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Médecin généraliste, maman interne, romancière, Marianne pose un regard avisé sur ses années d’internat. cover
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Interne en médecine

Médecin généraliste, maman interne, romancière, Marianne pose un regard avisé sur ses années d’internat.

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30min |09/12/2025|

134

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Interne en médecine

Médecin généraliste, maman interne, romancière, Marianne pose un regard avisé sur ses années d’internat.

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Description

Pourquoi est-il si difficile de parler des défis psychologiques auxquels font face les internes en médecine ? Dans cet épisode d'u podcast "Interne en médecine" je vous invite à découvrir Marianne Figuet, docteure en médecine générale et autrice de l'ouvrage "Le temps du printemps". Marianne nous partage son parcours et ses réflexions posées sur les études de médecine, révélant les réalités souvent méconnues de cette voie exigeante.


Marianne commence par évoquer ses motivations initiales pour entrer en médecine, une passion qui s'est heurtée à la dure réalité de l'internat. Elle ne cache pas les difficultés rencontrées et les défis psychologiques qui l'ont marquée. « Il y a un manque flagrant de préparation psychologique dans la formation des médecins », souligne-t-elle, mettant en lumière un aspect crucial souvent négligé.

Au fil de notre conversation, Marianne aborde également sa transition vers la médecine générale. Elle insiste sur l'importance d'écouter les patients, une compétence essentielle que tout médecin devrait cultiver. « La médecine générale est le cœur de notre système de santé », déclare-t-elle avec conviction, nous rappelant que chaque interaction compte et que chaque patient mérite d'être entendu.

Nous explorons aussi des sujets délicats tels que la violence subie durant les études de santé, ainsi que les biais sexistes et racistes qui persistent dans le milieu médical. Marianne exprime son souhait de réformer l'éducation médicale pour y intégrer davantage de sociologie et de psychologie, des disciplines qui pourraient enrichir la formation des futurs médecins. « Nous devons préparer nos internes à la réalité de la pratique, pas seulement à la théorie », affirme-t-elle, une citation qui résonne profondément dans le cœur de notre discussion.


Rejoignez-nous pour cette conversation riche et introspective, où Marianne Figuet partage non seulement son vécu, mais aussi sa vision pour un avenir meilleur dans le domaine médical. Cet épisode d'Internes en médecine est une invitation à réfléchir sur le parcours des internes, à reconnaître leurs luttes et à envisager des solutions pour un système de santé plus humain et empathique.


Interne en médecine est un podcast de et avec Pascale Lafitte, en partenariat avec l'ISNI, l'InterSyndicale Nationale des Internes.

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Et si ce podcast vous séduit, alors partagez-le avec vos proches, amis, collègues, voisins et votre médecin aussi qui a peut-être enfouit sous une montagne d’antibiotiques et de prescriptions ses années d’internat.



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Pascale Lafitte

    Bonjour et bienvenue, je suis Pascale Lafitte, je suis ravie de vous retrouver pour ce nouvel épisode d'Internes en médecine, le podcast radio qui donne la parole à des internes, des médecins qui se replongent dans leurs années d'internat et également des proches et des accompagnants d'internes. Internes en médecine, c'est votre podcast à suivre sans ordonnance ni modération. Un entretien réalisé en partenariat avec l'ISNI, l'Intersyndicale Nationale des Internes. Je vous présente Marianne Figué, docteure en médecine générale, qui après un externat à Saint-Etienne, a suivi son internat à Montpellier. Aujourd'hui, elle n'exerce pas, elle est rédactrice d'articles médicaux et autrice. En préambule, à notre entrevue, je lui ai demandé quelles étaient les raisons pour lesquelles elle avait choisi de suivre tes études de médecine.

  • Marianne Figuet

    J'avais vraiment envie de faire un métier utile et d'aider les gens, mais au départ, je voulais être pompier. Donc, ça n'avait absolument rien à voir, sauf que j'avais des bonnes notes, notamment en SVT. Donc, les profs, ils ont un peu essayé de me faire changer de voix. Et bon, j'ai entendu leurs arguments et je pense qu'ils étaient valables. Donc, je suis partie en médecine, comme ça. Après, honnêtement,m erci. Je savais pas trop, j'avais aussi hésité à faire journaliste et je pense qu'aujourd'hui ça me rattrape.

  • Pascale Lafitte

    Vous êtes partie en médecine comme ça et vous avez découvert comme ça ce qu'étaient ces longues années d'études ?

  • Marianne Figuet

    Complètement, on m'avait dit c'est difficile, je m'étais dit bon bah allez challenge, pourquoi pas, je vais pas choisir entre guillemets la facilité. Bon ça aurait pas été facile aussi de faire journaliste mais je sais pas, je me suis dit allez je choisis, je me challenge. Et oui j'ai tout découvert parce que je n'ai personne dans ma famille qui est médecin, j'avais pas du tout de proches qui avaient fait médecine donc ouai. Grosse surprise et pas forcément une bonne. Donc, je me suis posé la question plusieurs fois d'arrêter et de changer de voie. Mais finalement, je me suis quand même accrochée jusqu'au bout. Et voilà, on en est là aujourd'hui.

  • Pascale Lafitte

    Vous ne dites pas forcément une bonne. Pour quelles raisons ?

  • Marianne Figuet

    C'est quand même très difficile. Déjà la première année. Ensuite, on nous dit que ça va être plus simple, mais ça demande quand même énormément de travail, d'investissement personnel. On sait que ça demande des ressources de travail. de bonne mémoire aussi. Mais on n'est pas forcément non plus informés sur les ressources psychologiques qu'il va falloir aussi pour traverser tout ça. Donc même si c'était sympa et que j'ai appris énormément de choses, je pense qu'on peut faire beaucoup mieux dans les études de médecine. Et ça, éventuellement, ça m'intéresserait d'y travailler.

  • Pascale Lafitte

    À la fin de cet entretien, je vais vous donner une baguette magique et vous y préparer et commencer à me dire ce qu'on pourrait faire pour... Donc,

  • Marianne Figuet

    j'ai hâte.

  • Pascale Lafitte

    Voilà, mais je vais continuer. Vous, vous avez dit quelque chose à l'instant. Je l'ai retrouvé. Alors, ce que je n'ai pas dit encore à nos auditeurs, c'est que vous êtes auteur d'un ouvrage qui s'appelle Le temps du printemps. C'est une autofiction, on va dire. En lisant cet ouvrage, on découvre votre parcours d'étudiante en médecine d'interne. Les bons moments, les mauvais moments aussi. Et vous parlez de la réorientation. Vous dites que c'est difficile de changer d'orientation, mais pourquoi est-ce que c'est difficile ?

  • Marianne Figuet

    Déjà, ça a demandé un gros investissement au départ. On se dit, j'ai fait tout ça pour ça. Et puis finalement, après, les années passent et on se dit, il ne me reste plus que tant d'années, autant s'accrocher, etc. Et puis, il y a aussi la pression familiale et sociale qui fait que la médecine, c'est quand même une voie prestigieuse. On n'entend pas forcément la souffrance que ça peut procurer. Et donc, c'est difficile de faire accepter ce choix-là. Et donc, c'est même difficile de l'accepter soi-même et de l'envisager sérieusement parce que ça demande une acceptation de la part de beaucoup de monde.

  • Pascale Lafitte

    Et la hiérarchie, les co-internes, les amis, eux aussi, si vous parlez de cette difficulté et de cette éventuelle reconversion, vous voyez qu'il y a une incompréhension dans leur regard ?

  • Marianne Figuet

    Ça dépend qui. Moi, à ce moment-là, j'étais entourée de personnes Merci. qui étaient peut-être un peu dans le déni, des fois, qui ne voulaient peut-être pas voir ce qu'on subissait et donc qui préféraient garder les œillères. Alors, je ne dis pas ça du tout de manière péjorative, mais c'est vrai que parfois, c'est la simplicité aussi de ne pas trop se poser de questions et d'avancer, de faire ce qu'on nous demande et de suivre notre programme. Pendant l'externat, on a tellement de travail qu'honnêtement, il vaut mieux éventuellement éviter de se poser trop de questions. Et je pense que c'est aussi pour ça que peut-être... Je ne me suis pas sentie à ce moment-là d'en parler ou de l'accepter. Et pendant l'internat, il y a beaucoup de monde qui pense à arrêter. Pour le coup, pendant l'internat, on est vraiment proche du but. Donc, je pense que c'est encore plus difficile de reculer et arrêter pendant l'internat.

  • Pascale Lafitte

    Marianne s'est orientée vers la médecine générale. Elle nous explique pourquoi et nous révèle également combien son choix a été particulièrement débattu par ses proches.

  • Marianne Figuet

    Oui, il a été énormément discuté parce que finalement, je n'avais jamais envisagé la médecine générale parce que dans notre formation, c'est très universitaire. La médecine de ville est un peu méprisée, il ne faut pas mentir.

  • Pascale Lafitte

    Méprisée par les médecins,

  • Marianne Figuet

    en fait, par tous nos formateurs. C'est vrai qu'on n'est formés qu'à l'hôpital quasiment, donc on n'est pas encouragés à prendre de la médecine de ville. Et à l'internat, ce n'est quand même pas les premiers qui prennent médecine générale, en général. Donc, ce n'était pas un choix facile parce que je n'en avais pas forcément parlé avant. Mais en fait, quand j'ai dû choisir, c'était une évidence parce que déjà, je n'avais pas envie de choisir un organe. ou restreindre mon exercice. Et puis aussi, je n'avais pas du tout envie d'aller à l'hôpital. Et en plus, à l'époque, c'était trois ans. Donc, ça m'allait très bien d'en finir avec ces études.

  • Pascale Lafitte

    Vous dites dans l'ouvrage, en parlant de la médecine générale, vous dites que c'est une carte postale de la société.

  • Marianne Figuet

    Je ne m'en souvenais pas.

  • Pascale Lafitte

    Moi, je l'ai lue. Page 63.

  • Marianne Figuet

    Eh bien, c'est bien. C'est une bonne idée. Oui, c'est vrai. Du coup, ça me remet dedans. Mais oui, je le pense encore, même si je ne l'aurais pas formulé comme ça aujourd'hui.

  • Pascale Lafitte

    Comment est-ce que vous l'auriez créé aujourd'hui ?

  • Marianne Figuet

    Je ne sais pas, mais ça me va. Ce terme de carte postale de la société, c'est vrai que ça nous fait voir des personnes qu'on ne voit pas à l'hôpital. Ça nous fait voir des personnes qu'on ne voit pas forcément dans notre vie, parce que souvent, finalement, on est dans notre milieu. Moi, par exemple, en tant que médecin, c'est vrai que j'ai beaucoup d'amis médecins. Mon mari est médecin. Donc finalement, pour sortir un peu de ce cocon-là, les patients sont une vraie source de réflexion pour moi. J'ai découvert la sociologie récemment parce que finalement, je me suis rendu compte que j'étais complètement à côté de la plaque et qu'il me manquait plein de connaissances sur la société en fait et sur la façon dont elle s'organise.

  • Pascale Lafitte

    Vous écrivez un petit peu plus loin. Alors, elle s'appelle Eulalie, votre personnage. C'est une des raisons pour lesquelles elle avait choisi la médecine générale. Elle pouvait discuter avec une personne déprimée, effectuer les premiers examens d'un nouveau-né et s'évader avec les voyageurs. Mais la variété des consultations n'était pas l'unique raison de son choix. Quelle est l'autre ? Quelles sont les autres raisons ?

  • Marianne Figuet

    Le fait que l'internat ne soit pas très long, le fait que je ne voulais pas choisir un organe, et puis le fait que la médecine générale, ça permet aussi d'être loin de l'hôpital. Ça permet d'être à son compte, de travailler. seule ou avec une équipe qu'on a choisie. Donc, c'est quand même très confortable aussi. Pour moi, c'est très confortable. Je sais qu'il y a des personnes qui n'aiment pas du tout, mais moi, je préfère travailler comme ça.

  • Pascale Lafitte

    Qu'est-ce qu'ils vous ont apporté dans votre vie aujourd'hui, les patients ?

  • Marianne Figuet

    Franchement, ils m'ont apporté beaucoup de choses. Franchement, je trouve qu'ils m'ont apporté une ouverture d'esprit que je n'avais pas. C'est vrai que ça me permet de me poser des questions, peut-être un peu trop des fois. Mais ça me permet vraiment de m'interroger sur pourquoi on fait les choses, pourquoi il y a des gens qui sont plus en difficulté que d'autres, comment on accompagne ces personnes-là. Et c'est vrai qu'en médecine générale, quand on commence, ça nous apprend l'humilité parce qu'en fait, on se rend compte qu'on ne sait rien, qu'on n'est pas formé du tout à la médecine générale finalement. On n'est pas au contact de la vraie vie dans nos études de médecine. On est formé à l'hôpital, c'est très particulier comme exercice et finalement on est très très loin de la physiologie, des problèmes, des vrais problèmes des gens, j'ai envie de dire des problèmes quotidiens des gens qui viennent en médecine générale pour vraiment tout un tas de raisons, comme vous l'avez lu dans le passage, parce que ça aussi c'est une grande richesse intellectuellement pour un médecin, on est stimulé sur plein de spécialités en même temps, ça nous permet aussi de demander des avis à nos confrères, donc on apprend en permanence et ça c'est chouette. Mais c'est aussi une position un peu inconfortable parfois parce que finalement, l'incertitude, ça peut être très difficile à gérer. Et ça aussi, je trouve qu'on n'est pas très bien formé à ça. Donc vraiment, mes patients m'apprennent l'humilité vraiment et c'est agréable, même si parfois c'est difficile.

  • Pascale Lafitte

    L'ouvrage de Marianne Figué est un roman biographique, Le temps du printemps. Il apparaît aux éditions LibriNova. On y découvre Eulalie, jeune femme d'une trentaine d'années, maman et médecin. Il y est donc beaucoup question de médecine et beaucoup question de maternité, sujet sur lequel nous allons revenir ici. Mais pour l'instant, Marianne se remémore son premier jour d'interne.

  • Marianne Figuet

    Mon premier jour d'internat. C'était une garde aux urgences. C'était un CH, un centre hospitalier, mais régional. Et oui, c'est le stage que j'ai le moins bien vécu, évidemment. Mais voilà, en fait, je n'ai pas de souvenirs précis, mais je me rappelle que j'étais complètement perdue. J'étais égarée. Je me rappelle que j'avais dit à un chef, le chef, il me disait ça va, tu n'es pas trop stressée. Je lui disais, je suis plus dépassée que stressée tellement j'étais vraiment sous l'eau. mais bon On a survécu, mais voilà, pour moi, c'est le terme. J'ai survécu à ce stage.

  • Pascale Lafitte

    Six mois.

  • Marianne Figuet

    Sept ! C'était le Covid. Ils l'ont prolongé en plus, franchement.

  • Pascale Lafitte

    Survivre, c'est difficile. Quand on est médecin, de survivre face à des patients qui, eux aussi, luttent pour survivre. En fait, tout le monde dans ce service, en tout cas, vos patients et vous, étaient en état de survie. Ça demande beaucoup d'énergie.

  • Marianne Figuet

    Oui, franchement, oui. Alors vraiment, là j'ai survécu et tant mieux, mais j'aurais pu ne pas survivre sincèrement. Et oui c'est difficile, alors avec certains patients ça me permettait de m'évader, parce que c'est aussi des rencontres humaines et le contact humain fait que ça soigne aussi, et parfois ça soigne aussi les soignants. Mais oui c'est très difficile de soigner, surtout quand on est soi-même en posture de vulnérabilité, c'est difficile de donner parce que le soin ça demande de donner beaucoup, beaucoup d'énergie, beaucoup de joie, beaucoup d'entrain je trouve, il y a quand même un petit peu une posture. Et c'est difficile de l'adopter quand soi-même on est altéré et qu'on devrait soi-même se soigner finalement. Donc ce qui est bien, c'est que j'ai su appeler à l'aide pendant ce stage quand j'ai senti que je perdais complètement pied. Et le syndicat des internes a été vraiment très aidant pour moi.

  • Pascale Lafitte

    Vous savez maintenant quelles sont les raisons pour lesquelles il y a eu ce moment si difficile ?

  • Marianne Figuet

    Déjà, premièrement, je pense que vraiment physiologiquement, je ne suis pas faite pour travailler de nuit et 24 heures pour moi, c'est trop. Sincèrement, là, je... Je le pense aujourd'hui, je l'assume, parce que je n'osais pas m'avouer, je ne suis pas capable de travailler la nuit et je ne suis pas capable de travailler 24 heures d'affilée. C'est quelque chose pour moi qui était impossible, trop difficile. Et donc ça, ça m'a complètement fait perdre pied et généré chez moi beaucoup d'angoisse parce que je savais que je n'étais pas capable. Et savoir qu'on n'est pas capable face à des patients, c'est extrêmement angoissant. On a peur de faire les mauvais choix, on a peur de nuire. Et donc quand on a peur de nuire, on n'ose plus rien faire. Et c'est vrai qu'à ce moment-là, à la fois on ne veut pas déranger les chefs, mais à la fois on ne veut pas tuer un patient. Donc c'est extrêmement anxiogène et c'est ça qui m'a fait perdre le pied. Aujourd'hui, je pense qu'il y a des gens qui sont plus résistants, mais je ne pense pas qu'on soit quand même capable de le faire au maximum de ses capacités intellectuelles. Sauf que je pense quand même qu'on doit ça aux patients. Et que ce n'est pas une faiblesse que de dire qu'on ne peut pas le faire. Je ne comprends pas, il n'y a que les médecins maintenant qui travaillent 24 heures d'affilée. On sait les risques pour la santé, on sait les risques en sortie de garde, sur la route. Et c'est maintenu. Alors, il y a des médecins qui tiennent beaucoup à faire des 24 heures, parce que ça leur permet aussi de travailler moins de jours dans la semaine. Et je le comprends. Néanmoins, est-ce qu'on se rend compte quand même des capacités qu'on perd ? De nos vraies ressources, je ne sais pas. Je ne veux pas faire forcément annuler les 24 heures, mais ça devrait être vraiment un choix unique, parce que personnellement, je suis persuadée qu'on n'est pas bon et qu'il faudrait mieux passer en 12 heures.

  • Pascale Lafitte

    La médecine comme un métier, ça existe. On peut être très bon médecin, c'est un métier. On a tendance, nous, quand on est à l'extérieur, L'image qu'on renvoie, c'est la passion, c'est le médecin passionné, c'est celui qu'on montre au cinéma, qui n'arrête pas de travailler. Et ça, ça fosse un peu l'image qu'on peut avoir du médecin, même quand on est interne soi-même et qu'on rentre dans les études en se disant « mais c'est pas ce qu'on attend de moi » .

