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Inclusif - Ep.12 - Patrick : Gérer son entreprise et son cancer...

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31min |06/12/2024
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Description

Comment faire face à la maladie lorsque l'on est chef d'entreprise, pilier de sa famille et responsable d'une équipe ? Gérer un diagnostic de cancer tout en soutenant ses proches et en assurant la pérennité de son entreprise, peut-être un défi d'une ampleur insoupçonnée.

Après avoir traversé 3 infarctus, Patrick, dirigeant de l'entreprise Richiero SA, a réussi à vaincre le cancer tout en continuant à veiller sur son entreprise et sur ses équipes. Il a trouvé la force de concilier vie personnelle et responsabilités professionnelles et faire face à l'adversité. Il raconte, ses peurs, ses victoires et l'importance de l'entourage pour surmonter de tels défis.



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à tous et bienvenue sur le podcast Inclusif. Aujourd'hui, nous abordons un sujet fort et intime, comment faire face à la maladie lorsque l'on est chef d'entreprise, pilier de sa famille et responsable d'une équipe. Gérer un diagnostic de cancer tout en soutenant ses proches et en assurant la pérennité de son entreprise peut être un défi d'une ampleur insoupçonnée. Pour nous en parler, nous recevons aujourd'hui M. Rikiro, dirigeant de l'entreprise d'électricité Rikiro-Essa. Après avoir traversé trois infarctus, il a réussi à vaincre le cancer tout en continuant à veiller sur son entreprise et ses équipes. Dans cet épisode, il partagera avec nous comment il a trouvé la force de concilier vie personnelle et responsabilité professionnelle et faire face à l'adversité. Il nous racontera ses peurs, ses victoires et l'importance de l'entourage pour soumonter de tels défis. Je suis Shirazan, dans nos épisodes où nous tendons lumière des histoires inspirantes et des initiatives innovantes. Vous entendrez des témoignages de dirigeants d'entreprises engagés en faveur de l'inclusion des personnes en situation de handicap, certains ayant eux-mêmes vécu une telle situation, et des salariés qui ont pu faire de leur différence une force. Ils partageront leurs expériences, leurs défis et les stratégies qu'ils ont mises en place pour créer des environnements de travail véritablement ouverts à tous. Bonjour Patrick, vous êtes directeur général de l'entreprise Rikiro SAS, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça, depuis deux ans.

  • Speaker #0

    Depuis deux ans, ok. Cette entreprise, vous l'avez créée en partant de rien ?

  • Speaker #1

    Oui, en partant de rien. C'est un peu un accident de la vie au départ, puisque mes parents avaient plusieurs entreprises, produits pétroliers, électroménagers, du gaz, et une petite affaire d'électricité. Et le 11 octobre 1974, mes parents ont été mis en faillite, et mon père a mis fin à ses jours ce jour-là. Donc on s'est retrouvé à la rue parce que c'était bien avant la génération tapis. A l'époque, ma maman n'était pas déclarée, il n'y avait pas de SCI, il n'y avait pas de CRL, c'était tout en nom personnel. Donc j'ai fait pendant deux ans un abandon d'actifs pour se libérer et en encore payer pendant dix ans les dettes que mes parents avaient. et immédiatement j'ai recréé parallèlement à cela l'entreprise Rikero qu'on a aujourd'hui.

  • Speaker #0

    D'accord, vous aviez quel âge ?

  • Speaker #1

    18 ans. 18 ans. Alors j'avais un coup de chance, j'ai toujours eu beaucoup de chance dans la vie, puisque 1974 c'est l'année de l'élection de Valéry Giscard d'Estaing, le 27 mai, et une des premières mesures de Giscard d'Estaing c'était de mettre la majorité à 18 ans et non pas à 21. comme il en était à ce moment-là. Et ça m'a grandement facilité la vie, parce que sinon, pour être à son compte, à l'époque, avec la majorité à 21 ans, il aurait fallu avoir une tonne d'administratifs, de dérogations, etc. Donc là, de ce fait, j'étais 18 ans. J'étais majeur depuis trois mois, j'avais le permis depuis trois mois. Donc tout baignait, tout allait bien, entre guillemets.

  • Speaker #0

    Alors moi, ce qui m'interpelle, c'est qu'à 18 ans, pour moi, on sort de l'adolescence. Et là, vous avez 18 ans, vous reprenez une entreprise familiale parce que vous devez, de ce que je comprends, être charge de famille.

  • Speaker #1

    Oui. Alors, j'étais prêt quand même parce que depuis 13 ans, dès qu'il y avait deux jours de vacances scolaires, j'étais sur les chantiers. Donc ça, au niveau, j'étais prêt. Je venais de terminer à l'époque un BEP d'électricité. C'était extrêmement important à l'époque parce que... Mon départ, je voulais être musicien. Vous le savez d'ailleurs, parce que j'ai eu l'occasion de le dire. Musicien dans l'armée, parce que j'étais à l'harmonie du Gilles. À l'époque, personne qui avait une appétence au niveau de la musique, on avait la possibilité de réintégrer l'école de musique et le conservatoire de Lyon. À l'époque, il n'y avait pas d'école de musique. J'étais d'ailleurs le premier à... cofondé une école de musique à Lugines grâce à l'époque au président du conseil général de la Savoie qui s'appelait Michel Barnier. Je ne sais pas ce qu'il est devenu depuis, mais voilà. Donc, la musique dans la famille, on ne savait pas du tout ce qu'on pouvait faire avec la musique. Je n'ai vu personne qui était musicien chez moi. Et mon père m'a dit, oui, la musique, si tu veux t'amuser, d'accord, mais enfin, moi, je suis inscrit pour aller en électricité. Et à l'époque, c'est un peu dommage que ça s'est un peu perdu, c'était un concours de maths. Donc sur l'ensemble du lycée, il ne prenait que 11 personnes. Donc j'ai fait le job parce que j'ai une éducation assez stricte pour faire le job quand on doit faire le job. Je me disais, de toute façon, sur 11, il y a peu de chances que je sois pris. Et puis je devais être 11e, je ne sais pas. Donc du coup, j'ai été pris. Finalement, ça m'a bien plu, je n'ai aucun regret. et j'ai pu faire les deux, donc la musique et l'électricité. Par contre, j'ai énormément travaillé après, parce qu'au niveau gestion, au niveau relations, etc., j'avais tout à apprendre. Mais le 74, c'est une année charnière, intéressante. C'est une année entre deux chocs pétroliers, 73 et 79. Le choc pétrolier de 73... qui vient d'abord de la guerre du Kippour du 6 octobre 1973. On retrouve malheureusement aujourd'hui la même configuration. Ce sont les Égyptiens et les Syriens qui avaient envahi le mont du Sinaï et du Golan sur Israël. Israël avait répliqué très violemment et ça avait fait vraiment embraser le Moyen-Orient et créer le PEP, le pays producteur du pétrole. Et ça avait fait exploser vraiment à 300% le prix de l'essence. Donc Pompidou à l'époque voulait une indépendance énergétique, c'est pour ça qu'on a lancé le programme du nucléaire. Programme du nucléaire, on a vu l'émergence du chauffage électrique, mais il n'y avait pas d'école à l'époque, ça venait de partir. Donc c'est le VDF qui avait été formé très rapidement, qui avait ouvert ses écoles à un nombre d'entreprises, d'artisans, etc. qui voulait rentrer dans cette filière là. Donc j'étais un des premiers à avoir une formation de chauffage électrique, de ventilation, d'isolation, ainsi de suite. Donc on a pu démarrer, comme on a pu démarrer après très rapidement, j'étais un des premiers aussi à faire du ce qu'on appelait du précâblage informatique dans les lycées et le centre des impôts qui était un des clients principaux clients chez nous pendant 20 ans parce que j'étais précurseur au niveau de l'informatique.

  • Speaker #0

    Donc en fait, votre départ en tant qu'entrepreneur, c'est par le biais d'une faillite, celle de vos mouvements, et votre réussite, c'est par le biais d'opportunités que vous avez su saisir et qui étaient présentes au bon moment pour vous.

  • Speaker #1

    C'est jamais un élément, ni une faillite, ni une faillite. Après réussite, je fais ma vie d'entrepreneur, moi réussite, tout est relatif. J'avais l'ambition d'y arriver. J'ai toujours travaillé, j'ai fait une école de commerce, après j'ai fait le SJDB, l'école supérieure de jeunes dirigeants du bâtiment, dont j'ai la fierté d'avoir ramené en Savoie lorsque j'étais président du BTP Savoie, donc je le fais d'ailleurs à le salarié qui a repris mon entreprise, et ça c'est tout sauf la technique. C'est une formation en alternance exigeante. parce que ce sont des gens qui sont déjà très impliqués dans une entreprise, exigeantes parce que ce n'est pas leur métier. Quand on se met à son compte, généralement, que ce soit dans le bâtiment ou dans le commerce, par exemple, un charcutier ne va pas se mettre à son compte par la passion du droit fiscal ou de la comptabilité. Mais on ne peut pas l'échapper, on ne pourra jamais échapper à cet environnement-là. Donc, ce n'est pas du tout sa formation. Moi, j'ai plutôt une formation de matheux. Et lorsqu'on parle d'économie, de gestion, etc., c'est un peu très, très, très, très loin. Voilà. Donc, c'est pour ça que tout de suite, ma volonté, c'était peu prétentieux, mais c'était vraiment de tout comprendre et de tout savoir.

  • Speaker #0

    D'accord. Et donc, cette entreprise, vous la créez à 18 ans.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Donc, est-ce que vous pouvez me faire une sorte de récapitulatrice de comment elle a évolué ?

  • Speaker #1

    Comment elle est évoluée ? Le sillon, ce sont mes parents qui l'ont tracé. Moi, quand vous avez 15 ans, vous avez les huissiers à la maison, etc., on se doute que ce n'est pas l'image qu'on peut rêver d'être entrepreneur. Une entreprise, c'est une façade. Qu'est-ce qu'il y a derrière la façade ? Mes parents manquaient beaucoup d'argent, avaient énormément de dettes. Donc moi, je voulais retraire. avec tête de ma maman, dont je remâche parce qu'on a travaillé 25 ans ensemble. Donc, ce n'est pas une course au chiffre d'affaires, c'est une entreprise en attachant le mot qualité à cette entreprise. Parce qu'en 1974, quand vous partez d'une faillite, vous avez une étiquette dans le dos qui était beaucoup plus grande qu'aujourd'hui. Et ce qui est important, ce mot qualité, il est encore d'actualité aujourd'hui. On peut refuser du travail parce qu'on a un concurrent qui est moins cher. On dit aux clients, si vous voulez vraiment quelqu'un de moins cher, il ne faut pas venir chez nous. Par contre, si vous voulez un travail de qualité, c'est à vous de choisir. Vous pouvez venir chez nous. On aura aussi l'assurance de la péremité. J'ai créé un service maintenance parce qu'une fois que le travail est terminé, et que les clients ont besoin de nous, il faut savoir revenir rapidement et dépanner rapidement. Ensuite, en matière de trésorerie, tout de suite, je me suis dit, mais... S'il faut faire toute une vie professionnelle et avoir les huissiers à la maison sans arrêt, c'est pas possible, c'est pas imaginable. Donc j'ai toujours une trésorerie très saine, d'ailleurs on a pas besoin des banquiers depuis... On a eu besoin des banquiers pendant les dix premières années, et là on vient de fêter les 50 ans, je dirais depuis 40 ans, entre guillemets, on a pas besoin des banquiers. Alors je sais pas à quoi c'est dû, je sens très rigoureuse, on dit que j'ai mauvais caractère, mais... On confond mauvais caractère avec rigueur. Donc c'est une entreprise saine. D'accord. Je complète, vous avez raison de poser cette question. Je voulais me faire respecter, parce que mes parents n'étaient pas respectés. Mais pour respecter les gens, il faut être soi-même respectueux. J'ai toujours respecté mes salariés. Je peux vous donner un exemple. Mon père, comme souvent, ce n'était pas propre à mes parents, mais... Il faisait les paies quand l'argent rentrait, c'est-à-dire entre le 2 et le 31. Et déjà à 15 ans, je trouvais que ce n'était pas normal, parce que les gens, s'ils attendent la paie le 6, nous ça fait 50 ans qu'on fait la paie le 6, ce n'est pas le 7, ce n'est pas le 8. C'est de la responsabilité de l'entrepreneur de se débrouiller avec son banquier, avec une gestion justement très très rigoureuse pour que la paie soit assurée le 6. Chez Rikero, on a toujours la devise... C'est de payer ce qu'on doit. C'est pareil à l'égard des salariés. Un salarié qui est méritant, d'abord, il faut le payer correctement. Ensuite, il faut le payer d'une manière rigoureuse. C'est-à-dire, si c'est le 6, c'est le 6. Ce n'est pas le 16, ce n'est pas le 8. Voilà. Donc ça, j'étais très, très allergique à ça, à ce qu'on respecte ces conditions-là.

  • Speaker #0

    D'accord. Donc là, vous êtes un entrepreneur engagé, que ce soit au niveau de votre entreprise et de ce que je comprends de vos salariés. La entreprise n'a fait que prospérer, je suppose.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Et puis un jour, il y a la maladie. Est-ce que vous pouvez me parler de ça ? Comment ça s'est passé ?

  • Speaker #1

    La maladie ? Il y a eu plusieurs maladies. Donc je suis porteur d'un DAI, c'est-à-dire c'est un défibrillateur autonome interne. Donc c'est-à-dire que j'ai fait trois infarctus déjà. Et donc j'ai eu un des premiers implantations au CHU de Grenoble. d'un ordinateur global qui me gère le cœur. Ça, ça ne m'a jamais inquiété. Il paraît que 50% des porteurs, je crois qu'il y en a une centaine maintenant sur toute la région, il n'y en a pas tant que ça, on confond souvent avec un best-maker. Ce n'est pas un best-maker, c'est vraiment un ordinateur qui gère tout le cœur. 50% des gens ont été déprimés suite à ça. Moi, honnêtement, je n'ai jamais eu le coup. temps d'être déprimé c'est pour ça peut-être que j'ai pas été déprimé mais ça demande quand même un suivi médical etc donc on est je suis souvent au CHU de grenoble pour avoir ce suivi là ensuite c'est en début 2018 donc j'étais assez fatigué Mais c'est vrai que je n'ai pas trop prêté attention parce que là j'avais une info du ton qui était chargée. J'étais président de la CPME comme je suis encore aujourd'hui. Je venais de relancer le BTP en Savoie, il n'y avait plus de fédération homologuée. J'étais vice-président de la CCI et encore chef d'entreprise. Donc ça fait des journées assez longues. C'était 7 jours sur 7. J'ai fait 7 jours sur 7 pendant plus de 40 ans. Bon, je ne me plains pas parce que ça me convenait, il n'y a pas de souci. J'avais de l'énergie pour faire cela. Et puis un jour, j'ai commencé à perdre beaucoup de son. Donc j'ai été voir mon généraliste, qui est commencé à me traiter sur ce sujet-là. Et je trouvais quand même un peu bizarre qu'il n'aille pas plus loin. Et ensuite, il a commencé par me dire que c'était le stress de l'entrepreneur. Alors là, je ne l'ai pas cru du tout, parce que, comme je lui disais, je stresse les autres. Mais moi, personnellement, je ne suis pas vraiment stressé. C'est vrai. Donc j'ai été directement à Medipol, donc là on a fait une coloscopie pour voir ce qu'il en était au niveau, c'est un cancer du colon et du rectum, et là j'étais quand même surpris parce que j'étais en salle de réveil, et je me souviens très bien que le médecin passait de lit en lit, bonjour monsieur Durand, vous ça va, etc. Bonjour monsieur Riquéraud, vous avez un cancer avancé, donc il faudra venir vous voir assez rapidement, il faudra arrêter votre activité. Bonjour M. Dupont, vous ça va ? Je me suis demandé s'il m'avait vraiment parlé. Je me suis dit, j'ai rêvé ou pas ? Parce que j'étais moitié encore dans le sommeil. Et là, je me suis vraiment posé la question, en me disant, mais qu'est-ce qu'il m'a dit finalement ? Voilà, puis ensuite, ben non, c'était bien une réalité. Donc je ne vous cache pas que la première réaction, comme tout cancer, c'était quand même un choc important, moralement, etc. Mais je me... Je me suis vite repris parce que j'ai eu tellement de problèmes dans ma vie que quand vraiment il y a un problème grave, une intensité importante, je suis très serein et pragmatique.

