- Speaker #0
Bonjour et bienvenue dans J'ai 50 ans et alors, un podcast qui accompagne nos transitions. Je suis Sandrine Corbiot, j'adore faciliter les liens, les prises de conscience et le changement. Dans ce podcast, je vous partage des inspirations, des réflexions, des rencontres qui enrichissent mon quotidien. Pas de recettes toutes faites, juste des moments authentiques pour vous inspirer. Un rendez-vous qui fait du bien, une parenthèse qu'on s'octroie dans son quotidien pour marcher vers soi à son rythme. Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode. Alors aujourd'hui, on va parler du couple et de la sexualité. Alors c'est un sujet qui, quand on traverse la transition du milieu de vie... m'a semblé important parce que quand on traverse cette transition, on est dans un mouvement qui est quasi universel, qui se passe en nous, à l'intérieur de nous, et qui cherche à mettre plus de sens, à se connecter à quelque chose de plus grand, à retrouver aussi un certain équilibre. C'est un mouvement intérieur qui nous questionne et qui impacte nos relations aux autres et inévitablement peut-être aussi notre couple. Alors c'est peut-être aussi une période qui nous invite à réinventer son couple. Pour parler de ce sujet, j'ai la chance d'accueillir aujourd'hui avec nous Alain Héril, qui est psychothérapeute, sexothérapeute et formateur, auteur de nombreux ouvrages sur l'amour, la sexualité, la joie. J'ai d'ailleurs eu la grande joie d'accueillir déjà Alain Héril pour des conférences justement sur le thème de la joie. ou de l'amour et la sexualité chez les ados, que vous pouvez retrouver sur mon site. Et aujourd'hui, on va se questionner sur plutôt la qualité relationnelle dans le couple et sa dimension sacrée. Et plus spécifiquement autour de son livre que j'ai beaucoup aimé, qui s'appelle On ne fait pas l'amour, c'est l'amour qui nous fait Un livre qui est paru aux éditions Le Courrier du Livre. Et il y a également un oracle sur la sexualité sacrée avec de magnifiques illustrations. On en parlera tout au long de l'émission. Donc que vous soyez en couple depuis de nombreuses années ou pas et que vous cherchiez à enrichir votre vie affective, je suis ravie d'initier cette discussion qui, j'espère, ouvrira des pistes de réflexion sur le couple et sa dimension sacrée. Bonjour Alain Héril et bienvenue.
- Speaker #1
Bonjour et merci de m'accueillir pour parler de ce sujet. Je suis là avec grand plaisir.
- Speaker #0
Merci d'avoir accepté d'être avec nous. Alors comme à chaque fois dans cette émission, je prends un temps pour faire connaissance avec l'invité. Donc je vous propose Alain de nous expliquer un petit peu votre parcours, votre histoire, qu'est-ce qui fait que vous êtes intéressé ? à toutes ces questions autour de la psychothérapie, sexothérapie, quel est votre parcours ?
