- Speaker #0
Quand je commence, je ne sais pas m'arrêter. Ouais. Je ne sais pas m'arrêter. Quand je commence, je m'en fous du premier verre. Moi, je pense déjà à la bouteille. Et comment atteindre enfin ce nuage rose, cet état où je peux enfin me poser. Il n'y a rien de rose.
- Speaker #1
On le voit prendre la parole sans filtre. partager son histoire avec sincérité, on entend ses mots, on admire son courage, mais connaît-on vraiment l'homme derrière le combat ? Aujourd'hui, dans un nouvel épisode du Deep Dive, on plonge avec Baptiste Mullier, ancien alcoolique, auteur et conférencier, patient expert en addictologie. De l'ombre à la lumière, ensemble on va descendre dans les profondeurs d'un parcours marqué par l'addiction, la résilience et la reconstruction. Bienvenue dans le Deep Dive, Baptiste.
- Speaker #0
Je suis ravi de t'accueillir. Ouais, salut Etienne. Ravi d'ĂŞtre lĂ . Ah ouais,
- Speaker #1
t'es cool. Du coup, est-ce que tu peux te présenter un peu pour ceux qui ne te connaissent pas ?
- Speaker #0
Je m'appelle Baptiste, 34 ans, j'habite à Paris, je suis l'aîné d'une famille de 5 garçons, j'ai souffert d'addiction de mes 15 à 24 ans. Et à partir de mon entrée dans les Alcooliques Anonymes, ce groupe de parole pour les personnes qui souffrent d'addiction, j'ai commencé à cheminer vers la reconstruction. Et aujourd'hui, j'ai été formé en tant que patient expert, donc j'accompagne des personnes qui souffrent d'alcoolisme.
- Speaker #1
Quand tu dis patient expert, je ne connaissais pas cette dénomination, du coup j'ai découvert ça, c'est en fait quand tu as... Raconte-moi un petit peu cette dénomination.
- Speaker #0
C'est un ancien patient. atteint d'une maladie chronique. Donc, ce n'est pas forcément addiction. Ça peut être le cancer, ça peut être d'autres choses. D'autres maladies chroniques étaient formées. Donc, moi, j'ai reçu ma formation au travers de l'APHP, les hôpitaux de Paris, qui ont délivré la formation. J'ai fait des stages à l'hôpital Bichat en cure. Et à la fin de ta formation, tu as la certification, le diplôme. Et le patient expert, il peut faire de l'accompagnement, mais il peut aussi faire de la sensibilisation, de la prévention, mais aussi de la recherche pour améliorer les soins.
- Speaker #1
Et j'imagine que quand tu fais de l'accompagnement, le fait que tu sois justement patient et que tu aies vécu cette situation, ça doit aider, j'imagine ?
- Speaker #0
C'est l'émergence de cette nouvelle ressource de soins. En fait, on voit qu'il manque le lien, il manque l'identification, il manque l'espoir. Peut-être qu'on va pouvoir dire des choses aux patients experts qu'on n'oserait pas dire aux médecins, peut-être qu'il y a une barrière avec la blouse blanche, et donc c'est vraiment un truc, je te prends par la main, je viens là où tu en es dans ton parcours, c'est pas une histoire de verticalité où je suis sur ma montagne et je vais te dire viens, viens, viens me voir, en fait je vais là où tu en es aujourd'hui, et je sais ce que tu traverses.
- Speaker #1
Ouais, bien sûr.
- Speaker #0
Bon, évidemment chacun a ses parcours, donc je ne prétends pas... connaître tout et j'ai pas solution à tout mais au moins il ya cette identification possible et et ce lien cet espoir est créé à partir de l'expérience moi je trouve ça super intéressant d'avoir de parler à quelqu'un qui sait de là où enfin papa route est passé et c'est sûr que ouais ça doit être ça doit être top une ressource parmi tant d'autres en fait je suis pas en train de dire que le patient expert se suffit à lui même évidemment que le corps médical est là pour pour d'autres choses et puis à d'autres formes de thérapie et puis on peut écrire on peut faire du sport on peut faire il ya plein C'est vraiment trouver chaussure à son pied. Mais moi, en fait, ce qui m'a manqué, ça a été de parler à des gens où il suffit d'un regard pour être compris quoi.
- Speaker #1
Ouais, c'est sûr. Ok, super intéressant. Peut être on va parler du coup de tes premiers, de tes premiers verres d'alcool. Comment ça s'est passé ? Du coup, de ce que j'ai compris, c'est que tu as eu l'alcool assez festif. Est ce que tu peux parler un petit peu de tout ça ? Ça a commencé à 14 ans, c'est ça ?
- Speaker #0
Ouais, 14, 15 ans. On est fin quatrième. On commence à . C'est l'heure vraiment des premières fois. On voit ton premier café en terrasse, ton premier ciné solo, les premiers dîners classe et les premières soirées en fait. Et t'es invité, il y a de l'alcool présent évidemment. T'es mineur, il n'y a pas de souci, c'est dispo partout, il n'y a pas besoin de ta carte d'identité pour en acheter. C'est vrai, c'est vrai.
- Speaker #1
C'est avec du recul.
- Speaker #0
Voilà , et donc c'est normalisé, on est dans une culture où c'est banalisé, tu vois tes parents boire, faire la fête, il y a l'apéro quand t'es enfant, donc en fait tu te poses aucune question, c'est présent, mais moi j'avais aucune conscience que ça avait des risques. Et effectivement en fait, ça a été très festif au début, j'ai adoré ça, le bifort, le fait de se retrouver entre mecs, dans la rue, et on va en soirée, et le temps de quelques heures en fait, t'as le monde qui s'offre à toi. Tu te sens libre, tu te sens tout puissant et l'alcool, c'est de l'essence. Tu vois, c'est quelque chose qui me permet au début de me sentir exister, de me sentir vivre. Ça m'apporte plein, plein de choses positives et c'est que le week-end. Papa, il est là , il est cadré, donc il me donne des horaires de rentrée. Il n'y a pas encore d'impact négatif, mais j'adore ça. J'attends impatiemment le week-end comme peut-être tous les jeunes en fait. Tu vois, mais il y a cet insouciance, cette naïveté et c'est... très vite associé à l'alcool, la fête, et très rapidement, en fait, un bon week-end, c'est un week-end où je vais sortir. Mais sortir sans alcool, c'est pas... Je suis pas câblé, tu vois, c'est forcément alcoolisé. Mais peut-être que toi, tu as les mêmes expériences.
- Speaker #1
Écoute, ce qui est assez intéressant, justement, c'est que, comme je te disais en off, nous, on se connaissait avant et on a fait quand même pas mal de soirées ensemble, je pense. On avait pas mal de potes en commun. Dans toute l'histoire que tu racontes, je me suis retrouvé effectivement pas mal là -dessus, sur le fait de sortir quand on a 14, 15, 16 ans, 17 ans, 18 ans. La difficulté de sortir sans boire de l'alcool, que c'est festif, tout le monde est extrêmement bourré dans le milieu, boîte de nuit et pas que j'imagine. Donc c'est sûr que ton bouquin est super intéressant. D'ailleurs on va en parler, le titre c'est...
- Speaker #0
D'avoir trop trinqué ma vie s'est arrêtée.
- Speaker #1
Ouais, ok. Et trop cool, c'est franchement le bouquin super intéressant, tu l'as écrit il y a deux ans c'est ça ?
- Speaker #0
Il a été publié en 2020. En auto-édition, on a fait le choix avec ma co-auteure Judith Lossmann, mais on a choisi l'auto-édition pour avoir encore un lien avec le lecteur. C'est-à -dire que moi, j'adore envoyer chaque exemplaire dédicacé. J'adore avoir cette proximité, d'avoir les retours.
- Speaker #1
En auto-édition ?
- Speaker #0
C'est-à -dire qu'on a, comment dire, c'est pas forcément moi qui l'ai fait, j'ai été aidé avec Judith, mais on l'a mis en page nous-mêmes. On a créé la couverture, la quatrième de couvre. Et puis, on l'a envoyé avec le format, le fichier. On l'a envoyé chez un imprimeur qui nous l'imprime. Livraison à domicile. Et donc, moi, j'ai un stock de livres à la maison. Je reçois les commandes. Je fais la dédicace et je les envoie par la poste. Et j'adore cette proximité parce que je reçois des mails, je reçois des messages Insta sur les retours directement. Et tu sais, en fait, pourquoi est-ce que je l'ai écrit ? C'est que je me suis dit, c'est pas possible que je sois le seul jeune et qui souffrent d'addiction et qui tombent progressivement dans l'addiction. Et ce que je voulais dire, c'est que moi, je suis un enfant qui n'a manqué de rien. J'ai eu une enfance très, très heureuse. Et j'ai commencé un peu comme tout le monde. Certains me diront que j'ai commencé jeune ou quoi. Mais en fait, c'est ce qui se faisait peut-être. À Paris,
- Speaker #1
je trouve que c'est plus tôt que moi quand je discute. Tu vois, avec des gens qui viennent d'autres villes, j'ai l'impression qu'on sort plus tôt, on boit plus tôt. Et il y a ce truc quand même, c'est vrai que c'est maintenant moi aussi, j'ai deux petites filles. Et je me dis que moi pareil, j'ai commencé à boire en mode, en faisant la teuf, quand on avait 13 ans.
- Speaker #0
13 ans,
- Speaker #1
c'était un ado en fait, tu vois, c'est fou quoi.
- Speaker #0
Ouais, ouais, ouais.
- Speaker #1
Avant d'entrer dans le vif du sujet, le Deep Dive est un podcast bienveillant où l'on va à la rencontre d'invités au parcours inspirant. Chaque semaine, je vous emmène avec moi pour explorer la partie immergée de l'iceberg. Le concept est simple. Un invité, trois niveaux de discussion. A chaque niveau, l'invité choisit un ou deux badges parmi quatre animaux polaires directement sur la tablette. On commence en surface avec la partie émerger de l'iceberg, des questions plus légères pour apprendre à mieux connaître l'invité. Ensuite, on passe en mode deep dive, direction la partie immerger de l'iceberg, puis dans les abysses pour des échanges de plus en plus deep. On vous laisse découvrir, c'est parti, l'exploration commence ici. Je vais te faire choisir un badge du coup. Tu choisis le badge et on va en discuter après.
- Speaker #0
Mais je peux choisir celui-lĂ ? Oui,
- Speaker #1
tu cliques sur celui que tu veux.
- Speaker #0
J'aime bien le pingouin.
- Speaker #1
Donc lĂ , on a un de tes posts Insta.
- Speaker #0
Waouh ! J'ai longtemps hésité avant de partager cette photo parce que c'est une photo style un peu avant-après avec une photo de moi vraiment pas bien. La tête et le physique bouffis par l'alcool et vraiment dans le mal. J'ai dit même que l'alcool ronge, tu vois, l'alcool me ronge. Et à côté, à droite, tu as une photo Je crois que j'ai deux ou trois ans d'abstinence. Donc, on voit... Enfin, on ne me reconnaît pas. Le changement, il est violent.
- Speaker #1
C'est fou, cette photo.
