Le Pouligny-Saint-Pierre, fromage de chèvre AOP. Voyage au coeur de la Brenne chez un producteur fermier - cover
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Lait'Change

Le Pouligny-Saint-Pierre, fromage de chèvre AOP. Voyage au coeur de la Brenne chez un producteur fermier -

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30min |30/11/2025
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Le Pouligny-Saint-Pierre, fromage de chèvre AOP. Voyage au coeur de la Brenne chez un producteur fermier - cover
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Description

Romain Le Gal et France Frais vous invitent dans le Pays de Brenne, aussi connu être le pays aux milles étangs.

À Martizay dans l'Indre (36) , Vanessa et Wilfried sont producteurs de Pouligny-Saint-Pierre, un fromage au lait de chèvre d'Appellation d'Origine Protégée. Grâce à leur presévérance et leur travail, leur AOP a obtenu la médaille d'or au Concours Général Agricole 2025.

Dans ce podcast, vous découvrirez :

- l'organisation de l'exploitation et de la filière de ce beau fromage,

- le parcours atypique de ce couple de passionnés,

- et les défis et enjeux auxquels ils sont confrontés.


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Transcription

  • Romain Le Gal

    Bienvenue sur Lait'Change, le podcast qui donne la parole aux actrices et aux acteurs de la filière laitière et fromagère. Je suis Romain Le Gal et avec France Frais, on est très heureux de te retrouver pour repartir à la découverte d'un terroir d'un producteur d'un fromage. Aujourd'hui, on te propose de parler d'un fromage de chèvre produit dans l'Indre, parfois méconnu, qui est AOP. depuis 1972. Reconnaissable à sa forme pyramidale, il est fabriqué dans le pays de Brenne, également nommé Pays aux milles étangs. On va s'intéresser, évidemment, au Pouligny-Saint-Pierre. Rendez-vous donc à la ferme de Bray, avec Wilfried, président du syndicat du Pouligny-Saint-Pierre, et Vanessa, qui, avec un parcours atypique, ont créé cette très belle fromagerie fermière. Cela sera l'occasion de parler de l'élevage de chèvres, de la production de ce fromage, ainsi que son histoire, mais également de la filière. C'est parti pour un nouvel épisode en immersion, je te souhaite une très bonne écoute ! Bonjour Wilfried !

  • Wilfried

    Salut Romain, ça va ? Ça va et toi ? Bah impeccable ! Comment ça ce matin ? Bah nickel comme d'hab ! Nickel comme d'hab ! On te retrouve là ce matin en salle de traite ? Oui ! Est-ce que tu peux nous présenter en quelques mots ton exploitation ? Ouais ! Ok, pas de problème ! Alors nous c'est une installation, c'est une création d'atelier sur Martizay, dans la zone AOP du Pouligny-Saint-Pierre. On a créé notre atelier avec Vanessa, 130 chèvres, en transformation sur la totalité de notre lait en AOP Pouligny-Saint-Pierre. Fermier ! Donc là, on est en salle de traite.

  • Romain Le Gal

    Comment ça se passe le matin ? A quelle heure vous démarrez la traite ? Alors en ce moment, il y a un peu moins de lait, donc on commence vers 7h. Il y en a pour une heure à traire les 130 chèvres. On a des chèvres qui vont être taris d'ici 10 jours.

  • Wilfried

    Donc ça va aller beaucoup plus vite. Comme on dit, on va être à moitié en vacances d'ici 10 jours.

  • Romain Le Gal

    Et c'est quoi comme chèvres ?

  • Wilfried

    C'est de la chèvre alpine. Alors notre cahier des charges nous permet d'avoir de la chèvre alpine, les marrons, les sanènes, les blanches. Et les poitevines aussi, il est un peu méconnu, les blanches et noires, les deux-sèvres, du marais-poitevin, etc. Bon bah c'est super, donc on va continuer de traire les chèvres et puis on va continuer la visite après. Pas de problème.

  • Romain Le Gal

    La traite est finie, on vient de basculer dans la chèvrerie et c'est quoi l'étape suivante à la fin de traite du coup Wilfried ? Fin de traite ?

  • Wilfried

    Comme je dis familièrement, on range nos animaux dans leur paillé et on distribue l'aliment. Alors là, c'est des concentrés, c'est des céréales produites sur l'exploitation en totalité. Donc du maïs, de l'orge et ce que j'appelle le concentré, le correcteur azoté, une petite part. Et puis évidemment et essentiellement, on travaille avec des fourrages de légumineuses, du trèfle violet. et des luzernes qui sont produits intégralement sur la ferme, dans un rayon de 5 km en fait. Tout est produit dans un rayon de 5 km autour de la ferme.

  • Romain Le Gal

    Tu as combien d'hectares du coup ?

  • Wilfried

    Alors on a 80 hectares à peu près. On a récupéré 60 hectares il y a deux ans. Aujourd'hui, on est bien content parce qu'on va être autonome sur l'alimentation pratiquement en totalité. Donc là, les chèvres sont sur air paillées.

  • Romain Le Gal

    Et après, quand on a préparé l'entretien, tu m'as expliqué aussi qu'elles ont potentiellement Un accès à un extérieur ?

  • Wilfried

    Oui, elles ont accès à des aires d'exercice. Déjà, c'est une obligation de la part de nos cahiers des charges au niveau bien-être animal. Et donc là, comme on voit sur le côté droit du bâtiment, c'est ouvert pratiquement toute l'année. Je ne vais pas dire toute l'année parce que l'hiver, ça fait froid. Mais à partir du mois d'avril, du printemps jusqu'à l'automne, septembre, octobre, c'est ouvert.

  • Romain Le Gal

    Elles ont accès à l'extérieur quand elles veulent. Au niveau du cahier des charges du Pouligny-Saint-Pierre, c'est quoi les obligations par rapport à ce parcours et en termes de place pour les chèvres ? Alors on a des surfaces d'air paillé minimum à respecter par animal dans les stabulations, dans les chèvreries. C'est 1m² 50 par animal. Et après les aires d'exercice à l'extérieur, on n'a pas de surface minimum par animal, ça peut être 500m². 1000, 1 hectare, 2, enfin tout dépend de l'implantation du bâtiment par rapport à ses surfaces autour des bâtiments. Nous ici sur site, sur la ferme de Bray, on a très peu de surface autour des bâtiments. Parce qu'en fait vu que c'est une installation de création, avec pas d'apport, on avait 25 ans quand on s'est installé, donc pas de sous en poche comme la majorité des gens, donc on a fait le choix de dire on trouve une petite ferme. Avec très peu de surface qui représente un faible coût d'investissement et on monte tout, c'était la solution économique et on trouvera des surfaces plus tard. C'était un peu notre pari. Et là, les chefs vont avoir l'aliment le matin et après, toute la journée, vont avoir à disposition... Ouais,

  • Wilfried

    alors on fait deux repas de ce qu'on appelle le concentré, les céréales. Moi, j'appelle jugulièrement... L'énergie. L'énergie, exactement, c'est ça. Et donc, deux repas par jour, matin et soir. Et puis après, on fait trois repas de fourrage. Donc au niveau fourrage, là, on voit pour nos chèvres laitières, celles en lactation, c'est du trèfle essentiellement, du trèfle violet.

  • Romain Le Gal

    Il y a une bonne odeur de fourrage dans les mains.

  • Wilfried

    Ça, c'est notre religion, le fourrage, ici. On base toutes nos productions laitières sur les qualités de fourrage parce que une chèvre c'est un ruminant, donc c'est pas un mangeur de céréales, c'est pas un cochon. Et donc le but du jeu c'est de lui faire ingérer un maximum de fourrage de qualité. Économiquement c'est plus rentable aussi pour l'éleveur. Puis elle va consommer des légumineuses. Moins va consommer de céréales, correcteur azoté, mieux c'est pour le porte-monnaie et surtout pour la santé de l'animal. Super,

  • Romain Le Gal

    on continue la visite, on va voir le renouvellement ?

  • Wilfried

    Ouais, avec plaisir.

  • Romain Le Gal

    C'est parti. Alors, on vient d'arriver dans le bâtiment avec les chevrettes.

  • Wilfried

    Ouais.

  • Romain Le Gal

    Alors du coup, explique-nous un petit peu...

  • Wilfried

    Ouais, pourquoi ? Alors le pourquoi du comment, déjà on a monté ce bâtiment chevrette. Historiquement, on avait un vieux bâtiment, une vieille stabulation avec la maison. plus bas et on avait des problèmes, on élevait nos chevrettes dans ce bâtiment là et on avait des problèmes sanitaires on va dire sur l'élevage de chevrettes. Les problématiques qu'on retrouve sur les chevrettes c'est le problème de pulmonaire souvent, la pastorelle qui se développe sur des bâtiments mal ventilés, froid, humide, enfin tout ce que tu veux donc du coup on a pris une grosse inondation parce qu'on a la rivière pas loin. En 2016, quand on a pris l'inondation, on a dit dans la nuit de l'inondation du vendredi à samedi, je m'en rappellerai toute ma vie, j'ai fait les plans du bâtiment chevrette de colère. On monte un bâtiment chevrette, j'ai fait les plans. Le lendemain matin, les devis qu'on avait envoyés pour avoir les devis du constructeur, du terrassier, la semaine d'après, on avait les accords bancaires. ça a été très très vite, j'ai agi un peu sur un coup de colère et puis là ça faisait des années que ça allait pas et il fallait qu'on réagisse et comment ça fonctionne du coup au niveau de la reproduction alors nous au niveau reproduction on a deux lots en fait dans le bâtiment, on a un lot de lactations longues, donc des chèvres ça fait deux ou trois ans qu'elles ont pas fait de petits donc on les traie en permanence alors c'est vraiment l'un des rares animaux à ne pas avoir besoin d'avoir un petit tous les ans pour faire du lait la chèvre. En fait, une fois qu'elle a fait son petit, si on a des fourrages de qualité, on peut la maintenir au niveau de lait. Alors derrière, il faut un certain niveau génétique aussi. Nous ici, sur le deuxième lot du coup de repros qui met bas à l'automne, on travaille la génétique avec de l'insémination artificielle. Il y a 30% de notre troupeau qui est inséminé. ce qui permet d'augmenter notre qualité de lait par les taux, la quantité de lait. La morphologie mammaire, parce que la morphologie mammaire, ça a une incidence des mauvaises mamelles mal faites. C'est des mamelles qui se traînent mal, qui traînent dans les airs paillés. Donc, sanitairement, ça peut ramener des problèmes. Tout un travail génétique sur cette partie, la conformation des mamelles. Nous, ça fait 8 ans qu'on... Ça fait 8 ans qu'on travaille ça. Et surtout la morphologie mammaire. Et ce qui est rigolo, c'est que c'est le profil qui va le plus vite. Quand on met un critère morphologique sur une chèvre, du jour au lendemain, sur la chevrette qu'elle va faire, ça se voit tout de suite.

  • Romain Le Gal

    C'est intéressant, du coup tu travailles en deux lots. Un lot en lactation longue. Donc tu respectes toujours le cycle naturel de la chèvre puisque tu es sur une mise bas naturelle. Donc tu ne désaisonnes pas avec de la lumière.

  • Wilfried

    On fait un désaisonnement juste avec de la lumière. Vous faites quand même un désaisonnement sur un lot ? Ça n'impacte pas les lactations longues. Ça s'en fiche.

  • Romain Le Gal

    Elle s'en fiche ? Oui,

  • Wilfried

    elle s'en fiche. Il n'y a pas d'incidence du tout. Après, pour désaisonner, comme on dit, on fait juste un programme lumineux où on éclaire plus longtemps les bâtiments l'hiver pour leur faire croire que c'est les jours d'été. Et ça fonctionne très bien. Au début de notre installation, on avait deux lots de mise bas. On avait un lot en saison et un lot en désaisonné. Et très vite, ça a pu fonctionner. Parce qu'avec le programme lumineux, par contre, celles qui étaient en saison, elles étaient toutes paumées et vice-versa. Donc on a eu des échecs à la reproduction, parce que c'était le bordel dans le bâtiment, clairement. On a arrêté et on a lissé avec nos lactations, en faisant des lactations longues. plus souvent du lait toute l'année.

  • Romain Le Gal

    C'est combien de lactations ? Alors c'est compliqué chez toi, on va parler en années du coup, parce qu'avec 6 et sur les lactations longues... Ouais,

  • Wilfried

    ouais. 5-6 ans on est dedans.

  • Romain Le Gal

    D'accord.

  • Wilfried

    Donc on a quand même une carrière de chèvre assez longue. Ouais, ouais. Après il y a toujours les exceptions, des chèvres qui durent 8-10 ans.

  • Romain Le Gal

    On en a croisé une ce matin.

  • Wilfried

    Ouais, on en a croisé une, mais elle est en fin de carrière. Alors ici en plus on a un peu de mal à la mettre... Dans le camion, aller faire partir et donc derrière, dans l'ancien stabilis où on élevait nos chevrettes, on en a fait une maison de retraite.

  • Romain Le Gal

    D'accord, donc vous avez un Ehpad de chevrettes.

  • Wilfried

    Exactement, c'est exactement ça.

  • Romain Le Gal

    Ok, bon ben c'est cool. On continue la visite ?

  • Wilfried

    On continue.

  • Romain Le Gal

    Alors j'ai continué mon périple dans la ferme et là je viens de rejoindre Vanessa. Bonjour Vanessa.

  • Vanessa

    Bonjour.

  • Romain Le Gal

    Donc Vanessa qui est ce matin en fromagerie. Et il y a Wilfried qui fait ce moque de Vanessa, ce qui nous a suivis aussi.

  • Vanessa

    C'est ça.

  • Romain Le Gal

    Vanessa, du coup, qui es-tu ?

  • Vanessa

    Vanessa, je suis productrice de Pouligny-Saint-Pierre, à Aopé, éleveuse de chèvres.

  • Romain Le Gal

    La compagne de Wilfried. Et donc là, on est en fromagerie et tu produis du Pouligny-Saint-Pierre. Est-ce que tu peux nous expliquer un peu comment ça fonctionne, la fabrication de Pouligny ?

  • Vanessa

    La fabrication de Pouligny... On part du début ? Bah oui,

  • Romain Le Gal

    en partant du lait ! On a été à la traite tout à l'heure.

  • Vanessa

    Oui, et bah du coup on récupère le lait de deux traites. Donc par exemple là ce matin, il y a le lait d'hier soir et le lait de ce matin qui est mélangé, qu'on a mis dans les bacs dans la salle de caillage et qu'on va pas tarder à emprésurer. On va mettre la présure dans le lait et ça va cailler pendant 24 heures. Et demain matin, après, on va mouler ce caillé.

  • Romain Le Gal

    Donc là, le lait est mis dans des bassines finalement. Oui,

  • Vanessa

    c'est ça.

  • Romain Le Gal

    Où vous mettez la présure et un temps de coagulation, donc le passage de l'état liquide à l'état solide en 24 heures.

  • Vanessa

    Oui.

  • Romain Le Gal

    Donc on est sur un caillé lactique jour 1 et ensuite ?

  • Vanessa

    Et ensuite, le lendemain, il va être moulé du coup.

  • Romain Le Gal

    Oui.

  • Vanessa

    Donc dans les moules de Pouligny-Saint-Pierre. Et toute la journée, il va s'égoutter.

  • Romain Le Gal

    D'accord. Et comment tu fais le moulage ? Un moulage à la louche. Oui.

  • Vanessa

    Voilà. Et on fait plusieurs passages dans les blocs moules avec notre louche. Ça va nous faire gagner un petit peu de temps comme ça d'égouttage pour le moulage. Ça fait ressortir vraiment le lacto.

  • Romain Le Gal

    Le moulage. Ensuite, tu vas avoir des retournements ?

  • Vanessa

    Le lendemain.

  • Romain Le Gal

    Le lendemain. Donc là, on est en J3 finalement. Voilà.

  • Vanessa

    Au jour 3, on va retourner les blocs moules. Le matin et le soir, on va les remettre dans l'autre sens.

  • Romain Le Gal

    Et rebasculer dans l'autre sens.

  • Vanessa

    Et voilà. Et ensuite ? Et ensuite, le quatrième jour, ils vont être démoulés pour être salés. Et ils vont encore se ressuyer pendant 24 heures. Pendant 24 heures. Donc là, on est à jour 4. Après, en présurage. En fait, dans la salle de fabrication, on a trois jours de fabrication.

  • Romain Le Gal

    D'accord. Et après, les fromages, ils vont où ?

  • Vanessa

    Ils vont dans le séchoir.

  • Romain Le Gal

    Donc le séchoir où est Wilfried ? Alors là, on est en train de se déplacer dans le séchoir où Wilfried est en train de soigner et de retourner les poulinis. Donc les pouligny, la particularité, c'est que vous les couchez après ?

  • Vanessa

    Oui, c'est ça. Quand ils rentrent dans le séchoir, le premier jour, on va les coucher pour favoriser justement encore mieux le séchage et l'affinage. Et la croûte qui va venir dessus, que ça soit un peu plus uniforme. Après, le deuxième jour, on va les retourner dans l'autre sens. On leur fait faire un demi-tour, voilà, quand ils sont couchés. Et le troisième jour, on va les remettre debout.

  • Romain Le Gal

    On les remet debout. Et ils restent combien de temps dans cette salle de séchage ?

  • Vanessa

    Quatre jours. Et le cinquième jour, on les emmène dans le halloir.

  • Romain Le Gal

    D'accord. On sent une ambiance assez ventilée.

  • Vanessa

    Ça souffle un peu plus. Le but, c'est quand même de les sécher, de continuer à ressuyer un petit peu les fromages.

  • Romain Le Gal

    On est à quelle température et quelle hygrométrie ?

  • Vanessa

    En général, il y a à peu près 15 degrés. On est autour de 70% d'hygrométrie.