  • Marianne Figuet

    C'est très pertinent, je n'avais pas pensé à ça comme ça. Mais maintenant que vous le dites, je trouve que ça dessert énormément les... patients eux-mêmes aussi, de véhiculer cette image-là, même s'ils ne le font pas exprès, mais on leur donne cette image-là. Déjà parce que un bon médecin, ce n'est pas un médecin qui ne compte pas ses heures. Un bon médecin, c'est quelqu'un qui arrive à se reposer, qui arrive à prendre soin de ça, qui arrive à se former, qui a le temps de prendre du recul parce que quand on a la tête dans le guidon, qu'on est stressé, croyamment, on ne prend pas les bonnes décisions. Moi, j'ai beaucoup envie de travailler sur l'effet du stress des médecins, sur leur pratique. Parce que je pense sincèrement que la médecine peut être différente et moins oxygène aussi pour les patients. Par exemple, parfois, certains médecins vont avoir tendance à faire beaucoup d'examens qui ne sont pas forcément justifiés, qui n'ont pas forcément d'intérêt ni pour le patient ni pour la soeur. société, puisque c'est la société qui paye. Et pourquoi ils font ça ? Si ce n'est pour se rassurer, ou si ce n'est pour aussi rassurer le patient. Finalement, est-ce qu'un bon médecin, ce serait pas aussi quelqu'un qui arrive à dire, écoutez, stop, j'ai assez de recul pour dire que là, je suis pas inquiet. Laisser du temps, avoir du temps. Et un médecin qui a la tête dans le guidon, il n'a jamais le temps. Il n'a jamais le temps parce qu'il a toujours trop de choses à faire, et c'est normal, c'est pas de sa faute. On lui a pas appris à prendre soin de soi, on lui a pas appris qu'être un bon médecin c'était aussi avoir du temps pour soi Et moi, c'est ma vision des choses, en tout cas.

  • Pascale Lafitte

    Vous avez donc écrit qu'il y avait une violence subie durant les études de médecine. Vous dites qu'elles sont monnaie courante. Je pourrais retrouver le passage parce que j'ai des petits post-it partout. Les violences subies durant les études de santé sont monnaie courante. Eulalie, donc c'est votre personnage, était loin d'être un cas isolé. Mais mise bout à bout, ces violences forgent des soignants fragilisés qui ne doivent pas être violents, eux, surtout pas les femmes. ou pas avec leurs patients et leurs patientes ?

  • Marianne Figuet

    En fait, si vous voulez, j'aime beaucoup ce passage-là, parce que les patients se plaignent des médecins beaucoup. Et je le comprends, même en tant que patiente, des fois, moi j'ai des choses à redire, clairement. Mais comment voulez-vous qu'on ne soit pas violent quand en fait on est formé dans la violence ? On est formé, on est violent avec soi-même. À partir du moment où on est violent avec soi-même, comment voulez-vous qu'on ne soit pas violent avec les autres ? Et le pire, c'est que si on ne le questionne pas, ça, et bien finalement, on reste dans cette violence-là. Et en fait, on nie. Ça, c'est le grand truc de la médecine. On nie les patients. On peut les prendre de haut un petit peu. Bon, attention, je ne sais pas tous les médecins, loin de là. Mais c'est une possibilité. C'est un risque, en fait. Si on ne travaille pas sur soi, si on ne prend pas de recul, si on ne questionne pas ses biais, on reproduit. Et ça, c'est valable avec les violences, mais c'est valable aussi avec le sexisme, avec le racisme, avec finalement beaucoup de discrimination médicale. Quand j'étais externe, moi, on était parfois jusqu'à 8 ans dans une chambre de malade. Moi, je vais vous dire, mon fils a été hospitalisé au CHU. En fait, quand il rentre à 5 alors qu'il a 15 jours et que toutes les externes qui n'ont jamais vu un bébé de leur vie, elles veulent lui faire un examen. En fait, sinon, ce n'est pas possible. C'est extrêmement violent pour le bébé, mais pour les parents aussi. Donc ça, il faut vraiment qu'on apprenne à se questionner. Mais ça, ce n'est pas l'ordre du jour. Et ça,

  • Speaker #2

    c'est vraiment quelque chose pour lequel j'aimerais oeuvrer. À suivre sans ordonnance ni modération.

  • Pascale Lafitte

    Dans son ouvrage, Le temps du printemps, comme pour nous également aujourd'hui, Marianne se souvient de sa maternité.

  • Marianne Figuet

    J'ai été maman interne, j'étais enceinte pour ma thèse, ça c'était ma victoire. Je ne sais pas pourquoi, je voulais absolument être enceinte pour ma thèse, mais je ne le savais pas, donc c'est la belle surprise. Et donc oui, j'ai été maman pendant l'internat, j'étais enceinte sur un stage de ville. Bon, je vous avoue que les... professionnels avec qui je t'aide n'ont pas été très compréhensives et donc je devais être interne. Je n'étais pas une femme, je n'étais pas une femme enceinte, j'étais une interne qui devait accomplir son travail et rapporter des sous. Parce que oui, en libéral, on travaille pour nos chefs et on ne voit que l'argent passer. Donc ça, j'ai mal vécu mais à ce moment-là, j'avais finalement assez de ressources pour identifier le problème et savoir que ça ne venait pas de moi. Finalement, j'ai pu aussi être aidée encore une fois par le syndicat des internes. Heureusement qu'ils étaient là, franchement. Je leur dois une très fière chandelle parce qu'ils m'ont aussi aidée quand j'ai accouché et que je ne me voyais pas faire des gardes aux urgences justement en ayant accouché. Et ils m'ont fléché sur un stage plus vivable pour moi.

  • Pascale Lafitte

    Je sors de votre cas, mais il y a d'autres jeunes femmes internes qui ont des enfants à un internat. Quand on connaît les contraintes d'un interne, que ce soit les gardes, que ce soit les heures, tout le monde en parle. La presse en parle, tout le monde parle de ça. voilà On n'invente rien quand on le dit. C'est difficile. Vous avez droit à des congés maternités comme une personne qui travaillerait dans un autre type de métier ? Parce que vous êtes étudiant, en fait, et qu'au bout du compte, il y a une thèse, il y a la fin des études. Comment est-ce que ça se passe ?

  • Marianne Figuet

    Pour mon cas, ça a été assez simple parce que j'ai un internat de médecine générale que j'avais déjà fait les stages compliqués et que le syndicat m'a aidée. et en plus mon mari a pu prendre une disponibilité et moi j'ai eu un après j'ai pris un congé parental après mon congé maladie donc on est des salariés lambda on a ce droit là d'avoir un congé maternité, encore heureux j'ai envie de dire, et la possibilité de prendre des disponibilités selon les accords selon les facs c'est différent. Il y a beaucoup de femmes qui ont des enfants dans l'internat et franchement respect à elles parce que notamment celles qui ont des gardes avant on avait, dès qu'on était enceinte de 3 mois on n'était plus obligé de faire des gardes la nuit maintenant c'est supprimé voilà mais on recule mais enfin je ne comprends pas cette décision et en fait ça c'est aussi quelque chose un peu ouais bah elle est enceinte bah elle l'a voulu Oui, d'accord, mais en fait, voilà, c'est exactement ce que vous disiez, on est rentré dans les ordres, on n'a plus le droit d'avoir une vie à part la médecine. Je ne l'avais jamais vu comme ça, mais en fait, ça me parle énormément. C'est exactement ça. Oui, mais ta priorité, ça doit être la médecine. Ben non, vraiment pas ! Si c'est ta passion, que tu rêves de ça la nuit, oui, mais sinon, ne t'empêche pas de vivre, parce que la vie est courte. Et ça, c'est quelque chose que mes patients m'ont appris aussi, c'est qu'on voit bien qu'on ne sait jamais de quoi est fait demain, et c'est peut-être une vision un peu péjorative des choses, Mais moi, c'est vraiment ça aussi que j'ai appris pendant mes études de médecine, c'est qu'on n'a pas toujours le temps, on ne sait pas. On ne sait pas ce qui va arriver demain. Donc on ne peut pas se permettre de tout abandonner comme ça pour ses études.

  • Pascale Lafitte

    Les internes enceintes ont droit à une dispense de garde dès que leur médecin du travail l'indique. Dispense qui n'est pas une faveur, mais un droit. Dans l'usage, même si le droit existe, son application dépend fortement du service. Heureusement, il existe une culture de solidarité réelle entre internes qui réorganise souvent les plannings entre eux. Une forme de solidarité traditionnelle mais non réglementaire. J'ai parlé à Marianne du manque de médecins, de l'insupportable délai d'attente aux urgences, de toutes ces choses qui font que nous, nous patients, nous pestons, nous rageons contre les internes, les médecins et souvent même contre tout le personnel médical.

  • Marianne Figuet

    Aux urgences, si on avait le temps, si on avait des locaux adaptés, si on avait assez de médecins, assez d'infirmières, des brancards pour tout le monde, vous inquiétez pas, on prendrait tout le monde, ça rapportait soit à l'hôpital, on serait content de le faire, vous inquiétez pas. Mais c'est pas possible, et c'est pas de notre faute. Donc ça, clairement, je l'entends, mais ça rappelle quelque chose, c'est que les patients sont aussi très violents avec nous, même en médecine générale. Donc ça, c'est, comme vous le disiez, c'est systémique, il faut le changer Malheureusement, ce n'est pas à nous de le faire et ce n'est pas nous qui le ferons. Parce que de toute façon, regardez, les médecins ne font même pas grève parce qu'ils ne veulent pas laisser leurs patients. Donc, les gentils ne lisent pas, on sait qui c'est. Enfin, moi, je sais en tout cas.

  • Pascale Lafitte

    Vous dites que les patients peuvent être très violents ?

  • Marianne Figuet

    Oui, les patients sont violents. Pas tous, évidemment. Néanmoins, d'autant plus quand on est une femme, il y a des patients qui sont violents physiquement. Il y a des patients qui sont violents verbalement. Je ne sais pas comment l'exprimer, mais on ne peut pas mal parler à un autre être humain. Des fois, on le fait quand on est en colère, mais il faut savoir s'excuser. Et là, on va vers quelqu'un qui doit vous apporter du soin. Donc déjà, premièrement, c'est très désagréable pour le médecin. Mettre la pression, ça ne fait pas prendre des bonnes décisions, clairement, parce que quand on est en situation de stress, ce n'est pas la meilleure des façons pour réfléchir, honnêtement. Et puis, je ne sais pas si c'est très stratégique, parce que si on fait bien pris en charge par quelqu'un, autant ne pas l'agresser.

  • Pascale Lafitte

    Vous en parlez dans l'ouvrage, vous parlez de patients, puis même de la vie de chefs parfois, ils ont tendance à mal réagir parce que vous êtes une interne femme. Et à dire, ah bah non, c'est pas un médecin.

  • Marianne Figuet

    C'est ça. Le nombre de fois où c'était, et le docteur, il est où ? Ben, il est là. Elle est là. Oui, il y a ça. Honnêtement, on n'est pas pris au sérieux. Après, les patients, c'est pas de la mauvaise volonté, mais c'est en eux, en fait. C'est des biais sexistes qu'ils ont intégrés, qui se demandent si on est capables, qui remettent en cause nos capacités. Ça peut être aussi dû à la jeunesse. Alors quand on est une femme et jeune, je ne vous dis pas. Et si on est racisé en plus, c'est ce qui n'est pas mon cas. Mais de mes consoeurs, je l'entends malheureusement trop souvent. Ça se cumule en fait, si vous voulez.

  • Pascale Lafitte

    Vous écrivez combien de fois à l'hôpital l'avait-on prise pour une infirmière ? Combien de fois un étudiant mâle avait été pris pour le médecin alors que le médecin seigneur était aussi dans la pièce et que c'était une femme ? Et vous écrivez ceci aussi. Et je voulais qu'on en parle. Mais le pire à ses yeux était de constater qu'elle-même pouvait faire preuve de misogynie.

  • Marianne Figuet

    On a tous des biais. Les biais, comme je vous le disais, les biais racistes, les biais sexistes, etc. Il y en a mille, malheureusement. Et donc, quand on grandit dans une société qui est misogyne ou sexiste, en soi, c'est ancré. Donc, l'important, c'est de le questionner. Et donc, oui, ça peut m'arriver de me faire des réflexions. Par exemple, une fraction de seconde, se dire que c'est une femme. Oui, et ? Et donc, c'est hyper intéressant. de le vivre soi-même parce qu'en fait, c'est internalisé. Ce n'est pas conscient, ce n'est pas volontaire. Mais c'est ça qui est encore plus dangereux finalement. Mais ce livre m'a beaucoup aidée justement à questionner ces biais-là et j'espère à m'améliorer.

  • Pascale Lafitte

    Il y a un autre petit passage qui m'a interpellée parce que moi, je suis maman d'un interne dans le futur médecin. Et qui, comme vous dit, on lui demandait parfois de s'impliquer dans la prise en charge, de relire et expliquer les comptes rendus des examens, d'appeler. Là, on parle de la famille. En fait, est-ce que c'est difficile ? On commence à avoir un pied dans le métier, de voir arriver papa, maman, les frères, les soeurs, tonton, taty, papy, mamie, avec sa petite radio, avec son petit commentaire et ses cent mille questions.

  • Marianne Figuet

    En fait, c'est dur parce que ça demande énormément d'émotions. Ça demande des ressources émotionnelles importantes. Et les gens disent, oui, mais c'est juste ça, c'est juste une radio. Mais en fait, un médecin ne regarde plus jamais juste une radio. il faut un interrogatoire, un examen et... On regarde la radio et puis on n'a pas forcément envie de questionner les douleurs de sa mère. Si vous voulez que notre mère, elle est mal, ça ne nous fait pas la même chose que ce soit un patient qu'on ne connaît pas. Si vous voulez, donc, si c'est notre mère, on va beaucoup plus s'inquiéter. On va avoir envie de faire, je ne sais pas, peut-être une IRM, peut-être plein de choses. Mais parce qu'en fait, c'est notre maman et c'est valable pour toute la famille, si vous voulez. Donc ça, c'est quelque chose qu'ils ne comprennent pas. C'est toujours ça. Vous pouvez juste regarder ce résultat. Mais en fait, non, je ne peux pas. Je peux te dire que là, ce n'est pas normal. Mais émotionnellement, déjà, ça va me demander beaucoup. Donc, est-ce que la famille a vraiment envie de demander ça à quelqu'un ? Et ensuite, ce n'est pas comme ça qu'on pratique la médecine, en fait. La médecine, c'est plus qu'un examen. C'est plus que tu peux juste me donner ton avis. Non, c'est plus complexe. Mais ça, c'est très difficile à le faire comprendre.

  • Pascale Lafitte

    Et une interne avec son petit bébé qui vient de naître, est-ce qu'elle est le médecin de son bébé ou est-ce que là vraiment il faut un pédiatre à côté, extérieur ?

  • Marianne Figuet

    Non, moi je ne suis pas le médecin de mes enfants. Malheureusement, je l'ai été malgré moi parce qu'ils ont eu des soucis de santé et que des fois il y a le diagnostic qui s'impose à nous. Parce que même si on ne veut pas être médecin, on reste médecin et qu'on le voit. Donc j'avoue que ça a été compliqué et que ça m'a un peu fâchée avec le monde médical pour le coup. Je suis assez déçue, sincèrement. Déçue,

  • Pascale Lafitte

    C'est-à-dire ?

  • Marianne Figuet

    J'ai été déçue de l'accueil que j'ai reçue. J'ai été déçue des diagnostics qui n'ont pas été faits. J'ai été déçue par la prise en charge. Comme je l'ai évoqué au début du podcast, il y a mon fils qui a été hospitalisé. Et là, tout de suite, quand c'est grave, on a tout de suite un puits de reconnaissance. Même si on note les dysfonctionnements du système de santé, moi, du coup, je les vois tout de suite et ça me saute aux yeux. Mais bon, pour certains praticiens, je suis extrêmement reconnaissante et c'est des gens qui m'ont inspirée et qui m'ont donné envie de reprendre la médecine. Et pour d'autres, je me dis, on a beaucoup à faire.

  • Pascale Lafitte

    Vous serez médecin toute votre vie, vous savez ça ?

  • Marianne Figuet

    Je suis médecin et je le resterai, ça c'est sûr. Après, est-ce que j'exercerai ? Je pense que je prendrai service aux patients, quoi qu'il en coûte. Je rendrai service aux patients, que ce soit en écrivant dans la revue, puisque de toute façon j'écris pour les médecins, donc j'écris aussi pour les patients. J'écris des livres, donc j'écris pour les patients. Et dans mes livres, il y a toujours aussi un côté un peu thérapeutique, dans le sens, j'essaye en tout cas, d'amener le lecteur à réfléchir, d'amener le lecteur à prendre conscience peut-être de certaines choses. Et je pense que ça ne peut qu'aider les gens. Donc je continuerai à être médecin parce que je le serai à vie. Je continuerai à aider, j'y mettrai un point d'honneur. Après, est-ce que je reprendrai la consultation ? Je ne sais pas. Peut-être, sûrement. On verra.

  • Pascale Lafitte

    J'ai tendu une baguette magique à Marianne. Une baguette qui lui confère, comme ça, instantanément, la possibilité de revoir, un peu ou beaucoup, partiellement ou totalement, l'externat comme l'internat.

  • Marianne Figuet

    Alors, si j'avais une baguette magique, je refondrais complètement les études de médecine. J'arrêterais de faire apprendre des choses complètement inutiles. J'arrêterais de faire apprendre la sur-spécialité pour apprendre la physiologie, pour apprendre la médecine générale et ensuite éventuellement des notions de spécialité qui sont quand même intéressantes, disons-le. Mais néanmoins, il faut plus de pratiques courantes. Ensuite, j'amènerais de la sociologie dans les études de médecine. On n'en a pas. On a besoin de questionner nos biais. Tous, tous. On a tous des biais. Donc, il faut qu'on les questionne pour bien prendre en charge nos patients. Et ensuite, j'amènerais de la psychologie, parce qu'on a besoin d'écouter nos patients, on a besoin de nous écouter nous-mêmes. Et donc, on a besoin de notions de psychologie et on a besoin d'un accompagnement psychologique. Les psychologues ont un accompagnement. Ça se développe un petit peu en ce moment pour les médecins, ça s'appelle la supervision, ça permet de parler de ses patients. Mais il faut aussi un accompagnement psychologique à soi, pour parler de nous. Et je pense que ce serait déjà pas mal pour la baguette magique.

