Speaker #0Souviens-toi, le 17 août 2023 sortait le premier épisode du Dos de la Cuillère et déjà, je me plaignais que l'ANSES n'avait jamais publié de recommandations pour les personnes végétariennes. Eh bien, en ce glorieux jour du 13 mars 2025, mon vœu et celui de nombreuses autres personnes fut enfin exaucé puisque l'Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l'Alimentation de l'Environnement et du Travail a sorti ses toutes premières recommandations concernant... les alimentations végétariennes. Et elle nous a même gratifié non pas d'une, mais de deux expertises. Je t'en dis plus dans cet épisode. Bonjour, bienvenue dans le dos de la cuillère. Je suis Magali, diététicienne nutritionniste spécialisée dans les alimentations végétales. Ce podcast a pour but de partager mes expériences, mes rencontres et mes réflexions sur la diététique et le véganisme. Je te souhaite une bonne écoute ! Alors pourquoi c'est une bonne nouvelle ? Comme je te le disais, cela faisait un moment qu'on les attendait, le groupe de travail ayant été saisi en 2019. Et qu'est-ce que ça change pour les VG ? ça permet d'avoir des lignes directrices sur ce qu'est en France une alimentation végétale équilibrée et bonne pour la santé, pour les adultes. Et ces lignes directrices, ces nouveaux repères, pourront enfin être consultés par le grand public, voire même enseignés dans les formations des professionnels de santé, ou même, pourquoi pas, les professionnels de la restauration. C'est une vraie marque de reconnaissance pour ces alimentations qui, dans notre pays, sont généralement mal connues, voire même carrément mal vues. Donc, vraiment. Il y a de quoi se réjouir. Mais c'était sans compter une autre annonce de l'ANSES, onze jours plus tard, sur les isoflavones contenus dans le soja, et qui a complètement éclipsé cette première bonne nouvelle. J'ai d'ailleurs reçu beaucoup de messages sur ce sujet, et je sais que vous êtes nombreuses et nombreux à souhaiter un épisode là-dessus. Ça viendra. Mais pour en avoir discuté avec beaucoup de mes collègues, il me semblait important de ne pas jouer le jeu du sensationnalisme en me jetant à chaud sur le sujet. Parce que pour être tout à fait honnête, ma première réaction était plus énervée que constructive. Et je préfère privilégier une information qui me paraît beaucoup plus importante, et il s'agit donc de ces nouvelles recommandations. Quoi qu'il en soit, si tu es pressé et si tu ne l'as pas déjà fait, je t'invite fortement à lire l'analyse critique de l'avis de l'ANSES sur les isoflavones qui a été publié par Ausha et dont je mettrai le lien dans le descriptif. Mais revenons-en à nos recommandations. Comme je te le disais, il y a deux expertises qui ont été publiées. La première porte sur une revue systématique de la littérature relative au régime végétarien et leurs répercussions sur la santé et le statut nutritionnel. La deuxième porte sur l'établissement de repères alimentaires destinés aux personnes suivant un régime d'exclusion de toute ou partie des aliments d'origine animale. Le premier rapport est donc un résumé, une synthèse des dernières études publié sur le sujet et qui permet donc d'établir des liens, ou pas, entre la santé et les alimentations végées. On y retrouve le détail de la méthodologie qui a été utilisée par le groupe d'experts et d'expertes. Et déjà, rien que ça, si tu as un peu de temps et que le sujet t'intéresse, c'est hyper instructif pour comprendre comment ce groupe de travail s'y est pris pour faire son analyse. Et en gros, on retrouve quand même des principes de prudence habituels. Lorsqu'on parle d'épidémiologie nutritionnelle, qui est l'étude des effets de l'alimentation sur les risques de maladies, et donc en particulier sur les populations végées qui sont peu nombreuses et culturellement assez différentes. Donc c'est difficile de lier de manière sûre une cause à une conséquence quand on parle de nutrition, parce qu'il y a plein d'autres facteurs qui entrent en jeu et qui peuvent influencer les résultats. Donc plus que jamais, un lien de corrélation n'est pas forcément un lien de causalité. J'ai jamais dit que c'était logique. Ah non, vous avez bien fait. Et c'est pour ça que c'est super intéressant la nutrition et qu'il y a toujours de nouvelles découvertes. Et c'est aussi pour ça qu'il faut rester prudente et prudent quand on voit passer des informations nutritionnelles, surtout si celles-ci te sont balancées sans aucune nuance ni contexte. Donc, les conclusions du groupe de travail sont, avec un niveau de preuve dit modéré, que le régime végétarien serait associé à un risque plus faible de développer un diabète de type 2 comparé à un régime non végétarien. Et avec un niveau de preuve dit faible, que les VG, comparés aux non-VG, auraient un risque plus faible de développer