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Le Phil d'Actu - Philosophie et Actualité

10 septembre : une philosophie de la Révolution

10 septembre : une philosophie de la Révolution

13min |10/09/2025
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Description

10 septembre. Nous y sommes. Cela fait des mois que nous entendons parler de cette date, que résonnent les appels à tout bloquer. Face au budget Bayrou et aux inégalités qui augmentent, la colère gronde. Alors, à quoi faut-il s’attendre ? Est-ce le début d’une révolution, comparable à celle qui a eu lieu en 1789 ? Faut-il avoir peur ? On en parle avec la philosophe Rosa Luxemburg.


Le Phil d'Actu, c'est le podcast engagé qui met la philosophie au cœur de l'actualité !

Ce podcast est 100% indépendant, gratuit, sans publicité. Il ne survit que grâce à vos dons.


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Un grand merci aux tipeur-ses : Anne-Cécile, Didier, Mailys, Barthélémy, Olivier, Romain, Cédric, Quentin, Charlély, Antony, Aurélie, Claire, Paul, Erwan, Guillaume, Claudia, Lionel, Yves, Denis, M2linée, Marie Vincent, Olivier, Kilian, Anthony, Nicolas, Rémi, Béatrice, Damien, Mathilde, Anouk, David, Elodie, Vivien, Franck, Tiphaine, Margaux, Alix, Maya, Olivier, Juliette, Jonathan, Yacine, Arnaud, Bruno, Quentin, Augustin, Anaïs, Laurent, Nicolas, Alexandre, Gauthier, Khadija, Charles, Solène, Yoann, Juliette, Florence, Charles, Benjamin, Bastien, Jean-Charles, Anne, Florian, Etienne, Céline, Yvan, Antoine, Thomas, Eric, Matthieu, Clément, Anouck, Jean-François, Louise, Etienne, Francisco, Yoann, Tristan, Maud, Nathalie, Marc, Margot.