  • Pascale Lafitte

    Merci à Marianne Figuet pour sa franchise. Son ouvrage référence pour cet entretien, Le temps du printemps, apparu aux éditions LibriNova. Un autre livre est en cours de rédaction. Vous pouvez la retrouver également sur Instagram. Merci à l'ISNI, l'Intersyndicale Nationale des Internes, de nous avoir mis en contact. Et merci à vous tous d'être au rendez-vous. Partagez, faites vivre cet entretien et prospérez ce podcast. Abonnez-vous et à bientôt pour un prochain épisode d'Internet en médecine, le podcast, à suivre sans ordonnance ni modération.

Description

Pourquoi est-il si difficile de parler des défis psychologiques auxquels font face les internes en médecine ? Dans cet épisode d'u podcast "Interne en médecine" je vous invite à découvrir Marianne Figuet, docteure en médecine générale et autrice de l'ouvrage "Le temps du printemps". Marianne nous partage son parcours et ses réflexions posées sur les études de médecine, révélant les réalités souvent méconnues de cette voie exigeante.


Marianne commence par évoquer ses motivations initiales pour entrer en médecine, une passion qui s'est heurtée à la dure réalité de l'internat. Elle ne cache pas les difficultés rencontrées et les défis psychologiques qui l'ont marquée. « Il y a un manque flagrant de préparation psychologique dans la formation des médecins », souligne-t-elle, mettant en lumière un aspect crucial souvent négligé.

Au fil de notre conversation, Marianne aborde également sa transition vers la médecine générale. Elle insiste sur l'importance d'écouter les patients, une compétence essentielle que tout médecin devrait cultiver. « La médecine générale est le cœur de notre système de santé », déclare-t-elle avec conviction, nous rappelant que chaque interaction compte et que chaque patient mérite d'être entendu.

Nous explorons aussi des sujets délicats tels que la violence subie durant les études de santé, ainsi que les biais sexistes et racistes qui persistent dans le milieu médical. Marianne exprime son souhait de réformer l'éducation médicale pour y intégrer davantage de sociologie et de psychologie, des disciplines qui pourraient enrichir la formation des futurs médecins. « Nous devons préparer nos internes à la réalité de la pratique, pas seulement à la théorie », affirme-t-elle, une citation qui résonne profondément dans le cœur de notre discussion.


Rejoignez-nous pour cette conversation riche et introspective, où Marianne Figuet partage non seulement son vécu, mais aussi sa vision pour un avenir meilleur dans le domaine médical. Cet épisode d'Internes en médecine est une invitation à réfléchir sur le parcours des internes, à reconnaître leurs luttes et à envisager des solutions pour un système de santé plus humain et empathique.


Interne en médecine est un podcast de et avec Pascale Lafitte, en partenariat avec l'ISNI, l'InterSyndicale Nationale des Internes.

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Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Pascale Lafitte

    Bonjour et bienvenue, je suis Pascale Lafitte, je suis ravie de vous retrouver pour ce nouvel épisode d'Internes en médecine, le podcast radio qui donne la parole à des internes, des médecins qui se replongent dans leurs années d'internat et également des proches et des accompagnants d'internes. Internes en médecine, c'est votre podcast à suivre sans ordonnance ni modération. Un entretien réalisé en partenariat avec l'ISNI, l'Intersyndicale Nationale des Internes. Je vous présente Marianne Figué, docteure en médecine générale, qui après un externat à Saint-Etienne, a suivi son internat à Montpellier. Aujourd'hui, elle n'exerce pas, elle est rédactrice d'articles médicaux et autrice. En préambule, à notre entrevue, je lui ai demandé quelles étaient les raisons pour lesquelles elle avait choisi de suivre tes études de médecine.

  • Marianne Figuet

    J'avais vraiment envie de faire un métier utile et d'aider les gens, mais au départ, je voulais être pompier. Donc, ça n'avait absolument rien à voir, sauf que j'avais des bonnes notes, notamment en SVT. Donc, les profs, ils ont un peu essayé de me faire changer de voix. Et bon, j'ai entendu leurs arguments et je pense qu'ils étaient valables. Donc, je suis partie en médecine, comme ça. Après, honnêtement,m erci. Je savais pas trop, j'avais aussi hésité à faire journaliste et je pense qu'aujourd'hui ça me rattrape.

  • Pascale Lafitte

    Vous êtes partie en médecine comme ça et vous avez découvert comme ça ce qu'étaient ces longues années d'études ?

  • Marianne Figuet

    Complètement, on m'avait dit c'est difficile, je m'étais dit bon bah allez challenge, pourquoi pas, je vais pas choisir entre guillemets la facilité. Bon ça aurait pas été facile aussi de faire journaliste mais je sais pas, je me suis dit allez je choisis, je me challenge. Et oui j'ai tout découvert parce que je n'ai personne dans ma famille qui est médecin, j'avais pas du tout de proches qui avaient fait médecine donc ouai. Grosse surprise et pas forcément une bonne. Donc, je me suis posé la question plusieurs fois d'arrêter et de changer de voie. Mais finalement, je me suis quand même accrochée jusqu'au bout. Et voilà, on en est là aujourd'hui.

  • Pascale Lafitte

    Vous ne dites pas forcément une bonne. Pour quelles raisons ?

  • Marianne Figuet

    C'est quand même très difficile. Déjà la première année. Ensuite, on nous dit que ça va être plus simple, mais ça demande quand même énormément de travail, d'investissement personnel. On sait que ça demande des ressources de travail. de bonne mémoire aussi. Mais on n'est pas forcément non plus informés sur les ressources psychologiques qu'il va falloir aussi pour traverser tout ça. Donc même si c'était sympa et que j'ai appris énormément de choses, je pense qu'on peut faire beaucoup mieux dans les études de médecine. Et ça, éventuellement, ça m'intéresserait d'y travailler.

  • Pascale Lafitte

    À la fin de cet entretien, je vais vous donner une baguette magique et vous y préparer et commencer à me dire ce qu'on pourrait faire pour... Donc,

  • Marianne Figuet

    j'ai hâte.

  • Pascale Lafitte

    Voilà, mais je vais continuer. Vous, vous avez dit quelque chose à l'instant. Je l'ai retrouvé. Alors, ce que je n'ai pas dit encore à nos auditeurs, c'est que vous êtes auteur d'un ouvrage qui s'appelle Le temps du printemps. C'est une autofiction, on va dire. En lisant cet ouvrage, on découvre votre parcours d'étudiante en médecine d'interne. Les bons moments, les mauvais moments aussi. Et vous parlez de la réorientation. Vous dites que c'est difficile de changer d'orientation, mais pourquoi est-ce que c'est difficile ?

  • Marianne Figuet

    Déjà, ça a demandé un gros investissement au départ. On se dit, j'ai fait tout ça pour ça. Et puis finalement, après, les années passent et on se dit, il ne me reste plus que tant d'années, autant s'accrocher, etc. Et puis, il y a aussi la pression familiale et sociale qui fait que la médecine, c'est quand même une voie prestigieuse. On n'entend pas forcément la souffrance que ça peut procurer. Et donc, c'est difficile de faire accepter ce choix-là. Et donc, c'est même difficile de l'accepter soi-même et de l'envisager sérieusement parce que ça demande une acceptation de la part de beaucoup de monde.

  • Pascale Lafitte

    Et la hiérarchie, les co-internes, les amis, eux aussi, si vous parlez de cette difficulté et de cette éventuelle reconversion, vous voyez qu'il y a une incompréhension dans leur regard ?

  • Marianne Figuet

    Ça dépend qui. Moi, à ce moment-là, j'étais entourée de personnes Merci. qui étaient peut-être un peu dans le déni, des fois, qui ne voulaient peut-être pas voir ce qu'on subissait et donc qui préféraient garder les œillères. Alors, je ne dis pas ça du tout de manière péjorative, mais c'est vrai que parfois, c'est la simplicité aussi de ne pas trop se poser de questions et d'avancer, de faire ce qu'on nous demande et de suivre notre programme. Pendant l'externat, on a tellement de travail qu'honnêtement, il vaut mieux éventuellement éviter de se poser trop de questions. Et je pense que c'est aussi pour ça que peut-être... Je ne me suis pas sentie à ce moment-là d'en parler ou de l'accepter. Et pendant l'internat, il y a beaucoup de monde qui pense à arrêter. Pour le coup, pendant l'internat, on est vraiment proche du but. Donc, je pense que c'est encore plus difficile de reculer et arrêter pendant l'internat.

  • Pascale Lafitte

    Marianne s'est orientée vers la médecine générale. Elle nous explique pourquoi et nous révèle également combien son choix a été particulièrement débattu par ses proches.

  • Marianne Figuet

    Oui, il a été énormément discuté parce que finalement, je n'avais jamais envisagé la médecine générale parce que dans notre formation, c'est très universitaire. La médecine de ville est un peu méprisée, il ne faut pas mentir.

  • Pascale Lafitte

    Méprisée par les médecins,

  • Marianne Figuet

    en fait, par tous nos formateurs. C'est vrai qu'on n'est formés qu'à l'hôpital quasiment, donc on n'est pas encouragés à prendre de la médecine de ville. Et à l'internat, ce n'est quand même pas les premiers qui prennent médecine générale, en général. Donc, ce n'était pas un choix facile parce que je n'en avais pas forcément parlé avant. Mais en fait, quand j'ai dû choisir, c'était une évidence parce que déjà, je n'avais pas envie de choisir un organe. ou restreindre mon exercice. Et puis aussi, je n'avais pas du tout envie d'aller à l'hôpital. Et en plus, à l'époque, c'était trois ans. Donc, ça m'allait très bien d'en finir avec ces études.

  • Pascale Lafitte

    Vous dites dans l'ouvrage, en parlant de la médecine générale, vous dites que c'est une carte postale de la société.

  • Marianne Figuet

    Je ne m'en souvenais pas.

  • Pascale Lafitte

    Moi, je l'ai lue. Page 63.

  • Marianne Figuet

    Eh bien, c'est bien. C'est une bonne idée. Oui, c'est vrai. Du coup, ça me remet dedans. Mais oui, je le pense encore, même si je ne l'aurais pas formulé comme ça aujourd'hui.

  • Pascale Lafitte

    Comment est-ce que vous l'auriez créé aujourd'hui ?

  • Marianne Figuet

    Je ne sais pas, mais ça me va. Ce terme de carte postale de la société, c'est vrai que ça nous fait voir des personnes qu'on ne voit pas à l'hôpital. Ça nous fait voir des personnes qu'on ne voit pas forcément dans notre vie, parce que souvent, finalement, on est dans notre milieu. Moi, par exemple, en tant que médecin, c'est vrai que j'ai beaucoup d'amis médecins. Mon mari est médecin. Donc finalement, pour sortir un peu de ce cocon-là, les patients sont une vraie source de réflexion pour moi. J'ai découvert la sociologie récemment parce que finalement, je me suis rendu compte que j'étais complètement à côté de la plaque et qu'il me manquait plein de connaissances sur la société en fait et sur la façon dont elle s'organise.

  • Pascale Lafitte

    Vous écrivez un petit peu plus loin. Alors, elle s'appelle Eulalie, votre personnage. C'est une des raisons pour lesquelles elle avait choisi la médecine générale. Elle pouvait discuter avec une personne déprimée, effectuer les premiers examens d'un nouveau-né et s'évader avec les voyageurs. Mais la variété des consultations n'était pas l'unique raison de son choix. Quelle est l'autre ? Quelles sont les autres raisons ?

  • Marianne Figuet

    Le fait que l'internat ne soit pas très long, le fait que je ne voulais pas choisir un organe, et puis le fait que la médecine générale, ça permet aussi d'être loin de l'hôpital. Ça permet d'être à son compte, de travailler. seule ou avec une équipe qu'on a choisie. Donc, c'est quand même très confortable aussi. Pour moi, c'est très confortable. Je sais qu'il y a des personnes qui n'aiment pas du tout, mais moi, je préfère travailler comme ça.

  • Pascale Lafitte

    Qu'est-ce qu'ils vous ont apporté dans votre vie aujourd'hui, les patients ?

  • Marianne Figuet

    Franchement, ils m'ont apporté beaucoup de choses. Franchement, je trouve qu'ils m'ont apporté une ouverture d'esprit que je n'avais pas. C'est vrai que ça me permet de me poser des questions, peut-être un peu trop des fois. Mais ça me permet vraiment de m'interroger sur pourquoi on fait les choses, pourquoi il y a des gens qui sont plus en difficulté que d'autres, comment on accompagne ces personnes-là. Et c'est vrai qu'en médecine générale, quand on commence, ça nous apprend l'humilité parce qu'en fait, on se rend compte qu'on ne sait rien, qu'on n'est pas formé du tout à la médecine générale finalement. On n'est pas au contact de la vraie vie dans nos études de médecine. On est formé à l'hôpital, c'est très particulier comme exercice et finalement on est très très loin de la physiologie, des problèmes, des vrais problèmes des gens, j'ai envie de dire des problèmes quotidiens des gens qui viennent en médecine générale pour vraiment tout un tas de raisons, comme vous l'avez lu dans le passage, parce que ça aussi c'est une grande richesse intellectuellement pour un médecin, on est stimulé sur plein de spécialités en même temps, ça nous permet aussi de demander des avis à nos confrères, donc on apprend en permanence et ça c'est chouette. Mais c'est aussi une position un peu inconfortable parfois parce que finalement, l'incertitude, ça peut être très difficile à gérer. Et ça aussi, je trouve qu'on n'est pas très bien formé à ça. Donc vraiment, mes patients m'apprennent l'humilité vraiment et c'est agréable, même si parfois c'est difficile.

  • Pascale Lafitte

    L'ouvrage de Marianne Figué est un roman biographique, Le temps du printemps. Il apparaît aux éditions LibriNova. On y découvre Eulalie, jeune femme d'une trentaine d'années, maman et médecin. Il y est donc beaucoup question de médecine et beaucoup question de maternité, sujet sur lequel nous allons revenir ici. Mais pour l'instant, Marianne se remémore son premier jour d'interne.

  • Marianne Figuet

    Mon premier jour d'internat. C'était une garde aux urgences. C'était un CH, un centre hospitalier, mais régional. Et oui, c'est le stage que j'ai le moins bien vécu, évidemment. Mais voilà, en fait, je n'ai pas de souvenirs précis, mais je me rappelle que j'étais complètement perdue. J'étais égarée. Je me rappelle que j'avais dit à un chef, le chef, il me disait ça va, tu n'es pas trop stressée. Je lui disais, je suis plus dépassée que stressée tellement j'étais vraiment sous l'eau. mais bon On a survécu, mais voilà, pour moi, c'est le terme. J'ai survécu à ce stage.

  • Pascale Lafitte

    Six mois.

  • Marianne Figuet

    Sept ! C'était le Covid. Ils l'ont prolongé en plus, franchement.

  • Pascale Lafitte

    Survivre, c'est difficile. Quand on est médecin, de survivre face à des patients qui, eux aussi, luttent pour survivre. En fait, tout le monde dans ce service, en tout cas, vos patients et vous, étaient en état de survie. Ça demande beaucoup d'énergie.

  • Marianne Figuet

    Oui, franchement, oui. Alors vraiment, là j'ai survécu et tant mieux, mais j'aurais pu ne pas survivre sincèrement. Et oui c'est difficile, alors avec certains patients ça me permettait de m'évader, parce que c'est aussi des rencontres humaines et le contact humain fait que ça soigne aussi, et parfois ça soigne aussi les soignants. Mais oui c'est très difficile de soigner, surtout quand on est soi-même en posture de vulnérabilité, c'est difficile de donner parce que le soin ça demande de donner beaucoup, beaucoup d'énergie, beaucoup de joie, beaucoup d'entrain je trouve, il y a quand même un petit peu une posture. Et c'est difficile de l'adopter quand soi-même on est altéré et qu'on devrait soi-même se soigner finalement. Donc ce qui est bien, c'est que j'ai su appeler à l'aide pendant ce stage quand j'ai senti que je perdais complètement pied. Et le syndicat des internes a été vraiment très aidant pour moi.

  • Pascale Lafitte

    Vous savez maintenant quelles sont les raisons pour lesquelles il y a eu ce moment si difficile ?

  • Marianne Figuet

    Déjà, premièrement, je pense que vraiment physiologiquement, je ne suis pas faite pour travailler de nuit et 24 heures pour moi, c'est trop. Sincèrement, là, je... Je le pense aujourd'hui, je l'assume, parce que je n'osais pas m'avouer, je ne suis pas capable de travailler la nuit et je ne suis pas capable de travailler 24 heures d'affilée. C'est quelque chose pour moi qui était impossible, trop difficile. Et donc ça, ça m'a complètement fait perdre pied et généré chez moi beaucoup d'angoisse parce que je savais que je n'étais pas capable. Et savoir qu'on n'est pas capable face à des patients, c'est extrêmement angoissant. On a peur de faire les mauvais choix, on a peur de nuire. Et donc quand on a peur de nuire, on n'ose plus rien faire. Et c'est vrai qu'à ce moment-là, à la fois on ne veut pas déranger les chefs, mais à la fois on ne veut pas tuer un patient. Donc c'est extrêmement anxiogène et c'est ça qui m'a fait perdre le pied. Aujourd'hui, je pense qu'il y a des gens qui sont plus résistants, mais je ne pense pas qu'on soit quand même capable de le faire au maximum de ses capacités intellectuelles. Sauf que je pense quand même qu'on doit ça aux patients. Et que ce n'est pas une faiblesse que de dire qu'on ne peut pas le faire. Je ne comprends pas, il n'y a que les médecins maintenant qui travaillent 24 heures d'affilée. On sait les risques pour la santé, on sait les risques en sortie de garde, sur la route. Et c'est maintenu. Alors, il y a des médecins qui tiennent beaucoup à faire des 24 heures, parce que ça leur permet aussi de travailler moins de jours dans la semaine. Et je le comprends. Néanmoins, est-ce qu'on se rend compte quand même des capacités qu'on perd ? De nos vraies ressources, je ne sais pas. Je ne veux pas faire forcément annuler les 24 heures, mais ça devrait être vraiment un choix unique, parce que personnellement, je suis persuadée qu'on n'est pas bon et qu'il faudrait mieux passer en 12 heures.

  • Pascale Lafitte

    La médecine comme un métier, ça existe. On peut être très bon médecin, c'est un métier. On a tendance, nous, quand on est à l'extérieur, L'image qu'on renvoie, c'est la passion, c'est le médecin passionné, c'est celui qu'on montre au cinéma, qui n'arrête pas de travailler. Et ça, ça fosse un peu l'image qu'on peut avoir du médecin, même quand on est interne soi-même et qu'on rentre dans les études en se disant « mais c'est pas ce qu'on attend de moi » .

