- Anthony Baron
Si on parle de ce statut de micro-entreprise ou d'auto-entrepreneur, on est quand même en 2008, on est en pleine crise financière. C'est quoi les ambitions du gouvernement à ce moment-là ? Est-ce qu'il y a déjà cette volonté de vouloir moderniser ou en tout cas libéraliser les fonds de travail ?
- Hervé Novelli
C'est en tout cas la modernisation de l'économie que nous avions en tête avec Christine Lagarde qui m'a beaucoup aidé. dans la mesure où elle m'a laissé faire.
- Anthony Baron
Donc la meilleure aide, c'est laisser faire.
- Hervé Novelli
Parce que je savais. C'est présomptueux de le dire, mais je savais ce qu'était la direction d'une entreprise, de deux entreprises. J'avais dirigé une filiale, comme vous l'avez dit, d'une grande banque américaine. J'avais dirigé aussi une filiale du groupe Total. Bref, j'avais fait un parcours dans l'entrepreneuriat qui me permettait d'avoir une vision de ce qu'il fallait faire et ce qu'il faut faire. c'est embêter le moins possible les entrepreneurs et les laisser faire.
- Anthony Baron
Bonjour, je suis Anthony Baron et vous écoutez les After Decider, un podcast à déconcilier qui accueille des leaders entreprenants, acteurs de l'économie réelle, portant au quotidien des mutations et des innovations dont les actions impactent notre société. Bonne écoute à tous. Bonjour et bienvenue dans l'émission Face à Face Decider, une émission qui accueille des leaders entreprenants, acteurs de l'économie réelle, portant au quotidien des mutations et des innovations dont les actions impactent notre société. Nous nous immergeons aujourd'hui dans le future of work. Nous avons l'honneur et le privilège d'accueillir Hervé Novelli, ancien ministre, un entrepreneur et homme politique engagé au service de l'entrepreneuriat notamment. Vous êtes le père du statut de micro-entreprise créé en 2008. Bonjour Hervé Novelli. Bonjour. Et bienvenue dans ce nouveau numéro de Face à Face Décideur. Alors dans cette interview, nous allons revenir sur les éléments de votre parcours, la création du statut d'auto-entrepreneur, votre vision aussi du travail en France, les évolutions à venir, vers quelles nouvelles formes de travail on pourrait effectivement évoluer. Et puis, on va profiter de votre belle expérience politique aussi pour faire un point sur la situation du pays et dans un contexte qu'on observe comme étant assez chahuté d'un point de vue géopolitique. Alors Hervé Novelli, vous avez un parcours académique avec une maîtrise d'économie à Paris Dauphine, vous êtes diplômé également de micro-mécanique et vous êtes passionné par le monde de l'entreprise où vous avez construit votre carrière entre la vie d'entrepreneur et la scène publique. Vous débutez votre carrière en tant que chargé d'admission au sein de la Chambre syndicale de la sidérurgie française avant de prendre la direction de l'entreprise Janton en 1983, une PME spécialisée dans le secteur paramédical. En 1986, Vous êtes nommé chef de cabinet du ministre de l'Industrie, des PTT et du Tourisme, Alain Madelin, au sein du gouvernement de coalition de Jacques Chirac. Et en 88, vous êtes vice-président de la Banque d'affaires américaine Drexel Burnham Lambert. En 2015, vous créez également Wiki PME, je pense que ce sera intéressant d'y revenir, qui est la première communauté numérique et solidaire pour représenter les entrepreneurs sur notamment les réseaux sociaux. Et maintenant, côté scène politique, vous vous engagez comme conseiller municipal au sein de la ville de Richelieu en Indre-et-Loire, très belle ville. Puis vous êtes élu en tant que député de la quatrième circonscription d'Indre-et-Loire de 93 à 97, de 2002 à 2012. Et en 99, vous êtes également élu député européen et en parallèle, vous occupez aussi plusieurs mandats locaux, notamment celui de vice-président du conseil général d'Indre-et-Loire et conseiller régional de la région centre entre 95 et 2017. et Et surtout, vous avez été le maire de Richelieu de 2008 à 2020. Et en 2007, vous êtes nommé secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur. En 2008, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des PME, du tourisme, des services et de la consommation. Et c'est à cette époque que vous êtes à l'origine du statut d'auto-entrepreneur et du statut d'entreprise individuelle à responsabilité limitée, EIRL. Depuis 2013, vous avez d'autres mandats. vous êtes Président de l'Institut Gustave Courbet, administrateur de plusieurs entreprises et fonds d'investissement, notamment du Ponant, de la société Le Ponant, de BALT. Vous êtes senior advisor aussi au sein d'un fonds d'investissement qui s'appelle Bridgepoint. Vous présidez depuis 2017 le Conseil supérieur de l'écotorisme, que vous avez participé à créer en 2008. Vous êtes membre et conseiller d'administration de la fondation Mérimée pour les monuments historiques. Vous présidez également l'association des plateformes d'indépendants. Les indépendants vous suivent également, ça depuis 2019. Et enfin, vous êtes chevalier de la Légion d'honneur et vous avez reçu le prix Renaissance de l'économie en 2017. Quel parcours, cher Hervé ? Et durant votre carrière, vous avez navigué entre... L'univers entrepreneurial et la vie publique, comment ces deux mondes se sont-ils nourris l'un et l'autre dans votre parcours ?
- Hervé Novelli
Je crois que je suis un des rares hommes publics actuels ou passés selon la considération qu'on fait de mon âge à avoir chevauché à la fois ce qu'on appelle le secteur privé et le secteur public. Je l'ai fait de manière très inopinée. Je suis d'abord un entrepreneur, mon père est décédé brutalement en 1982. Et en 1983, j'ai donc repris les deux petites entreprises familiales. Vous avez cité l'une d'entre elles, Janton. Et il y avait une entreprise à Paris qui s'appelait du reste Novelli BM et qui recevait les produits créés par Janton qui étaient des produits destinés à fabriquer des prothèses et des orthèses pour handicapés, dans un secteur très... paramédicale, mais avec lequel je me suis frotté et qui m'a beaucoup appris. En fait, ça m'a tout appris d'une certaine manière, puisque j'ai appris les fins de mois difficiles, j'ai appris l'angoisse de l'entrepreneur face à des marchés qui se dérobent, la volonté d'aller vendre les produits à l'exportation. Bref, le quotidien de l'entrepreneur, je l'ai vécu et j'ai vendu ma seconde entreprise, un quart de siècle après l'avoir reprise et quelques mois avant de rentrer au gouvernement. Je ne savais pas que j'y rentrerais, mais en tout cas, les choses se sont bien passées de ce point de vue-là. Et j'ai écrit sur cette expérience, j'ai écrit un bouquin qui est épuisé aux éditions L'organisation qui s'appelait « Aider les PME » qui parut dans les années 93-95 où j'avais reçu déjà en tant que député. une mission sur les PME de la part de deux ministres du gouvernement d'Edouard Balladur qui me demandaient de faire un peu le point sur l'ensemble des problématiques que rencontre un entrepreneur d'une petite ou moyenne entreprise. J'ai toujours été convaincu que la réalité de la vie économique, c'est la réalité de ce qu'on appelle la microéconomie. Vous savez, on fait une distinction savante entre microéconomie et macroéconomie. La macroéconomie... C'est pour les gens bien, la microéconomie, c'est pour le charcutier ou le boulanger.
- Anthony Baron
Sinon, les problématiques sont différentes.
- Hervé Novelli
Oui, mais la réalité de la vie économique française, elle se concentre beaucoup plus sur la microéconomie que sur la macro. Je ne dis pas que la macroéconomie, les grands équilibres financiers, on en parlera, ou budgétaires, les relations internationales, tout cela, je ne dis pas que ce n'est pas important. Mais la réalité de la vie économique, en tout cas la croissance économique, la valeur ajoutée de l'économie en France, elle est constituée à 70 ou 75% ou 80% par les très petites entreprises, les petites entreprises, les PME, jusqu'aux entreprises de taille intermédiaire dont j'ai créé la définition du reste dans la loi de... modernisation de l'économie de 2009. Donc j'ai été confronté très vite à cette dichotomie. J'ai été nommé parce que je connaissais Alain Madelin qui m'a demandé de venir l'aider. C'était un département qu'il maîtrisait moins que d'autres puisqu'il venait d'être nommé ministre de l'industrie et moi j'avais une expérience industrielle avec la chambre syndicale de la sidérurgie et avec les deux petites entreprises que je manageais. Je suis devenu son chef de cabinet et cela m'a permis tout de suite, brutalement, d'être confronté à un univers totalement différent, qui est le secteur public. Il était encore plus différent à l'époque qu'il ne l'est aujourd'hui du secteur privé. Je passerai sur tout ce que l'on permet dans le secteur public à l'époque, mais qui serait qualifié d'abus de biens sociaux dans le secteur privé de l'époque en question. Mais moi, j'avais eu la chance d'avoir eu un père qui savait ce que c'était. Et donc, ça m'a permis de faire une comparaison très rapide et de comprendre qu'il y avait des codes à connaître, qu'il y avait des langages à apporter, des méthodes pour faire en sorte que votre passage dans le secteur public en n'étant pas fonctionnaire ne se termine pas par un désastre. Ça s'est passé.
- Anthony Baron
Parce qu'il y a d'autres expériences de ministres ou autres qui ont été plus malheureuses.
