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La vie est belle, essaie-la !

Loïc Résibois – Le droit de choisir – Partie 1

Loïc Résibois – Le droit de choisir – Partie 1

30min |01/11/2024
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Loïc Résibois – Le droit de choisir – Partie 1

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Description

Loïc Résibois, 46 ans, a reçu il y a un an et demi le diagnostic de la maladie de Charcot. Depuis, il mène avec détermination et courage un combat pour défendre l’aide active à mourir, tout en exprimant une puissante envie de vivre. Comme la plupart des personnes atteintes d’une maladie incurable, Loïc souhaite avant tout profiter de chaque instant avec ses proches et ses amis, savourant chaque moment de bonheur possible…


Depuis l’enregistrement de ce podcast, Loïc nous a quittés le 24 septembre 2024, à l’Île de Ré. Nous tenons à lui rendre un hommage appuyé. Au cours des deux dernières années, Loïc a accompagné l’ARSLA avec une bonne humeur communicative, même dans les périodes les plus difficiles. Il a su nous interpeller et nous mobiliser sur des sujets essentiels. Nous pensons à lui et à toute sa famille.



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Nous remercions chaleureusement toutes les personnes qui ont participé à cette première saison : personnes malades, aidants, proches, professionnels de santé.


Un immense merci également à la Fondation d'entreprise IRCEM pour son précieux soutien, ainsi qu'à l’Agence CosaVostra pour la réalisation du visuel du podcast.


Ce podcast de l'ARLSA a été réalisé par Natacha Sels, la post-production est de Bertrand Chaumeton.

 

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Bonne écoute !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Natacha Sels

    La vie est belle, essaie-la ! (SLA), le podcast de l'ARSLA, qui met en lumière des personnes confrontées à la SLA et des professionnels engagés.

  • Loïc Résibois

    Même si je milite pour l'aide à mourir, mon envie de vivre est très très forte.

  • Natacha Sels

    Loïc Résibois, le droit de choisir, partie 1. Aujourd'hui, j'ai rendez-vous avec Loïc Résibois, atteint de la maladie de Charcot depuis un an et demi. De lui, je connais seulement un combat. légaliser l'aide active à mourir en France. Je vais découvrir un homme qui a la fureur de vivre chevillé au corps, l'humour en bandoulière, cachant à peine sa générosité et l'amour de son prochain. Son entourage et tous ceux qui le suivent le lui rendent bien. Tandis que je me dirige vers son domicile, une maison dans les environs d'Amiens, je retrouve le ciel gris du nord. Il fait beau, puisqu'il ne pleut pas, et sur les bas côtés, l'explosion de jonquilles fait figure de soleil. La maman de Loïc vient m'ouvrir. Elle et son mari sont venus prendre le relais de son épouse absente pour la semaine. Sa fille Capucine donne le ton.

  • Capucine Résibois

    Alors mon père, il est assez grand, il fait 1m85, il a les yeux bleus. Il est brun avec des cheveux plutôt courts mais pas le crâne rasé. Il est sportif, il a toujours été sportif. Et puis c'est quelqu'un de très généreux, c'est quelqu'un de très altruiste. C'est lui qui m'a appris le roller, notamment à l'île de Ré dans son endroit préféré. Au-delà de ça, il pratiquait le tennis, donc il m'a essayé de partager la passion du tennis, mais ça n'a pas trop marché pour moi.

  • Natacha Sels

    Est-ce que c'est un gentil papa ?

  • Capucine Résibois

    Oui, c'est un très gentil papa quand il veut. Pas toujours. Non, il est très gentil, mais il a toujours été... Je pense que les plus grandes valeurs qu'il m'a transmises, c'est surtout la générosité et l'altruisme, le fait de penser aux autres, de vouloir toujours aider les autres, les gens dans le besoin. Voilà, il a toujours voulu aider. Il a toujours voulu aider, et c'est lui qui m'a transmis ces valeurs-là.

  • Loïc Résibois

    On est dans mon salon avec une cheminée, j'adore ça, c'est hyper important pour moi. Je trouve que ça donne de la chaleur à la maison. Alors je ne peux évidemment plus allumer le feu moi-même, mais c'est hyper important pour moi. À côté de nous se trouve une grande cage. À l'intérieur de cette cage, un magnifique perroquet qui s'appelle Nina. C'est un éclectus femelle. qui a un caractère de cochon et qui n'est gentil qu'avec notre fille Capucine. Je dirais même qu'elle est un peu amoureuse de Capucine. Elle lui lisse ses cheveux, elle lui fait des bisous, parce que les perroquets ça a une langue, et donc elle passe la langue sur son visage, c'est très étonnant. Et alors quand elle parle, elle a pris la voix de Capucine, c'est hyper surprenant.

  • Natacha Sels

    En tout cas, elle a des couleurs absolument incroyables.

  • Loïc Résibois

    Et un peu plus loin, tu as un billard, ça c'est hyper important pour moi, j'adore jouer, j'adore le jeu. je peux plus jouer mais les copains du tennis après l'entraînement débarquer à la maison et jouer au billard avec moi c'est super ça nous permettait de continuer à avoir des rapports un peu de compétition et généralement vers une heure du mat' Caro pétait un câble en disant que tout le monde se barre pour qu'ils puissent enfin dormir tellement ça rigolait fort donc voilà j'ai très souvent du monde qui passent à la maison et en fait C'est aussi une charge mentale pour mon épouse parce qu'elle a envie de montrer qu'elle s'en sort, qu'elle est forte, que la maison est bien tenue. Et donc, c'est bien pour moi, mais ce n'est pas forcément facile pour elle. Alors pour la presse, elle sait que c'est devenu mon combat, que c'est très important pour moi et pour mon moral. Elle prend sur elle, mais j'ai aussi conscience et je la remercie. C'est encore un effort supplémentaire que je lui demande.

  • Natacha Sels

    Et là, en ce moment, elle n'est pas là. Elle n'est pas là, mais à la maison, il y a tes parents.

  • Loïc Résibois

    Alors, quand mon épouse travaille, ce qui arrive encore deux demi-journées par semaine, ou là, elle est partie en vacances, en fait, il y a les gens qui viennent me garder. C'est l'expression que j'emploie parce que c'est un peu vrai, ça correspond à la réalité. C'est un peu infantilisant, mais c'est exactement ça. Et donc, mes parents sont venus me garder. Et c'est évidemment super de les avoir à mes côtés, mais pour eux c'était pas facile. Ils ont 76, 75 ans.

  • Natacha Sels

    Et donc toi tu te bats pour le choix de la fin de vie, de façon générale et spécifiquement pour la maladie de Charcot. Est-ce que tu peux m'en dire un peu plus ?

  • Loïc Résibois

    Alors d'abord, je vais préciser que ce n'est pas parce que je milite pour l'aide à mourir que je veux mourir. Moi, comme la grande majorité des malades condamnés ce qu'on veut c'est profiter du temps qui nous reste de nos proches de nos amis être heureux le plus longtemps possible mais l'aide à mourir c'est à la fois la garantie d'une mort sans douleur au moment voulu et le au moment voulu c'est très important et c'est surtout la garantie d'une fin de vie sereine parce qu'en fait tu sais que tu seras jamais en cette situation où tu es pas encore mort mais plus tout à fait vivant. Moi c'est ça qui me fait peur, j'ai compris que j'allais mourir, j'ai envie de dire. On sait tous qu'on va mourir un jour moi ce que je veux c'est bien mourir, c'est avoir une mort digne et qui corresponde à la vie que j'ai vécue en fait. Je sais pas quand, je te dirai j'en peux plus m ais je ne sais même pas si ce moment va arriver, mais savoir que si un jour je dis je n'en peux plus, je veux que ça s'arrête, on puisse faire en sorte que ça s'arrête rapidement. C'est de nature à lever énormément de mes angoisses, mais en fait des angoisses de dizaines de milliers de malades condamnés. Le système qui existe en France, c'est la sédation profonde et continue jusqu'au décès, qu'on appelait avant euthanasie passive. Ce système qui consiste à attendre que le malade soit à l'article de sa mort pour l'endormir, cesser les traitements, cesser de l'hydrater et de l'alimenter. Et ensuite, on attend. Son visage s'amaigrit, son corps s'amaigrit, le malade fini soit par mourir de sa maladie pour les plus chanceux soit par mourir en fait de déshydratation que ces organes lâchent les uns après les autres la mort prend de quelques heures à trois semaines. Ma question est la suivante quel intérêt de faire vivre à des gens qui ont déjà souffert pendant des mois une agonie aussi longue, à la fois pour le malade, mais aussi pour ses proches ? ça n'a aucun sens. La sélation profonde et continue est faite pour le confort du soignant, qui n'a pas l'impression de donner la mort, et pas pour le confort du malade. Et je trouve qu'il aurait fallu changer un peu le paradigme des médecins, et qu'on mette le patient au cœur de la préoccupation des médecins. Et quand on voit à quel point, et j'en suis le premier témoin, l'envie de vivre est surprenante, incroyablement forte. Quand un malade condamné dit de manière claire et éthérée qu'il veut mourir, c'est vraiment qu'il n'en peut plus et donc pour moi accompagner ce malade jusqu'à la mort c'est juste un acte ultime de soins et j'irai jusqu'à dire d'humanité et ce n'est pas du tout une inversion et une rupture anthropologique comme certains le disent, sous la réserve bien évidemment, qu'on mette en place l'aide à mourir, mais qu'on renforce aussi l'aide à vivre.

  • Natacha Sels

    La sonnerie de la porte retentit. C'est déjà l'équipe du DASMO 80. Loïc m'avait prévenu. J'ai un rendez-vous chez la pneumologue référente de la SLA au CHU d'Amiens. J'attends ça depuis un an. Je ne peux pas le manquer. Si tu veux, tu m'accompagnes. J'avais bien sûr accepté.

  • Albane

    Marthe et Albane.

  • Natacha Sels

    Enchantée.

  • Albane

    Moi je suis l'infirmière de coordination du DASMO du coup.

  • Marthe

    Et moi je suis l'éducatrice spécialisée du DASMO.

  • Albane

    Loïc c'est un visage plein de sourires, un regard plein de malice. Il a de très grandes mains et tout est très grand et c'est quelqu'un qui inspire la sympathie. On est venu l'accompagner dans le transport et puis dans la consultation à l'hôpital,voilà.

  • Natacha Sels

    Donc là on va à l'hôpital

  • Albane

    Exactement. Dans son parcours de soins, il y a une nécessité de consultation et du coup on l'accompagne dans ce projet là. O n reste comme ça ? Oui, je veux bien que vous descendiez l'acoudoir, que vous me filiez mon téléphone et après je suis paré pour vous accompagner. allez hop puis l'ordonnant c'est bon maman et ma carte vital c'est parti c'est bon oui ouais c'est juste placer maman bien sûr ça m'énerve et où le mappol

  • Natacha Sels

    C'est à peu près à quelle distance l'hôpital ?

  • Loïc Résibois

    On est à, je ne sais pas, 25 kilomètres peut-être. Ah oui. Je t'avoue que je ne suis pas âgé. Je suis content de rencontrer la pneumo référente de la SLA, mais je lui en veux parce que ça fait un an que je cherche désespérément. Alors on peut être en flux. Et en fait, là, une fois de plus, je constate que je parviens à rencontrer parce que j'ai dû activer mon réseau. Moi j'essaie de battre aussi pour les gens qui n'ont pas de réseau. Et je fais l'opinion en fait, depuis 20 ans longtemps, je commence à avoir peur Martin. La priorité à droite qui est agréée, ça fait... Ouais ouais c'est ça ! Je fais un clin d'œil ! Et donc en fait je constate que les gens qui n'ont pas de connaissance... C'est encore plus difficile pour eux. Et tu vois, même si je milite pour l'aide à mourir, je parle de plus en plus d'aide à vivre, parce que je constate qu'il y a de nombreux malades qui veulent en finir. Évidemment qu'ils souffrent de leur maladie, mais en fait, ils souffrent aussi beaucoup du fait que notre système de soins est un peu à l'agonie, et donc on n'arrive pas à répondre aux demandes matérielles. technique des gens et ça pour moi c'est pas un bon motif pour vouloir en finir. Moi je note les gens qui demandent d'aide à mourir c'est parce qu'ils ne supportent pas leur maladie, pas parce que notre système de soins est incapable de répondre à leurs besoins.

  • Natacha Sels

    Tu as quel âge Loïc ?

  • Loïc Résibois

    J'ai 46 ans, ma femme à 47 et moi je tiens vraiment à souligner le fait qu'avec moi elle est juste incroyable. J'ai toujours peur. Même si je fais des blagues avec elle, qu'elle finisse par se lasser, se rouler les dents, parce que c'est hyper dur. C'est pas seulement du matin au soir. Moi, c'est même la nuit, parce que la nuit, je lui demande de me retourner dans le lit. Faut bien imaginer, un malade de charcot, au bout d'un certain temps, il ne peut même plus se tourner dans son lit. Je peux même pas me gratter la tête. Enfin, c'est quand même très très dur à vivre au quotidien. Même si je précise qu'aujourd'hui, je suis encore heureux. Et j'ai envie que ça continue comme ça. On arrive devant le...

  • Natacha Sels

    Le chien.

  • Albane

    Ouais, c'est ça.

  • Loïc Résibois

    Natacha je te laisse te présenter et tenter ta chance toi-même. On verra si tu es persuasive ou pas.

  • Natacha Sels

    Loïc ne rate pas une occasion de plaisanter. Et le docteur Mailleux, pneumologue référente SLA, accepte de prendre un peu de son temps pour répondre à quelques-unes de mes questions.

  • Dr Mailleux

    Alors, la référente est d'un bien grand mot, c'est-à-dire que j'ai un peu plus l'habitude de prendre en charge ces patients. Mais on est une équipe de pneumologues et mes collègues ont quelques patients aussi. J'ai peut-être une plus grande, on va dire, patientelle sur ce sujet-là.

  • Natacha Sels

    Et la question que je me posais, c'est qu'est-ce que ça fait d'avoir en face de soi des personnes qu'on ne peut pas guérir quand on est médecin ?

  • Dr Mailleux

    Alors, on est content de pouvoir les aider déjà. Ne pas les guérir, c'est difficile, mais on ne les leurre pas. Je veux dire, déjà, eux savent très bien. Nous, on essaye d'améliorer le confort de vie. en proposant des techniques de ventilation par exemple quand c'est le moment, en sachant que l'arrière-pensée ne peut pas leur rajouter trop de contraintes non plus. Et donc il faut faire très attention à ce qu'on propose aux patients qui sont devant nous, à la charge de travail que ça va occasionner, aux contraintes. Il faut vraiment se poser les bonnes questions.

  • Natacha Sels

    Est-ce qu'il y a une façon au niveau psychologique dont vous pouvez aider ces patients-là aussi ?

  • Dr Mailleux

    Oui, parce qu'on peut déjà, il faut les prendre en charge avec un vocabulaire adapté à chacun et à leurs problèmes. S'imaginer qu'elle peut être la vie à domicile et être le plus, on va dire, bienveillant possible. Essayer de répondre à leurs attentes de rendez-vous. quand on peut, à leurs attentes de questionnement, de les entourer au mieux, dans une atmosphère, on va dire, plutôt rassurante, sans les leurrer quand même. Donc il faut faire très attention de ne jamais prononcer des mots qui pourraient les heurter, mais il faut quand même poser les bonnes questions, sur la prise en charge actuelle ou à venir. Ça c'est important.