- Speaker #0
Ouais. Et en fait, ce que je voulais dire, c'est que, jeune, on peut en arriver là . Mais je publie aussi d'autres photos en mode, « Ah, OK, peut-être qu'on n'a pas besoin d'en arriver là pour se prendre en main, pour se poser des questions par rapport à sa relation à l'alcool. » Mais je voulais juste, en fait, montrer le... qu'il y a de l'espoir aussi. Et que c'est un truc de malade à quel point l'alcool peut te défigurer. Mais aussi que jeune, il y a de l'espoir. Tu peux t'en sortir. Ça me bouleverse, cette photo. De me voir comme ça, c'est... Ça me replonge dans des années de souffrance où je ne savais pas qui j'étais, où j'avais juste envie de survivre, voire même mourir en fait. Est-ce que vraiment j'avais envie de survivre ? L'alcool me permettait de sortir la tête de l'eau, mais en même temps, l'alcool me détruisait à petit feu. Ça a été ma façon de mourir. On pourra en discuter un peu plus tard peut-être. Mais l'alcool, ça a été au début de l'essence me permettre de me sentir exister, mais ça a été tout le contraire en fait. C'est un mensonge pour moi l'alcool.
- Speaker #1
Ok, on va choisir du coup peut-être un deuxième badge aussi. Je te laisse choisir. Pareil, c'est un de tes posts Insta.
- Speaker #0
Allez hop !
- Speaker #1
Donc là , pareil, tu peux juste décrire pour ceux qui nous écoutent.
- Speaker #0
C'est ma photo. Très récemment, j'ai fêté mes 10 ans sans alcool. Fais citation. Ouais, de la bombe, de la bombe. Je peine encore à réaliser ce que signifie une décennie. Enfin, une décennie, ça a été monstrueux. Je ne me rends pas compte. Quand je commence, je ne sais pas. où ça va m'amener, je suis sur un chemin très bancal, hyper flou, je suis dans le brouillard, et ça a été vraiment une histoire d'un jour à la fois. Il y a certaines personnes qui me disent, « Ouais, mais comment t'as fait dix ans ? » Mais en fait, je leur réponds, « Mais je suis sur le même chemin que toi, en fait. Je suis un peu plus avancé, mais j'ai commencé comme toi par un jour un, sans savoir où ça allait m'emmener. » Mais je suis... tellement reconnaissant d'avoir réussi à m'entourer d'un bon serrail de soins qui me convenaient. C'est important,
- Speaker #1
l'entourage.
- Speaker #0
Jamais je n'aurais pu le faire seul.
- Speaker #1
Est-ce que justement, tu as des relations amicales ou autres que tu as dĂ» couper ?
- Speaker #0
Certaines, mais naturellement. Moi, j'ai eu peur de la confrontation, mais en fait, il y a beaucoup de choses qui se font naturellement, où petit à petit, tu te rends compte que, à part l'alcool, qu'est-ce que je partage avec cette personne ? Moi, j'appelle ça des compagnons de beuverie ou même des alcoolites. Les alcoolites. Pas mal ça. J'aime bien ça. Moi, je pensais que je les aimais. Effectivement, on rigolait ensemble, tu vois, on se tape des barres. Mais à part se retrouver pour boire, en fait, je partage pas grand-chose. Et vu qu'on boit, mes souvenirs sont flous, je retiens pas grand-chose. Et moi, en fait, un de mes grands bouleversements, ça a été en tout début d'abstinence. enfin pas en tout début, mais au bout de plusieurs mois et même au bout de plusieurs années, de me rendre compte que mes véritables potes, ceux que j'aime et ceux qui m'aiment en retour pour qui je suis, je ne savais pas grand-chose d'eux. Et ça, ça a été vraiment une souffrance de me dire, mais en fait, putain, c'était potes, vraiment. Et l'alcool ne t'a pas permis de nourrir l'amitié, de construire quelque chose. Donc je suis tellement content aujourd'hui de me souvenir et d'être là , d'être présent, tu vois, dans les regards, de me souvenir, de construire quelque chose de durable. Je parle vraiment de moi, je ne suis pas en train de dire que l'alcool est mauvais pour tout le monde, mais en tout cas, moi, ma relation, c'était impossible de construire quoi que ce soit avec quelqu'un, tu vois. On pourra aussi parler de mes expériences amoureuses, mais comment veux-tu construire un couple alors que ma priorité, c'est la bouteille qui est sur la table ?
- Speaker #1
Ouais, je suis d'accord. Et par rapport justement, si on revient Ă ce poste, Ă tes 10 ans d'abstinence,
- Speaker #0
c'était quoi le déclic ?
- Speaker #1
Je crois que tu avais une date, j'ai noté, c'était le 31 mars 2015. En 2015,
- Speaker #0
ça remonte, ouais.
- Speaker #1
Et du coup, ah oui, donc en fait tes 10 ans c'était il y a un mois quoi. Ouais, il y a un mois. Et ce 31 mars 2015, qu'est-ce qui s'est passé ? Raconte-nous un petit peu.
- Speaker #0
C'est la date de ma dernière cuite, ma dernière consommation d'alcool. Je ne sais pas que c'est ma dernière consommation d'alcool à ce moment-là . C'est une horrible cuite et je suis dans le noir. Je suis dans ma piole en train de... en gueule de bois, mais vraiment avec des idées noires et j'ai juste envie de crever, quoi. Bon, ça fait longtemps que j'ai envie de crever, mais là , il y a... j'ai envie que tout s'arrête cette souffrance elle est intenable je sais que j'ai un problème mais je sais pas comment faire pour m'en sortir je me nourris plus je veux vraiment je veux plus exister quoi et quand tu dis cette souffrance c'est tu parles de quel type de souffrance c'est physique et émotionnel psychologique je suis en dépression l'alcool me plonge dans cette dépression et physiquement j'ai juste tellement, tellement mal de cette consommation d'alcool à outrance. La gueule de bois, elle est mortifère. Sans parler de dépendance à l'alcool, on a le droit de se poser des questions sur sa relation à l'alcool. C'est sûr, c'est sûr. C'est ça peut-être le message qui est important. Moi, je témoigne de mon alcoolisme, mais en fait, c'est un sujet plus général vu que c'est banalisé que 90% des Français boivent. Tu vois, ils consomment une drogue légale.
- Speaker #1
Pour moi, ça l'est, c'est vraiment une drogue.
- Speaker #0
Ben ouais, mais... Ça change. C'est un psychotrope qui altère ton comportement et donc c'est une drogue. Et addictogène qui en fait, je ne suis pas médecin, mais en fait, ça concerne tout le monde. Il faut vraiment que ce soit clair, ça concerne tout le monde l'addiction, c'est-à -dire que l'alcool. Dans mon cerveau, il va se passer des choses, que je sois dépendant ou non, ce pic artificiel de dopamine va me pousser à prendre le deuxième verre, que je sois dépendant ou non. En revanche, il y a des cerveaux qui sont ainsi faits pour savoir dire stop et d'autres qui ne vont pas savoir dire stop. Mais en fait, l'alcool est problématique ou peut être problématique pour tout le monde. Personne n'est à l'abri de par la composition de l'alcool. C'est une drogue, ça présente des risques, et donc ça serait plutôt intéressant qu'universellement on puisse se poser des questions type pourquoi est-ce que je bois ? Est-ce qu'il y a des raisons ? Est-ce qu'il y a un mal-être que je cache ? Est-ce que ça me permet de faire des choses ? Est-ce que l'alcool est mon médicament contre l'angoisse, contre mes phobies sociales, pour oublier, pour anesthésier ? La place que prend l'alcool dans ma vie ? Est-ce que j'associe tel événement, tel pote, telle émotion à l'alcool ? La place que ça prend,
- Speaker #1
Non ? Et je pense qu'effectivement, on devrait apprendre aux ados de se poser ce genre de questions, parce que ça devient beaucoup plus clair. Et c'est intéressant, effectivement, que chacun se dise pourquoi je bois. J'imagine qu'il y a plein de façons de boire, parce que si quelqu'un est introverti, il devient extraverti, s'il est timide, il est moins, s'il a des angoisses, il en a moins. J'imagine que chacun...
- Speaker #0
Chacun a ses raisons. Ouais. Il peut y avoir des raisons très saines. Il y a des personnes qui dégustent très bien un verre de vin en terrasse et qui ne le terminent même pas.
- Speaker #1
Et ça, je suis d'accord. Mais c'est vrai que quand tu es jeune et que tu prends une bouteille de rosé à 1 euro chez l'épicier, je ne sais pas si c'est de la dégustation.
- Speaker #0
Non, non, c'est la recherche pour les effets. Moi, c'est vraiment les effets que j'adorais. Mais ça aussi, on pourrait s'interroger sur pourquoi est-ce qu'à tout prix, je cherche à me transcender, à sortir un peu des limites de mon corps. Moi, pourquoi est-ce que j'ai bu ? c'est que J'ai un corps limité et puis il y a peut-être une personnalité que je n'aime pas beaucoup, mon introversion, ma timidité, ma sensibilité et je n'ai pas envie d'être ce mec-là en bande. Ce n'est pas tant valorisé que ça et moi, il y a ce côté assez intégration dans le groupe grâce à l'alcool. On fait la même chose, le bifor, les jeux d'alcool et on se crée un personnage.
- Speaker #1
Tu penses qu'il y a plus de risques chez les mecs que chez les filles ?
- Speaker #0
Non.
- Speaker #1
Je sais pas parce que comme tu parlais de groupe et que les mecs tu vois il y a plus cette posture ouais moi si je bois je tiens bien l'alcool etc pas forcément ?
- Speaker #0
Pas forcément et puis on voit que maintenant les filles boivent pareil.
- Speaker #1
Tu penses qu'il y a autant de ce qu'on appelle c'est quoi c'est le binge drinking c'est ça ? Ouais binge drinking. Il y en a autant qu'avant ?
- Speaker #0
Bah le binge drinking il est en fait les statistiques... Et les lobbies d'alcool balancent ça comme chiffre. Ils disent oui, mais arrêtez de nous taper dessus parce que la consommation baisse. Et oui, effectivement, depuis des années et des années, la consommation en France baisse. Mais ça ne veut pas dire qu'il y a moins de problèmes. Il y a autant d'alcoolos dépendants, même si la consommation baisse. Et en revanche, les jeunes se focalisent beaucoup plus maintenant sur le binge drinking, le fait de boire des quantités massives justement pour atteindre les effets le plus vite possible possible. Et ça, en fait, quand notre cerveau est encore un organe immature, il arrive à maturité à l'âge de 25 ans. Quand je commence à boire avant 25 ans, j'augmente mes risques de devenir dépendant. Parce que mon cerveau, sa capacité à pouvoir dire stop, ça, à 15-16 ans, il n'est pas encore fini ton cerveau. Donc, tu augmentes tes risques de 30 %.
- Speaker #1
C'est énorme. Tu me disais que tu avais un enfant, il a quel âge ?
- Speaker #0
Il a un an et demi. Ok.
- Speaker #1
Qu'est-ce que tu dirais aux jeunes parents, et pas que, aux parents tout court, tu vois, qui commencent à avoir des ados, les ados veulent découvrir peut-être l'alcool, etc. Est-ce que tu aurais un conseil à donner à ces parents par rapport à ça ?
