- Speaker #0
Hey, je te le dis en rap. L'équilibre des médias, c'est aussi d'une certaine manière l'équilibre des démocraties. Quand les médias vont très mal, c'est rarement le signe d'une démocratie qui va très bien.
- Speaker #1
En quoi je suis concernée par la fake news ? Quand on comprend que ça a une intention de nous manipuler, c'est là où nous, en tant que citoyens aussi, on doit bien s'informer parce que derrière, il y a une intention cachée de nous faire croire quelque chose ou de nous faire penser autrement.
- Speaker #0
Trump, en 2024, c'est 97% de propos mensongers, 3% de propos vraisemblants. C'est très surprenant qu'un homme qui a 34 chefs d'accusation de poursuite contre lui accuse les médias d'être corrompus, non ? Nous sommes en guerre. CNN is fake news, don't talk to me. Alors c'est devenu un métier, donc en 2017, de regarder des jeux vidéo et de les commenter. Est-ce que manger des pizzas, c'est devenu un métier ?
- Speaker #1
Moi c'est Mélanie, alias Mélanie Nouveaux Médias sur Instagram. Réalisatrice de reportages pendant 7 ans pour la télé, aujourd'hui je suis experte en nouveaux médias et je t'emmène dans les coulisses de l'audiovisuel, qu'il soit tradit ou digital, fake news, mensonges, jeux d'influence et de pouvoir, mon objectif c'est d'aider à mieux t'informer en levant le silence sur ce qui se passe derrière la caméra, les micros, dans les rédacs, dans les bureaux des prods. Et surtout, on décrypte tout ça avec les insiders, ceux qui font les médias. Dans l'épisode 5 de J'étais le Dien à Oeuf, Aujourd'hui, je reçois Thomas Huchon, journaliste, réalisateur de documentaires et expert en fake news. Il est l'auteur du livre Anti-fake news avec Jean-Bernard Schmitt, que je vous conseille vraiment, et chroniqueur sur M6. Avec l'actualité qu'on connaît aujourd'hui, mieux s'informer est au cœur de notre rôle de citoyen et un véritable enjeu démocratique. On vous parle fake news, réseaux sociaux, Donald Trump et on vous donne des conseils concrets pour mieux vous informer. Bonjour Thomas. Bonjour. Je suis ravie de te recevoir sur le podcast « Je te lis en off » . J'attendais vraiment cet épisode parce que c'est un peu la fake news, c'est un peu le sujet qui me passionne dans ce podcast que j'ai créé pour aider les gens à mieux s'informer. Est-ce que tu peux te présenter ?
- Speaker #0
Ouais, moi je suis Thomas Huchon, je suis journaliste, réalisateur de documentaires, j'écris des livres aussi et je suis devenu un espèce de spécialiste un peu bizarre. Parce que depuis dix ans, je m'intéresse beaucoup au phénomène de la désinformation, des théories du complot, les fake news. Et comme ce phénomène-là, c'est devenu un espèce de truc... hyper important dans la société d'aujourd'hui, moi je suis devenu un peu un spécialiste, et donc je donne des cours, je fais de la formation, j'interviens auprès d'associations, mais aussi dans des entreprises, pour faire de la pédagogie, parce que le sujet, aujourd'hui, il dépasse largement le cadre du métier de journaliste.
- Speaker #1
Ce qui est drôle, c'est que quand j'ai créé ce podcast, je me suis rendu compte qu'apprendre à s'informer, c'était vraiment un exercice. C'était vraiment un exercice, on doit apprendre. Les gens pensent parfois que c'est inné de s'informer, de connaître les bonnes informations. J'ai l'impression que maintenant, c'est comme apprendre une langue ou à faire du vélo. On a vraiment besoin d'apprendre à s'informer. Et je crois que c'est aussi ce que toi, tu penses ?
- Speaker #0
En fait, on a un peu une fausse idée en s'informant sur Internet. Quand on... Le processus d'apprendre à s'informer, ça a toujours existé. Dans les collèges, dans les CDI, il y a des journaux qui sont fabriqués spécifiquement à destination des jeunes pour leur apprendre à comprendre qu'au sein d'un journal, il y a différents trucs. Il y a des reportages qui ne sont pas la même chose que des enquêtes. Il y a des éditoriaux qui ne sont pas la même chose que des interviews. Il y a des tribunes. Il y a plein de formats différents au sein d'un média, d'une forme de média. Et donc, il faut apprendre que tout ça existe. Il faut comprendre aussi comment l'information est fabriquée. Parce que l'information, elle est fabriquée. Et... Et ce n'est ni bien ni mal. Il faut juste savoir comment elle est fabriquée et comment ça fonctionne, la fabrique de l'information, pour arriver à décrypter l'information. Mais on est dans un monde dans lequel, finalement, ce qui était un peu nos repères, notre manière de comprendre le monde, ça a complètement explosé. Traditionnellement, l'info, tu découvrais ça dans ta famille. Parce qu'il y avait des journaux qui traînaient sur la table.
- Speaker #1
Le JT de ce soir en famille.
- Speaker #0
Eux, on partageait. Il y avait un moment souvent un peu de la grande messe du 20h. Donc il y avait ce moment d'information commun. Et puis en fonction des familles, sur la table, il y avait Libération, il y avait le Figaro. Et puis on se structurait politiquement aussi avec cette information-là. Maintenant, ces moments partagés, ils sont de plus en plus réduits. Ils existent toujours pendant les grands moments en direct. Donc, les Jeux Olympiques, les trucs de sport, peut-être les élections, les grands débats politiques, quand il y a un moment qui cristallise vraiment l'opinion. Mais il y a de moins en moins de moments ensemble. Et donc, cette transmission, tu vois, cette manière d'apprendre l'information, eh bien, ça existe de moins en moins. On a de moins en moins de place pour tout ça, parce qu'il y a de moins en moins de moments. moment partagé et qu'on est chacun un peu sur l'outil que tu as là devant toi.
- Speaker #1
Que je n'ai pas rangé dans ma poche.
- Speaker #0
Ce n'est pas grave, mais cet outil-là, en l'occurrence le smartphone, nous accompagne tellement tout le temps qu'il a aussi... créer des nouvelles pratiques en matière d'information. Et ces nouvelles pratiques, elles sont beaucoup plus individuelles. Et donc, quand on ne sait pas décrypter ces différentes choses, il peut se passer à la fois des choses géniales, mais souvent un certain nombre de catastrophes.
- Speaker #1
Ok, super. J'avais une idée en tête pour commencer ce podcast. Elle est un peu difficile et un peu large, mais j'aimerais bien avoir ton avis d'expert. Tu penses quoi du monde médiatique en France et dans le monde en ce moment ? C'est quoi les enjeux ? Qu'est-ce qui se passe en ce moment ?
- Speaker #0
C'est difficile. Déjà, les enjeux sont très différents d'un média à un autre. Et moi, je n'aime pas trop, sans te faire le reproche du tout, mais je n'aime pas trop ces généralités qu'on fait autour des médias. C'est un peu comme quand on parle des jeunes. Qu'est-ce que ça veut dire les jeunes ? Il y en a plein de différents, des jeunes. Des médias, on a plein de différents aussi. Ce qui est sûr, c'est qu'on a des médias d'avant, entre guillemets, la télévision, la radio, les journaux. qui essayent de continuer à exister dans un monde où il y a de plus en plus de numériques et où dans l'espace numérique, ils ont du mal à exister. Ils ont du mal à exister pour plein de raisons. Parce qu'ils ne sont pas allés sur ce support-là dès le départ, donc ils ont pris un temps de retard. Et puis parce que la manière dont fonctionne l'espace numérique ne correspond pas du tout à la manière dont ils décrivent le monde.
- Speaker #1
Il y a vraiment un gros besoin d'adaptation, en fait.
- Speaker #0
Je ne sais pas s'il y a un besoin d'adaptation. Je ne sais pas dans qu'est-ce qu'il faut adapter. Moi, je serais plutôt de dire qu'il faut réguler les réseaux sociaux pour que cette espèce de volonté de capter notre attention en permanence avec les choses les plus choquantes, les plus clivantes, souvent des choses fausses en plus, eh bien, ça ne soit plus l'alpha et l'oméga de la manière dont on s'informe. Il faudrait qu'on prenne, au contraire, plus de temps, plus de distance. plus de mesures, plus de réflexion, plus d'esprit critique face à l'information que dans l'immédiateté, en fait, quand on veut aller trop vite. Franchement, on augmente de manière considérable le risque de dire ou de faire une énorme connerie. Donc, il faut en avoir conscience et donc il faut aussi être capable, peut-être, de ralentir un peu ce temps. Mais aujourd'hui, on a ces deux enjeux. On a un enjeu de... d'une forme de média qui vient d'hier, entre guillemets, qui voudrait exister aujourd'hui et peut-être demain. Et on a les médias de demain qui sont déjà présents aujourd'hui et qui bouleversent un peu tout. Et puis, on n'a même pas encore parlé d'intelligence artificielle. Donc, je crois qu'on est dans un moment où il y a plein de possibilités. Et en même temps, il y a aussi une forme de risque, de menace, parce que l'équilibre des médias, c'est aussi... d'une certaine manière l'équilibre des démocraties. Qu'on le veuille ou non, qu'on aime ou pas les médias. Mais ça donne une forme de température de ce qu'est l'état d'une démocratie et donc quand les médias vont très mal, c'est rarement le signe d'une démocratie qui va très bien.