  • Natacha Sels

    Vous parlez du futur avec eux ?

  • Dr Mailleux

    Tout à fait. Alors, de futur, on parle de futur, mais de directives anticipées aussi. Et donc, pas sur une première rencontre. jamais parce que je ne sais pas qui j'ai en face de moi et quels sont les affects, comment ça se passe, déjà ce que sait le patient. Mais on approche tout doucement les vraies questions au fur et à mesure des consultations bien sûr.

  • Natacha Sels

    À un moment il y a la question de la trachéotomie, c'est ça ?

  • Dr Mailleux

    Tout à fait. Alors ça c'est une question sérieuse. qu'on n'aborde pas toujours. Personnellement, je ne parle certains patients, je n'ai jamais parlé de trachéotomie tout au long du suivi parce que eux savent, s'ils ne nous posent pas la question et si moi je ne l'aborde pas, ça veut dire en soi qu'ils ne sont pas forcément prêts à y accéder. Et pour leur éviter d'avoir à y réfléchir en oui ou non, on n'aborde pas la question. Alors par contre, ceux qui connaissent la technique, et la majorité de toute façon la connaissent, surtout dans l'évolution de la pathologie, les patients qui sont très demandeurs vont nous le dire dès le départ. Alors après, on peut changer d'idée avec l'évolution, mais souvent, je veux dire, ça va être immédiatement demandé. Alors pas forcément sur cette parole de trachéotomie, mais quelquefois en disant... veux tout docteur, vous allez m'aider, je veux tout, j'ai des choses à faire et à vivre. On a très bien compris quand on nous annonce ça. Donc on suit.

  • Natacha Sels

    Alors aujourd'hui j'étais venue interviewer Loïc et il y a quelques jours il m'a dit ça y est j'ai un rendez-vous que j'attends depuis très très très longtemps. Qu'est-ce qui fait qu'il a attendu aussi longtemps pour un rendez-vous en pneumonie ? Il m'a parlé d'une année.

  • Dr Mailleux

    Alors oui c'est ce qu'il m'a dit. Alors j'étais très surpris. Moi j'ai des correspondances là sur la fin de l'année. C'est vrai que j'ai dû voir passer sa demande, alors un an ça me paraît compliqué, mais j'ai dû voir passer sa demande, mais étant donné qu'il avait un suivi sur Paris qui était bien mené, je pense que du coup on ne l'a pas mis dans nos priorités de rendez-vous. Il n'a pas été complètement abandonné puisqu'il a quand même vu les neurologues à plusieurs reprises. Et c'est pareil, je pense que si mes collègues neurologues avaient senti le besoin, ils m'auraient intercepté. Donc voilà, peut-être qu'en effet on a raté quelque chose parce qu'on n'a pas compris le besoin, mais il était suivi. Rassurons-nous tous.

  • Natacha Sels

    Tandis que Loïc passe une batterie d'examens, Albane, l'infirmière coordinatrice et moi discutons à voix basse dans la salle d'attente. Elle a beaucoup de choses à dire, Alban, et je souffre de ne pouvoir lui tendre le micro. Heureusement, les infirmières du service sont sympas et nous trouvent un endroit où nous isoler.

  • Albane

    En réalité, je ne soigne pas les gens, je les aide à vivre leurs besoins d'être. Et j'essaye de faire au mieux. d'être le plus invisible possible pour permettre aux gens d'être ce qu'ils sont. Et je suis le porte-parole, la confidente, et c'est en ça que je vois le soin, pas forcément en termes techniques. Mais une infirmière sait aussi savoir s'asseoir à côté de la personne, d'échanger ou ne serait-ce que d'écouter.

  • Natacha Sels

    On en parlait là, assises toutes les deux dans la salle d'attente, mais pour toi, c'est quoi la vie, c'est quoi la mort finalement ?

  • Albane

    C'est deux grandes copines. C'est à dire que pour moi l'un ne va pas sans l'autre, elles sont indissociables et on se pose tellement de questions au sujet de la vie et pourtant la mort elle reste toujours de côté la pauvre. Et tout au long de notre vie on sera amené à la côtoyer et je trouve ça triste qu'on doive la mettre de côté parce qu'on a peur alors qu'au final pour moi Accompagner la mort, c'est comme accompagner la vie, ça reste un soin.

  • Natacha Sels

    Qu'est-ce qu'elle peut nous apporter, la mort, si on la regarde un peu plus près, si on ose la regarder ?

  • Albane

    Déjà, la mort, moi je la vois comme une délivrance. Mais au-delà de ça, ce qui pour moi est difficile à... à accepter en tant que personne et en tant que soignante, c'est de voir les gens souffrir. Et je ne parle pas forcément de la souffrance physique, c'est aussi de la souffrance psychique. Et pour en revenir à Loïc, je pense que c'est ça dont il a peur, c'est de souffrir, aussi bien d'un point de vue physique, mais c'est cette souffrance que peut éprouver une personne malade qui est dépendante. de voir le regard des gens qu'il aime changer parce qu'il est dépendant, parce qu'il a besoin de ces personnes-là pour vivre, tout simplement. Et ce changement de regard, ça peut faire beaucoup de mal, en fait, parce qu'on perd son identité. Et je pense que tant qu'on ne l'a pas vécu, tant qu'on n'est pas dans cette situation d'extrême nécessité, de dépendance, On ne peut pas comprendre qu'on puisse avoir besoin d'exprimer cette envie, de choisir quand est-ce qu'on doit partir.

  • Natacha Sels

    Sur le trajet du retour, nous continuons d'échanger. Pour Loïc, communiquer c'est la vie. Et moi, j'ai hâte de savoir comment s'est passée la rencontre avec la pneumologue.

  • Loïc Résibois

    Oui, elle était très bien, c'est pour ça que j'étais déçu de devoir lui dire que j'avais détesté pendant des mois. En fait, je crois que c'est le système qui ne va pas. Ce n'est pas vraiment les individus. C'est trop de patients, pas assez de moyens. C'est aussi simple que ça. Et donc, ça génère de la maltraitance. J'ai envie de dire, et du personnel qui est frustré de ne pas bien pouvoir prendre en charge des patients. Et des patients qui pensent que les médecins s'en foutent. Et donc, ça génère aussi certainement d'agressivité inutile.

  • Albane

    C'est bon.

  • Loïc Résibois

    J'ai plein de plaisir que je dois arrêter, auxquels je dois renoncer. Par exemple, l'ortho me dit que la viande, c'est très bien d'arrêter et de la hacher. Ah ben non. Moi, franchement, j'ai envie de manger un steak. de sentir le plaisir ben non je vous l'ai dit je peux pas le jour où peut-être j'aurai peur parce que la peur est un moteur hyper important par exemple moi le fauteuil à la maison j'étais très fier de venir à mes copains non je m'en sers pas j'ai le déambulateur à la maison et le fauteuil c'est que pour dehors et en fait la même journée je suis tombé deux fois et ben en deux minutes j'ai accepté l'idée d'être en fauteuil parce que J'étais vraiment angoissé, la peur d'avoir mal, parce que tu tombes avec Charcot, tu peux même pas mettre tes mains pour t'arrêter, tu tombes vraiment comme une merde, et tu te fais mal. Mais ça t'aide aussi à accepter des aides techniques que tu ne te sentais pas capable d'accepter. C'est pour ça que je dis que... Même si je m'invite pour aller mourir, mon envie de vivre est très très forte.

  • Natacha Sels

    À la maison, la maman de Loïc nous attend de pied ferme, avec l'intention de nous faire goûter à sa délicieuse quiche, ce que nous faisons semblant de refuser pour la forme. C'est l'occasion de se détendre dans une ambiance décontractée qui semble de mise chez les résiduits.

  • Maman de Loïc

    Tu vas te chercher un coca dans le bac du frigo ?

  • Albane

    Voilà, bon !

  • Maman de Loïc

    En tout cas, merci beaucoup.

  • Albane

    Il n'y a pas de quoi.

  • Loïc Résibois

    Ça va, elles sont payées pour ça.

  • Albane

    Exactement. Exactement. La VNI, vous voulez qu'on la mette où, Loïc ?

  • Natacha Sels

    Moi, j'avais une question. C'est quoi la VNI ?

  • Albane

    VNI, Ventilation Non-Invasive.

  • Natacha Sels

    D'accord. Et ça consiste en quoi ?

  • Albane

    Ça consiste en quoi, Loïc ?

  • Loïc Résibois

    Insuffler de l'air sous pression dans mes poumons, pour agrandir mes alvéoles de poumons, pour que je respire mieux.

  • Albane

    Forcer la respiration en fait. Loïc n'a plus la capacité, ou du moins une capacité très faible, de faire fonctionner son diaphragme et ses muscles intercostaux. Et en fait, la machine va pousser de l'air, de manière à ce que son diaphragme et ses muscles intercostaux s'ouvrent, de manière à ce que le poumon puisse être ventilé correctement.

  • Loïc Résibois

    Et ça va aussi soulager mes blessures respiratoires. Merci beaucoup, les filles. C'était vraiment sympa.

  • Maman de Loïc

    Merci beaucoup, en tout cas.

  • Albane

    Je...

  • Maman de Loïc

    De le supporter déjà.

  • Albane

    Je réitère mes propos. Vous n'étiez pas présente. Mais si vous avez besoin de quoi que ce soit, d'une information ou quoi, vous n'hésitez pas.

  • Maman de Loïc

    Merci beaucoup.

  • Albane

    Vraiment.

  • Maman de Loïc

    Il vous a dit qu'il allait au concert de Oshie ?

  • Albane

    Oui, on l'a su. C'est jeudi, là ?

  • Natacha Sels

    La maison, de plein pied et ouverte, ressemble à une ruche où les abeilles virevoltent en tous sens. Alban et Marthe prévoient la prochaine sortie au ciné de Loïc. Son père bricole, sa mère prépare du gâteau, les voisins passent et rigolent. Loïc demande à chacun de se retirer afin que nous puissions parler tranquillement. Moi j'aimerais, parce qu'en fait comme on a embarqué tout de suite à l'hôpital, te demander un petit peu comment tu as appris la maladie, comment ça s'est passé et comment à ce moment-là tu as réagi, parce que c'est juste un cataclysme j'imagine.

  • Loïc Résibois

    Alors en fait j'ai eu quand même de la chance quelque part. Je suis entré dans la maladie fin 2019 début 2020 de manière très... Singulière, mais aussi anodine. En fait, j'avais un tremblement à la main après avoir joué au tennis avec mes adversaires quand je buvais un coup. Et je disais à ma femme, Mais attends, moi je prends un coca, mais il doit froid que je veux une bière tellement je tremble. Donc c'était vraiment anodin. Et en même temps, comme ça a duré dans le temps, ma femme m'a demandé d'aller voir une neurologue. C'était mon premier rendez-vous avec un médecin spécialiste. Je n'avais jamais eu de problème de santé avant. En plus, je ne buvais pas, je ne fumais pas, je faisais beaucoup de sport, donc je me sentais quand même un peu invulnérable. Et cette neurologue, elle a commencé à me faire passer les examens. Et ils ont trouvé que j'avais une maladie auto-immune qui s'appelle une sarcoïdose. Et ils ont pensé que c'est ce qui pouvait provoquer mes problèmes neurologiques, auquel cas ça s'appelle précipitation. une neuro sarcoïdose et pendant deux ans et demi j'ai eu différents traitements mais qui n'ont jamais réussi à diminuer mes symptômes et donc planer quand même autour de moi cette hypothèse de la maladie charcot donc lorsque des russies qui est tombé en septembre 2022 j'avais tant de mes préparer j'ai pas été sidéré évidemment quand le médecin m'a dit que c'était ça que c'était sûr Bon bah, là j'ai appris officiellement que mon espérance de vie venait de passer de, on va dire une quarantaine d'années, à 3 à 5 ans. Bien sûr que c'était dur. Mais ce que j'ai trouvé encore plus injuste, c'est qu'on m'a... aussi dit que comme j'avais été diagnostiqué tardivement, je n'étais pas éligible aux traitements expérimentaux qui auraient pu augmenter un peu mon espérance de vie. Donc ça, j'ai vu que c'était un peu comme une double peine. J'étais condamné à mort et en plus je n'avais même pas l'espoir d'avoir cette perspective de vivre plus longtemps parce que je n'étais pas dans les clous administratifs. Et ça a été quelque part un premier signal de... Toutes les tracasseries administratives que tu peux rencontrer quand tu es malade de charcot ou même malade en général. Et tu dirais finalement, mes proches ont vécu ça plus difficilement que moi.

  • Natacha Sels

    La maman de Loïc confirme.

  • Maman de Loïc

    Il nous donne une vraie leçon de vie, c'est incroyable. Il ne se plaint jamais, il a toujours peur de déranger, ça nous embête un petit peu parce qu'on est là pour lui faire plaisir et pour essayer de... Que ce soit un peu plus facile pour lui. Et lui, il a toujours peur de déranger. Donc il n'ose pas demander. Il n'ose jamais nous demander. On ne croyait pas au départ que c'était la maladie de Charcot. Quand on nous a parlé de cette maladie, on ne la connaissait pas bien. On savait à peu près ce que c'était, mais pas dans les détails. Et on ne le croyait pas. On disait, lui, non, il n'a jamais été malade. Ce serait une exception, mais ça ne peut pas être ça. Et puis, on voyait quand même, au bout de deux ans, se dégrader quand même tous ses muscles, perdre des forces. Mais cet été, il était encore... Il marchait en début d'été avec un déambulateur encore, il allait jusqu'à la mer qui n'est pas très loin mais avec son déambulateur. Et bien sûr il avait arrêté le sport, il avait arrêté tout ça. Il accepte quand même bien je trouve sa condition. Il aimait beaucoup l'île dorée parce que depuis qu'il était malade ça lui faisait beaucoup de bien de nager. Alors il nageait où il avait pied et mon mari était à côté ou sa femme bien sûr. Mais il était sur le dos et ça lui faisait énormément de bien. Il se sentait très léger sur l'eau.

  • Loïc Résibois

    Aujourd'hui, quand je vois des gens marcher, sauter, courir, ça me semble presque magique ce qu'ils font, tellement c'est éloigné de mon quotidien.

  • Natacha Sels

    Et qu'est-ce qui a été le plus difficile à accepter pour toi ?

  • Loïc Résibois

    Je ne saurais pas répondre à cette question sur ce qui a été le plus difficile à accepter pour moi, parce que je pensais ne pas accepter la dépendante. Finalement, je l'ai accepté. Je pensais ne pas accepter d'être en fauteuil. Je l'ai accepté et du coup je me dis que plus la maladie progresse et plus l'envie de vivre se renforce. Donc là je sais que la tracheotomie pour moi c'est une énorme appréhension, comme la gastrostomie. J'ai envie de te dire aujourd'hui que je ne veux pas subir ces interventions, mais peut-être que je les subirai et je serai heureux de continuer à vivre comme ça. Là c'est mon avis aujourd'hui.