- Hervé Novelli
Des entreprises, d'entrepreneurs qui sont... ça s'est mal terminé. Ça s'est mal terminé parce que les deux mondes étaient... ne se comprenaient pas. Par exemple, nous avions voulu réformer l'industrie à l'époque en mettant le ministère de l'Industrie sous contrôle d'un directeur général de l'industrie qui venait du privé. Il s'appelait Jacques Maisonrouge, c'était l'ancien patron d'IBM. Ça s'est terminé par un désastre, ou plus exactement par le fait que les demandes ne se sont pas comprises puisque Jacques Maisonrouge avait fait toute sa carrière aux Etats-Unis, ne comprenait pas. et on... Par contre, on peut être très indulgent avec lui. Le pauvre, il s'est confronté au ministère de l'Industrie, c'est-à-dire au corps des mines, aux us et coutumes de la haute administration. Voilà, ça n'a pas pris. La greffe n'a pas pris. Et elle prend rarement. Je me souviens aussi, je connaissais très bien Francis Maire, que j'avais connu dans la sidérurgie, qui est devenu ministre de l'économie sous le septennat de Jacques Chirac. Et qui finalement n'a pas donné la pleine mesure de son talent parce qu'il y avait là aussi une sorte de mur de Chine entre ce qu'il pensait, ce qu'il voulait faire et la réalité de ce qu'il pouvait faire à la tête du ministère de l'économie et des finances.
- Anthony Baron
Qu'est-ce qui fait que ça a fonctionné pour vous ?
- Hervé Novelli
Eh bien j'ai eu beaucoup de chance, comme souvent dans ma propre existence. Lorsque j'ai quitté le ministère de l'Industrie, j'y avais passé deux ans, je connaissais ainsi les us et coutumes, la manière dont fonctionnait l'appareil d'État, dans une période qui était difficile, puisqu'on était dans la première cohabitation Chirac-Mitterrand, 86-88. et donc lorsque j'ai été nommé au gouvernement... Quinze ans après, je connaissais très bien les deux mondes. Et c'est pour ça que j'ai laissé, enfin certains le disent, une bonne trace, y compris à Bercy où je suis assez populaire. Paradoxalement, un libéral à Bercy populaire, ce n'est pas forcément tout à fait usuel. Parce que j'avais les deux langages, les deux codes, je savais ce qu'il fallait. pour l'environnement entrepreneurial, libéré, simplifié, accompagné, beaucoup plus que subventionné. Et donc, je savais dénouer les blocages, les nœuds, mais je le faisais avec une méthode que je m'étais forgée. Certains ont appelé ça la méthode cursive ou furtive, c'est-à-dire que dans un univers... hyper réglementée comme l'est la société française, vous semez, si j'ose dire, de la liberté, vous récoltez des emplois. Et lorsque j'ai créé le statut de l'auto-entrepreneur, je l'ai fait avec cette idée de simplification et ça a marché au-delà de mes espérances puisque, on le sait aujourd'hui, cela a dopé le monde. des indépendants, mais peut-être en parlant de tout.
- Anthony Baron
Absolument, absolument. Et d'ailleurs, si on parle de ce statut de micro-entreprise ou d'auto-entrepreneur, on est quand même en 2008, on est en pleine crise financière. C'est quoi les ambitions du gouvernement à ce moment-là ? Est-ce qu'il y a déjà cette volonté de vouloir moderniser ou en tout cas libéraliser les fonds de travail ?
- Hervé Novelli
C'est en tout cas la modernisation de l'économie que nous avions en tête avec Christine Lagarde qui m'a beaucoup aidé dans la mesure où elle m'a laissé faire.
- Anthony Baron
Donc la meilleure aide, c'est laisser faire.
- Hervé Novelli
Parce que je savais. C'est présomptueux de le dire, mais je savais ce qu'était la direction d'une entreprise, de deux entreprises. J'avais dirigé une filiale, comme vous l'avez dit, d'une grande banque américaine. J'avais dirigé aussi une filiale du groupe Total. Bref, j'avais fait un parcours dans l'entrepreneuriat qui me permettait d'avoir une vision de ce qu'il fallait faire et ce qu'il faut faire, c'est embêter le moins possible les entrepreneurs et les laisser faire beaucoup plus. Donc j'ai eu cette répartition des rôles qu'elle a bien voulu accepter et au contraire qu'elle m'a proposé. À moi la microéconomie, à elle la macroéconomie et tout ça, mais le soutien du puissant ministère de l'économie pour faire passer les mesures que je jugeais indispensables. Vous parlez de la crise financière de 2008. Je vais vous donner un exemple de la manière dont souvent les capteurs, comme on dit aujourd'hui, c'est-à-dire la capacité d'un gouvernement, des pouvoirs publics à appréhender un choc dans l'économie, sont parfois déficients. En 2008, nous sommes avec une crise financière qui commence. C'est la faillite de Lehman Brothers en plein été. Et il y a une sourde inquiétude et on me fait revenir avec tous les ministres de Bercy pour une réunion au plus haut niveau de l'État. Donc avec le premier ministre de l'époque et le directeur de cabinet du président de la République, le gouverneur de la Banque de France, le président d'Oseo, le directeur du Trésor, bref, tout cet aéropage est convoqué à Matignon en plein mois d'août pour apprécier les conséquences de cette faillite sur l'économie française. Et moi, j'avais passé quelques jours chez moi en Touraine et de manière tout à fait inopinée, j'avais assisté à une réunion amicale d'une quinzaine ou d'une vingtaine de chefs d'entreprise chez un de mes amis. qui réunissait ses collègues entrepreneurs. Et donc là, on est en plein mois d'août et ils viennent tous me voir en me disant on n'a plus de crédit bancaire. Les banques ne veulent plus nous prêter. Elles ont peur. Les crédits américains sont pourris. Elles les ont dans leur bilan. Elles ne veulent plus prendre aucun risque de se repasser des crédits pourris. Elles ont bloqué les crédits. Et j'entends cela et je me dis, c'est quand même très grave ce qui se passe. Et le lendemain, j'avais cette réunion à Matignon pour apprécier les choses. Et Christine Lagarde me dit, viens, on va y aller ensemble à Matignon. Donc, on part de Bercy ce matin-là. Et je lui dis, tu sais, je suis très inquiet. J'ai quand même un panel significatif de plus d'une quinzaine d'entrepreneurs qui me disent que tout est bloqué, que les banques ne veulent plus financer leur trésorerie. Et voilà, elle me dit, écoute, c'est inquiétant ce que tu dis, mais moi, j'ai la note de la direction du Trésor qui dit qu'il faut être prudent, mais que les encours de crédit qui sont suivis par la Banque de France et qui s'arrêtaient au 31 juillet... montrait une progression des encours de crédit de quelques points jusqu'à la fin du mois de juillet. On était peut-être le 10 août ou le 11 août et elle me dit « moi je ne peux pas relater ce que me disent les services de mon ministère mais tu prendras la parole après moi pour dire que tu n'as pas la même perception et que tu trouves que la situation est beaucoup plus grave » . Voilà la réalité. à laquelle on peut être confronté et que les capteurs du ministère de l'économie ou d'autres ministères ne sont pas forcément en situation de saisir quand il y a une crise brutale. Il peut s'effondrer la confiance.
- Anthony Baron
Il y a un décalage en fait, ,
- Hervé Novelli
C'est ça, entre la réalité et la crise le 10 août. il n'y avait pas de crise puisqu'on était sur le 31 juillet, plus 3 ou 4 ou 5% d'encours de crédit. Donc le financement de l'économie était ou semblait assuré. J'ai pris la parole après elle pour dire que je n'avais pas du tout la même perception, qu'on assistait à une crise du crédit en France et qu'il fallait prendre un certain nombre de mesures. Alors inutile de vous dire que j'ai été mal accueilli, j'ai vu les mines déconfites de l'ensemble des hauts fonctionnaires qui étaient en face et qui ne croyaient pas à ce que je disais. J'apparaissais un peu comme le vilain petit canard. J'ai l'habitude et ça m'est souvent arrivé dans cette période. Mais le premier ministre de l'époque, et c'est pour ça que je conserve un très bon souvenir de lui, à cette occasion, a dit « Écoute Hervé, personne ne semble approuver tes craintes, il faut être prudent. » C'est ce qu'on nous dit, on va l'être, mais toi, tu n'es pas aujourd'hui suivi, mais par contre, je vais te demander, et c'est ça qui est d'une certaine manière a sauvé des milliers et des milliers d'entreprises, de préparer un plan de sauvetage des PME françaises. on va doter et donc on a en quelques jours il m'a demandé pour une semaine donc j'ai débattu avec le président de l'époque, directeur général d'Oseo qui est devenu la BPI des crédits de trésorerie qui se sont substitués au crédit bancaire avec des garanties de l'Etat qui ont permis de sauver des dizaines de milliers de PME françaises
- Anthony Baron
donc déjà l'ancêtre du PGE c'est une pré-garantie d'Etat
- Hervé Novelli
je pense que Bruno Le Maire s'est beaucoup inspiré de ce que j'avais fait à Bercy. Mais moi, je'étais... un bon libéral dissimulé derrière Oseo, qui faisait ses prêts, qui avait été recapitalisé pour cela. Et ça donnait moins le sentiment des prêts garantis par l'État, même si c'était la même chose. En tout cas, c'était, on va dire, plus esthétique que de passer par Oseo.
- Anthony Baron
C'est vrai qu'on comprend bien, effectivement, la situation en 2008.
- Hervé Novelli
On va faire toucher du doigt une réalité, c'est la difficulté que les pouvoirs publics français particulièrement, avec un État qui est quand même omniprésent et qui met son nez un peu partout, la difficulté de toucher du doigt des réalités comme celle-là. Et ça m'a beaucoup fait réfléchir, et c'est pour ça que je suis partisan d'une redistribution des pouvoirs qui fasse qu'on soit au plus près du terrain. avec une réelle capacité d'action qui permettent de mieux appréhender les problèmes.