- Speaker #1
Et pourquoi tu fais ce rapprochement entre les médias et la démocratie ?
- Speaker #0
Parce qu'en fait les médias font partie intégrante des modèles démocratiques. Il n'y a pas de démocratie, de pays libre entre guillemets, sans la possibilité d'avoir une presse libre. La presse elle est là à la fois pour rendre des comptes mais aussi pour poser des questions, pour interroger, pour informer les citoyens et permettre aux citoyens de se faire leur propre opinion sur les choses. Donc il faut qu'elle ait un espace de liberté suffisant pour pouvoir exister. Et cet espace de liberté... Dans les sociétés dans lesquelles on vit aujourd'hui, il est aussi conditionné par le business. C'est-à-dire que plus votre business est florissant, plus vous pouvez vous permettre des choses. Donc dans un moment où le business de l'information n'est pas très bon, et même plutôt l'argent diminue, on manque de moyens pour fabriquer de l'info, il y a une nouvelle équation à trouver. En tout cas, il y a quelque chose à faire. Tout ça se passe en plus dans une époque où il y a une perte de confiance, une défiance qui augmente. Enfin, il y a quand même... Je ne sais pas quel est, comme on dit, un qui de l'œuf ou la poule. Est-ce que c'est la défiance dans les médias qui fait que les gens ne l'achètent plus ? Ou est-ce que c'est parce que les gens ne s'informent plus dans les médias qu'ils les détestent ?
- Speaker #1
C'est un mélange des deux.
- Speaker #0
Certainement qu'il y a un peu des deux. Mais en tout cas, il faudra qu'on trouve des solutions. Parce que quand il n'y a plus de journalistes... Libres de faire leur travail et libres d'informer la population, on prend quand même un énorme risque, pas uniquement pour les journalistes, en réalité pour tout le monde. Parce que si les journalistes ne peuvent plus s'exprimer, c'est très rare que vous, vous puissiez vous exprimer dans la rue comme vous le voulez.
- Speaker #1
C'est marrant parce que tu parles de liberté de la presse, liberté d'expression. Dans ton livre Anti-Fake News, il y a un rappel qui m'a été assez utile. Tu rappelles qu'en fait, la liberté d'expression n'est pas la même dans tous les pays. Et ça, je trouvais ça assez fascinant parce que certains tech bros, ou en tout cas boss des grandes plateformes, prêchent la liberté d'expression pour pouvoir laisser tout dire sur leur réseau. Et tu rappelles que, par exemple, en France et aux États-Unis, ça ne veut pas dire la même chose culturellement. C'est complètement différent.
- Speaker #0
Non, ça ne veut pas dire la même chose. Il y a d'un côté une vision philosophiquement absolutiste de la liberté d'expression, qui est donc, y compris de la liberté d'expression politique. Donc ça, c'est plutôt la version américaine. consacré par le premier amendement de la Constitution américaine et qui vient de l'héritage politique du moment où... l'Amérique devient un pays indépendant. Ils veulent s'émanciper de la couronne, donc ils veulent avoir la liberté, y compris de pratiquer leur religion comme ils le veulent. Donc, il y a tout un enjeu, mais il y a surtout un enjeu d'être libre, de se comporter comme ils veulent. Donc, pour eux, le premier élément fondateur de leur nation, c'est la liberté. Il se trouve que dans le cas de la France, la consécration de ces principes, notamment de liberté d'expression, ils sont... concomitant de deux autres principes qui sont l'égalité et la fraternité. Et donc la liberté n'existe pas toute seule. Ça implique plein de choses, mais ça dit surtout que la liberté d'expression en France, elle est un tout petit peu plus encadrée que ce qu'elle n'est aux Etats-Unis. En réalité, c'est plus compliqué que ça aux Etats-Unis. Parce que, eh bien, il y a des tas de choses qui sont autorisées en France. et qui ne le sont pas aux Etats-Unis. Pourquoi ? Je pense par exemple à tout ce qui relève de la nudité.
- Speaker #1
Oui.
- Speaker #0
Je me souviens d'un photographe allemand qui, pour dénoncer cette espèce de double standard un peu bizarre sur les réseaux sociaux, qui applique plutôt la... liberté d'expression à l'américaine qu'à la française, ou à l'allemande, dans son cas, lui, il avait fait une photo avec une mannequin, il pose, avec une mannequin nue. Cette mannequin nue tient un écriteau avec une... horrible parole raciste. La photo est supprimée en quelques minutes par Facebook qui la flagship, la banne, l'interdit pour nudité.
- Speaker #1
On peut être facho sur les réseaux, mais on ne peut pas être nu.
- Speaker #0
Et du coup, à l'inverse, cette photo, en vertu du droit français, en vertu du droit allemand, Elle devrait être interdite parce qu'elle contient des propos racistes. Et pas du tout parce qu'elle contient des propos des seins nus, par exemple. Ce n'est pas illégal dans le droit français et dans le droit allemand non plus. Donc, je crois qu'il faut bien avoir conscience qu'il y a effectivement des différences, qu'en France, la liberté d'expression, elle est surtout conditionnée à deux choses. La première, c'est qu'il faut que vous soyez identifiable. On sait qui tu es quand tu parles. Pourquoi ? Parce que si tu dis des choses qui sortent du cadre de la loi, il faut qu'on puisse te poursuivre. Donc il faut que tu sois redevable devant la loi des propos que tu as tenus.
- Speaker #1
Responsable en fait.
- Speaker #0
Alors effectivement, il y a derrière l'idée d'une liberté d'expression en France, l'idée d'une responsabilité de la parole qui est tenue. Pourquoi ? Parce qu'il y a l'idée que la charge de la preuve... doit résider sur celui qui accuse et pas sur celui qui se défend. Ça veut dire qu'on ne peut pas, en gros, accuser sans preuve. Ça, c'était l'époque des procès de l'Inquisition. On vous accusait d'un truc dont vous ne pouviez pas vous défendre. Donc, fatalement, vous étiez coupable. Et à la fin, on vous brûlait, on vous coupait la tête, on vous massait, on vous torturait pendant des heures. Mais donc, cette vision-là que ce qu'on dit doit être potentiellement basé sur quelque chose, Eh bien, ça fait que la liberté d'expression en France, elle est très différente de la liberté d'expression aux États-Unis. Parce que sur quoi reposent en fait ces éléments ? Qu'est-ce qu'on peut dire et qu'est-ce qu'on ne peut pas dire ? Eh bien, la seule chose qu'on peut dire, ce sont des choses qui sont basées sur des faits. Donc, quelque part, la vérité. Ça ne veut pas dire qu'on n'a pas des vérités différentes, mais au moins si on base nos réflexions sur des faits... il y a quelque chose de concret sur lequel on peut tous se reposer. La liberté d'expression à la française, elle consacre pas seulement le fait qu'on puisse être libre, mais l'idée qu'on puisse vivre ensemble. Parce qu'on est un pays dans lequel l'expression, les propos, ont eu aussi des conséquences politiques, parfois de l'incitation à la haine, à la violence. Et donc nous, on a considéré que le racisme, le sexisme, la misogynie, l'homophobie, l'antisémitisme, l'antisémitisme, tout ça, c'était des choses qui ont eu lieu. des choses qui n'étaient pas du domaine de l'opinion, et donc pas du domaine de l'acceptable.
- Speaker #1
C'est ça, et donc d'avoir ces propos, c'est un délit en France.
- Speaker #0
Ça serait un délit de dire des choses horribles sur, effectivement, les juifs, les homosexuels, de dire qu'il existe des races inférieures, tout ce genre de propos-là. Ils ne sont pas considérés comme des opinions, ils sont considérés comme des délits.
- Speaker #1
Ce qui n'est pas le cas aux Etats-Unis.
- Speaker #0
Aux Etats-Unis, si vous avez envie de faire une manifestation du Ku Klux Klan, vous pouvez faire une manifestation du Ku Klux Klan. Et donc, c'est une version très différente. Ça veut dire, quelque part, si je devais résumer de manière un peu provocatrice, ce truc-là, c'est pas de téton, mais des croix gammées, quoi. Et je pense que dans l'espèce de faux débat, parce que c'est un faux débat, qui est créé aujourd'hui par Elon Musk, suivi par Mark Zuckerberg, Jeff Bezos, les patrons de Google... et toute la bande de la Silicon Valley, ils ne vous disent pas qu'ils veulent défendre les opinions des autres. La liberté d'expression ne les intéresse pas si elle concerne les autres. D'ailleurs, il n'y a qu'à voir le... le nombre de comptes supprimés sur X depuis le rachat d'Elon Musk pour se rendre compte que c'est pas vrai. Ils ne font que censurer des comptes. Donc ça, c'est un premier élément. Mais qu'est-ce qu'ils veulent ? Ils veulent nous faire croire. En tout cas, ils veulent nous imposer leur vision des choses qui est que leurs opinions sont égales ou équivalentes à nos faits. Et c'est ça qu'on ne peut pas accepter. C'est pas le fait qui... En fait, le fait qu'ils mentent, à la limite... Bon, ils ont mal le droit de dire ce qu'ils veulent. Mais le fait qu'ils essaient... essaient de faire passer leurs mensonges dingues pour des faits à la hauteur des faits, et bien ça, ce n'est pas possible. Et donc quand, par exemple, on nous dit que des migrants haïtiens bouffent des chiens et des Ausha au petit-déj à Springfield dans l'Ohio, et bien nous, on ne doit pas accepter ce genre de truc, et surtout, on ne doit pas accepter qu'il existe un outil qui va prendre cette parole-là et la démultiplier sans jamais faire la même chose pour sa contrainte. contradiction.