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Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    10 septembre, nous y sommes. Cela fait des mois que nous entendons parler de cette date et que résonnent les appels à tout bloquer. Face au budget Bayrou et aux inégalités qui augmentent, la colère gronde. Alors, à quoi faut-il s'attendre ? Est-ce le début d'une révolution comparable à celle qui a eu lieu en 1789 ? Faut-il avoir peur ? On en parle avec la philosophe Rosa Luxembourg. Je suis Alice de Rochechouart et vous écoutez Le Fil d'Actu, le podcast engagé qui met la philosophie au cœur de l'actualité. Ce podcast est totalement indépendant et il ne survit que grâce à vos dons. Alors si vous voulez soutenir mon travail, vous pouvez faire un don en cliquant sur la page indiquée en description. Et bien sûr, vous pouvez aussi acheter mon livre privilège aux éditions J.C. Lattès. Merci pour votre soutien. Bloquons tout. C'est le mot d'ordre du mouvement du 10 septembre qui s'organise depuis le mois de juillet. A l'époque, le premier ministre François Bayrou avait présenté son nouveau budget, proposant notamment la suppression de deux jours fériés et la possible suppression d'une semaine de congés payés. Depuis, la colère monte. Et le départ de François Bayrou n'empêchera pas la mobilisation. Le mouvement s'organise et il suscite des craintes et des réticences. En effet, au départ, il s'agissait d'une protestation brute, confuse, mêlant toutes les sensibilités politiques. Les contestations provenaient aussi bien de l'extrême gauche que de l'extrême droite, si bien que de nombreux commentateurs, commentatrices et personnalités politiques se sont désolidarisés du mouvement. Désormais, les orientations politiques se sont précisées. Les revendications sont de gauche, progressiste, antifasciste. Et finalement... Elles sont soutenues par de nombreux partis de gauche. Mais à quoi faut-il s'attendre ? À un mouvement social ? À une révolte ? Ou même à une révolution ? Une révolte, c'est un soulèvement contre une situation injuste. C'est une réaction brute et soudaine. La révolution, c'est un peu plus que ça. C'est l'émergence d'un monde nouveau. La révolution incarne une pensée, une idéologie, un projet politique. Et souvent... elle cherche à s'institutionnaliser, à créer un nouvel ordre politique. Il y a eu de nombreuses révolutions dans l'histoire, mais ce terme fait peur. Parce qu'on nous répète deux choses. 1. Une révolution serait toujours violente. Et 2. Elle conduirait toujours à un nouvel État autoritaire. Mais est-ce vrai ? Née en Pologne en 1771, la philosophe marxiste Rosa Luxembourg a proposé une analyse précieuse de la Révolution. Elle cherche à s'opposer à ces deux aspects qu'on nous jure pourtant inévitables. La Révolution serait nécessairement autoritaire et nécessairement violente. Rosa Luxembourg est née, joli symbole, l'année de la Commune de Paris, ce soulèvement populaire qui a mené les Parisiens et Parisiennes à faire sécession pendant deux mois. avant d'être réprimé dans le sang. Rosa Luxembourg écrit dans les années 1900-1920, quand l'Europe est en pleine effervescence politique. En ce début de XXe siècle, on trouve des mouvements de droite durs, des ligues racistes et réactionnaires qui veulent instaurer des régimes hiérarchiques et autoritaires, mais aussi des idéologies communistes, anarchistes et socialistes qui cherchent à faire souffler un vent nouveau en Europe. En 1917, La révolution russe inspire d'autres pays, comme l'Allemagne, la Hongrie ou l'Italie. Et elle inspire également Rosa Luxembourg. Celle-ci soutient la révolution bolchevique, mais elle est très critique de l'autoritarisme, du centralisme et de la toute-puissance du parti. Luxembourg soutient que la révolution communiste doit être un processus d'émancipation par les travailleurs et travailleuses eux-mêmes, et non le fait d'un parti autoritaire qui donnerait des ordres de marche. A l'inverse, Elle affirme l'importance de la liberté d'expression et de la liberté de parole. La lutte, explique-t-elle, est un lieu où l'on s'éduque, où l'on s'informe, où l'on échange des idées, où l'on aiguise son regard et son analyse. Elle s'oppose farouchement aux organisations verticales où la pensée est dictée et le débat interdit. Le véritable socialisme, selon elle, est une démocratie approfondie. Tout le reste n'est qu'un travestissement. qui peut mener à une nouvelle oligarchie ou à une dictature. C'est pour cette raison que, pour Rosa Luxembourg, la révolution doit être menée par le peuple et non pas monopolisée par un parti, par une élite éclairée qui prétendrait guider les masses. On ne doit jamais sacrifier la démocratie, sous peine de trahir l'idéal révolutionnaire. Elle écrit « L'attache historique du prolétariat lorsqu'il prend le pouvoir est de remplacer la démocratie bourgeoise par la démocratie socialiste, et non de supprimer la démocratie. » Rosa Luxembourg s'oppose également à l'idée que la révolution serait nécessairement violente. Pacifiste convaincue, elle refuse les moyens d'action violents et défend les grèves de masse. La révolution, selon elle, est un processus, un blocage continu et non un bain de sang. Elle soutient que l'usage de la violence conduit à l'illusion du pouvoir et que ceux qui en usent finissent toujours par faire preuve d'autoritarisme jusqu'à réinstaurer des institutions politiques injustes. Autrement dit, quand la révolution est violente, elle reconduit systématiquement des structures de domination et non d'émancipation. Évidemment, Rosa Luxembourg se rend bien compte qu'il y a souvent de la violence lors des épisodes révolutionnaires. Mais cette violence est souvent répressive. C'est le pouvoir en place qui en use, qui fait couler le sang. Et chaque perte humaine est toujours à déplorer. La victoire elle-même ne compensera jamais le sang versé. Alors, le moyen d'action que préconise Rosa Luxembourg, c'est celui de la grève de masse. Des grèves spontanées, qui ne seraient pas désorganisées ou chaotiques, mais autogérées, où les travailleuses et travailleurs choisiraient leur destin. Ni autoritaires, ni violentes, chez Rosa Luxembourg, la révolution est le moment où le peuple s'empare à nouveau de l'action politique. où les masses se saisissent de l'instant présent, où la lutte des classes s'incarne en une action politique spontanée. Là où l'analyse de Rosa Luxembourg est intéressante, c'est qu'elle correspond totalement à ce qui se passe en ce moment. Le mouvement du 10 septembre ne se déroule pas sous l'égide d'un parti. Si certains partis et de nombreux syndicats soutiennent le mouvement, Ils n'en sont pas les organisateurs ou les dirigeants. Le 10 septembre est un mouvement qui part de la base, des masses pour reprendre le vocabulaire de Rosa Luxembourg. Il sort des canaux habituels d'organisation et veut inventer de nouvelles formes de lutte. Il capte l'air du temps, l'énergie contestataire et s'incarne en une multitude d'actions autogérées. On peut alors sortir de la croyance selon laquelle une révolution conduirait nécessairement à un régime autoritaire. en insistant sur la liberté de parole et de réflexion au sein du mouvement et sur le caractère spontané et démocratique des actions qui s'organisent. Des actions qui sont d'ailleurs non violentes. À partir du 10 septembre, il y aura surtout des grèves et des blocages qui cherchent à créer un rapport de force avec le pouvoir par l'imprévisibilité de ces actes et la promesse de tout bloquer. Tout au plus, il y aura un peu de casse matérielle. Mais rien de comparable à l'ampleur de la casse sociale des dernières années. Et puis, ces actions sont devenues indispensables. La Macronie a bien montré qu'elle n'avait que faire des manifestations. En 2023, pendant la réforme des retraites, des millions de gens dans la rue n'avaient pas suffi à faire bouger le gouvernement d'un cheveu. Emmanuel Macron se moque de la contestation populaire. Il est persuadé d'avoir raison contre tout le monde. Les seuls qui ont réussi à le faire plier Ce sont les Gilets jaunes, avec leur ténacité et leur imprévisibilité. Alors, tirons les leçons du passé. Le mot d'ordre du 10 septembre, c'est grève, blocage, sabotage. L'objectif, c'est que le gouvernement ne sache pas à quoi s'en tenir. Et la violence physique ne viendra pas des acteurs et actrices du mouvement, mais de la répression qui s'organise. Le gouvernement se durcit, il prépare une riposte sévère. Bruno Retailleau, ministre de l'Intérieur, a déployé 80 000 policiers et gendarmes et a diffusé un schéma national des violences urbaines. Un document entravant la liberté de la presse et autorisant les forces de l'ordre à réprimer les manifestants sans sommation. Ce même Bruno Retailleau qui avait dit la semaine dernière On regroupe nos forces, ensuite on les encercle et après on les tape. Même l'ONU s'était inquiétée de la brutalité des forces de l'ordre françaises. Une brutalité telle qu'elle menacerait l'état de droit. Alors, ne soyons pas dupes des discours à venir. La violence ne sera pas celle des manifestants et manifestantes. mais celle d'un pouvoir inquiet pour son propre maintien. Alors, que faut-il attendre du 10 septembre ? Une révolution pour de bon ? Qui sait ? Ce qu'on peut se dire avec Rosa Luxembourg, c'est que chaque soulèvement nous rapproche d'un changement. Rosa Luxembourg a commencé à écrire en 1905, après la première révolution russe. Une révolution inattendue dans un pays où la monarchie était absolue et autoritaire. Soudain, de manière spontanée, les populations opprimées se sont mises en grève pour réclamer des réformes politiques et sociales. La grève générale a réussi à faire plier le tsar Nicolas II, qui est parvenu malgré tout à se maintenir au pouvoir en réprimant sévèrement les révoltes et en promettant une nouvelle constitution plus libérale et progressiste, ce qu'il n'a évidemment pas fait. Mais cet épisode a semé les graines qui donneront, 12 ans plus tard, la révolution bolchevique de 1917. Pour Rosa Luxembourg, la défaite est toujours une avancée. Elle permet de tirer des leçons. Elle nous dit « Nous devons défendre la révolution non pas comme un bon soudain, l'affaire de 24 heures, mais comme une période historique, potentiellement longue, de lutte de classe avec des pauses plus ou moins brèves. » Il y avait eu des révoltes en 1781, 1787, 1788. Alors, impossible de savoir où nous en sommes dans l'histoire. Et comme le dit Rosa Luxembourg, « Il n'est rien de plus invraisemblable qu'une révolution une heure avant qu'elle n'éclate. Il n'est rien de plus évident qu'une révolution lorsqu'elle a livré sa première bataille et remporté sa première victoire. » Ce qui me paraît certain, c'est qu'il nous faut participer au mouvement du 10 septembre. de manière démocratique et autogérée. Car chaque protestation contre l'injustice qui grève notre société est une inspiration. Chaque action peut convertir de nouvelles personnes aux idéaux de justice sociale, y compris des personnes qui ont pu être tentées par l'extrême droite et qui, comme le rappelle Rosa Luxembourg, vont pouvoir s'informer et changer leurs croyances en participant à la lutte. Chaque action est une graine semée pour l'avenir. Et qui sait ? ce qui finira par pousser. C'est la fin de cet épisode. On se retrouve très vite pour un nouvel épisode du Fil d'Actu. En attendant, pour des infos exclusives et parfois des petites blagues, vous pouvez me suivre sur Instagram, sur mon compte Alice de Rochechouart. Et un grand merci à toutes celles et ceux qui, grâce à leurs dons, me permettent de continuer sereinement le podcast. Un grand merci à Elodie, Alix, Bruno, Alexandre Vous aussi, vous pouvez rejoindre l'aventure du fil d'actu. Merci et à très vite !

