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Quel est notre rapport à la technologie ?  - Louis de Diesbach cover
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J'ai 50 ans et alors ?

Quel est notre rapport à la technologie ? - Louis de Diesbach

Quel est notre rapport à la technologie ? - Louis de Diesbach

32min |05/09/2024
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J'ai 50 ans et alors ?

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Description

Le numérique nous sert-il encore ou sommes-nous devenus ses esclaves ? Avec l'intelligence artificielle omniprésente dans nos vies, comment notre rapport au monde évolue-t-il ? Quel impact cela a-t-il sur notre quotidien et nos relations humaines ?


Se poser ces questions c’est remettre la relation, la conversation et l'échange au cœur de notre vie.  

Il ne s'agit pas ici d'être technophobe, mais de mieux comprendre ce qui se passe derrière les écrans et les plateformes que nous utilisons constamment. Et de questionner nos comportements et le lien humain.


Je vous propose de prendre un moment pour y réfléchir ensemble, peu importe notre âge, que l'on ait 50 ans ou pas.


Avec Louis de Diesbach, éthicien de la technique et consultant au Boston Consulting Group. Auteur des livres « Liker sa servitude » et « Bonjour ChatGPT », on prends le temps de réfléchir à la place de la technologie dans nos vies et à l'importance de remettre le lien, l'échange et le dialogue au cœur de notre existence.


Ressources :

Louis de Diesbach

Ses livres :

"Bonjour ChatGPT"

"Liker sa servitude"


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Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour et bienvenue dans "J'ai 50 ans et alors?" un podcast qui accompagne nos transitions. Je suis Sandrine Corbiau, j'adore faciliter les liens, les prises de conscience et le changement. Dans ce podcast, je vous partage des inspirations, des réflexions, des rencontres qui enrichissent mon quotidien. Pas de recettes toutes faites, juste des moments authentiques pour vous inspirer. Un rendez-vous qui fait du bien, une parenthèse qu'on s'octroie dans son quotidien pour marcher vers soi à son rythme. Bonjour et bienvenue dans cette nouvelle édition. Je suis ravie d'être avec vous aujourd'hui pour discuter du numérique qui est partout, tout le temps. On est connecté à tout moment. Et l'idée c'est... Est-ce que le numérique nous sert encore ou bien est-ce qu'on est devenus des esclaves à l'heure où l'intelligence artificielle et ChatGPT est partout, et vraiment partout dans nos vies ? Comment notre rapport au monde est-il en train de changer ? Quelle relation avons-nous avec la machine et quel impact cela a-t-il sur notre quotidien ? Et donc ce qui me plaît dans ces questions qu'on va se poser, c'est que... On va remettre la relation, la conversation et l'échange au cœur de notre vie. C'est un petit peu à ça que ces questions nous invitent. Et nous invitent aussi à repenser un certain vivre ensemble, un véritable débat de société. Alors ici, il ne s'agit pas d'être technophobe, mais plutôt de mieux comprendre ce qui se passe derrière les écrans, comment évolue toute cette technologie. pouvoir agir en conscience. Donc je vous propose de prendre un moment pour réfléchir à tout ça, peu importe notre âge, qu'on ait 50 ans ou pas. Et pour aborder ce sujet, j'ai le grand plaisir d'être avec Louis de Diesbeck, qui est éthicien et consultant au Boston Consulting Group. Et donc, il a également écrit deux ouvrages, qui est Likez sa servitude et Bonjour Tchadjipiti paru aux éditions Mardaga. Il est également conférencier sur l'éthique et la philosophie dans l'intelligence artificielle. Bonjour Louis.

  • Speaker #1

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Bienvenue et merci d'être avec nous aujourd'hui. Alors dans cette première partie d'émission, je vais te proposer, te poser des questions pour un petit peu mieux te connaître. Est-ce que tu pourrais nous expliquer un peu ton parcours ?

  • Speaker #1

    Oui, tout à fait. Alors, effectivement, tu as déjà dit pas mal de choses, peut-être même l'essentiel. Moi, j'ai toujours vécu en Belgique. J'ai d'abord fait mes études à Solvay. J'ai d'abord un background plutôt business. Et puis après, en parallèle de mon premier boulot, j'ai fait un master en éthique et en philosophie que j'ai moi-même souhaité orienter sur la philosophie de la technologie et de l'IA. Et ensuite, on s'en suivit, comme tu l'as dit, à la sortie de divers ouvrages. et la rédaction de plusieurs chroniques et tribunes dans les journaux. Une chose qui est importante que tu n'as pas dite, mais que peut-être que tu ne sais pas, je suis marié, je suis papa de deux enfants, deux jeunes enfants qui ont trois ans et un an et demi. Là, je suis bien dans le dur. Et c'est important parce qu'effectivement, je pense que le fait d'être père, en tout cas le fait de savoir qu'il y aura quelque chose après moi, indirectement, ça... Ça altère, ni pour le meilleur ni pour le pire, mais en tout cas, ça altère, ça apporte une certaine modification dans mon rapport à la technologie, puisqu'elle va, de toute évidence, former ou changer le futur. Et sachant qu'il y aura mes enfants dans ce futur-là, évidemment, mon regard sur la technologie, je pense, a changé. En tout cas, ça joue dans ce regard que je peux avoir sur la tech.

  • Speaker #0

    Est-ce que c'est ça qui fait que tu t'es spécialisé dans la tech ? Ou bien il y a un autre événement, il y a quelque chose d'autre qui fait que tu t'es spécialisé dans le... Plus spécifiquement l'éthique ?

  • Speaker #1

    Alors non, ce n'est pas mes enfants. Alors là, les gens vont être un peu déçus. C'est vraiment juste, j'ai trouvé ça intéressant. J'ai vu des documentaires là-dessus qui parlaient de l'impact de la tech. J'ai trouvé ça intéressant et j'ai voulu creuser. Et en fait, c'est tout. À côté de ça, j'avais donc dans mon master en éthique et en philo, j'avais des cours sur l'éthique de la tech. Pas beaucoup, mais un petit peu. Et les philosophes que j'ai étudiés... à l'occasion, telles que Martina Heidegger, telles que Anne Sionas notamment aussi, m'ont donné envie de creuser un peu plus la question. Et donc voilà, c'est comme ça que ça s'est fait. Mais il n'y a pas de grand événement qui pourrait venir expliquer cette passion pour l'éthique de la tech. C'est vraiment, ça a été très incrémental. J'ai vu quelque chose, ça m'intéressait, j'ai lu autre chose, j'ai trouvé ça passionnant, j'ai découvert encore autre chose. Donc voilà, ça s'est fait petit à petit, mais aujourd'hui je suis très content d'avoir choisi, je dirais, ce domaine-là, même si c'est d'une certaine façon un peu imposé à moi.

  • Speaker #0

    Et c'est quoi éthicien exactement ?

  • Speaker #1

    Alors l'éthique, c'est une branche de la philosophie. On dit souvent que la philosophie se divise en quatre grandes branches, qui sont la métaphysique, la logique, l'épistémologie et l'éthique. Et donc l'éthique, c'est, pour le dire de façon un peu grossière, les puristes m'excuseront, l'éthique, c'est de se poser la question du bien et du mal, en fait. Donc qu'est-ce qui est une bonne action, qu'est-ce qui est une mauvaise action ? Ça c'est... l'éthique. Et donc, on se doute bien que ce n'est quand même pas si simple que ça. On remonte les textes sur l'éthique aux prémices de la philosophie. On peut penser, il y a Aristote qui a écrit un texte remarquable, ça s'appelle l'éthique à Nicomac, qui survient sur plusieurs principes éthiques. On peut penser à Emmanuel Kant, à Jérémie Bentham. Il y a plusieurs philosophes qui ont pensé la question du bien et du mal. Qu'est-ce qui est une bonne action ? Qu'est-ce qui est une mauvaise action ? Est-ce qu'on peut mentir ? Est-ce qu'on ne peut pas mentir ? Enfin, voilà, toutes ces questions-là autour de l'éthique. pour peut-être ancrer ça de façon plus actuelle. Un philosophe belge qui s'appelle Gilbert Otoit, qui malheureusement nous a quittés il y a quelques années, qui disait que l'éthique de la technologie est toujours à cheval entre des questions de métaphysique et des questions de philosophie politique. Alors qu'est-ce que ça veut dire ? Ça veut dire que quand on pense à l'éthique de la tech, donc au fait que la tech est bonne ou mauvaise, eh bien ça nous force à nous poser deux questions. La question métaphysique, c'est-à-dire qu'est-ce que c'est que être humain ? Et quand on pense notamment au transhumanisme, etc., au fait que la technologie va venir altérer l'expérience humaine, c'est vrai, qu'est-ce que ça veut dire encore être humain à l'heure de l'IA ? Et au niveau de la philosophie politique, ça nous force à nous poser la question de quel est le monde qu'on a envie de créer. Et notamment quand on pense aux questions environnementales de l'IA, quand on pense aux questions sociales et sociétales, aux laissés-pour-compte notamment de la tech, aux questions de biais, aux questions de l'impact sur le modèle démocratique, etc. Évidemment que quand on pense la tech, on est obligé de penser ces questions de philosophie politique. Et moi, c'est vraiment ce que j'ai envie de faire. C'est vraiment ce que j'ai envie de faire, c'est de continuer à penser, à réfléchir, à repenser. ces questions d'éthique, du coup, donc métaphysique et de philosophie politique, autour de la technologie, dont l'intelligence artificielle est certes le buzzword du moment, mais voilà, il y a d'autres choses dans la tech que l'IA.

  • Speaker #0

    Merci, c'est passionnant de t'écouter. On a envie d'en savoir plus. Mais quelles sont les valeurs, toi, tes valeurs essentielles au quotidien, qui te drivent dans ton travail ?

  • Speaker #1

    Il y en a beaucoup. Et puis, Dieu sait que l'important, c'est les valeurs. je dirais que c'est je pense que j'ai une vraie valeur famille qui est quand même très importante j'ai une épouse exceptionnelle à laquelle mes deux ouvrages sont dédiés parce que vraiment si elle n'était pas là il n'y aurait rien de tout ça je dis souvent que j'ai trois piliers dans ma vie et elle est sûrement un des trois piliers donc j'ai vraiment une valeur famille assez importante, une valeur travail très importante, j'aime travailler vraiment ça me plaît etc et à côté de ça vraiment tout ce qui est lié à tout ça c'est la rigueur, la discipline généralement j'essaie d'être quelqu'un de très ponctuel je sais qu'aujourd'hui je suis arrivé un petit peu en retard mais d'habitude je suis quelqu'un de très ponctuel mais donc voilà c'est un petit peu toutes ces choses là qui font que je me retrouve dans les différentes éthiques qui existent, moi je me retrouve beaucoup dans l'éthique cancienne, Emmanuel Kant qui d'ailleurs alors 2024 Emmanuel Kant est né il y a pile poil 300 ans et donc effectivement moi Emmanuel Kant c'est je trouve un philosophe qui est passionnant mais qui était connu pour être extrêmement rigoureux il faisait la même promenade tous les jours à la même heure. La légende dit que ses voisins réglaient leur montre sur le passage d'Emmanuel Kant. Ce n'est pas un philosophe marrant, mais c'est un philosophe qui est extrêmement rigoureux. Je parle du principe que dans l'éthique, quand on décide si quelque chose est bon ou pas, la rigueur et la philosophie kantienne sont éminemment importantes. C'est trop facile de dire que dans certains cas, on peut, dans d'autres cas, on ne peut pas. Je trouve que ça permet à ce moment-là de justifier un peu tout et n'importe quoi. Donc la rigueur, pour moi, c'est quelque chose qui est assez important.

  • Speaker #0

    Et si tu devais retenir une chose de Kant, ce serait quoi ?

  • Speaker #1

    L'impératif catégorique. C'est-à-dire ? Je suis désolé.

  • Speaker #0

    En langage simplifié.

  • Speaker #1

    En fait, Emmanuel Kant, dans un ouvrage qui s'appelle La Fondation de la Métaphysique d'Hemmer, il explique comment est-ce qu'il faut agir. C'est un peu la base de l'éthique, c'est qu'est-ce qui est une bonne ou une mauvaise action. Et il a plusieurs formulations, mais ma préférée, il dit qu'il faut agir de telle sorte que tu traites l'humanité, non seulement dans ta propre personne, mais également dans celle d'autrui. jamais simplement comme un moyen, toujours en même temps comme une fin. Donc, jamais simplement comme un moyen, c'est-à-dire qu'il ne faut pas utiliser les gens, et il faut toujours les traiter comme des fins en soi, avec respect pour la dignité et la personne humaine. Et je pense qu'effectivement, si aujourd'hui, on agissait tous toujours de la sorte, c'est-à-dire par vrai respect de la personne humaine, je ne sais pas s'il y aurait moins de misère dans le monde, c'est à peu près mieux de dire ça, mais je pense qu'en tout cas, on serait dans la meilleure direction.

  • Speaker #0

    Et donc, comment est-ce qu'on peut faire le lien, alors, avec ton livre, justement ? Dans le respect de l'humain, ton dernier livre s'appelle Bonjour Tchadjipiti. D'abord, peut-être, pourquoi ce titre ?

  • Speaker #1

    Alors, en fait, le titre est né d'une interrogation. Donc, peut-être pour rappel, Tchadjipiti, c'est cet outil qui a été lancé par OpenAI le 30 novembre 2022. Et dès le 1er décembre, dès le lendemain, les gens... ont commencé à publier des screenshots de leurs conversations avec ChatGPT en disant regardez ce qu'il est capable de faire, regardez ce qu'il me répond, etc. Et une grande majorité commençait par bonjour ChatGPT Et ça m'a interrogé. Ça m'a interrogé parce que, de façon un peu cocasse, en tout cas je ne sais pas pour toi, mais moi je ne dis pas bonjour à ma machine à café le matin. Non. Ce qui me rassure d'un certain côté. Mais moi je ne fais pas ça. Et donc c'est un peu la question de se dire mais qui fait ça ? Qui sont ces gens qui disent bonjour à ChatGPT ? Et puis j'ai réalisé que... moi-même, quand j'utilise ChatGPT, je lui dis aussi bonjour. Pourquoi est-ce qu'on dit bonjour à ChatGPT et pourquoi est-ce que, le terme est un peu barbare, mais pourquoi est-ce qu'on anthropomorphise ? Pourquoi est-ce qu'on porte sur la technologie des traits humains ? Et donc, j'ai voulu vraiment creuser cette question-là. Platon disait que, de toute façon, la philosophie part toujours de l'étonnement, de l'émerveillement, de se demander pourquoi est-ce qu'une chose est comme ça et pas autrement. Et en fait, moi, j'ai exactement eu ça. J'ai vu... c'est ce que les gens faisaient, ça m'a étonné, ça m'a émerveillé. Je me suis dit, mais pourquoi est-ce que c'est comme ça et pas autrement ? Pourquoi est-ce que les gens disent bonjour et pourquoi est-ce qu'ils ne disent pas bonjour à leur machine à café ou à d'autres choses, etc. ? Et pourquoi est-ce que d'ailleurs les gens se disent de moins en moins bonjour entre eux, entre êtres humains ? Donc c'est toutes ces questions-là que j'ai eu envie de creuser. J'ai lu pas mal de choses sur la psychologie, des neurosciences, de la philosophie politique, évidemment. Et puis retour toujours à notre ami Emmanuel Kant. entre autres, qui vient justement poser un peu cette question de notre rapport à autrui. Donc voilà, c'est un peu tout ça que j'ai voulu creuser. Mais la question de base, c'est pourquoi est-ce qu'on dit bonjour à Chez GPT ?

  • Speaker #0

    Et donc, pourquoi cette question ? Donc, tu as exploré toutes ces questions, mais est-ce qu'il y a un début de réponse ? Est-ce qu'il y a une réponse à ça ?

  • Speaker #1

    Je n'aurais pas envie de spoiler le livre aux gens qui nous écoutent. Mais en fait, pour le dire de façon un petit peu bête, en fait, on anthropomorphise tous et toutes. l'anthropomorphisme en tant que tel, ce n'est pas forcément un phénomène qui est très bizarre. Ce que je ne m'attendais pas du tout. Pour celles et ceux qui nous écoutent, peut-être que vous avez un robot aspirateur ou un robot tondeuse, etc. Les gens qui ont ça, souvent lui donnent un nom. C'est un peu absurde. Je sais que chez mes beaux-parents, il y a un robot tondeuse, il s'appelle Bernard. On en parle un petit peu dans le livre. Il n'y a pas de raison, mais c'est quelque chose qu'on fait. Peut-être que vous avez déjà... Je ne sais pas, vous étiez dans votre voiture, en montée, votre voiture galérait un peu, vous allez dire allez titine Ça, c'est vraiment de l'anthropomorphisme. Alors vraiment, je vous garantis que vous disiez ça ou pas, votre voiture, ça ne changera que dalle. Mais on se dit qu'il y a peut-être ce petit quelque chose. Et non, l'anthropomorphisme, en fait, ça existe depuis des milliers d'années. Ça n'a pas rendu la tech pour exister. Typiquement, si on pense par exemple au dieu de l'Olympe, Zeus, par exemple, on le sait, n'avait rien de très… de cette divinité, de cette perfection divine qu'on peut imaginer. On sait que Zeus était colérique, qu'il était grassement adultère, qu'en fait, il n'était pas parfait, comme on peut l'entendre, en tout cas dans le divin monothéiste, mais qu'il était finalement assez humain dans ses comportements. Ce côté d'anthropomorphisme, en fait, ce n'est pas forcément propre à la tech. Et donc, le fait de dire bonjour à Chadjipiti et d'anthropomorphiser, ce n'est pas fondamentalement un problème. Et donc, c'est pour ça que j'ai vraiment orienté la question sur... Ok, une fois qu'on dit bonjour à la machine, la vraie question n'est pas est-ce que c'est normal qu'on lui dise bonjour ou pas ? Pour moi, la vraie question c'est si on dit bonjour à la machine comme à un être humain, est-ce qu'à un moment on ne risque pas de dire bonjour aux êtres humains comme à la machine ? Et donc de vraiment creuser, et comme je le disais là tout à l'heure, cette question de l'éthique, de la technique, d'un point de vue métaphysique, qu'est-ce que ça veut dire notre rapport à l'autre ? Qu'est-ce que ça veut dire être humain vraiment dans ce sens-là ? Et puis évidemment, d'un point de vue philosophie politique, c'est... Quel est le monde qu'on a envie de construire ? Est-ce qu'on a envie de construire un monde dans lequel, en fait, on ne parle plus avec les êtres humains ? On a une sorte de démocratie gérée par des robots, ou démocratie ou non d'ailleurs. Qu'est-ce que ça voudrait dire, faire société à l'ère de l'IA ? Et moi, c'est justement effectivement ces questions-là que j'ai voulu creuser.

  • Speaker #0

    C'est passionnant. Dans ton livre, tu donnes trois exemples. Tu parles aussi de la série Black Mirror. de l'épisode. Tu peux rappeler ce qui se passe ?