  • Natacha Sels

    Dans le prochain épisode, vous retrouverez Loïc Rézybois, Le droit de choisir, partie 2. Restez à l'écoute de notre podcast La vie est belle SLA et abonnez-vous sur votre plateforme préférée.

Description

Loïc Résibois, 46 ans, a reçu il y a un an et demi le diagnostic de la maladie de Charcot. Depuis, il mène avec détermination et courage un combat pour défendre l’aide active à mourir, tout en exprimant une puissante envie de vivre. Comme la plupart des personnes atteintes d’une maladie incurable, Loïc souhaite avant tout profiter de chaque instant avec ses proches et ses amis, savourant chaque moment de bonheur possible…


Depuis l’enregistrement de ce podcast, Loïc nous a quittés le 24 septembre 2024, à l’Île de Ré. Nous tenons à lui rendre un hommage appuyé. Au cours des deux dernières années, Loïc a accompagné l’ARSLA avec une bonne humeur communicative, même dans les périodes les plus difficiles. Il a su nous interpeller et nous mobiliser sur des sujets essentiels. Nous pensons à lui et à toute sa famille.



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Nous remercions chaleureusement toutes les personnes qui ont participé à cette première saison : personnes malades, aidants, proches, professionnels de santé.


Un immense merci également à la Fondation d'entreprise IRCEM pour son précieux soutien, ainsi qu'à l’Agence CosaVostra pour la réalisation du visuel du podcast.


Ce podcast de l'ARLSA a été réalisé par Natacha Sels, la post-production est de Bertrand Chaumeton.

 

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Bonne écoute !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Natacha Sels

    La vie est belle, essaie-la ! (SLA), le podcast de l'ARSLA, qui met en lumière des personnes confrontées à la SLA et des professionnels engagés.

  • Loïc Résibois

    Même si je milite pour l'aide à mourir, mon envie de vivre est très très forte.

  • Natacha Sels

    Loïc Résibois, le droit de choisir, partie 1. Aujourd'hui, j'ai rendez-vous avec Loïc Résibois, atteint de la maladie de Charcot depuis un an et demi. De lui, je connais seulement un combat. légaliser l'aide active à mourir en France. Je vais découvrir un homme qui a la fureur de vivre chevillé au corps, l'humour en bandoulière, cachant à peine sa générosité et l'amour de son prochain. Son entourage et tous ceux qui le suivent le lui rendent bien. Tandis que je me dirige vers son domicile, une maison dans les environs d'Amiens, je retrouve le ciel gris du nord. Il fait beau, puisqu'il ne pleut pas, et sur les bas côtés, l'explosion de jonquilles fait figure de soleil. La maman de Loïc vient m'ouvrir. Elle et son mari sont venus prendre le relais de son épouse absente pour la semaine. Sa fille Capucine donne le ton.

  • Capucine Résibois

    Alors mon père, il est assez grand, il fait 1m85, il a les yeux bleus. Il est brun avec des cheveux plutôt courts mais pas le crâne rasé. Il est sportif, il a toujours été sportif. Et puis c'est quelqu'un de très généreux, c'est quelqu'un de très altruiste. C'est lui qui m'a appris le roller, notamment à l'île de Ré dans son endroit préféré. Au-delà de ça, il pratiquait le tennis, donc il m'a essayé de partager la passion du tennis, mais ça n'a pas trop marché pour moi.

  • Natacha Sels

    Est-ce que c'est un gentil papa ?

  • Capucine Résibois

    Oui, c'est un très gentil papa quand il veut. Pas toujours. Non, il est très gentil, mais il a toujours été... Je pense que les plus grandes valeurs qu'il m'a transmises, c'est surtout la générosité et l'altruisme, le fait de penser aux autres, de vouloir toujours aider les autres, les gens dans le besoin. Voilà, il a toujours voulu aider. Il a toujours voulu aider, et c'est lui qui m'a transmis ces valeurs-là.

  • Loïc Résibois

    On est dans mon salon avec une cheminée, j'adore ça, c'est hyper important pour moi. Je trouve que ça donne de la chaleur à la maison. Alors je ne peux évidemment plus allumer le feu moi-même, mais c'est hyper important pour moi. À côté de nous se trouve une grande cage. À l'intérieur de cette cage, un magnifique perroquet qui s'appelle Nina. C'est un éclectus femelle. qui a un caractère de cochon et qui n'est gentil qu'avec notre fille Capucine. Je dirais même qu'elle est un peu amoureuse de Capucine. Elle lui lisse ses cheveux, elle lui fait des bisous, parce que les perroquets ça a une langue, et donc elle passe la langue sur son visage, c'est très étonnant. Et alors quand elle parle, elle a pris la voix de Capucine, c'est hyper surprenant.

  • Natacha Sels

    En tout cas, elle a des couleurs absolument incroyables.

  • Loïc Résibois

    Et un peu plus loin, tu as un billard, ça c'est hyper important pour moi, j'adore jouer, j'adore le jeu. je peux plus jouer mais les copains du tennis après l'entraînement débarquer à la maison et jouer au billard avec moi c'est super ça nous permettait de continuer à avoir des rapports un peu de compétition et généralement vers une heure du mat' Caro pétait un câble en disant que tout le monde se barre pour qu'ils puissent enfin dormir tellement ça rigolait fort donc voilà j'ai très souvent du monde qui passent à la maison et en fait C'est aussi une charge mentale pour mon épouse parce qu'elle a envie de montrer qu'elle s'en sort, qu'elle est forte, que la maison est bien tenue. Et donc, c'est bien pour moi, mais ce n'est pas forcément facile pour elle. Alors pour la presse, elle sait que c'est devenu mon combat, que c'est très important pour moi et pour mon moral. Elle prend sur elle, mais j'ai aussi conscience et je la remercie. C'est encore un effort supplémentaire que je lui demande.

  • Natacha Sels

    Et là, en ce moment, elle n'est pas là. Elle n'est pas là, mais à la maison, il y a tes parents.

  • Loïc Résibois

    Alors, quand mon épouse travaille, ce qui arrive encore deux demi-journées par semaine, ou là, elle est partie en vacances, en fait, il y a les gens qui viennent me garder. C'est l'expression que j'emploie parce que c'est un peu vrai, ça correspond à la réalité. C'est un peu infantilisant, mais c'est exactement ça. Et donc, mes parents sont venus me garder. Et c'est évidemment super de les avoir à mes côtés, mais pour eux c'était pas facile. Ils ont 76, 75 ans.

  • Natacha Sels

    Et donc toi tu te bats pour le choix de la fin de vie, de façon générale et spécifiquement pour la maladie de Charcot. Est-ce que tu peux m'en dire un peu plus ?

  • Loïc Résibois

    Alors d'abord, je vais préciser que ce n'est pas parce que je milite pour l'aide à mourir que je veux mourir. Moi, comme la grande majorité des malades condamnés ce qu'on veut c'est profiter du temps qui nous reste de nos proches de nos amis être heureux le plus longtemps possible mais l'aide à mourir c'est à la fois la garantie d'une mort sans douleur au moment voulu et le au moment voulu c'est très important et c'est surtout la garantie d'une fin de vie sereine parce qu'en fait tu sais que tu seras jamais en cette situation où tu es pas encore mort mais plus tout à fait vivant. Moi c'est ça qui me fait peur, j'ai compris que j'allais mourir, j'ai envie de dire. On sait tous qu'on va mourir un jour moi ce que je veux c'est bien mourir, c'est avoir une mort digne et qui corresponde à la vie que j'ai vécue en fait. Je sais pas quand, je te dirai j'en peux plus m ais je ne sais même pas si ce moment va arriver, mais savoir que si un jour je dis je n'en peux plus, je veux que ça s'arrête, on puisse faire en sorte que ça s'arrête rapidement. C'est de nature à lever énormément de mes angoisses, mais en fait des angoisses de dizaines de milliers de malades condamnés. Le système qui existe en France, c'est la sédation profonde et continue jusqu'au décès, qu'on appelait avant euthanasie passive. Ce système qui consiste à attendre que le malade soit à l'article de sa mort pour l'endormir, cesser les traitements, cesser de l'hydrater et de l'alimenter. Et ensuite, on attend. Son visage s'amaigrit, son corps s'amaigrit, le malade fini soit par mourir de sa maladie pour les plus chanceux soit par mourir en fait de déshydratation que ces organes lâchent les uns après les autres la mort prend de quelques heures à trois semaines. Ma question est la suivante quel intérêt de faire vivre à des gens qui ont déjà souffert pendant des mois une agonie aussi longue, à la fois pour le malade, mais aussi pour ses proches ? ça n'a aucun sens. La sélation profonde et continue est faite pour le confort du soignant, qui n'a pas l'impression de donner la mort, et pas pour le confort du malade. Et je trouve qu'il aurait fallu changer un peu le paradigme des médecins, et qu'on mette le patient au cœur de la préoccupation des médecins. Et quand on voit à quel point, et j'en suis le premier témoin, l'envie de vivre est surprenante, incroyablement forte. Quand un malade condamné dit de manière claire et éthérée qu'il veut mourir, c'est vraiment qu'il n'en peut plus et donc pour moi accompagner ce malade jusqu'à la mort c'est juste un acte ultime de soins et j'irai jusqu'à dire d'humanité et ce n'est pas du tout une inversion et une rupture anthropologique comme certains le disent, sous la réserve bien évidemment, qu'on mette en place l'aide à mourir, mais qu'on renforce aussi l'aide à vivre.

  • Natacha Sels

    La sonnerie de la porte retentit. C'est déjà l'équipe du DASMO 80. Loïc m'avait prévenu. J'ai un rendez-vous chez la pneumologue référente de la SLA au CHU d'Amiens. J'attends ça depuis un an. Je ne peux pas le manquer. Si tu veux, tu m'accompagnes. J'avais bien sûr accepté.

  • Albane

    Marthe et Albane.

  • Natacha Sels

    Enchantée.

  • Albane

    Moi je suis l'infirmière de coordination du DASMO du coup.

  • Marthe

    Et moi je suis l'éducatrice spécialisée du DASMO.

  • Albane

    Loïc c'est un visage plein de sourires, un regard plein de malice. Il a de très grandes mains et tout est très grand et c'est quelqu'un qui inspire la sympathie. On est venu l'accompagner dans le transport et puis dans la consultation à l'hôpital,voilà.

  • Natacha Sels

    Donc là on va à l'hôpital

  • Albane

    Exactement. Dans son parcours de soins, il y a une nécessité de consultation et du coup on l'accompagne dans ce projet là. O n reste comme ça ? Oui, je veux bien que vous descendiez l'acoudoir, que vous me filiez mon téléphone et après je suis paré pour vous accompagner. allez hop puis l'ordonnant c'est bon maman et ma carte vital c'est parti c'est bon oui ouais c'est juste placer maman bien sûr ça m'énerve et où le mappol

  • Natacha Sels

    C'est à peu près à quelle distance l'hôpital ?

  • Loïc Résibois

    On est à, je ne sais pas, 25 kilomètres peut-être. Ah oui. Je t'avoue que je ne suis pas âgé. Je suis content de rencontrer la pneumo référente de la SLA, mais je lui en veux parce que ça fait un an que je cherche désespérément. Alors on peut être en flux. Et en fait, là, une fois de plus, je constate que je parviens à rencontrer parce que j'ai dû activer mon réseau. Moi j'essaie de battre aussi pour les gens qui n'ont pas de réseau. Et je fais l'opinion en fait, depuis 20 ans longtemps, je commence à avoir peur Martin. La priorité à droite qui est agréée, ça fait... Ouais ouais c'est ça ! Je fais un clin d'œil ! Et donc en fait je constate que les gens qui n'ont pas de connaissance... C'est encore plus difficile pour eux. Et tu vois, même si je milite pour l'aide à mourir, je parle de plus en plus d'aide à vivre, parce que je constate qu'il y a de nombreux malades qui veulent en finir. Évidemment qu'ils souffrent de leur maladie, mais en fait, ils souffrent aussi beaucoup du fait que notre système de soins est un peu à l'agonie, et donc on n'arrive pas à répondre aux demandes matérielles. technique des gens et ça pour moi c'est pas un bon motif pour vouloir en finir. Moi je note les gens qui demandent d'aide à mourir c'est parce qu'ils ne supportent pas leur maladie, pas parce que notre système de soins est incapable de répondre à leurs besoins.

  • Natacha Sels

    Tu as quel âge Loïc ?

  • Loïc Résibois

    J'ai 46 ans, ma femme à 47 et moi je tiens vraiment à souligner le fait qu'avec moi elle est juste incroyable. J'ai toujours peur. Même si je fais des blagues avec elle, qu'elle finisse par se lasser, se rouler les dents, parce que c'est hyper dur. C'est pas seulement du matin au soir. Moi, c'est même la nuit, parce que la nuit, je lui demande de me retourner dans le lit. Faut bien imaginer, un malade de charcot, au bout d'un certain temps, il ne peut même plus se tourner dans son lit. Je peux même pas me gratter la tête. Enfin, c'est quand même très très dur à vivre au quotidien. Même si je précise qu'aujourd'hui, je suis encore heureux. Et j'ai envie que ça continue comme ça. On arrive devant le...

  • Natacha Sels

    Le chien.

  • Albane

    Ouais, c'est ça.

  • Loïc Résibois

    Natacha je te laisse te présenter et tenter ta chance toi-même. On verra si tu es persuasive ou pas.

  • Natacha Sels

    Loïc ne rate pas une occasion de plaisanter. Et le docteur Mailleux, pneumologue référente SLA, accepte de prendre un peu de son temps pour répondre à quelques-unes de mes questions.

  • Dr Mailleux

    Alors, la référente est d'un bien grand mot, c'est-à-dire que j'ai un peu plus l'habitude de prendre en charge ces patients. Mais on est une équipe de pneumologues et mes collègues ont quelques patients aussi. J'ai peut-être une plus grande, on va dire, patientelle sur ce sujet-là.

  • Natacha Sels

    Et la question que je me posais, c'est qu'est-ce que ça fait d'avoir en face de soi des personnes qu'on ne peut pas guérir quand on est médecin ?

  • Dr Mailleux

    Alors, on est content de pouvoir les aider déjà. Ne pas les guérir, c'est difficile, mais on ne les leurre pas. Je veux dire, déjà, eux savent très bien. Nous, on essaye d'améliorer le confort de vie. en proposant des techniques de ventilation par exemple quand c'est le moment, en sachant que l'arrière-pensée ne peut pas leur rajouter trop de contraintes non plus. Et donc il faut faire très attention à ce qu'on propose aux patients qui sont devant nous, à la charge de travail que ça va occasionner, aux contraintes. Il faut vraiment se poser les bonnes questions.

  • Natacha Sels

    Est-ce qu'il y a une façon au niveau psychologique dont vous pouvez aider ces patients-là aussi ?

  • Dr Mailleux

    Oui, parce qu'on peut déjà, il faut les prendre en charge avec un vocabulaire adapté à chacun et à leurs problèmes. S'imaginer qu'elle peut être la vie à domicile et être le plus, on va dire, bienveillant possible. Essayer de répondre à leurs attentes de rendez-vous. quand on peut, à leurs attentes de questionnement, de les entourer au mieux, dans une atmosphère, on va dire, plutôt rassurante, sans les leurrer quand même. Donc il faut faire très attention de ne jamais prononcer des mots qui pourraient les heurter, mais il faut quand même poser les bonnes questions, sur la prise en charge actuelle ou à venir. Ça c'est important.

