- Speaker #0
Hello à tous et bienvenue dans un nouvel épisode d'Orchamps, le podcast qui vous emmène dans les coulisses du sport de haut niveau. Aujourd'hui on est de retour à Nantes et on est en compagnie d'un sprinter français qu'on ne présente plus, Christophe Lemaitre. Vous êtes le recordman du 200 mètres français depuis 2011 et qui de mieux pour vous accompagner sur cet épisode que votre entraîneur depuis quelques mois, Christophe Lemaitre. Richard Curzas, vous êtes également vous le sélectionneur du relais 4x100m. Est-ce que pour débuter cet épisode, vous pouvez vous présenter un petit peu tous les deux, nous raconter votre parcours et vos accomplissements ?
- Speaker #1
Moi en tout cas, l'athlétisme c'est dans mon ADN depuis tout petit. Je suis arrivé à l'athlétisme par le milieu associatif, puis ensuite par différentes sélections et ensuite derrière un concours qui est le professeur de sport pour être conseiller technique national aujourd'hui à la Fédération Française d'Athlétisme. Et parallèlement à ça, j'ai toujours baigné dans le sport. J'étais prof de PS, éducateur, et toujours dans l'accompagnement aussi de projets de jeunes, à la fois sportifs, mais aussi des fois culturels, en fonction de mes missions. Maintenant, ça va faire 17 ans que je suis dans la pratique de la performance et responsable du Pôle France aujourd'hui sur Nantes, dans lequel Christophe nous a rejoints depuis septembre.
- Speaker #0
C'est tout récent, du coup ?
- Speaker #2
Oui, c'est tout récent, parce qu'il y avait besoin vraiment d'un changement et aussi d'un cadre un peu plus stable. pour essayer d'avoir un projet qui tienne la route tout simplement et espérer viser cette qualification pour les Jeux.
- Speaker #0
Christophe, est-ce que vous pouvez nous rappeler un petit peu votre parcours avec l'athlétisme ? Comment vous avez commencé et quelles ont été les principales étapes de cette carrière ?
- Speaker #2
Alors moi j'ai commencé beaucoup plus tard, j'ai commencé seulement à 15 ans. J'ai découvert ce sport seulement à cet âge-là. Après j'ai toujours fait du sport, j'étais toujours dans le sport, j'ai commencé vraiment... Petit, mais plus avec des sports co, j'ai commencé par du hand, du foot, du rugby. Et c'est seulement après ces sports-là que mes parents, ma mère plus particulièrement, a décidé de rechercher un sport plus en adéquation avec mes qualités. Et du coup, elle s'était renseignée, elle a trouvé un club de sport qui organisait un test sur 50 mètres. Et c'est à partir de ce test-là que mon premier coach m'a... m'a conseillé de prendre ma licence et de me mettre au sprint parce que j'avais peut-être des qualités dans ce domaine. Et c'est comme ça que ça a commencé.
- Speaker #0
Est-ce que vous pouvez faire aussi un petit point sur vos principales médailles, vos principaux records ?
- Speaker #2
Il y en a trop. J'avais anciennement le record de France du 100 mètres en 1992. Puis après, il a été battu par Jimmy Vicour en 1986. Donc oui, je tourne le record de France du 200 mètres en 1980. Pour les médailles, je dois avoir une vingtaine de titres au niveau national. Ensuite, j'ai 9 médailles européennes, parce qu'il y a aussi une en salle. 9 médailles européennes, donc 4 titres, et 2 médailles olympiques et 2 médailles au championnat du monde.
- Speaker #0
En 2021, vous subissez un petit peu une déception parce que vous ne participez pas ou vous ne prenez pas le départ aux Jeux olympiques de Tokyo. Et vous déclarez à la presse que vous avez tout changé depuis, que vous avez revu toute votre manière de travailler, votre staff et aussi le lieu de vos entraînements. Comment on en arrive à cette décision ? Qu'est-ce que ça implique ?
