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Interne en médecine

En médecine générale, Killian, ancien président de l'ISNI : Chaque patient mérite une attention particulière, peu importe où il se trouve.

En médecine générale, Killian, ancien président de l'ISNI : Chaque patient mérite une attention particulière, peu importe où il se trouve.

32min |14/10/2025|

119

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En médecine générale, Killian, ancien président de l'ISNI : Chaque patient mérite une attention particulière, peu importe où il se trouve.

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Description

Qu'est-ce qui pousse un jeune homme à choisir la médecine générale après avoir exploré d'autres voies ? Pour cet épisode du podcast "Internes en médecine", j'ai rencontré Killian L'Helgouarc'h, interne en médecine générale à Montpellier et ancien président de l'ISNI, l'Intersyndicale Nationale des Internes. Killian partage avec nous son histoire, marquée par un accident de santé et une opération chirurgicale lourde durant son enfance qui a éveillé en lui une passion pour la médecine. Ce témoignage est bien plus qu'un récit personnel ; c'est une réflexion sur les défis et les joies d'une carrière médicale.

Killian nous plonge dans ses expériences durant l'externat, où il a fait ses premiers pas dans le monde médical. Il évoque avec émotion ses premiers contacts avec les patients, soulignant la satisfaction qu'il a trouvée dans l'internat, malgré la pression constante qui pèse sur les internes. "La médecine, c'est avant tout une histoire de relations humaines", dit-il, rappelant l'importance de la bienveillance et du soutien au sein des équipes médicales. À travers ses mots, on ressent son engagement sincère pour améliorer les conditions de travail des internes, un sujet qui lui tient particulièrement à cœur.

Nous abordons également la santé mentale des internes, un thème crucial dans notre système de santé actuel. Killian partage son point de vue sur l'impact de la pression académique sur le bien-être des futurs médecins. "Il est essentiel de prendre soin de soi pour pouvoir prendre soin des autres", insiste-t-il, un message fort qui résonne avec de nombreux professionnels de santé. Cette discussion ouverte et honnête met en lumière les défis que rencontrent les internes, mais également les ressources et le soutien disponibles.

Enfin, Killian exprime son désir de travailler dans des territoires ruraux, soulignant l'importance de la médecine générale dans ces zones souvent négligées. "Chaque patient mérite une attention particulière, peu importe où il se trouve", affirme-t-il avec conviction. Son engagement pour la médecine générale est palpable et inspirant, et il nous rappelle à quel point cette spécialité est vitale pour notre système de santé.

Rejoignez-nous pour cet échange enrichissant qui met en avant non seulement le parcours de Killian, mais aussi les enjeux actuels de la médecine. Que vous soyez étudiant en médecine, professionnel de santé ou simplement curieux d'en apprendre davantage sur le monde médical, cet épisode de "Internes en médecine" est fait pour vous.


Interne en médecine est un podcast de et avec Pascale Lafitte, réalisé en partenariat avec l'ISNI, l'Intersyndicale Nationale des Internes.

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Et si ce podcast vous séduit, alors partagez-le avec vos proches, amis, collègues, voisins et votre médecin aussi qui a peut-être enfouit sous une montagne d’antibiotiques et de prescriptions ses années d’internat.



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Pascale Lafitte

    Bonjour et bienvenue, je suis Pascale Lafitte, je suis ravie de vous retrouver pour cette nouvelle saison d'Internes en médecine, une série d'entretiens avec des internes, avec des médecins également, qui se replongeront dans leurs années d'internat, des proches et des accompagnants d'internes aussi. Et avant tout, je vais commencer par vous remercier, vous, de suivre ce podcast. Vous êtes de plus en plus nombreux, c'est chouette, donc sincèrement merci. Et maintenant allons-y, et n'oubliez pas, Internes en médecine, le podcast, est à suivre sans ordonnance ni modération. Un rendez-vous réalisé en partenariat avec l'ISNI, l'Intersyndicale Nationale des Internes. Intern en médecine, saison 2, c'est parti, avec un premier entretien, une première rencontre.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Je m'appelle Kylian Lelguarch, intern de médecine générale en dernière année et ancien président de l'ISNI.

  • Pascale Lafitte

    Je suis ravie d'avoir enfin rencontré Kylian, tellement occupé l'an passé que j'ai attendu le bon moment pour lui emprunter un peu de son temps, ne pas trop le déranger, soit la fin de son mandat de président de l'ISNI. Kylian est interne à Montpellier, nous nous sommes rencontrés donc à Montpellier, dans un bureau du syndicat des internes du Languedoc-Roussillon, au CHU La Péronie, à deux pas de l'accueil des urgences. Kylian nous explique pourquoi. Il a choisi de devenir médecin.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Je pense que ça remonte à quand j'étais tout petit, à l'âge de 6 ans, je me suis fait opérer, une grosse chirurgie. J'ai passé plusieurs jours à l'hôpital, donc je pense que ça m'a bien marqué. Mes parents aussi étaient, surtout ma mère, côté de ma mère, qui était très portée santé, donc m'a toujours un peu poussé aussi à m'intéresser à la santé. Et puis finalement, après, quand j'ai grandi, j'ai abandonné la médecine. Je me suis dit que ce sera plutôt la physique ou l'histoire géo qui me plaisait. et puis finalement en en quand il fallait choisir où aller après post-bac. Puisque la médecine est sélective, on va commencer par la sélection d'abord, voir si j'y arrive, et puis si je n'y arrive pas, j'aurai des plans B et C si jamais. Donc je suis parti là-dedans, et j'ai fait deux ans et j'ai réussi. Donc voilà pourquoi je me retrouve médecin aujourd'hui.

  • Pascale Lafitte

    Ce n'est pas un métier comme astrophysicien, ce n'est pas un métier comme prof d'histoire, ou historien, ou chercheur, ou géographe. La médecine, il y a un patient, il n'y a pas des étoiles à observer. Vous saviez à quoi vous attendre ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    J'ai eu la chance de faire quelques stages. C'est très compliqué quand on est lycéen de faire des stages à l'hôpital parce qu'on n'est pas majeur. Il y a toutes les questions de responsabilité, de confidentialité que l'hôpital public ne fait pas confiance. J'ai eu la chance de faire un stage dans un hôpital mais dans des services qui ne voyaient pas de patients. En radiologie, bon... Manque de bol pour eux, on voyait les patients donc j'en ai vu. Et puis je suis allé en Suisse aussi faire un stage d'une semaine pour voir les côtés infirmiers, pour voir un peu le métier, ce qui n'est pas du tout pareil non plus que médecin, mais ça me donnait une première approche de la santé. J'ai beaucoup maturé ce que c'était la médecine tout au long de mes études. J'ai toujours aimé le contact avec les gens et c'est d'ailleurs pour ça que j'ai choisi le médecin généraliste. Au départ je voulais faire radiologue ou médecine nucléaire, ce qui n'est pas du tout pareil. Et quand j'ai fait un stage où vous ne voyez pas de patient, je me suis dit c'est pas trop pour moi ça, donc il fallait que je change mon projet professionnel, et c'est là où j'ai choisi du coup la médecine générale. Donc je pense que j'ai un peu maturé, et puis j'ai appris aussi à apprécier la médecine tout au long de mes études. J'ai assez peu aimé l'externat parce qu'on n'a pas trop de responsabilités, on se fait un peu marcher dessus dans les services, on ne sait pas trop où se mettre, personne ne connaît son prénom, notre prénom parce qu'on est là trop longtemps. trois semaines dans le mois et qu'après ça change. Donc j'ai très peu aimé. Et là où je me suis vraiment épanoui en médecine, c'est quand j'ai eu mes premières responsabilités, mes premiers patients, ou même en sixième année j'en avais un peu, où vraiment il fallait que je connaisse très bien mes patients. Pas beaucoup, un ou deux, mais c'était mes patients, à moi, je vais m'en occuper. Et c'est là où vraiment j'ai pris la dimension de ce que c'était le médecin et puis surtout le... Là où j'ai pris aussi du plaisir à suivre le patient de A à Z, du début de son hospitalisation jusqu'à la fin de son hospitalisation.

  • Pascale Lafitte

    Donc ça veut dire que c'est lorsque vous êtes rentré à un internat ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Oui. Paradoxalement, ce que je dis souvent, c'est que finalement, j'apprécie la médecine depuis le début de l'internat. Or,

  • Pascale Lafitte

    vous, vous vous êtes engagé pour aider les internes à vivre mieux.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Effectivement, c'est un paradoxe intéressant que vous soulevez, mais je pense que ce que j'ai apprécié... dans l'internat, dans le début de l'internat, c'était à la fois les responsables qui sont difficiles et très durs, mais j'ai eu la chance, contrairement à beaucoup de mes collègues, d'avoir des stages qui sont bienveillants, où le temps de travail était à peu près respecté, et je me sens chanceux dans les stages que j'ai pu choisir. Et puis, au-delà de la responsabilité, des stages avec des praticiens et des chefs qui étaient très bienveillants, c'était aussi le... Ce qui m'a beaucoup plu, c'était le contact avec le patient et de se dire que j'étais le médecin du patient. C'est ça que j'ai beaucoup apprécié.

  • Pascale Lafitte

    Comment vous définiriez un médecin ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Je dirais que c'est quelqu'un qui doit prendre soin de la personne, tout en ayant conscience des limites du soin qu'il peut prodiguer. Et c'est ça que j'aime beaucoup avec la médecine générale, parce que finalement, quand on est généraliste, on suit les patients quasiment depuis parfois, et à mon avis, j'espère que j'aurai des patients comme ça, depuis tout bébé jusqu'à tout vieux. Et du coup, ça fait qu'on a une dimension qui est vraiment au-delà de juste l'aspect de la pathologie aiguë ou chronique qu'on suit, et aussi tout l'aspect sociétal et environnemental du patient qui... On rentre vraiment dans l'intimité de la personne, on sait avec qui elle est, s'il y a des enfants, où elle habite, son travail, comment ça s'y passe, etc. Et donc c'est au-delà du seul soin technique, que ça, on a tous appris à faire, c'est aussi de savoir mesurer l'intensité du soin qu'on doit prodiguer. Et c'est ça qui rend toute la complexité de la médecine, et elle est encore plus complexe que celle que moi j'aurais bien fait. qui est plutôt dans les territoires ruraux, dans les déserts médicaux, où en plus de la complexité de savoir jusqu'où on va, il y a la complexité de savoir avec quels moyens on a sur le territoire.

  • Pascale Lafitte

    Donc vous voulez aller dans des territoires plutôt désertiques, ce qu'on appelle le désert médical, c'est ça ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Je pense que c'est le bon terme. Et d'ailleurs, ça casse un peu le coup à beaucoup de gens qui disent que les jeunes ne veulent plus aller dans les déserts médicaux. Non, c'est faux. J'en fais partie et moi j'ai toujours vécu en ruralité. Les seules fois où j'ai vécu en ville c'était pour les études. Mais je sais que c'est pas là où je m'y sens le mieux et je préfère aller dans les territoires ruraux. Donc forcément dans les déserts médicaux, même si Paris est le plus grand désert médical de France. Mais en tout cas c'est dans les territoires ruraux que je me sens mieux. C'est aussi là où la pratique que j'ai envie, qui est une pratique un peu particulière, à la fois de généraliste en cabinet mais aussi... Avec une valance un peu hospitalière, c'est là où je peux la retrouver. Il y a des choses qui peuvent se faire assez plus facilement que dans certains endroits, notamment avec des CHU, des grands hôpitaux, où c'est toujours un peu plus long de construire. L'exemple que je prends souvent, c'est en Lauser à Langoyne, là où j'ai fait mon premier stage chez le praticien. Il y a une MSP, mais aussi un hôpital de proximité, ce qui fait que des patients qu'on voit en consultation ou qu'on voit en ville en visite, on peut les hospitaliser nous-mêmes. Et c'est nous qui sommes responsables de l'hospitalisation dans l'hôpital de proximité. Il n'y a pas besoin de l'envoyer à 40 minutes à Mande ou au Puy-en-Velay pour passer par les urgences, puis on sait être hospitalisé. Donc il y a une fluidité du parcours patient qui, je trouve, est très intéressante.

  • Pascale Lafitte

    Ça veut dire que vous pouvez être aussi le médecin du patient hospitalisé, parce que l'organisation est faite comme ça ? C'est quelque chose d'expérimental ou c'est quelque chose qu'on retrouve dans tous les endroits où il y a un véritable manque de médecins ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Alors c'est exactement ça, c'est-à-dire que le matin c'est les consultations classiques, au cabinet, puis après sur l'heure de midi, c'est la visite des patients à l'hôpital. Mais c'est nous qui le faisons en tant que généralistes. Alors c'est pas des grosses hospitalisations, c'est pas que ça soit non plus trop complexe, parce qu'on n'a pas le plateau technique pour faire du soin complexe, mais c'est des infections pulmonaires, des infections urinaires, c'est de la rééducation post-chute, c'est... décharger aussi les hôpitaux à côté. Si un patient vit sur place, autant le ramener le plus rapidement possible. Donc c'est ça. Et c'est, je pense, assez expérimental. Ou en tout cas, je ne l'ai pas trouvé ailleurs. J'ai trouvé des systèmes un peu équivalents, mais pas aussi unifiés qu'à Langone, là où j'étais. Parce que c'est vraiment rattaché physiquement à la MSP, avec l'hôpital de proximité, ce qui n'est pas le cas souvent dans les autres endroits. Et quand j'avais interrogé les ARS qui sont normalement 40 de l'Organisation Territoriale des Soins, ou en tout cas qui connaissent leur territoire, aucune ARS en France était capable de me dire si un modèle comme ça existait dans leur territoire. Donc c'est juste pas, par réponse du non ça n'existe pas, c'est juste non on ne sait pas. Donc ce qui démontre un peu, on va dire, l'éloignement... des ARS par rapport au territoire.

  • Pascale Lafitte

    On pourrait dire que Kylian, c'est la force tranquille. Voix douce, ton posé, rassurant, mais direct aussi, comme le laisse entrevoir cette pique ou saillie au sujet de l'ARS. En l'écoutant retracer ses rencontres, ses anecdotes d'interne, je me suis demandé si cette expérience vécue à Langogne, en Lauser, qu'il rapporte spontanément, n'était pas la genèse de son engagement syndical.

  • Killian L'Helgouarc'h

    En fait, je me suis toujours engagé, si on remonte au tout début, j'étais délégué de classe en sixième et je l'ai été pendant sept ans. Je fais un septennat de délégué de classe et finalement, je me suis toujours engagé un peu pour les autres, pour les représenter. Et puis, j'aime bien avoir la responsabilité d'eux. J'aime bien réfléchir au système dans lequel je suis et porter un peu la voix de tout le monde. Donc, je l'ai fait quand j'étais au collège lycée. Puis après, je l'ai refait quand j'étais en fac de médecine. A Brest, tout au début, où j'ai été tuteur pour les premières années. Puis j'ai géré le tutorat avec trois autres amis à Brest. On a fait de très belles choses à Brest. On a rendu les cours gratuits, parce qu'il y avait un marché noir du cours. On a travaillé ça. On a rendu le tutorat gratuit aussi pour les boursiers. On a fait pas mal de choses. Puis après, j'ai fait l'ANEMF, qui est le pendant de l'ISNIM et pour les plus jeunes. Et donc, c'était assez naturellement aussi pendant mon internat que je me suis dit, en fait, je me suis toujours engagé, je trouvais quelque chose à côté. j'aime La peur de s'ennuyer, je ne sais pas, mais en tout cas, j'avais envie de m'engager aussi. C'était aussi une façon de moi, parce que je viens de Brest, de Bretagne, du Finistère. Quand j'arrive à Montpellier, je ne connais personne, très peu de gens. C'est aussi une façon pour moi de rencontrer du monde, de comprendre aussi la géographie locale, le fonctionnement local, de m'investir justement dans le syndicat de Montpellier. Et puis après, quand j'ai été élu président, j'ai découvert l'ISNI, que je connaissais assez peu avant. Et je me suis dit, c'est un peu l'apothéose de l'engagement syndical quand même. J'ai fait trois ans au syndicat de Montpellier et je me suis dit, les planètes étaient alignées sur le plan professionnel et personnel pour se dire, ok, on peut tenter et se sentir aussi capable, parce que depuis très longtemps j'ai un manque de confiance en moi qui est quand même important. Et donc c'était aussi un challenge de se dire... Là, je planais de caligner, let's go, on y va, pendant un an, vivre à Paris, ce que je n'avais jamais fait non plus. Et puis prendre la tête du premier syndicat d'interne de France. C'est aussi s'exposer médiatiquement, c'est beaucoup de contraintes, mais c'était un grand plaisir et c'est un vrai challenge pour moi. Et donc, pour répondre à la question par rapport à Langueuil, je pense que ça a participé à mon engagement, ça c'est clair, parce que j'ai découvert la désert médicaux. Je les connaissais quand même un peu moins en Bretagne parce qu'on est un peu mieux fourni. Donc là, j'étais quand même assez frappé déjà de l'éloignement géographique avec les autres hôpitaux. Quand on demande à un patient de faire une échographie, c'est 40 minutes aller, 40 minutes retour. Il faut être vraiment sûr de soi qu'il faut faire déplacer le patient pour faire une échographie. Donc j'ai appris ça et je me suis dit que c'était un modèle qui était vraiment fantastique, qui me correspondait beaucoup. et je l'ai utilisé beaucoup de fois pendant ma présidence à l'ISNI pour montrer et démontrer qu'il y avait... D'autres solutions que la coercition pour laquelle je me bats, pour améliorer l'accès aux soins de nos concitoyens.

  • Pascale Lafitte

    Je vous donne une baguette magique où je suis premier ministre et je cherche un ministre de la santé et c'est vous, ça tombe sur vous. Forcément vous avez réfléchi à beaucoup de choses. Comment vous les verriez ces études de médecine demain pour qu'il y ait moins de maltraitance, pour qu'il n'y ait pas cette souffrance à soigner en fait. On a des internes qui souffrent pour nous soigner donc il y a quelque chose qui est... paradoxal qui est surtout insupportable.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Oui c'est complètement insupportable et moi les pires appels que j'ai eu dans ma vie ce sont des appels où on m'annonce un suicide d'un interne. Et que ce soit la famille qui m'appelle directement ou un président d'un syndicat local qui vient d'apprendre qu'un interne s'est suicidé, c'est absolument terrible. Et on se dit que là on a raté un truc collectivement qui a une responsabilité pas juste de la faculté, pas juste du CHU mais de tout le monde. sur ce terrible accident qui est arrivé. Si j'étais ministre de la Santé, moi j'essaierais d'inculper plus de bienveillance dans nos études, plus de responsabilité aussi, et plus de considération. Quand j'étais externe, je trouvais que c'était inadmissible qu'on nous appelle l'externe, et qu'on n'ait pas de prénom. Quand on est interne, je trouve ça inadmissible que quand on a des situations, on ne prend jamais le temps, on est tellement débordé, on a tellement de choses à faire toute la journée, qu'on ne prend jamais le temps de demander vraiment un « ça va » . Parce qu'il y a le « salut, ça va » du matin, classique, mais ce n'est pas un vrai « est-ce que ça va ? » . Et ça, je pense, quand on est responsable pédagogique, quand on est chef de service, qu'on a été énormément formé en management, c'est la base, le B.A.B. du management, de savoir si... Ces collaborateurs, ceux avec qui on travaille, vont bien ou vont pas bien, qui peut être un facteur en lien avec le service, mais ça peut être aussi complètement extérieur et que ça a un impact forcément sur le soin des patients. Parce que c'est surtout ça en fait. Comme vous disiez, c'est paradoxal d'avoir des soignants qui ne sont pas bien dans leur peau, qui ne sont pas bien dans leur tête et qui soignent des gens qui eux ne sont pas bien non plus. Finalement, personne n'est bien.