  • Speaker #1

    Pour celles et ceux qui voudraient le regarder, c'est le premier épisode de la saison 2 qui s'appelle Be Right Back, je crois. Oui, c'est ça. Sans spoiler du tout, mais dès les premières minutes de l'épisode, c'est un couple et le jeune homme décède. Le jeune homme décède et la jeune femme reste seule et au début elle ne sait pas trop comment noyer son chagrin et une amie lui parle d'une application dans laquelle elle pourrait télécharger toutes les données qu'elle a de son compagnon et du coup le faire revivre et donc discuter avec en fait cette copie factice de l'amour de sa vie et en fait moi ce qui m'a interrogé ces deux choses c'est d'une part de comprendre qu'est ce que comment est-ce qu'on en arrive là et qu'est ce que ça veut dire mais d'autre part de rappeler que ça c'est aujourd'hui quelque chose qui existe et cet épisode de black mirror il n'est pas sorti il ya très longtemps il est sorti en 2013 donc c'est à dire il ya un tout petit peu plus de dix ans Et ce qu'on appelle aujourd'hui les dead bots ou les grief bots, c'est un jeu de mots fait sur le... Est-ce que c'est un chat bot ? Un chat bot, c'est pour discuter avec un agent conversationnel. Un dead bot, c'est pour converser avec une personne qui est décédée. Et donc, ça existe de plus en plus. Il y a pas mal de reportages, notamment des personnes en Chine et au Japon, qui continuent d'échanger avec, entre autres, leurs grands-parents. mais ça peut être également leurs copains, leurs copines, leurs parents, après leur décès, grâce à toutes les informations qu'ils et elles ont récoltées sur la personne décédée et qu'ils ont nourrie dans la machine. Et ce qui m'a interrogé, c'est, mais c'est fou, c'était il y a dix ans. Il y a dix ans, les gens ont regardé Black Mirror et tout le monde s'est dit Mais quelle horreur ! Il ne faudrait surtout pas qu'on arrive là ! Dix ans plus tard, c'était une réalité. Qu'est-ce qui s'est passé ? Comment est-ce que la fiction a pu, à ce point-là, nous orienter ? pour qu'en fait, on se dise, en fait, c'est ça qu'on va créer. Est-ce que la fiction est toujours anticipatrice, oui ou non ? Voilà, ça fait partie des questions que j'essaie de poser dans le livre.

  • Speaker #0

    Et du fait qu'on devient dépassé, finalement, par cette technologie ?

  • Speaker #1

    Alors, qu'est-ce que tu entends par dépassé ?

  • Speaker #0

    Le fait que ça arrive vraiment, ça veut dire que les gens ne font plus le deuil, qu'il y a la possibilité de...

  • Speaker #1

    De nouveau, en fait, aujourd'hui, je ne sais pas. Est-ce qu'un dead bot, c'est forcément toujours mauvais ? C'est hyper difficile comme question, parce que s'il y a des gens que ça aide vraiment à passer outre un deuil très difficile, peut-être que c'est mieux. Alors Kant ne dirait sûrement pas, parce que je pense que là on ne traite pas l'humanité, en tout cas dans le cadre de la personne décédée, comme une fin en soi. Je pense qu'il y a une question de dignité qu'il faut clairement se poser. Sommer en quelque sorte des gens de revenir à la vie. Par des moyens artificiels, je trouve que c'est terrible. Je pense qu'on peut laisser les morts en paix. Mais il y a des gens qui n'arrivent pas à s'en sortir et qui, grâce à ça, sortent d'une dépression. Et c'est ça que je trouve génial avec l'éthique et l'éthique de la tech. C'est jamais blanc ou noir. C'est jamais blanc ou noir. C'est toujours complexe. C'est toujours en nuance. Ce qui, d'ailleurs, ne plaît pas toujours. Moi, je trouve que c'est très difficile d'être édicien de la technique dans un univers médiatique. Parce que tant les éditeurs, les éditrices, les journalistes, etc. mènent des propos bien tranchés. L'éthique de la tech, en tout cas selon moi, quand c'est bien fait, ce n'est pas tranché. C'est toujours compliqué, c'est toujours difficile. Et il faut justement essayer de naviguer là-dedans pour trouver les bonnes réponses. Ce qui est éminemment intéressant, mais éminemment complexe. Et donc, pour revenir à ta question, est-ce qu'on est dépassé ? Je ne sais pas. En revanche, ce qui est certain, c'est que tout va toujours plus vite. Et avant... Par exemple, entre le moment où Jules Verne écrit De la Terre à la Lune et le moment où on met un pied sur la Lune, il y a plusieurs décennies. Là, les Gravebots, il a fallu une décennie pour que d'un seul coup ça arrive. C'est toujours cette question de se dire, à quel moment est-ce qu'on va si vite pour que tout arrive ? Et si on va très vite, est-ce qu'on ne pourrait pas finir par aller trop vite ? Et c'est effectivement des questions que j'essaie de poser.

  • Speaker #0

    Et de perdre le contrôle, en fait, que la machine, il contrôle sur nous.

  • Speaker #1

    Alors,

  • Speaker #0

    de nouveau,

  • Speaker #1

    je vais t'embêter, mais moi, typiquement, le côté, on va se faire dominer par les machines, les machines vont tout nous dicter, etc. Je pense que ça vend du papier, ça vend des places de ciné, mais je pense qu'on est à des années-lumière de ce qui va vraiment se passer. Vraiment, si vous avez envie de passer une bonne soirée, vous pouvez regarder Terminator, c'est un chouette film. Mais ce n'est pas du tout, selon moi en tout cas, une sorte de bande-annonce du futur. En revanche, si vous avez vraiment envie d'avoir très très peur, vous pouvez regarder l'épisode de Black Mirror, vous pouvez regarder le film Her, dont je parle pas mal dans le livre aussi, donc H-E-R, où c'est l'histoire d'un jeune homme qui tombe amoureux d'un agent conversationnel. Ou bien vous pouvez regarder WALL-E, le petit film d'animation de Pixar et Disney, dans lequel en fait des êtres humains ont ruiné la planète. Son nom. tous et toutes dans un énorme vaisseau spatial et dans ce vaisseau spatial, ils sont tous et toutes assis dans des sortes de petits cocons, des sortes de grosses chaises roulantes, bardés d'écran, à boire et manger des sodas et des burgers toute la journée et à ne plus interagir les uns avec les autres. Et on perd le contact humain. Ça, pour moi, c'est beaucoup plus flippant que des trucs où effectivement les robots vont venir tous nous dominer, etc. En revanche, quand on parle de contrôle, je pense qu'il y a potentiellement une perte de contrôle dans ce qu'on a envie de développer. Tu vois, parfois, en fait, comme tu le disais, à force de vouloir être trop vite, parfois, effectivement, on perd le contrôle de cette vitesse et on se dit juste, OK, en fait, il faut qu'on progresse plus vite pour être meilleur que les Américains, pour être meilleur que les Chinois, pour être meilleur que les Russes, etc. Donc, on va toujours plus vite. Et on oublie de se poser cette question qui est à la fois très simple, mais à la fois très compliquée, c'est est-ce que parce qu'on peut, on doit ? Et donc, d'un point de vue technique, c'est très intéressant parce qu'il ne faut pas oublier que dans la technologie, moi je dis souvent un peu en rigolant, tu ne peux pas faire CTRL-Z, tu ne peux pas revenir en arrière. La bombe atomique, par exemple, elle est inventée, on ne peut pas la désinventer. On peut plus d'un seul coup faire un mince, en fait on aurait pas dû, c'était pas une super idée, on arrête. Et c'est pareil pour toutes les techs, on pourra jamais désinventer Chachipiti. Chachipiti, c'est là, ça existe. Et donc, dans la tech, souvent on se dit, ah bah écoute, parce qu'on peut le faire, on doit le faire et on va le faire. Et bien je suis pas certain, je pense pas que quand on peut, on doit absolument. Et je pense que du coup, ça fait qu'il y a beaucoup de questions qu'on se pose. des problèmes qu'on rencontre où assez naturellement on se dit pour résoudre ce problème là on va créer une application alors qu'en fait parfois la réponse c'est pas forcément plus de tech parfois la réponse ça peut être moins de tech et c'est ce que tu disais justement dans ton introduction et j'aimais bien c'est ici c'est Et dans mes ouvrages et dans mes écrits, il n'y a pas de technophobie, il n'y a pas de technophilie. Je pense que la tech n'est... J'avais un ami qui disait, la tech n'est ni bonne, ni mauvaise, ni neutre. Et donc, ça amène plein de questions dont on pourrait parler pendant des heures. Mais effectivement, moi, c'est ça que j'adore creuser et que j'ai essayé de développer dans mon livre.

  • Speaker #0

    On est en compagnie de Louis de Diezbach et on parle de notre rapport à la machine. Et donc, on parlait des agents conversationnels. Tu donnes aussi deux ou trois exemples dans ton livre. Tu peux nous en donner un ici, de la grand-mère, par exemple, qu'on place dans un...

  • Speaker #1

    Alors effectivement, je parle de la technologie. Et effectivement, tout le monde se dit que la technologie, c'est toujours mieux. Et donc, avec la robotique qui va évoluer, etc. L'IA, vous allez voir, c'est toujours mieux. Et un petit peu ce que je disais, on se dit que plus de textes, c'est toujours la réponse. Et effectivement, si jamais on réfléchit aux EHPAD en France, par exemple, aux Homes, etc. Aujourd'hui, il y a une vraie crise de personnel soignant. Et donc, on est en train de se dire, super, en fait, on va pouvoir mettre des robots à la place. Et donc, quand on fait ça, selon moi, en fait, on met une sorte de pansement bariolé sur une plaie ouverte. On ne résout absolument rien du problème. Le vrai problème, c'est qu'aujourd'hui, il y a une vraie crise. Du sens au niveau de qu'est-ce que c'est qu'accompagner les uns et les autres, il y a une vraie crise au niveau de la valorisation, la reconnaissance et donc du coup du personnel soignant et même d'un point de vue salarial, rémunérateur, etc. Tous ces jobs essentiels qu'on a découvert pendant le Covid et puis qui d'un seul coup en fait maintenant que le Covid est... presque terminé, ces job et social ne sont plus tellement essentiels que ça en fait, ils étaient un peu oubliés. Et donc c'est un petit peu ce que j'essaie de dire, c'est si demain grâce à l'intelligence artificielle on peut supprimer le personnel soignant et que toutes les personnes dans les homes et les EHPAD sont gérées et soignées par des robots, est-ce que c'est vraiment un progrès ? Et la question que j'essaie de poser c'est est-ce que toute innovation est forcément un progrès ? Moi je crois que non. Je crois que non et je donne effectivement un autre exemple c'est… S'il y a un jeune garçon, je crois que c'est dans le livre, il s'appelle Martin, ce jeune garçon est en décrochage scolaire, ses parents sont en plein divorce, il ne va pas bien du tout, etc. Et sa mère qui combine deux boulots, comme on le sait, ça existe, il y a beaucoup de personnes qui sont dans des situations difficiles comme ça. Et en fait, elle n'arrive pas à l'accompagner en maths et en français, elle se rend compte que son fils décroche. Et super, en fait, il y a une nouvelle intelligence artificielle qui existe et qui va pouvoir lui faire une sorte de professeur à la maison. Est-ce que c'est vraiment un progrès pour Martin ? Non, pour moi la vraie question qu'il va falloir se poser c'est comment est-ce qu'on peut faire pour qu'une mère célibataire n'ait pas à combiner deux boulots ? Comment est-ce qu'on peut faire pour que quand il y a un divorce, parce que ça existe, ça se passe au mieux et que le bien-être de l'enfant soit toujours prioritaire, d'abord pour les deux parents et ensuite vraiment pour toute la structure qui l'entoure. En fait, toutes les vraies questions pour moi c'est ça. Si après on peut avoir un truc qui lui fait des exercices personnalisés, c'est super. Mais le truc en fait c'est que quand ils ont fait une annonce sur la tech... C'est toujours avec tambours et trompettes, c'est en grande, son phare, et donc tout le monde se dit Ah génial, on a une nouvelle application qui fait ça, waouh, incroyable ! Et ça permet en fait de mettre un peu sous le tapis des questions qui sont tellement, tellement plus difficiles à gérer. C'est dur de poser la vraie question de la revalorisation du personnel soignant. C'est pas une question facile, si c'était facile ça aurait été résolu depuis hyper longtemps. C'est pas le cas. Moi je me souviens de cette image qui était assez forte C'est que je crois que c'était en début de Covid Sophie Wilmès va visiter un hôpital Et le personnel l'accueille avec une haie d'honneur Mais en lui tournant le dos Parce qu'elle avait été à l'époque responsable D'une certaine coupe dans le budget De la santé Je la blâme pas du tout, je connaissais pas les conséquences Mais c'est dire, la question de la valorisation Et des finances simplement De la santé C'est évidemment difficile. C'est une question, c'est dans les médias pratiquement tous les jours. Frank Vandenbroek en a beaucoup parlé, notamment lorsque lui-même a été ministre de l'Institut. C'est des questions qui sont compliquées. Et en fait, créer une application, par rapport à ça, ce n'est pas très difficile. Créer ChatGPT versus résoudre la crise de la santé, c'est beaucoup plus facile de créer ChatGPT. Et quand ChatGPT sort avec, comme je disais, tambours et trompettes, tout le monde est très content. Et pendant au moins quelques semaines, voire quelques mois si on gère ça bien, On ne parlera plus de la crise de la santé. Moi, j'aimerais bien qu'on parle plus de la crise de la santé et des questions sociales, sociétales, politiques derrière la tech, plutôt que de se dire, ah super, maintenant on a un nouveau modèle et au lieu d'avoir X milliards de paramètres, il en a X plus 5. C'est super et je suis ravi qu'il y ait des gens qui travaillent sur ça. Je pense que de toute façon, la technique fait plein de choses merveilleuses, que ce soit notamment dans la recherche, entre autres médicales. On sait que typiquement, l'intelligence artificielle est bien meilleure pour déceler le cancer du sein. que n'importe quel médecin, c'est une très bonne chose. C'est un vrai progrès en plus d'être une innovation. Donc, comment est-ce qu'on peut s'assurer que toute innovation soit également un progrès, mais un progrès au sens social, sociétal et politique du terme ?

  • Speaker #0

    Oui, je dirais un progrès aussi au niveau des relations qu'on entretient avec les humains, du relationnel, de la relation qu'on a avec la machine. Mais est-ce que ça n'appauvrit pas justement la relation qu'on a avec les autres, la relation qu'on a avec soi ?

  • Speaker #1

    Tout à fait. On parlait de la question métaphysique. Pour avoir un tout petit peu creusé la question, je me suis rendu compte que ce qui... selon moi, là tu trouveras plein de philosophes qui penseront différemment et c'est merveilleux, mais je pense qu'en fait vraiment ce qui nous fait humain, c'est le lien. C'est le lien à autrui. C'est pas forcément notre intelligence parce que c'est... Ce qui nous rend humain pour moi c'est le lien et moi j'aimerais qu'on se concentre plus sur ça. Et aujourd'hui, je n'ai pas l'impression que la technologie renforce notre capacité à créer du lien. Alors je pense pas que ce soit volontaire qu'on fasse l'inverse même si parfois c'est peut-être un petit peu le cas. plus facile de manipuler ou de vendre des choses à des gens qui sont seuls, à des gens qui sont en groupe, etc. Donc je pense que c'est principalement le lien sur lequel il faut qu'on se renforce à tout niveau, au niveau technique, mais donc au niveau aussi de nos politiques publiques, au niveau de ce qu'on est en train de créer, etc. Et c'est un petit peu mon propos, c'est de dire, mais est-ce que dans cette capacité à voir dans le regard de l'autre toute son altérité, toute sa différence, mais du coup qui nous permet à nous-mêmes aussi d'être dans notre altérité, dans notre différence, est-ce que ce n'est pas ça ce qu'il y a de plus merveilleux dans l'humanité ? Et je reviens justement à ce qu'on disait. Moi, je suis marié, j'ai deux enfants. Vraiment, il n'y a rien de plus merveilleux que de découvrir cette altérité qui est en plus en train de se créer avec mes enfants. Moi, je trouve que, en tout cas, je me sens dans ces cas-là profondément humain, bien plus que quand je suis en train de demander à Chedjipidi de me prendre une image pour un post sur je ne sais pas quelle plateforme.

  • Speaker #0

    Mais pour conclure, qu'est-ce que tu aurais envie de dire ? À tes enfants qui sont en train de grandir par rapport à l'avenir ? Qu'est-ce que tu auras envie de...

  • Speaker #1

    C'est une question difficile. Je pense que, comme je te disais, la technologie n'a pas de contrôle Z. De toute façon, elle sera là et je pense qu'il faut apprendre à vivre avec. Mais vivre avec, c'est aussi apprendre à vivre sans. Et donc de bien comprendre quand est-ce que c'est nécessaire et pratique et utile. Et voilà, il ne faut pas non plus devenir un vieux con. Moi, parfois, je vois des gens qui disent Ah, mais voilà, avec les nouvelles applications, etc., les gens ne savent plus lire une carte. Ce n'est pas très grave. Je l'ai honnêtement. Je n'ai aucun souci à ce que les gens ne sachent plus lire une carte. Et grâce à Google Maps, moi, je suis arrivé jusqu'ici et je suis très content. Donc, il ne faut pas non plus... Vraiment, il ne faut pas devenir un vieux con. Ça fait des milliers d'années qu'il y a des technologies ou des outils qui apparaissent, qui disparaissent, simplement parce que c'est le sens de l'histoire. Donc, il ne faut pas vouloir aller à contre-sens de l'histoire, mais il faut aussi se rappeler... qui on est, et c'est finalement très bateau. Connais-toi toi-même, ça a des milliers d'années, c'est clairement pas de moi, mais connais-toi toi-même et du coup, sois serein avec les choix que tu vas faire et continue à avancer.

  • Speaker #0

    Et toi, comment tu gères, une dernière question, comment tu gères ta technologie, ton rapport à la machine ? Est-ce que tu as des moments où tu es complètement déconnecté ?

  • Speaker #1

    J'ai quelques règles à la maison, je veux pas de téléphone devant les enfants. Pas de téléphone à table, pas de téléphone dans la chambre, j'aimerais mais je n'y arrive pas. Parce que c'est aussi mon réveil et c'est très pratique d'utiliser ça comme excuse. Donc oui, j'ai quelques règles effectivement que j'utilise. Après, de nouveau, c'est ce que je dis souvent, je ne suis pas du tout technophobe. J'ai un iPhone, je suis sur LinkedIn, je travaille pour BCG qui est quand même le numéro 1 consulting partner au monde pour tout ce qui est technologie. Je dirais...

  • Speaker #0

    Voilà, j'embrasse aussi la technologie dans tout ce qu'elle peut nous apporter de meilleur. Je parlais notamment entre autres de la recherche, etc. Il y a énormément de choses qui peuvent être faites avec la tech et je pense que c'est une très bonne chose. Mais oui, je pense que quelques règles de bonne intelligence, une approche un peu saine, ça ne fait de mal à personne. Et notamment, entre autres, avec les enfants, je pense que c'est important.

  • Speaker #1

    Bien, un tout grand merci, Louis. Donc, je rappelle ton livre, c'est Bonjour Tchadjipiti. qui a été publié aux éditions Mardaga. Donc, Louis de Diezbach, j'espère que vous avez apprécié cette émission, que ça vous a invité à vous questionner aussi sur le rapport qu'on entretient avec la machine, comment est-ce qu'on l'utilise, les questions qu'on se pose, c'est toujours très passionnant. Donc, un tout grand merci Louis. Si vous voulez plus d'infos aussi sur mes activités, parce que j'organise beaucoup de conférences, de cercles, de marches aussi, peut-être bientôt, n'hésitez pas à aller voir sur mon site www.sandrinecorbio.be et j'en profite pour remercier David Martinez pour la production de cette émission, son accueil chaleureux et professionnel. Et je vous donne rendez-vous dans 15 jours pour une prochaine émission. Si la philosophie et se poser des questions vous intéressent, rejoignez-moi au cycle de conférences que j'organise à partir du mois d'octobre sur le thème du deuil avec le docteur en philosophie Jean-Michel Longnot. Toutes les infos sont sur mon site www.sandrinecorbio.be. Vous pouvez y assister en présentiel ou en replay. Je mettrai toutes les infos sous ce lien. J'espère que ce podcast vous a aidé à se miner. Si vous avez aimé ce podcast, n'hésitez pas à le partager ou à le commenter. Et si vous voulez plus d'infos sur mes activités, n'hésitez pas à vous inscrire à ma newsletter. Je mettrai tous les liens sous ce post. Ce podcast fait aussi partie d'une émission diffusée sur Radio Alma tous les deuxièmes mardi et dernier mardi du mois. J'en profite pour remercier David Martinez pour la réalisation de ce podcast. Je m'appelle, je suis Sandrine Corbiot, j'adore faciliter les prises de conscience et le changement, et je me réjouis de vous retrouver la prochaine fois. À bientôt !

