- Speaker #0
Bonjour, aujourd'hui on plonge dans les rouages du pacte du treil. C'est un outil fiscal assez clé pour la transmission des entreprises familiales en France.
- Speaker #1
Oui, absolument clé.
- Speaker #0
Pour en parler, on s'est basé sur plusieurs sources. Une interview d'experts, des analyses de notaires de France, des éclairages de blocs spécialisés, les infos officielles. Et même une étude d'impact sur les réformes qui se profilent.
- Speaker #1
Tout à fait.
- Speaker #0
L'idée, c'est de comprendre ensemble ce pacte, pourquoi il existe, comment il marche et... Pourquoi on en parle autant pour 2025 ? Allez, on décortique ça.
- Speaker #1
Alors, le pacte du treil, concrètement, ça permet quoi ? Ça permet d'alléger, et même considérablement, la facture fiscale quand on transmet une entreprise, que ce soit par donation ou succession.
- Speaker #0
Comment ça ?
- Speaker #1
En fait, il offre une exonération de 75% sur la valeur des titres qu'on transmet. Et ça, c'est calculé avant d'appliquer les droits de mutation. C'est un levier fiscal majeur en France.
- Speaker #0
Majeur, oui. Et on comprend vite pourquoi. Pourquoi quand on regarde les taux ? En France, les droits de succession, ça peut grimper jusqu'à 45% en ligne directe, au-delà de 1,9 million d'euros.
- Speaker #1
C'est énorme !
- Speaker #0
C'est beaucoup plus que chez nos voisins. L'Allemagne, par exemple, c'est 30% max, mais seulement à partir de 26 millions.
- Speaker #1
La comparaison est parlante,
- Speaker #0
oui. Du coup, sans ce pacte du treil, beaucoup d'entreprises familiales, même si elles sont en bonne santé, pourraient être forcées de vendre, juste pour payer les droits.
- Speaker #1
Exactement !
- Speaker #0
Il y a un exemple souvent cité, une boîte qui vaut 10 millions. Sans Dutreil, la transmission, ça coûterait quelque chose comme 4,2 millions d'euros de droit.
- Speaker #1
Oulah oui !
- Speaker #0
L'enjeu économique est bien réel.
- Speaker #1
Absolument. Mais attention, pour avoir cet avantage, il y a des contreparties, des conditions assez strictes d'ailleurs.
- Speaker #0
Ah oui ?
- Speaker #1
L'idée derrière, c'est de s'assurer que l'avantage fiscal profite bien à la continuité de l'activité économique réelle, pas juste à la gestion de patrimoine.
- Speaker #0
D'accord. Et c'est quoi ces conditions exactement ? J'imagine que ça touche à l'entreprise elle-même et à l'engagement des repreneurs.
- Speaker #1
Tout à fait. D'abord, l'entreprise. Elle doit avoir une activité qu'on appelle opérationnelle principale.
- Speaker #0
C'est-à-dire ?
- Speaker #1
C'est le fameux acronyme ICALL. Industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale. Les activités purement patrimoniales, comme la location d'immeubles nus ou meublés, ça s'est explicitement exclu depuis la loi de finances 2024.
- Speaker #0
Ok, donc focus sur l'activité réelle.
- Speaker #1
Exactement. Deuxième point, les engagements de conservation des titres. Il faut un pacte collectif signé avant la transmission d'au moins deux ans.
- Speaker #0
Deux ans minimum ?
- Speaker #1
Oui, sur un certain pourcentage des droits financiers et de vote. Et ensuite, après la transmission, chaque bénéficiaire doit prendre un engagement individuel de garder ses titres pendant quatre ans.
- Speaker #0
D'accord, engagement collectif puis individuel. Et c'est tout ?
- Speaker #1
Non. Dernière chose, il faut que l'un des signataires de cet engagement individuel exerce une fonction de direction. effectives dans l'entreprise. Et ce, pendant 3 ans après la transmission.
- Speaker #0
D'accord. C'est un cadre assez précis quand même.
- Speaker #1
Oui, assez contraignant.
- Speaker #0
Mais un cadre qui, si je comprends bien, a plutôt bien fonctionné et fait consensus pendant presque 20 ans ?
- Speaker #1
Oui, globalement.
- Speaker #0
Pourtant, là, on entend beaucoup parler de possibles réformes pour 2025. Qu'est-ce qui se passe ? Pourquoi ce changement de cap ?
- Speaker #1
C'est là que ça coince actuellement. Après deux décennies de, on va dire, de stabilité relative, le dispositif est remis en question.
- Speaker #0
Pour quelles raisons ?
- Speaker #1
Les arguments principaux tournent autour de deux axes. D'un côté, le coût pour le budget de l'État. On parle d'environ 800 millions d'euros par an. Bon, c'est loin des 3 milliards qu'on a pu entendre parfois, mais ça reste une somme.