  • Romain Le Gal

    Cool. Je te suis en cave pour que tu nous expliques la suite. Alors, on rentre dans une autre cave. Et là, c'est le hâloir. Et le hâloir. Et donc là, on voit les pouligny, il fait un petit peu plus frais ?

  • Vanessa

    On est encore un petit peu plus frais, on est autour de 12 degrés, 13 degrés. Et on a un peu plus d'hygrométrie en général, on est plutôt à 90%.

  • Romain Le Gal

    Donc là, les pouligny, ils restent toujours droits sur la suite de l'affinage ?

  • Vanessa

    Oui, après on les laisse comme ça, ils touchent plus.

  • Romain Le Gal

    Sur les grilles, et c'est quoi le minimum d'affinage pour un poulini ?

  • Vanessa

    C'est 11 jours.

  • Romain Le Gal

    C'est 11 jours.

  • Vanessa

    11 jours à partir du jour d'emprésurage.

  • Romain Le Gal

    Et ça commence à bleuter à partir de combien de jours d'affinage ?

  • Vanessa

    Alors, nous, normalement, on est en couverture blanche.

  • Romain Le Gal

    D'accord.

  • Vanessa

    Donc on n'est pas censé avoir du bleu.

  • Romain Le Gal

    Vous n'êtes pas censé bleuter. Voilà,

  • Vanessa

    c'est ça. Après, on a des collègues qui, eux, sont vraiment bleus. Donc ce n'est pas tout à fait la même couverture. Ils ont un pénicillium, le pénicillium album, qui vient se mettre dessus, qui est vraiment plus épais. Et là, ça, c'est un autre bleu.

  • Romain Le Gal

    Donc c'est une autre conduite d'affinage ?

  • Vanessa

    C'est une autre conduite. C'est vraiment après dans l'ambiance de la fromagerie. Quelque chose qui est recherché. Ça donne un autre goût au pouligny. On va avoir des notes plutôt champignons, sous-bois. C'est assez différent d'une autre.

  • Romain Le Gal

    Et le vôtre, il va avoir quoi du coup ?

  • Vanessa

    On ressent plus le côté caprin, quand même un peu beurré, acidulé. Un peu lactique. Un peu d'acidité. C'est ça. Et le bleu, c'est vraiment le côté, pour le coup, avec la croûte champignon sous bois qui va ressortir plus.

  • Romain Le Gal

    Et c'est vous qui aviez fait le choix de ce type d'affinage ?

  • Vanessa

    Oui, on avait choisi.

  • Romain Le Gal

    C'était vraiment une volonté d'être plus sur un affinage blanc ?

  • Vanessa

    Oui.

  • Romain Le Gal

    Bon, super. On va continuer l'échange après.

  • Vanessa

    Ça marche.

  • Romain Le Gal

    On a fait le tour de votre exploitation. Je me retrouve avec vous deux, Wilfried et Vanessa. Et puis, je vous propose de continuer cet échange. Déjà, vous vous êtes présenté brièvement, mais qui êtes-vous ? Comment êtes-vous arrivé là ?

  • Wilfried

    Eh bien, en fait, ça fait maintenant... maintenant presque 21 ans qu'on est ensemble avec Vanessa. Moi, je suis issu du commerce. J'ai fait un DUT technique de commercialisation à Issouda, donc pas très loin d'ici, mais je suis natif de Sologne. J'ai travaillé dans la vente d'articles de pêche et de loisirs parce que je suis un passionné de pêche à la base. Et puis, suite à un licenciement plus ou moins économique, maquillé comme ça, on s'est dit, Vanessa a expliqué son parcours, on s'est dit on va travailler pour nous. Et on va essayer quelque chose qui nous plaît. On aimait les animaux. On savait qu'il y avait une formation. À l'époque, on était sur Châteauroux, pas loin, avec la Ferme des Ages, avec un lycée agricole, avec une spécialisation caprine. Donc, on a tenté. On s'est dit, on tente. Et toi, Vanessa, du coup, c'est quoi ton parcours ?

  • Vanessa

    J'ai fait un lycée agricole. Donc, j'ai un bac agricole. Et à sortie de ça, moi, j'ai travaillé un petit peu à droite à gauche dans le commerce. En attendant de savoir ce que j'avais envie de faire, quand Wilfried a été licencié, c'est vrai qu'on a pris la décision d'essayer de faire quelque chose pour nous avec les animaux. Et donc l'idée d'avoir des chèvres et de transformer notre produit et de le vendre nous a tout de suite intéressés. Moi, je suis partie à la ferme des âges pour faire le certificat de spécialisation.

  • Romain Le Gal

    D'accord. Et vous aviez dans l'idée de créer une ferme, de faire une reprise ?

  • Wilfried

    En fait, l'idée première à la base, c'est qu'on s'était dit, vu qu'on a été formé par la ferme des âges, on savait qu'il y avait une demande sur l'AOP Pouligny-Saint-Pierre. La stratégie, c'était déjà, dans un premier temps, d'aller travailler dans des exploitations pour se former davantage sur le terrain. Et deuxième chose, c'est soit on se disait... On trouve une exploitation sur l'AOP Pouligny ou soit le bord de mer. Parce qu'on n'était pas forcément attaché à une région et on savait que le bord de mer, déjà c'est sympa, qu'il y a une demande. Donc on a cherché dans ces deux zones-là et on s'est rendu compte que, pour nous, vu notre parcours, parce que c'est un parcours hors cadre familial, on a précisé qu'on n'a aucun de nos parents, aucun de nos ancêtres dans le milieu agricole et qu'on n'est pas issu de la région. Donc du coup, et pas d'apport, parce que quand on est jeune, on a très peu qu'on désapporte.

  • Romain Le Gal

    Et donc les difficultés, ça a été quoi dans l'installation ? Quand on est hors quête familiale, est-ce que c'est réalisable ? Aujourd'hui, on voit oui, mais qu'est-ce que vous conseilleriez ? Ça a été quoi vos plus grosses difficultés ?

  • Wilfried

    En fait, je pense que déjà, on a été super bien aiguillés par l'accueil de la chambre d'agriculture. Enfin honnêtement... On n'a pas de lobby avec la chambre, mais honnêtement, on a eu un super soutien. C'est toujours d'actualité de toute façon. Et après, en étant hors cadre, on ne connaît pas, on n'est pas issu du coin. Et le milieu agricole, c'est un milieu très fermé quand même. Il y a des codes, c'est ce que je dis souvent. Et donc, il a fallu trouver une ferme. C'est compliqué. Et après, quand on l'a trouvé, il faut faire ses preuves. Et ça, c'est quand même assez propre au milieu agricole. c'est que ça demande beaucoup de temps pour être qualifié de bon. Par son voisinage, c'est vraiment un travail de longue haleine.

  • Romain Le Gal

    Et toi Vanessa, pour toi, ça a été quoi les plus grosses difficultés ?

  • Vanessa

    La première difficulté, c'était de trouver une banque qui veuille bien nous accompagner, ça c'est sûr. Pas de moyens, pas d'argent. Pas de moyens, pas d'argent, pas de famille, pas de parents avec des terres déjà. Des fois c'est un plus pour la banque quand des enfants veulent s'installer avec des parents qui ont déjà des terres. La banque est un peu moins frileuse. Et après, la difficulté, je dirais, c'est peut-être plutôt, nous, on s'installait avec une ferme qui n'avait pas de surface pour faire nos fourrages. Donc, ça a été, au fil des années, d'arriver à récupérer de la surface pour être autonome. Pour être autonome au niveau des fourrages. Et ça, ça a mis plusieurs années.

  • Romain Le Gal

    Donc là, on est au cœur de la zone du pays de Brenne. Comment vous qualifieriez votre terroir ici ? Comment on peut le décrire pour ceux qui nous écoutent ? Parce que c'est quand même assez spécifique, on est sur la plus petite zone d'appellation d'origine protégée de France. C'est 22 communes sur un territoire qui est un peu particulier. Bon, pour un pêcheur, je vais pas donner des indices, pour un pêcheur, je pense qu'il y a des heureux.

  • Wilfried

    Je vais essayer d'être neutre du coup. Je vais faire honneur à la profession en indiquant que c'est vrai qu'on est sur un super beau territoire. On est dans le pays des milles étangs, sur un parc naturel régional. Mais à côté de ça, on est sur une production caprine où l'animal a des exigences avant l'éleveur. C'est produire des fourrages de qualité. Et les fourrages de qualité chez nous, c'est des légumineuses, donc du trèfle violet ou des luzernes. Enfin, surtout des luzernes. Et cette petite plante-là, elle aime les sols calcaires. Et les sols de brun, c'est des sols argileux. C'est pauvre. Donc il faut trouver les veines de terre calcaire pour pouvoir faire pousser de la luzerne

  • Romain Le Gal

    C'est quoi l'histoire de cette AOP ? C'est AOP depuis quelle année ?

  • Wilfried

    Alors ça a été reconnu en 72 C'est un travail de longue haleine fait par des personnes qui se sont battues pendant très longtemps au sein de la chambre d'agriculture Monsieur Dion en l'occurrence Et première AOP reconnue de France en Cap-Rhin Donc après on était dans 1972 ? 1972 c'est ça, AOC d'abord, AOP reconnue dans les années 2000 de mémoire. Alors avec, sur l'historique, sur les plus belles années de production, on est arrivé à 300 tonnes. Malheureusement aujourd'hui on est bien en dessous des 200 et c'est un combat qu'on mène au quotidien pour faire dorer notre belle image de... De fromage de plateau, le Pouligny Saint-Pierre, et l'idée c'est de ne jamais descendre en dessous des 200 tonnes parce qu'on est rémunéré au tonnage produit. Donc si on ne produit pas un minimum de tonnage, on ne fait pas rentrer beaucoup de sous et on n'a pas de moyens d'action, c'est aussi simple que ça. Pour faire parler du Pouligny. Pour faire parler au niveau com, au niveau salon, rémunérer notre animateur, enfin c'est tout bête, c'est quelque part un peu le système d'une entreprise, pas de sous, pas de moyens quoi.

  • Romain Le Gal

    Et cette filière aujourd'hui pour ses 200 tonnes, c'est combien de producteurs ?

  • Wilfried

    Donc là vous êtes un des producteurs fermiers de Pouligny-Saint-Pierre, c'est quoi la filière en termes de nombre d'acteurs ? En nombre d'acteurs, en tout on est une trentaine, on est 8 producteurs fermiers avec un qui fait partie affinage, et puis 22 producteurs laitiers et au niveau pourcentage on est en 73. tonnes produites par des fermiers et à peu près 110-120 tonnes produites par des laitiers. Donc en fait, plus ça va, plus l'écart se réduit entre les tonnages laitiers et les tonnages fermiers. Sur votre appellation, finalement, les fermiers se maintiennent et progressent peut-être avec des installations. On arrive à maintenir des volumes avec Alors sans parler de la production, on essaie de garder le rythme d'une installation par an, que ce soit laitier ou fermier. C'est quelque chose qu'on veut maintenir pour maintenir un peu de tonnage. Mais là où on a beaucoup de craintes, c'est la réduction des tonnages chez les laitiers. On maintient chez les fermiers et on réduit largement chez les laitiers.

  • Romain Le Gal

    Ok. Et du coup, Vanessa, toi, comment tu vois l'avenir ? du Pouligny-Saint-Pierre, comment tu ressens les choses ?

  • Vanessa

    L'avenir du Pouligny-Saint-Pierre, on a un petit peu de mal à le voir quand même sur le long terme. Parce que s'il n'y a pas quand même de futures installations, que ce soit en fermier ou en laitier d'ailleurs, et si les laitiers continuent de diminuer, pour continuer leur tonnage, malheureusement on se demande si dans 10 ans le Pouligny-Saint-Pierre sera toujours capable d'être là.

  • Romain Le Gal

    Vous voyez d'autres problématiques à part cette baisse de volume qui va arriver dans les années à venir sur votre appellation ?

  • Wilfried

    La problématique qu'on a, et là on soutient l'intégralité de la filière parce qu'on essaye d'être solidaires des 5 AOP, parce qu'on est dans une région centre où il y a 5 appellations de Caprine. Donc on essaye de travailler ensemble parce que la problématique qui nous pend au nez, enfin qui ne nous pend pas au nez, qui est présente, c'est la problématique sanitaire qui est de plus en plus importante, qui pèse de plus en plus chez nos producteurs laitiers, mais aussi fermiers, avec une pression constante. Donc on essaye de soulager et de soutenir nos industries, nos transformateurs au niveau local en proposant des solutions. Bon, mais... Tant qu'on aura cette pression sanitaire, ça va être difficile de maintenir des volumes chez nos laiteries. On le comprend largement. On le comprend largement. Et c'est là-dessus où il va falloir qu'on soit solidaires. Vraiment, tous ensemble. Qu'il n'y ait plus cet ancrage entre les fermiers et les laitiers. On est tous dans le même bateau. Tous ensemble ?

  • Romain Le Gal

    Bah ouais, on est toujours plus forts. Surtout sur des petites filières ? Bah je pense.

  • Wilfried

    Il n'y a pas de... de raison.

  • Romain Le Gal

    Non. Si vous deviez donner à ceux qui nous écoutent envie de déguster du poulini, comment vous feriez ?

  • Wilfried

    C'est un fromage de plateau avant tout, donc tout bêtement avec un bon vin, alors pas d'abus sur l'alcool c'est sûr, mais avec un bon rogui, blanc ou gris c'est top. Déguster comme ça avec un morceau de pain frais Et toi Vanessa ?

  • Vanessa

    Même si c'est un fromage de plateau, on peut quand même pas mal le cuisiner. Ce qui est pas mal, c'est de le découper en petits dés et puis avoir un petit ramequin avec de l'huile de noisette. Et de tremper le pouligny dedans et c'est vraiment pas mal, ça change un peu. L'huile de noisette, ça se marie bien. Après, un peu plus affiné, coupé en dés aussi, dans une salade de lentilles. C'est top aussi avec un peu... On peut faire plein de choses et se faire plaisir avec le pouligny. Quand il est un peu plus sec, mais vraiment sec, on peut le râper comme un parmesan sur des pâtes. Ça marche aussi super bien.

  • Romain Le Gal

    Tout à l'heure, on n'en avait pas parlé, mais pour reconnaître un pouligny fermier, il y a une petite étiquette dessus avec un petit carré vert. Tandis que ceux qui ne le savent pas, il y a un petit carré rouge pour un pouligny laitier. j'aurais une dernière question avant de clôturer cet échange. Est-ce que vous êtes prêts ?

  • Vanessa

    Allez !

  • Romain Le Gal

    C'est la question rituelle du podcast, mais je pense que vous savez ce que je vais vous demander. Je vois des regards vides. Quel est votre pizza préféré ?

  • Wilfried

    Quatre fromages, évidemment. C'est vrai, en plus. Je ne mens pas.

  • Vanessa

    Moi, ce n'est pas la quatre fromages.

  • Romain Le Gal

    Mais ce n'est pas grave, c'est l'Hawaïenne ?

  • Vanessa

    Non. surtout pas

  • Romain Le Gal

    Moi j'aime bien l'Hawaïenne

  • Vanessa

    Avec l'ananas c'est pas possible Non mais j'aime beaucoup les pizzas Avec du saumon Une salmone. Ta pizza préférée c'est une salmone Avec un bon fromage dessus quand même 4 fromages évidemment Le pouligny encore mieux Mais un gorgonzola C'est vrai que des fois, on se fait des pizzas où il y a un peu beaucoup de fromage. Non,

  • Wilfried

    il n'y en a jamais trop.

  • Romain Le Gal

    Il y a une pub qui disaient plus t'en mets, plus t'en as.

  • Wilfried

    C'est exactement ça.

  • Romain Le Gal

    Merci beaucoup de votre accueil. Merci à toi.

  • Wilfried

    Merci d'être venu. Et puis à très bientôt. A bientôt. Merci. Merci, salut.

  • Romain Le Gal

    Notre épisode touche déjà sa fin. Une très belle rencontre avec ce couple qui nous a montré qu'avec passion et détermination, Même sans venir du monde agricole, il est possible de reprendre ou créer une exploitation. Le Pouligny-Saint-Pierre, premier AOC Caprine reconnu en 1972, et qui est produite sur la plus petite zone AOP, a plus qu'aujourd'hui besoin de toit. Il s'en produisait plus de 300 tonnes il y a quelques années, nous sommes aujourd'hui à moins de 200 tonnes. Il est important de parler et soutenir nos plus petites appellations. Pour finir sur une note positive, Il est bon d'entendre qu'il y a quand même des projets et des installations de jeunes agriculteurs. On espère que cet épisode t'a plu. N'hésite pas à le partager ou à nous laisser des commentaires sur les réseaux. Et on te dit évidemment à très bientôt pour un nouvel épisode de Lait'Change. Salut !

Chapters

  • Introduction

    00:06

  • Présentation de l'exploitation avec Wilfried

    01:05

  • La salle de traite

    01:35

  • La chèvrerie

    02:21

  • Les obligations du cahier des charges du Pouligny-Saint-Pierre

    03:57

  • L'alimentation

    05:00

  • Les chevrettes

    06:14

  • La reproduction et la génétique

    07:38

  • La lactation longue

    09:16

  • Les vieilles chèvres

    10:35

  • La fromagerie avec Vanessa

    11:07

  • La fabrication du Pouligny-Saint-Pierre AOP

    11:39

  • Le séchoir

    13:40

  • Le hâloir

    14:46

  • L'affinage

    15:28

  • Qui êtes-vous Vanessa et Wilfried ?

