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Conseil Sport, le podcast bien-être, santé et nutrition de DECATHLON

Histoire : à la conquête de La Diagonale des Fous, ultra-trail à La Réunion

Histoire : à la conquête de La Diagonale des Fous, ultra-trail à La Réunion

50min |25/08/2021|

3595

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Description

Une idée lancée lors d’une soirée “rougaille-saucisse” entre collègues : et si on tentait La Diagonale des Fous, trail mythique. Des discussions, quelques minutes de réflexion et une ambition posée pour Damien, Gaëtan et Nicolas : terminer cet ultra-trail de 170 km, dont 10 000 m de dénivelé positif, à travers l’île de la Réunion ! Considérée comme l'une des courses nature les plus difficiles au monde, La Diagonale des Fous nécessite des mois de préparation physique et mentale pour espérer franchir la ligne d'arrivée et se voir récompensé du Graal : un tee-shirt floqué d'une phrase qui en dit long, "J'ai survécu". Plus qu’un trail, La Diagonale des Fous est un véritable voyage intérieur où il faut puiser dans ses ressources, aller chercher la volonté au plus profond de soi, dépasser ses limites, s’accepter et se faire confiance. Grâce à ces trois “Fous”, vous allez vivre l’expérience émotionnelle incroyable d’un tel défi… Préparez-vous, prenez place direction : La Réunion. Bon voyage ! 


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Les Conseils de sportifs et des sportives, c’est le podcast de DECATHLON qui vous accompagne dans votre pratique sportive, qui vous aide à débuter ou à reprendre le sport. C’est aussi le podcast qui vous prouve que l’activité physique, c’est avant tout du plaisir ! Grâce aux conseils et astuces d'expert•es en la matière et aux partages d'expériences de vie de pratiquant•es, chaque épisode est une nouvelle occasion d'en apprendre un peu plus sur votre (future) passion !


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On nous le dit assez souvent : pratiquer une activité physique, c'est bon pour la santé. Ce qu'on nous dit moins c'est comment on s'y prend ? Par où on commence ? Plus que de vous voir accomplir un exploit sportif, notre plus grande fierté serait de vous faire aimer le sport, durablement. Parce que c'est ça, le secret de la motivation : trouver l'activité qui vous apporte la dose de joie qu'il vous faut dans votre quotidien.


Producteur : Pipo et Lola


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour et bienvenue dans ce podcast Histoire de Sportifs. On se retrouve aujourd'hui pour un épisode hors série avec, une fois n'est pas coutume, trois sportifs. Gaëtan, Damien et Nicolas, des ultra-trailers qui se connaissent bien puisqu'ils travaillent ensemble chez Decathlon. C'est d'ailleurs lors d'une soirée entre collègues qu'ils ont décidé de courir la Diagonale des Fous. Une course nature qui porte bien son nom, 166 km pour 9611 mètres de dénivelé positif à travers l'île de la Réunion. Alors dans cet épisode, ils vont nous raconter cette aventure à la fois solitaire et collective, vous le verrez. Les doutes pendant les préparations, l'ambiance locale et puis la course bien sûr, avec un abandon pour l'un d'entre eux. On retrouve le récit de Gaëtan, Damien et Nicolas juste après l'intro. Bon podcast !

  • Speaker #1

    Je ne sais même pas comment je vais te dire.

  • Speaker #2

    C'était assez fort en émotions.

  • Speaker #1

    Moi j'ai réussi à rester dans le tempo. Moi c'est inoubliable.

  • Speaker #3

    Courir, c'est dur.

  • Speaker #2

    Tu prends une énergie folle.

  • Speaker #1

    Le style c'est comme ça, on partage. C'est fort.

  • Speaker #2

    On l'a fait. C'est mon aventure.

  • Speaker #1

    Alors bonjour à tous, moi c'est Gaëtan, je suis chef de produit au trail running chez Decathlon. J'ai participé à la Diagonale des Fous cette année. C'était un défi qui, quelques années plus tôt, m'aurait paru complètement invraisemblable.

  • Speaker #2

    Bonjour à tous, je m'appelle Damien, je suis responsable d'approvisionnement chez Calenji Trail. Ça fait à peu près huit ans que je fais du trail et je suis plutôt issu du monde du foot. Je suis passé par d'autres activités, karaté, VTT, vélo de route, triathlon. Et naturellement, la course à pied pour finir. Entre la route et le trail, j'ai vite fait mon choix. On s'est retrouvé à la Diague, qui me paraissait une montagne quand j'ai commencé la course à pied. On se dit qu'on ne va jamais réussir à franchir une distance pareille. C'est pas humain et finalement, on l'a fait.

  • Speaker #3

    Bonjour, moi c'est Nicolas. J'ai la chance de travailler au trail. qui est mon sport de prédilection. Puis ingénieur produit et ingénieur etc. Je me suis mis au trail après la course à pied, sur route, parce que j'avais envie justement de découvrir les chemins autour de moi. Et puis au fur et à mesure, on fait 20 kilomètres, on en fait 30, 40. Et puis un beau jour, il y a les collègues qui parlent de la diagonale des fous. C'est un nom finalement qui se traduit bien, puisque les fous partent comme ça au mois de décembre en se disant, allez on s'inscrit. et je me suis laissé embarquer. C'est bien le terme parce que c'était à peine réfléchi en fait. C'est après qu'on y réfléchit, c'est après qu'on en prend conscience.

  • Speaker #1

    La participation à la Diagonale c'est un peu particulier parce que c'était un projet plutôt familial puisqu'il y a 20 ans j'ai connu ma femme à l'île de la Réunion où j'étais militaire en service national. Et on avait prévu pour nos 20 ans de rencontre de partir à La Réunion. Et je m'étais dit, si je peux courir, c'est bien. Et puis, il y a eu un petit gros péto qui s'est créé au trail. En fait, là, on est trois autour de la table, mais on était sept. Et puis, il y a eu une soirée qu'on a appelée soirée rougail-saucisse chez notre directeur financier, Jérémy. Pendant cette soirée, il en parlait de la Diagonale des Fous. Moi, j'avais plutôt prévu de faire une petite course. Et puis la soirée a avancé, la soirée a avancé, on a bu quelques bières et puis ils m'ont dit mais tu vas pas faire une petite course, tu vas venir avec nous. Et puis à la fin de la soirée j'ai dit bon bah je vous suis. Et donc c'est comme ça que ça a commencé, partir petit et finir un peu comme un fou.

  • Speaker #2

    C'est vrai que ça a commencé sur cette soirée rougail saucisse. Moi j'ai des vieux souvenirs, je sais plus à quel endroit on était, on a déjà dû échanger dessus. On se disait en 2018, dans deux ans... On ferait bien la Diag, et puis il n'y avait rien de concret pendant quasiment un an. Et puis c'est vrai que ce soir-là, c'était le point de départ. On y va. Ça devenait concret en fait. Une simple idée qu'on ne pensait même pas réaliser. Pour moi, je pensais que c'était encore trop tôt. C'était un doux rêve.

  • Speaker #1

    Moi, c'est pareil. Moi, je m'étais inscrit au Templier, le Grand Trail Templier, qui est une course de 78 kilomètres. Et je n'avais pas imaginé que l'année suivante, je partirais sur un ultra trail.

  • Speaker #3

    Chaque année, on planifie un peu nos trails de l'année. Et je pense que ça arrive à ce moment-là à peu près. On était arrivé à la fin de l'année, on se demandait ce qu'on allait faire l'année suivante. Effectivement, on avait fait des courses de 40 et 70 kilomètres. Et puis Jérémy, qui lui l'a déjà fait, nous en a parlé. Il avait envie de le refaire et donc il nous a emmené avec lui. L'idée a commencé à germer, mais ça va vraiment très vite en fait. On se laisse vraiment embarquer, on connaît à peine la course, on ne sait même pas quel est le dénivelé, par où ça va passer, etc. Et puis on s'inscrit et on se dit que ce n'est pas grave, je découvrirai un peu la difficulté au fur et à mesure. En tout cas, pour moi, ça a été ça.

  • Speaker #2

    Alors la préparation pour la Diag, j'ai envie de dire que mentalement déjà, tu commences la préparation le soir du rougail saucisse quand même. C'est là où tu prends conscience que tu t'engages sur quelque chose que tu n'as jamais fait, tu ne sais même pas si tu en es capable. Mentalement, il faut se faire à l'idée que tu vas devoir courir 170 bornes avec 10 000 mètres de dénivelé alors que tu ne l'as jamais fait. On a fait en moyenne, on était sur des formats... Ils peuvent paraître longs, 70-80 kilomètres pour le max. Et là, passer à plus du double, ça paraissait insurmontable. Donc déjà, il faut se faire à l'idée qu'on va réaliser ça. Et on ne sait pas comment on va y arriver avec l'entraînement qu'on réalise au quotidien autour du lac du Véron.

  • Speaker #1

    Alors moi, de mon côté, la préparation, j'ai été très littéraire puisque j'ai acheté pas mal de livres. Et du coup, j'avais quelques bouquins sur ma table de nuit. Et plus je les lisais, plus la pression montait. Parce que chaque témoignage montre, entre guillemets, l'intensité de la préparation et de l'entraînement, à la fois physique et mental. Et je pense que c'est les livres, moi, qui m'ont fait comprendre dans quoi je m'étais engagé.

  • Speaker #3

    La préparation aussi, elle passe par des courses intermédiaires. C'est-à-dire que si on devait faire un entraînement pendant six mois, ce serait compliqué, il faut se motiver tous les jours. En fait, d'avoir des petites courses intermédiaires, ça permet aussi de se motiver pour le mois suivant, dans trois mois. Et ça, forcément, on s'y implique davantage. Il y a beaucoup de moments passés ensemble pendant les entraînements, c'est ce qui nous motive aussi. On a aussi les groupes WhatsApp, où on est tous connectés, et la veille, c'est des messages, c'est « moi j'y vais demain matin à telle heure, qui va avec moi ? » Et je pense que sans ça, tout seul dans son coin, c'est pas très compliqué. Donc on se retrouvait au Mont-Saint-Aubert, on se retrouvait même au lac du Héron, et l'étape ultime, parce qu'on est dans le nord de la France, c'était dans les Terils. C'était vraiment notre challenge. Si on allait au Terril cette semaine, c'était hyper important. Parce que c'était beaucoup de dénive. On va avoir mal au canne pendant deux heures. Et généralement, il ne faisait pas hyper beau. Donc, ce n'était pas la grosse motivation non plus.

  • Speaker #2

    Donc, en fait, on a tous fait des préparations assez différentes dans un premier temps. C'est-à-dire dans les six premiers mois après l'inscription. On a pris notre package. En fait, c'était plus de l'entretien avec comme objectif, on rallongeait un peu les distances le week-end, mais il n'y avait pas de préparation très structurée, je dirais. Puis, on a quand même mis un événement, le 90 kilomètres du Mont Blanc, comme étape intermédiaire pour la préparation de cette diagonale. On s'est dit, on va faire quand même une distance relativement importante avec un bon dénivelé. Et moi, je me souviens, quand on est sorti de cet événement-là, on s'est dit, on n'est pas prêt. Et là, ça a été un révélateur pour dire qu'on a super mal au cuisse quand même. Il faudrait qu'on s'entraîne peut-être différemment. Et c'est à partir de là qu'on a commencé à mettre le terril en jeu. Je me rappelle la première fois, en deux heures ou trois heures de séance, on attrape entre 1000, 1500 mètres ou 2000 mètres de dénivelé. On fait tout en marchant, sauf les descentes sur lesquelles on trottine parce qu'on est emporté par notre élan tellement c'est raide. Et puis après, on a mal pendant cinq, six jours où on ne peut plus courir du tout. Ça, c'est la première séance. Et puis, on y retourne le week-end suivant. On s'aperçoit que ça va mieux et qu'on récupère plus vite. On se dit qu'on l'intègre de manière régulière pour se familiariser. L'idée, c'était de se forger un peu les muscles des cuisses.

  • Speaker #3

    C'est tout à fait ça. Pour revenir un peu sur la préparation, elle était double. Comme tout sportif et tout trailer, elle était de voir jusqu'où j'étais capable d'aller. Toujours mieux se préparer, mieux s'entraîner, etc. pour aller toujours plus loin. Et puis j'avais un double enjeu, c'était aussi une préparation et une bataille contre la maladie, parce que deux mois après m'être inscrit à la Diag, j'ai déclaré un diabète. Et du coup, j'ai arrêté de courir pendant un mois. Et ma volonté derrière, c'était de pouvoir continuer à tenir tous mes challenges de l'année avec cette maladie-là. Et donc chaque étape, chaque course était un nouveau challenge pour moi.