- Speaker #0
C'est une très bonne question. Je n'ai pas de réponse toute faite. Je dirais qu'il y a beaucoup de choses qui se passent au travers du dialogue, de la communication. et de faire peut-être attention à certains messages parfois subliminaux que l'on envoie je pense au je pense à un truc très banal mais l'apéro l'été en fait il ya ce côté très festif où les enfants sont autour ok il ya des chips des cacahuètes et puis il ya le jus d'orange pour les enfants mais les parents ils ont leur pastis l'on faisait la sont tout ça est en fait l'enfant mais dès deux trois ans il capte que bas mon oncle il change de comportement au bout de verre « Ah tiens, il fait rigoler la galerie ! » Et moi, mes parents, ils vont me dire « Ah tiens, prends du champomy, c'est le champagne des enfants. » En fait, ce que tu transmets à l'enfant, c'est que, adulte, tu as accès à ça. Et ça fait rigoler, donc c'est cool, c'est fun. Et figure-toi que dès 3 ans, un enfant va savoir simuler lui-même un état d'ébriété alors qu'il n'est pas bourré, tu vois. Parce qu'il veut aussi lui faire rire. Et donc, en fait, tu vois, tu transmets des messages que la fête, c'est uniquement au travers de l'alcool. Tu vas faire rire uniquement. Et donc, en fait, c'est d'essayer de déconstruire tout ça. Peut-être qu'on peut essayer de faire un apéro où il n'y a pas... Voilà ce à quoi je pense, mais ça passe au travers de la communication. Et pas du tout en mode anti-alcool, à dire « Ouais, c'est dangereux, dangereux » , mais plutôt dans « Je te laisse faire tes choix. » Ados, t'es à un âge où t'as envie de dépasser, de te tester. C'est normal, cette phase. Mais je serai là si ça dérape.
- Speaker #1
Donc la communication pour toi, et est-ce qu'il y a... Est-ce que, imagine...
- Speaker #0
D'être vrai, tu vois, de dire que ça présente des risques. Moi, j'ai jamais eu ça. Mes parents m'ont jamais dit, l'alcool, il y a des risques d'addiction. On me parlait des substances illicites.
- Speaker #1
Mais c'était... Nos parents, c'était encore une autre génération. Alors imagine nos grands-parents. Mais tu vois, genre, moi je connais même des gens, ils avaient, tu vois, la tradition, la petite goutte de vin dans le biberon, tu vois.
- Speaker #0
Ouais, ouais.
- Speaker #1
Non mais quand tu y penses,
- Speaker #0
c'est un peu faux, quoi. Bah oui, à l'époque...
- Speaker #1
Les pétlones ont trempé le doigt, tu vois, moi j'ai trempé le doigt dans le verre de vin, je sais pas quel âge j'avais, peut-être 8-9 ans, c'est fou quoi.
- Speaker #0
On a une responsabilité. Je peux comprendre les parents qui disent je préfère que la première gorgée se fasse en famille plutôt que quelque chose de pas trop contrôlé entre potes dans la rue, mais tu fais consommer une drogue. En fait, l'idée, c'est toujours remplacer le terme alcool par une drogue illicite. Est-ce que tu dirais, oh, ça va, quelques rails de coke en famille ? En fait, tu vois, ça choque. Mais c'est la même chose. Les statistiques montrent. Il y a un graphe qui est impressionnant, qui montre la dangerosité des drogues et qui classe les drogues selon leur dangerosité. L'alcool arrive en premier devant l'héroïne, devant la coke, devant... Et ce n'est pas une histoire de « ah oui, c'est parce qu'il y a plus de consommateurs » . Non, c'est pondéré. Mais en fait, ce graphe, il prend en compte à la fois les dangers que l'on se fait soi-même, les dangers physiques, les dangers sur notre santé mentale, mais aussi sur les conséquences sur l'entourage. Et donc, l'alcool, les conséquences sur l'entourage, elles sont dramatiques. Et l'alcool arrive en premier. L'alcool, c'est très dangereux. Ouais,
- Speaker #1
c'est sûr.
- Speaker #0
c'est sûr c'est fou c'est fou quoi c'est une drogue légale ouais mais qui est mais je peux comprendre aussi enfin tu vois mon papa il a il s'est reconverti dans le vin c'était sa passion et donc j'ai je suis allé voir son taf les cuves les vies passionnant ouais parce que non moi j'adore aussi produit noble fin c'est sûr c'est un beau produit mais mais tu vois tout ce qui est terroirs, le savoir-faire, c'est hyper inspirant. Donc j'entends qu'il faut protéger notre héritage culturel, on est fiers de ça, mais c'est... Faut le réguler,
- Speaker #1
tu crois ?
- Speaker #0
En fait, on n'est pas assez informé. C'est pas du tout que... Mais on est mal informé. Soyons clairs, l'alcool, c'est pas parce qu'on boit que du bon vin, qu'il n'y a pas des risques. Il y a de l'éthanol dans le produit. L'éthanol, c'est ça la substance euh... addictogènes, psychotropes, c'est pas parce que tu bois du oeuf clico ou un bon cru que c'est pas dangereux en fait. Ok,
- Speaker #1
je te propose de rentrer en mode deep dive, même si on a un peu commencé. Je te laisse cliquer sur le bouton tout en bas. Du coup, bienvenue en mode deep dive. Donc là , hop, on descend sous l'iceberg et je te laisse choisir un nouveau badge pour voir ce qu'il y a derrière
- Speaker #0
Oui, bonjour Baptiste. Je voulais savoir par rapport à ta sobriété, quels étaient tes séquelles physiques et psychiques, mentales, que tu pouvais encore avoir aujourd'hui ?
- Speaker #1
Pas évident cette question-là .
- Speaker #0
Non, non, mais... Alors je touche du bois, physiquement ça va. J'ai fait des check-up. Alors au début, il y avait quelques taux qui n'étaient pas très bons. Mais physiquement, mon corps va très très bien. Je n'ai pas de problème au foie, pas de problème cardiaque. C'est juste qu'en fait, il faut savoir qu'après beaucoup d'excès, il y a peut-être des maladies qui vont se déclencher après, liées à cette consommation. Donc voilà , peut-être que sur le papier, il n'y aura peut-être pas marqué que c'est dû à cause de ma consommation d'alcool d'avant. mais peut-être que mon cœur a pris cher, peut-être qu'un autre organe a pris cher. Je vais bien. En tout cas, je ne regrette absolument pas d'avoir arrêté à 24 piges. Je dirais que pour répondre à sa question, c'est plutôt psychologiquement, les séquelles sont là , dans le sens où l'alcool est un dépresseur. Il faut le savoir, l'alcool c'est pas du tout quelque chose qui détend ni qui te met dans un truc d'exubérance.
- Speaker #1
Quand tu dis dépresseur, j'imagine que c'est l'inverse de antidépresseur, c'est quelque chose qui te tend du coup, qui te crée des angoisses ?
- Speaker #0
Ça va nourrir tes angoisses et ça va développer de la dépression. Ça va nourrir ta dépression. Et c'est ça un des cercles vicieux les plus mortifères, c'est qu'au début tu bois pour te sentir mieux, mais tu te sens de plus en plus mal. Ton cerveau, il a associé l'alcool à quelque chose qui va te permettre d'aller mieux. Donc, tu retournes vers l'alcool. Et en fait, on est dans un cercle vicieux. En fait, le problème, c'est pas... Le problème, c'est l'alcool. C'est sûr. Le blues du dimanche soir. Je pense qu'il y en a... Il est dur, celui-là . Tu le connais ? Bah, si tu es... Il y a beaucoup de raisons pour lesquelles il y a le blues,
- Speaker #1
évidemment. Il est encore plus dur en gover, c'est ça que je veux dire.
- Speaker #0
C'est ça. en fait, parfois, pourquoi est-ce que t'es en blouse ? tu es encore en descente. C'est donc normal. Et même si tu n'as bu que le vendredi soir, la descente, parfois, c'est 48-72 heures. Donc, c'est normal que le dimanche soir, tu ne te sentes pas bien. Mais pas forcément gueule de bois. Tu peux ne pas être en gueule de bois, mais quand même en descente et ressentir, je ne sais pas, du vide, de la dépression, envie de rien, perte de sens de sa vie. Pose-toi la question. Parce que c'est peut-être lié à l'alcool. Il y a parfois une explication. ça peut être très commun d'avoir un blues le dimanche si on s'est mis... Ouais,
- Speaker #1
je suis d'accord. En tout cas, ce qui est sûr, c'est que si t'es en go-over, moi, pour ma part, ça a décuplé, tu vois, tout ce qui est anxiété, etc. Donc, tu te sens beaucoup plus mal. Mais d'ailleurs, tu vois, c'est marrant parce que là , s'il y a des jeunes, je sais pas, de 15, 16, 18 ans qui écoutent, ils vont dire, bah, moi, je suis pas dans le go-over en 6 heures. C'est vrai que moi, à l'orage, tu vois, le lendemain, midi, c'est bon, on chantait plus d'effets. maintenant à 30 piges je me rappelle tu vois il y a 3 ans la dernière cuite que je me suis mis Je mets six jours à récupérer.
- Speaker #0
Ah mais c'est mortifère.
- Speaker #1
Non mais vraiment, entre 20 et 30 ans, tu vois vraiment la diff' quoi.
- Speaker #0
Moi, c'est arrivĂ© très tĂ´t. Je buvais tellement qu'Ă 19, 20 ans, dĂ©jĂ j'Ă©tais sur les rotules. Et je buvais pour me redonner des coups de peps, tu vois. Je l'appelle ça l'alcool courage. Tu vois, oĂą en fait, t'es sur les rotules, mais il faut encore y aller, il faut y retourner. Il y a un peu le faux mot, la peur de rater quelque chose, la peur de ne pas ĂŞtre prĂ©sent. Et moi, c'est vraiment des notions de performance. En fait, il faut que je sois lĂ . J'ai besoin d'ĂŞtre dans ce groupe-lĂ , de faire la fĂŞte. Donc, je ne rate rien. Mais l'alcool, c'est ma bĂ©quille. En fait, vu que l'alcool nourrit les angoisses, je me suis retrouvĂ© abstinent avec des anxiĂ©tĂ©s que je n'avais pas avant. Typiquement, l'agoraphobie. ça c'est venu Ă cause de la colle c'est venu Ă cause de la l'Ă©cart et dans le bouquin ouais mais j'Ă©tais terrifiĂ© de sortir de la maison sobre et j'Ă©tais terrifiĂ© par par les gens terrifiĂ©s qui m'arrive quelque chose dans la rue prendre les transports en commun c'est impossible mais c'est moi et ça en fait je le sais c'est l'alcool qui a qui a créé ces anxiĂ©tĂ©s nourrit tout ça et qui m'a rendu handicapĂ© dans ces situations lĂ
- Speaker #1
Tu penses que tu as vu une variabilité du fait de cette situation ? C'est qu'en fait, tu t'es habitué à la puissance que te procure l'alcool et que du coup, quand tu n'es pas alcoolisé, tu te sens encore moins bien en fait ?
- Speaker #0
C'est ça. Je fonctionne grâce à l'alcool dans certaines situations. Moi, j'ai eu des phases où je buvais dès le matin, mais il y a aussi plein de phases où je buvais, où je pouvais ne pas boire pendant deux jours. Il n'empêche que quand je commence, je ne sais pas m'arrêter. Ouais, je sais pas m'arrêter. Quand je commence, je m'en fous du premier verre. Moi, je pense déjà à la bouteille et comment atteindre enfin ce nuage rose, cet état où je peux enfin me poser. Il n'y a rien de rose. Et tu as lu mon livre, en fait, ce que je cherchais, cette naïveté, cet endroit de détente où mon cerveau se met en pause, il a volé en éclats à cause d'un drame. J'en sais rien si on peut en parler, mais...
- Speaker #1
Si tu veux en parler.