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10 septembre. Nous y sommes. Cela fait des mois que nous entendons parler de cette date, que résonnent les appels à tout bloquer. Face au budget Bayrou et aux inégalités qui augmentent, la colère gronde. Alors, à quoi faut-il s’attendre ? Est-ce le début d’une révolution, comparable à celle qui a eu lieu en 1789 ? Faut-il avoir peur ? On en parle avec la philosophe Rosa Luxemburg.


Le Phil d'Actu, c'est le podcast engagé qui met la philosophie au cœur de l'actualité !

Ce podcast est 100% indépendant, gratuit, sans publicité. Il ne survit que grâce à vos dons.


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  • Speaker #0

    10 septembre, nous y sommes. Cela fait des mois que nous entendons parler de cette date et que résonnent les appels à tout bloquer. Face au budget Bayrou et aux inégalités qui augmentent, la colère gronde. Alors, à quoi faut-il s'attendre ? Est-ce le début d'une révolution comparable à celle qui a eu lieu en 1789 ? Faut-il avoir peur ? On en parle avec la philosophe Rosa Luxembourg. Je suis Alice de Rochechouart et vous écoutez Le Fil d'Actu, le podcast engagé qui met la philosophie au cœur de l'actualité. Ce podcast est totalement indépendant et il ne survit que grâce à vos dons. Alors si vous voulez soutenir mon travail, vous pouvez faire un don en cliquant sur la page indiquée en description. Et bien sûr, vous pouvez aussi acheter mon livre privilège aux éditions J.C. Lattès. Merci pour votre soutien. Bloquons tout. C'est le mot d'ordre du mouvement du 10 septembre qui s'organise depuis le mois de juillet. A l'époque, le premier ministre François Bayrou avait présenté son nouveau budget, proposant notamment la suppression de deux jours fériés et la possible suppression d'une semaine de congés payés. Depuis, la colère monte. Et le départ de François Bayrou n'empêchera pas la mobilisation. Le mouvement s'organise et il suscite des craintes et des réticences. En effet, au départ, il s'agissait d'une protestation brute, confuse, mêlant toutes les sensibilités politiques. Les contestations provenaient aussi bien de l'extrême gauche que de l'extrême droite, si bien que de nombreux commentateurs, commentatrices et personnalités politiques se sont désolidarisés du mouvement. Désormais, les orientations politiques se sont précisées. Les revendications sont de gauche, progressiste, antifasciste. Et finalement... Elles sont soutenues par de nombreux partis de gauche. Mais à quoi faut-il s'attendre ? À un mouvement social ? À une révolte ? Ou même à une révolution ? Une révolte, c'est un soulèvement contre une situation injuste. C'est une réaction brute et soudaine. La révolution, c'est un peu plus que ça. C'est l'émergence d'un monde nouveau. La révolution incarne une pensée, une idéologie, un projet politique. Et souvent... elle cherche à s'institutionnaliser, à créer un nouvel ordre politique. Il y a eu de nombreuses révolutions dans l'histoire, mais ce terme fait peur. Parce qu'on nous répète deux choses. 1. Une révolution serait toujours violente. Et 2. Elle conduirait toujours à un nouvel État autoritaire. Mais est-ce vrai ? Née en Pologne en 1771, la philosophe marxiste Rosa Luxembourg a proposé une analyse précieuse de la Révolution. Elle cherche à s'opposer à ces deux aspects qu'on nous jure pourtant inévitables. La Révolution serait nécessairement autoritaire et nécessairement violente. Rosa Luxembourg est née, joli symbole, l'année de la Commune de Paris, ce soulèvement populaire qui a mené les Parisiens et Parisiennes à faire sécession pendant deux mois. avant d'être réprimé dans le sang. Rosa Luxembourg écrit dans les années 1900-1920, quand l'Europe est en pleine effervescence politique. En ce début de XXe siècle, on trouve des mouvements de droite durs, des ligues racistes et réactionnaires qui veulent instaurer des régimes hiérarchiques et autoritaires, mais aussi des idéologies communistes, anarchistes et socialistes qui cherchent à faire souffler un vent nouveau en Europe. En 1917, La révolution russe inspire d'autres pays, comme l'Allemagne, la Hongrie ou l'Italie. Et elle inspire également Rosa Luxembourg. Celle-ci soutient la révolution bolchevique, mais elle est très critique de l'autoritarisme, du centralisme et de la toute-puissance du parti. Luxembourg soutient que la révolution communiste doit être un processus d'émancipation par les travailleurs et travailleuses eux-mêmes, et non le fait d'un parti autoritaire qui donnerait des ordres de marche. A l'inverse, Elle affirme l'importance de la liberté d'expression et de la liberté de parole. La lutte, explique-t-elle, est un lieu où l'on s'éduque, où l'on s'informe, où l'on échange des idées, où l'on aiguise son regard et son analyse. Elle s'oppose farouchement aux organisations verticales où la pensée est dictée et le débat interdit. Le véritable socialisme, selon elle, est une démocratie approfondie. Tout le reste n'est qu'un travestissement. qui peut mener à une nouvelle oligarchie ou à une dictature. C'est pour cette raison que, pour Rosa Luxembourg, la révolution doit être menée par le peuple et non pas monopolisée par un parti, par une élite éclairée qui prétendrait guider les masses. On ne doit jamais sacrifier la démocratie, sous peine de trahir l'idéal révolutionnaire. Elle écrit « L'attache historique du prolétariat lorsqu'il prend le pouvoir est de remplacer la démocratie bourgeoise par la démocratie socialiste, et non de supprimer la démocratie. » Rosa Luxembourg s'oppose également à l'idée que la révolution serait nécessairement violente. Pacifiste convaincue, elle refuse les moyens d'action violents et défend les grèves de masse. La révolution, selon elle, est un processus, un blocage continu et non un bain de sang. Elle soutient que l'usage de la violence conduit à l'illusion du pouvoir et que ceux qui en usent finissent toujours par faire preuve d'autoritarisme jusqu'à réinstaurer des institutions politiques injustes. Autrement dit, quand la révolution est violente, elle reconduit systématiquement des structures de domination et non d'émancipation. Évidemment, Rosa Luxembourg se rend bien compte