  • Speaker #1

    Après, moi, dans la préparation, je me suis fait une frayeur. c'est que je me suis inscrit à une course parce que je ne pouvais pas faire le 90 km du Mont-Blanc. Je me suis inscrit à la Maxi Race, qui est une course qui a lieu fin mai à Annecy. Je partais un peu blessé, puisque j'avais une douleur au tendon d'Achille que j'essayais de traiter avec notre ostéo commun, qui est Étienne, et quelqu'un qui a compté aussi dans la prépa de l'équipe. Au 50e kilomètre, j'abandonne. Et alors là, le moral, à zéro. À zéro parce que 50 km, l'objectif, il est à 170. Je suis en vrac. Comment ça va faire ? Et du coup, ça m'a mis comme un aiguillon pour dire, bon, maintenant, déjà, ces tendons, il va falloir bien les remettre. Et puis après, il va falloir vraiment que tu t'y mettes progressivement pour aller chercher cette course de fou en octobre.

  • Speaker #2

    Le Slash, c'est un moment fondateur pour l'événement, puisqu'on ne s'imaginait pas partir sur la diagonale sans avoir fait le traditionnel week-end shock. Le week-end shock, c'est qu'on cumule sur deux jours et demi, trois jours. Un nombre de kilomètres et de dénivelé qui a pour but de nous éprouver physiquement, voir notre capacité de récupération puisqu'on enchaîne trois jours d'affilée. Et puis ça a pour but de tester aussi tout le matériel, voir si on ne va pas avoir un petit pépin avec le sac à dos, avec la chaussure, comment nos pieds vont réagir. Gérer l'alimentation aussi c'est important parce qu'on est tous différents face à ça. On est tous plus ou moins confrontés à des problèmes de digestion pendant une course, c'est pas évident. Le week-end choc, il commence avant le week-end choc aussi. Il commence sur une soirée de préparation du week-end choc. On fait le tracé des parcours, on se réunit autour d'une bière bourbon. On se préparait pour la diag, forcément, on était en couleur locale, après le rougail et saucisse. Et là, on est avec les ordinateurs, les montres, les cartes, et on décide de ce qu'on va faire pendant ces trois jours. Vendredi matin, on fait ça. L'après-midi, on fait une autre. Le samedi, une grosse séance. Et le dimanche, on se recolle encore deux séances. Et au final, on fait le total. Alors, ça fait combien, les gars ? Et puis là, on dit 100 kilomètres. Waouh, c'est quand même épais. Tu te dis, en trois jours, tu vas faire 100 bornes avec 10 000. Sur la diag, il va t'en rester 70. Là, tu n'es pas trop serein. Et tu te dis, est-ce que je vais être capable déjà de passer ce premier créneau ? Et de bien le passer, c'est un mois avant l'événement. Et puis derrière, de récupérer, d'enchaîner mes entraînements. Parce qu'il ne faut pas s'arrêter, c'est qu'un week-end shock, c'est que de la prépa. Après, il reste trois semaines pleine balle. Mentalement, il faut s'y faire.

  • Speaker #1

    Et donc là, dans l'équipe, il y a une espèce d'alchimie, parce qu'on a tous des rythmes un peu différents, mais on a le même objectif. Et ça, ça joue énormément, parce que moi, je suis le plus lent de la bande. Devant, ça galope. et j'avais une grosse appréhension sur est-ce que... pendant ce week-end choc, je vais tenir avec les collègues, avec les copains. Et en fait, on a eu tous un espèce de groupe très uni et ça a très bien fonctionné. Pour moi, c'est inoubliable. Et dans ma tête, c'était si ça se passe mal là, qu'est-ce que je fais ?

  • Speaker #0

    Nous sommes donc le 17 octobre 2019, c'est le jour J. 2863 participants sont donc au départ de cette Diagonale des Fous. Et parmi eux, on retrouve nos trois fous à nous, Gaëtan, Damien et Nicolas.

  • Speaker #1

    Alors on est arrivé le lundi 14 octobre à La Réunion. Il y a un truc qui est génial, c'est que tu arrives à l'aéroport Roland-Garros, et puis tu as « Bienvenue à Azote Trailer » , et puis tu as un comité d'accueil avec l'équipe d'organisation de la Diagonale des Fous qui te remet un petit package avec des danseuses créoles, tu bois du rhum. Il y a une espèce d'ébullition autour de cet événement. Donc à la télé sur Réunion 1ère, il y a diagonale J-1, J-3, J-2, J-1, donc la pression monte. Bienvenue pour cette 27e édition du VORED à tous ceux qui viennent de l'extérieur ! Quand on arrive à Saint-Pierre, ce qui est particulier, c'est qu'il fait un peu froid, il y a du vent, et le départ, il est en bord de mer. dans une espèce d'esplanade. Et là, on comprend tout de suite, au volume de l'organisation, que c'est quelque chose d'énorme comme le Tour de France. Parce que tout est bloqué, il y a un concert de musique, il y a des gens partout, et c'est la cohue pour rentrer dans le sas.

  • Speaker #3

    Le départ se fait à 22h, on arrive à 18h. Alors 18h, effectivement, il y a du vent, il fait un peu frais, la nuit tombe. plus du tout les mêmes conditions que pendant la journée. Donc là, il faut commencer à se couvrir. Là, on arrive sur un de grands parkings, parkings plus sireux. On rentre dans une zone de contrôle, où on présente nos sacs. Là, on a le matériel obligatoire qui est contrôlé par des bénévoles. Donc là, on sent un peu la pression monter parce que on se dit ça y est, on y est. On se regarde un peu tous, on se dit maintenant, on ne peut plus reculer. Puis on passe au premier sas, on regarde derrière nous, on dit ça y est, maintenant On est entré, on ne peut plus en sortir et c'est maintenant que ça commence. On rentre un peu dans notre bulle, mais comme on est à 7-8, on a envie encore de partager ces moments-là. On a envie de revivre encore tous les moments passés parce qu'on se raconte encore notre préparation, etc. On se remémore un peu les instants et on se dit ça y est, on y est. Et puis on arrive sur ce terrain, sur ce parking, grand parking pour oscireux. On avait pris de quoi mettre sur le sol pour ne pas se salir, pour s'asseoir. C'est rudimentaire. C'est-à-dire que quand tu t'assoies, tu sens bien les cailloux au sol. Ce n'est pas hyper confortable. Et puis on s'installe. On le sait, on va devoir attendre 4 heures. Alors on s'installe. Il y a un bruit de folie juste à côté, parce qu'il y a la scène qui est juste à côté. Il y a de la musique, c'est sympa, parce que ça donne un peu d'ambiance. Mais... Merci. Je ne sais pas si tu as envie d'écouter cette musique ou si tu as plutôt envie de t'isoler.

  • Speaker #1

    Et moi, à ce moment-là, j'ai eu peur. Moi, j'ai eu peur parce que je connais les loulous. Et quand je les ai vus se concentrer, ça m'a fait peur parce que je me suis dit, je ne suis pas prêt. Je ne suis pas prêt parce que je regardais Damien qui était concentration ultime dans sa bulle. Je voyais Gildas, Jérémy, des gens avec qui on déconne quand même un peu au quotidien. Et là, je les voyais rentrer dans la compétition. Et quelque part... Moi, ça me stressait parce que je me disais, est-ce que toi, tu y es aussi ? J'ai pensé à tout ce qu'on avait fait, à la préparation. Et je me suis dit, bon, t'as fait le taf quand même. Si t'es là, c'est pas par hasard. Et je me suis détendu.

  • Speaker #2

    Au départ, on s'installe, on met les ponchos au sol. Et puis, on commence à s'alimenter puisqu'on fait notre repas du soir. Je pense que chacun regarde ce que l'autre a appris avant le départ. Et là, c'est un pique-nique géant. Donc, c'est plutôt encore sympa. Et effectivement, après, au bout d'une heure, ça commence à s'éteindre, malgré le bruit. Tu as le silence qui me revient en mémoire. C'est bizarre parce que c'est sourd. Et on se met dans notre bulle parce qu'on n'a pas envie de perdre d'énergie non plus. Parce qu'on sait que la moindre réserve ressource, on va en avoir besoin pour les jours qui viennent. On sait que ça va être long et on ne sait pas si on va y arriver. On n'a pas l'expérience.

  • Speaker #1

    Et juste après, ils ouvrent les portes pour aller se diriger sous l'arche de départ. Et là, ça se met à pousser quelque chose de terrible. et là on est tous à se tenir pareil bras dessus, bras dessous pour pas se perdre et puis là l'ambiance de Saint-Pierre qui monte avec l'impression d'être des stars de rock quoi, il y a des milliers de personnes qui hurlent, qui crient,

  • Speaker #2

    et on va jusqu'à cette fameuse ligne de départ, sous la pression des 2700 coureurs qui sont derrière

  • Speaker #1

    Et là, il y a le feu d'artifice qui éclate au-dessus du port de Saint-Pierre. Donc vous, vous deviez l'avoir dans le dos. On traverse Saint-Pierre, mais c'est l'ambiance, l'euphorie, les tam-tams, les tambours, les familles, tout le monde. Donc c'est un moment d'émotion vraiment très fort pour moi. Et là, on arrive dans les champs de canne à sucre. Il y a de la poussière parce qu'ils ont du coup... couper la canne sur un terrain sec. Et moi, j'ai le souvenir de mal respirer parce qu'il y a de la poussière. Et il y a la lune qui est en face et les étoiles. Et je me dis, là, tu vas profiter. Mon gars, là, t'es là, t'as fait l'entraînement, t'as fait 8 000 bornes et là, tu profites. Et donc, le stress, il est parti là.

  • Speaker #2

    Personnellement, j'ai greffé mon frère au groupe. Mon frère, c'est le local de l'étape. ça fait un an et demi qu'il est sur l'île de la Réunion et ça a... peu motivé aussi mon inscription à cette course là et j'avais prévu de faire la course avec lui et là il ya le fameux coup de départ je suis bien et là mon frère il est pas bien quoi et là dès le premier kilomètre il me dit je me sens fatigué et je vois tout de suite qu'on perd des places quoi je reste à côté de lui faut que je sois super attentif parce que on se fait doubler dans tous les sens il est vraiment fatigué il transpire dès le début quoi À ce moment-là, déjà, je me dis que ça va être dur. Et il me fait, vas-y, pars, je vais attendre Gaëtan. Je sais très bien qu'il ne va pas attendre Gaëtan. C'est très bien qu'il va abandonner. C'est ce qu'il fera au 25e kilomètre, le soir vers mon arrivée quasiment. Et là, je pars. Sauf qu'à ce moment-là, on n'est plus dans les 200 premiers comme au moment du départ. On avait passé 4 heures quand même dans le sas. Arriver de bonne heure, à se placer pour éviter les bouchons, pour être bien positionné. Et là, on se retrouve millième. Le premier ravitaillement, il est au 15e. C'est juste après ce ravitaillement-là, on sait que ça bouchonne parce qu'on arrive sur un sentier, un single. Il y a quelques passages techniques et ça commence à bouchonner. Ça marche, ça s'arrête. Je double quand c'est possible, mais ce n'est pas souvent possible. Au 26e kilomètre, il y a un ravitaillement, Notre-Dame-de-la-Paix. Et là, je vois Nico.

  • Speaker #3

    Moi, super content parce que je suis devant Damien. Je suis champion du monde. Je pouvais m'arrêter, c'est bon, j'avais fait ma course. Damien, c'est le mec qui te dit au revoir dès le début. Et donc là, ce n'était pas normal. Il y avait quelque chose qui clochait. Et de le voir arriver comme ça au Ravito, finalement, ça m'a rassuré et m'a fait plaisir. Même si pour ton frère, j'étais forcément déçu. Et là, je lui dis, vas-y maintenant, fais ta course, t'es bien. Parce que bien sûr, Damien, il aime bien partager la course avec les gens. Et il me dit, c'est sympa parce que je vous vois tous ensemble. Effectivement, on était, depuis le début de la course, j'étais avec Jérémy, j'étais avec Jean-Luc, avec Gildas. Et puis là, Damien nous retrouve et il nous dit, je courrais bien avec vous. Ça a l'air d'être sympa. Et là, je lui dis, je me souviens de ces mots, je lui dis, écoute Damien, c'est super sympa, mais fais ta course. Cette course, elle est pour toi. Éclate-toi, là t'as l'air super bien et vas-y échappe-toi.