  • Speaker #0

    Donc là, c'est le choc de l'annonce. Qu'est-ce qu'on ressent ? Quand on nous annonce ça, parce que vous n'avez pas juste la responsabilité de votre santé, vous avez aussi la responsabilité de toute une entreprise.

  • Speaker #1

    Bien sûr. Donc, quel est le pourcentage ? Déjà, l'entreprise était déjà bien structurée. Elle a fait la responsabilité des structures comme la CPME ou le BTP. J'ai commencé la fédération le 17 décembre 2017. Là, c'était début 2018, donc c'était naissant. Donc je me suis dit je veux voir ce qu'il en est, si je peux continuer ou pas, si je ne suis pas en état de continuer, je vais démissionner. Ça c'est clair, il faut assurer la pérennité des structures dont on est responsable, tout comme dans l'entreprise. L'entreprise était structurée mais c'était quand même assez difficile parce que quand vous êtes là depuis 40 ans, même si c'est structuré, on a l'habitude que vous soyez là. Vous êtes le capitaine du navire. Oui, oui, oui. C'est un peu différent avec les autres structures, puisque la CPME ou les structures comme la CPME, finalement, vous changez de président tous les 4-5 ans. Donc, on est habitué. Il y a des permanents qui font quand même bien tourner la boîte. C'est complètement différent d'une entreprise. Là, il y a un manque physique d'abord, parce que moi, j'ai toujours eu l'habitude d'aller dire bonjour. au personnel, y compris le matin, etc. Donc là, il y a eu, de la part du personnel, une très grande inquiétude. Et là, on a joué la transparence tout de suite. On a dit, bon, voilà, il y a un cancer qui arrive, il faudra le traiter, il faudra prendre les choses. Je vous tiendrai informés de ce qu'il en est. Finalement, je n'ai pas trop pensé à moi. C'est pas... Je raisonnais dans la tête pour dire, bon, combien de temps ? Je voulais tout savoir de la part des médecins. Et je leur rends hommage parce qu'aujourd'hui, ils ont un discours qui est quand même... très clair, avec des explications. Moi je veux comprendre, je veux savoir. Et là ils ont été très très clairs. Bon oui, il y avait un risque de décès évidemment. Parce que c'était en plus un cancer avancé mais pas de métastase. Donc ça, c'est le premier point qui m'a rassuré. Après j'ai dit, ben avec la galère, qu'est-ce que vous voulez faire ? Vous êtes au milieu de la mer, est-ce que vous ramez ou est-ce que vous coulez ? On va choisir de ramer. Puis d'un coup on verra bien après. Voilà.

  • Speaker #0

    Vous suivez le courant ?

  • Speaker #1

    de suivre le courant.

  • Speaker #0

    Vous avez quand même stressé un peu, parce que jusqu'à... Monsieur qui ne stresse pas à ce moment-là, vous avez stressé quand même.

  • Speaker #1

    Oui, mais c'est un stress contenu, pour dire avant tout quelles sont les priorités à donner, vous êtes pris dans un mouvance quand même, où franchement, vous n'avez pas trop le temps de penser à ça. Il y a eu des moments de bas. Il est maman au moral très très très compliqué. Quand j'ai appelé mon épouse, je ne pouvais pas lui dire grand chose, mais elle a compris tout de suite. Mais je ne me suis pas effondré. Je ne peux pas dire que je me suis effondré, parce que je me suis dit, c'est comme ça, c'est comme ça. Il faut être cartésien, pragmatique, et il faut retosser les manches et voir ce qu'on peut faire. Vous savez, quand on... Mon père, ce qui s'est passé avec mon père à 18 ans, j'ai eu d'autres problèmes aussi familiaux très très graves, qui étaient plus importants qu'un cancer. Donc derrière, il faut raisonner d'une manière concrète, pas à pas, en disant, voilà, il y a une première étape pour faire de la chimio, j'ai eu 60 chimio-thérapies, 60 chimio et j'ai eu 35 radiothérapies. Donc là par contre, j'étais surpris parce qu'au début, il me dit, vous savez, il faut surtout prendre un DSM. J'ai trouvé que j'étais toujours plus malin que les autres. J'ai dit non, quand même, je suis capable de prendre ma voiture pour descendre, pour faire 50 kilomètres. Je l'ai fait deux fois. Et la troisième fois, j'étais raide mort sur le lit. Mais la difficulté dans tout ça, c'est quand même la fatigue. Et là, vous ne pouvez pas lutter contre la fatigue. Je vois la chimiothérapie, ce qui est compliqué. Il faut prendre en compte ça dans le raisonnement mental. C'est-à-dire que vous faites une chimio. vous en faites une deuxième, vous en faites une troisième, une quatrième, et plus ça va, plus vous êtes fatigué, parce que vous n'avez pas le temps de récupérer, qu'il y a la suivante qui arrive, et entre les deux, on alternait entre une radiothérapie, voilà, là, au bout de trois mois, j'étais, je rentrais, alors là, je ne faisais plus rien, absolument plus rien, ni de reprise, ni ailleurs, je rentrais, je me longeais sur le lit, et je mangeais un tout petit peu, et j'attendais la suivante, parce que j'étais incapable de faire autre chose, ça, c'était... je pense, mentalement et physiquement, mais mentalement c'était très très compliqué parce que vous vous dites, bon sang, je suis réduit à à ne plus rien faire. Ça pour moi c'était vraiment... Vraiment dramatique.

  • Speaker #0

    Vous passez de multiples activités, à travailler 7 jours sur 7, à je ne peux plus rien faire.

  • Speaker #1

    Vous tombez du 7ème étage et vous vous dites, je suis par terre et il y a un poids dessus qui m'empêche de me relever.

  • Speaker #0

    Vous avez perdu espoir à un moment ou pas ?

  • Speaker #1

    Non, jamais. Non, non, bien sûr qu'on pense à vos décès. On se dit, si ça arrive, ça arrive. En attendant que ça arrive, on va faire le maximum. Ok. Voilà. Par contre, il y a eu des étapes. J'ai eu deux opérations. Donc, une opération extrêmement technique qui a duré huit heures, qui était assez compliquée d'après le médecin. Là, j'ai eu une poche pendant trois mois. Alors, au bout de trois mois, j'étais super content et confiant qu'on m'enlève la poche parce que c'est très, très contraignant. Et là, j'étais un peu la fleur au fusil, comme en 2014. Et là, j'ai eu beaucoup plus mal que la première opération. D'accord. Donc là, j'étais quand même surpris. Et j'étais un peu en colère parce que je me suis dit, bon, finalement, après cette opération, je vais pouvoir redémarrer vraiment à 100%. Puis non, c'était encore... Oui, il a fallu un an quand même, un an complet pour reprendre un peu. Et il y a eu des moments de fatigue. qu'il ne faut pas négliger, il faut s'organiser des moments de repos. Et encore aujourd'hui, il y a des moments où il faut que je me repose. Il faut que je me repose, voilà, je prends de la lecture, je lis. Et puis, il ne faut pas lutter contre la fatigue, ce n'est pas possible.

  • Speaker #0

    Donc aujourd'hui, là, vous avez repris plus ou moins les activités ?

  • Speaker #1

    Oui, depuis longtemps quand même.

  • Speaker #0

    Ok. Ce que j'en déduis, c'est que trois infarctus, c'est ça ? Oui. Un cancer ?

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Vous êtes une sorte de survivant ?

  • Speaker #1

    Euh... ouais peut-être, mais enfin il y a des tas de gens qui ont... beaucoup de survivants, hein, dans tant que...

  • Speaker #0

    Je dis pas qu'il n'y en aurait pas beaucoup, mais je pense que vous en êtes un,

  • Speaker #1

    quand même.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pensez que le fait d'avoir cet état d'esprit de battant, d'être optimiste, de ne pas trop stresser, de croire en la vie, ça a joué quelque chose sur votre guérison ?

  • Speaker #1

    Alors si j'en réfère aux médecins, ils disent que le mental est... 50% de la réussite. Ce que je ne crois pas, mais je pense que ça fait beaucoup. Je pense que ça fait énormément. Ensuite, c'est quelque chose qu'on ne peut pas trop communiquer. Quand vous avez une grippe, quand vous avez quelqu'un dans la rue, vous dites, il a la grippe, le pauvre a la grippe, vraiment, il n'a pas de bol. Quand vous avez un cancer comme ça, etc., vous ne pouvez même pas l'expliquer parce que ça dépasse un peu la... le raisonnement lambda qu'on peut avoir tous les jours. Ou alors vous avez des réactions complètement diverses, quelquefois très surprenantes, c'est vraiment difficile. Même pour ma famille, on n'en parle pas trop, parce que je ne veux pas les embêter avec ça. Mais je ne peux pas dire que j'étais vraiment perturbé par ça, j'ai une volonté de m'en sortir. Je vois plusieurs fois, j'étais voir le personnel le matin pour leur dire laissez-moi encore un mois, ça ira mieux dans un mois. Voilà et puis il faut dire quand même on est redevable par rapport à la médecine parce que la médecine a fait énormément énormément de progrès aujourd'hui. On a des chirurgiens qui sont, et des cancérologues qui sont vraiment impressionnants. Je peux vous faire une confidence quand même, ça c'est mon épouse, je dis souvent. J'avais mon cancérologue qui était plus déprimé que moi. Est-ce que c'est vrai ? Plusieurs fois, il m'a dit, vous êtes dans un état... Qu'est-ce que vous allez faire ? On ne peut pas dire ça tous les cinq minutes ou tout au long de la journée. Il faut voir ce qu'il faut faire. Il y a la fatigue, il faut se reposer. Moi, vous savez, dans l'électricité, il y a un chapitre important qui est le dépannage, le pas à pas. C'est-à-dire que si vous avez tout un bâtiment qui est en panne, vous n'allez pas enlever tous les fils tout de suite. tous les fusibles, il faut faire pas à pas. Voilà, qu'est-ce qu'on peut faire ? Ça, ça m'a servi toute ma vie. Quand j'ai repris l'entreprise, il y avait des tas de choses qu'ils ne connaissaient pas au niveau compta, etc. Donc, j'ai repris pas à pas. Voilà, ce chapitre-là, ce qui va, ce qui ne va pas. Ce chapitre-là, ce qui va, ce qui ne va pas. C'est important. On ne peut pas tout faire en même temps, mais il faut donner vraiment les priorités à donner. La priorité, à un bon moment donné, c'était que je me repose. Donc, je me suis reposé.

  • Speaker #0

    En fait, moi, ce que j'en déduis, c'est que cette maladie, ça vous a appris à vous écouter, finalement.

  • Speaker #1

    Oui. Oui, oui, oui, ça m'a appris. Oui, oui, oui, vous avez parfaitement raison. J'ai pris conscience que j'ai pris de l'âge quand même aussi, parce qu'à l'époque j'avais 63 ans. Donc, oui, oui, c'est très, très question pertinente, parce que finalement, on se dit, on se sent un peu quand même indispensable, il faut bien dire comme on est. Et on se dit, un jour, ça finira, forcément. Et puis on se dit, finalement, j'ai passé un an quand même entre pointillés, ça peut se faire aussi sans la maladie, c'est clair. C'est-à-dire qu'à un moment donné, on se dit, finalement, je peux quand même prendre un peu de vacances, ce que je ne m'étais jamais autorisé à faire pendant une quarantaine d'années. À tort d'ailleurs, ce serait maintenant, je prendrais beaucoup plus de vacances.

  • Speaker #0

    Vous allez en prendre beaucoup plus.

  • Speaker #1

    Oui, mais la nature, il se passe par du vide. Non, mais il faut... apprendre à se reposer. Quand on est chef d'entreprise, on ne peut pas dire, c'est 18h du soir, je ferme la lumière, je ferme la clé, puis je m'en vais. Les soucis vous perturbent pendant les 24 heures d'une journée. Je vous fais une confidence aussi, quand j'ai acheté mon premier camion, je n'ai pas dormi pendant 6 mois, parce que c'était mon premier gros crédit. Puis ensuite, j'ai fait beaucoup de crédits. Un soir, je me suis dit, mais je suis complètement nul parce que je ne peux pas penser à tous les crédits. Donc, finalement, autant que je dorme comme il faut. Et le lendemain, je serai frais dispo pour attaquer de front tous les problèmes de l'entreprise. Du coup, je dors bien.

  • Speaker #0

    D'accord. C'est la question que j'allais vous poser. Est-ce que aujourd'hui,

  • Speaker #1

    vous dormez bien ? Oui, aujourd'hui, je dors bien, très bien.

  • Speaker #0

    D'accord. Pour conclure, est-ce que vous auriez un mot à dire ou une idée à faire passer ? à tous les entrepreneurs qui traversent ce genre de difficultés aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Alors, peut-être une maxime de Nietzsche qui disait...

  • Speaker #0

    Tout ce qui ne tue pas rend plus fort.

  • Speaker #1

    J'y ai pensé aussi. C'est un peu les portes ouvertes,

  • Speaker #0

    mais c'est la vraie réalité. Voilà, donc après c'est une résilience, une résilience positive. Je pense aussi à une autre maxime d'André Marot qui disait Une vie ne vaut rien, mais rien ne vaut la vie. Je pense que tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir. Il ne faut jamais baisser les bras. Que ce soit dans la dureté de la vie d'une entreprise ou la santé, alors évidemment la santé c'est quand même prioritaire, c'est clair. Ensuite il faut savoir s'enturer, il faut savoir, comme je disais, à un moment donné gérer sa propre vie, ce qui n'est pas évident quand on est à fond dedans, quand on est à fond, on crée, on développe. Moi je suis une entreprise, c'est quelque chose, mais quand on crée, on développe, c'est quand même très difficile. On est passionné par notre métier, donc on n'a pas de mérite à ce niveau-là. Puis on est majeur, c'est sympa, on peut faire autre chose. Mais ce n'est pas vraiment lié à l'argent. Quand on parle de sa propre entreprise, il y a beaucoup de choses qui brillent. Mais derrière, c'est quand même la passion de son métier. Mais il ne faut pas que ça prenne sur la santé de votre vie. Une vie mérite de vivre pleinement. C'est clair. La vie est belle. Je pense toujours qu'il y a beaucoup plus pire que nous.

  • Speaker #1

    En tout cas, je vous remercie beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci à vous, il n'y a pas de soucis.

  • Speaker #1

    Merci à tous pour votre écoute. Le podcast Inclusive est soutenu par la GFIT et les réseaux sociaux de l'Ordre de l'Ordre. À la semaine prochaine pour un nouvel épisode.