qu'il y a souvent de la violence lors des épisodes révolutionnaires. Mais cette violence est souvent répressive. C'est le pouvoir en place qui en use, qui fait couler le sang. Et chaque perte humaine est toujours à déplorer. La victoire elle-même ne compensera jamais le sang versé. Alors, le moyen d'action que préconise Rosa Luxembourg, c'est celui de la grève de masse. Des grèves spontanées, qui ne seraient pas désorganisées ou chaotiques, mais autogérées, où les travailleuses et travailleurs choisiraient leur destin. Ni autoritaires, ni violentes, chez Rosa Luxembourg, la révolution est le moment où le peuple s'empare à nouveau de l'action politique. où les masses se saisissent de l'instant présent, où la lutte des classes s'incarne en une action politique spontanée. Là où l'analyse de Rosa Luxembourg est intéressante, c'est qu'elle correspond totalement à ce qui se passe en ce moment. Le mouvement du 10 septembre ne se déroule pas sous l'égide d'un parti. Si certains partis et de nombreux syndicats soutiennent le mouvement, Ils n'en sont pas les organisateurs ou les dirigeants. Le 10 septembre est un mouvement qui part de la base, des masses pour reprendre le vocabulaire de Rosa Luxembourg. Il sort des canaux habituels d'organisation et veut inventer de nouvelles formes de lutte. Il capte l'air du temps, l'énergie contestataire et s'incarne en une multitude d'actions autogérées. On peut alors sortir de la croyance selon laquelle une révolution conduirait nécessairement à un régime autoritaire. en insistant sur la liberté de parole et de réflexion au sein du mouvement et sur le caractère spontané et démocratique des actions qui s'organisent. Des actions qui sont d'ailleurs non violentes. À partir du 10 septembre, il y aura surtout des grèves et des blocages qui cherchent à créer un rapport de force avec le pouvoir par l'imprévisibilité de ces actes et la promesse de tout bloquer. Tout au plus, il y aura un peu de casse matérielle. Mais rien de comparable à l'ampleur de la casse sociale des dernières années. Et puis, ces actions sont devenues indispensables. La Macronie a bien montré qu'elle n'avait que faire des manifestations. En 2023, pendant la réforme des retraites, des millions de gens dans la rue n'avaient pas suffi à faire bouger le gouvernement d'un cheveu. Emmanuel Macron se moque de la contestation populaire. Il est persuadé d'avoir raison contre tout le monde. Les seuls qui ont réussi à le faire plier Ce sont les Gilets jaunes, avec leur ténacité et leur imprévisibilité. Alors, tirons les leçons du passé. Le mot d'ordre du 10 septembre, c'est grève, blocage, sabotage. L'objectif, c'est que le gouvernement ne sache pas à quoi s'en tenir. Et la violence physique ne viendra pas des acteurs et actrices du mouvement, mais de la répression qui s'organise. Le gouvernement se durcit, il prépare une riposte sévère. Bruno Retailleau, ministre de l'Intérieur, a déployé 80 000 policiers et gendarmes et a diffusé un schéma national des violences urbaines. Un document entravant la liberté de la presse et autorisant les forces de l'ordre à réprimer les manifestants sans sommation. Ce même Bruno Retailleau qui avait dit la semaine dernière On regroupe nos forces, ensuite on les encercle et après on les tape. Même l'ONU s'était inquiétée de la brutalité des forces de l'ordre françaises. Une brutalité telle qu'elle menacerait l'état de droit. Alors, ne soyons pas dupes des discours à venir. La violence ne sera pas celle des manifestants et manifestantes. mais celle d'un pouvoir inquiet pour son propre maintien. Alors, que faut-il attendre du 10 septembre ? Une révolution pour de bon ? Qui sait ? Ce qu'on peut se dire avec Rosa Luxembourg, c'est que chaque soulèvement nous rapproche d'un changement. Rosa Luxembourg a commencé à écrire en 1905, après la première révolution russe. Une révolution inattendue dans un pays où la monarchie était absolue et autoritaire. Soudain, de manière spontanée, les populations opprimées se sont mises en grève pour réclamer des réformes politiques et sociales. La grève générale a réussi à faire plier le tsar Nicolas II, qui est parvenu malgré tout à se maintenir au pouvoir en réprimant sévèrement les révoltes et en promettant une nouvelle constitution plus libérale et progressiste, ce qu'il n'a évidemment pas fait. Mais cet épisode a semé les graines qui donneront, 12 ans plus tard, la révolution bolchevique de 1917. Pour Rosa Luxembourg, la défaite est toujours une avancée. Elle permet de tirer des leçons. Elle nous dit « Nous devons défendre la révolution non pas comme un bon soudain, l'affaire de 24 heures, mais comme une période historique, potentiellement longue, de lutte de classe avec des pauses plus ou moins brèves. » Il y avait eu des révoltes en 1781, 1787, 1788. Alors, impossible de savoir où nous en sommes dans l'histoire. Et comme le dit Rosa Luxembourg, « Il n'est rien de plus invraisemblable qu'une révolution une heure avant qu'elle n'éclate. Il n'est rien de plus évident qu'une révolution lorsqu'elle a livré sa première bataille et remporté sa première victoire. » Ce qui me paraît certain, c'est qu'il nous faut participer au mouvement du 10 septembre. de manière démocratique et autogérée. Car chaque protestation contre l'injustice qui grève notre société est une inspiration. Chaque action peut convertir de nouvelles personnes aux idéaux de justice sociale, y compris des personnes qui ont pu être tentées par l'extrême droite et qui, comme le rappelle Rosa Luxembourg, vont pouvoir s'informer et changer leurs croyances en participant à la lutte. Chaque action est une graine semée pour l'avenir. Et qui sait ? ce qui finira par pousser. C'est la fin de cet épisode. On se retrouve très vite pour un nouvel épisode du Fil d'Actu. En attendant, pour des infos exclusives et parfois des petites blagues, vous pouvez me suivre sur Instagram, sur mon compte Alice de Rochechouart. Et un grand merci à toutes celles et ceux qui, grâce à leurs dons, me permettent de continuer sereinement le podcast. Un grand merci à Elodie, Alix, Bruno, Alexandre Vous aussi, vous pouvez rejoindre l'aventure du fil d'actu. Merci et à très vite !