  • Pascale Lafitte

    D'abord, ils sont exténués. On a des interne. Je rencontre des internes depuis quelques mois, je rencontre des internes fatigués. Des internes qui disent une chose, par exemple, pourquoi on nous impose des gardes de 24 heures ? Parce que physiquement, il y a ceux qui peuvent, il y a ceux qui veulent, et il y a ceux qui physiquement ne les supportent pas, n'y arrivent pas. Or, l'internat, pour arriver au bout de ses études, il faut en passer par là. C'est ce que vous appelez bienveillance, considération,

  • Killian L'Helgouarc'h

    c'est ça ? Oui, alors on a fait deux travaux majeurs, donc la santé mentale pendant mon mandat à l'ISNI, et puis on a fait aussi une enquête handicap. Et j'étais effaré quand on avait des internes qui, je prends un exemple d'un TDAH, donc trouble du spectre autistique, nous disaient, le doyen m'a dit qu'avec mon TDAH, je ne pourrais pas faire médecine. Pourquoi ? Parce que l'interne n'arrivait pas à valider son stage aux urgences, parce que justement, on lui imposait des gardes 24 heures. Mais moi, je pose la question au doyen, est-ce qu'il faut... forcément faire des gardes de 24 heures pour être un bon médecin. Et aujourd'hui, personne en France n'est capable de dire en réalité qu'est-ce qu'il faut pour être un bon médecin. Pareil sur la parentalité, on a fait un gros travail sur... J'étais effaré des internes femmes qui calculaient au jour près, j'ai une amie qui a calculé au jour près quand est-ce qu'il fallait tomber enceinte pour éviter de se faire invalider de son stage. Je trouve ça lunaire. Et donc on a essayé de... d'amener plus de flexibilité, ça en cours, ça doit être validé par le Conseil d'État, donc on aura, je pense, de bonnes nouvelles à annoncer aux internes dans quelques mois. Et je trouvais ça pareil, absolument, on discutait avec les doyens de cette proposition de flexibilité, et notamment on veut l'invalidation automatique, c'est 4 mois. Si on fait moins de 4 mois, on est invalidé automatiquement, il n'y a pas de discussion. Et on l'a passé à 3 mois. Et tous les doyens disaient, mais c'est pas possible de valider un stage en trois mois, c'est une hérésie, on n'aura fait que la moitié du stage, comment c'est possible ? Et moi je leur disais, déjà, un, avec le temps de travail qu'on fait, trois mois de stage et six mois de stage en réalité, et puis deux, dites-moi ce qu'il faut apprendre dans des stages, et je vous dirais, ça se trouve, on va se rendre compte que pour être réanimateur, il faut quatre ans au lieu de cinq. Et peut-être que pour être généraliste, au lieu de trois, il faut peut-être un et demi, je n'en sais rien, deux. Donc, il y a cette hypocrisie de tout le monde où, en fait, on voit les études que sur le spectre quantitatif et pas sur le spectre qualitatif. Et ce qui fait que pour des internes qui ont du mal avec des gardes 24 heures, tout le monde ne peut pas faire ça. Et d'ailleurs, même si c'est prouvé, j'aime bien, souvent, le ministre de la Santé le disait, Yannick, Une autre disait, oui, mais c'est un fossé générationnel. Souvent, on entend ça, fossé générationnel, la jeune génération ne veut pas bosser ou ne veut plus bosser comme avant, etc. En fait, c'est juste aussi une question de santé publique. Toutes les études au niveau international démontrent et montrent qu'au bout de 24 heures, on est lessivé et qu'on prend bien moins bien en charge les patients que si on faisait un travail de 12 heures. Et d'ailleurs, même l'IA est plus empathique que nous au bout de 24 heures. que lire. L'IA est plus empathique que nous. À un moment donné, il faut peut-être se poser les bonnes questions.

  • Pascale Lafitte

    Ça veut dire qu'il ne faut pas arriver aux urgences à 5h du matin.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Voilà, exactement.

  • Pascale Lafitte

    Vous avez parlé de bienveillance, de responsabilité, de considération. Dans le mot responsabilité, qu'est-ce que vous entendez ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Ce que j'entends, c'est double responsabilité, donner plus de responsabilité aux étudiants. On est souvent, et notamment moi, mon grand regret de l'externat, c'est de ne pas avoir été vraiment en responsabilité, de ne pas avoir dit vieux. Plutôt que d'avoir dix patients à gérer, en fait on a un et tu essaies de bien le gérer toi-même. Et on te chapote, on fait mais tu prescris tout, tu vérifies tout, c'est toi qui gères. Et ça aujourd'hui les logiciels ne le permettent pas parce que si l'externe prescrit en fait ça a les codes de l'interne, enfin c'est juste interdit. Donc on pourrait donner un peu plus de responsabilité aux externes. Et puis la responsabilité aussi des doyens, des chefs de service sur le respect qu'ils ont normalement de la loi. Ils sont tenus de respecter la loi, mais ils ne le respectent pas. Ils ont plusieurs responsabilités aussi dans ce sens-là.

  • Pascale Lafitte

    Kylian se souvient aussi de son premier jour d'interne.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Quand j'ai fini de passer le concours de l'internat, je ne voulais pas faire un stage d'externat. Je ne voulais plus être externe, ça ne m'intéressait plus. Et donc, je voulais être interne. Donc, quand on est après le concours d'internat, on fait faisant fonction d'interne, FFI. Et je l'ai fait dans un petit hôpital à côté de Brest, dans un service de médecine. donc je dirais que c'est ma première euh C'était mon premier jour d'internat, sans être tout à fait le premier jour d'internat, puisque je le faisais pendant l'été, avant la rentrée officielle qui était en novembre. Et je me souviens d'arriver, c'était ma chef que j'adorais, qui m'a beaucoup appris, qui malheureusement est décédée depuis, et on faisait la visite ensemble, et on voyait un patient qui toussait, etc. Et elle me dit, bon, Kian, qu'est-ce qu'on fait ? Moi, je dis... Je ne sais pas. J'ai l'impression d'avoir tout oublié. J'ai l'impression de ne plus avoir les QCM dans lesquels je Ausha. Et donc, face aux patients, je ne savais plus quoi faire. Elle m'a dit, on va peut-être faire une radio pour voir si elle a une infection pulmonaire. Je dis, ah oui, pas bête, c'est une bonne idée. Donc, j'ai prescrit la radio et on est allé. Et c'était, c'était, c'était, je me suis senti à la fois très bête. Et en même temps, je me suis dit, bon, peut-être qu'en fait, c'est des cases à cocher. Je n'avais jamais prescrit de radio. tout seul, donc voilà, c'est la première fois et la prochaine fois, je saurai que si j'ai un doute, je fais une radio.

  • Pascale Lafitte

    Ça, c'est votre première avant-première. C'est une avant-première. Vous parlez d'une personne qui vous accompagne. Donc, l'expérience de l'interne, c'est comme un dé qu'on jette. La personne qui va vous accompagner la première fois, elle est essentielle ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Complètement. Et le compagnonnage, on le dit souvent en médecine, est important, mais en fait c'est fondamental parce que c'est C'est avec nos collègues qu'on apprend et qu'on travaille. On travaille à 100% à l'hôpital ou en ville. Donc si on ne s'entend pas avec nos collègues ou si nos collègues ne sont pas bienveillants avec nous parce qu'on est en apprentissage, c'est clair que ça ne va pas bien marcher et que le stage sera un enfer. Et moi, je l'ai vu à plusieurs reprises. Je parlais de ma première chef officiellement, clairement, qui m'a beaucoup appris et qui était très très forte, très très très forte. Et je me souviens aussi d'un stage en gériatrie. ici à Montpellier, enfin à Montpellier-Nîmes, et où j'avais une chef et ça m'avait beaucoup étonné, beaucoup étonné, ça m'avait beaucoup questionné. Je venais de passer un week-end de garde horrible, au total j'ai eu deux décès sur le week-end, dont deux décès dans lesquels je me questionnais beaucoup sur ma responsabilité en tant que médecin. Et sur le deuxième décès que j'ai eu, c'était une patiente qui faisait une détresse respiratoire majeure à 6h du matin, pour lequel j'ai... J'ai fait ce qu'il fallait, et enfin, à posteriori, je sais que j'ai fait ce qu'il fallait, mais sur le coup, pas forcément. Et donc, elle était très, très, très dysnique, enfin, grosse difficulté à respirer. Donc, j'ai appelé ma chef pour échanger avec elle, qui est par téléphone chez elle. Et elle m'a dit, bon, je pense qu'on va devoir la sédater parce qu'elle n'est pas confortable et qu'on n'y arrive pas, et qu'elle est trop abîmée pour la sauver. Et donc, elle m'a dit, j'arrive. Je me suis dit... J'arrive, c'est-à-dire tu viens sur place, elle me fait oui oui j'arrive, j'arrive. Et là je me suis dit bon, alors soit c'est que je suis nul et que ma chef vient pour prendre la main, soit c'est que je suis nul, enfin il n'y avait pas d'autre possibilité que l'autre possibilité que j'étais nul à ce moment-là. Et en plus elle a eu un accident de voiture sur la rentrée, rien n'allait. Donc c'est une autre chef qui est arrivée et puis finalement quand elle est arrivée ça allait un peu mieux, finalement elle avait passé un peu le cap donc ça... On a pu temporiser, mais elle est décédée dans les heures qui suivaient quand même. Et donc j'ai assez vite débriefé, parce que j'ai eu la chance d'avoir des chefs avec qui je pouvais parler. Et parce que ça m'a beaucoup pesé, je me suis dit, mais pourquoi elle se déplace ? Je n'ai jamais vu un chef, pendant la nuit, se déplacer sur une urgence comme ça. Et donc elle m'a dit à posteriori, non, non, totale confiance en toi. Simplement, la première fois que j'ai dû faire une sédation, parce que la patiente n'était vraiment pas bien. j'étais toute seule à l'hôpital et mon chef ne s'est pas déplacé, je l'ai hyper mal vécu donc je ne voulais pas que ça t'arrive, donc c'est pour ça que je suis venu et je me suis dit ah ouais là c'est une leçon de bienveillance que je viens de me prendre

  • Pascale Lafitte

    Elle s'est déplacée pour vous et pour votre futur parcours de médecin et là ça m'a ça faisait pas partie des options que j'envisageais au départ donc ça m'a beaucoup surpris et je lui remercie La confiance en soi, ce que vous abordez là, la peur de l'erreur, la peur d'avoir fait quelque chose qui ne va pas, est-ce que c'est difficile à vivre au quotidien, à porter ? Est-ce qu'il faut savoir s'entourer ? Est-ce qu'il y a un travail à faire pour être mieux avec ça ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Tous les internes que j'ai vus, qui m'ont appelé ou qui nous ont sollicités quand j'étais président de Montpellier ou président national, A chaque fois, je me disais, c'est trop bête, parce que s'il y a eu plus de communication dans le stage, s'il y a eu plus de bienveillance dans le stage, en fait, on aurait évité des drames, on aurait évité des situations, ça peut aller jusqu'au suicide de l'interne, clairement. Et donc, je me dis vraiment qu'on manque, en fait, de communication. Et en fait, on le voit bien, on est quand même dans un système où on passe un premier concours en première année, puis un second concours en sixième année. Parfois même, pendant l'externat, il faut être le meilleur classé pour pouvoir choisir les meilleurs stages. Et puis après, pendant l'internat, si on n'est pas bien classé, on va choisir les stages en dernier. Donc on n'aura jamais le choix du stage, on sera toujours à subir le système. Et donc, cette concurrence qui est importante, puis même une concurrence des postes après aussi, notamment en hospitalier, pas en libéral forcément, mais en hospitalier. Donc cet aspect de concurrence permanente fait qu'on ne doit pas montrer de faiblesse. Et souvent, c'est vécu comme « je ne vais pas bien, donc c'est une faiblesse » ou « j'ai mal vécu une situation clinique, c'est une faiblesse, il ne faut pas que je la montre » . Et aussi parce que c'est entretenu par nos seniors parfois aussi, qui ne sont pas tous bienveillants clairement, et qui ne veulent pas qu'on montre de faiblesse, qu'il faut que ça dure. Et ça, je l'ai constaté que dans beaucoup de situations, s'il y a eu une communication comme là, moi j'ai pu le faire. dans mon service, ça me pesait cette situation clinique pour savoir si j'étais responsable ou pas responsable, s'il fallait que je m'améliore ou pas m'améliorer, ou il y avait un truc que j'avais raté pendant la nuit. Et le fait d'avoir pu débriefer avec mes chefs, ça calme tout de suite l'angoisse. On reprend un peu confiance en soi, même si on a vécu une situation qui était difficile. Et après, on peut mieux repartir. Quand on est dans le doute permanent de savoir si ce qu'on a fait est bien ou pas bien, et qu'on ne peut jamais demander si c'est bien ou pas bien, ou si on nous... montre simplement ce qu'on ne sait pas faire et jamais ce qu'on sait faire, c'est clair qu'au bout d'un internat entier, on finit par ne pas savoir ce qu'on fait, d'être très angoissé et de ne pas avoir confiance en soi. Et en médecine, c'est essentiel parce qu'on a la vie de gens entre les mains, avec des décisions qui sont complexes et difficiles à prendre des fois dans la minute, et ça peut mettre rapidement en difficulté. et si on n'a pas le... Si on n'est pas bien entouré, c'est toujours compliqué. Moi, je disais aux nouveaux internes qui sont arrivés à Montpellier, quand on sort de garde, ça m'avait toujours frappé. Mes collègues, mes co-internes étaient toujours en disant « pendant ma garde, j'ai fait ça, j'ai fait ça, j'ai fait ci et tout, j'ai réanimé machin, j'ai mis tant de l'asilex à tel, etc. » En fait, quand on creuse un peu, il n'a pas vraiment fait ça. appeler son chef pour savoir quoi faire. Donc ça dédramatise un peu parce qu'on se dit, il a fait tout ça pendant la nuit, mais tout seul, mais waouh ! Et on s'est dit, vraiment, moi je suis nul, je serais incapable de faire tout ça. Mais finalement, quand on creuse, on est tous pareils, on a tous les mêmes difficultés et en fait, il était aussi en difficulté comme nous, on aurait pu l'être. Il a appelé son chef comme n'importe quel interne.

  • Pascale Lafitte

    Je reviens à vous, à votre internat. Une année sans patient, ça a été difficile ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    C'est une bonne question. J'ai appréhendé un peu. Je me suis dit, mais finalement, est-ce qu'à l'issue de... Ça se trouve, je me suis dit, au bout d'un an, peut-être que je n'aurais pas envie de revenir. Et je vais peut-être repartir en histoire géo ou en astrophysique. Et j'ai suivi le conseil d'un très bon ami à moi qui a arrêté médecine depuis longtemps, qui était en... en 4ème, 5ème année quand il a arrêté enfin il l'a mis en pause actuellement parce qu'il court beaucoup il fait du 1500m, il essaie d'être sélectionné aux Jeux Olympiques et je lui avais dit mais toi t'as pas peur de partir et puis de pas revenir il m'avait dit mais Kylian si je ne reviens pas c'est que j'avais plus envie de faire ça et c'est pas grave et puis finalement peut-être qu'en partant je vais me rendre compte que c'était vraiment ça que j'avais envie de faire et donc j'aurais envie de revenir donc finalement tout bénéf pour moi de... de faire une pause. Et je me suis dit, c'est vraiment vrai ce qu'il dit. Et donc, je suis parti avec cette philosophie-là dans mon année. Heureusement, ce que j'ai constaté, c'est que le patient me manquait quand même, que la pratique me manquait. Et donc assez vite, j'ai essayé de trouver un créneau pour remplacer. J'ai fait une semaine de remplacement en avril. Je me suis dit en avril, il ne devrait pas y avoir grand chose, ça devrait aller. Oui, sauf une grève nationale organisée le 29 avril, alors que je remplaçais deux semaines avant. Donc c'est souvent ça ce qui s'est passé pendant mon année. Quand je remplaçais, il y avait la guerre partout, il fallait organiser. des contre-attaques.

  • Pascale Lafitte

    Donc là, vous reprenez...

  • Killian L'Helgouarc'h

    Je suis très content de revenir. Je me suis posé la question longtemps de savoir si je faisais un deuxième mandat, une deuxième année, ce qui est possible. Il faut bien que je finisse un jour mon internat, c'était un peu la conclusion. Et je me suis dit, si je faisais une deuxième année, j'aurais sanctuarisé un jour ou deux dans la semaine ou des demi-journées où je fais du remplacement et je fais de la médecine, parce que je peux remplacer actuellement. donc c'est content et confiant que je reviens, que je reprends, que j'ai repris la médecine. Et j'avais hâte de reprendre.

  • Pascale Lafitte

    Et votre projet pour après, c'est d'être médecin d'abord et avant tout, mais pas que, j'ai l'impression.

  • Killian L'Helgouarc'h

    D'abord médecin, ça c'est clair, ça c'est sûr et certain. Plutôt dans les territoires ruraux, donc en Lauserre. J'ai aussi découvert pendant mon internat Mayotte, que j'ai adoré, où il y a tout à faire sur le plan... de la santé à créer à Mayotte, donc c'est des territoires qui me plaisent bien. Donc d'abord médecin, et puis j'ai toujours été engagé, donc ce serait mentir que de dire que je ne serais pas engagé demain non plus, quelle que soit la forme de l'engagement, parce qu'il y a mille façons de s'engager. Là, on va dire que j'ai raccroché l'ISNI, mais je commence à me réengager dans l'association du Shift Project, il est shifter. Donc voilà, c'est d'autres formes d'engagement, c'est sur d'autres sujets aussi, d'autres thématiques qui me plaisent bien. Mais j'ai toujours été engagé, donc je sais que je le serai toujours.

  • Pascale Lafitte

    Cet engagement, dont parle Kylian, l'association The Shifters, apporte un soutien bénévole au centre de réflexion The Shift Project qui œuvre à la décarbonation de l'économie. Je vous remercie.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Merci.

  • Pascale Lafitte

    Je vais vous laisser aller retrouver vos patients, puisque maintenant vous en avez. Tout à fait. Merci beaucoup. Partagez le podcast, faites vivre et prospérer ces entretiens simplement en vous abonnant et en partageant le lien. Je vous dis à bientôt pour un prochain épisode d'Internon Médecine, le podcast à suivre sans ordonnance ni modération. Cet épisode d'Internon Médecine vous a été proposé en partenariat avec l'ISNI, l'intersyndicale nationale des internes.