Description

Comment faire face à la maladie lorsque l'on est chef d'entreprise, pilier de sa famille et responsable d'une équipe ? Gérer un diagnostic de cancer tout en soutenant ses proches et en assurant la pérennité de son entreprise, peut-être un défi d'une ampleur insoupçonnée.

Après avoir traversé 3 infarctus, Patrick, dirigeant de l'entreprise Richiero SA, a réussi à vaincre le cancer tout en continuant à veiller sur son entreprise et sur ses équipes. Il a trouvé la force de concilier vie personnelle et responsabilités professionnelles et faire face à l'adversité. Il raconte, ses peurs, ses victoires et l'importance de l'entourage pour surmonter de tels défis.



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à tous et bienvenue sur le podcast Inclusif. Aujourd'hui, nous abordons un sujet fort et intime, comment faire face à la maladie lorsque l'on est chef d'entreprise, pilier de sa famille et responsable d'une équipe. Gérer un diagnostic de cancer tout en soutenant ses proches et en assurant la pérennité de son entreprise peut être un défi d'une ampleur insoupçonnée. Pour nous en parler, nous recevons aujourd'hui M. Rikiro, dirigeant de l'entreprise d'électricité Rikiro-Essa. Après avoir traversé trois infarctus, il a réussi à vaincre le cancer tout en continuant à veiller sur son entreprise et ses équipes. Dans cet épisode, il partagera avec nous comment il a trouvé la force de concilier vie personnelle et responsabilité professionnelle et faire face à l'adversité. Il nous racontera ses peurs, ses victoires et l'importance de l'entourage pour soumonter de tels défis. Je suis Shirazan, dans nos épisodes où nous tendons lumière des histoires inspirantes et des initiatives innovantes. Vous entendrez des témoignages de dirigeants d'entreprises engagés en faveur de l'inclusion des personnes en situation de handicap, certains ayant eux-mêmes vécu une telle situation, et des salariés qui ont pu faire de leur différence une force. Ils partageront leurs expériences, leurs défis et les stratégies qu'ils ont mises en place pour créer des environnements de travail véritablement ouverts à tous. Bonjour Patrick, vous êtes directeur général de l'entreprise Rikiro SAS, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça, depuis deux ans.

  • Speaker #0

    Depuis deux ans, ok. Cette entreprise, vous l'avez créée en partant de rien ?

  • Speaker #1

    Oui, en partant de rien. C'est un peu un accident de la vie au départ, puisque mes parents avaient plusieurs entreprises, produits pétroliers, électroménagers, du gaz, et une petite affaire d'électricité. Et le 11 octobre 1974, mes parents ont été mis en faillite, et mon père a mis fin à ses jours ce jour-là. Donc on s'est retrouvé à la rue parce que c'était bien avant la génération tapis. A l'époque, ma maman n'était pas déclarée, il n'y avait pas de SCI, il n'y avait pas de CRL, c'était tout en nom personnel. Donc j'ai fait pendant deux ans un abandon d'actifs pour se libérer et en encore payer pendant dix ans les dettes que mes parents avaient. et immédiatement j'ai recréé parallèlement à cela l'entreprise Rikero qu'on a aujourd'hui.

  • Speaker #0

    D'accord, vous aviez quel âge ?

  • Speaker #1

    18 ans. 18 ans. Alors j'avais un coup de chance, j'ai toujours eu beaucoup de chance dans la vie, puisque 1974 c'est l'année de l'élection de Valéry Giscard d'Estaing, le 27 mai, et une des premières mesures de Giscard d'Estaing c'était de mettre la majorité à 18 ans et non pas à 21. comme il en était à ce moment-là. Et ça m'a grandement facilité la vie, parce que sinon, pour être à son compte, à l'époque, avec la majorité à 21 ans, il aurait fallu avoir une tonne d'administratifs, de dérogations, etc. Donc là, de ce fait, j'étais 18 ans. J'étais majeur depuis trois mois, j'avais le permis depuis trois mois. Donc tout baignait, tout allait bien, entre guillemets.

  • Speaker #0

    Alors moi, ce qui m'interpelle, c'est qu'à 18 ans, pour moi, on sort de l'adolescence. Et là, vous avez 18 ans, vous reprenez une entreprise familiale parce que vous devez, de ce que je comprends, être charge de famille.

  • Speaker #1

    Oui. Alors, j'étais prêt quand même parce que depuis 13 ans, dès qu'il y avait deux jours de vacances scolaires, j'étais sur les chantiers. Donc ça, au niveau, j'étais prêt. Je venais de terminer à l'époque un BEP d'électricité. C'était extrêmement important à l'époque parce que... Mon départ, je voulais être musicien. Vous le savez d'ailleurs, parce que j'ai eu l'occasion de le dire. Musicien dans l'armée, parce que j'étais à l'harmonie du Gilles. À l'époque, personne qui avait une appétence au niveau de la musique, on avait la possibilité de réintégrer l'école de musique et le conservatoire de Lyon. À l'époque, il n'y avait pas d'école de musique. J'étais d'ailleurs le premier à... cofondé une école de musique à Lugines grâce à l'époque au président du conseil général de la Savoie qui s'appelait Michel Barnier. Je ne sais pas ce qu'il est devenu depuis, mais voilà. Donc, la musique dans la famille, on ne savait pas du tout ce qu'on pouvait faire avec la musique. Je n'ai vu personne qui était musicien chez moi. Et mon père m'a dit, oui, la musique, si tu veux t'amuser, d'accord, mais enfin, moi, je suis inscrit pour aller en électricité. Et à l'époque, c'est un peu dommage que ça s'est un peu perdu, c'était un concours de maths. Donc sur l'ensemble du lycée, il ne prenait que 11 personnes. Donc j'ai fait le job parce que j'ai une éducation assez stricte pour faire le job quand on doit faire le job. Je me disais, de toute façon, sur 11, il y a peu de chances que je sois pris. Et puis je devais être 11e, je ne sais pas. Donc du coup, j'ai été pris. Finalement, ça m'a bien plu, je n'ai aucun regret. et j'ai pu faire les deux, donc la musique et l'électricité. Par contre, j'ai énormément travaillé après, parce qu'au niveau gestion, au niveau relations, etc., j'avais tout à apprendre. Mais le 74, c'est une année charnière, intéressante. C'est une année entre deux chocs pétroliers, 73 et 79. Le choc pétrolier de 73... qui vient d'abord de la guerre du Kippour du 6 octobre 1973. On retrouve malheureusement aujourd'hui la même configuration. Ce sont les Égyptiens et les Syriens qui avaient envahi le mont du Sinaï et du Golan sur Israël. Israël avait répliqué très violemment et ça avait fait vraiment embraser le Moyen-Orient et créer le PEP, le pays producteur du pétrole. Et ça avait fait exploser vraiment à 300% le prix de l'essence. Donc Pompidou à l'époque voulait une indépendance énergétique, c'est pour ça qu'on a lancé le programme du nucléaire. Programme du nucléaire, on a vu l'émergence du chauffage électrique, mais il n'y avait pas d'école à l'époque, ça venait de partir. Donc c'est le VDF qui avait été formé très rapidement, qui avait ouvert ses écoles à un nombre d'entreprises, d'artisans, etc. qui voulait rentrer dans cette filière là. Donc j'étais un des premiers à avoir une formation de chauffage électrique, de ventilation, d'isolation, ainsi de suite. Donc on a pu démarrer, comme on a pu démarrer après très rapidement, j'étais un des premiers aussi à faire du ce qu'on appelait du précâblage informatique dans les lycées et le centre des impôts qui était un des clients principaux clients chez nous pendant 20 ans parce que j'étais précurseur au niveau de l'informatique.

  • Speaker #0

    Donc en fait, votre départ en tant qu'entrepreneur, c'est par le biais d'une faillite, celle de vos mouvements, et votre réussite, c'est par le biais d'opportunités que vous avez su saisir et qui étaient présentes au bon moment pour vous.

  • Speaker #1

    C'est jamais un élément, ni une faillite, ni une faillite. Après réussite, je fais ma vie d'entrepreneur, moi réussite, tout est relatif. J'avais l'ambition d'y arriver. J'ai toujours travaillé, j'ai fait une école de commerce, après j'ai fait le SJDB, l'école supérieure de jeunes dirigeants du bâtiment, dont j'ai la fierté d'avoir ramené en Savoie lorsque j'étais président du BTP Savoie, donc je le fais d'ailleurs à le salarié qui a repris mon entreprise, et ça c'est tout sauf la technique. C'est une formation en alternance exigeante. parce que ce sont des gens qui sont déjà très impliqués dans une entreprise, exigeantes parce que ce n'est pas leur métier. Quand on se met à son compte, généralement, que ce soit dans le bâtiment ou dans le commerce, par exemple, un charcutier ne va pas se mettre à son compte par la passion du droit fiscal ou de la comptabilité. Mais on ne peut pas l'échapper, on ne pourra jamais échapper à cet environnement-là. Donc, ce n'est pas du tout sa formation. Moi, j'ai plutôt une formation de matheux. Et lorsqu'on parle d'économie, de gestion, etc., c'est un peu très, très, très, très loin. Voilà. Donc, c'est pour ça que tout de suite, ma volonté, c'était peu prétentieux, mais c'était vraiment de tout comprendre et de tout savoir.

  • Speaker #0

    D'accord. Et donc, cette entreprise, vous la créez à 18 ans.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Donc, est-ce que vous pouvez me faire une sorte de récapitulatrice de comment elle a évolué ?

  • Speaker #1

    Comment elle est évoluée ? Le sillon, ce sont mes parents qui l'ont tracé. Moi, quand vous avez 15 ans, vous avez les huissiers à la maison, etc., on se doute que ce n'est pas l'image qu'on peut rêver d'être entrepreneur. Une entreprise, c'est une façade. Qu'est-ce qu'il y a derrière la façade ? Mes parents manquaient beaucoup d'argent, avaient énormément de dettes. Donc moi, je voulais retraire. avec tête de ma maman, dont je remâche parce qu'on a travaillé 25 ans ensemble. Donc, ce n'est pas une course au chiffre d'affaires, c'est une entreprise en attachant le mot qualité à cette entreprise. Parce qu'en 1974, quand vous partez d'une faillite, vous avez une étiquette dans le dos qui était beaucoup plus grande qu'aujourd'hui. Et ce qui est important, ce mot qualité, il est encore d'actualité aujourd'hui. On peut refuser du travail parce qu'on a un concurrent qui est moins cher. On dit aux clients, si vous voulez vraiment quelqu'un de moins cher, il ne faut pas venir chez nous. Par contre, si vous voulez un travail de qualité, c'est à vous de choisir. Vous pouvez venir chez nous. On aura aussi l'assurance de la péremité. J'ai créé un service maintenance parce qu'une fois que le travail est terminé, et que les clients ont besoin de nous, il faut savoir revenir rapidement et dépanner rapidement. Ensuite, en matière de trésorerie, tout de suite, je me suis dit, mais... S'il faut faire toute une vie professionnelle et avoir les huissiers à la maison sans arrêt, c'est pas possible, c'est pas imaginable. Donc j'ai toujours une trésorerie très saine, d'ailleurs on a pas besoin des banquiers depuis... On a eu besoin des banquiers pendant les dix premières années, et là on vient de fêter les 50 ans, je dirais depuis 40 ans, entre guillemets, on a pas besoin des banquiers. Alors je sais pas à quoi c'est dû, je sens très rigoureuse, on dit que j'ai mauvais caractère, mais... On confond mauvais caractère avec rigueur. Donc c'est une entreprise saine. D'accord. Je complète, vous avez raison de poser cette question. Je voulais me faire respecter, parce que mes parents n'étaient pas respectés. Mais pour respecter les gens, il faut être soi-même respectueux. J'ai toujours respecté mes salariés. Je peux vous donner un exemple. Mon père, comme souvent, ce n'était pas propre à mes parents, mais... Il faisait les paies quand l'argent rentrait, c'est-à-dire entre le 2 et le 31. Et déjà à 15 ans, je trouvais que ce n'était pas normal, parce que les gens, s'ils attendent la paie le 6, nous ça fait 50 ans qu'on fait la paie le 6, ce n'est pas le 7, ce n'est pas le 8. C'est de la responsabilité de l'entrepreneur de se débrouiller avec son banquier, avec une gestion justement très très rigoureuse pour que la paie soit assurée le 6. Chez Rikero, on a toujours la devise... C'est de payer ce qu'on doit. C'est pareil à l'égard des salariés. Un salarié qui est méritant, d'abord, il faut le payer correctement. Ensuite, il faut le payer d'une manière rigoureuse. C'est-à-dire, si c'est le 6, c'est le 6. Ce n'est pas le 16, ce n'est pas le 8. Voilà. Donc ça, j'étais très, très allergique à ça, à ce qu'on respecte ces conditions-là.

  • Speaker #0

    D'accord. Donc là, vous êtes un entrepreneur engagé, que ce soit au niveau de votre entreprise et de ce que je comprends de vos salariés. La entreprise n'a fait que prospérer, je suppose.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Et puis un jour, il y a la maladie. Est-ce que vous pouvez me parler de ça ? Comment ça s'est passé ?

  • Speaker #1

    La maladie ? Il y a eu plusieurs maladies. Donc je suis porteur d'un DAI, c'est-à-dire c'est un défibrillateur autonome interne. Donc c'est-à-dire que j'ai fait trois infarctus déjà. Et donc j'ai eu un des premiers implantations au CHU de Grenoble. d'un ordinateur global qui me gère le cœur. Ça, ça ne m'a jamais inquiété. Il paraît que 50% des porteurs, je crois qu'il y en a une centaine maintenant sur toute la région, il n'y en a pas tant que ça, on confond souvent avec un best-maker. Ce n'est pas un best-maker, c'est vraiment un ordinateur qui gère tout le cœur. 50% des gens ont été déprimés suite à ça. Moi, honnêtement, je n'ai jamais eu le coup. temps d'être déprimé c'est pour ça peut-être que j'ai pas été déprimé mais ça demande quand même un suivi médical etc donc on est je suis souvent au CHU de grenoble pour avoir ce suivi là ensuite c'est en début 2018 donc j'étais assez fatigué Mais c'est vrai que je n'ai pas trop prêté attention parce que là j'avais une info du ton qui était chargée. J'étais président de la CPME comme je suis encore aujourd'hui. Je venais de relancer le BTP en Savoie, il n'y avait plus de fédération homologuée. J'étais vice-président de la CCI et encore chef d'entreprise. Donc ça fait des journées assez longues. C'était 7 jours sur 7. J'ai fait 7 jours sur 7 pendant plus de 40 ans. Bon, je ne me plains pas parce que ça me convenait, il n'y a pas de souci. J'avais de l'énergie pour faire cela. Et puis un jour, j'ai commencé à perdre beaucoup de son. Donc j'ai été voir mon généraliste, qui est commencé à me traiter sur ce sujet-là. Et je trouvais quand même un peu bizarre qu'il n'aille pas plus loin. Et ensuite, il a commencé par me dire que c'était le stress de l'entrepreneur. Alors là, je ne l'ai pas cru du tout, parce que, comme je lui disais, je stresse les autres. Mais moi, personnellement, je ne suis pas vraiment stressé. C'est vrai. Donc j'ai été directement à Medipol, donc là on a fait une coloscopie pour voir ce qu'il en était au niveau, c'est un cancer du colon et du rectum, et là j'étais quand même surpris parce que j'étais en salle de réveil, et je me souviens très bien que le médecin passait de lit en lit, bonjour monsieur Durand, vous ça va, etc. Bonjour monsieur Riquéraud, vous avez un cancer avancé, donc il faudra venir vous voir assez rapidement, il faudra arrêter votre activité. Bonjour M. Dupont, vous ça va ? Je me suis demandé s'il m'avait vraiment parlé. Je me suis dit, j'ai rêvé ou pas ? Parce que j'étais moitié encore dans le sommeil. Et là, je me suis vraiment posé la question, en me disant, mais qu'est-ce qu'il m'a dit finalement ? Voilà, puis ensuite, ben non, c'était bien une réalité. Donc je ne vous cache pas que la première réaction, comme tout cancer, c'était quand même un choc important, moralement, etc. Mais je me... Je me suis vite repris parce que j'ai eu tellement de problèmes dans ma vie que quand vraiment il y a un problème grave, une intensité importante, je suis très serein et pragmatique.