- Speaker #1
Alors mon parcours, pour faire au plus simple, parce que j'ai comme beaucoup de personnes un parcours qui est un peu atypique, j'ai commencé de manière tout à fait simple, puisque j'ai une formation universitaire, je suis psychologue clinicien, j'ai fait une formation de psycho à la fac à Paris 3. Et puis, j'ai aussi une formation en philosophie que j'ai faite à Paris 12. Donc, j'étais destiné à être professeur de philo. C'était un peu mon objectif. Et puis, il s'avère que j'ai rencontré le théâtre. Et pendant 15 ans, j'ai complètement laissé tomber tout ce qui était de l'ordre de la philosophie, de la psychologie pour être comédien et surtout metteur en scène de théâtre professionnel. C'était mon métier pendant 15 ans. Et puis, les aléas de la vie m'ont ramené vers la psycho. Donc, j'ai fait une psychanalyse personnelle. Et puis, j'ai ouvert un cabinet et j'ai commencé à consulter. Et au départ, j'ai consulté en étant psychologue. Et il s'avère que j'ai eu beaucoup de patients, de patientes. de couples également, d'ados qui sont venus me voir avec des problématiques liées à leur sexualité, à leur rapport au désir. Et donc, comme je pensais ne pas être suffisamment formé sur ces terrains-là, j'ai fait une formation en sexothérapie avec Suzanne Kepes. qui est la personne qui a d'une certaine manière inventé le terme de sexothérapie. Et donc, je me suis formée en tant que sexothérapeute, et ce qui fait que j'ai pris ce virage-là, et que donc dans mon cabinet, j'ai été amenée à accompagner, à écouter les problématiques sexuelles des hommes, des femmes et des couples, parce que j'ai une formation de thérapeute de couple que j'ai faite avec Moni El-Kaïm. Et donc... Et donc, en fait, naturellement, la sexualité est devenue le centre des débats au sein de mon cabinet. Donc, ce sont mes patients qui m'ont amené à la sexothérapie, parce que les demandes étaient urgentes, précises, nombreuses, et qu'il fallait que je puisse m'accorder à ces demandes-là pour accompagner au mieux mes patients et mes patientes. Donc, voilà, dans les grandes lignes. Et puis, je suis devenu formateur. tout à fait naturellement et à l'heure actuelle je ne consulte plus, je fais essentiellement de la formation, je suis à, semble-t-il, à l'âge de la transmission, donc je forme en université et puis aussi dans des organismes privés des sexothérapeutes, donc des thérapeutes qui sont déjà installés, qui viennent faire cette spécialisation. avec moi et où on travaille la question du désir, la question des fantasmes, la question des pulsions et bien entendu la question du couple aussi qui est au centre du débat. Voilà. Et je suis formateur maintenant depuis près de 25 ans. Voilà. Donc, comme vous le disiez, j'ai commis quelques livres sur ces sujets-là. Voilà. C'est-à-dire que... Moi, j'ai un credo qui est presque un mantra que je dis à chaque fois quand je commence un cours. C'est une phrase du philosophe Gilles Deleuze qui dit on n'enseigne pas ce que l'on sait, on enseigne ce que l'on cherche Oui,
- Speaker #0
mais j'allais justement vous poser cette question. Alors, qu'est-ce que ça vous inspire ?
- Speaker #1
C'est-à-dire que la sexualité est un domaine de recherche. C'est-à-dire que très bizarrement, on pourrait penser que... que la sexualité est quelque chose de naturel chez l'être humain. En fait, ce qui est naturel, ce qui est inscrit au niveau instinctif chez nous, c'est plutôt la perpétuation de l'espèce. Mais la sexualité en tant que telle, la sexualité comme élément émotionnel, comme élément de rencontre, comme élément de rapport à soi et de rapport à l'autre, ça fait partie de notre histoire, de nos rencontres, de nos expériences, de notre culture, de notre morale, de notre éducation. Tout ça va jouer et bien entendu... que la sexualité est au cœur de la rencontre avec l'autre et que la sexualité, elle est au cœur du couple, mais souvent sous forme d'interrogations. Il y a beaucoup d'interrogations autour de la sexualité. Qu'est-ce qu'une sexualité épanouit ? À quoi sert le désir ? À quoi sert le plaisir ? Qu'est-ce que ça raconte de la rencontre des corps à l'intérieur de la sexualité ? C'est-à-dire que moi, ce qui me passionne dans la sexualité, c'est justement... tous ces espaces d'interrogation, parce que je n'ai pas la prétention de savoir ce qu'est une sexualité épanouie pour tout le monde. Je n'ai pas le mode d'emploi, je n'ai pas la baguette magique, mais néanmoins, mon travail, c'est de m'interroger sur ces terrains-là et puis d'essayer de comprendre, surtout dans le monde qui est le nôtre, beaucoup de choses. avance, ça part un petit peu dans tous les sens d'ailleurs, d'essayer d'aider les personnes, notamment les couples. Et puis vous parliez du milieu de vie, qui est un moment où effectivement on s'interroge beaucoup sur la sexualité parce qu'on a une vie sexuelle passée, dans laquelle on a rencontré des choses, on a vécu des choses. Et puis il y a tout le temps qu'il y a devant nous. Et qu'est-ce qu'on va faire avec ce temps ? Et qu'est-ce qu'on va faire dans ce temps-là, avec son désir et puis avec la... la rencontre avec l'autre, le cheminement avec l'autre. Et c'est vrai qu'arrivé à ces âges-là, en général, c'est ce que j'ai rencontré, c'est ce que j'ai pu vivre moi-même. On se pose la question d'une autre sexualité, d'un autre regard sur la sexualité, qui va être peut-être un regard moins pulsionnel, moins systématique, mais plus avec de la conscience, de la réflexion. Et je trouve que c'est une période dans le couple et dans l'aventure d'un être humain qui est absolument extraordinaire, justement par rapport à la sexualité, parce que ça va interroger tout un tas d'éléments, les émotions, le corps, la relation, et puis le rapport à l'énergie sexuelle aussi. On est dans un espace de questionnement avec la sexualité, de questionnement actif, bien entendu. Et la sexualité n'est pas quelque chose qui nous laisse tranquille. La sexualité vient continuellement nous questionner sur nous-mêmes et je trouve que c'est une excellente chose dans le cheminement d'un être humain.