    16:38

  • Un nouveau départ

    18:09

  • Les défis

    19:31

  • Les difficultés

    20:28

  • Le terroir du Pays de Brenne

    21:15

  • L'histoire de l'AOP Pouligny-Saint-Pierre

    22:18

  • La production

    22:57

  • La filière et ses acteurs

    23:44

  • L'avenir du Pouligny-Saint-Pierre

    25:04

  • Les autres problématiques

    25:46

  • Les conseils de dégustation

    27:00

  • L'identification du fromage

    28:00

  • La question rituel !

    28:20

  • Conclusion

    29:30

Description

Romain Le Gal et France Frais vous invitent dans le Pays de Brenne, aussi connu être le pays aux milles étangs.

À Martizay dans l'Indre (36) , Vanessa et Wilfried sont producteurs de Pouligny-Saint-Pierre, un fromage au lait de chèvre d'Appellation d'Origine Protégée. Grâce à leur presévérance et leur travail, leur AOP a obtenu la médaille d'or au Concours Général Agricole 2025.

Dans ce podcast, vous découvrirez :

- l'organisation de l'exploitation et de la filière de ce beau fromage,

- le parcours atypique de ce couple de passionnés,

- et les défis et enjeux auxquels ils sont confrontés.


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Transcription

  • Romain Le Gal

    Bienvenue sur Lait'Change, le podcast qui donne la parole aux actrices et aux acteurs de la filière laitière et fromagère. Je suis Romain Le Gal et avec France Frais, on est très heureux de te retrouver pour repartir à la découverte d'un terroir d'un producteur d'un fromage. Aujourd'hui, on te propose de parler d'un fromage de chèvre produit dans l'Indre, parfois méconnu, qui est AOP. depuis 1972. Reconnaissable à sa forme pyramidale, il est fabriqué dans le pays de Brenne, également nommé Pays aux milles étangs. On va s'intéresser, évidemment, au Pouligny-Saint-Pierre. Rendez-vous donc à la ferme de Bray, avec Wilfried, président du syndicat du Pouligny-Saint-Pierre, et Vanessa, qui, avec un parcours atypique, ont créé cette très belle fromagerie fermière. Cela sera l'occasion de parler de l'élevage de chèvres, de la production de ce fromage, ainsi que son histoire, mais également de la filière. C'est parti pour un nouvel épisode en immersion, je te souhaite une très bonne écoute ! Bonjour Wilfried !

  • Wilfried

    Salut Romain, ça va ? Ça va et toi ? Bah impeccable ! Comment ça ce matin ? Bah nickel comme d'hab ! Nickel comme d'hab ! On te retrouve là ce matin en salle de traite ? Oui ! Est-ce que tu peux nous présenter en quelques mots ton exploitation ? Ouais ! Ok, pas de problème ! Alors nous c'est une installation, c'est une création d'atelier sur Martizay, dans la zone AOP du Pouligny-Saint-Pierre. On a créé notre atelier avec Vanessa, 130 chèvres, en transformation sur la totalité de notre lait en AOP Pouligny-Saint-Pierre. Fermier ! Donc là, on est en salle de traite.

  • Romain Le Gal

    Comment ça se passe le matin ? A quelle heure vous démarrez la traite ? Alors en ce moment, il y a un peu moins de lait, donc on commence vers 7h. Il y en a pour une heure à traire les 130 chèvres. On a des chèvres qui vont être taris d'ici 10 jours.

  • Wilfried

    Donc ça va aller beaucoup plus vite. Comme on dit, on va être à moitié en vacances d'ici 10 jours.

  • Romain Le Gal

    Et c'est quoi comme chèvres ?

  • Wilfried

    C'est de la chèvre alpine. Alors notre cahier des charges nous permet d'avoir de la chèvre alpine, les marrons, les sanènes, les blanches. Et les poitevines aussi, il est un peu méconnu, les blanches et noires, les deux-sèvres, du marais-poitevin, etc. Bon bah c'est super, donc on va continuer de traire les chèvres et puis on va continuer la visite après. Pas de problème.

  • Romain Le Gal

    La traite est finie, on vient de basculer dans la chèvrerie et c'est quoi l'étape suivante à la fin de traite du coup Wilfried ? Fin de traite ?

  • Wilfried

    Comme je dis familièrement, on range nos animaux dans leur paillé et on distribue l'aliment. Alors là, c'est des concentrés, c'est des céréales produites sur l'exploitation en totalité. Donc du maïs, de l'orge et ce que j'appelle le concentré, le correcteur azoté, une petite part. Et puis évidemment et essentiellement, on travaille avec des fourrages de légumineuses, du trèfle violet. et des luzernes qui sont produits intégralement sur la ferme, dans un rayon de 5 km en fait. Tout est produit dans un rayon de 5 km autour de la ferme.

  • Romain Le Gal

    Tu as combien d'hectares du coup ?

  • Wilfried

    Alors on a 80 hectares à peu près. On a récupéré 60 hectares il y a deux ans. Aujourd'hui, on est bien content parce qu'on va être autonome sur l'alimentation pratiquement en totalité. Donc là, les chèvres sont sur air paillées.

  • Romain Le Gal

    Et après, quand on a préparé l'entretien, tu m'as expliqué aussi qu'elles ont potentiellement Un accès à un extérieur ?

  • Wilfried

    Oui, elles ont accès à des aires d'exercice. Déjà, c'est une obligation de la part de nos cahiers des charges au niveau bien-être animal. Et donc là, comme on voit sur le côté droit du bâtiment, c'est ouvert pratiquement toute l'année. Je ne vais pas dire toute l'année parce que l'hiver, ça fait froid. Mais à partir du mois d'avril, du printemps jusqu'à l'automne, septembre, octobre, c'est ouvert.

  • Romain Le Gal

    Elles ont accès à l'extérieur quand elles veulent. Au niveau du cahier des charges du Pouligny-Saint-Pierre, c'est quoi les obligations par rapport à ce parcours et en termes de place pour les chèvres ? Alors on a des surfaces d'air paillé minimum à respecter par animal dans les stabulations, dans les chèvreries. C'est 1m² 50 par animal. Et après les aires d'exercice à l'extérieur, on n'a pas de surface minimum par animal, ça peut être 500m². 1000, 1 hectare, 2, enfin tout dépend de l'implantation du bâtiment par rapport à ses surfaces autour des bâtiments. Nous ici sur site, sur la ferme de Bray, on a très peu de surface autour des bâtiments. Parce qu'en fait vu que c'est une installation de création, avec pas d'apport, on avait 25 ans quand on s'est installé, donc pas de sous en poche comme la majorité des gens, donc on a fait le choix de dire on trouve une petite ferme. Avec très peu de surface qui représente un faible coût d'investissement et on monte tout, c'était la solution économique et on trouvera des surfaces plus tard. C'était un peu notre pari. Et là, les chefs vont avoir l'aliment le matin et après, toute la journée, vont avoir à disposition... Ouais,

  • Wilfried

    alors on fait deux repas de ce qu'on appelle le concentré, les céréales. Moi, j'appelle jugulièrement... L'énergie. L'énergie, exactement, c'est ça. Et donc, deux repas par jour, matin et soir. Et puis après, on fait trois repas de fourrage. Donc au niveau fourrage, là, on voit pour nos chèvres laitières, celles en lactation, c'est du trèfle essentiellement, du trèfle violet.

  • Romain Le Gal

    Il y a une bonne odeur de fourrage dans les mains.

  • Wilfried

    Ça, c'est notre religion, le fourrage, ici. On base toutes nos productions laitières sur les qualités de fourrage parce que une chèvre c'est un ruminant, donc c'est pas un mangeur de céréales, c'est pas un cochon. Et donc le but du jeu c'est de lui faire ingérer un maximum de fourrage de qualité. Économiquement c'est plus rentable aussi pour l'éleveur. Puis elle va consommer des légumineuses. Moins va consommer de céréales, correcteur azoté, mieux c'est pour le porte-monnaie et surtout pour la santé de l'animal. Super,

  • Romain Le Gal

    on continue la visite, on va voir le renouvellement ?

  • Wilfried

    Ouais, avec plaisir.

  • Romain Le Gal

    C'est parti. Alors, on vient d'arriver dans le bâtiment avec les chevrettes.

  • Wilfried

    Ouais.

  • Romain Le Gal

    Alors du coup, explique-nous un petit peu...

  • Wilfried

    Ouais, pourquoi ? Alors le pourquoi du comment, déjà on a monté ce bâtiment chevrette. Historiquement, on avait un vieux bâtiment, une vieille stabulation avec la maison. plus bas et on avait des problèmes, on élevait nos chevrettes dans ce bâtiment là et on avait des problèmes sanitaires on va dire sur l'élevage de chevrettes. Les problématiques qu'on retrouve sur les chevrettes c'est le problème de pulmonaire souvent, la pastorelle qui se développe sur des bâtiments mal ventilés, froid, humide, enfin tout ce que tu veux donc du coup on a pris une grosse inondation parce qu'on a la rivière pas loin. En 2016, quand on a pris l'inondation, on a dit dans la nuit de l'inondation du vendredi à samedi, je m'en rappellerai toute ma vie, j'ai fait les plans du bâtiment chevrette de colère. On monte un bâtiment chevrette, j'ai fait les plans. Le lendemain matin, les devis qu'on avait envoyés pour avoir les devis du constructeur, du terrassier, la semaine d'après, on avait les accords bancaires. ça a été très très vite, j'ai agi un peu sur un coup de colère et puis là ça faisait des années que ça allait pas et il fallait qu'on réagisse et comment ça fonctionne du coup au niveau de la reproduction alors nous au niveau reproduction on a deux lots en fait dans le bâtiment, on a un lot de lactations longues, donc des chèvres ça fait deux ou trois ans qu'elles ont pas fait de petits donc on les traie en permanence alors c'est vraiment l'un des rares animaux à ne pas avoir besoin d'avoir un petit tous les ans pour faire du lait la chèvre. En fait, une fois qu'elle a fait son petit, si on a des fourrages de qualité, on peut la maintenir au niveau de lait. Alors derrière, il faut un certain niveau génétique aussi. Nous ici, sur le deuxième lot du coup de repros qui met bas à l'automne, on travaille la génétique avec de l'insémination artificielle. Il y a 30% de notre troupeau qui est inséminé. ce qui permet d'augmenter notre qualité de lait par les taux, la quantité de lait. La morphologie mammaire, parce que la morphologie mammaire, ça a une incidence des mauvaises mamelles mal faites. C'est des mamelles qui se traînent mal, qui traînent dans les airs paillés. Donc, sanitairement, ça peut ramener des problèmes. Tout un travail génétique sur cette partie, la conformation des mamelles. Nous, ça fait 8 ans qu'on... Ça fait 8 ans qu'on travaille ça. Et surtout la morphologie mammaire. Et ce qui est rigolo, c'est que c'est le profil qui va le plus vite. Quand on met un critère morphologique sur une chèvre, du jour au lendemain, sur la chevrette qu'elle va faire, ça se voit tout de suite.

  • Romain Le Gal

    C'est intéressant, du coup tu travailles en deux lots. Un lot en lactation longue. Donc tu respectes toujours le cycle naturel de la chèvre puisque tu es sur une mise bas naturelle. Donc tu ne désaisonnes pas avec de la lumière.

  • Wilfried

    On fait un désaisonnement juste avec de la lumière. Vous faites quand même un désaisonnement sur un lot ? Ça n'impacte pas les lactations longues. Ça s'en fiche.

  • Romain Le Gal

    Elle s'en fiche ? Oui,

  • Wilfried

    elle s'en fiche. Il n'y a pas d'incidence du tout. Après, pour désaisonner, comme on dit, on fait juste un programme lumineux où on éclaire plus longtemps les bâtiments l'hiver pour leur faire croire que c'est les jours d'été. Et ça fonctionne très bien. Au début de notre installation, on avait deux lots de mise bas. On avait un lot en saison et un lot en désaisonné. Et très vite, ça a pu fonctionner. Parce qu'avec le programme lumineux, par contre, celles qui étaient en saison, elles étaient toutes paumées et vice-versa. Donc on a eu des échecs à la reproduction, parce que c'était le bordel dans le bâtiment, clairement. On a arrêté et on a lissé avec nos lactations, en faisant des lactations longues. plus souvent du lait toute l'année.

  • Romain Le Gal

    C'est combien de lactations ? Alors c'est compliqué chez toi, on va parler en années du coup, parce qu'avec 6 et sur les lactations longues... Ouais,

  • Wilfried

    ouais. 5-6 ans on est dedans.

  • Romain Le Gal

    D'accord.

  • Wilfried

    Donc on a quand même une carrière de chèvre assez longue. Ouais, ouais. Après il y a toujours les exceptions, des chèvres qui durent 8-10 ans.

  • Romain Le Gal

    On en a croisé une ce matin.

  • Wilfried

    Ouais, on en a croisé une, mais elle est en fin de carrière. Alors ici en plus on a un peu de mal à la mettre... Dans le camion, aller faire partir et donc derrière, dans l'ancien stabilis où on élevait nos chevrettes, on en a fait une maison de retraite.

  • Romain Le Gal

    D'accord, donc vous avez un Ehpad de chevrettes.

  • Wilfried

    Exactement, c'est exactement ça.

  • Romain Le Gal

    Ok, bon ben c'est cool. On continue la visite ?

  • Wilfried

    On continue.

  • Romain Le Gal

    Alors j'ai continué mon périple dans la ferme et là je viens de rejoindre Vanessa. Bonjour Vanessa.

  • Vanessa

    Bonjour.

  • Romain Le Gal

    Donc Vanessa qui est ce matin en fromagerie. Et il y a Wilfried qui fait ce moque de Vanessa, ce qui nous a suivis aussi.

  • Vanessa

    C'est ça.

  • Romain Le Gal

    Vanessa, du coup, qui es-tu ?

  • Vanessa

    Vanessa, je suis productrice de Pouligny-Saint-Pierre, à Aopé, éleveuse de chèvres.

  • Romain Le Gal

    La compagne de Wilfried. Et donc là, on est en fromagerie et tu produis du Pouligny-Saint-Pierre. Est-ce que tu peux nous expliquer un peu comment ça fonctionne, la fabrication de Pouligny ?

  • Vanessa

    La fabrication de Pouligny... On part du début ? Bah oui,

  • Romain Le Gal

    en partant du lait ! On a été à la traite tout à l'heure.

  • Vanessa

    Oui, et bah du coup on récupère le lait de deux traites. Donc par exemple là ce matin, il y a le lait d'hier soir et le lait de ce matin qui est mélangé, qu'on a mis dans les bacs dans la salle de caillage et qu'on va pas tarder à emprésurer. On va mettre la présure dans le lait et ça va cailler pendant 24 heures. Et demain matin, après, on va mouler ce caillé.

  • Romain Le Gal

    Donc là, le lait est mis dans des bassines finalement. Oui,

  • Vanessa

    c'est ça.

  • Romain Le Gal

    Où vous mettez la présure et un temps de coagulation, donc le passage de l'état liquide à l'état solide en 24 heures.

  • Vanessa

    Oui.

  • Romain Le Gal

    Donc on est sur un caillé lactique jour 1 et ensuite ?

  • Vanessa

    Et ensuite, le lendemain, il va être moulé du coup.

  • Romain Le Gal

    Oui.

  • Vanessa

    Donc dans les moules de Pouligny-Saint-Pierre. Et toute la journée, il va s'égoutter.

  • Romain Le Gal

    D'accord. Et comment tu fais le moulage ? Un moulage à la louche. Oui.

  • Vanessa

    Voilà. Et on fait plusieurs passages dans les blocs moules avec notre louche. Ça va nous faire gagner un petit peu de temps comme ça d'égouttage pour le moulage. Ça fait ressortir vraiment le lacto.

  • Romain Le Gal

    Le moulage. Ensuite, tu vas avoir des retournements ?

  • Vanessa

    Le lendemain.

  • Romain Le Gal

    Le lendemain. Donc là, on est en J3 finalement. Voilà.

  • Vanessa

    Au jour 3, on va retourner les blocs moules. Le matin et le soir, on va les remettre dans l'autre sens.

  • Romain Le Gal

    Et rebasculer dans l'autre sens.

  • Vanessa

    Et voilà. Et ensuite ? Et ensuite, le quatrième jour, ils vont être démoulés pour être salés. Et ils vont encore se ressuyer pendant 24 heures. Pendant 24 heures. Donc là, on est à jour 4. Après, en présurage. En fait, dans la salle de fabrication, on a trois jours de fabrication.

  • Romain Le Gal

    D'accord. Et après, les fromages, ils vont où ?

  • Vanessa

    Ils vont dans le séchoir.

  • Romain Le Gal

    Donc le séchoir où est Wilfried ? Alors là, on est en train de se déplacer dans le séchoir où Wilfried est en train de soigner et de retourner les poulinis. Donc les pouligny, la particularité, c'est que vous les couchez après ?

  • Vanessa

    Oui, c'est ça. Quand ils rentrent dans le séchoir, le premier jour, on va les coucher pour favoriser justement encore mieux le séchage et l'affinage. Et la croûte qui va venir dessus, que ça soit un peu plus uniforme. Après, le deuxième jour, on va les retourner dans l'autre sens. On leur fait faire un demi-tour, voilà, quand ils sont couchés. Et le troisième jour, on va les remettre debout.

  • Romain Le Gal

    On les remet debout. Et ils restent combien de temps dans cette salle de séchage ?

  • Vanessa

    Quatre jours. Et le cinquième jour, on les emmène dans le halloir.

  • Romain Le Gal

    D'accord. On sent une ambiance assez ventilée.

  • Vanessa

    Ça souffle un peu plus. Le but, c'est quand même de les sécher, de continuer à ressuyer un petit peu les fromages.

  • Romain Le Gal

    On est à quelle température et quelle hygrométrie ?

  • Vanessa

    En général, il y a à peu près 15 degrés. On est autour de 70% d'hygrométrie.