Description

Le numérique nous sert-il encore ou sommes-nous devenus ses esclaves ? Avec l'intelligence artificielle omniprésente dans nos vies, comment notre rapport au monde évolue-t-il ? Quel impact cela a-t-il sur notre quotidien et nos relations humaines ?


Se poser ces questions c’est remettre la relation, la conversation et l'échange au cœur de notre vie.  

Il ne s'agit pas ici d'être technophobe, mais de mieux comprendre ce qui se passe derrière les écrans et les plateformes que nous utilisons constamment. Et de questionner nos comportements et le lien humain.


Je vous propose de prendre un moment pour y réfléchir ensemble, peu importe notre âge, que l'on ait 50 ans ou pas.


Avec Louis de Diesbach, éthicien de la technique et consultant au Boston Consulting Group. Auteur des livres « Liker sa servitude » et « Bonjour ChatGPT », on prends le temps de réfléchir à la place de la technologie dans nos vies et à l'importance de remettre le lien, l'échange et le dialogue au cœur de notre existence.


Ressources :

Louis de Diesbach

Ses livres :

"Bonjour ChatGPT"

"Liker sa servitude"


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Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour et bienvenue dans "J'ai 50 ans et alors?" un podcast qui accompagne nos transitions. Je suis Sandrine Corbiau, j'adore faciliter les liens, les prises de conscience et le changement. Dans ce podcast, je vous partage des inspirations, des réflexions, des rencontres qui enrichissent mon quotidien. Pas de recettes toutes faites, juste des moments authentiques pour vous inspirer. Un rendez-vous qui fait du bien, une parenthèse qu'on s'octroie dans son quotidien pour marcher vers soi à son rythme. Bonjour et bienvenue dans cette nouvelle édition. Je suis ravie d'être avec vous aujourd'hui pour discuter du numérique qui est partout, tout le temps. On est connecté à tout moment. Et l'idée c'est... Est-ce que le numérique nous sert encore ou bien est-ce qu'on est devenus des esclaves à l'heure où l'intelligence artificielle et ChatGPT est partout, et vraiment partout dans nos vies ? Comment notre rapport au monde est-il en train de changer ? Quelle relation avons-nous avec la machine et quel impact cela a-t-il sur notre quotidien ? Et donc ce qui me plaît dans ces questions qu'on va se poser, c'est que... On va remettre la relation, la conversation et l'échange au cœur de notre vie. C'est un petit peu à ça que ces questions nous invitent. Et nous invitent aussi à repenser un certain vivre ensemble, un véritable débat de société. Alors ici, il ne s'agit pas d'être technophobe, mais plutôt de mieux comprendre ce qui se passe derrière les écrans, comment évolue toute cette technologie. pouvoir agir en conscience. Donc je vous propose de prendre un moment pour réfléchir à tout ça, peu importe notre âge, qu'on ait 50 ans ou pas. Et pour aborder ce sujet, j'ai le grand plaisir d'être avec Louis de Diesbeck, qui est éthicien et consultant au Boston Consulting Group. Et donc, il a également écrit deux ouvrages, qui est Likez sa servitude et Bonjour Tchadjipiti paru aux éditions Mardaga. Il est également conférencier sur l'éthique et la philosophie dans l'intelligence artificielle. Bonjour Louis.

  • Speaker #1

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Bienvenue et merci d'être avec nous aujourd'hui. Alors dans cette première partie d'émission, je vais te proposer, te poser des questions pour un petit peu mieux te connaître. Est-ce que tu pourrais nous expliquer un peu ton parcours ?

  • Speaker #1

    Oui, tout à fait. Alors, effectivement, tu as déjà dit pas mal de choses, peut-être même l'essentiel. Moi, j'ai toujours vécu en Belgique. J'ai d'abord fait mes études à Solvay. J'ai d'abord un background plutôt business. Et puis après, en parallèle de mon premier boulot, j'ai fait un master en éthique et en philosophie que j'ai moi-même souhaité orienter sur la philosophie de la technologie et de l'IA. Et ensuite, on s'en suivit, comme tu l'as dit, à la sortie de divers ouvrages. et la rédaction de plusieurs chroniques et tribunes dans les journaux. Une chose qui est importante que tu n'as pas dite, mais que peut-être que tu ne sais pas, je suis marié, je suis papa de deux enfants, deux jeunes enfants qui ont trois ans et un an et demi. Là, je suis bien dans le dur. Et c'est important parce qu'effectivement, je pense que le fait d'être père, en tout cas le fait de savoir qu'il y aura quelque chose après moi, indirectement, ça... Ça altère, ni pour le meilleur ni pour le pire, mais en tout cas, ça altère, ça apporte une certaine modification dans mon rapport à la technologie, puisqu'elle va, de toute évidence, former ou changer le futur. Et sachant qu'il y aura mes enfants dans ce futur-là, évidemment, mon regard sur la technologie, je pense, a changé. En tout cas, ça joue dans ce regard que je peux avoir sur la tech.

  • Speaker #0

    Est-ce que c'est ça qui fait que tu t'es spécialisé dans la tech ? Ou bien il y a un autre événement, il y a quelque chose d'autre qui fait que tu t'es spécialisé dans le... Plus spécifiquement l'éthique ?

  • Speaker #1

    Alors non, ce n'est pas mes enfants. Alors là, les gens vont être un peu déçus. C'est vraiment juste, j'ai trouvé ça intéressant. J'ai vu des documentaires là-dessus qui parlaient de l'impact de la tech. J'ai trouvé ça intéressant et j'ai voulu creuser. Et en fait, c'est tout. À côté de ça, j'avais donc dans mon master en éthique et en philo, j'avais des cours sur l'éthique de la tech. Pas beaucoup, mais un petit peu. Et les philosophes que j'ai étudiés... à l'occasion, telles que Martina Heidegger, telles que Anne Sionas notamment aussi, m'ont donné envie de creuser un peu plus la question. Et donc voilà, c'est comme ça que ça s'est fait. Mais il n'y a pas de grand événement qui pourrait venir expliquer cette passion pour l'éthique de la tech. C'est vraiment, ça a été très incrémental. J'ai vu quelque chose, ça m'intéressait, j'ai lu autre chose, j'ai trouvé ça passionnant, j'ai découvert encore autre chose. Donc voilà, ça s'est fait petit à petit, mais aujourd'hui je suis très content d'avoir choisi, je dirais, ce domaine-là, même si c'est d'une certaine façon un peu imposé à moi.

  • Speaker #0

    Et c'est quoi éthicien exactement ?

  • Speaker #1

    Alors l'éthique, c'est une branche de la philosophie. On dit souvent que la philosophie se divise en quatre grandes branches, qui sont la métaphysique, la logique, l'épistémologie et l'éthique. Et donc l'éthique, c'est, pour le dire de façon un peu grossière, les puristes m'excuseront, l'éthique, c'est de se poser la question du bien et du mal, en fait. Donc qu'est-ce qui est une bonne action, qu'est-ce qui est une mauvaise action ? Ça c'est... l'éthique. Et donc, on se doute bien que ce n'est quand même pas si simple que ça. On remonte les textes sur l'éthique aux prémices de la philosophie. On peut penser, il y a Aristote qui a écrit un texte remarquable, ça s'appelle l'éthique à Nicomac, qui survient sur plusieurs principes éthiques. On peut penser à Emmanuel Kant, à Jérémie Bentham. Il y a plusieurs philosophes qui ont pensé la question du bien et du mal. Qu'est-ce qui est une bonne action ? Qu'est-ce qui est une mauvaise action ? Est-ce qu'on peut mentir ? Est-ce qu'on ne peut pas mentir ? Enfin, voilà, toutes ces questions-là autour de l'éthique. pour peut-être ancrer ça de façon plus actuelle. Un philosophe belge qui s'appelle Gilbert Otoit, qui malheureusement nous a quittés il y a quelques années, qui disait que l'éthique de la technologie est toujours à cheval entre des questions de métaphysique et des questions de philosophie politique. Alors qu'est-ce que ça veut dire ? Ça veut dire que quand on pense à l'éthique de la tech, donc au fait que la tech est bonne ou mauvaise, eh bien ça nous force à nous poser deux questions. La question métaphysique, c'est-à-dire qu'est-ce que c'est que être humain ? Et quand on pense notamment au transhumanisme, etc., au fait que la technologie va venir altérer l'expérience humaine, c'est vrai, qu'est-ce que ça veut dire encore être humain à l'heure de l'IA ? Et au niveau de la philosophie politique, ça nous force à nous poser la question de quel est le monde qu'on a envie de créer. Et notamment quand on pense aux questions environnementales de l'IA, quand on pense aux questions sociales et sociétales, aux laissés-pour-compte notamment de la tech, aux questions de biais, aux questions de l'impact sur le modèle démocratique, etc. Évidemment que quand on pense la tech, on est obligé de penser ces questions de philosophie politique. Et moi, c'est vraiment ce que j'ai envie de faire. C'est vraiment ce que j'ai envie de faire, c'est de continuer à penser, à réfléchir, à repenser. ces questions d'éthique, du coup, donc métaphysique et de philosophie politique, autour de la technologie, dont l'intelligence artificielle est certes le buzzword du moment, mais voilà, il y a d'autres choses dans la tech que l'IA.

  • Speaker #0

    Merci, c'est passionnant de t'écouter. On a envie d'en savoir plus. Mais quelles sont les valeurs, toi, tes valeurs essentielles au quotidien, qui te drivent dans ton travail ?

  • Speaker #1

    Il y en a beaucoup. Et puis, Dieu sait que l'important, c'est les valeurs. je dirais que c'est je pense que j'ai une vraie valeur famille qui est quand même très importante j'ai une épouse exceptionnelle à laquelle mes deux ouvrages sont dédiés parce que vraiment si elle n'était pas là il n'y aurait rien de tout ça je dis souvent que j'ai trois piliers dans ma vie et elle est sûrement un des trois piliers donc j'ai vraiment une valeur famille assez importante, une valeur travail très importante, j'aime travailler vraiment ça me plaît etc et à côté de ça vraiment tout ce qui est lié à tout ça c'est la rigueur, la discipline généralement j'essaie d'être quelqu'un de très ponctuel je sais qu'aujourd'hui je suis arrivé un petit peu en retard mais d'habitude je suis quelqu'un de très ponctuel mais donc voilà c'est un petit peu toutes ces choses là qui font que je me retrouve dans les différentes éthiques qui existent, moi je me retrouve beaucoup dans l'éthique cancienne, Emmanuel Kant qui d'ailleurs alors 2024 Emmanuel Kant est né il y a pile poil 300 ans et donc effectivement moi Emmanuel Kant c'est je trouve un philosophe qui est passionnant mais qui était connu pour être extrêmement rigoureux il faisait la même promenade tous les jours à la même heure. La légende dit que ses voisins réglaient leur montre sur le passage d'Emmanuel Kant. Ce n'est pas un philosophe marrant, mais c'est un philosophe qui est extrêmement rigoureux. Je parle du principe que dans l'éthique, quand on décide si quelque chose est bon ou pas, la rigueur et la philosophie kantienne sont éminemment importantes. C'est trop facile de dire que dans certains cas, on peut, dans d'autres cas, on ne peut pas. Je trouve que ça permet à ce moment-là de justifier un peu tout et n'importe quoi. Donc la rigueur, pour moi, c'est quelque chose qui est assez important.

  • Speaker #0

    Et si tu devais retenir une chose de Kant, ce serait quoi ?

  • Speaker #1

    L'impératif catégorique. C'est-à-dire ? Je suis désolé.

  • Speaker #0

    En langage simplifié.

  • Speaker #1

    En fait, Emmanuel Kant, dans un ouvrage qui s'appelle La Fondation de la Métaphysique d'Hemmer, il explique comment est-ce qu'il faut agir. C'est un peu la base de l'éthique, c'est qu'est-ce qui est une bonne ou une mauvaise action. Et il a plusieurs formulations, mais ma préférée, il dit qu'il faut agir de telle sorte que tu traites l'humanité, non seulement dans ta propre personne, mais également dans celle d'autrui. jamais simplement comme un moyen, toujours en même temps comme une fin. Donc, jamais simplement comme un moyen, c'est-à-dire qu'il ne faut pas utiliser les gens, et il faut toujours les traiter comme des fins en soi, avec respect pour la dignité et la personne humaine. Et je pense qu'effectivement, si aujourd'hui, on agissait tous toujours de la sorte, c'est-à-dire par vrai respect de la personne humaine, je ne sais pas s'il y aurait moins de misère dans le monde, c'est à peu près mieux de dire ça, mais je pense qu'en tout cas, on serait dans la meilleure direction.

  • Speaker #0

    Et donc, comment est-ce qu'on peut faire le lien, alors, avec ton livre, justement ? Dans le respect de l'humain, ton dernier livre s'appelle Bonjour Tchadjipiti. D'abord, peut-être, pourquoi ce titre ?

  • Speaker #1

    Alors, en fait, le titre est né d'une interrogation. Donc, peut-être pour rappel, Tchadjipiti, c'est cet outil qui a été lancé par OpenAI le 30 novembre 2022. Et dès le 1er décembre, dès le lendemain, les gens... ont commencé à publier des screenshots de leurs conversations avec ChatGPT en disant regardez ce qu'il est capable de faire, regardez ce qu'il me répond, etc. Et une grande majorité commençait par bonjour ChatGPT Et ça m'a interrogé. Ça m'a interrogé parce que, de façon un peu cocasse, en tout cas je ne sais pas pour toi, mais moi je ne dis pas bonjour à ma machine à café le matin. Non. Ce qui me rassure d'un certain côté. Mais moi je ne fais pas ça. Et donc c'est un peu la question de se dire mais qui fait ça ? Qui sont ces gens qui disent bonjour à ChatGPT ? Et puis j'ai réalisé que... moi-même, quand j'utilise ChatGPT, je lui dis aussi bonjour. Pourquoi est-ce qu'on dit bonjour à ChatGPT et pourquoi est-ce que, le terme est un peu barbare, mais pourquoi est-ce qu'on anthropomorphise ? Pourquoi est-ce qu'on porte sur la technologie des traits humains ? Et donc, j'ai voulu vraiment creuser cette question-là. Platon disait que, de toute façon, la philosophie part toujours de l'étonnement, de l'émerveillement, de se demander pourquoi est-ce qu'une chose est comme ça et pas autrement. Et en fait, moi, j'ai exactement eu ça. J'ai vu... c'est ce que les gens faisaient, ça m'a étonné, ça m'a émerveillé. Je me suis dit, mais pourquoi est-ce que c'est comme ça et pas autrement ? Pourquoi est-ce que les gens disent bonjour et pourquoi est-ce qu'ils ne disent pas bonjour à leur machine à café ou à d'autres choses, etc. ? Et pourquoi est-ce que d'ailleurs les gens se disent de moins en moins bonjour entre eux, entre êtres humains ? Donc c'est toutes ces questions-là que j'ai eu envie de creuser. J'ai lu pas mal de choses sur la psychologie, des neurosciences, de la philosophie politique, évidemment. Et puis retour toujours à notre ami Emmanuel Kant. entre autres, qui vient justement poser un peu cette question de notre rapport à autrui. Donc voilà, c'est un peu tout ça que j'ai voulu creuser. Mais la question de base, c'est pourquoi est-ce qu'on dit bonjour à Chez GPT ?

  • Speaker #0

    Et donc, pourquoi cette question ? Donc, tu as exploré toutes ces questions, mais est-ce qu'il y a un début de réponse ? Est-ce qu'il y a une réponse à ça ?

  • Speaker #1

    Je n'aurais pas envie de spoiler le livre aux gens qui nous écoutent. Mais en fait, pour le dire de façon un petit peu bête, en fait, on anthropomorphise tous et toutes. l'anthropomorphisme en tant que tel, ce n'est pas forcément un phénomène qui est très bizarre. Ce que je ne m'attendais pas du tout. Pour celles et ceux qui nous écoutent, peut-être que vous avez un robot aspirateur ou un robot tondeuse, etc. Les gens qui ont ça, souvent lui donnent un nom. C'est un peu absurde. Je sais que chez mes beaux-parents, il y a un robot tondeuse, il s'appelle Bernard. On en parle un petit peu dans le livre. Il n'y a pas de raison, mais c'est quelque chose qu'on fait. Peut-être que vous avez déjà... Je ne sais pas, vous étiez dans votre voiture, en montée, votre voiture galérait un peu, vous allez dire allez titine Ça, c'est vraiment de l'anthropomorphisme. Alors vraiment, je vous garantis que vous disiez ça ou pas, votre voiture, ça ne changera que dalle. Mais on se dit qu'il y a peut-être ce petit quelque chose. Et non, l'anthropomorphisme, en fait, ça existe depuis des milliers d'années. Ça n'a pas rendu la tech pour exister. Typiquement, si on pense par exemple au dieu de l'Olympe, Zeus, par exemple, on le sait, n'avait rien de très… de cette divinité, de cette perfection divine qu'on peut imaginer. On sait que Zeus était colérique, qu'il était grassement adultère, qu'en fait, il n'était pas parfait, comme on peut l'entendre, en tout cas dans le divin monothéiste, mais qu'il était finalement assez humain dans ses comportements. Ce côté d'anthropomorphisme, en fait, ce n'est pas forcément propre à la tech. Et donc, le fait de dire bonjour à Chadjipiti et d'anthropomorphiser, ce n'est pas fondamentalement un problème. Et donc, c'est pour ça que j'ai vraiment orienté la question sur... Ok, une fois qu'on dit bonjour à la machine, la vraie question n'est pas est-ce que c'est normal qu'on lui dise bonjour ou pas ? Pour moi, la vraie question c'est si on dit bonjour à la machine comme à un être humain, est-ce qu'à un moment on ne risque pas de dire bonjour aux êtres humains comme à la machine ? Et donc de vraiment creuser, et comme je le disais là tout à l'heure, cette question de l'éthique, de la technique, d'un point de vue métaphysique, qu'est-ce que ça veut dire notre rapport à l'autre ? Qu'est-ce que ça veut dire être humain vraiment dans ce sens-là ? Et puis évidemment, d'un point de vue philosophie politique, c'est... Quel est le monde qu'on a envie de construire ? Est-ce qu'on a envie de construire un monde dans lequel, en fait, on ne parle plus avec les êtres humains ? On a une sorte de démocratie gérée par des robots, ou démocratie ou non d'ailleurs. Qu'est-ce que ça voudrait dire, faire société à l'ère de l'IA ? Et moi, c'est justement effectivement ces questions-là que j'ai voulu creuser.

  • Speaker #0

    C'est passionnant. Dans ton livre, tu donnes trois exemples. Tu parles aussi de la série Black Mirror. de l'épisode. Tu peux rappeler ce qui se passe ?