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10 septembre. Nous y sommes. Cela fait des mois que nous entendons parler de cette date, que résonnent les appels à tout bloquer. Face au budget Bayrou et aux inégalités qui augmentent, la colère gronde. Alors, à quoi faut-il s’attendre ? Est-ce le début d’une révolution, comparable à celle qui a eu lieu en 1789 ? Faut-il avoir peur ? On en parle avec la philosophe Rosa Luxemburg.


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    10 septembre, nous y sommes. Cela fait des mois que nous entendons parler de cette date et que résonnent les appels à tout bloquer. Face au budget Bayrou et aux inégalités qui augmentent, la colère gronde. Alors, à quoi faut-il s'attendre ? Est-ce le début d'une révolution comparable à celle qui a eu lieu en 1789 ? Faut-il avoir peur ? On en parle avec la philosophe Rosa Luxembourg. Je suis Alice de Rochechouart et vous écoutez Le Fil d'Actu, le podcast engagé qui met la philosophie au cœur de l'actualité. Ce podcast est totalement indépendant et il ne survit que grâce à vos dons. Alors si vous voulez soutenir mon travail, vous pouvez faire un don en cliquant sur la page indiquée en description. Et bien sûr, vous pouvez aussi acheter mon livre privilège aux éditions J.C. Lattès. Merci pour votre soutien. Bloquons tout. C'est le mot d'ordre du mouvement du 10 septembre qui s'organise depuis le mois de juillet. A l'époque, le premier ministre François Bayrou avait présenté son nouveau budget, proposant notamment la suppression de deux jours fériés et la possible suppression d'une semaine de congés payés. Depuis, la colère monte. Et le départ de François Bayrou n'empêchera pas la mobilisation. Le mouvement s'organise et il suscite des craintes et des réticences. En effet, au départ, il s'agissait d'une protestation brute, confuse, mêlant toutes les sensibilités politiques. Les contestations provenaient aussi bien de l'extrême gauche que de l'extrême droite, si bien que de nombreux commentateurs, commentatrices et personnalités politiques se sont désolidarisés du mouvement. Désormais, les orientations politiques se sont précisées. Les revendications sont de gauche, progressiste, antifasciste. Et finalement... Elles sont soutenues par de nombreux partis de gauche. Mais à quoi faut-il s'attendre ? À un mouvement social ? À une révolte ? Ou même à une révolution ? Une révolte, c'est un soulèvement contre une situation injuste. C'est une réaction brute et soudaine. La révolution, c'est un peu plus que ça. C'est l'émergence d'un monde nouveau. La révolution incarne une pensée, une idéologie, un projet politique. Et souvent... elle cherche à s'institutionnaliser, à créer un nouvel ordre politique. Il y a eu de nombreuses révolutions dans l'histoire, mais ce terme fait peur. Parce qu'on nous répète deux choses. 1. Une révolution serait toujours violente. Et 2. Elle conduirait toujours à un nouvel État autoritaire. Mais est-ce vrai ? Née en Pologne en 1771, la philosophe marxiste Rosa Luxembourg a proposé une analyse précieuse de la Révolution. Elle cherche à s'opposer à ces deux aspects qu'on nous jure pourtant inévitables. La Révolution serait nécessairement autoritaire et nécessairement violente. Rosa Luxembourg est née, joli symbole, l'année de la Commune de Paris, ce soulèvement populaire qui a mené les Parisiens et Parisiennes à faire sécession pendant deux mois. avant d'être réprimé dans le sang. Rosa Luxembourg écrit dans les années 1900-1920, quand l'Europe est en pleine effervescence politique. En ce début de XXe siècle, on trouve des mouvements de droite durs, des ligues racistes et réactionnaires qui veulent instaurer des régimes hiérarchiques et autoritaires, mais aussi des idéologies communistes, anarchistes et socialistes qui cherchent à faire souffler un vent nouveau en Europe. En 1917, La révolution russe inspire d'autres pays, comme l'Allemagne, la Hongrie ou l'Italie. Et elle inspire également Rosa Luxembourg. Celle-ci soutient la révolution bolchevique, mais elle est très critique de l'autoritarisme, du centralisme et de la toute-puissance du parti. Luxembourg soutient que la révolution communiste doit être un processus d'émancipation par les travailleurs et travailleuses eux-mêmes, et non le fait d'un parti autoritaire qui donnerait des ordres de marche. A l'inverse, Elle affirme l'importance de la liberté d'expression et de la liberté de parole. La lutte, explique-t-elle, est un lieu où l'on s'éduque, où l'on s'informe, où l'on échange des idées, où l'on aiguise son regard et son analyse. Elle s'oppose farouchement aux organisations verticales où la pensée est dictée et le débat interdit. Le véritable socialisme, selon elle, est une démocratie approfondie. Tout le reste n'est qu'un travestissement. qui peut mener à une nouvelle oligarchie ou à une dictature. C'est pour cette raison que, pour Rosa Luxembourg, la révolution doit être menée par le peuple et non pas monopolisée par un parti, par une élite éclairée qui prétendrait guider les masses. On ne doit jamais sacrifier la démocratie, sous peine de trahir l'idéal révolutionnaire. Elle écrit « L'attache historique du prolétariat lorsqu'il prend le pouvoir est de remplacer la démocratie bourgeoise par la démocratie socialiste, et non de supprimer la démocratie. » Rosa Luxembourg s'oppose également à l'idée que la révolution serait nécessairement violente. Pacifiste convaincue, elle refuse les moyens d'action violents et défend les grèves de masse. La révolution, selon elle, est un processus, un blocage continu et non un bain de sang. Elle soutient que l'usage de la violence conduit à l'illusion du pouvoir et que ceux qui en usent finissent toujours par faire preuve d'autoritarisme jusqu'à réinstaurer des institutions politiques injustes. Autrement dit, quand la révolution est violente, elle reconduit systématiquement des structures de domination et non d'émancipation. Évidemment, Rosa Luxembourg se rend bien compte qu'il y a souvent de la violence lors des épisodes révolutionnaires. Mais cette violence est