Chapters

  • Introduction au podcast et présentation de l'invité

    00:09

  • Le parcours de Killian L'Helgouarc'h vers la médecine

    01:01

  • Les choix de spécialité et l'importance du contact patient

    01:36

  • L'épanouissement en tant qu'interne et responsabilités médicales

    04:05

  • La définition du médecin et la dimension humaine de la médecine

    05:33

  • Killian L'Helgouarc'h et son engagement pour les territoires ruraux

    07:00

  • L'importance de la communication et de la bienveillance en médecine

    08:35

  • Réflexions sur la santé mentale des internes

    14:17

  • Responsabilités et bienveillance dans la formation médicale

    19:25

  • Conclusion et perspectives d'avenir deKillian L'Helgouarc'h

    28:48

Description

Qu'est-ce qui pousse un jeune homme à choisir la médecine générale après avoir exploré d'autres voies ? Pour cet épisode du podcast "Internes en médecine", j'ai rencontré Killian L'Helgouarc'h, interne en médecine générale à Montpellier et ancien président de l'ISNI, l'Intersyndicale Nationale des Internes. Killian partage avec nous son histoire, marquée par un accident de santé et une opération chirurgicale lourde durant son enfance qui a éveillé en lui une passion pour la médecine. Ce témoignage est bien plus qu'un récit personnel ; c'est une réflexion sur les défis et les joies d'une carrière médicale.

Killian nous plonge dans ses expériences durant l'externat, où il a fait ses premiers pas dans le monde médical. Il évoque avec émotion ses premiers contacts avec les patients, soulignant la satisfaction qu'il a trouvée dans l'internat, malgré la pression constante qui pèse sur les internes. "La médecine, c'est avant tout une histoire de relations humaines", dit-il, rappelant l'importance de la bienveillance et du soutien au sein des équipes médicales. À travers ses mots, on ressent son engagement sincère pour améliorer les conditions de travail des internes, un sujet qui lui tient particulièrement à cœur.

Nous abordons également la santé mentale des internes, un thème crucial dans notre système de santé actuel. Killian partage son point de vue sur l'impact de la pression académique sur le bien-être des futurs médecins. "Il est essentiel de prendre soin de soi pour pouvoir prendre soin des autres", insiste-t-il, un message fort qui résonne avec de nombreux professionnels de santé. Cette discussion ouverte et honnête met en lumière les défis que rencontrent les internes, mais également les ressources et le soutien disponibles.

Enfin, Killian exprime son désir de travailler dans des territoires ruraux, soulignant l'importance de la médecine générale dans ces zones souvent négligées. "Chaque patient mérite une attention particulière, peu importe où il se trouve", affirme-t-il avec conviction. Son engagement pour la médecine générale est palpable et inspirant, et il nous rappelle à quel point cette spécialité est vitale pour notre système de santé.

Rejoignez-nous pour cet échange enrichissant qui met en avant non seulement le parcours de Killian, mais aussi les enjeux actuels de la médecine. Que vous soyez étudiant en médecine, professionnel de santé ou simplement curieux d'en apprendre davantage sur le monde médical, cet épisode de "Internes en médecine" est fait pour vous.


Interne en médecine est un podcast de et avec Pascale Lafitte, réalisé en partenariat avec l'ISNI, l'Intersyndicale Nationale des Internes.

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Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Pascale Lafitte

    Bonjour et bienvenue, je suis Pascale Lafitte, je suis ravie de vous retrouver pour cette nouvelle saison d'Internes en médecine, une série d'entretiens avec des internes, avec des médecins également, qui se replongeront dans leurs années d'internat, des proches et des accompagnants d'internes aussi. Et avant tout, je vais commencer par vous remercier, vous, de suivre ce podcast. Vous êtes de plus en plus nombreux, c'est chouette, donc sincèrement merci. Et maintenant allons-y, et n'oubliez pas, Internes en médecine, le podcast, est à suivre sans ordonnance ni modération. Un rendez-vous réalisé en partenariat avec l'ISNI, l'Intersyndicale Nationale des Internes. Intern en médecine, saison 2, c'est parti, avec un premier entretien, une première rencontre.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Je m'appelle Kylian Lelguarch, intern de médecine générale en dernière année et ancien président de l'ISNI.

  • Pascale Lafitte

    Je suis ravie d'avoir enfin rencontré Kylian, tellement occupé l'an passé que j'ai attendu le bon moment pour lui emprunter un peu de son temps, ne pas trop le déranger, soit la fin de son mandat de président de l'ISNI. Kylian est interne à Montpellier, nous nous sommes rencontrés donc à Montpellier, dans un bureau du syndicat des internes du Languedoc-Roussillon, au CHU La Péronie, à deux pas de l'accueil des urgences. Kylian nous explique pourquoi. Il a choisi de devenir médecin.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Je pense que ça remonte à quand j'étais tout petit, à l'âge de 6 ans, je me suis fait opérer, une grosse chirurgie. J'ai passé plusieurs jours à l'hôpital, donc je pense que ça m'a bien marqué. Mes parents aussi étaient, surtout ma mère, côté de ma mère, qui était très portée santé, donc m'a toujours un peu poussé aussi à m'intéresser à la santé. Et puis finalement, après, quand j'ai grandi, j'ai abandonné la médecine. Je me suis dit que ce sera plutôt la physique ou l'histoire géo qui me plaisait. et puis finalement en en quand il fallait choisir où aller après post-bac. Puisque la médecine est sélective, on va commencer par la sélection d'abord, voir si j'y arrive, et puis si je n'y arrive pas, j'aurai des plans B et C si jamais. Donc je suis parti là-dedans, et j'ai fait deux ans et j'ai réussi. Donc voilà pourquoi je me retrouve médecin aujourd'hui.

  • Pascale Lafitte

    Ce n'est pas un métier comme astrophysicien, ce n'est pas un métier comme prof d'histoire, ou historien, ou chercheur, ou géographe. La médecine, il y a un patient, il n'y a pas des étoiles à observer. Vous saviez à quoi vous attendre ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    J'ai eu la chance de faire quelques stages. C'est très compliqué quand on est lycéen de faire des stages à l'hôpital parce qu'on n'est pas majeur. Il y a toutes les questions de responsabilité, de confidentialité que l'hôpital public ne fait pas confiance. J'ai eu la chance de faire un stage dans un hôpital mais dans des services qui ne voyaient pas de patients. En radiologie, bon... Manque de bol pour eux, on voyait les patients donc j'en ai vu. Et puis je suis allé en Suisse aussi faire un stage d'une semaine pour voir les côtés infirmiers, pour voir un peu le métier, ce qui n'est pas du tout pareil non plus que médecin, mais ça me donnait une première approche de la santé. J'ai beaucoup maturé ce que c'était la médecine tout au long de mes études. J'ai toujours aimé le contact avec les gens et c'est d'ailleurs pour ça que j'ai choisi le médecin généraliste. Au départ je voulais faire radiologue ou médecine nucléaire, ce qui n'est pas du tout pareil. Et quand j'ai fait un stage où vous ne voyez pas de patient, je me suis dit c'est pas trop pour moi ça, donc il fallait que je change mon projet professionnel, et c'est là où j'ai choisi du coup la médecine générale. Donc je pense que j'ai un peu maturé, et puis j'ai appris aussi à apprécier la médecine tout au long de mes études. J'ai assez peu aimé l'externat parce qu'on n'a pas trop de responsabilités, on se fait un peu marcher dessus dans les services, on ne sait pas trop où se mettre, personne ne connaît son prénom, notre prénom parce qu'on est là trop longtemps. trois semaines dans le mois et qu'après ça change. Donc j'ai très peu aimé. Et là où je me suis vraiment épanoui en médecine, c'est quand j'ai eu mes premières responsabilités, mes premiers patients, ou même en sixième année j'en avais un peu, où vraiment il fallait que je connaisse très bien mes patients. Pas beaucoup, un ou deux, mais c'était mes patients, à moi, je vais m'en occuper. Et c'est là où vraiment j'ai pris la dimension de ce que c'était le médecin et puis surtout le... Là où j'ai pris aussi du plaisir à suivre le patient de A à Z, du début de son hospitalisation jusqu'à la fin de son hospitalisation.

  • Pascale Lafitte

    Donc ça veut dire que c'est lorsque vous êtes rentré à un internat ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Oui. Paradoxalement, ce que je dis souvent, c'est que finalement, j'apprécie la médecine depuis le début de l'internat. Or,

  • Pascale Lafitte

    vous, vous vous êtes engagé pour aider les internes à vivre mieux.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Effectivement, c'est un paradoxe intéressant que vous soulevez, mais je pense que ce que j'ai apprécié... dans l'internat, dans le début de l'internat, c'était à la fois les responsables qui sont difficiles et très durs, mais j'ai eu la chance, contrairement à beaucoup de mes collègues, d'avoir des stages qui sont bienveillants, où le temps de travail était à peu près respecté, et je me sens chanceux dans les stages que j'ai pu choisir. Et puis, au-delà de la responsabilité, des stages avec des praticiens et des chefs qui étaient très bienveillants, c'était aussi le... Ce qui m'a beaucoup plu, c'était le contact avec le patient et de se dire que j'étais le médecin du patient. C'est ça que j'ai beaucoup apprécié.

  • Pascale Lafitte

    Comment vous définiriez un médecin ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Je dirais que c'est quelqu'un qui doit prendre soin de la personne, tout en ayant conscience des limites du soin qu'il peut prodiguer. Et c'est ça que j'aime beaucoup avec la médecine générale, parce que finalement, quand on est généraliste, on suit les patients quasiment depuis parfois, et à mon avis, j'espère que j'aurai des patients comme ça, depuis tout bébé jusqu'à tout vieux. Et du coup, ça fait qu'on a une dimension qui est vraiment au-delà de juste l'aspect de la pathologie aiguë ou chronique qu'on suit, et aussi tout l'aspect sociétal et environnemental du patient qui... On rentre vraiment dans l'intimité de la personne, on sait avec qui elle est, s'il y a des enfants, où elle habite, son travail, comment ça s'y passe, etc. Et donc c'est au-delà du seul soin technique, que ça, on a tous appris à faire, c'est aussi de savoir mesurer l'intensité du soin qu'on doit prodiguer. Et c'est ça qui rend toute la complexité de la médecine, et elle est encore plus complexe que celle que moi j'aurais bien fait. qui est plutôt dans les territoires ruraux, dans les déserts médicaux, où en plus de la complexité de savoir jusqu'où on va, il y a la complexité de savoir avec quels moyens on a sur le territoire.

  • Pascale Lafitte

    Donc vous voulez aller dans des territoires plutôt désertiques, ce qu'on appelle le désert médical, c'est ça ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Je pense que c'est le bon terme. Et d'ailleurs, ça casse un peu le coup à beaucoup de gens qui disent que les jeunes ne veulent plus aller dans les déserts médicaux. Non, c'est faux. J'en fais partie et moi j'ai toujours vécu en ruralité. Les seules fois où j'ai vécu en ville c'était pour les études. Mais je sais que c'est pas là où je m'y sens le mieux et je préfère aller dans les territoires ruraux. Donc forcément dans les déserts médicaux, même si Paris est le plus grand désert médical de France. Mais en tout cas c'est dans les territoires ruraux que je me sens mieux. C'est aussi là où la pratique que j'ai envie, qui est une pratique un peu particulière, à la fois de généraliste en cabinet mais aussi... Avec une valance un peu hospitalière, c'est là où je peux la retrouver. Il y a des choses qui peuvent se faire assez plus facilement que dans certains endroits, notamment avec des CHU, des grands hôpitaux, où c'est toujours un peu plus long de construire. L'exemple que je prends souvent, c'est en Lauser à Langoyne, là où j'ai fait mon premier stage chez le praticien. Il y a une MSP, mais aussi un hôpital de proximité, ce qui fait que des patients qu'on voit en consultation ou qu'on voit en ville en visite, on peut les hospitaliser nous-mêmes. Et c'est nous qui sommes responsables de l'hospitalisation dans l'hôpital de proximité. Il n'y a pas besoin de l'envoyer à 40 minutes à Mande ou au Puy-en-Velay pour passer par les urgences, puis on sait être hospitalisé. Donc il y a une fluidité du parcours patient qui, je trouve, est très intéressante.

  • Pascale Lafitte

    Ça veut dire que vous pouvez être aussi le médecin du patient hospitalisé, parce que l'organisation est faite comme ça ? C'est quelque chose d'expérimental ou c'est quelque chose qu'on retrouve dans tous les endroits où il y a un véritable manque de médecins ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Alors c'est exactement ça, c'est-à-dire que le matin c'est les consultations classiques, au cabinet, puis après sur l'heure de midi, c'est la visite des patients à l'hôpital. Mais c'est nous qui le faisons en tant que généralistes. Alors c'est pas des grosses hospitalisations, c'est pas que ça soit non plus trop complexe, parce qu'on n'a pas le plateau technique pour faire du soin complexe, mais c'est des infections pulmonaires, des infections urinaires, c'est de la rééducation post-chute, c'est... décharger aussi les hôpitaux à côté. Si un patient vit sur place, autant le ramener le plus rapidement possible. Donc c'est ça. Et c'est, je pense, assez expérimental. Ou en tout cas, je ne l'ai pas trouvé ailleurs. J'ai trouvé des systèmes un peu équivalents, mais pas aussi unifiés qu'à Langone, là où j'étais. Parce que c'est vraiment rattaché physiquement à la MSP, avec l'hôpital de proximité, ce qui n'est pas le cas souvent dans les autres endroits. Et quand j'avais interrogé les ARS qui sont normalement 40 de l'Organisation Territoriale des Soins, ou en tout cas qui connaissent leur territoire, aucune ARS en France était capable de me dire si un modèle comme ça existait dans leur territoire. Donc c'est juste pas, par réponse du non ça n'existe pas, c'est juste non on ne sait pas. Donc ce qui démontre un peu, on va dire, l'éloignement... des ARS par rapport au territoire.

  • Pascale Lafitte

    On pourrait dire que Kylian, c'est la force tranquille. Voix douce, ton posé, rassurant, mais direct aussi, comme le laisse entrevoir cette pique ou saillie au sujet de l'ARS. En l'écoutant retracer ses rencontres, ses anecdotes d'interne, je me suis demandé si cette expérience vécue à Langogne, en Lauser, qu'il rapporte spontanément, n'était pas la genèse de son engagement syndical.

  • Killian L'Helgouarc'h

    En fait, je me suis toujours engagé, si on remonte au tout début, j'étais délégué de classe en sixième et je l'ai été pendant sept ans. Je fais un septennat de délégué de classe et finalement, je me suis toujours engagé un peu pour les autres, pour les représenter. Et puis, j'aime bien avoir la responsabilité d'eux. J'aime bien réfléchir au système dans lequel je suis et porter un peu la voix de tout le monde. Donc, je l'ai fait quand j'étais au collège lycée. Puis après, je l'ai refait quand j'étais en fac de médecine. A Brest, tout au début, où j'ai été tuteur pour les premières années. Puis j'ai géré le tutorat avec trois autres amis à Brest. On a fait de très belles choses à Brest. On a rendu les cours gratuits, parce qu'il y avait un marché noir du cours. On a travaillé ça. On a rendu le tutorat gratuit aussi pour les boursiers. On a fait pas mal de choses. Puis après, j'ai fait l'ANEMF, qui est le pendant de l'ISNIM et pour les plus jeunes. Et donc, c'était assez naturellement aussi pendant mon internat que je me suis dit, en fait, je me suis toujours engagé, je trouvais quelque chose à côté. j'aime La peur de s'ennuyer, je ne sais pas, mais en tout cas, j'avais envie de m'engager aussi. C'était aussi une façon de moi, parce que je viens de Brest, de Bretagne, du Finistère. Quand j'arrive à Montpellier, je ne connais personne, très peu de gens. C'est aussi une façon pour moi de rencontrer du monde, de comprendre aussi la géographie locale, le fonctionnement local, de m'investir justement dans le syndicat de Montpellier. Et puis après, quand j'ai été élu président, j'ai découvert l'ISNI, que je connaissais assez peu avant. Et je me suis dit, c'est un peu l'apothéose de l'engagement syndical quand même. J'ai fait trois ans au syndicat de Montpellier et je me suis dit, les planètes étaient alignées sur le plan professionnel et personnel pour se dire, ok, on peut tenter et se sentir aussi capable, parce que depuis très longtemps j'ai un manque de confiance en moi qui est quand même important. Et donc c'était aussi un challenge de se dire... Là, je planais de caligner, let's go, on y va, pendant un an, vivre à Paris, ce que je n'avais jamais fait non plus. Et puis prendre la tête du premier syndicat d'interne de France. C'est aussi s'exposer médiatiquement, c'est beaucoup de contraintes, mais c'était un grand plaisir et c'est un vrai challenge pour moi. Et donc, pour répondre à la question par rapport à Langueuil, je pense que ça a participé à mon engagement, ça c'est clair, parce que j'ai découvert la désert médicaux. Je les connaissais quand même un peu moins en Bretagne parce qu'on est un peu mieux fourni. Donc là, j'étais quand même assez frappé déjà de l'éloignement géographique avec les autres hôpitaux. Quand on demande à un patient de faire une échographie, c'est 40 minutes aller, 40 minutes retour. Il faut être vraiment sûr de soi qu'il faut faire déplacer le patient pour faire une échographie. Donc j'ai appris ça et je me suis dit que c'était un modèle qui était vraiment fantastique, qui me correspondait beaucoup. et je l'ai utilisé beaucoup de fois pendant ma présidence à l'ISNI pour montrer et démontrer qu'il y avait... D'autres solutions que la coercition pour laquelle je me bats, pour améliorer l'accès aux soins de nos concitoyens.

  • Pascale Lafitte

    Je vous donne une baguette magique où je suis premier ministre et je cherche un ministre de la santé et c'est vous, ça tombe sur vous. Forcément vous avez réfléchi à beaucoup de choses. Comment vous les verriez ces études de médecine demain pour qu'il y ait moins de maltraitance, pour qu'il n'y ait pas cette souffrance à soigner en fait. On a des internes qui souffrent pour nous soigner donc il y a quelque chose qui est... paradoxal qui est surtout insupportable.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Oui c'est complètement insupportable et moi les pires appels que j'ai eu dans ma vie ce sont des appels où on m'annonce un suicide d'un interne. Et que ce soit la famille qui m'appelle directement ou un président d'un syndicat local qui vient d'apprendre qu'un interne s'est suicidé, c'est absolument terrible. Et on se dit que là on a raté un truc collectivement qui a une responsabilité pas juste de la faculté, pas juste du CHU mais de tout le monde. sur ce terrible accident qui est arrivé. Si j'étais ministre de la Santé, moi j'essaierais d'inculper plus de bienveillance dans nos études, plus de responsabilité aussi, et plus de considération. Quand j'étais externe, je trouvais que c'était inadmissible qu'on nous appelle l'externe, et qu'on n'ait pas de prénom. Quand on est interne, je trouve ça inadmissible que quand on a des situations, on ne prend jamais le temps, on est tellement débordé, on a tellement de choses à faire toute la journée, qu'on ne prend jamais le temps de demander vraiment un « ça va » . Parce qu'il y a le « salut, ça va » du matin, classique, mais ce n'est pas un vrai « est-ce que ça va ? » . Et ça, je pense, quand on est responsable pédagogique, quand on est chef de service, qu'on a été énormément formé en management, c'est la base, le B.A.B. du management, de savoir si... Ces collaborateurs, ceux avec qui on travaille, vont bien ou vont pas bien, qui peut être un facteur en lien avec le service, mais ça peut être aussi complètement extérieur et que ça a un impact forcément sur le soin des patients. Parce que c'est surtout ça en fait. Comme vous disiez, c'est paradoxal d'avoir des soignants qui ne sont pas bien dans leur peau, qui ne sont pas bien dans leur tête et qui soignent des gens qui eux ne sont pas bien non plus. Finalement, personne n'est bien.