- Anthony Baron
Et donc, cher Hervé, si on revient justement à cette période et notamment le statut d'auto-entrepreneur, encore une fois, l'initiative, elle était dans le programme du président de l'époque, Nicolas Sarkozy, où vous arrivez avec cette conviction de vous dire « Ok, il manque quelque chose en France, on doit libéraliser le travail et le statut d'indépendant peut aider. »
- Hervé Novelli
Alors... C'est beaucoup plus simple que ça, si j'ose dire. Lorsque je suis arrivé au gouvernement, en charge des entreprises, c'était mon premier poste, toutes les entreprises et le commerce extérieur. Là, j'étais avec mon bagage d'entrepreneur que j'avais été, et j'avais une idée fixe qui était la simplification. Je pensais que là... Beaucoup de nos problèmes, beaucoup des problèmes des entrepreneurs français sont liés à la complexité et à l'avalanche de normes et de contraintes administratives qui pèsent sur eux. Au-delà de la fiscalité, au-delà des charges, au-delà de tous les autres problèmes, il y a celui-là. Donc, mon idée, elle était de simplifier dans les domaines économiques, entrepreneuriaux, sociaux et réglementaires. J'ai donc créé des groupes de travail. en arrivant au ministère en 2007, je suis nommé à la fin du mois de juin 2007, je crée des groupes de travail sur la simplification dans ces trois ordres réglementaires. fiscaux, sociaux, et je leur dis « Trouvez-moi les trois mesures de simplification qui pourraient être intéressantes pour notre pays et rendez-moi les copies pour la fin de l'année. » Donc on est en 2007. Ces trois groupes, je les crée avec beaucoup de praticiens du privé. Très peu de hauts fonctionnaires, quelques-uns peuvent que la machine soit branchée.
- Anthony Baron
Et en lien avec les réalités pratiques des entreprises, et en lien avec le terrain.
- Hervé Novelli
Bien sûr, alors des entrepreneurs, des avocats, des commissaires aux comptes, des experts comptables, des notaires, tous ceux qui accompagnent au quotidien le développement de nos entreprises. Et à ma grande... Un grand intérêt, je constate, quand ils me rendent ces dossiers, que les trois groupes de travail ont conclu comme mesure prioritaire de faciliter la création d'entreprise, la création d'activité. Et alors, j'ai mandaté le directeur général de l'agence pour la création d'entreprise de l'époque, cette agence a disparu, pour me faire un rapport sur les mesures à prendre pour faciliter la création d'entreprise. Et il m'a rendu ce rapport qui préconisait la création d'un nouveau statut. La vérité oblige à dire que ce nouveau statut a été beaucoup travaillé en interne par le cabinet, par mon cabinet, et qu'on a abouti à la création d'un statut d'entrepreneur qui s'appelait l'auto-entrepreneur, que j'ai préféré. Certains voulaient qu'on l'appelle l'activité Novelli pour attacher son nom. Donc j'ai préféré... avec quelques amis qui avaient réfléchi à ces sujets, préféré qu'on l'appelle auto-entrepreneur, parce que je voulais bien qu'on touche du doigt cette réalité qu'on peut entreprendre sa propre activité. Et c'est devenu le statut de l'auto-entrepreneur, qui est devenu malheureusement pour moi, en matière sémantique, la micro-entreprise qui n'a pas du tout la même force, puisque là on est sur un concept d'entreprise, alors que moi je m'étais... l'accent sur l'entrepreneur. On a fait beaucoup d'innovations avec ce statut. J'étais très confiant, très content. Lorsqu'on crée ce statut durant l'année 2008, je présente ce statut au Parlement, il y a des innovations exceptionnelles. C'était la première inscription en ligne. On permettait de s'inscrire en ligne sans passer par les différents lieux où on devait enregistrer la création d'entreprise. À l'époque, la fusion, je réalise un prélèvement. forfaitaire unique assis sur le chiffre d'affaires, ce qui était une énorme innovation parce que c'était un prélèvement qui contenait à la fois les charges et l'impôt sur le revenu pour ceux qui décidaient d'opter pour ce prélèvement de leur impôt. Donc on fusionne. C'était très révolutionnaire, ça la reste encore. On fusionne un peu sur le revenu et les charges. Et je l'ai obtenu parce que j'étais à Bercy et que le ministre du budget de l'époque m'a laissé faire sur ces sujets puisqu'il était aussi ministre des Comptes publics. C'était Eric Woerth à l'époque. Donc, on a beaucoup d'innovations. Et ce statut qui ne venait pas de nulle part puisqu'il y avait à la fois un statut qui préexistait qui était le statut du régime micro-social. qui avait été créé antérieurement et qui permettait une exonération de TVA. D'accord. Dont on va parler maintenant, jusqu'à un certain plafond, au-delà duquel vous étiez redevable de la déclaration de TVA. J'exonère de taxes professionnelles, même si la taxe professionnelle a ensuite disparu, pour donner un véritable boost. Donc, dans mon esprit, c'est un statut de simplification à l'extrême qui permet le passage à l'acte. Et j'inaugure le salon de la micro-entreprise, ça s'appelait à l'époque, avant le salon de l'auto-entrepreneur, le salon de la micro-entreprise qui avait lieu en octobre 2008. Donc quelques mois avant le 1er janvier 2009, date d'application de la création de ce statut qui devient inscrit dans la loi.
- Anthony Baron
Oui, parce que ça passe dans la loi de modernisation de l'économie.
- Hervé Novelli
Je défends donc toute la partie entreprise. de cette loi qui comportait trois chapitres. Un chapitre sur l'entreprise dont j'étais en charge, un chapitre sur la concurrence et la distribution dont était en charge le ministre de la Consommation de l'époque, avant que je ne me remplace à ce ministère, et puis un chapitre sur les grands équilibres financiers dont se chargeait Christine Lagarde. Donc on avait une répartition des rôles. Et j'ai bataillé tout au long de cette année pour faire adopter ce statut qui était déjà accusé, vous allez rire, de concurrence déloyale par les artisans du bâtiment. Donc, c'était il y a 15 ans.
- Anthony Baron
C'est vrai ? Alors, je pensais qu'on vous aurait plutôt attaqué sur le côté précaire du statut et en fait, pas du tout.
- Hervé Novelli
Parce qu'à l'époque, moi, je n'avais pas vu ou pas suffisamment. que le succès triomphal, je parlais de ce salon, j'ai vu le stand de l'Agence nationale de la création d'entreprises prise d'assaut par des gens qui voulaient savoir ce qu'était ce statut très réellement, ce statut super simplifié qui leur permettait de se lancer, de se lancer sans urgence, avec leurs ambitions, leurs projets éventuels, mais sans risque, puisque pas de chiffre d'affaires, c'était le slogan, pas de chiffre d'affaires, pas de charges. Donc ça s'est très bien passé, mais j'étais passé, moi, À côté,
- Anthony Baron
de ce qui se passait en même temps, à savoir la révolution numérique. C'est-à-dire que la révolution numérique, c'est quoi ? C'est la capacité de création d'un lieu, en l'occurrence les applications, où vous allez rencontrer des gens qui peuvent vous offrir des services avec des gens qui ont besoin que ce service soit offert. Quand je dis offert, c'est sous rétribution. Bien sûr. Et donc... Cette adéquation entre un statut ultra simplifié d'un côté et d'indépendant, de non salarié, et cette capacité à créer des applications allait évidemment booster le statut. Les VTC sont nés à la même époque, dans une loi de l'horisme, dite loi Novelli, puisque j'ai créé aussi...
- Hervé Novelli
Enfin, vous l'avez votre nom sur une loi !
- Anthony Baron
De temps en temps, on dit que cette loi touriste s'appelle la loi Noëlli. Mais il y a eu tout un emballement du numérique, une révolution qui a mis de plein pied le statut comme le mieux en adéquation avec la réalité de la vie économique. Et ça a eu des conséquences très importantes que je n'avais pas vues. Oui,
- Hervé Novelli
parce que j'imagine que vous avez échangé avec les organisations patronales. sur ce statut. Donc, ce que vous parliez tout à l'heure, effectivement, de la fédération des artisans du bâtiment qui s'en inquiétait, mais j'imagine que les organisations patronales de l'époque ont dû l'accueillir quand même de façon très positive.
- Anthony Baron
Non, ni de manière positive ni de manière négative. Parce qu'en fait, les craintes et les déclarations des organisations d'entrepreneurs du bâtiment, la CAPEB, pour ne pas la nommer, Et la FFB, la Fédération française du bâtiment, ont tout de suite été assez hostiles à cette forme d'activité parce qu'ils y voyaient une sorte de concurrence déloyale, ce qui prête à sourire aujourd'hui. Parce que si la concurrence avait été si déloyale que cela, en 15 ans, je pense qu'il n'y aurait plus aucun artisan du bâtiment qui existe aujourd'hui. Donc, c'était assez démesuré, mais ça a été... Ça a été une bataille que j'ai remportée au Parlement et notamment au Sénat où j'ai dû batailler ferme contre l'influence de certains lobbies. Mais surtout, on est aux prémices de la révolution numérique, de la numérisation de l'économie et le statut de l'auto-entrepreneur devient quelque chose de très important.
- Hervé Novelli
Parce que grâce à la révolution numérique, on a aussi de nombreux emplois. autour du digital et du numérique qui naissent et qui naissent aussi, qui arrivent à se développer sous ce statut.
- Anthony Baron
Absolument. Par exemple, on est au début de ce qu'on appelle le commerce en ligne, du e-commerce. C'est la même époque, c'est 2010. Je reçois à Bercy les représentants de cette nouvelle industrie naissante, la Fédération des entreprises de vente à distance, en fait la FEVAD, qui naissait et s'organisait parce que le commerce en ligne commençait. de se développer. Et nombre de plateformes avaient des auto-entrepreneurs devant les écrans qui faisaient du commerce en ligne. Donc, il y a une sorte de symbiose entre le statut d'indépendant et la révolution numérique. C'est ça qu'on a du mal, que certains ont du mal à comprendre.
- Hervé Novelli
Oui, absolument.