  • Speaker #0

    Donc là, c'est le choc de l'annonce. Qu'est-ce qu'on ressent ? Quand on nous annonce ça, parce que vous n'avez pas juste la responsabilité de votre santé, vous avez aussi la responsabilité de toute une entreprise.

  • Speaker #1

    Bien sûr. Donc, quel est le pourcentage ? Déjà, l'entreprise était déjà bien structurée. Elle a fait la responsabilité des structures comme la CPME ou le BTP. J'ai commencé la fédération le 17 décembre 2017. Là, c'était début 2018, donc c'était naissant. Donc je me suis dit je veux voir ce qu'il en est, si je peux continuer ou pas, si je ne suis pas en état de continuer, je vais démissionner. Ça c'est clair, il faut assurer la pérennité des structures dont on est responsable, tout comme dans l'entreprise. L'entreprise était structurée mais c'était quand même assez difficile parce que quand vous êtes là depuis 40 ans, même si c'est structuré, on a l'habitude que vous soyez là. Vous êtes le capitaine du navire. Oui, oui, oui. C'est un peu différent avec les autres structures, puisque la CPME ou les structures comme la CPME, finalement, vous changez de président tous les 4-5 ans. Donc, on est habitué. Il y a des permanents qui font quand même bien tourner la boîte. C'est complètement différent d'une entreprise. Là, il y a un manque physique d'abord, parce que moi, j'ai toujours eu l'habitude d'aller dire bonjour. au personnel, y compris le matin, etc. Donc là, il y a eu, de la part du personnel, une très grande inquiétude. Et là, on a joué la transparence tout de suite. On a dit, bon, voilà, il y a un cancer qui arrive, il faudra le traiter, il faudra prendre les choses. Je vous tiendrai informés de ce qu'il en est. Finalement, je n'ai pas trop pensé à moi. C'est pas... Je raisonnais dans la tête pour dire, bon, combien de temps ? Je voulais tout savoir de la part des médecins. Et je leur rends hommage parce qu'aujourd'hui, ils ont un discours qui est quand même... très clair, avec des explications. Moi je veux comprendre, je veux savoir. Et là ils ont été très très clairs. Bon oui, il y avait un risque de décès évidemment. Parce que c'était en plus un cancer avancé mais pas de métastase. Donc ça, c'est le premier point qui m'a rassuré. Après j'ai dit, ben avec la galère, qu'est-ce que vous voulez faire ? Vous êtes au milieu de la mer, est-ce que vous ramez ou est-ce que vous coulez ? On va choisir de ramer. Puis d'un coup on verra bien après. Voilà.

  • Speaker #0

    Vous suivez le courant ?

  • Speaker #1

    de suivre le courant.

  • Speaker #0

    Vous avez quand même stressé un peu, parce que jusqu'à... Monsieur qui ne stresse pas à ce moment-là, vous avez stressé quand même.

  • Speaker #1

    Oui, mais c'est un stress contenu, pour dire avant tout quelles sont les priorités à donner, vous êtes pris dans un mouvance quand même, où franchement, vous n'avez pas trop le temps de penser à ça. Il y a eu des moments de bas. Il est maman au moral très très très compliqué. Quand j'ai appelé mon épouse, je ne pouvais pas lui dire grand chose, mais elle a compris tout de suite. Mais je ne me suis pas effondré. Je ne peux pas dire que je me suis effondré, parce que je me suis dit, c'est comme ça, c'est comme ça. Il faut être cartésien, pragmatique, et il faut retosser les manches et voir ce qu'on peut faire. Vous savez, quand on... Mon père, ce qui s'est passé avec mon père à 18 ans, j'ai eu d'autres problèmes aussi familiaux très très graves, qui étaient plus importants qu'un cancer. Donc derrière, il faut raisonner d'une manière concrète, pas à pas, en disant, voilà, il y a une première étape pour faire de la chimio, j'ai eu 60 chimio-thérapies, 60 chimio et j'ai eu 35 radiothérapies. Donc là par contre, j'étais surpris parce qu'au début, il me dit, vous savez, il faut surtout prendre un DSM. J'ai trouvé que j'étais toujours plus malin que les autres. J'ai dit non, quand même, je suis capable de prendre ma voiture pour descendre, pour faire 50 kilomètres. Je l'ai fait deux fois. Et la troisième fois, j'étais raide mort sur le lit. Mais la difficulté dans tout ça, c'est quand même la fatigue. Et là, vous ne pouvez pas lutter contre la fatigue. Je vois la chimiothérapie, ce qui est compliqué. Il faut prendre en compte ça dans le raisonnement mental. C'est-à-dire que vous faites une chimio. vous en faites une deuxième, vous en faites une troisième, une quatrième, et plus ça va, plus vous êtes fatigué, parce que vous n'avez pas le temps de récupérer, qu'il y a la suivante qui arrive, et entre les deux, on alternait entre une radiothérapie, voilà, là, au bout de trois mois, j'étais, je rentrais, alors là, je ne faisais plus rien, absolument plus rien, ni de reprise, ni ailleurs, je rentrais, je me longeais sur le lit, et je mangeais un tout petit peu, et j'attendais la suivante, parce que j'étais incapable de faire autre chose, ça, c'était... je pense, mentalement et physiquement, mais mentalement c'était très très compliqué parce que vous vous dites, bon sang, je suis réduit à à ne plus rien faire. Ça pour moi c'était vraiment... Vraiment dramatique.

  • Speaker #0

    Vous passez de multiples activités, à travailler 7 jours sur 7, à je ne peux plus rien faire.

  • Speaker #1

    Vous tombez du 7ème étage et vous vous dites, je suis par terre et il y a un poids dessus qui m'empêche de me relever.

  • Speaker #0

    Vous avez perdu espoir à un moment ou pas ?

  • Speaker #1

    Non, jamais. Non, non, bien sûr qu'on pense à vos décès. On se dit, si ça arrive, ça arrive. En attendant que ça arrive, on va faire le maximum. Ok. Voilà. Par contre, il y a eu des étapes. J'ai eu deux opérations. Donc, une opération extrêmement technique qui a duré huit heures, qui était assez compliquée d'après le médecin. Là, j'ai eu une poche pendant trois mois. Alors, au bout de trois mois, j'étais super content et confiant qu'on m'enlève la poche parce que c'est très, très contraignant. Et là, j'étais un peu la fleur au fusil, comme en 2014. Et là, j'ai eu beaucoup plus mal que la première opération. D'accord. Donc là, j'étais quand même surpris. Et j'étais un peu en colère parce que je me suis dit, bon, finalement, après cette opération, je vais pouvoir redémarrer vraiment à 100%. Puis non, c'était encore... Oui, il a fallu un an quand même, un an complet pour reprendre un peu. Et il y a eu des moments de fatigue. qu'il ne faut pas négliger, il faut s'organiser des moments de repos. Et encore aujourd'hui, il y a des moments où il faut que je me repose. Il faut que je me repose, voilà, je prends de la lecture, je lis. Et puis, il ne faut pas lutter contre la fatigue, ce n'est pas possible.

  • Speaker #0

    Donc aujourd'hui, là, vous avez repris plus ou moins les activités ?

  • Speaker #1

    Oui, depuis longtemps quand même.

  • Speaker #0

    Ok. Ce que j'en déduis, c'est que trois infarctus, c'est ça ? Oui. Un cancer ?

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Vous êtes une sorte de survivant ?

  • Speaker #1

    Euh... ouais peut-être, mais enfin il y a des tas de gens qui ont... beaucoup de survivants, hein, dans tant que...

  • Speaker #0

    Je dis pas qu'il n'y en aurait pas beaucoup, mais je pense que vous en êtes un,

  • Speaker #1

    quand même.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pensez que le fait d'avoir cet état d'esprit de battant, d'être optimiste, de ne pas trop stresser, de croire en la vie, ça a joué quelque chose sur votre guérison ?

  • Speaker #1

    Alors si j'en réfère aux médecins, ils disent que le mental est... 50% de la réussite. Ce que je ne crois pas, mais je pense que ça fait beaucoup. Je pense que ça fait énormément. Ensuite, c'est quelque chose qu'on ne peut pas trop communiquer. Quand vous avez une grippe, quand vous avez quelqu'un dans la rue, vous dites, il a la grippe, le pauvre a la grippe, vraiment, il n'a pas de bol. Quand vous avez un cancer comme ça, etc., vous ne pouvez même pas l'expliquer parce que ça dépasse un peu la... le raisonnement lambda qu'on peut avoir tous les jours. Ou alors vous avez des réactions complètement diverses, quelquefois très surprenantes, c'est vraiment difficile. Même pour ma famille, on n'en parle pas trop, parce que je ne veux pas les embêter avec ça. Mais je ne peux pas dire que j'étais vraiment perturbé par ça, j'ai une volonté de m'en sortir. Je vois plusieurs fois, j'étais voir le personnel le matin pour leur dire laissez-moi encore un mois, ça ira mieux dans un mois. Voilà et puis il faut dire quand même on est redevable par rapport à la médecine parce que la médecine a fait énormément énormément de progrès aujourd'hui. On a des chirurgiens qui sont, et des cancérologues qui sont vraiment impressionnants. Je peux vous faire une confidence quand même, ça c'est mon épouse, je dis souvent. J'avais mon cancérologue qui était plus déprimé que moi. Est-ce que c'est vrai ? Plusieurs fois, il m'a dit, vous êtes dans un état... Qu'est-ce que vous allez faire ? On ne peut pas dire ça tous les cinq minutes ou tout au long de la journée. Il faut voir ce qu'il faut faire. Il y a la fatigue, il faut se reposer. Moi, vous savez, dans l'électricité, il y a un chapitre important qui est le dépannage, le pas à pas. C'est-à-dire que si vous avez tout un bâtiment qui est en panne, vous n'allez pas enlever tous les fils tout de suite. tous les fusibles, il faut faire pas à pas. Voilà, qu'est-ce qu'on peut faire ? Ça, ça m'a servi toute ma vie. Quand j'ai repris l'entreprise, il y avait des tas de choses qu'ils ne connaissaient pas au niveau compta, etc. Donc, j'ai repris pas à pas. Voilà, ce chapitre-là, ce qui va, ce qui ne va pas. Ce chapitre-là, ce qui va, ce qui ne va pas. C'est important. On ne peut pas tout faire en même temps, mais il faut donner vraiment les priorités à donner. La priorité, à un bon moment donné, c'était que je me repose. Donc, je me suis reposé.

  • Speaker #0

    En fait, moi, ce que j'en déduis, c'est que cette maladie, ça vous a appris à vous écouter, finalement.

  • Speaker #1

    Oui. Oui, oui, oui, ça m'a appris. Oui, oui, oui, vous avez parfaitement raison. J'ai pris conscience que j'ai pris de l'âge quand même aussi, parce qu'à l'époque j'avais 63 ans. Donc, oui, oui, c'est très, très question pertinente, parce que finalement, on se dit, on se sent un peu quand même indispensable, il faut bien dire comme on est. Et on se dit, un jour, ça finira, forcément. Et puis on se dit, finalement, j'ai passé un an quand même entre pointillés, ça peut se faire aussi sans la maladie, c'est clair. C'est-à-dire qu'à un moment donné, on se dit, finalement, je peux quand même prendre un peu de vacances, ce que je ne m'étais jamais autorisé à faire pendant une quarantaine d'années. À tort d'ailleurs, ce serait maintenant, je prendrais beaucoup plus de vacances.

  • Speaker #0

    Vous allez en prendre beaucoup plus.

  • Speaker #1

    Oui, mais la nature, il se passe par du vide. Non, mais il faut... apprendre à se reposer. Quand on est chef d'entreprise, on ne peut pas dire, c'est 18h du soir, je ferme la lumière, je ferme la clé, puis je m'en vais. Les soucis vous perturbent pendant les 24 heures d'une journée. Je vous fais une confidence aussi, quand j'ai acheté mon premier camion, je n'ai pas dormi pendant 6 mois, parce que c'était mon premier gros crédit. Puis ensuite, j'ai fait beaucoup de crédits. Un soir, je me suis dit, mais je suis complètement nul parce que je ne peux pas penser à tous les crédits. Donc, finalement, autant que je dorme comme il faut. Et le lendemain, je serai frais dispo pour attaquer de front tous les problèmes de l'entreprise. Du coup, je dors bien.

  • Speaker #0

    D'accord. C'est la question que j'allais vous poser. Est-ce que aujourd'hui,

  • Speaker #1

    vous dormez bien ? Oui, aujourd'hui, je dors bien, très bien.

  • Speaker #0

    D'accord. Pour conclure, est-ce que vous auriez un mot à dire ou une idée à faire passer ? à tous les entrepreneurs qui traversent ce genre de difficultés aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Alors, peut-être une maxime de Nietzsche qui disait...

  • Speaker #0

    Tout ce qui ne tue pas rend plus fort.

  • Speaker #1

    J'y ai pensé aussi. C'est un peu les portes ouvertes,

  • Speaker #0

    mais c'est la vraie réalité. Voilà, donc après c'est une résilience, une résilience positive. Je pense aussi à une autre maxime d'André Marot qui disait Une vie ne vaut rien, mais rien ne vaut la vie. Je pense que tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir. Il ne faut jamais baisser les bras. Que ce soit dans la dureté de la vie d'une entreprise ou la santé, alors évidemment la santé c'est quand même prioritaire, c'est clair. Ensuite il faut savoir s'enturer, il faut savoir, comme je disais, à un moment donné gérer sa propre vie, ce qui n'est pas évident quand on est à fond dedans, quand on est à fond, on crée, on développe. Moi je suis une entreprise, c'est quelque chose, mais quand on crée, on développe, c'est quand même très difficile. On est passionné par notre métier, donc on n'a pas de mérite à ce niveau-là. Puis on est majeur, c'est sympa, on peut faire autre chose. Mais ce n'est pas vraiment lié à l'argent. Quand on parle de sa propre entreprise, il y a beaucoup de choses qui brillent. Mais derrière, c'est quand même la passion de son métier. Mais il ne faut pas que ça prenne sur la santé de votre vie. Une vie mérite de vivre pleinement. C'est clair. La vie est belle. Je pense toujours qu'il y a beaucoup plus pire que nous.

  • Speaker #1

    En tout cas, je vous remercie beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci à vous, il n'y a pas de soucis.

  • Speaker #1

    Merci à tous pour votre écoute. Le podcast Inclusive est soutenu par la GFIT et les réseaux sociaux de l'Ordre de l'Ordre. À la semaine prochaine pour un nouvel épisode.