  • Speaker #2

    Là tu vois on est au 26ème kilomètre, on fait quelques kilomètres ensemble avec Jérémy et Nicolas. Et là il commence à faire froid, on avait Gildas qui était censé nous rattraper, on l'appelle, on s'habille. Nicolas ne profite pas des ravitaillements pour se changer, donc il préfère faire ça après. Il perd du temps au ravitaillement et après il perd du temps à s'habiller.

  • Speaker #3

    Je me fais charrier sur les ravitaux parce que je passe trop de temps. Et là en l'occurrence, je n'avais pas senti le froid arriver au ravitaux où j'ai retrouvé Damien. Et en sortant du ravitaux, le froid est arrivé et je me suis dit que je n'étais pas assez couvert pour la nuit. Et donc j'en ai profité pour me changer au bord de la route. C'était l'occasion aussi de tous se regrouper. Puis une fois habillé plus chaudement, là on est parti.

  • Speaker #1

    Et on part dans une montée pour rejoindre Colnay-de-Boeuf. Et là, il y a des sapins. Mais des sapins, je me dis, mais c'est pas possible, j'ai l'impression d'être dans les Alpes. Et il y a du gel au sol. Et c'est parti comme ça, dans la nuit, sous la lune et tout. Et c'est tellement beau que dans les sapins, à un moment, je me dis, il y a la pleine lune, j'éteins ma frontale. Et là, je suis dans le noir et je me dis, mais c'est magnifique. C'est des moments comme ça que je suis venu chercher et c'est pour ça que j'aime le trail. Et là, ça dure, je ne sais pas, peut-être une heure comme ça. Et puis après, on voit l'aube du jour qui commence à arriver. Et là, j'arrive au Colnay de Bœuf et là, il y a du vent et il fait un froid de canard. Le ravitaillement est là et je me dis, là, si tu t'arrêtes, tu vas geler sur place. Donc j'arrive, je prends un thé, je bois, le soleil se lève. et il y a la beauté de l'île qui s'offre à nous, et il y a une vue sur le piton des neiges là, qui est extraordinaire, et c'est un moment, on parle de trail comme l'évasion, l'aventure, et c'est des moments comme ça. Moi c'est ce qui m'a marqué jusqu'à la descente de Marabout, où là il s'est passé une belle surprise.

  • Speaker #3

    Et là, on arrive à Marabout et il y a une belle surprise qui nous attend. J'étais avec Jean-Luc et Jérémy, on courait à trois, on était bien. Il y a Jean-Luc, il voit une banderole avec le nom de notre marque, notre chaîne. Il me dit, mais c'est bizarre cette banderole quand même en plein milieu de la Réunion. Et puis nous, un peu naïvement, on dit, ce nom, c'est que peut-être il y a des gens qui ont voulu l'identifier ou qui sont supporters, etc. Et là, quelques mètres après, 200-300 mètres après, on voit un bonhomme sous une grosse doudoune avec une capuche. Et là, on découvre notre leader qui était venu nous rendre visite, nous supporter. Alors, ce n'était pas du tout prévu. Entre la nuit passée, le soleil qui se lève, les belles couleurs, je crois qu'émotionnellement, d'avoir en plus son leader qui débarque pour nous supporter, là, on était au summum. Donc génial, là, on était vraiment... dans ce qu'on pouvait rêver de mieux pour cette course parce qu'on était ensemble, on avançait bien et en plus on avait des belles surprises.

  • Speaker #2

    Alors Thierry, comment tu te sens ?

  • Speaker #3

    Ah putain,

  • Speaker #2

    on dit qu'est-ce que tu fais ? Eh ben je suis nul.

  • Speaker #3

    Comment ça se passe les gars ?

  • Speaker #1

    C'est la fin !

  • Speaker #2

    C'est la fin !

  • Speaker #1

    C'est la fin !

  • Speaker #2

    C'est moi la banderole ! Et puis, je suis à l'approche de Marabout, 49e kilomètre. Et là, je croise un coureur du relais, il me double. Et puis, il me dit, t'es parti sur des bases de combien ? Je fais, je ne sais pas, j'avais prévu de faire 42, 44 heures avec mon frère. Et puis, il me fait faire gaffe parce que l'année dernière, j'ai fait la diag. Et à cette heure-là, j'étais dans les mêmes temps de passage que toi et j'ai mis 33 heures. Moi, 33 heures, ce n'est pas du tout ce que j'avais. imaginer, je m'en sentais déjà pas capable parce que j'ai pas l'expérience quoi je sais pas si je vais aller au bout ouais je suis bien mais jusqu'où ça va durer quoi il y aura bien une panne de carburant tôt ou tard quoi Je continue à avancer, je suis bien, j'avance à mon rythme sans être en sur-régime. Et puis là, Marabout, effectivement, c'est le moment magique. Moi, je garde cette image. Tu as une terre qui est rouge au sol, à côté de ce chemin de couleur ocre, tu as l'herbe verte couverte de gel. Et cette lumière de 5h30 du matin, c'est juste magique. C'est une image, tu prends plaisir à être là. Tu prends conscience de la chance que tu as. T'es pas dans la course, t'es dans une aventure, t'es dans l'exploration, t'es dans la découverte. C'est juste magique. Tu viens un moment et tu profites. Peu importe ce qui va arriver, t'as vécu ce moment-là. Ce lever de soleil, je le garde en mémoire, je l'emmène avec moi. Donc je continue dans Marabout et Marabout, ça porte bien son nom. Parce qu'on met les pieds dans des mares, c'est dégueulasse. Tu te charges et tu as l'impression de faire une épreuve de Koh Lanta. Ce n'est pas possible. Et puis après, tu arrives sur une descente, la descente de la mort, la descente de Kotok Air Vegan. J'en avais entendu parler, mais je ne l'imaginais pas comme ça. C'est super vertical et tu dois descendre.

  • Speaker #3

    C'est terrible parce que dans la course, tu entends les commentaires des autres coureurs. Ils connaissent ce parcours. Et donc là, ils disent, là, on va arriver sur la descente de Kerwegan. Il y en a un qui dit, ah oui, c'est la descente technique. Et là, il y a le mec qui dit, c'est pas une descente technique, c'est une descente à la con. Et là, toi, tu te dis, mais qu'est-ce qui m'attend ?

  • Speaker #2

    Puis en fait, là, t'es qu'au 55e kilomètre, 60e, tu descends un escalier qui est super raide. Même une échelle, tu la mets moins verticale que ce sentier-là ne descend. Et t'es tôt dans la course. tu te dis j'ai envie d'économiser mes cuisses parce que je sais pas jusqu'où elles vont me supporter et quand on arrive en bas on se retourne avec

  • Speaker #3

    Jérémy et Jean-Luc et on regarde le chemin qu'on vient de parcourir cette descente impressionnante et là on dit on l'a fait c'est sûr qu'on a fait ça et c'est déjà impressionnant donc là on arrive à ce moment là moi en l'occurrence j'avais déjà mal depuis le cinquième kilomètre douleur à la cheville que j'avais ressenti depuis le le week-end de préparation. J'avais essayé de me faire soigner cette douleur les quelques semaines avant la course, mais depuis le départ, cette douleur était présente. Au fur et à mesure des kilomètres, quand tes muscles sont chauds, etc., tu ne le sens plus trop. Et puis j'ai commencé à avoir une douleur au quadriceps. Je pense que c'est le fait de compenser. Et là, j'ai senti que ce n'était pas très bon. Et là arrive le ravito. Donc là, c'est le ravito, le premier gros ravito de première base de vie à Sillaos. C'est là qu'on peut effectivement se changer, se poser un peu, on a notre sac d'allègement qui arrive, etc. Et là je dis, je suis bien, mais j'ai cette douleur, j'ai besoin de me faire masser parce que, en l'occurrence, je veux essayer de soulager cette douleur.

  • Speaker #0

    Les kinés me disent que ça fait un peu mal, mais je sens que ça ne passe pas et en même temps j'ai envie de repartir. Et là je repars avec l'espoir de pouvoir continuer et que la douleur se passe. Je n'ai pas une grosse expérience en trail, mais ça peut arriver, une douleur peut arriver et peut partir aussi vite. Donc je me dis que je vais me remettre à courir et ça va peut-être se passer. Sauf que ça ne s'est pas passé. Rapidement j'ai senti que dans les descentes comme dans les montées, ça allait être compliqué. Et là, le chemin de croix a débuté. Donc là, on est au cœur de la course, Mafate, c'est la jungle. C'est l'endroit où on ne peut pas accéder en voiture ou par d'autres moyens de transport plutôt classiques. Il n'y a que l'hélico qui peut y aller. Jérémy m'avait dit, si tu entres dans Mafate, tu ne peux plus en sortir facilement, donc tu es parti pour 20-24 heures de course. L'inquiétude grandit parce que je me dis, j'ai mal, je ne suis pas bien. Je ne sais pas comment ça va se passer, comment je vais en sortir surtout. Et puis j'y suis allé quand même, avec des conseils, des encouragements, des motivations à droite à gauche. Puis moi surtout l'envie de ne pas abandonner, parce que quand tu as fait tout ce chemin pour arriver sur cette belle île, ce n'est pas pour te dire que tu vas t'arrêter au 60ème. Je me suis dit tant pis, je vais y aller, je vais rentrer dans ma fat. Donc avant de rentrer dans ma fat, il y a déjà cette première montée qui s'appelle Taïbit.

  • Speaker #1

    Le fameux col du Taïbit.

  • Speaker #0

    Le fameux col du Taïbit. Et là, ça a été déjà la première épreuve. Difficile de monter. Finalement, je poussais qu'avec la jambe droite. Et en descente, c'est pareil, je ne descendais que sur une jambe. Donc ça devenait compliqué. Donc là, on arrive début de nuit. 19h, 19h30 de mémoire sur le ravito de Marla. Il commençait à faire froid. Je n'étais pas très bien et pas très serein. Le fait de passer la nuit comme ça dans la jungle. Je me pose, je me pose une demi-heure. Je me pose des questions aussi. parce que je vois le médecin qui me dit si tu arrêtes, il faut que tu fasses le chemin inverse c'est à dire que tu repartes vers Sillaos ou alors que tu trouves un moyen de te faire emmener c'était au niveau des Col des Beux et là c'était à 10 km 10-15 km après et puis il était hors de question que je fasse demi-tour parce que quand t'as passé des difficultés t'as surtout pas envie de les faire en sens inverse, c'était comme si tu effaçais tout donc je dis je continue ... Et là, entre temps, j'ai une amie à la réunion qui m'avait dit, de toute façon, avant la course, si t'arrives quoi que ce soit, t'hésites pas, tu m'appelles, etc. On viendra te chercher. Et donc, elle était avec son mari. Et là, je lui dis, écoute, j'en peux plus, je suis coincé, j'ai très mal. Je pense que je pourrais pas continuer parce que je prends plus plaisir à avancer parce que c'était vraiment très douloureux. Je pense que je vais arrêter. J'ai donné mon dossard, ça ça a été dur. J'ai donné mon dossard, j'ai dégrafé moi-même mon dossard pour le donner à un coureur. Et là, psychologiquement, ça a été dur. Parce que ça y est, c'était fait. À un moment donné, je me suis posé la question. Est-ce que je cours après pour rechercher mon dossard ? Et là, il y a plein de choses qui passent par la tête. C'est dur. Je me souviens toujours des mots d'Eric, qui est un collègue qui a fait le coup de trail. il y a beaucoup d'expérience dans le trail, il m'a écrit après mon abandon, il m'a dit tu sais Nico l'abandon c'est aussi un apprentissage de la course et on finit des courses c'est super mais apprendre à abandonner c'est important aussi parce que c'est une épreuve difficile