  • Marianne Figuet

    C'est très pertinent, je n'avais pas pensé à ça comme ça. Mais maintenant que vous le dites, je trouve que ça dessert énormément les... patients eux-mêmes aussi, de véhiculer cette image-là, même s'ils ne le font pas exprès, mais on leur donne cette image-là. Déjà parce que un bon médecin, ce n'est pas un médecin qui ne compte pas ses heures. Un bon médecin, c'est quelqu'un qui arrive à se reposer, qui arrive à prendre soin de ça, qui arrive à se former, qui a le temps de prendre du recul parce que quand on a la tête dans le guidon, qu'on est stressé, croyamment, on ne prend pas les bonnes décisions. Moi, j'ai beaucoup envie de travailler sur l'effet du stress des médecins, sur leur pratique. Parce que je pense sincèrement que la médecine peut être différente et moins oxygène aussi pour les patients. Par exemple, parfois, certains médecins vont avoir tendance à faire beaucoup d'examens qui ne sont pas forcément justifiés, qui n'ont pas forcément d'intérêt ni pour le patient ni pour la soeur. société, puisque c'est la société qui paye. Et pourquoi ils font ça ? Si ce n'est pour se rassurer, ou si ce n'est pour aussi rassurer le patient. Finalement, est-ce qu'un bon médecin, ce serait pas aussi quelqu'un qui arrive à dire, écoutez, stop, j'ai assez de recul pour dire que là, je suis pas inquiet. Laisser du temps, avoir du temps. Et un médecin qui a la tête dans le guidon, il n'a jamais le temps. Il n'a jamais le temps parce qu'il a toujours trop de choses à faire, et c'est normal, c'est pas de sa faute. On lui a pas appris à prendre soin de soi, on lui a pas appris qu'être un bon médecin c'était aussi avoir du temps pour soi Et moi, c'est ma vision des choses, en tout cas.

  • Pascale Lafitte

    Vous avez donc écrit qu'il y avait une violence subie durant les études de médecine. Vous dites qu'elles sont monnaie courante. Je pourrais retrouver le passage parce que j'ai des petits post-it partout. Les violences subies durant les études de santé sont monnaie courante. Eulalie, donc c'est votre personnage, était loin d'être un cas isolé. Mais mise bout à bout, ces violences forgent des soignants fragilisés qui ne doivent pas être violents, eux, surtout pas les femmes. ou pas avec leurs patients et leurs patientes ?

  • Marianne Figuet

    En fait, si vous voulez, j'aime beaucoup ce passage-là, parce que les patients se plaignent des médecins beaucoup. Et je le comprends, même en tant que patiente, des fois, moi j'ai des choses à redire, clairement. Mais comment voulez-vous qu'on ne soit pas violent quand en fait on est formé dans la violence ? On est formé, on est violent avec soi-même. À partir du moment où on est violent avec soi-même, comment voulez-vous qu'on ne soit pas violent avec les autres ? Et le pire, c'est que si on ne le questionne pas, ça, et bien finalement, on reste dans cette violence-là. Et en fait, on nie. Ça, c'est le grand truc de la médecine. On nie les patients. On peut les prendre de haut un petit peu. Bon, attention, je ne sais pas tous les médecins, loin de là. Mais c'est une possibilité. C'est un risque, en fait. Si on ne travaille pas sur soi, si on ne prend pas de recul, si on ne questionne pas ses biais, on reproduit. Et ça, c'est valable avec les violences, mais c'est valable aussi avec le sexisme, avec le racisme, avec finalement beaucoup de discrimination médicale. Quand j'étais externe, moi, on était parfois jusqu'à 8 ans dans une chambre de malade. Moi, je vais vous dire, mon fils a été hospitalisé au CHU. En fait, quand il rentre à 5 alors qu'il a 15 jours et que toutes les externes qui n'ont jamais vu un bébé de leur vie, elles veulent lui faire un examen. En fait, sinon, ce n'est pas possible. C'est extrêmement violent pour le bébé, mais pour les parents aussi. Donc ça, il faut vraiment qu'on apprenne à se questionner. Mais ça, ce n'est pas l'ordre du jour. Et ça,

  • Speaker #2

    c'est vraiment quelque chose pour lequel j'aimerais oeuvrer. À suivre sans ordonnance ni modération.

  • Pascale Lafitte

    Dans son ouvrage, Le temps du printemps, comme pour nous également aujourd'hui, Marianne se souvient de sa maternité.

  • Marianne Figuet

    J'ai été maman interne, j'étais enceinte pour ma thèse, ça c'était ma victoire. Je ne sais pas pourquoi, je voulais absolument être enceinte pour ma thèse, mais je ne le savais pas, donc c'est la belle surprise. Et donc oui, j'ai été maman pendant l'internat, j'étais enceinte sur un stage de ville. Bon, je vous avoue que les... professionnels avec qui je t'aide n'ont pas été très compréhensives et donc je devais être interne. Je n'étais pas une femme, je n'étais pas une femme enceinte, j'étais une interne qui devait accomplir son travail et rapporter des sous. Parce que oui, en libéral, on travaille pour nos chefs et on ne voit que l'argent passer. Donc ça, j'ai mal vécu mais à ce moment-là, j'avais finalement assez de ressources pour identifier le problème et savoir que ça ne venait pas de moi. Finalement, j'ai pu aussi être aidée encore une fois par le syndicat des internes. Heureusement qu'ils étaient là, franchement. Je leur dois une très fière chandelle parce qu'ils m'ont aussi aidée quand j'ai accouché et que je ne me voyais pas faire des gardes aux urgences justement en ayant accouché. Et ils m'ont fléché sur un stage plus vivable pour moi.

  • Pascale Lafitte

    Je sors de votre cas, mais il y a d'autres jeunes femmes internes qui ont des enfants à un internat. Quand on connaît les contraintes d'un interne, que ce soit les gardes, que ce soit les heures, tout le monde en parle. La presse en parle, tout le monde parle de ça. voilà On n'invente rien quand on le dit. C'est difficile. Vous avez droit à des congés maternités comme une personne qui travaillerait dans un autre type de métier ? Parce que vous êtes étudiant, en fait, et qu'au bout du compte, il y a une thèse, il y a la fin des études. Comment est-ce que ça se passe ?

  • Marianne Figuet

    Pour mon cas, ça a été assez simple parce que j'ai un internat de médecine générale que j'avais déjà fait les stages compliqués et que le syndicat m'a aidée. et en plus mon mari a pu prendre une disponibilité et moi j'ai eu un après j'ai pris un congé parental après mon congé maladie donc on est des salariés lambda on a ce droit là d'avoir un congé maternité, encore heureux j'ai envie de dire, et la possibilité de prendre des disponibilités selon les accords selon les facs c'est différent. Il y a beaucoup de femmes qui ont des enfants dans l'internat et franchement respect à elles parce que notamment celles qui ont des gardes avant on avait, dès qu'on était enceinte de 3 mois on n'était plus obligé de faire des gardes la nuit maintenant c'est supprimé voilà mais on recule mais enfin je ne comprends pas cette décision et en fait ça c'est aussi quelque chose un peu ouais bah elle est enceinte bah elle l'a voulu Oui, d'accord, mais en fait, voilà, c'est exactement ce que vous disiez, on est rentré dans les ordres, on n'a plus le droit d'avoir une vie à part la médecine. Je ne l'avais jamais vu comme ça, mais en fait, ça me parle énormément. C'est exactement ça. Oui, mais ta priorité, ça doit être la médecine. Ben non, vraiment pas ! Si c'est ta passion, que tu rêves de ça la nuit, oui, mais sinon, ne t'empêche pas de vivre, parce que la vie est courte. Et ça, c'est quelque chose que mes patients m'ont appris aussi, c'est qu'on voit bien qu'on ne sait jamais de quoi est fait demain, et c'est peut-être une vision un peu péjorative des choses, Mais moi, c'est vraiment ça aussi que j'ai appris pendant mes études de médecine, c'est qu'on n'a pas toujours le temps, on ne sait pas. On ne sait pas ce qui va arriver demain. Donc on ne peut pas se permettre de tout abandonner comme ça pour ses études.

  • Pascale Lafitte

    Les internes enceintes ont droit à une dispense de garde dès que leur médecin du travail l'indique. Dispense qui n'est pas une faveur, mais un droit. Dans l'usage, même si le droit existe, son application dépend fortement du service. Heureusement, il existe une culture de solidarité réelle entre internes qui réorganise souvent les plannings entre eux. Une forme de solidarité traditionnelle mais non réglementaire. J'ai parlé à Marianne du manque de médecins, de l'insupportable délai d'attente aux urgences, de toutes ces choses qui font que nous, nous patients, nous pestons, nous rageons contre les internes, les médecins et souvent même contre tout le personnel médical.

  • Marianne Figuet

    Aux urgences, si on avait le temps, si on avait des locaux adaptés, si on avait assez de médecins, assez d'infirmières, des brancards pour tout le monde, vous inquiétez pas, on prendrait tout le monde, ça rapportait soit à l'hôpital, on serait content de le faire, vous inquiétez pas. Mais c'est pas possible, et c'est pas de notre faute. Donc ça, clairement, je l'entends, mais ça rappelle quelque chose, c'est que les patients sont aussi très violents avec nous, même en médecine générale. Donc ça, c'est, comme vous le disiez, c'est systémique, il faut le changer Malheureusement, ce n'est pas à nous de le faire et ce n'est pas nous qui le ferons. Parce que de toute façon, regardez, les médecins ne font même pas grève parce qu'ils ne veulent pas laisser leurs patients. Donc, les gentils ne lisent pas, on sait qui c'est. Enfin, moi, je sais en tout cas.

  • Pascale Lafitte

    Vous dites que les patients peuvent être très violents ?

  • Marianne Figuet

    Oui, les patients sont violents. Pas tous, évidemment. Néanmoins, d'autant plus quand on est une femme, il y a des patients qui sont violents physiquement. Il y a des patients qui sont violents verbalement. Je ne sais pas comment l'exprimer, mais on ne peut pas mal parler à un autre être humain. Des fois, on le fait quand on est en colère, mais il faut savoir s'excuser. Et là, on va vers quelqu'un qui doit vous apporter du soin. Donc déjà, premièrement, c'est très désagréable pour le médecin. Mettre la pression, ça ne fait pas prendre des bonnes décisions, clairement, parce que quand on est en situation de stress, ce n'est pas la meilleure des façons pour réfléchir, honnêtement. Et puis, je ne sais pas si c'est très stratégique, parce que si on fait bien pris en charge par quelqu'un, autant ne pas l'agresser.

  • Pascale Lafitte

    Vous en parlez dans l'ouvrage, vous parlez de patients, puis même de la vie de chefs parfois, ils ont tendance à mal réagir parce que vous êtes une interne femme. Et à dire, ah bah non, c'est pas un médecin.

  • Marianne Figuet

    C'est ça. Le nombre de fois où c'était, et le docteur, il est où ? Ben, il est là. Elle est là. Oui, il y a ça. Honnêtement, on n'est pas pris au sérieux. Après, les patients, c'est pas de la mauvaise volonté, mais c'est en eux, en fait. C'est des biais sexistes qu'ils ont intégrés, qui se demandent si on est capables, qui remettent en cause nos capacités. Ça peut être aussi dû à la jeunesse. Alors quand on est une femme et jeune, je ne vous dis pas. Et si on est racisé en plus, c'est ce qui n'est pas mon cas. Mais de mes consoeurs, je l'entends malheureusement trop souvent. Ça se cumule en fait, si vous voulez.

  • Pascale Lafitte

    Vous écrivez combien de fois à l'hôpital l'avait-on prise pour une infirmière ? Combien de fois un étudiant mâle avait été pris pour le médecin alors que le médecin seigneur était aussi dans la pièce et que c'était une femme ? Et vous écrivez ceci aussi. Et je voulais qu'on en parle. Mais le pire à ses yeux était de constater qu'elle-même pouvait faire preuve de misogynie.

  • Marianne Figuet

    On a tous des biais. Les biais, comme je vous le disais, les biais racistes, les biais sexistes, etc. Il y en a mille, malheureusement. Et donc, quand on grandit dans une société qui est misogyne ou sexiste, en soi, c'est ancré. Donc, l'important, c'est de le questionner. Et donc, oui, ça peut m'arriver de me faire des réflexions. Par exemple, une fraction de seconde, se dire que c'est une femme. Oui, et ? Et donc, c'est hyper intéressant. de le vivre soi-même parce qu'en fait, c'est internalisé. Ce n'est pas conscient, ce n'est pas volontaire. Mais c'est ça qui est encore plus dangereux finalement. Mais ce livre m'a beaucoup aidée justement à questionner ces biais-là et j'espère à m'améliorer.

  • Pascale Lafitte

    Il y a un autre petit passage qui m'a interpellée parce que moi, je suis maman d'un interne dans le futur médecin. Et qui, comme vous dit, on lui demandait parfois de s'impliquer dans la prise en charge, de relire et expliquer les comptes rendus des examens, d'appeler. Là, on parle de la famille. En fait, est-ce que c'est difficile ? On commence à avoir un pied dans le métier, de voir arriver papa, maman, les frères, les soeurs, tonton, taty, papy, mamie, avec sa petite radio, avec son petit commentaire et ses cent mille questions.

  • Marianne Figuet

    En fait, c'est dur parce que ça demande énormément d'émotions. Ça demande des ressources émotionnelles importantes. Et les gens disent, oui, mais c'est juste ça, c'est juste une radio. Mais en fait, un médecin ne regarde plus jamais juste une radio. il faut un interrogatoire, un examen et... On regarde la radio et puis on n'a pas forcément envie de questionner les douleurs de sa mère. Si vous voulez que notre mère, elle est mal, ça ne nous fait pas la même chose que ce soit un patient qu'on ne connaît pas. Si vous voulez, donc, si c'est notre mère, on va beaucoup plus s'inquiéter. On va avoir envie de faire, je ne sais pas, peut-être une IRM, peut-être plein de choses. Mais parce qu'en fait, c'est notre maman et c'est valable pour toute la famille, si vous voulez. Donc ça, c'est quelque chose qu'ils ne comprennent pas. C'est toujours ça. Vous pouvez juste regarder ce résultat. Mais en fait, non, je ne peux pas. Je peux te dire que là, ce n'est pas normal. Mais émotionnellement, déjà, ça va me demander beaucoup. Donc, est-ce que la famille a vraiment envie de demander ça à quelqu'un ? Et ensuite, ce n'est pas comme ça qu'on pratique la médecine, en fait. La médecine, c'est plus qu'un examen. C'est plus que tu peux juste me donner ton avis. Non, c'est plus complexe. Mais ça, c'est très difficile à le faire comprendre.

  • Pascale Lafitte

    Et une interne avec son petit bébé qui vient de naître, est-ce qu'elle est le médecin de son bébé ou est-ce que là vraiment il faut un pédiatre à côté, extérieur ?

  • Marianne Figuet

    Non, moi je ne suis pas le médecin de mes enfants. Malheureusement, je l'ai été malgré moi parce qu'ils ont eu des soucis de santé et que des fois il y a le diagnostic qui s'impose à nous. Parce que même si on ne veut pas être médecin, on reste médecin et qu'on le voit. Donc j'avoue que ça a été compliqué et que ça m'a un peu fâchée avec le monde médical pour le coup. Je suis assez déçue, sincèrement. Déçue,

  • Pascale Lafitte

    C'est-à-dire ?

  • Marianne Figuet

    J'ai été déçue de l'accueil que j'ai reçue. J'ai été déçue des diagnostics qui n'ont pas été faits. J'ai été déçue par la prise en charge. Comme je l'ai évoqué au début du podcast, il y a mon fils qui a été hospitalisé. Et là, tout de suite, quand c'est grave, on a tout de suite un puits de reconnaissance. Même si on note les dysfonctionnements du système de santé, moi, du coup, je les vois tout de suite et ça me saute aux yeux. Mais bon, pour certains praticiens, je suis extrêmement reconnaissante et c'est des gens qui m'ont inspirée et qui m'ont donné envie de reprendre la médecine. Et pour d'autres, je me dis, on a beaucoup à faire.

  • Pascale Lafitte

    Vous serez médecin toute votre vie, vous savez ça ?

  • Marianne Figuet

    Je suis médecin et je le resterai, ça c'est sûr. Après, est-ce que j'exercerai ? Je pense que je prendrai service aux patients, quoi qu'il en coûte. Je rendrai service aux patients, que ce soit en écrivant dans la revue, puisque de toute façon j'écris pour les médecins, donc j'écris aussi pour les patients. J'écris des livres, donc j'écris pour les patients. Et dans mes livres, il y a toujours aussi un côté un peu thérapeutique, dans le sens, j'essaye en tout cas, d'amener le lecteur à réfléchir, d'amener le lecteur à prendre conscience peut-être de certaines choses. Et je pense que ça ne peut qu'aider les gens. Donc je continuerai à être médecin parce que je le serai à vie. Je continuerai à aider, j'y mettrai un point d'honneur. Après, est-ce que je reprendrai la consultation ? Je ne sais pas. Peut-être, sûrement. On verra.

  • Pascale Lafitte

    J'ai tendu une baguette magique à Marianne. Une baguette qui lui confère, comme ça, instantanément, la possibilité de revoir, un peu ou beaucoup, partiellement ou totalement, l'externat comme l'internat.

  • Marianne Figuet

    Alors, si j'avais une baguette magique, je refondrais complètement les études de médecine. J'arrêterais de faire apprendre des choses complètement inutiles. J'arrêterais de faire apprendre la sur-spécialité pour apprendre la physiologie, pour apprendre la médecine générale et ensuite éventuellement des notions de spécialité qui sont quand même intéressantes, disons-le. Mais néanmoins, il faut plus de pratiques courantes. Ensuite, j'amènerais de la sociologie dans les études de médecine. On n'en a pas. On a besoin de questionner nos biais. Tous, tous. On a tous des biais. Donc, il faut qu'on les questionne pour bien prendre en charge nos patients. Et ensuite, j'amènerais de la psychologie, parce qu'on a besoin d'écouter nos patients, on a besoin de nous écouter nous-mêmes. Et donc, on a besoin de notions de psychologie et on a besoin d'un accompagnement psychologique. Les psychologues ont un accompagnement. Ça se développe un petit peu en ce moment pour les médecins, ça s'appelle la supervision, ça permet de parler de ses patients. Mais il faut aussi un accompagnement psychologique à soi, pour parler de nous. Et je pense que ce serait déjà pas mal pour la baguette magique.

  • Pascale Lafitte

    Merci à Marianne Figuet pour sa franchise. Son ouvrage référence pour cet entretien, Le temps du printemps, apparu aux éditions LibriNova. Un autre livre est en cours de rédaction. Vous pouvez la retrouver également sur Instagram. Merci à l'ISNI, l'Intersyndicale Nationale des Internes, de nous avoir mis en contact. Et merci à vous tous d'être au rendez-vous. Partagez, faites vivre cet entretien et prospérez ce podcast. Abonnez-vous et à bientôt pour un prochain épisode d'Internet en médecine, le podcast, à suivre sans ordonnance ni modération.