  • Natacha Sels

    Vous parlez du futur avec eux ?

  • Dr Mailleux

    Tout à fait. Alors, de futur, on parle de futur, mais de directives anticipées aussi. Et donc, pas sur une première rencontre. jamais parce que je ne sais pas qui j'ai en face de moi et quels sont les affects, comment ça se passe, déjà ce que sait le patient. Mais on approche tout doucement les vraies questions au fur et à mesure des consultations bien sûr.

  • Natacha Sels

    À un moment il y a la question de la trachéotomie, c'est ça ?

  • Dr Mailleux

    Tout à fait. Alors ça c'est une question sérieuse. qu'on n'aborde pas toujours. Personnellement, je ne parle certains patients, je n'ai jamais parlé de trachéotomie tout au long du suivi parce que eux savent, s'ils ne nous posent pas la question et si moi je ne l'aborde pas, ça veut dire en soi qu'ils ne sont pas forcément prêts à y accéder. Et pour leur éviter d'avoir à y réfléchir en oui ou non, on n'aborde pas la question. Alors par contre, ceux qui connaissent la technique, et la majorité de toute façon la connaissent, surtout dans l'évolution de la pathologie, les patients qui sont très demandeurs vont nous le dire dès le départ. Alors après, on peut changer d'idée avec l'évolution, mais souvent, je veux dire, ça va être immédiatement demandé. Alors pas forcément sur cette parole de trachéotomie, mais quelquefois en disant... veux tout docteur, vous allez m'aider, je veux tout, j'ai des choses à faire et à vivre. On a très bien compris quand on nous annonce ça. Donc on suit.

  • Natacha Sels

    Alors aujourd'hui j'étais venue interviewer Loïc et il y a quelques jours il m'a dit ça y est j'ai un rendez-vous que j'attends depuis très très très longtemps. Qu'est-ce qui fait qu'il a attendu aussi longtemps pour un rendez-vous en pneumonie ? Il m'a parlé d'une année.

  • Dr Mailleux

    Alors oui c'est ce qu'il m'a dit. Alors j'étais très surpris. Moi j'ai des correspondances là sur la fin de l'année. C'est vrai que j'ai dû voir passer sa demande, alors un an ça me paraît compliqué, mais j'ai dû voir passer sa demande, mais étant donné qu'il avait un suivi sur Paris qui était bien mené, je pense que du coup on ne l'a pas mis dans nos priorités de rendez-vous. Il n'a pas été complètement abandonné puisqu'il a quand même vu les neurologues à plusieurs reprises. Et c'est pareil, je pense que si mes collègues neurologues avaient senti le besoin, ils m'auraient intercepté. Donc voilà, peut-être qu'en effet on a raté quelque chose parce qu'on n'a pas compris le besoin, mais il était suivi. Rassurons-nous tous.

  • Natacha Sels

    Tandis que Loïc passe une batterie d'examens, Albane, l'infirmière coordinatrice et moi discutons à voix basse dans la salle d'attente. Elle a beaucoup de choses à dire, Alban, et je souffre de ne pouvoir lui tendre le micro. Heureusement, les infirmières du service sont sympas et nous trouvent un endroit où nous isoler.

  • Albane

    En réalité, je ne soigne pas les gens, je les aide à vivre leurs besoins d'être. Et j'essaye de faire au mieux. d'être le plus invisible possible pour permettre aux gens d'être ce qu'ils sont. Et je suis le porte-parole, la confidente, et c'est en ça que je vois le soin, pas forcément en termes techniques. Mais une infirmière sait aussi savoir s'asseoir à côté de la personne, d'échanger ou ne serait-ce que d'écouter.

  • Natacha Sels

    On en parlait là, assises toutes les deux dans la salle d'attente, mais pour toi, c'est quoi la vie, c'est quoi la mort finalement ?

  • Albane

    C'est deux grandes copines. C'est à dire que pour moi l'un ne va pas sans l'autre, elles sont indissociables et on se pose tellement de questions au sujet de la vie et pourtant la mort elle reste toujours de côté la pauvre. Et tout au long de notre vie on sera amené à la côtoyer et je trouve ça triste qu'on doive la mettre de côté parce qu'on a peur alors qu'au final pour moi Accompagner la mort, c'est comme accompagner la vie, ça reste un soin.

  • Natacha Sels

    Qu'est-ce qu'elle peut nous apporter, la mort, si on la regarde un peu plus près, si on ose la regarder ?

  • Albane

    Déjà, la mort, moi je la vois comme une délivrance. Mais au-delà de ça, ce qui pour moi est difficile à... à accepter en tant que personne et en tant que soignante, c'est de voir les gens souffrir. Et je ne parle pas forcément de la souffrance physique, c'est aussi de la souffrance psychique. Et pour en revenir à Loïc, je pense que c'est ça dont il a peur, c'est de souffrir, aussi bien d'un point de vue physique, mais c'est cette souffrance que peut éprouver une personne malade qui est dépendante. de voir le regard des gens qu'il aime changer parce qu'il est dépendant, parce qu'il a besoin de ces personnes-là pour vivre, tout simplement. Et ce changement de regard, ça peut faire beaucoup de mal, en fait, parce qu'on perd son identité. Et je pense que tant qu'on ne l'a pas vécu, tant qu'on n'est pas dans cette situation d'extrême nécessité, de dépendance, On ne peut pas comprendre qu'on puisse avoir besoin d'exprimer cette envie, de choisir quand est-ce qu'on doit partir.

  • Natacha Sels

    Sur le trajet du retour, nous continuons d'échanger. Pour Loïc, communiquer c'est la vie. Et moi, j'ai hâte de savoir comment s'est passée la rencontre avec la pneumologue.

  • Loïc Résibois

    Oui, elle était très bien, c'est pour ça que j'étais déçu de devoir lui dire que j'avais détesté pendant des mois. En fait, je crois que c'est le système qui ne va pas. Ce n'est pas vraiment les individus. C'est trop de patients, pas assez de moyens. C'est aussi simple que ça. Et donc, ça génère de la maltraitance. J'ai envie de dire, et du personnel qui est frustré de ne pas bien pouvoir prendre en charge des patients. Et des patients qui pensent que les médecins s'en foutent. Et donc, ça génère aussi certainement d'agressivité inutile.

  • Albane

    C'est bon.

  • Loïc Résibois

    J'ai plein de plaisir que je dois arrêter, auxquels je dois renoncer. Par exemple, l'ortho me dit que la viande, c'est très bien d'arrêter et de la hacher. Ah ben non. Moi, franchement, j'ai envie de manger un steak. de sentir le plaisir ben non je vous l'ai dit je peux pas le jour où peut-être j'aurai peur parce que la peur est un moteur hyper important par exemple moi le fauteuil à la maison j'étais très fier de venir à mes copains non je m'en sers pas j'ai le déambulateur à la maison et le fauteuil c'est que pour dehors et en fait la même journée je suis tombé deux fois et ben en deux minutes j'ai accepté l'idée d'être en fauteuil parce que J'étais vraiment angoissé, la peur d'avoir mal, parce que tu tombes avec Charcot, tu peux même pas mettre tes mains pour t'arrêter, tu tombes vraiment comme une merde, et tu te fais mal. Mais ça t'aide aussi à accepter des aides techniques que tu ne te sentais pas capable d'accepter. C'est pour ça que je dis que... Même si je m'invite pour aller mourir, mon envie de vivre est très très forte.

  • Natacha Sels

    À la maison, la maman de Loïc nous attend de pied ferme, avec l'intention de nous faire goûter à sa délicieuse quiche, ce que nous faisons semblant de refuser pour la forme. C'est l'occasion de se détendre dans une ambiance décontractée qui semble de mise chez les résiduits.

  • Maman de Loïc

    Tu vas te chercher un coca dans le bac du frigo ?

  • Albane

    Voilà, bon !

  • Maman de Loïc

    En tout cas, merci beaucoup.

  • Albane

    Il n'y a pas de quoi.

  • Loïc Résibois

    Ça va, elles sont payées pour ça.

  • Albane

    Exactement. Exactement. La VNI, vous voulez qu'on la mette où, Loïc ?

  • Natacha Sels

    Moi, j'avais une question. C'est quoi la VNI ?

  • Albane

    VNI, Ventilation Non-Invasive.

  • Natacha Sels

    D'accord. Et ça consiste en quoi ?

  • Albane

    Ça consiste en quoi, Loïc ?

  • Loïc Résibois

    Insuffler de l'air sous pression dans mes poumons, pour agrandir mes alvéoles de poumons, pour que je respire mieux.

  • Albane

    Forcer la respiration en fait. Loïc n'a plus la capacité, ou du moins une capacité très faible, de faire fonctionner son diaphragme et ses muscles intercostaux. Et en fait, la machine va pousser de l'air, de manière à ce que son diaphragme et ses muscles intercostaux s'ouvrent, de manière à ce que le poumon puisse être ventilé correctement.

  • Loïc Résibois

    Et ça va aussi soulager mes blessures respiratoires. Merci beaucoup, les filles. C'était vraiment sympa.

  • Maman de Loïc

    Merci beaucoup, en tout cas.

  • Albane

    Je...

  • Maman de Loïc

    De le supporter déjà.

  • Albane

    Je réitère mes propos. Vous n'étiez pas présente. Mais si vous avez besoin de quoi que ce soit, d'une information ou quoi, vous n'hésitez pas.

  • Maman de Loïc

    Merci beaucoup.

  • Albane

    Vraiment.

  • Maman de Loïc

    Il vous a dit qu'il allait au concert de Oshie ?

  • Albane

    Oui, on l'a su. C'est jeudi, là ?

  • Natacha Sels

    La maison, de plein pied et ouverte, ressemble à une ruche où les abeilles virevoltent en tous sens. Alban et Marthe prévoient la prochaine sortie au ciné de Loïc. Son père bricole, sa mère prépare du gâteau, les voisins passent et rigolent. Loïc demande à chacun de se retirer afin que nous puissions parler tranquillement. Moi j'aimerais, parce qu'en fait comme on a embarqué tout de suite à l'hôpital, te demander un petit peu comment tu as appris la maladie, comment ça s'est passé et comment à ce moment-là tu as réagi, parce que c'est juste un cataclysme j'imagine.

  • Loïc Résibois

    Alors en fait j'ai eu quand même de la chance quelque part. Je suis entré dans la maladie fin 2019 début 2020 de manière très... Singulière, mais aussi anodine. En fait, j'avais un tremblement à la main après avoir joué au tennis avec mes adversaires quand je buvais un coup. Et je disais à ma femme, Mais attends, moi je prends un coca, mais il doit froid que je veux une bière tellement je tremble. Donc c'était vraiment anodin. Et en même temps, comme ça a duré dans le temps, ma femme m'a demandé d'aller voir une neurologue. C'était mon premier rendez-vous avec un médecin spécialiste. Je n'avais jamais eu de problème de santé avant. En plus, je ne buvais pas, je ne fumais pas, je faisais beaucoup de sport, donc je me sentais quand même un peu invulnérable. Et cette neurologue, elle a commencé à me faire passer les examens. Et ils ont trouvé que j'avais une maladie auto-immune qui s'appelle une sarcoïdose. Et ils ont pensé que c'est ce qui pouvait provoquer mes problèmes neurologiques, auquel cas ça s'appelle précipitation. une neuro sarcoïdose et pendant deux ans et demi j'ai eu différents traitements mais qui n'ont jamais réussi à diminuer mes symptômes et donc planer quand même autour de moi cette hypothèse de la maladie charcot donc lorsque des russies qui est tombé en septembre 2022 j'avais tant de mes préparer j'ai pas été sidéré évidemment quand le médecin m'a dit que c'était ça que c'était sûr Bon bah, là j'ai appris officiellement que mon espérance de vie venait de passer de, on va dire une quarantaine d'années, à 3 à 5 ans. Bien sûr que c'était dur. Mais ce que j'ai trouvé encore plus injuste, c'est qu'on m'a... aussi dit que comme j'avais été diagnostiqué tardivement, je n'étais pas éligible aux traitements expérimentaux qui auraient pu augmenter un peu mon espérance de vie. Donc ça, j'ai vu que c'était un peu comme une double peine. J'étais condamné à mort et en plus je n'avais même pas l'espoir d'avoir cette perspective de vivre plus longtemps parce que je n'étais pas dans les clous administratifs. Et ça a été quelque part un premier signal de... Toutes les tracasseries administratives que tu peux rencontrer quand tu es malade de charcot ou même malade en général. Et tu dirais finalement, mes proches ont vécu ça plus difficilement que moi.

  • Natacha Sels

    La maman de Loïc confirme.

  • Maman de Loïc

    Il nous donne une vraie leçon de vie, c'est incroyable. Il ne se plaint jamais, il a toujours peur de déranger, ça nous embête un petit peu parce qu'on est là pour lui faire plaisir et pour essayer de... Que ce soit un peu plus facile pour lui. Et lui, il a toujours peur de déranger. Donc il n'ose pas demander. Il n'ose jamais nous demander. On ne croyait pas au départ que c'était la maladie de Charcot. Quand on nous a parlé de cette maladie, on ne la connaissait pas bien. On savait à peu près ce que c'était, mais pas dans les détails. Et on ne le croyait pas. On disait, lui, non, il n'a jamais été malade. Ce serait une exception, mais ça ne peut pas être ça. Et puis, on voyait quand même, au bout de deux ans, se dégrader quand même tous ses muscles, perdre des forces. Mais cet été, il était encore... Il marchait en début d'été avec un déambulateur encore, il allait jusqu'à la mer qui n'est pas très loin mais avec son déambulateur. Et bien sûr il avait arrêté le sport, il avait arrêté tout ça. Il accepte quand même bien je trouve sa condition. Il aimait beaucoup l'île dorée parce que depuis qu'il était malade ça lui faisait beaucoup de bien de nager. Alors il nageait où il avait pied et mon mari était à côté ou sa femme bien sûr. Mais il était sur le dos et ça lui faisait énormément de bien. Il se sentait très léger sur l'eau.

  • Loïc Résibois

    Aujourd'hui, quand je vois des gens marcher, sauter, courir, ça me semble presque magique ce qu'ils font, tellement c'est éloigné de mon quotidien.

  • Natacha Sels

    Et qu'est-ce qui a été le plus difficile à accepter pour toi ?

  • Loïc Résibois

    Je ne saurais pas répondre à cette question sur ce qui a été le plus difficile à accepter pour moi, parce que je pensais ne pas accepter la dépendante. Finalement, je l'ai accepté. Je pensais ne pas accepter d'être en fauteuil. Je l'ai accepté et du coup je me dis que plus la maladie progresse et plus l'envie de vivre se renforce. Donc là je sais que la tracheotomie pour moi c'est une énorme appréhension, comme la gastrostomie. J'ai envie de te dire aujourd'hui que je ne veux pas subir ces interventions, mais peut-être que je les subirai et je serai heureux de continuer à vivre comme ça. Là c'est mon avis aujourd'hui.