certaines pathologies comme les cardiopathies ischémiques, les troubles ovulatoires, certains cancers de la prostate, de l'estomac et du sang, et certaines maladies ophtalmologiques et gastro-intestinales. En revanche, il présenterait un risque plus élevé de fractures osseuses et d'hypospadias, qui est une malformation congénitale de l'urètre. Enfin, concernant le statut nutritionnel des populations, les études épidémiologiques montrent que les végétariens et végétariennes ont un statut nutritionnel en fer, en iode, en vitamine B12 et D, ainsi qu'un équilibre phosphocalcique moins favorable que les non-végétariens et non-végétariennes. Et pour les végétaliens ? et végétalienne, on observe en plus un statut nutritionnel moins favorable en vitamine B2. Que peut-on faire pour que ça s'arrange ? Alors pour ce qui est du fer, de l'iode et de la vitamine B12, je t'invite à écouter ou réécouter les épisodes que j'ai déjà fait sur ces sujets. Concernant la vitamine B2, elle est contenue dans de nombreux végétaux comme les épinards, les salades, poivrons rouges, avocats, etc. À consommer de préférence cru, mais on en retrouve aussi dans les oléagineux. Et concernant les autres points de vigilance comme la vitamine D et le calcium, j'ai prévu de faire un épisode consacré à ce sujet dans cette saison. Mais on dirait qu'il manque quelque chose. Ah bah oui, mais et les sacro-saintes protéines alors ? Eh bien, le groupe de travail a retenu trois articles reposant sur des études transversales datant de 1989, 1999 et 2008, portant entre autres sur la relation entre un régime végétarien et le statut en protéines. Et le groupe de travail a conclu qu'il n'y a pas de différence observée dans les concentrations en protéines totales entre les régimes végés ou qui incluent de la chair animale. Donc, je répète pour les gens du fond là-bas, les protéines ne sont pas un problème quand on a une alimentation végétarienne ou végétalienne. Comme je le disais en introduction, le deuxième rapport de l'ANSES porte sur les recommandations nutritionnelles, des repères alimentaires pour être en bonne santé quand on est végé. L'ANSES propose ses recommandations pour deux types d'alimentation. D'une part, lacto-ovo-végétarienne, c'est-à-dire sans chair animale de type viande et poisson, mais avec consommation de produits laitiers, oeufs et miel. Et d'autre part, végétalienne, c'est-à-dire 100% végétale. Donc, pour les personnes qui ont une alimentation lacto-ovo-végétarienne, l'ANSES recommande de consommer chaque jour 700 g de fruits et légumes, 75 g de légumes secs cuits, 170 g de féculents et pains dont au moins 120 g complets et sources de fibres, 65 g d'oléagineux, pistaches, amandes, noisettes, etc. 35 g d'huile, dont au moins 25 g d'huile riche en acide alpha-linolénique, huile de colza, huile de noix, huile de soja et huile de lin. 450 ml de lait ou zéro si on souhaite limiter cette consommation. 30 g d'œufs, 50 g de fromage, 350 g d'analogues de produits laitiers frais type yaourt et lait végétaux, crème, dessert, etc. 100 g d'analogues de viande, vecteurs de protéines comme le sétan, tofu, tempeh, protéines de soja texturées, etc. Et 10 g de levure de bière et autres, type germes de blé, marmite, etc. Et un peu de sucre en poudre ? Non ! Maintenant, pour les personnes qui ont une alimentation végétalienne, l'ANSES recommande la consommation de 700 g de fruits et légumes, 120 g de légumes secs, 250 g de féculents épeints dont au moins 120 g complets ou sources de fibres, 50 g d'oléagineux, 30 g d'huile dont au moins 25 g d'huile riche en acide alpha-linolénique, 270 g d'analogues de produits laitiers frais, 0 g d'analogues de viande, et 15 g de levure de bière et autres. Alors je sais pas ce que t'en penses, mais quand j'ai vu ces chiffres, il y a 2-3 trucs que j'ai pas compris tout de suite. Par exemple... pourquoi il est recommandé pour les personnes végétaliennes de consommer moins d'oléagineux, moins d'huile, moins d'analogues de produits laitiers frais et 0 g d'analogues de viande. Intuitivement, on pourrait penser le contraire, puisque les personnes végétariennes ont déjà dans leur régime alimentaire des produits en plus comme le lait, les œufs et le fromage. Apparemment, cela vient de la consommation plus élevée en légumes secs pour cette... population, 120 grammes contre 75 grammes pour les végétariens et végétariennes, et donc ce surplus permet de se passer des analogues de viande d'une part et de consommer moins des autres groupes alimentaires que j'ai cités. C'est ce qu'on appelle la magie des légumineuses. Faut-il vraiment que je revienne sur ce sujet ? Je t'invite à réécouter l'épisode sur les légumineuses. Un autre truc un peu remarquable, c'est la quantité de fruits et légumes recommandés. 