  • Pascale Lafitte

    D'abord, ils sont exténués. On a des interne. Je rencontre des internes depuis quelques mois, je rencontre des internes fatigués. Des internes qui disent une chose, par exemple, pourquoi on nous impose des gardes de 24 heures ? Parce que physiquement, il y a ceux qui peuvent, il y a ceux qui veulent, et il y a ceux qui physiquement ne les supportent pas, n'y arrivent pas. Or, l'internat, pour arriver au bout de ses études, il faut en passer par là. C'est ce que vous appelez bienveillance, considération,

  • Killian L'Helgouarc'h

    c'est ça ? Oui, alors on a fait deux travaux majeurs, donc la santé mentale pendant mon mandat à l'ISNI, et puis on a fait aussi une enquête handicap. Et j'étais effaré quand on avait des internes qui, je prends un exemple d'un TDAH, donc trouble du spectre autistique, nous disaient, le doyen m'a dit qu'avec mon TDAH, je ne pourrais pas faire médecine. Pourquoi ? Parce que l'interne n'arrivait pas à valider son stage aux urgences, parce que justement, on lui imposait des gardes 24 heures. Mais moi, je pose la question au doyen, est-ce qu'il faut... forcément faire des gardes de 24 heures pour être un bon médecin. Et aujourd'hui, personne en France n'est capable de dire en réalité qu'est-ce qu'il faut pour être un bon médecin. Pareil sur la parentalité, on a fait un gros travail sur... J'étais effaré des internes femmes qui calculaient au jour près, j'ai une amie qui a calculé au jour près quand est-ce qu'il fallait tomber enceinte pour éviter de se faire invalider de son stage. Je trouve ça lunaire. Et donc on a essayé de... d'amener plus de flexibilité, ça en cours, ça doit être validé par le Conseil d'État, donc on aura, je pense, de bonnes nouvelles à annoncer aux internes dans quelques mois. Et je trouvais ça pareil, absolument, on discutait avec les doyens de cette proposition de flexibilité, et notamment on veut l'invalidation automatique, c'est 4 mois. Si on fait moins de 4 mois, on est invalidé automatiquement, il n'y a pas de discussion. Et on l'a passé à 3 mois. Et tous les doyens disaient, mais c'est pas possible de valider un stage en trois mois, c'est une hérésie, on n'aura fait que la moitié du stage, comment c'est possible ? Et moi je leur disais, déjà, un, avec le temps de travail qu'on fait, trois mois de stage et six mois de stage en réalité, et puis deux, dites-moi ce qu'il faut apprendre dans des stages, et je vous dirais, ça se trouve, on va se rendre compte que pour être réanimateur, il faut quatre ans au lieu de cinq. Et peut-être que pour être généraliste, au lieu de trois, il faut peut-être un et demi, je n'en sais rien, deux. Donc, il y a cette hypocrisie de tout le monde où, en fait, on voit les études que sur le spectre quantitatif et pas sur le spectre qualitatif. Et ce qui fait que pour des internes qui ont du mal avec des gardes 24 heures, tout le monde ne peut pas faire ça. Et d'ailleurs, même si c'est prouvé, j'aime bien, souvent, le ministre de la Santé le disait, Yannick, Une autre disait, oui, mais c'est un fossé générationnel. Souvent, on entend ça, fossé générationnel, la jeune génération ne veut pas bosser ou ne veut plus bosser comme avant, etc. En fait, c'est juste aussi une question de santé publique. Toutes les études au niveau international démontrent et montrent qu'au bout de 24 heures, on est lessivé et qu'on prend bien moins bien en charge les patients que si on faisait un travail de 12 heures. Et d'ailleurs, même l'IA est plus empathique que nous au bout de 24 heures. que lire. L'IA est plus empathique que nous. À un moment donné, il faut peut-être se poser les bonnes questions.

  • Pascale Lafitte

    Ça veut dire qu'il ne faut pas arriver aux urgences à 5h du matin.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Voilà, exactement.

  • Pascale Lafitte

    Vous avez parlé de bienveillance, de responsabilité, de considération. Dans le mot responsabilité, qu'est-ce que vous entendez ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Ce que j'entends, c'est double responsabilité, donner plus de responsabilité aux étudiants. On est souvent, et notamment moi, mon grand regret de l'externat, c'est de ne pas avoir été vraiment en responsabilité, de ne pas avoir dit vieux. Plutôt que d'avoir dix patients à gérer, en fait on a un et tu essaies de bien le gérer toi-même. Et on te chapote, on fait mais tu prescris tout, tu vérifies tout, c'est toi qui gères. Et ça aujourd'hui les logiciels ne le permettent pas parce que si l'externe prescrit en fait ça a les codes de l'interne, enfin c'est juste interdit. Donc on pourrait donner un peu plus de responsabilité aux externes. Et puis la responsabilité aussi des doyens, des chefs de service sur le respect qu'ils ont normalement de la loi. Ils sont tenus de respecter la loi, mais ils ne le respectent pas. Ils ont plusieurs responsabilités aussi dans ce sens-là.

  • Pascale Lafitte

    Kylian se souvient aussi de son premier jour d'interne.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Quand j'ai fini de passer le concours de l'internat, je ne voulais pas faire un stage d'externat. Je ne voulais plus être externe, ça ne m'intéressait plus. Et donc, je voulais être interne. Donc, quand on est après le concours d'internat, on fait faisant fonction d'interne, FFI. Et je l'ai fait dans un petit hôpital à côté de Brest, dans un service de médecine. donc je dirais que c'est ma première euh C'était mon premier jour d'internat, sans être tout à fait le premier jour d'internat, puisque je le faisais pendant l'été, avant la rentrée officielle qui était en novembre. Et je me souviens d'arriver, c'était ma chef que j'adorais, qui m'a beaucoup appris, qui malheureusement est décédée depuis, et on faisait la visite ensemble, et on voyait un patient qui toussait, etc. Et elle me dit, bon, Kian, qu'est-ce qu'on fait ? Moi, je dis... Je ne sais pas. J'ai l'impression d'avoir tout oublié. J'ai l'impression de ne plus avoir les QCM dans lesquels je Ausha. Et donc, face aux patients, je ne savais plus quoi faire. Elle m'a dit, on va peut-être faire une radio pour voir si elle a une infection pulmonaire. Je dis, ah oui, pas bête, c'est une bonne idée. Donc, j'ai prescrit la radio et on est allé. Et c'était, c'était, c'était, je me suis senti à la fois très bête. Et en même temps, je me suis dit, bon, peut-être qu'en fait, c'est des cases à cocher. Je n'avais jamais prescrit de radio. tout seul, donc voilà, c'est la première fois et la prochaine fois, je saurai que si j'ai un doute, je fais une radio.

  • Pascale Lafitte

    Ça, c'est votre première avant-première. C'est une avant-première. Vous parlez d'une personne qui vous accompagne. Donc, l'expérience de l'interne, c'est comme un dé qu'on jette. La personne qui va vous accompagner la première fois, elle est essentielle ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Complètement. Et le compagnonnage, on le dit souvent en médecine, est important, mais en fait c'est fondamental parce que c'est C'est avec nos collègues qu'on apprend et qu'on travaille. On travaille à 100% à l'hôpital ou en ville. Donc si on ne s'entend pas avec nos collègues ou si nos collègues ne sont pas bienveillants avec nous parce qu'on est en apprentissage, c'est clair que ça ne va pas bien marcher et que le stage sera un enfer. Et moi, je l'ai vu à plusieurs reprises. Je parlais de ma première chef officiellement, clairement, qui m'a beaucoup appris et qui était très très forte, très très très forte. Et je me souviens aussi d'un stage en gériatrie. ici à Montpellier, enfin à Montpellier-Nîmes, et où j'avais une chef et ça m'avait beaucoup étonné, beaucoup étonné, ça m'avait beaucoup questionné. Je venais de passer un week-end de garde horrible, au total j'ai eu deux décès sur le week-end, dont deux décès dans lesquels je me questionnais beaucoup sur ma responsabilité en tant que médecin. Et sur le deuxième décès que j'ai eu, c'était une patiente qui faisait une détresse respiratoire majeure à 6h du matin, pour lequel j'ai... J'ai fait ce qu'il fallait, et enfin, à posteriori, je sais que j'ai fait ce qu'il fallait, mais sur le coup, pas forcément. Et donc, elle était très, très, très dysnique, enfin, grosse difficulté à respirer. Donc, j'ai appelé ma chef pour échanger avec elle, qui est par téléphone chez elle. Et elle m'a dit, bon, je pense qu'on va devoir la sédater parce qu'elle n'est pas confortable et qu'on n'y arrive pas, et qu'elle est trop abîmée pour la sauver. Et donc, elle m'a dit, j'arrive. Je me suis dit... J'arrive, c'est-à-dire tu viens sur place, elle me fait oui oui j'arrive, j'arrive. Et là je me suis dit bon, alors soit c'est que je suis nul et que ma chef vient pour prendre la main, soit c'est que je suis nul, enfin il n'y avait pas d'autre possibilité que l'autre possibilité que j'étais nul à ce moment-là. Et en plus elle a eu un accident de voiture sur la rentrée, rien n'allait. Donc c'est une autre chef qui est arrivée et puis finalement quand elle est arrivée ça allait un peu mieux, finalement elle avait passé un peu le cap donc ça... On a pu temporiser, mais elle est décédée dans les heures qui suivaient quand même. Et donc j'ai assez vite débriefé, parce que j'ai eu la chance d'avoir des chefs avec qui je pouvais parler. Et parce que ça m'a beaucoup pesé, je me suis dit, mais pourquoi elle se déplace ? Je n'ai jamais vu un chef, pendant la nuit, se déplacer sur une urgence comme ça. Et donc elle m'a dit à posteriori, non, non, totale confiance en toi. Simplement, la première fois que j'ai dû faire une sédation, parce que la patiente n'était vraiment pas bien. j'étais toute seule à l'hôpital et mon chef ne s'est pas déplacé, je l'ai hyper mal vécu donc je ne voulais pas que ça t'arrive, donc c'est pour ça que je suis venu et je me suis dit ah ouais là c'est une leçon de bienveillance que je viens de me prendre

  • Pascale Lafitte

    Elle s'est déplacée pour vous et pour votre futur parcours de médecin et là ça m'a ça faisait pas partie des options que j'envisageais au départ donc ça m'a beaucoup surpris et je lui remercie La confiance en soi, ce que vous abordez là, la peur de l'erreur, la peur d'avoir fait quelque chose qui ne va pas, est-ce que c'est difficile à vivre au quotidien, à porter ? Est-ce qu'il faut savoir s'entourer ? Est-ce qu'il y a un travail à faire pour être mieux avec ça ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Tous les internes que j'ai vus, qui m'ont appelé ou qui nous ont sollicités quand j'étais président de Montpellier ou président national, A chaque fois, je me disais, c'est trop bête, parce que s'il y a eu plus de communication dans le stage, s'il y a eu plus de bienveillance dans le stage, en fait, on aurait évité des drames, on aurait évité des situations, ça peut aller jusqu'au suicide de l'interne, clairement. Et donc, je me dis vraiment qu'on manque, en fait, de communication. Et en fait, on le voit bien, on est quand même dans un système où on passe un premier concours en première année, puis un second concours en sixième année. Parfois même, pendant l'externat, il faut être le meilleur classé pour pouvoir choisir les meilleurs stages. Et puis après, pendant l'internat, si on n'est pas bien classé, on va choisir les stages en dernier. Donc on n'aura jamais le choix du stage, on sera toujours à subir le système. Et donc, cette concurrence qui est importante, puis même une concurrence des postes après aussi, notamment en hospitalier, pas en libéral forcément, mais en hospitalier. Donc cet aspect de concurrence permanente fait qu'on ne doit pas montrer de faiblesse. Et souvent, c'est vécu comme « je ne vais pas bien, donc c'est une faiblesse » ou « j'ai mal vécu une situation clinique, c'est une faiblesse, il ne faut pas que je la montre » . Et aussi parce que c'est entretenu par nos seniors parfois aussi, qui ne sont pas tous bienveillants clairement, et qui ne veulent pas qu'on montre de faiblesse, qu'il faut que ça dure. Et ça, je l'ai constaté que dans beaucoup de situations, s'il y a eu une communication comme là, moi j'ai pu le faire. dans mon service, ça me pesait cette situation clinique pour savoir si j'étais responsable ou pas responsable, s'il fallait que je m'améliore ou pas m'améliorer, ou il y avait un truc que j'avais raté pendant la nuit. Et le fait d'avoir pu débriefer avec mes chefs, ça calme tout de suite l'angoisse. On reprend un peu confiance en soi, même si on a vécu une situation qui était difficile. Et après, on peut mieux repartir. Quand on est dans le doute permanent de savoir si ce qu'on a fait est bien ou pas bien, et qu'on ne peut jamais demander si c'est bien ou pas bien, ou si on nous... montre simplement ce qu'on ne sait pas faire et jamais ce qu'on sait faire, c'est clair qu'au bout d'un internat entier, on finit par ne pas savoir ce qu'on fait, d'être très angoissé et de ne pas avoir confiance en soi. Et en médecine, c'est essentiel parce qu'on a la vie de gens entre les mains, avec des décisions qui sont complexes et difficiles à prendre des fois dans la minute, et ça peut mettre rapidement en difficulté. et si on n'a pas le... Si on n'est pas bien entouré, c'est toujours compliqué. Moi, je disais aux nouveaux internes qui sont arrivés à Montpellier, quand on sort de garde, ça m'avait toujours frappé. Mes collègues, mes co-internes étaient toujours en disant « pendant ma garde, j'ai fait ça, j'ai fait ça, j'ai fait ci et tout, j'ai réanimé machin, j'ai mis tant de l'asilex à tel, etc. » En fait, quand on creuse un peu, il n'a pas vraiment fait ça. appeler son chef pour savoir quoi faire. Donc ça dédramatise un peu parce qu'on se dit, il a fait tout ça pendant la nuit, mais tout seul, mais waouh ! Et on s'est dit, vraiment, moi je suis nul, je serais incapable de faire tout ça. Mais finalement, quand on creuse, on est tous pareils, on a tous les mêmes difficultés et en fait, il était aussi en difficulté comme nous, on aurait pu l'être. Il a appelé son chef comme n'importe quel interne.

  • Pascale Lafitte

    Je reviens à vous, à votre internat. Une année sans patient, ça a été difficile ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    C'est une bonne question. J'ai appréhendé un peu. Je me suis dit, mais finalement, est-ce qu'à l'issue de... Ça se trouve, je me suis dit, au bout d'un an, peut-être que je n'aurais pas envie de revenir. Et je vais peut-être repartir en histoire géo ou en astrophysique. Et j'ai suivi le conseil d'un très bon ami à moi qui a arrêté médecine depuis longtemps, qui était en... en 4ème, 5ème année quand il a arrêté enfin il l'a mis en pause actuellement parce qu'il court beaucoup il fait du 1500m, il essaie d'être sélectionné aux Jeux Olympiques et je lui avais dit mais toi t'as pas peur de partir et puis de pas revenir il m'avait dit mais Kylian si je ne reviens pas c'est que j'avais plus envie de faire ça et c'est pas grave et puis finalement peut-être qu'en partant je vais me rendre compte que c'était vraiment ça que j'avais envie de faire et donc j'aurais envie de revenir donc finalement tout bénéf pour moi de... de faire une pause. Et je me suis dit, c'est vraiment vrai ce qu'il dit. Et donc, je suis parti avec cette philosophie-là dans mon année. Heureusement, ce que j'ai constaté, c'est que le patient me manquait quand même, que la pratique me manquait. Et donc assez vite, j'ai essayé de trouver un créneau pour remplacer. J'ai fait une semaine de remplacement en avril. Je me suis dit en avril, il ne devrait pas y avoir grand chose, ça devrait aller. Oui, sauf une grève nationale organisée le 29 avril, alors que je remplaçais deux semaines avant. Donc c'est souvent ça ce qui s'est passé pendant mon année. Quand je remplaçais, il y avait la guerre partout, il fallait organiser. des contre-attaques.

  • Pascale Lafitte

    Donc là, vous reprenez...

  • Killian L'Helgouarc'h

    Je suis très content de revenir. Je me suis posé la question longtemps de savoir si je faisais un deuxième mandat, une deuxième année, ce qui est possible. Il faut bien que je finisse un jour mon internat, c'était un peu la conclusion. Et je me suis dit, si je faisais une deuxième année, j'aurais sanctuarisé un jour ou deux dans la semaine ou des demi-journées où je fais du remplacement et je fais de la médecine, parce que je peux remplacer actuellement. donc c'est content et confiant que je reviens, que je reprends, que j'ai repris la médecine. Et j'avais hâte de reprendre.

  • Pascale Lafitte

    Et votre projet pour après, c'est d'être médecin d'abord et avant tout, mais pas que, j'ai l'impression.

  • Killian L'Helgouarc'h

    D'abord médecin, ça c'est clair, ça c'est sûr et certain. Plutôt dans les territoires ruraux, donc en Lauserre. J'ai aussi découvert pendant mon internat Mayotte, que j'ai adoré, où il y a tout à faire sur le plan... de la santé à créer à Mayotte, donc c'est des territoires qui me plaisent bien. Donc d'abord médecin, et puis j'ai toujours été engagé, donc ce serait mentir que de dire que je ne serais pas engagé demain non plus, quelle que soit la forme de l'engagement, parce qu'il y a mille façons de s'engager. Là, on va dire que j'ai raccroché l'ISNI, mais je commence à me réengager dans l'association du Shift Project, il est shifter. Donc voilà, c'est d'autres formes d'engagement, c'est sur d'autres sujets aussi, d'autres thématiques qui me plaisent bien. Mais j'ai toujours été engagé, donc je sais que je le serai toujours.

  • Pascale Lafitte

    Cet engagement, dont parle Kylian, l'association The Shifters, apporte un soutien bénévole au centre de réflexion The Shift Project qui œuvre à la décarbonation de l'économie. Je vous remercie.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Merci.

  • Pascale Lafitte

    Je vais vous laisser aller retrouver vos patients, puisque maintenant vous en avez. Tout à fait. Merci beaucoup. Partagez le podcast, faites vivre et prospérer ces entretiens simplement en vous abonnant et en partageant le lien. Je vous dis à bientôt pour un prochain épisode d'Internon Médecine, le podcast à suivre sans ordonnance ni modération. Cet épisode d'Internon Médecine vous a été proposé en partenariat avec l'ISNI, l'intersyndicale nationale des internes.