  • Natacha Sels

    Dans le prochain épisode, vous retrouverez Loïc Rézybois, Le droit de choisir, partie 2. Restez à l'écoute de notre podcast La vie est belle SLA et abonnez-vous sur votre plateforme préférée.

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Description

Loïc Résibois, 46 ans, a reçu il y a un an et demi le diagnostic de la maladie de Charcot. Depuis, il mène avec détermination et courage un combat pour défendre l’aide active à mourir, tout en exprimant une puissante envie de vivre. Comme la plupart des personnes atteintes d’une maladie incurable, Loïc souhaite avant tout profiter de chaque instant avec ses proches et ses amis, savourant chaque moment de bonheur possible…


Depuis l’enregistrement de ce podcast, Loïc nous a quittés le 24 septembre 2024, à l’Île de Ré. Nous tenons à lui rendre un hommage appuyé. Au cours des deux dernières années, Loïc a accompagné l’ARSLA avec une bonne humeur communicative, même dans les périodes les plus difficiles. Il a su nous interpeller et nous mobiliser sur des sujets essentiels. Nous pensons à lui et à toute sa famille.



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Nous remercions chaleureusement toutes les personnes qui ont participé à cette première saison : personnes malades, aidants, proches, professionnels de santé.


Un immense merci également à la Fondation d'entreprise IRCEM pour son précieux soutien, ainsi qu'à l’Agence CosaVostra pour la réalisation du visuel du podcast.


Ce podcast de l'ARLSA a été réalisé par Natacha Sels, la post-production est de Bertrand Chaumeton.

 

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Bonne écoute !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Natacha Sels

    La vie est belle, essaie-la ! (SLA), le podcast de l'ARSLA, qui met en lumière des personnes confrontées à la SLA et des professionnels engagés.

  • Loïc Résibois

    Même si je milite pour l'aide à mourir, mon envie de vivre est très très forte.

  • Natacha Sels

    Loïc Résibois, le droit de choisir, partie 1. Aujourd'hui, j'ai rendez-vous avec Loïc Résibois, atteint de la maladie de Charcot depuis un an et demi. De lui, je connais seulement un combat. légaliser l'aide active à mourir en France. Je vais découvrir un homme qui a la fureur de vivre chevillé au corps, l'humour en bandoulière, cachant à peine sa générosité et l'amour de son prochain. Son entourage et tous ceux qui le suivent le lui rendent bien. Tandis que je me dirige vers son domicile, une maison dans les environs d'Amiens, je retrouve le ciel gris du nord. Il fait beau, puisqu'il ne pleut pas, et sur les bas côtés, l'explosion de jonquilles fait figure de soleil. La maman de Loïc vient m'ouvrir. Elle et son mari sont venus prendre le relais de son épouse absente pour la semaine. Sa fille Capucine donne le ton.

  • Capucine Résibois

    Alors mon père, il est assez grand, il fait 1m85, il a les yeux bleus. Il est brun avec des cheveux plutôt courts mais pas le crâne rasé. Il est sportif, il a toujours été sportif. Et puis c'est quelqu'un de très généreux, c'est quelqu'un de très altruiste. C'est lui qui m'a appris le roller, notamment à l'île de Ré dans son endroit préféré. Au-delà de ça, il pratiquait le tennis, donc il m'a essayé de partager la passion du tennis, mais ça n'a pas trop marché pour moi.

  • Natacha Sels

    Est-ce que c'est un gentil papa ?

  • Capucine Résibois

    Oui, c'est un très gentil papa quand il veut. Pas toujours. Non, il est très gentil, mais il a toujours été... Je pense que les plus grandes valeurs qu'il m'a transmises, c'est surtout la générosité et l'altruisme, le fait de penser aux autres, de vouloir toujours aider les autres, les gens dans le besoin. Voilà, il a toujours voulu aider. Il a toujours voulu aider, et c'est lui qui m'a transmis ces valeurs-là.

  • Loïc Résibois

    On est dans mon salon avec une cheminée, j'adore ça, c'est hyper important pour moi. Je trouve que ça donne de la chaleur à la maison. Alors je ne peux évidemment plus allumer le feu moi-même, mais c'est hyper important pour moi. À côté de nous se trouve une grande cage. À l'intérieur de cette cage, un magnifique perroquet qui s'appelle Nina. C'est un éclectus femelle. qui a un caractère de cochon et qui n'est gentil qu'avec notre fille Capucine. Je dirais même qu'elle est un peu amoureuse de Capucine. Elle lui lisse ses cheveux, elle lui fait des bisous, parce que les perroquets ça a une langue, et donc elle passe la langue sur son visage, c'est très étonnant. Et alors quand elle parle, elle a pris la voix de Capucine, c'est hyper surprenant.

  • Natacha Sels

    En tout cas, elle a des couleurs absolument incroyables.

  • Loïc Résibois

    Et un peu plus loin, tu as un billard, ça c'est hyper important pour moi, j'adore jouer, j'adore le jeu. je peux plus jouer mais les copains du tennis après l'entraînement débarquer à la maison et jouer au billard avec moi c'est super ça nous permettait de continuer à avoir des rapports un peu de compétition et généralement vers une heure du mat' Caro pétait un câble en disant que tout le monde se barre pour qu'ils puissent enfin dormir tellement ça rigolait fort donc voilà j'ai très souvent du monde qui passent à la maison et en fait C'est aussi une charge mentale pour mon épouse parce qu'elle a envie de montrer qu'elle s'en sort, qu'elle est forte, que la maison est bien tenue. Et donc, c'est bien pour moi, mais ce n'est pas forcément facile pour elle. Alors pour la presse, elle sait que c'est devenu mon combat, que c'est très important pour moi et pour mon moral. Elle prend sur elle, mais j'ai aussi conscience et je la remercie. C'est encore un effort supplémentaire que je lui demande.

  • Natacha Sels

    Et là, en ce moment, elle n'est pas là. Elle n'est pas là, mais à la maison, il y a tes parents.

  • Loïc Résibois

    Alors, quand mon épouse travaille, ce qui arrive encore deux demi-journées par semaine, ou là, elle est partie en vacances, en fait, il y a les gens qui viennent me garder. C'est l'expression que j'emploie parce que c'est un peu vrai, ça correspond à la réalité. C'est un peu infantilisant, mais c'est exactement ça. Et donc, mes parents sont venus me garder. Et c'est évidemment super de les avoir à mes côtés, mais pour eux c'était pas facile. Ils ont 76, 75 ans.

  • Natacha Sels

    Et donc toi tu te bats pour le choix de la fin de vie, de façon générale et spécifiquement pour la maladie de Charcot. Est-ce que tu peux m'en dire un peu plus ?

  • Loïc Résibois

    Alors d'abord, je vais préciser que ce n'est pas parce que je milite pour l'aide à mourir que je veux mourir. Moi, comme la grande majorité des malades condamnés ce qu'on veut c'est profiter du temps qui nous reste de nos proches de nos amis être heureux le plus longtemps possible mais l'aide à mourir c'est à la fois la garantie d'une mort sans douleur au moment voulu et le au moment voulu c'est très important et c'est surtout la garantie d'une fin de vie sereine parce qu'en fait tu sais que tu seras jamais en cette situation où tu es pas encore mort mais plus tout à fait vivant. Moi c'est ça qui me fait peur, j'ai compris que j'allais mourir, j'ai envie de dire. On sait tous qu'on va mourir un jour moi ce que je veux c'est bien mourir, c'est avoir une mort digne et qui corresponde à la vie que j'ai vécue en fait. Je sais pas quand, je te dirai j'en peux plus m ais je ne sais même pas si ce moment va arriver, mais savoir que si un jour je dis je n'en peux plus, je veux que ça s'arrête, on puisse faire en sorte que ça s'arrête rapidement. C'est de nature à lever énormément de mes angoisses, mais en fait des angoisses de dizaines de milliers de malades condamnés. Le système qui existe en France, c'est la sédation profonde et continue jusqu'au décès, qu'on appelait avant euthanasie passive. Ce système qui consiste à attendre que le malade soit à l'article de sa mort pour l'endormir, cesser les traitements, cesser de l'hydrater et de l'alimenter. Et ensuite, on attend. Son visage s'amaigrit, son corps s'amaigrit, le malade fini soit par mourir de sa maladie pour les plus chanceux soit par mourir en fait de déshydratation que ces organes lâchent les uns après les autres la mort prend de quelques heures à trois semaines. Ma question est la suivante quel intérêt de faire vivre à des gens qui ont déjà souffert pendant des mois une agonie aussi longue, à la fois pour le malade, mais aussi pour ses proches ? ça n'a aucun sens. La sélation profonde et continue est faite pour le confort du soignant, qui n'a pas l'impression de donner la mort, et pas pour le confort du malade. Et je trouve qu'il aurait fallu changer un peu le paradigme des médecins, et qu'on mette le patient au cœur de la préoccupation des médecins. Et quand on voit à quel point, et j'en suis le premier témoin, l'envie de vivre est surprenante, incroyablement forte. Quand un malade condamné dit de manière claire et éthérée qu'il veut mourir, c'est vraiment qu'il n'en peut plus et donc pour moi accompagner ce malade jusqu'à la mort c'est juste un acte ultime de soins et j'irai jusqu'à dire d'humanité et ce n'est pas du tout une inversion et une rupture anthropologique comme certains le disent, sous la réserve bien évidemment, qu'on mette en place l'aide à mourir, mais qu'on renforce aussi l'aide à vivre.

  • Natacha Sels

    La sonnerie de la porte retentit. C'est déjà l'équipe du DASMO 80. Loïc m'avait prévenu. J'ai un rendez-vous chez la pneumologue référente de la SLA au CHU d'Amiens. J'attends ça depuis un an. Je ne peux pas le manquer. Si tu veux, tu m'accompagnes. J'avais bien sûr accepté.

  • Albane

    Marthe et Albane.

  • Natacha Sels

    Enchantée.

  • Albane

    Moi je suis l'infirmière de coordination du DASMO du coup.

  • Marthe

    Et moi je suis l'éducatrice spécialisée du DASMO.

  • Albane

    Loïc c'est un visage plein de sourires, un regard plein de malice. Il a de très grandes mains et tout est très grand et c'est quelqu'un qui inspire la sympathie. On est venu l'accompagner dans le transport et puis dans la consultation à l'hôpital,voilà.

  • Natacha Sels

    Donc là on va à l'hôpital

  • Albane

    Exactement. Dans son parcours de soins, il y a une nécessité de consultation et du coup on l'accompagne dans ce projet là. O n reste comme ça ? Oui, je veux bien que vous descendiez l'acoudoir, que vous me filiez mon téléphone et après je suis paré pour vous accompagner. allez hop puis l'ordonnant c'est bon maman et ma carte vital c'est parti c'est bon oui ouais c'est juste placer maman bien sûr ça m'énerve et où le mappol

  • Natacha Sels

    C'est à peu près à quelle distance l'hôpital ?

  • Loïc Résibois

    On est à, je ne sais pas, 25 kilomètres peut-être. Ah oui. Je t'avoue que je ne suis pas âgé. Je suis content de rencontrer la pneumo référente de la SLA, mais je lui en veux parce que ça fait un an que je cherche désespérément. Alors on peut être en flux. Et en fait, là, une fois de plus, je constate que je parviens à rencontrer parce que j'ai dû activer mon réseau. Moi j'essaie de battre aussi pour les gens qui n'ont pas de réseau. Et je fais l'opinion en fait, depuis 20 ans longtemps, je commence à avoir peur Martin. La priorité à droite qui est agréée, ça fait... Ouais ouais c'est ça ! Je fais un clin d'œil ! Et donc en fait je constate que les gens qui n'ont pas de connaissance... C'est encore plus difficile pour eux. Et tu vois, même si je milite pour l'aide à mourir, je parle de plus en plus d'aide à vivre, parce que je constate qu'il y a de nombreux malades qui veulent en finir. Évidemment qu'ils souffrent de leur maladie, mais en fait, ils souffrent aussi beaucoup du fait que notre système de soins est un peu à l'agonie, et donc on n'arrive pas à répondre aux demandes matérielles. technique des gens et ça pour moi c'est pas un bon motif pour vouloir en finir. Moi je note les gens qui demandent d'aide à mourir c'est parce qu'ils ne supportent pas leur maladie, pas parce que notre système de soins est incapable de répondre à leurs besoins.

  • Natacha Sels

    Tu as quel âge Loïc ?

  • Loïc Résibois

    J'ai 46 ans, ma femme à 47 et moi je tiens vraiment à souligner le fait qu'avec moi elle est juste incroyable. J'ai toujours peur. Même si je fais des blagues avec elle, qu'elle finisse par se lasser, se rouler les dents, parce que c'est hyper dur. C'est pas seulement du matin au soir. Moi, c'est même la nuit, parce que la nuit, je lui demande de me retourner dans le lit. Faut bien imaginer, un malade de charcot, au bout d'un certain temps, il ne peut même plus se tourner dans son lit. Je peux même pas me gratter la tête. Enfin, c'est quand même très très dur à vivre au quotidien. Même si je précise qu'aujourd'hui, je suis encore heureux. Et j'ai envie que ça continue comme ça. On arrive devant le...

  • Natacha Sels

    Le chien.

  • Albane

    Ouais, c'est ça.

  • Loïc Résibois

    Natacha je te laisse te présenter et tenter ta chance toi-même. On verra si tu es persuasive ou pas.

  • Natacha Sels

    Loïc ne rate pas une occasion de plaisanter. Et le docteur Mailleux, pneumologue référente SLA, accepte de prendre un peu de son temps pour répondre à quelques-unes de mes questions.

  • Dr Mailleux

    Alors, la référente est d'un bien grand mot, c'est-à-dire que j'ai un peu plus l'habitude de prendre en charge ces patients. Mais on est une équipe de pneumologues et mes collègues ont quelques patients aussi. J'ai peut-être une plus grande, on va dire, patientelle sur ce sujet-là.

  • Natacha Sels

    Et la question que je me posais, c'est qu'est-ce que ça fait d'avoir en face de soi des personnes qu'on ne peut pas guérir quand on est médecin ?

  • Dr Mailleux

    Alors, on est content de pouvoir les aider déjà. Ne pas les guérir, c'est difficile, mais on ne les leurre pas. Je veux dire, déjà, eux savent très bien. Nous, on essaye d'améliorer le confort de vie. en proposant des techniques de ventilation par exemple quand c'est le moment, en sachant que l'arrière-pensée ne peut pas leur rajouter trop de contraintes non plus. Et donc il faut faire très attention à ce qu'on propose aux patients qui sont devant nous, à la charge de travail que ça va occasionner, aux contraintes. Il faut vraiment se poser les bonnes questions.

  • Natacha Sels

    Est-ce qu'il y a une façon au niveau psychologique dont vous pouvez aider ces patients-là aussi ?

  • Dr Mailleux

    Oui, parce qu'on peut déjà, il faut les prendre en charge avec un vocabulaire adapté à chacun et à leurs problèmes. S'imaginer qu'elle peut être la vie à domicile et être le plus, on va dire, bienveillant possible. Essayer de répondre à leurs attentes de rendez-vous. quand on peut, à leurs attentes de questionnement, de les entourer au mieux, dans une atmosphère, on va dire, plutôt rassurante, sans les leurrer quand même. Donc il faut faire très attention de ne jamais prononcer des mots qui pourraient les heurter, mais il faut quand même poser les bonnes questions, sur la prise en charge actuelle ou à venir. Ça c'est important.