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Description

Pourquoi est-il si difficile de parler des défis psychologiques auxquels font face les internes en médecine ? Dans cet épisode d'u podcast "Interne en médecine" je vous invite à découvrir Marianne Figuet, docteure en médecine générale et autrice de l'ouvrage "Le temps du printemps". Marianne nous partage son parcours et ses réflexions posées sur les études de médecine, révélant les réalités souvent méconnues de cette voie exigeante.


Marianne commence par évoquer ses motivations initiales pour entrer en médecine, une passion qui s'est heurtée à la dure réalité de l'internat. Elle ne cache pas les difficultés rencontrées et les défis psychologiques qui l'ont marquée. « Il y a un manque flagrant de préparation psychologique dans la formation des médecins », souligne-t-elle, mettant en lumière un aspect crucial souvent négligé.

Au fil de notre conversation, Marianne aborde également sa transition vers la médecine générale. Elle insiste sur l'importance d'écouter les patients, une compétence essentielle que tout médecin devrait cultiver. « La médecine générale est le cœur de notre système de santé », déclare-t-elle avec conviction, nous rappelant que chaque interaction compte et que chaque patient mérite d'être entendu.

Nous explorons aussi des sujets délicats tels que la violence subie durant les études de santé, ainsi que les biais sexistes et racistes qui persistent dans le milieu médical. Marianne exprime son souhait de réformer l'éducation médicale pour y intégrer davantage de sociologie et de psychologie, des disciplines qui pourraient enrichir la formation des futurs médecins. « Nous devons préparer nos internes à la réalité de la pratique, pas seulement à la théorie », affirme-t-elle, une citation qui résonne profondément dans le cœur de notre discussion.


Rejoignez-nous pour cette conversation riche et introspective, où Marianne Figuet partage non seulement son vécu, mais aussi sa vision pour un avenir meilleur dans le domaine médical. Cet épisode d'Internes en médecine est une invitation à réfléchir sur le parcours des internes, à reconnaître leurs luttes et à envisager des solutions pour un système de santé plus humain et empathique.


Interne en médecine est un podcast de et avec Pascale Lafitte, en partenariat avec l'ISNI, l'InterSyndicale Nationale des Internes.

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Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Pascale Lafitte

    Bonjour et bienvenue, je suis Pascale Lafitte, je suis ravie de vous retrouver pour ce nouvel épisode d'Internes en médecine, le podcast radio qui donne la parole à des internes, des médecins qui se replongent dans leurs années d'internat et également des proches et des accompagnants d'internes. Internes en médecine, c'est votre podcast à suivre sans ordonnance ni modération. Un entretien réalisé en partenariat avec l'ISNI, l'Intersyndicale Nationale des Internes. Je vous présente Marianne Figué, docteure en médecine générale, qui après un externat à Saint-Etienne, a suivi son internat à Montpellier. Aujourd'hui, elle n'exerce pas, elle est rédactrice d'articles médicaux et autrice. En préambule, à notre entrevue, je lui ai demandé quelles étaient les raisons pour lesquelles elle avait choisi de suivre tes études de médecine.

  • Marianne Figuet

    J'avais vraiment envie de faire un métier utile et d'aider les gens, mais au départ, je voulais être pompier. Donc, ça n'avait absolument rien à voir, sauf que j'avais des bonnes notes, notamment en SVT. Donc, les profs, ils ont un peu essayé de me faire changer de voix. Et bon, j'ai entendu leurs arguments et je pense qu'ils étaient valables. Donc, je suis partie en médecine, comme ça. Après, honnêtement,m erci. Je savais pas trop, j'avais aussi hésité à faire journaliste et je pense qu'aujourd'hui ça me rattrape.

  • Pascale Lafitte

    Vous êtes partie en médecine comme ça et vous avez découvert comme ça ce qu'étaient ces longues années d'études ?

  • Marianne Figuet

    Complètement, on m'avait dit c'est difficile, je m'étais dit bon bah allez challenge, pourquoi pas, je vais pas choisir entre guillemets la facilité. Bon ça aurait pas été facile aussi de faire journaliste mais je sais pas, je me suis dit allez je choisis, je me challenge. Et oui j'ai tout découvert parce que je n'ai personne dans ma famille qui est médecin, j'avais pas du tout de proches qui avaient fait médecine donc ouai. Grosse surprise et pas forcément une bonne. Donc, je me suis posé la question plusieurs fois d'arrêter et de changer de voie. Mais finalement, je me suis quand même accrochée jusqu'au bout. Et voilà, on en est là aujourd'hui.

  • Pascale Lafitte

    Vous ne dites pas forcément une bonne. Pour quelles raisons ?

  • Marianne Figuet

    C'est quand même très difficile. Déjà la première année. Ensuite, on nous dit que ça va être plus simple, mais ça demande quand même énormément de travail, d'investissement personnel. On sait que ça demande des ressources de travail. de bonne mémoire aussi. Mais on n'est pas forcément non plus informés sur les ressources psychologiques qu'il va falloir aussi pour traverser tout ça. Donc même si c'était sympa et que j'ai appris énormément de choses, je pense qu'on peut faire beaucoup mieux dans les études de médecine. Et ça, éventuellement, ça m'intéresserait d'y travailler.

  • Pascale Lafitte

    À la fin de cet entretien, je vais vous donner une baguette magique et vous y préparer et commencer à me dire ce qu'on pourrait faire pour... Donc,

  • Marianne Figuet

    j'ai hâte.

  • Pascale Lafitte

    Voilà, mais je vais continuer. Vous, vous avez dit quelque chose à l'instant. Je l'ai retrouvé. Alors, ce que je n'ai pas dit encore à nos auditeurs, c'est que vous êtes auteur d'un ouvrage qui s'appelle Le temps du printemps. C'est une autofiction, on va dire. En lisant cet ouvrage, on découvre votre parcours d'étudiante en médecine d'interne. Les bons moments, les mauvais moments aussi. Et vous parlez de la réorientation. Vous dites que c'est difficile de changer d'orientation, mais pourquoi est-ce que c'est difficile ?

  • Marianne Figuet

    Déjà, ça a demandé un gros investissement au départ. On se dit, j'ai fait tout ça pour ça. Et puis finalement, après, les années passent et on se dit, il ne me reste plus que tant d'années, autant s'accrocher, etc. Et puis, il y a aussi la pression familiale et sociale qui fait que la médecine, c'est quand même une voie prestigieuse. On n'entend pas forcément la souffrance que ça peut procurer. Et donc, c'est difficile de faire accepter ce choix-là. Et donc, c'est même difficile de l'accepter soi-même et de l'envisager sérieusement parce que ça demande une acceptation de la part de beaucoup de monde.

  • Pascale Lafitte

    Et la hiérarchie, les co-internes, les amis, eux aussi, si vous parlez de cette difficulté et de cette éventuelle reconversion, vous voyez qu'il y a une incompréhension dans leur regard ?

  • Marianne Figuet

    Ça dépend qui. Moi, à ce moment-là, j'étais entourée de personnes Merci. qui étaient peut-être un peu dans le déni, des fois, qui ne voulaient peut-être pas voir ce qu'on subissait et donc qui préféraient garder les œillères. Alors, je ne dis pas ça du tout de manière péjorative, mais c'est vrai que parfois, c'est la simplicité aussi de ne pas trop se poser de questions et d'avancer, de faire ce qu'on nous demande et de suivre notre programme. Pendant l'externat, on a tellement de travail qu'honnêtement, il vaut mieux éventuellement éviter de se poser trop de questions. Et je pense que c'est aussi pour ça que peut-être... Je ne me suis pas sentie à ce moment-là d'en parler ou de l'accepter. Et pendant l'internat, il y a beaucoup de monde qui pense à arrêter. Pour le coup, pendant l'internat, on est vraiment proche du but. Donc, je pense que c'est encore plus difficile de reculer et arrêter pendant l'internat.

  • Pascale Lafitte

    Marianne s'est orientée vers la médecine générale. Elle nous explique pourquoi et nous révèle également combien son choix a été particulièrement débattu par ses proches.

  • Marianne Figuet

    Oui, il a été énormément discuté parce que finalement, je n'avais jamais envisagé la médecine générale parce que dans notre formation, c'est très universitaire. La médecine de ville est un peu méprisée, il ne faut pas mentir.

  • Pascale Lafitte

    Méprisée par les médecins,

  • Marianne Figuet

    en fait, par tous nos formateurs. C'est vrai qu'on n'est formés qu'à l'hôpital quasiment, donc on n'est pas encouragés à prendre de la médecine de ville. Et à l'internat, ce n'est quand même pas les premiers qui prennent médecine générale, en général. Donc, ce n'était pas un choix facile parce que je n'en avais pas forcément parlé avant. Mais en fait, quand j'ai dû choisir, c'était une évidence parce que déjà, je n'avais pas envie de choisir un organe. ou restreindre mon exercice. Et puis aussi, je n'avais pas du tout envie d'aller à l'hôpital. Et en plus, à l'époque, c'était trois ans. Donc, ça m'allait très bien d'en finir avec ces études.

  • Pascale Lafitte

    Vous dites dans l'ouvrage, en parlant de la médecine générale, vous dites que c'est une carte postale de la société.

  • Marianne Figuet

    Je ne m'en souvenais pas.

  • Pascale Lafitte

    Moi, je l'ai lue. Page 63.

  • Marianne Figuet

    Eh bien, c'est bien. C'est une bonne idée. Oui, c'est vrai. Du coup, ça me remet dedans. Mais oui, je le pense encore, même si je ne l'aurais pas formulé comme ça aujourd'hui.

  • Pascale Lafitte

    Comment est-ce que vous l'auriez créé aujourd'hui ?

  • Marianne Figuet

    Je ne sais pas, mais ça me va. Ce terme de carte postale de la société, c'est vrai que ça nous fait voir des personnes qu'on ne voit pas à l'hôpital. Ça nous fait voir des personnes qu'on ne voit pas forcément dans notre vie, parce que souvent, finalement, on est dans notre milieu. Moi, par exemple, en tant que médecin, c'est vrai que j'ai beaucoup d'amis médecins. Mon mari est médecin. Donc finalement, pour sortir un peu de ce cocon-là, les patients sont une vraie source de réflexion pour moi. J'ai découvert la sociologie récemment parce que finalement, je me suis rendu compte que j'étais complètement à côté de la plaque et qu'il me manquait plein de connaissances sur la société en fait et sur la façon dont elle s'organise.

  • Pascale Lafitte

    Vous écrivez un petit peu plus loin. Alors, elle s'appelle Eulalie, votre personnage. C'est une des raisons pour lesquelles elle avait choisi la médecine générale. Elle pouvait discuter avec une personne déprimée, effectuer les premiers examens d'un nouveau-né et s'évader avec les voyageurs. Mais la variété des consultations n'était pas l'unique raison de son choix. Quelle est l'autre ? Quelles sont les autres raisons ?

  • Marianne Figuet

    Le fait que l'internat ne soit pas très long, le fait que je ne voulais pas choisir un organe, et puis le fait que la médecine générale, ça permet aussi d'être loin de l'hôpital. Ça permet d'être à son compte, de travailler. seule ou avec une équipe qu'on a choisie. Donc, c'est quand même très confortable aussi. Pour moi, c'est très confortable. Je sais qu'il y a des personnes qui n'aiment pas du tout, mais moi, je préfère travailler comme ça.

  • Pascale Lafitte

    Qu'est-ce qu'ils vous ont apporté dans votre vie aujourd'hui, les patients ?

  • Marianne Figuet

    Franchement, ils m'ont apporté beaucoup de choses. Franchement, je trouve qu'ils m'ont apporté une ouverture d'esprit que je n'avais pas. C'est vrai que ça me permet de me poser des questions, peut-être un peu trop des fois. Mais ça me permet vraiment de m'interroger sur pourquoi on fait les choses, pourquoi il y a des gens qui sont plus en difficulté que d'autres, comment on accompagne ces personnes-là. Et c'est vrai qu'en médecine générale, quand on commence, ça nous apprend l'humilité parce qu'en fait, on se rend compte qu'on ne sait rien, qu'on n'est pas formé du tout à la médecine générale finalement. On n'est pas au contact de la vraie vie dans nos études de médecine. On est formé à l'hôpital, c'est très particulier comme exercice et finalement on est très très loin de la physiologie, des problèmes, des vrais problèmes des gens, j'ai envie de dire des problèmes quotidiens des gens qui viennent en médecine générale pour vraiment tout un tas de raisons, comme vous l'avez lu dans le passage, parce que ça aussi c'est une grande richesse intellectuellement pour un médecin, on est stimulé sur plein de spécialités en même temps, ça nous permet aussi de demander des avis à nos confrères, donc on apprend en permanence et ça c'est chouette. Mais c'est aussi une position un peu inconfortable parfois parce que finalement, l'incertitude, ça peut être très difficile à gérer. Et ça aussi, je trouve qu'on n'est pas très bien formé à ça. Donc vraiment, mes patients m'apprennent l'humilité vraiment et c'est agréable, même si parfois c'est difficile.

  • Pascale Lafitte

    L'ouvrage de Marianne Figué est un roman biographique, Le temps du printemps. Il apparaît aux éditions LibriNova. On y découvre Eulalie, jeune femme d'une trentaine d'années, maman et médecin. Il y est donc beaucoup question de médecine et beaucoup question de maternité, sujet sur lequel nous allons revenir ici. Mais pour l'instant, Marianne se remémore son premier jour d'interne.

  • Marianne Figuet

    Mon premier jour d'internat. C'était une garde aux urgences. C'était un CH, un centre hospitalier, mais régional. Et oui, c'est le stage que j'ai le moins bien vécu, évidemment. Mais voilà, en fait, je n'ai pas de souvenirs précis, mais je me rappelle que j'étais complètement perdue. J'étais égarée. Je me rappelle que j'avais dit à un chef, le chef, il me disait ça va, tu n'es pas trop stressée. Je lui disais, je suis plus dépassée que stressée tellement j'étais vraiment sous l'eau. mais bon On a survécu, mais voilà, pour moi, c'est le terme. J'ai survécu à ce stage.

  • Pascale Lafitte

    Six mois.

  • Marianne Figuet

    Sept ! C'était le Covid. Ils l'ont prolongé en plus, franchement.

  • Pascale Lafitte

    Survivre, c'est difficile. Quand on est médecin, de survivre face à des patients qui, eux aussi, luttent pour survivre. En fait, tout le monde dans ce service, en tout cas, vos patients et vous, étaient en état de survie. Ça demande beaucoup d'énergie.

  • Marianne Figuet

    Oui, franchement, oui. Alors vraiment, là j'ai survécu et tant mieux, mais j'aurais pu ne pas survivre sincèrement. Et oui c'est difficile, alors avec certains patients ça me permettait de m'évader, parce que c'est aussi des rencontres humaines et le contact humain fait que ça soigne aussi, et parfois ça soigne aussi les soignants. Mais oui c'est très difficile de soigner, surtout quand on est soi-même en posture de vulnérabilité, c'est difficile de donner parce que le soin ça demande de donner beaucoup, beaucoup d'énergie, beaucoup de joie, beaucoup d'entrain je trouve, il y a quand même un petit peu une posture. Et c'est difficile de l'adopter quand soi-même on est altéré et qu'on devrait soi-même se soigner finalement. Donc ce qui est bien, c'est que j'ai su appeler à l'aide pendant ce stage quand j'ai senti que je perdais complètement pied. Et le syndicat des internes a été vraiment très aidant pour moi.

  • Pascale Lafitte

    Vous savez maintenant quelles sont les raisons pour lesquelles il y a eu ce moment si difficile ?

  • Marianne Figuet

    Déjà, premièrement, je pense que vraiment physiologiquement, je ne suis pas faite pour travailler de nuit et 24 heures pour moi, c'est trop. Sincèrement, là, je... Je le pense aujourd'hui, je l'assume, parce que je n'osais pas m'avouer, je ne suis pas capable de travailler la nuit et je ne suis pas capable de travailler 24 heures d'affilée. C'est quelque chose pour moi qui était impossible, trop difficile. Et donc ça, ça m'a complètement fait perdre pied et généré chez moi beaucoup d'angoisse parce que je savais que je n'étais pas capable. Et savoir qu'on n'est pas capable face à des patients, c'est extrêmement angoissant. On a peur de faire les mauvais choix, on a peur de nuire. Et donc quand on a peur de nuire, on n'ose plus rien faire. Et c'est vrai qu'à ce moment-là, à la fois on ne veut pas déranger les chefs, mais à la fois on ne veut pas tuer un patient. Donc c'est extrêmement anxiogène et c'est ça qui m'a fait perdre le pied. Aujourd'hui, je pense qu'il y a des gens qui sont plus résistants, mais je ne pense pas qu'on soit quand même capable de le faire au maximum de ses capacités intellectuelles. Sauf que je pense quand même qu'on doit ça aux patients. Et que ce n'est pas une faiblesse que de dire qu'on ne peut pas le faire. Je ne comprends pas, il n'y a que les médecins maintenant qui travaillent 24 heures d'affilée. On sait les risques pour la santé, on sait les risques en sortie de garde, sur la route. Et c'est maintenu. Alors, il y a des médecins qui tiennent beaucoup à faire des 24 heures, parce que ça leur permet aussi de travailler moins de jours dans la semaine. Et je le comprends. Néanmoins, est-ce qu'on se rend compte quand même des capacités qu'on perd ? De nos vraies ressources, je ne sais pas. Je ne veux pas faire forcément annuler les 24 heures, mais ça devrait être vraiment un choix unique, parce que personnellement, je suis persuadée qu'on n'est pas bon et qu'il faudrait mieux passer en 12 heures.

  • Pascale Lafitte

    La médecine comme un métier, ça existe. On peut être très bon médecin, c'est un métier. On a tendance, nous, quand on est à l'extérieur, L'image qu'on renvoie, c'est la passion, c'est le médecin passionné, c'est celui qu'on montre au cinéma, qui n'arrête pas de travailler. Et ça, ça fosse un peu l'image qu'on peut avoir du médecin, même quand on est interne soi-même et qu'on rentre dans les études en se disant « mais c'est pas ce qu'on attend de moi » .