souvent répressive. C'est le pouvoir en place qui en use, qui fait couler le sang. Et chaque perte humaine est toujours à déplorer. La victoire elle-même ne compensera jamais le sang versé. Alors, le moyen d'action que préconise Rosa Luxembourg, c'est celui de la grève de masse. Des grèves spontanées, qui ne seraient pas désorganisées ou chaotiques, mais autogérées, où les travailleuses et travailleurs choisiraient leur destin. Ni autoritaires, ni violentes, chez Rosa Luxembourg, la révolution est le moment où le peuple s'empare à nouveau de l'action politique. où les masses se saisissent de l'instant présent, où la lutte des classes s'incarne en une action politique spontanée. Là où l'analyse de Rosa Luxembourg est intéressante, c'est qu'elle correspond totalement à ce qui se passe en ce moment. Le mouvement du 10 septembre ne se déroule pas sous l'égide d'un parti. Si certains partis et de nombreux syndicats soutiennent le mouvement, Ils n'en sont pas les organisateurs ou les dirigeants. Le 10 septembre est un mouvement qui part de la base, des masses pour reprendre le vocabulaire de Rosa Luxembourg. Il sort des canaux habituels d'organisation et veut inventer de nouvelles formes de lutte. Il capte l'air du temps, l'énergie contestataire et s'incarne en une multitude d'actions autogérées. On peut alors sortir de la croyance selon laquelle une révolution conduirait nécessairement à un régime autoritaire. en insistant sur la liberté de parole et de réflexion au sein du mouvement et sur le caractère spontané et démocratique des actions qui s'organisent. Des actions qui sont d'ailleurs non violentes. À partir du 10 septembre, il y aura surtout des grèves et des blocages qui cherchent à créer un rapport de force avec le pouvoir par l'imprévisibilité de ces actes et la promesse de tout bloquer. Tout au plus, il y aura un peu de casse matérielle. Mais rien de comparable à l'ampleur de la casse sociale des dernières années. Et puis, ces actions sont devenues indispensables. La Macronie a bien montré qu'elle n'avait que faire des manifestations. En 2023, pendant la réforme des retraites, des millions de gens dans la rue n'avaient pas suffi à faire bouger le gouvernement d'un cheveu. Emmanuel Macron se moque de la contestation populaire. Il est persuadé d'avoir raison contre tout le monde. Les seuls qui ont réussi à le faire plier Ce sont les Gilets jaunes, avec leur ténacité et leur imprévisibilité. Alors, tirons les leçons du passé. Le mot d'ordre du 10 septembre, c'est grève, blocage, sabotage. L'objectif, c'est que le gouvernement ne sache pas à quoi s'en tenir. Et la violence physique ne viendra pas des acteurs et actrices du mouvement, mais de la répression qui s'organise. Le gouvernement se durcit, il prépare une riposte sévère. Bruno Retailleau, ministre de l'Intérieur, a déployé 80 000 policiers et gendarmes et a diffusé un schéma national des violences urbaines. Un document entravant la liberté de la presse et autorisant les forces de l'ordre à réprimer les manifestants sans sommation. Ce même Bruno Retailleau qui avait dit la semaine dernière On regroupe nos forces, ensuite on les encercle et après on les tape. Même l'ONU s'était inquiétée de la brutalité des forces de l'ordre françaises. Une brutalité telle qu'elle menacerait l'état de droit. Alors, ne soyons pas dupes des discours à venir. La violence ne sera pas celle des manifestants et manifestantes. mais celle d'un pouvoir inquiet pour son propre maintien. Alors, que faut-il attendre du 10 septembre ? Une révolution pour de bon ? Qui sait ? Ce qu'on peut se dire avec Rosa Luxembourg, c'est que chaque soulèvement nous rapproche d'un changement. Rosa Luxembourg a commencé à écrire en 1905, après la première révolution russe. Une révolution inattendue dans un pays où la monarchie était absolue et autoritaire. Soudain, de manière spontanée, les populations opprimées se sont mises en grève pour réclamer des réformes politiques et sociales. La grève générale a réussi à faire plier le tsar Nicolas II, qui est parvenu malgré tout à se maintenir au pouvoir en réprimant sévèrement les révoltes et en promettant une nouvelle constitution plus libérale et progressiste, ce qu'il n'a évidemment pas fait. Mais cet épisode a semé les graines qui donneront, 12 ans plus tard, la révolution bolchevique de 1917. Pour Rosa Luxembourg, la défaite est toujours une avancée. Elle permet de tirer des leçons. Elle nous dit « Nous devons défendre la révolution non pas comme un bon soudain, l'affaire de 24 heures, mais comme une période historique, potentiellement longue, de lutte de classe avec des pauses plus ou moins brèves. » Il y avait eu des révoltes en 1781, 1787, 1788. Alors, impossible de savoir où nous en sommes dans l'histoire. Et comme le dit Rosa Luxembourg, « Il n'est rien de plus invraisemblable qu'une révolution une heure avant qu'elle n'éclate. Il n'est rien de plus évident qu'une révolution lorsqu'elle a livré sa première bataille et remporté sa première victoire. » Ce qui me paraît certain, c'est qu'il nous faut participer au mouvement du 10 septembre. de manière démocratique et autogérée. Car chaque protestation contre l'injustice qui grève notre société est une inspiration. Chaque action peut convertir de nouvelles personnes aux idéaux de justice sociale, y compris des personnes qui ont pu être tentées par l'extrême droite et qui, comme le rappelle Rosa Luxembourg, vont pouvoir s'informer et changer leurs croyances en participant à la lutte. Chaque action est une graine semée pour l'avenir. Et qui sait ? ce qui finira par pousser. C'est la fin de cet épisode. On se retrouve très vite pour un nouvel épisode du Fil d'Actu. En attendant, pour des infos exclusives et parfois des petites blagues, vous pouvez me suivre sur Instagram, sur mon compte Alice de Rochechouart. Et un grand merci à toutes celles et ceux qui, grâce à leurs dons, me permettent de continuer sereinement le podcast. Un grand merci à Elodie, Alix, Bruno, Alexandre Vous aussi, vous pouvez rejoindre l'aventure du fil d'actu. Merci et à très vite !