- Speaker #0
C'est passionnant, donc on va aller un petit peu au cœur de tout ça. Mais avant ça, je voulais… Vous parlez beaucoup de psychothérapie intégrative. Qu'est-ce que c'est exactement et en quoi est-ce important pour vous ?
- Speaker #1
Alors, c'est important pour moi parce que moi, pour faire rapidement, j'ai beaucoup côtoyé le milieu psychanalytique et j'ai beaucoup côtoyé en fait les chapelles psychanalytiques. Si vous faites partie d'un courant, vous êtes en accord avec les gens du même courant que vous, et les gens d'un autre courant, ce sont quasiment des ennemis, des étrangers à qui il ne faut pas parler, tout ça. Et moi, ça m'a beaucoup choqué, ce clivage-là, qu'on ne trouve pas que dans la psychanalyse. Et donc, je me suis intéressé à ce qu'on appelle la psychanalyse intégrative ou la psychothérapie intégrative, qui est en fait le fait d'aller chercher... plutôt les complémentarités que les dissensions ou que les éloignements. C'est-à-dire que par rapport à la psychanalyse, en psychanalyse intégrative, on parle de Freud, mais on parle aussi de Lacan, on parle aussi de Wilhelm Reich, on parle aussi de Jung. On essaye d'ouvrir le regard sur un questionnement différent suivant les auteurs, sur l'inconscient. Donc, moi, ce qui m'intéresse, c'est cette diversité de points de vue. qui rend les choses très complexes, bien entendu, mais qui en même temps, à mon avis, nous rendent plus intelligents. C'est-à-dire de savoir qu'il n'y a pas qu'une seule manière de regarder les choses, il y en a plusieurs, et puis que tout ça, ça bouge avec le temps, ça bouge avec la vie, ça bouge avec les expériences également. Et pour revenir sur le terrain de la sexualité, oui, Freud a posé un certain nombre de choses, mais Freud, il est mort en 1939, on est en 2024, donc il y a un autre regard, les choses, elles ont changé, propositions et ouvrir son regard dans un sens intégratif, c'est-à-dire intégrer d'autres visions, les confronter les unes aux autres. C'est une manière d'essayer de se rapprocher au mieux, non pas de la vérité, ça serait un peu présomptueux de dire ça, mais de s'approcher d'une meilleure connaissance des fonctionnements humains, d'autant plus que d'une culture à l'autre, on a des regards différents. Donc, c'est de prendre en compte ces différences-là et de faire en sorte que ces différences soient les plus dynamiques possibles pour essayer de comprendre ce grand mystère qu'est l'être humain, son fonctionnement, ses méandres, ses ombres et ses lumières. Et c'est ça qui est en jeu. Ce qui fait que dans mes cours, par exemple, je peux parler de Freud, je peux parler de Jung, mais je peux aussi parler de penseurs spiritualistes comme Krishnamurti, par exemple. Et pour moi, ce n'est pas quelque chose qui est incongru. Au contraire, ce sont des éléments qui sont des éléments de complémentarité. Et c'est la vision que j'ai de l'intégratif. C'est-à-dire, c'est intégrer des éléments qui regardent la même chose de manière complètement différente.