Chapters

  • Introduction au podcast et présentation de l'invité

    00:09

  • Le parcours de Killian L'Helgouarc'h vers la médecine

    01:01

  • Les choix de spécialité et l'importance du contact patient

    01:36

  • L'épanouissement en tant qu'interne et responsabilités médicales

    04:05

  • La définition du médecin et la dimension humaine de la médecine

    05:33

  • Killian L'Helgouarc'h et son engagement pour les territoires ruraux

    07:00

  • L'importance de la communication et de la bienveillance en médecine

    08:35

  • Réflexions sur la santé mentale des internes

    14:17

  • Responsabilités et bienveillance dans la formation médicale

    19:25

  • Conclusion et perspectives d'avenir deKillian L'Helgouarc'h

    28:48

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Description

Qu'est-ce qui pousse un jeune homme à choisir la médecine générale après avoir exploré d'autres voies ? Pour cet épisode du podcast "Internes en médecine", j'ai rencontré Killian L'Helgouarc'h, interne en médecine générale à Montpellier et ancien président de l'ISNI, l'Intersyndicale Nationale des Internes. Killian partage avec nous son histoire, marquée par un accident de santé et une opération chirurgicale lourde durant son enfance qui a éveillé en lui une passion pour la médecine. Ce témoignage est bien plus qu'un récit personnel ; c'est une réflexion sur les défis et les joies d'une carrière médicale.

Killian nous plonge dans ses expériences durant l'externat, où il a fait ses premiers pas dans le monde médical. Il évoque avec émotion ses premiers contacts avec les patients, soulignant la satisfaction qu'il a trouvée dans l'internat, malgré la pression constante qui pèse sur les internes. "La médecine, c'est avant tout une histoire de relations humaines", dit-il, rappelant l'importance de la bienveillance et du soutien au sein des équipes médicales. À travers ses mots, on ressent son engagement sincère pour améliorer les conditions de travail des internes, un sujet qui lui tient particulièrement à cœur.

Nous abordons également la santé mentale des internes, un thème crucial dans notre système de santé actuel. Killian partage son point de vue sur l'impact de la pression académique sur le bien-être des futurs médecins. "Il est essentiel de prendre soin de soi pour pouvoir prendre soin des autres", insiste-t-il, un message fort qui résonne avec de nombreux professionnels de santé. Cette discussion ouverte et honnête met en lumière les défis que rencontrent les internes, mais également les ressources et le soutien disponibles.

Enfin, Killian exprime son désir de travailler dans des territoires ruraux, soulignant l'importance de la médecine générale dans ces zones souvent négligées. "Chaque patient mérite une attention particulière, peu importe où il se trouve", affirme-t-il avec conviction. Son engagement pour la médecine générale est palpable et inspirant, et il nous rappelle à quel point cette spécialité est vitale pour notre système de santé.

Rejoignez-nous pour cet échange enrichissant qui met en avant non seulement le parcours de Killian, mais aussi les enjeux actuels de la médecine. Que vous soyez étudiant en médecine, professionnel de santé ou simplement curieux d'en apprendre davantage sur le monde médical, cet épisode de "Internes en médecine" est fait pour vous.


Interne en médecine est un podcast de et avec Pascale Lafitte, réalisé en partenariat avec l'ISNI, l'Intersyndicale Nationale des Internes.

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Et si ce podcast vous séduit, alors partagez-le avec vos proches, amis, collègues, voisins et votre médecin aussi qui a peut-être enfouit sous une montagne d’antibiotiques et de prescriptions ses années d’internat.



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Pascale Lafitte

    Bonjour et bienvenue, je suis Pascale Lafitte, je suis ravie de vous retrouver pour cette nouvelle saison d'Internes en médecine, une série d'entretiens avec des internes, avec des médecins également, qui se replongeront dans leurs années d'internat, des proches et des accompagnants d'internes aussi. Et avant tout, je vais commencer par vous remercier, vous, de suivre ce podcast. Vous êtes de plus en plus nombreux, c'est chouette, donc sincèrement merci. Et maintenant allons-y, et n'oubliez pas, Internes en médecine, le podcast, est à suivre sans ordonnance ni modération. Un rendez-vous réalisé en partenariat avec l'ISNI, l'Intersyndicale Nationale des Internes. Intern en médecine, saison 2, c'est parti, avec un premier entretien, une première rencontre.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Je m'appelle Kylian Lelguarch, intern de médecine générale en dernière année et ancien président de l'ISNI.

  • Pascale Lafitte

    Je suis ravie d'avoir enfin rencontré Kylian, tellement occupé l'an passé que j'ai attendu le bon moment pour lui emprunter un peu de son temps, ne pas trop le déranger, soit la fin de son mandat de président de l'ISNI. Kylian est interne à Montpellier, nous nous sommes rencontrés donc à Montpellier, dans un bureau du syndicat des internes du Languedoc-Roussillon, au CHU La Péronie, à deux pas de l'accueil des urgences. Kylian nous explique pourquoi. Il a choisi de devenir médecin.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Je pense que ça remonte à quand j'étais tout petit, à l'âge de 6 ans, je me suis fait opérer, une grosse chirurgie. J'ai passé plusieurs jours à l'hôpital, donc je pense que ça m'a bien marqué. Mes parents aussi étaient, surtout ma mère, côté de ma mère, qui était très portée santé, donc m'a toujours un peu poussé aussi à m'intéresser à la santé. Et puis finalement, après, quand j'ai grandi, j'ai abandonné la médecine. Je me suis dit que ce sera plutôt la physique ou l'histoire géo qui me plaisait. et puis finalement en en quand il fallait choisir où aller après post-bac. Puisque la médecine est sélective, on va commencer par la sélection d'abord, voir si j'y arrive, et puis si je n'y arrive pas, j'aurai des plans B et C si jamais. Donc je suis parti là-dedans, et j'ai fait deux ans et j'ai réussi. Donc voilà pourquoi je me retrouve médecin aujourd'hui.

  • Pascale Lafitte

    Ce n'est pas un métier comme astrophysicien, ce n'est pas un métier comme prof d'histoire, ou historien, ou chercheur, ou géographe. La médecine, il y a un patient, il n'y a pas des étoiles à observer. Vous saviez à quoi vous attendre ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    J'ai eu la chance de faire quelques stages. C'est très compliqué quand on est lycéen de faire des stages à l'hôpital parce qu'on n'est pas majeur. Il y a toutes les questions de responsabilité, de confidentialité que l'hôpital public ne fait pas confiance. J'ai eu la chance de faire un stage dans un hôpital mais dans des services qui ne voyaient pas de patients. En radiologie, bon... Manque de bol pour eux, on voyait les patients donc j'en ai vu. Et puis je suis allé en Suisse aussi faire un stage d'une semaine pour voir les côtés infirmiers, pour voir un peu le métier, ce qui n'est pas du tout pareil non plus que médecin, mais ça me donnait une première approche de la santé. J'ai beaucoup maturé ce que c'était la médecine tout au long de mes études. J'ai toujours aimé le contact avec les gens et c'est d'ailleurs pour ça que j'ai choisi le médecin généraliste. Au départ je voulais faire radiologue ou médecine nucléaire, ce qui n'est pas du tout pareil. Et quand j'ai fait un stage où vous ne voyez pas de patient, je me suis dit c'est pas trop pour moi ça, donc il fallait que je change mon projet professionnel, et c'est là où j'ai choisi du coup la médecine générale. Donc je pense que j'ai un peu maturé, et puis j'ai appris aussi à apprécier la médecine tout au long de mes études. J'ai assez peu aimé l'externat parce qu'on n'a pas trop de responsabilités, on se fait un peu marcher dessus dans les services, on ne sait pas trop où se mettre, personne ne connaît son prénom, notre prénom parce qu'on est là trop longtemps. trois semaines dans le mois et qu'après ça change. Donc j'ai très peu aimé. Et là où je me suis vraiment épanoui en médecine, c'est quand j'ai eu mes premières responsabilités, mes premiers patients, ou même en sixième année j'en avais un peu, où vraiment il fallait que je connaisse très bien mes patients. Pas beaucoup, un ou deux, mais c'était mes patients, à moi, je vais m'en occuper. Et c'est là où vraiment j'ai pris la dimension de ce que c'était le médecin et puis surtout le... Là où j'ai pris aussi du plaisir à suivre le patient de A à Z, du début de son hospitalisation jusqu'à la fin de son hospitalisation.

  • Pascale Lafitte

    Donc ça veut dire que c'est lorsque vous êtes rentré à un internat ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Oui. Paradoxalement, ce que je dis souvent, c'est que finalement, j'apprécie la médecine depuis le début de l'internat. Or,

  • Pascale Lafitte

    vous, vous vous êtes engagé pour aider les internes à vivre mieux.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Effectivement, c'est un paradoxe intéressant que vous soulevez, mais je pense que ce que j'ai apprécié... dans l'internat, dans le début de l'internat, c'était à la fois les responsables qui sont difficiles et très durs, mais j'ai eu la chance, contrairement à beaucoup de mes collègues, d'avoir des stages qui sont bienveillants, où le temps de travail était à peu près respecté, et je me sens chanceux dans les stages que j'ai pu choisir. Et puis, au-delà de la responsabilité, des stages avec des praticiens et des chefs qui étaient très bienveillants, c'était aussi le... Ce qui m'a beaucoup plu, c'était le contact avec le patient et de se dire que j'étais le médecin du patient. C'est ça que j'ai beaucoup apprécié.

  • Pascale Lafitte

    Comment vous définiriez un médecin ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Je dirais que c'est quelqu'un qui doit prendre soin de la personne, tout en ayant conscience des limites du soin qu'il peut prodiguer. Et c'est ça que j'aime beaucoup avec la médecine générale, parce que finalement, quand on est généraliste, on suit les patients quasiment depuis parfois, et à mon avis, j'espère que j'aurai des patients comme ça, depuis tout bébé jusqu'à tout vieux. Et du coup, ça fait qu'on a une dimension qui est vraiment au-delà de juste l'aspect de la pathologie aiguë ou chronique qu'on suit, et aussi tout l'aspect sociétal et environnemental du patient qui... On rentre vraiment dans l'intimité de la personne, on sait avec qui elle est, s'il y a des enfants, où elle habite, son travail, comment ça s'y passe, etc. Et donc c'est au-delà du seul soin technique, que ça, on a tous appris à faire, c'est aussi de savoir mesurer l'intensité du soin qu'on doit prodiguer. Et c'est ça qui rend toute la complexité de la médecine, et elle est encore plus complexe que celle que moi j'aurais bien fait. qui est plutôt dans les territoires ruraux, dans les déserts médicaux, où en plus de la complexité de savoir jusqu'où on va, il y a la complexité de savoir avec quels moyens on a sur le territoire.

  • Pascale Lafitte

    Donc vous voulez aller dans des territoires plutôt désertiques, ce qu'on appelle le désert médical, c'est ça ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Je pense que c'est le bon terme. Et d'ailleurs, ça casse un peu le coup à beaucoup de gens qui disent que les jeunes ne veulent plus aller dans les déserts médicaux. Non, c'est faux. J'en fais partie et moi j'ai toujours vécu en ruralité. Les seules fois où j'ai vécu en ville c'était pour les études. Mais je sais que c'est pas là où je m'y sens le mieux et je préfère aller dans les territoires ruraux. Donc forcément dans les déserts médicaux, même si Paris est le plus grand désert médical de France. Mais en tout cas c'est dans les territoires ruraux que je me sens mieux. C'est aussi là où la pratique que j'ai envie, qui est une pratique un peu particulière, à la fois de généraliste en cabinet mais aussi... Avec une valance un peu hospitalière, c'est là où je peux la retrouver. Il y a des choses qui peuvent se faire assez plus facilement que dans certains endroits, notamment avec des CHU, des grands hôpitaux, où c'est toujours un peu plus long de construire. L'exemple que je prends souvent, c'est en Lauser à Langoyne, là où j'ai fait mon premier stage chez le praticien. Il y a une MSP, mais aussi un hôpital de proximité, ce qui fait que des patients qu'on voit en consultation ou qu'on voit en ville en visite, on peut les hospitaliser nous-mêmes. Et c'est nous qui sommes responsables de l'hospitalisation dans l'hôpital de proximité. Il n'y a pas besoin de l'envoyer à 40 minutes à Mande ou au Puy-en-Velay pour passer par les urgences, puis on sait être hospitalisé. Donc il y a une fluidité du parcours patient qui, je trouve, est très intéressante.

  • Pascale Lafitte

    Ça veut dire que vous pouvez être aussi le médecin du patient hospitalisé, parce que l'organisation est faite comme ça ? C'est quelque chose d'expérimental ou c'est quelque chose qu'on retrouve dans tous les endroits où il y a un véritable manque de médecins ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Alors c'est exactement ça, c'est-à-dire que le matin c'est les consultations classiques, au cabinet, puis après sur l'heure de midi, c'est la visite des patients à l'hôpital. Mais c'est nous qui le faisons en tant que généralistes. Alors c'est pas des grosses hospitalisations, c'est pas que ça soit non plus trop complexe, parce qu'on n'a pas le plateau technique pour faire du soin complexe, mais c'est des infections pulmonaires, des infections urinaires, c'est de la rééducation post-chute, c'est... décharger aussi les hôpitaux à côté. Si un patient vit sur place, autant le ramener le plus rapidement possible. Donc c'est ça. Et c'est, je pense, assez expérimental. Ou en tout cas, je ne l'ai pas trouvé ailleurs. J'ai trouvé des systèmes un peu équivalents, mais pas aussi unifiés qu'à Langone, là où j'étais. Parce que c'est vraiment rattaché physiquement à la MSP, avec l'hôpital de proximité, ce qui n'est pas le cas souvent dans les autres endroits. Et quand j'avais interrogé les ARS qui sont normalement 40 de l'Organisation Territoriale des Soins, ou en tout cas qui connaissent leur territoire, aucune ARS en France était capable de me dire si un modèle comme ça existait dans leur territoire. Donc c'est juste pas, par réponse du non ça n'existe pas, c'est juste non on ne sait pas. Donc ce qui démontre un peu, on va dire, l'éloignement... des ARS par rapport au territoire.

  • Pascale Lafitte

    On pourrait dire que Kylian, c'est la force tranquille. Voix douce, ton posé, rassurant, mais direct aussi, comme le laisse entrevoir cette pique ou saillie au sujet de l'ARS. En l'écoutant retracer ses rencontres, ses anecdotes d'interne, je me suis demandé si cette expérience vécue à Langogne, en Lauser, qu'il rapporte spontanément, n'était pas la genèse de son engagement syndical.

  • Killian L'Helgouarc'h

    En fait, je me suis toujours engagé, si on remonte au tout début, j'étais délégué de classe en sixième et je l'ai été pendant sept ans. Je fais un septennat de délégué de classe et finalement, je me suis toujours engagé un peu pour les autres, pour les représenter. Et puis, j'aime bien avoir la responsabilité d'eux. J'aime bien réfléchir au système dans lequel je suis et porter un peu la voix de tout le monde. Donc, je l'ai fait quand j'étais au collège lycée. Puis après, je l'ai refait quand j'étais en fac de médecine. A Brest, tout au début, où j'ai été tuteur pour les premières années. Puis j'ai géré le tutorat avec trois autres amis à Brest. On a fait de très belles choses à Brest. On a rendu les cours gratuits, parce qu'il y avait un marché noir du cours. On a travaillé ça. On a rendu le tutorat gratuit aussi pour les boursiers. On a fait pas mal de choses. Puis après, j'ai fait l'ANEMF, qui est le pendant de l'ISNIM et pour les plus jeunes. Et donc, c'était assez naturellement aussi pendant mon internat que je me suis dit, en fait, je me suis toujours engagé, je trouvais quelque chose à côté. j'aime La peur de s'ennuyer, je ne sais pas, mais en tout cas, j'avais envie de m'engager aussi. C'était aussi une façon de moi, parce que je viens de Brest, de Bretagne, du Finistère. Quand j'arrive à Montpellier, je ne connais personne, très peu de gens. C'est aussi une façon pour moi de rencontrer du monde, de comprendre aussi la géographie locale, le fonctionnement local, de m'investir justement dans le syndicat de Montpellier. Et puis après, quand j'ai été élu président, j'ai découvert l'ISNI, que je connaissais assez peu avant. Et je me suis dit, c'est un peu l'apothéose de l'engagement syndical quand même. J'ai fait trois ans au syndicat de Montpellier et je me suis dit, les planètes étaient alignées sur le plan professionnel et personnel pour se dire, ok, on peut tenter et se sentir aussi capable, parce que depuis très longtemps j'ai un manque de confiance en moi qui est quand même important. Et donc c'était aussi un challenge de se dire... Là, je planais de caligner, let's go, on y va, pendant un an, vivre à Paris, ce que je n'avais jamais fait non plus. Et puis prendre la tête du premier syndicat d'interne de France. C'est aussi s'exposer médiatiquement, c'est beaucoup de contraintes, mais c'était un grand plaisir et c'est un vrai challenge pour moi. Et donc, pour répondre à la question par rapport à Langueuil, je pense que ça a participé à mon engagement, ça c'est clair, parce que j'ai découvert la désert médicaux. Je les connaissais quand même un peu moins en Bretagne parce qu'on est un peu mieux fourni. Donc là, j'étais quand même assez frappé déjà de l'éloignement géographique avec les autres hôpitaux. Quand on demande à un patient de faire une échographie, c'est 40 minutes aller, 40 minutes retour. Il faut être vraiment sûr de soi qu'il faut faire déplacer le patient pour faire une échographie. Donc j'ai appris ça et je me suis dit que c'était un modèle qui était vraiment fantastique, qui me correspondait beaucoup. et je l'ai utilisé beaucoup de fois pendant ma présidence à l'ISNI pour montrer et démontrer qu'il y avait... D'autres solutions que la coercition pour laquelle je me bats, pour améliorer l'accès aux soins de nos concitoyens.

  • Pascale Lafitte

    Je vous donne une baguette magique où je suis premier ministre et je cherche un ministre de la santé et c'est vous, ça tombe sur vous. Forcément vous avez réfléchi à beaucoup de choses. Comment vous les verriez ces études de médecine demain pour qu'il y ait moins de maltraitance, pour qu'il n'y ait pas cette souffrance à soigner en fait. On a des internes qui souffrent pour nous soigner donc il y a quelque chose qui est... paradoxal qui est surtout insupportable.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Oui c'est complètement insupportable et moi les pires appels que j'ai eu dans ma vie ce sont des appels où on m'annonce un suicide d'un interne. Et que ce soit la famille qui m'appelle directement ou un président d'un syndicat local qui vient d'apprendre qu'un interne s'est suicidé, c'est absolument terrible. Et on se dit que là on a raté un truc collectivement qui a une responsabilité pas juste de la faculté, pas juste du CHU mais de tout le monde. sur ce terrible accident qui est arrivé. Si j'étais ministre de la Santé, moi j'essaierais d'inculper plus de bienveillance dans nos études, plus de responsabilité aussi, et plus de considération. Quand j'étais externe, je trouvais que c'était inadmissible qu'on nous appelle l'externe, et qu'on n'ait pas de prénom. Quand on est interne, je trouve ça inadmissible que quand on a des situations, on ne prend jamais le temps, on est tellement débordé, on a tellement de choses à faire toute la journée, qu'on ne prend jamais le temps de demander vraiment un « ça va » . Parce qu'il y a le « salut, ça va » du matin, classique, mais ce n'est pas un vrai « est-ce que ça va ? » . Et ça, je pense, quand on est responsable pédagogique, quand on est chef de service, qu'on a été énormément formé en management, c'est la base, le B.A.B. du management, de savoir si... Ces collaborateurs, ceux avec qui on travaille, vont bien ou vont pas bien, qui peut être un facteur en lien avec le service, mais ça peut être aussi complètement extérieur et que ça a un impact forcément sur le soin des patients. Parce que c'est surtout ça en fait. Comme vous disiez, c'est paradoxal d'avoir des soignants qui ne sont pas bien dans leur peau, qui ne sont pas bien dans leur tête et qui soignent des gens qui eux ne sont pas bien non plus. Finalement, personne n'est bien.