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Description

Comment faire face à la maladie lorsque l'on est chef d'entreprise, pilier de sa famille et responsable d'une équipe ? Gérer un diagnostic de cancer tout en soutenant ses proches et en assurant la pérennité de son entreprise, peut-être un défi d'une ampleur insoupçonnée.

Après avoir traversé 3 infarctus, Patrick, dirigeant de l'entreprise Richiero SA, a réussi à vaincre le cancer tout en continuant à veiller sur son entreprise et sur ses équipes. Il a trouvé la force de concilier vie personnelle et responsabilités professionnelles et faire face à l'adversité. Il raconte, ses peurs, ses victoires et l'importance de l'entourage pour surmonter de tels défis.



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à tous et bienvenue sur le podcast Inclusif. Aujourd'hui, nous abordons un sujet fort et intime, comment faire face à la maladie lorsque l'on est chef d'entreprise, pilier de sa famille et responsable d'une équipe. Gérer un diagnostic de cancer tout en soutenant ses proches et en assurant la pérennité de son entreprise peut être un défi d'une ampleur insoupçonnée. Pour nous en parler, nous recevons aujourd'hui M. Rikiro, dirigeant de l'entreprise d'électricité Rikiro-Essa. Après avoir traversé trois infarctus, il a réussi à vaincre le cancer tout en continuant à veiller sur son entreprise et ses équipes. Dans cet épisode, il partagera avec nous comment il a trouvé la force de concilier vie personnelle et responsabilité professionnelle et faire face à l'adversité. Il nous racontera ses peurs, ses victoires et l'importance de l'entourage pour soumonter de tels défis. Je suis Shirazan, dans nos épisodes où nous tendons lumière des histoires inspirantes et des initiatives innovantes. Vous entendrez des témoignages de dirigeants d'entreprises engagés en faveur de l'inclusion des personnes en situation de handicap, certains ayant eux-mêmes vécu une telle situation, et des salariés qui ont pu faire de leur différence une force. Ils partageront leurs expériences, leurs défis et les stratégies qu'ils ont mises en place pour créer des environnements de travail véritablement ouverts à tous. Bonjour Patrick, vous êtes directeur général de l'entreprise Rikiro SAS, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça, depuis deux ans.

  • Speaker #0

    Depuis deux ans, ok. Cette entreprise, vous l'avez créée en partant de rien ?

  • Speaker #1

    Oui, en partant de rien. C'est un peu un accident de la vie au départ, puisque mes parents avaient plusieurs entreprises, produits pétroliers, électroménagers, du gaz, et une petite affaire d'électricité. Et le 11 octobre 1974, mes parents ont été mis en faillite, et mon père a mis fin à ses jours ce jour-là. Donc on s'est retrouvé à la rue parce que c'était bien avant la génération tapis. A l'époque, ma maman n'était pas déclarée, il n'y avait pas de SCI, il n'y avait pas de CRL, c'était tout en nom personnel. Donc j'ai fait pendant deux ans un abandon d'actifs pour se libérer et en encore payer pendant dix ans les dettes que mes parents avaient. et immédiatement j'ai recréé parallèlement à cela l'entreprise Rikero qu'on a aujourd'hui.

  • Speaker #0

    D'accord, vous aviez quel âge ?

  • Speaker #1

    18 ans. 18 ans. Alors j'avais un coup de chance, j'ai toujours eu beaucoup de chance dans la vie, puisque 1974 c'est l'année de l'élection de Valéry Giscard d'Estaing, le 27 mai, et une des premières mesures de Giscard d'Estaing c'était de mettre la majorité à 18 ans et non pas à 21. comme il en était à ce moment-là. Et ça m'a grandement facilité la vie, parce que sinon, pour être à son compte, à l'époque, avec la majorité à 21 ans, il aurait fallu avoir une tonne d'administratifs, de dérogations, etc. Donc là, de ce fait, j'étais 18 ans. J'étais majeur depuis trois mois, j'avais le permis depuis trois mois. Donc tout baignait, tout allait bien, entre guillemets.

  • Speaker #0

    Alors moi, ce qui m'interpelle, c'est qu'à 18 ans, pour moi, on sort de l'adolescence. Et là, vous avez 18 ans, vous reprenez une entreprise familiale parce que vous devez, de ce que je comprends, être charge de famille.

  • Speaker #1

    Oui. Alors, j'étais prêt quand même parce que depuis 13 ans, dès qu'il y avait deux jours de vacances scolaires, j'étais sur les chantiers. Donc ça, au niveau, j'étais prêt. Je venais de terminer à l'époque un BEP d'électricité. C'était extrêmement important à l'époque parce que... Mon départ, je voulais être musicien. Vous le savez d'ailleurs, parce que j'ai eu l'occasion de le dire. Musicien dans l'armée, parce que j'étais à l'harmonie du Gilles. À l'époque, personne qui avait une appétence au niveau de la musique, on avait la possibilité de réintégrer l'école de musique et le conservatoire de Lyon. À l'époque, il n'y avait pas d'école de musique. J'étais d'ailleurs le premier à... cofondé une école de musique à Lugines grâce à l'époque au président du conseil général de la Savoie qui s'appelait Michel Barnier. Je ne sais pas ce qu'il est devenu depuis, mais voilà. Donc, la musique dans la famille, on ne savait pas du tout ce qu'on pouvait faire avec la musique. Je n'ai vu personne qui était musicien chez moi. Et mon père m'a dit, oui, la musique, si tu veux t'amuser, d'accord, mais enfin, moi, je suis inscrit pour aller en électricité. Et à l'époque, c'est un peu dommage que ça s'est un peu perdu, c'était un concours de maths. Donc sur l'ensemble du lycée, il ne prenait que 11 personnes. Donc j'ai fait le job parce que j'ai une éducation assez stricte pour faire le job quand on doit faire le job. Je me disais, de toute façon, sur 11, il y a peu de chances que je sois pris. Et puis je devais être 11e, je ne sais pas. Donc du coup, j'ai été pris. Finalement, ça m'a bien plu, je n'ai aucun regret. et j'ai pu faire les deux, donc la musique et l'électricité. Par contre, j'ai énormément travaillé après, parce qu'au niveau gestion, au niveau relations, etc., j'avais tout à apprendre. Mais le 74, c'est une année charnière, intéressante. C'est une année entre deux chocs pétroliers, 73 et 79. Le choc pétrolier de 73... qui vient d'abord de la guerre du Kippour du 6 octobre 1973. On retrouve malheureusement aujourd'hui la même configuration. Ce sont les Égyptiens et les Syriens qui avaient envahi le mont du Sinaï et du Golan sur Israël. Israël avait répliqué très violemment et ça avait fait vraiment embraser le Moyen-Orient et créer le PEP, le pays producteur du pétrole. Et ça avait fait exploser vraiment à 300% le prix de l'essence. Donc Pompidou à l'époque voulait une indépendance énergétique, c'est pour ça qu'on a lancé le programme du nucléaire. Programme du nucléaire, on a vu l'émergence du chauffage électrique, mais il n'y avait pas d'école à l'époque, ça venait de partir. Donc c'est le VDF qui avait été formé très rapidement, qui avait ouvert ses écoles à un nombre d'entreprises, d'artisans, etc. qui voulait rentrer dans cette filière là. Donc j'étais un des premiers à avoir une formation de chauffage électrique, de ventilation, d'isolation, ainsi de suite. Donc on a pu démarrer, comme on a pu démarrer après très rapidement, j'étais un des premiers aussi à faire du ce qu'on appelait du précâblage informatique dans les lycées et le centre des impôts qui était un des clients principaux clients chez nous pendant 20 ans parce que j'étais précurseur au niveau de l'informatique.

  • Speaker #0

    Donc en fait, votre départ en tant qu'entrepreneur, c'est par le biais d'une faillite, celle de vos mouvements, et votre réussite, c'est par le biais d'opportunités que vous avez su saisir et qui étaient présentes au bon moment pour vous.

  • Speaker #1

    C'est jamais un élément, ni une faillite, ni une faillite. Après réussite, je fais ma vie d'entrepreneur, moi réussite, tout est relatif. J'avais l'ambition d'y arriver. J'ai toujours travaillé, j'ai fait une école de commerce, après j'ai fait le SJDB, l'école supérieure de jeunes dirigeants du bâtiment, dont j'ai la fierté d'avoir ramené en Savoie lorsque j'étais président du BTP Savoie, donc je le fais d'ailleurs à le salarié qui a repris mon entreprise, et ça c'est tout sauf la technique. C'est une formation en alternance exigeante. parce que ce sont des gens qui sont déjà très impliqués dans une entreprise, exigeantes parce que ce n'est pas leur métier. Quand on se met à son compte, généralement, que ce soit dans le bâtiment ou dans le commerce, par exemple, un charcutier ne va pas se mettre à son compte par la passion du droit fiscal ou de la comptabilité. Mais on ne peut pas l'échapper, on ne pourra jamais échapper à cet environnement-là. Donc, ce n'est pas du tout sa formation. Moi, j'ai plutôt une formation de matheux. Et lorsqu'on parle d'économie, de gestion, etc., c'est un peu très, très, très, très loin. Voilà. Donc, c'est pour ça que tout de suite, ma volonté, c'était peu prétentieux, mais c'était vraiment de tout comprendre et de tout savoir.

  • Speaker #0

    D'accord. Et donc, cette entreprise, vous la créez à 18 ans.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Donc, est-ce que vous pouvez me faire une sorte de récapitulatrice de comment elle a évolué ?

  • Speaker #1

    Comment elle est évoluée ? Le sillon, ce sont mes parents qui l'ont tracé. Moi, quand vous avez 15 ans, vous avez les huissiers à la maison, etc., on se doute que ce n'est pas l'image qu'on peut rêver d'être entrepreneur. Une entreprise, c'est une façade. Qu'est-ce qu'il y a derrière la façade ? Mes parents manquaient beaucoup d'argent, avaient énormément de dettes. Donc moi, je voulais retraire. avec tête de ma maman, dont je remâche parce qu'on a travaillé 25 ans ensemble. Donc, ce n'est pas une course au chiffre d'affaires, c'est une entreprise en attachant le mot qualité à cette entreprise. Parce qu'en 1974, quand vous partez d'une faillite, vous avez une étiquette dans le dos qui était beaucoup plus grande qu'aujourd'hui. Et ce qui est important, ce mot qualité, il est encore d'actualité aujourd'hui. On peut refuser du travail parce qu'on a un concurrent qui est moins cher. On dit aux clients, si vous voulez vraiment quelqu'un de moins cher, il ne faut pas venir chez nous. Par contre, si vous voulez un travail de qualité, c'est à vous de choisir. Vous pouvez venir chez nous. On aura aussi l'assurance de la péremité. J'ai créé un service maintenance parce qu'une fois que le travail est terminé, et que les clients ont besoin de nous, il faut savoir revenir rapidement et dépanner rapidement. Ensuite, en matière de trésorerie, tout de suite, je me suis dit, mais... S'il faut faire toute une vie professionnelle et avoir les huissiers à la maison sans arrêt, c'est pas possible, c'est pas imaginable. Donc j'ai toujours une trésorerie très saine, d'ailleurs on a pas besoin des banquiers depuis... On a eu besoin des banquiers pendant les dix premières années, et là on vient de fêter les 50 ans, je dirais depuis 40 ans, entre guillemets, on a pas besoin des banquiers. Alors je sais pas à quoi c'est dû, je sens très rigoureuse, on dit que j'ai mauvais caractère, mais... On confond mauvais caractère avec rigueur. Donc c'est une entreprise saine. D'accord. Je complète, vous avez raison de poser cette question. Je voulais me faire respecter, parce que mes parents n'étaient pas respectés. Mais pour respecter les gens, il faut être soi-même respectueux. J'ai toujours respecté mes salariés. Je peux vous donner un exemple. Mon père, comme souvent, ce n'était pas propre à mes parents, mais... Il faisait les paies quand l'argent rentrait, c'est-à-dire entre le 2 et le 31. Et déjà à 15 ans, je trouvais que ce n'était pas normal, parce que les gens, s'ils attendent la paie le 6, nous ça fait 50 ans qu'on fait la paie le 6, ce n'est pas le 7, ce n'est pas le 8. C'est de la responsabilité de l'entrepreneur de se débrouiller avec son banquier, avec une gestion justement très très rigoureuse pour que la paie soit assurée le 6. Chez Rikero, on a toujours la devise... C'est de payer ce qu'on doit. C'est pareil à l'égard des salariés. Un salarié qui est méritant, d'abord, il faut le payer correctement. Ensuite, il faut le payer d'une manière rigoureuse. C'est-à-dire, si c'est le 6, c'est le 6. Ce n'est pas le 16, ce n'est pas le 8. Voilà. Donc ça, j'étais très, très allergique à ça, à ce qu'on respecte ces conditions-là.

  • Speaker #0

    D'accord. Donc là, vous êtes un entrepreneur engagé, que ce soit au niveau de votre entreprise et de ce que je comprends de vos salariés. La entreprise n'a fait que prospérer, je suppose.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Et puis un jour, il y a la maladie. Est-ce que vous pouvez me parler de ça ? Comment ça s'est passé ?

  • Speaker #1

    La maladie ? Il y a eu plusieurs maladies. Donc je suis porteur d'un DAI, c'est-à-dire c'est un défibrillateur autonome interne. Donc c'est-à-dire que j'ai fait trois infarctus déjà. Et donc j'ai eu un des premiers implantations au CHU de Grenoble. d'un ordinateur global qui me gère le cœur. Ça, ça ne m'a jamais inquiété. Il paraît que 50% des porteurs, je crois qu'il y en a une centaine maintenant sur toute la région, il n'y en a pas tant que ça, on confond souvent avec un best-maker. Ce n'est pas un best-maker, c'est vraiment un ordinateur qui gère tout le cœur. 50% des gens ont été déprimés suite à ça. Moi, honnêtement, je n'ai jamais eu le coup. temps d'être déprimé c'est pour ça peut-être que j'ai pas été déprimé mais ça demande quand même un suivi médical etc donc on est je suis souvent au CHU de grenoble pour avoir ce suivi là ensuite c'est en début 2018 donc j'étais assez fatigué Mais c'est vrai que je n'ai pas trop prêté attention parce que là j'avais une info du ton qui était chargée. J'étais président de la CPME comme je suis encore aujourd'hui. Je venais de relancer le BTP en Savoie, il n'y avait plus de fédération homologuée. J'étais vice-président de la CCI et encore chef d'entreprise. Donc ça fait des journées assez longues. C'était 7 jours sur 7. J'ai fait 7 jours sur 7 pendant plus de 40 ans. Bon, je ne me plains pas parce que ça me convenait, il n'y a pas de souci. J'avais de l'énergie pour faire cela. Et puis un jour, j'ai commencé à perdre beaucoup de son. Donc j'ai été voir mon généraliste, qui est commencé à me traiter sur ce sujet-là. Et je trouvais quand même un peu bizarre qu'il n'aille pas plus loin. Et ensuite, il a commencé par me dire que c'était le stress de l'entrepreneur. Alors là, je ne l'ai pas cru du tout, parce que, comme je lui disais, je stresse les autres. Mais moi, personnellement, je ne suis pas vraiment stressé. C'est vrai. Donc j'ai été directement à Medipol, donc là on a fait une coloscopie pour voir ce qu'il en était au niveau, c'est un cancer du colon et du rectum, et là j'étais quand même surpris parce que j'étais en salle de réveil, et je me souviens très bien que le médecin passait de lit en lit, bonjour monsieur Durand, vous ça va, etc. Bonjour monsieur Riquéraud, vous avez un cancer avancé, donc il faudra venir vous voir assez rapidement, il faudra arrêter votre activité. Bonjour M. Dupont, vous ça va ? Je me suis demandé s'il m'avait vraiment parlé. Je me suis dit, j'ai rêvé ou pas ? Parce que j'étais moitié encore dans le sommeil. Et là, je me suis vraiment posé la question, en me disant, mais qu'est-ce qu'il m'a dit finalement ? Voilà, puis ensuite, ben non, c'était bien une réalité. Donc je ne vous cache pas que la première réaction, comme tout cancer, c'était quand même un choc important, moralement, etc. Mais je me... Je me suis vite repris parce que j'ai eu tellement de problèmes dans ma vie que quand vraiment il y a un problème grave, une intensité importante, je suis très serein et pragmatique.