- Speaker #0
Ouais, moi, j'ai aucun souci à en parler. Je buvais vraiment pour fuir la réalité. Parce que les contours de ma vie, quand ils réapparaissaient, c'était... Je ne me sentais vraiment pas à ma place. Une telle souffrance. l'exigence que l'on mettait sur moi avec ce chemin tout tracé où il faut faire si il faut faire ça toutes ces injonctions j'avais tellement du mal à trouver ma place donc j'avais besoin d'alcool pour aller dans mon monde où en fait tout le monde me fout la paix mais dans ce monde là moi je pensais qu'il était tout naïf tout rose tout se passe bien et un soir alcoolisé je me suis fait violer et il se monte de bisounours il a volé en éclats tout Je suis défragmenté en fait. Déjà je ne sais pas que ça peut arriver à un jeune homme hétérosexuel de se faire violer par un homme, je ne sais pas que ça existe. Et puis psychologiquement, mais t'es...
- Speaker #1
T'avais quel âge ?
- Speaker #0
22.
- Speaker #1
Et juste pour recontextualiser si ça te va, c'était en boîte, et je crois que s'il t'a donné un verre de...
- Speaker #0
C'est ça, il m'a offert un whisky coca, et après ça, je perds le contrôle de mon corps. Je sais pas s'il m'a mis un truc dans le verre, je sais juste que j'étais déjà très alcoolisé, et qu'après ce verre, je... Je n'arrive plus à dire non. Et il fait ce qu'il veut. et et c'est je sais pas trop comment l'exprimer déjà il ya énormément de colère il ya énormément d'impuissance de dégoût de soi même de la dépression qui se rajoute en plus et je finis aussi par prendre des médicaments parce que je deviens officiellement en dépression il s'avère que c'était bien plus profond que ça ça avait un autre terme s'appelait de l'alcoolisme mais ma mère pensait à de la dépression et elle m'a emmené voir des psychiatres des psychologues tout Tout ça pour... essayer de parler de ce qui s'était passé. Et le médecin me prescrivait anxiolytiques, somnifères, antidépresseurs. Et moi, je mélangeais tout ça avec l'alcool, comme des bonbons, en fait. Et les Xanax, le Valium, c'était des bonbons, en fait. Je suis dépendant, je suis un addict, en fait. Il ne faut pas me donner ces trucs-là . Ça devient mécanique, ritualisé. J'en ai besoin pour fonctionner. Tu penses,
- Speaker #1
quand tu as une nature addict, ça peut aller sur plus de sujets, en fait ?
- Speaker #0
tu vois aussi bien sur les médocs que sur l'alcool que sur la foot que sur un peu tout en fait ouais et ça c'est propre à chacun donc dans le sens où il ya des gens qui sont mono addict d'autres qui vont être plus riz moi je sais que j'ai une sensibilité à l'alcool j'ai pas de sensibilité avec la weed par exemple ça m'a jamais vraiment intéressé la coke non plus en revanche les médocs ouais les réseaux sociaux le portable ouais le travail C'est un chouïa bancal, tu vois. Dans ce côté, toujours plus, toujours plus, avec parfois des impacts négatifs où en fait, tu mets de côté des vrais liens, des vrais liens sociaux. Ouais, ouais.
- Speaker #1
Et pour en revenir du coup à cette histoire de viol qui est détaillée dans le livre, ce qui est terrifiant, t'as réussi à te remettre de ça, comment ça se passe ?
- Speaker #0
Moi je suis dans le turfu en fait, je suis dissocié de mon corps, je ressens plus rien, c'est ouf, je voyais ces scènes dans les films et en fait c'est vraiment quelque chose de pulsionnel qui m'est arrivé, c'est que tu... tu te fous dans la douche et t'es en larmes et tu t'assieds dans la douche et l'eau ne fait pas disparaître l'odeur. L'eau ne fait pas disparaître. Et donc tu te frottes, tu te griffes, tu te brosses les dents et tu te fais saigner les gencives tellement t'as de la haine contre toi. C'est des scènes que je voyais dans les films. En fait, instinctivement, t'as juste envie de te laver et ça part pas. Et après, ma maman m'emmène faire des démarches administratives, les flics, tout ça. Mais moi, je ne sais pas, je raconte évidemment, mais je suis dissocié de ma propre personne. Ça n'a pas donné suite. Après, je suis allé voir des psys, mais je buvais encore.
- Speaker #1
Et ça a renforcé justement cette alcoolisme, tu penses, cette histoire ?
- Speaker #0
Ça m'a donné encore plus de raisons de boire et ce qui a permis de faire durer mon alcoolisme parce que ma maman, elle était toute pleine d'amour et pleine d'empathie.
- Speaker #1
T'as une relation d'eau avec ta mère.
- Speaker #0
C'est trop mignon. C'est mon idole. C'est incroyable. Hallucinant d'avoir une relation comme ça et je suis tellement fier et content de pouvoir tisser une relation authentique avec elle maintenant.
- Speaker #1
T'es presque aussi proche de ta mère que du coup on l'a pas dit mais t'as un frère jumeau.
- Speaker #0
Ouais, c'est des socles dans ma vie où évidemment j'ai une admiration totale pour ma mère qui m'a sauvé la vie. Et mon frère jumeau, c'est vraiment cette symbiose, c'est mon tout, c'est ma mère, c'est ma chère. Mais on a une relation un peu plus pudique.
- Speaker #1
Vous êtes vrai jumeau, c'est ça ?
- Speaker #0
Ouais, vrai jumeau, donc on est identiques. 99,999% de gĂŞne en commun. C'est fou.
- Speaker #1
Ça doit être bizarre cette sensation d'avoir une sorte de double.
- Speaker #0
Oui, c'est perturbant, mais figure-toi que c'est un cadeau empoisonné. Je ne changerais rien. Avoir Marin, c'est un tel cadeau. Mais en revanche, c'est vrai que quand j'ai fait mon analyse et que j'ai essayé de comprendre certaines raisons pour lesquelles j'ai bu, ma gémelléité, évidemment, entrait dans une des top priorités. Parce que quand tu es jumeau, tu grandis avec un nous. Le nous. Tu grandis pas avec le je. Donc mettre des limites, s'affirmer, je ne sais pas. Donc moi je me suis construit en mode le nous est plus important que moi, je vais m'oublier et je vais faire passer les désirs de l'autre avant les miens. Ce qui évidemment quand on commence à tomber dans de la souffrance et dans... en fait moi me faire du mal j'ai aucun problème moi je m'oublie tu vois l'autre est plus important que moi donc dans l'auto-destruction en fait il ya beaucoup de choses qui se jouent et même dans comment dirais-je le le fait de la construction de son identité elle est beaucoup plus floue dans avec un jumeau ça doit être dur ça va pas être évident c'est ce qu'on pouvait sa place trouver qui on est s'affirmer c'est en tout cas pour moi ça a été violent il y avait de la rivalité un petit peu Non.
- Speaker #1
Sportive ou autre. Que toi, tu me disais, donc toi, c'était plus le sport ton truc, lui, c'était plus les études, si j'ai compris.
- Speaker #0
Ouais, après, évidemment qu'il était bon en sport, mais disons que sur le papier, il était meilleur en cours et moi, j'étais meilleur en sport. Je courrais plus vite. C'est ça, tu vois. Et donc, oui, effectivement, j'étais fier dans les tournois sportifs où j'étais fier d'arriver premier et lui deuxième. Mais il n'y avait pas cette rivalité. C'est plutôt un cocon. Et on se protège du reste du monde parce qu'on se suffit à nous-mêmes.
- Speaker #1
Et alors, justement, comment lui, il a vécu ça quand toi, t'as sombré dans l'alcoolisme ? Est-ce qu'il a ressenti ça ? C'était dur pour lui ? En tant que jumeau, comment ça se passe ?
- Speaker #0
Il en a énormément souffert. Mais notre relation pudique, bon, qui était... C'est une présence, c'est une présence constante, mais mettre des mots sur des choses, on a eu beaucoup de mal. Aujourd'hui, ça va beaucoup mieux, mais on a eu beaucoup de mal à se dire les choses. Donc... Merci. Il a souffert en silence. Et après, les moments où vraiment ça a basculé dans de la déchéance, il n'était pas là , il était à San Francisco. Donc, il a souffert de loin, mais il n'était pas vraiment là pour me prendre dans ses bras. Et encore une fois, là , tu vois, l'abstinence me permet de... J'en ai parlé pour ma maman, mais pareil, mon frère jumeau, mes autres frères, mais qu'est-ce que je suis content de... de tisser des liens vrais tu vois et de vraiment sentir que j'ai un endroit où il y a de la tolérance, de l'amour, de la bienveillance qu'on va pas se juger, enfin qu'est-ce que c'est, j'ai beaucoup de chance,
- Speaker #1
j'ai tellement de chance parce que du coup vous êtes 5 frères et soeurs si je me rappelle ouais on est 5 mecs,
- Speaker #0
je suis l'aîné avec mon frère jumeau et ensuite j'ai 3 autres frères 5 mecs c'est chaud,
- Speaker #1
c'est de la bombe ils ont kiffé tes parents ?
- Speaker #0
ça doit être intense quand même Bon, j'imagine qu'ils ont quand même souhaité avoir une fille à un moment donné, mais elle est très fière de ces cinq gars. Elle est entourée, tu vois, elle a sa meute autour.
- Speaker #1
Et justement, toi, ton socle familial, ça a été important, c'est un vrai soutien. Donc le fait de pouvoir parler de ça avec ton frère, tes frères, ta mère, etc. Donc toute la partie alcoolisme.
- Speaker #0
bah en fait l'addiction c'est une maladie du lien qui se soigne par le lien c'est une maladie du lien parce que je remplace en fait ma réponse pour tout ça devient l'alcool et je me sens de plus en plus seul tu vois la solitude elle détruit tout le temps que que l'addiction moi je me réfugie tout seul dans des parcs avec mes canettes aux pieds je vois plus personne je mens je suis C'est qui en plus était...
- Speaker #1
Grave entouré, t'avais plein de potes. Tu te sentais seul malgré...
- Speaker #0
Je me sentais seul malgré cet entourage.
- Speaker #1
C'est pas parce que t'as un entourage que tu te sens pas seul.
- Speaker #0
Exactement. Mais il y avait tellement cette... Tu vois, je me sentais inadapté dans la société dans laquelle je vivais. Et j'ai préféré mettre un voile dessus, mettre des œillères. Et l'alcool a été le bonbon parfait, tu vois. Qui m'a détruit. Qui m'a détruit. Mais ça se soigne par le lien. Alors, ce n'est pas forcément des liens familiaux, ça peut aussi être des liens thérapeutiques. Moi, ce qui m'a sauvé, c'est les groupes de parole, de rencontrer des semblables, des gens qui vivent la même chose que moi.
- Speaker #1
Par rapport aux groupes de parole, du coup, tu as fait les Alcooliques Anonymes, c'est ça ?
- Speaker #0
Oui, c'est ça.
- Speaker #1
Et comment ça se passe ? Comment ça se passe, les Alcooliques Anonymes ? Donc ça, c'est une association, une organisation qui est mondiale. Aux États-Unis, on entend AA, etc. En France, c'est le même système. Raconte un petit peu.
- Speaker #0
C'est le même système. C'est des groupes de parole, il y en a beaucoup à Paris, il y a un site internet où on voit tous les groupes qui sont présents en France, avec les horaires, les adresses, et tu te pointes. Et c'est terrifiant !
- Speaker #1
Tu t'en rappelles le premier jour du coup ?
- Speaker #0
Ouais, je me souviens, c'est ma maman qui m'avait accompagné, sa présence m'avait aidé, moi j'avais 24 piges, j'avais accepté de l'aide. J'ai pas été tiré, mais j'étais terrifié parce que c'est terrifiant d'admettre son alcoolisme. C'est terrifiant d'admettre sa vulnérabilité et d'avoir besoin d'aide. Au début, on pense qu'on a failli quelque part. J'ai pas réussi à contrôler. Je suis pas comme les autres. Eux, ils peuvent contrôler. Moi, non. Moi, ça m'a détruit. En fait, c'est...