700 grammes par jour pour les deux populations. Bon, ça fait un peu beaucoup là, comme ça, c'est vrai, mais quand on y pense, la recommandation bien connue pour la population générale est déjà de 5 portions de fruits et légumes, une portion représentant à peu près 80 à 100 grammes. Bon, ça fait en gros deux portions de plus pour les végés, des personnes censées végétaliser leur alimentation. Bon, ça paraît beaucoup, mais ça fait sens. D'autant plus que pour fixer ces quantités, le groupe de travail s'est appuyé sur les habitudes de consommation de l'étude Nutrinet Santé, qui est une cohorte française en ligne et qui existe depuis mai 2009. Donc elle est hyper précieuse pour les chercheurs et chercheuses pour recueillir des données de consommation alimentaire en France, mais on peut se poser la question de la représentativité des personnes végées qui y participent, parce que déjà, elles ne sont pas hyper... hyper nombreuses et probablement qu'elles sont plus privilégiées que le reste de la population végé-française par rapport à leur accès à l'alimentation et leur éducation nutritionnelle. Encore une fois, on en revient à la difficulté d'établir des conclusions tranchées quand on fait de la recherche en nutrition. Malgré tout, comme pour les recommandations de l'ANSES, qui existaient déjà pour la population générale, il s'agit bien de repères et non pas d'objectifs à atteindre coûte que coûte chaque jour. Il faut donc les adapter. à sa situation personnelle. J'enchaîne donc sur les points négatifs que je trouve à ces recommandations. Premièrement, je crains que beaucoup de personnes végées ne se reconnaissent pas dans celle-ci. 0 g d'analogue de viande. Quand on a une alimentation végétalienne. C'est-à-dire pas de seitan, pas de tofu, pas de tempeh. Ce sont des aliments qui sont pourtant régulièrement consommés par les populations végétaliennes. Donc ne pas en tenir compte dans les repères me paraît dommage. D'autant que si effectivement c'est tout à fait possible d'avoir une alimentation végétalienne sans en consommer, ça reste des aliments de plus en plus accessibles en France, intéressants nutritionnellement, faciles à intégrer au quotidien ou lors d'occasions plus sociales. Bref, je trouve ça dommage. Deuxièmement, les repères élaborés dans cette expertise ne sont valables que pour la population générale adulte, hors femmes enceintes ou allaitantes, hors personnes âgées ou populations physiquement très actives et enfin hors enfants ou ados. A priori, c'est prévu pour plus tard, donc affaire à suivre. Enfin, il y a d'autres points discutables mais qui sont déjà cités dans le rapport, tels que par exemple la non prise en compte des algues et la faible biodisponibilité de la vitamine B12 dans les œufs, ce qui a pour conclusion de sous-estimer le besoin de se complémenter pour les personnes végétariennes. J'aimerais quand même finir sur une note positive parce que, je le répète, ça reste une bonne nouvelle. Premièrement, un groupe de travail d'experts et d'expertes ont acté à l'unanimité que les alimentations végétariennes n'étaient non seulement pas délétères pour la santé, mais qu'elles étaient même favorables pour de nombreuses pathologies et parmi les plus répandues en France. Deuxièmement, grâce aux repères fixés par l'ANSES, une personne adulte qui souhaite s'assurer qu'elle mange correctement en étant végée peut enfin, en un coup d'œil, avoir une idée de comment orienter son alimentation. Idem pour les pros de santé qui souhaitent conseiller leur... patiente et patient. Et enfin, ces repères, même s'ils ne sont pas parfaits, sont les premiers à paraître. Et je suis sûre que les prochaines recommandations vont s'affiner progressivement et coller davantage à la consommation réelle d'une population française de plus en plus désireuse de végétaliser son alimentation, de prendre soin de sa santé, de sa planète et des animaux non humains. C'est la fin de cet épisode. J'espère que tu auras pris autant de plaisir à l'écouter que moi à le produire. N'hésite pas à t'abonner pour être averti de chaque nouvelle sortie. Et si tu le souhaites, tu peux laisser un avis sur ta plateforme d'écoute préférée, ça m'aidera beaucoup. Si tu as des questions ou que tu souhaites échanger, tu peux aussi me retrouver sur Instagram, sur ma page magalie-le-dos-de-la-cuillère ou par mail à l'adresse coucou-le-dos-de-la-cuillère.fr Des aliments d'origine animale. Des aliments d'origine animale. Pourquoi j'ai... Baaah ! Baaah ! Animal ! Attends, je bois un coup. Je recommence ? Ou j'abandonne ? Eh ben le groupe de tra... Ça te fait rire, hein ? Quand j'ai... Eh mais dis donc ! Non mais... Non mais alors ! Je peux continuer à travailler ? Is it too much ? J'ai tapé le micro. Respire. Parce qu'elle... Ça suffit maintenant. Là, tu me regardes. ... et le statut en protéine. Protéine. Ou proté-out. The end. J'ai soigné ma chute.