- Anthony Baron
Ils pensent que le monde salarial est le monde idéal, alors que c'est un monde. qui va exister encore pendant de nombreuses années, mais c'est un monde qui était beaucoup plus adapté à la révolution de l'usine, de l'industrie. Dès lors que vous changez de société, que vous passez d'une société industrielle à une société post-industrielle, société dite de service, il est normal qu'on mette l'accent sur le service à rendre plutôt que sur la durée du travail. Absolument. Et du travail posté avec horaires fixes et pointages pour vérifier que les horaires sont bien tenus. Donc, c'est cela que je mets, Chine, et mes vertus à faire toucher du doigt tous ceux qui ont des responsabilités. Il faut réfléchir à cette évolution qui est incontournable. Pourquoi elle est incontournable ? Parce qu'elle est technologique, tout simplement. C'est mon côté un peu rationnel, rationaliste, certains diraient marxiste, Karl Marx disait les infrastructures commandent les superstructures. Il disait, en fait, il voulait dire que c'est les conditions du mode de production qui vont influer sur les lois. C'est un des rares cas. que j'adopte chez Karl Marx, parce qu'on ferait bien de réfléchir au monde qui vient. Le monde qui vient, ce n'est pas le monde des temps modernes, ni le monde de l'industrie telle qu'on l'a connue. Je ne dis pas qu'il ne faut pas d'industrie, qu'on se comprenne bien, mais il faut une industrie qui soit en adéquation avec la réalité technologique, et que les industries en 3D, toutes les formes industrielles, de robotisation, tout cela doit être...
- Hervé Novelli
Oui, on a vu une vraie révolution aussi industrielle, l'étude 4.0 émerger ces dernières années, etc.
- Anthony Baron
Et qui n'est pas en notre faveur quand on se compare au pays les plus voisins. Oui, bien sûr. La lutte contre les robots qui allaient détruire les emplois, là encore, a beaucoup marqué notre pays. Et pourtant,
- Hervé Novelli
aujourd'hui...
- Anthony Baron
Et l'Allemagne a plus de robots que nous, l'Italie a plus de robots que nous, et ils sont tous les deux... deux pays qui sont plus industrialisés que nous. Il y a ce lien entre robotisation et désindustrialisation. Toutes ces erreurs, nous les payons aujourd'hui. Donc moi, je souhaite pour mon pays qu'on ait cette réflexion sur le travail. Il y a le travail salarié qui va continuer parce qu'il est inscrit. Il y a 90 pour tous.
- Hervé Novelli
Il y a un attachement aussi des Français au CDI, il est protégé, etc. Bien sûr.
- Anthony Baron
Il faut faire sa place au travail indépendant. Vous savez qu'en quelques années, le travail indépendant, le nombre de travailleurs indépendants a doublé en 15 ans.
- Hervé Novelli
Absolument.
- Anthony Baron
Lorsque j'ai créé le statut en 2009, il y avait à peu près 2 millions d'artisans, de travailleurs non salariés, artisans, commerçants, professions libérales. Aujourd'hui, vous avez 4 millions d'indépendants. Là, je parle à... à la SERP, avec des chiffres globaux. Vous avez 4 millions indépendants dont en gros la moitié sont des auto-entrepreneurs. Et ça veut dire quoi ?
- Hervé Novelli
On le voit aujourd'hui d'ailleurs, j'abonde dans votre sens, 2024, on a une année record en création d'entreprise. 1,1 million d'entreprises.
- Anthony Baron
Absolument.
- Hervé Novelli
Dont, je me permets, 64% de micro-entreprises.
- Anthony Baron
Absolument. Ça veut dire que la création d'entreprises, elle est essentiellement ... liées à la création d'auto-entrepreneurs ou de micro-entreprises. Et donc, c'est pour ça que je peux vous annoncer, après ces chiffres triomphants de 2024, des mauvais chiffres en 2025 liés aux atermoiements...
- Hervé Novelli
Aux défaillances d'entreprises.
- Anthony Baron
...dévernements.
- Hervé Novelli
Et il y a aussi des défaillances d'entreprises. 60 000. 60 000 sur l'année 2024. Et effectivement, quand on regarde également les typologies d'entreprises... qui sont en défaillance, on a aussi une grande majorité de micro-entreprises également. Bref,
- Anthony Baron
les chiffres...
- Hervé Novelli
Mais rien d'anormal.
- Anthony Baron
Ils n'incluent pas ceux qui ne se créent pas. C'est-à-dire, ils n'incluent pas tous ceux qui ne vont pas créer de micro-entreprises cette année parce qu'ils seront inquiets sur les projets funestes du gouvernement. Ça, c'est... La psychologie en économie, c'est vital. Et donc, on aura des mauvais chiffres en 2025. Ce que j'espère, c'est qu'on clarifie la position du gouvernement sur ce statut. Oui. Parce qu'aujourd'hui, le gouvernement dit, on est pour ce statut, mais on veut le renier d'une certaine manière. Et en oubliant que, comme vous l'avez rappelé fort justement, les deux tiers de création d'entreprise sont... sous forme de statut de micro-entreprise ou d'auto-entrepreneur. Et donc, si on s'attaque à ce statut, on s'attaque à la création d'entreprises dans ce pays. Donc, il faudrait choisir. Et j'en reviens à ce que je vous disais il y a quelques instants sur le futur du travail. La réflexion des gouvernements n'est pas, c'est le moins qu'on puisse dire, achevée. Les mauvaises langues pourraient même dire qu'elle n'est pas du tout commencée. C'est à moitié vrai. en fait il y a une interrogation de beaucoup de gens sur quel va être le travail demain. Parce que vous avez dit que beaucoup de gens vont continuer d'être salariés, et vous avez raison. Mais quand vous interrogez des jeunes, que ce soit des jeunes sans formation, ou des jeunes qualifiés, des diplômés de grandes écoles, beaucoup refusent le mode salarial pour leur existence et pour leur vie. Donc on sent bien qu'il y a une évolution. où le travail doit être appréhendé sous ces différentes formes. Il y a un travail salarié qui fait l'objet d'un contrat qui est bien codifié et relativement bien protégé, avec bien sûr les conséquences que l'on connaît sur la rigidité du droit du travail français par rapport à d'autres et la difficulté de supprimer des emplois lorsque la situation l'exige. On connaît ça. Mais... À côté, vous avez toute une catégorie de gens qui souhaitent exercer un travail sous forme indépendante. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire remplir une tâche, remplir un service, livrer ce service et continuer comme cela en ayant des clients plutôt qu'un emploi salarié. Donc c'est cette coexistence entre... Le travail salarié d'un côté, le travail indépendant de l'autre, qui va continuer de se développer, qu'il faut aujourd'hui harmoniser. Et je milite pour la création et l'ajout dans le Code du travail d'un Code de l'activité indépendante qui reste à écrire.
- Hervé Novelli
Il y a effectivement un sujet avec le gouvernement dans le cadre du projet de loi finance 2025 qui était une baisse du seuil de TVA à 25 000 euros. Là où, jusqu'à présent, on avait deux seuils de TVA, un qui était à 37 500 euros et un autre autour de 85 000 euros. Le premier sur les activités plutôt de service et celui à 85 000 euros d'exonération de TVA était sur les activités de commerce, d'achat et de vente de marchandises. Et donc, en gros, la remise en cause, en tout cas l'abaissement de cette exonération de TVA, pour vous c'est un frein ? demain à ce que des auto-entrepreneurs ou en tout cas des indépendants cherchent à se lancer ?
- Anthony Baron
J'étais indigné. Indigné pour un certain nombre de raisons. C'était l'incompréhension dont faisaient preuve les pouvoirs publics à l'égard de ces nouvelles formes d'activité. De quoi s'agissait-il ? Il s'agissait de fragiliser un statut qui est le statut de micro-entreprise et de fragiliser... fragiliser la création d'entreprises en faisant cela parce qu'on allait diminuer le nombre de créateurs sous forme de statut auto-entrepreneur. Ça c'est évident. Et c'était évident puisque les deux tiers des créations d'entreprises en France, vous l'avez rappelé, sont liés à la micro-entreprise. Bon, premier point, on s'attaque donc à une des rares courbes qui marchait bien. Et cette année, on aura un recul de la création d'entreprise.
- Hervé Novelli
1,1 million l'année dernière, 2025.
- Anthony Baron
Il n'y en aura pas 1,1 million du fait des atterrements du gouvernement. Mais surtout, ce qui m'indignait, c'était qu'on voulait faire croire qu'on avait besoin de diminuer ce seuil parce qu'il y avait cette concurrence déloyale qui était menée contre les artisans du bâtiment. Ceci est faux. Ceci est faux. On sait bien que le chiffre d'affaires des micro-entreprises dans le secteur du bâtiment est de 2 points, ce qui veut dire que 98% est fait par des entreprises établies,
- Hervé Novelli
privées,
- Anthony Baron
SA, SAS. Donc, c'était pour rentrer de l'argent dans les caisses de l'État. Oui,
- Hervé Novelli
c'était le seul argument.
- Anthony Baron
à Bercy, que j'ai bien connu, je le rappelais, mesure dite de rendement. Donc il y avait 400 millions qui allaient venir de cet abaissement du seuil de TVA, donc d'exonération de TVA, qui allait devoir être déclarée et faire rentrer de l'argent dans les caisses à travers cet abaissement du plafond de la TVA. du plafond de l'exonération de la TVA. Donc, ceci faisait encore une fois la preuve d'une méconnaissance absolue des réalités de la microéconomie. Qu'est-ce qui se passe quand vous abaissez un seuil qui vous est favorable ? Eh bien, vous ne déclarez pas plus que ce seuil. Bien sûr,
- Hervé Novelli
vous limitez vos revenus.
- Anthony Baron
Vous limitez vos revenus.
- Hervé Novelli
Vous limitez donc la création de richesses.