  • Speaker #1

    Moi, c'est le seul moment de grand doute que j'ai eu dans la course. Donc, c'est dans la montée et je fais une erreur de débutant, mais vraiment de débutant, c'est-à-dire que je commence à discuter avec des gars et là, on s'entend super bien. On est trois, on discute, on raconte nos vies, nos enfants, la vie. Le trail, c'est comme ça, on partage. Et en fait, ils vont plus vite que moi. Et je ne me rends pas compte, mais j'accélère. Et donc, je reste peut-être, je ne sais pas, trois quarts d'heure, une heure avec eux. Et la montée arrive et là je suis sec parce que j'ai accéléré sans me rendre compte. Et donc là j'ai plus de jus et je m'arrête. Donc je m'assieds sur une pierre, je prends une barre de protéines ou de je sais pas quoi. Et là je suis au plus bas quoi, j'ai presque, je me dis mais j'y arriverai pas quoi. Et là il y a une créole qui arrive derrière qui avait sans doute beaucoup d'expérience sur la diagonale. Elle s'arrête, elle s'assied à côté de moi, elle me regarde, elle me fait « C'est bon, tu vas y arriver » . Et elle me dit… Tipa tipa, tu finiras à la redoute. Et pour eux, c'est en clair, si tu vas petit à petit, tu vas y arriver. Et du coup, ça m'a marqué. Donc, je suis resté dix minutes, un quart d'heure sur mon rocher et je suis reparti comme ça, comme un blessé. Et puis, c'est ça qui est dingue entre elles. C'est que tu peux être au plus bas pendant un moment et puis ça va repartir. Et c'est reparti. Et là, après, c'est la... la fameuse descente infernale vers Sillaos, que j'ai faite doucement, parce que moi, alors Damien, il a couru dans cette descente, moi, je la trouvais tellement dangereuse. C'est-à-dire, tu cours, tu marches, tu cours, et puis tu vois les gars en dessous. Tu les vois, mais c'est droit, c'est un mur. Et là, tu descends vers Sillaos, et alors, il paraît de la base de vie de Sillaos, et moi, Sillaos, c'était, dans le conte que nous a raconté Jérémy, pour moi, Sillaos, c'était un coin de paradis, parce que... Tu peux te poser, tu peux te doucher, tu peux manger, tu peux te faire masser et tu repars. Et donc je suis arrivé à Sillaos, déjà, clac, ça s'est coché. Et j'ai pris mon temps, je suis allé me doucher à l'eau froide. J'ai mangé et il y avait une école de kiné de La Réunion. Et j'ai eu droit à deux filles et deux massages. Alors là, c'est le top. Et donc je me suis fait masser les mollets, les cuisses. Et après, j'ai rebut deux, trois verres. et c'est reparti.

  • Speaker #2

    Après la descente de Côte-aux-Coeurs vegan, on a l'impression de marcher sur la tête de ceux qui nous précèdent. Tu arrives effectivement à Sillaos et tu retrouves un autre coin de paradis. Par contre, tu retournes un peu à la civilisation. Tu as l'impression que c'est un des plus beaux villages fleuris de France. C'est magique. C'est une base de vie. Il fait bon y arriver. Tu es content. Moi, c'est un moment qui était important puisque là, je retrouve ma femme. qui est venu m'encourager. Mon portable, il est à chaise depuis le départ de la course. La batterie ne tient pas. Et là, elle me tend le sien et elle me montre tous les WhatsApp qu'il y a eu dans notre groupe de supporters et de coureurs. Et putain, ça te requinque. Moi, je suis bien à ce moment-là, mais tu prends une énergie folle à voir toute cette émulation. Alors déjà, tu as l'énergie parce que tu sais que les collègues, tu es obligé d'aller au bout parce que les collègues, ils vont aller au bout. Quoi qu'il arrive, tu ne peux pas lâcher. Si tu n'as pas un souci physique, tu vas au bout. Et de voir toute cette émulation qu'une course d'une telle ampleur génère parmi des personnes qui sont trailer ou pas du tout trailer. Ils ne connaissent rien à la course à pied, mais ils vivent l'événement avec toi. Et là, c'est juste magique. Tu as les frissons. Et par-dessus, il y a le message justement d'Olivier qui a fait la surprise aux collègues à Marabout et que moi j'ai loupé. Il avait fait une petite vidéo et je la capte à ce moment-là, au 65e kilomètre, là, à Sillaos, je vois la vidéo. Et c'est la goutte d'eau, quoi, t'as presque envie de pleurer. Et là, je me dis, c'est bon, il ne reste plus que 100 bornes, quoi. Je suis au 65e, il me reste 105, je suis bien, je continue. Par contre, tu sais qu'il y a peu de temps après, à l'horizon, il y a le Taïbit qui se pointe. Et je m'en fous, je suis bien. Sauf que dès les premières marches du Taïbit, plus si bien que ça. Et là, ça commence à devenir compliqué. Physiquement, je n'avance plus. J'ai l'impression d'aller moins vite que des randonneurs. Merde, qu'est-ce qui se passe ? Et puis quand tu bascules au col des Bœufs, tu es dans le brouillard, tu ne vois rien. Les conditions ne sont pas top. Tu as l'impression d'être en hiver. Tu n'as aucune visibilité. Je m'arrête au ravito suivant, je prends une soupe, etc. Et puis après, on arrive sur un terrain de jeu, moi, que j'apprécie plus particulièrement, puisqu'on arrive sur un sentier qui s'appelle le sentier scout. C'est comme un toboggan. J'ai l'impression d'être dans un parc d'attractions géant. C'est des up and down. Ça descend, ça monte un tout petit peu, c'est des coups de cul. Et puis, t'es en sous-bois et c'est super ludique. Pif, paf, à droite, à gauche. Et puis là, je recommence à trouver des sensations. Je prends de nouveau du plaisir en tout cas. J'avais tellement mal vécu cette montée du Taïbit que là je profite de Sentier Scout. Et puis il y a un moment sur Sentier Scout, tu débouches sur une crête, tu as le vide à gauche, tu as le vide à droite. Et par contre tu te projettes sur le cirque qui t'entoure et les massifs que tu as, les crêtes volcaniques que tu as devant toi qui sont recouvertes de verdure et qui sont juste magnifiques. J'arrive au pied de la deuxième grosse difficulté, c'est la montée du Maïdo. La montée du Maïdo, elle se fait en deux portions. Une portion de 600 mètres de dénivelé positif, un plat sur lequel on va trouver le ravitaillement de roches plates, et encore 800 mètres qui sont annoncés très terribles. Je me dis que je vais resubir. Et puis en fait, dans la première partie de 600 mètres, ça se passe bien. Et ça se passe tellement bien que là, à un moment, il y a un coureur qui m'interpelle et qui me dit « C'est toi Nils ? » « Nils ? Non, je ne connais pas Nils. » Parce qu'il y a deux gars qui étaient habillés comme toi et qui cherchaient un certain Nils. Et là, je comprends que je reviens sur Thierry et son frère. Et effectivement, juste avant le ravitaillement de Ausha, il reste 2 km avant le ravito, je retrouve Thierry et son frère qui sont là. Là, il nous reste 60-65 km. Et là, je demande à Thierry, ça vous dérange si je fais la course avec vous ? Et puis là, pas de problème. Et puis là, à partir de ce moment-là, on va suivre le parcours ensemble. Et ça sera un autre bon moment de la course. Avec Thierry et Olivier, on repart du Maïdo et on fait une longue descente qui nous paraît interminable. Mais par contre, ça y est, on est dans la cohésion et on fait tout ensemble. Il y en a un qui s'arrête pisser, tout le monde s'arrête pisser. On fait tout jusqu'au bout. On est déterminés à finir ensemble la course. Il reste 60 bornes, on sait que c'est encore long. Pour nous, 60 km, c'est un trail normal. Et on sait qu'il y a encore des difficultés qui arrivent. Et effectivement, il y aura des difficultés sur cette fin de parcours, puisqu'il y a des sentiers, je n'ai jamais vu des sentiers aussi techniques. Ce n'est même plus du trail, c'est entre l'alpinisme, le gymkanage. Ce qui est incroyable, c'est la lucidité qu'on a eue, je pense, tous les trois. On n'a jamais douté sur le fait qu'on irait au bout, et dans de plutôt bonnes conditions. Et c'est une surprise parce qu'on n'avait jamais passé autant de temps dehors, ni Thierry, ni Olivier, ni moi, donc on ne savait pas ce que ça allait donner. Et je pense que c'était encore une plus grosse surprise pour Olivier, qui lui, sur le dernier mois, il n'a pas pu s'entraîner, il était blessé. Donc faire 33 heures dans ces conditions, c'était juste magique. On a sur la fin du parcours, sur les 30 derniers kilomètres, moi c'est la première fois que j'ai la première notion de classement. On arrive au 132ème kilomètre et là, on nous scanne. sur la deuxième base de vie et 99, 100 et 102ème. Putain, top 100, Diag, un truc juste impensable quand on est parti l'avant-veille au soir. Là Thierry c'est un compétiteur donc Thierry c'est un taureau dans l'arène donc quand il voit le drapeau rouge, il fonce dedans quoi. Donc là, à partir de là, ça va devenir un peu plus dur pour nous et avec Olivier puisque... Thierry, dès qu'il voit une frontale, il va la chercher. Et puis nous, derrière, on ferme notre gueule et on colle. Et puis on essaye de le ralentir quand il y a besoin de le ralentir. On a tous mal aux pattes, mais Thierry, il a un mental de compétiteur qui fait qu'il va se faire encore plus mal que la douleur qu'il a à l'instant présent. Et puis là, on est en mode conquête. C'est fou parce qu'on est dans le top 100. 90, 87, 70 et on est en chasse. Il y a un dernier secteur pavé qui est super difficile. À côté, les pavés du Nord, c'est super roulant, même en roller. On a galéré, mais mentalement, on était quand même super déterminés. C'était dur de passer ce secteur en marchant. C'est dur à assumer. Et puis après, il y a un dernier coup de cul, une petite bosse. Il nous amène jusqu'à Colorado. Et à Colorado, tu es à 4,6 km de l'arrivée. Il fait super beau, parce qu'il doit être 6h30. Il nous reste trois quarts d'heure de descente, super technique, qu'on passe ensemble. Et là, c'est fou, parce qu'à ce moment-là, tu retrouves des jambes, mais les mêmes jambes que tu avais au départ de la course. Tu oublies tout. 4 km, c'est rien. Et là, tu te reprends à courir à des allures, tu fais des portions de descente à 14, 15, 16, c'est juste incroyable. Et tu sais que tu vas finir et que tu vas retrouver toute la famille et que tu vas avoir ce putain de t-shirt « J'ai survécu » avec la médaille de finisher.

  • Speaker #0

    Découverte de l'arrivée pour moi parce que je ne la connaissais pas. Et donc j'arrive dans ce stade, à 7h du matin, au stade de la Redoute, à Saint-Denis. Autant il y a beaucoup de spectateurs au départ. Mais cette heure du mat', c'était assez calme Et là on entend le commentateur commenter l'arrivée des coureurs et là on est 54ème, 55ème position. On entend les places et là je réalise que mon Dame il a fait une super perf et Thierry et son frère également. Dame en fait ça compense mon échec. C'est le fait que j'étais content pour lui, j'étais content de le voir arriver et je l'avais quitté. au 25e kilomètre en me disant vas-y fais ta course, éclate-toi, et il s'était éclaté. Et ça c'était chouette. Et donc on l'attend. Alors moi je suis un peu dans ma bulle, je suis encore un peu dans ma bulle finalement. Je me pose encore ces questions. Qu'est-ce que tu as fait ? Est-ce que tu as bien fait ? Est-ce que tu n'aurais pas pu faire autrement ? Voilà, tout ça passe dans ma tête. Et là j'entends l'arrivée de Damien. Superbe arrivée, ils arrivent en courant les trois, donc Damien et les deux frangins. Super beau. Belle émotion à l'arrivée, ils étaient frais, c'est ça qui était impressionnant. Ils avaient quand même passé 33 heures à courir et ils étaient encore frais. C'était magnifique, beau soleil du matin, c'était très chouette d'arriver et se vendre. Trois compétences qui nous arrivent ici à l'arrivée des premiers rangs dans le top 60 de cette année.

  • Speaker #2

    On arrive, il n'y a pas beaucoup de monde, mais le peu de personnes qui sont là, ça compte. Il y avait Nicolas, Aline, Olivier, mon frère, forcément. Ouais, quelle joie. Après, l'émotion de la ligne, elle est bizarre parce qu'on était tellement préparés, on savait qu'on allait y arriver. t'exploses pas de joie non plus, tu es soulagé d'en avoir fini. On est satisfait, mais il n'y a pas eu une euphorie, il n'y a pas de trempette ni tambour, ça reste mesuré. Je pense que c'est après que tu prends conscience de ce que tu as fait, ça reste finisher de la Diag, c'est un truc dont tu as rêvé et on l'a fait. Et ça, c'est la plus belle des satisfactions. J'étais content de passer la ligne avec Thierry et Olivier. La prochaine fois, je le ferai avec ma femme et mes enfants. Allez,

  • Speaker #1

    mon pitou ! Tu l'as fait ! Tu l'as fait ! Allez, mon Gigi !