  • Marianne Figuet

    C'est très pertinent, je n'avais pas pensé à ça comme ça. Mais maintenant que vous le dites, je trouve que ça dessert énormément les... patients eux-mêmes aussi, de véhiculer cette image-là, même s'ils ne le font pas exprès, mais on leur donne cette image-là. Déjà parce que un bon médecin, ce n'est pas un médecin qui ne compte pas ses heures. Un bon médecin, c'est quelqu'un qui arrive à se reposer, qui arrive à prendre soin de ça, qui arrive à se former, qui a le temps de prendre du recul parce que quand on a la tête dans le guidon, qu'on est stressé, croyamment, on ne prend pas les bonnes décisions. Moi, j'ai beaucoup envie de travailler sur l'effet du stress des médecins, sur leur pratique. Parce que je pense sincèrement que la médecine peut être différente et moins oxygène aussi pour les patients. Par exemple, parfois, certains médecins vont avoir tendance à faire beaucoup d'examens qui ne sont pas forcément justifiés, qui n'ont pas forcément d'intérêt ni pour le patient ni pour la soeur. société, puisque c'est la société qui paye. Et pourquoi ils font ça ? Si ce n'est pour se rassurer, ou si ce n'est pour aussi rassurer le patient. Finalement, est-ce qu'un bon médecin, ce serait pas aussi quelqu'un qui arrive à dire, écoutez, stop, j'ai assez de recul pour dire que là, je suis pas inquiet. Laisser du temps, avoir du temps. Et un médecin qui a la tête dans le guidon, il n'a jamais le temps. Il n'a jamais le temps parce qu'il a toujours trop de choses à faire, et c'est normal, c'est pas de sa faute. On lui a pas appris à prendre soin de soi, on lui a pas appris qu'être un bon médecin c'était aussi avoir du temps pour soi Et moi, c'est ma vision des choses, en tout cas.

  • Pascale Lafitte

    Vous avez donc écrit qu'il y avait une violence subie durant les études de médecine. Vous dites qu'elles sont monnaie courante. Je pourrais retrouver le passage parce que j'ai des petits post-it partout. Les violences subies durant les études de santé sont monnaie courante. Eulalie, donc c'est votre personnage, était loin d'être un cas isolé. Mais mise bout à bout, ces violences forgent des soignants fragilisés qui ne doivent pas être violents, eux, surtout pas les femmes. ou pas avec leurs patients et leurs patientes ?

  • Marianne Figuet

    En fait, si vous voulez, j'aime beaucoup ce passage-là, parce que les patients se plaignent des médecins beaucoup. Et je le comprends, même en tant que patiente, des fois, moi j'ai des choses à redire, clairement. Mais comment voulez-vous qu'on ne soit pas violent quand en fait on est formé dans la violence ? On est formé, on est violent avec soi-même. À partir du moment où on est violent avec soi-même, comment voulez-vous qu'on ne soit pas violent avec les autres ? Et le pire, c'est que si on ne le questionne pas, ça, et bien finalement, on reste dans cette violence-là. Et en fait, on nie. Ça, c'est le grand truc de la médecine. On nie les patients. On peut les prendre de haut un petit peu. Bon, attention, je ne sais pas tous les médecins, loin de là. Mais c'est une possibilité. C'est un risque, en fait. Si on ne travaille pas sur soi, si on ne prend pas de recul, si on ne questionne pas ses biais, on reproduit. Et ça, c'est valable avec les violences, mais c'est valable aussi avec le sexisme, avec le racisme, avec finalement beaucoup de discrimination médicale. Quand j'étais externe, moi, on était parfois jusqu'à 8 ans dans une chambre de malade. Moi, je vais vous dire, mon fils a été hospitalisé au CHU. En fait, quand il rentre à 5 alors qu'il a 15 jours et que toutes les externes qui n'ont jamais vu un bébé de leur vie, elles veulent lui faire un examen. En fait, sinon, ce n'est pas possible. C'est extrêmement violent pour le bébé, mais pour les parents aussi. Donc ça, il faut vraiment qu'on apprenne à se questionner. Mais ça, ce n'est pas l'ordre du jour. Et ça,

  • Speaker #2

    c'est vraiment quelque chose pour lequel j'aimerais oeuvrer. À suivre sans ordonnance ni modération.

  • Pascale Lafitte

    Dans son ouvrage, Le temps du printemps, comme pour nous également aujourd'hui, Marianne se souvient de sa maternité.

  • Marianne Figuet

    J'ai été maman interne, j'étais enceinte pour ma thèse, ça c'était ma victoire. Je ne sais pas pourquoi, je voulais absolument être enceinte pour ma thèse, mais je ne le savais pas, donc c'est la belle surprise. Et donc oui, j'ai été maman pendant l'internat, j'étais enceinte sur un stage de ville. Bon, je vous avoue que les... professionnels avec qui je t'aide n'ont pas été très compréhensives et donc je devais être interne. Je n'étais pas une femme, je n'étais pas une femme enceinte, j'étais une interne qui devait accomplir son travail et rapporter des sous. Parce que oui, en libéral, on travaille pour nos chefs et on ne voit que l'argent passer. Donc ça, j'ai mal vécu mais à ce moment-là, j'avais finalement assez de ressources pour identifier le problème et savoir que ça ne venait pas de moi. Finalement, j'ai pu aussi être aidée encore une fois par le syndicat des internes. Heureusement qu'ils étaient là, franchement. Je leur dois une très fière chandelle parce qu'ils m'ont aussi aidée quand j'ai accouché et que je ne me voyais pas faire des gardes aux urgences justement en ayant accouché. Et ils m'ont fléché sur un stage plus vivable pour moi.

  • Pascale Lafitte

    Je sors de votre cas, mais il y a d'autres jeunes femmes internes qui ont des enfants à un internat. Quand on connaît les contraintes d'un interne, que ce soit les gardes, que ce soit les heures, tout le monde en parle. La presse en parle, tout le monde parle de ça. voilà On n'invente rien quand on le dit. C'est difficile. Vous avez droit à des congés maternités comme une personne qui travaillerait dans un autre type de métier ? Parce que vous êtes étudiant, en fait, et qu'au bout du compte, il y a une thèse, il y a la fin des études. Comment est-ce que ça se passe ?

  • Marianne Figuet

    Pour mon cas, ça a été assez simple parce que j'ai un internat de médecine générale que j'avais déjà fait les stages compliqués et que le syndicat m'a aidée. et en plus mon mari a pu prendre une disponibilité et moi j'ai eu un après j'ai pris un congé parental après mon congé maladie donc on est des salariés lambda on a ce droit là d'avoir un congé maternité, encore heureux j'ai envie de dire, et la possibilité de prendre des disponibilités selon les accords selon les facs c'est différent. Il y a beaucoup de femmes qui ont des enfants dans l'internat et franchement respect à elles parce que notamment celles qui ont des gardes avant on avait, dès qu'on était enceinte de 3 mois on n'était plus obligé de faire des gardes la nuit maintenant c'est supprimé voilà mais on recule mais enfin je ne comprends pas cette décision et en fait ça c'est aussi quelque chose un peu ouais bah elle est enceinte bah elle l'a voulu Oui, d'accord, mais en fait, voilà, c'est exactement ce que vous disiez, on est rentré dans les ordres, on n'a plus le droit d'avoir une vie à part la médecine. Je ne l'avais jamais vu comme ça, mais en fait, ça me parle énormément. C'est exactement ça. Oui, mais ta priorité, ça doit être la médecine. Ben non, vraiment pas ! Si c'est ta passion, que tu rêves de ça la nuit, oui, mais sinon, ne t'empêche pas de vivre, parce que la vie est courte. Et ça, c'est quelque chose que mes patients m'ont appris aussi, c'est qu'on voit bien qu'on ne sait jamais de quoi est fait demain, et c'est peut-être une vision un peu péjorative des choses, Mais moi, c'est vraiment ça aussi que j'ai appris pendant mes études de médecine, c'est qu'on n'a pas toujours le temps, on ne sait pas. On ne sait pas ce qui va arriver demain. Donc on ne peut pas se permettre de tout abandonner comme ça pour ses études.

  • Pascale Lafitte

    Les internes enceintes ont droit à une dispense de garde dès que leur médecin du travail l'indique. Dispense qui n'est pas une faveur, mais un droit. Dans l'usage, même si le droit existe, son application dépend fortement du service. Heureusement, il existe une culture de solidarité réelle entre internes qui réorganise souvent les plannings entre eux. Une forme de solidarité traditionnelle mais non réglementaire. J'ai parlé à Marianne du manque de médecins, de l'insupportable délai d'attente aux urgences, de toutes ces choses qui font que nous, nous patients, nous pestons, nous rageons contre les internes, les médecins et souvent même contre tout le personnel médical.

  • Marianne Figuet

    Aux urgences, si on avait le temps, si on avait des locaux adaptés, si on avait assez de médecins, assez d'infirmières, des brancards pour tout le monde, vous inquiétez pas, on prendrait tout le monde, ça rapportait soit à l'hôpital, on serait content de le faire, vous inquiétez pas. Mais c'est pas possible, et c'est pas de notre faute. Donc ça, clairement, je l'entends, mais ça rappelle quelque chose, c'est que les patients sont aussi très violents avec nous, même en médecine générale. Donc ça, c'est, comme vous le disiez, c'est systémique, il faut le changer Malheureusement, ce n'est pas à nous de le faire et ce n'est pas nous qui le ferons. Parce que de toute façon, regardez, les médecins ne font même pas grève parce qu'ils ne veulent pas laisser leurs patients. Donc, les gentils ne lisent pas, on sait qui c'est. Enfin, moi, je sais en tout cas.

  • Pascale Lafitte

    Vous dites que les patients peuvent être très violents ?

  • Marianne Figuet

    Oui, les patients sont violents. Pas tous, évidemment. Néanmoins, d'autant plus quand on est une femme, il y a des patients qui sont violents physiquement. Il y a des patients qui sont violents verbalement. Je ne sais pas comment l'exprimer, mais on ne peut pas mal parler à un autre être humain. Des fois, on le fait quand on est en colère, mais il faut savoir s'excuser. Et là, on va vers quelqu'un qui doit vous apporter du soin. Donc déjà, premièrement, c'est très désagréable pour le médecin. Mettre la pression, ça ne fait pas prendre des bonnes décisions, clairement, parce que quand on est en situation de stress, ce n'est pas la meilleure des façons pour réfléchir, honnêtement. Et puis, je ne sais pas si c'est très stratégique, parce que si on fait bien pris en charge par quelqu'un, autant ne pas l'agresser.

  • Pascale Lafitte

    Vous en parlez dans l'ouvrage, vous parlez de patients, puis même de la vie de chefs parfois, ils ont tendance à mal réagir parce que vous êtes une interne femme. Et à dire, ah bah non, c'est pas un médecin.

  • Marianne Figuet

    C'est ça. Le nombre de fois où c'était, et le docteur, il est où ? Ben, il est là. Elle est là. Oui, il y a ça. Honnêtement, on n'est pas pris au sérieux. Après, les patients, c'est pas de la mauvaise volonté, mais c'est en eux, en fait. C'est des biais sexistes qu'ils ont intégrés, qui se demandent si on est capables, qui remettent en cause nos capacités. Ça peut être aussi dû à la jeunesse. Alors quand on est une femme et jeune, je ne vous dis pas. Et si on est racisé en plus, c'est ce qui n'est pas mon cas. Mais de mes consoeurs, je l'entends malheureusement trop souvent. Ça se cumule en fait, si vous voulez.

  • Pascale Lafitte

    Vous écrivez combien de fois à l'hôpital l'avait-on prise pour une infirmière ? Combien de fois un étudiant mâle avait été pris pour le médecin alors que le médecin seigneur était aussi dans la pièce et que c'était une femme ? Et vous écrivez ceci aussi. Et je voulais qu'on en parle. Mais le pire à ses yeux était de constater qu'elle-même pouvait faire preuve de misogynie.

  • Marianne Figuet

    On a tous des biais. Les biais, comme je vous le disais, les biais racistes, les biais sexistes, etc. Il y en a mille, malheureusement. Et donc, quand on grandit dans une société qui est misogyne ou sexiste, en soi, c'est ancré. Donc, l'important, c'est de le questionner. Et donc, oui, ça peut m'arriver de me faire des réflexions. Par exemple, une fraction de seconde, se dire que c'est une femme. Oui, et ? Et donc, c'est hyper intéressant. de le vivre soi-même parce qu'en fait, c'est internalisé. Ce n'est pas conscient, ce n'est pas volontaire. Mais c'est ça qui est encore plus dangereux finalement. Mais ce livre m'a beaucoup aidée justement à questionner ces biais-là et j'espère à m'améliorer.

  • Pascale Lafitte

    Il y a un autre petit passage qui m'a interpellée parce que moi, je suis maman d'un interne dans le futur médecin. Et qui, comme vous dit, on lui demandait parfois de s'impliquer dans la prise en charge, de relire et expliquer les comptes rendus des examens, d'appeler. Là, on parle de la famille. En fait, est-ce que c'est difficile ? On commence à avoir un pied dans le métier, de voir arriver papa, maman, les frères, les soeurs, tonton, taty, papy, mamie, avec sa petite radio, avec son petit commentaire et ses cent mille questions.

  • Marianne Figuet

    En fait, c'est dur parce que ça demande énormément d'émotions. Ça demande des ressources émotionnelles importantes. Et les gens disent, oui, mais c'est juste ça, c'est juste une radio. Mais en fait, un médecin ne regarde plus jamais juste une radio. il faut un interrogatoire, un examen et... On regarde la radio et puis on n'a pas forcément envie de questionner les douleurs de sa mère. Si vous voulez que notre mère, elle est mal, ça ne nous fait pas la même chose que ce soit un patient qu'on ne connaît pas. Si vous voulez, donc, si c'est notre mère, on va beaucoup plus s'inquiéter. On va avoir envie de faire, je ne sais pas, peut-être une IRM, peut-être plein de choses. Mais parce qu'en fait, c'est notre maman et c'est valable pour toute la famille, si vous voulez. Donc ça, c'est quelque chose qu'ils ne comprennent pas. C'est toujours ça. Vous pouvez juste regarder ce résultat. Mais en fait, non, je ne peux pas. Je peux te dire que là, ce n'est pas normal. Mais émotionnellement, déjà, ça va me demander beaucoup. Donc, est-ce que la famille a vraiment envie de demander ça à quelqu'un ? Et ensuite, ce n'est pas comme ça qu'on pratique la médecine, en fait. La médecine, c'est plus qu'un examen. C'est plus que tu peux juste me donner ton avis. Non, c'est plus complexe. Mais ça, c'est très difficile à le faire comprendre.

  • Pascale Lafitte

    Et une interne avec son petit bébé qui vient de naître, est-ce qu'elle est le médecin de son bébé ou est-ce que là vraiment il faut un pédiatre à côté, extérieur ?

  • Marianne Figuet

    Non, moi je ne suis pas le médecin de mes enfants. Malheureusement, je l'ai été malgré moi parce qu'ils ont eu des soucis de santé et que des fois il y a le diagnostic qui s'impose à nous. Parce que même si on ne veut pas être médecin, on reste médecin et qu'on le voit. Donc j'avoue que ça a été compliqué et que ça m'a un peu fâchée avec le monde médical pour le coup. Je suis assez déçue, sincèrement. Déçue,

  • Pascale Lafitte

    C'est-à-dire ?

  • Marianne Figuet

    J'ai été déçue de l'accueil que j'ai reçue. J'ai été déçue des diagnostics qui n'ont pas été faits. J'ai été déçue par la prise en charge. Comme je l'ai évoqué au début du podcast, il y a mon fils qui a été hospitalisé. Et là, tout de suite, quand c'est grave, on a tout de suite un puits de reconnaissance. Même si on note les dysfonctionnements du système de santé, moi, du coup, je les vois tout de suite et ça me saute aux yeux. Mais bon, pour certains praticiens, je suis extrêmement reconnaissante et c'est des gens qui m'ont inspirée et qui m'ont donné envie de reprendre la médecine. Et pour d'autres, je me dis, on a beaucoup à faire.

  • Pascale Lafitte

    Vous serez médecin toute votre vie, vous savez ça ?

  • Marianne Figuet

    Je suis médecin et je le resterai, ça c'est sûr. Après, est-ce que j'exercerai ? Je pense que je prendrai service aux patients, quoi qu'il en coûte. Je rendrai service aux patients, que ce soit en écrivant dans la revue, puisque de toute façon j'écris pour les médecins, donc j'écris aussi pour les patients. J'écris des livres, donc j'écris pour les patients. Et dans mes livres, il y a toujours aussi un côté un peu thérapeutique, dans le sens, j'essaye en tout cas, d'amener le lecteur à réfléchir, d'amener le lecteur à prendre conscience peut-être de certaines choses. Et je pense que ça ne peut qu'aider les gens. Donc je continuerai à être médecin parce que je le serai à vie. Je continuerai à aider, j'y mettrai un point d'honneur. Après, est-ce que je reprendrai la consultation ? Je ne sais pas. Peut-être, sûrement. On verra.

  • Pascale Lafitte

    J'ai tendu une baguette magique à Marianne. Une baguette qui lui confère, comme ça, instantanément, la possibilité de revoir, un peu ou beaucoup, partiellement ou totalement, l'externat comme l'internat.

  • Marianne Figuet

    Alors, si j'avais une baguette magique, je refondrais complètement les études de médecine. J'arrêterais de faire apprendre des choses complètement inutiles. J'arrêterais de faire apprendre la sur-spécialité pour apprendre la physiologie, pour apprendre la médecine générale et ensuite éventuellement des notions de spécialité qui sont quand même intéressantes, disons-le. Mais néanmoins, il faut plus de pratiques courantes. Ensuite, j'amènerais de la sociologie dans les études de médecine. On n'en a pas. On a besoin de questionner nos biais. Tous, tous. On a tous des biais. Donc, il faut qu'on les questionne pour bien prendre en charge nos patients. Et ensuite, j'amènerais de la psychologie, parce qu'on a besoin d'écouter nos patients, on a besoin de nous écouter nous-mêmes. Et donc, on a besoin de notions de psychologie et on a besoin d'un accompagnement psychologique. Les psychologues ont un accompagnement. Ça se développe un petit peu en ce moment pour les médecins, ça s'appelle la supervision, ça permet de parler de ses patients. Mais il faut aussi un accompagnement psychologique à soi, pour parler de nous. Et je pense que ce serait déjà pas mal pour la baguette magique.

  • Pascale Lafitte

    Merci à Marianne Figuet pour sa franchise. Son ouvrage référence pour cet entretien, Le temps du printemps, apparu aux éditions LibriNova. Un autre livre est en cours de rédaction. Vous pouvez la retrouver également sur Instagram. Merci à l'ISNI, l'Intersyndicale Nationale des Internes, de nous avoir mis en contact. Et merci à vous tous d'être au rendez-vous. Partagez, faites vivre cet entretien et prospérez ce podcast. Abonnez-vous et à bientôt pour un prochain épisode d'Internet en médecine, le podcast, à suivre sans ordonnance ni modération.