- Speaker #0
Oui, ça me fait penser à la médecine intégrative. C'est un peu la même chose. C'est prendre tout un ensemble de... de bonnes choses et de faire fructifier ensemble l'un avec l'autre plutôt que l'un contre l'autre. On pourrait dire qu'une de vos valeurs clés, c'est ouvrir son regard ?
- Speaker #1
C'est ouvrir son regard et c'est rechercher les correspondances, de voir comment un discours va correspondre avec un autre discours. Je ne suis pas en train de dire que tout ressemble à tout, mais en même temps, en recherchant ces correspondances, on ouvre son regard, on ouvre ses perceptions. Et à mon avis, on se rapproche de quelque chose d'un peu plus intelligent que de défendre un seul axe, une seule vision qui serait considérée comme étant universelle. En tout cas, c'est le propos. C'est vers ça que je vais. Je ne suis pas le seul partisan de la médecine intégrative ou de la psychothérapie intégrative, mais je pense que c'est l'avenir, en tout cas, que c'est là que ça se situe. Et donc, en tout cas, moi, je dirige à Paris un centre de formation en psychothérapie intégrative. Et c'est le travail que je fais avec les gens qui m'accordent leur confiance sur ces projets-là.
- Speaker #0
Eh bien, ça rejoint un petit peu les valeurs du podcast ici. Moi, j'essaye aussi d'élargir les regards. Il n'y a pas une et une seule façon d'aborder ces transitions du milieu de vie. Il y a plein de questionnements, il y a plein d'approches, il y a plein de choses qu'on peut mettre en commun et c'est passionnant. Est-ce que vous pourriez maintenant nous dire pourquoi vous avez choisi le titre de ce livre ? On ne fait pas l'amour, c'est l'amour qui nous fait. Pourquoi ce titre ?
- Speaker #1
Parce qu'il me semble que, alors ça joue beaucoup sur le milieu de vie me semble-t-il, mais il me semble que dans tous les couples que j'ai reçus, il y avait deux questions qui se posaient. Il y avait la question bien sûr du désir, du plaisir, de la sexualité, mais il y avait aussi la question de l'amour. C'est-à-dire qu'est-ce que c'est que l'amour, qu'est-ce que c'est qu'aimer l'autre, qu'être aimé par l'autre ? Ce sont des questions autour desquelles l'humanité tourne depuis très longtemps. Mais toujours est-il que dans cette vision de la sexualité que propose mon livre, il y a l'idée que nous sommes au service de quelque chose et que nous sommes au service de l'amour. C'est-à-dire que lorsque deux personnes se rencontrent dans un désir, dans une relation sexuelle, il y a quelque chose qui passe à travers eux. Et ce qui passe à travers eux, c'est le flux de l'amour, c'est l'énergie de l'amour. Et qu'en fait... ce qui va nous transformer, ce qui va nous élever d'une certaine manière, c'est cette rencontre avec l'amour que, à mon sens, nous portons toutes et tous à l'intérieur de nous depuis notre arrivée au monde. Et c'est comment, en fait, une relation sexuelle n'est pas simplement le lieu de recherche du plaisir, de l'orgasme, mais c'est aussi le lieu de la rencontre avec l'autre et de la rencontre aussi à travers deux corps, de la rencontre avec quelque chose de plus grand que nous. Donc ça c'est l'amour, c'est-à-dire que c'est l'amour qui nous fait. C'est-à-dire que dans l'expression faire l'amour ça laisse entendre que nous avons la capacité de fabriquer l'amour dans la rencontre avec l'autre et je prends un peu le contre-pied de ça, de dire non, nous nous mettons au service de quelque chose qui passe à travers nous et que je nomme amour dans le livre.
- Speaker #0
D'où cette appellation du couple sacré, c'est ça le sacré ?