- Speaker #2
En France, il y avait un ras-de-bol général. Un ras-de-bol de ne pas être au niveau, de ne pas aller aussi vite qu'on pense, de voir qu'on travaille mais que ça ne marche pas, de voir qu'on loupe des gros échanges comme les Jeux. Donc je pense qu'il y a eu vraiment un moment où on s'est dit bon bah là ça marche plus, ce que je faisais ne marche plus, donc il faut voir autre chose, faire autre chose. Du coup il y a eu une grande réflexion parce que quand vraiment tout changeait alors qu'on fait ça pendant 15 ans, la même structure, le même coach, le même lieu d'entraînement de vie, c'est compliqué. Est-ce qu'on sera capable de trouver un projet qui... peut me convenir, mais aussi un projet où je serai capable d'avoir, où je me sentirais à l'aise aussi, où j'aurais un cadre où je pourrais m'épanouir, où je pourrais me sentir bien aussi. Donc c'est des questions qui sont restées longtemps en suspens, où j'avais vraiment du mal à trouver les réponses, et il a fallu... Voilà que faire un choix à un moment donné parce que je ne pouvais pas rester dans ce doute-là pendant trop longtemps parce qu'il y avait aussi les Jeux Olympiques de Paris qui allaient vite arriver vu qu'il n'y avait que trois ans entre Tokyo et Paris. J'avais pris une décision. Bien que je sois resté au club d'Aix-les-Bains, j'ai changé de coach, j'ai changé de manière d'entraîner, de voir l'entraînement différemment avec une grosse prépa physique derrière. Et c'est seulement après septembre que j'ai vraiment décidé d'aller à Nantes parce que j'étais vraiment avec trois les différents. J'étais sur Aix-les-Bains, ma vie de famille à Metz. Des fois, j'allais à Nantes. C'était beaucoup trop. Ça générait de la fatigue. Donc, il fallait que je fasse un choix. Je me suis dit, pendant un an, je serai plus souvent à Nantes pour avoir plus de stabilité et un meilleur suivi également.
- Speaker #0
Richard, est-ce que c'est Christophe qui vous a appelé ou est-ce que c'est vous qui lui avez proposé de rejoindre votre groupe d'entraînement ?
- Speaker #1
Il faut savoir que Christophe, je le connais aussi depuis 2009, quand il était junior. Je travaillais avec Pierrot Caraz à l'époque, je faisais les analyses vidéo de Christophe. J'ai décortiqué toutes ses courses sur 100 mètres et sur 200 mètres à l'époque. Et donc, on se connaissait aussi de cette... période et d'une belle période puisqu'il a été triple champion d'Europe à Barcelone en 2010, vice-champion du monde à Daigou en 1980 où il fait son record de France. On a vécu la mésaventure quand même des Jeux de Londres où en 2024 on finit 4e et on récupère la médaille sur tapis vert en 2015 où on prend la médaille de bronze. Donc toutes ces expériences partagées avec Christophe forcément étaient intéressantes. Il faut savoir que Christophe, quand il était avec Pierrot Carras, était convoité par d'autres entraîneurs à l'époque de par ses résultats. Et il se trouve qu'à ce moment-là de sa carrière, les convoitises étaient beaucoup moins importantes. Et par respect, tout simplement, à Christophe par rapport à la carrière qu'il a eue, et dans la situation dans laquelle il était, je l'ai appelé pour prendre des nouvelles. Et dans les différents échanges qu'on a pu avoir, on a abouti à cette réflexion, au travers d'Emmanuel Reinhardt aussi, qui était un des anciens sprinteurs d'Aix-les-Bains, et qui est un ami aussi à Christophe. Et de fil en aiguille, on a mis ce staff justement l'année 2022-2023. Comme dit Christophe, il était à trois endroits différents. Donc il est vrai que ça a été une première étape par rapport à ce projet, mais on a bien vu qu'à la fin de la saison, il a pu se permettre de revenir en conditions physiques. Mais de mon point de vue, en tout cas, c'était plus suffisant, en tout cas en échangeant avec le staff. Il