  • Speaker #0

    Donc là, c'est le choc de l'annonce. Qu'est-ce qu'on ressent ? Quand on nous annonce ça, parce que vous n'avez pas juste la responsabilité de votre santé, vous avez aussi la responsabilité de toute une entreprise.

  • Speaker #1

    Bien sûr. Donc, quel est le pourcentage ? Déjà, l'entreprise était déjà bien structurée. Elle a fait la responsabilité des structures comme la CPME ou le BTP. J'ai commencé la fédération le 17 décembre 2017. Là, c'était début 2018, donc c'était naissant. Donc je me suis dit je veux voir ce qu'il en est, si je peux continuer ou pas, si je ne suis pas en état de continuer, je vais démissionner. Ça c'est clair, il faut assurer la pérennité des structures dont on est responsable, tout comme dans l'entreprise. L'entreprise était structurée mais c'était quand même assez difficile parce que quand vous êtes là depuis 40 ans, même si c'est structuré, on a l'habitude que vous soyez là. Vous êtes le capitaine du navire. Oui, oui, oui. C'est un peu différent avec les autres structures, puisque la CPME ou les structures comme la CPME, finalement, vous changez de président tous les 4-5 ans. Donc, on est habitué. Il y a des permanents qui font quand même bien tourner la boîte. C'est complètement différent d'une entreprise. Là, il y a un manque physique d'abord, parce que moi, j'ai toujours eu l'habitude d'aller dire bonjour. au personnel, y compris le matin, etc. Donc là, il y a eu, de la part du personnel, une très grande inquiétude. Et là, on a joué la transparence tout de suite. On a dit, bon, voilà, il y a un cancer qui arrive, il faudra le traiter, il faudra prendre les choses. Je vous tiendrai informés de ce qu'il en est. Finalement, je n'ai pas trop pensé à moi. C'est pas... Je raisonnais dans la tête pour dire, bon, combien de temps ? Je voulais tout savoir de la part des médecins. Et je leur rends hommage parce qu'aujourd'hui, ils ont un discours qui est quand même... très clair, avec des explications. Moi je veux comprendre, je veux savoir. Et là ils ont été très très clairs. Bon oui, il y avait un risque de décès évidemment. Parce que c'était en plus un cancer avancé mais pas de métastase. Donc ça, c'est le premier point qui m'a rassuré. Après j'ai dit, ben avec la galère, qu'est-ce que vous voulez faire ? Vous êtes au milieu de la mer, est-ce que vous ramez ou est-ce que vous coulez ? On va choisir de ramer. Puis d'un coup on verra bien après. Voilà.

  • Speaker #0

    Vous suivez le courant ?

  • Speaker #1

    de suivre le courant.

  • Speaker #0

    Vous avez quand même stressé un peu, parce que jusqu'à... Monsieur qui ne stresse pas à ce moment-là, vous avez stressé quand même.

  • Speaker #1

    Oui, mais c'est un stress contenu, pour dire avant tout quelles sont les priorités à donner, vous êtes pris dans un mouvance quand même, où franchement, vous n'avez pas trop le temps de penser à ça. Il y a eu des moments de bas. Il est maman au moral très très très compliqué. Quand j'ai appelé mon épouse, je ne pouvais pas lui dire grand chose, mais elle a compris tout de suite. Mais je ne me suis pas effondré. Je ne peux pas dire que je me suis effondré, parce que je me suis dit, c'est comme ça, c'est comme ça. Il faut être cartésien, pragmatique, et il faut retosser les manches et voir ce qu'on peut faire. Vous savez, quand on... Mon père, ce qui s'est passé avec mon père à 18 ans, j'ai eu d'autres problèmes aussi familiaux très très graves, qui étaient plus importants qu'un cancer. Donc derrière, il faut raisonner d'une manière concrète, pas à pas, en disant, voilà, il y a une première étape pour faire de la chimio, j'ai eu 60 chimio-thérapies, 60 chimio et j'ai eu 35 radiothérapies. Donc là par contre, j'étais surpris parce qu'au début, il me dit, vous savez, il faut surtout prendre un DSM. J'ai trouvé que j'étais toujours plus malin que les autres. J'ai dit non, quand même, je suis capable de prendre ma voiture pour descendre, pour faire 50 kilomètres. Je l'ai fait deux fois. Et la troisième fois, j'étais raide mort sur le lit. Mais la difficulté dans tout ça, c'est quand même la fatigue. Et là, vous ne pouvez pas lutter contre la fatigue. Je vois la chimiothérapie, ce qui est compliqué. Il faut prendre en compte ça dans le raisonnement mental. C'est-à-dire que vous faites une chimio. vous en faites une deuxième, vous en faites une troisième, une quatrième, et plus ça va, plus vous êtes fatigué, parce que vous n'avez pas le temps de récupérer, qu'il y a la suivante qui arrive, et entre les deux, on alternait entre une radiothérapie, voilà, là, au bout de trois mois, j'étais, je rentrais, alors là, je ne faisais plus rien, absolument plus rien, ni de reprise, ni ailleurs, je rentrais, je me longeais sur le lit, et je mangeais un tout petit peu, et j'attendais la suivante, parce que j'étais incapable de faire autre chose, ça, c'était... je pense, mentalement et physiquement, mais mentalement c'était très très compliqué parce que vous vous dites, bon sang, je suis réduit à à ne plus rien faire. Ça pour moi c'était vraiment... Vraiment dramatique.

  • Speaker #0

    Vous passez de multiples activités, à travailler 7 jours sur 7, à je ne peux plus rien faire.

  • Speaker #1

    Vous tombez du 7ème étage et vous vous dites, je suis par terre et il y a un poids dessus qui m'empêche de me relever.

  • Speaker #0

    Vous avez perdu espoir à un moment ou pas ?

  • Speaker #1

    Non, jamais. Non, non, bien sûr qu'on pense à vos décès. On se dit, si ça arrive, ça arrive. En attendant que ça arrive, on va faire le maximum. Ok. Voilà. Par contre, il y a eu des étapes. J'ai eu deux opérations. Donc, une opération extrêmement technique qui a duré huit heures, qui était assez compliquée d'après le médecin. Là, j'ai eu une poche pendant trois mois. Alors, au bout de trois mois, j'étais super content et confiant qu'on m'enlève la poche parce que c'est très, très contraignant. Et là, j'étais un peu la fleur au fusil, comme en 2014. Et là, j'ai eu beaucoup plus mal que la première opération. D'accord. Donc là, j'étais quand même surpris. Et j'étais un peu en colère parce que je me suis dit, bon, finalement, après cette opération, je vais pouvoir redémarrer vraiment à 100%. Puis non, c'était encore... Oui, il a fallu un an quand même, un an complet pour reprendre un peu. Et il y a eu des moments de fatigue. qu'il ne faut pas négliger, il faut s'organiser des moments de repos. Et encore aujourd'hui, il y a des moments où il faut que je me repose. Il faut que je me repose, voilà, je prends de la lecture, je lis. Et puis, il ne faut pas lutter contre la fatigue, ce n'est pas possible.

  • Speaker #0

    Donc aujourd'hui, là, vous avez repris plus ou moins les activités ?

  • Speaker #1

    Oui, depuis longtemps quand même.

  • Speaker #0

    Ok. Ce que j'en déduis, c'est que trois infarctus, c'est ça ? Oui. Un cancer ?

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Vous êtes une sorte de survivant ?

  • Speaker #1

    Euh... ouais peut-être, mais enfin il y a des tas de gens qui ont... beaucoup de survivants, hein, dans tant que...

  • Speaker #0

    Je dis pas qu'il n'y en aurait pas beaucoup, mais je pense que vous en êtes un,

  • Speaker #1

    quand même.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pensez que le fait d'avoir cet état d'esprit de battant, d'être optimiste, de ne pas trop stresser, de croire en la vie, ça a joué quelque chose sur votre guérison ?

  • Speaker #1

    Alors si j'en réfère aux médecins, ils disent que le mental est... 50% de la réussite. Ce que je ne crois pas, mais je pense que ça fait beaucoup. Je pense que ça fait énormément. Ensuite, c'est quelque chose qu'on ne peut pas trop communiquer. Quand vous avez une grippe, quand vous avez quelqu'un dans la rue, vous dites, il a la grippe, le pauvre a la grippe, vraiment, il n'a pas de bol. Quand vous avez un cancer comme ça, etc., vous ne pouvez même pas l'expliquer parce que ça dépasse un peu la... le raisonnement lambda qu'on peut avoir tous les jours. Ou alors vous avez des réactions complètement diverses, quelquefois très surprenantes, c'est vraiment difficile. Même pour ma famille, on n'en parle pas trop, parce que je ne veux pas les embêter avec ça. Mais je ne peux pas dire que j'étais vraiment perturbé par ça, j'ai une volonté de m'en sortir. Je vois plusieurs fois, j'étais voir le personnel le matin pour leur dire laissez-moi encore un mois, ça ira mieux dans un mois. Voilà et puis il faut dire quand même on est redevable par rapport à la médecine parce que la médecine a fait énormément énormément de progrès aujourd'hui. On a des chirurgiens qui sont, et des cancérologues qui sont vraiment impressionnants. Je peux vous faire une confidence quand même, ça c'est mon épouse, je dis souvent. J'avais mon cancérologue qui était plus déprimé que moi. Est-ce que c'est vrai ? Plusieurs fois, il m'a dit, vous êtes dans un état... Qu'est-ce que vous allez faire ? On ne peut pas dire ça tous les cinq minutes ou tout au long de la journée. Il faut voir ce qu'il faut faire. Il y a la fatigue, il faut se reposer. Moi, vous savez, dans l'électricité, il y a un chapitre important qui est le dépannage, le pas à pas. C'est-à-dire que si vous avez tout un bâtiment qui est en panne, vous n'allez pas enlever tous les fils tout de suite. tous les fusibles, il faut faire pas à pas. Voilà, qu'est-ce qu'on peut faire ? Ça, ça m'a servi toute ma vie. Quand j'ai repris l'entreprise, il y avait des tas de choses qu'ils ne connaissaient pas au niveau compta, etc. Donc, j'ai repris pas à pas. Voilà, ce chapitre-là, ce qui va, ce qui ne va pas. Ce chapitre-là, ce qui va, ce qui ne va pas. C'est important. On ne peut pas tout faire en même temps, mais il faut donner vraiment les priorités à donner. La priorité, à un bon moment donné, c'était que je me repose. Donc, je me suis reposé.

  • Speaker #0

    En fait, moi, ce que j'en déduis, c'est que cette maladie, ça vous a appris à vous écouter, finalement.

  • Speaker #1

    Oui. Oui, oui, oui, ça m'a appris. Oui, oui, oui, vous avez parfaitement raison. J'ai pris conscience que j'ai pris de l'âge quand même aussi, parce qu'à l'époque j'avais 63 ans. Donc, oui, oui, c'est très, très question pertinente, parce que finalement, on se dit, on se sent un peu quand même indispensable, il faut bien dire comme on est. Et on se dit, un jour, ça finira, forcément. Et puis on se dit, finalement, j'ai passé un an quand même entre pointillés, ça peut se faire aussi sans la maladie, c'est clair. C'est-à-dire qu'à un moment donné, on se dit, finalement, je peux quand même prendre un peu de vacances, ce que je ne m'étais jamais autorisé à faire pendant une quarantaine d'années. À tort d'ailleurs, ce serait maintenant, je prendrais beaucoup plus de vacances.

  • Speaker #0

    Vous allez en prendre beaucoup plus.

  • Speaker #1

    Oui, mais la nature, il se passe par du vide. Non, mais il faut... apprendre à se reposer. Quand on est chef d'entreprise, on ne peut pas dire, c'est 18h du soir, je ferme la lumière, je ferme la clé, puis je m'en vais. Les soucis vous perturbent pendant les 24 heures d'une journée. Je vous fais une confidence aussi, quand j'ai acheté mon premier camion, je n'ai pas dormi pendant 6 mois, parce que c'était mon premier gros crédit. Puis ensuite, j'ai fait beaucoup de crédits. Un soir, je me suis dit, mais je suis complètement nul parce que je ne peux pas penser à tous les crédits. Donc, finalement, autant que je dorme comme il faut. Et le lendemain, je serai frais dispo pour attaquer de front tous les problèmes de l'entreprise. Du coup, je dors bien.

  • Speaker #0

    D'accord. C'est la question que j'allais vous poser. Est-ce que aujourd'hui,

  • Speaker #1

    vous dormez bien ? Oui, aujourd'hui, je dors bien, très bien.

  • Speaker #0

    D'accord. Pour conclure, est-ce que vous auriez un mot à dire ou une idée à faire passer ? à tous les entrepreneurs qui traversent ce genre de difficultés aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Alors, peut-être une maxime de Nietzsche qui disait...

  • Speaker #0

    Tout ce qui ne tue pas rend plus fort.

  • Speaker #1

    J'y ai pensé aussi. C'est un peu les portes ouvertes,

  • Speaker #0

    mais c'est la vraie réalité. Voilà, donc après c'est une résilience, une résilience positive. Je pense aussi à une autre maxime d'André Marot qui disait Une vie ne vaut rien, mais rien ne vaut la vie. Je pense que tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir. Il ne faut jamais baisser les bras. Que ce soit dans la dureté de la vie d'une entreprise ou la santé, alors évidemment la santé c'est quand même prioritaire, c'est clair. Ensuite il faut savoir s'enturer, il faut savoir, comme je disais, à un moment donné gérer sa propre vie, ce qui n'est pas évident quand on est à fond dedans, quand on est à fond, on crée, on développe. Moi je suis une entreprise, c'est quelque chose, mais quand on crée, on développe, c'est quand même très difficile. On est passionné par notre métier, donc on n'a pas de mérite à ce niveau-là. Puis on est majeur, c'est sympa, on peut faire autre chose. Mais ce n'est pas vraiment lié à l'argent. Quand on parle de sa propre entreprise, il y a beaucoup de choses qui brillent. Mais derrière, c'est quand même la passion de son métier. Mais il ne faut pas que ça prenne sur la santé de votre vie. Une vie mérite de vivre pleinement. C'est clair. La vie est belle. Je pense toujours qu'il y a beaucoup plus pire que nous.

  • Speaker #1

    En tout cas, je vous remercie beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci à vous, il n'y a pas de soucis.

  • Speaker #1

    Merci à tous pour votre écoute. Le podcast Inclusive est soutenu par la GFIT et les réseaux sociaux de l'Ordre de l'Ordre. À la semaine prochaine pour un nouvel épisode.