- Speaker #1
Mais quand tu fais cette référence, je pense que tu parles de Donald Trump.
- Speaker #0
Oh, bien sûr, on est obligé, c'est obligé à un moment de parler de M. Trump.
- Speaker #1
Et c'est intéressant parce que j'ai lu, alors je crois que c'est le Washington Post qui dit que dans son dernier mandat, il a fait plus de 30 700 et quelques mensonges. C'est quand même hallucinant. Pourquoi ? Je sais que dans ton livre aussi, tu en parles pour son premier mandat et là, il vient d'être réélu, donc c'est en pleine actu. Pourquoi c'est le symbole un peu de la désinformation à Donald Trump ?
- Speaker #0
En fait, le problème de Donald Trump, ce n'est pas qu'il ment. Le problème de Donald Trump, c'est qu'il a supprimé les faits. Et à quel moment ça s'est passé ? Durant toute sa campagne de 2016, il institue ce truc-là. Et quelque part, c'est devenu institutionnalisé le 21 janvier 2017. à Washington, c'est l'intronisation de Trump. Et toute la journée, ils vont nous expliquer que leur inauguration sera la meilleure de toutes les inaugurations, qu'il y aura le plus de monde possible, qu'il n'y a jamais eu autant de monde à une inauguration. Les journalistes américains, bêtes comme ils sont, vont faire un truc, ils vont vérifier. Donc ils vont prendre des photos aériennes des deux inaugurations. Donc on voit, c'est des photos assez classiques, on voit les grandes pelouses de Washington remplies de monde, les drapeaux américains, les chapeaux de l'oncle Sam, la totale. Et le président qui prête serment, machin et tout. Et donc... Il regarde les photos et les photos montrent clairement qu'il y a beaucoup plus de monde pour Barack Obama en 2009 que pour Donald Trump en 2017. Et franchement, on s'en fiche un peu. Limite, c'est pas très grave. Mais pour les équipes de Trump, c'était hyper important. Et pour sa conseillère en communication. Kelly Anne Conway, qui, au cours de cette matinée, n'est plus la conseillère en communication d'un candidat à la Maison-Blanche, mais la conseillère en communication du président. C'est-à-dire qu'elle incarne, quelque part, la voix de l'Institut de l'État fédéral américain, la parole de la plus... plus importante démocratie de notre planète ? Elle va inventer une expression, elle va inventer le terme de fait alternatif, alternative facts, si tu te souviens, pour décrire, elle dit, non, vous n'avez pas raison, il n'y avait pas plus de monde à Obama qu'à Trump, nous avons des faits alternatifs.
- Speaker #1
Comme s'il y avait une autre vérité.
- Speaker #0
Comme s'il y avait une autre vérité, et en fait, oui, encore une fois, philosophiquement, on peut s'arrêter pendant des heures et se dire, oui, il y a plusieurs vérités. Mais... Il peut y avoir plusieurs vérités qui coexistent dans une société à partir du moment où on partage les faits. Parce que c'est ça le socle commun. Et en fait, on est obligé d'avoir un minima, un petit peu de socle commun. Sinon, ce n'est pas possible. Ça ne peut pas fonctionner. Nos sociétés ne peuvent pas fonctionner sans qu'il y ait un minimum de choses qu'on partage et sans qu'il y ait entre nous un minimum de confiance. Deux chiffres sur M. Trump qui vont, à mon avis, t'éclairer. On parlait de 2016. En 2016, Trump, c'est... 96% de mensonges prononcés durant la campagne. 4% de propos vrais selon l'institut Politifact. Est-ce qu'il a fait mieux en 2024 ? Oui, même si on ne pensait pas que c'était possible. Trump, en 2024, c'est 97% de propos mensongers, 3% de propos vrais seulement. Et effectivement, le Washington Post avait, lui, fait un travail différent de comptabiliser le nombre de mensonges dans l'expression publique du président au cours de ses quatre années de mandat. De mémoire, on était à 25 000 et des brouettes, comme tu le disais, un tout petit peu moins que... De mémoire, un tout petit peu moins, mais ça m'a été là du fact-checking. Je sais que vous le ferez devant vos écrans.
- Speaker #1
Et ce qui est intéressant, quand on parle là-dessus, c'est que moi, je me suis un peu renseignée sur comment Trump a gagné ses dernières élections. Je sais que tu en as parlé aussi dans ton livre pour les premières élections. Moi, ce que j'ai trouvé assez... Le fascinant, c'est qu'il a justement rejeté les médias traditionnels. Il y a eu beaucoup les réseaux sociaux, mais il a beaucoup compté sur le podcast. Donc moi, comme je suis un peu spécialiste du podcast, ça m'a intéressée. Et le podcast, c'est un outil incroyable pour sa communication. Je trouve ça fou. Mais là, il a utilisé aussi le côté des médias pas traduits, justement des médias digitaux, où il n'y a pas de limite, il n'y a pas de garde-fou. Et en fait, il a été dans des podcasts de personnalités d'extrême droite, comme Joe Rogan, qui est d'ailleurs produit par Spotify. Et il n'y a personne, en fait, qui a pu dénoncer les mensonges qu'il faisait, parce que quand il est à la télé, en général, les gens essayent quand même de le contredire.
- Speaker #0
Oui, il y a un fact-checking.
- Speaker #1
Au minima. Et souvent même, c'est ce que tu dis dans ton livre, quand il dit des mensonges, parfois à la télé, carrément, il y a des bandeaux pour dire que ce qu'il dit n'est pas vrai. Chez Joe Rogan, c'est trois heures de... show. En plus, on sait que c'est quand même un showman. Il a fait de la télé. Il est très doué. Le podcast, c'est vraiment le média qui le mitier à fond parce qu'il n'y a personne qui va aller le contredire. Il peut faire son show. En plus, c'est un média qui va créer de l'intimité avec les gens. En plus, dedans, il le dit très bien dans le podcast de Jorgen, que la presse tradit, elle est corrompue, que les médias très digitaux sont... Voilà le côté contre les institutions et moi je vais vraiment vous parler vrai.
- Speaker #0
C'est très surprenant qu'un homme qui a 34 chefs d'accusation de poursuite contre lui accuse les médias d'être corrompus, non ? C'est quand même sidérant. Mais effectivement, c'est encore un des retournements de plus de Donald Trump. Donc il défend la liberté d'expression tout en empêchant son opposition d'exister aux États-Unis. Il défend les droits des êtres humains tout en expulsant toute personne qui a un tout petit peu l'air d'un étranger. Là où il y a quelque chose d'assez intéressant dans ce que tu dis, c'est qu'effectivement, il est un homme de médias, au sens, un homme médiatique, mais aussi un homme qui comprend les mécaniques propres aux médias et propres à chacun des médias. Il avait été l'un des premiers à aspirer, finalement, le phénomène de la télé-réalité avec The Apprentice. Et donc, il est devenu une vedette aux Etats-Unis. Il faisait partie de ces personnages qui surgissaient de ci, de là, dans une série. Je crois qu'il y a un passage passage, il est mentionné dans Sex and the City, il est mentionné dans plein de séries. Il existe, en fait, dans l'univers culturel que les médias lui ouvrent aux Etats-Unis, et notamment les télés, les télécablés, tout ça. Il a en plus un vrai talent pour le faire, et en tout cas il correspond à ce que recherche une forme d'audience américaine. Et là-dessus, effectivement, D'abord l'avènement d'internet et des chaînes YouTube, de l'information sur les réseaux sociaux, lui permet de construire ces communautés numériques, de les abreuver avec ces messages. lui, il crée des vases communicants entre les communautés préexistantes, notamment complotistes aux Etats-Unis. Je parle bien sûr de toute la fanbase de Alex Jones, qui est un peu avant le podcast, celui qui faisait, lui, des shows radio. Il n'y avait pas encore la vidéo. Mais qui a apporté énormément de soutien à Trump et énormément d'électeurs à Trump avec ses trucs. Et derrière, ben oui, effectivement, il est capable de servir de ce côté intimiste, de ce côté conversation. Tu vois, on est entre nous, on se dit la vérité. Il n'y a pas un grand censeur du New York Times ou de CNN qui va venir couper parce qu'on ne pourrait pas dire la vérité aux Américains. Et en plus, je trouve qu'il a été capable de... de faire exister cet écosystème. Parce qu'en fait, il lui donne une forme d'écho. Il y va, ses proches y vont, son entourage y va, et donc du coup, il fait exister cet univers. Il pourrait dire à ses proches ou lui choisir de ne donner sa parole. de ne réserver sa parole qu'à Fox News, par exemple, qui a un média pour concentrer les gens là-dessus. Mais non, lui, il choisit. Du coup, c'est pour ça que je te dis qu'il est vraiment très fort en termes de médias, y compris dans son utilisation. C'est-à-dire qu'il choisit là où il veut taper. Et quand il tape, derrière, il a toute sa mécanique qui vient se mettre en place, notamment les réseaux sociaux, des memes. Enfin, c'était quoi le truc ? I'm gonna be the Cameraman in a Vamul. Vous savez, cette espèce de truc-là qui a été fait. Il y a même de l'intelligence artificielle. Il y a plein de trucs. Et en plus, il a maintenant le soutien de Musk qui, dès qu'il appuie sur un bouton, il y a 200 millions de personnes qui le voient sur Twitter.