- Speaker #0
D'accord, le coût budgétaire.
- Speaker #1
Et l'autre axe ?
- Speaker #0
C'est une volonté affichée de lutter contre les inégalités de patrimoine, notamment celles qui passent par l'héritage.
- Speaker #1
L'équilibre est délicat en fait.
- Speaker #0
Entre préserver un outil jugé vital pour les PME et ETI familiales.
- Speaker #1
Et voilà, et le réformer au nom de l'équité fiscale. C'est tout le débat.
- Speaker #0
Et concrètement, ces réformes, elles ressembleraient à quoi ? Quelles sont les pistes ?
- Speaker #1
Il y a deux pistes principales sur la table. La plus structurante, ce serait de recentrer l'exonération du trail uniquement sur les actifs qui sont strictement nécessaires à l'activité professionnelle.
- Speaker #0
Strictement nécessaires ? Qu'est-ce que ça veut dire ?
- Speaker #1
Ça exclurait du calcul de l'exonération la trésorerie qui serait jugée... excédentaires par exemple, ou d'autres actifs qui ne sont pas directement opérationnels.
- Speaker #0
Comme un immeuble détenu par une filiale SCI, mais pas utilisé pour l'activité principale.
- Speaker #1
Voilà, ce genre de choses.
- Speaker #0
Mais, c'est pas un peu compliqué ça ? Comment on définit ce qui est strictement nécessaire ou excédentaire dans la vraie vie d'une PME ? Ça ouvre la porte à pas mal d'interprétations, non ?
- Speaker #1
Exactement. C'est une des critiques majeures qui est faite à cette proposition. Ça risque de complexifier énormément l'évaluation des entreprises pour la transmission.
- Speaker #0
Et de créer de l'insécurité juridique, j'imagine.
- Speaker #1
Oui. Et puis, mécaniquement, ça augmenterait le coût fiscal pour les entreprises concernées. Il y a des calculs qui circulent. Une entreprise avec, disons, 30% d'actifs jugés non opérationnels pourrait voir la base taxable de sa transmission augmenter de près de 287%.
- Speaker #0
Ah oui, quand même, l'impact est loin d'être neutre. Pas du tout. On imagine l'inquiétude des chefs d'entreprise.
- Speaker #1
Surtout si, comme le disent certaines sources, près de 85% des transmissions familiales en France utilisent ce pacte.
- Speaker #0
Oui, le chiffre est très élevé.
- Speaker #1
Un durchissement pareil, ça pourrait clairement freiner ce type de transmission. Peut-être au profit de ventes à des fonds d'investissement ou à des groupes étrangers. C'est un risque pointé du doigt, effectivement. D'ailleurs, une étude menée en Grèce a montré l'inverse. Quand ils ont allégé la fiscalité sur les successions, ça a favorisé les transmissions familiales et ça a même stimulé l'investissement après la reprise.
- Speaker #0
Intéressant.
- Speaker #1
C'est pourquoi, face à ces incertitudes et à la complexité du truc, l'anticipation, c'est vraiment le maître mot.
- Speaker #0
Il faut s'y prendre tôt.
- Speaker #1
Plus que jamais. Les experts conseillent de préparer une transmission au moins deux ou trois ans à l'avance. Et surtout, de bien se faire accompagner.
- Speaker #0
Par des avocats, notaires, experts comptables ?
- Speaker #1
Oui, c'est crucial pour sécuriser l'opération. Et il ne faut pas oublier le suivi après la transmission. Vérifier que toutes les conditions sont bien respectées sur toute la durée. On parle de 4 à 6 ans, c'est vital.
- Speaker #0
Pourquoi vital ?
- Speaker #1
Parce qu'une remise en cause de l'exonération a posteriori, ça peut être financièrement désastreux. Ça peut même engager la responsabilité des conseillers qui ont monté l'opération.
- Speaker #0
D'accord, c'est très clair. Donc, si on résume, le pacte d'Utrecht, c'est un outil fiscal puissant, presque indispensable pour beaucoup d'entreprises familiales en France. À cause de la fiscalité successorale élevée, mais c'est aussi un mécanisme complexe, avec des règles strictes, et dont l'avenir est aujourd'hui un peu flou avec ces projets de réforme.
- Speaker #1
Tout à fait. Et ça nous laisse avec une question, peut-être pour la suite. En voulant ne favoriser que les actifs jugés strictement opérationnels, est-ce qu'on ne risque pas finalement d'inciter les entreprises familiales à réduire trop fortement leurs trésoreries ou leurs réserves ?
- Speaker #0
Ce qui pourrait les fragiliser.
- Speaker #1
Ben oui. Ça pourrait affaiblir leur capacité à investir, à innover, ou tout simplement à faire face aux prochaines crises économiques. C'est une vraie question à méditer, je pense.