- Anthony Baron
Vous limitez la déclaration de vos revenus. Donc, on allait en plus augmenter le travail au noir. Dans l'économie, c'est absolument l'inverse de ce que je voulais faire lorsque j'ai créé ce statut qui a entraîné une baisse du travail au noir. Donc, un, les rentrées ne seraient pas au rendez-vous. Et deux, il faut savoir, vous avez cité des chiffres de 2024, je vais vous en donner deux autres. Le chiffre d'affaires global des micro-entrepreneurs en 2024, c'est autour de 26 milliards d'euros. et donc... Avec une moyenne de 20%, on peut dire qu'on est sur plus de 5 milliards d'euros de rentrées sociales et fiscales, mais surtout sociales. Donc, on va faire baisser ces rentrées, puisqu'il y aura moins de gens qui vont se déclarer, il y aura plus de gens qui vont s'arrêter à ce seuil. Donc, c'était une mesure inique et en plus profondément antisociale. Et c'est ça que... Moi, j'ai été... Très fier de créer ce statut parce que j'ai vu beaucoup de... Petites gens comme on dit, ou des gens qui sont venus me voir, que je rencontrais au cours de mes déplacements, de mes réunions. Et bien après que je sois sorti du gouvernement, qui me disaient vous nous avez rendu notre dignité, on vous remerciait. Parce que maintenant on sait pourquoi on se lève le matin, on est entrepreneur, on est auto-entrepreneur. J'ai vu beaucoup de jeunes aussi, des banlieues, qui me le disaient. Parce que vous savez que l'économie des banlieues, il n'y a pas grand chose. Si vous enlevez les VTC, vous n'avez plus que... Je caricature à peine, mais vous n'avez plus que le deal. Et ce n'est quand même pas terrible. Donc, il y avait toutes ces mesures antisociales qui s'attaquaient aux entrepreneurs qui commencent à entreprendre ou qui sont du bas de l'échelle. Donc, tout ça m'a révolté. J'ai manifesté mon indignation. Je suis allé voir tout le monde. Et à Bercy, certains... On n'était pas loin de penser ce que je viens de vous dire. Donc, cette mesure est suspendue. C'est très loin. Absolument. Mais maintenant, il faut qu'elle soit abrogée.
- Hervé Novelli
Alors, apparemment, il y a des discussions qui sont toujours en cours, mais en tout cas, il n'y a pas encore d'abrogation.
- Anthony Baron
On nous a annoncé ces discussions. L'abrogation n'est toujours pas arrivée. Et là, on est sur une suspension. Et toutes les sources d'incertitudes juridiques qui vont avec une mesure qui est inscrite dans la loi de finances pour 2025 et qui n'est pas appliquée. Donc, dans quelques jours, il y aura une proposition de loi qui devrait abroger cette mesure pour 2024. Mais le projet de loi de finances de 2026...
- Hervé Novelli
Pourrait le remettre au bout du jour.
- Anthony Baron
Je n'y crois pas. Et je me battrai là-dessus. Par contre, je souhaiterais que le gouvernement... instaure vraiment un débat puissant et de fond sur le futur du travail.
- Hervé Novelli
Absolument.
- Anthony Baron
Rien besoin pour mettre fin à toutes ces...
- Hervé Novelli
En fait, face au succès quand même de ce statut, on passe un peu de temps sur ce statut, mais moi il m'intéresse puisque vous le savez, ça fait 15 ans que j'entreprends dans l'univers du management de transition. Ce statut pour le management de transition n'est pas forcément adapté puisque les plafonds du fait des rémunérations de managers de transition est vite atteint. Moi, j'aurais pensé que les plafonds de ce statut augmenteraient ces dernières années justement parce que c'est un succès. On le voit aujourd'hui, on a plus de 12% de la population active qui travaille en indépendant ou en profession libérale et que forcément, il y a quelque chose derrière. C'est pas... simplement un écran de fumée. Il y a une vraie volonté de se projeter dans une forme de travail différente de celle du salariat, qu'une vraie part significative de la population souhaite s'inscrire dans la durée, en plus de ça, sur ce mode de travail. Et finalement, on l'a laissé plutôt figé. Alors, je crois qu'il y a eu une petite augmentation en 2017 ou 2018, mais globalement, on n'est pas allé dans une libéralisation plus forte que ça.
- Anthony Baron
Vous avez tout à fait raison. On aurait pu penser que le succès du statut aurait dû conduire nos gouvernants à élargir ce statut, voire à transférer les avantages de ce statut à d'autres statuts. Bien sûr. Ce qui serait...
- Hervé Novelli
Sur des limites de chiffre d'affaires.
- Anthony Baron
Bruno Le Maire a doublé les plafonds. Il a doublé les plafonds de seuil de chiffre d'affaires, mais malheureusement, il a laissé le niveau d'exonération de TVA fixé. à l'origine. Donc, vous avez eu une complexification de fait, puisque ceux qui dépassaient les plafonds d'exonération de TVA devaient déclarer la TVA, et donc ça a complexifié. Mais, le fait qu'il ait doublé les plafonds de chiffre d'affaires, et qu'on soit aujourd'hui, comme vous l'avez rappelé, à 70 000 et à 185 000 pour les plafonds de chiffre d'affaires, est déjà une vraie avancée qui tout de suite a rencontré un grand succès à nouveau. Vous avez raison d'insister sur cela. Pourquoi ? Parce qu'on voit bien que cette extension du chiffre d'affaires faite par les auto-entrepreneurs, elle correspond à un besoin, parce qu'il n'y a pas pour moi de différence de nature entre l'entrepreneur du bas de l'échelle qui serait l'auto-entrepreneur d'un côté, et puis le... l'entrepreneur dans un manager de transition qui viendrait dans une mission de moyenne durée ou de longue durée dans l'entreprise diriger le service informatique. C'est un continuum et donc il n'y a aucune raison que ce statut d'une certaine manière soit attaqué. Alors que tous les autres statuts du type indépendant puissent se développer dans l'entreprise sans risque. Ça apparaît aberrant. C'est pour ça que j'ai toujours milité pour une prise en compte globale du statut du travailleur indépendant, du travailleur non salarié. Le gouvernement a saucissonné les choses en organisant des élections pour les chauffeurs de VTC et les livreurs pour qu'on ait une représentation. des auto-entrepreneurs, chauffeurs ou livreurs. Et donc, il a saucissonné en tranches, permettant la négociation dans le secteur de la mobilité, tout en faisant en sorte que tout le reste, tout ce peuple des indépendants ne soit pas pris en compte dans ces élections. Donc, on a vraiment un chantier, moi, qui me passionne. J'ai eu l'occasion de mon entretien. retenir du reste avec le président de la République. Ce chantier du futur du travail est certainement le plus gros défi que notre société doit affronter parce que c'est à la fois vital, indiscutable et indubitable et inévitable pour adapter nos formes d'activité à la réalité économique. Mais il faut le faire, bien sûr, en concertation. Il faut le faire en s'entourant de toutes les précautions. il faut déprécariser Le statut de l'indépendant.
- Hervé Novelli
Oui, c'est ça.
- Anthony Baron
Il y a un vrai sujet et ce sujet doit être pris à bras le corps. Le code du travail aujourd'hui, dans sa forme actuelle, est un code du travail qui laisse de côté 12% de la population active française. Voilà la réalité, puisque c'est un code du travail salarial.
- Hervé Novelli
En faveur des salariés.
- Anthony Baron
Oui, en faveur des salariés, mais surtout qui ne parlent... des travailleurs indépendants qu'à travers une requalification en salarié si jamais on se rapproche trop de la forme salariale.
- Hervé Novelli
Et qu'il a effectivement, on va dire, un client unique ou qui lui prend telle part de son chiffre d'affaires, etc.
- Anthony Baron
Le code du travail est très clair et très détaillé. Il s'agit de sanctionner et de requalifier. Moi, ce que je souhaiterais, c'est qu'on ait une définition du travail indépendant en droit positif. dans le code du travail, avec ses règles, avec ses sanctions s'il doit y en avoir, avec tout ce qui est nécessaire pour faire en sorte qu'on développe de manière harmonieuse et non pas de manière anarchique, comme c'est le cas aujourd'hui, cette forme de travail. Je suis convaincu que ça va continuer. L'indépendant est inscrit dans, je dirais, la volonté de nombre de nos concitoyens, c'est-à-dire la capacité à travailler quand on le souhaite, quand on le veut, quand on le peut, quand on en a envie, et non pas le salariat à vie dans la même entreprise. Il y a d'un côté ça, de l'autre côté la forme extrême qui est de travailler quelques jours, quelques mois par an. Bon, il faut trouver les critères qui aillent bien, tant pour le salariat qui restera pendant encore des décennies. la forme majoritaire d'activité dans les entreprises, mais avec les indépendants qui prendront une place de plus en plus importante dans l'activité des boîtes. Ça veut dire aussi qu'il y a une évolution du management qui doit être perçue. Il y a une évolution du rôle de l'entreprise qui ne sera plus celle de droit divin avec une hiérarchie très identifiée, mais plutôt de style bottom-up, c'est-à-dire avec... des gens, des cellules, si j'ose dire, de micro-entrepreneurs, d'intrapreneurs qui feront que l'ensemble des objectifs convergeront vers un objectif global de l'entreprise. Tout cela reste à écrire, tout cela reste à mettre en forme et le gouvernement, y compris le président, a malgré de bonnes intentions, a laissé la chose un peu en l'état.
- Hervé Novelli
parce que On a un taux de chômage aujourd'hui autour de 7,4%. On sait qu'on a un chômage des jeunes et un chômage également chez les seniors qui est quand même élevé. Est-ce que justement cette forme de statut n'est pas une réponse ? C'est quelque chose qu'on pourrait pousser pour rendre actif ? Chez les jeunes notamment, on va pouvoir acquérir de l'expérience très rapidement, face à des entreprises aussi qui parfois ne peuvent pas embaucher. Et puis chez les seniors, globalement, cette faculté a pouvoir... transmettre une expérience et je pense que voilà, je pense encore une fois aux seniors parce que c'est une population mais voilà, qui se retrouvent du jour au lendemain donc sans emploi, on ne l'amène pas forcément sur cette voie de dire mettez-vous en auto-entrepreneur, vous avez des choses à transmettre, vous avez tout le temps un revenu en complément de vos revenus du chômage. Enfin voilà, mais ça permet de rester actif et ça joue, je me permets juste, ça joue aussi sur l'employabilité. Parce qu'aujourd'hui, une entreprise qui cherche à embaucher regarde aussi l'employabilité de la personne. Donc effectivement, si la personne, de fait de son secteur d'activité, de sa fonction, est dans une niche qui ne lui permet même pas de rebondir immédiatement, plus son temps de chômage dure, plus son employabilité. Baisse.