  • Speaker #1

    Pour celles et ceux qui voudraient le regarder, c'est le premier épisode de la saison 2 qui s'appelle Be Right Back, je crois. Oui, c'est ça. Sans spoiler du tout, mais dès les premières minutes de l'épisode, c'est un couple et le jeune homme décède. Le jeune homme décède et la jeune femme reste seule et au début elle ne sait pas trop comment noyer son chagrin et une amie lui parle d'une application dans laquelle elle pourrait télécharger toutes les données qu'elle a de son compagnon et du coup le faire revivre et donc discuter avec en fait cette copie factice de l'amour de sa vie et en fait moi ce qui m'a interrogé ces deux choses c'est d'une part de comprendre qu'est ce que comment est-ce qu'on en arrive là et qu'est ce que ça veut dire mais d'autre part de rappeler que ça c'est aujourd'hui quelque chose qui existe et cet épisode de black mirror il n'est pas sorti il ya très longtemps il est sorti en 2013 donc c'est à dire il ya un tout petit peu plus de dix ans Et ce qu'on appelle aujourd'hui les dead bots ou les grief bots, c'est un jeu de mots fait sur le... Est-ce que c'est un chat bot ? Un chat bot, c'est pour discuter avec un agent conversationnel. Un dead bot, c'est pour converser avec une personne qui est décédée. Et donc, ça existe de plus en plus. Il y a pas mal de reportages, notamment des personnes en Chine et au Japon, qui continuent d'échanger avec, entre autres, leurs grands-parents. mais ça peut être également leurs copains, leurs copines, leurs parents, après leur décès, grâce à toutes les informations qu'ils et elles ont récoltées sur la personne décédée et qu'ils ont nourrie dans la machine. Et ce qui m'a interrogé, c'est, mais c'est fou, c'était il y a dix ans. Il y a dix ans, les gens ont regardé Black Mirror et tout le monde s'est dit Mais quelle horreur ! Il ne faudrait surtout pas qu'on arrive là ! Dix ans plus tard, c'était une réalité. Qu'est-ce qui s'est passé ? Comment est-ce que la fiction a pu, à ce point-là, nous orienter ? pour qu'en fait, on se dise, en fait, c'est ça qu'on va créer. Est-ce que la fiction est toujours anticipatrice, oui ou non ? Voilà, ça fait partie des questions que j'essaie de poser dans le livre.

  • Speaker #0

    Et du fait qu'on devient dépassé, finalement, par cette technologie ?

  • Speaker #1

    Alors, qu'est-ce que tu entends par dépassé ?

  • Speaker #0

    Le fait que ça arrive vraiment, ça veut dire que les gens ne font plus le deuil, qu'il y a la possibilité de...

  • Speaker #1

    De nouveau, en fait, aujourd'hui, je ne sais pas. Est-ce qu'un dead bot, c'est forcément toujours mauvais ? C'est hyper difficile comme question, parce que s'il y a des gens que ça aide vraiment à passer outre un deuil très difficile, peut-être que c'est mieux. Alors Kant ne dirait sûrement pas, parce que je pense que là on ne traite pas l'humanité, en tout cas dans le cadre de la personne décédée, comme une fin en soi. Je pense qu'il y a une question de dignité qu'il faut clairement se poser. Sommer en quelque sorte des gens de revenir à la vie. Par des moyens artificiels, je trouve que c'est terrible. Je pense qu'on peut laisser les morts en paix. Mais il y a des gens qui n'arrivent pas à s'en sortir et qui, grâce à ça, sortent d'une dépression. Et c'est ça que je trouve génial avec l'éthique et l'éthique de la tech. C'est jamais blanc ou noir. C'est jamais blanc ou noir. C'est toujours complexe. C'est toujours en nuance. Ce qui, d'ailleurs, ne plaît pas toujours. Moi, je trouve que c'est très difficile d'être édicien de la technique dans un univers médiatique. Parce que tant les éditeurs, les éditrices, les journalistes, etc. mènent des propos bien tranchés. L'éthique de la tech, en tout cas selon moi, quand c'est bien fait, ce n'est pas tranché. C'est toujours compliqué, c'est toujours difficile. Et il faut justement essayer de naviguer là-dedans pour trouver les bonnes réponses. Ce qui est éminemment intéressant, mais éminemment complexe. Et donc, pour revenir à ta question, est-ce qu'on est dépassé ? Je ne sais pas. En revanche, ce qui est certain, c'est que tout va toujours plus vite. Et avant... Par exemple, entre le moment où Jules Verne écrit De la Terre à la Lune et le moment où on met un pied sur la Lune, il y a plusieurs décennies. Là, les Gravebots, il a fallu une décennie pour que d'un seul coup ça arrive. C'est toujours cette question de se dire, à quel moment est-ce qu'on va si vite pour que tout arrive ? Et si on va très vite, est-ce qu'on ne pourrait pas finir par aller trop vite ? Et c'est effectivement des questions que j'essaie de poser.

  • Speaker #0

    Et de perdre le contrôle, en fait, que la machine, il contrôle sur nous.

  • Speaker #1

    Alors,

  • Speaker #0

    de nouveau,

  • Speaker #1

    je vais t'embêter, mais moi, typiquement, le côté, on va se faire dominer par les machines, les machines vont tout nous dicter, etc. Je pense que ça vend du papier, ça vend des places de ciné, mais je pense qu'on est à des années-lumière de ce qui va vraiment se passer. Vraiment, si vous avez envie de passer une bonne soirée, vous pouvez regarder Terminator, c'est un chouette film. Mais ce n'est pas du tout, selon moi en tout cas, une sorte de bande-annonce du futur. En revanche, si vous avez vraiment envie d'avoir très très peur, vous pouvez regarder l'épisode de Black Mirror, vous pouvez regarder le film Her, dont je parle pas mal dans le livre aussi, donc H-E-R, où c'est l'histoire d'un jeune homme qui tombe amoureux d'un agent conversationnel. Ou bien vous pouvez regarder WALL-E, le petit film d'animation de Pixar et Disney, dans lequel en fait des êtres humains ont ruiné la planète. Son nom. tous et toutes dans un énorme vaisseau spatial et dans ce vaisseau spatial, ils sont tous et toutes assis dans des sortes de petits cocons, des sortes de grosses chaises roulantes, bardés d'écran, à boire et manger des sodas et des burgers toute la journée et à ne plus interagir les uns avec les autres. Et on perd le contact humain. Ça, pour moi, c'est beaucoup plus flippant que des trucs où effectivement les robots vont venir tous nous dominer, etc. En revanche, quand on parle de contrôle, je pense qu'il y a potentiellement une perte de contrôle dans ce qu'on a envie de développer. Tu vois, parfois, en fait, comme tu le disais, à force de vouloir être trop vite, parfois, effectivement, on perd le contrôle de cette vitesse et on se dit juste, OK, en fait, il faut qu'on progresse plus vite pour être meilleur que les Américains, pour être meilleur que les Chinois, pour être meilleur que les Russes, etc. Donc, on va toujours plus vite. Et on oublie de se poser cette question qui est à la fois très simple, mais à la fois très compliquée, c'est est-ce que parce qu'on peut, on doit ? Et donc, d'un point de vue technique, c'est très intéressant parce qu'il ne faut pas oublier que dans la technologie, moi je dis souvent un peu en rigolant, tu ne peux pas faire CTRL-Z, tu ne peux pas revenir en arrière. La bombe atomique, par exemple, elle est inventée, on ne peut pas la désinventer. On peut plus d'un seul coup faire un mince, en fait on aurait pas dû, c'était pas une super idée, on arrête. Et c'est pareil pour toutes les techs, on pourra jamais désinventer Chachipiti. Chachipiti, c'est là, ça existe. Et donc, dans la tech, souvent on se dit, ah bah écoute, parce qu'on peut le faire, on doit le faire et on va le faire. Et bien je suis pas certain, je pense pas que quand on peut, on doit absolument. Et je pense que du coup, ça fait qu'il y a beaucoup de questions qu'on se pose. des problèmes qu'on rencontre où assez naturellement on se dit pour résoudre ce problème là on va créer une application alors qu'en fait parfois la réponse c'est pas forcément plus de tech parfois la réponse ça peut être moins de tech et c'est ce que tu disais justement dans ton introduction et j'aimais bien c'est ici c'est Et dans mes ouvrages et dans mes écrits, il n'y a pas de technophobie, il n'y a pas de technophilie. Je pense que la tech n'est... J'avais un ami qui disait, la tech n'est ni bonne, ni mauvaise, ni neutre. Et donc, ça amène plein de questions dont on pourrait parler pendant des heures. Mais effectivement, moi, c'est ça que j'adore creuser et que j'ai essayé de développer dans mon livre.

  • Speaker #0

    On est en compagnie de Louis de Diezbach et on parle de notre rapport à la machine. Et donc, on parlait des agents conversationnels. Tu donnes aussi deux ou trois exemples dans ton livre. Tu peux nous en donner un ici, de la grand-mère, par exemple, qu'on place dans un...

  • Speaker #1

    Alors effectivement, je parle de la technologie. Et effectivement, tout le monde se dit que la technologie, c'est toujours mieux. Et donc, avec la robotique qui va évoluer, etc. L'IA, vous allez voir, c'est toujours mieux. Et un petit peu ce que je disais, on se dit que plus de textes, c'est toujours la réponse. Et effectivement, si jamais on réfléchit aux EHPAD en France, par exemple, aux Homes, etc. Aujourd'hui, il y a une vraie crise de personnel soignant. Et donc, on est en train de se dire, super, en fait, on va pouvoir mettre des robots à la place. Et donc, quand on fait ça, selon moi, en fait, on met une sorte de pansement bariolé sur une plaie ouverte. On ne résout absolument rien du problème. Le vrai problème, c'est qu'aujourd'hui, il y a une vraie crise. Du sens au niveau de qu'est-ce que c'est qu'accompagner les uns et les autres, il y a une vraie crise au niveau de la valorisation, la reconnaissance et donc du coup du personnel soignant et même d'un point de vue salarial, rémunérateur, etc. Tous ces jobs essentiels qu'on a découvert pendant le Covid et puis qui d'un seul coup en fait maintenant que le Covid est... presque terminé, ces job et social ne sont plus tellement essentiels que ça en fait, ils étaient un peu oubliés. Et donc c'est un petit peu ce que j'essaie de dire, c'est si demain grâce à l'intelligence artificielle on peut supprimer le personnel soignant et que toutes les personnes dans les homes et les EHPAD sont gérées et soignées par des robots, est-ce que c'est vraiment un progrès ? Et la question que j'essaie de poser c'est est-ce que toute innovation est forcément un progrès ? Moi je crois que non. Je crois que non et je donne effectivement un autre exemple c'est… S'il y a un jeune garçon, je crois que c'est dans le livre, il s'appelle Martin, ce jeune garçon est en décrochage scolaire, ses parents sont en plein divorce, il ne va pas bien du tout, etc. Et sa mère qui combine deux boulots, comme on le sait, ça existe, il y a beaucoup de personnes qui sont dans des situations difficiles comme ça. Et en fait, elle n'arrive pas à l'accompagner en maths et en français, elle se rend compte que son fils décroche. Et super, en fait, il y a une nouvelle intelligence artificielle qui existe et qui va pouvoir lui faire une sorte de professeur à la maison. Est-ce que c'est vraiment un progrès pour Martin ? Non, pour moi la vraie question qu'il va falloir se poser c'est comment est-ce qu'on peut faire pour qu'une mère célibataire n'ait pas à combiner deux boulots ? Comment est-ce qu'on peut faire pour que quand il y a un divorce, parce que ça existe, ça se passe au mieux et que le bien-être de l'enfant soit toujours prioritaire, d'abord pour les deux parents et ensuite vraiment pour toute la structure qui l'entoure. En fait, toutes les vraies questions pour moi c'est ça. Si après on peut avoir un truc qui lui fait des exercices personnalisés, c'est super. Mais le truc en fait c'est que quand ils ont fait une annonce sur la tech... C'est toujours avec tambours et trompettes, c'est en grande, son phare, et donc tout le monde se dit Ah génial, on a une nouvelle application qui fait ça, waouh, incroyable ! Et ça permet en fait de mettre un peu sous le tapis des questions qui sont tellement, tellement plus difficiles à gérer. C'est dur de poser la vraie question de la revalorisation du personnel soignant. C'est pas une question facile, si c'était facile ça aurait été résolu depuis hyper longtemps. C'est pas le cas. Moi je me souviens de cette image qui était assez forte C'est que je crois que c'était en début de Covid Sophie Wilmès va visiter un hôpital Et le personnel l'accueille avec une haie d'honneur Mais en lui tournant le dos Parce qu'elle avait été à l'époque responsable D'une certaine coupe dans le budget De la santé Je la blâme pas du tout, je connaissais pas les conséquences Mais c'est dire, la question de la valorisation Et des finances simplement De la santé C'est évidemment difficile. C'est une question, c'est dans les médias pratiquement tous les jours. Frank Vandenbroek en a beaucoup parlé, notamment lorsque lui-même a été ministre de l'Institut. C'est des questions qui sont compliquées. Et en fait, créer une application, par rapport à ça, ce n'est pas très difficile. Créer ChatGPT versus résoudre la crise de la santé, c'est beaucoup plus facile de créer ChatGPT. Et quand ChatGPT sort avec, comme je disais, tambours et trompettes, tout le monde est très content. Et pendant au moins quelques semaines, voire quelques mois si on gère ça bien, On ne parlera plus de la crise de la santé. Moi, j'aimerais bien qu'on parle plus de la crise de la santé et des questions sociales, sociétales, politiques derrière la tech, plutôt que de se dire, ah super, maintenant on a un nouveau modèle et au lieu d'avoir X milliards de paramètres, il en a X plus 5. C'est super et je suis ravi qu'il y ait des gens qui travaillent sur ça. Je pense que de toute façon, la technique fait plein de choses merveilleuses, que ce soit notamment dans la recherche, entre autres médicales. On sait que typiquement, l'intelligence artificielle est bien meilleure pour déceler le cancer du sein. que n'importe quel médecin, c'est une très bonne chose. C'est un vrai progrès en plus d'être une innovation. Donc, comment est-ce qu'on peut s'assurer que toute innovation soit également un progrès, mais un progrès au sens social, sociétal et politique du terme ?

  • Speaker #0

    Oui, je dirais un progrès aussi au niveau des relations qu'on entretient avec les humains, du relationnel, de la relation qu'on a avec la machine. Mais est-ce que ça n'appauvrit pas justement la relation qu'on a avec les autres, la relation qu'on a avec soi ?

  • Speaker #1

    Tout à fait. On parlait de la question métaphysique. Pour avoir un tout petit peu creusé la question, je me suis rendu compte que ce qui... selon moi, là tu trouveras plein de philosophes qui penseront différemment et c'est merveilleux, mais je pense qu'en fait vraiment ce qui nous fait humain, c'est le lien. C'est le lien à autrui. C'est pas forcément notre intelligence parce que c'est... Ce qui nous rend humain pour moi c'est le lien et moi j'aimerais qu'on se concentre plus sur ça. Et aujourd'hui, je n'ai pas l'impression que la technologie renforce notre capacité à créer du lien. Alors je pense pas que ce soit volontaire qu'on fasse l'inverse même si parfois c'est peut-être un petit peu le cas. plus facile de manipuler ou de vendre des choses à des gens qui sont seuls, à des gens qui sont en groupe, etc. Donc je pense que c'est principalement le lien sur lequel il faut qu'on se renforce à tout niveau, au niveau technique, mais donc au niveau aussi de nos politiques publiques, au niveau de ce qu'on est en train de créer, etc. Et c'est un petit peu mon propos, c'est de dire, mais est-ce que dans cette capacité à voir dans le regard de l'autre toute son altérité, toute sa différence, mais du coup qui nous permet à nous-mêmes aussi d'être dans notre altérité, dans notre différence, est-ce que ce n'est pas ça ce qu'il y a de plus merveilleux dans l'humanité ? Et je reviens justement à ce qu'on disait. Moi, je suis marié, j'ai deux enfants. Vraiment, il n'y a rien de plus merveilleux que de découvrir cette altérité qui est en plus en train de se créer avec mes enfants. Moi, je trouve que, en tout cas, je me sens dans ces cas-là profondément humain, bien plus que quand je suis en train de demander à Chedjipidi de me prendre une image pour un post sur je ne sais pas quelle plateforme.

  • Speaker #0

    Mais pour conclure, qu'est-ce que tu aurais envie de dire ? À tes enfants qui sont en train de grandir par rapport à l'avenir ? Qu'est-ce que tu auras envie de...

  • Speaker #1

    C'est une question difficile. Je pense que, comme je te disais, la technologie n'a pas de contrôle Z. De toute façon, elle sera là et je pense qu'il faut apprendre à vivre avec. Mais vivre avec, c'est aussi apprendre à vivre sans. Et donc de bien comprendre quand est-ce que c'est nécessaire et pratique et utile. Et voilà, il ne faut pas non plus devenir un vieux con. Moi, parfois, je vois des gens qui disent Ah, mais voilà, avec les nouvelles applications, etc., les gens ne savent plus lire une carte. Ce n'est pas très grave. Je l'ai honnêtement. Je n'ai aucun souci à ce que les gens ne sachent plus lire une carte. Et grâce à Google Maps, moi, je suis arrivé jusqu'ici et je suis très content. Donc, il ne faut pas non plus... Vraiment, il ne faut pas devenir un vieux con. Ça fait des milliers d'années qu'il y a des technologies ou des outils qui apparaissent, qui disparaissent, simplement parce que c'est le sens de l'histoire. Donc, il ne faut pas vouloir aller à contre-sens de l'histoire, mais il faut aussi se rappeler... qui on est, et c'est finalement très bateau. Connais-toi toi-même, ça a des milliers d'années, c'est clairement pas de moi, mais connais-toi toi-même et du coup, sois serein avec les choix que tu vas faire et continue à avancer.

  • Speaker #0

    Et toi, comment tu gères, une dernière question, comment tu gères ta technologie, ton rapport à la machine ? Est-ce que tu as des moments où tu es complètement déconnecté ?

  • Speaker #1

    J'ai quelques règles à la maison, je veux pas de téléphone devant les enfants. Pas de téléphone à table, pas de téléphone dans la chambre, j'aimerais mais je n'y arrive pas. Parce que c'est aussi mon réveil et c'est très pratique d'utiliser ça comme excuse. Donc oui, j'ai quelques règles effectivement que j'utilise. Après, de nouveau, c'est ce que je dis souvent, je ne suis pas du tout technophobe. J'ai un iPhone, je suis sur LinkedIn, je travaille pour BCG qui est quand même le numéro 1 consulting partner au monde pour tout ce qui est technologie. Je dirais...

  • Speaker #0

    Voilà, j'embrasse aussi la technologie dans tout ce qu'elle peut nous apporter de meilleur. Je parlais notamment entre autres de la recherche, etc. Il y a énormément de choses qui peuvent être faites avec la tech et je pense que c'est une très bonne chose. Mais oui, je pense que quelques règles de bonne intelligence, une approche un peu saine, ça ne fait de mal à personne. Et notamment, entre autres, avec les enfants, je pense que c'est important.

  • Speaker #1

    Bien, un tout grand merci, Louis. Donc, je rappelle ton livre, c'est Bonjour Tchadjipiti. qui a été publié aux éditions Mardaga. Donc, Louis de Diezbach, j'espère que vous avez apprécié cette émission, que ça vous a invité à vous questionner aussi sur le rapport qu'on entretient avec la machine, comment est-ce qu'on l'utilise, les questions qu'on se pose, c'est toujours très passionnant. Donc, un tout grand merci Louis. Si vous voulez plus d'infos aussi sur mes activités, parce que j'organise beaucoup de conférences, de cercles, de marches aussi, peut-être bientôt, n'hésitez pas à aller voir sur mon site www.sandrinecorbio.be et j'en profite pour remercier David Martinez pour la production de cette émission, son accueil chaleureux et professionnel. Et je vous donne rendez-vous dans 15 jours pour une prochaine émission. Si la philosophie et se poser des questions vous intéressent, rejoignez-moi au cycle de conférences que j'organise à partir du mois d'octobre sur le thème du deuil avec le docteur en philosophie Jean-Michel Longnot. Toutes les infos sont sur mon site www.sandrinecorbio.be. Vous pouvez y assister en présentiel ou en replay. Je mettrai toutes les infos sous ce lien. J'espère que ce podcast vous a aidé à se miner. Si vous avez aimé ce podcast, n'hésitez pas à le partager ou à le commenter. Et si vous voulez plus d'infos sur mes activités, n'hésitez pas à vous inscrire à ma newsletter. Je mettrai tous les liens sous ce post. Ce podcast fait aussi partie d'une émission diffusée sur Radio Alma tous les deuxièmes mardi et dernier mardi du mois. J'en profite pour remercier David Martinez pour la réalisation de ce podcast. Je m'appelle, je suis Sandrine Corbiot, j'adore faciliter les prises de conscience et le changement, et je me réjouis de vous retrouver la prochaine fois. À bientôt !