  • Natacha Sels

    Vous parlez du futur avec eux ?

  • Dr Mailleux

    Tout à fait. Alors, de futur, on parle de futur, mais de directives anticipées aussi. Et donc, pas sur une première rencontre. jamais parce que je ne sais pas qui j'ai en face de moi et quels sont les affects, comment ça se passe, déjà ce que sait le patient. Mais on approche tout doucement les vraies questions au fur et à mesure des consultations bien sûr.

  • Natacha Sels

    À un moment il y a la question de la trachéotomie, c'est ça ?

  • Dr Mailleux

    Tout à fait. Alors ça c'est une question sérieuse. qu'on n'aborde pas toujours. Personnellement, je ne parle certains patients, je n'ai jamais parlé de trachéotomie tout au long du suivi parce que eux savent, s'ils ne nous posent pas la question et si moi je ne l'aborde pas, ça veut dire en soi qu'ils ne sont pas forcément prêts à y accéder. Et pour leur éviter d'avoir à y réfléchir en oui ou non, on n'aborde pas la question. Alors par contre, ceux qui connaissent la technique, et la majorité de toute façon la connaissent, surtout dans l'évolution de la pathologie, les patients qui sont très demandeurs vont nous le dire dès le départ. Alors après, on peut changer d'idée avec l'évolution, mais souvent, je veux dire, ça va être immédiatement demandé. Alors pas forcément sur cette parole de trachéotomie, mais quelquefois en disant... veux tout docteur, vous allez m'aider, je veux tout, j'ai des choses à faire et à vivre. On a très bien compris quand on nous annonce ça. Donc on suit.

  • Natacha Sels

    Alors aujourd'hui j'étais venue interviewer Loïc et il y a quelques jours il m'a dit ça y est j'ai un rendez-vous que j'attends depuis très très très longtemps. Qu'est-ce qui fait qu'il a attendu aussi longtemps pour un rendez-vous en pneumonie ? Il m'a parlé d'une année.

  • Dr Mailleux

    Alors oui c'est ce qu'il m'a dit. Alors j'étais très surpris. Moi j'ai des correspondances là sur la fin de l'année. C'est vrai que j'ai dû voir passer sa demande, alors un an ça me paraît compliqué, mais j'ai dû voir passer sa demande, mais étant donné qu'il avait un suivi sur Paris qui était bien mené, je pense que du coup on ne l'a pas mis dans nos priorités de rendez-vous. Il n'a pas été complètement abandonné puisqu'il a quand même vu les neurologues à plusieurs reprises. Et c'est pareil, je pense que si mes collègues neurologues avaient senti le besoin, ils m'auraient intercepté. Donc voilà, peut-être qu'en effet on a raté quelque chose parce qu'on n'a pas compris le besoin, mais il était suivi. Rassurons-nous tous.

  • Natacha Sels

    Tandis que Loïc passe une batterie d'examens, Albane, l'infirmière coordinatrice et moi discutons à voix basse dans la salle d'attente. Elle a beaucoup de choses à dire, Alban, et je souffre de ne pouvoir lui tendre le micro. Heureusement, les infirmières du service sont sympas et nous trouvent un endroit où nous isoler.

  • Albane

    En réalité, je ne soigne pas les gens, je les aide à vivre leurs besoins d'être. Et j'essaye de faire au mieux. d'être le plus invisible possible pour permettre aux gens d'être ce qu'ils sont. Et je suis le porte-parole, la confidente, et c'est en ça que je vois le soin, pas forcément en termes techniques. Mais une infirmière sait aussi savoir s'asseoir à côté de la personne, d'échanger ou ne serait-ce que d'écouter.

  • Natacha Sels

    On en parlait là, assises toutes les deux dans la salle d'attente, mais pour toi, c'est quoi la vie, c'est quoi la mort finalement ?

  • Albane

    C'est deux grandes copines. C'est à dire que pour moi l'un ne va pas sans l'autre, elles sont indissociables et on se pose tellement de questions au sujet de la vie et pourtant la mort elle reste toujours de côté la pauvre. Et tout au long de notre vie on sera amené à la côtoyer et je trouve ça triste qu'on doive la mettre de côté parce qu'on a peur alors qu'au final pour moi Accompagner la mort, c'est comme accompagner la vie, ça reste un soin.

  • Natacha Sels

    Qu'est-ce qu'elle peut nous apporter, la mort, si on la regarde un peu plus près, si on ose la regarder ?

  • Albane

    Déjà, la mort, moi je la vois comme une délivrance. Mais au-delà de ça, ce qui pour moi est difficile à... à accepter en tant que personne et en tant que soignante, c'est de voir les gens souffrir. Et je ne parle pas forcément de la souffrance physique, c'est aussi de la souffrance psychique. Et pour en revenir à Loïc, je pense que c'est ça dont il a peur, c'est de souffrir, aussi bien d'un point de vue physique, mais c'est cette souffrance que peut éprouver une personne malade qui est dépendante. de voir le regard des gens qu'il aime changer parce qu'il est dépendant, parce qu'il a besoin de ces personnes-là pour vivre, tout simplement. Et ce changement de regard, ça peut faire beaucoup de mal, en fait, parce qu'on perd son identité. Et je pense que tant qu'on ne l'a pas vécu, tant qu'on n'est pas dans cette situation d'extrême nécessité, de dépendance, On ne peut pas comprendre qu'on puisse avoir besoin d'exprimer cette envie, de choisir quand est-ce qu'on doit partir.

  • Natacha Sels

    Sur le trajet du retour, nous continuons d'échanger. Pour Loïc, communiquer c'est la vie. Et moi, j'ai hâte de savoir comment s'est passée la rencontre avec la pneumologue.

  • Loïc Résibois

    Oui, elle était très bien, c'est pour ça que j'étais déçu de devoir lui dire que j'avais détesté pendant des mois. En fait, je crois que c'est le système qui ne va pas. Ce n'est pas vraiment les individus. C'est trop de patients, pas assez de moyens. C'est aussi simple que ça. Et donc, ça génère de la maltraitance. J'ai envie de dire, et du personnel qui est frustré de ne pas bien pouvoir prendre en charge des patients. Et des patients qui pensent que les médecins s'en foutent. Et donc, ça génère aussi certainement d'agressivité inutile.

  • Albane

    C'est bon.

  • Loïc Résibois

    J'ai plein de plaisir que je dois arrêter, auxquels je dois renoncer. Par exemple, l'ortho me dit que la viande, c'est très bien d'arrêter et de la hacher. Ah ben non. Moi, franchement, j'ai envie de manger un steak. de sentir le plaisir ben non je vous l'ai dit je peux pas le jour où peut-être j'aurai peur parce que la peur est un moteur hyper important par exemple moi le fauteuil à la maison j'étais très fier de venir à mes copains non je m'en sers pas j'ai le déambulateur à la maison et le fauteuil c'est que pour dehors et en fait la même journée je suis tombé deux fois et ben en deux minutes j'ai accepté l'idée d'être en fauteuil parce que J'étais vraiment angoissé, la peur d'avoir mal, parce que tu tombes avec Charcot, tu peux même pas mettre tes mains pour t'arrêter, tu tombes vraiment comme une merde, et tu te fais mal. Mais ça t'aide aussi à accepter des aides techniques que tu ne te sentais pas capable d'accepter. C'est pour ça que je dis que... Même si je m'invite pour aller mourir, mon envie de vivre est très très forte.

  • Natacha Sels

    À la maison, la maman de Loïc nous attend de pied ferme, avec l'intention de nous faire goûter à sa délicieuse quiche, ce que nous faisons semblant de refuser pour la forme. C'est l'occasion de se détendre dans une ambiance décontractée qui semble de mise chez les résiduits.

  • Maman de Loïc

    Tu vas te chercher un coca dans le bac du frigo ?

  • Albane

    Voilà, bon !

  • Maman de Loïc

    En tout cas, merci beaucoup.

  • Albane

    Il n'y a pas de quoi.

  • Loïc Résibois

    Ça va, elles sont payées pour ça.

  • Albane

    Exactement. Exactement. La VNI, vous voulez qu'on la mette où, Loïc ?

  • Natacha Sels

    Moi, j'avais une question. C'est quoi la VNI ?

  • Albane

    VNI, Ventilation Non-Invasive.

  • Natacha Sels

    D'accord. Et ça consiste en quoi ?

  • Albane

    Ça consiste en quoi, Loïc ?

  • Loïc Résibois

    Insuffler de l'air sous pression dans mes poumons, pour agrandir mes alvéoles de poumons, pour que je respire mieux.

  • Albane

    Forcer la respiration en fait. Loïc n'a plus la capacité, ou du moins une capacité très faible, de faire fonctionner son diaphragme et ses muscles intercostaux. Et en fait, la machine va pousser de l'air, de manière à ce que son diaphragme et ses muscles intercostaux s'ouvrent, de manière à ce que le poumon puisse être ventilé correctement.

  • Loïc Résibois

    Et ça va aussi soulager mes blessures respiratoires. Merci beaucoup, les filles. C'était vraiment sympa.

  • Maman de Loïc

    Merci beaucoup, en tout cas.

  • Albane

    Je...

  • Maman de Loïc

    De le supporter déjà.

  • Albane

    Je réitère mes propos. Vous n'étiez pas présente. Mais si vous avez besoin de quoi que ce soit, d'une information ou quoi, vous n'hésitez pas.

  • Maman de Loïc

    Merci beaucoup.

  • Albane

    Vraiment.

  • Maman de Loïc

    Il vous a dit qu'il allait au concert de Oshie ?

  • Albane

    Oui, on l'a su. C'est jeudi, là ?

  • Natacha Sels

    La maison, de plein pied et ouverte, ressemble à une ruche où les abeilles virevoltent en tous sens. Alban et Marthe prévoient la prochaine sortie au ciné de Loïc. Son père bricole, sa mère prépare du gâteau, les voisins passent et rigolent. Loïc demande à chacun de se retirer afin que nous puissions parler tranquillement. Moi j'aimerais, parce qu'en fait comme on a embarqué tout de suite à l'hôpital, te demander un petit peu comment tu as appris la maladie, comment ça s'est passé et comment à ce moment-là tu as réagi, parce que c'est juste un cataclysme j'imagine.

  • Loïc Résibois

    Alors en fait j'ai eu quand même de la chance quelque part. Je suis entré dans la maladie fin 2019 début 2020 de manière très... Singulière, mais aussi anodine. En fait, j'avais un tremblement à la main après avoir joué au tennis avec mes adversaires quand je buvais un coup. Et je disais à ma femme, Mais attends, moi je prends un coca, mais il doit froid que je veux une bière tellement je tremble. Donc c'était vraiment anodin. Et en même temps, comme ça a duré dans le temps, ma femme m'a demandé d'aller voir une neurologue. C'était mon premier rendez-vous avec un médecin spécialiste. Je n'avais jamais eu de problème de santé avant. En plus, je ne buvais pas, je ne fumais pas, je faisais beaucoup de sport, donc je me sentais quand même un peu invulnérable. Et cette neurologue, elle a commencé à me faire passer les examens. Et ils ont trouvé que j'avais une maladie auto-immune qui s'appelle une sarcoïdose. Et ils ont pensé que c'est ce qui pouvait provoquer mes problèmes neurologiques, auquel cas ça s'appelle précipitation. une neuro sarcoïdose et pendant deux ans et demi j'ai eu différents traitements mais qui n'ont jamais réussi à diminuer mes symptômes et donc planer quand même autour de moi cette hypothèse de la maladie charcot donc lorsque des russies qui est tombé en septembre 2022 j'avais tant de mes préparer j'ai pas été sidéré évidemment quand le médecin m'a dit que c'était ça que c'était sûr Bon bah, là j'ai appris officiellement que mon espérance de vie venait de passer de, on va dire une quarantaine d'années, à 3 à 5 ans. Bien sûr que c'était dur. Mais ce que j'ai trouvé encore plus injuste, c'est qu'on m'a... aussi dit que comme j'avais été diagnostiqué tardivement, je n'étais pas éligible aux traitements expérimentaux qui auraient pu augmenter un peu mon espérance de vie. Donc ça, j'ai vu que c'était un peu comme une double peine. J'étais condamné à mort et en plus je n'avais même pas l'espoir d'avoir cette perspective de vivre plus longtemps parce que je n'étais pas dans les clous administratifs. Et ça a été quelque part un premier signal de... Toutes les tracasseries administratives que tu peux rencontrer quand tu es malade de charcot ou même malade en général. Et tu dirais finalement, mes proches ont vécu ça plus difficilement que moi.

  • Natacha Sels

    La maman de Loïc confirme.

  • Maman de Loïc

    Il nous donne une vraie leçon de vie, c'est incroyable. Il ne se plaint jamais, il a toujours peur de déranger, ça nous embête un petit peu parce qu'on est là pour lui faire plaisir et pour essayer de... Que ce soit un peu plus facile pour lui. Et lui, il a toujours peur de déranger. Donc il n'ose pas demander. Il n'ose jamais nous demander. On ne croyait pas au départ que c'était la maladie de Charcot. Quand on nous a parlé de cette maladie, on ne la connaissait pas bien. On savait à peu près ce que c'était, mais pas dans les détails. Et on ne le croyait pas. On disait, lui, non, il n'a jamais été malade. Ce serait une exception, mais ça ne peut pas être ça. Et puis, on voyait quand même, au bout de deux ans, se dégrader quand même tous ses muscles, perdre des forces. Mais cet été, il était encore... Il marchait en début d'été avec un déambulateur encore, il allait jusqu'à la mer qui n'est pas très loin mais avec son déambulateur. Et bien sûr il avait arrêté le sport, il avait arrêté tout ça. Il accepte quand même bien je trouve sa condition. Il aimait beaucoup l'île dorée parce que depuis qu'il était malade ça lui faisait beaucoup de bien de nager. Alors il nageait où il avait pied et mon mari était à côté ou sa femme bien sûr. Mais il était sur le dos et ça lui faisait énormément de bien. Il se sentait très léger sur l'eau.

  • Loïc Résibois

    Aujourd'hui, quand je vois des gens marcher, sauter, courir, ça me semble presque magique ce qu'ils font, tellement c'est éloigné de mon quotidien.

  • Natacha Sels

    Et qu'est-ce qui a été le plus difficile à accepter pour toi ?

  • Loïc Résibois

    Je ne saurais pas répondre à cette question sur ce qui a été le plus difficile à accepter pour moi, parce que je pensais ne pas accepter la dépendante. Finalement, je l'ai accepté. Je pensais ne pas accepter d'être en fauteuil. Je l'ai accepté et du coup je me dis que plus la maladie progresse et plus l'envie de vivre se renforce. Donc là je sais que la tracheotomie pour moi c'est une énorme appréhension, comme la gastrostomie. J'ai envie de te dire aujourd'hui que je ne veux pas subir ces interventions, mais peut-être que je les subirai et je serai heureux de continuer à vivre comme ça. Là c'est mon avis aujourd'hui.

  • Natacha Sels

    Dans le prochain épisode, vous retrouverez Loïc Rézybois, Le droit de choisir, partie 2. Restez à l'écoute de notre podcast La vie est belle SLA et abonnez-vous sur votre plateforme préférée.