- Anthony Baron
Vous touchez à un point sur lequel je travaille depuis des mois, qui est l'employabilité des seniors. On réfléchit, et c'est tout notre drame français, c'est que nous réfléchissons dans un cadre uniquement salarial. Et donc, lorsqu'on parle d'employabilité des seniors, on va dire, eh bien, on va sanctionner les entreprises qui se séparent des seniors. C'est oublier la réalité du travail. Et du monde du travail, vous avez des seniors qui veulent prendre leur retraite, mais qui souhaiteraient pouvoir travailler quelques heures par jour.
- Hervé Novelli
Souhaitent rester actifs encore, bien sûr.
- Anthony Baron
Et le statut d'indépendant, de travailleur non salarié est particulièrement adapté. C'est comme ça que je l'avais conçu. C'est un statut universel, c'est-à-dire pouvant convenir à toutes les gens pour qu'ils puissent... qu'on soit dans la fonction publique ou qu'on soit retraité, travailler. La fonction publique est aujourd'hui interdite aux auto-entrepreneurs. Bravo. Lorsqu'on parle employabilité des seniors, qui est un vrai sujet puisqu'il y a beaucoup de gens qui prennent leur retraite, on oublie qu'on pourrait avoir une sorte d'appareillage fécond, vous en avez parlé du reste, entre retraités actifs, c'est-à-dire retraité sous forme de statut. d'auto-entrepreneurs pouvant ainsi apporter leur expérience dans les entreprises sous une forme beaucoup plus moderne et qui leur permette à la fois de jouir d'une partie de leur retraite, mais aussi de pouvoir travailler et apporter leur expérience dans l'entreprise à des jeunes qui seraient enchantés d'avoir cela. On a essayé, les syndicats...
- Hervé Novelli
Et là, on se fiche du statut à ce moment-là.
- Anthony Baron
Mais surtout, on ne pense qu'à appareiller un jeune... salarié avec un senior salarié. Ça ne marche pas. Pourquoi ? Parce que les entreprises supportent des charges salariales des deux côtés. L'avantage de cet appareillage que je propose sans succès pour l'instant, c'est bien sûr que les charges sont acquittées pour le retraité qui a un statut d'auto-entrepreneur, sont acquittées par lui-même. Et donc, pour l'entreprise, Cela permet de supporter le coût de deux personnes plutôt que d'une et de faire en sorte que l'expérience de l'auto-entrepreneur retraité qui vient dans l'entreprise a apporté son expertise, ses compétences aux jeunes. Eh bien, tout cela, aujourd'hui, personne ne réfléchit à cet appareillage et je crois que c'est le seul qui serait intéressant. on voit bien aujourd'hui le taux d'échec des... des seniors en entreprise, tout simplement parce qu'à mon avis, on se prive de ces formes innovantes sur un travail dont on doit considérer qu'il ne sera pas uniquement un travail salarié. Donc c'est un effort de mentalité et puis aussi une menace, en tout cas les syndicats de salariés le perçoivent comme tel, sauf la CFDT qui a créé un syndicat d'indépendants. Oui.
- Hervé Novelli
L'union des indépendants. On a eu l'occasion d'accueillir les deux présidents, parce qu'ils étaient deux, aux acteurs de la transformation il y a quelques années maintenant, mais c'était passionnant.
- Anthony Baron
La PMVT a fait la preuve d'une réflexion sur le futur du travail que les autres syndicats seraient bien inspirés de porter. Et j'ajoute que... Il y a aussi ce sujet, le MEDEF n'a pas fait droit aux demandes réitérées des auto-entrepreneurs qui se considèrent comme des entrepreneurs de pouvoir adhérer chez eux. La CGPME a été plus habile. Maintenant, la CPME, puisqu'elle a permis des membres associés à son activité à travers la Fédération nationale des auto-entrepreneurs, qui est liée aujourd'hui et proche de la CPME. Donc, on voit qu'on a vraiment à prendre à bras le corps ce futur du travail. Moi, je suis triste de voir qu'on perd du temps. On devrait... porter ce débat plutôt que...
- Hervé Novelli
Donc, aller plus loin. Aller plus loin, effectivement, dans l'usage.
- Anthony Baron
Ir au défi à mener, réfléchir aux nouvelles formes d'activité, à leur protection. Bref, tout cela, c'est réfléchir aux 20 ans qui viennent. Mais si on s'arc-boute sur, d'un côté, il faut de l'auto-entrepreneur pour que Salaria Service, c'est faux. Bien sûr. Salaria, c'est voué à rétrécir. progressivement, lentement, parce que quand vous avez 12%, vous avez rappelé le Chim, des actifs qui sont sous forme indépendante alors qu'ils étaient 5% il y a quelques années. C'est une vraie réalité dont on devrait tenir compte quand on a la prétention de s'occuper des relations du travail.
- Hervé Novelli
Et c'est assez intéressant. J'ai abondé dans votre sens. C'est intéressant cette interview parce que j'ai l'impression qu'on est d'accord sur beaucoup de choses. C'est génial. Mais effectivement, c'est plutôt un témoignage, cette fois-ci, de notre côté, à travers notre activité de manager de transition. Chez AD Conci, moi, je le vois en tout cas depuis 15 ans, dans les managers de transition qu'on a l'occasion et l'opportunité d'accompagner, ils alternent des phases de mission en indépendant, des phases de CDI, reviennent à des missions, etc. Et il y a une vraie alternance. Donc, en fait, on se retrouve dans, finalement, l'intérêt pour eux. Et même, on le voit dans les indépendants de façon plus large, on n'est pas figé non plus dans le temps à être indépendant. On peut alterner aussi ces périodes de CDI. Et c'est là peut-être le lien aussi avec les nouvelles formes de travail ou ce futur off-work, qui est de se dire finalement, peu importe le statut, ce qui intéresse un collaborateur qui rejoint une entreprise, c'est vraiment le contenu.
- Anthony Baron
Bien sûr, mais on le voit bien. Ce que vous dites est très vrai. Moi, je l'ai observé pendant le Covid. Le Covid, vous avez eu donc le développement du télétravail. Le télétravail d'un salarié est quand même difficile à appréhender en matière de lien de subordination. Comment on qualifie un salarié à travers son lien de subordination ? Ce lien de subordination est contrebalancé par un contrat de travail qui fixe les droits et devoirs à la fois de l'entrepreneur qui est en gauche et du salarié qui vient travailler dans l'entreprise. Mais ce lien de subordination, c'est-à-dire cette... cette capacité à donner des ordres, à encadrer et à être finalement, je vais dire, celui qui impulse et qui donne les ordres. Quand vous êtes en télé d'un faille, il y a une autonomie plus large qui est donnée aux salariés. Donc, ce que vous dites de cette convergence... Quand on voit des différents statuts, c'est parfaitement exact. On voit bien qu'on est dans une phase d'autonomisation du salarié, même du salarié, si j'ose dire, à travers ces formes d'activité, du télétravail qui font que le travail à distance, il est difficile d'apprécier le lien de subordination quand vous êtes dans votre maison en train de vous occuper de vos enfants. Je caricature à peine parce que j'ai des exemples près de moi. et que vous êtes censé être en télétravail. Donc, on voit bien qu'il y a un bouillonnement dans la société lié aux nouvelles technologies qui oblige à une réflexion sur le nouveau cadre contractuel du travail. Alors, certains disent qu'il faut un contrat d'activité. Non, je pense qu'il faut simplement que le contrat de travail, qui est la marque du travail salarié, passe la place à un contrat de paiement. de prestation, un contrat d'ordre plus commercial que salarial qui va relier le donneur d'ordre et le sous-traitant d'une certaine manière. On est là sur ce type de pratique mais... On n'ose pas.
- Hervé Novelli
Bien sûr.
- Anthony Baron
Je pense qu'on n'ose pas parce qu'il y a trop de conservatisme. Il y a les syndicats de salariés qui défendent leurs salariés, qui pensent qu'ils sont menacés. Donc, on va s'arc-bouter sur des positions conservatrices qui, à mon avis, retardent cette nécessaire adéquation entre la technologie qui se répond à une vitesse grand V, y compris aujourd'hui avec l'intelligence artificielle, et les formes d'activité.
- Hervé Novelli
Alors, On a fait le point beaucoup sur la France, mais qu'en est-il ou comment se positionne la France par rapport à nos voisins européens ?
- Anthony Baron
La France, elle est handicapée, je vais vous dire les choses de manière aussi pratique. Elle est handicapée, d'abord aux Etats-Unis, vous avez ce qu'on appelle les freelancers, qui se développent à une vitesse exceptionnelle.
- Hervé Novelli
35% de la population active et on prévoit à 2030 quasiment un actif sur deux exactement qui serait en freelance.
- Anthony Baron
Alors je ne dis pas qu'il faut adopter les mœurs et coutumes de la société américaine, mais la flexibilité que l'on observe, elle est aujourd'hui inscrite dans la compétitivité de l'économie américaine. Ailleurs, il y a des réponses qui sont apportées en Italie, en Allemagne, en Espagne, en Angleterre pour faire droit. à cette nouvelle catégorie de travailleurs indépendants. Alors, ça peut se planter. Il y a, par exemple, eu des essais en Italie de ce qu'on appelle un tiers statut, c'est-à-dire un statut hybride entre le salariat et l'indépendant. Les Anglais ont un statut de worker qui est lui aussi un statut...
- Hervé Novelli
Ou des contracteurs, effectivement. Oui, oui.