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Le numérique nous sert-il encore ou sommes-nous devenus ses esclaves ? Avec l'intelligence artificielle omniprésente dans nos vies, comment notre rapport au monde évolue-t-il ? Quel impact cela a-t-il sur notre quotidien et nos relations humaines ?


Se poser ces questions c’est remettre la relation, la conversation et l'échange au cœur de notre vie.  

Il ne s'agit pas ici d'être technophobe, mais de mieux comprendre ce qui se passe derrière les écrans et les plateformes que nous utilisons constamment. Et de questionner nos comportements et le lien humain.


Je vous propose de prendre un moment pour y réfléchir ensemble, peu importe notre âge, que l'on ait 50 ans ou pas.


Avec Louis de Diesbach, éthicien de la technique et consultant au Boston Consulting Group. Auteur des livres « Liker sa servitude » et « Bonjour ChatGPT », on prends le temps de réfléchir à la place de la technologie dans nos vies et à l'importance de remettre le lien, l'échange et le dialogue au cœur de notre existence.


Ressources :

Louis de Diesbach

Ses livres :

"Bonjour ChatGPT"

"Liker sa servitude"


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  • Speaker #0

    Bonjour et bienvenue dans "J'ai 50 ans et alors?" un podcast qui accompagne nos transitions. Je suis Sandrine Corbiau, j'adore faciliter les liens, les prises de conscience et le changement. Dans ce podcast, je vous partage des inspirations, des réflexions, des rencontres qui enrichissent mon quotidien. Pas de recettes toutes faites, juste des moments authentiques pour vous inspirer. Un rendez-vous qui fait du bien, une parenthèse qu'on s'octroie dans son quotidien pour marcher vers soi à son rythme. Bonjour et bienvenue dans cette nouvelle édition. Je suis ravie d'être avec vous aujourd'hui pour discuter du numérique qui est partout, tout le temps. On est connecté à tout moment. Et l'idée c'est... Est-ce que le numérique nous sert encore ou bien est-ce qu'on est devenus des esclaves à l'heure où l'intelligence artificielle et ChatGPT est partout, et vraiment partout dans nos vies ? Comment notre rapport au monde est-il en train de changer ? Quelle relation avons-nous avec la machine et quel impact cela a-t-il sur notre quotidien ? Et donc ce qui me plaît dans ces questions qu'on va se poser, c'est que... On va remettre la relation, la conversation et l'échange au cœur de notre vie. C'est un petit peu à ça que ces questions nous invitent. Et nous invitent aussi à repenser un certain vivre ensemble, un véritable débat de société. Alors ici, il ne s'agit pas d'être technophobe, mais plutôt de mieux comprendre ce qui se passe derrière les écrans, comment évolue toute cette technologie. pouvoir agir en conscience. Donc je vous propose de prendre un moment pour réfléchir à tout ça, peu importe notre âge, qu'on ait 50 ans ou pas. Et pour aborder ce sujet, j'ai le grand plaisir d'être avec Louis de Diesbeck, qui est éthicien et consultant au Boston Consulting Group. Et donc, il a également écrit deux ouvrages, qui est Likez sa servitude et Bonjour Tchadjipiti paru aux éditions Mardaga. Il est également conférencier sur l'éthique et la philosophie dans l'intelligence artificielle. Bonjour Louis.

  • Speaker #1

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Bienvenue et merci d'être avec nous aujourd'hui. Alors dans cette première partie d'émission, je vais te proposer, te poser des questions pour un petit peu mieux te connaître. Est-ce que tu pourrais nous expliquer un peu ton parcours ?

  • Speaker #1

    Oui, tout à fait. Alors, effectivement, tu as déjà dit pas mal de choses, peut-être même l'essentiel. Moi, j'ai toujours vécu en Belgique. J'ai d'abord fait mes études à Solvay. J'ai d'abord un background plutôt business. Et puis après, en parallèle de mon premier boulot, j'ai fait un master en éthique et en philosophie que j'ai moi-même souhaité orienter sur la philosophie de la technologie et de l'IA. Et ensuite, on s'en suivit, comme tu l'as dit, à la sortie de divers ouvrages. et la rédaction de plusieurs chroniques et tribunes dans les journaux. Une chose qui est importante que tu n'as pas dite, mais que peut-être que tu ne sais pas, je suis marié, je suis papa de deux enfants, deux jeunes enfants qui ont trois ans et un an et demi. Là, je suis bien dans le dur. Et c'est important parce qu'effectivement, je pense que le fait d'être père, en tout cas le fait de savoir qu'il y aura quelque chose après moi, indirectement, ça... Ça altère, ni pour le meilleur ni pour le pire, mais en tout cas, ça altère, ça apporte une certaine modification dans mon rapport à la technologie, puisqu'elle va, de toute évidence, former ou changer le futur. Et sachant qu'il y aura mes enfants dans ce futur-là, évidemment, mon regard sur la technologie, je pense, a changé. En tout cas, ça joue dans ce regard que je peux avoir sur la tech.

  • Speaker #0

    Est-ce que c'est ça qui fait que tu t'es spécialisé dans la tech ? Ou bien il y a un autre événement, il y a quelque chose d'autre qui fait que tu t'es spécialisé dans le... Plus spécifiquement l'éthique ?

  • Speaker #1

    Alors non, ce n'est pas mes enfants. Alors là, les gens vont être un peu déçus. C'est vraiment juste, j'ai trouvé ça intéressant. J'ai vu des documentaires là-dessus qui parlaient de l'impact de la tech. J'ai trouvé ça intéressant et j'ai voulu creuser. Et en fait, c'est tout. À côté de ça, j'avais donc dans mon master en éthique et en philo, j'avais des cours sur l'éthique de la tech. Pas beaucoup, mais un petit peu. Et les philosophes que j'ai étudiés... à l'occasion, telles que Martina Heidegger, telles que Anne Sionas notamment aussi, m'ont donné envie de creuser un peu plus la question. Et donc voilà, c'est comme ça que ça s'est fait. Mais il n'y a pas de grand événement qui pourrait venir expliquer cette passion pour l'éthique de la tech. C'est vraiment, ça a été très incrémental. J'ai vu quelque chose, ça m'intéressait, j'ai lu autre chose, j'ai trouvé ça passionnant, j'ai découvert encore autre chose. Donc voilà, ça s'est fait petit à petit, mais aujourd'hui je suis très content d'avoir choisi, je dirais, ce domaine-là, même si c'est d'une certaine façon un peu imposé à moi.

  • Speaker #0

    Et c'est quoi éthicien exactement ?

  • Speaker #1

    Alors l'éthique, c'est une branche de la philosophie. On dit souvent que la philosophie se divise en quatre grandes branches, qui sont la métaphysique, la logique, l'épistémologie et l'éthique. Et donc l'éthique, c'est, pour le dire de façon un peu grossière, les puristes m'excuseront, l'éthique, c'est de se poser la question du bien et du mal, en fait. Donc qu'est-ce qui est une bonne action, qu'est-ce qui est une mauvaise action ? Ça c'est... l'éthique. Et donc, on se doute bien que ce n'est quand même pas si simple que ça. On remonte les textes sur l'éthique aux prémices de la philosophie. On peut penser, il y a Aristote qui a écrit un texte remarquable, ça s'appelle l'éthique à Nicomac, qui survient sur plusieurs principes éthiques. On peut penser à Emmanuel Kant, à Jérémie Bentham. Il y a plusieurs philosophes qui ont pensé la question du bien et du mal. Qu'est-ce qui est une bonne action ? Qu'est-ce qui est une mauvaise action ? Est-ce qu'on peut mentir ? Est-ce qu'on ne peut pas mentir ? Enfin, voilà, toutes ces questions-là autour de l'éthique. pour peut-être ancrer ça de façon plus actuelle. Un philosophe belge qui s'appelle Gilbert Otoit, qui malheureusement nous a quittés il y a quelques années, qui disait que l'éthique de la technologie est toujours à cheval entre des questions de métaphysique et des questions de philosophie politique. Alors qu'est-ce que ça veut dire ? Ça veut dire que quand on pense à l'éthique de la tech, donc au fait que la tech est bonne ou mauvaise, eh bien ça nous force à nous poser deux questions. La question métaphysique, c'est-à-dire qu'est-ce que c'est que être humain ? Et quand on pense notamment au transhumanisme, etc., au fait que la technologie va venir altérer l'expérience humaine, c'est vrai, qu'est-ce que ça veut dire encore être humain à l'heure de l'IA ? Et au niveau de la philosophie politique, ça nous force à nous poser la question de quel est le monde qu'on a envie de créer. Et notamment quand on pense aux questions environnementales de l'IA, quand on pense aux questions sociales et sociétales, aux laissés-pour-compte notamment de la tech, aux questions de biais, aux questions de l'impact sur le modèle démocratique, etc. Évidemment que quand on pense la tech, on est obligé de penser ces questions de philosophie politique. Et moi, c'est vraiment ce que j'ai envie de faire. C'est vraiment ce que j'ai envie de faire, c'est de continuer à penser, à réfléchir, à repenser. ces questions d'éthique, du coup, donc métaphysique et de philosophie politique, autour de la technologie, dont l'intelligence artificielle est certes le buzzword du moment, mais voilà, il y a d'autres choses dans la tech que l'IA.

  • Speaker #0

    Merci, c'est passionnant de t'écouter. On a envie d'en savoir plus. Mais quelles sont les valeurs, toi, tes valeurs essentielles au quotidien, qui te drivent dans ton travail ?

  • Speaker #1

    Il y en a beaucoup. Et puis, Dieu sait que l'important, c'est les valeurs. je dirais que c'est je pense que j'ai une vraie valeur famille qui est quand même très importante j'ai une épouse exceptionnelle à laquelle mes deux ouvrages sont dédiés parce que vraiment si elle n'était pas là il n'y aurait rien de tout ça je dis souvent que j'ai trois piliers dans ma vie et elle est sûrement un des trois piliers donc j'ai vraiment une valeur famille assez importante, une valeur travail très importante, j'aime travailler vraiment ça me plaît etc et à côté de ça vraiment tout ce qui est lié à tout ça c'est la rigueur, la discipline généralement j'essaie d'être quelqu'un de très ponctuel je sais qu'aujourd'hui je suis arrivé un petit peu en retard mais d'habitude je suis quelqu'un de très ponctuel mais donc voilà c'est un petit peu toutes ces choses là qui font que je me retrouve dans les différentes éthiques qui existent, moi je me retrouve beaucoup dans l'éthique cancienne, Emmanuel Kant qui d'ailleurs alors 2024 Emmanuel Kant est né il y a pile poil 300 ans et donc effectivement moi Emmanuel Kant c'est je trouve un philosophe qui est passionnant mais qui était connu pour être extrêmement rigoureux il faisait la même promenade tous les jours à la même heure. La légende dit que ses voisins réglaient leur montre sur le passage d'Emmanuel Kant. Ce n'est pas un philosophe marrant, mais c'est un philosophe qui est extrêmement rigoureux. Je parle du principe que dans l'éthique, quand on décide si quelque chose est bon ou pas, la rigueur et la philosophie kantienne sont éminemment importantes. C'est trop facile de dire que dans certains cas, on peut, dans d'autres cas, on ne peut pas. Je trouve que ça permet à ce moment-là de justifier un peu tout et n'importe quoi. Donc la rigueur, pour moi, c'est quelque chose qui est assez important.

  • Speaker #0

    Et si tu devais retenir une chose de Kant, ce serait quoi ?

  • Speaker #1

    L'impératif catégorique. C'est-à-dire ? Je suis désolé.

  • Speaker #0

    En langage simplifié.

  • Speaker #1

    En fait, Emmanuel Kant, dans un ouvrage qui s'appelle La Fondation de la Métaphysique d'Hemmer, il explique comment est-ce qu'il faut agir. C'est un peu la base de l'éthique, c'est qu'est-ce qui est une bonne ou une mauvaise action. Et il a plusieurs formulations, mais ma préférée, il dit qu'il faut agir de telle sorte que tu traites l'humanité, non seulement dans ta propre personne, mais également dans celle d'autrui. jamais simplement comme un moyen, toujours en même temps comme une fin. Donc, jamais simplement comme un moyen, c'est-à-dire qu'il ne faut pas utiliser les gens, et il faut toujours les traiter comme des fins en soi, avec respect pour la dignité et la personne humaine. Et je pense qu'effectivement, si aujourd'hui, on agissait tous toujours de la sorte, c'est-à-dire par vrai respect de la personne humaine, je ne sais pas s'il y aurait moins de misère dans le monde, c'est à peu près mieux de dire ça, mais je pense qu'en tout cas, on serait dans la meilleure direction.

  • Speaker #0

    Et donc, comment est-ce qu'on peut faire le lien, alors, avec ton livre, justement ? Dans le respect de l'humain, ton dernier livre s'appelle Bonjour Tchadjipiti. D'abord, peut-être, pourquoi ce titre ?

  • Speaker #1

    Alors, en fait, le titre est né d'une interrogation. Donc, peut-être pour rappel, Tchadjipiti, c'est cet outil qui a été lancé par OpenAI le 30 novembre 2022. Et dès le 1er décembre, dès le lendemain, les gens... ont commencé à publier des screenshots de leurs conversations avec ChatGPT en disant regardez ce qu'il est capable de faire, regardez ce qu'il me répond, etc. Et une grande majorité commençait par bonjour ChatGPT Et ça m'a interrogé. Ça m'a interrogé parce que, de façon un peu cocasse, en tout cas je ne sais pas pour toi, mais moi je ne dis pas bonjour à ma machine à café le matin. Non. Ce qui me rassure d'un certain côté. Mais moi je ne fais pas ça. Et donc c'est un peu la question de se dire mais qui fait ça ? Qui sont ces gens qui disent bonjour à ChatGPT ? Et puis j'ai réalisé que... moi-même, quand j'utilise ChatGPT, je lui dis aussi bonjour. Pourquoi est-ce qu'on dit bonjour à ChatGPT et pourquoi est-ce que, le terme est un peu barbare, mais pourquoi est-ce qu'on anthropomorphise ? Pourquoi est-ce qu'on porte sur la technologie des traits humains ? Et donc, j'ai voulu vraiment creuser cette question-là. Platon disait que, de toute façon, la philosophie part toujours de l'étonnement, de l'émerveillement, de se demander pourquoi est-ce qu'une chose est comme ça et pas autrement. Et en fait, moi, j'ai exactement eu ça. J'ai vu... c'est ce que les gens faisaient, ça m'a étonné, ça m'a émerveillé. Je me suis dit, mais pourquoi est-ce que c'est comme ça et pas autrement ? Pourquoi est-ce que les gens disent bonjour et pourquoi est-ce qu'ils ne disent pas bonjour à leur machine à café ou à d'autres choses, etc. ? Et pourquoi est-ce que d'ailleurs les gens se disent de moins en moins bonjour entre eux, entre êtres humains ? Donc c'est toutes ces questions-là que j'ai eu envie de creuser. J'ai lu pas mal de choses sur la psychologie, des neurosciences, de la philosophie politique, évidemment. Et puis retour toujours à notre ami Emmanuel Kant. entre autres, qui vient justement poser un peu cette question de notre rapport à autrui. Donc voilà, c'est un peu tout ça que j'ai voulu creuser. Mais la question de base, c'est pourquoi est-ce qu'on dit bonjour à Chez GPT ?

  • Speaker #0

    Et donc, pourquoi cette question ? Donc, tu as exploré toutes ces questions, mais est-ce qu'il y a un début de réponse ? Est-ce qu'il y a une réponse à ça ?

  • Speaker #1

    Je n'aurais pas envie de spoiler le livre aux gens qui nous écoutent. Mais en fait, pour le dire de façon un petit peu bête, en fait, on anthropomorphise tous et toutes. l'anthropomorphisme en tant que tel, ce n'est pas forcément un phénomène qui est très bizarre. Ce que je ne m'attendais pas du tout. Pour celles et ceux qui nous écoutent, peut-être que vous avez un robot aspirateur ou un robot tondeuse, etc. Les gens qui ont ça, souvent lui donnent un nom. C'est un peu absurde. Je sais que chez mes beaux-parents, il y a un robot tondeuse, il s'appelle Bernard. On en parle un petit peu dans le livre. Il n'y a pas de raison, mais c'est quelque chose qu'on fait. Peut-être que vous avez déjà... Je ne sais pas, vous étiez dans votre voiture, en montée, votre voiture galérait un peu, vous allez dire allez titine Ça, c'est vraiment de l'anthropomorphisme. Alors vraiment, je vous garantis que vous disiez ça ou pas, votre voiture, ça ne changera que dalle. Mais on se dit qu'il y a peut-être ce petit quelque chose. Et non, l'anthropomorphisme, en fait, ça existe depuis des milliers d'années. Ça n'a pas rendu la tech pour exister. Typiquement, si on pense par exemple au dieu de l'Olympe, Zeus, par exemple, on le sait, n'avait rien de très… de cette divinité, de cette perfection divine qu'on peut imaginer. On sait que Zeus était colérique, qu'il était grassement adultère, qu'en fait, il n'était pas parfait, comme on peut l'entendre, en tout cas dans le divin monothéiste, mais qu'il était finalement assez humain dans ses comportements. Ce côté d'anthropomorphisme, en fait, ce n'est pas forcément propre à la tech. Et donc, le fait de dire bonjour à Chadjipiti et d'anthropomorphiser, ce n'est pas fondamentalement un problème. Et donc, c'est pour ça que j'ai vraiment orienté la question sur... Ok, une fois qu'on dit bonjour à la machine, la vraie question n'est pas est-ce que c'est normal qu'on lui dise bonjour ou pas ? Pour moi, la vraie question c'est si on dit bonjour à la machine comme à un être humain, est-ce qu'à un moment on ne risque pas de dire bonjour aux êtres humains comme à la machine ? Et donc de vraiment creuser, et comme je le disais là tout à l'heure, cette question de l'éthique, de la technique, d'un point de vue métaphysique, qu'est-ce que ça veut dire notre rapport à l'autre ? Qu'est-ce que ça veut dire être humain vraiment dans ce sens-là ? Et puis évidemment, d'un point de vue philosophie politique, c'est... Quel est le monde qu'on a envie de construire ? Est-ce qu'on a envie de construire un monde dans lequel, en fait, on ne parle plus avec les êtres humains ? On a une sorte de démocratie gérée par des robots, ou démocratie ou non d'ailleurs. Qu'est-ce que ça voudrait dire, faire société à l'ère de l'IA ? Et moi, c'est justement effectivement ces questions-là que j'ai voulu creuser.

  • Speaker #0

    C'est passionnant. Dans ton livre, tu donnes trois exemples. Tu parles aussi de la série Black Mirror. de l'épisode. Tu peux rappeler ce qui se passe ?