- Speaker #1
C'est ça, j'allais rebondir sur Elon Musk. Mais avant, on n'a pas défini. Je trouve que c'est super important parce que parfois, on n'a pas exactement la notion de la définition de la fake news. Donc ça, c'était important pour moi de le préciser parce qu'il y a une vraie différence entre la fake news et la fausse information. Oui. On joue sur les termes en français et en anglais.
- Speaker #0
Non, je pense que c'est important, justement, de comprendre que si nous, on n'a pas compris ce qu'étaient les fake news, c'est parce qu'on ne parle pas anglais.
- Speaker #1
On appelle un fox ?
- Speaker #0
Oui, on pourra revenir sur ce qu'a décidé de créer l'Académie française. Pour une fois, ils ont servi à un truc. Mais toi, si je te dis de me traduire en français le terme de fake news ?
- Speaker #1
Moi, je sais...
- Speaker #0
Toi, tu vas dire fausse info.
- Speaker #1
Oui, mais je sais qu'il y a une intention derrière.
- Speaker #0
Il y a quelque chose derrière. Par contre, si on essaie de traduire fausse info en anglais, on ne dirait pas fake news instinctivement. On dirait false, wrong. Ce qui veut bien dire qu'il y a deux phénomènes assez différents. Pour l'expliquer de la manière la plus claire, c'est comme un faux et un fake sac Vuitton. Le faux sac Vuitton, tu l'as payé 2 dollars à Clignancourt et tu sais très bien que c'est un faux, il n'y a pas de problème. Le fake Vuitton, tu l'as payé 3 000 et tu t'es fait arnaquer.
- Speaker #1
Stéphane a questionné.
- Speaker #0
Donc du coup, la différence, c'est que à la fin, t'as un faux sac Vuitton. Mais il y en a un qui n'a pas voulu t'arnaquer et l'autre qui a voulu t'arnaquer. Et quelque part, la différence entre la fausse info ou la fake news, elle n'a pas d'intérêt pour le grand public qui la reçoit en pleine figure. Il y a des mensonges et c'est insupportable. si on essaie d'analyser le phénomène, de comprendre la société dans laquelle on vit, et de comprendre justement les équilibres, les intérêts, et bien comprendre qu'il y a derrière la fake news une intention de manipuler, de mentir ou d'en tirer profit. à la diffuser, on passe à côté d'une partie du problème. Et donc, c'est important de faire la différence entre, justement, la fake news. Nous, en France, on pourrait dire l'infox. Mais en vrai, on peut continuer à dire fake news. C'est pas grave. On peut parler anglais de temps en temps. Ça ne nous fera pas de mal. Et les fausses infos. Les fausses infos, c'est quand, par exemple, l'AFP annonce que Martin Bouygues est mort, alors que c'est pas vrai. Ou c'est l'arrestation supposée de Xavier Dupont de Ligonnès, qui, en fait, n'est pas vrai. Ça, c'est des fausses infos.
- Speaker #1
C'est une erreur journalistique en fait.
- Speaker #0
C'est en tout cas une erreur dans la course au scoop. Et peut-être un peu de fanfaronnade de la part des journalistes qui préfèrent mettre un point d'exclamation à arrêter plutôt qu'un point d'interrogation sur la une du journal. Il y a aussi là, tu vois. une idée de capter notre attention, de vendre des journaux, de business, qu'il ne faut pas oublier, parce que, souvent, les vraies raisons, elles sont beaucoup plus liées à l'univers économique dans lequel on évolue qu'à une quelconque manipulation politique, comme l'imaginent certains, qui serait terrible, et encore une fois, si on avait des cas précis de ces trucs-là, moi, je serais le premier à les dénoncer, mais il se trouve que c'est plus une espèce de défait de système, mais là, de système. système capitaliste néolibéral.
- Speaker #1
Mais c'est ça que je trouve qui est important dans cette définition, c'est de comprendre, parce que parfois, je me dis, nous on est des spécialistes des médias, mais quand on est quelqu'un qui ne travaille pas dans ce domaine-là, on peut se dire, mais en quoi je suis concernée par la fake news ? Et je me dis, quand on comprend que ça a une intention de nous manipuler, c'est là où nous, en tant que citoyens aussi, on doit bien s'informer, parce que derrière il y a une intention cachée de nous faire croire quelque chose ou de nous faire penser autrement.
- Speaker #0
Oui, et il y a aussi un autre truc qui est que ... Finalement, l'existence de ces mensonges abîme un petit peu la relation entre nous. C'est-à-dire que la relation citoyenne qui peut exister entre les gens, elle est aussi basée sur le fait que, quand tu me dis bonjour, je sais que tu ne penses pas au revoir. Pour dire les choses très simplement. Et bien, si on commence à penser que systématiquement, il y a une forme de mensonge, de choses dissimulées derrière, ça abîme. quelque chose qui est très précieux et qui est pourtant invisible, qui est notre capacité à vivre ensemble. Et je crois que c'est là qu'il y a, encore une fois, une forme de péril collectif à ces fake news. C'est qu'elles abîment quelque chose entre nous qui est un peu irremplaçable.
- Speaker #1
Et maintenant qu'on a bien la définition de fake news en tête, on peut revenir sur Elon Musk. dont tu parlais tout à l'heure, et des tech bros. Pendant la réélection de Donald Trump, il y a eu un peu une vague, je sais, en France, dans les médias français, de quitter X, l'ancien Twitter. Juste pour bien faire comprendre un petit peu aux gens qui nous écoutent, pourquoi il y a eu cette vague, ce mouvement ? C'est quoi le problème de X,
- Speaker #0
en fait ? C'est quoi le problème de X ? En fait, il y a deux problèmes dans ce que le mouvement Hello Kitty X ou d'autres... personnes qui ont quitté cette plateforme nous l'ont expliqué, il y a premièrement un truc de dire non au comportement du patron de la plateforme, donc d'Elon Musk. C'est-à-dire de... Dire voilà, moi je ne peux pas cautionner avec mon institution, avec mon média, avec mon ONG, avec mon idéologie, avec ce que je défends, avec mes valeurs, d'être membre d'une plateforme où le patron soutient un candidat d'extrême droite aux Etats-Unis, défend des militants néo-nazis en Angleterre, et soutient un parti en Allemagne, l'AFD. Donc il y a un premier truc qui est la personnalité d'Elon Musk. qui cristallise un certain nombre de choses et à mon avis, à juste titre, je ne comprends toujours pas très bien pourquoi tout le monde s'interroge sur le sens profond du geste qu'il a eu le jour de l'investiture.
- Speaker #1
Tu sais,
- Speaker #0
mais en fait, il y a une petite méthode qui est assez simple. Si vous voulez savoir si un truc est nazi, il faut demander au nazi. Et donc, si les nazis applaudissent dès demain quand ils le meurent, je pense que c'est un... Ils savent mieux que nous.
- Speaker #1
En plus, je trouve, moi, j'avais vu les montages. Les montages, quand on fait un montage, on ne peut pas...
- Speaker #0
Il n'y a pas de question, mais il fait un geste. Est-ce que lui, il est un... C'est une autre question. Et je pense, il est réactionnaire, il est d'extrême droite, il est libertarien. Il est aussi un grand provocateur. Et il fait ça principalement à la destination de l'Europe. Et en fait, il nous dit, en gros, J'en ai rien à foutre de vos valeurs, de votre passé et de vos interdits moraux. Et en fait, il nous crache à la gueule. et à la gueule de tous les gens pour qui à la fois ce genre de geste est inacceptable et tout ce que ce genre de geste vient balayer est insupportable c'est à dire que il y a aussi un truc de dire c'est une forme de négationnisme franchement c'est dégueulasse mais donc le premier problème que se posent les gens c'est est-ce que je peux cautionner c'est le valeur du directeur est-ce qu'avec un mec comme Musk à la tête ... Est-ce que moi, je peux rester sur cette plateforme ? Et je pense que c'est une question qui se pose légitimement. Et il y a une deuxième question qui est là, qui va un peu dans le même sens, mais qui n'est pas tant sur la personnalité de Musk que sur le réseau en lui-même. C'est-à-dire que le réseau donne désormais clairement une prime à un certain type de contenu, à un certain type de profil. il a un certain type de personnalité qui sont effectivement assez centrés à la droite ou à l'extrême droite de l'échiquier politique du coup ça crée en plus avec la possibilité d'acheter les processus de certification c'est-à-dire cette petite pastille bleue qu'on connaît tous sur les réseaux sociaux, avant on vous la donnait parce que vous faisiez la preuve que vous étiez vérifié, donc potentiellement vous aviez une forme d'image de marque qui garantissait un peu que vous n'alliez pas dire n'importe quoi, ce n'était pas une garantie à 100%, au contraire, mais ça disait qu'au moins c'était vous qui parlaient, et que vous, vous étiez bien cette personne-là. Là, on est dans un truc où les gens peuvent acheter, et quand ils achètent, ils ont des outils de démultiplication de l'audience. Qui a acheté ? principalement des personnes qui avaient été bannies auparavant, qui étaient des personnes bannies non pas pour des questions de liberté d'expression, mais parce qu'ils avaient tenu des propos de haine. C'était plutôt... Les gens qui étaient bannis étaient très rarement bannis sur des principes de liberté d'expression, ils étaient bannis sur des principes de modération. C'était de l'incitation à la haine, de l'incitation à la violence, des attaques ad nominem, des menaces de mort, tout un tas de choses de cet ordre-là. Donc, on a, du coup, une plateforme et, en fait, ce que se disent les... Déjà, c'est... Est-ce que le terrain de jeu n'est pas devenu infréquentable ?