- Anthony Baron
Bon, donc ce phénomène, il est global, il est général, il n'est pas lié à la méchanceté des uns ou des autres, mais à la simple évolution technologique qui induit ce développement, ce développement de formes d'activité. Moi, je pense qu'on a commencé de développer une forme originale, qui est la reconnaissance du travail indépendant à travers des élections, même si, je le disais, elles sont partielles, très partielles, et pour les travailleurs indépendants du secteur. dit de la mobilité. Je crois qu'il faut continuer, qu'il faut améliorer cette vision. Il y a quelque chose qui menace, qui est une directive européenne sur la mobilité justement et qui risque de requalifier en salariés l'ensemble des travailleurs du secteur de la mobilité, c'est-à-dire l'ensemble des travailleurs indépendants, c'est-à-dire les VTC et les livreurs. Je pense que c'est une très mauvaise chose parce que... Les entrepreneurs qui développent ces activités fermeront en France.
- Hervé Novelli
C'est évident.
- Anthony Baron
On perdra encore de la souplesse de l'économie française au profit, si j'ose dire, d'une rigidité accentuée. Donc, j'appelle vraiment de mes voeux, et j'en ai parlé vraiment aux plus hautes autorités de l'État, cette nécessité d'une réflexion forte qui viendrait. compléter, élargir l'embryon de régulation qui a été mis en place dans le secteur de la mobilité.
- Hervé Novelli
Très clair. Et question très directe, demain président de la République, quelles mesures mettriez-vous en place immédiatement pour booster l'entrepreneuriat en France ?
- Anthony Baron
Quels sont les sujets qui aujourd'hui empoisonnent le quotidien de l'entrepreneur ? Ils sont de trois ordres, ça n'a pas bougé. Il y a la fiscalité qui les étouffe, et notamment les charges. liées à un système de financement de la protection qui est obsolète, de mon point de vue. Nous sommes le seul pays en Europe à ne pas avoir de fonds de pension, c'est-à-dire à ne pas avoir donné la possibilité à des gens de se préparer à leur retraite en complétant la retraite par répartition qui existe aujourd'hui. Donc la conséquence de cela, c'est que les charges sociales sont très importantes parce qu'elles n'incluent pas cette... part de capitalisation qui viendrait faire baisser ces charges. La protection sociale et la fiscalité qui va avec cette protection sociale est un vrai sujet. Le deuxième sujet, je reste dans l'ordre économique, le deuxième sujet, c'est celui de la rigidité de nos codes. J'en ai parlé suffisamment pour ne pas être plus explicite. Et le troisième sujet, c'est la prise de pouvoir lancinante des normes, de la prolifération des normes et de la bureaucratie qui sont la marque de notre pays, liée à une histoire que l'on connaît d'un État surpuissant et envahissant. Voilà, ces trois sujets dans l'ordre économique doivent être réglés. Et ils peuvent l'être, puisque d'autres pays montrent la voie. Donc il n'y a aucune raison qu'on ait un État qui dépense autant d'argent en matière de dépenses publiques par rapport à la production annuelle. Il n'y a aucune raison, sauf à entretenir une bureaucratie qui va peu à peu nous étouffer et qui surtout va diminuer nos libertés. C'est un projet qui pourrait être mis sur la table en 2027, parce qu'on en a besoin aujourd'hui.
- Hervé Novelli
Je suis entièrement d'accord. On le voit, il y a des mouvements de dirigeants d'entreprises, d'entrepreneurs, effectivement, qui vont dans ce sens, en fait, d'aller contre une surréglementation des normes qui sont à chaque coin de rue. Et finalement, on se retrouve assez vite contraints et surtout avec ce qui se passe, c'est un peu le lien aussi avec le contexte un peu géopolitique. Mais voilà, face à un continent ou en tout cas un pays tel que les États-Unis qui va dans une libéralisation très forte. Avec des barrières douanières qui arrivent en plus de ça, on se retrouve quand même face à des difficultés de compétition, de compétitivité, avec des lois et une régulation qui, je prends l'exemple de la CSRD, mais il y en a d'autres, où on ajoute ça en plus, alors qu'en fait, notre souhait, c'est quand même de rester compétitif face à cette nouvelle menace économique.
- Anthony Baron
Là aussi, on a ce sujet d'une bureaucratie qui s'affirme et qui s'affiche en réglementant. Ça va ensemble. La réglementation, les impôts et les fonctionnaires. Je ne sais plus qui disait, je crois que c'est Clémenceau qui disait que vous semez des fonctionnaires et vous récoltez des impôts. Il avait parfaitement raison. En fait, on a besoin, et c'est cela qu'il faut proposer, de... ce qu'on appelle un re-engineering de l'État moderne en France. Vous vous rendez compte que les structures gouvernementales n'ont pas bougé depuis 1945. Donc, c'est à peu près toujours les mêmes départements ministres qui sont en charge. Et dans une entreprise, quand vous avez des difficultés, vous avez des décisions qui sont prises. L'entreprise en difficulté existe. Et elle obéit à certaines règles, on bloque les embauches, on taille dans les missions non prioritaires de l'entreprise, le marketing ou autre. Je plaide pour qu'on adopte le concept d'état en difficulté, un plan français pour pouvoir mettre fin à des missions inefficaces ou inutiles et qui permettraient de réduire la dépense avant. toute chose et de réinventer, d'inventer un État moderne, c'est-à-dire un État fort sur ses missions régaliennes, puisque vous m'y invitez avec la géopolitique, et beaucoup plus faible, ou en tout cas qui recentrerait son action sur des mécanismes de régulation plutôt que sur des mécanismes de coercition, de contrôle patillon. Bref, on a besoin de cette invention. des missions prioritaires de l'État. C'est ce qu'ont fait tous les pays. Tous les pays qui ont voulu se réformer se sont livrés à cette réflexion sur les missions de services publics et ont trouvé à réformer et donc à baisser les dépenses publiques en externalisant ou en fermant des missions soit qui peuvent être mieux faites par le privé soit qui doivent disparaître parce qu'elles sont inutiles. Donc ce sujet-là aussi, est un sujet prioritaire. Mais vous voyez qu'en fait, la réalité de la réponse à votre question, c'est qu'il faut réformer l'État. C'est ça le...
- Hervé Novelli
Je voulais qu'on y vienne, mais c'était intéressant de vous l'entendre dire.
- Anthony Baron
Et l'État est le grand malade. C'est l'État qui prélève, c'est l'État qui dépense, et qui dépense beaucoup plus qu'ailleurs. On recherche l'erreur. Donc on doit alléger... Les missions de l'État, les faire exercer par d'autres, on doit faire en sorte qu'on renforce les missions prioritaires et qu'on s'allège des missions qui ne le sont pas. Et cette réflexion est embryonnaire, elle n'a pas lieu, comme si toutes les missions qu'exerce aujourd'hui l'État se valaient toutes et étaient toutes de la même importance. Non, c'est faux. Il y a beaucoup de missions qui ne sont pas efficaces et qui nécessiteraient d'être... exercée par d'autres. C'est ce qui se passe en Suède, c'est ce qui se passe dans... Moi, j'ai observé de près la réforme canadienne de l'État qui avait eu lieu dans les années 90, et qui a abouti en trois ans à une baisse des dépenses publiques et à un retour à un déficit tout à fait insupportable. Donc voilà, vous avez aujourd'hui une sorte de mur. que l'on doit surmonter, on ne le fera pas en faisant des coupes sombres, mais en se livrant à une réflexion sur un état...
- Hervé Novelli
Oui, effectivement, parce qu'on voit des débats arriver aussi autour de la TVA sociale, etc., etc., mais le fondement n'est pas là, on en est bien d'accord. Non.
- Anthony Baron
C'est clair. TVA sociale, c'est un jeu de bonnetaux qui consiste à changer d'arbre, en pensant que ça a des vertus. Non.
- Hervé Novelli
Oui.
- Anthony Baron
La charge restera la même sur les finances publiques, et donc...
- Hervé Novelli
Absolument.
- Anthony Baron
Et donc, ça n'a pas...
- Hervé Novelli
Merci. et on a un risque sur la consommation avec ce levier. On ne peut pas ne pas vous inviter dans cette émission et ne pas parler de géopolitique. On le voit, on a un contexte international avec des conflits qui se densifient, aux portes de l'Europe notamment, encore plus récemment au Cachemire entre le Pakistan et l'Inde, des élections américaines qui ont mené un deuxième mandat pour Donald Trump qui arrive avec cette fois-ci l'impression de plus de pouvoir. avec des mesures assez extrêmes, globalement, et qui amènent en plus de ça, avec un climat aussi, je dirais, politique français, où on se retrouve un peu dans une espèce de ventre mou, où je pense que tout le monde maintenant va attendre 2027. Bon, à quoi s'attendre, effectivement, déjà jusqu'à 2027, quand, effectivement, on est un entrepreneur ou un dirigeant d'entreprise ?
- Anthony Baron
Alors, quand on est un entrepreneur ou un dirigeant d'entreprise, la première des choses, d'abord, c'est d'entreprendre soi-même. c'est de se débrouiller soi-même c'est-à-dire d'attendre peu de la puissance publique parce que ce n'est pas le rôle de la puissance publique d'entreprendre à la place de l'entrepreneur. Moi je milite pour faire en sorte que l'État soit beaucoup plus quelqu'un de bienveillant, qui veille à éviter de surcharger l'entreprise, que ce soit de manière fiscale ou de manière sociale, mais qui laisse l'entrepreneur développer sa capacité d'innovation. En France, on a la chance d'avoir beaucoup de gens imaginatifs, un enseignement, notamment dans les sciences positives que sont les mathématiques ou les sciences physiques qui sont nécessaires dans le monde qui vient. on a cette chance il ne faut pas la gâcher on a déjà gâché une chance j'espère qu'on y reviendra sur l'électricité d'origine nucléaire, qui était une des grandes chances françaises en matière de compétitivité.
- Hervé Novelli
C'est un champion mondial.