  • Speaker #1

    Pour celles et ceux qui voudraient le regarder, c'est le premier épisode de la saison 2 qui s'appelle Be Right Back, je crois. Oui, c'est ça. Sans spoiler du tout, mais dès les premières minutes de l'épisode, c'est un couple et le jeune homme décède. Le jeune homme décède et la jeune femme reste seule et au début elle ne sait pas trop comment noyer son chagrin et une amie lui parle d'une application dans laquelle elle pourrait télécharger toutes les données qu'elle a de son compagnon et du coup le faire revivre et donc discuter avec en fait cette copie factice de l'amour de sa vie et en fait moi ce qui m'a interrogé ces deux choses c'est d'une part de comprendre qu'est ce que comment est-ce qu'on en arrive là et qu'est ce que ça veut dire mais d'autre part de rappeler que ça c'est aujourd'hui quelque chose qui existe et cet épisode de black mirror il n'est pas sorti il ya très longtemps il est sorti en 2013 donc c'est à dire il ya un tout petit peu plus de dix ans Et ce qu'on appelle aujourd'hui les dead bots ou les grief bots, c'est un jeu de mots fait sur le... Est-ce que c'est un chat bot ? Un chat bot, c'est pour discuter avec un agent conversationnel. Un dead bot, c'est pour converser avec une personne qui est décédée. Et donc, ça existe de plus en plus. Il y a pas mal de reportages, notamment des personnes en Chine et au Japon, qui continuent d'échanger avec, entre autres, leurs grands-parents. mais ça peut être également leurs copains, leurs copines, leurs parents, après leur décès, grâce à toutes les informations qu'ils et elles ont récoltées sur la personne décédée et qu'ils ont nourrie dans la machine. Et ce qui m'a interrogé, c'est, mais c'est fou, c'était il y a dix ans. Il y a dix ans, les gens ont regardé Black Mirror et tout le monde s'est dit Mais quelle horreur ! Il ne faudrait surtout pas qu'on arrive là ! Dix ans plus tard, c'était une réalité. Qu'est-ce qui s'est passé ? Comment est-ce que la fiction a pu, à ce point-là, nous orienter ? pour qu'en fait, on se dise, en fait, c'est ça qu'on va créer. Est-ce que la fiction est toujours anticipatrice, oui ou non ? Voilà, ça fait partie des questions que j'essaie de poser dans le livre.

  • Speaker #0

    Et du fait qu'on devient dépassé, finalement, par cette technologie ?

  • Speaker #1

    Alors, qu'est-ce que tu entends par dépassé ?

  • Speaker #0

    Le fait que ça arrive vraiment, ça veut dire que les gens ne font plus le deuil, qu'il y a la possibilité de...

  • Speaker #1

    De nouveau, en fait, aujourd'hui, je ne sais pas. Est-ce qu'un dead bot, c'est forcément toujours mauvais ? C'est hyper difficile comme question, parce que s'il y a des gens que ça aide vraiment à passer outre un deuil très difficile, peut-être que c'est mieux. Alors Kant ne dirait sûrement pas, parce que je pense que là on ne traite pas l'humanité, en tout cas dans le cadre de la personne décédée, comme une fin en soi. Je pense qu'il y a une question de dignité qu'il faut clairement se poser. Sommer en quelque sorte des gens de revenir à la vie. Par des moyens artificiels, je trouve que c'est terrible. Je pense qu'on peut laisser les morts en paix. Mais il y a des gens qui n'arrivent pas à s'en sortir et qui, grâce à ça, sortent d'une dépression. Et c'est ça que je trouve génial avec l'éthique et l'éthique de la tech. C'est jamais blanc ou noir. C'est jamais blanc ou noir. C'est toujours complexe. C'est toujours en nuance. Ce qui, d'ailleurs, ne plaît pas toujours. Moi, je trouve que c'est très difficile d'être édicien de la technique dans un univers médiatique. Parce que tant les éditeurs, les éditrices, les journalistes, etc. mènent des propos bien tranchés. L'éthique de la tech, en tout cas selon moi, quand c'est bien fait, ce n'est pas tranché. C'est toujours compliqué, c'est toujours difficile. Et il faut justement essayer de naviguer là-dedans pour trouver les bonnes réponses. Ce qui est éminemment intéressant, mais éminemment complexe. Et donc, pour revenir à ta question, est-ce qu'on est dépassé ? Je ne sais pas. En revanche, ce qui est certain, c'est que tout va toujours plus vite. Et avant... Par exemple, entre le moment où Jules Verne écrit De la Terre à la Lune et le moment où on met un pied sur la Lune, il y a plusieurs décennies. Là, les Gravebots, il a fallu une décennie pour que d'un seul coup ça arrive. C'est toujours cette question de se dire, à quel moment est-ce qu'on va si vite pour que tout arrive ? Et si on va très vite, est-ce qu'on ne pourrait pas finir par aller trop vite ? Et c'est effectivement des questions que j'essaie de poser.

  • Speaker #0

    Et de perdre le contrôle, en fait, que la machine, il contrôle sur nous.

  • Speaker #1

    Alors,

  • Speaker #0

    de nouveau,

  • Speaker #1

    je vais t'embêter, mais moi, typiquement, le côté, on va se faire dominer par les machines, les machines vont tout nous dicter, etc. Je pense que ça vend du papier, ça vend des places de ciné, mais je pense qu'on est à des années-lumière de ce qui va vraiment se passer. Vraiment, si vous avez envie de passer une bonne soirée, vous pouvez regarder Terminator, c'est un chouette film. Mais ce n'est pas du tout, selon moi en tout cas, une sorte de bande-annonce du futur. En revanche, si vous avez vraiment envie d'avoir très très peur, vous pouvez regarder l'épisode de Black Mirror, vous pouvez regarder le film Her, dont je parle pas mal dans le livre aussi, donc H-E-R, où c'est l'histoire d'un jeune homme qui tombe amoureux d'un agent conversationnel. Ou bien vous pouvez regarder WALL-E, le petit film d'animation de Pixar et Disney, dans lequel en fait des êtres humains ont ruiné la planète. Son nom. tous et toutes dans un énorme vaisseau spatial et dans ce vaisseau spatial, ils sont tous et toutes assis dans des sortes de petits cocons, des sortes de grosses chaises roulantes, bardés d'écran, à boire et manger des sodas et des burgers toute la journée et à ne plus interagir les uns avec les autres. Et on perd le contact humain. Ça, pour moi, c'est beaucoup plus flippant que des trucs où effectivement les robots vont venir tous nous dominer, etc. En revanche, quand on parle de contrôle, je pense qu'il y a potentiellement une perte de contrôle dans ce qu'on a envie de développer. Tu vois, parfois, en fait, comme tu le disais, à force de vouloir être trop vite, parfois, effectivement, on perd le contrôle de cette vitesse et on se dit juste, OK, en fait, il faut qu'on progresse plus vite pour être meilleur que les Américains, pour être meilleur que les Chinois, pour être meilleur que les Russes, etc. Donc, on va toujours plus vite. Et on oublie de se poser cette question qui est à la fois très simple, mais à la fois très compliquée, c'est est-ce que parce qu'on peut, on doit ? Et donc, d'un point de vue technique, c'est très intéressant parce qu'il ne faut pas oublier que dans la technologie, moi je dis souvent un peu en rigolant, tu ne peux pas faire CTRL-Z, tu ne peux pas revenir en arrière. La bombe atomique, par exemple, elle est inventée, on ne peut pas la désinventer. On peut plus d'un seul coup faire un mince, en fait on aurait pas dû, c'était pas une super idée, on arrête. Et c'est pareil pour toutes les techs, on pourra jamais désinventer Chachipiti. Chachipiti, c'est là, ça existe. Et donc, dans la tech, souvent on se dit, ah bah écoute, parce qu'on peut le faire, on doit le faire et on va le faire. Et bien je suis pas certain, je pense pas que quand on peut, on doit absolument. Et je pense que du coup, ça fait qu'il y a beaucoup de questions qu'on se pose. des problèmes qu'on rencontre où assez naturellement on se dit pour résoudre ce problème là on va créer une application alors qu'en fait parfois la réponse c'est pas forcément plus de tech parfois la réponse ça peut être moins de tech et c'est ce que tu disais justement dans ton introduction et j'aimais bien c'est ici c'est Et dans mes ouvrages et dans mes écrits, il n'y a pas de technophobie, il n'y a pas de technophilie. Je pense que la tech n'est... J'avais un ami qui disait, la tech n'est ni bonne, ni mauvaise, ni neutre. Et donc, ça amène plein de questions dont on pourrait parler pendant des heures. Mais effectivement, moi, c'est ça que j'adore creuser et que j'ai essayé de développer dans mon livre.

  • Speaker #0

    On est en compagnie de Louis de Diezbach et on parle de notre rapport à la machine. Et donc, on parlait des agents conversationnels. Tu donnes aussi deux ou trois exemples dans ton livre. Tu peux nous en donner un ici, de la grand-mère, par exemple, qu'on place dans un...

  • Speaker #1

    Alors effectivement, je parle de la technologie. Et effectivement, tout le monde se dit que la technologie, c'est toujours mieux. Et donc, avec la robotique qui va évoluer, etc. L'IA, vous allez voir, c'est toujours mieux. Et un petit peu ce que je disais, on se dit que plus de textes, c'est toujours la réponse. Et effectivement, si jamais on réfléchit aux EHPAD en France, par exemple, aux Homes, etc. Aujourd'hui, il y a une vraie crise de personnel soignant. Et donc, on est en train de se dire, super, en fait, on va pouvoir mettre des robots à la place. Et donc, quand on fait ça, selon moi, en fait, on met une sorte de pansement bariolé sur une plaie ouverte. On ne résout absolument rien du problème. Le vrai problème, c'est qu'aujourd'hui, il y a une vraie crise. Du sens au niveau de qu'est-ce que c'est qu'accompagner les uns et les autres, il y a une vraie crise au niveau de la valorisation, la reconnaissance et donc du coup du personnel soignant et même d'un point de vue salarial, rémunérateur, etc. Tous ces jobs essentiels qu'on a découvert pendant le Covid et puis qui d'un seul coup en fait maintenant que le Covid est... presque terminé, ces job et social ne sont plus tellement essentiels que ça en fait, ils étaient un peu oubliés. Et donc c'est un petit peu ce que j'essaie de dire, c'est si demain grâce à l'intelligence artificielle on peut supprimer le personnel soignant et que toutes les personnes dans les homes et les EHPAD sont gérées et soignées par des robots, est-ce que c'est vraiment un progrès ? Et la question que j'essaie de poser c'est est-ce que toute innovation est forcément un progrès ? Moi je crois que non. Je crois que non et je donne effectivement un autre exemple c'est… S'il y a un jeune garçon, je crois que c'est dans le livre, il s'appelle Martin, ce jeune garçon est en décrochage scolaire, ses parents sont en plein divorce, il ne va pas bien du tout, etc. Et sa mère qui combine deux boulots, comme on le sait, ça existe, il y a beaucoup de personnes qui sont dans des situations difficiles comme ça. Et en fait, elle n'arrive pas à l'accompagner en maths et en français, elle se rend compte que son fils décroche. Et super, en fait, il y a une nouvelle intelligence artificielle qui existe et qui va pouvoir lui faire une sorte de professeur à la maison. Est-ce que c'est vraiment un progrès pour Martin ? Non, pour moi la vraie question qu'il va falloir se poser c'est comment est-ce qu'on peut faire pour qu'une mère célibataire n'ait pas à combiner deux boulots ? Comment est-ce qu'on peut faire pour que quand il y a un divorce, parce que ça existe, ça se passe au mieux et que le bien-être de l'enfant soit toujours prioritaire, d'abord pour les deux parents et ensuite vraiment pour toute la structure qui l'entoure. En fait, toutes les vraies questions pour moi c'est ça. Si après on peut avoir un truc qui lui fait des exercices personnalisés, c'est super. Mais le truc en fait c'est que quand ils ont fait une annonce sur la tech... C'est toujours avec tambours et trompettes, c'est en grande, son phare, et donc tout le monde se dit Ah génial, on a une nouvelle application qui fait ça, waouh, incroyable ! Et ça permet en fait de mettre un peu sous le tapis des questions qui sont tellement, tellement plus difficiles à gérer. C'est dur de poser la vraie question de la revalorisation du personnel soignant. C'est pas une question facile, si c'était facile ça aurait été résolu depuis hyper longtemps. C'est pas le cas. Moi je me souviens de cette image qui était assez forte C'est que je crois que c'était en début de Covid Sophie Wilmès va visiter un hôpital Et le personnel l'accueille avec une haie d'honneur Mais en lui tournant le dos Parce qu'elle avait été à l'époque responsable D'une certaine coupe dans le budget De la santé Je la blâme pas du tout, je connaissais pas les conséquences Mais c'est dire, la question de la valorisation Et des finances simplement De la santé C'est évidemment difficile. C'est une question, c'est dans les médias pratiquement tous les jours. Frank Vandenbroek en a beaucoup parlé, notamment lorsque lui-même a été ministre de l'Institut. C'est des questions qui sont compliquées. Et en fait, créer une application, par rapport à ça, ce n'est pas très difficile. Créer ChatGPT versus résoudre la crise de la santé, c'est beaucoup plus facile de créer ChatGPT. Et quand ChatGPT sort avec, comme je disais, tambours et trompettes, tout le monde est très content. Et pendant au moins quelques semaines, voire quelques mois si on gère ça bien, On ne parlera plus de la crise de la santé. Moi, j'aimerais bien qu'on parle plus de la crise de la santé et des questions sociales, sociétales, politiques derrière la tech, plutôt que de se dire, ah super, maintenant on a un nouveau modèle et au lieu d'avoir X milliards de paramètres, il en a X plus 5. C'est super et je suis ravi qu'il y ait des gens qui travaillent sur ça. Je pense que de toute façon, la technique fait plein de choses merveilleuses, que ce soit notamment dans la recherche, entre autres médicales. On sait que typiquement, l'intelligence artificielle est bien meilleure pour déceler le cancer du sein. que n'importe quel médecin, c'est une très bonne chose. C'est un vrai progrès en plus d'être une innovation. Donc, comment est-ce qu'on peut s'assurer que toute innovation soit également un progrès, mais un progrès au sens social, sociétal et politique du terme ?

  • Speaker #0

    Oui, je dirais un progrès aussi au niveau des relations qu'on entretient avec les humains, du relationnel, de la relation qu'on a avec la machine. Mais est-ce que ça n'appauvrit pas justement la relation qu'on a avec les autres, la relation qu'on a avec soi ?

  • Speaker #1

    Tout à fait. On parlait de la question métaphysique. Pour avoir un tout petit peu creusé la question, je me suis rendu compte que ce qui... selon moi, là tu trouveras plein de philosophes qui penseront différemment et c'est merveilleux, mais je pense qu'en fait vraiment ce qui nous fait humain, c'est le lien. C'est le lien à autrui. C'est pas forcément notre intelligence parce que c'est... Ce qui nous rend humain pour moi c'est le lien et moi j'aimerais qu'on se concentre plus sur ça. Et aujourd'hui, je n'ai pas l'impression que la technologie renforce notre capacité à créer du lien. Alors je pense pas que ce soit volontaire qu'on fasse l'inverse même si parfois c'est peut-être un petit peu le cas. plus facile de manipuler ou de vendre des choses à des gens qui sont seuls, à des gens qui sont en groupe, etc. Donc je pense que c'est principalement le lien sur lequel il faut qu'on se renforce à tout niveau, au niveau technique, mais donc au niveau aussi de nos politiques publiques, au niveau de ce qu'on est en train de créer, etc. Et c'est un petit peu mon propos, c'est de dire, mais est-ce que dans cette capacité à voir dans le regard de l'autre toute son altérité, toute sa différence, mais du coup qui nous permet à nous-mêmes aussi d'être dans notre altérité, dans notre différence, est-ce que ce n'est pas ça ce qu'il y a de plus merveilleux dans l'humanité ? Et je reviens justement à ce qu'on disait. Moi, je suis marié, j'ai deux enfants. Vraiment, il n'y a rien de plus merveilleux que de découvrir cette altérité qui est en plus en train de se créer avec mes enfants. Moi, je trouve que, en tout cas, je me sens dans ces cas-là profondément humain, bien plus que quand je suis en train de demander à Chedjipidi de me prendre une image pour un post sur je ne sais pas quelle plateforme.

  • Speaker #0

    Mais pour conclure, qu'est-ce que tu aurais envie de dire ? À tes enfants qui sont en train de grandir par rapport à l'avenir ? Qu'est-ce que tu auras envie de...

  • Speaker #1

    C'est une question difficile. Je pense que, comme je te disais, la technologie n'a pas de contrôle Z. De toute façon, elle sera là et je pense qu'il faut apprendre à vivre avec. Mais vivre avec, c'est aussi apprendre à vivre sans. Et donc de bien comprendre quand est-ce que c'est nécessaire et pratique et utile. Et voilà, il ne faut pas non plus devenir un vieux con. Moi, parfois, je vois des gens qui disent Ah, mais voilà, avec les nouvelles applications, etc., les gens ne savent plus lire une carte. Ce n'est pas très grave. Je l'ai honnêtement. Je n'ai aucun souci à ce que les gens ne sachent plus lire une carte. Et grâce à Google Maps, moi, je suis arrivé jusqu'ici et je suis très content. Donc, il ne faut pas non plus... Vraiment, il ne faut pas devenir un vieux con. Ça fait des milliers d'années qu'il y a des technologies ou des outils qui apparaissent, qui disparaissent, simplement parce que c'est le sens de l'histoire. Donc, il ne faut pas vouloir aller à contre-sens de l'histoire, mais il faut aussi se rappeler... qui on est, et c'est finalement très bateau. Connais-toi toi-même, ça a des milliers d'années, c'est clairement pas de moi, mais connais-toi toi-même et du coup, sois serein avec les choix que tu vas faire et continue à avancer.

  • Speaker #0

    Et toi, comment tu gères, une dernière question, comment tu gères ta technologie, ton rapport à la machine ? Est-ce que tu as des moments où tu es complètement déconnecté ?

  • Speaker #1

    J'ai quelques règles à la maison, je veux pas de téléphone devant les enfants. Pas de téléphone à table, pas de téléphone dans la chambre, j'aimerais mais je n'y arrive pas. Parce que c'est aussi mon réveil et c'est très pratique d'utiliser ça comme excuse. Donc oui, j'ai quelques règles effectivement que j'utilise. Après, de nouveau, c'est ce que je dis souvent, je ne suis pas du tout technophobe. J'ai un iPhone, je suis sur LinkedIn, je travaille pour BCG qui est quand même le numéro 1 consulting partner au monde pour tout ce qui est technologie. Je dirais...

  • Speaker #0

    Voilà, j'embrasse aussi la technologie dans tout ce qu'elle peut nous apporter de meilleur. Je parlais notamment entre autres de la recherche, etc. Il y a énormément de choses qui peuvent être faites avec la tech et je pense que c'est une très bonne chose. Mais oui, je pense que quelques règles de bonne intelligence, une approche un peu saine, ça ne fait de mal à personne. Et notamment, entre autres, avec les enfants, je pense que c'est important.

  • Speaker #1

    Bien, un tout grand merci, Louis. Donc, je rappelle ton livre, c'est Bonjour Tchadjipiti. qui a été publié aux éditions Mardaga. Donc, Louis de Diezbach, j'espère que vous avez apprécié cette émission, que ça vous a invité à vous questionner aussi sur le rapport qu'on entretient avec la machine, comment est-ce qu'on l'utilise, les questions qu'on se pose, c'est toujours très passionnant. Donc, un tout grand merci Louis. Si vous voulez plus d'infos aussi sur mes activités, parce que j'organise beaucoup de conférences, de cercles, de marches aussi, peut-être bientôt, n'hésitez pas à aller voir sur mon site www.sandrinecorbio.be et j'en profite pour remercier David Martinez pour la production de cette émission, son accueil chaleureux et professionnel. Et je vous donne rendez-vous dans 15 jours pour une prochaine émission. Si la philosophie et se poser des questions vous intéressent, rejoignez-moi au cycle de conférences que j'organise à partir du mois d'octobre sur le thème du deuil avec le docteur en philosophie Jean-Michel Longnot. Toutes les infos sont sur mon site www.sandrinecorbio.be. Vous pouvez y assister en présentiel ou en replay. Je mettrai toutes les infos sous ce lien. J'espère que ce podcast vous a aidé à se miner. Si vous avez aimé ce podcast, n'hésitez pas à le partager ou à le commenter. Et si vous voulez plus d'infos sur mes activités, n'hésitez pas à vous inscrire à ma newsletter. Je mettrai tous les liens sous ce post. Ce podcast fait aussi partie d'une émission diffusée sur Radio Alma tous les deuxièmes mardi et dernier mardi du mois. J'en profite pour remercier David Martinez pour la réalisation de ce podcast. Je m'appelle, je suis Sandrine Corbiot, j'adore faciliter les prises de conscience et le changement, et je me réjouis de vous retrouver la prochaine fois. À bientôt !