- Speaker #1
Quand tu disais banni, c'était banni avant qu'Elon Musk prenne le pouvoir sur la plateforme.
- Speaker #0
Avant qu'Elon Musk prenne les plateformes. En fait, c'est dingue à quel point les choses vont vite. Mais on a donc des gens qui disent, moi, je ne peux pas y aller parce qu'il y a Musk et que Musk est l'incarnation de... du soutien politique à l'extrême droite populiste internationale aujourd'hui. Il est un peu la tête de gondole de ce mouvement-là, et moi je ne veux pas y aller, et je ne veux plus cautionner ça. Et il y a d'autres parties qui vont dire, moi je ne veux pas cautionner ce système algorithmique qu'on ne comprend pas, où on voit bien qu'il y a une polarisation de la politique qui se met, et finalement, moi, en restant sur cette plateforme, j'incite les gens qui veulent me suivre à rester sur cette plateforme. Donc c'est le cas d'un certain nombre d'organisations non gouvernementales, d'un... d'associations, de médias. Ouest France, par exemple, a dit, nous, on ne veut plus y être parce qu'on ne veut pas que les lecteurs de Ouest France soient obligés d'aller sur X pour suivre ce qu'on va dire sur Twitter. Ce qu'on va dire, en tout cas, publiquement. Et donc, ils ont migré vers d'autres plateformes. Moi, je pense que aux deux questions, on pourrait quitter Twitter et s'en aller de Twitter. Je pense qu'on oublie, en fait, en permanence un truc, c'est qu'ils ont beaucoup plus besoin de nous que nous n'avons besoin d'eux. Et qu'en fait, on a le pouvoir de quitter ces trucs-là. Toi,
- Speaker #1
si je comprends bien, tu conseilles de ne pas rester dessus ?
- Speaker #0
Moi, je conseille d'utiliser le moins possible les réseaux sociaux, d'acheter des journaux, d'écouter la radio, de regarder des grandes émissions d'informations documentaires à la télévision, de lire des livres, de parler à des vrais gens dans la vraie vie et d'essayer de se détacher de ces mécaniques. En fait, le problème, c'est que les supports numériques ont quelque chose de merveilleux. dans leur côté pratique, inventif, ils concentrent tout dans notre poche. On a plus de livres qui n'ont jamais été écrits dans l'histoire de l'humanité. On a plus de savoirs, plus de connexions, plus de gens. Il y a quelque chose de dingue à cet outil. Et puis en même temps, cet outil, il devient un peu... On pensait qu'il était notre outil, et à la fin, on est en train de se transformer, nous, en celui qui est utilisé. Donc, je crois qu'il y a un moment, il faut aussi qu'on soit capable de se distancer un peu de ces appareils qui sont très très puissants, qui sont très très forts. Les réseaux sociaux ont compris comment fonctionnaient les êtres humains. Et c'est ce savoir-là qui est le plus précieux pour eux, parce que c'est avec ça qu'ils captent ton attention et la mienne. Toi, avec un certain nombre de choses qui te correspondent, aux horaires qui sont les tiens, avec le rythme et l'espacement qui... qui te va, tout ça parce que tous les trois postes sur Instagram, on va te mettre une publicité et que cette publicité, plus tu envoies, plus ils gagnent de l'argent et surtout plus tu cliques.
- Speaker #1
Oui, ça me fait penser à ce dont tu parlais qui sont les bulles liées à l'algorithme. Tu racontes qu'en fait, je crois que c'est des personnes de l'intérieur des plateformes qui ont révélé ça, qu'en fait, quand on est par exemple sur Instagram, quand on s'informe, il y a toujours des informations qui vont aller dans notre sens de personnes. qui ont le même avis que nous, et on n'est plus du tout confrontés à la contradiction de nos idées quand on est sur les réseaux sociaux, parce que les réseaux ont envie qu'on soit toujours plus connectés.
- Speaker #0
Alors, en fait, c'est une mécanique qui existe chez les êtres humains de manière générale. Tout à l'heure, on disait, sur la table du salon, dans la famille, il y avait Libération, il y avait le Figaro. Ou il y avait peut-être la Croix, le Monde, j'en sais rien. Mais en tout cas, on a des opinions. Et, grosso modo, on va chercher... à s'informer sur des trucs qui représentent un petit peu nos opinions. C'est très rare, les gens qui n'ont pas d'opinion du tout, c'est très rare qu'ils s'informent énormément. En gros, plus t'as d'opinion, plus tu essaies de t'informer. Et on a tous des biais, et notamment des biais idéologiques. On est un peu plus de gauche, un peu plus de centre, on est un peu plus féministe, un peu plus machiste, un peu plus machin, un peu plus truc. Il y a plein de manières d'être et de manières d'exister. Et finalement, ce qui était une mécanique, je vais à la maison de la presse, j'achète tel journal, j'allume la télé, je vais sur telle chaîne, je mets la radio, je mets telle radio. C'est devenu un truc sur le fil d'actualité, dans nos réseaux sociaux, quels qu'ils soient. Et en fait, on concentre un peu toutes les sources d'informations. Et là où on avait conscience d'acheter un journal différent, aujourd'hui, on s'informe tous sur Instagram, Facebook, TikTok, x anciennement Twitter. Et donc, on a l'impression de partager quelque chose. Puisqu'on s'informe tous au même endroit. Mais est-ce qu'on partage vraiment quelque chose ? En réalité, non. Sur les réseaux sociaux, est-ce que tu vois ce que tu crois ? Ou est-ce que tu crois ce que tu vois ? Sur les réseaux, tu vois ce que tu crois déjà un peu. Parce que c'est comme ça qu'on va tapater. On va te montrer des choses que tu crois déjà un peu et tu vas dire, hé, c'est bien ça. Ça va exactement dans le sens de ce que je pensais.
- Speaker #1
Incroyable.
- Speaker #0
Et on va te faire monter un peu en sauce. On va te radicaliser un peu contre toi-même, d'une certaine manière. Tu te dis, hé, j'ai raison de penser comme ça. Parce que déjà, c'est ce que je pense. Et puis en plus, j'ai raison. Et puis, regarde autour. Snoopy, 75, et Jean-Kévin, 22, mes meilleurs copains. Ils pensent comme moi. Donc, tu ne vois que des choses que tu crois déjà un peu. Tu ne vois que des gens qui croient ou qui pensent comme toi. Et à la fin, ça crée un truc complètement dingue. Quand on te montre une information qui ne va pas dans le sens de ce que tu crois, qui est contraire, qui est contradictoire, plus que contraire, est-ce que tu vas l'analyser, réfléchir, peut-être changer d'avis ? Non. En fait, tu es tellement rentré. dans un processus émotionnel que tu ne supportes pas. Et donc tu vas le rejeter de manière hyper brutale. Et d'ailleurs, en la rejetant de manière hyper brutale, tu vas souvent interagir avec la plateforme. Tu vas mettre un commentaire, tu vas le partager en disant... c'est vraiment des salopards les mecs de l'autre côté. Et donc, l'idée, c'est pas seulement de te maintenir connecté, c'est de te pousser à l'interaction. Donc, il y a ces deux mécaniques. Et donc, à la fin, ouais, je pense qu'on a tous, enfin moi en tout cas, j'ai la sensation d'être un petit hamster qui tourne dans une roue. Et j'aimerais bien qu'on arrête la roue parce que j'en peux plus.
- Speaker #1
Tu conseilles aux gens de plus s'informer par la presse traditionnelle, de décrocher un peu des réseaux sociaux. Mais le problème, c'est que moi, par exemple, je crée du contenu, ça fait aussi partie de mon business d'être sur les réseaux sociaux, et je me sens un peu prisonnière de tout ce qu'on appelle, les gars-femmes c'est Google, Amazon, Facebook, parce que je me dis, moi évidemment je suis journaliste depuis 10 ans, j'ai une déontologie, donc ça m'embête de publier sur ce type de plateforme, mais en même temps j'ai aussi mon business, et il y a plein de gens maintenant dont le business dépend de ces réseaux, donc on se sent un peu... Prise de piège ?