Description

Comment faire face à la maladie lorsque l'on est chef d'entreprise, pilier de sa famille et responsable d'une équipe ? Gérer un diagnostic de cancer tout en soutenant ses proches et en assurant la pérennité de son entreprise, peut-être un défi d'une ampleur insoupçonnée.

Après avoir traversé 3 infarctus, Patrick, dirigeant de l'entreprise Richiero SA, a réussi à vaincre le cancer tout en continuant à veiller sur son entreprise et sur ses équipes. Il a trouvé la force de concilier vie personnelle et responsabilités professionnelles et faire face à l'adversité. Il raconte, ses peurs, ses victoires et l'importance de l'entourage pour surmonter de tels défis.



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à tous et bienvenue sur le podcast Inclusif. Aujourd'hui, nous abordons un sujet fort et intime, comment faire face à la maladie lorsque l'on est chef d'entreprise, pilier de sa famille et responsable d'une équipe. Gérer un diagnostic de cancer tout en soutenant ses proches et en assurant la pérennité de son entreprise peut être un défi d'une ampleur insoupçonnée. Pour nous en parler, nous recevons aujourd'hui M. Rikiro, dirigeant de l'entreprise d'électricité Rikiro-Essa. Après avoir traversé trois infarctus, il a réussi à vaincre le cancer tout en continuant à veiller sur son entreprise et ses équipes. Dans cet épisode, il partagera avec nous comment il a trouvé la force de concilier vie personnelle et responsabilité professionnelle et faire face à l'adversité. Il nous racontera ses peurs, ses victoires et l'importance de l'entourage pour soumonter de tels défis. Je suis Shirazan, dans nos épisodes où nous tendons lumière des histoires inspirantes et des initiatives innovantes. Vous entendrez des témoignages de dirigeants d'entreprises engagés en faveur de l'inclusion des personnes en situation de handicap, certains ayant eux-mêmes vécu une telle situation, et des salariés qui ont pu faire de leur différence une force. Ils partageront leurs expériences, leurs défis et les stratégies qu'ils ont mises en place pour créer des environnements de travail véritablement ouverts à tous. Bonjour Patrick, vous êtes directeur général de l'entreprise Rikiro SAS, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça, depuis deux ans.

  • Speaker #0

    Depuis deux ans, ok. Cette entreprise, vous l'avez créée en partant de rien ?

  • Speaker #1

    Oui, en partant de rien. C'est un peu un accident de la vie au départ, puisque mes parents avaient plusieurs entreprises, produits pétroliers, électroménagers, du gaz, et une petite affaire d'électricité. Et le 11 octobre 1974, mes parents ont été mis en faillite, et mon père a mis fin à ses jours ce jour-là. Donc on s'est retrouvé à la rue parce que c'était bien avant la génération tapis. A l'époque, ma maman n'était pas déclarée, il n'y avait pas de SCI, il n'y avait pas de CRL, c'était tout en nom personnel. Donc j'ai fait pendant deux ans un abandon d'actifs pour se libérer et en encore payer pendant dix ans les dettes que mes parents avaient. et immédiatement j'ai recréé parallèlement à cela l'entreprise Rikero qu'on a aujourd'hui.

  • Speaker #0

    D'accord, vous aviez quel âge ?

  • Speaker #1

    18 ans. 18 ans. Alors j'avais un coup de chance, j'ai toujours eu beaucoup de chance dans la vie, puisque 1974 c'est l'année de l'élection de Valéry Giscard d'Estaing, le 27 mai, et une des premières mesures de Giscard d'Estaing c'était de mettre la majorité à 18 ans et non pas à 21. comme il en était à ce moment-là. Et ça m'a grandement facilité la vie, parce que sinon, pour être à son compte, à l'époque, avec la majorité à 21 ans, il aurait fallu avoir une tonne d'administratifs, de dérogations, etc. Donc là, de ce fait, j'étais 18 ans. J'étais majeur depuis trois mois, j'avais le permis depuis trois mois. Donc tout baignait, tout allait bien, entre guillemets.

  • Speaker #0

    Alors moi, ce qui m'interpelle, c'est qu'à 18 ans, pour moi, on sort de l'adolescence. Et là, vous avez 18 ans, vous reprenez une entreprise familiale parce que vous devez, de ce que je comprends, être charge de famille.

  • Speaker #1

    Oui. Alors, j'étais prêt quand même parce que depuis 13 ans, dès qu'il y avait deux jours de vacances scolaires, j'étais sur les chantiers. Donc ça, au niveau, j'étais prêt. Je venais de terminer à l'époque un BEP d'électricité. C'était extrêmement important à l'époque parce que... Mon départ, je voulais être musicien. Vous le savez d'ailleurs, parce que j'ai eu l'occasion de le dire. Musicien dans l'armée, parce que j'étais à l'harmonie du Gilles. À l'époque, personne qui avait une appétence au niveau de la musique, on avait la possibilité de réintégrer l'école de musique et le conservatoire de Lyon. À l'époque, il n'y avait pas d'école de musique. J'étais d'ailleurs le premier à... cofondé une école de musique à Lugines grâce à l'époque au président du conseil général de la Savoie qui s'appelait Michel Barnier. Je ne sais pas ce qu'il est devenu depuis, mais voilà. Donc, la musique dans la famille, on ne savait pas du tout ce qu'on pouvait faire avec la musique. Je n'ai vu personne qui était musicien chez moi. Et mon père m'a dit, oui, la musique, si tu veux t'amuser, d'accord, mais enfin, moi, je suis inscrit pour aller en électricité. Et à l'époque, c'est un peu dommage que ça s'est un peu perdu, c'était un concours de maths. Donc sur l'ensemble du lycée, il ne prenait que 11 personnes. Donc j'ai fait le job parce que j'ai une éducation assez stricte pour faire le job quand on doit faire le job. Je me disais, de toute façon, sur 11, il y a peu de chances que je sois pris. Et puis je devais être 11e, je ne sais pas. Donc du coup, j'ai été pris. Finalement, ça m'a bien plu, je n'ai aucun regret. et j'ai pu faire les deux, donc la musique et l'électricité. Par contre, j'ai énormément travaillé après, parce qu'au niveau gestion, au niveau relations, etc., j'avais tout à apprendre. Mais le 74, c'est une année charnière, intéressante. C'est une année entre deux chocs pétroliers, 73 et 79. Le choc pétrolier de 73... qui vient d'abord de la guerre du Kippour du 6 octobre 1973. On retrouve malheureusement aujourd'hui la même configuration. Ce sont les Égyptiens et les Syriens qui avaient envahi le mont du Sinaï et du Golan sur Israël. Israël avait répliqué très violemment et ça avait fait vraiment embraser le Moyen-Orient et créer le PEP, le pays producteur du pétrole. Et ça avait fait exploser vraiment à 300% le prix de l'essence. Donc Pompidou à l'époque voulait une indépendance énergétique, c'est pour ça qu'on a lancé le programme du nucléaire. Programme du nucléaire, on a vu l'émergence du chauffage électrique, mais il n'y avait pas d'école à l'époque, ça venait de partir. Donc c'est le VDF qui avait été formé très rapidement, qui avait ouvert ses écoles à un nombre d'entreprises, d'artisans, etc. qui voulait rentrer dans cette filière là. Donc j'étais un des premiers à avoir une formation de chauffage électrique, de ventilation, d'isolation, ainsi de suite. Donc on a pu démarrer, comme on a pu démarrer après très rapidement, j'étais un des premiers aussi à faire du ce qu'on appelait du précâblage informatique dans les lycées et le centre des impôts qui était un des clients principaux clients chez nous pendant 20 ans parce que j'étais précurseur au niveau de l'informatique.

  • Speaker #0

    Donc en fait, votre départ en tant qu'entrepreneur, c'est par le biais d'une faillite, celle de vos mouvements, et votre réussite, c'est par le biais d'opportunités que vous avez su saisir et qui étaient présentes au bon moment pour vous.

  • Speaker #1

    C'est jamais un élément, ni une faillite, ni une faillite. Après réussite, je fais ma vie d'entrepreneur, moi réussite, tout est relatif. J'avais l'ambition d'y arriver. J'ai toujours travaillé, j'ai fait une école de commerce, après j'ai fait le SJDB, l'école supérieure de jeunes dirigeants du bâtiment, dont j'ai la fierté d'avoir ramené en Savoie lorsque j'étais président du BTP Savoie, donc je le fais d'ailleurs à le salarié qui a repris mon entreprise, et ça c'est tout sauf la technique. C'est une formation en alternance exigeante. parce que ce sont des gens qui sont déjà très impliqués dans une entreprise, exigeantes parce que ce n'est pas leur métier. Quand on se met à son compte, généralement, que ce soit dans le bâtiment ou dans le commerce, par exemple, un charcutier ne va pas se mettre à son compte par la passion du droit fiscal ou de la comptabilité. Mais on ne peut pas l'échapper, on ne pourra jamais échapper à cet environnement-là. Donc, ce n'est pas du tout sa formation. Moi, j'ai plutôt une formation de matheux. Et lorsqu'on parle d'économie, de gestion, etc., c'est un peu très, très, très, très loin. Voilà. Donc, c'est pour ça que tout de suite, ma volonté, c'était peu prétentieux, mais c'était vraiment de tout comprendre et de tout savoir.

  • Speaker #0

    D'accord. Et donc, cette entreprise, vous la créez à 18 ans.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Donc, est-ce que vous pouvez me faire une sorte de récapitulatrice de comment elle a évolué ?

  • Speaker #1

    Comment elle est évoluée ? Le sillon, ce sont mes parents qui l'ont tracé. Moi, quand vous avez 15 ans, vous avez les huissiers à la maison, etc., on se doute que ce n'est pas l'image qu'on peut rêver d'être entrepreneur. Une entreprise, c'est une façade. Qu'est-ce qu'il y a derrière la façade ? Mes parents manquaient beaucoup d'argent, avaient énormément de dettes. Donc moi, je voulais retraire. avec tête de ma maman, dont je remâche parce qu'on a travaillé 25 ans ensemble. Donc, ce n'est pas une course au chiffre d'affaires, c'est une entreprise en attachant le mot qualité à cette entreprise. Parce qu'en 1974, quand vous partez d'une faillite, vous avez une étiquette dans le dos qui était beaucoup plus grande qu'aujourd'hui. Et ce qui est important, ce mot qualité, il est encore d'actualité aujourd'hui. On peut refuser du travail parce qu'on a un concurrent qui est moins cher. On dit aux clients, si vous voulez vraiment quelqu'un de moins cher, il ne faut pas venir chez nous. Par contre, si vous voulez un travail de qualité, c'est à vous de choisir. Vous pouvez venir chez nous. On aura aussi l'assurance de la péremité. J'ai créé un service maintenance parce qu'une fois que le travail est terminé, et que les clients ont besoin de nous, il faut savoir revenir rapidement et dépanner rapidement. Ensuite, en matière de trésorerie, tout de suite, je me suis dit, mais... S'il faut faire toute une vie professionnelle et avoir les huissiers à la maison sans arrêt, c'est pas possible, c'est pas imaginable. Donc j'ai toujours une trésorerie très saine, d'ailleurs on a pas besoin des banquiers depuis... On a eu besoin des banquiers pendant les dix premières années, et là on vient de fêter les 50 ans, je dirais depuis 40 ans, entre guillemets, on a pas besoin des banquiers. Alors je sais pas à quoi c'est dû, je sens très rigoureuse, on dit que j'ai mauvais caractère, mais... On confond mauvais caractère avec rigueur. Donc c'est une entreprise saine. D'accord. Je complète, vous avez raison de poser cette question. Je voulais me faire respecter, parce que mes parents n'étaient pas respectés. Mais pour respecter les gens, il faut être soi-même respectueux. J'ai toujours respecté mes salariés. Je peux vous donner un exemple. Mon père, comme souvent, ce n'était pas propre à mes parents, mais... Il faisait les paies quand l'argent rentrait, c'est-à-dire entre le 2 et le 31. Et déjà à 15 ans, je trouvais que ce n'était pas normal, parce que les gens, s'ils attendent la paie le 6, nous ça fait 50 ans qu'on fait la paie le 6, ce n'est pas le 7, ce n'est pas le 8. C'est de la responsabilité de l'entrepreneur de se débrouiller avec son banquier, avec une gestion justement très très rigoureuse pour que la paie soit assurée le 6. Chez Rikero, on a toujours la devise... C'est de payer ce qu'on doit. C'est pareil à l'égard des salariés. Un salarié qui est méritant, d'abord, il faut le payer correctement. Ensuite, il faut le payer d'une manière rigoureuse. C'est-à-dire, si c'est le 6, c'est le 6. Ce n'est pas le 16, ce n'est pas le 8. Voilà. Donc ça, j'étais très, très allergique à ça, à ce qu'on respecte ces conditions-là.

  • Speaker #0

    D'accord. Donc là, vous êtes un entrepreneur engagé, que ce soit au niveau de votre entreprise et de ce que je comprends de vos salariés. La entreprise n'a fait que prospérer, je suppose.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Et puis un jour, il y a la maladie. Est-ce que vous pouvez me parler de ça ? Comment ça s'est passé ?

  • Speaker #1

    La maladie ? Il y a eu plusieurs maladies. Donc je suis porteur d'un DAI, c'est-à-dire c'est un défibrillateur autonome interne. Donc c'est-à-dire que j'ai fait trois infarctus déjà. Et donc j'ai eu un des premiers implantations au CHU de Grenoble. d'un ordinateur global qui me gère le cœur. Ça, ça ne m'a jamais inquiété. Il paraît que 50% des porteurs, je crois qu'il y en a une centaine maintenant sur toute la région, il n'y en a pas tant que ça, on confond souvent avec un best-maker. Ce n'est pas un best-maker, c'est vraiment un ordinateur qui gère tout le cœur. 50% des gens ont été déprimés suite à ça. Moi, honnêtement, je n'ai jamais eu le coup. temps d'être déprimé c'est pour ça peut-être que j'ai pas été déprimé mais ça demande quand même un suivi médical etc donc on est je suis souvent au CHU de grenoble pour avoir ce suivi là ensuite c'est en début 2018 donc j'étais assez fatigué Mais c'est vrai que je n'ai pas trop prêté attention parce que là j'avais une info du ton qui était chargée. J'étais président de la CPME comme je suis encore aujourd'hui. Je venais de relancer le BTP en Savoie, il n'y avait plus de fédération homologuée. J'étais vice-président de la CCI et encore chef d'entreprise. Donc ça fait des journées assez longues. C'était 7 jours sur 7. J'ai fait 7 jours sur 7 pendant plus de 40 ans. Bon, je ne me plains pas parce que ça me convenait, il n'y a pas de souci. J'avais de l'énergie pour faire cela. Et puis un jour, j'ai commencé à perdre beaucoup de son. Donc j'ai été voir mon généraliste, qui est commencé à me traiter sur ce sujet-là. Et je trouvais quand même un peu bizarre qu'il n'aille pas plus loin. Et ensuite, il a commencé par me dire que c'était le stress de l'entrepreneur. Alors là, je ne l'ai pas cru du tout, parce que, comme je lui disais, je stresse les autres. Mais moi, personnellement, je ne suis pas vraiment stressé. C'est vrai. Donc j'ai été directement à Medipol, donc là on a fait une coloscopie pour voir ce qu'il en était au niveau, c'est un cancer du colon et du rectum, et là j'étais quand même surpris parce que j'étais en salle de réveil, et je me souviens très bien que le médecin passait de lit en lit, bonjour monsieur Durand, vous ça va, etc. Bonjour monsieur Riquéraud, vous avez un cancer avancé, donc il faudra venir vous voir assez rapidement, il faudra arrêter votre activité. Bonjour M. Dupont, vous ça va ? Je me suis demandé s'il m'avait vraiment parlé. Je me suis dit, j'ai rêvé ou pas ? Parce que j'étais moitié encore dans le sommeil. Et là, je me suis vraiment posé la question, en me disant, mais qu'est-ce qu'il m'a dit finalement ? Voilà, puis ensuite, ben non, c'était bien une réalité. Donc je ne vous cache pas que la première réaction, comme tout cancer, c'était quand même un choc important, moralement, etc. Mais je me... Je me suis vite repris parce que j'ai eu tellement de problèmes dans ma vie que quand vraiment il y a un problème grave, une intensité importante, je suis très serein et pragmatique.