fallait passer à une autre étape. C'est vrai que quand j'ai proposé à Christophe, à un moment donné, je lui ai dit Tu sais, je pense qu'à l'approche des Jeux Olympiques, tu as une vie de famille, c'est un choix difficile à faire. Et je le conçois, mais par rapport à ça, je pense que si tu veux avoir une chance, c'est de venir ici trois semaines sur quatre. Et donc, je lui ai laissé tout le temps de l'été ou 15 jours, trois semaines pour qu'il réfléchisse. Et puis, il a réfléchi et donc il m'a rappelé pour me dire finalement, je viens à la rentrée. Donc, on a commencé à tout planifier, tout le rétro-planning de la préparation 2023-2024. Et aujourd'hui, ça marche plutôt bien. En tout cas, dans le travail qu'il fait, il le dit lui-même. C'est-à-dire qu'il avait besoin d'un cadre dans lequel il pouvait s'épanouir. Et pour moi c'est important, c'est-à-dire qu'au-delà de la performance, c'est aussi de pouvoir accompagner des athlètes et qu'ils construisent leur identité d'athlètes de haut niveau, qu'ils soient à la fois responsables de leurs projets, mais qu'ils soient aussi épanouis. Et je pense que Christophe avait besoin de ça à ce moment-là, et aujourd'hui je pense qu'il a pris la mesure de son projet en venant sur Nantes. Et c'est réellement intéressant aussi dans l'échange, parce que c'est réciproque, c'est-à-dire que Christophe a une carrière exceptionnelle derrière lui. Aujourd'hui, moi je suis responsable d'un Pôle France avec des jeunes. qu'ils soient en devenir, et de pouvoir côtoyer Christophe aujourd'hui, au quotidien, dans les entraînements, c'est forcément une plus-value. Cet hiver, l'ensemble du groupe a battu ses records personnels, c'est pas un hasard. Je pense que mon implication a été aussi sûrement plus forte de par son projet. Lorsqu'il décide de me dire je vais venir trois semaines sur quatre je me dis bon, là, faut pas déconner Il fait le choix quand même de s'éloigner de sa fille, qui venait, Anna, sa femme, Anaïs. On va prendre les choses au sérieux, on va tout mettre en œuvre en tout cas pour sortir le meilleur de nous-mêmes. Donc je pense que c'est une vraie réciprocité. Et puis Christophe c'est quelqu'un de valeur aussi par rapport à tout le système star du sport de haut niveau. Il n'est pas du tout là-dedans, c'est quelqu'un de très humble et qui est dans le partage par rapport à ça. Donc c'est vrai qu'au début j'avais un peu peur. Quand il est arrivé les premières semaines, je me suis dit... Ça risque d'être compliqué d'être dans une chambre de 12 mètres carrés, dans un crèves, de revenir quasiment en arrière comme un étudiant à 33 ans. Et j'avais ces craintes au départ. J'avais bien échangé aussi avec sa femme, qu'elle l'accompagne aussi, Christophe, par rapport à ce projet-là, qu'il n'ait pas un sentiment de culpabilité de pouvoir aussi s'éloigner de sa famille trois semaines sur quatre. Et il se trouve qu'aujourd'hui, après six mois de préparation et de cette organisation-là, beaucoup, même autour, dans le crèves, me disent Christophe est beaucoup plus ouvert, on le sent épanoui, heureux, et au sein du groupe c'est la même chose. Et moi aussi je le ressens, et du coup ça enlève beaucoup de pression aussi par rapport à ça. C'est-à-dire que, quel que soit le résultat final, c'est-à-dire que c'est une aventure humaine. Et cette aventure au moins, aujourd'hui elle est respectée par rapport à ce que recherchait Christophe. C'est-à-dire de retrouver du plaisir dans le groupe, de la confrontation. Je pense que c'est quelqu'un qui a besoin de s'entraîner à être dans un groupe, de vivre avec un groupe, et s'entraîner seul comme il l'a pu le faire dans les années... passé, quand il a arrêté de s'entraîner plus ou moins avec Pierrot, il s'est retrouvé un peu isolé. Donc je pense que c'est ça qu'il a retrouvé aussi, un an toujours.