- Speaker #0
Oui, mais moi je ne dis pas qu'il faut interdire les réseaux. Je dis qu'il faut les réguler. Je pense que c'est important de faire la différence entre les deux. Moi je ne suis absolument pas pour la censure. Je pense que les réseaux... sont devenus des médias. Qu'ils le veuillent ou non, ils sont des médias. Et donc ils doivent dépendre des lois sur les médias. Et donc, on va boucler la boucle avec ce qu'on disait au tout début de l'émission, au tout début du podcast, pardon. Mais la loi de 1881 sur la liberté de la presse doit s'appliquer aux médias. Et donc... identifiable, tenu responsable de ses propos. Et là, c'est absolument certain que s'il y a l'obligation pour eux de respecter ces deux principes, ça va beaucoup changer sur ces plateformes.
- Speaker #1
Mais quand on voit tous ces gros patrons... des plateformes, justement. Je sais que, par exemple, l'Europe essaye de les forcer à réguler tout ça, mais maintenant qu'ils sont proches du pouvoir de Donald Trump, je sais qu'il y a aussi des... Maintenant, il y a des espèces de coups de pression politiques pour empêcher cette régulation.
- Speaker #0
Il y a deux types de coups de pression politiques. C'est-à-dire qu'il y a d'un côté un coup de pression politico-diplomatique de la part de Trump et des... patrons de la tech qui poussent en disant non au DSA, le Digital Services Act, qui est la loi européenne qui encadre les obligations faites aux services numériques dans le cadre d'une activité commerciale au sein de l'Union Européenne. Donc il y a ça. Et puis il y a l'autre côté que je trouve, moi, encore plus perverse, qui est de soutenir au sein des pays européens des partis politiques qui vont épouser les idées de ces gars-là. lors des élections européennes et au sein du Parlement européen. Donc c'est pas pour rien que Musk soutient l'AFD et qu'il soutient les partis d'extrême droite en Europe. Parce qu'il les soutient afin d'obtenir d'eux qu'ils votent pour des modifications du DSA ou des suppressions d'un certain nombre de principes légaux qui empêchent les GAFA de tourner comme elles voudraient tourner. C'est vrai, il ne faut pas se tromper. Il y a un énorme combat, c'est presque une guerre, qui se livre là. Et qui se livre avec un adversaire un peu inattendu, qui est l'Union Européenne. Et c'est peut-être quelque chose qu'il faudrait que les gens en sachent. C'est que le seul organisme aujourd'hui qui défend vraiment les citoyens face aux abus des géants de la technologie, c'est l'Union Européenne. Et donc on a tout intérêt à ce que l'Union Européenne soit la plus forte possible, qu'elle dispose de la plus grande légitimité possible, parce que c'est de ce rapport de force-là, entre les big tech et l'Union Européenne, que vont se trancher tout un tas de questions aussi fondamentales que des questions d'information au sein de l'Union Européenne, des questions de liberté fondamentale, des questions de vie privée, des questions de protection. de nos données personnelles et donc de nos intimités. Parce que tout ça, ce sont les vrais enjeux du XXIe siècle. Et je crois qu'il est grand temps que nous, nous comprenions que les outils à notre disposition méritent d'être utilisés. En tout cas, si on ne s'en sert pas, on prend un énorme risque de vivre dans une forme de technodépendance aux géants chinois et américains de la tech et surtout de technophéodalisme, d'être soumis par leur volonté à une manière de voir les choses. à une manière d'exercer la conversation qui, en fait, change le résultat et la fabrique des opinions. Le problème, c'est qu'il joue sur la manière dont on va discuter. Et en gros, ils ne nous permettent plus de faire ce qu'on fait là.
- Speaker #1
Ça me fait penser au nouveau débat qu'il y a maintenant. Je sais que tu es aussi un expert en IA, avec le nouveau géant chinois, c'est DeepSeek, je crois, qui s'appelle. Justement, quand tu parles de protection des données, on a l'habitude... Moi, je m'en sers au quotidien de l'IA. je fais attention, je sais, je pense bien l'utiliser.
- Speaker #0
J'ai pas de problème avec ça.
- Speaker #1
Mais en fait, l'émergence de ce nouveau, de ce nouvel outil chinois qui vient concurrencer ChatGPT, ce que je lisais était super intéressant, on disait qu'en fait, pour la protection de nos données, comme c'est un outil chinois, en fait, si on l'utilise, on sait pas du tout ce qu'ils vont faire, de tout ce qu'ils récupèrent quand les entreprises...
- Speaker #0
Je pense qu'on sait pas du tout ce que Sam Altman avec OpenAI et ChatGPT fait des données. Moi, j'ai trouvé ça un peu rigolo parce qu'effectivement, quand DeepSeek a annoncé son nouveau modèle la semaine dernière, on a vu le patron de ChatGPT, d'OpenAI, nous dire « Oh, mais c'est scandaleux, ils ont volé les données » . Pardon, mais que faites-vous, messieurs ?
- Speaker #1
Avec Mark Zuckerberg,
- Speaker #0
etc. En fait, ils ont tous un peu ce truc-là. Non, là où on voit quand même que... Il y a une différence qui reste entre les IA chinoises et les IA américaines. C'est dans leur manière d'aborder un certain point d'histoire, un certain nombre de points d'information. Et donc, si on s'amuse à lui demander ce qui s'est passé, Plastien Admen, elle ne va pas vraiment vous répondre. Elle va commencer à vous engueuler si vous lui parlez du Tibet. Si vous lui dites que Taïwan, il y a des questions qui se posent. Elles risquent de vraiment vous engueuler et de vous dénoncer. Puis à la fin, elles vont vous déprogrammer l'application. Donc, il y a un truc qui est assez rigolo, effectivement, à voir que ces IA chinoises, elles ont une manière de fonctionner qui a l'air d'être très efficace. Et puis en même temps, elles ont les barrières de leurs fondateurs. Pareil, on l'oublie trop. Les IA, elles sont fabriquées par les humains. Et donc, elles ont les biais, à un certain moment, d'un certain nombre d'êtres humains.
- Speaker #1
Et alors, comment on fait, maintenant qu'on a un peu parlé de tout ça, comment on fait pour apprendre à lutter contre la désinformation ? Comment on reconnaît une fausse image ? Comment on reconnaît une fausse information ? C'est quoi notre boîte à outils dont on dispose ?
- Speaker #0
Alors, déjà, je crois qu'il faut se dire qu'il n'y aura pas de solution technologique. C'est-à-dire qu'il n'y aura pas de... J'entendais quelqu'un l'autre jour qui souhaitait la création d'un Ausha des fake news. Donc un truc où tu chasameras une info et tu saurais si elle est vraie ou si elle est fausse. Je trouve l'idée merveilleuse, mais je ne crois pas vraiment que ça fonctionne comme ça. Justement parce qu'il y a plein de nuances. C'est-à-dire qu'il y a des choses qui sont 100% fausses. La Terre est plate, c'est 100% faux. C'est que des conneries. Les pyramides fabriquées par les extraterrestres, c'est que des conneries.
- Speaker #1
Ça fâchait beaucoup de gens.
- Speaker #0
De toute façon, ils vont être fâchés rien qu'à voir mon visage. Normalement, c'est ce qu'on a. Mais je crois qu'il y a des trucs qui sont objectivement faux et il y a des trucs qui sont faux par interprétation. Il y a des trucs qui sont faux parce que sortis de leur contexte. Il y a des trucs qui sont faux parce que dénaturés. Donc, il y a plein de nuances. Je crois que ce qu'il faut bien avoir en tête, c'est que... La première manière de tomber dans un piège de désinformation, c'est d'y croire un petit peu à la base. C'est-à-dire qu'en fait, les fake news qui vont le mieux marcher sur nous, sont celles qui vont dans le sens de ce qu'on croit déjà un peu.
- Speaker #1
Donc il faut se battre contre soi-même déjà. Alors,
- Speaker #0
voilà. Et donc c'est ce... dire que le premier rideau de défense, c'est de savoir que, un, il y a des fake news. Deux, ces fake news, elles marchent d'autant mieux que elles me plaisent un peu. Et trois, de se dire que quand on pense qu'on ne peut pas nous manipuler, c'est là que va arriver la manipulation. C'est-à-dire que le premier rideau de défense, la première ligne, c'est nous. C'est-à-dire penser contre soi-même, se méfier de ses propres croyances, de ses préjugés. Et donc, c'est un premier travail d'hygiène un peu mentale, personnelle, de dire voilà. Mais il faut que je pose des questions.
- Speaker #1
Ce qu'on appelle l'esprit critique.