  • Speaker #2

    Allez,

  • Speaker #1

    Gigi ! Ouais ! Donc moi, en fait, là... C'est complètement différent de Damien, c'est-à-dire que moi je ne suis pas un compétiteur dans l'âme. Moi je suis un hédoniste du trail, j'aime vivre l'émotion du trail. Et donc quand Damien, lui, il était de jour, moi j'étais de nuit, je suis loin derrière. Et Mafat, il l'a fait de jour, moi je l'ai fait de nuit. Et donc avant de rentrer dans Mafat, j'ai vu beaucoup de gens abandonner. Jérémy m'avait dit... Si tu rentres dans ma fat, tu finis. Et de voir tous ces gens qui abandonnaient, comme dans le livre que j'avais lu, parce qu'Antoine Guillon, il dit, les gens, ils hésitent à rentrer dans ma fat, un peu comme ce que disait Nico tout à l'heure, c'est-à-dire que ça va être dur. Et donc là, je suis en haut du col du Taïbit, et je me dis, tu l'as fini. Tu rentres, tu finis. Et là, j'avais l'œil du tigre, quoi. Le butique c'est qu'il n'y a plus rien qui va m'arrêter. Et là démarre la nuit, pour moi c'est une des plus belles nuits de ma vie. Le cirque de Mafate, c'est coupé de la civilisation. Il n'y a pas de route, il n'y a pas d'éclairage. Il n'y a rien. Il n'y a que de la nature sauvage et des gens. Et dans cette nuit-là, moi, j'ai fait un voyage presque mystique, dans le sens où c'est un voyage à la fois intérieur et physique. Parce que ça fait déjà la deuxième nuit où tu ne dors pas. Et tu passes par plein de choses, parce que ton cerveau, il est sous les étoiles, dans un endroit unique au monde. Et tu penses à des choses que tu as dans ta vie de tous les jours, tu n'as jamais le temps d'y penser, jamais. Ça, c'est des moments uniques et c'est pour ça que je fais du trail. C'est que le trail, c'est à la fois un sport où tu voyages intérieurement, tu vis des émotions avec les gens. Et cette nuit dans ma fat, c'est quelque chose d'incroyable de par le voyage intellectuel et spirituel que j'ai pu faire. À la sortie de Mafate, il faut en sortir, et là il y a ce fameux Maïdo. Et le Maïdo, moi je l'ai fait en plein cagnard. Et là, la montée des 800 mètres, il y avait Olivier qui est venu me chercher en haut. et quand t'arrives en haut t'es content parce qu'il fait 30 degrés, t'as la saharienne. Les gens t'acclament, t'arrives en haut. Moi, j'avais l'impression d'être, je ne sais pas, Cavendish sur le Tour de France. Et les gens, ils te poussent, ils t'appellent par ton prénom, parce qu'ils veulent le prénom sur le dossard, donc ils t'encouragent. Et t'arrives en haut du Maïdo, ça y est, j'y suis, je l'ai fait. Et après, t'arrives sur la descente. la plus douloureuse pour moi parce que j'avais mal aux pieds, j'avais les pieds qui avaient chauffé. J'ai eu la chance, parce que ma femme m'a fait une surprise avec mes enfants, c'est qu'ils arrivaient le jour J à La Réunion et ils ne m'avaient pas dit et ils sont venus m'attendre à Ilé-Savanna, donc en bas. Et là, quand je les ai vus, j'ai pleuré comme un bébé. C'est fort. Moi, le trail, ça me porte. Le fait de retrouver ma famille, ça m'a galvanisé et après Sur le gâteau, à la possession, c'est taré. Ils venaient de finir leur course et ils sont venus m'encourager comme si j'étais un athlète de haut niveau. J'avais l'impression d'être une Ferrari qui rentrait au stand. Et après, il y a l'aboutissement. Quand tu vois le panneau, la redoute, je descends, je descends et là, je vois un petit gamin en bas. Mon fils, il est là avec son portable, il fait la descente avec moi. Et là, c'est juste incroyable. Et là, c'est ce que disait Damien. Je me remets à courir à 12 à l'heure. Donc là, il y a mes filles qui arrivent, ma femme. On se prend tous dans les bras, on finit. Et là, j'arrive dans le stade de la redoute. Les loulous, ils sont encore là. Donc Damien, Nico, Jérémy, Olivier, leurs femmes et tout, qui sont là. L'arrivée, c'est la visualisation mentale. d'un truc que tu as juste rêvé dans ta vie. Et là, tu te dis, mon rêve, je l'ai fait.

  • Speaker #0

    Émotion, partage, joie, déception. Vous l'avez compris, la Diagonale des Fous, ce n'est pas qu'une épreuve sportive, mais c'est aussi une véritable aventure humaine. J'espère que ce podcast vous a plu. N'hésitez pas à le partager si c'est le cas. Et puis moi, je vous dis à bientôt,

  • Speaker #2

    même à très vite,

  • Speaker #0

    pour d'autres belles histoires de sportifs.

Description

Une idée lancée lors d’une soirée “rougaille-saucisse” entre collègues : et si on tentait La Diagonale des Fous, trail mythique. Des discussions, quelques minutes de réflexion et une ambition posée pour Damien, Gaëtan et Nicolas : terminer cet ultra-trail de 170 km, dont 10 000 m de dénivelé positif, à travers l’île de la Réunion ! Considérée comme l'une des courses nature les plus difficiles au monde, La Diagonale des Fous nécessite des mois de préparation physique et mentale pour espérer franchir la ligne d'arrivée et se voir récompensé du Graal : un tee-shirt floqué d'une phrase qui en dit long, "J'ai survécu". Plus qu’un trail, La Diagonale des Fous est un véritable voyage intérieur où il faut puiser dans ses ressources, aller chercher la volonté au plus profond de soi, dépasser ses limites, s’accepter et se faire confiance. Grâce à ces trois “Fous”, vous allez vivre l’expérience émotionnelle incroyable d’un tel défi… Préparez-vous, prenez place direction : La Réunion. Bon voyage ! 


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Les Conseils de sportifs et des sportives, c’est le podcast de DECATHLON qui vous accompagne dans votre pratique sportive, qui vous aide à débuter ou à reprendre le sport. C’est aussi le podcast qui vous prouve que l’activité physique, c’est avant tout du plaisir ! Grâce aux conseils et astuces d'expert•es en la matière et aux partages d'expériences de vie de pratiquant•es, chaque épisode est une nouvelle occasion d'en apprendre un peu plus sur votre (future) passion !


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On nous le dit assez souvent : pratiquer une activité physique, c'est bon pour la santé. Ce qu'on nous dit moins c'est comment on s'y prend ? Par où on commence ? Plus que de vous voir accomplir un exploit sportif, notre plus grande fierté serait de vous faire aimer le sport, durablement. Parce que c'est ça, le secret de la motivation : trouver l'activité qui vous apporte la dose de joie qu'il vous faut dans votre quotidien.


Producteur : Pipo et Lola


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour et bienvenue dans ce podcast Histoire de Sportifs. On se retrouve aujourd'hui pour un épisode hors série avec, une fois n'est pas coutume, trois sportifs. Gaëtan, Damien et Nicolas, des ultra-trailers qui se connaissent bien puisqu'ils travaillent ensemble chez Decathlon. C'est d'ailleurs lors d'une soirée entre collègues qu'ils ont décidé de courir la Diagonale des Fous. Une course nature qui porte bien son nom, 166 km pour 9611 mètres de dénivelé positif à travers l'île de la Réunion. Alors dans cet épisode, ils vont nous raconter cette aventure à la fois solitaire et collective, vous le verrez. Les doutes pendant les préparations, l'ambiance locale et puis la course bien sûr, avec un abandon pour l'un d'entre eux. On retrouve le récit de Gaëtan, Damien et Nicolas juste après l'intro. Bon podcast !

  • Speaker #1

    Je ne sais même pas comment je vais te dire.

  • Speaker #2

    C'était assez fort en émotions.

  • Speaker #1

    Moi j'ai réussi à rester dans le tempo. Moi c'est inoubliable.

  • Speaker #3

    Courir, c'est dur.

  • Speaker #2

    Tu prends une énergie folle.

  • Speaker #1

    Le style c'est comme ça, on partage. C'est fort.

  • Speaker #2

    On l'a fait. C'est mon aventure.

  • Speaker #1

    Alors bonjour à tous, moi c'est Gaëtan, je suis chef de produit au trail running chez Decathlon. J'ai participé à la Diagonale des Fous cette année. C'était un défi qui, quelques années plus tôt, m'aurait paru complètement invraisemblable.

  • Speaker #2

    Bonjour à tous, je m'appelle Damien, je suis responsable d'approvisionnement chez Calenji Trail. Ça fait à peu près huit ans que je fais du trail et je suis plutôt issu du monde du foot. Je suis passé par d'autres activités, karaté, VTT, vélo de route, triathlon. Et naturellement, la course à pied pour finir. Entre la route et le trail, j'ai vite fait mon choix. On s'est retrouvé à la Diague, qui me paraissait une montagne quand j'ai commencé la course à pied. On se dit qu'on ne va jamais réussir à franchir une distance pareille. C'est pas humain et finalement, on l'a fait.

  • Speaker #3

    Bonjour, moi c'est Nicolas. J'ai la chance de travailler au trail. qui est mon sport de prédilection. Puis ingénieur produit et ingénieur etc. Je me suis mis au trail après la course à pied, sur route, parce que j'avais envie justement de découvrir les chemins autour de moi. Et puis au fur et à mesure, on fait 20 kilomètres, on en fait 30, 40. Et puis un beau jour, il y a les collègues qui parlent de la diagonale des fous. C'est un nom finalement qui se traduit bien, puisque les fous partent comme ça au mois de décembre en se disant, allez on s'inscrit. et je me suis laissé embarquer. C'est bien le terme parce que c'était à peine réfléchi en fait. C'est après qu'on y réfléchit, c'est après qu'on en prend conscience.

  • Speaker #1

    La participation à la Diagonale c'est un peu particulier parce que c'était un projet plutôt familial puisqu'il y a 20 ans j'ai connu ma femme à l'île de la Réunion où j'étais militaire en service national. Et on avait prévu pour nos 20 ans de rencontre de partir à La Réunion. Et je m'étais dit, si je peux courir, c'est bien. Et puis, il y a eu un petit gros péto qui s'est créé au trail. En fait, là, on est trois autour de la table, mais on était sept. Et puis, il y a eu une soirée qu'on a appelée soirée rougail-saucisse chez notre directeur financier, Jérémy. Pendant cette soirée, il en parlait de la Diagonale des Fous. Moi, j'avais plutôt prévu de faire une petite course. Et puis la soirée a avancé, la soirée a avancé, on a bu quelques bières et puis ils m'ont dit mais tu vas pas faire une petite course, tu vas venir avec nous. Et puis à la fin de la soirée j'ai dit bon bah je vous suis. Et donc c'est comme ça que ça a commencé, partir petit et finir un peu comme un fou.

  • Speaker #2

    C'est vrai que ça a commencé sur cette soirée rougail saucisse. Moi j'ai des vieux souvenirs, je sais plus à quel endroit on était, on a déjà dû échanger dessus. On se disait en 2018, dans deux ans... On ferait bien la Diag, et puis il n'y avait rien de concret pendant quasiment un an. Et puis c'est vrai que ce soir-là, c'était le point de départ. On y va. Ça devenait concret en fait. Une simple idée qu'on ne pensait même pas réaliser. Pour moi, je pensais que c'était encore trop tôt. C'était un doux rêve.

  • Speaker #1

    Moi, c'est pareil. Moi, je m'étais inscrit au Templier, le Grand Trail Templier, qui est une course de 78 kilomètres. Et je n'avais pas imaginé que l'année suivante, je partirais sur un ultra trail.