  • Pascale Lafitte

    D'abord, ils sont exténués. On a des interne. Je rencontre des internes depuis quelques mois, je rencontre des internes fatigués. Des internes qui disent une chose, par exemple, pourquoi on nous impose des gardes de 24 heures ? Parce que physiquement, il y a ceux qui peuvent, il y a ceux qui veulent, et il y a ceux qui physiquement ne les supportent pas, n'y arrivent pas. Or, l'internat, pour arriver au bout de ses études, il faut en passer par là. C'est ce que vous appelez bienveillance, considération,

  • Killian L'Helgouarc'h

    c'est ça ? Oui, alors on a fait deux travaux majeurs, donc la santé mentale pendant mon mandat à l'ISNI, et puis on a fait aussi une enquête handicap. Et j'étais effaré quand on avait des internes qui, je prends un exemple d'un TDAH, donc trouble du spectre autistique, nous disaient, le doyen m'a dit qu'avec mon TDAH, je ne pourrais pas faire médecine. Pourquoi ? Parce que l'interne n'arrivait pas à valider son stage aux urgences, parce que justement, on lui imposait des gardes 24 heures. Mais moi, je pose la question au doyen, est-ce qu'il faut... forcément faire des gardes de 24 heures pour être un bon médecin. Et aujourd'hui, personne en France n'est capable de dire en réalité qu'est-ce qu'il faut pour être un bon médecin. Pareil sur la parentalité, on a fait un gros travail sur... J'étais effaré des internes femmes qui calculaient au jour près, j'ai une amie qui a calculé au jour près quand est-ce qu'il fallait tomber enceinte pour éviter de se faire invalider de son stage. Je trouve ça lunaire. Et donc on a essayé de... d'amener plus de flexibilité, ça en cours, ça doit être validé par le Conseil d'État, donc on aura, je pense, de bonnes nouvelles à annoncer aux internes dans quelques mois. Et je trouvais ça pareil, absolument, on discutait avec les doyens de cette proposition de flexibilité, et notamment on veut l'invalidation automatique, c'est 4 mois. Si on fait moins de 4 mois, on est invalidé automatiquement, il n'y a pas de discussion. Et on l'a passé à 3 mois. Et tous les doyens disaient, mais c'est pas possible de valider un stage en trois mois, c'est une hérésie, on n'aura fait que la moitié du stage, comment c'est possible ? Et moi je leur disais, déjà, un, avec le temps de travail qu'on fait, trois mois de stage et six mois de stage en réalité, et puis deux, dites-moi ce qu'il faut apprendre dans des stages, et je vous dirais, ça se trouve, on va se rendre compte que pour être réanimateur, il faut quatre ans au lieu de cinq. Et peut-être que pour être généraliste, au lieu de trois, il faut peut-être un et demi, je n'en sais rien, deux. Donc, il y a cette hypocrisie de tout le monde où, en fait, on voit les études que sur le spectre quantitatif et pas sur le spectre qualitatif. Et ce qui fait que pour des internes qui ont du mal avec des gardes 24 heures, tout le monde ne peut pas faire ça. Et d'ailleurs, même si c'est prouvé, j'aime bien, souvent, le ministre de la Santé le disait, Yannick, Une autre disait, oui, mais c'est un fossé générationnel. Souvent, on entend ça, fossé générationnel, la jeune génération ne veut pas bosser ou ne veut plus bosser comme avant, etc. En fait, c'est juste aussi une question de santé publique. Toutes les études au niveau international démontrent et montrent qu'au bout de 24 heures, on est lessivé et qu'on prend bien moins bien en charge les patients que si on faisait un travail de 12 heures. Et d'ailleurs, même l'IA est plus empathique que nous au bout de 24 heures. que lire. L'IA est plus empathique que nous. À un moment donné, il faut peut-être se poser les bonnes questions.

  • Pascale Lafitte

    Ça veut dire qu'il ne faut pas arriver aux urgences à 5h du matin.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Voilà, exactement.

  • Pascale Lafitte

    Vous avez parlé de bienveillance, de responsabilité, de considération. Dans le mot responsabilité, qu'est-ce que vous entendez ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Ce que j'entends, c'est double responsabilité, donner plus de responsabilité aux étudiants. On est souvent, et notamment moi, mon grand regret de l'externat, c'est de ne pas avoir été vraiment en responsabilité, de ne pas avoir dit vieux. Plutôt que d'avoir dix patients à gérer, en fait on a un et tu essaies de bien le gérer toi-même. Et on te chapote, on fait mais tu prescris tout, tu vérifies tout, c'est toi qui gères. Et ça aujourd'hui les logiciels ne le permettent pas parce que si l'externe prescrit en fait ça a les codes de l'interne, enfin c'est juste interdit. Donc on pourrait donner un peu plus de responsabilité aux externes. Et puis la responsabilité aussi des doyens, des chefs de service sur le respect qu'ils ont normalement de la loi. Ils sont tenus de respecter la loi, mais ils ne le respectent pas. Ils ont plusieurs responsabilités aussi dans ce sens-là.

  • Pascale Lafitte

    Kylian se souvient aussi de son premier jour d'interne.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Quand j'ai fini de passer le concours de l'internat, je ne voulais pas faire un stage d'externat. Je ne voulais plus être externe, ça ne m'intéressait plus. Et donc, je voulais être interne. Donc, quand on est après le concours d'internat, on fait faisant fonction d'interne, FFI. Et je l'ai fait dans un petit hôpital à côté de Brest, dans un service de médecine. donc je dirais que c'est ma première euh C'était mon premier jour d'internat, sans être tout à fait le premier jour d'internat, puisque je le faisais pendant l'été, avant la rentrée officielle qui était en novembre. Et je me souviens d'arriver, c'était ma chef que j'adorais, qui m'a beaucoup appris, qui malheureusement est décédée depuis, et on faisait la visite ensemble, et on voyait un patient qui toussait, etc. Et elle me dit, bon, Kian, qu'est-ce qu'on fait ? Moi, je dis... Je ne sais pas. J'ai l'impression d'avoir tout oublié. J'ai l'impression de ne plus avoir les QCM dans lesquels je Ausha. Et donc, face aux patients, je ne savais plus quoi faire. Elle m'a dit, on va peut-être faire une radio pour voir si elle a une infection pulmonaire. Je dis, ah oui, pas bête, c'est une bonne idée. Donc, j'ai prescrit la radio et on est allé. Et c'était, c'était, c'était, je me suis senti à la fois très bête. Et en même temps, je me suis dit, bon, peut-être qu'en fait, c'est des cases à cocher. Je n'avais jamais prescrit de radio. tout seul, donc voilà, c'est la première fois et la prochaine fois, je saurai que si j'ai un doute, je fais une radio.

  • Pascale Lafitte

    Ça, c'est votre première avant-première. C'est une avant-première. Vous parlez d'une personne qui vous accompagne. Donc, l'expérience de l'interne, c'est comme un dé qu'on jette. La personne qui va vous accompagner la première fois, elle est essentielle ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Complètement. Et le compagnonnage, on le dit souvent en médecine, est important, mais en fait c'est fondamental parce que c'est C'est avec nos collègues qu'on apprend et qu'on travaille. On travaille à 100% à l'hôpital ou en ville. Donc si on ne s'entend pas avec nos collègues ou si nos collègues ne sont pas bienveillants avec nous parce qu'on est en apprentissage, c'est clair que ça ne va pas bien marcher et que le stage sera un enfer. Et moi, je l'ai vu à plusieurs reprises. Je parlais de ma première chef officiellement, clairement, qui m'a beaucoup appris et qui était très très forte, très très très forte. Et je me souviens aussi d'un stage en gériatrie. ici à Montpellier, enfin à Montpellier-Nîmes, et où j'avais une chef et ça m'avait beaucoup étonné, beaucoup étonné, ça m'avait beaucoup questionné. Je venais de passer un week-end de garde horrible, au total j'ai eu deux décès sur le week-end, dont deux décès dans lesquels je me questionnais beaucoup sur ma responsabilité en tant que médecin. Et sur le deuxième décès que j'ai eu, c'était une patiente qui faisait une détresse respiratoire majeure à 6h du matin, pour lequel j'ai... J'ai fait ce qu'il fallait, et enfin, à posteriori, je sais que j'ai fait ce qu'il fallait, mais sur le coup, pas forcément. Et donc, elle était très, très, très dysnique, enfin, grosse difficulté à respirer. Donc, j'ai appelé ma chef pour échanger avec elle, qui est par téléphone chez elle. Et elle m'a dit, bon, je pense qu'on va devoir la sédater parce qu'elle n'est pas confortable et qu'on n'y arrive pas, et qu'elle est trop abîmée pour la sauver. Et donc, elle m'a dit, j'arrive. Je me suis dit... J'arrive, c'est-à-dire tu viens sur place, elle me fait oui oui j'arrive, j'arrive. Et là je me suis dit bon, alors soit c'est que je suis nul et que ma chef vient pour prendre la main, soit c'est que je suis nul, enfin il n'y avait pas d'autre possibilité que l'autre possibilité que j'étais nul à ce moment-là. Et en plus elle a eu un accident de voiture sur la rentrée, rien n'allait. Donc c'est une autre chef qui est arrivée et puis finalement quand elle est arrivée ça allait un peu mieux, finalement elle avait passé un peu le cap donc ça... On a pu temporiser, mais elle est décédée dans les heures qui suivaient quand même. Et donc j'ai assez vite débriefé, parce que j'ai eu la chance d'avoir des chefs avec qui je pouvais parler. Et parce que ça m'a beaucoup pesé, je me suis dit, mais pourquoi elle se déplace ? Je n'ai jamais vu un chef, pendant la nuit, se déplacer sur une urgence comme ça. Et donc elle m'a dit à posteriori, non, non, totale confiance en toi. Simplement, la première fois que j'ai dû faire une sédation, parce que la patiente n'était vraiment pas bien. j'étais toute seule à l'hôpital et mon chef ne s'est pas déplacé, je l'ai hyper mal vécu donc je ne voulais pas que ça t'arrive, donc c'est pour ça que je suis venu et je me suis dit ah ouais là c'est une leçon de bienveillance que je viens de me prendre

  • Pascale Lafitte

    Elle s'est déplacée pour vous et pour votre futur parcours de médecin et là ça m'a ça faisait pas partie des options que j'envisageais au départ donc ça m'a beaucoup surpris et je lui remercie La confiance en soi, ce que vous abordez là, la peur de l'erreur, la peur d'avoir fait quelque chose qui ne va pas, est-ce que c'est difficile à vivre au quotidien, à porter ? Est-ce qu'il faut savoir s'entourer ? Est-ce qu'il y a un travail à faire pour être mieux avec ça ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Tous les internes que j'ai vus, qui m'ont appelé ou qui nous ont sollicités quand j'étais président de Montpellier ou président national, A chaque fois, je me disais, c'est trop bête, parce que s'il y a eu plus de communication dans le stage, s'il y a eu plus de bienveillance dans le stage, en fait, on aurait évité des drames, on aurait évité des situations, ça peut aller jusqu'au suicide de l'interne, clairement. Et donc, je me dis vraiment qu'on manque, en fait, de communication. Et en fait, on le voit bien, on est quand même dans un système où on passe un premier concours en première année, puis un second concours en sixième année. Parfois même, pendant l'externat, il faut être le meilleur classé pour pouvoir choisir les meilleurs stages. Et puis après, pendant l'internat, si on n'est pas bien classé, on va choisir les stages en dernier. Donc on n'aura jamais le choix du stage, on sera toujours à subir le système. Et donc, cette concurrence qui est importante, puis même une concurrence des postes après aussi, notamment en hospitalier, pas en libéral forcément, mais en hospitalier. Donc cet aspect de concurrence permanente fait qu'on ne doit pas montrer de faiblesse. Et souvent, c'est vécu comme « je ne vais pas bien, donc c'est une faiblesse » ou « j'ai mal vécu une situation clinique, c'est une faiblesse, il ne faut pas que je la montre » . Et aussi parce que c'est entretenu par nos seniors parfois aussi, qui ne sont pas tous bienveillants clairement, et qui ne veulent pas qu'on montre de faiblesse, qu'il faut que ça dure. Et ça, je l'ai constaté que dans beaucoup de situations, s'il y a eu une communication comme là, moi j'ai pu le faire. dans mon service, ça me pesait cette situation clinique pour savoir si j'étais responsable ou pas responsable, s'il fallait que je m'améliore ou pas m'améliorer, ou il y avait un truc que j'avais raté pendant la nuit. Et le fait d'avoir pu débriefer avec mes chefs, ça calme tout de suite l'angoisse. On reprend un peu confiance en soi, même si on a vécu une situation qui était difficile. Et après, on peut mieux repartir. Quand on est dans le doute permanent de savoir si ce qu'on a fait est bien ou pas bien, et qu'on ne peut jamais demander si c'est bien ou pas bien, ou si on nous... montre simplement ce qu'on ne sait pas faire et jamais ce qu'on sait faire, c'est clair qu'au bout d'un internat entier, on finit par ne pas savoir ce qu'on fait, d'être très angoissé et de ne pas avoir confiance en soi. Et en médecine, c'est essentiel parce qu'on a la vie de gens entre les mains, avec des décisions qui sont complexes et difficiles à prendre des fois dans la minute, et ça peut mettre rapidement en difficulté. et si on n'a pas le... Si on n'est pas bien entouré, c'est toujours compliqué. Moi, je disais aux nouveaux internes qui sont arrivés à Montpellier, quand on sort de garde, ça m'avait toujours frappé. Mes collègues, mes co-internes étaient toujours en disant « pendant ma garde, j'ai fait ça, j'ai fait ça, j'ai fait ci et tout, j'ai réanimé machin, j'ai mis tant de l'asilex à tel, etc. » En fait, quand on creuse un peu, il n'a pas vraiment fait ça. appeler son chef pour savoir quoi faire. Donc ça dédramatise un peu parce qu'on se dit, il a fait tout ça pendant la nuit, mais tout seul, mais waouh ! Et on s'est dit, vraiment, moi je suis nul, je serais incapable de faire tout ça. Mais finalement, quand on creuse, on est tous pareils, on a tous les mêmes difficultés et en fait, il était aussi en difficulté comme nous, on aurait pu l'être. Il a appelé son chef comme n'importe quel interne.

  • Pascale Lafitte

    Je reviens à vous, à votre internat. Une année sans patient, ça a été difficile ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    C'est une bonne question. J'ai appréhendé un peu. Je me suis dit, mais finalement, est-ce qu'à l'issue de... Ça se trouve, je me suis dit, au bout d'un an, peut-être que je n'aurais pas envie de revenir. Et je vais peut-être repartir en histoire géo ou en astrophysique. Et j'ai suivi le conseil d'un très bon ami à moi qui a arrêté médecine depuis longtemps, qui était en... en 4ème, 5ème année quand il a arrêté enfin il l'a mis en pause actuellement parce qu'il court beaucoup il fait du 1500m, il essaie d'être sélectionné aux Jeux Olympiques et je lui avais dit mais toi t'as pas peur de partir et puis de pas revenir il m'avait dit mais Kylian si je ne reviens pas c'est que j'avais plus envie de faire ça et c'est pas grave et puis finalement peut-être qu'en partant je vais me rendre compte que c'était vraiment ça que j'avais envie de faire et donc j'aurais envie de revenir donc finalement tout bénéf pour moi de... de faire une pause. Et je me suis dit, c'est vraiment vrai ce qu'il dit. Et donc, je suis parti avec cette philosophie-là dans mon année. Heureusement, ce que j'ai constaté, c'est que le patient me manquait quand même, que la pratique me manquait. Et donc assez vite, j'ai essayé de trouver un créneau pour remplacer. J'ai fait une semaine de remplacement en avril. Je me suis dit en avril, il ne devrait pas y avoir grand chose, ça devrait aller. Oui, sauf une grève nationale organisée le 29 avril, alors que je remplaçais deux semaines avant. Donc c'est souvent ça ce qui s'est passé pendant mon année. Quand je remplaçais, il y avait la guerre partout, il fallait organiser. des contre-attaques.

  • Pascale Lafitte

    Donc là, vous reprenez...

  • Killian L'Helgouarc'h

    Je suis très content de revenir. Je me suis posé la question longtemps de savoir si je faisais un deuxième mandat, une deuxième année, ce qui est possible. Il faut bien que je finisse un jour mon internat, c'était un peu la conclusion. Et je me suis dit, si je faisais une deuxième année, j'aurais sanctuarisé un jour ou deux dans la semaine ou des demi-journées où je fais du remplacement et je fais de la médecine, parce que je peux remplacer actuellement. donc c'est content et confiant que je reviens, que je reprends, que j'ai repris la médecine. Et j'avais hâte de reprendre.

  • Pascale Lafitte

    Et votre projet pour après, c'est d'être médecin d'abord et avant tout, mais pas que, j'ai l'impression.

  • Killian L'Helgouarc'h

    D'abord médecin, ça c'est clair, ça c'est sûr et certain. Plutôt dans les territoires ruraux, donc en Lauserre. J'ai aussi découvert pendant mon internat Mayotte, que j'ai adoré, où il y a tout à faire sur le plan... de la santé à créer à Mayotte, donc c'est des territoires qui me plaisent bien. Donc d'abord médecin, et puis j'ai toujours été engagé, donc ce serait mentir que de dire que je ne serais pas engagé demain non plus, quelle que soit la forme de l'engagement, parce qu'il y a mille façons de s'engager. Là, on va dire que j'ai raccroché l'ISNI, mais je commence à me réengager dans l'association du Shift Project, il est shifter. Donc voilà, c'est d'autres formes d'engagement, c'est sur d'autres sujets aussi, d'autres thématiques qui me plaisent bien. Mais j'ai toujours été engagé, donc je sais que je le serai toujours.

  • Pascale Lafitte

    Cet engagement, dont parle Kylian, l'association The Shifters, apporte un soutien bénévole au centre de réflexion The Shift Project qui œuvre à la décarbonation de l'économie. Je vous remercie.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Merci.

  • Pascale Lafitte

    Je vais vous laisser aller retrouver vos patients, puisque maintenant vous en avez. Tout à fait. Merci beaucoup. Partagez le podcast, faites vivre et prospérer ces entretiens simplement en vous abonnant et en partageant le lien. Je vous dis à bientôt pour un prochain épisode d'Internon Médecine, le podcast à suivre sans ordonnance ni modération. Cet épisode d'Internon Médecine vous a été proposé en partenariat avec l'ISNI, l'intersyndicale nationale des internes.