Description

Pourquoi est-il si difficile de parler des défis psychologiques auxquels font face les internes en médecine ? Dans cet épisode d'u podcast "Interne en médecine" je vous invite à découvrir Marianne Figuet, docteure en médecine générale et autrice de l'ouvrage "Le temps du printemps". Marianne nous partage son parcours et ses réflexions posées sur les études de médecine, révélant les réalités souvent méconnues de cette voie exigeante.


Marianne commence par évoquer ses motivations initiales pour entrer en médecine, une passion qui s'est heurtée à la dure réalité de l'internat. Elle ne cache pas les difficultés rencontrées et les défis psychologiques qui l'ont marquée. « Il y a un manque flagrant de préparation psychologique dans la formation des médecins », souligne-t-elle, mettant en lumière un aspect crucial souvent négligé.

Au fil de notre conversation, Marianne aborde également sa transition vers la médecine générale. Elle insiste sur l'importance d'écouter les patients, une compétence essentielle que tout médecin devrait cultiver. « La médecine générale est le cœur de notre système de santé », déclare-t-elle avec conviction, nous rappelant que chaque interaction compte et que chaque patient mérite d'être entendu.

Nous explorons aussi des sujets délicats tels que la violence subie durant les études de santé, ainsi que les biais sexistes et racistes qui persistent dans le milieu médical. Marianne exprime son souhait de réformer l'éducation médicale pour y intégrer davantage de sociologie et de psychologie, des disciplines qui pourraient enrichir la formation des futurs médecins. « Nous devons préparer nos internes à la réalité de la pratique, pas seulement à la théorie », affirme-t-elle, une citation qui résonne profondément dans le cœur de notre discussion.


Rejoignez-nous pour cette conversation riche et introspective, où Marianne Figuet partage non seulement son vécu, mais aussi sa vision pour un avenir meilleur dans le domaine médical. Cet épisode d'Internes en médecine est une invitation à réfléchir sur le parcours des internes, à reconnaître leurs luttes et à envisager des solutions pour un système de santé plus humain et empathique.


Interne en médecine est un podcast de et avec Pascale Lafitte, en partenariat avec l'ISNI, l'InterSyndicale Nationale des Internes.

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Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Pascale Lafitte

    Bonjour et bienvenue, je suis Pascale Lafitte, je suis ravie de vous retrouver pour ce nouvel épisode d'Internes en médecine, le podcast radio qui donne la parole à des internes, des médecins qui se replongent dans leurs années d'internat et également des proches et des accompagnants d'internes. Internes en médecine, c'est votre podcast à suivre sans ordonnance ni modération. Un entretien réalisé en partenariat avec l'ISNI, l'Intersyndicale Nationale des Internes. Je vous présente Marianne Figué, docteure en médecine générale, qui après un externat à Saint-Etienne, a suivi son internat à Montpellier. Aujourd'hui, elle n'exerce pas, elle est rédactrice d'articles médicaux et autrice. En préambule, à notre entrevue, je lui ai demandé quelles étaient les raisons pour lesquelles elle avait choisi de suivre tes études de médecine.

  • Marianne Figuet

    J'avais vraiment envie de faire un métier utile et d'aider les gens, mais au départ, je voulais être pompier. Donc, ça n'avait absolument rien à voir, sauf que j'avais des bonnes notes, notamment en SVT. Donc, les profs, ils ont un peu essayé de me faire changer de voix. Et bon, j'ai entendu leurs arguments et je pense qu'ils étaient valables. Donc, je suis partie en médecine, comme ça. Après, honnêtement,m erci. Je savais pas trop, j'avais aussi hésité à faire journaliste et je pense qu'aujourd'hui ça me rattrape.

  • Pascale Lafitte

    Vous êtes partie en médecine comme ça et vous avez découvert comme ça ce qu'étaient ces longues années d'études ?

  • Marianne Figuet

    Complètement, on m'avait dit c'est difficile, je m'étais dit bon bah allez challenge, pourquoi pas, je vais pas choisir entre guillemets la facilité. Bon ça aurait pas été facile aussi de faire journaliste mais je sais pas, je me suis dit allez je choisis, je me challenge. Et oui j'ai tout découvert parce que je n'ai personne dans ma famille qui est médecin, j'avais pas du tout de proches qui avaient fait médecine donc ouai. Grosse surprise et pas forcément une bonne. Donc, je me suis posé la question plusieurs fois d'arrêter et de changer de voie. Mais finalement, je me suis quand même accrochée jusqu'au bout. Et voilà, on en est là aujourd'hui.

  • Pascale Lafitte

    Vous ne dites pas forcément une bonne. Pour quelles raisons ?

  • Marianne Figuet

    C'est quand même très difficile. Déjà la première année. Ensuite, on nous dit que ça va être plus simple, mais ça demande quand même énormément de travail, d'investissement personnel. On sait que ça demande des ressources de travail. de bonne mémoire aussi. Mais on n'est pas forcément non plus informés sur les ressources psychologiques qu'il va falloir aussi pour traverser tout ça. Donc même si c'était sympa et que j'ai appris énormément de choses, je pense qu'on peut faire beaucoup mieux dans les études de médecine. Et ça, éventuellement, ça m'intéresserait d'y travailler.

  • Pascale Lafitte

    À la fin de cet entretien, je vais vous donner une baguette magique et vous y préparer et commencer à me dire ce qu'on pourrait faire pour... Donc,

  • Marianne Figuet

    j'ai hâte.

  • Pascale Lafitte

    Voilà, mais je vais continuer. Vous, vous avez dit quelque chose à l'instant. Je l'ai retrouvé. Alors, ce que je n'ai pas dit encore à nos auditeurs, c'est que vous êtes auteur d'un ouvrage qui s'appelle Le temps du printemps. C'est une autofiction, on va dire. En lisant cet ouvrage, on découvre votre parcours d'étudiante en médecine d'interne. Les bons moments, les mauvais moments aussi. Et vous parlez de la réorientation. Vous dites que c'est difficile de changer d'orientation, mais pourquoi est-ce que c'est difficile ?

  • Marianne Figuet

    Déjà, ça a demandé un gros investissement au départ. On se dit, j'ai fait tout ça pour ça. Et puis finalement, après, les années passent et on se dit, il ne me reste plus que tant d'années, autant s'accrocher, etc. Et puis, il y a aussi la pression familiale et sociale qui fait que la médecine, c'est quand même une voie prestigieuse. On n'entend pas forcément la souffrance que ça peut procurer. Et donc, c'est difficile de faire accepter ce choix-là. Et donc, c'est même difficile de l'accepter soi-même et de l'envisager sérieusement parce que ça demande une acceptation de la part de beaucoup de monde.

  • Pascale Lafitte

    Et la hiérarchie, les co-internes, les amis, eux aussi, si vous parlez de cette difficulté et de cette éventuelle reconversion, vous voyez qu'il y a une incompréhension dans leur regard ?

  • Marianne Figuet

    Ça dépend qui. Moi, à ce moment-là, j'étais entourée de personnes Merci. qui étaient peut-être un peu dans le déni, des fois, qui ne voulaient peut-être pas voir ce qu'on subissait et donc qui préféraient garder les œillères. Alors, je ne dis pas ça du tout de manière péjorative, mais c'est vrai que parfois, c'est la simplicité aussi de ne pas trop se poser de questions et d'avancer, de faire ce qu'on nous demande et de suivre notre programme. Pendant l'externat, on a tellement de travail qu'honnêtement, il vaut mieux éventuellement éviter de se poser trop de questions. Et je pense que c'est aussi pour ça que peut-être... Je ne me suis pas sentie à ce moment-là d'en parler ou de l'accepter. Et pendant l'internat, il y a beaucoup de monde qui pense à arrêter. Pour le coup, pendant l'internat, on est vraiment proche du but. Donc, je pense que c'est encore plus difficile de reculer et arrêter pendant l'internat.

  • Pascale Lafitte

    Marianne s'est orientée vers la médecine générale. Elle nous explique pourquoi et nous révèle également combien son choix a été particulièrement débattu par ses proches.

  • Marianne Figuet

    Oui, il a été énormément discuté parce que finalement, je n'avais jamais envisagé la médecine générale parce que dans notre formation, c'est très universitaire. La médecine de ville est un peu méprisée, il ne faut pas mentir.

  • Pascale Lafitte

    Méprisée par les médecins,

  • Marianne Figuet

    en fait, par tous nos formateurs. C'est vrai qu'on n'est formés qu'à l'hôpital quasiment, donc on n'est pas encouragés à prendre de la médecine de ville. Et à l'internat, ce n'est quand même pas les premiers qui prennent médecine générale, en général. Donc, ce n'était pas un choix facile parce que je n'en avais pas forcément parlé avant. Mais en fait, quand j'ai dû choisir, c'était une évidence parce que déjà, je n'avais pas envie de choisir un organe. ou restreindre mon exercice. Et puis aussi, je n'avais pas du tout envie d'aller à l'hôpital. Et en plus, à l'époque, c'était trois ans. Donc, ça m'allait très bien d'en finir avec ces études.

  • Pascale Lafitte

    Vous dites dans l'ouvrage, en parlant de la médecine générale, vous dites que c'est une carte postale de la société.

  • Marianne Figuet

    Je ne m'en souvenais pas.

  • Pascale Lafitte

    Moi, je l'ai lue. Page 63.

  • Marianne Figuet

    Eh bien, c'est bien. C'est une bonne idée. Oui, c'est vrai. Du coup, ça me remet dedans. Mais oui, je le pense encore, même si je ne l'aurais pas formulé comme ça aujourd'hui.

  • Pascale Lafitte

    Comment est-ce que vous l'auriez créé aujourd'hui ?

  • Marianne Figuet

    Je ne sais pas, mais ça me va. Ce terme de carte postale de la société, c'est vrai que ça nous fait voir des personnes qu'on ne voit pas à l'hôpital. Ça nous fait voir des personnes qu'on ne voit pas forcément dans notre vie, parce que souvent, finalement, on est dans notre milieu. Moi, par exemple, en tant que médecin, c'est vrai que j'ai beaucoup d'amis médecins. Mon mari est médecin. Donc finalement, pour sortir un peu de ce cocon-là, les patients sont une vraie source de réflexion pour moi. J'ai découvert la sociologie récemment parce que finalement, je me suis rendu compte que j'étais complètement à côté de la plaque et qu'il me manquait plein de connaissances sur la société en fait et sur la façon dont elle s'organise.

  • Pascale Lafitte

    Vous écrivez un petit peu plus loin. Alors, elle s'appelle Eulalie, votre personnage. C'est une des raisons pour lesquelles elle avait choisi la médecine générale. Elle pouvait discuter avec une personne déprimée, effectuer les premiers examens d'un nouveau-né et s'évader avec les voyageurs. Mais la variété des consultations n'était pas l'unique raison de son choix. Quelle est l'autre ? Quelles sont les autres raisons ?

  • Marianne Figuet

    Le fait que l'internat ne soit pas très long, le fait que je ne voulais pas choisir un organe, et puis le fait que la médecine générale, ça permet aussi d'être loin de l'hôpital. Ça permet d'être à son compte, de travailler. seule ou avec une équipe qu'on a choisie. Donc, c'est quand même très confortable aussi. Pour moi, c'est très confortable. Je sais qu'il y a des personnes qui n'aiment pas du tout, mais moi, je préfère travailler comme ça.

  • Pascale Lafitte

    Qu'est-ce qu'ils vous ont apporté dans votre vie aujourd'hui, les patients ?

  • Marianne Figuet

    Franchement, ils m'ont apporté beaucoup de choses. Franchement, je trouve qu'ils m'ont apporté une ouverture d'esprit que je n'avais pas. C'est vrai que ça me permet de me poser des questions, peut-être un peu trop des fois. Mais ça me permet vraiment de m'interroger sur pourquoi on fait les choses, pourquoi il y a des gens qui sont plus en difficulté que d'autres, comment on accompagne ces personnes-là. Et c'est vrai qu'en médecine générale, quand on commence, ça nous apprend l'humilité parce qu'en fait, on se rend compte qu'on ne sait rien, qu'on n'est pas formé du tout à la médecine générale finalement. On n'est pas au contact de la vraie vie dans nos études de médecine. On est formé à l'hôpital, c'est très particulier comme exercice et finalement on est très très loin de la physiologie, des problèmes, des vrais problèmes des gens, j'ai envie de dire des problèmes quotidiens des gens qui viennent en médecine générale pour vraiment tout un tas de raisons, comme vous l'avez lu dans le passage, parce que ça aussi c'est une grande richesse intellectuellement pour un médecin, on est stimulé sur plein de spécialités en même temps, ça nous permet aussi de demander des avis à nos confrères, donc on apprend en permanence et ça c'est chouette. Mais c'est aussi une position un peu inconfortable parfois parce que finalement, l'incertitude, ça peut être très difficile à gérer. Et ça aussi, je trouve qu'on n'est pas très bien formé à ça. Donc vraiment, mes patients m'apprennent l'humilité vraiment et c'est agréable, même si parfois c'est difficile.

  • Pascale Lafitte

    L'ouvrage de Marianne Figué est un roman biographique, Le temps du printemps. Il apparaît aux éditions LibriNova. On y découvre Eulalie, jeune femme d'une trentaine d'années, maman et médecin. Il y est donc beaucoup question de médecine et beaucoup question de maternité, sujet sur lequel nous allons revenir ici. Mais pour l'instant, Marianne se remémore son premier jour d'interne.

  • Marianne Figuet

    Mon premier jour d'internat. C'était une garde aux urgences. C'était un CH, un centre hospitalier, mais régional. Et oui, c'est le stage que j'ai le moins bien vécu, évidemment. Mais voilà, en fait, je n'ai pas de souvenirs précis, mais je me rappelle que j'étais complètement perdue. J'étais égarée. Je me rappelle que j'avais dit à un chef, le chef, il me disait ça va, tu n'es pas trop stressée. Je lui disais, je suis plus dépassée que stressée tellement j'étais vraiment sous l'eau. mais bon On a survécu, mais voilà, pour moi, c'est le terme. J'ai survécu à ce stage.

  • Pascale Lafitte

    Six mois.

  • Marianne Figuet

    Sept ! C'était le Covid. Ils l'ont prolongé en plus, franchement.

  • Pascale Lafitte

    Survivre, c'est difficile. Quand on est médecin, de survivre face à des patients qui, eux aussi, luttent pour survivre. En fait, tout le monde dans ce service, en tout cas, vos patients et vous, étaient en état de survie. Ça demande beaucoup d'énergie.

  • Marianne Figuet

    Oui, franchement, oui. Alors vraiment, là j'ai survécu et tant mieux, mais j'aurais pu ne pas survivre sincèrement. Et oui c'est difficile, alors avec certains patients ça me permettait de m'évader, parce que c'est aussi des rencontres humaines et le contact humain fait que ça soigne aussi, et parfois ça soigne aussi les soignants. Mais oui c'est très difficile de soigner, surtout quand on est soi-même en posture de vulnérabilité, c'est difficile de donner parce que le soin ça demande de donner beaucoup, beaucoup d'énergie, beaucoup de joie, beaucoup d'entrain je trouve, il y a quand même un petit peu une posture. Et c'est difficile de l'adopter quand soi-même on est altéré et qu'on devrait soi-même se soigner finalement. Donc ce qui est bien, c'est que j'ai su appeler à l'aide pendant ce stage quand j'ai senti que je perdais complètement pied. Et le syndicat des internes a été vraiment très aidant pour moi.

  • Pascale Lafitte

    Vous savez maintenant quelles sont les raisons pour lesquelles il y a eu ce moment si difficile ?

  • Marianne Figuet

    Déjà, premièrement, je pense que vraiment physiologiquement, je ne suis pas faite pour travailler de nuit et 24 heures pour moi, c'est trop. Sincèrement, là, je... Je le pense aujourd'hui, je l'assume, parce que je n'osais pas m'avouer, je ne suis pas capable de travailler la nuit et je ne suis pas capable de travailler 24 heures d'affilée. C'est quelque chose pour moi qui était impossible, trop difficile. Et donc ça, ça m'a complètement fait perdre pied et généré chez moi beaucoup d'angoisse parce que je savais que je n'étais pas capable. Et savoir qu'on n'est pas capable face à des patients, c'est extrêmement angoissant. On a peur de faire les mauvais choix, on a peur de nuire. Et donc quand on a peur de nuire, on n'ose plus rien faire. Et c'est vrai qu'à ce moment-là, à la fois on ne veut pas déranger les chefs, mais à la fois on ne veut pas tuer un patient. Donc c'est extrêmement anxiogène et c'est ça qui m'a fait perdre le pied. Aujourd'hui, je pense qu'il y a des gens qui sont plus résistants, mais je ne pense pas qu'on soit quand même capable de le faire au maximum de ses capacités intellectuelles. Sauf que je pense quand même qu'on doit ça aux patients. Et que ce n'est pas une faiblesse que de dire qu'on ne peut pas le faire. Je ne comprends pas, il n'y a que les médecins maintenant qui travaillent 24 heures d'affilée. On sait les risques pour la santé, on sait les risques en sortie de garde, sur la route. Et c'est maintenu. Alors, il y a des médecins qui tiennent beaucoup à faire des 24 heures, parce que ça leur permet aussi de travailler moins de jours dans la semaine. Et je le comprends. Néanmoins, est-ce qu'on se rend compte quand même des capacités qu'on perd ? De nos vraies ressources, je ne sais pas. Je ne veux pas faire forcément annuler les 24 heures, mais ça devrait être vraiment un choix unique, parce que personnellement, je suis persuadée qu'on n'est pas bon et qu'il faudrait mieux passer en 12 heures.

  • Pascale Lafitte

    La médecine comme un métier, ça existe. On peut être très bon médecin, c'est un métier. On a tendance, nous, quand on est à l'extérieur, L'image qu'on renvoie, c'est la passion, c'est le médecin passionné, c'est celui qu'on montre au cinéma, qui n'arrête pas de travailler. Et ça, ça fosse un peu l'image qu'on peut avoir du médecin, même quand on est interne soi-même et qu'on rentre dans les études en se disant « mais c'est pas ce qu'on attend de moi » .