  • Speaker #3

    Chaque année, on planifie un peu nos trails de l'année. Et je pense que ça arrive à ce moment-là à peu près. On était arrivé à la fin de l'année, on se demandait ce qu'on allait faire l'année suivante. Effectivement, on avait fait des courses de 40 et 70 kilomètres. Et puis Jérémy, qui lui l'a déjà fait, nous en a parlé. Il avait envie de le refaire et donc il nous a emmené avec lui. L'idée a commencé à germer, mais ça va vraiment très vite en fait. On se laisse vraiment embarquer, on connaît à peine la course, on ne sait même pas quel est le dénivelé, par où ça va passer, etc. Et puis on s'inscrit et on se dit que ce n'est pas grave, je découvrirai un peu la difficulté au fur et à mesure. En tout cas, pour moi, ça a été ça.

  • Speaker #2

    Alors la préparation pour la Diag, j'ai envie de dire que mentalement déjà, tu commences la préparation le soir du rougail saucisse quand même. C'est là où tu prends conscience que tu t'engages sur quelque chose que tu n'as jamais fait, tu ne sais même pas si tu en es capable. Mentalement, il faut se faire à l'idée que tu vas devoir courir 170 bornes avec 10 000 mètres de dénivelé alors que tu ne l'as jamais fait. On a fait en moyenne, on était sur des formats... Ils peuvent paraître longs, 70-80 kilomètres pour le max. Et là, passer à plus du double, ça paraissait insurmontable. Donc déjà, il faut se faire à l'idée qu'on va réaliser ça. Et on ne sait pas comment on va y arriver avec l'entraînement qu'on réalise au quotidien autour du lac du Véron.

  • Speaker #1

    Alors moi, de mon côté, la préparation, j'ai été très littéraire puisque j'ai acheté pas mal de livres. Et du coup, j'avais quelques bouquins sur ma table de nuit. Et plus je les lisais, plus la pression montait. Parce que chaque témoignage montre, entre guillemets, l'intensité de la préparation et de l'entraînement, à la fois physique et mental. Et je pense que c'est les livres, moi, qui m'ont fait comprendre dans quoi je m'étais engagé.

  • Speaker #3

    La préparation aussi, elle passe par des courses intermédiaires. C'est-à-dire que si on devait faire un entraînement pendant six mois, ce serait compliqué, il faut se motiver tous les jours. En fait, d'avoir des petites courses intermédiaires, ça permet aussi de se motiver pour le mois suivant, dans trois mois. Et ça, forcément, on s'y implique davantage. Il y a beaucoup de moments passés ensemble pendant les entraînements, c'est ce qui nous motive aussi. On a aussi les groupes WhatsApp, où on est tous connectés, et la veille, c'est des messages, c'est « moi j'y vais demain matin à telle heure, qui va avec moi ? » Et je pense que sans ça, tout seul dans son coin, c'est pas très compliqué. Donc on se retrouvait au Mont-Saint-Aubert, on se retrouvait même au lac du Héron, et l'étape ultime, parce qu'on est dans le nord de la France, c'était dans les Terils. C'était vraiment notre challenge. Si on allait au Terril cette semaine, c'était hyper important. Parce que c'était beaucoup de dénive. On va avoir mal au canne pendant deux heures. Et généralement, il ne faisait pas hyper beau. Donc, ce n'était pas la grosse motivation non plus.

  • Speaker #2

    Donc, en fait, on a tous fait des préparations assez différentes dans un premier temps. C'est-à-dire dans les six premiers mois après l'inscription. On a pris notre package. En fait, c'était plus de l'entretien avec comme objectif, on rallongeait un peu les distances le week-end, mais il n'y avait pas de préparation très structurée, je dirais. Puis, on a quand même mis un événement, le 90 kilomètres du Mont Blanc, comme étape intermédiaire pour la préparation de cette diagonale. On s'est dit, on va faire quand même une distance relativement importante avec un bon dénivelé. Et moi, je me souviens, quand on est sorti de cet événement-là, on s'est dit, on n'est pas prêt. Et là, ça a été un révélateur pour dire qu'on a super mal au cuisse quand même. Il faudrait qu'on s'entraîne peut-être différemment. Et c'est à partir de là qu'on a commencé à mettre le terril en jeu. Je me rappelle la première fois, en deux heures ou trois heures de séance, on attrape entre 1000, 1500 mètres ou 2000 mètres de dénivelé. On fait tout en marchant, sauf les descentes sur lesquelles on trottine parce qu'on est emporté par notre élan tellement c'est raide. Et puis après, on a mal pendant cinq, six jours où on ne peut plus courir du tout. Ça, c'est la première séance. Et puis, on y retourne le week-end suivant. On s'aperçoit que ça va mieux et qu'on récupère plus vite. On se dit qu'on l'intègre de manière régulière pour se familiariser. L'idée, c'était de se forger un peu les muscles des cuisses.

  • Speaker #3

    C'est tout à fait ça. Pour revenir un peu sur la préparation, elle était double. Comme tout sportif et tout trailer, elle était de voir jusqu'où j'étais capable d'aller. Toujours mieux se préparer, mieux s'entraîner, etc. pour aller toujours plus loin. Et puis j'avais un double enjeu, c'était aussi une préparation et une bataille contre la maladie, parce que deux mois après m'être inscrit à la Diag, j'ai déclaré un diabète. Et du coup, j'ai arrêté de courir pendant un mois. Et ma volonté derrière, c'était de pouvoir continuer à tenir tous mes challenges de l'année avec cette maladie-là. Et donc chaque étape, chaque course était un nouveau challenge pour moi.

  • Speaker #1

    Après, moi, dans la préparation, je me suis fait une frayeur. c'est que je me suis inscrit à une course parce que je ne pouvais pas faire le 90 km du Mont-Blanc. Je me suis inscrit à la Maxi Race, qui est une course qui a lieu fin mai à Annecy. Je partais un peu blessé, puisque j'avais une douleur au tendon d'Achille que j'essayais de traiter avec notre ostéo commun, qui est Étienne, et quelqu'un qui a compté aussi dans la prépa de l'équipe. Au 50e kilomètre, j'abandonne. Et alors là, le moral, à zéro. À zéro parce que 50 km, l'objectif, il est à 170. Je suis en vrac. Comment ça va faire ? Et du coup, ça m'a mis comme un aiguillon pour dire, bon, maintenant, déjà, ces tendons, il va falloir bien les remettre. Et puis après, il va falloir vraiment que tu t'y mettes progressivement pour aller chercher cette course de fou en octobre.

  • Speaker #2

    Le Slash, c'est un moment fondateur pour l'événement, puisqu'on ne s'imaginait pas partir sur la diagonale sans avoir fait le traditionnel week-end shock. Le week-end shock, c'est qu'on cumule sur deux jours et demi, trois jours. Un nombre de kilomètres et de dénivelé qui a pour but de nous éprouver physiquement, voir notre capacité de récupération puisqu'on enchaîne trois jours d'affilée. Et puis ça a pour but de tester aussi tout le matériel, voir si on ne va pas avoir un petit pépin avec le sac à dos, avec la chaussure, comment nos pieds vont réagir. Gérer l'alimentation aussi c'est important parce qu'on est tous différents face à ça. On est tous plus ou moins confrontés à des problèmes de digestion pendant une course, c'est pas évident. Le week-end choc, il commence avant le week-end choc aussi. Il commence sur une soirée de préparation du week-end choc. On fait le tracé des parcours, on se réunit autour d'une bière bourbon. On se préparait pour la diag, forcément, on était en couleur locale, après le rougail et saucisse. Et là, on est avec les ordinateurs, les montres, les cartes, et on décide de ce qu'on va faire pendant ces trois jours. Vendredi matin, on fait ça. L'après-midi, on fait une autre. Le samedi, une grosse séance. Et le dimanche, on se recolle encore deux séances. Et au final, on fait le total. Alors, ça fait combien, les gars ? Et puis là, on dit 100 kilomètres. Waouh, c'est quand même épais. Tu te dis, en trois jours, tu vas faire 100 bornes avec 10 000. Sur la diag, il va t'en rester 70. Là, tu n'es pas trop serein. Et tu te dis, est-ce que je vais être capable déjà de passer ce premier créneau ? Et de bien le passer, c'est un mois avant l'événement. Et puis derrière, de récupérer, d'enchaîner mes entraînements. Parce qu'il ne faut pas s'arrêter, c'est qu'un week-end shock, c'est que de la prépa. Après, il reste trois semaines pleine balle. Mentalement, il faut s'y faire.

  • Speaker #1

    Et donc là, dans l'équipe, il y a une espèce d'alchimie, parce qu'on a tous des rythmes un peu différents, mais on a le même objectif. Et ça, ça joue énormément, parce que moi, je suis le plus lent de la bande. Devant, ça galope. et j'avais une grosse appréhension sur est-ce que... pendant ce week-end choc, je vais tenir avec les collègues, avec les copains. Et en fait, on a eu tous un espèce de groupe très uni et ça a très bien fonctionné. Pour moi, c'est inoubliable. Et dans ma tête, c'était si ça se passe mal là, qu'est-ce que je fais ?

  • Speaker #0

    Nous sommes donc le 17 octobre 2019, c'est le jour J. 2863 participants sont donc au départ de cette Diagonale des Fous. Et parmi eux, on retrouve nos trois fous à nous, Gaëtan, Damien et Nicolas.

  • Speaker #1

    Alors on est arrivé le lundi 14 octobre à La Réunion. Il y a un truc qui est génial, c'est que tu arrives à l'aéroport Roland-Garros, et puis tu as « Bienvenue à Azote Trailer » , et puis tu as un comité d'accueil avec l'équipe d'organisation de la Diagonale des Fous qui te remet un petit package avec des danseuses créoles, tu bois du rhum. Il y a une espèce d'ébullition autour de cet événement. Donc à la télé sur Réunion 1ère, il y a diagonale J-1, J-3, J-2, J-1, donc la pression monte. Bienvenue pour cette 27e édition du VORED à tous ceux qui viennent de l'extérieur ! Quand on arrive à Saint-Pierre, ce qui est particulier, c'est qu'il fait un peu froid, il y a du vent, et le départ, il est en bord de mer. dans une espèce d'esplanade. Et là, on comprend tout de suite, au volume de l'organisation, que c'est quelque chose d'énorme comme le Tour de France. Parce que tout est bloqué, il y a un concert de musique, il y a des gens partout, et c'est la cohue pour rentrer dans le sas.

  • Speaker #3

    Le départ se fait à 22h, on arrive à 18h. Alors 18h, effectivement, il y a du vent, il fait un peu frais, la nuit tombe. plus du tout les mêmes conditions que pendant la journée. Donc là, il faut commencer à se couvrir. Là, on arrive sur un de grands parkings, parkings plus sireux. On rentre dans une zone de contrôle, où on présente nos sacs. Là, on a le matériel obligatoire qui est contrôlé par des bénévoles. Donc là, on sent un peu la pression monter parce que on se dit ça y est, on y est. On se regarde un peu tous, on se dit maintenant, on ne peut plus reculer. Puis on passe au premier sas, on regarde derrière nous, on dit ça y est, maintenant On est entré, on ne peut plus en sortir et c'est maintenant que ça commence. On rentre un peu dans notre bulle, mais comme on est à 7-8, on a envie encore de partager ces moments-là. On a envie de revivre encore tous les moments passés parce qu'on se raconte encore notre préparation, etc. On se remémore un peu les instants et on se dit ça y est, on y est. Et puis on arrive sur ce terrain, sur ce parking, grand parking pour oscireux. On avait pris de quoi mettre sur le sol pour ne pas se salir, pour s'asseoir. C'est rudimentaire. C'est-à-dire que quand tu t'assoies, tu sens bien les cailloux au sol. Ce n'est pas hyper confortable. Et puis on s'installe. On le sait, on va devoir attendre 4 heures. Alors on s'installe. Il y a un bruit de folie juste à côté, parce qu'il y a la scène qui est juste à côté. Il y a de la musique, c'est sympa, parce que ça donne un peu d'ambiance. Mais... Merci. Je ne sais pas si tu as envie d'écouter cette musique ou si tu as plutôt envie de t'isoler.

  • Speaker #1

    Et moi, à ce moment-là, j'ai eu peur. Moi, j'ai eu peur parce que je connais les loulous. Et quand je les ai vus se concentrer, ça m'a fait peur parce que je me suis dit, je ne suis pas prêt. Je ne suis pas prêt parce que je regardais Damien qui était concentration ultime dans sa bulle. Je voyais Gildas, Jérémy, des gens avec qui on déconne quand même un peu au quotidien. Et là, je les voyais rentrer dans la compétition. Et quelque part... Moi, ça me stressait parce que je me disais, est-ce que toi, tu y es aussi ? J'ai pensé à tout ce qu'on avait fait, à la préparation. Et je me suis dit, bon, t'as fait le taf quand même. Si t'es là, c'est pas par hasard. Et je me suis détendu.