- Speaker #1
Oui, le sacré, alors bien entendu, évidemment je ne parle pas de religion dans le sens premier du terme, je parle plutôt de spiritualité, c'est-à-dire de recherche d'une énergie à l'intérieur de laquelle on serait magnifié l'un et l'autre. Et cette dimension de sacré, elle est liée au fait que... de considérer la sexualité comme étant un lieu privilégié de rencontre avec l'autre. Alors ça va un peu à l'encontre d'une sexualité essentiellement pulsionnelle, où on chercherait à tout prix l'obtention d'un plaisir, d'un orgasme, à partir duquel le projet serait réalisé et que l'acte sexuel serait terminé. Non, ce n'est pas ça qui est en jeu. Ce qui est en jeu dans la dimension sacrée, c'est vraiment la manière dont on se met en rencontre avec l'autre et dont l'autre se met en rencontre avec nous. Donc du coup, ça va ritualiser la sexualité de manière un peu différente et ça va mettre aussi de la conscience et avec un certain nombre d'éléments dont je parle dans le livre et notamment un élément qui est très important qui est le ralentissement, qui est le fait d'être dans un rapport sexuel qui soit ralenti. Alors, ralenti, ça ne veut pas dire qu'on est en suspension et qu'on fait les choses moins vite qu'à l'habitude. C'est juste que dans le ralentissement, il y a des éléments qui vont se mettre en place, la manière de toucher l'autre, la manière de le regarder, la manière de l'appréhender, et qui vont amener cette dimension sacrée. Donc, la sacralisation de la sexualité, elle passe vraiment par un accroissement de la... la conscience qu'il y a à être avec l'autre et que l'autre soit avec soi-même. Ce qui va modifier beaucoup de choses, notamment dans l'engagement qu'on va mettre en place dans une relation sexuelle. C'est-à-dire que la sexualité n'est plus une sexualité dite génitale où c'est simplement le frottement de muqueuse qui va être intéressant. Il va y avoir autre chose qui va se mettre en jeu. Le frottement de muqueuse est intéressant, bien entendu, mais je pense que quand on arrive en milieu de vie, On a déjà testé ça. On a déjà testé la sexualité qui est le plaisir pour le plaisir. Et je pense qu'à ce moment-là, on demande autre chose à la sexualité et on a besoin que la sexualité nous apporte autre chose.
- Speaker #0
Est-ce que c'est en lien avec le thème de… Est-ce que c'est en lien avec une certaine forme de joie ?
- Speaker #1
Ah, oh que oui ! Oh que oui ! C'est-à-dire que la sexualité et la joie sont… deux éléments qui sont concomitants, qui vont normalement ensemble, et c'est une forme de joie, je dirais même que c'est une forme de jubilation. C'est-à-dire, c'est trouver une jubilation dans le fait de participer à ce moment sexuel avec l'autre. Il y a vraiment quelque chose qui est de cet ordre-là. Et d'une certaine manière, c'est bien de faire l'amour ensemble, mais c'est bien de faire l'humour ensemble. Donc d'être dans une dimension où il y a une joie des corps, une joie des regards, une joie des mains dans ce moment sexuel. Et pour moi, en tout cas, je fais un lien entre la dimension sacrée et la joie, qui pour moi est un lien qui est naturel et qu'on ne va pas trouver dès le début de sa vie sexuelle. Parce que le début de sa vie sexuelle, souvent, et c'est très en lien avec les injonctions sociétales, est sous le joug de la performance, du scénario qu'il faudrait répéter à chaque fois. La joie, c'est l'acceptation de l'imprévu, c'est l'acceptation de l'inattendu, c'est l'acceptation de la surprise, c'est l'acceptation de la curiosité. Et tous ces éléments-là participent pour moi à la dimension sacrée de la relation sexuelle.
- Speaker #0
Dans votre livre, vous parlez aussi du féminin masculin sacré, un équilibre à trouver. Est-ce que vous pourriez, enfin à trouver, ce n'est pas un but en soi, mais est-ce que vous pourriez nous expliquer un petit peu ces notions de féminin sacré, masculin sacré qu'on a tous en nous en fait ?