  • Marianne Figuet

    C'est très pertinent, je n'avais pas pensé à ça comme ça. Mais maintenant que vous le dites, je trouve que ça dessert énormément les... patients eux-mêmes aussi, de véhiculer cette image-là, même s'ils ne le font pas exprès, mais on leur donne cette image-là. Déjà parce que un bon médecin, ce n'est pas un médecin qui ne compte pas ses heures. Un bon médecin, c'est quelqu'un qui arrive à se reposer, qui arrive à prendre soin de ça, qui arrive à se former, qui a le temps de prendre du recul parce que quand on a la tête dans le guidon, qu'on est stressé, croyamment, on ne prend pas les bonnes décisions. Moi, j'ai beaucoup envie de travailler sur l'effet du stress des médecins, sur leur pratique. Parce que je pense sincèrement que la médecine peut être différente et moins oxygène aussi pour les patients. Par exemple, parfois, certains médecins vont avoir tendance à faire beaucoup d'examens qui ne sont pas forcément justifiés, qui n'ont pas forcément d'intérêt ni pour le patient ni pour la soeur. société, puisque c'est la société qui paye. Et pourquoi ils font ça ? Si ce n'est pour se rassurer, ou si ce n'est pour aussi rassurer le patient. Finalement, est-ce qu'un bon médecin, ce serait pas aussi quelqu'un qui arrive à dire, écoutez, stop, j'ai assez de recul pour dire que là, je suis pas inquiet. Laisser du temps, avoir du temps. Et un médecin qui a la tête dans le guidon, il n'a jamais le temps. Il n'a jamais le temps parce qu'il a toujours trop de choses à faire, et c'est normal, c'est pas de sa faute. On lui a pas appris à prendre soin de soi, on lui a pas appris qu'être un bon médecin c'était aussi avoir du temps pour soi Et moi, c'est ma vision des choses, en tout cas.

  • Pascale Lafitte

    Vous avez donc écrit qu'il y avait une violence subie durant les études de médecine. Vous dites qu'elles sont monnaie courante. Je pourrais retrouver le passage parce que j'ai des petits post-it partout. Les violences subies durant les études de santé sont monnaie courante. Eulalie, donc c'est votre personnage, était loin d'être un cas isolé. Mais mise bout à bout, ces violences forgent des soignants fragilisés qui ne doivent pas être violents, eux, surtout pas les femmes. ou pas avec leurs patients et leurs patientes ?

  • Marianne Figuet

    En fait, si vous voulez, j'aime beaucoup ce passage-là, parce que les patients se plaignent des médecins beaucoup. Et je le comprends, même en tant que patiente, des fois, moi j'ai des choses à redire, clairement. Mais comment voulez-vous qu'on ne soit pas violent quand en fait on est formé dans la violence ? On est formé, on est violent avec soi-même. À partir du moment où on est violent avec soi-même, comment voulez-vous qu'on ne soit pas violent avec les autres ? Et le pire, c'est que si on ne le questionne pas, ça, et bien finalement, on reste dans cette violence-là. Et en fait, on nie. Ça, c'est le grand truc de la médecine. On nie les patients. On peut les prendre de haut un petit peu. Bon, attention, je ne sais pas tous les médecins, loin de là. Mais c'est une possibilité. C'est un risque, en fait. Si on ne travaille pas sur soi, si on ne prend pas de recul, si on ne questionne pas ses biais, on reproduit. Et ça, c'est valable avec les violences, mais c'est valable aussi avec le sexisme, avec le racisme, avec finalement beaucoup de discrimination médicale. Quand j'étais externe, moi, on était parfois jusqu'à 8 ans dans une chambre de malade. Moi, je vais vous dire, mon fils a été hospitalisé au CHU. En fait, quand il rentre à 5 alors qu'il a 15 jours et que toutes les externes qui n'ont jamais vu un bébé de leur vie, elles veulent lui faire un examen. En fait, sinon, ce n'est pas possible. C'est extrêmement violent pour le bébé, mais pour les parents aussi. Donc ça, il faut vraiment qu'on apprenne à se questionner. Mais ça, ce n'est pas l'ordre du jour. Et ça,

  • Speaker #2

    c'est vraiment quelque chose pour lequel j'aimerais oeuvrer. À suivre sans ordonnance ni modération.

  • Pascale Lafitte

    Dans son ouvrage, Le temps du printemps, comme pour nous également aujourd'hui, Marianne se souvient de sa maternité.

  • Marianne Figuet

    J'ai été maman interne, j'étais enceinte pour ma thèse, ça c'était ma victoire. Je ne sais pas pourquoi, je voulais absolument être enceinte pour ma thèse, mais je ne le savais pas, donc c'est la belle surprise. Et donc oui, j'ai été maman pendant l'internat, j'étais enceinte sur un stage de ville. Bon, je vous avoue que les... professionnels avec qui je t'aide n'ont pas été très compréhensives et donc je devais être interne. Je n'étais pas une femme, je n'étais pas une femme enceinte, j'étais une interne qui devait accomplir son travail et rapporter des sous. Parce que oui, en libéral, on travaille pour nos chefs et on ne voit que l'argent passer. Donc ça, j'ai mal vécu mais à ce moment-là, j'avais finalement assez de ressources pour identifier le problème et savoir que ça ne venait pas de moi. Finalement, j'ai pu aussi être aidée encore une fois par le syndicat des internes. Heureusement qu'ils étaient là, franchement. Je leur dois une très fière chandelle parce qu'ils m'ont aussi aidée quand j'ai accouché et que je ne me voyais pas faire des gardes aux urgences justement en ayant accouché. Et ils m'ont fléché sur un stage plus vivable pour moi.

  • Pascale Lafitte

    Je sors de votre cas, mais il y a d'autres jeunes femmes internes qui ont des enfants à un internat. Quand on connaît les contraintes d'un interne, que ce soit les gardes, que ce soit les heures, tout le monde en parle. La presse en parle, tout le monde parle de ça. voilà On n'invente rien quand on le dit. C'est difficile. Vous avez droit à des congés maternités comme une personne qui travaillerait dans un autre type de métier ? Parce que vous êtes étudiant, en fait, et qu'au bout du compte, il y a une thèse, il y a la fin des études. Comment est-ce que ça se passe ?

  • Marianne Figuet

    Pour mon cas, ça a été assez simple parce que j'ai un internat de médecine générale que j'avais déjà fait les stages compliqués et que le syndicat m'a aidée. et en plus mon mari a pu prendre une disponibilité et moi j'ai eu un après j'ai pris un congé parental après mon congé maladie donc on est des salariés lambda on a ce droit là d'avoir un congé maternité, encore heureux j'ai envie de dire, et la possibilité de prendre des disponibilités selon les accords selon les facs c'est différent. Il y a beaucoup de femmes qui ont des enfants dans l'internat et franchement respect à elles parce que notamment celles qui ont des gardes avant on avait, dès qu'on était enceinte de 3 mois on n'était plus obligé de faire des gardes la nuit maintenant c'est supprimé voilà mais on recule mais enfin je ne comprends pas cette décision et en fait ça c'est aussi quelque chose un peu ouais bah elle est enceinte bah elle l'a voulu Oui, d'accord, mais en fait, voilà, c'est exactement ce que vous disiez, on est rentré dans les ordres, on n'a plus le droit d'avoir une vie à part la médecine. Je ne l'avais jamais vu comme ça, mais en fait, ça me parle énormément. C'est exactement ça. Oui, mais ta priorité, ça doit être la médecine. Ben non, vraiment pas ! Si c'est ta passion, que tu rêves de ça la nuit, oui, mais sinon, ne t'empêche pas de vivre, parce que la vie est courte. Et ça, c'est quelque chose que mes patients m'ont appris aussi, c'est qu'on voit bien qu'on ne sait jamais de quoi est fait demain, et c'est peut-être une vision un peu péjorative des choses, Mais moi, c'est vraiment ça aussi que j'ai appris pendant mes études de médecine, c'est qu'on n'a pas toujours le temps, on ne sait pas. On ne sait pas ce qui va arriver demain. Donc on ne peut pas se permettre de tout abandonner comme ça pour ses études.

  • Pascale Lafitte

    Les internes enceintes ont droit à une dispense de garde dès que leur médecin du travail l'indique. Dispense qui n'est pas une faveur, mais un droit. Dans l'usage, même si le droit existe, son application dépend fortement du service. Heureusement, il existe une culture de solidarité réelle entre internes qui réorganise souvent les plannings entre eux. Une forme de solidarité traditionnelle mais non réglementaire. J'ai parlé à Marianne du manque de médecins, de l'insupportable délai d'attente aux urgences, de toutes ces choses qui font que nous, nous patients, nous pestons, nous rageons contre les internes, les médecins et souvent même contre tout le personnel médical.

  • Marianne Figuet

    Aux urgences, si on avait le temps, si on avait des locaux adaptés, si on avait assez de médecins, assez d'infirmières, des brancards pour tout le monde, vous inquiétez pas, on prendrait tout le monde, ça rapportait soit à l'hôpital, on serait content de le faire, vous inquiétez pas. Mais c'est pas possible, et c'est pas de notre faute. Donc ça, clairement, je l'entends, mais ça rappelle quelque chose, c'est que les patients sont aussi très violents avec nous, même en médecine générale. Donc ça, c'est, comme vous le disiez, c'est systémique, il faut le changer Malheureusement, ce n'est pas à nous de le faire et ce n'est pas nous qui le ferons. Parce que de toute façon, regardez, les médecins ne font même pas grève parce qu'ils ne veulent pas laisser leurs patients. Donc, les gentils ne lisent pas, on sait qui c'est. Enfin, moi, je sais en tout cas.

  • Pascale Lafitte

    Vous dites que les patients peuvent être très violents ?

  • Marianne Figuet

    Oui, les patients sont violents. Pas tous, évidemment. Néanmoins, d'autant plus quand on est une femme, il y a des patients qui sont violents physiquement. Il y a des patients qui sont violents verbalement. Je ne sais pas comment l'exprimer, mais on ne peut pas mal parler à un autre être humain. Des fois, on le fait quand on est en colère, mais il faut savoir s'excuser. Et là, on va vers quelqu'un qui doit vous apporter du soin. Donc déjà, premièrement, c'est très désagréable pour le médecin. Mettre la pression, ça ne fait pas prendre des bonnes décisions, clairement, parce que quand on est en situation de stress, ce n'est pas la meilleure des façons pour réfléchir, honnêtement. Et puis, je ne sais pas si c'est très stratégique, parce que si on fait bien pris en charge par quelqu'un, autant ne pas l'agresser.

  • Pascale Lafitte

    Vous en parlez dans l'ouvrage, vous parlez de patients, puis même de la vie de chefs parfois, ils ont tendance à mal réagir parce que vous êtes une interne femme. Et à dire, ah bah non, c'est pas un médecin.

  • Marianne Figuet

    C'est ça. Le nombre de fois où c'était, et le docteur, il est où ? Ben, il est là. Elle est là. Oui, il y a ça. Honnêtement, on n'est pas pris au sérieux. Après, les patients, c'est pas de la mauvaise volonté, mais c'est en eux, en fait. C'est des biais sexistes qu'ils ont intégrés, qui se demandent si on est capables, qui remettent en cause nos capacités. Ça peut être aussi dû à la jeunesse. Alors quand on est une femme et jeune, je ne vous dis pas. Et si on est racisé en plus, c'est ce qui n'est pas mon cas. Mais de mes consoeurs, je l'entends malheureusement trop souvent. Ça se cumule en fait, si vous voulez.

  • Pascale Lafitte

    Vous écrivez combien de fois à l'hôpital l'avait-on prise pour une infirmière ? Combien de fois un étudiant mâle avait été pris pour le médecin alors que le médecin seigneur était aussi dans la pièce et que c'était une femme ? Et vous écrivez ceci aussi. Et je voulais qu'on en parle. Mais le pire à ses yeux était de constater qu'elle-même pouvait faire preuve de misogynie.

  • Marianne Figuet

    On a tous des biais. Les biais, comme je vous le disais, les biais racistes, les biais sexistes, etc. Il y en a mille, malheureusement. Et donc, quand on grandit dans une société qui est misogyne ou sexiste, en soi, c'est ancré. Donc, l'important, c'est de le questionner. Et donc, oui, ça peut m'arriver de me faire des réflexions. Par exemple, une fraction de seconde, se dire que c'est une femme. Oui, et ? Et donc, c'est hyper intéressant. de le vivre soi-même parce qu'en fait, c'est internalisé. Ce n'est pas conscient, ce n'est pas volontaire. Mais c'est ça qui est encore plus dangereux finalement. Mais ce livre m'a beaucoup aidée justement à questionner ces biais-là et j'espère à m'améliorer.

  • Pascale Lafitte

    Il y a un autre petit passage qui m'a interpellée parce que moi, je suis maman d'un interne dans le futur médecin. Et qui, comme vous dit, on lui demandait parfois de s'impliquer dans la prise en charge, de relire et expliquer les comptes rendus des examens, d'appeler. Là, on parle de la famille. En fait, est-ce que c'est difficile ? On commence à avoir un pied dans le métier, de voir arriver papa, maman, les frères, les soeurs, tonton, taty, papy, mamie, avec sa petite radio, avec son petit commentaire et ses cent mille questions.

  • Marianne Figuet

    En fait, c'est dur parce que ça demande énormément d'émotions. Ça demande des ressources émotionnelles importantes. Et les gens disent, oui, mais c'est juste ça, c'est juste une radio. Mais en fait, un médecin ne regarde plus jamais juste une radio. il faut un interrogatoire, un examen et... On regarde la radio et puis on n'a pas forcément envie de questionner les douleurs de sa mère. Si vous voulez que notre mère, elle est mal, ça ne nous fait pas la même chose que ce soit un patient qu'on ne connaît pas. Si vous voulez, donc, si c'est notre mère, on va beaucoup plus s'inquiéter. On va avoir envie de faire, je ne sais pas, peut-être une IRM, peut-être plein de choses. Mais parce qu'en fait, c'est notre maman et c'est valable pour toute la famille, si vous voulez. Donc ça, c'est quelque chose qu'ils ne comprennent pas. C'est toujours ça. Vous pouvez juste regarder ce résultat. Mais en fait, non, je ne peux pas. Je peux te dire que là, ce n'est pas normal. Mais émotionnellement, déjà, ça va me demander beaucoup. Donc, est-ce que la famille a vraiment envie de demander ça à quelqu'un ? Et ensuite, ce n'est pas comme ça qu'on pratique la médecine, en fait. La médecine, c'est plus qu'un examen. C'est plus que tu peux juste me donner ton avis. Non, c'est plus complexe. Mais ça, c'est très difficile à le faire comprendre.

  • Pascale Lafitte

    Et une interne avec son petit bébé qui vient de naître, est-ce qu'elle est le médecin de son bébé ou est-ce que là vraiment il faut un pédiatre à côté, extérieur ?

  • Marianne Figuet

    Non, moi je ne suis pas le médecin de mes enfants. Malheureusement, je l'ai été malgré moi parce qu'ils ont eu des soucis de santé et que des fois il y a le diagnostic qui s'impose à nous. Parce que même si on ne veut pas être médecin, on reste médecin et qu'on le voit. Donc j'avoue que ça a été compliqué et que ça m'a un peu fâchée avec le monde médical pour le coup. Je suis assez déçue, sincèrement. Déçue,

  • Pascale Lafitte

    C'est-à-dire ?

  • Marianne Figuet

    J'ai été déçue de l'accueil que j'ai reçue. J'ai été déçue des diagnostics qui n'ont pas été faits. J'ai été déçue par la prise en charge. Comme je l'ai évoqué au début du podcast, il y a mon fils qui a été hospitalisé. Et là, tout de suite, quand c'est grave, on a tout de suite un puits de reconnaissance. Même si on note les dysfonctionnements du système de santé, moi, du coup, je les vois tout de suite et ça me saute aux yeux. Mais bon, pour certains praticiens, je suis extrêmement reconnaissante et c'est des gens qui m'ont inspirée et qui m'ont donné envie de reprendre la médecine. Et pour d'autres, je me dis, on a beaucoup à faire.

  • Pascale Lafitte

    Vous serez médecin toute votre vie, vous savez ça ?

  • Marianne Figuet

    Je suis médecin et je le resterai, ça c'est sûr. Après, est-ce que j'exercerai ? Je pense que je prendrai service aux patients, quoi qu'il en coûte. Je rendrai service aux patients, que ce soit en écrivant dans la revue, puisque de toute façon j'écris pour les médecins, donc j'écris aussi pour les patients. J'écris des livres, donc j'écris pour les patients. Et dans mes livres, il y a toujours aussi un côté un peu thérapeutique, dans le sens, j'essaye en tout cas, d'amener le lecteur à réfléchir, d'amener le lecteur à prendre conscience peut-être de certaines choses. Et je pense que ça ne peut qu'aider les gens. Donc je continuerai à être médecin parce que je le serai à vie. Je continuerai à aider, j'y mettrai un point d'honneur. Après, est-ce que je reprendrai la consultation ? Je ne sais pas. Peut-être, sûrement. On verra.

  • Pascale Lafitte

    J'ai tendu une baguette magique à Marianne. Une baguette qui lui confère, comme ça, instantanément, la possibilité de revoir, un peu ou beaucoup, partiellement ou totalement, l'externat comme l'internat.

  • Marianne Figuet

    Alors, si j'avais une baguette magique, je refondrais complètement les études de médecine. J'arrêterais de faire apprendre des choses complètement inutiles. J'arrêterais de faire apprendre la sur-spécialité pour apprendre la physiologie, pour apprendre la médecine générale et ensuite éventuellement des notions de spécialité qui sont quand même intéressantes, disons-le. Mais néanmoins, il faut plus de pratiques courantes. Ensuite, j'amènerais de la sociologie dans les études de médecine. On n'en a pas. On a besoin de questionner nos biais. Tous, tous. On a tous des biais. Donc, il faut qu'on les questionne pour bien prendre en charge nos patients. Et ensuite, j'amènerais de la psychologie, parce qu'on a besoin d'écouter nos patients, on a besoin de nous écouter nous-mêmes. Et donc, on a besoin de notions de psychologie et on a besoin d'un accompagnement psychologique. Les psychologues ont un accompagnement. Ça se développe un petit peu en ce moment pour les médecins, ça s'appelle la supervision, ça permet de parler de ses patients. Mais il faut aussi un accompagnement psychologique à soi, pour parler de nous. Et je pense que ce serait déjà pas mal pour la baguette magique.

  • Pascale Lafitte

    Merci à Marianne Figuet pour sa franchise. Son ouvrage référence pour cet entretien, Le temps du printemps, apparu aux éditions LibriNova. Un autre livre est en cours de rédaction. Vous pouvez la retrouver également sur Instagram. Merci à l'ISNI, l'Intersyndicale Nationale des Internes, de nous avoir mis en contact. Et merci à vous tous d'être au rendez-vous. Partagez, faites vivre cet entretien et prospérez ce podcast. Abonnez-vous et à bientôt pour un prochain épisode d'Internet en médecine, le podcast, à suivre sans ordonnance ni modération.

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