  • Speaker #2

    Au départ, on s'installe, on met les ponchos au sol. Et puis, on commence à s'alimenter puisqu'on fait notre repas du soir. Je pense que chacun regarde ce que l'autre a appris avant le départ. Et là, c'est un pique-nique géant. Donc, c'est plutôt encore sympa. Et effectivement, après, au bout d'une heure, ça commence à s'éteindre, malgré le bruit. Tu as le silence qui me revient en mémoire. C'est bizarre parce que c'est sourd. Et on se met dans notre bulle parce qu'on n'a pas envie de perdre d'énergie non plus. Parce qu'on sait que la moindre réserve ressource, on va en avoir besoin pour les jours qui viennent. On sait que ça va être long et on ne sait pas si on va y arriver. On n'a pas l'expérience.

  • Speaker #1

    Et juste après, ils ouvrent les portes pour aller se diriger sous l'arche de départ. Et là, ça se met à pousser quelque chose de terrible. et là on est tous à se tenir pareil bras dessus, bras dessous pour pas se perdre et puis là l'ambiance de Saint-Pierre qui monte avec l'impression d'être des stars de rock quoi, il y a des milliers de personnes qui hurlent, qui crient,

  • Speaker #2

    et on va jusqu'à cette fameuse ligne de départ, sous la pression des 2700 coureurs qui sont derrière

  • Speaker #1

    Et là, il y a le feu d'artifice qui éclate au-dessus du port de Saint-Pierre. Donc vous, vous deviez l'avoir dans le dos. On traverse Saint-Pierre, mais c'est l'ambiance, l'euphorie, les tam-tams, les tambours, les familles, tout le monde. Donc c'est un moment d'émotion vraiment très fort pour moi. Et là, on arrive dans les champs de canne à sucre. Il y a de la poussière parce qu'ils ont du coup... couper la canne sur un terrain sec. Et moi, j'ai le souvenir de mal respirer parce qu'il y a de la poussière. Et il y a la lune qui est en face et les étoiles. Et je me dis, là, tu vas profiter. Mon gars, là, t'es là, t'as fait l'entraînement, t'as fait 8 000 bornes et là, tu profites. Et donc, le stress, il est parti là.

  • Speaker #2

    Personnellement, j'ai greffé mon frère au groupe. Mon frère, c'est le local de l'étape. ça fait un an et demi qu'il est sur l'île de la Réunion et ça a... peu motivé aussi mon inscription à cette course là et j'avais prévu de faire la course avec lui et là il ya le fameux coup de départ je suis bien et là mon frère il est pas bien quoi et là dès le premier kilomètre il me dit je me sens fatigué et je vois tout de suite qu'on perd des places quoi je reste à côté de lui faut que je sois super attentif parce que on se fait doubler dans tous les sens il est vraiment fatigué il transpire dès le début quoi À ce moment-là, déjà, je me dis que ça va être dur. Et il me fait, vas-y, pars, je vais attendre Gaëtan. Je sais très bien qu'il ne va pas attendre Gaëtan. C'est très bien qu'il va abandonner. C'est ce qu'il fera au 25e kilomètre, le soir vers mon arrivée quasiment. Et là, je pars. Sauf qu'à ce moment-là, on n'est plus dans les 200 premiers comme au moment du départ. On avait passé 4 heures quand même dans le sas. Arriver de bonne heure, à se placer pour éviter les bouchons, pour être bien positionné. Et là, on se retrouve millième. Le premier ravitaillement, il est au 15e. C'est juste après ce ravitaillement-là, on sait que ça bouchonne parce qu'on arrive sur un sentier, un single. Il y a quelques passages techniques et ça commence à bouchonner. Ça marche, ça s'arrête. Je double quand c'est possible, mais ce n'est pas souvent possible. Au 26e kilomètre, il y a un ravitaillement, Notre-Dame-de-la-Paix. Et là, je vois Nico.

  • Speaker #3

    Moi, super content parce que je suis devant Damien. Je suis champion du monde. Je pouvais m'arrêter, c'est bon, j'avais fait ma course. Damien, c'est le mec qui te dit au revoir dès le début. Et donc là, ce n'était pas normal. Il y avait quelque chose qui clochait. Et de le voir arriver comme ça au Ravito, finalement, ça m'a rassuré et m'a fait plaisir. Même si pour ton frère, j'étais forcément déçu. Et là, je lui dis, vas-y maintenant, fais ta course, t'es bien. Parce que bien sûr, Damien, il aime bien partager la course avec les gens. Et il me dit, c'est sympa parce que je vous vois tous ensemble. Effectivement, on était, depuis le début de la course, j'étais avec Jérémy, j'étais avec Jean-Luc, avec Gildas. Et puis là, Damien nous retrouve et il nous dit, je courrais bien avec vous. Ça a l'air d'être sympa. Et là, je lui dis, je me souviens de ces mots, je lui dis, écoute Damien, c'est super sympa, mais fais ta course. Cette course, elle est pour toi. Éclate-toi, là t'as l'air super bien et vas-y échappe-toi.

  • Speaker #2

    Là tu vois on est au 26ème kilomètre, on fait quelques kilomètres ensemble avec Jérémy et Nicolas. Et là il commence à faire froid, on avait Gildas qui était censé nous rattraper, on l'appelle, on s'habille. Nicolas ne profite pas des ravitaillements pour se changer, donc il préfère faire ça après. Il perd du temps au ravitaillement et après il perd du temps à s'habiller.

  • Speaker #3

    Je me fais charrier sur les ravitaux parce que je passe trop de temps. Et là en l'occurrence, je n'avais pas senti le froid arriver au ravitaux où j'ai retrouvé Damien. Et en sortant du ravitaux, le froid est arrivé et je me suis dit que je n'étais pas assez couvert pour la nuit. Et donc j'en ai profité pour me changer au bord de la route. C'était l'occasion aussi de tous se regrouper. Puis une fois habillé plus chaudement, là on est parti.

  • Speaker #1

    Et on part dans une montée pour rejoindre Colnay-de-Boeuf. Et là, il y a des sapins. Mais des sapins, je me dis, mais c'est pas possible, j'ai l'impression d'être dans les Alpes. Et il y a du gel au sol. Et c'est parti comme ça, dans la nuit, sous la lune et tout. Et c'est tellement beau que dans les sapins, à un moment, je me dis, il y a la pleine lune, j'éteins ma frontale. Et là, je suis dans le noir et je me dis, mais c'est magnifique. C'est des moments comme ça que je suis venu chercher et c'est pour ça que j'aime le trail. Et là, ça dure, je ne sais pas, peut-être une heure comme ça. Et puis après, on voit l'aube du jour qui commence à arriver. Et là, j'arrive au Colnay de Bœuf et là, il y a du vent et il fait un froid de canard. Le ravitaillement est là et je me dis, là, si tu t'arrêtes, tu vas geler sur place. Donc j'arrive, je prends un thé, je bois, le soleil se lève. et il y a la beauté de l'île qui s'offre à nous, et il y a une vue sur le piton des neiges là, qui est extraordinaire, et c'est un moment, on parle de trail comme l'évasion, l'aventure, et c'est des moments comme ça. Moi c'est ce qui m'a marqué jusqu'à la descente de Marabout, où là il s'est passé une belle surprise.

  • Speaker #3

    Et là, on arrive à Marabout et il y a une belle surprise qui nous attend. J'étais avec Jean-Luc et Jérémy, on courait à trois, on était bien. Il y a Jean-Luc, il voit une banderole avec le nom de notre marque, notre chaîne. Il me dit, mais c'est bizarre cette banderole quand même en plein milieu de la Réunion. Et puis nous, un peu naïvement, on dit, ce nom, c'est que peut-être il y a des gens qui ont voulu l'identifier ou qui sont supporters, etc. Et là, quelques mètres après, 200-300 mètres après, on voit un bonhomme sous une grosse doudoune avec une capuche. Et là, on découvre notre leader qui était venu nous rendre visite, nous supporter. Alors, ce n'était pas du tout prévu. Entre la nuit passée, le soleil qui se lève, les belles couleurs, je crois qu'émotionnellement, d'avoir en plus son leader qui débarque pour nous supporter, là, on était au summum. Donc génial, là, on était vraiment... dans ce qu'on pouvait rêver de mieux pour cette course parce qu'on était ensemble, on avançait bien et en plus on avait des belles surprises.

  • Speaker #2

    Alors Thierry, comment tu te sens ?

  • Speaker #3

    Ah putain,

  • Speaker #2

    on dit qu'est-ce que tu fais ? Eh ben je suis nul.

  • Speaker #3

    Comment ça se passe les gars ?

  • Speaker #1

    C'est la fin !

  • Speaker #2

    C'est la fin !

  • Speaker #1

    C'est la fin !

  • Speaker #2

    C'est moi la banderole ! Et puis, je suis à l'approche de Marabout, 49e kilomètre. Et là, je croise un coureur du relais, il me double. Et puis, il me dit, t'es parti sur des bases de combien ? Je fais, je ne sais pas, j'avais prévu de faire 42, 44 heures avec mon frère. Et puis, il me fait faire gaffe parce que l'année dernière, j'ai fait la diag. Et à cette heure-là, j'étais dans les mêmes temps de passage que toi et j'ai mis 33 heures. Moi, 33 heures, ce n'est pas du tout ce que j'avais. imaginer, je m'en sentais déjà pas capable parce que j'ai pas l'expérience quoi je sais pas si je vais aller au bout ouais je suis bien mais jusqu'où ça va durer quoi il y aura bien une panne de carburant tôt ou tard quoi Je continue à avancer, je suis bien, j'avance à mon rythme sans être en sur-régime. Et puis là, Marabout, effectivement, c'est le moment magique. Moi, je garde cette image. Tu as une terre qui est rouge au sol, à côté de ce chemin de couleur ocre, tu as l'herbe verte couverte de gel. Et cette lumière de 5h30 du matin, c'est juste magique. C'est une image, tu prends plaisir à être là. Tu prends conscience de la chance que tu as. T'es pas dans la course, t'es dans une aventure, t'es dans l'exploration, t'es dans la découverte. C'est juste magique. Tu viens un moment et tu profites. Peu importe ce qui va arriver, t'as vécu ce moment-là. Ce lever de soleil, je le garde en mémoire, je l'emmène avec moi. Donc je continue dans Marabout et Marabout, ça porte bien son nom. Parce qu'on met les pieds dans des mares, c'est dégueulasse. Tu te charges et tu as l'impression de faire une épreuve de Koh Lanta. Ce n'est pas possible. Et puis après, tu arrives sur une descente, la descente de la mort, la descente de Kotok Air Vegan. J'en avais entendu parler, mais je ne l'imaginais pas comme ça. C'est super vertical et tu dois descendre.

  • Speaker #3

    C'est terrible parce que dans la course, tu entends les commentaires des autres coureurs. Ils connaissent ce parcours. Et donc là, ils disent, là, on va arriver sur la descente de Kerwegan. Il y en a un qui dit, ah oui, c'est la descente technique. Et là, il y a le mec qui dit, c'est pas une descente technique, c'est une descente à la con. Et là, toi, tu te dis, mais qu'est-ce qui m'attend ?

  • Speaker #2

    Puis en fait, là, t'es qu'au 55e kilomètre, 60e, tu descends un escalier qui est super raide. Même une échelle, tu la mets moins verticale que ce sentier-là ne descend. Et t'es tôt dans la course. tu te dis j'ai envie d'économiser mes cuisses parce que je sais pas jusqu'où elles vont me supporter et quand on arrive en bas on se retourne avec

  • Speaker #3

    Jérémy et Jean-Luc et on regarde le chemin qu'on vient de parcourir cette descente impressionnante et là on dit on l'a fait c'est sûr qu'on a fait ça et c'est déjà impressionnant donc là on arrive à ce moment là moi en l'occurrence j'avais déjà mal depuis le cinquième kilomètre douleur à la cheville que j'avais ressenti depuis le le week-end de préparation. J'avais essayé de me faire soigner cette douleur les quelques semaines avant la course, mais depuis le départ, cette douleur était présente. Au fur et à mesure des kilomètres, quand tes muscles sont chauds, etc., tu ne le sens plus trop. Et puis j'ai commencé à avoir une douleur au quadriceps. Je pense que c'est le fait de compenser. Et là, j'ai senti que ce n'était pas très bon. Et là arrive le ravito. Donc là, c'est le ravito, le premier gros ravito de première base de vie à Sillaos. C'est là qu'on peut effectivement se changer, se poser un peu, on a notre sac d'allègement qui arrive, etc. Et là je dis, je suis bien, mais j'ai cette douleur, j'ai besoin de me faire masser parce que, en l'occurrence, je veux essayer de soulager cette douleur.