Description

10 septembre. Nous y sommes. Cela fait des mois que nous entendons parler de cette date, que résonnent les appels à tout bloquer. Face au budget Bayrou et aux inégalités qui augmentent, la colère gronde. Alors, à quoi faut-il s’attendre ? Est-ce le début d’une révolution, comparable à celle qui a eu lieu en 1789 ? Faut-il avoir peur ? On en parle avec la philosophe Rosa Luxemburg.


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    10 septembre, nous y sommes. Cela fait des mois que nous entendons parler de cette date et que résonnent les appels à tout bloquer. Face au budget Bayrou et aux inégalités qui augmentent, la colère gronde. Alors, à quoi faut-il s'attendre ? Est-ce le début d'une révolution comparable à celle qui a eu lieu en 1789 ? Faut-il avoir peur ? On en parle avec la philosophe Rosa Luxembourg. Je suis Alice de Rochechouart et vous écoutez Le Fil d'Actu, le podcast engagé qui met la philosophie au cœur de l'actualité. Ce podcast est totalement indépendant et il ne survit que grâce à vos dons. Alors si vous voulez soutenir mon travail, vous pouvez faire un don en cliquant sur la page indiquée en description. Et bien sûr, vous pouvez aussi acheter mon livre privilège aux éditions J.C. Lattès. Merci pour votre soutien. Bloquons tout. C'est le mot d'ordre du mouvement du 10 septembre qui s'organise depuis le mois de juillet. A l'époque, le premier ministre François Bayrou avait présenté son nouveau budget, proposant notamment la suppression de deux jours fériés et la possible suppression d'une semaine de congés payés. Depuis, la colère monte. Et le départ de François Bayrou n'empêchera pas la mobilisation. Le mouvement s'organise et il suscite des craintes et des réticences. En effet, au départ, il s'agissait d'une protestation brute, confuse, mêlant toutes les sensibilités politiques. Les contestations provenaient aussi bien de l'extrême gauche que de l'extrême droite, si bien que de nombreux commentateurs, commentatrices et personnalités politiques se sont désolidarisés du mouvement. Désormais, les orientations politiques se sont précisées. Les revendications sont de gauche, progressiste, antifasciste. Et finalement... Elles sont soutenues par de nombreux partis de gauche. Mais à quoi faut-il s'attendre ? À un mouvement social ? À une révolte ? Ou même à une révolution ? Une révolte, c'est un soulèvement contre une situation injuste. C'est une réaction brute et soudaine. La révolution, c'est un peu plus que ça. C'est l'émergence d'un monde nouveau. La révolution incarne une pensée, une idéologie, un projet politique. Et souvent... elle cherche à s'institutionnaliser, à créer un nouvel ordre politique. Il y a eu de nombreuses révolutions dans l'histoire, mais ce terme fait peur. Parce qu'on nous répète deux choses. 1. Une révolution serait toujours violente. Et 2. Elle conduirait toujours à un nouvel État autoritaire. Mais est-ce vrai ? Née en Pologne en 1771, la philosophe marxiste Rosa Luxembourg a proposé une analyse précieuse de la Révolution. Elle cherche à s'opposer à ces deux aspects qu'on nous jure pourtant inévitables. La Révolution serait nécessairement autoritaire et nécessairement violente. Rosa Luxembourg est née, joli symbole, l'année de la Commune de Paris, ce soulèvement populaire qui a mené les Parisiens et Parisiennes à faire sécession pendant deux mois. avant d'être réprimé dans le sang. Rosa Luxembourg écrit dans les années 1900-1920, quand l'Europe est en pleine effervescence politique. En ce début de XXe siècle, on trouve des mouvements de droite durs, des ligues racistes et réactionnaires qui veulent instaurer des régimes hiérarchiques et autoritaires, mais aussi des idéologies communistes, anarchistes et socialistes qui cherchent à faire souffler un vent nouveau en Europe. En 1917, La révolution russe inspire d'autres pays, comme l'Allemagne, la Hongrie ou l'Italie. Et elle inspire également Rosa Luxembourg. Celle-ci soutient la révolution bolchevique, mais elle est très critique de l'autoritarisme, du centralisme et de la toute-puissance du parti. Luxembourg soutient que la révolution communiste doit être un processus d'émancipation par les travailleurs et travailleuses eux-mêmes, et non le fait d'un parti autoritaire qui donnerait des ordres de marche. A l'inverse, Elle affirme l'importance de la liberté d'expression et de la liberté de parole. La lutte, explique-t-elle, est un lieu où l'on s'éduque, où l'on s'informe, où l'on échange des idées, où l'on aiguise son regard et son analyse. Elle s'oppose farouchement aux organisations verticales où la pensée est dictée et le débat interdit. Le véritable socialisme, selon elle, est une démocratie approfondie. Tout le reste n'est qu'un travestissement. qui peut mener à une nouvelle oligarchie ou à une dictature. C'est pour cette raison que, pour Rosa Luxembourg, la révolution doit être menée par le peuple et non pas monopolisée par un parti, par une élite éclairée qui prétendrait guider les masses. On ne doit jamais sacrifier la démocratie, sous peine de trahir l'idéal révolutionnaire. Elle écrit « L'attache historique du prolétariat lorsqu'il prend le pouvoir est de remplacer la démocratie bourgeoise par la démocratie socialiste, et non de supprimer la démocratie. » Rosa Luxembourg s'oppose également à l'idée que la révolution serait nécessairement violente. Pacifiste convaincue, elle refuse les moyens d'action violents et défend les grèves de masse. La révolution, selon elle, est un processus, un blocage continu et non un bain de sang. Elle soutient que l'usage de la violence conduit à l'illusion du pouvoir et que ceux qui en usent finissent toujours par faire preuve d'autoritarisme jusqu'à réinstaurer des institutions politiques injustes. Autrement dit, quand la révolution est violente, elle reconduit systématiquement des structures de domination et non d'émancipation. Évidemment, Rosa Luxembourg se rend bien compte qu'il y a souvent de la violence lors des épisodes révolutionnaires. Mais cette violence est souvent répressive. C'est le pouvoir en place qui