- Speaker #0
Ce que vous soulignez, c'est que vraiment la finalité, c'est les Jeux Olympiques de Paris. Mais ce qui est très important, c'est tout le chemin que vous parcourez depuis 2023 avec Christophe. Est-ce que vous avez mis d'une manière technique des choses en place ? Vous parliez un petit peu de préparation physique, juste avant que Richard prenne la parole. Est-ce qu'il y a d'autres aspects de récupération ? des nouvelles routines en fait que vous avez mis en place ?
- Speaker #2
De toute façon, il y avait une routine à mettre en place parce que c'était une programmation totalement différente de ce que j'ai vécu jusqu'à maintenant. C'était quelque chose qui cassait totalement avec ma routine habituelle, même avec le lieu d'entraînement, le lieu où je vis trois semaines par mois. Donc forcément, il y avait une routine à... à mettre en place et à reprendre aussi une nouvelle routine à apprivoiser entre guillemets. Donc il fallait être capable de gérer ça. Il y a eu, comme Richard l'a souligné, essayer de ne pas avoir trop de culpabilité vis-à-vis de ma famille. Donc ça, c'était un premier pas important. Deuxième pas important, ma trier à un groupe aussi. Donc il fallait vraiment... Il y avait beaucoup de choses, on va dire. C'était plus au niveau mental, psychologique à gérer que physique. Le physique, je pense qu'il n'y a pas de problème, j'ai des années d'expérience derrière moi. J'avais fait, comme je l'ai dit avant, j'ai fait une grosse prépa physique l'année dernière qui me permettait d'être, comme Richard l'a souligné, plus entraînable. Donc c'était vraiment le côté psychologique qu'il fallait vraiment appréhender et travailler dessus pour que le projet puisse partir sur des bases vraiment saines.
- Speaker #0
Vous en parlez un petit peu de... La pression, du stress, etc. Est-ce qu'on ressent quelque chose ? Vous avez une longue carrière derrière vous. Quand le public voit votre nom sur une affiche pour un meeting, pour une compétition, etc., il y a forcément des attentes. Comment est-ce qu'on deal avec ce stress et ces attentes du public ?
- Speaker #2
Disons que je ne m'en occupe pas, en fait. Je vais être honnête. Je ne sais pas, honnêtement, s'il y a des attentes en termes de résultats vis-à-vis du public. Mais... Mais en tout cas, moi j'essaie d'abord de répondre à mes propres attentes avant de répondre aux attentes des autres. Si tant est que j'ai envie de répondre aux attentes des autres aussi. Donc je préfère vraiment m'occuper de moi parce qu'il y a énormément de travail à faire, aussi bien dans la préparation qu'en compétition. Donc je ne peux pas me permettre de me disperser avec d'autres choses, d'autres éléments extérieurs que mon projet.
- Speaker #0
C'est la meilleure réponse possible. Richard sourit, donc il est d'accord avec vous.