Description

Loïc Résibois, 46 ans, a reçu il y a un an et demi le diagnostic de la maladie de Charcot. Depuis, il mène avec détermination et courage un combat pour défendre l’aide active à mourir, tout en exprimant une puissante envie de vivre. Comme la plupart des personnes atteintes d’une maladie incurable, Loïc souhaite avant tout profiter de chaque instant avec ses proches et ses amis, savourant chaque moment de bonheur possible…


Depuis l’enregistrement de ce podcast, Loïc nous a quittés le 24 septembre 2024, à l’Île de Ré. Nous tenons à lui rendre un hommage appuyé. Au cours des deux dernières années, Loïc a accompagné l’ARSLA avec une bonne humeur communicative, même dans les périodes les plus difficiles. Il a su nous interpeller et nous mobiliser sur des sujets essentiels. Nous pensons à lui et à toute sa famille.



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Nous remercions chaleureusement toutes les personnes qui ont participé à cette première saison : personnes malades, aidants, proches, professionnels de santé.


Un immense merci également à la Fondation d'entreprise IRCEM pour son précieux soutien, ainsi qu'à l’Agence CosaVostra pour la réalisation du visuel du podcast.


Ce podcast de l'ARLSA a été réalisé par Natacha Sels, la post-production est de Bertrand Chaumeton.

 

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Bonne écoute !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Natacha Sels

    La vie est belle, essaie-la ! (SLA), le podcast de l'ARSLA, qui met en lumière des personnes confrontées à la SLA et des professionnels engagés.

  • Loïc Résibois

    Même si je milite pour l'aide à mourir, mon envie de vivre est très très forte.

  • Natacha Sels

    Loïc Résibois, le droit de choisir, partie 1. Aujourd'hui, j'ai rendez-vous avec Loïc Résibois, atteint de la maladie de Charcot depuis un an et demi. De lui, je connais seulement un combat. légaliser l'aide active à mourir en France. Je vais découvrir un homme qui a la fureur de vivre chevillé au corps, l'humour en bandoulière, cachant à peine sa générosité et l'amour de son prochain. Son entourage et tous ceux qui le suivent le lui rendent bien. Tandis que je me dirige vers son domicile, une maison dans les environs d'Amiens, je retrouve le ciel gris du nord. Il fait beau, puisqu'il ne pleut pas, et sur les bas côtés, l'explosion de jonquilles fait figure de soleil. La maman de Loïc vient m'ouvrir. Elle et son mari sont venus prendre le relais de son épouse absente pour la semaine. Sa fille Capucine donne le ton.

  • Capucine Résibois

    Alors mon père, il est assez grand, il fait 1m85, il a les yeux bleus. Il est brun avec des cheveux plutôt courts mais pas le crâne rasé. Il est sportif, il a toujours été sportif. Et puis c'est quelqu'un de très généreux, c'est quelqu'un de très altruiste. C'est lui qui m'a appris le roller, notamment à l'île de Ré dans son endroit préféré. Au-delà de ça, il pratiquait le tennis, donc il m'a essayé de partager la passion du tennis, mais ça n'a pas trop marché pour moi.

  • Natacha Sels

    Est-ce que c'est un gentil papa ?

  • Capucine Résibois

    Oui, c'est un très gentil papa quand il veut. Pas toujours. Non, il est très gentil, mais il a toujours été... Je pense que les plus grandes valeurs qu'il m'a transmises, c'est surtout la générosité et l'altruisme, le fait de penser aux autres, de vouloir toujours aider les autres, les gens dans le besoin. Voilà, il a toujours voulu aider. Il a toujours voulu aider, et c'est lui qui m'a transmis ces valeurs-là.

  • Loïc Résibois

    On est dans mon salon avec une cheminée, j'adore ça, c'est hyper important pour moi. Je trouve que ça donne de la chaleur à la maison. Alors je ne peux évidemment plus allumer le feu moi-même, mais c'est hyper important pour moi. À côté de nous se trouve une grande cage. À l'intérieur de cette cage, un magnifique perroquet qui s'appelle Nina. C'est un éclectus femelle. qui a un caractère de cochon et qui n'est gentil qu'avec notre fille Capucine. Je dirais même qu'elle est un peu amoureuse de Capucine. Elle lui lisse ses cheveux, elle lui fait des bisous, parce que les perroquets ça a une langue, et donc elle passe la langue sur son visage, c'est très étonnant. Et alors quand elle parle, elle a pris la voix de Capucine, c'est hyper surprenant.

  • Natacha Sels

    En tout cas, elle a des couleurs absolument incroyables.

  • Loïc Résibois

    Et un peu plus loin, tu as un billard, ça c'est hyper important pour moi, j'adore jouer, j'adore le jeu. je peux plus jouer mais les copains du tennis après l'entraînement débarquer à la maison et jouer au billard avec moi c'est super ça nous permettait de continuer à avoir des rapports un peu de compétition et généralement vers une heure du mat' Caro pétait un câble en disant que tout le monde se barre pour qu'ils puissent enfin dormir tellement ça rigolait fort donc voilà j'ai très souvent du monde qui passent à la maison et en fait C'est aussi une charge mentale pour mon épouse parce qu'elle a envie de montrer qu'elle s'en sort, qu'elle est forte, que la maison est bien tenue. Et donc, c'est bien pour moi, mais ce n'est pas forcément facile pour elle. Alors pour la presse, elle sait que c'est devenu mon combat, que c'est très important pour moi et pour mon moral. Elle prend sur elle, mais j'ai aussi conscience et je la remercie. C'est encore un effort supplémentaire que je lui demande.

  • Natacha Sels

    Et là, en ce moment, elle n'est pas là. Elle n'est pas là, mais à la maison, il y a tes parents.

  • Loïc Résibois

    Alors, quand mon épouse travaille, ce qui arrive encore deux demi-journées par semaine, ou là, elle est partie en vacances, en fait, il y a les gens qui viennent me garder. C'est l'expression que j'emploie parce que c'est un peu vrai, ça correspond à la réalité. C'est un peu infantilisant, mais c'est exactement ça. Et donc, mes parents sont venus me garder. Et c'est évidemment super de les avoir à mes côtés, mais pour eux c'était pas facile. Ils ont 76, 75 ans.

  • Natacha Sels

    Et donc toi tu te bats pour le choix de la fin de vie, de façon générale et spécifiquement pour la maladie de Charcot. Est-ce que tu peux m'en dire un peu plus ?

  • Loïc Résibois

    Alors d'abord, je vais préciser que ce n'est pas parce que je milite pour l'aide à mourir que je veux mourir. Moi, comme la grande majorité des malades condamnés ce qu'on veut c'est profiter du temps qui nous reste de nos proches de nos amis être heureux le plus longtemps possible mais l'aide à mourir c'est à la fois la garantie d'une mort sans douleur au moment voulu et le au moment voulu c'est très important et c'est surtout la garantie d'une fin de vie sereine parce qu'en fait tu sais que tu seras jamais en cette situation où tu es pas encore mort mais plus tout à fait vivant. Moi c'est ça qui me fait peur, j'ai compris que j'allais mourir, j'ai envie de dire. On sait tous qu'on va mourir un jour moi ce que je veux c'est bien mourir, c'est avoir une mort digne et qui corresponde à la vie que j'ai vécue en fait. Je sais pas quand, je te dirai j'en peux plus m ais je ne sais même pas si ce moment va arriver, mais savoir que si un jour je dis je n'en peux plus, je veux que ça s'arrête, on puisse faire en sorte que ça s'arrête rapidement. C'est de nature à lever énormément de mes angoisses, mais en fait des angoisses de dizaines de milliers de malades condamnés. Le système qui existe en France, c'est la sédation profonde et continue jusqu'au décès, qu'on appelait avant euthanasie passive. Ce système qui consiste à attendre que le malade soit à l'article de sa mort pour l'endormir, cesser les traitements, cesser de l'hydrater et de l'alimenter. Et ensuite, on attend. Son visage s'amaigrit, son corps s'amaigrit, le malade fini soit par mourir de sa maladie pour les plus chanceux soit par mourir en fait de déshydratation que ces organes lâchent les uns après les autres la mort prend de quelques heures à trois semaines. Ma question est la suivante quel intérêt de faire vivre à des gens qui ont déjà souffert pendant des mois une agonie aussi longue, à la fois pour le malade, mais aussi pour ses proches ? ça n'a aucun sens. La sélation profonde et continue est faite pour le confort du soignant, qui n'a pas l'impression de donner la mort, et pas pour le confort du malade. Et je trouve qu'il aurait fallu changer un peu le paradigme des médecins, et qu'on mette le patient au cœur de la préoccupation des médecins. Et quand on voit à quel point, et j'en suis le premier témoin, l'envie de vivre est surprenante, incroyablement forte. Quand un malade condamné dit de manière claire et éthérée qu'il veut mourir, c'est vraiment qu'il n'en peut plus et donc pour moi accompagner ce malade jusqu'à la mort c'est juste un acte ultime de soins et j'irai jusqu'à dire d'humanité et ce n'est pas du tout une inversion et une rupture anthropologique comme certains le disent, sous la réserve bien évidemment, qu'on mette en place l'aide à mourir, mais qu'on renforce aussi l'aide à vivre.

  • Natacha Sels

    La sonnerie de la porte retentit. C'est déjà l'équipe du DASMO 80. Loïc m'avait prévenu. J'ai un rendez-vous chez la pneumologue référente de la SLA au CHU d'Amiens. J'attends ça depuis un an. Je ne peux pas le manquer. Si tu veux, tu m'accompagnes. J'avais bien sûr accepté.

  • Albane

    Marthe et Albane.

  • Natacha Sels

    Enchantée.

  • Albane

    Moi je suis l'infirmière de coordination du DASMO du coup.

  • Marthe

    Et moi je suis l'éducatrice spécialisée du DASMO.

  • Albane

    Loïc c'est un visage plein de sourires, un regard plein de malice. Il a de très grandes mains et tout est très grand et c'est quelqu'un qui inspire la sympathie. On est venu l'accompagner dans le transport et puis dans la consultation à l'hôpital,voilà.

  • Natacha Sels

    Donc là on va à l'hôpital

  • Albane

    Exactement. Dans son parcours de soins, il y a une nécessité de consultation et du coup on l'accompagne dans ce projet là. O n reste comme ça ? Oui, je veux bien que vous descendiez l'acoudoir, que vous me filiez mon téléphone et après je suis paré pour vous accompagner. allez hop puis l'ordonnant c'est bon maman et ma carte vital c'est parti c'est bon oui ouais c'est juste placer maman bien sûr ça m'énerve et où le mappol

  • Natacha Sels

    C'est à peu près à quelle distance l'hôpital ?

  • Loïc Résibois

    On est à, je ne sais pas, 25 kilomètres peut-être. Ah oui. Je t'avoue que je ne suis pas âgé. Je suis content de rencontrer la pneumo référente de la SLA, mais je lui en veux parce que ça fait un an que je cherche désespérément. Alors on peut être en flux. Et en fait, là, une fois de plus, je constate que je parviens à rencontrer parce que j'ai dû activer mon réseau. Moi j'essaie de battre aussi pour les gens qui n'ont pas de réseau. Et je fais l'opinion en fait, depuis 20 ans longtemps, je commence à avoir peur Martin. La priorité à droite qui est agréée, ça fait... Ouais ouais c'est ça ! Je fais un clin d'œil ! Et donc en fait je constate que les gens qui n'ont pas de connaissance... C'est encore plus difficile pour eux. Et tu vois, même si je milite pour l'aide à mourir, je parle de plus en plus d'aide à vivre, parce que je constate qu'il y a de nombreux malades qui veulent en finir. Évidemment qu'ils souffrent de leur maladie, mais en fait, ils souffrent aussi beaucoup du fait que notre système de soins est un peu à l'agonie, et donc on n'arrive pas à répondre aux demandes matérielles. technique des gens et ça pour moi c'est pas un bon motif pour vouloir en finir. Moi je note les gens qui demandent d'aide à mourir c'est parce qu'ils ne supportent pas leur maladie, pas parce que notre système de soins est incapable de répondre à leurs besoins.

  • Natacha Sels

    Tu as quel âge Loïc ?

  • Loïc Résibois

    J'ai 46 ans, ma femme à 47 et moi je tiens vraiment à souligner le fait qu'avec moi elle est juste incroyable. J'ai toujours peur. Même si je fais des blagues avec elle, qu'elle finisse par se lasser, se rouler les dents, parce que c'est hyper dur. C'est pas seulement du matin au soir. Moi, c'est même la nuit, parce que la nuit, je lui demande de me retourner dans le lit. Faut bien imaginer, un malade de charcot, au bout d'un certain temps, il ne peut même plus se tourner dans son lit. Je peux même pas me gratter la tête. Enfin, c'est quand même très très dur à vivre au quotidien. Même si je précise qu'aujourd'hui, je suis encore heureux. Et j'ai envie que ça continue comme ça. On arrive devant le...

  • Natacha Sels

    Le chien.

  • Albane

    Ouais, c'est ça.

  • Loïc Résibois

    Natacha je te laisse te présenter et tenter ta chance toi-même. On verra si tu es persuasive ou pas.

  • Natacha Sels

    Loïc ne rate pas une occasion de plaisanter. Et le docteur Mailleux, pneumologue référente SLA, accepte de prendre un peu de son temps pour répondre à quelques-unes de mes questions.

  • Dr Mailleux

    Alors, la référente est d'un bien grand mot, c'est-à-dire que j'ai un peu plus l'habitude de prendre en charge ces patients. Mais on est une équipe de pneumologues et mes collègues ont quelques patients aussi. J'ai peut-être une plus grande, on va dire, patientelle sur ce sujet-là.

  • Natacha Sels

    Et la question que je me posais, c'est qu'est-ce que ça fait d'avoir en face de soi des personnes qu'on ne peut pas guérir quand on est médecin ?

  • Dr Mailleux

    Alors, on est content de pouvoir les aider déjà. Ne pas les guérir, c'est difficile, mais on ne les leurre pas. Je veux dire, déjà, eux savent très bien. Nous, on essaye d'améliorer le confort de vie. en proposant des techniques de ventilation par exemple quand c'est le moment, en sachant que l'arrière-pensée ne peut pas leur rajouter trop de contraintes non plus. Et donc il faut faire très attention à ce qu'on propose aux patients qui sont devant nous, à la charge de travail que ça va occasionner, aux contraintes. Il faut vraiment se poser les bonnes questions.

  • Natacha Sels

    Est-ce qu'il y a une façon au niveau psychologique dont vous pouvez aider ces patients-là aussi ?

  • Dr Mailleux

    Oui, parce qu'on peut déjà, il faut les prendre en charge avec un vocabulaire adapté à chacun et à leurs problèmes. S'imaginer qu'elle peut être la vie à domicile et être le plus, on va dire, bienveillant possible. Essayer de répondre à leurs attentes de rendez-vous. quand on peut, à leurs attentes de questionnement, de les entourer au mieux, dans une atmosphère, on va dire, plutôt rassurante, sans les leurrer quand même. Donc il faut faire très attention de ne jamais prononcer des mots qui pourraient les heurter, mais il faut quand même poser les bonnes questions, sur la prise en charge actuelle ou à venir. Ça c'est important.