Chapters

  • Introduction au podcast et présentation de l'invité

    00:09

  • Le parcours de Killian L'Helgouarc'h vers la médecine

    01:01

  • Les choix de spécialité et l'importance du contact patient

    01:36

  • L'épanouissement en tant qu'interne et responsabilités médicales

    04:05

  • La définition du médecin et la dimension humaine de la médecine

    05:33

  • Killian L'Helgouarc'h et son engagement pour les territoires ruraux

    07:00

  • L'importance de la communication et de la bienveillance en médecine

    08:35

  • Réflexions sur la santé mentale des internes

    14:17

  • Responsabilités et bienveillance dans la formation médicale

    19:25

  • Conclusion et perspectives d'avenir deKillian L'Helgouarc'h

    28:48

Description

Qu'est-ce qui pousse un jeune homme à choisir la médecine générale après avoir exploré d'autres voies ? Pour cet épisode du podcast "Internes en médecine", j'ai rencontré Killian L'Helgouarc'h, interne en médecine générale à Montpellier et ancien président de l'ISNI, l'Intersyndicale Nationale des Internes. Killian partage avec nous son histoire, marquée par un accident de santé et une opération chirurgicale lourde durant son enfance qui a éveillé en lui une passion pour la médecine. Ce témoignage est bien plus qu'un récit personnel ; c'est une réflexion sur les défis et les joies d'une carrière médicale.

Killian nous plonge dans ses expériences durant l'externat, où il a fait ses premiers pas dans le monde médical. Il évoque avec émotion ses premiers contacts avec les patients, soulignant la satisfaction qu'il a trouvée dans l'internat, malgré la pression constante qui pèse sur les internes. "La médecine, c'est avant tout une histoire de relations humaines", dit-il, rappelant l'importance de la bienveillance et du soutien au sein des équipes médicales. À travers ses mots, on ressent son engagement sincère pour améliorer les conditions de travail des internes, un sujet qui lui tient particulièrement à cœur.

Nous abordons également la santé mentale des internes, un thème crucial dans notre système de santé actuel. Killian partage son point de vue sur l'impact de la pression académique sur le bien-être des futurs médecins. "Il est essentiel de prendre soin de soi pour pouvoir prendre soin des autres", insiste-t-il, un message fort qui résonne avec de nombreux professionnels de santé. Cette discussion ouverte et honnête met en lumière les défis que rencontrent les internes, mais également les ressources et le soutien disponibles.

Enfin, Killian exprime son désir de travailler dans des territoires ruraux, soulignant l'importance de la médecine générale dans ces zones souvent négligées. "Chaque patient mérite une attention particulière, peu importe où il se trouve", affirme-t-il avec conviction. Son engagement pour la médecine générale est palpable et inspirant, et il nous rappelle à quel point cette spécialité est vitale pour notre système de santé.

Rejoignez-nous pour cet échange enrichissant qui met en avant non seulement le parcours de Killian, mais aussi les enjeux actuels de la médecine. Que vous soyez étudiant en médecine, professionnel de santé ou simplement curieux d'en apprendre davantage sur le monde médical, cet épisode de "Internes en médecine" est fait pour vous.


Interne en médecine est un podcast de et avec Pascale Lafitte, réalisé en partenariat avec l'ISNI, l'Intersyndicale Nationale des Internes.

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Transcription

  • Pascale Lafitte

    Bonjour et bienvenue, je suis Pascale Lafitte, je suis ravie de vous retrouver pour cette nouvelle saison d'Internes en médecine, une série d'entretiens avec des internes, avec des médecins également, qui se replongeront dans leurs années d'internat, des proches et des accompagnants d'internes aussi. Et avant tout, je vais commencer par vous remercier, vous, de suivre ce podcast. Vous êtes de plus en plus nombreux, c'est chouette, donc sincèrement merci. Et maintenant allons-y, et n'oubliez pas, Internes en médecine, le podcast, est à suivre sans ordonnance ni modération. Un rendez-vous réalisé en partenariat avec l'ISNI, l'Intersyndicale Nationale des Internes. Intern en médecine, saison 2, c'est parti, avec un premier entretien, une première rencontre.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Je m'appelle Kylian Lelguarch, intern de médecine générale en dernière année et ancien président de l'ISNI.

  • Pascale Lafitte

    Je suis ravie d'avoir enfin rencontré Kylian, tellement occupé l'an passé que j'ai attendu le bon moment pour lui emprunter un peu de son temps, ne pas trop le déranger, soit la fin de son mandat de président de l'ISNI. Kylian est interne à Montpellier, nous nous sommes rencontrés donc à Montpellier, dans un bureau du syndicat des internes du Languedoc-Roussillon, au CHU La Péronie, à deux pas de l'accueil des urgences. Kylian nous explique pourquoi. Il a choisi de devenir médecin.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Je pense que ça remonte à quand j'étais tout petit, à l'âge de 6 ans, je me suis fait opérer, une grosse chirurgie. J'ai passé plusieurs jours à l'hôpital, donc je pense que ça m'a bien marqué. Mes parents aussi étaient, surtout ma mère, côté de ma mère, qui était très portée santé, donc m'a toujours un peu poussé aussi à m'intéresser à la santé. Et puis finalement, après, quand j'ai grandi, j'ai abandonné la médecine. Je me suis dit que ce sera plutôt la physique ou l'histoire géo qui me plaisait. et puis finalement en en quand il fallait choisir où aller après post-bac. Puisque la médecine est sélective, on va commencer par la sélection d'abord, voir si j'y arrive, et puis si je n'y arrive pas, j'aurai des plans B et C si jamais. Donc je suis parti là-dedans, et j'ai fait deux ans et j'ai réussi. Donc voilà pourquoi je me retrouve médecin aujourd'hui.

  • Pascale Lafitte

    Ce n'est pas un métier comme astrophysicien, ce n'est pas un métier comme prof d'histoire, ou historien, ou chercheur, ou géographe. La médecine, il y a un patient, il n'y a pas des étoiles à observer. Vous saviez à quoi vous attendre ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    J'ai eu la chance de faire quelques stages. C'est très compliqué quand on est lycéen de faire des stages à l'hôpital parce qu'on n'est pas majeur. Il y a toutes les questions de responsabilité, de confidentialité que l'hôpital public ne fait pas confiance. J'ai eu la chance de faire un stage dans un hôpital mais dans des services qui ne voyaient pas de patients. En radiologie, bon... Manque de bol pour eux, on voyait les patients donc j'en ai vu. Et puis je suis allé en Suisse aussi faire un stage d'une semaine pour voir les côtés infirmiers, pour voir un peu le métier, ce qui n'est pas du tout pareil non plus que médecin, mais ça me donnait une première approche de la santé. J'ai beaucoup maturé ce que c'était la médecine tout au long de mes études. J'ai toujours aimé le contact avec les gens et c'est d'ailleurs pour ça que j'ai choisi le médecin généraliste. Au départ je voulais faire radiologue ou médecine nucléaire, ce qui n'est pas du tout pareil. Et quand j'ai fait un stage où vous ne voyez pas de patient, je me suis dit c'est pas trop pour moi ça, donc il fallait que je change mon projet professionnel, et c'est là où j'ai choisi du coup la médecine générale. Donc je pense que j'ai un peu maturé, et puis j'ai appris aussi à apprécier la médecine tout au long de mes études. J'ai assez peu aimé l'externat parce qu'on n'a pas trop de responsabilités, on se fait un peu marcher dessus dans les services, on ne sait pas trop où se mettre, personne ne connaît son prénom, notre prénom parce qu'on est là trop longtemps. trois semaines dans le mois et qu'après ça change. Donc j'ai très peu aimé. Et là où je me suis vraiment épanoui en médecine, c'est quand j'ai eu mes premières responsabilités, mes premiers patients, ou même en sixième année j'en avais un peu, où vraiment il fallait que je connaisse très bien mes patients. Pas beaucoup, un ou deux, mais c'était mes patients, à moi, je vais m'en occuper. Et c'est là où vraiment j'ai pris la dimension de ce que c'était le médecin et puis surtout le... Là où j'ai pris aussi du plaisir à suivre le patient de A à Z, du début de son hospitalisation jusqu'à la fin de son hospitalisation.

  • Pascale Lafitte

    Donc ça veut dire que c'est lorsque vous êtes rentré à un internat ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Oui. Paradoxalement, ce que je dis souvent, c'est que finalement, j'apprécie la médecine depuis le début de l'internat. Or,

  • Pascale Lafitte

    vous, vous vous êtes engagé pour aider les internes à vivre mieux.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Effectivement, c'est un paradoxe intéressant que vous soulevez, mais je pense que ce que j'ai apprécié... dans l'internat, dans le début de l'internat, c'était à la fois les responsables qui sont difficiles et très durs, mais j'ai eu la chance, contrairement à beaucoup de mes collègues, d'avoir des stages qui sont bienveillants, où le temps de travail était à peu près respecté, et je me sens chanceux dans les stages que j'ai pu choisir. Et puis, au-delà de la responsabilité, des stages avec des praticiens et des chefs qui étaient très bienveillants, c'était aussi le... Ce qui m'a beaucoup plu, c'était le contact avec le patient et de se dire que j'étais le médecin du patient. C'est ça que j'ai beaucoup apprécié.

  • Pascale Lafitte

    Comment vous définiriez un médecin ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Je dirais que c'est quelqu'un qui doit prendre soin de la personne, tout en ayant conscience des limites du soin qu'il peut prodiguer. Et c'est ça que j'aime beaucoup avec la médecine générale, parce que finalement, quand on est généraliste, on suit les patients quasiment depuis parfois, et à mon avis, j'espère que j'aurai des patients comme ça, depuis tout bébé jusqu'à tout vieux. Et du coup, ça fait qu'on a une dimension qui est vraiment au-delà de juste l'aspect de la pathologie aiguë ou chronique qu'on suit, et aussi tout l'aspect sociétal et environnemental du patient qui... On rentre vraiment dans l'intimité de la personne, on sait avec qui elle est, s'il y a des enfants, où elle habite, son travail, comment ça s'y passe, etc. Et donc c'est au-delà du seul soin technique, que ça, on a tous appris à faire, c'est aussi de savoir mesurer l'intensité du soin qu'on doit prodiguer. Et c'est ça qui rend toute la complexité de la médecine, et elle est encore plus complexe que celle que moi j'aurais bien fait. qui est plutôt dans les territoires ruraux, dans les déserts médicaux, où en plus de la complexité de savoir jusqu'où on va, il y a la complexité de savoir avec quels moyens on a sur le territoire.

  • Pascale Lafitte

    Donc vous voulez aller dans des territoires plutôt désertiques, ce qu'on appelle le désert médical, c'est ça ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Je pense que c'est le bon terme. Et d'ailleurs, ça casse un peu le coup à beaucoup de gens qui disent que les jeunes ne veulent plus aller dans les déserts médicaux. Non, c'est faux. J'en fais partie et moi j'ai toujours vécu en ruralité. Les seules fois où j'ai vécu en ville c'était pour les études. Mais je sais que c'est pas là où je m'y sens le mieux et je préfère aller dans les territoires ruraux. Donc forcément dans les déserts médicaux, même si Paris est le plus grand désert médical de France. Mais en tout cas c'est dans les territoires ruraux que je me sens mieux. C'est aussi là où la pratique que j'ai envie, qui est une pratique un peu particulière, à la fois de généraliste en cabinet mais aussi... Avec une valance un peu hospitalière, c'est là où je peux la retrouver. Il y a des choses qui peuvent se faire assez plus facilement que dans certains endroits, notamment avec des CHU, des grands hôpitaux, où c'est toujours un peu plus long de construire. L'exemple que je prends souvent, c'est en Lauser à Langoyne, là où j'ai fait mon premier stage chez le praticien. Il y a une MSP, mais aussi un hôpital de proximité, ce qui fait que des patients qu'on voit en consultation ou qu'on voit en ville en visite, on peut les hospitaliser nous-mêmes. Et c'est nous qui sommes responsables de l'hospitalisation dans l'hôpital de proximité. Il n'y a pas besoin de l'envoyer à 40 minutes à Mande ou au Puy-en-Velay pour passer par les urgences, puis on sait être hospitalisé. Donc il y a une fluidité du parcours patient qui, je trouve, est très intéressante.

  • Pascale Lafitte

    Ça veut dire que vous pouvez être aussi le médecin du patient hospitalisé, parce que l'organisation est faite comme ça ? C'est quelque chose d'expérimental ou c'est quelque chose qu'on retrouve dans tous les endroits où il y a un véritable manque de médecins ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Alors c'est exactement ça, c'est-à-dire que le matin c'est les consultations classiques, au cabinet, puis après sur l'heure de midi, c'est la visite des patients à l'hôpital. Mais c'est nous qui le faisons en tant que généralistes. Alors c'est pas des grosses hospitalisations, c'est pas que ça soit non plus trop complexe, parce qu'on n'a pas le plateau technique pour faire du soin complexe, mais c'est des infections pulmonaires, des infections urinaires, c'est de la rééducation post-chute, c'est... décharger aussi les hôpitaux à côté. Si un patient vit sur place, autant le ramener le plus rapidement possible. Donc c'est ça. Et c'est, je pense, assez expérimental. Ou en tout cas, je ne l'ai pas trouvé ailleurs. J'ai trouvé des systèmes un peu équivalents, mais pas aussi unifiés qu'à Langone, là où j'étais. Parce que c'est vraiment rattaché physiquement à la MSP, avec l'hôpital de proximité, ce qui n'est pas le cas souvent dans les autres endroits. Et quand j'avais interrogé les ARS qui sont normalement 40 de l'Organisation Territoriale des Soins, ou en tout cas qui connaissent leur territoire, aucune ARS en France était capable de me dire si un modèle comme ça existait dans leur territoire. Donc c'est juste pas, par réponse du non ça n'existe pas, c'est juste non on ne sait pas. Donc ce qui démontre un peu, on va dire, l'éloignement... des ARS par rapport au territoire.

  • Pascale Lafitte

    On pourrait dire que Kylian, c'est la force tranquille. Voix douce, ton posé, rassurant, mais direct aussi, comme le laisse entrevoir cette pique ou saillie au sujet de l'ARS. En l'écoutant retracer ses rencontres, ses anecdotes d'interne, je me suis demandé si cette expérience vécue à Langogne, en Lauser, qu'il rapporte spontanément, n'était pas la genèse de son engagement syndical.

  • Killian L'Helgouarc'h

    En fait, je me suis toujours engagé, si on remonte au tout début, j'étais délégué de classe en sixième et je l'ai été pendant sept ans. Je fais un septennat de délégué de classe et finalement, je me suis toujours engagé un peu pour les autres, pour les représenter. Et puis, j'aime bien avoir la responsabilité d'eux. J'aime bien réfléchir au système dans lequel je suis et porter un peu la voix de tout le monde. Donc, je l'ai fait quand j'étais au collège lycée. Puis après, je l'ai refait quand j'étais en fac de médecine. A Brest, tout au début, où j'ai été tuteur pour les premières années. Puis j'ai géré le tutorat avec trois autres amis à Brest. On a fait de très belles choses à Brest. On a rendu les cours gratuits, parce qu'il y avait un marché noir du cours. On a travaillé ça. On a rendu le tutorat gratuit aussi pour les boursiers. On a fait pas mal de choses. Puis après, j'ai fait l'ANEMF, qui est le pendant de l'ISNIM et pour les plus jeunes. Et donc, c'était assez naturellement aussi pendant mon internat que je me suis dit, en fait, je me suis toujours engagé, je trouvais quelque chose à côté. j'aime La peur de s'ennuyer, je ne sais pas, mais en tout cas, j'avais envie de m'engager aussi. C'était aussi une façon de moi, parce que je viens de Brest, de Bretagne, du Finistère. Quand j'arrive à Montpellier, je ne connais personne, très peu de gens. C'est aussi une façon pour moi de rencontrer du monde, de comprendre aussi la géographie locale, le fonctionnement local, de m'investir justement dans le syndicat de Montpellier. Et puis après, quand j'ai été élu président, j'ai découvert l'ISNI, que je connaissais assez peu avant. Et je me suis dit, c'est un peu l'apothéose de l'engagement syndical quand même. J'ai fait trois ans au syndicat de Montpellier et je me suis dit, les planètes étaient alignées sur le plan professionnel et personnel pour se dire, ok, on peut tenter et se sentir aussi capable, parce que depuis très longtemps j'ai un manque de confiance en moi qui est quand même important. Et donc c'était aussi un challenge de se dire... Là, je planais de caligner, let's go, on y va, pendant un an, vivre à Paris, ce que je n'avais jamais fait non plus. Et puis prendre la tête du premier syndicat d'interne de France. C'est aussi s'exposer médiatiquement, c'est beaucoup de contraintes, mais c'était un grand plaisir et c'est un vrai challenge pour moi. Et donc, pour répondre à la question par rapport à Langueuil, je pense que ça a participé à mon engagement, ça c'est clair, parce que j'ai découvert la désert médicaux. Je les connaissais quand même un peu moins en Bretagne parce qu'on est un peu mieux fourni. Donc là, j'étais quand même assez frappé déjà de l'éloignement géographique avec les autres hôpitaux. Quand on demande à un patient de faire une échographie, c'est 40 minutes aller, 40 minutes retour. Il faut être vraiment sûr de soi qu'il faut faire déplacer le patient pour faire une échographie. Donc j'ai appris ça et je me suis dit que c'était un modèle qui était vraiment fantastique, qui me correspondait beaucoup. et je l'ai utilisé beaucoup de fois pendant ma présidence à l'ISNI pour montrer et démontrer qu'il y avait... D'autres solutions que la coercition pour laquelle je me bats, pour améliorer l'accès aux soins de nos concitoyens.

  • Pascale Lafitte

    Je vous donne une baguette magique où je suis premier ministre et je cherche un ministre de la santé et c'est vous, ça tombe sur vous. Forcément vous avez réfléchi à beaucoup de choses. Comment vous les verriez ces études de médecine demain pour qu'il y ait moins de maltraitance, pour qu'il n'y ait pas cette souffrance à soigner en fait. On a des internes qui souffrent pour nous soigner donc il y a quelque chose qui est... paradoxal qui est surtout insupportable.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Oui c'est complètement insupportable et moi les pires appels que j'ai eu dans ma vie ce sont des appels où on m'annonce un suicide d'un interne. Et que ce soit la famille qui m'appelle directement ou un président d'un syndicat local qui vient d'apprendre qu'un interne s'est suicidé, c'est absolument terrible. Et on se dit que là on a raté un truc collectivement qui a une responsabilité pas juste de la faculté, pas juste du CHU mais de tout le monde. sur ce terrible accident qui est arrivé. Si j'étais ministre de la Santé, moi j'essaierais d'inculper plus de bienveillance dans nos études, plus de responsabilité aussi, et plus de considération. Quand j'étais externe, je trouvais que c'était inadmissible qu'on nous appelle l'externe, et qu'on n'ait pas de prénom. Quand on est interne, je trouve ça inadmissible que quand on a des situations, on ne prend jamais le temps, on est tellement débordé, on a tellement de choses à faire toute la journée, qu'on ne prend jamais le temps de demander vraiment un « ça va » . Parce qu'il y a le « salut, ça va » du matin, classique, mais ce n'est pas un vrai « est-ce que ça va ? » . Et ça, je pense, quand on est responsable pédagogique, quand on est chef de service, qu'on a été énormément formé en management, c'est la base, le B.A.B. du management, de savoir si... Ces collaborateurs, ceux avec qui on travaille, vont bien ou vont pas bien, qui peut être un facteur en lien avec le service, mais ça peut être aussi complètement extérieur et que ça a un impact forcément sur le soin des patients. Parce que c'est surtout ça en fait. Comme vous disiez, c'est paradoxal d'avoir des soignants qui ne sont pas bien dans leur peau, qui ne sont pas bien dans leur tête et qui soignent des gens qui eux ne sont pas bien non plus. Finalement, personne n'est bien.