  • Speaker #0

    Donc là, c'est le choc de l'annonce. Qu'est-ce qu'on ressent ? Quand on nous annonce ça, parce que vous n'avez pas juste la responsabilité de votre santé, vous avez aussi la responsabilité de toute une entreprise.

  • Speaker #1

    Bien sûr. Donc, quel est le pourcentage ? Déjà, l'entreprise était déjà bien structurée. Elle a fait la responsabilité des structures comme la CPME ou le BTP. J'ai commencé la fédération le 17 décembre 2017. Là, c'était début 2018, donc c'était naissant. Donc je me suis dit je veux voir ce qu'il en est, si je peux continuer ou pas, si je ne suis pas en état de continuer, je vais démissionner. Ça c'est clair, il faut assurer la pérennité des structures dont on est responsable, tout comme dans l'entreprise. L'entreprise était structurée mais c'était quand même assez difficile parce que quand vous êtes là depuis 40 ans, même si c'est structuré, on a l'habitude que vous soyez là. Vous êtes le capitaine du navire. Oui, oui, oui. C'est un peu différent avec les autres structures, puisque la CPME ou les structures comme la CPME, finalement, vous changez de président tous les 4-5 ans. Donc, on est habitué. Il y a des permanents qui font quand même bien tourner la boîte. C'est complètement différent d'une entreprise. Là, il y a un manque physique d'abord, parce que moi, j'ai toujours eu l'habitude d'aller dire bonjour. au personnel, y compris le matin, etc. Donc là, il y a eu, de la part du personnel, une très grande inquiétude. Et là, on a joué la transparence tout de suite. On a dit, bon, voilà, il y a un cancer qui arrive, il faudra le traiter, il faudra prendre les choses. Je vous tiendrai informés de ce qu'il en est. Finalement, je n'ai pas trop pensé à moi. C'est pas... Je raisonnais dans la tête pour dire, bon, combien de temps ? Je voulais tout savoir de la part des médecins. Et je leur rends hommage parce qu'aujourd'hui, ils ont un discours qui est quand même... très clair, avec des explications. Moi je veux comprendre, je veux savoir. Et là ils ont été très très clairs. Bon oui, il y avait un risque de décès évidemment. Parce que c'était en plus un cancer avancé mais pas de métastase. Donc ça, c'est le premier point qui m'a rassuré. Après j'ai dit, ben avec la galère, qu'est-ce que vous voulez faire ? Vous êtes au milieu de la mer, est-ce que vous ramez ou est-ce que vous coulez ? On va choisir de ramer. Puis d'un coup on verra bien après. Voilà.

  • Speaker #0

    Vous suivez le courant ?

  • Speaker #1

    de suivre le courant.

  • Speaker #0

    Vous avez quand même stressé un peu, parce que jusqu'à... Monsieur qui ne stresse pas à ce moment-là, vous avez stressé quand même.

  • Speaker #1

    Oui, mais c'est un stress contenu, pour dire avant tout quelles sont les priorités à donner, vous êtes pris dans un mouvance quand même, où franchement, vous n'avez pas trop le temps de penser à ça. Il y a eu des moments de bas. Il est maman au moral très très très compliqué. Quand j'ai appelé mon épouse, je ne pouvais pas lui dire grand chose, mais elle a compris tout de suite. Mais je ne me suis pas effondré. Je ne peux pas dire que je me suis effondré, parce que je me suis dit, c'est comme ça, c'est comme ça. Il faut être cartésien, pragmatique, et il faut retosser les manches et voir ce qu'on peut faire. Vous savez, quand on... Mon père, ce qui s'est passé avec mon père à 18 ans, j'ai eu d'autres problèmes aussi familiaux très très graves, qui étaient plus importants qu'un cancer. Donc derrière, il faut raisonner d'une manière concrète, pas à pas, en disant, voilà, il y a une première étape pour faire de la chimio, j'ai eu 60 chimio-thérapies, 60 chimio et j'ai eu 35 radiothérapies. Donc là par contre, j'étais surpris parce qu'au début, il me dit, vous savez, il faut surtout prendre un DSM. J'ai trouvé que j'étais toujours plus malin que les autres. J'ai dit non, quand même, je suis capable de prendre ma voiture pour descendre, pour faire 50 kilomètres. Je l'ai fait deux fois. Et la troisième fois, j'étais raide mort sur le lit. Mais la difficulté dans tout ça, c'est quand même la fatigue. Et là, vous ne pouvez pas lutter contre la fatigue. Je vois la chimiothérapie, ce qui est compliqué. Il faut prendre en compte ça dans le raisonnement mental. C'est-à-dire que vous faites une chimio. vous en faites une deuxième, vous en faites une troisième, une quatrième, et plus ça va, plus vous êtes fatigué, parce que vous n'avez pas le temps de récupérer, qu'il y a la suivante qui arrive, et entre les deux, on alternait entre une radiothérapie, voilà, là, au bout de trois mois, j'étais, je rentrais, alors là, je ne faisais plus rien, absolument plus rien, ni de reprise, ni ailleurs, je rentrais, je me longeais sur le lit, et je mangeais un tout petit peu, et j'attendais la suivante, parce que j'étais incapable de faire autre chose, ça, c'était... je pense, mentalement et physiquement, mais mentalement c'était très très compliqué parce que vous vous dites, bon sang, je suis réduit à à ne plus rien faire. Ça pour moi c'était vraiment... Vraiment dramatique.

  • Speaker #0

    Vous passez de multiples activités, à travailler 7 jours sur 7, à je ne peux plus rien faire.

  • Speaker #1

    Vous tombez du 7ème étage et vous vous dites, je suis par terre et il y a un poids dessus qui m'empêche de me relever.

  • Speaker #0

    Vous avez perdu espoir à un moment ou pas ?

  • Speaker #1

    Non, jamais. Non, non, bien sûr qu'on pense à vos décès. On se dit, si ça arrive, ça arrive. En attendant que ça arrive, on va faire le maximum. Ok. Voilà. Par contre, il y a eu des étapes. J'ai eu deux opérations. Donc, une opération extrêmement technique qui a duré huit heures, qui était assez compliquée d'après le médecin. Là, j'ai eu une poche pendant trois mois. Alors, au bout de trois mois, j'étais super content et confiant qu'on m'enlève la poche parce que c'est très, très contraignant. Et là, j'étais un peu la fleur au fusil, comme en 2014. Et là, j'ai eu beaucoup plus mal que la première opération. D'accord. Donc là, j'étais quand même surpris. Et j'étais un peu en colère parce que je me suis dit, bon, finalement, après cette opération, je vais pouvoir redémarrer vraiment à 100%. Puis non, c'était encore... Oui, il a fallu un an quand même, un an complet pour reprendre un peu. Et il y a eu des moments de fatigue. qu'il ne faut pas négliger, il faut s'organiser des moments de repos. Et encore aujourd'hui, il y a des moments où il faut que je me repose. Il faut que je me repose, voilà, je prends de la lecture, je lis. Et puis, il ne faut pas lutter contre la fatigue, ce n'est pas possible.

  • Speaker #0

    Donc aujourd'hui, là, vous avez repris plus ou moins les activités ?

  • Speaker #1

    Oui, depuis longtemps quand même.

  • Speaker #0

    Ok. Ce que j'en déduis, c'est que trois infarctus, c'est ça ? Oui. Un cancer ?

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Vous êtes une sorte de survivant ?

  • Speaker #1

    Euh... ouais peut-être, mais enfin il y a des tas de gens qui ont... beaucoup de survivants, hein, dans tant que...

  • Speaker #0

    Je dis pas qu'il n'y en aurait pas beaucoup, mais je pense que vous en êtes un,

  • Speaker #1

    quand même.

  • Speaker #0

    Est-ce que vous pensez que le fait d'avoir cet état d'esprit de battant, d'être optimiste, de ne pas trop stresser, de croire en la vie, ça a joué quelque chose sur votre guérison ?

  • Speaker #1

    Alors si j'en réfère aux médecins, ils disent que le mental est... 50% de la réussite. Ce que je ne crois pas, mais je pense que ça fait beaucoup. Je pense que ça fait énormément. Ensuite, c'est quelque chose qu'on ne peut pas trop communiquer. Quand vous avez une grippe, quand vous avez quelqu'un dans la rue, vous dites, il a la grippe, le pauvre a la grippe, vraiment, il n'a pas de bol. Quand vous avez un cancer comme ça, etc., vous ne pouvez même pas l'expliquer parce que ça dépasse un peu la... le raisonnement lambda qu'on peut avoir tous les jours. Ou alors vous avez des réactions complètement diverses, quelquefois très surprenantes, c'est vraiment difficile. Même pour ma famille, on n'en parle pas trop, parce que je ne veux pas les embêter avec ça. Mais je ne peux pas dire que j'étais vraiment perturbé par ça, j'ai une volonté de m'en sortir. Je vois plusieurs fois, j'étais voir le personnel le matin pour leur dire laissez-moi encore un mois, ça ira mieux dans un mois. Voilà et puis il faut dire quand même on est redevable par rapport à la médecine parce que la médecine a fait énormément énormément de progrès aujourd'hui. On a des chirurgiens qui sont, et des cancérologues qui sont vraiment impressionnants. Je peux vous faire une confidence quand même, ça c'est mon épouse, je dis souvent. J'avais mon cancérologue qui était plus déprimé que moi. Est-ce que c'est vrai ? Plusieurs fois, il m'a dit, vous êtes dans un état... Qu'est-ce que vous allez faire ? On ne peut pas dire ça tous les cinq minutes ou tout au long de la journée. Il faut voir ce qu'il faut faire. Il y a la fatigue, il faut se reposer. Moi, vous savez, dans l'électricité, il y a un chapitre important qui est le dépannage, le pas à pas. C'est-à-dire que si vous avez tout un bâtiment qui est en panne, vous n'allez pas enlever tous les fils tout de suite. tous les fusibles, il faut faire pas à pas. Voilà, qu'est-ce qu'on peut faire ? Ça, ça m'a servi toute ma vie. Quand j'ai repris l'entreprise, il y avait des tas de choses qu'ils ne connaissaient pas au niveau compta, etc. Donc, j'ai repris pas à pas. Voilà, ce chapitre-là, ce qui va, ce qui ne va pas. Ce chapitre-là, ce qui va, ce qui ne va pas. C'est important. On ne peut pas tout faire en même temps, mais il faut donner vraiment les priorités à donner. La priorité, à un bon moment donné, c'était que je me repose. Donc, je me suis reposé.

  • Speaker #0

    En fait, moi, ce que j'en déduis, c'est que cette maladie, ça vous a appris à vous écouter, finalement.

  • Speaker #1

    Oui. Oui, oui, oui, ça m'a appris. Oui, oui, oui, vous avez parfaitement raison. J'ai pris conscience que j'ai pris de l'âge quand même aussi, parce qu'à l'époque j'avais 63 ans. Donc, oui, oui, c'est très, très question pertinente, parce que finalement, on se dit, on se sent un peu quand même indispensable, il faut bien dire comme on est. Et on se dit, un jour, ça finira, forcément. Et puis on se dit, finalement, j'ai passé un an quand même entre pointillés, ça peut se faire aussi sans la maladie, c'est clair. C'est-à-dire qu'à un moment donné, on se dit, finalement, je peux quand même prendre un peu de vacances, ce que je ne m'étais jamais autorisé à faire pendant une quarantaine d'années. À tort d'ailleurs, ce serait maintenant, je prendrais beaucoup plus de vacances.

  • Speaker #0

    Vous allez en prendre beaucoup plus.

  • Speaker #1

    Oui, mais la nature, il se passe par du vide. Non, mais il faut... apprendre à se reposer. Quand on est chef d'entreprise, on ne peut pas dire, c'est 18h du soir, je ferme la lumière, je ferme la clé, puis je m'en vais. Les soucis vous perturbent pendant les 24 heures d'une journée. Je vous fais une confidence aussi, quand j'ai acheté mon premier camion, je n'ai pas dormi pendant 6 mois, parce que c'était mon premier gros crédit. Puis ensuite, j'ai fait beaucoup de crédits. Un soir, je me suis dit, mais je suis complètement nul parce que je ne peux pas penser à tous les crédits. Donc, finalement, autant que je dorme comme il faut. Et le lendemain, je serai frais dispo pour attaquer de front tous les problèmes de l'entreprise. Du coup, je dors bien.

  • Speaker #0

    D'accord. C'est la question que j'allais vous poser. Est-ce que aujourd'hui,

  • Speaker #1

    vous dormez bien ? Oui, aujourd'hui, je dors bien, très bien.

  • Speaker #0

    D'accord. Pour conclure, est-ce que vous auriez un mot à dire ou une idée à faire passer ? à tous les entrepreneurs qui traversent ce genre de difficultés aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Alors, peut-être une maxime de Nietzsche qui disait...

  • Speaker #0

    Tout ce qui ne tue pas rend plus fort.

  • Speaker #1

    J'y ai pensé aussi. C'est un peu les portes ouvertes,

  • Speaker #0

    mais c'est la vraie réalité. Voilà, donc après c'est une résilience, une résilience positive. Je pense aussi à une autre maxime d'André Marot qui disait Une vie ne vaut rien, mais rien ne vaut la vie. Je pense que tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir. Il ne faut jamais baisser les bras. Que ce soit dans la dureté de la vie d'une entreprise ou la santé, alors évidemment la santé c'est quand même prioritaire, c'est clair. Ensuite il faut savoir s'enturer, il faut savoir, comme je disais, à un moment donné gérer sa propre vie, ce qui n'est pas évident quand on est à fond dedans, quand on est à fond, on crée, on développe. Moi je suis une entreprise, c'est quelque chose, mais quand on crée, on développe, c'est quand même très difficile. On est passionné par notre métier, donc on n'a pas de mérite à ce niveau-là. Puis on est majeur, c'est sympa, on peut faire autre chose. Mais ce n'est pas vraiment lié à l'argent. Quand on parle de sa propre entreprise, il y a beaucoup de choses qui brillent. Mais derrière, c'est quand même la passion de son métier. Mais il ne faut pas que ça prenne sur la santé de votre vie. Une vie mérite de vivre pleinement. C'est clair. La vie est belle. Je pense toujours qu'il y a beaucoup plus pire que nous.

  • Speaker #1

    En tout cas, je vous remercie beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci à vous, il n'y a pas de soucis.

  • Speaker #1

    Merci à tous pour votre écoute. Le podcast Inclusive est soutenu par la GFIT et les réseaux sociaux de l'Ordre de l'Ordre. À la semaine prochaine pour un nouvel épisode.

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