  • Romain Le Gal

    Cool. Je te suis en cave pour que tu nous expliques la suite. Alors, on rentre dans une autre cave. Et là, c'est le hâloir. Et le hâloir. Et donc là, on voit les pouligny, il fait un petit peu plus frais ?

  • Vanessa

    On est encore un petit peu plus frais, on est autour de 12 degrés, 13 degrés. Et on a un peu plus d'hygrométrie en général, on est plutôt à 90%.

  • Romain Le Gal

    Donc là, les pouligny, ils restent toujours droits sur la suite de l'affinage ?

  • Vanessa

    Oui, après on les laisse comme ça, ils touchent plus.

  • Romain Le Gal

    Sur les grilles, et c'est quoi le minimum d'affinage pour un poulini ?

  • Vanessa

    C'est 11 jours.

  • Romain Le Gal

    C'est 11 jours.

  • Vanessa

    11 jours à partir du jour d'emprésurage.

  • Romain Le Gal

    Et ça commence à bleuter à partir de combien de jours d'affinage ?

  • Vanessa

    Alors, nous, normalement, on est en couverture blanche.

  • Romain Le Gal

    D'accord.

  • Vanessa

    Donc on n'est pas censé avoir du bleu.

  • Romain Le Gal

    Vous n'êtes pas censé bleuter. Voilà,

  • Vanessa

    c'est ça. Après, on a des collègues qui, eux, sont vraiment bleus. Donc ce n'est pas tout à fait la même couverture. Ils ont un pénicillium, le pénicillium album, qui vient se mettre dessus, qui est vraiment plus épais. Et là, ça, c'est un autre bleu.

  • Romain Le Gal

    Donc c'est une autre conduite d'affinage ?

  • Vanessa

    C'est une autre conduite. C'est vraiment après dans l'ambiance de la fromagerie. Quelque chose qui est recherché. Ça donne un autre goût au pouligny. On va avoir des notes plutôt champignons, sous-bois. C'est assez différent d'une autre.

  • Romain Le Gal

    Et le vôtre, il va avoir quoi du coup ?

  • Vanessa

    On ressent plus le côté caprin, quand même un peu beurré, acidulé. Un peu lactique. Un peu d'acidité. C'est ça. Et le bleu, c'est vraiment le côté, pour le coup, avec la croûte champignon sous bois qui va ressortir plus.

  • Romain Le Gal

    Et c'est vous qui aviez fait le choix de ce type d'affinage ?

  • Vanessa

    Oui, on avait choisi.

  • Romain Le Gal

    C'était vraiment une volonté d'être plus sur un affinage blanc ?

  • Vanessa

    Oui.

  • Romain Le Gal

    Bon, super. On va continuer l'échange après.

  • Vanessa

    Ça marche.

  • Romain Le Gal

    On a fait le tour de votre exploitation. Je me retrouve avec vous deux, Wilfried et Vanessa. Et puis, je vous propose de continuer cet échange. Déjà, vous vous êtes présenté brièvement, mais qui êtes-vous ? Comment êtes-vous arrivé là ?

  • Wilfried

    Eh bien, en fait, ça fait maintenant... maintenant presque 21 ans qu'on est ensemble avec Vanessa. Moi, je suis issu du commerce. J'ai fait un DUT technique de commercialisation à Issouda, donc pas très loin d'ici, mais je suis natif de Sologne. J'ai travaillé dans la vente d'articles de pêche et de loisirs parce que je suis un passionné de pêche à la base. Et puis, suite à un licenciement plus ou moins économique, maquillé comme ça, on s'est dit, Vanessa a expliqué son parcours, on s'est dit on va travailler pour nous. Et on va essayer quelque chose qui nous plaît. On aimait les animaux. On savait qu'il y avait une formation. À l'époque, on était sur Châteauroux, pas loin, avec la Ferme des Ages, avec un lycée agricole, avec une spécialisation caprine. Donc, on a tenté. On s'est dit, on tente. Et toi, Vanessa, du coup, c'est quoi ton parcours ?

  • Vanessa

    J'ai fait un lycée agricole. Donc, j'ai un bac agricole. Et à sortie de ça, moi, j'ai travaillé un petit peu à droite à gauche dans le commerce. En attendant de savoir ce que j'avais envie de faire, quand Wilfried a été licencié, c'est vrai qu'on a pris la décision d'essayer de faire quelque chose pour nous avec les animaux. Et donc l'idée d'avoir des chèvres et de transformer notre produit et de le vendre nous a tout de suite intéressés. Moi, je suis partie à la ferme des âges pour faire le certificat de spécialisation.

  • Romain Le Gal

    D'accord. Et vous aviez dans l'idée de créer une ferme, de faire une reprise ?

  • Wilfried

    En fait, l'idée première à la base, c'est qu'on s'était dit, vu qu'on a été formé par la ferme des âges, on savait qu'il y avait une demande sur l'AOP Pouligny-Saint-Pierre. La stratégie, c'était déjà, dans un premier temps, d'aller travailler dans des exploitations pour se former davantage sur le terrain. Et deuxième chose, c'est soit on se disait... On trouve une exploitation sur l'AOP Pouligny ou soit le bord de mer. Parce qu'on n'était pas forcément attaché à une région et on savait que le bord de mer, déjà c'est sympa, qu'il y a une demande. Donc on a cherché dans ces deux zones-là et on s'est rendu compte que, pour nous, vu notre parcours, parce que c'est un parcours hors cadre familial, on a précisé qu'on n'a aucun de nos parents, aucun de nos ancêtres dans le milieu agricole et qu'on n'est pas issu de la région. Donc du coup, et pas d'apport, parce que quand on est jeune, on a très peu qu'on désapporte.

  • Romain Le Gal

    Et donc les difficultés, ça a été quoi dans l'installation ? Quand on est hors quête familiale, est-ce que c'est réalisable ? Aujourd'hui, on voit oui, mais qu'est-ce que vous conseilleriez ? Ça a été quoi vos plus grosses difficultés ?

  • Wilfried

    En fait, je pense que déjà, on a été super bien aiguillés par l'accueil de la chambre d'agriculture. Enfin honnêtement... On n'a pas de lobby avec la chambre, mais honnêtement, on a eu un super soutien. C'est toujours d'actualité de toute façon. Et après, en étant hors cadre, on ne connaît pas, on n'est pas issu du coin. Et le milieu agricole, c'est un milieu très fermé quand même. Il y a des codes, c'est ce que je dis souvent. Et donc, il a fallu trouver une ferme. C'est compliqué. Et après, quand on l'a trouvé, il faut faire ses preuves. Et ça, c'est quand même assez propre au milieu agricole. c'est que ça demande beaucoup de temps pour être qualifié de bon. Par son voisinage, c'est vraiment un travail de longue haleine.

  • Romain Le Gal

    Et toi Vanessa, pour toi, ça a été quoi les plus grosses difficultés ?

  • Vanessa

    La première difficulté, c'était de trouver une banque qui veuille bien nous accompagner, ça c'est sûr. Pas de moyens, pas d'argent. Pas de moyens, pas d'argent, pas de famille, pas de parents avec des terres déjà. Des fois c'est un plus pour la banque quand des enfants veulent s'installer avec des parents qui ont déjà des terres. La banque est un peu moins frileuse. Et après, la difficulté, je dirais, c'est peut-être plutôt, nous, on s'installait avec une ferme qui n'avait pas de surface pour faire nos fourrages. Donc, ça a été, au fil des années, d'arriver à récupérer de la surface pour être autonome. Pour être autonome au niveau des fourrages. Et ça, ça a mis plusieurs années.

  • Romain Le Gal

    Donc là, on est au cœur de la zone du pays de Brenne. Comment vous qualifieriez votre terroir ici ? Comment on peut le décrire pour ceux qui nous écoutent ? Parce que c'est quand même assez spécifique, on est sur la plus petite zone d'appellation d'origine protégée de France. C'est 22 communes sur un territoire qui est un peu particulier. Bon, pour un pêcheur, je vais pas donner des indices, pour un pêcheur, je pense qu'il y a des heureux.

  • Wilfried

    Je vais essayer d'être neutre du coup. Je vais faire honneur à la profession en indiquant que c'est vrai qu'on est sur un super beau territoire. On est dans le pays des milles étangs, sur un parc naturel régional. Mais à côté de ça, on est sur une production caprine où l'animal a des exigences avant l'éleveur. C'est produire des fourrages de qualité. Et les fourrages de qualité chez nous, c'est des légumineuses, donc du trèfle violet ou des luzernes. Enfin, surtout des luzernes. Et cette petite plante-là, elle aime les sols calcaires. Et les sols de brun, c'est des sols argileux. C'est pauvre. Donc il faut trouver les veines de terre calcaire pour pouvoir faire pousser de la luzerne

  • Romain Le Gal

    C'est quoi l'histoire de cette AOP ? C'est AOP depuis quelle année ?

  • Wilfried

    Alors ça a été reconnu en 72 C'est un travail de longue haleine fait par des personnes qui se sont battues pendant très longtemps au sein de la chambre d'agriculture Monsieur Dion en l'occurrence Et première AOP reconnue de France en Cap-Rhin Donc après on était dans 1972 ? 1972 c'est ça, AOC d'abord, AOP reconnue dans les années 2000 de mémoire. Alors avec, sur l'historique, sur les plus belles années de production, on est arrivé à 300 tonnes. Malheureusement aujourd'hui on est bien en dessous des 200 et c'est un combat qu'on mène au quotidien pour faire dorer notre belle image de... De fromage de plateau, le Pouligny Saint-Pierre, et l'idée c'est de ne jamais descendre en dessous des 200 tonnes parce qu'on est rémunéré au tonnage produit. Donc si on ne produit pas un minimum de tonnage, on ne fait pas rentrer beaucoup de sous et on n'a pas de moyens d'action, c'est aussi simple que ça. Pour faire parler du Pouligny. Pour faire parler au niveau com, au niveau salon, rémunérer notre animateur, enfin c'est tout bête, c'est quelque part un peu le système d'une entreprise, pas de sous, pas de moyens quoi.

  • Romain Le Gal

    Et cette filière aujourd'hui pour ses 200 tonnes, c'est combien de producteurs ?

  • Wilfried

    Donc là vous êtes un des producteurs fermiers de Pouligny-Saint-Pierre, c'est quoi la filière en termes de nombre d'acteurs ? En nombre d'acteurs, en tout on est une trentaine, on est 8 producteurs fermiers avec un qui fait partie affinage, et puis 22 producteurs laitiers et au niveau pourcentage on est en 73. tonnes produites par des fermiers et à peu près 110-120 tonnes produites par des laitiers. Donc en fait, plus ça va, plus l'écart se réduit entre les tonnages laitiers et les tonnages fermiers. Sur votre appellation, finalement, les fermiers se maintiennent et progressent peut-être avec des installations. On arrive à maintenir des volumes avec Alors sans parler de la production, on essaie de garder le rythme d'une installation par an, que ce soit laitier ou fermier. C'est quelque chose qu'on veut maintenir pour maintenir un peu de tonnage. Mais là où on a beaucoup de craintes, c'est la réduction des tonnages chez les laitiers. On maintient chez les fermiers et on réduit largement chez les laitiers.

  • Romain Le Gal

    Ok. Et du coup, Vanessa, toi, comment tu vois l'avenir ? du Pouligny-Saint-Pierre, comment tu ressens les choses ?

  • Vanessa

    L'avenir du Pouligny-Saint-Pierre, on a un petit peu de mal à le voir quand même sur le long terme. Parce que s'il n'y a pas quand même de futures installations, que ce soit en fermier ou en laitier d'ailleurs, et si les laitiers continuent de diminuer, pour continuer leur tonnage, malheureusement on se demande si dans 10 ans le Pouligny-Saint-Pierre sera toujours capable d'être là.

  • Romain Le Gal

    Vous voyez d'autres problématiques à part cette baisse de volume qui va arriver dans les années à venir sur votre appellation ?

  • Wilfried

    La problématique qu'on a, et là on soutient l'intégralité de la filière parce qu'on essaye d'être solidaires des 5 AOP, parce qu'on est dans une région centre où il y a 5 appellations de Caprine. Donc on essaye de travailler ensemble parce que la problématique qui nous pend au nez, enfin qui ne nous pend pas au nez, qui est présente, c'est la problématique sanitaire qui est de plus en plus importante, qui pèse de plus en plus chez nos producteurs laitiers, mais aussi fermiers, avec une pression constante. Donc on essaye de soulager et de soutenir nos industries, nos transformateurs au niveau local en proposant des solutions. Bon, mais... Tant qu'on aura cette pression sanitaire, ça va être difficile de maintenir des volumes chez nos laiteries. On le comprend largement. On le comprend largement. Et c'est là-dessus où il va falloir qu'on soit solidaires. Vraiment, tous ensemble. Qu'il n'y ait plus cet ancrage entre les fermiers et les laitiers. On est tous dans le même bateau. Tous ensemble ?

  • Romain Le Gal

    Bah ouais, on est toujours plus forts. Surtout sur des petites filières ? Bah je pense.

  • Wilfried

    Il n'y a pas de... de raison.

  • Romain Le Gal

    Non. Si vous deviez donner à ceux qui nous écoutent envie de déguster du poulini, comment vous feriez ?

  • Wilfried

    C'est un fromage de plateau avant tout, donc tout bêtement avec un bon vin, alors pas d'abus sur l'alcool c'est sûr, mais avec un bon rogui, blanc ou gris c'est top. Déguster comme ça avec un morceau de pain frais Et toi Vanessa ?

  • Vanessa

    Même si c'est un fromage de plateau, on peut quand même pas mal le cuisiner. Ce qui est pas mal, c'est de le découper en petits dés et puis avoir un petit ramequin avec de l'huile de noisette. Et de tremper le pouligny dedans et c'est vraiment pas mal, ça change un peu. L'huile de noisette, ça se marie bien. Après, un peu plus affiné, coupé en dés aussi, dans une salade de lentilles. C'est top aussi avec un peu... On peut faire plein de choses et se faire plaisir avec le pouligny. Quand il est un peu plus sec, mais vraiment sec, on peut le râper comme un parmesan sur des pâtes. Ça marche aussi super bien.

  • Romain Le Gal

    Tout à l'heure, on n'en avait pas parlé, mais pour reconnaître un pouligny fermier, il y a une petite étiquette dessus avec un petit carré vert. Tandis que ceux qui ne le savent pas, il y a un petit carré rouge pour un pouligny laitier. j'aurais une dernière question avant de clôturer cet échange. Est-ce que vous êtes prêts ?

  • Vanessa

    Allez !

  • Romain Le Gal

    C'est la question rituelle du podcast, mais je pense que vous savez ce que je vais vous demander. Je vois des regards vides. Quel est votre pizza préféré ?

  • Wilfried

    Quatre fromages, évidemment. C'est vrai, en plus. Je ne mens pas.

  • Vanessa

    Moi, ce n'est pas la quatre fromages.

  • Romain Le Gal

    Mais ce n'est pas grave, c'est l'Hawaïenne ?

  • Vanessa

    Non. surtout pas

  • Romain Le Gal

    Moi j'aime bien l'Hawaïenne

  • Vanessa

    Avec l'ananas c'est pas possible Non mais j'aime beaucoup les pizzas Avec du saumon Une salmone. Ta pizza préférée c'est une salmone Avec un bon fromage dessus quand même 4 fromages évidemment Le pouligny encore mieux Mais un gorgonzola C'est vrai que des fois, on se fait des pizzas où il y a un peu beaucoup de fromage. Non,

  • Wilfried

    il n'y en a jamais trop.

  • Romain Le Gal

    Il y a une pub qui disaient plus t'en mets, plus t'en as.

  • Wilfried

    C'est exactement ça.

  • Romain Le Gal

    Merci beaucoup de votre accueil. Merci à toi.

  • Wilfried

    Merci d'être venu. Et puis à très bientôt. A bientôt. Merci. Merci, salut.

  • Romain Le Gal

    Notre épisode touche déjà sa fin. Une très belle rencontre avec ce couple qui nous a montré qu'avec passion et détermination, Même sans venir du monde agricole, il est possible de reprendre ou créer une exploitation. Le Pouligny-Saint-Pierre, premier AOC Caprine reconnu en 1972, et qui est produite sur la plus petite zone AOP, a plus qu'aujourd'hui besoin de toit. Il s'en produisait plus de 300 tonnes il y a quelques années, nous sommes aujourd'hui à moins de 200 tonnes. Il est important de parler et soutenir nos plus petites appellations. Pour finir sur une note positive, Il est bon d'entendre qu'il y a quand même des projets et des installations de jeunes agriculteurs. On espère que cet épisode t'a plu. N'hésite pas à le partager ou à nous laisser des commentaires sur les réseaux. Et on te dit évidemment à très bientôt pour un nouvel épisode de Lait'Change. Salut !

Chapters

  • Introduction

    00:06

  • Présentation de l'exploitation avec Wilfried

    01:05

  • La salle de traite

    01:35

  • La chèvrerie

    02:21

  • Les obligations du cahier des charges du Pouligny-Saint-Pierre

    03:57

  • L'alimentation

    05:00

  • Les chevrettes

    06:14

  • La reproduction et la génétique

    07:38

  • La lactation longue

    09:16

  • Les vieilles chèvres

    10:35

  • La fromagerie avec Vanessa

    11:07

  • La fabrication du Pouligny-Saint-Pierre AOP

    11:39

  • Le séchoir

    13:40

  • Le hâloir

    14:46

  • L'affinage

    15:28

  • Qui êtes-vous Vanessa et Wilfried ?

    16:38

  • Un nouveau départ

    18:09

  • Les défis

    19:31

  • Les difficultés

    20:28

  • Le terroir du Pays de Brenne

    21:15

  • L'histoire de l'AOP Pouligny-Saint-Pierre

    22:18

  • La production

    22:57

  • La filière et ses acteurs

    23:44

  • L'avenir du Pouligny-Saint-Pierre

    25:04

  • Les autres problématiques

    25:46

  • Les conseils de dégustation

    27:00

  • L'identification du fromage

    28:00

  • La question rituel !