  • Pascale Lafitte

    D'abord, ils sont exténués. On a des interne. Je rencontre des internes depuis quelques mois, je rencontre des internes fatigués. Des internes qui disent une chose, par exemple, pourquoi on nous impose des gardes de 24 heures ? Parce que physiquement, il y a ceux qui peuvent, il y a ceux qui veulent, et il y a ceux qui physiquement ne les supportent pas, n'y arrivent pas. Or, l'internat, pour arriver au bout de ses études, il faut en passer par là. C'est ce que vous appelez bienveillance, considération,

  • Killian L'Helgouarc'h

    c'est ça ? Oui, alors on a fait deux travaux majeurs, donc la santé mentale pendant mon mandat à l'ISNI, et puis on a fait aussi une enquête handicap. Et j'étais effaré quand on avait des internes qui, je prends un exemple d'un TDAH, donc trouble du spectre autistique, nous disaient, le doyen m'a dit qu'avec mon TDAH, je ne pourrais pas faire médecine. Pourquoi ? Parce que l'interne n'arrivait pas à valider son stage aux urgences, parce que justement, on lui imposait des gardes 24 heures. Mais moi, je pose la question au doyen, est-ce qu'il faut... forcément faire des gardes de 24 heures pour être un bon médecin. Et aujourd'hui, personne en France n'est capable de dire en réalité qu'est-ce qu'il faut pour être un bon médecin. Pareil sur la parentalité, on a fait un gros travail sur... J'étais effaré des internes femmes qui calculaient au jour près, j'ai une amie qui a calculé au jour près quand est-ce qu'il fallait tomber enceinte pour éviter de se faire invalider de son stage. Je trouve ça lunaire. Et donc on a essayé de... d'amener plus de flexibilité, ça en cours, ça doit être validé par le Conseil d'État, donc on aura, je pense, de bonnes nouvelles à annoncer aux internes dans quelques mois. Et je trouvais ça pareil, absolument, on discutait avec les doyens de cette proposition de flexibilité, et notamment on veut l'invalidation automatique, c'est 4 mois. Si on fait moins de 4 mois, on est invalidé automatiquement, il n'y a pas de discussion. Et on l'a passé à 3 mois. Et tous les doyens disaient, mais c'est pas possible de valider un stage en trois mois, c'est une hérésie, on n'aura fait que la moitié du stage, comment c'est possible ? Et moi je leur disais, déjà, un, avec le temps de travail qu'on fait, trois mois de stage et six mois de stage en réalité, et puis deux, dites-moi ce qu'il faut apprendre dans des stages, et je vous dirais, ça se trouve, on va se rendre compte que pour être réanimateur, il faut quatre ans au lieu de cinq. Et peut-être que pour être généraliste, au lieu de trois, il faut peut-être un et demi, je n'en sais rien, deux. Donc, il y a cette hypocrisie de tout le monde où, en fait, on voit les études que sur le spectre quantitatif et pas sur le spectre qualitatif. Et ce qui fait que pour des internes qui ont du mal avec des gardes 24 heures, tout le monde ne peut pas faire ça. Et d'ailleurs, même si c'est prouvé, j'aime bien, souvent, le ministre de la Santé le disait, Yannick, Une autre disait, oui, mais c'est un fossé générationnel. Souvent, on entend ça, fossé générationnel, la jeune génération ne veut pas bosser ou ne veut plus bosser comme avant, etc. En fait, c'est juste aussi une question de santé publique. Toutes les études au niveau international démontrent et montrent qu'au bout de 24 heures, on est lessivé et qu'on prend bien moins bien en charge les patients que si on faisait un travail de 12 heures. Et d'ailleurs, même l'IA est plus empathique que nous au bout de 24 heures. que lire. L'IA est plus empathique que nous. À un moment donné, il faut peut-être se poser les bonnes questions.

  • Pascale Lafitte

    Ça veut dire qu'il ne faut pas arriver aux urgences à 5h du matin.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Voilà, exactement.

  • Pascale Lafitte

    Vous avez parlé de bienveillance, de responsabilité, de considération. Dans le mot responsabilité, qu'est-ce que vous entendez ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Ce que j'entends, c'est double responsabilité, donner plus de responsabilité aux étudiants. On est souvent, et notamment moi, mon grand regret de l'externat, c'est de ne pas avoir été vraiment en responsabilité, de ne pas avoir dit vieux. Plutôt que d'avoir dix patients à gérer, en fait on a un et tu essaies de bien le gérer toi-même. Et on te chapote, on fait mais tu prescris tout, tu vérifies tout, c'est toi qui gères. Et ça aujourd'hui les logiciels ne le permettent pas parce que si l'externe prescrit en fait ça a les codes de l'interne, enfin c'est juste interdit. Donc on pourrait donner un peu plus de responsabilité aux externes. Et puis la responsabilité aussi des doyens, des chefs de service sur le respect qu'ils ont normalement de la loi. Ils sont tenus de respecter la loi, mais ils ne le respectent pas. Ils ont plusieurs responsabilités aussi dans ce sens-là.

  • Pascale Lafitte

    Kylian se souvient aussi de son premier jour d'interne.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Quand j'ai fini de passer le concours de l'internat, je ne voulais pas faire un stage d'externat. Je ne voulais plus être externe, ça ne m'intéressait plus. Et donc, je voulais être interne. Donc, quand on est après le concours d'internat, on fait faisant fonction d'interne, FFI. Et je l'ai fait dans un petit hôpital à côté de Brest, dans un service de médecine. donc je dirais que c'est ma première euh C'était mon premier jour d'internat, sans être tout à fait le premier jour d'internat, puisque je le faisais pendant l'été, avant la rentrée officielle qui était en novembre. Et je me souviens d'arriver, c'était ma chef que j'adorais, qui m'a beaucoup appris, qui malheureusement est décédée depuis, et on faisait la visite ensemble, et on voyait un patient qui toussait, etc. Et elle me dit, bon, Kian, qu'est-ce qu'on fait ? Moi, je dis... Je ne sais pas. J'ai l'impression d'avoir tout oublié. J'ai l'impression de ne plus avoir les QCM dans lesquels je Ausha. Et donc, face aux patients, je ne savais plus quoi faire. Elle m'a dit, on va peut-être faire une radio pour voir si elle a une infection pulmonaire. Je dis, ah oui, pas bête, c'est une bonne idée. Donc, j'ai prescrit la radio et on est allé. Et c'était, c'était, c'était, je me suis senti à la fois très bête. Et en même temps, je me suis dit, bon, peut-être qu'en fait, c'est des cases à cocher. Je n'avais jamais prescrit de radio. tout seul, donc voilà, c'est la première fois et la prochaine fois, je saurai que si j'ai un doute, je fais une radio.

  • Pascale Lafitte

    Ça, c'est votre première avant-première. C'est une avant-première. Vous parlez d'une personne qui vous accompagne. Donc, l'expérience de l'interne, c'est comme un dé qu'on jette. La personne qui va vous accompagner la première fois, elle est essentielle ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Complètement. Et le compagnonnage, on le dit souvent en médecine, est important, mais en fait c'est fondamental parce que c'est C'est avec nos collègues qu'on apprend et qu'on travaille. On travaille à 100% à l'hôpital ou en ville. Donc si on ne s'entend pas avec nos collègues ou si nos collègues ne sont pas bienveillants avec nous parce qu'on est en apprentissage, c'est clair que ça ne va pas bien marcher et que le stage sera un enfer. Et moi, je l'ai vu à plusieurs reprises. Je parlais de ma première chef officiellement, clairement, qui m'a beaucoup appris et qui était très très forte, très très très forte. Et je me souviens aussi d'un stage en gériatrie. ici à Montpellier, enfin à Montpellier-Nîmes, et où j'avais une chef et ça m'avait beaucoup étonné, beaucoup étonné, ça m'avait beaucoup questionné. Je venais de passer un week-end de garde horrible, au total j'ai eu deux décès sur le week-end, dont deux décès dans lesquels je me questionnais beaucoup sur ma responsabilité en tant que médecin. Et sur le deuxième décès que j'ai eu, c'était une patiente qui faisait une détresse respiratoire majeure à 6h du matin, pour lequel j'ai... J'ai fait ce qu'il fallait, et enfin, à posteriori, je sais que j'ai fait ce qu'il fallait, mais sur le coup, pas forcément. Et donc, elle était très, très, très dysnique, enfin, grosse difficulté à respirer. Donc, j'ai appelé ma chef pour échanger avec elle, qui est par téléphone chez elle. Et elle m'a dit, bon, je pense qu'on va devoir la sédater parce qu'elle n'est pas confortable et qu'on n'y arrive pas, et qu'elle est trop abîmée pour la sauver. Et donc, elle m'a dit, j'arrive. Je me suis dit... J'arrive, c'est-à-dire tu viens sur place, elle me fait oui oui j'arrive, j'arrive. Et là je me suis dit bon, alors soit c'est que je suis nul et que ma chef vient pour prendre la main, soit c'est que je suis nul, enfin il n'y avait pas d'autre possibilité que l'autre possibilité que j'étais nul à ce moment-là. Et en plus elle a eu un accident de voiture sur la rentrée, rien n'allait. Donc c'est une autre chef qui est arrivée et puis finalement quand elle est arrivée ça allait un peu mieux, finalement elle avait passé un peu le cap donc ça... On a pu temporiser, mais elle est décédée dans les heures qui suivaient quand même. Et donc j'ai assez vite débriefé, parce que j'ai eu la chance d'avoir des chefs avec qui je pouvais parler. Et parce que ça m'a beaucoup pesé, je me suis dit, mais pourquoi elle se déplace ? Je n'ai jamais vu un chef, pendant la nuit, se déplacer sur une urgence comme ça. Et donc elle m'a dit à posteriori, non, non, totale confiance en toi. Simplement, la première fois que j'ai dû faire une sédation, parce que la patiente n'était vraiment pas bien. j'étais toute seule à l'hôpital et mon chef ne s'est pas déplacé, je l'ai hyper mal vécu donc je ne voulais pas que ça t'arrive, donc c'est pour ça que je suis venu et je me suis dit ah ouais là c'est une leçon de bienveillance que je viens de me prendre

  • Pascale Lafitte

    Elle s'est déplacée pour vous et pour votre futur parcours de médecin et là ça m'a ça faisait pas partie des options que j'envisageais au départ donc ça m'a beaucoup surpris et je lui remercie La confiance en soi, ce que vous abordez là, la peur de l'erreur, la peur d'avoir fait quelque chose qui ne va pas, est-ce que c'est difficile à vivre au quotidien, à porter ? Est-ce qu'il faut savoir s'entourer ? Est-ce qu'il y a un travail à faire pour être mieux avec ça ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    Tous les internes que j'ai vus, qui m'ont appelé ou qui nous ont sollicités quand j'étais président de Montpellier ou président national, A chaque fois, je me disais, c'est trop bête, parce que s'il y a eu plus de communication dans le stage, s'il y a eu plus de bienveillance dans le stage, en fait, on aurait évité des drames, on aurait évité des situations, ça peut aller jusqu'au suicide de l'interne, clairement. Et donc, je me dis vraiment qu'on manque, en fait, de communication. Et en fait, on le voit bien, on est quand même dans un système où on passe un premier concours en première année, puis un second concours en sixième année. Parfois même, pendant l'externat, il faut être le meilleur classé pour pouvoir choisir les meilleurs stages. Et puis après, pendant l'internat, si on n'est pas bien classé, on va choisir les stages en dernier. Donc on n'aura jamais le choix du stage, on sera toujours à subir le système. Et donc, cette concurrence qui est importante, puis même une concurrence des postes après aussi, notamment en hospitalier, pas en libéral forcément, mais en hospitalier. Donc cet aspect de concurrence permanente fait qu'on ne doit pas montrer de faiblesse. Et souvent, c'est vécu comme « je ne vais pas bien, donc c'est une faiblesse » ou « j'ai mal vécu une situation clinique, c'est une faiblesse, il ne faut pas que je la montre » . Et aussi parce que c'est entretenu par nos seniors parfois aussi, qui ne sont pas tous bienveillants clairement, et qui ne veulent pas qu'on montre de faiblesse, qu'il faut que ça dure. Et ça, je l'ai constaté que dans beaucoup de situations, s'il y a eu une communication comme là, moi j'ai pu le faire. dans mon service, ça me pesait cette situation clinique pour savoir si j'étais responsable ou pas responsable, s'il fallait que je m'améliore ou pas m'améliorer, ou il y avait un truc que j'avais raté pendant la nuit. Et le fait d'avoir pu débriefer avec mes chefs, ça calme tout de suite l'angoisse. On reprend un peu confiance en soi, même si on a vécu une situation qui était difficile. Et après, on peut mieux repartir. Quand on est dans le doute permanent de savoir si ce qu'on a fait est bien ou pas bien, et qu'on ne peut jamais demander si c'est bien ou pas bien, ou si on nous... montre simplement ce qu'on ne sait pas faire et jamais ce qu'on sait faire, c'est clair qu'au bout d'un internat entier, on finit par ne pas savoir ce qu'on fait, d'être très angoissé et de ne pas avoir confiance en soi. Et en médecine, c'est essentiel parce qu'on a la vie de gens entre les mains, avec des décisions qui sont complexes et difficiles à prendre des fois dans la minute, et ça peut mettre rapidement en difficulté. et si on n'a pas le... Si on n'est pas bien entouré, c'est toujours compliqué. Moi, je disais aux nouveaux internes qui sont arrivés à Montpellier, quand on sort de garde, ça m'avait toujours frappé. Mes collègues, mes co-internes étaient toujours en disant « pendant ma garde, j'ai fait ça, j'ai fait ça, j'ai fait ci et tout, j'ai réanimé machin, j'ai mis tant de l'asilex à tel, etc. » En fait, quand on creuse un peu, il n'a pas vraiment fait ça. appeler son chef pour savoir quoi faire. Donc ça dédramatise un peu parce qu'on se dit, il a fait tout ça pendant la nuit, mais tout seul, mais waouh ! Et on s'est dit, vraiment, moi je suis nul, je serais incapable de faire tout ça. Mais finalement, quand on creuse, on est tous pareils, on a tous les mêmes difficultés et en fait, il était aussi en difficulté comme nous, on aurait pu l'être. Il a appelé son chef comme n'importe quel interne.

  • Pascale Lafitte

    Je reviens à vous, à votre internat. Une année sans patient, ça a été difficile ?

  • Killian L'Helgouarc'h

    C'est une bonne question. J'ai appréhendé un peu. Je me suis dit, mais finalement, est-ce qu'à l'issue de... Ça se trouve, je me suis dit, au bout d'un an, peut-être que je n'aurais pas envie de revenir. Et je vais peut-être repartir en histoire géo ou en astrophysique. Et j'ai suivi le conseil d'un très bon ami à moi qui a arrêté médecine depuis longtemps, qui était en... en 4ème, 5ème année quand il a arrêté enfin il l'a mis en pause actuellement parce qu'il court beaucoup il fait du 1500m, il essaie d'être sélectionné aux Jeux Olympiques et je lui avais dit mais toi t'as pas peur de partir et puis de pas revenir il m'avait dit mais Kylian si je ne reviens pas c'est que j'avais plus envie de faire ça et c'est pas grave et puis finalement peut-être qu'en partant je vais me rendre compte que c'était vraiment ça que j'avais envie de faire et donc j'aurais envie de revenir donc finalement tout bénéf pour moi de... de faire une pause. Et je me suis dit, c'est vraiment vrai ce qu'il dit. Et donc, je suis parti avec cette philosophie-là dans mon année. Heureusement, ce que j'ai constaté, c'est que le patient me manquait quand même, que la pratique me manquait. Et donc assez vite, j'ai essayé de trouver un créneau pour remplacer. J'ai fait une semaine de remplacement en avril. Je me suis dit en avril, il ne devrait pas y avoir grand chose, ça devrait aller. Oui, sauf une grève nationale organisée le 29 avril, alors que je remplaçais deux semaines avant. Donc c'est souvent ça ce qui s'est passé pendant mon année. Quand je remplaçais, il y avait la guerre partout, il fallait organiser. des contre-attaques.

  • Pascale Lafitte

    Donc là, vous reprenez...

  • Killian L'Helgouarc'h

    Je suis très content de revenir. Je me suis posé la question longtemps de savoir si je faisais un deuxième mandat, une deuxième année, ce qui est possible. Il faut bien que je finisse un jour mon internat, c'était un peu la conclusion. Et je me suis dit, si je faisais une deuxième année, j'aurais sanctuarisé un jour ou deux dans la semaine ou des demi-journées où je fais du remplacement et je fais de la médecine, parce que je peux remplacer actuellement. donc c'est content et confiant que je reviens, que je reprends, que j'ai repris la médecine. Et j'avais hâte de reprendre.

  • Pascale Lafitte

    Et votre projet pour après, c'est d'être médecin d'abord et avant tout, mais pas que, j'ai l'impression.

  • Killian L'Helgouarc'h

    D'abord médecin, ça c'est clair, ça c'est sûr et certain. Plutôt dans les territoires ruraux, donc en Lauserre. J'ai aussi découvert pendant mon internat Mayotte, que j'ai adoré, où il y a tout à faire sur le plan... de la santé à créer à Mayotte, donc c'est des territoires qui me plaisent bien. Donc d'abord médecin, et puis j'ai toujours été engagé, donc ce serait mentir que de dire que je ne serais pas engagé demain non plus, quelle que soit la forme de l'engagement, parce qu'il y a mille façons de s'engager. Là, on va dire que j'ai raccroché l'ISNI, mais je commence à me réengager dans l'association du Shift Project, il est shifter. Donc voilà, c'est d'autres formes d'engagement, c'est sur d'autres sujets aussi, d'autres thématiques qui me plaisent bien. Mais j'ai toujours été engagé, donc je sais que je le serai toujours.

  • Pascale Lafitte

    Cet engagement, dont parle Kylian, l'association The Shifters, apporte un soutien bénévole au centre de réflexion The Shift Project qui œuvre à la décarbonation de l'économie. Je vous remercie.

  • Killian L'Helgouarc'h

    Merci.

  • Pascale Lafitte

    Je vais vous laisser aller retrouver vos patients, puisque maintenant vous en avez. Tout à fait. Merci beaucoup. Partagez le podcast, faites vivre et prospérer ces entretiens simplement en vous abonnant et en partageant le lien. Je vous dis à bientôt pour un prochain épisode d'Internon Médecine, le podcast à suivre sans ordonnance ni modération. Cet épisode d'Internon Médecine vous a été proposé en partenariat avec l'ISNI, l'intersyndicale nationale des internes.

Chapters

  • Introduction au podcast et présentation de l'invité

    00:09

  • Le parcours de Killian L'Helgouarc'h vers la médecine

    01:01

  • Les choix de spécialité et l'importance du contact patient

    01:36

  • L'épanouissement en tant qu'interne et responsabilités médicales

    04:05

  • La définition du médecin et la dimension humaine de la médecine

    05:33

  • Killian L'Helgouarc'h et son engagement pour les territoires ruraux

    07:00

  • L'importance de la communication et de la bienveillance en médecine

    08:35

  • Réflexions sur la santé mentale des internes

    14:17

  • Responsabilités et bienveillance dans la formation médicale

    19:25

  • Conclusion et perspectives d'avenir deKillian L'Helgouarc'h

    28:48

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