- Speaker #1
Mais reconnaître, j'imagine que ça doit être le début du process de guérison.
- Speaker #0
C'est ça. La prise de conscience, c'est le début de tout. C'est le point de départ. et après bas les regards la présence de gens qui jugent pas et qui comprennent c'est magnifique je me suis senti enfin en fait je me suis dit enfin j'ai moins honte de dire ce que je cache et je peux dire des choses que j'ai jamais dit poser les mots tu vois ça fait un bien fou ça me permet aussi le groupe me permet aussi de me décentrer de ma propre souffrance Tu sais, dans la dépression, dans la maladie, on est très autocentré.
- Speaker #1
Donc toi, tu as fait une dépression forte du coup ?
- Speaker #0
À cause de l'alcool. Après, dans ma famille, on a un terrain sensible face à la dépression. Et ça,
- Speaker #1
c'est intéressant. Du coup, tu vois, quand tu as des parents ou des grands-parents qui ont fait une dépression, c'est souvent héréditaire. Il faut faire attention au terrain dépressif familial. Je ne connais pas trop.
- Speaker #0
Oui, c'est ça. Enfin, il faut juste en avoir conscience, tu vois, de conscience de nos propres vulnérabilités. Et c'est vrai qu'il y a des choses qui se transmettent. On connaît peut-être tous des familles où il y a de l'alcoolisme, où il y a de la dépression, où il y a d'autres choses, tu vois. Ce sont des choses qui peuvent se transmettre. Ça ne veut pas dire que si mon père est alcoolique ou dépressif,
- Speaker #1
je le serais.
- Speaker #0
C'est des facteurs de vulnérabilité, des facteurs de risque. Moi, il s'avère que si on cherche bien, oui, il y a de l'alcoolisme, oui, il y a de la dépression dans ma famille. Mais tu vois, mes frères, même mon frère jumeau, n'est pas alcoolique. Alors qu'on a les mêmes gènes. Donc c'est aussi ça comme message. en fait c'est pas parce que C'est pas parce qu'il y a ça dans ta famille que tu le seras obligatoire.
- Speaker #1
C'est intéressant de casser ce truc de déterminer.
- Speaker #0
Il n'y a pas de fatalisme.
- Speaker #1
C'est vrai que j'ai pas pensé mais vous avez exactement les mêmes gènes. Donc le fait de savoir que lui n'est pas alcoolique, ça veut dire que même si tu as des parents avec des addictions, etc. C'est pas parce que tu as ça que tu auras des addictions.
- Speaker #0
Non. Après, moi je suis un profil très anxieux et hyper sensible. Mon frère jumeau l'est aussi. Mais l'anxiété et l'hypersensibilité sont aussi des facteurs de risque face à l'addiction. Parce que je vais avoir besoin d'un truc pour compenser un manque, pour me sentir à l'aise. Et puis ça devient un cercle vicieux. Et puis même mon hypersensibilité, tu vois, à un moment donné, mettre mon cerveau en pause. À un moment donné, comment accueillir ces émotions ? Mais c'est la tempête sous mon crâne en fait. Comment tu veux tu... Et puis moi, c'est peut-être lié à mon hypersensibilité.
- Speaker #1
Comment est-ce que t'es hypersensible ? Parce que je sais pas si c'est un... Un vrai diagnostic, moi j'ai lu un bouquin, Suis-je hypersensible, je crois, ou de Fabrice Simidal, c'est intéressant.
- Speaker #0
Pas une pathologie, l'hypersensibilité. Mais c'est grâce à mes thérapeutes et notamment Judith Lossmann qui a posé un terme. Et là , je me suis dit, mais ouais, putain, en fait, c'est ça. Et ça aussi, ça a été un point de départ, tu vois, commencer à accepter ma véritable nature, arrêter de mettre des masques, arrêter de faire croire que je suis quelqu'un d'autre. commencer un peu à s'accepter, à s'aimer, tu vois. Et puis plus spécifiquement, en parlant d'hypersensibilité, je pense que tu as peut-être le même message que moi. Moi, j'ai vraiment envie de dire que c'est OK d'être un homme. et de ressentir des choses.
- Speaker #1
Moi, je suis d'accord à 1000%, c'est sûr.
- Speaker #0
Mais putain, mais arrêtons en fait ce côté, la virilité, c'est quelqu'un qui ne montre rien, qui est viril. Arrêtons, ça m'a détruit, ça. Ouais, c'est sûr. Ça m'a détruit. Essayons aussi d'accepter qu'on a le droit de ressentir, d'avoir des vulnérabilités. On n'est pas des machines, quoi. Ouais,
- Speaker #1
c'est sûr. Mais c'est important de le dire. Parce que le problème c'est qu'il y a beaucoup de jeunes qui disent moi j'ai pas à voir un psy, j'ai pas besoin, moi je vais pas prendre des antidépresseurs, j'ai pas besoin, je peux prendre de médocs, j'ai pas besoin, je suis un homme etc et ça crée malheureusement des gens qui se suicident, qui peuvent avoir du suicide, des soucis donc c'est important de dire que oui c'est sûr que même si tu es un homme, alors les femmes aussi bien sûr, mais même si tu es un homme tu peux faire une dépression, tu peux pleurer, tu peux ressentir des choses, ouais c'est sûr, c'est important qu'on t'en parle. Et ça tu trouves justement que cette partie virilité tu voulais C'était important pour toi de le montrer et tu voulais pas montrer ta sensibilité ?
- Speaker #0
Ouais, beaucoup. Au début, appartenir au groupe, tu vois, de la testostérone, on est ado et puis jeune adulte, faire sa place. Moi, j'ai l'impression que je suis aimé et reconnu, vu dans ce personnage qui montre rien, en fait. Ouais. ça fait bonhomme tu vois je me sens viril avec un verre à la main le whisky tu vois il faut se créer bonhomme il n'y a pas la place de ça tu penses que c'est plus chez les mecs justement ce côté un peu bonhomme on est viril entre potes on voit ce que tu me disais non tout à l'heure mais je sais pas peut-être que c'est peut-être que j'ai pas envie de dire en fait peut-être que les intérêts plus on va boire pour différentes raisons en fait en fait j'ai pas envie de faire de différence entre les mecs et les meufs parce que en fait on
- Speaker #1
On sait que tu as une bande de potes entre mecs. Tu as ce truc quand même plus... Peut-être, même si je ne jure pas et surtout j'ai deux filles, etc. Mais de genre, on est plus dans la compète, on ne veut plus se prouver. En tout cas,
- Speaker #0
c'est ce que j'ai connu. Moi aussi,
- Speaker #1
oui. Donc, c'est sûr. Est-ce que c'est la vérité maintenant ? Je ne sais pas.
- Speaker #0
Mais je sais. Mais en fait, il y avait aussi des filles au Bifor. Oui. Et puis, je sais pas si tu faisais la même chose, mais moi j'invitais les filles qui ramenaient de la hard, qui buvaient, qui voulaient bien jouer au jeu d'alcool. Les gens qui n'acceptaient pas les verres ou les gangés, je les trouvais chiants. Ce qui montre quand même une relation très problématique à l'alcool.
- Speaker #1
Mais il y a toujours, moi ça je le vois toujours, genre par exemple, du coup moi maintenant je bois un verre de vin au resto, ou même si je fais un mariage, tu vois, je prends genre un verre de hard, un gin-to avec ça de gin.
- Speaker #0
Ouais.
- Speaker #1
Et genre je m'arrête tu vois, et les gens ils disent tu vois ils veulent te resservir, ils disent bah t'es relou, allez vas-y, franchement on est là pour rigoler. Et t'as ce truc je trouve quand même, je sais pas si c'est plutôt français, pas que, où t'es quand même dans une société où on veut te pousser à boire je trouve. Je sais pas, t'entends ce quoi toi ?
- Speaker #0
En fait je trouve que notre société glamourise l'alcool et met l'alcool sur un piédestal, et c'est ce qu'on a dit en partie 1, alors que c'est une drogue. et J'espère que notre société va évoluer, notre regard va évoluer concernant l'alcool. En fait, ce qui est dramatique, c'est que c'est la seule drogue où on a besoin de se justifier, ne pas en prendre. C'est hallucinant, en fait. Oui, c'est sûr. On ne va pas agiter une clope sous ton bec en mode... Puis quand tu dis non, j'ai arrêté de fumer, on ne va pas te poser de questions, on va même te féliciter. Là , en fait, tu dis j'ai arrêté l'alcool, on va te dire mais... Tu vois, ça interroge énormément. C'est ce que je dis par exemple aux étudiants que je peux voir parce que je fais des conférences en milieu étudiant et je leur dis essayons de normaliser le non face à l'alcool. On a normalisé le non face à la clope, j'espère en tout cas c'est ce que je vois, mais qu'on se sente concerné ou non par l'addiction et si on crée un environnement, une société où on n'a pas besoin de se justifier et de ne pas en prendre, où c'est ok de dire non, de s'arrêter à un moment donné. et je vais te dire pourquoi. Parce que Cette société qui, je l'espère, sera plus bienveillante autour de ce sujet, si ce sujet devient moins tabou, il y aura moins de honte. Et s'il y a moins de honte, les personnes qui effectivement souffrent d'addiction auront peut-être un peu moins de mal à en parler. Parce que le tabou, il sera un peu moins là .
- Speaker #1
Et en parlant de ça, justement, une scène assez surréaliste, je ne sais pas si tu as vu. c'était Arthus qui s'est interviewé par Léa Salamé du coup on va raconter pour ceux qui n'ont pas vu et du coup Arthus il dit qu'il a arrêté de boire et Léa Salamé lui a dit ah ouais vous êtes devenu chiant quoi, c'est ça non ?
- Speaker #0
ouais c'est exactement ça, ça m'a choqué c'était fou,
- Speaker #1
il lui disait je comprends pas en France on arrête la coke, tout le monde se félicite, l'alcool non c'est genre on est chiant quoi c'était hallucinant qu'elle se dise ça sur une émission publique,
- Speaker #0
grande écoute pas une heure de grande écoute mais allez voir la vidéo allez voir la vidéo et vous ferez vous ferez votre propre propre avis dessus je trouve arthur tellement digne dans sa réponse allez voir j'ai pas envie de spoiler quoi te laisse choisir un autre badge du coup pareil toujours sur ce niveau là un
- Speaker #1
micro trottoir choisit ce que tu veux je Ah si,
- Speaker #0
c'était pour nous. Est-ce que quand tu étais addict, tu savais que tu allais t'en sortir ?
- Speaker #1
Question très rapide.
- Speaker #0
On ne me l'a jamais posé cette question. Non. L'alcool te maintient dans un état tellement dépressiogène que l'avenir, tu n'y penses même pas. Tu es déjà en train de lutter pour survivre jusqu'au lendemain. Il n'y a plus aucune projection possible. Et même à la toute fin... je bois pour mourir. Je bois pour me mettre en blackout, pour ne pas récolter de souvenirs. Donc, non, il y a vraiment cette volonté de s'autodétruire, de s'autoflageller. Je n'ai pas envie d'exister.