- Speaker #1
Bien sûr. C'est-à-dire que là, je rejoins la pensée de Carl Gustav Jung qui parlait du fait qu'un homme a naturellement à l'intérieur de lui une dimension. féminine qui s'appelle l'anima, et une femme a naturellement à l'intérieur d'elle une dimension masculine qui s'appelle l'animus. Mais ces dimensions-là dont parle Jung, il les inscrit sur un terrain sacré, sur un terrain de spiritualité. Donc en fait, quand on a une relation sexuelle, hétérosexuelle, il y a un homme et une femme, et puis il y a aussi leurs dimensions masculines et féminines qui sont en jeu. Et donc l'alliance entre tous ces éléments-là... c'est ce qui va créer aussi la puissance et la force d'une relation sexuelle. Mais il faut déjà les avoir équilibrés à l'intérieur de soi. C'est-à-dire que dans le travail que l'on fait sur soi, il est évident que si on est un homme, c'est d'équilibrer aussi son rapport à son féminin, donc de rencontrer son féminin. Et un homme qui rencontre son féminin, ce n'est pas simplement parce qu'il fait la vaisselle et le ménage, ça c'est un peu caricatural, c'est parce qu'il va rencontrer à l'intérieur de lui les dimensions de douceur, de vulnérabilité. Et chez une femme, la rencontre avec son masculin, c'est de rencontrer les dimensions de puissance, de force. Et donc là, on est complètement dans la pensée de Jung. Et la sexualité, c'est aussi un lieu pour rencontrer ces espaces de soi et les partager avec l'autre. Donc ça, c'est un axe qui est vraiment important et qui prend du temps. dans sa vie personnelle.
- Speaker #0
Quand on vous écoute, on a l'impression que le couple, alors, c'est un lieu de croissance personnelle, et à deux en même temps. Il y a une citation de Christine Saint-Gé que vous citez dans votre livre, c'est tant que nous ne sommes pas en amour avec nous-mêmes, nous sommes un danger pour les autres
- Speaker #1
Oui, c'est-à-dire que c'est une femme dont j'aime beaucoup l'œuvre. Et cette phrase, je l'ai reprise parce que ça laisse entendre que nous avons besoin de déblayer beaucoup de choses dans nos vies personnelles et que ça, c'est un travail qui se fait de soi à soi. Sinon, on va demander au couple de remplir ce travail-là et l'autre va devenir notre thérapeute et pas notre compagnon, notre compagne. Donc, c'est important d'avoir regardé ses propres ombres. sa propre lumière également, de l'avoir équilibrée dans un travail personnel et que la rencontre avec l'autre se fasse sans qu'il y ait la demande faite à l'autre, que l'autre nous répare, que l'autre puisse être notre infirmier, notre infirmière, notre médecin. C'est simplement que l'autre soit un autre et que cette rencontre-là se fait avec des éléments qui sont apaisés à l'intérieur de soi. Et cet apaisement passe par un équilibrage de ces dimensions masculines et féminines intérieures, mais ça passe aussi par le fait d'avoir travaillé sur son histoire, travaillé sur sa généalogie et d'être un petit peu plus centré, aligné avec soi-même. Alors tout ça, ce sont des mots, bien sûr, mais c'est comment ensuite on les met en acte. Et ça demande du temps.
- Speaker #0
Ça demande du temps.
- Speaker #1
Bien sûr, bien sûr. C'est pour ça qu'à mon avis… À 25 ans, on n'a pas fait ce travail-là, on est en train de le faire, on est en train de le découvrir. Et je pense que quand on arrive à des âges, à 45, 50, 55 ans, voire plus, c'est là où on acquiert cette maturité, où on a un savoir sur soi suffisamment équilibré, pour peu qu'on ait fait ce travail, qui permet de rencontrer l'autre différemment. Et c'est là où, justement... On ne fait pas l'amour, c'est l'amour qui nous fait. Je pense que c'est vraiment dans cette période-là que cette phrase prend tout son sens.
- Speaker #0
Est-ce que vous auriez peut-être trois questions à explorer pour aller vers cette sexualité sacrée ?