- Speaker #0
C'est la base de l'esprit critique. L'esprit critique, c'est bizarre parce que c'est à la fois, tout le monde est prêt à y mettre plein de trucs. Et en même temps, on a tous des définitions différentes. Donc, l'esprit critique, c'est... tout un processus de questions qu'on va mettre en place pour s'interroger et établir un raisonnement. Ce sont les règles pour établir un raisonnement, quelque part. Et le cheminement pour se poser des questions. Donc, il faut se poser des questions, il faut s'interroger, se méfier de nos croyances, de nos préjugés, se méfier un tout petit peu de nous-mêmes. Et je crois qu'il faut bien... Se dire que pour faire ça, mais il faut du temps. Et que dans notre manière d'accéder à l'information numérique... Et bien en fait, on n'a pas ce temps. Une info, on chasse une autre. Les infos sont très courtes, construites et montées de manière à capter notre attention. Ça ne veut pas dire que tout ça ne doit pas être consommé, encore une fois. Ça veut dire que plus le temps s'accélère, moins on a le temps de réfléchir. Moins on a le temps de réfléchir, plus on prend le risque, à un moment ou à un autre, d'être manipulé. reprendre du temps. Le premier conseil, c'est de lutter un peu contre nous-mêmes avec tous ces petits principes qu'on a donnés. Le deuxième, c'est d'essayer de faire du temps, de reprendre un petit peu le temps de s'interroger. Le deuxième conseil, il permet d'appliquer le premier. Et le troisième conseil, c'est effectivement d'essayer d'éviter de tirer des conclusions trop activement, d'éviter de... de prendre les choses de manière trop émotionnelle. Parce qu'on est mis dans un état émotionnel sur ces plateformes. Donc, on va plutôt que réfléchir, on va ressentir une information. Et ce n'est pas la même chose. Donc, il faut aussi se remettre un petit peu à la tête. Et je pense qu'après, il y a plein d'outils numériques qui permettent, par exemple, de vérifier l'origine d'une photo. recherche inversée sur Google, donc vous pouvez prendre une photo et dire, bah tiens, d'où elle vient ? Si c'est une photo faite par un photographe de presse, en général, vous aurez des éléments concrets sur là où ça a été pris, par qui, comment, dans quelles conditions.
- Speaker #1
Et quand aussi, parce que parfois il y a la...
- Speaker #0
Il y a une question de temporalité. Voilà, ça, il y a trois grands principes. Puis derrière, il y a tout un tas de questions, les 5 W. On pourrait dire pour une... Les profs d'anglais vont être contents qu'on s'y perdent travail. Mais donc, il y a ça. Et puis, il y a un moment, il faut multiplier nos sources d'informations. C'est aussi, plus on multiplie les sources d'informations, plus on voit des choses qui vont dans le sens, pas contraire, mais en tout cas dans un sens différent de ce qu'on croit un peu, ça nous ouvre un peu aussi l'esprit. Je crois qu'il faut...
- Speaker #1
Et plus nuancer aussi, ça nous aborde de la nuance.
- Speaker #0
Oui, la nuance, ce n'est pas que une connerie. et en même temps il y a plein de moments dans lesquels finalement tu vois, on parlait tout à l'heure de ceux qui ont vu des différentes nuances de gestes d'indices au bras d'Elon Musk Oui,
- Speaker #1
en fait reste un fait
- Speaker #0
Donc voilà, je crois que c'est important d'être nuancé dans notre interprétation mais que ce qu'on a devant les yeux, on soit capable de le voir de le nommer, de l'identifier mais n'oublions pas un truc un peu aussi, c'est que ... En général, quand on paye pour s'informer, on n'est pas désinformé. Parce qu'il y a cette relation-là. Donc, on paye pour s'informer, vous achetez de la confiance. Vous achetez le fait que Lacroix, Ouest France...
- Speaker #1
Ou des moyens d'enquêter aussi.
- Speaker #0
Et en plus, on donne un peu le pouvoir aux journalistes au sein des rédactions. Et voilà. Et puis, c'est aussi une entreprise, un journal. Donc, ce n'est pas fait que pour... faire, entre guillemets, une espèce d'image du bien, de l'éthique, de tout ça. Ça fabrique de l'information dans les meilleures conditions déontologiques possibles, mais c'est des marchands de tapis.
- Speaker #1
Et aussi...
- Speaker #0
Comme moi.
- Speaker #1
On disait tout à l'heure que c'est compliqué de réguler les réseaux sociaux avec toutes les forces, l'Europe, les Etats-Unis, les GAFAM. Mais est-ce que... J'ai fait un épisode justement là-dessus sur le podcast, sur l'éthique en tant que créateur de contenu. et personnes qui sont sur les réseaux. Moi, j'estime que... Je parlais de Spotify, qui, pareil, alors ils ne sont pas américains, mais voilà, ils produisent du organe, ils ont donné de l'argent pour organiser des événements dans le cadre de l'investiture de Donald Trump. Moi, j'estime qu'en tant que créatrice de contenu, que journaliste sur les réseaux sociaux, j'ai aussi une responsabilité de ne pas faire n'importe quoi. Je pourrais dire plus ou moins n'importe quoi. Mais je me considère responsable et je pense que les créateurs de contenu, par exemple, j'ai eu des retours sur cet épisode de Podcaster qui disaient « En fait, je n'ai pas conscience que je peux influencer des gens quand je parle, parce que moi, je parle, je ne me rends pas compte du pouvoir que je peux avoir sur les gens. » Et c'est vrai que ce que tu as dit, ça m'a fait réfléchir sur « Il faut que je fasse plus gaffe quand je m'exprime. »
- Speaker #0
Ça va un peu dans le sens d'une étude qui a été publiée, il me semble, par... L'UNESCO, récemment, qui montrait, ils avaient auditionné des centaines et des centaines d'influenceurs sur les réseaux sociaux, sur les questions un peu démocratiques, et sur la conscience qu'ils avaient ou non de leur influence et le poids que ça pouvait avoir. Et du coup, il y en avait plus de deux tiers des personnes interrogées qui disaient qu'ils avaient envie d'être formés à ces questions-là, à ces questions de déontologie, à ces questions peut-être de vérification d'informations et tout. Et je trouve qu'il y a une espèce d'énorme naïveté à ne pas le penser comme un prérequis et comme un présupposé obligatoire à la fabrication de contenu. Mais effectivement, je viens à la fois d'un... d'un autre univers, d'une autre époque et d'une autre manière de faire. Pour moi, l'information, c'est important. Ça mérite d'être fabriqué correctement. Je pense que ça dit un truc qui est un peu terrifiant, en fait. Que des gens puissent s'imaginer faire ça sans réfléchir une seule seconde à la qualité de ce qu'ils disent, d'un point de vue... Parce qu'ils pensent... qu'ils font un produit de qualité ou non. J'ai fait un bon podcast, j'ai fait une bonne vidéo. Ils essayent de faire un truc qui, selon leurs critères, a une forme de qualité. Mais de qualité informationnelle, de ne pas se poser cette question-là, ça me sidère un peu. Mais voilà. À côté de ça, on va essayer de voir les choses de manière encourageante dans cette période. sombre, on n'a pas beaucoup de bonnes nouvelles, ça dit que ils sont capables d'évoluer. Et donc, ils sont capables de se former, en tout cas, ils demandent à se former sur un certain nombre de sujets. Et donc, peut-être qu'une fois formés, ils prendront ça en considération de manière plus importante. En tout cas, c'est mon souhait. Et puis, on verra bien, mais Mais oui, il y avait plein de gens qui trouvaient ce chiffre hyper encourageant. Et je suis d'accord qu'il a quelque chose d'encourageant. Parce que si les mecs disaient, on est deux tiers à ne pas vérifier nos infos, et puis en plus on s'en fout, ça serait horrible. Dommage. Là, ils disent quand même qu'ils veulent apprendre à faire un peu de base de gestion éditoriale. Donc, il y a quelque chose de pas décourageant.
- Speaker #1
Ouais, il y a une prise de conscience. Mais c'est vrai que, tu vois, dans les retours de mon épisode, il y avait des gens qui me disaient « Mais attends, ce que tu racontes, c'est basique » . J'ai dit « Oui, mais moi, par exemple, je suis journaliste. Donc, avant d'être podcasteuse, j'ai eu une déontologie. J'ai appris des règles qui font que quand je fais mon podcast ou quand je j'annonce des faits, je sais que ça soit au max sourcé. » Enfin, voilà, je prends aussi en considération les gens qui vont m'écouter. Je les respecte même dans les paroles que j'ai. Et pour moi, c'est la base. Les gens me disent que c'est la base. Je cite sans citer les gens, mais je donne des cas concrets de ce que j'ai entendu en tant que podcasteuse. Et ils me disent que c'est effrayant. Et je dis que les gens ne se rendent pas compte que... En fait, c'est ce qu'on parlait. Il y a une différence entre la liberté d'expression. Je ne dis pas qu'on ne peut pas dire ce qu'on veut, mais en même temps, on est responsable puisque des gens nous écoutent.