- Speaker #1
je suis juste trop à vivre trop en souffrance donc non je ne sais pas c'est fou d'ailleurs c'est black out de normaliser ces black out quand genre moi je sais que pareil tu vois je crois je prends je prenais 3 4 votre carré boule c'est le truc surtout pas faire pour le coeur et c'est votre car et red bull je sais pas si les gc la nouvelle génération ils prennent aussi ça toujours mais ça me crée des black out quoi et genre c'était normal quand tu te réveillais tous les tas soirée c'est fou quoi toi je donne dans ton livre du coup tu disais que tu en as ouais moi c'était un peu mon
- Speaker #0
c'était un peu mon savoir-faire. Au début, c'est normalisé. Donc, je me dis, en fait, tout va bien parce que d'autres en font aussi. En fait, il s'avère que moi, systématiquement, j'en fais. Et je tombe même dans des réflexions type, en fait, si j'ai fait un blackout, c'est que j'ai dû bien faire la teuf. Donc, c'est bien, tu vois. Limite, c'est stylé, tu vois. C'est hallucinant. Alors qu'en fait, qu'est-ce que c'est le blackout ? C'est un mécanisme de défense. Ton cerveau, en fait, il va shutdown pour se protéger simplement parce que j'ai trop bu, tu vois. C'est vachement dangereux. Et encore une fois, si tu fais des blackouts avant 25 piges, quand ton cerveau n'est pas un organe mature, là encore, ça peut créer des conséquences. Irréversible.
- Speaker #1
Mais ça, il faut bien le dire. Parce que c'est vrai que je pense que c'est vachement normalisé.
- Speaker #0
En fait, ce n'est pas anodin de faire des blackouts. Pas du tout.
- Speaker #1
Mais on le normalise de ouf.
- Speaker #0
Mais ouais.
- Speaker #1
C'est fou.
- Speaker #0
Et puis, en fait, OK, il y a le côté blackout biologique. Mais il y a aussi ce qui s'ensuit où il y a la peur de ne pas savoir ce qui a été dit, ne pas savoir ce qu'on a fait. Où est-ce que je me suis retrouvé ? Où est-ce que je me suis réveillé ? C'est tout. terrifiant. Parce que toi,
- Speaker #1
j'ai vu du coup que tu t'es retrouvé, enfin tu t'es déjà réveillé dans des parcs, dans le métro.
- Speaker #0
Moi, je fais le bonhomme, je fais genre tout va bien, je suis super baptiste, le mec qui est yolo, le mec qui s'en fout, genre ouais, mais t'inquiète, tout va bien. Mais au fond, au fond, mais j'ai tellement honte, j'ai tellement peur, je me fais plus confiance, ça me ronge en fait, le blackout. Même si je fais genre que ça va, et puis on enchaîne, et puis... Mais non, en fait, au fond de moi, c'est terrifiant, vraiment. C'est sûr.
- Speaker #1
J'aimerais bien parler de, si c'est OK pour toi, malheureusement, tu as perdu ton papa, du coup, quand tu étais jeune. Tu avais quel âge ?
- Speaker #0
19 ans.
- Speaker #1
Et c'était dans une période, justement, où tu buvais pas mal. Est-ce que ça... Comment tu as vécu ça, d'ailleurs, pour les jeunes, malheureusement, qui perdent un de leurs parents aussi jeune ? Qu'est-ce que tu pourrais leur dire ? Comment on se reconstruit ? Comment on gère cette situation ? Et comment tu as fait, toi ?
- Speaker #0
Je te remercie pour cette question. Il faut savoir qu'à 19 ans, je suis encore sous... Papa, c'était la figure autoritaire de la famille. C'était lui qui mettait les règles et j'avais peur de lui. Mais ça a été un peu mon garde-fou. Donc vu tant qu'il est là , j'essaie un peu de me tenir à carreau, mais je sens au fond de moi qu'en fait, j'ai besoin de boire plus. J'ai besoin de trouver d'autres moments, d'autres opportunités. Donc en fait, il faut être clair, c'est pas la mort de papa qui a déclenché de l'alcoolisme. C'était déjà là , tapissé, ça a juste été l'ouverture des vannes. Donc à 19 ans, après la mort de papa, c'est assez terrifiant de le dire, mais je l'ai d'abord vécu comme une libération. Dans le sens où j'ai enfin moins de règles, je vais enfin respirer, je vais enfin me sentir libre. Sauf que cette liberté, me sentir libre, m'affranchir des codes et tout, c'était lié à l'alcool. Tu vois, dans ce côté un peu transgression. Ouais, bien sûr. Ouais, je bois et puis on s'en fout de l'avenir, on vit le moment présent, viens, on tease, viens, on sort, on fait la fête. Mais n'importe quoi, je ne fais plus la fête en fait, je ne bois pas du tout. Il n'y a rien de festif dans le blackout, il n'y a rien de festif dans être un zombie en fait, donc c'est aussi du déni. Mais il y a eu ce côté libération, je vais enfin pouvoir faire ce que je veux et l'alcool est très content parce qu'il va prendre de plus en plus de place. Donc ça c'est l'ouverture des vannes. Et après comment est-ce que... Comment est-ce qu'on accueille ça ? On accueille comme on peut. Le deuil, c'est quelque chose de très intime, tu vois. La seule chose que je peux dire, c'est que j'ai commencé à faire mon deuil à partir du moment où j'ai arrêté l'alcool, 5 ou 6 ans après sa mort. La réparation, la cicatrisation, l'acceptation, c'est fait l'esprit clair. Sans dépresseur, sans fuite, sans... dans la confrontation.
- Speaker #1
Tu penses qu'il faut se confronter vraiment et pas être dans le déni pour vraiment faire le deuil d'une situation comme ça ?
- Speaker #0
C'est humain d'avoir envie d'anesthésier, d'avoir besoin de quelque chose, tu vois, mais quand on utilise des produits comme l'alcool, ça peut être très risqué de mettre un pansement sur une plaie béante et de penser que ça va nous aider. Au contraire, en fait, ça va retarder la cicatrisation. C'est ouf, mais papa, il a commencé à me manquer abstinent. C'est fou. Pour te dire à quel point on vit dans un autre monde, on vit dans le brouillard, c'est comme si...
- Speaker #1
Totalement déconnecté.
- Speaker #0
Totalement déconnecté. Donc non, en fait, ça ne soigne pas l'alcool, c'est vraiment tout le contraire.
- Speaker #1
Et la proximité familiale avec tes frères, ta mère, c'était, j'imagine, un soutien ?
- Speaker #0
On s'est beaucoup rapprochés, on parle de nous comme une meute et j'ai vraiment besoin d'eux, c'est un cocon. Mais après, dans l'alcool, ils avaient peur de moi, ils ne savaient pas dans quel état j'allais rentrer, peur de savoir si j'allais rentrer ou pas. Donc oui, il y a eu des liens qui se sont distendus, mais heureusement, comme tu le dis si bien, c'est possible de... que les chemins se rejoignent et qu'on puisse retisser des liens. C'est le cas et wow, trop de chance. Oui, c'est vrai. Vraiment. Mais tu vois, j'ai eu la chance d'avoir cette famille et mes amis aussi qui sont restés. Mais pour les personnes qui n'ont pas cette chance-là , il y a aussi les groupes de parole pour ça. Des gens qui vraiment vont t'accueillir pour qui tu es, avec ta honte. avec ta colère, avec tes vulnérabilités. Bon, c'est un pas en avant qui est hyper dur à franchir, parce que c'est terrifiant de se confronter au regard de l'autre, mais c'est aussi un point de départ. Le truc, c'est que j'ai peur de cet inconnu, mais j'ai peur aussi de ce présent-là . En fait, il faut aussi que j'accepte que l'enfer, que j'imagine être la reconstruction, l'enfer, j'y suis déjà . La souffrance, je vais peut-être la connaître après. Mais la souffrance, elle est déjà là . Tu as donné tellement de chance à l'alcool, tu as donné tellement de chance à cette béquille. Essaye de donner une chance à quelque chose d'autre. Moi, vraiment, j'insiste, je ne savais pas du tout que ça allait me sauver l'abstinence. Je ne savais pas du tout où ça allait m'emmener et si ça allait être mon chemin actuel encore aujourd'hui. J'en savais rien.
- Speaker #1
Tu penses que ça t'a vraiment sauvé ?
- Speaker #0
L'abstinence ? Ouais. Mais il n'y a pas photo.
- Speaker #1
Tu penses que... Tu arrives à t'imaginer, genre, si t'avais pas réussi à être abstinent, ta vie, comment t'aurais été ?
- Speaker #0
J'aurais continué à tout détruire sur mon passage. Je sais même pas si je serais en vie. Moi, j'ai été... Je sais pas si t'as ressenti ça un jour. Moi, j'ai réalisé en thérapie que je suis un enfant qui a refusé de grandir. Très, très peur du monde adulte, très, très peur des responsabilités. et puis ses injonctions de la société. C'est aussi pour ça que j'ai préféré rester de l'autre côté de la berge avec ma bouteille et je voyais les autres traverser la rivière et ils me faisaient coucou de l'autre côté de la rive. Au début, moi, je me disais, ouais, ils sont relous, ils sont chiants, moi je suis bien et tout. Mais en fait, au bout d'un moment, on se sent de plus en plus seul. Je suis un enfant qui a refusé de grandir, qui avait très très peur. En revanche, l'abstinence me permet de passer à l'âge adulte. d'accueillir les responsabilités, de me souvenir des choses, peut-être que ma parole ait un peu plus de valeur, de m'engager, de construire, et en fait je prends beaucoup de plaisir là -dedans en fait.
- Speaker #1
Ouais c'est sûr.
- Speaker #0
Ce qui est sûr, c'est que dans mon histoire, l'alcool avait pris toute la place. C'est à nouveau un apprentissage de maintenant que j'ai un peu plus de place, comment est-ce que je vais combler tout ce temps-là , qui au début est associé à un immense temps d'ennui. Putain, mais ma vie, elle est à chier. Je n'ai plus l'alcool, j'ai l'impression d'être une merde, je suis une merde. J'ai besoin de quelque chose. Au début, c'est de l'ennui. Et puis petit à petit, petit à petit, avec des liens. je me suis rendu compte que c'était pas forcément de l'ennui mais c'était peut-être que j'étais hyper mal à l'aise avec la paix intérieure je passe du cap en fait c'est bon je dis pas du tout que la paix intérieure c'est j'ai trouvé ça au bout de deux semaines d'abstinence n'a mis beaucoup de temps mais j'étais tellement mal à l'aise à être avec moi même qu'il fallait que je me fuis. Ouais, c'est sûr. Donc, tout ce qui était ennui, tout ce qui était tant seul avec moi-même, les pensées qui fusent, en fait, intenables. Donc, j'ai besoin de quelque chose pour me divertir. Bien sûr. Et donc, l'alcool, ou tu vois, ça peut être les réseaux sociaux, scroller, tu vois. Mais en fait, aujourd'hui, l'abstinence, le fait de ne pas avoir de masque, le fait de, de, inévitablement, être confronté à ce que l'on ressent, il n'y a plus de fuite possible, ben... On trouve petit à petit de la paix. J'ai moins de montagne russe émotionnelle. Mais qu'est-ce que c'est bon d'être un peu plus à l'équilibre ? C'est sûr.