- Speaker #1
Alors, trois questions à explorer, ça va être des questions qui vont s'inscrire plutôt sur un terrain philosophique, parce que là, la question, c'est vraiment la question de son identité dans la sexualité. Je pense qu'il y a déjà une première question, c'est... Qui suis-je quand je suis en sexualité avec une autre personne que moi ? Quelle personne je suis ? Et une autre question, c'est qu'est-ce que je recherche ? Qu'est-ce que je recherche ? Pourquoi ? C'est une question toute simple. C'est pourquoi je fais l'amour ? À partir du moment où on a déblayé l'idée qu'on ne fait pas l'amour simplement pour obtenir un surplus de plaisir, voilà, qu'est-ce que je recherche ? on est entendu et puis après il y a aussi la question du corps et comment je peux être en amitié avec mon corps pour que ce corps ami qui est le mien je puisse l'offrir au regard de l'autre l'offrir aux mains de l'autre l'offrir à la bouche de l'autre et ces questions là la question de l'identité la question de de qu'est-ce que je fais quand j'ai une relation sexuelle la question du corps... me paraissent être des questions qui sont absolument fondamentales. Alors, c'est un peu philosophique ce que je pose là, mais je crois que la sexualité sacrée s'inscrit sur un terrain fondamentalement philosophique.
- Speaker #0
Oui, il n'y a pas de recette toute faite. On questionne, on explique. Et j'avais envie de terminer par une citation qui m'a beaucoup parlé. Celui dont le regard contemple l'âme d'autrui possède la connaissance de l'existence. que vous expliquez ?
- Speaker #1
C'est-à-dire que dans la sexualité sacrée, le regard est très présent. C'est-à-dire que beaucoup de personnes, c'est ce que j'ai entendu dans le cabinet, ont des relations sexuelles en fermant les yeux, en étant dans le noir et tout ça. Libre à eux, bien entendu. Ce n'est pas un jugement quand je dis ça. Mais dès qu'on ouvre le regard, dès qu'on regarde l'autre, et dès qu'on regarde l'autre avec... avec amour, avec un sentiment d'empathie, de compréhension, d'attention, de curiosité également, à ce moment-là, on va regarder quelque chose de lui qui est au-delà de lui. Et c'est pour ça que le mot âme, là, est utilisé. Mais à partir du moment où deux corps qui se rencontrent dans une relation sexuelle, ce sont deux temples qui s'accordent. À partir du moment... où quand on touche la peau de l'autre, on touche justement cette dimension sacrée de l'autre, l'âme se convoque de manière certaine et directe. Et donc, regarder l'autre avec cette intention-là, c'est effectivement aller vers un regard qui se porte sur l'âme de l'autre et sur le fait de laisser l'autre aussi regarder sa propre âme. De toute façon, c'est quelque chose que l'on dit très souvent, les yeux sont le miroir de l'âme, et dès qu'on a ce regard posé sur l'autre, il y a quelque chose qui se passe. Et ce qui est très intéressant, c'est que se regarder les yeux dans les yeux, d'un point de vue animal, c'est se défier. Et donc, dès que l'on va dépasser cette défiance naturelle qui est à l'intérieur de nous, on va passer de la défiance à la confiance. Et cet élément-là, il est fondamental de la sexualité sacrée.
- Speaker #0
Merci Alain Héril, c'est passionnant de vous écouter. Je vous invite à aller lire son livre On ne fait pas l'amour, c'est l'amour qui nous fait publié au courrier du livre. Il y a également un oracle sur la sexualité sacrée avec des magnifiques illustrations. Comment est née l'idée de cet oracle ?
- Speaker #1
Les deux sont liés. C'est-à-dire qu'en fait, cet oracle est un oracle qui est né pendant le confinement. Et Karine Zibo, qui a fait ces merveilleuses illustrations, est une artiste que j'aime beaucoup. Et puis, quand j'ai écrit On ne fait pas l'amour, c'est l'amour qui nous fait ça me semblait presque naturel d'y adjoindre un oracle. Alors l'oracle est sorti chez un autre éditeur, peu importe. Mais en fait, les deux sont, le livre et l'oracle vont ensemble. C'est vraiment deux pierres posées dans le jardin de la sexualité sacrée. Et donc, ça faisait très longtemps que j'avais envie de faire un oracle. Bizarrement, je ne trouvais pas de thème. Et puis, beaucoup de choses avaient été faites et qui étaient tout à fait remarquables. Et puis, cette idée nous est venue avec Karine. Et puis, ça s'est fait très vite. L'oracle est sorti aux éditions Le Duc. Et on a voulu faire un oracle qui soit, dans les illustrations, quelque chose qui ne soit pas figuratif. Donc c'est un oracle où les dessins, les illustrations sont volontairement très ouvertes, très oniriques, très propices à la projection imaginative. C'est un oracle qui n'est pas genré. Il y a des couples, on ne sait pas si c'est un homme, une femme, deux hommes, deux femmes. C'est-à-dire que vraiment pour offrir un maximum de possibilités de projection imaginative pour les personnes qui achètent cet oracle. Et les retours sont plutôt positifs par rapport à ça.