- Anthony Baron
L'électricité. Et sur la base d'un accord politique insensé entre les Verts d'un côté et certaines forces politiques de l'autre, on a failli tuer cet outil nucléaire qui assurait un avantage compétitif, qui, je l'espère, sera préservé. Le président de la République a changé d'avis et aujourd'hui soutient le nucléaire. Encore faut-il qu'on donne les moyens à EDF de pouvoir développer son appareil productif d'électricité d'origine nucléaire. Donc vous avez aujourd'hui des pays qui se mettent en situation de conquête et de leadership. Pour faire simple, les États-Unis, dont on voit aujourd'hui qu'ils accélèrent dans la volonté d'assumer ou d'assurer un leadership avec toutes les outrances que cela comporte, comme par exemple... L'arme des droits de douane maniée de manière délirante par le président Trump. Vous avez la Chine qui conteste le leadership américain et qui, à bas bruit, est en train de vouloir conquérir le monde. Et puis vous avez la Russie qui revient à une vieille pratique bien connue. pour ceux qui ont suivi l'histoire de l'expansion agressive pour faire une grande Russie qui irait en haut jusqu'à l'Allemagne. Donc vous avez des empires qui aujourd'hui sont agressifs et qui ont instauré un leadership autoritaire, y compris Trump dont la démocratie aujourd'hui laisse quand même un peu dubitatif. et bien à nous de faire en sorte que nous jouions nos atouts. Et Dieu sait si l'Europe en a. Mais l'Europe est un un politique. L'Europe ne sait pas toujours prendre des bonnes décisions. Il ne faut pas recréer à Bruxelles les inconvénients que nous observons à Paris, à savoir celle d'un potentiel centre bruxellois qui livrait des impôts encore et toujours et qui... auraient les mêmes défauts que l'État français. Autrement dit, ne pas reproduire les défauts français à l'échelle européenne. Et donc, ça nécessite un effort intellectuel de réflexion sur l'Europe que nous voulons bâtir. Nous avons besoin de l'Europe. Nous avons besoin de bâtir une Europe puissante, qui s'affiche sur les sujets de compétitivité, d'industrialisation, de défense. et de modernisation et d'innovation. Nous avons des atouts pour cela, mais il faut adapter nos institutions, faire en sorte qu'il y ait une parfaite coopération dans un certain nombre de domaines sans que ça se traduise par un sentiment de dépossession des peuples à travers ce qui pressentrait comme un... un remplacement de la France par l'Europe. Ça, à l'époque, n'en valait pas. Oui,
- Hervé Novelli
il y a encore un sentiment nationaliste fort.
- Anthony Baron
Un sentiment très fort. Mais il y a aussi une volonté, en tout cas un caractère pressant, de développer des politiques européennes dans un certain nombre de domaines. Et ça, j'attends avec beaucoup d'intérêt les propositions qui sont sur la table. Pour l'instant, je n'en vois pas beaucoup. L'Europe est en panne, l'Europe ne sait pas choisir, et les institutions doivent absolument... et évoluer avec un président de l'Europe qui serait beaucoup plus puissant et un peu moins passant que le sont les différents présidents du Conseil européen. Donc un président de l'Union européenne, ça me semble être une première préforme. Il y en a d'autres, bien sûr, pour mener les politiques qui vaillent et pour choisir les politiques. et c'est tout le sujet de ce qu'on appelle la subsidiarité, c'est-à-dire... la capacité de décider ce qui doit être fait et ce qui ne doit pas être fait parce que ce n'est pas le bon échelon de prise de décision. Très souvent, on a le sentiment que l'Europe décide à la place de la France de la taille des tomates ou de la taille des boulons. Ce n'est pas son job. Par contre,
- Hervé Novelli
c'est le cas sur la courbure des bananes et dimensionnement des concombres.
- Anthony Baron
On a quand même toute une réflexion qui est aujourd'hui Au point mort, pour relever les défis géopolitiques dont vous parlez, l'Europe doit tenir sa place. Elle est porteuse d'un certain nombre de valeurs qui sont des valeurs quasi millénaires de démocratie et de défense des droits. Il serait temps de muscler.
- Hervé Novelli
Oui, de devenir une puissance économique en tant que telle.
- Anthony Baron
Une puissance économique, de se donner les moyens d'une prise de décision qui est souvent lente. et peu assurée. Donc voilà, j'attends avec beaucoup d'intérêt les propositions qui doivent venir.
- Hervé Novelli
Très bien. Merci beaucoup, en tout cas, pour cet éclairage et cette analyse, Hervé. On arrive bientôt à la fin de cette interview. Fort de votre expérience, justement, dans l'univers de l'entreprise, dans la sphère publique, qu'est-ce que vous souhaitez transmettre aujourd'hui aux nouvelles générations, notamment d'entrepreneurs qui nous écoutent ?
- Anthony Baron
Moi, je suis très frappé d'abord de voir que les jeunes entrepreneurs sont très mobiles, sont très actifs, envisagent le marché de manière globale, mondiale, ce qui n'était pas le cas lorsque j'ai démarré, où on prenait sa petite valise pour aller à l'export, après avoir conforté une base intérieure. Aujourd'hui, on pense global. Les jeunes entrepreneurs, de ce point de vue, montrent l'exemple. Moi, je souhaiterais qu'on continue de leur donner envie de développer leur activité chez nous. Je suis frappé de voir que les conditions qu'on impose en matière fiscale, en matière normative, en matière de place, dans la société, à l'entrepreneuriat, sont aujourd'hui peu favorables. Et j'aimerais bien que l'entrepreneur devienne, redevienne, devienne une sorte de héros, en tout cas considéré. par les décideurs au sens global plutôt que comme des fraudeurs en puissance. Les discours anti-entrepreneurs ou anti-riches que l'on entend, et notamment ceux qui sont perçus comme riches parce qu'ils ont réussi dans les entreprises, me semblent totalement déclassés par rapport à l'état du monde. si la France n'a pas les entrepreneurs ? qu'elle doit avoir, elle sera déclassée. Elle sera déclassée. Il ne faut pas compter sur le personnel politique aussi talentueux soit-il, encore que, quand on regarde, ce n'est pas forcément le cas, pour sauver le pays. Ce qui va sauver le pays, c'est sa capacité à transmettre de la prospérité et de l'emploi. Et qui le fait ? Les entrepreneurs qui le font. Donc ce sont ces entrepreneurs sur lesquels je compte et le message, c'est de continuer. eh bien, le XXIe siècle sera prolifique pour vous. C'est un souhait, en tout cas, et une conviction.
- Hervé Novelli
J'ai la même question qui s'adresse cette fois-ci, plutôt dans ce que vous souhaitez transmettre aux nouvelles générations de décideurs publics et élus.
- Anthony Baron
Pour les décideurs publics, j'aimerais qu'ils soient le plus proche possible des citoyens quand ils prennent une décision. C'est-à-dire que Tocqueville enseigne que... Plus vous êtes proche de vos concitoyens, plus les décisions ont des chances d'être efficaces et d'être appliquées. Autrement dit, il faut réorganiser l'ensemble des échelons institutionnels de notre pays pour faire en sorte que les communes, les maires, n'aient pas le sentiment d'impuissance en ayant été privés de tous les leviers, y compris fiscaux, par la puissance publique, qui ensuite leur rétrocèdent, comme si on faisait une aumône, En termes de subvention, il faut que les collectivités soient simplifiées, que les régions et les départements soient rapprochés, pour qu'on ait moins de strates de décision, mais des décisions qui soient identifiées par nos concitoyens, plutôt que noyées, et on ne sait jamais qui est responsable de telle ou telle décision. Et je souhaiterais aussi que des décisions qui sont prises au niveau local, par la puissance publique puisse être contestée localement avec un pouvoir dérogatoire. Je prends un exemple. J'ai été très frappé et indigné, je dois dire, qu'on arrête les travaux de cette autoroute qui est du côté de Toulouse, je crois que c'est la 69, dont les travaux ont été arrêtés au motif que l'intérêt général n'était pas servi. Mais ce n'est pas au juge de définir l'intérêt général, c'est aux élus. et aux représentants du peuple. J'avais été offusqué quand on a fait l'abandon de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Vous avez ces décisions qui sont des décisions qui ne devraient pas pouvoir être prises si localement la population le conteste. On avait eu un référendum à Notre-Dame-des-Landes qui n'a pas été suivi des faits. On a abandonné en race campagne. Donc ça, c'est la marque vraiment de ce que je souhaiterais voir. voire supprimer, mais ça passe par une redistribution des pouvoirs, notamment au niveau local.
- Hervé Novelli
Un remercie, cher Hervé. C'était un plaisir en tout cas d'avoir cet échange ensemble.
- Anthony Baron
On a pu parler encore pendant des heures, mais on va s'arrêter là.
- Hervé Novelli
Moi, j'avais encore plein de questions, donc on aurait effectivement pu continuer, mais après, il faut que ce soit effectivement, entre guillemets, audible dans un temps qui ne peut nous être donné, même si... Et in fine, on n'avait pas forcément de limite de temps. On se l'a en tout cas autorisé à ne pas en avoir. Moi, je reviendrai effectivement, encore une fois, sur les quelques éléments de cette interview qui m'ont marqué. C'est le grand succès quand même de ce statut d'auto-entrepreneur. Je vais rappeler les chiffres parce qu'ils sont vraiment révélateurs de ce succès. 26 milliards d'euros de chiffre d'affaires, 5 milliards d'euros de rentrée fiscale et sociale pour l'État. Voilà. Donc, un grand merci en tout cas d'avoir été à l'initiative, encore une fois de...
- Anthony Baron
très intéressé de discuter de ces sujets parce que ce sont des sujets d'avenir. Et je pense qu'on doit se projeter, regarder ce qui se passe et voir que si nous restons dans un statu quo, ce statu quo sera mortel pour notre pays.
- Hervé Novelli
Absolument. Restons agiles et en mouvement. C'est un peu effectivement ce qu'on peut aussi retenir. Donc un grand merci à Hervé Novelli encore une fois pour cet échange et une émission qu'on peut réécouter sur l'ensemble des plateformes d'écoute en ligne et de podcast. Et on se retrouve la semaine prochaine. Merci d'avoir écouté les After Decider, un podcast produit par Adéquancy. Retrouvez l'intégralité de nos épisodes sur les plateformes de streaming. On se retrouve la semaine prochaine pour un nouvel épisode. A très bientôt.