- Speaker #1
Et tu as utilisé d'autres choses pour trouver cette paix. Moi, je sais que pour ma part, par exemple, j'ai découvert la méditation mindfulness. Ça m'a vachement aidé, justement, pour les pensées, d'essayer d'être plus ancré dans le présent, etc. Toi, juste le fait d'avoir été... Je dis juste, ce n'est pas juste. Mais le fait d'avoir été abstinent, c'est ça qui t'a vraiment tout changé ? Ou tu as dû faire d'autres choses en plus pour renforcer justement ça ? Je ne sais pas, plus de sport, changer ton alimentation ? que t'as
- Speaker #0
Il y a beaucoup de choses qui se font naturellement, mais on a besoin d'aide. On a besoin d'aide. Ce n'est pas des illuminations que j'ai eues un matin. Je me suis dit, tiens, il faut que je fasse ça. En fait, non, je me suis rapproché de gens en qui j'avais confiance et qui m'aiguillaient. Et puis ensuite, j'ai toqué la porte de certains médecins, certains psys. Et j'ai testé pas mal de choses. Je dirais qu'en fait, l'abstinence ne règle pas tous tes problèmes. Même si rien qu'en étant abstinent, il y a des choses qui peuvent évoluer. notamment l'absence de gueule de bois qui est quand même un putain de trésor mais l'abstinence c'est l'accès à des prises de conscience et je vais m'en rendre compte dans l'abstinence si je suis aligné avec moi-même ou s'il y a des petits changements à faire mais ces prises de conscience elles seront vraies et authentiques dans l'abstinence c'est pas dans l'alcool et dans la consommation excessive que je peux prendre conscience de choses C'est comme si tu vas voir un psy et le soir même, tu t'enquilles 3-4 pintes. Et au bout de 6 mois, tu vas dire « En fait, elle ne me sert à rien ma psy, je n'avance pas, je tourne en rond. » Mais tu m'étonnes.
- Speaker #1
Tu avances quand mĂŞme, c'est un cheminement.
- Speaker #0
Mais tu n'avances peut-être pas aussi vite. Je reviens là -dessus, je bois un dépresseur. Comment veux-tu que j'ai l'esprit clair si je bois un dépresseur ? Je prends ce cas-là . Enfin bref. Mais en fait, l'abstinence a été la pièce de puzzle manquant. Mais ce n'est pas genre une révolution. C'est vraiment très progressif. Et donc, j'ai associé ça au groupe de parole, à des exercices de sofro, de respiration et l'écriture. L'écriture m'a énormément aidé. Et c'est le petit objet que j'ai ramené. Qu'on a oublié. tu vois je c'est très bon, ça me fait bien de le penser je peux en parler ?
- Speaker #1
normalement c'était la première partie en fait j'ai eu beaucoup de mal à chercher un objet pour ceux qui n'ont pas vu les autres épisodes on demande aux invités au deep dive de ramener un objet qui a été inspirant pour eux qui a une histoire sur leur vie personnelle ou professionnelle et donc voilà Baptiste va nous présenter son objet mon objet j'ai eu beaucoup de mal parce que je
- Speaker #0
ne suis pas très matérialiste je Je... Je n'ai pas d'objet très symbolique. Et en fait, je ziotais sur mon bureau. Et en fait, j'ai toujours ce petit carnet depuis un an et demi ou deux ans d'abstinence. Et en fait, le contenu, il n'est pas forcément très intéressant, mais c'est juste...
- Speaker #1
Le carnet est très beau d'ailleurs.
- Speaker #0
Oui, j'adore. En fait, c'est le symbole d'un moment de ma vie d'un tournant. C'est le symbole de mon affranchissement du regard de l'autre. Je suis abstinent. Bientôt deux ans d'abstinence et je continue d'être, j'essaye d'être encore bien carré, à suivre le moule et je suis en entreprise tu vois.
- Speaker #1
Juste lĂ , donc lĂ tu parles de toi il y a huit ans, juste pour qu'on comprenne.
- Speaker #0
Ouais, moi il y a huit ans je suis abstinent, mais mon abstinence elle est fragile parce que je ne suis pas encore en totale acceptation de ma véritable nature. Juste,
- Speaker #1
je fais une petite parenthèse, quand on... On est vraiment addict à l'alcool et qu'on est alcoolique, l'abstinence doit être à 100% du coup ?
- Speaker #0
En tout cas, c'est la solution, c'est le choix que je m'impose.
- Speaker #1
Mais généralement, je m'y connais très peu,
- Speaker #0
mais... C'est une maladie chronique, c'est une maladie chronique. En fait, les systèmes de la récompense qui sont les neurotransmetteurs, on va parler de chemin. En fait, plus tu bois... Plus les petites lumières alcool-alcool vont s'allumer, ça va devenir des chemins, genre un besoin. Ces petits chemins, ils vont se transformer en autoroute. Tu vois, ça va vraiment être le seul et unique chemin que j'utilise, tu vois, pour répondre à une angoisse, pour répondre à une émotion indésirable ou à une situation. Voilà , ces chemins, ils vont être empruntés. On parle de maladie chronique parce que ces chemins ne disparaissent pas. C'est juste que je n'alimente plus ces chemins si je suis abstinent. Et je vais créer d'autres chemins. Et ces petits chemins vont à nouveau devenir des autoroutes. Moi, aujourd'hui, maintenant, c'est acté.
- Speaker #1
Mais tu fais bien. Moi, je trouve que tu as raison à 100% de l'abstinence. De toute façon, j'ai l'impression que, aux alcooliques anonymes, etc., j'ai l'impression que les gens arrêtent totalement. Tu es obligé. Il suffit d'un verre pour plonger, non ?
- Speaker #0
Oui, j'ai beaucoup d'exemples. Après 5 ans, 10 ans, 15 ans, même 30 ans d'abstinence, ils se croient guéris. Et il y a rechute derrière. Après, je veux juste ouvrir quand même une... porte, c'est-à -dire que c'est vrai que l'abstinence totale est difficile à accepter, et j'ai aussi des histoires de personnes qui ont eu une phase d'alcoolisme et de dépendance, et qui retrouvent une consommation, une relation différente. Donc j'essaie aussi d'ouvrir à ça, c'est juste pas le chemin que j'ai choisi. En tout cas, moi, il n'y a aucun doute. Aucun doute, c'est l'abstinence totale qui me convient le mieux.
- Speaker #1
Donc,
- Speaker #0
pour revenir à ça, je suis en entreprise et je connais à nouveau un épisode de dépression. Je ne suis pas bien et je me rends compte que je suis face à un mur où peut-être, et je suis terrifié de l'accepter, peut-être que je ne vais pas avoir la même trajectoire que mes amis. C'est mon corps qui exprime une souffrance, des anxiétés hallucinantes.
- Speaker #1
Trajectoire professionnelle, tu veux dire ?
- Speaker #0
Trajectoire professionnelle, oui. et en fait je J'ai ce petit carnet entre les mains et je commence un petit carnet de bord. Et je me pose ces questions-là . Et je suis triste et je pleure. Et dans ces lignes-là , j'écris que je pleure tout le temps parce que... Elle est où ma putain de place ? Et je suis terrifié d'accepter que je vais peut-être avoir une trajectoire différente. Et le poser sur papier, ça a été un exutoire. Et ça m'a permis de donner... Je sais pas comment j'ai fait, mais ça m'a donné peut-être l'espoir de me lancer et d'enfin me dire, Baptiste, écoute tes tripes. Écoute ton cœur qui te dit en fait de transmettre aux autres. Alors, je n'avais pas les mots encore pour exprimer très clairement. Je n'ai pas tout de suite fait des conférences, mais j'ai choisi d'écrire un livre.
- Speaker #1
Ça jeûne quand même. Je me rappelle que j'avais vu ça, je crois que sur un post Facebook, tu vois. Et cette sensibilisation que tu faisais par rapport à l'alcool. Enfin, moi, dans ma tête, j'étais encore un gamin, tu vois. Et on a le même âge. Et tu avais quoi ?
- Speaker #0
Tu avais 27, 28 ans.
- Speaker #1
Ah oui, donc quand mĂŞme.
- Speaker #0
J'ai arrêté à 24 et je crois que l'idée du livre a commencé à germer à 27 ans et je me lance. En fait, si j'ai amené ce livre, ce petit carnet, c'est le symbole d'une nouvelle trajectoire de vie et peut-être une meilleure confiance, un soutien aussi de ma famille et puis qu'est-ce que ça m'a libéré. Merci. L'écriture a sauvé ma vie, mais je suis tellement heureux d'avoir osé la trajectoire, parce que maintenant je suis patient expert, je fais des conférences, j'accompagne des personnes qui sont en train d'alcoolisme, et je me sens à ma place. Je me sens vraiment à ma place, et quand on est hypersensible, et que l'hypersensibilité c'est aussi la recherche de l'authenticité, de la profondeur de la relation. Nier cette hypersensibilité, c'est foncer dans le mur. J'ai aussi besoin de trouver un cadre professionnel où je vais... Je ne vais pas nier mon hypersensibilité. Je ne dis pas du tout que chaque addict doit faire ce que je fais, pas du tout. Mais en fait, je dis que je suis content d'avoir trouvé un endroit où même professionnellement, je n'ai pas besoin de mettre de masque. Je suis moi-même avec mes jours sans, mes jours, je ne suis pas une machine. Mon taf, c'est les émotions, c'est l'humain, c'est le lien. Je ne mets pas de masque et qu'est-ce que ça fait du bien.
- Speaker #1
Ça doit être super gratifiant en plus de faire un taf où t'aides les gens, en tant qu'hypersensible.
- Speaker #0
C'est vrai que ça me fait du bien, thérapeutiquement ça me fait du bien, ça me rappelle aussi à quel point l'alcool m'a fait du mal, parce qu'il y a des gens qui me disent « mais comment tu fais, tu tournes pas la page ? » Ça doit être violent en fait de toujours parler d'alcool alors que tu bois pas. c'est ma façon de tourner la page donc d'un côté ça me fait du bien et de l'autre cette de voir à quel point la souffrance est là dans notre société dans ce monde en fait ça me bouleverse ça me heurte et j'ai manqué de liens j'ai manqué de compréhension j'ai manqué de deux pas mal de choses et donc j'essaye d'apporter une lumière, un espoir, sans promettre du tout la recette miracle. C'est que souvent, en fait, quand on ne va pas bien, on a besoin que notre souffrance soit vue, comprise. Et parfois, il n'y a pas besoin de mots, juste une... une présence. Donc j'essaye d'être une présence. Ok.
- Speaker #1
Super chouette. On va passer du coup dans le dernier niveau. On descend encore plus sous l'iceberg.
- Speaker #0
Wow.
- Speaker #1
Quatre derniers badges. Vous pouvez les choisir.
- Speaker #0
Ok. Je choisis le plus profond.
- Speaker #1
La baleine. Je te laisse lire la...
- Speaker #0
Est-ce qu'on peut vraiment renaître ou apprend-on juste à vivre avec nos cendres ? Wow.
- Speaker #1
Pas évident cette question. Est-ce que déjà tu considères que tu as fait une renaissance du coup avec l'abstinence ? Pour toi tu l'as...
- Speaker #0
Moi, je parlerais beaucoup plus de chemin infini, un renouvellement sans fin. Et ça, c'est violent à accepter parce qu'humain, on a envie d'une ligne d'arrivée. On a envie de dire, bon, allez, c'est bon, j'ai fait le taf, maintenant, on passe à autre chose. En fait, c'est plutôt un art de vivre. Maintenant, mon abstinence, c'est un choix incarné. Il vient toucher tous les domaines de ma vie, pro, perso. Tu vois, c'est vraiment un art de vivre. Ça a mis du temps à ce que je puisse accueillir tout ce que ça signifiait, l'abstinence. mais je parlerai beaucoup plus de cheminement, d'acceptation. Et donc oui, j'ai des cicatrices, tout le monde a des cicatrices, tout le monde a vécu des souffrances, comment vivre avec ? Il y a cette image qui circule un peu sur Insta, je ne sais pas si c'est un dessin, tu vois où en fait, tu sais, tu as un homme qui se trimballe des cailloux, qui les traîne, et la photo d'après, c'est qu'il porte le caillou. Ben, c'est un peu ça. Ce n'est plus un poids. c'est beaucoup plus de la paix, beaucoup plus de sérénité et d'être ok avec. Et je dis pas que j'ai tout réglé, il y a certains traumas qui sont là encore, mais avec cette confiance. Tu vois, l'abstinence me donne cette confiance dans la vie. Ouais, bien sûr.