- Speaker #0
Oui, je le trouve magnifique. Je le trouve magnifique. Les illustrations sont très belles et les questions de réflexion aussi. Tout ça, on peut trouver sur votre site, je pense ?
- Speaker #1
Alors, on peut le trouver sur mon site. Et sinon, on ne fait pas l'amour, c'est l'amour qui nous fait. Ou l'oracle de la sexualité sacrée sont diffusés très, très, très largement sur toutes les plateformes, chez les bons petits libraires. Voilà, c'est facilement trouvable.
- Speaker #0
Super. Et votre site, c'est www.alainheril.com
- Speaker #1
Et Alain Heril, tout attaché.
- Speaker #0
Ok, et je terminerai encore par une... une info, vous allez donner l'ancien diplôme universitaire européen couple et sexualité qui s'adresse aux thérapeutes, c'est ça ?
- Speaker #1
Oui, c'est-à-dire que je travaille avec une université espagnole qui propose des formations pour les pays francophones et notamment pour les thérapeutes et dans ce cadre-là, on ouvre en février 2025 donc une formation un diplôme universitaire européen qui s'appelle couple et sexualité, qui est un diplôme qui est en ligne et qui s'adresse aussi bien à la France, la Belgique, la Suisse, mais aussi le Québec, les pays du Maghreb, l'Afrique noire francophone. Donc, c'est très, très, très ouvert au niveau du public. L'organisme qui gère les plateformes de formation de la Faculté Miguel de Cervantes s'appelle Sowell Formations. S-O-W-E-L Formations. Et donc, sur leur site, on trouve toutes les informations sur ce diplôme universitaire européen.
- Speaker #0
Eh bien, un tout grand merci Alain Héril. C'est passionnant de vous écouter, écouter vos questionnements qui en amènent d'autres. Et le chemin n'est jamais fini, mais c'est toujours un vrai plaisir. de vous accueillir, soit en conférence, soit ici dans le podcast. Merci beaucoup pour tous les enseignements que vous nous apportez. Et voilà, j'espère que cette discussion vous a enrichi, vous a donné l'envie d'aller vers plus de sacré dans votre couple. Un tout grand merci Alain et Ril.
- Speaker #1
Merci, merci beaucoup à vous.
- Speaker #0
Si vous voulez plus d'infos aussi sur mes activités, parce que j'organise beaucoup de conférences, de cercles, de marches aussi, peut-être bientôt, n'hésitez pas à aller voir sur mon site www.sandrinecorbio.be et j'en profite pour remercier David Martinez pour la production de cette émission, son accueil chaleureux et professionnel. Et je vous donne rendez-vous dans 15 jours pour une prochaine émission. Si la philosophie et se poser des questions vous intéressent, rejoignez-moi au cycle de conférences que j'organise à partir du mois d'octobre sur le thème du deuil avec le docteur en philosophie Jean-Michel Longnot. Toutes les infos sont sur mon site www.sandrinecorbio.be. Vous pouvez y assister en présentiel ou en replay. Je mettrai toutes les infos sous ce lien. J'espère que ce podcast vous a aidé à se mimer. Si vous avez aimé ce podcast, n'hésitez pas à le partager ou à le commenter. Et si vous voulez plus d'infos sur mes activités, n'hésitez pas à vous inscrire à ma newsletter. Je mettrai tous les liens sous ce post. Ce podcast fait aussi partie d'une émission diffusée sur Radio Alma tous les deuxièmes mardi et dernier mardi du mois. J'en profite pour remercier David Martinez pour la réalisation de ce podcast. Pour rappel, je suis Sandrine Corbiot, j'adore faciliter les prises de conscience et le changement, et je me réjouis de vous retrouver la prochaine fois. A bientôt !