- Speaker #1
Je pense que c'est un point commun qu'on a aussi, parce que moi je suis dans la même dynamique aussi. C'est-à-dire qu'aujourd'hui, avant tout, c'est ce que je disais tout à l'heure, c'est qu'il soit épanoui, qu'on prenne du plaisir, et que la performance n'est qu'une finalité en fait. Et tout dépend de l'objectif que l'on fixe. On se fixe l'objectif bien évidemment, quand un athlète vient s'entraîner au quotidien, c'est pour être performant. Mais ce n'est peut-être pas l'objectif prioritaire en fait. C'est d'avant tout de pouvoir prendre du plaisir dans ce qu'il va pratiquer. Et je pense que justement, on a ce point en commun. Moi, je n'ai aucune pression par rapport à Christophe, le fait qu'il fasse les Jeux ou pas. Parce que pour moi, c'est son plus grand défi aussi de sa carrière, il le dit lui-même. Donc aujourd'hui, s'il l'est fait, mais quelle aventure en fait ? Ça sera une aventure extraordinaire parce qu'il finira sur les Jeux Olympiques à Paris 2024, alors que peu de gens y croient, il faut être honnête. Mais nous, on y croit parce qu'il y a ce rapport aussi avec le groupe, avec Christophe, les histoires passées aussi, qui font qu'en tout cas, on ne va pas... perdre la totalité de cette relation et de cet échange qu'on aura vécu dans cette aventure. Ça, c'est une certitude. On regarde l'évolution qu'on est en train de vivre aussi aujourd'hui. Et bien évidemment, si la finalité se termine de cette façon, l'histoire sera magnifique.
- Speaker #0
Ça sera la cerise sur le gâteau,
- Speaker #1
en fait.
- Speaker #0
Vous avez 33 ans maintenant. Est-ce que vous constatez une différence entre la préparation mentale que vous mettiez en place au début de votre carrière et celle que vous mettez en place maintenant ?
- Speaker #2
La préparation mentale, j'ai commencé très tard, j'ai commencé à l'automne 2015 seulement, après les championnats du monde de 2015. Parce qu'il y avait d'abord une volonté de tout mettre en place pour essayer les Jeux de Rio en 2016. Et puis bien sûr j'ai continué parce que j'ai vu les résultats. Et c'est vrai que le travail d'un point de vue psychologique m'aide énormément dans ce projet-là. Pour d'abord les réseaux qu'on avait indiqués précédemment, le fait d'être loin de ma famille, de mes amis, de laisser ma compagne seule avec ma fille, et être aussi dans, m'aider à appréhender ce nouvel environnement. En fait, c'était un peu dans la continuité de ce que je faisais au début, mais sur d'autres thèmes différents. Donc, ça jouait un rôle dans mon intégration au sein du Krebs et de ce groupe.
- Speaker #0
Richard, est-ce que vous vous ressentez, quand Christophe mentalement est bien, à l'entraînement, donc physiquement, que son esprit soit là ou pas là ? Pour vous, la performance physique est la même ?
- Speaker #1
Oui, je le vois forcément quand il est bien. J'avoue qu'au début, les premières semaines, je sentais qu'il y avait de la fragilité. Mais petit à petit, ça s'est renforcé et que la fragilité a disparu. Et aujourd'hui, je le vois plus souvent bien que pas bien. Et d'ailleurs, quand j'essaie de penser à quel moment il n'a pas été bien, je n'arrive pas à retrouver ces moments-là aujourd'hui. Même quand il a eu son petit pépin cet hiver, on a su rebondir dessus. Je crois qu'il est... Il a une certitude aussi dans le projet qu'il est en train de mener aujourd'hui. Et il y croit, alors que je pense qu'un an derrière, il ne croyait pas du tout. Là, je pense qu'il y croit, parce qu'on a des indicateurs aussi à l'entraînement qui commencent à montrer des choses intéressantes. Mais on sait qu'on n'est pas en avance, on n'est pas en retard, on est sous le fil du rasoir. Mais derrière, si ça passe, ça peut passer. Donc je pense qu'aussi, ce moment où on y croit plus que les années d'avant, forcément, ça nous met dans un état de bien-être. Et Christophe, là-dessus, aujourd'hui, il arrive, il a le sourire à l'entraînement et il pratique à 100%. Il n'est pas dans une logique d'esquiver, quelles que soient les séances, qui sont des séances parfois compliquées, pas très agréables, tout ce qui est la prophylaxie le mardi avec la