- Speaker #1
Et cette paix, du coup, c'est quelque chose vraiment que tu connaissais pas avant l'abstinence ?
- Speaker #0
Non, je dirais que je l'ai peut-être vaguement connu lors de mon enfance et je suis assez nostalgique de mon enfance. Mais tu vois, c'est un regard d'enfant que j'ai des souvenirs d'enfant. Je me sentais libre, je me sentais heureux, euphorique, bien. Et aujourd'hui. Aujourd'hui, je me sens bien. Et je tiens à dire, l'idée, ce n'est pas d'être systématiquement en haut. On est des humains, on a des bas. Il y a des jours où je suis cloué au lit et je l'accepte. Il ne faut pas croire que ma vie, c'est que du peps et je me lève à 6h du mat pour faire un trail. Enfin, pas du tout, en fait. Pas du tout. J'ai mes vulnérabilités, j'ai mes moments de down. Mais je suis mieux. Ouais.
- Speaker #1
Ouais, c'est sûr.
- Speaker #0
Je connais beaucoup moins la souffrance. Et ça me suffit pour dire que... Que ça va, quoi.
- Speaker #1
Je te laisse choisir un dernier badge ?
- Speaker #0
Ouais. Y a-t-il des choses que tu ne te pardonnes pas encore ? J'adore cette question. j'ai beaucoup avancé thérapeutiquement j'ai fait j'ai fait la paix avec beaucoup de choses en revanche il ya des situations où ça me manque de ne pas être aussi impulsif de pas être aussi dans la spontanéité de pas je vois parfois je me sens moins drôle sans alcool et je me sens parfois un un peu. Un peu mise à l'écart et ça me rend triste. Et oui, il peut ressurgir parfois un peu d'autoflagellation, un peu de désamour, tu vois. Ça passe. Mais dans ces situations-là , ouais, j'ai un peu du mal à ... Tu vas véritablement accepter que ta nature, mec, c'est peut-être pas d'être le bout en train. Tu l'étais dans l'alcool, mais maintenant, t'es toi-même. Et n'oublie pas que tes vrais potes, ils t'invitent parce qu'ils savent très bien qui tu es. Le vrai Baptiste, il est très à l'aise avec peu de personnes. Il va beaucoup s'effacer dans les grands groupes. Il ne va pas beaucoup s'affirmer. Il a besoin de temps, de patience, de respect. et Il ne va pas prendre la place, il va un peu en retrait. Après, dans ma sensibilité, comme toi, tu vois, besoin d'être nourri par la profondeur de la relation. J'ai besoin de paix. J'ai vraiment besoin de mes cocons. Je ne suis plus attiré par... par les folles années qu'on a pu connaître, tu vois. Mais on a le droit aussi d'évoluer, c'est même l'essence même de la vie.
- Speaker #1
Comment tu expliques cette addiction pour toi, c'est quoi ? C'est une fuite de la réalité ?
- Speaker #0
C'est clairement une fuite de la réalité.
- Speaker #1
Soit tu as socialisé avec les boites, avec les sorties la plupart du temps.
- Speaker #0
Oui, après c'est devenu beaucoup plus hors contexte festif, tout seul dans ma dans la piaule, dans des parcs. Oui,
- Speaker #1
mais c'est ça qui est encore plus... vision entre guillemets, c'est que comme c'était sur un contexte festif, du coup, je pense que tu te rends moins compte d'un potentiel alcoolisme qu'une personne qui boit seule dans sa chambre, tu vois.
- Speaker #0
Ouais, et tu dis un truc, mais essentiel, c'est que moi, au début, je justifie mes alcoolisations en mode, mais en fait, je fais juste la fête.
- Speaker #1
Donc,
- Speaker #0
il ne peut pas y avoir de problème. L'alcoolique, c'est celui qui va boire dès le matin. Et puis, c'est le vieux, quoi.
- Speaker #1
On imagine le mec au PMU, tu vois, genre, alors qu'en fait, ça peut arriver.
- Speaker #0
Non, pas du C'est pas une histoire de... c'est que à partir du moment où tu bois tout seul que t'es un alcoolique. Non, non, en fait. Je vais même te donner un exemple. Après, ça peut être un débat, parce qu'il y a des gens qui voient les choses différemment. En fait, t'es en terrasse avec des potes, la soirée dure, et au final, à la fin, tu te rends compte que tout le monde a environ pris une taille de vin, bu une taille de vin en tout, tu vois. Tu vas dire que c'est ok. On était ensemble, voilà , ça a duré du temps, tu vois. Tu prends... Une autre personne qui a bu la même quantité une bouteille de vin tout seul dans sa piole, lui, tu vas dire, il y a un problème.
- Speaker #1
Oui, je suis d'accord.
- Speaker #0
La situation est différente, mais au final, tu as bu la même quantité. Oui, c'est vrai.
- Speaker #1
C'est vrai que quand j'imagine les deux, tout de suite, tu dis, le mec qui est seul, c'est chaud. Alors que le mec qui est avec ses potes, il kiffe. Oui,
- Speaker #0
c'est ça. Il a bu la même chose et donc tu prends les mêmes risques.
- Speaker #1
Et tu vois là , s'il y avait un... un jeune ado ou pas que d'ailleurs tu vois je parle entre 15 et 25 ans qui t'écoutent et qu'est ce que tu lui conseillerais comment comment tu sais si tu es addict ou pas est ce que il suffit de je sais pas de faire un test de ne pas voir pendant un certain moment un certain temps il ya des choses un peu pour se rendre compte d'une addiction pas
- Speaker #0
C'est de prendre conscience de sa relation à l'alcool. Et en fait, comment est-ce qu'on en prend conscience ? C'est dans des périodes où on va justement moins boire ou ne pas boire du tout. En fait, si je cède à la tentation alcoolique à chaque fois, je ne vais pas me rendre compte que j'en ai besoin pour telle situation ou qu'avec cette personne-là , je ne me vois pas être avec elle sans boire. Même dans mon couple, tu vois les soirées romantiques, des trucs comme ça. Est-ce que ça serait la même soirée sans la taille de vin à côté ? En fait, prenons le temps de mettre pause, de mettre le pied sur le frein et regardons la place que ça prend dans nos vies. Et dans quelles situations est-ce que c'est plus compliqué que d'autres ? Puis au final, si tu ne bois pas pendant deux semaines, ça reste aussi très bénéfique pour ton corps. Il y a aussi ce côté healthy que tu peux mettre en place.
- Speaker #1
Ce qui peut être assez vicieux d'ailleurs, je rebondis, parce que maintenant, on est vachement sur le dry January. que les gens finalement ils boivent pas pendant un mois et après pendant 11 mois ils se défendent la gueule tu vois bah ouais mais alors peut-être c'est un mot alors est ce qu'effectivement si tu arrives vraiment arrêté un mois ça montre que tu gères bien peut-être peut-être c'est ça aussi je me rends pas compte tu vois par rapport à l'addiction est ce qu'on peut pas boire un mois ça montre que tu peux gérer ta consommation pas du tout pas
- Speaker #0
du tout quand tu si quand tu commences tu sais pas tu arrêter et que ça reprend toute la place et qui a des impacts négatifs bah tu tu peux te questionner, c'est pas anodin du tout. Ça ne veut pas dire que tu n'as pas de problème si tu sais t'imposer un dry. Parce que si tu te dis, en fait, dans deux semaines, de toute façon, trois semaines, je vais me resservir. En fait, l'idée du dry January, c'est de la prise de conscience. Ça ne sert à rien si tu ne bois pas pendant 30 jours et qu'après, tu reprends tes défonces les 11 mois de l'année. Ça ne sert à rien. En fait, qu'est-ce que j'apprends de ce dry January ? Qu'est-ce que j'apprends sur moi, sur ma relation aux autres, sur ma relation à l'alcool ? Ça va t'apporter énormément de réponses. Mais ce dry, tu peux le faire en juillet, tu peux le faire en octobre, il n'y a aucune règle.
- Speaker #1
Donc pour toi, si je comprends bien, ce serait plutôt si tu arrives à boire et t'arrêter. Plutôt le fait de boire un verre et de ne pas en boire un deuxième, un troisième, un quatrième.
- Speaker #0
En fait, avant toute chose, au-delà de tips, je dirais surtout que si tu te sens sur une pente glissante, Mais accepte la main tendue ou demande de l'aide. Tu n'es pas seul, mon gars. Tu n'es pas seul. Tu n'as pas à être seul dans tout ça. Tu n'as pas à te questionner tout seul dans ta chambre et à chercher des vaines réponses sur chat GPT et essayer de te rassurer toi-même. Va en parler. Il y a des mains tendues.
- Speaker #1
Et justement, pour clôturer là -dessus, tu vois, s'il y a des jeunes qui écoutent ce podcast et qui ont envie d'être aidés, j'imagine qu'il y a quoi ? Il y a des numéros ? On les met pas là ?
- Speaker #0
Il y a des numéros, Alcool Info Service, Drogue Info Service. Il y a aussi les groupes de parole. Il y a Alcoolique Anonyme, Vie Libre, La Croix Bleue. Il y a des livres aussi.
- Speaker #1
Sachant que là , on a parlé beaucoup d'alcoolisme, mais finalement, toute la discussion peut être sur peu importe la drogue. Peu importe. Quelqu'un qui prend du cannabis, de la weed, de tout type de drogue.
- Speaker #0
Pour les drogues illicites, c'est plutôt les narcotiques anonymes. Oui. Et après, c'est moins bien répandu, mais il y a pour les jeux d'argent. pour la pornographie. Puis après, il y a des structures médicales pour les XAPA, les CJC, s'il y a des jeunes qui nous écoutent, les CJC, c'est Consultation Jeunes Consommateurs. C'est pris en charge. Et c'est des consultations jusqu'à 25 ans où tu peux discuter de ta relation à l'alcool ou d'autres drogues et juste gagner en conscience sur le sujet. OK. Si vous faites un tour sur mon Insta, je serais ravi de vous répondre. Et si vous êtes intéressé par mon livre, le site c'est d'avoir trop trinqué, ma vie s'est arrêtée.com Génial,
- Speaker #1
Baptiste, merci beaucoup, super intéressant.
- Speaker #0
Merci Etienne,
- Speaker #1
c'était le top. Génial, et puis c'était cool de te revoir, ça faisait combien de temps qu'on ne s'était pas vu ?
- Speaker #0
15 ans je crois.
- Speaker #1
On ne connaissait pas très bien, mais on se croisait et ça faisait 15 ans qu'on ne s'était pas vu.
- Speaker #0
Une vraie joie, merci. Ouais, franchement de mĂŞme. Je me suis dit, mais pourquoi il m'invite, j'ai rien Ă dire.
- Speaker #1
Franchement, c'était chanmé, j'ai trop chuchoté. Merci beaucoup. A plus tard, salut. Salut. Merci de nous avoir écoutés. Retrouvez le Deep Dive tous les jeudis sur notre chaîne YouTube et sur les plateformes d'écoute Spotify, Deezer, Apple Podcasts et Amazon Music. Pensez à vous abonner pour ne rien manquer des prochains épisodes. D'ici là , prenez soin de vous et à la prochaine !