    28:20

  • Conclusion

    29:30

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Description

Romain Le Gal et France Frais vous invitent dans le Pays de Brenne, aussi connu être le pays aux milles étangs.

À Martizay dans l'Indre (36) , Vanessa et Wilfried sont producteurs de Pouligny-Saint-Pierre, un fromage au lait de chèvre d'Appellation d'Origine Protégée. Grâce à leur presévérance et leur travail, leur AOP a obtenu la médaille d'or au Concours Général Agricole 2025.

Dans ce podcast, vous découvrirez :

- l'organisation de l'exploitation et de la filière de ce beau fromage,

- le parcours atypique de ce couple de passionnés,

- et les défis et enjeux auxquels ils sont confrontés.


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Transcription

  • Romain Le Gal

    Bienvenue sur Lait'Change, le podcast qui donne la parole aux actrices et aux acteurs de la filière laitière et fromagère. Je suis Romain Le Gal et avec France Frais, on est très heureux de te retrouver pour repartir à la découverte d'un terroir d'un producteur d'un fromage. Aujourd'hui, on te propose de parler d'un fromage de chèvre produit dans l'Indre, parfois méconnu, qui est AOP. depuis 1972. Reconnaissable à sa forme pyramidale, il est fabriqué dans le pays de Brenne, également nommé Pays aux milles étangs. On va s'intéresser, évidemment, au Pouligny-Saint-Pierre. Rendez-vous donc à la ferme de Bray, avec Wilfried, président du syndicat du Pouligny-Saint-Pierre, et Vanessa, qui, avec un parcours atypique, ont créé cette très belle fromagerie fermière. Cela sera l'occasion de parler de l'élevage de chèvres, de la production de ce fromage, ainsi que son histoire, mais également de la filière. C'est parti pour un nouvel épisode en immersion, je te souhaite une très bonne écoute ! Bonjour Wilfried !

  • Wilfried

    Salut Romain, ça va ? Ça va et toi ? Bah impeccable ! Comment ça ce matin ? Bah nickel comme d'hab ! Nickel comme d'hab ! On te retrouve là ce matin en salle de traite ? Oui ! Est-ce que tu peux nous présenter en quelques mots ton exploitation ? Ouais ! Ok, pas de problème ! Alors nous c'est une installation, c'est une création d'atelier sur Martizay, dans la zone AOP du Pouligny-Saint-Pierre. On a créé notre atelier avec Vanessa, 130 chèvres, en transformation sur la totalité de notre lait en AOP Pouligny-Saint-Pierre. Fermier ! Donc là, on est en salle de traite.

  • Romain Le Gal

    Comment ça se passe le matin ? A quelle heure vous démarrez la traite ? Alors en ce moment, il y a un peu moins de lait, donc on commence vers 7h. Il y en a pour une heure à traire les 130 chèvres. On a des chèvres qui vont être taris d'ici 10 jours.

  • Wilfried

    Donc ça va aller beaucoup plus vite. Comme on dit, on va être à moitié en vacances d'ici 10 jours.

  • Romain Le Gal

    Et c'est quoi comme chèvres ?

  • Wilfried

    C'est de la chèvre alpine. Alors notre cahier des charges nous permet d'avoir de la chèvre alpine, les marrons, les sanènes, les blanches. Et les poitevines aussi, il est un peu méconnu, les blanches et noires, les deux-sèvres, du marais-poitevin, etc. Bon bah c'est super, donc on va continuer de traire les chèvres et puis on va continuer la visite après. Pas de problème.

  • Romain Le Gal

    La traite est finie, on vient de basculer dans la chèvrerie et c'est quoi l'étape suivante à la fin de traite du coup Wilfried ? Fin de traite ?

  • Wilfried

    Comme je dis familièrement, on range nos animaux dans leur paillé et on distribue l'aliment. Alors là, c'est des concentrés, c'est des céréales produites sur l'exploitation en totalité. Donc du maïs, de l'orge et ce que j'appelle le concentré, le correcteur azoté, une petite part. Et puis évidemment et essentiellement, on travaille avec des fourrages de légumineuses, du trèfle violet. et des luzernes qui sont produits intégralement sur la ferme, dans un rayon de 5 km en fait. Tout est produit dans un rayon de 5 km autour de la ferme.

  • Romain Le Gal

    Tu as combien d'hectares du coup ?

  • Wilfried

    Alors on a 80 hectares à peu près. On a récupéré 60 hectares il y a deux ans. Aujourd'hui, on est bien content parce qu'on va être autonome sur l'alimentation pratiquement en totalité. Donc là, les chèvres sont sur air paillées.

  • Romain Le Gal

    Et après, quand on a préparé l'entretien, tu m'as expliqué aussi qu'elles ont potentiellement Un accès à un extérieur ?

  • Wilfried

    Oui, elles ont accès à des aires d'exercice. Déjà, c'est une obligation de la part de nos cahiers des charges au niveau bien-être animal. Et donc là, comme on voit sur le côté droit du bâtiment, c'est ouvert pratiquement toute l'année. Je ne vais pas dire toute l'année parce que l'hiver, ça fait froid. Mais à partir du mois d'avril, du printemps jusqu'à l'automne, septembre, octobre, c'est ouvert.

  • Romain Le Gal

    Elles ont accès à l'extérieur quand elles veulent. Au niveau du cahier des charges du Pouligny-Saint-Pierre, c'est quoi les obligations par rapport à ce parcours et en termes de place pour les chèvres ? Alors on a des surfaces d'air paillé minimum à respecter par animal dans les stabulations, dans les chèvreries. C'est 1m² 50 par animal. Et après les aires d'exercice à l'extérieur, on n'a pas de surface minimum par animal, ça peut être 500m². 1000, 1 hectare, 2, enfin tout dépend de l'implantation du bâtiment par rapport à ses surfaces autour des bâtiments. Nous ici sur site, sur la ferme de Bray, on a très peu de surface autour des bâtiments. Parce qu'en fait vu que c'est une installation de création, avec pas d'apport, on avait 25 ans quand on s'est installé, donc pas de sous en poche comme la majorité des gens, donc on a fait le choix de dire on trouve une petite ferme. Avec très peu de surface qui représente un faible coût d'investissement et on monte tout, c'était la solution économique et on trouvera des surfaces plus tard. C'était un peu notre pari. Et là, les chefs vont avoir l'aliment le matin et après, toute la journée, vont avoir à disposition... Ouais,

  • Wilfried

    alors on fait deux repas de ce qu'on appelle le concentré, les céréales. Moi, j'appelle jugulièrement... L'énergie. L'énergie, exactement, c'est ça. Et donc, deux repas par jour, matin et soir. Et puis après, on fait trois repas de fourrage. Donc au niveau fourrage, là, on voit pour nos chèvres laitières, celles en lactation, c'est du trèfle essentiellement, du trèfle violet.

  • Romain Le Gal

    Il y a une bonne odeur de fourrage dans les mains.

  • Wilfried

    Ça, c'est notre religion, le fourrage, ici. On base toutes nos productions laitières sur les qualités de fourrage parce que une chèvre c'est un ruminant, donc c'est pas un mangeur de céréales, c'est pas un cochon. Et donc le but du jeu c'est de lui faire ingérer un maximum de fourrage de qualité. Économiquement c'est plus rentable aussi pour l'éleveur. Puis elle va consommer des légumineuses. Moins va consommer de céréales, correcteur azoté, mieux c'est pour le porte-monnaie et surtout pour la santé de l'animal. Super,

  • Romain Le Gal

    on continue la visite, on va voir le renouvellement ?

  • Wilfried

    Ouais, avec plaisir.

  • Romain Le Gal

    C'est parti. Alors, on vient d'arriver dans le bâtiment avec les chevrettes.

  • Wilfried

    Ouais.

  • Romain Le Gal

    Alors du coup, explique-nous un petit peu...

  • Wilfried

    Ouais, pourquoi ? Alors le pourquoi du comment, déjà on a monté ce bâtiment chevrette. Historiquement, on avait un vieux bâtiment, une vieille stabulation avec la maison. plus bas et on avait des problèmes, on élevait nos chevrettes dans ce bâtiment là et on avait des problèmes sanitaires on va dire sur l'élevage de chevrettes. Les problématiques qu'on retrouve sur les chevrettes c'est le problème de pulmonaire souvent, la pastorelle qui se développe sur des bâtiments mal ventilés, froid, humide, enfin tout ce que tu veux donc du coup on a pris une grosse inondation parce qu'on a la rivière pas loin. En 2016, quand on a pris l'inondation, on a dit dans la nuit de l'inondation du vendredi à samedi, je m'en rappellerai toute ma vie, j'ai fait les plans du bâtiment chevrette de colère. On monte un bâtiment chevrette, j'ai fait les plans. Le lendemain matin, les devis qu'on avait envoyés pour avoir les devis du constructeur, du terrassier, la semaine d'après, on avait les accords bancaires. ça a été très très vite, j'ai agi un peu sur un coup de colère et puis là ça faisait des années que ça allait pas et il fallait qu'on réagisse et comment ça fonctionne du coup au niveau de la reproduction alors nous au niveau reproduction on a deux lots en fait dans le bâtiment, on a un lot de lactations longues, donc des chèvres ça fait deux ou trois ans qu'elles ont pas fait de petits donc on les traie en permanence alors c'est vraiment l'un des rares animaux à ne pas avoir besoin d'avoir un petit tous les ans pour faire du lait la chèvre. En fait, une fois qu'elle a fait son petit, si on a des fourrages de qualité, on peut la maintenir au niveau de lait. Alors derrière, il faut un certain niveau génétique aussi. Nous ici, sur le deuxième lot du coup de repros qui met bas à l'automne, on travaille la génétique avec de l'insémination artificielle. Il y a 30% de notre troupeau qui est inséminé. ce qui permet d'augmenter notre qualité de lait par les taux, la quantité de lait. La morphologie mammaire, parce que la morphologie mammaire, ça a une incidence des mauvaises mamelles mal faites. C'est des mamelles qui se traînent mal, qui traînent dans les airs paillés. Donc, sanitairement, ça peut ramener des problèmes. Tout un travail génétique sur cette partie, la conformation des mamelles. Nous, ça fait 8 ans qu'on... Ça fait 8 ans qu'on travaille ça. Et surtout la morphologie mammaire. Et ce qui est rigolo, c'est que c'est le profil qui va le plus vite. Quand on met un critère morphologique sur une chèvre, du jour au lendemain, sur la chevrette qu'elle va faire, ça se voit tout de suite.

  • Romain Le Gal

    C'est intéressant, du coup tu travailles en deux lots. Un lot en lactation longue. Donc tu respectes toujours le cycle naturel de la chèvre puisque tu es sur une mise bas naturelle. Donc tu ne désaisonnes pas avec de la lumière.

  • Wilfried

    On fait un désaisonnement juste avec de la lumière. Vous faites quand même un désaisonnement sur un lot ? Ça n'impacte pas les lactations longues. Ça s'en fiche.

  • Romain Le Gal

    Elle s'en fiche ? Oui,

  • Wilfried

    elle s'en fiche. Il n'y a pas d'incidence du tout. Après, pour désaisonner, comme on dit, on fait juste un programme lumineux où on éclaire plus longtemps les bâtiments l'hiver pour leur faire croire que c'est les jours d'été. Et ça fonctionne très bien. Au début de notre installation, on avait deux lots de mise bas. On avait un lot en saison et un lot en désaisonné. Et très vite, ça a pu fonctionner. Parce qu'avec le programme lumineux, par contre, celles qui étaient en saison, elles étaient toutes paumées et vice-versa. Donc on a eu des échecs à la reproduction, parce que c'était le bordel dans le bâtiment, clairement. On a arrêté et on a lissé avec nos lactations, en faisant des lactations longues. plus souvent du lait toute l'année.

  • Romain Le Gal

    C'est combien de lactations ? Alors c'est compliqué chez toi, on va parler en années du coup, parce qu'avec 6 et sur les lactations longues... Ouais,

  • Wilfried

    ouais. 5-6 ans on est dedans.

  • Romain Le Gal

    D'accord.

  • Wilfried

    Donc on a quand même une carrière de chèvre assez longue. Ouais, ouais. Après il y a toujours les exceptions, des chèvres qui durent 8-10 ans.

  • Romain Le Gal

    On en a croisé une ce matin.

  • Wilfried

    Ouais, on en a croisé une, mais elle est en fin de carrière. Alors ici en plus on a un peu de mal à la mettre... Dans le camion, aller faire partir et donc derrière, dans l'ancien stabilis où on élevait nos chevrettes, on en a fait une maison de retraite.

  • Romain Le Gal

    D'accord, donc vous avez un Ehpad de chevrettes.

  • Wilfried

    Exactement, c'est exactement ça.

  • Romain Le Gal

    Ok, bon ben c'est cool. On continue la visite ?

  • Wilfried

    On continue.

  • Romain Le Gal

    Alors j'ai continué mon périple dans la ferme et là je viens de rejoindre Vanessa. Bonjour Vanessa.

  • Vanessa

    Bonjour.

  • Romain Le Gal

    Donc Vanessa qui est ce matin en fromagerie. Et il y a Wilfried qui fait ce moque de Vanessa, ce qui nous a suivis aussi.

  • Vanessa

    C'est ça.

  • Romain Le Gal

    Vanessa, du coup, qui es-tu ?

  • Vanessa

    Vanessa, je suis productrice de Pouligny-Saint-Pierre, à Aopé, éleveuse de chèvres.

  • Romain Le Gal

    La compagne de Wilfried. Et donc là, on est en fromagerie et tu produis du Pouligny-Saint-Pierre. Est-ce que tu peux nous expliquer un peu comment ça fonctionne, la fabrication de Pouligny ?

  • Vanessa

    La fabrication de Pouligny... On part du début ? Bah oui,

  • Romain Le Gal

    en partant du lait ! On a été à la traite tout à l'heure.

  • Vanessa

    Oui, et bah du coup on récupère le lait de deux traites. Donc par exemple là ce matin, il y a le lait d'hier soir et le lait de ce matin qui est mélangé, qu'on a mis dans les bacs dans la salle de caillage et qu'on va pas tarder à emprésurer. On va mettre la présure dans le lait et ça va cailler pendant 24 heures. Et demain matin, après, on va mouler ce caillé.

  • Romain Le Gal

    Donc là, le lait est mis dans des bassines finalement. Oui,

  • Vanessa

    c'est ça.

  • Romain Le Gal

    Où vous mettez la présure et un temps de coagulation, donc le passage de l'état liquide à l'état solide en 24 heures.

  • Vanessa

    Oui.

  • Romain Le Gal

    Donc on est sur un caillé lactique jour 1 et ensuite ?

  • Vanessa

    Et ensuite, le lendemain, il va être moulé du coup.

  • Romain Le Gal

    Oui.

  • Vanessa

    Donc dans les moules de Pouligny-Saint-Pierre. Et toute la journée, il va s'égoutter.

  • Romain Le Gal

    D'accord. Et comment tu fais le moulage ? Un moulage à la louche. Oui.

  • Vanessa

    Voilà. Et on fait plusieurs passages dans les blocs moules avec notre louche. Ça va nous faire gagner un petit peu de temps comme ça d'égouttage pour le moulage. Ça fait ressortir vraiment le lacto.

  • Romain Le Gal

    Le moulage. Ensuite, tu vas avoir des retournements ?

  • Vanessa

    Le lendemain.

  • Romain Le Gal

    Le lendemain. Donc là, on est en J3 finalement. Voilà.

  • Vanessa

    Au jour 3, on va retourner les blocs moules. Le matin et le soir, on va les remettre dans l'autre sens.

  • Romain Le Gal

    Et rebasculer dans l'autre sens.

  • Vanessa

    Et voilà. Et ensuite ? Et ensuite, le quatrième jour, ils vont être démoulés pour être salés. Et ils vont encore se ressuyer pendant 24 heures. Pendant 24 heures. Donc là, on est à jour 4. Après, en présurage. En fait, dans la salle de fabrication, on a trois jours de fabrication.

  • Romain Le Gal

    D'accord. Et après, les fromages, ils vont où ?

  • Vanessa

    Ils vont dans le séchoir.

  • Romain Le Gal

    Donc le séchoir où est Wilfried ? Alors là, on est en train de se déplacer dans le séchoir où Wilfried est en train de soigner et de retourner les poulinis. Donc les pouligny, la particularité, c'est que vous les couchez après ?

  • Vanessa

    Oui, c'est ça. Quand ils rentrent dans le séchoir, le premier jour, on va les coucher pour favoriser justement encore mieux le séchage et l'affinage. Et la croûte qui va venir dessus, que ça soit un peu plus uniforme. Après, le deuxième jour, on va les retourner dans l'autre sens. On leur fait faire un demi-tour, voilà, quand ils sont couchés. Et le troisième jour, on va les remettre debout.

  • Romain Le Gal

    On les remet debout. Et ils restent combien de temps dans cette salle de séchage ?

  • Vanessa

    Quatre jours. Et le cinquième jour, on les emmène dans le halloir.

  • Romain Le Gal

    D'accord. On sent une ambiance assez ventilée.

  • Vanessa

    Ça souffle un peu plus. Le but, c'est quand même de les sécher, de continuer à ressuyer un petit peu les fromages.

  • Romain Le Gal

    On est à quelle température et quelle hygrométrie ?

  • Vanessa

    En général, il y a à peu près 15 degrés. On est autour de 70% d'hygrométrie.

  • Romain Le Gal

    Cool. Je te suis en cave pour que tu nous expliques la suite. Alors, on rentre dans une autre cave. Et là, c'est le hâloir. Et le hâloir. Et donc là, on voit les pouligny, il fait un petit peu plus frais ?