en use, qui fait couler le sang. Et chaque perte humaine est toujours à déplorer. La victoire elle-même ne compensera jamais le sang versé. Alors, le moyen d'action que préconise Rosa Luxembourg, c'est celui de la grève de masse. Des grèves spontanées, qui ne seraient pas désorganisées ou chaotiques, mais autogérées, où les travailleuses et travailleurs choisiraient leur destin. Ni autoritaires, ni violentes, chez Rosa Luxembourg, la révolution est le moment où le peuple s'empare à nouveau de l'action politique. où les masses se saisissent de l'instant présent, où la lutte des classes s'incarne en une action politique spontanée. Là où l'analyse de Rosa Luxembourg est intéressante, c'est qu'elle correspond totalement à ce qui se passe en ce moment. Le mouvement du 10 septembre ne se déroule pas sous l'égide d'un parti. Si certains partis et de nombreux syndicats soutiennent le mouvement, Ils n'en sont pas les organisateurs ou les dirigeants. Le 10 septembre est un mouvement qui part de la base, des masses pour reprendre le vocabulaire de Rosa Luxembourg. Il sort des canaux habituels d'organisation et veut inventer de nouvelles formes de lutte. Il capte l'air du temps, l'énergie contestataire et s'incarne en une multitude d'actions autogérées. On peut alors sortir de la croyance selon laquelle une révolution conduirait nécessairement à un régime autoritaire. en insistant sur la liberté de parole et de réflexion au sein du mouvement et sur le caractère spontané et démocratique des actions qui s'organisent. Des actions qui sont d'ailleurs non violentes. À partir du 10 septembre, il y aura surtout des grèves et des blocages qui cherchent à créer un rapport de force avec le pouvoir par l'imprévisibilité de ces actes et la promesse de tout bloquer. Tout au plus, il y aura un peu de casse matérielle. Mais rien de comparable à l'ampleur de la casse sociale des dernières années. Et puis, ces actions sont devenues indispensables. La Macronie a bien montré qu'elle n'avait que faire des manifestations. En 2023, pendant la réforme des retraites, des millions de gens dans la rue n'avaient pas suffi à faire bouger le gouvernement d'un cheveu. Emmanuel Macron se moque de la contestation populaire. Il est persuadé d'avoir raison contre tout le monde. Les seuls qui ont réussi à le faire plier Ce sont les Gilets jaunes, avec leur ténacité et leur imprévisibilité. Alors, tirons les leçons du passé. Le mot d'ordre du 10 septembre, c'est grève, blocage, sabotage. L'objectif, c'est que le gouvernement ne sache pas à quoi s'en tenir. Et la violence physique ne viendra pas des acteurs et actrices du mouvement, mais de la répression qui s'organise. Le gouvernement se durcit, il prépare une riposte sévère. Bruno Retailleau, ministre de l'Intérieur, a déployé 80 000 policiers et gendarmes et a diffusé un schéma national des violences urbaines. Un document entravant la liberté de la presse et autorisant les forces de l'ordre à réprimer les manifestants sans sommation. Ce même Bruno Retailleau qui avait dit la semaine dernière On regroupe nos forces, ensuite on les encercle et après on les tape. Même l'ONU s'était inquiétée de la brutalité des forces de l'ordre françaises. Une brutalité telle qu'elle menacerait l'état de droit. Alors, ne soyons pas dupes des discours à venir. La violence ne sera pas celle des manifestants et manifestantes. mais celle d'un pouvoir inquiet pour son propre maintien. Alors, que faut-il attendre du 10 septembre ? Une révolution pour de bon ? Qui sait ? Ce qu'on peut se dire avec Rosa Luxembourg, c'est que chaque soulèvement nous rapproche d'un changement. Rosa Luxembourg a commencé à écrire en 1905, après la première révolution russe. Une révolution inattendue dans un pays où la monarchie était absolue et autoritaire. Soudain, de manière spontanée, les populations opprimées se sont mises en grève pour réclamer des réformes politiques et sociales. La grève générale a réussi à faire plier le tsar Nicolas II, qui est parvenu malgré tout à se maintenir au pouvoir en réprimant sévèrement les révoltes et en promettant une nouvelle constitution plus libérale et progressiste, ce qu'il n'a évidemment pas fait. Mais cet épisode a semé les graines qui donneront, 12 ans plus tard, la révolution bolchevique de 1917. Pour Rosa Luxembourg, la défaite est toujours une avancée. Elle permet de tirer des leçons. Elle nous dit « Nous devons défendre la révolution non pas comme un bon soudain, l'affaire de 24 heures, mais comme une période historique, potentiellement longue, de lutte de classe avec des pauses plus ou moins brèves. » Il y avait eu des révoltes en 1781, 1787, 1788. Alors, impossible de savoir où nous en sommes dans l'histoire. Et comme le dit Rosa Luxembourg, « Il n'est rien de plus invraisemblable qu'une révolution une heure avant qu'elle n'éclate. Il n'est rien de plus évident qu'une révolution lorsqu'elle a livré sa première bataille et remporté sa première victoire. » Ce qui me paraît certain, c'est qu'il nous faut participer au mouvement du 10 septembre. de manière démocratique et autogérée. Car chaque protestation contre l'injustice qui grève notre société est une inspiration. Chaque action peut convertir de nouvelles personnes aux idéaux de justice sociale, y compris des personnes qui ont pu être tentées par l'extrême droite et qui, comme le rappelle Rosa Luxembourg, vont pouvoir s'informer et changer leurs croyances en participant à la lutte. Chaque action est une graine semée pour l'avenir. Et qui sait ? ce qui finira par pousser. C'est la fin de cet épisode. On se retrouve très vite pour un nouvel épisode du Fil d'Actu. En attendant, pour des infos exclusives et parfois des petites blagues, vous pouvez me suivre sur Instagram, sur mon compte Alice de Rochechouart. Et un grand merci à toutes celles et ceux qui, grâce à leurs dons, me permettent de continuer sereinement le podcast. Un grand merci à Elodie, Alix, Bruno, Alexandre Vous aussi, vous pouvez rejoindre l'aventure du fil d'actu. Merci et à très vite !

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