kiné. Alors c'est fait en groupe, donc forcément c'est beaucoup plus intéressant aussi. Les séances longues, de côte, c'est en groupe aussi. Donc je pense qu'il puise aussi son énergie au sein du groupe, et inversement. Encore une fois de la réciprocité et du coup je le trouve très épanoui. Sincèrement aujourd'hui on voit bien qu'il ne rechigne pas à venir. Si vraiment il n'était pas épanoui, il m'aurait passé un premier coup de fil en me disant Richard, je ne viens pas cette semaine Il aurait trouvé n'importe quelle excuse d'ailleurs pour essayer de dire je ne vais pas venir à cette période-là, je vais plutôt venir à l'autre période Donc on a essayé de faire un rétro-planning équilibré, mais malgré tout il vit ici quasiment à 80%. Donc si vraiment il n'était pas épanoui, il aurait... pris une fuite en avant et trouver une nouvelle trajectoire, ce qui n'est pas le cas au contraire. Des fois même on a prolongé des séquences parce qu'il y avait des nécessités par rapport à la préparation. Donc non, je le trouve très épanoui et je souhaite, là on va partir à Jacksonville dans 15 jours, on va vivre une nouvelle aventure aussi de groupe, à la fois par rapport à... ils vont vivre ensemble, donc c'est quelque chose qui va aussi lui permettre encore de découvrir une nouvelle expérience, malgré qu'il en ait... Il en a vécu beaucoup à l'international et beaucoup de stages, mais ce sera une de plus différente, je pense, par rapport à ce qu'il a vécu. Et c'est ça aussi peut-être qui est intéressant pour lui.
- Speaker #0
Du coup, vous nous disiez que Christophe apporte beaucoup aux jeunes qui travaillent dans le groupe d'entraînement, qui ont tous battu leur record cet hiver. Les jeunes apportent quelque chose à Christophe en termes de dynamique de groupe, mais est-ce qu'ils ont appris des choses sur la partie technique, sur l'entraînement, des nouvelles méthodes de récupération, par exemple ?
- Speaker #2
Disons que, dans un premier temps... Ça m'a permis de réapprendre à travailler en groupe, dans un premier temps. Comme l'a expliqué Richard, il y a quelques années avant que je rejoigne le groupe, je m'entraînais seul parce qu'il n'y avait plus vraiment de groupe de sprint, ou du moins je ne m'entraînais plus trop avec eux, j'étais souvent seul. Donc c'était compliqué, il n'y avait pas de dynamique de groupe, donc il fallait vraiment se motiver seul. Et même aller en entraînement en se disant qu'on va s'entraîner seul, quand on va faire des gros entraînements, des fois ça peut être compliqué. D'abord, ça m'a réappris à retrouver une dynamique de groupe, de retrouver de la confrontation aussi, parce que forcément, tu as les jeunes qui cavalent, qui veulent aller vite, qui cherchent plus le challenge que moi d'ailleurs. Donc, il a fallu réapprendre la confrontation, réapprendre à se battre, même aux entraînements. Être à la bagarre pour faire des séances de start, de sprint avec le groupe, parce que c'était quelque chose que je n'avais plus l'habitude, que je retrouvais seulement qu'en compétition.
- Speaker #0
Et est-ce que vous le prenez pas mal ? Est-ce que ça vous fait quelque chose quand un plus jeune passe devant vous à l'entraînement ? Ou est-ce que ça vous pousse au contraire ?
- Speaker #2
Non, je pense qu'il faut le prendre différemment. Il faut vraiment dire... Il faut vraiment prendre comme une compétition aussi, avec un esprit de jeu. Il y a des moments où je suis devant, des fois ça arrive qu'ils sont devant moi, donc il faut le prendre comme un jeu, un défi, sans pour autant se prendre la tête et essayer d'être capable. de se donner à fond dans ces moments-là et justement ça pousse à te donner plus à fond, à te pousser dans tes retranchements et donc à produire un entraînement de meilleure qualité que lors des entraînements où tu es tout seul et c'est seulement toi qui dois trouver les ressources et des fois, trouver des ressources, c'est compliqué, faire du sprint tout seul, c'est compliqué d'avoir quelque chose qui te pousse. Alors que quand tu as des... Coéquipé à côté de toi qui font la même séance dans les starts, t'as quelque chose qui te donne envie de...