  • Natacha Sels

    Vous parlez du futur avec eux ?

  • Dr Mailleux

    Tout à fait. Alors, de futur, on parle de futur, mais de directives anticipées aussi. Et donc, pas sur une première rencontre. jamais parce que je ne sais pas qui j'ai en face de moi et quels sont les affects, comment ça se passe, déjà ce que sait le patient. Mais on approche tout doucement les vraies questions au fur et à mesure des consultations bien sûr.

  • Natacha Sels

    À un moment il y a la question de la trachéotomie, c'est ça ?

  • Dr Mailleux

    Tout à fait. Alors ça c'est une question sérieuse. qu'on n'aborde pas toujours. Personnellement, je ne parle certains patients, je n'ai jamais parlé de trachéotomie tout au long du suivi parce que eux savent, s'ils ne nous posent pas la question et si moi je ne l'aborde pas, ça veut dire en soi qu'ils ne sont pas forcément prêts à y accéder. Et pour leur éviter d'avoir à y réfléchir en oui ou non, on n'aborde pas la question. Alors par contre, ceux qui connaissent la technique, et la majorité de toute façon la connaissent, surtout dans l'évolution de la pathologie, les patients qui sont très demandeurs vont nous le dire dès le départ. Alors après, on peut changer d'idée avec l'évolution, mais souvent, je veux dire, ça va être immédiatement demandé. Alors pas forcément sur cette parole de trachéotomie, mais quelquefois en disant... veux tout docteur, vous allez m'aider, je veux tout, j'ai des choses à faire et à vivre. On a très bien compris quand on nous annonce ça. Donc on suit.

  • Natacha Sels

    Alors aujourd'hui j'étais venue interviewer Loïc et il y a quelques jours il m'a dit ça y est j'ai un rendez-vous que j'attends depuis très très très longtemps. Qu'est-ce qui fait qu'il a attendu aussi longtemps pour un rendez-vous en pneumonie ? Il m'a parlé d'une année.

  • Dr Mailleux

    Alors oui c'est ce qu'il m'a dit. Alors j'étais très surpris. Moi j'ai des correspondances là sur la fin de l'année. C'est vrai que j'ai dû voir passer sa demande, alors un an ça me paraît compliqué, mais j'ai dû voir passer sa demande, mais étant donné qu'il avait un suivi sur Paris qui était bien mené, je pense que du coup on ne l'a pas mis dans nos priorités de rendez-vous. Il n'a pas été complètement abandonné puisqu'il a quand même vu les neurologues à plusieurs reprises. Et c'est pareil, je pense que si mes collègues neurologues avaient senti le besoin, ils m'auraient intercepté. Donc voilà, peut-être qu'en effet on a raté quelque chose parce qu'on n'a pas compris le besoin, mais il était suivi. Rassurons-nous tous.

  • Natacha Sels

    Tandis que Loïc passe une batterie d'examens, Albane, l'infirmière coordinatrice et moi discutons à voix basse dans la salle d'attente. Elle a beaucoup de choses à dire, Alban, et je souffre de ne pouvoir lui tendre le micro. Heureusement, les infirmières du service sont sympas et nous trouvent un endroit où nous isoler.

  • Albane

    En réalité, je ne soigne pas les gens, je les aide à vivre leurs besoins d'être. Et j'essaye de faire au mieux. d'être le plus invisible possible pour permettre aux gens d'être ce qu'ils sont. Et je suis le porte-parole, la confidente, et c'est en ça que je vois le soin, pas forcément en termes techniques. Mais une infirmière sait aussi savoir s'asseoir à côté de la personne, d'échanger ou ne serait-ce que d'écouter.

  • Natacha Sels

    On en parlait là, assises toutes les deux dans la salle d'attente, mais pour toi, c'est quoi la vie, c'est quoi la mort finalement ?

  • Albane

    C'est deux grandes copines. C'est à dire que pour moi l'un ne va pas sans l'autre, elles sont indissociables et on se pose tellement de questions au sujet de la vie et pourtant la mort elle reste toujours de côté la pauvre. Et tout au long de notre vie on sera amené à la côtoyer et je trouve ça triste qu'on doive la mettre de côté parce qu'on a peur alors qu'au final pour moi Accompagner la mort, c'est comme accompagner la vie, ça reste un soin.

  • Natacha Sels

    Qu'est-ce qu'elle peut nous apporter, la mort, si on la regarde un peu plus près, si on ose la regarder ?

  • Albane

    Déjà, la mort, moi je la vois comme une délivrance. Mais au-delà de ça, ce qui pour moi est difficile à... à accepter en tant que personne et en tant que soignante, c'est de voir les gens souffrir. Et je ne parle pas forcément de la souffrance physique, c'est aussi de la souffrance psychique. Et pour en revenir à Loïc, je pense que c'est ça dont il a peur, c'est de souffrir, aussi bien d'un point de vue physique, mais c'est cette souffrance que peut éprouver une personne malade qui est dépendante. de voir le regard des gens qu'il aime changer parce qu'il est dépendant, parce qu'il a besoin de ces personnes-là pour vivre, tout simplement. Et ce changement de regard, ça peut faire beaucoup de mal, en fait, parce qu'on perd son identité. Et je pense que tant qu'on ne l'a pas vécu, tant qu'on n'est pas dans cette situation d'extrême nécessité, de dépendance, On ne peut pas comprendre qu'on puisse avoir besoin d'exprimer cette envie, de choisir quand est-ce qu'on doit partir.

  • Natacha Sels

    Sur le trajet du retour, nous continuons d'échanger. Pour Loïc, communiquer c'est la vie. Et moi, j'ai hâte de savoir comment s'est passée la rencontre avec la pneumologue.

  • Loïc Résibois

    Oui, elle était très bien, c'est pour ça que j'étais déçu de devoir lui dire que j'avais détesté pendant des mois. En fait, je crois que c'est le système qui ne va pas. Ce n'est pas vraiment les individus. C'est trop de patients, pas assez de moyens. C'est aussi simple que ça. Et donc, ça génère de la maltraitance. J'ai envie de dire, et du personnel qui est frustré de ne pas bien pouvoir prendre en charge des patients. Et des patients qui pensent que les médecins s'en foutent. Et donc, ça génère aussi certainement d'agressivité inutile.

  • Albane

    C'est bon.

  • Loïc Résibois

    J'ai plein de plaisir que je dois arrêter, auxquels je dois renoncer. Par exemple, l'ortho me dit que la viande, c'est très bien d'arrêter et de la hacher. Ah ben non. Moi, franchement, j'ai envie de manger un steak. de sentir le plaisir ben non je vous l'ai dit je peux pas le jour où peut-être j'aurai peur parce que la peur est un moteur hyper important par exemple moi le fauteuil à la maison j'étais très fier de venir à mes copains non je m'en sers pas j'ai le déambulateur à la maison et le fauteuil c'est que pour dehors et en fait la même journée je suis tombé deux fois et ben en deux minutes j'ai accepté l'idée d'être en fauteuil parce que J'étais vraiment angoissé, la peur d'avoir mal, parce que tu tombes avec Charcot, tu peux même pas mettre tes mains pour t'arrêter, tu tombes vraiment comme une merde, et tu te fais mal. Mais ça t'aide aussi à accepter des aides techniques que tu ne te sentais pas capable d'accepter. C'est pour ça que je dis que... Même si je m'invite pour aller mourir, mon envie de vivre est très très forte.

  • Natacha Sels

    À la maison, la maman de Loïc nous attend de pied ferme, avec l'intention de nous faire goûter à sa délicieuse quiche, ce que nous faisons semblant de refuser pour la forme. C'est l'occasion de se détendre dans une ambiance décontractée qui semble de mise chez les résiduits.

  • Maman de Loïc

    Tu vas te chercher un coca dans le bac du frigo ?

  • Albane

    Voilà, bon !

  • Maman de Loïc

    En tout cas, merci beaucoup.

  • Albane

    Il n'y a pas de quoi.

  • Loïc Résibois

    Ça va, elles sont payées pour ça.

  • Albane

    Exactement. Exactement. La VNI, vous voulez qu'on la mette où, Loïc ?

  • Natacha Sels

    Moi, j'avais une question. C'est quoi la VNI ?

  • Albane

    VNI, Ventilation Non-Invasive.

  • Natacha Sels

    D'accord. Et ça consiste en quoi ?

  • Albane

    Ça consiste en quoi, Loïc ?

  • Loïc Résibois

    Insuffler de l'air sous pression dans mes poumons, pour agrandir mes alvéoles de poumons, pour que je respire mieux.

  • Albane

    Forcer la respiration en fait. Loïc n'a plus la capacité, ou du moins une capacité très faible, de faire fonctionner son diaphragme et ses muscles intercostaux. Et en fait, la machine va pousser de l'air, de manière à ce que son diaphragme et ses muscles intercostaux s'ouvrent, de manière à ce que le poumon puisse être ventilé correctement.

  • Loïc Résibois

    Et ça va aussi soulager mes blessures respiratoires. Merci beaucoup, les filles. C'était vraiment sympa.

  • Maman de Loïc

    Merci beaucoup, en tout cas.

  • Albane

    Je...

  • Maman de Loïc

    De le supporter déjà.

  • Albane

    Je réitère mes propos. Vous n'étiez pas présente. Mais si vous avez besoin de quoi que ce soit, d'une information ou quoi, vous n'hésitez pas.

  • Maman de Loïc

    Merci beaucoup.

  • Albane

    Vraiment.

  • Maman de Loïc

    Il vous a dit qu'il allait au concert de Oshie ?

  • Albane

    Oui, on l'a su. C'est jeudi, là ?

  • Natacha Sels

    La maison, de plein pied et ouverte, ressemble à une ruche où les abeilles virevoltent en tous sens. Alban et Marthe prévoient la prochaine sortie au ciné de Loïc. Son père bricole, sa mère prépare du gâteau, les voisins passent et rigolent. Loïc demande à chacun de se retirer afin que nous puissions parler tranquillement. Moi j'aimerais, parce qu'en fait comme on a embarqué tout de suite à l'hôpital, te demander un petit peu comment tu as appris la maladie, comment ça s'est passé et comment à ce moment-là tu as réagi, parce que c'est juste un cataclysme j'imagine.

  • Loïc Résibois

    Alors en fait j'ai eu quand même de la chance quelque part. Je suis entré dans la maladie fin 2019 début 2020 de manière très... Singulière, mais aussi anodine. En fait, j'avais un tremblement à la main après avoir joué au tennis avec mes adversaires quand je buvais un coup. Et je disais à ma femme, Mais attends, moi je prends un coca, mais il doit froid que je veux une bière tellement je tremble. Donc c'était vraiment anodin. Et en même temps, comme ça a duré dans le temps, ma femme m'a demandé d'aller voir une neurologue. C'était mon premier rendez-vous avec un médecin spécialiste. Je n'avais jamais eu de problème de santé avant. En plus, je ne buvais pas, je ne fumais pas, je faisais beaucoup de sport, donc je me sentais quand même un peu invulnérable. Et cette neurologue, elle a commencé à me faire passer les examens. Et ils ont trouvé que j'avais une maladie auto-immune qui s'appelle une sarcoïdose. Et ils ont pensé que c'est ce qui pouvait provoquer mes problèmes neurologiques, auquel cas ça s'appelle précipitation. une neuro sarcoïdose et pendant deux ans et demi j'ai eu différents traitements mais qui n'ont jamais réussi à diminuer mes symptômes et donc planer quand même autour de moi cette hypothèse de la maladie charcot donc lorsque des russies qui est tombé en septembre 2022 j'avais tant de mes préparer j'ai pas été sidéré évidemment quand le médecin m'a dit que c'était ça que c'était sûr Bon bah, là j'ai appris officiellement que mon espérance de vie venait de passer de, on va dire une quarantaine d'années, à 3 à 5 ans. Bien sûr que c'était dur. Mais ce que j'ai trouvé encore plus injuste, c'est qu'on m'a... aussi dit que comme j'avais été diagnostiqué tardivement, je n'étais pas éligible aux traitements expérimentaux qui auraient pu augmenter un peu mon espérance de vie. Donc ça, j'ai vu que c'était un peu comme une double peine. J'étais condamné à mort et en plus je n'avais même pas l'espoir d'avoir cette perspective de vivre plus longtemps parce que je n'étais pas dans les clous administratifs. Et ça a été quelque part un premier signal de... Toutes les tracasseries administratives que tu peux rencontrer quand tu es malade de charcot ou même malade en général. Et tu dirais finalement, mes proches ont vécu ça plus difficilement que moi.

  • Natacha Sels

    La maman de Loïc confirme.

  • Maman de Loïc

    Il nous donne une vraie leçon de vie, c'est incroyable. Il ne se plaint jamais, il a toujours peur de déranger, ça nous embête un petit peu parce qu'on est là pour lui faire plaisir et pour essayer de... Que ce soit un peu plus facile pour lui. Et lui, il a toujours peur de déranger. Donc il n'ose pas demander. Il n'ose jamais nous demander. On ne croyait pas au départ que c'était la maladie de Charcot. Quand on nous a parlé de cette maladie, on ne la connaissait pas bien. On savait à peu près ce que c'était, mais pas dans les détails. Et on ne le croyait pas. On disait, lui, non, il n'a jamais été malade. Ce serait une exception, mais ça ne peut pas être ça. Et puis, on voyait quand même, au bout de deux ans, se dégrader quand même tous ses muscles, perdre des forces. Mais cet été, il était encore... Il marchait en début d'été avec un déambulateur encore, il allait jusqu'à la mer qui n'est pas très loin mais avec son déambulateur. Et bien sûr il avait arrêté le sport, il avait arrêté tout ça. Il accepte quand même bien je trouve sa condition. Il aimait beaucoup l'île dorée parce que depuis qu'il était malade ça lui faisait beaucoup de bien de nager. Alors il nageait où il avait pied et mon mari était à côté ou sa femme bien sûr. Mais il était sur le dos et ça lui faisait énormément de bien. Il se sentait très léger sur l'eau.

  • Loïc Résibois

    Aujourd'hui, quand je vois des gens marcher, sauter, courir, ça me semble presque magique ce qu'ils font, tellement c'est éloigné de mon quotidien.

  • Natacha Sels

    Et qu'est-ce qui a été le plus difficile à accepter pour toi ?

  • Loïc Résibois

    Je ne saurais pas répondre à cette question sur ce qui a été le plus difficile à accepter pour moi, parce que je pensais ne pas accepter la dépendante. Finalement, je l'ai accepté. Je pensais ne pas accepter d'être en fauteuil. Je l'ai accepté et du coup je me dis que plus la maladie progresse et plus l'envie de vivre se renforce. Donc là je sais que la tracheotomie pour moi c'est une énorme appréhension, comme la gastrostomie. J'ai envie de te dire aujourd'hui que je ne veux pas subir ces interventions, mais peut-être que je les subirai et je serai heureux de continuer à vivre comme ça. Là c'est mon avis aujourd'hui.

  • Natacha Sels

    Dans le prochain épisode, vous retrouverez Loïc Rézybois, Le droit de choisir, partie 2. Restez à l'écoute de notre podcast La vie est belle SLA et abonnez-vous sur votre plateforme préférée.

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