  • Vanessa

    On est encore un petit peu plus frais, on est autour de 12 degrés, 13 degrés. Et on a un peu plus d'hygrométrie en général, on est plutôt à 90%.

  • Romain Le Gal

    Donc là, les pouligny, ils restent toujours droits sur la suite de l'affinage ?

  • Vanessa

    Oui, après on les laisse comme ça, ils touchent plus.

  • Romain Le Gal

    Sur les grilles, et c'est quoi le minimum d'affinage pour un poulini ?

  • Vanessa

    C'est 11 jours.

  • Romain Le Gal

    C'est 11 jours.

  • Vanessa

    11 jours à partir du jour d'emprésurage.

  • Romain Le Gal

    Et ça commence à bleuter à partir de combien de jours d'affinage ?

  • Vanessa

    Alors, nous, normalement, on est en couverture blanche.

  • Romain Le Gal

    D'accord.

  • Vanessa

    Donc on n'est pas censé avoir du bleu.

  • Romain Le Gal

    Vous n'êtes pas censé bleuter. Voilà,

  • Vanessa

    c'est ça. Après, on a des collègues qui, eux, sont vraiment bleus. Donc ce n'est pas tout à fait la même couverture. Ils ont un pénicillium, le pénicillium album, qui vient se mettre dessus, qui est vraiment plus épais. Et là, ça, c'est un autre bleu.

  • Romain Le Gal

    Donc c'est une autre conduite d'affinage ?

  • Vanessa

    C'est une autre conduite. C'est vraiment après dans l'ambiance de la fromagerie. Quelque chose qui est recherché. Ça donne un autre goût au pouligny. On va avoir des notes plutôt champignons, sous-bois. C'est assez différent d'une autre.

  • Romain Le Gal

    Et le vôtre, il va avoir quoi du coup ?

  • Vanessa

    On ressent plus le côté caprin, quand même un peu beurré, acidulé. Un peu lactique. Un peu d'acidité. C'est ça. Et le bleu, c'est vraiment le côté, pour le coup, avec la croûte champignon sous bois qui va ressortir plus.

  • Romain Le Gal

    Et c'est vous qui aviez fait le choix de ce type d'affinage ?

  • Vanessa

    Oui, on avait choisi.

  • Romain Le Gal

    C'était vraiment une volonté d'être plus sur un affinage blanc ?

  • Vanessa

    Oui.

  • Romain Le Gal

    Bon, super. On va continuer l'échange après.

  • Vanessa

    Ça marche.

  • Romain Le Gal

    On a fait le tour de votre exploitation. Je me retrouve avec vous deux, Wilfried et Vanessa. Et puis, je vous propose de continuer cet échange. Déjà, vous vous êtes présenté brièvement, mais qui êtes-vous ? Comment êtes-vous arrivé là ?

  • Wilfried

    Eh bien, en fait, ça fait maintenant... maintenant presque 21 ans qu'on est ensemble avec Vanessa. Moi, je suis issu du commerce. J'ai fait un DUT technique de commercialisation à Issouda, donc pas très loin d'ici, mais je suis natif de Sologne. J'ai travaillé dans la vente d'articles de pêche et de loisirs parce que je suis un passionné de pêche à la base. Et puis, suite à un licenciement plus ou moins économique, maquillé comme ça, on s'est dit, Vanessa a expliqué son parcours, on s'est dit on va travailler pour nous. Et on va essayer quelque chose qui nous plaît. On aimait les animaux. On savait qu'il y avait une formation. À l'époque, on était sur Châteauroux, pas loin, avec la Ferme des Ages, avec un lycée agricole, avec une spécialisation caprine. Donc, on a tenté. On s'est dit, on tente. Et toi, Vanessa, du coup, c'est quoi ton parcours ?

  • Vanessa

    J'ai fait un lycée agricole. Donc, j'ai un bac agricole. Et à sortie de ça, moi, j'ai travaillé un petit peu à droite à gauche dans le commerce. En attendant de savoir ce que j'avais envie de faire, quand Wilfried a été licencié, c'est vrai qu'on a pris la décision d'essayer de faire quelque chose pour nous avec les animaux. Et donc l'idée d'avoir des chèvres et de transformer notre produit et de le vendre nous a tout de suite intéressés. Moi, je suis partie à la ferme des âges pour faire le certificat de spécialisation.

  • Romain Le Gal

    D'accord. Et vous aviez dans l'idée de créer une ferme, de faire une reprise ?

  • Wilfried

    En fait, l'idée première à la base, c'est qu'on s'était dit, vu qu'on a été formé par la ferme des âges, on savait qu'il y avait une demande sur l'AOP Pouligny-Saint-Pierre. La stratégie, c'était déjà, dans un premier temps, d'aller travailler dans des exploitations pour se former davantage sur le terrain. Et deuxième chose, c'est soit on se disait... On trouve une exploitation sur l'AOP Pouligny ou soit le bord de mer. Parce qu'on n'était pas forcément attaché à une région et on savait que le bord de mer, déjà c'est sympa, qu'il y a une demande. Donc on a cherché dans ces deux zones-là et on s'est rendu compte que, pour nous, vu notre parcours, parce que c'est un parcours hors cadre familial, on a précisé qu'on n'a aucun de nos parents, aucun de nos ancêtres dans le milieu agricole et qu'on n'est pas issu de la région. Donc du coup, et pas d'apport, parce que quand on est jeune, on a très peu qu'on désapporte.

  • Romain Le Gal

    Et donc les difficultés, ça a été quoi dans l'installation ? Quand on est hors quête familiale, est-ce que c'est réalisable ? Aujourd'hui, on voit oui, mais qu'est-ce que vous conseilleriez ? Ça a été quoi vos plus grosses difficultés ?

  • Wilfried

    En fait, je pense que déjà, on a été super bien aiguillés par l'accueil de la chambre d'agriculture. Enfin honnêtement... On n'a pas de lobby avec la chambre, mais honnêtement, on a eu un super soutien. C'est toujours d'actualité de toute façon. Et après, en étant hors cadre, on ne connaît pas, on n'est pas issu du coin. Et le milieu agricole, c'est un milieu très fermé quand même. Il y a des codes, c'est ce que je dis souvent. Et donc, il a fallu trouver une ferme. C'est compliqué. Et après, quand on l'a trouvé, il faut faire ses preuves. Et ça, c'est quand même assez propre au milieu agricole. c'est que ça demande beaucoup de temps pour être qualifié de bon. Par son voisinage, c'est vraiment un travail de longue haleine.

  • Romain Le Gal

    Et toi Vanessa, pour toi, ça a été quoi les plus grosses difficultés ?

  • Vanessa

    La première difficulté, c'était de trouver une banque qui veuille bien nous accompagner, ça c'est sûr. Pas de moyens, pas d'argent. Pas de moyens, pas d'argent, pas de famille, pas de parents avec des terres déjà. Des fois c'est un plus pour la banque quand des enfants veulent s'installer avec des parents qui ont déjà des terres. La banque est un peu moins frileuse. Et après, la difficulté, je dirais, c'est peut-être plutôt, nous, on s'installait avec une ferme qui n'avait pas de surface pour faire nos fourrages. Donc, ça a été, au fil des années, d'arriver à récupérer de la surface pour être autonome. Pour être autonome au niveau des fourrages. Et ça, ça a mis plusieurs années.

  • Romain Le Gal

    Donc là, on est au cœur de la zone du pays de Brenne. Comment vous qualifieriez votre terroir ici ? Comment on peut le décrire pour ceux qui nous écoutent ? Parce que c'est quand même assez spécifique, on est sur la plus petite zone d'appellation d'origine protégée de France. C'est 22 communes sur un territoire qui est un peu particulier. Bon, pour un pêcheur, je vais pas donner des indices, pour un pêcheur, je pense qu'il y a des heureux.

  • Wilfried

    Je vais essayer d'être neutre du coup. Je vais faire honneur à la profession en indiquant que c'est vrai qu'on est sur un super beau territoire. On est dans le pays des milles étangs, sur un parc naturel régional. Mais à côté de ça, on est sur une production caprine où l'animal a des exigences avant l'éleveur. C'est produire des fourrages de qualité. Et les fourrages de qualité chez nous, c'est des légumineuses, donc du trèfle violet ou des luzernes. Enfin, surtout des luzernes. Et cette petite plante-là, elle aime les sols calcaires. Et les sols de brun, c'est des sols argileux. C'est pauvre. Donc il faut trouver les veines de terre calcaire pour pouvoir faire pousser de la luzerne

  • Romain Le Gal

    C'est quoi l'histoire de cette AOP ? C'est AOP depuis quelle année ?

  • Wilfried

    Alors ça a été reconnu en 72 C'est un travail de longue haleine fait par des personnes qui se sont battues pendant très longtemps au sein de la chambre d'agriculture Monsieur Dion en l'occurrence Et première AOP reconnue de France en Cap-Rhin Donc après on était dans 1972 ? 1972 c'est ça, AOC d'abord, AOP reconnue dans les années 2000 de mémoire. Alors avec, sur l'historique, sur les plus belles années de production, on est arrivé à 300 tonnes. Malheureusement aujourd'hui on est bien en dessous des 200 et c'est un combat qu'on mène au quotidien pour faire dorer notre belle image de... De fromage de plateau, le Pouligny Saint-Pierre, et l'idée c'est de ne jamais descendre en dessous des 200 tonnes parce qu'on est rémunéré au tonnage produit. Donc si on ne produit pas un minimum de tonnage, on ne fait pas rentrer beaucoup de sous et on n'a pas de moyens d'action, c'est aussi simple que ça. Pour faire parler du Pouligny. Pour faire parler au niveau com, au niveau salon, rémunérer notre animateur, enfin c'est tout bête, c'est quelque part un peu le système d'une entreprise, pas de sous, pas de moyens quoi.

  • Romain Le Gal

    Et cette filière aujourd'hui pour ses 200 tonnes, c'est combien de producteurs ?

  • Wilfried

    Donc là vous êtes un des producteurs fermiers de Pouligny-Saint-Pierre, c'est quoi la filière en termes de nombre d'acteurs ? En nombre d'acteurs, en tout on est une trentaine, on est 8 producteurs fermiers avec un qui fait partie affinage, et puis 22 producteurs laitiers et au niveau pourcentage on est en 73. tonnes produites par des fermiers et à peu près 110-120 tonnes produites par des laitiers. Donc en fait, plus ça va, plus l'écart se réduit entre les tonnages laitiers et les tonnages fermiers. Sur votre appellation, finalement, les fermiers se maintiennent et progressent peut-être avec des installations. On arrive à maintenir des volumes avec Alors sans parler de la production, on essaie de garder le rythme d'une installation par an, que ce soit laitier ou fermier. C'est quelque chose qu'on veut maintenir pour maintenir un peu de tonnage. Mais là où on a beaucoup de craintes, c'est la réduction des tonnages chez les laitiers. On maintient chez les fermiers et on réduit largement chez les laitiers.

  • Romain Le Gal

    Ok. Et du coup, Vanessa, toi, comment tu vois l'avenir ? du Pouligny-Saint-Pierre, comment tu ressens les choses ?

  • Vanessa

    L'avenir du Pouligny-Saint-Pierre, on a un petit peu de mal à le voir quand même sur le long terme. Parce que s'il n'y a pas quand même de futures installations, que ce soit en fermier ou en laitier d'ailleurs, et si les laitiers continuent de diminuer, pour continuer leur tonnage, malheureusement on se demande si dans 10 ans le Pouligny-Saint-Pierre sera toujours capable d'être là.

  • Romain Le Gal

    Vous voyez d'autres problématiques à part cette baisse de volume qui va arriver dans les années à venir sur votre appellation ?

  • Wilfried

    La problématique qu'on a, et là on soutient l'intégralité de la filière parce qu'on essaye d'être solidaires des 5 AOP, parce qu'on est dans une région centre où il y a 5 appellations de Caprine. Donc on essaye de travailler ensemble parce que la problématique qui nous pend au nez, enfin qui ne nous pend pas au nez, qui est présente, c'est la problématique sanitaire qui est de plus en plus importante, qui pèse de plus en plus chez nos producteurs laitiers, mais aussi fermiers, avec une pression constante. Donc on essaye de soulager et de soutenir nos industries, nos transformateurs au niveau local en proposant des solutions. Bon, mais... Tant qu'on aura cette pression sanitaire, ça va être difficile de maintenir des volumes chez nos laiteries. On le comprend largement. On le comprend largement. Et c'est là-dessus où il va falloir qu'on soit solidaires. Vraiment, tous ensemble. Qu'il n'y ait plus cet ancrage entre les fermiers et les laitiers. On est tous dans le même bateau. Tous ensemble ?

  • Romain Le Gal

    Bah ouais, on est toujours plus forts. Surtout sur des petites filières ? Bah je pense.

  • Wilfried

    Il n'y a pas de... de raison.

  • Romain Le Gal

    Non. Si vous deviez donner à ceux qui nous écoutent envie de déguster du poulini, comment vous feriez ?

  • Wilfried

    C'est un fromage de plateau avant tout, donc tout bêtement avec un bon vin, alors pas d'abus sur l'alcool c'est sûr, mais avec un bon rogui, blanc ou gris c'est top. Déguster comme ça avec un morceau de pain frais Et toi Vanessa ?

  • Vanessa

    Même si c'est un fromage de plateau, on peut quand même pas mal le cuisiner. Ce qui est pas mal, c'est de le découper en petits dés et puis avoir un petit ramequin avec de l'huile de noisette. Et de tremper le pouligny dedans et c'est vraiment pas mal, ça change un peu. L'huile de noisette, ça se marie bien. Après, un peu plus affiné, coupé en dés aussi, dans une salade de lentilles. C'est top aussi avec un peu... On peut faire plein de choses et se faire plaisir avec le pouligny. Quand il est un peu plus sec, mais vraiment sec, on peut le râper comme un parmesan sur des pâtes. Ça marche aussi super bien.

  • Romain Le Gal

    Tout à l'heure, on n'en avait pas parlé, mais pour reconnaître un pouligny fermier, il y a une petite étiquette dessus avec un petit carré vert. Tandis que ceux qui ne le savent pas, il y a un petit carré rouge pour un pouligny laitier. j'aurais une dernière question avant de clôturer cet échange. Est-ce que vous êtes prêts ?

  • Vanessa

    Allez !

  • Romain Le Gal

    C'est la question rituelle du podcast, mais je pense que vous savez ce que je vais vous demander. Je vois des regards vides. Quel est votre pizza préféré ?

  • Wilfried

    Quatre fromages, évidemment. C'est vrai, en plus. Je ne mens pas.

  • Vanessa

    Moi, ce n'est pas la quatre fromages.

  • Romain Le Gal

    Mais ce n'est pas grave, c'est l'Hawaïenne ?

  • Vanessa

    Non. surtout pas

  • Romain Le Gal

    Moi j'aime bien l'Hawaïenne

  • Vanessa

    Avec l'ananas c'est pas possible Non mais j'aime beaucoup les pizzas Avec du saumon Une salmone. Ta pizza préférée c'est une salmone Avec un bon fromage dessus quand même 4 fromages évidemment Le pouligny encore mieux Mais un gorgonzola C'est vrai que des fois, on se fait des pizzas où il y a un peu beaucoup de fromage. Non,

  • Wilfried

    il n'y en a jamais trop.

  • Romain Le Gal

    Il y a une pub qui disaient plus t'en mets, plus t'en as.

  • Wilfried

    C'est exactement ça.

  • Romain Le Gal

    Merci beaucoup de votre accueil. Merci à toi.

  • Wilfried

    Merci d'être venu. Et puis à très bientôt. A bientôt. Merci. Merci, salut.

  • Romain Le Gal

    Notre épisode touche déjà sa fin. Une très belle rencontre avec ce couple qui nous a montré qu'avec passion et détermination, Même sans venir du monde agricole, il est possible de reprendre ou créer une exploitation. Le Pouligny-Saint-Pierre, premier AOC Caprine reconnu en 1972, et qui est produite sur la plus petite zone AOP, a plus qu'aujourd'hui besoin de toit. Il s'en produisait plus de 300 tonnes il y a quelques années, nous sommes aujourd'hui à moins de 200 tonnes. Il est important de parler et soutenir nos plus petites appellations. Pour finir sur une note positive, Il est bon d'entendre qu'il y a quand même des projets et des installations de jeunes agriculteurs. On espère que cet épisode t'a plu. N'hésite pas à le partager ou à nous laisser des commentaires sur les réseaux. Et on te dit évidemment à très bientôt pour un nouvel épisode de Lait'Change. Salut !

Chapters

  • Introduction

    00:06

  • Présentation de l'exploitation avec Wilfried

    01:05

  • La salle de traite

    01:35

  • La chèvrerie

    02:21

  • Les obligations du cahier des charges du Pouligny-Saint-Pierre

    03:57

  • L'alimentation

    05:00

  • Les chevrettes

    06:14

  • La reproduction et la génétique

    07:38

  • La lactation longue

    09:16

  • Les vieilles chèvres

    10:35

  • La fromagerie avec Vanessa

    11:07

  • La fabrication du Pouligny-Saint-Pierre AOP

    11:39

  • Le séchoir

    13:40

  • Le hâloir

    14:46

  • L'affinage

    15:28

  • Qui êtes-vous Vanessa et Wilfried ?

    16:38

  • Un nouveau départ

    18:09

  • Les défis

    19:31

  • Les difficultés

    20:28

  • Le terroir du Pays de Brenne

    21:15

  • L'histoire de l'AOP Pouligny-Saint-Pierre

    22:18

  • La production

    22:57

  • La filière et ses acteurs

    23:44

  • L'avenir du Pouligny-Saint-Pierre

    25:04

  • Les autres problématiques

    25:46

  • Les conseils de dégustation

    27:00

  • L'identification du fromage

    28:00

  • La question rituel !