- Speaker #0
Je ne laisse pas partir devant tout seul.
- Speaker #2
Ah non, il ne faut pas.
- Speaker #1
Moi, c'est vrai que j'avais une certaine appréhension par rapport à ça. Je me suis dit, il va se faire battre par des jeunes, comment il va le prendre ? Et en fait, il y a eu cette capacité de résilience, de se dire, ce n'est pas grave, à un moment donné, il s'est trouvé derrière. Même moi, j'étais un peu gêné des fois. J'avais envie qu'il soit devant, ça me facilitait la tâche. Si il est devant, c'est bon, ça va être plus motivant aussi pour lui. Et en fait, il a eu cette capacité de résilience au début, quand il était derrière, de pouvoir justement répondre présent et de ne pas lâcher, d'être persévérant. Et aujourd'hui, il est à la fois devant, des fois derrière, mais au tout début, il était plus souvent derrière que devant. Et je me suis dit, il ne va pas tenir en fait. À un moment donné, il va se dire, c'est bon, c'est fini, ma carrière, elle est derrière moi. Et au contraire, cette capacité de résilience m'a impressionné aujourd'hui, parce que... des chronos sur 150 où il était vraiment très loin encore l'année dernière et qu'aujourd'hui il se rapproche de ses meilleurs jeunes et voir maintenant il est devant. Et lui il le ressent aussi sur les séances de côté et tout. Ça aussi c'est un point de repère pour lui qui voit qu'il a aussi progressé, évolué, mais il a eu cette force-là de pouvoir être patient, d'être résilient, de pouvoir avancer.
- Speaker #0
Vous analysez les parcours vidéo de Christophe ? 10-15 ans. Tout à fait. Est-ce que vous utilisez de plus en plus du coup l'analyse vidéo ? Est-ce qu'il y a d'autres arrivées technologiques vraiment qui ont pris une place phénoménale dans votre dimension de l'entraînement ?
- Speaker #1
Tout à fait. Dans la programmation, on a beaucoup de projets de recherche aujourd'hui autour de l'entraînement. D'ailleurs, la Fédération a mis en place une série d'optimisation de la performance. Ici, moi, je travaille avec les universités aussi et le CREPS au travers de la recherche. Donc à la fois ces analyses vidéo que je faisais il y a dix ans sur les rapports fréquence amplitude entre les différentes portions de course et on les a toujours et on est toujours dans ces analyses là mais aussi par rapport à un outil qu'on utilise le Sprint mi 80 qui permet de nous définir la force et la puissance de l'athlète et sa vitesse en mètres secondes donc à la fois dans la résistance mais aussi à la fois en survitesse aussi des recherches sur tout ce qui est le renforcement de la chaîne postérieure on a beaucoup de blessures au niveau des ischios jambiers principalement du biceps femoral chez nos athlètes Il se trouve qu'en travaillant à la fois dans des protocoles de renforcement musculaire sur cette chaîne postérieure, mais aussi dans des analyses à la fois d'échographie pour pouvoir comprendre pourquoi, malgré un muscle renforcé, ça lâche toujours, entre l'activation des fessiers, du biceps femoral, des différents chefs des ischios jambiers, on a pu observer aussi des choses intéressantes pour mobiliser au travers de reprogrammations neuromusculaires. Donc clairement, oui, on est dans une démarche scientifique. lorsqu'on est dans l'entraînement, une recherche perpétuelle pour pouvoir améliorer à la fois la charge d'entraînement dans la programmation d'entraînement. C'est-à-dire que là, je pense que aussi l'organisation pour Christophe, trois semaines, une semaine, elle est intéressante. Parce qu'il travaille dur pendant trois semaines, et puis il rentre à Metz, il récupère, il profite de sa famille, il continue à s'entraîner. Mais la séance du lundi ici, elle dure cinq heures. Le lundi, quand il est à Metz, ça dure une heure et demie. Donc on divise quasiment en deux sa semaine, et c'est aussi intéressant. temps de récupération pour lui, je pense qu'il est intéressant dans l'équilibre à la fois de sa vie personnelle, mais aussi dans les qualités physiques à développer pour éviter la blessure.