- Speaker #0
C'est toujours l'espèce de double truc. Non, mais je pense que ça tient aussi au fait qu'il y a tout un tas de gens qui se retrouvent aujourd'hui à... avec des grosses communautés qu'il n'avait pas prévues. qui sont allés un peu comme ça. Et ça a marché. Tant mieux pour eux. Ma boucle. Mais du coup, ils n'étaient pas prêts à ça. Là, je ne sais pas. Je me demande si, quand tu es jeune journaliste... réfléchis un peu à ces sujets parce que tu te les poses un peu ces questions est ce que tu tu y penses un peu ou je dirais un truc c'est que il ya un super bouquin à liser des livres qui s'appelle journaliste de françois simon françois simon c'était un collègue du d'Hubert Boeufmery au Monde. Hubert Boeufmery était le fondateur du journal Le Monde. Et donc, il écrit... C'est un petit bouquin, ça fait 110 pages. Et il essaye de décrire ce qu'est un journaliste. Et notamment sur tous ces sujets-là. Et au bout d'un moment, il se rend compte que... Enfin... Il fait le rapport sur sa propre vie et sur son truc. Et il nous dit que son rapport... à son métier. En fait, c'était ça qui guidait sa déontologie. Et que, finalement, même s'il y a la fameuse charte de Munich, dont tout le monde parle, mais en réalité, oui, c'est les principes fondateurs et tout. qui correspondent plutôt à des journaux d'investigation, de presse écrite, qu'à d'autres formes de médias. Mais d'une manière générale, il y a une forme d'éthique journalistique à avoir. Et cette éthique, on est bien soumis à la même. souvent très seul pour y faire face. Le reporter sur le terrain, il est tout seul. Et si il bidonne le truc, c'est difficile de savoir qu'il l'a bidonné. Donc il y a un moment, il y a une forme de chaîne de la confiance qui s'instaure, et il y a une chaîne de l'obligation de la manière de travailler. Donc on voit bien qu'il y a des moments dans lesquels tout ça explose totalement. Je pense à l'affaire du petit Grégory, qui est l'affaire emblématique de... de tout ce qu'il ne faut jamais faire quand on est journaliste ou quand on dirige un média, et de tout ce que la concurrence du scoop a pu apporter de plus terrible, en plus avec une famille au milieu, enfin des trucs, voilà. Et en plus, au même moment, un pouvoir policier, gendarme et judiciaire qui complètement la ramasse et qui, du coup, ne fait que polluer ces scènes de crime de tous ces journalistes qui débarquent. C'est le cauchemar absurde.
- Speaker #1
Parce qu'il y a carrément un journaliste qui devient acteur de l'histoire.
- Speaker #0
En l'occurrence, oui. Ce n'est pas le seul cas dans l'histoire des faits divers où les journalistes ont joué un rôle. Il y a eu plein d'autres moments. Je pense à des histoires aux Etats-Unis, notamment l'histoire du Zodiac, dans laquelle il y a un journaliste qui est contacté par le tueur à un moment ou à un autre. C'est déjà arrivé. Mais là, c'était surtout sur le côté système de la chasse aux scoops qui a fait péter les plombs à tout le monde et qui a rendu tout le monde... peut-être pas débile, mais au moins un peu fou, et qui a d'ailleurs marqué pas mal de monde. Denis Robert, le fondateur du média en ligne Blast, qui est un très grand journaliste d'investigation, lui, il a vécu cette époque-là, et il l'a vécu comme quelque chose de traumatisant. Ça l'a dégoûté du milieu. Il y a pas mal de journalistes qui ont vécu ce truc-là de manière qu'ils ont été un peu dégoûtés du métier. Ok.
- Speaker #1
Si tu devais donner un conseil aux personnes qui nous écoutent et qui ont envie de se réapproprier leur pouvoir de s'informer, tu leur dirais quoi ?
- Speaker #0
Je leur dirais de regarder la presse payante et de choisir celle qui leur correspond le mieux. Et d'essayer de le suivre un petit peu. Il y a aujourd'hui des formules d'abonnement qui sont à 10%. euros par mois sur internet pour avoir accès au journal et à toutes ces archi-livres et même à télécharger le journal en PDF pour le lire. En fait, je pense que c'est important que l'objet informationnel redevienne un objet. que les gens comprennent que... Quelle vertu ça a de lire un journal en entier ? Peut-être pas, mais en tout cas d'avoir un journal, c'est qu'il y a toute l'information dans cet objet. Mais donc il y a des informations qui sont plus importantes que d'autres. Ça ne veut pas dire qu'il y a des informations moins importantes. c'est à dire qu'il y en a qui sont plus mis en avant que d'autres pourquoi ? parce qu'il y a une hiérarchie mais donc ça nous permet de comprendre les choses ça nous permet de comprendre le monde ça nous permet de juguler nos opinions nos impressions donc il y a tout ça donc je pense que le vrai conseil que je donnerais c'est de se trouver un journal qui nous correspond et il y en a plein il y en a des super, il y en a des hebdos des mensuels, des quotidiens il y en a plein de sortes ils sont super et donc choisissez-en un et soutenez-le parce qu'en le soutenant vous allez donner aux journalistes qui le fabriquent la force de fabriquer la meilleure info pour vous et de créer un cercle vertueux. Je crois qu'on a bien besoin de créer des cercles vertueux en ce moment.
- Speaker #1
Autre question sur ce podcast, justement, on parle de désinformation, on a des gens à me s'informer. Qui tu aimerais avoir à ce micro pour justement parler de ce sujet ? Est-ce qu'il y a quelqu'un que tu aimerais entendre ?
- Speaker #0
Je pense que l'une des vraies manières de réfléchir à tous ces sujets de désinformation, C'est d'essayer de comprendre un peu mieux comment notre cerveau fonctionne, de comprendre comment fonctionnent nos biais cognitifs, comment fonctionne tout ça. Et donc, je te conseillerais d'inviter quelqu'un que j'aime beaucoup, dont je lis les livres, et qui me passionne depuis des années, qui s'appelle Albert Muckeiber, qui est un psychologue, un chercheur en neurosciences, qui est un homme brillant en plus, d'être une personne absolument adorable et sympathique. Et donc, je te conseillerais d'inviter Albert Muckeiber. Et... Et je réfléchis à trouver une femme dans le même genre pour réfléchir à la manière dont on accède à l'information, et peut-être pour les plus petits. d'interviewer une femme qui s'appelle Rosemary Farinella, qui avait développé une méthode d'éducation aux médias dans les écoles primaires, dans laquelle elle apprend aux gamins en CM1, CM2 à vérifier des infos. C'est absolument génial. Elle a plein d'anecdotes super à raconter. Elle a écrit des livres et elle a reçu le prix de la meilleure initiative pédagogique de l'UNESCO en 2000. 2015 ou 2016, j'ai un affreux doute. Voilà, super personne, hyper intéressante, et qui, sur ces sujets, ouvrirait un peu des écoutines un peu différentes.
- Speaker #1
Trop bien. Je note. On a parlé vaguement de ton livre Anti-Fake News, qui est super. Moi, j'ai trouvé très cool. Ça a vraiment vulgarisé autour de tout ce phénomène de désinformation en théorie du complot. Où est-ce qu'on peut te retrouver et c'est quoi tes actus ? Je crois que tu écris un nouveau livre en ce moment.
- Speaker #0
Alors moi j'écris un bouquin chez la même maison d'édition, donc aux éditions First, qui va s'appeler Résister aux fake news et qui sortira avant l'été. Je suis aussi dans la grande semaine sur M6, tous les samedis à 17h40. C'est un talk show présenté par Ophélie Meunier. Moi je fais partie de la bande de chroniqueurs autour de Anne-Sophie Girard, Baptiste Desmontiers, Nora Malagré. Kelly Massol Carole Jugeley-Welling enfin voilà il y a toute une petite bande et puis j'ai un un truc, bah justement si les gens veulent savoir si c'est une théorie du complot ou si c'est vrai, et bien ils peuvent aller sur anti-fake news AI anti-fake news AI, c'est un compte insta et tiktok dans lequel on déconstruit les théories du complot et les fake news avec un faux Thomas Huchon
- Speaker #1
Oui, ça, il faut que tu m'expliques. J'ai vu que tu avais un avatar.
- Speaker #0
Moi, j'ai créé un faux Thomas Huchon. C'est-à-dire que j'ai créé un avatar numérique en intelligence artificielle qui fait les vidéos à ma place sur Instagram pour aller plus vite, à la fois en termes de coût de production et de rapidité de répondre aux théories du complot qui circulent sur les réseaux sociaux. Et donc, on fabrique d'une manière un peu originale. Voilà, et on va sur ce projet qui est un petit média. essayer de sortir de nouvelles choses, bientôt une chaîne YouTube, peut-être des podcasts, des vidéos. En tout cas, on y réfléchit. Donc, plein de nouvelles choses. Mais pour l'instant, effectivement, principalement le bouquin et l'émission dans la grande semaine.
- Speaker #1
Ok. Écoute, super. Moi, j'ai vu ton compte Instagram avec cet avatar. Je trouve ça trop cool.
- Speaker #0
Allez-y, likez, donnez de la force.
- Speaker #1
Allez. Je vais mettre l'Instagram pour que les gens puissent te suivre. Et en tout cas, merci. C'était super, cette interview. J'espère que les gens ont appris quand même... plein de choses, je pense que oui. Et je trouve ça cool de savoir qu'il y a des outils, en fait, pour essayer de se battre un peu contre cette désinformation. Ouais,
- Speaker #0
après, tu l'as compris. Le seul vrai outil,
- Speaker #1
c'est le cerveau.
- Speaker #0
Merci à toi.
- Speaker #2
Merci beaucoup d'avoir écouté cet épisode jusqu'au bout. Si ça t'a plu, n'hésite pas à commenter, partager, en parler autour de toi. Tu peux aussi t'abonner à ma chaîne YouTube et mettre une note sur Spotify. C'est hyper important pour soutenir le podcast. Ça m'aide non seulement pour continuer, mais aussi aller chercher de nouveaux invités pour te proposer toujours plus de coulisses et de décryptage média. Je te le dis en off revient un lundi sur deux à 18h. Je vous donne rendez-vous très bientôt pour l'épisode 6. Hey ! Je te le dis en off.