Description

Le numérique nous sert-il encore ou sommes-nous devenus ses esclaves ? Avec l'intelligence artificielle omniprésente dans nos vies, comment notre rapport au monde évolue-t-il ? Quel impact cela a-t-il sur notre quotidien et nos relations humaines ?


Se poser ces questions c’est remettre la relation, la conversation et l'échange au cœur de notre vie.  

Il ne s'agit pas ici d'être technophobe, mais de mieux comprendre ce qui se passe derrière les écrans et les plateformes que nous utilisons constamment. Et de questionner nos comportements et le lien humain.


Je vous propose de prendre un moment pour y réfléchir ensemble, peu importe notre âge, que l'on ait 50 ans ou pas.


Avec Louis de Diesbach, éthicien de la technique et consultant au Boston Consulting Group. Auteur des livres « Liker sa servitude » et « Bonjour ChatGPT », on prends le temps de réfléchir à la place de la technologie dans nos vies et à l'importance de remettre le lien, l'échange et le dialogue au cœur de notre existence.


Ressources :

Louis de Diesbach

Ses livres :

"Bonjour ChatGPT"

"Liker sa servitude"


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  • Speaker #0

    Bonjour et bienvenue dans "J'ai 50 ans et alors?" un podcast qui accompagne nos transitions. Je suis Sandrine Corbiau, j'adore faciliter les liens, les prises de conscience et le changement. Dans ce podcast, je vous partage des inspirations, des réflexions, des rencontres qui enrichissent mon quotidien. Pas de recettes toutes faites, juste des moments authentiques pour vous inspirer. Un rendez-vous qui fait du bien, une parenthèse qu'on s'octroie dans son quotidien pour marcher vers soi à son rythme. Bonjour et bienvenue dans cette nouvelle édition. Je suis ravie d'être avec vous aujourd'hui pour discuter du numérique qui est partout, tout le temps. On est connecté à tout moment. Et l'idée c'est... Est-ce que le numérique nous sert encore ou bien est-ce qu'on est devenus des esclaves à l'heure où l'intelligence artificielle et ChatGPT est partout, et vraiment partout dans nos vies ? Comment notre rapport au monde est-il en train de changer ? Quelle relation avons-nous avec la machine et quel impact cela a-t-il sur notre quotidien ? Et donc ce qui me plaît dans ces questions qu'on va se poser, c'est que... On va remettre la relation, la conversation et l'échange au cœur de notre vie. C'est un petit peu à ça que ces questions nous invitent. Et nous invitent aussi à repenser un certain vivre ensemble, un véritable débat de société. Alors ici, il ne s'agit pas d'être technophobe, mais plutôt de mieux comprendre ce qui se passe derrière les écrans, comment évolue toute cette technologie. pouvoir agir en conscience. Donc je vous propose de prendre un moment pour réfléchir à tout ça, peu importe notre âge, qu'on ait 50 ans ou pas. Et pour aborder ce sujet, j'ai le grand plaisir d'être avec Louis de Diesbeck, qui est éthicien et consultant au Boston Consulting Group. Et donc, il a également écrit deux ouvrages, qui est Likez sa servitude et Bonjour Tchadjipiti paru aux éditions Mardaga. Il est également conférencier sur l'éthique et la philosophie dans l'intelligence artificielle. Bonjour Louis.

  • Speaker #1

    Bonjour.

  • Speaker #0

    Bienvenue et merci d'être avec nous aujourd'hui. Alors dans cette première partie d'émission, je vais te proposer, te poser des questions pour un petit peu mieux te connaître. Est-ce que tu pourrais nous expliquer un peu ton parcours ?

  • Speaker #1

    Oui, tout à fait. Alors, effectivement, tu as déjà dit pas mal de choses, peut-être même l'essentiel. Moi, j'ai toujours vécu en Belgique. J'ai d'abord fait mes études à Solvay. J'ai d'abord un background plutôt business. Et puis après, en parallèle de mon premier boulot, j'ai fait un master en éthique et en philosophie que j'ai moi-même souhaité orienter sur la philosophie de la technologie et de l'IA. Et ensuite, on s'en suivit, comme tu l'as dit, à la sortie de divers ouvrages. et la rédaction de plusieurs chroniques et tribunes dans les journaux. Une chose qui est importante que tu n'as pas dite, mais que peut-être que tu ne sais pas, je suis marié, je suis papa de deux enfants, deux jeunes enfants qui ont trois ans et un an et demi. Là, je suis bien dans le dur. Et c'est important parce qu'effectivement, je pense que le fait d'être père, en tout cas le fait de savoir qu'il y aura quelque chose après moi, indirectement, ça... Ça altère, ni pour le meilleur ni pour le pire, mais en tout cas, ça altère, ça apporte une certaine modification dans mon rapport à la technologie, puisqu'elle va, de toute évidence, former ou changer le futur. Et sachant qu'il y aura mes enfants dans ce futur-là, évidemment, mon regard sur la technologie, je pense, a changé. En tout cas, ça joue dans ce regard que je peux avoir sur la tech.

  • Speaker #0

    Est-ce que c'est ça qui fait que tu t'es spécialisé dans la tech ? Ou bien il y a un autre événement, il y a quelque chose d'autre qui fait que tu t'es spécialisé dans le... Plus spécifiquement l'éthique ?

  • Speaker #1

    Alors non, ce n'est pas mes enfants. Alors là, les gens vont être un peu déçus. C'est vraiment juste, j'ai trouvé ça intéressant. J'ai vu des documentaires là-dessus qui parlaient de l'impact de la tech. J'ai trouvé ça intéressant et j'ai voulu creuser. Et en fait, c'est tout. À côté de ça, j'avais donc dans mon master en éthique et en philo, j'avais des cours sur l'éthique de la tech. Pas beaucoup, mais un petit peu. Et les philosophes que j'ai étudiés... à l'occasion, telles que Martina Heidegger, telles que Anne Sionas notamment aussi, m'ont donné envie de creuser un peu plus la question. Et donc voilà, c'est comme ça que ça s'est fait. Mais il n'y a pas de grand événement qui pourrait venir expliquer cette passion pour l'éthique de la tech. C'est vraiment, ça a été très incrémental. J'ai vu quelque chose, ça m'intéressait, j'ai lu autre chose, j'ai trouvé ça passionnant, j'ai découvert encore autre chose. Donc voilà, ça s'est fait petit à petit, mais aujourd'hui je suis très content d'avoir choisi, je dirais, ce domaine-là, même si c'est d'une certaine façon un peu imposé à moi.

  • Speaker #0

    Et c'est quoi éthicien exactement ?

  • Speaker #1

    Alors l'éthique, c'est une branche de la philosophie. On dit souvent que la philosophie se divise en quatre grandes branches, qui sont la métaphysique, la logique, l'épistémologie et l'éthique. Et donc l'éthique, c'est, pour le dire de façon un peu grossière, les puristes m'excuseront, l'éthique, c'est de se poser la question du bien et du mal, en fait. Donc qu'est-ce qui est une bonne action, qu'est-ce qui est une mauvaise action ? Ça c'est... l'éthique. Et donc, on se doute bien que ce n'est quand même pas si simple que ça. On remonte les textes sur l'éthique aux prémices de la philosophie. On peut penser, il y a Aristote qui a écrit un texte remarquable, ça s'appelle l'éthique à Nicomac, qui survient sur plusieurs principes éthiques. On peut penser à Emmanuel Kant, à Jérémie Bentham. Il y a plusieurs philosophes qui ont pensé la question du bien et du mal. Qu'est-ce qui est une bonne action ? Qu'est-ce qui est une mauvaise action ? Est-ce qu'on peut mentir ? Est-ce qu'on ne peut pas mentir ? Enfin, voilà, toutes ces questions-là autour de l'éthique. pour peut-être ancrer ça de façon plus actuelle. Un philosophe belge qui s'appelle Gilbert Otoit, qui malheureusement nous a quittés il y a quelques années, qui disait que l'éthique de la technologie est toujours à cheval entre des questions de métaphysique et des questions de philosophie politique. Alors qu'est-ce que ça veut dire ? Ça veut dire que quand on pense à l'éthique de la tech, donc au fait que la tech est bonne ou mauvaise, eh bien ça nous force à nous poser deux questions. La question métaphysique, c'est-à-dire qu'est-ce que c'est que être humain ? Et quand on pense notamment au transhumanisme, etc., au fait que la technologie va venir altérer l'expérience humaine, c'est vrai, qu'est-ce que ça veut dire encore être humain à l'heure de l'IA ? Et au niveau de la philosophie politique, ça nous force à nous poser la question de quel est le monde qu'on a envie de créer. Et notamment quand on pense aux questions environnementales de l'IA, quand on pense aux questions sociales et sociétales, aux laissés-pour-compte notamment de la tech, aux questions de biais, aux questions de l'impact sur le modèle démocratique, etc. Évidemment que quand on pense la tech, on est obligé de penser ces questions de philosophie politique. Et moi, c'est vraiment ce que j'ai envie de faire. C'est vraiment ce que j'ai envie de faire, c'est de continuer à penser, à réfléchir, à repenser. ces questions d'éthique, du coup, donc métaphysique et de philosophie politique, autour de la technologie, dont l'intelligence artificielle est certes le buzzword du moment, mais voilà, il y a d'autres choses dans la tech que l'IA.

  • Speaker #0

    Merci, c'est passionnant de t'écouter. On a envie d'en savoir plus. Mais quelles sont les valeurs, toi, tes valeurs essentielles au quotidien, qui te drivent dans ton travail ?

  • Speaker #1

    Il y en a beaucoup. Et puis, Dieu sait que l'important, c'est les valeurs. je dirais que c'est je pense que j'ai une vraie valeur famille qui est quand même très importante j'ai une épouse exceptionnelle à laquelle mes deux ouvrages sont dédiés parce que vraiment si elle n'était pas là il n'y aurait rien de tout ça je dis souvent que j'ai trois piliers dans ma vie et elle est sûrement un des trois piliers donc j'ai vraiment une valeur famille assez importante, une valeur travail très importante, j'aime travailler vraiment ça me plaît etc et à côté de ça vraiment tout ce qui est lié à tout ça c'est la rigueur, la discipline généralement j'essaie d'être quelqu'un de très ponctuel je sais qu'aujourd'hui je suis arrivé un petit peu en retard mais d'habitude je suis quelqu'un de très ponctuel mais donc voilà c'est un petit peu toutes ces choses là qui font que je me retrouve dans les différentes éthiques qui existent, moi je me retrouve beaucoup dans l'éthique cancienne, Emmanuel Kant qui d'ailleurs alors 2024 Emmanuel Kant est né il y a pile poil 300 ans et donc effectivement moi Emmanuel Kant c'est je trouve un philosophe qui est passionnant mais qui était connu pour être extrêmement rigoureux il faisait la même promenade tous les jours à la même heure. La légende dit que ses voisins réglaient leur montre sur le passage d'Emmanuel Kant. Ce n'est pas un philosophe marrant, mais c'est un philosophe qui est extrêmement rigoureux. Je parle du principe que dans l'éthique, quand on décide si quelque chose est bon ou pas, la rigueur et la philosophie kantienne sont éminemment importantes. C'est trop facile de dire que dans certains cas, on peut, dans d'autres cas, on ne peut pas. Je trouve que ça permet à ce moment-là de justifier un peu tout et n'importe quoi. Donc la rigueur, pour moi, c'est quelque chose qui est assez important.

  • Speaker #0

    Et si tu devais retenir une chose de Kant, ce serait quoi ?

  • Speaker #1

    L'impératif catégorique. C'est-à-dire ? Je suis désolé.

  • Speaker #0

    En langage simplifié.

  • Speaker #1

    En fait, Emmanuel Kant, dans un ouvrage qui s'appelle La Fondation de la Métaphysique d'Hemmer, il explique comment est-ce qu'il faut agir. C'est un peu la base de l'éthique, c'est qu'est-ce qui est une bonne ou une mauvaise action. Et il a plusieurs formulations, mais ma préférée, il dit qu'il faut agir de telle sorte que tu traites l'humanité, non seulement dans ta propre personne, mais également dans celle d'autrui. jamais simplement comme un moyen, toujours en même temps comme une fin. Donc, jamais simplement comme un moyen, c'est-à-dire qu'il ne faut pas utiliser les gens, et il faut toujours les traiter comme des fins en soi, avec respect pour la dignité et la personne humaine. Et je pense qu'effectivement, si aujourd'hui, on agissait tous toujours de la sorte, c'est-à-dire par vrai respect de la personne humaine, je ne sais pas s'il y aurait moins de misère dans le monde, c'est à peu près mieux de dire ça, mais je pense qu'en tout cas, on serait dans la meilleure direction.

  • Speaker #0

    Et donc, comment est-ce qu'on peut faire le lien, alors, avec ton livre, justement ? Dans le respect de l'humain, ton dernier livre s'appelle Bonjour Tchadjipiti. D'abord, peut-être, pourquoi ce titre ?

  • Speaker #1

    Alors, en fait, le titre est né d'une interrogation. Donc, peut-être pour rappel, Tchadjipiti, c'est cet outil qui a été lancé par OpenAI le 30 novembre 2022. Et dès le 1er décembre, dès le lendemain, les gens... ont commencé à publier des screenshots de leurs conversations avec ChatGPT en disant regardez ce qu'il est capable de faire, regardez ce qu'il me répond, etc. Et une grande majorité commençait par bonjour ChatGPT Et ça m'a interrogé. Ça m'a interrogé parce que, de façon un peu cocasse, en tout cas je ne sais pas pour toi, mais moi je ne dis pas bonjour à ma machine à café le matin. Non. Ce qui me rassure d'un certain côté. Mais moi je ne fais pas ça. Et donc c'est un peu la question de se dire mais qui fait ça ? Qui sont ces gens qui disent bonjour à ChatGPT ? Et puis j'ai réalisé que... moi-même, quand j'utilise ChatGPT, je lui dis aussi bonjour. Pourquoi est-ce qu'on dit bonjour à ChatGPT et pourquoi est-ce que, le terme est un peu barbare, mais pourquoi est-ce qu'on anthropomorphise ? Pourquoi est-ce qu'on porte sur la technologie des traits humains ? Et donc, j'ai voulu vraiment creuser cette question-là. Platon disait que, de toute façon, la philosophie part toujours de l'étonnement, de l'émerveillement, de se demander pourquoi est-ce qu'une chose est comme ça et pas autrement. Et en fait, moi, j'ai exactement eu ça. J'ai vu... c'est ce que les gens faisaient, ça m'a étonné, ça m'a émerveillé. Je me suis dit, mais pourquoi est-ce que c'est comme ça et pas autrement ? Pourquoi est-ce que les gens disent bonjour et pourquoi est-ce qu'ils ne disent pas bonjour à leur machine à café ou à d'autres choses, etc. ? Et pourquoi est-ce que d'ailleurs les gens se disent de moins en moins bonjour entre eux, entre êtres humains ? Donc c'est toutes ces questions-là que j'ai eu envie de creuser. J'ai lu pas mal de choses sur la psychologie, des neurosciences, de la philosophie politique, évidemment. Et puis retour toujours à notre ami Emmanuel Kant. entre autres, qui vient justement poser un peu cette question de notre rapport à autrui. Donc voilà, c'est un peu tout ça que j'ai voulu creuser. Mais la question de base, c'est pourquoi est-ce qu'on dit bonjour à Chez GPT ?

  • Speaker #0

    Et donc, pourquoi cette question ? Donc, tu as exploré toutes ces questions, mais est-ce qu'il y a un début de réponse ? Est-ce qu'il y a une réponse à ça ?

  • Speaker #1

    Je n'aurais pas envie de spoiler le livre aux gens qui nous écoutent. Mais en fait, pour le dire de façon un petit peu bête, en fait, on anthropomorphise tous et toutes. l'anthropomorphisme en tant que tel, ce n'est pas forcément un phénomène qui est très bizarre. Ce que je ne m'attendais pas du tout. Pour celles et ceux qui nous écoutent, peut-être que vous avez un robot aspirateur ou un robot tondeuse, etc. Les gens qui ont ça, souvent lui donnent un nom. C'est un peu absurde. Je sais que chez mes beaux-parents, il y a un robot tondeuse, il s'appelle Bernard. On en parle un petit peu dans le livre. Il n'y a pas de raison, mais c'est quelque chose qu'on fait. Peut-être que vous avez déjà... Je ne sais pas, vous étiez dans votre voiture, en montée, votre voiture galérait un peu, vous allez dire allez titine Ça, c'est vraiment de l'anthropomorphisme. Alors vraiment, je vous garantis que vous disiez ça ou pas, votre voiture, ça ne changera que dalle. Mais on se dit qu'il y a peut-être ce petit quelque chose. Et non, l'anthropomorphisme, en fait, ça existe depuis des milliers d'années. Ça n'a pas rendu la tech pour exister. Typiquement, si on pense par exemple au dieu de l'Olympe, Zeus, par exemple, on le sait, n'avait rien de très… de cette divinité, de cette perfection divine qu'on peut imaginer. On sait que Zeus était colérique, qu'il était grassement adultère, qu'en fait, il n'était pas parfait, comme on peut l'entendre, en tout cas dans le divin monothéiste, mais qu'il était finalement assez humain dans ses comportements. Ce côté d'anthropomorphisme, en fait, ce n'est pas forcément propre à la tech. Et donc, le fait de dire bonjour à Chadjipiti et d'anthropomorphiser, ce n'est pas fondamentalement un problème. Et donc, c'est pour ça que j'ai vraiment orienté la question sur... Ok, une fois qu'on dit bonjour à la machine, la vraie question n'est pas est-ce que c'est normal qu'on lui dise bonjour ou pas ? Pour moi, la vraie question c'est si on dit bonjour à la machine comme à un être humain, est-ce qu'à un moment on ne risque pas de dire bonjour aux êtres humains comme à la machine ? Et donc de vraiment creuser, et comme je le disais là tout à l'heure, cette question de l'éthique, de la technique, d'un point de vue métaphysique, qu'est-ce que ça veut dire notre rapport à l'autre ? Qu'est-ce que ça veut dire être humain vraiment dans ce sens-là ? Et puis évidemment, d'un point de vue philosophie politique, c'est... Quel est le monde qu'on a envie de construire ? Est-ce qu'on a envie de construire un monde dans lequel, en fait, on ne parle plus avec les êtres humains ? On a une sorte de démocratie gérée par des robots, ou démocratie ou non d'ailleurs. Qu'est-ce que ça voudrait dire, faire société à l'ère de l'IA ? Et moi, c'est justement effectivement ces questions-là que j'ai voulu creuser.

  • Speaker #0

    C'est passionnant. Dans ton livre, tu donnes trois exemples. Tu parles aussi de la série Black Mirror. de l'épisode. Tu peux rappeler ce qui se passe ?