- Speaker #2
Non, ça ne m'a jamais dérangé, j'ai déjà fait des tests de ce style-là plusieurs fois, donc c'est toujours intéressant, c'est toujours des choses qui sont intéressantes. Après, il faut faire attention, parce que faire de la donnée pour faire de la donnée, ça ne sert à rien, après il faut être capable de savoir comment l'utiliser, comment l'interpréter, et qu'est-ce qu'on va en faire. mais ça reste des choses intéressantes. De toute façon, la technologie a un rôle de plus en plus important dans la préparation, ça on le sait. Même quand on voit l'évolution des pointes actuellement, c'est de la technologie qui permet d'affluer sur la performance. Donc je pense que c'est toujours bien d'avoir de la technologie qui est mise au service de la performance. Et justement, il faut savoir... Le plus important, c'est de savoir l'utiliser, c'est de savoir interpréter les données, qu'est-ce qu'on en fait et à quoi elle va nous servir. C'est tout ça le plus important.
- Speaker #0
Oui, pour ne pas juste analyser pour analyser et au final ne pas utiliser la donnée.
- Speaker #2
Oui, c'est ça, exactement.
- Speaker #0
Est-ce que vous pouvez nous donner un petit peu vos prochaines échéances, vos prochains objectifs ?
- Speaker #1
Là on va partir à Jacksonville faire une préparation et puis après on va enchaîner sur un certain nombre de compétitions. On n'a pas encore déterminé précisément, mais parce que je pense qu'il faut prendre les choses les unes après les autres, au regard de la préparation hivernale. Donc la préparation de Jacksonville dans 15 jours, et puis après on va rentrer, et puis un certain nombre de meetings qui sera mis en œuvre par rapport à ça.
- Speaker #0
Est-ce que vous avez une belle émotion, une anecdote sur soit vos carrières individuelles, soit votre carrière ensemble à nous raconter ?
- Speaker #1
Moi j'ai une anecdote. Oui,
- Speaker #2
la nid.
- Speaker #1
L'anecdote c'est le soir de... le matin, non la nuit. C'était...
- Speaker #2
Je ne sais pas du tout.
- Speaker #1
Bon bref, c'était à Barcelone et il n'a pas mieux trouvé que de péter une bouteille de Magnum qu'il a éclatée sur l'esplanade de l'hôtel de Champagne.
- Speaker #2
C'était un accident.
- Speaker #1
C'était un accident mais on n'a pas fait ses trois titres du coup. On en a retrouvé une après. C'est ça.
- Speaker #0
La bouteille de
- Speaker #2
Champagne est restée à l'hôtel du coup.
- Speaker #1
Sur le sol de l'hôtel, elle a éclaté.
- Speaker #0
L'hôtel qui a profité de...
- Speaker #1
Voilà l'anecdote.
- Speaker #0
Eh bien, c'est une super anecdote. En tout cas, merci beaucoup d'être venu discuter avec nous sur Hors-Champ. On était ravis de vous avoir avec nous. Et on vous souhaite plein de bonnes choses et plein de courage pour la suite et la fin de votre préparation olympique. En attendant, pour toutes les personnes qui nous écoutent, on se retrouve dès le mois prochain pour un nouvel épisode. Et sinon, rendez-vous sur tous nos réseaux sociaux.