- Speaker #0
Bonjour et bienvenue. Aujourd'hui, on plonge dans un sujet législatif assez chaud au Québec, le projet de loi 109.
- Speaker #1
Oui, bonjour.
- Speaker #0
Les documents qu'on a consultés, ils parlent d'affirmer la... comment ils disent déjà ?
- Speaker #1
La souveraineté culturelle du Québec, dans le numérique.
- Speaker #0
C'est ça. Notre but, c'est de décortiquer un peu cette loi, voir ce qu'elle implique vraiment. L'idée de base, si je résume, c'est rendre le contenu franco plus facile à trouver en ligne. C'est ça.
- Speaker #1
Exactement. L'intention est là, très clairement. protéger, promouvoir la langue française, la culture québécoise, face à tout ce qui domine sur les plateformes numériques.
- Speaker #0
D'accord. Et c'est pas rien. Ça va jusqu'à toucher à la charte québécoise des droits et libertés pour y mettre un droit à la découvrabilité.
- Speaker #1
Ah oui, ce mot, découvrabilité, ça revient souvent. Qu'est-ce que ça signifie concrètement dans le texte de loi ? La loi le définit comme la disponibilité d'un contenu en ligne et surtout sa capacité à être trouvé facilement. Et elle précise même particulièrement par une personne qui n'en fait pas la recherche.
- Speaker #0
Donc les suggestions, les recommandations ?
- Speaker #1
Voilà, c'est ça. Penser aux suggestions sur Netflix, Spotify. Faire remonter le contenu francophone en gros.
- Speaker #0
Intéressant. Alors qui est visé par ça ? Quelles entreprises ? Et on leur demande quoi au juste ?
- Speaker #1
Principalement, ça touche les plateformes où on regarde des films, des séries ou celles où on écoute de la musique, des balados, des livres audio. Accessibles ici au Québec. Ok. et aussi les fabricants de télés intelligentes ou les appareils connectés du même genre.
- Speaker #0
Et il y a des exclusions ?
- Speaker #1
Oui, fait intéressant, les médias sociaux et les plateformes dédiées au contenu autochtone sont explicitement exclus.
- Speaker #0
Pourquoi, à votre avis ?
- Speaker #1
C'est une bonne question. Peut-être pour cibler d'abord le contenu plus, disons, éditorialisé, ou peut-être pour éviter la complexité des contenus générés par les utilisateurs sur les réseaux sociaux. Ce n'est pas précisé.
- Speaker #0
D'accord. Pour ceux qui sont visés alors, les obligations, elles sont lourdes.
- Speaker #1
Disons qu'il y en a plusieurs. On peut les regrouper. D'abord, un truc administratif s'enregistrer auprès du ministre de la Culture. Si l'entreprise est assez grosse, selon des seuils.
- Speaker #0
Qui reste à définir, j'imagine.
- Speaker #1
Exactement. Tout ça, ce sera dans les règlements. Ensuite, l'interface, les menus, les options, tout ça doit être en français par défaut. Logique. Et pour certaines boîtes, il faudra... aussi donner accès à d'autres plateformes qui, elles, respectent des critères de présence francophone. Encore une fois, détail à venir par règlement.
- Speaker #0
Ok. Enregistrement, français par défaut, accès. Et le contenu lui-même ?
- Speaker #1
Il y a des quotas. Oui,
- Speaker #0
c'est le gros morceau.
- Speaker #1
Elles devront offrir une certaine quantité ou proportion de contenu francophone, les chiffres précis, les pourcentages.
- Speaker #0
Par règlement aussi ?
- Speaker #1
Toujours. Et elles devront aussi activement travailler à la fameuse découvrabilité. Comment ? Par des recommandations, des mises en avant. Selon des normes, elles aussi, définies plus tard. Et j'ajoute, respecter des normes de métadonnées pour le contenu franco et fournir des données anonymes sur ce que les gens consomment, pour analyse par le ministère.
- Speaker #0
Ce qui est frappant, c'est vraiment cette dépendance aux règlements à venir. Ça laisse pas mal de flou pour l'instant.
- Speaker #1
Oui, c'est vrai.
- Speaker #0
Et comment on s'assure que tout ça va être respecté ?
- Speaker #1
Il y a des gendarmes du numérique québécois qui sont prévus. Ah ah ! En quelque sorte, oui.
- Speaker #0
La loi crée le Bureau de la découvrabilité des contenus culturels.
- Speaker #1
Au sein du ministère.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
Ce bureau aura des pouvoirs d'inspection, d'enquête. Le ministre pourra ordonner des corrections. Et surtout, il y a des sanctions. Ah, lesquelles ? Des sanctions administratives, pécrinières. Ça peut aller jusqu'à 15 000 dollars par jour de manquement.
- Speaker #0
Ah oui, quand même.
- Speaker #1
Et des amendes pénales. Là, on parle de montants jusqu'à 300 000 dollars. Et ça peut doubler si l'entreprise récidive.
- Speaker #0
C'est pas juste symbolique ?
- Speaker #1
Clairement pas.
- Speaker #0
Mais il y a une porte ouverte pour négocier des mesures de substitution si jamais une entreprise propose une autre façon d'atteindre les mêmes buts. Bon, si on récapitule, le Québec met en place un cadre légal assez costaud pour tenter de garantir une place visible, dit Vont, au contenu francophone, sur nos écrans, dans nos écouteurs, avec des règles assez précises pour les géants du net et les fabricants d'appareils. Au fond, qu'est-ce que ça représente cette démarche ?
- Speaker #1
C'est une intervention directe de l'État dans l'univers numérique pour des objectifs culturels. C'est une prise de position forte.
- Speaker #0
Et ça soulève quelles questions d'un point de vue journalistique et informatif ?
- Speaker #1
Plusieurs questions cruciales en fait. D'abord, comment ces règles, surtout celles qui viendront par règlement, vont vraiment s'appliquer à des entreprises mondiales avec des algorithmes qui sont souvent des boîtes noires ?
- Speaker #0
Oui, la question technique.
- Speaker #1
Exactement. Ensuite ? Quelle sera l'efficacité réelle ? Est-ce que ça va vraiment changer les habitudes des gens face aux tendances mondiales, aux préférences personnelles ? C'est difficile à dire. Et peut-être une dernière piste de réflexion pour aller plus loin. Au-delà de forcer la main par la loi, est-ce que l'écosystème numérique lui-même pourrait évoluer ? Est-ce qu'il pourrait valoriser intrinsèquement la diversité culturelle, le français inclus, sans qu'on ait besoin de lois aussi contraignantes ? C'est une question ouverte, je pense.