  • Speaker #1

    Pour celles et ceux qui voudraient le regarder, c'est le premier épisode de la saison 2 qui s'appelle Be Right Back, je crois. Oui, c'est ça. Sans spoiler du tout, mais dès les premières minutes de l'épisode, c'est un couple et le jeune homme décède. Le jeune homme décède et la jeune femme reste seule et au début elle ne sait pas trop comment noyer son chagrin et une amie lui parle d'une application dans laquelle elle pourrait télécharger toutes les données qu'elle a de son compagnon et du coup le faire revivre et donc discuter avec en fait cette copie factice de l'amour de sa vie et en fait moi ce qui m'a interrogé ces deux choses c'est d'une part de comprendre qu'est ce que comment est-ce qu'on en arrive là et qu'est ce que ça veut dire mais d'autre part de rappeler que ça c'est aujourd'hui quelque chose qui existe et cet épisode de black mirror il n'est pas sorti il ya très longtemps il est sorti en 2013 donc c'est à dire il ya un tout petit peu plus de dix ans Et ce qu'on appelle aujourd'hui les dead bots ou les grief bots, c'est un jeu de mots fait sur le... Est-ce que c'est un chat bot ? Un chat bot, c'est pour discuter avec un agent conversationnel. Un dead bot, c'est pour converser avec une personne qui est décédée. Et donc, ça existe de plus en plus. Il y a pas mal de reportages, notamment des personnes en Chine et au Japon, qui continuent d'échanger avec, entre autres, leurs grands-parents. mais ça peut être également leurs copains, leurs copines, leurs parents, après leur décès, grâce à toutes les informations qu'ils et elles ont récoltées sur la personne décédée et qu'ils ont nourrie dans la machine. Et ce qui m'a interrogé, c'est, mais c'est fou, c'était il y a dix ans. Il y a dix ans, les gens ont regardé Black Mirror et tout le monde s'est dit Mais quelle horreur ! Il ne faudrait surtout pas qu'on arrive là ! Dix ans plus tard, c'était une réalité. Qu'est-ce qui s'est passé ? Comment est-ce que la fiction a pu, à ce point-là, nous orienter ? pour qu'en fait, on se dise, en fait, c'est ça qu'on va créer. Est-ce que la fiction est toujours anticipatrice, oui ou non ? Voilà, ça fait partie des questions que j'essaie de poser dans le livre.

  • Speaker #0

    Et du fait qu'on devient dépassé, finalement, par cette technologie ?

  • Speaker #1

    Alors, qu'est-ce que tu entends par dépassé ?

  • Speaker #0

    Le fait que ça arrive vraiment, ça veut dire que les gens ne font plus le deuil, qu'il y a la possibilité de...

  • Speaker #1

    De nouveau, en fait, aujourd'hui, je ne sais pas. Est-ce qu'un dead bot, c'est forcément toujours mauvais ? C'est hyper difficile comme question, parce que s'il y a des gens que ça aide vraiment à passer outre un deuil très difficile, peut-être que c'est mieux. Alors Kant ne dirait sûrement pas, parce que je pense que là on ne traite pas l'humanité, en tout cas dans le cadre de la personne décédée, comme une fin en soi. Je pense qu'il y a une question de dignité qu'il faut clairement se poser. Sommer en quelque sorte des gens de revenir à la vie. Par des moyens artificiels, je trouve que c'est terrible. Je pense qu'on peut laisser les morts en paix. Mais il y a des gens qui n'arrivent pas à s'en sortir et qui, grâce à ça, sortent d'une dépression. Et c'est ça que je trouve génial avec l'éthique et l'éthique de la tech. C'est jamais blanc ou noir. C'est jamais blanc ou noir. C'est toujours complexe. C'est toujours en nuance. Ce qui, d'ailleurs, ne plaît pas toujours. Moi, je trouve que c'est très difficile d'être édicien de la technique dans un univers médiatique. Parce que tant les éditeurs, les éditrices, les journalistes, etc. mènent des propos bien tranchés. L'éthique de la tech, en tout cas selon moi, quand c'est bien fait, ce n'est pas tranché. C'est toujours compliqué, c'est toujours difficile. Et il faut justement essayer de naviguer là-dedans pour trouver les bonnes réponses. Ce qui est éminemment intéressant, mais éminemment complexe. Et donc, pour revenir à ta question, est-ce qu'on est dépassé ? Je ne sais pas. En revanche, ce qui est certain, c'est que tout va toujours plus vite. Et avant... Par exemple, entre le moment où Jules Verne écrit De la Terre à la Lune et le moment où on met un pied sur la Lune, il y a plusieurs décennies. Là, les Gravebots, il a fallu une décennie pour que d'un seul coup ça arrive. C'est toujours cette question de se dire, à quel moment est-ce qu'on va si vite pour que tout arrive ? Et si on va très vite, est-ce qu'on ne pourrait pas finir par aller trop vite ? Et c'est effectivement des questions que j'essaie de poser.

  • Speaker #0

    Et de perdre le contrôle, en fait, que la machine, il contrôle sur nous.

  • Speaker #1

    Alors,

  • Speaker #0

    de nouveau,

  • Speaker #1

    je vais t'embêter, mais moi, typiquement, le côté, on va se faire dominer par les machines, les machines vont tout nous dicter, etc. Je pense que ça vend du papier, ça vend des places de ciné, mais je pense qu'on est à des années-lumière de ce qui va vraiment se passer. Vraiment, si vous avez envie de passer une bonne soirée, vous pouvez regarder Terminator, c'est un chouette film. Mais ce n'est pas du tout, selon moi en tout cas, une sorte de bande-annonce du futur. En revanche, si vous avez vraiment envie d'avoir très très peur, vous pouvez regarder l'épisode de Black Mirror, vous pouvez regarder le film Her, dont je parle pas mal dans le livre aussi, donc H-E-R, où c'est l'histoire d'un jeune homme qui tombe amoureux d'un agent conversationnel. Ou bien vous pouvez regarder WALL-E, le petit film d'animation de Pixar et Disney, dans lequel en fait des êtres humains ont ruiné la planète. Son nom. tous et toutes dans un énorme vaisseau spatial et dans ce vaisseau spatial, ils sont tous et toutes assis dans des sortes de petits cocons, des sortes de grosses chaises roulantes, bardés d'écran, à boire et manger des sodas et des burgers toute la journée et à ne plus interagir les uns avec les autres. Et on perd le contact humain. Ça, pour moi, c'est beaucoup plus flippant que des trucs où effectivement les robots vont venir tous nous dominer, etc. En revanche, quand on parle de contrôle, je pense qu'il y a potentiellement une perte de contrôle dans ce qu'on a envie de développer. Tu vois, parfois, en fait, comme tu le disais, à force de vouloir être trop vite, parfois, effectivement, on perd le contrôle de cette vitesse et on se dit juste, OK, en fait, il faut qu'on progresse plus vite pour être meilleur que les Américains, pour être meilleur que les Chinois, pour être meilleur que les Russes, etc. Donc, on va toujours plus vite. Et on oublie de se poser cette question qui est à la fois très simple, mais à la fois très compliquée, c'est est-ce que parce qu'on peut, on doit ? Et donc, d'un point de vue technique, c'est très intéressant parce qu'il ne faut pas oublier que dans la technologie, moi je dis souvent un peu en rigolant, tu ne peux pas faire CTRL-Z, tu ne peux pas revenir en arrière. La bombe atomique, par exemple, elle est inventée, on ne peut pas la désinventer. On peut plus d'un seul coup faire un mince, en fait on aurait pas dû, c'était pas une super idée, on arrête. Et c'est pareil pour toutes les techs, on pourra jamais désinventer Chachipiti. Chachipiti, c'est là, ça existe. Et donc, dans la tech, souvent on se dit, ah bah écoute, parce qu'on peut le faire, on doit le faire et on va le faire. Et bien je suis pas certain, je pense pas que quand on peut, on doit absolument. Et je pense que du coup, ça fait qu'il y a beaucoup de questions qu'on se pose. des problèmes qu'on rencontre où assez naturellement on se dit pour résoudre ce problème là on va créer une application alors qu'en fait parfois la réponse c'est pas forcément plus de tech parfois la réponse ça peut être moins de tech et c'est ce que tu disais justement dans ton introduction et j'aimais bien c'est ici c'est Et dans mes ouvrages et dans mes écrits, il n'y a pas de technophobie, il n'y a pas de technophilie. Je pense que la tech n'est... J'avais un ami qui disait, la tech n'est ni bonne, ni mauvaise, ni neutre. Et donc, ça amène plein de questions dont on pourrait parler pendant des heures. Mais effectivement, moi, c'est ça que j'adore creuser et que j'ai essayé de développer dans mon livre.

  • Speaker #0

    On est en compagnie de Louis de Diezbach et on parle de notre rapport à la machine. Et donc, on parlait des agents conversationnels. Tu donnes aussi deux ou trois exemples dans ton livre. Tu peux nous en donner un ici, de la grand-mère, par exemple, qu'on place dans un...

  • Speaker #1

    Alors effectivement, je parle de la technologie. Et effectivement, tout le monde se dit que la technologie, c'est toujours mieux. Et donc, avec la robotique qui va évoluer, etc. L'IA, vous allez voir, c'est toujours mieux. Et un petit peu ce que je disais, on se dit que plus de textes, c'est toujours la réponse. Et effectivement, si jamais on réfléchit aux EHPAD en France, par exemple, aux Homes, etc. Aujourd'hui, il y a une vraie crise de personnel soignant. Et donc, on est en train de se dire, super, en fait, on va pouvoir mettre des robots à la place. Et donc, quand on fait ça, selon moi, en fait, on met une sorte de pansement bariolé sur une plaie ouverte. On ne résout absolument rien du problème. Le vrai problème, c'est qu'aujourd'hui, il y a une vraie crise. Du sens au niveau de qu'est-ce que c'est qu'accompagner les uns et les autres, il y a une vraie crise au niveau de la valorisation, la reconnaissance et donc du coup du personnel soignant et même d'un point de vue salarial, rémunérateur, etc. Tous ces jobs essentiels qu'on a découvert pendant le Covid et puis qui d'un seul coup en fait maintenant que le Covid est... presque terminé, ces job et social ne sont plus tellement essentiels que ça en fait, ils étaient un peu oubliés. Et donc c'est un petit peu ce que j'essaie de dire, c'est si demain grâce à l'intelligence artificielle on peut supprimer le personnel soignant et que toutes les personnes dans les homes et les EHPAD sont gérées et soignées par des robots, est-ce que c'est vraiment un progrès ? Et la question que j'essaie de poser c'est est-ce que toute innovation est forcément un progrès ? Moi je crois que non. Je crois que non et je donne effectivement un autre exemple c'est… S'il y a un jeune garçon, je crois que c'est dans le livre, il s'appelle Martin, ce jeune garçon est en décrochage scolaire, ses parents sont en plein divorce, il ne va pas bien du tout, etc. Et sa mère qui combine deux boulots, comme on le sait, ça existe, il y a beaucoup de personnes qui sont dans des situations difficiles comme ça. Et en fait, elle n'arrive pas à l'accompagner en maths et en français, elle se rend compte que son fils décroche. Et super, en fait, il y a une nouvelle intelligence artificielle qui existe et qui va pouvoir lui faire une sorte de professeur à la maison. Est-ce que c'est vraiment un progrès pour Martin ? Non, pour moi la vraie question qu'il va falloir se poser c'est comment est-ce qu'on peut faire pour qu'une mère célibataire n'ait pas à combiner deux boulots ? Comment est-ce qu'on peut faire pour que quand il y a un divorce, parce que ça existe, ça se passe au mieux et que le bien-être de l'enfant soit toujours prioritaire, d'abord pour les deux parents et ensuite vraiment pour toute la structure qui l'entoure. En fait, toutes les vraies questions pour moi c'est ça. Si après on peut avoir un truc qui lui fait des exercices personnalisés, c'est super. Mais le truc en fait c'est que quand ils ont fait une annonce sur la tech... C'est toujours avec tambours et trompettes, c'est en grande, son phare, et donc tout le monde se dit Ah génial, on a une nouvelle application qui fait ça, waouh, incroyable ! Et ça permet en fait de mettre un peu sous le tapis des questions qui sont tellement, tellement plus difficiles à gérer. C'est dur de poser la vraie question de la revalorisation du personnel soignant. C'est pas une question facile, si c'était facile ça aurait été résolu depuis hyper longtemps. C'est pas le cas. Moi je me souviens de cette image qui était assez forte C'est que je crois que c'était en début de Covid Sophie Wilmès va visiter un hôpital Et le personnel l'accueille avec une haie d'honneur Mais en lui tournant le dos Parce qu'elle avait été à l'époque responsable D'une certaine coupe dans le budget De la santé Je la blâme pas du tout, je connaissais pas les conséquences Mais c'est dire, la question de la valorisation Et des finances simplement De la santé C'est évidemment difficile. C'est une question, c'est dans les médias pratiquement tous les jours. Frank Vandenbroek en a beaucoup parlé, notamment lorsque lui-même a été ministre de l'Institut. C'est des questions qui sont compliquées. Et en fait, créer une application, par rapport à ça, ce n'est pas très difficile. Créer ChatGPT versus résoudre la crise de la santé, c'est beaucoup plus facile de créer ChatGPT. Et quand ChatGPT sort avec, comme je disais, tambours et trompettes, tout le monde est très content. Et pendant au moins quelques semaines, voire quelques mois si on gère ça bien, On ne parlera plus de la crise de la santé. Moi, j'aimerais bien qu'on parle plus de la crise de la santé et des questions sociales, sociétales, politiques derrière la tech, plutôt que de se dire, ah super, maintenant on a un nouveau modèle et au lieu d'avoir X milliards de paramètres, il en a X plus 5. C'est super et je suis ravi qu'il y ait des gens qui travaillent sur ça. Je pense que de toute façon, la technique fait plein de choses merveilleuses, que ce soit notamment dans la recherche, entre autres médicales. On sait que typiquement, l'intelligence artificielle est bien meilleure pour déceler le cancer du sein. que n'importe quel médecin, c'est une très bonne chose. C'est un vrai progrès en plus d'être une innovation. Donc, comment est-ce qu'on peut s'assurer que toute innovation soit également un progrès, mais un progrès au sens social, sociétal et politique du terme ?

  • Speaker #0

    Oui, je dirais un progrès aussi au niveau des relations qu'on entretient avec les humains, du relationnel, de la relation qu'on a avec la machine. Mais est-ce que ça n'appauvrit pas justement la relation qu'on a avec les autres, la relation qu'on a avec soi ?

  • Speaker #1

    Tout à fait. On parlait de la question métaphysique. Pour avoir un tout petit peu creusé la question, je me suis rendu compte que ce qui... selon moi, là tu trouveras plein de philosophes qui penseront différemment et c'est merveilleux, mais je pense qu'en fait vraiment ce qui nous fait humain, c'est le lien. C'est le lien à autrui. C'est pas forcément notre intelligence parce que c'est... Ce qui nous rend humain pour moi c'est le lien et moi j'aimerais qu'on se concentre plus sur ça. Et aujourd'hui, je n'ai pas l'impression que la technologie renforce notre capacité à créer du lien. Alors je pense pas que ce soit volontaire qu'on fasse l'inverse même si parfois c'est peut-être un petit peu le cas. plus facile de manipuler ou de vendre des choses à des gens qui sont seuls, à des gens qui sont en groupe, etc. Donc je pense que c'est principalement le lien sur lequel il faut qu'on se renforce à tout niveau, au niveau technique, mais donc au niveau aussi de nos politiques publiques, au niveau de ce qu'on est en train de créer, etc. Et c'est un petit peu mon propos, c'est de dire, mais est-ce que dans cette capacité à voir dans le regard de l'autre toute son altérité, toute sa différence, mais du coup qui nous permet à nous-mêmes aussi d'être dans notre altérité, dans notre différence, est-ce que ce n'est pas ça ce qu'il y a de plus merveilleux dans l'humanité ? Et je reviens justement à ce qu'on disait. Moi, je suis marié, j'ai deux enfants. Vraiment, il n'y a rien de plus merveilleux que de découvrir cette altérité qui est en plus en train de se créer avec mes enfants. Moi, je trouve que, en tout cas, je me sens dans ces cas-là profondément humain, bien plus que quand je suis en train de demander à Chedjipidi de me prendre une image pour un post sur je ne sais pas quelle plateforme.

  • Speaker #0

    Mais pour conclure, qu'est-ce que tu aurais envie de dire ? À tes enfants qui sont en train de grandir par rapport à l'avenir ? Qu'est-ce que tu auras envie de...

  • Speaker #1

    C'est une question difficile. Je pense que, comme je te disais, la technologie n'a pas de contrôle Z. De toute façon, elle sera là et je pense qu'il faut apprendre à vivre avec. Mais vivre avec, c'est aussi apprendre à vivre sans. Et donc de bien comprendre quand est-ce que c'est nécessaire et pratique et utile. Et voilà, il ne faut pas non plus devenir un vieux con. Moi, parfois, je vois des gens qui disent Ah, mais voilà, avec les nouvelles applications, etc., les gens ne savent plus lire une carte. Ce n'est pas très grave. Je l'ai honnêtement. Je n'ai aucun souci à ce que les gens ne sachent plus lire une carte. Et grâce à Google Maps, moi, je suis arrivé jusqu'ici et je suis très content. Donc, il ne faut pas non plus... Vraiment, il ne faut pas devenir un vieux con. Ça fait des milliers d'années qu'il y a des technologies ou des outils qui apparaissent, qui disparaissent, simplement parce que c'est le sens de l'histoire. Donc, il ne faut pas vouloir aller à contre-sens de l'histoire, mais il faut aussi se rappeler... qui on est, et c'est finalement très bateau. Connais-toi toi-même, ça a des milliers d'années, c'est clairement pas de moi, mais connais-toi toi-même et du coup, sois serein avec les choix que tu vas faire et continue à avancer.

  • Speaker #0

    Et toi, comment tu gères, une dernière question, comment tu gères ta technologie, ton rapport à la machine ? Est-ce que tu as des moments où tu es complètement déconnecté ?

  • Speaker #1

    J'ai quelques règles à la maison, je veux pas de téléphone devant les enfants. Pas de téléphone à table, pas de téléphone dans la chambre, j'aimerais mais je n'y arrive pas. Parce que c'est aussi mon réveil et c'est très pratique d'utiliser ça comme excuse. Donc oui, j'ai quelques règles effectivement que j'utilise. Après, de nouveau, c'est ce que je dis souvent, je ne suis pas du tout technophobe. J'ai un iPhone, je suis sur LinkedIn, je travaille pour BCG qui est quand même le numéro 1 consulting partner au monde pour tout ce qui est technologie. Je dirais...

  • Speaker #0

    Voilà, j'embrasse aussi la technologie dans tout ce qu'elle peut nous apporter de meilleur. Je parlais notamment entre autres de la recherche, etc. Il y a énormément de choses qui peuvent être faites avec la tech et je pense que c'est une très bonne chose. Mais oui, je pense que quelques règles de bonne intelligence, une approche un peu saine, ça ne fait de mal à personne. Et notamment, entre autres, avec les enfants, je pense que c'est important.

  • Speaker #1

    Bien, un tout grand merci, Louis. Donc, je rappelle ton livre, c'est Bonjour Tchadjipiti. qui a été publié aux éditions Mardaga. Donc, Louis de Diezbach, j'espère que vous avez apprécié cette émission, que ça vous a invité à vous questionner aussi sur le rapport qu'on entretient avec la machine, comment est-ce qu'on l'utilise, les questions qu'on se pose, c'est toujours très passionnant. Donc, un tout grand merci Louis. Si vous voulez plus d'infos aussi sur mes activités, parce que j'organise beaucoup de conférences, de cercles, de marches aussi, peut-être bientôt, n'hésitez pas à aller voir sur mon site www.sandrinecorbio.be et j'en profite pour remercier David Martinez pour la production de cette émission, son accueil chaleureux et professionnel. Et je vous donne rendez-vous dans 15 jours pour une prochaine émission. Si la philosophie et se poser des questions vous intéressent, rejoignez-moi au cycle de conférences que j'organise à partir du mois d'octobre sur le thème du deuil avec le docteur en philosophie Jean-Michel Longnot. Toutes les infos sont sur mon site www.sandrinecorbio.be. Vous pouvez y assister en présentiel ou en replay. Je mettrai toutes les infos sous ce lien. J'espère que ce podcast vous a aidé à se miner. Si vous avez aimé ce podcast, n'hésitez pas à le partager ou à le commenter. Et si vous voulez plus d'infos sur mes activités, n'hésitez pas à vous inscrire à ma newsletter. Je mettrai tous les liens sous ce post. Ce podcast fait aussi partie d'une émission diffusée sur Radio Alma tous les deuxièmes mardi et dernier mardi du mois. J'en profite pour remercier David Martinez pour la réalisation de ce podcast. Je m'appelle, je suis Sandrine Corbiot, j'adore faciliter les prises de conscience et le changement, et je me réjouis de vous retrouver la prochaine fois. À bientôt !

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