    28:20

  • Conclusion

    29:30

Description

Romain Le Gal et France Frais vous invitent dans le Pays de Brenne, aussi connu être le pays aux milles étangs.

À Martizay dans l'Indre (36) , Vanessa et Wilfried sont producteurs de Pouligny-Saint-Pierre, un fromage au lait de chèvre d'Appellation d'Origine Protégée. Grâce à leur presévérance et leur travail, leur AOP a obtenu la médaille d'or au Concours Général Agricole 2025.

Dans ce podcast, vous découvrirez :

- l'organisation de l'exploitation et de la filière de ce beau fromage,

- le parcours atypique de ce couple de passionnés,

- et les défis et enjeux auxquels ils sont confrontés.


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Transcription

  • Romain Le Gal

    Bienvenue sur Lait'Change, le podcast qui donne la parole aux actrices et aux acteurs de la filière laitière et fromagère. Je suis Romain Le Gal et avec France Frais, on est très heureux de te retrouver pour repartir à la découverte d'un terroir d'un producteur d'un fromage. Aujourd'hui, on te propose de parler d'un fromage de chèvre produit dans l'Indre, parfois méconnu, qui est AOP. depuis 1972. Reconnaissable à sa forme pyramidale, il est fabriqué dans le pays de Brenne, également nommé Pays aux milles étangs. On va s'intéresser, évidemment, au Pouligny-Saint-Pierre. Rendez-vous donc à la ferme de Bray, avec Wilfried, président du syndicat du Pouligny-Saint-Pierre, et Vanessa, qui, avec un parcours atypique, ont créé cette très belle fromagerie fermière. Cela sera l'occasion de parler de l'élevage de chèvres, de la production de ce fromage, ainsi que son histoire, mais également de la filière. C'est parti pour un nouvel épisode en immersion, je te souhaite une très bonne écoute ! Bonjour Wilfried !

  • Wilfried

    Salut Romain, ça va ? Ça va et toi ? Bah impeccable ! Comment ça ce matin ? Bah nickel comme d'hab ! Nickel comme d'hab ! On te retrouve là ce matin en salle de traite ? Oui ! Est-ce que tu peux nous présenter en quelques mots ton exploitation ? Ouais ! Ok, pas de problème ! Alors nous c'est une installation, c'est une création d'atelier sur Martizay, dans la zone AOP du Pouligny-Saint-Pierre. On a créé notre atelier avec Vanessa, 130 chèvres, en transformation sur la totalité de notre lait en AOP Pouligny-Saint-Pierre. Fermier ! Donc là, on est en salle de traite.

  • Romain Le Gal

    Comment ça se passe le matin ? A quelle heure vous démarrez la traite ? Alors en ce moment, il y a un peu moins de lait, donc on commence vers 7h. Il y en a pour une heure à traire les 130 chèvres. On a des chèvres qui vont être taris d'ici 10 jours.

  • Wilfried

    Donc ça va aller beaucoup plus vite. Comme on dit, on va être à moitié en vacances d'ici 10 jours.

  • Romain Le Gal

    Et c'est quoi comme chèvres ?

  • Wilfried

    C'est de la chèvre alpine. Alors notre cahier des charges nous permet d'avoir de la chèvre alpine, les marrons, les sanènes, les blanches. Et les poitevines aussi, il est un peu méconnu, les blanches et noires, les deux-sèvres, du marais-poitevin, etc. Bon bah c'est super, donc on va continuer de traire les chèvres et puis on va continuer la visite après. Pas de problème.

  • Romain Le Gal

    La traite est finie, on vient de basculer dans la chèvrerie et c'est quoi l'étape suivante à la fin de traite du coup Wilfried ? Fin de traite ?

  • Wilfried

    Comme je dis familièrement, on range nos animaux dans leur paillé et on distribue l'aliment. Alors là, c'est des concentrés, c'est des céréales produites sur l'exploitation en totalité. Donc du maïs, de l'orge et ce que j'appelle le concentré, le correcteur azoté, une petite part. Et puis évidemment et essentiellement, on travaille avec des fourrages de légumineuses, du trèfle violet. et des luzernes qui sont produits intégralement sur la ferme, dans un rayon de 5 km en fait. Tout est produit dans un rayon de 5 km autour de la ferme.

  • Romain Le Gal

    Tu as combien d'hectares du coup ?

  • Wilfried

    Alors on a 80 hectares à peu près. On a récupéré 60 hectares il y a deux ans. Aujourd'hui, on est bien content parce qu'on va être autonome sur l'alimentation pratiquement en totalité. Donc là, les chèvres sont sur air paillées.

  • Romain Le Gal

    Et après, quand on a préparé l'entretien, tu m'as expliqué aussi qu'elles ont potentiellement Un accès à un extérieur ?

  • Wilfried

    Oui, elles ont accès à des aires d'exercice. Déjà, c'est une obligation de la part de nos cahiers des charges au niveau bien-être animal. Et donc là, comme on voit sur le côté droit du bâtiment, c'est ouvert pratiquement toute l'année. Je ne vais pas dire toute l'année parce que l'hiver, ça fait froid. Mais à partir du mois d'avril, du printemps jusqu'à l'automne, septembre, octobre, c'est ouvert.

  • Romain Le Gal

    Elles ont accès à l'extérieur quand elles veulent. Au niveau du cahier des charges du Pouligny-Saint-Pierre, c'est quoi les obligations par rapport à ce parcours et en termes de place pour les chèvres ? Alors on a des surfaces d'air paillé minimum à respecter par animal dans les stabulations, dans les chèvreries. C'est 1m² 50 par animal. Et après les aires d'exercice à l'extérieur, on n'a pas de surface minimum par animal, ça peut être 500m². 1000, 1 hectare, 2, enfin tout dépend de l'implantation du bâtiment par rapport à ses surfaces autour des bâtiments. Nous ici sur site, sur la ferme de Bray, on a très peu de surface autour des bâtiments. Parce qu'en fait vu que c'est une installation de création, avec pas d'apport, on avait 25 ans quand on s'est installé, donc pas de sous en poche comme la majorité des gens, donc on a fait le choix de dire on trouve une petite ferme. Avec très peu de surface qui représente un faible coût d'investissement et on monte tout, c'était la solution économique et on trouvera des surfaces plus tard. C'était un peu notre pari. Et là, les chefs vont avoir l'aliment le matin et après, toute la journée, vont avoir à disposition... Ouais,

  • Wilfried

    alors on fait deux repas de ce qu'on appelle le concentré, les céréales. Moi, j'appelle jugulièrement... L'énergie. L'énergie, exactement, c'est ça. Et donc, deux repas par jour, matin et soir. Et puis après, on fait trois repas de fourrage. Donc au niveau fourrage, là, on voit pour nos chèvres laitières, celles en lactation, c'est du trèfle essentiellement, du trèfle violet.

  • Romain Le Gal

    Il y a une bonne odeur de fourrage dans les mains.

  • Wilfried

    Ça, c'est notre religion, le fourrage, ici. On base toutes nos productions laitières sur les qualités de fourrage parce que une chèvre c'est un ruminant, donc c'est pas un mangeur de céréales, c'est pas un cochon. Et donc le but du jeu c'est de lui faire ingérer un maximum de fourrage de qualité. Économiquement c'est plus rentable aussi pour l'éleveur. Puis elle va consommer des légumineuses. Moins va consommer de céréales, correcteur azoté, mieux c'est pour le porte-monnaie et surtout pour la santé de l'animal. Super,

  • Romain Le Gal

    on continue la visite, on va voir le renouvellement ?

  • Wilfried

    Ouais, avec plaisir.

  • Romain Le Gal

    C'est parti. Alors, on vient d'arriver dans le bâtiment avec les chevrettes.

  • Wilfried

    Ouais.

  • Romain Le Gal

    Alors du coup, explique-nous un petit peu...

  • Wilfried

    Ouais, pourquoi ? Alors le pourquoi du comment, déjà on a monté ce bâtiment chevrette. Historiquement, on avait un vieux bâtiment, une vieille stabulation avec la maison. plus bas et on avait des problèmes, on élevait nos chevrettes dans ce bâtiment là et on avait des problèmes sanitaires on va dire sur l'élevage de chevrettes. Les problématiques qu'on retrouve sur les chevrettes c'est le problème de pulmonaire souvent, la pastorelle qui se développe sur des bâtiments mal ventilés, froid, humide, enfin tout ce que tu veux donc du coup on a pris une grosse inondation parce qu'on a la rivière pas loin. En 2016, quand on a pris l'inondation, on a dit dans la nuit de l'inondation du vendredi à samedi, je m'en rappellerai toute ma vie, j'ai fait les plans du bâtiment chevrette de colère. On monte un bâtiment chevrette, j'ai fait les plans. Le lendemain matin, les devis qu'on avait envoyés pour avoir les devis du constructeur, du terrassier, la semaine d'après, on avait les accords bancaires. ça a été très très vite, j'ai agi un peu sur un coup de colère et puis là ça faisait des années que ça allait pas et il fallait qu'on réagisse et comment ça fonctionne du coup au niveau de la reproduction alors nous au niveau reproduction on a deux lots en fait dans le bâtiment, on a un lot de lactations longues, donc des chèvres ça fait deux ou trois ans qu'elles ont pas fait de petits donc on les traie en permanence alors c'est vraiment l'un des rares animaux à ne pas avoir besoin d'avoir un petit tous les ans pour faire du lait la chèvre. En fait, une fois qu'elle a fait son petit, si on a des fourrages de qualité, on peut la maintenir au niveau de lait. Alors derrière, il faut un certain niveau génétique aussi. Nous ici, sur le deuxième lot du coup de repros qui met bas à l'automne, on travaille la génétique avec de l'insémination artificielle. Il y a 30% de notre troupeau qui est inséminé. ce qui permet d'augmenter notre qualité de lait par les taux, la quantité de lait. La morphologie mammaire, parce que la morphologie mammaire, ça a une incidence des mauvaises mamelles mal faites. C'est des mamelles qui se traînent mal, qui traînent dans les airs paillés. Donc, sanitairement, ça peut ramener des problèmes. Tout un travail génétique sur cette partie, la conformation des mamelles. Nous, ça fait 8 ans qu'on... Ça fait 8 ans qu'on travaille ça. Et surtout la morphologie mammaire. Et ce qui est rigolo, c'est que c'est le profil qui va le plus vite. Quand on met un critère morphologique sur une chèvre, du jour au lendemain, sur la chevrette qu'elle va faire, ça se voit tout de suite.

  • Romain Le Gal

    C'est intéressant, du coup tu travailles en deux lots. Un lot en lactation longue. Donc tu respectes toujours le cycle naturel de la chèvre puisque tu es sur une mise bas naturelle. Donc tu ne désaisonnes pas avec de la lumière.

  • Wilfried

    On fait un désaisonnement juste avec de la lumière. Vous faites quand même un désaisonnement sur un lot ? Ça n'impacte pas les lactations longues. Ça s'en fiche.

  • Romain Le Gal

    Elle s'en fiche ? Oui,

  • Wilfried

    elle s'en fiche. Il n'y a pas d'incidence du tout. Après, pour désaisonner, comme on dit, on fait juste un programme lumineux où on éclaire plus longtemps les bâtiments l'hiver pour leur faire croire que c'est les jours d'été. Et ça fonctionne très bien. Au début de notre installation, on avait deux lots de mise bas. On avait un lot en saison et un lot en désaisonné. Et très vite, ça a pu fonctionner. Parce qu'avec le programme lumineux, par contre, celles qui étaient en saison, elles étaient toutes paumées et vice-versa. Donc on a eu des échecs à la reproduction, parce que c'était le bordel dans le bâtiment, clairement. On a arrêté et on a lissé avec nos lactations, en faisant des lactations longues. plus souvent du lait toute l'année.

  • Romain Le Gal

    C'est combien de lactations ? Alors c'est compliqué chez toi, on va parler en années du coup, parce qu'avec 6 et sur les lactations longues... Ouais,

  • Wilfried

    ouais. 5-6 ans on est dedans.

  • Romain Le Gal

    D'accord.

  • Wilfried

    Donc on a quand même une carrière de chèvre assez longue. Ouais, ouais. Après il y a toujours les exceptions, des chèvres qui durent 8-10 ans.

  • Romain Le Gal

    On en a croisé une ce matin.

  • Wilfried

    Ouais, on en a croisé une, mais elle est en fin de carrière. Alors ici en plus on a un peu de mal à la mettre... Dans le camion, aller faire partir et donc derrière, dans l'ancien stabilis où on élevait nos chevrettes, on en a fait une maison de retraite.

  • Romain Le Gal

    D'accord, donc vous avez un Ehpad de chevrettes.

  • Wilfried

    Exactement, c'est exactement ça.

  • Romain Le Gal

    Ok, bon ben c'est cool. On continue la visite ?

  • Wilfried

    On continue.

  • Romain Le Gal

    Alors j'ai continué mon périple dans la ferme et là je viens de rejoindre Vanessa. Bonjour Vanessa.

  • Vanessa

    Bonjour.

  • Romain Le Gal

    Donc Vanessa qui est ce matin en fromagerie. Et il y a Wilfried qui fait ce moque de Vanessa, ce qui nous a suivis aussi.

  • Vanessa

    C'est ça.

  • Romain Le Gal

    Vanessa, du coup, qui es-tu ?

  • Vanessa

    Vanessa, je suis productrice de Pouligny-Saint-Pierre, à Aopé, éleveuse de chèvres.

  • Romain Le Gal

    La compagne de Wilfried. Et donc là, on est en fromagerie et tu produis du Pouligny-Saint-Pierre. Est-ce que tu peux nous expliquer un peu comment ça fonctionne, la fabrication de Pouligny ?

  • Vanessa

    La fabrication de Pouligny... On part du début ? Bah oui,

  • Romain Le Gal

    en partant du lait ! On a été à la traite tout à l'heure.

  • Vanessa

    Oui, et bah du coup on récupère le lait de deux traites. Donc par exemple là ce matin, il y a le lait d'hier soir et le lait de ce matin qui est mélangé, qu'on a mis dans les bacs dans la salle de caillage et qu'on va pas tarder à emprésurer. On va mettre la présure dans le lait et ça va cailler pendant 24 heures. Et demain matin, après, on va mouler ce caillé.

  • Romain Le Gal

    Donc là, le lait est mis dans des bassines finalement. Oui,

  • Vanessa

    c'est ça.

  • Romain Le Gal

    Où vous mettez la présure et un temps de coagulation, donc le passage de l'état liquide à l'état solide en 24 heures.

  • Vanessa

    Oui.

  • Romain Le Gal

    Donc on est sur un caillé lactique jour 1 et ensuite ?

  • Vanessa

    Et ensuite, le lendemain, il va être moulé du coup.

  • Romain Le Gal

    Oui.

  • Vanessa

    Donc dans les moules de Pouligny-Saint-Pierre. Et toute la journée, il va s'égoutter.

  • Romain Le Gal

    D'accord. Et comment tu fais le moulage ? Un moulage à la louche. Oui.

  • Vanessa

    Voilà. Et on fait plusieurs passages dans les blocs moules avec notre louche. Ça va nous faire gagner un petit peu de temps comme ça d'égouttage pour le moulage. Ça fait ressortir vraiment le lacto.

  • Romain Le Gal

    Le moulage. Ensuite, tu vas avoir des retournements ?

  • Vanessa

    Le lendemain.

  • Romain Le Gal

    Le lendemain. Donc là, on est en J3 finalement. Voilà.

  • Vanessa

    Au jour 3, on va retourner les blocs moules. Le matin et le soir, on va les remettre dans l'autre sens.

  • Romain Le Gal

    Et rebasculer dans l'autre sens.

  • Vanessa

    Et voilà. Et ensuite ? Et ensuite, le quatrième jour, ils vont être démoulés pour être salés. Et ils vont encore se ressuyer pendant 24 heures. Pendant 24 heures. Donc là, on est à jour 4. Après, en présurage. En fait, dans la salle de fabrication, on a trois jours de fabrication.

  • Romain Le Gal

    D'accord. Et après, les fromages, ils vont où ?

  • Vanessa

    Ils vont dans le séchoir.

  • Romain Le Gal

    Donc le séchoir où est Wilfried ? Alors là, on est en train de se déplacer dans le séchoir où Wilfried est en train de soigner et de retourner les poulinis. Donc les pouligny, la particularité, c'est que vous les couchez après ?

  • Vanessa

    Oui, c'est ça. Quand ils rentrent dans le séchoir, le premier jour, on va les coucher pour favoriser justement encore mieux le séchage et l'affinage. Et la croûte qui va venir dessus, que ça soit un peu plus uniforme. Après, le deuxième jour, on va les retourner dans l'autre sens. On leur fait faire un demi-tour, voilà, quand ils sont couchés. Et le troisième jour, on va les remettre debout.

  • Romain Le Gal

    On les remet debout. Et ils restent combien de temps dans cette salle de séchage ?

  • Vanessa

    Quatre jours. Et le cinquième jour, on les emmène dans le halloir.

  • Romain Le Gal

    D'accord. On sent une ambiance assez ventilée.

  • Vanessa

    Ça souffle un peu plus. Le but, c'est quand même de les sécher, de continuer à ressuyer un petit peu les fromages.

  • Romain Le Gal

    On est à quelle température et quelle hygrométrie ?

  • Vanessa

    En général, il y a à peu près 15 degrés. On est autour de 70% d'hygrométrie.

  • Romain Le Gal

    Cool. Je te suis en cave pour que tu nous expliques la suite. Alors, on rentre dans une autre cave. Et là, c'est le hâloir. Et le hâloir. Et donc là, on voit les pouligny, il fait un petit peu plus frais ?

  • Vanessa

    On est encore un petit peu plus frais, on est autour de 12 degrés, 13 degrés. Et on a un peu plus d'hygrométrie en général, on est plutôt à 90%.

  • Romain Le Gal

    Donc là, les pouligny, ils restent toujours droits sur la suite de l'affinage ?

  • Vanessa

    Oui, après on les laisse comme ça, ils touchent plus.

  • Romain Le Gal

    Sur les grilles, et c'est quoi le minimum d'affinage pour un poulini ?

  • Vanessa

    C'est 11 jours.

  • Romain Le Gal

    C'est 11 jours.

  • Vanessa

    11 jours à partir du jour d'emprésurage.

  • Romain Le Gal

    Et ça commence à bleuter à partir de combien de jours d'affinage ?

  • Vanessa

    Alors, nous, normalement, on est en couverture blanche.

  • Romain Le Gal

    D'accord.

  • Vanessa

    Donc on n'est pas censé avoir du bleu.

  • Romain Le Gal

    Vous n'êtes pas censé bleuter. Voilà,

  • Vanessa

    c'est ça. Après, on a des collègues qui, eux, sont vraiment bleus. Donc ce n'est pas tout à fait la même couverture. Ils ont un pénicillium, le pénicillium album, qui vient se mettre dessus, qui est vraiment plus épais. Et là, ça, c'est un autre bleu.

  • Romain Le Gal

    Donc c'est une autre conduite d'affinage ?

  • Vanessa

    C'est une autre conduite. C'est vraiment après dans l'ambiance de la fromagerie. Quelque chose qui est recherché. Ça donne un autre goût au pouligny. On va avoir des notes plutôt champignons, sous-bois. C'est assez différent d'une autre.

  • Romain Le Gal

    Et le vôtre, il va avoir quoi du coup ?

  • Vanessa

    On ressent plus le côté caprin, quand même un peu beurré, acidulé. Un peu lactique. Un peu d'acidité. C'est ça. Et le bleu, c'est vraiment le côté, pour le coup, avec la croûte champignon sous bois qui va ressortir plus.

  • Romain Le Gal

    Et c'est vous qui aviez fait le choix de ce type d'affinage ?

  • Vanessa

    Oui, on avait choisi.

  • Romain Le Gal

    C'était vraiment une volonté d'être plus sur un affinage blanc ?

  • Vanessa

    Oui.

  • Romain Le Gal

    Bon, super. On va continuer l'échange après.

  • Vanessa

    Ça marche.

  • Romain Le Gal

    On a fait le tour de votre exploitation. Je me retrouve avec vous deux, Wilfried et Vanessa. Et puis, je vous propose de continuer cet échange. Déjà, vous vous êtes présenté brièvement, mais qui êtes-vous ? Comment êtes-vous arrivé là ?

  • Wilfried

    Eh bien, en fait, ça fait maintenant... maintenant presque 21 ans qu'on est ensemble avec Vanessa. Moi, je suis issu du commerce. J'ai fait un DUT technique de commercialisation à Issouda, donc pas très loin d'ici, mais je suis natif de Sologne. J'ai travaillé dans la vente d'articles de pêche et de loisirs parce que je suis un passionné de pêche à la base. Et puis, suite à un licenciement plus ou moins économique, maquillé comme ça, on s'est dit, Vanessa a expliqué son parcours, on s'est dit on va travailler pour nous. Et on va essayer quelque chose qui nous plaît. On aimait les animaux. On savait qu'il y avait une formation. À l'époque, on était sur Châteauroux, pas loin, avec la Ferme des Ages, avec un lycée agricole, avec une spécialisation caprine. Donc, on a tenté. On s'est dit, on tente. Et toi, Vanessa, du coup, c'est quoi ton parcours ?

  • Vanessa

    J'ai fait un lycée agricole. Donc, j'ai un bac agricole. Et à sortie de ça, moi, j'ai travaillé un petit peu à droite à gauche dans le commerce. En attendant de savoir ce que j'avais envie de faire, quand Wilfried a été licencié, c'est vrai qu'on a pris la décision d'essayer de faire quelque chose pour nous avec les animaux. Et donc l'idée d'avoir des chèvres et de transformer notre produit et de le vendre nous a tout de suite intéressés. Moi, je suis partie à la ferme des âges pour faire le certificat de spécialisation.

  • Romain Le Gal

    D'accord. Et vous aviez dans l'idée de créer une ferme, de faire une reprise ?

  • Wilfried

    En fait, l'idée première à la base, c'est qu'on s'était dit, vu qu'on a été formé par la ferme des âges, on savait qu'il y avait une demande sur l'AOP Pouligny-Saint-Pierre. La stratégie, c'était déjà, dans un premier temps, d'aller travailler dans des exploitations pour se former davantage sur le terrain. Et deuxième chose, c'est soit on se disait... On trouve une exploitation sur l'AOP Pouligny ou soit le bord de mer. Parce qu'on n'était pas forcément attaché à une région et on savait que le bord de mer, déjà c'est sympa, qu'il y a une demande. Donc on a cherché dans ces deux zones-là et on s'est rendu compte que, pour nous, vu notre parcours, parce que c'est un parcours hors cadre familial, on a précisé qu'on n'a aucun de nos parents, aucun de nos ancêtres dans le milieu agricole et qu'on n'est pas issu de la région. Donc du coup, et pas d'apport, parce que quand on est jeune, on a très peu qu'on désapporte.

  • Romain Le Gal

    Et donc les difficultés, ça a été quoi dans l'installation ? Quand on est hors quête familiale, est-ce que c'est réalisable ? Aujourd'hui, on voit oui, mais qu'est-ce que vous conseilleriez ? Ça a été quoi vos plus grosses difficultés ?

  • Wilfried

    En fait, je pense que déjà, on a été super bien aiguillés par l'accueil de la chambre d'agriculture. Enfin honnêtement... On n'a pas de lobby avec la chambre, mais honnêtement, on a eu un super soutien. C'est toujours d'actualité de toute façon. Et après, en étant hors cadre, on ne connaît pas, on n'est pas issu du coin. Et le milieu agricole, c'est un milieu très fermé quand même. Il y a des codes, c'est ce que je dis souvent. Et donc, il a fallu trouver une ferme. C'est compliqué. Et après, quand on l'a trouvé, il faut faire ses preuves. Et ça, c'est quand même assez propre au milieu agricole. c'est que ça demande beaucoup de temps pour être qualifié de bon. Par son voisinage, c'est vraiment un travail de longue haleine.

  • Romain Le Gal

    Et toi Vanessa, pour toi, ça a été quoi les plus grosses difficultés ?

  • Vanessa

    La première difficulté, c'était de trouver une banque qui veuille bien nous accompagner, ça c'est sûr. Pas de moyens, pas d'argent. Pas de moyens, pas d'argent, pas de famille, pas de parents avec des terres déjà. Des fois c'est un plus pour la banque quand des enfants veulent s'installer avec des parents qui ont déjà des terres. La banque est un peu moins frileuse. Et après, la difficulté, je dirais, c'est peut-être plutôt, nous, on s'installait avec une ferme qui n'avait pas de surface pour faire nos fourrages. Donc, ça a été, au fil des années, d'arriver à récupérer de la surface pour être autonome. Pour être autonome au niveau des fourrages. Et ça, ça a mis plusieurs années.

  • Romain Le Gal

    Donc là, on est au cœur de la zone du pays de Brenne. Comment vous qualifieriez votre terroir ici ? Comment on peut le décrire pour ceux qui nous écoutent ? Parce que c'est quand même assez spécifique, on est sur la plus petite zone d'appellation d'origine protégée de France. C'est 22 communes sur un territoire qui est un peu particulier. Bon, pour un pêcheur, je vais pas donner des indices, pour un pêcheur, je pense qu'il y a des heureux.

  • Wilfried

    Je vais essayer d'être neutre du coup. Je vais faire honneur à la profession en indiquant que c'est vrai qu'on est sur un super beau territoire. On est dans le pays des milles étangs, sur un parc naturel régional. Mais à côté de ça, on est sur une production caprine où l'animal a des exigences avant l'éleveur. C'est produire des fourrages de qualité. Et les fourrages de qualité chez nous, c'est des légumineuses, donc du trèfle violet ou des luzernes. Enfin, surtout des luzernes. Et cette petite plante-là, elle aime les sols calcaires. Et les sols de brun, c'est des sols argileux. C'est pauvre. Donc il faut trouver les veines de terre calcaire pour pouvoir faire pousser de la luzerne

  • Romain Le Gal

    C'est quoi l'histoire de cette AOP ? C'est AOP depuis quelle année ?

  • Wilfried

    Alors ça a été reconnu en 72 C'est un travail de longue haleine fait par des personnes qui se sont battues pendant très longtemps au sein de la chambre d'agriculture Monsieur Dion en l'occurrence Et première AOP reconnue de France en Cap-Rhin Donc après on était dans 1972 ? 1972 c'est ça, AOC d'abord, AOP reconnue dans les années 2000 de mémoire. Alors avec, sur l'historique, sur les plus belles années de production, on est arrivé à 300 tonnes. Malheureusement aujourd'hui on est bien en dessous des 200 et c'est un combat qu'on mène au quotidien pour faire dorer notre belle image de... De fromage de plateau, le Pouligny Saint-Pierre, et l'idée c'est de ne jamais descendre en dessous des 200 tonnes parce qu'on est rémunéré au tonnage produit. Donc si on ne produit pas un minimum de tonnage, on ne fait pas rentrer beaucoup de sous et on n'a pas de moyens d'action, c'est aussi simple que ça. Pour faire parler du Pouligny. Pour faire parler au niveau com, au niveau salon, rémunérer notre animateur, enfin c'est tout bête, c'est quelque part un peu le système d'une entreprise, pas de sous, pas de moyens quoi.

  • Romain Le Gal

    Et cette filière aujourd'hui pour ses 200 tonnes, c'est combien de producteurs ?

  • Wilfried

    Donc là vous êtes un des producteurs fermiers de Pouligny-Saint-Pierre, c'est quoi la filière en termes de nombre d'acteurs ? En nombre d'acteurs, en tout on est une trentaine, on est 8 producteurs fermiers avec un qui fait partie affinage, et puis 22 producteurs laitiers et au niveau pourcentage on est en 73. tonnes produites par des fermiers et à peu près 110-120 tonnes produites par des laitiers. Donc en fait, plus ça va, plus l'écart se réduit entre les tonnages laitiers et les tonnages fermiers. Sur votre appellation, finalement, les fermiers se maintiennent et progressent peut-être avec des installations. On arrive à maintenir des volumes avec Alors sans parler de la production, on essaie de garder le rythme d'une installation par an, que ce soit laitier ou fermier. C'est quelque chose qu'on veut maintenir pour maintenir un peu de tonnage. Mais là où on a beaucoup de craintes, c'est la réduction des tonnages chez les laitiers. On maintient chez les fermiers et on réduit largement chez les laitiers.

  • Romain Le Gal

    Ok. Et du coup, Vanessa, toi, comment tu vois l'avenir ? du Pouligny-Saint-Pierre, comment tu ressens les choses ?

  • Vanessa

    L'avenir du Pouligny-Saint-Pierre, on a un petit peu de mal à le voir quand même sur le long terme. Parce que s'il n'y a pas quand même de futures installations, que ce soit en fermier ou en laitier d'ailleurs, et si les laitiers continuent de diminuer, pour continuer leur tonnage, malheureusement on se demande si dans 10 ans le Pouligny-Saint-Pierre sera toujours capable d'être là.

  • Romain Le Gal

    Vous voyez d'autres problématiques à part cette baisse de volume qui va arriver dans les années à venir sur votre appellation ?

  • Wilfried

    La problématique qu'on a, et là on soutient l'intégralité de la filière parce qu'on essaye d'être solidaires des 5 AOP, parce qu'on est dans une région centre où il y a 5 appellations de Caprine. Donc on essaye de travailler ensemble parce que la problématique qui nous pend au nez, enfin qui ne nous pend pas au nez, qui est présente, c'est la problématique sanitaire qui est de plus en plus importante, qui pèse de plus en plus chez nos producteurs laitiers, mais aussi fermiers, avec une pression constante. Donc on essaye de soulager et de soutenir nos industries, nos transformateurs au niveau local en proposant des solutions. Bon, mais... Tant qu'on aura cette pression sanitaire, ça va être difficile de maintenir des volumes chez nos laiteries. On le comprend largement. On le comprend largement. Et c'est là-dessus où il va falloir qu'on soit solidaires. Vraiment, tous ensemble. Qu'il n'y ait plus cet ancrage entre les fermiers et les laitiers. On est tous dans le même bateau. Tous ensemble ?

  • Romain Le Gal

    Bah ouais, on est toujours plus forts. Surtout sur des petites filières ? Bah je pense.

  • Wilfried

    Il n'y a pas de... de raison.

  • Romain Le Gal

    Non. Si vous deviez donner à ceux qui nous écoutent envie de déguster du poulini, comment vous feriez ?

  • Wilfried

    C'est un fromage de plateau avant tout, donc tout bêtement avec un bon vin, alors pas d'abus sur l'alcool c'est sûr, mais avec un bon rogui, blanc ou gris c'est top. Déguster comme ça avec un morceau de pain frais Et toi Vanessa ?

  • Vanessa

    Même si c'est un fromage de plateau, on peut quand même pas mal le cuisiner. Ce qui est pas mal, c'est de le découper en petits dés et puis avoir un petit ramequin avec de l'huile de noisette. Et de tremper le pouligny dedans et c'est vraiment pas mal, ça change un peu. L'huile de noisette, ça se marie bien. Après, un peu plus affiné, coupé en dés aussi, dans une salade de lentilles. C'est top aussi avec un peu... On peut faire plein de choses et se faire plaisir avec le pouligny. Quand il est un peu plus sec, mais vraiment sec, on peut le râper comme un parmesan sur des pâtes. Ça marche aussi super bien.

  • Romain Le Gal

    Tout à l'heure, on n'en avait pas parlé, mais pour reconnaître un pouligny fermier, il y a une petite étiquette dessus avec un petit carré vert. Tandis que ceux qui ne le savent pas, il y a un petit carré rouge pour un pouligny laitier. j'aurais une dernière question avant de clôturer cet échange. Est-ce que vous êtes prêts ?

  • Vanessa

    Allez !

  • Romain Le Gal

    C'est la question rituelle du podcast, mais je pense que vous savez ce que je vais vous demander. Je vois des regards vides. Quel est votre pizza préféré ?

  • Wilfried

    Quatre fromages, évidemment. C'est vrai, en plus. Je ne mens pas.

  • Vanessa

    Moi, ce n'est pas la quatre fromages.

  • Romain Le Gal

    Mais ce n'est pas grave, c'est l'Hawaïenne ?

  • Vanessa

    Non. surtout pas

  • Romain Le Gal

    Moi j'aime bien l'Hawaïenne

  • Vanessa

    Avec l'ananas c'est pas possible Non mais j'aime beaucoup les pizzas Avec du saumon Une salmone. Ta pizza préférée c'est une salmone Avec un bon fromage dessus quand même 4 fromages évidemment Le pouligny encore mieux Mais un gorgonzola C'est vrai que des fois, on se fait des pizzas où il y a un peu beaucoup de fromage. Non,

  • Wilfried

    il n'y en a jamais trop.

  • Romain Le Gal

    Il y a une pub qui disaient plus t'en mets, plus t'en as.

  • Wilfried

    C'est exactement ça.

  • Romain Le Gal

    Merci beaucoup de votre accueil. Merci à toi.

  • Wilfried

    Merci d'être venu. Et puis à très bientôt. A bientôt. Merci. Merci, salut.

  • Romain Le Gal

    Notre épisode touche déjà sa fin. Une très belle rencontre avec ce couple qui nous a montré qu'avec passion et détermination, Même sans venir du monde agricole, il est possible de reprendre ou créer une exploitation. Le Pouligny-Saint-Pierre, premier AOC Caprine reconnu en 1972, et qui est produite sur la plus petite zone AOP, a plus qu'aujourd'hui besoin de toit. Il s'en produisait plus de 300 tonnes il y a quelques années, nous sommes aujourd'hui à moins de 200 tonnes. Il est important de parler et soutenir nos plus petites appellations. Pour finir sur une note positive, Il est bon d'entendre qu'il y a quand même des projets et des installations de jeunes agriculteurs. On espère que cet épisode t'a plu. N'hésite pas à le partager ou à nous laisser des commentaires sur les réseaux. Et on te dit évidemment à très bientôt pour un nouvel épisode de Lait'Change. Salut !

Chapters

  • Introduction

    00:06

  • Présentation de l'exploitation avec Wilfried

    01:05

  • La salle de traite

    01:35

  • La chèvrerie

    02:21

  • Les obligations du cahier des charges du Pouligny-Saint-Pierre

    03:57

  • L'alimentation

    05:00

  • Les chevrettes

    06:14

  • La reproduction et la génétique

    07:38

  • La lactation longue

    09:16

  • Les vieilles chèvres

    10:35

  • La fromagerie avec Vanessa

    11:07

  • La fabrication du Pouligny-Saint-Pierre AOP

    11:39

  • Le séchoir

    13:40

  • Le hâloir

    14:46

  • L'affinage

    15:28

  • Qui êtes-vous Vanessa et Wilfried ?

    16:38

  • Un nouveau départ

    18:09

  • Les défis

    19:31

  • Les difficultés

    20:28

  • Le terroir du Pays de Brenne

    21:15

  • L'histoire de l'AOP Pouligny-Saint-Pierre

    22:18

  • La production

    22:57

  • La filière et ses acteurs

    23:44

  • L'avenir du Pouligny-Saint-Pierre

    25:04

  • Les autres problématiques

    25:46

  • Les conseils de dégustation

    27:00

  • L'identification du fromage

    28:00

  • La question rituel !

    28:20

  • Conclusion

    29:30

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