  • Speaker #0

    Les kinés me disent que ça fait un peu mal, mais je sens que ça ne passe pas et en même temps j'ai envie de repartir. Et là je repars avec l'espoir de pouvoir continuer et que la douleur se passe. Je n'ai pas une grosse expérience en trail, mais ça peut arriver, une douleur peut arriver et peut partir aussi vite. Donc je me dis que je vais me remettre à courir et ça va peut-être se passer. Sauf que ça ne s'est pas passé. Rapidement j'ai senti que dans les descentes comme dans les montées, ça allait être compliqué. Et là, le chemin de croix a débuté. Donc là, on est au cœur de la course, Mafate, c'est la jungle. C'est l'endroit où on ne peut pas accéder en voiture ou par d'autres moyens de transport plutôt classiques. Il n'y a que l'hélico qui peut y aller. Jérémy m'avait dit, si tu entres dans Mafate, tu ne peux plus en sortir facilement, donc tu es parti pour 20-24 heures de course. L'inquiétude grandit parce que je me dis, j'ai mal, je ne suis pas bien. Je ne sais pas comment ça va se passer, comment je vais en sortir surtout. Et puis j'y suis allé quand même, avec des conseils, des encouragements, des motivations à droite à gauche. Puis moi surtout l'envie de ne pas abandonner, parce que quand tu as fait tout ce chemin pour arriver sur cette belle île, ce n'est pas pour te dire que tu vas t'arrêter au 60ème. Je me suis dit tant pis, je vais y aller, je vais rentrer dans ma fat. Donc avant de rentrer dans ma fat, il y a déjà cette première montée qui s'appelle Taïbit.

  • Speaker #1

    Le fameux col du Taïbit.

  • Speaker #0

    Le fameux col du Taïbit. Et là, ça a été déjà la première épreuve. Difficile de monter. Finalement, je poussais qu'avec la jambe droite. Et en descente, c'est pareil, je ne descendais que sur une jambe. Donc ça devenait compliqué. Donc là, on arrive début de nuit. 19h, 19h30 de mémoire sur le ravito de Marla. Il commençait à faire froid. Je n'étais pas très bien et pas très serein. Le fait de passer la nuit comme ça dans la jungle. Je me pose, je me pose une demi-heure. Je me pose des questions aussi. parce que je vois le médecin qui me dit si tu arrêtes, il faut que tu fasses le chemin inverse c'est à dire que tu repartes vers Sillaos ou alors que tu trouves un moyen de te faire emmener c'était au niveau des Col des Beux et là c'était à 10 km 10-15 km après et puis il était hors de question que je fasse demi-tour parce que quand t'as passé des difficultés t'as surtout pas envie de les faire en sens inverse, c'était comme si tu effaçais tout donc je dis je continue ... Et là, entre temps, j'ai une amie à la réunion qui m'avait dit, de toute façon, avant la course, si t'arrives quoi que ce soit, t'hésites pas, tu m'appelles, etc. On viendra te chercher. Et donc, elle était avec son mari. Et là, je lui dis, écoute, j'en peux plus, je suis coincé, j'ai très mal. Je pense que je pourrais pas continuer parce que je prends plus plaisir à avancer parce que c'était vraiment très douloureux. Je pense que je vais arrêter. J'ai donné mon dossard, ça ça a été dur. J'ai donné mon dossard, j'ai dégrafé moi-même mon dossard pour le donner à un coureur. Et là, psychologiquement, ça a été dur. Parce que ça y est, c'était fait. À un moment donné, je me suis posé la question. Est-ce que je cours après pour rechercher mon dossard ? Et là, il y a plein de choses qui passent par la tête. C'est dur. Je me souviens toujours des mots d'Eric, qui est un collègue qui a fait le coup de trail. il y a beaucoup d'expérience dans le trail, il m'a écrit après mon abandon, il m'a dit tu sais Nico l'abandon c'est aussi un apprentissage de la course et on finit des courses c'est super mais apprendre à abandonner c'est important aussi parce que c'est une épreuve difficile

  • Speaker #1

    Moi, c'est le seul moment de grand doute que j'ai eu dans la course. Donc, c'est dans la montée et je fais une erreur de débutant, mais vraiment de débutant, c'est-à-dire que je commence à discuter avec des gars et là, on s'entend super bien. On est trois, on discute, on raconte nos vies, nos enfants, la vie. Le trail, c'est comme ça, on partage. Et en fait, ils vont plus vite que moi. Et je ne me rends pas compte, mais j'accélère. Et donc, je reste peut-être, je ne sais pas, trois quarts d'heure, une heure avec eux. Et la montée arrive et là je suis sec parce que j'ai accéléré sans me rendre compte. Et donc là j'ai plus de jus et je m'arrête. Donc je m'assieds sur une pierre, je prends une barre de protéines ou de je sais pas quoi. Et là je suis au plus bas quoi, j'ai presque, je me dis mais j'y arriverai pas quoi. Et là il y a une créole qui arrive derrière qui avait sans doute beaucoup d'expérience sur la diagonale. Elle s'arrête, elle s'assied à côté de moi, elle me regarde, elle me fait « C'est bon, tu vas y arriver » . Et elle me dit… Tipa tipa, tu finiras à la redoute. Et pour eux, c'est en clair, si tu vas petit à petit, tu vas y arriver. Et du coup, ça m'a marqué. Donc, je suis resté dix minutes, un quart d'heure sur mon rocher et je suis reparti comme ça, comme un blessé. Et puis, c'est ça qui est dingue entre elles. C'est que tu peux être au plus bas pendant un moment et puis ça va repartir. Et c'est reparti. Et là, après, c'est la... la fameuse descente infernale vers Sillaos, que j'ai faite doucement, parce que moi, alors Damien, il a couru dans cette descente, moi, je la trouvais tellement dangereuse. C'est-à-dire, tu cours, tu marches, tu cours, et puis tu vois les gars en dessous. Tu les vois, mais c'est droit, c'est un mur. Et là, tu descends vers Sillaos, et alors, il paraît de la base de vie de Sillaos, et moi, Sillaos, c'était, dans le conte que nous a raconté Jérémy, pour moi, Sillaos, c'était un coin de paradis, parce que... Tu peux te poser, tu peux te doucher, tu peux manger, tu peux te faire masser et tu repars. Et donc je suis arrivé à Sillaos, déjà, clac, ça s'est coché. Et j'ai pris mon temps, je suis allé me doucher à l'eau froide. J'ai mangé et il y avait une école de kiné de La Réunion. Et j'ai eu droit à deux filles et deux massages. Alors là, c'est le top. Et donc je me suis fait masser les mollets, les cuisses. Et après, j'ai rebut deux, trois verres. et c'est reparti.

  • Speaker #2

    Après la descente de Côte-aux-Coeurs vegan, on a l'impression de marcher sur la tête de ceux qui nous précèdent. Tu arrives effectivement à Sillaos et tu retrouves un autre coin de paradis. Par contre, tu retournes un peu à la civilisation. Tu as l'impression que c'est un des plus beaux villages fleuris de France. C'est magique. C'est une base de vie. Il fait bon y arriver. Tu es content. Moi, c'est un moment qui était important puisque là, je retrouve ma femme. qui est venu m'encourager. Mon portable, il est à chaise depuis le départ de la course. La batterie ne tient pas. Et là, elle me tend le sien et elle me montre tous les WhatsApp qu'il y a eu dans notre groupe de supporters et de coureurs. Et putain, ça te requinque. Moi, je suis bien à ce moment-là, mais tu prends une énergie folle à voir toute cette émulation. Alors déjà, tu as l'énergie parce que tu sais que les collègues, tu es obligé d'aller au bout parce que les collègues, ils vont aller au bout. Quoi qu'il arrive, tu ne peux pas lâcher. Si tu n'as pas un souci physique, tu vas au bout. Et de voir toute cette émulation qu'une course d'une telle ampleur génère parmi des personnes qui sont trailer ou pas du tout trailer. Ils ne connaissent rien à la course à pied, mais ils vivent l'événement avec toi. Et là, c'est juste magique. Tu as les frissons. Et par-dessus, il y a le message justement d'Olivier qui a fait la surprise aux collègues à Marabout et que moi j'ai loupé. Il avait fait une petite vidéo et je la capte à ce moment-là, au 65e kilomètre, là, à Sillaos, je vois la vidéo. Et c'est la goutte d'eau, quoi, t'as presque envie de pleurer. Et là, je me dis, c'est bon, il ne reste plus que 100 bornes, quoi. Je suis au 65e, il me reste 105, je suis bien, je continue. Par contre, tu sais qu'il y a peu de temps après, à l'horizon, il y a le Taïbit qui se pointe. Et je m'en fous, je suis bien. Sauf que dès les premières marches du Taïbit, plus si bien que ça. Et là, ça commence à devenir compliqué. Physiquement, je n'avance plus. J'ai l'impression d'aller moins vite que des randonneurs. Merde, qu'est-ce qui se passe ? Et puis quand tu bascules au col des Bœufs, tu es dans le brouillard, tu ne vois rien. Les conditions ne sont pas top. Tu as l'impression d'être en hiver. Tu n'as aucune visibilité. Je m'arrête au ravito suivant, je prends une soupe, etc. Et puis après, on arrive sur un terrain de jeu, moi, que j'apprécie plus particulièrement, puisqu'on arrive sur un sentier qui s'appelle le sentier scout. C'est comme un toboggan. J'ai l'impression d'être dans un parc d'attractions géant. C'est des up and down. Ça descend, ça monte un tout petit peu, c'est des coups de cul. Et puis, t'es en sous-bois et c'est super ludique. Pif, paf, à droite, à gauche. Et puis là, je recommence à trouver des sensations. Je prends de nouveau du plaisir en tout cas. J'avais tellement mal vécu cette montée du Taïbit que là je profite de Sentier Scout. Et puis il y a un moment sur Sentier Scout, tu débouches sur une crête, tu as le vide à gauche, tu as le vide à droite. Et par contre tu te projettes sur le cirque qui t'entoure et les massifs que tu as, les crêtes volcaniques que tu as devant toi qui sont recouvertes de verdure et qui sont juste magnifiques. J'arrive au pied de la deuxième grosse difficulté, c'est la montée du Maïdo. La montée du Maïdo, elle se fait en deux portions. Une portion de 600 mètres de dénivelé positif, un plat sur lequel on va trouver le ravitaillement de roches plates, et encore 800 mètres qui sont annoncés très terribles. Je me dis que je vais resubir. Et puis en fait, dans la première partie de 600 mètres, ça se passe bien. Et ça se passe tellement bien que là, à un moment, il y a un coureur qui m'interpelle et qui me dit « C'est toi Nils ? » « Nils ? Non, je ne connais pas Nils. » Parce qu'il y a deux gars qui étaient habillés comme toi et qui cherchaient un certain Nils. Et là, je comprends que je reviens sur Thierry et son frère. Et effectivement, juste avant le ravitaillement de Ausha, il reste 2 km avant le ravito, je retrouve Thierry et son frère qui sont là. Là, il nous reste 60-65 km. Et là, je demande à Thierry, ça vous dérange si je fais la course avec vous ? Et puis là, pas de problème. Et puis là, à partir de ce moment-là, on va suivre le parcours ensemble. Et ça sera un autre bon moment de la course. Avec Thierry et Olivier, on repart du Maïdo et on fait une longue descente qui nous paraît interminable. Mais par contre, ça y est, on est dans la cohésion et on fait tout ensemble. Il y en a un qui s'arrête pisser, tout le monde s'arrête pisser. On fait tout jusqu'au bout. On est déterminés à finir ensemble la course. Il reste 60 bornes, on sait que c'est encore long. Pour nous, 60 km, c'est un trail normal. Et on sait qu'il y a encore des difficultés qui arrivent. Et effectivement, il y aura des difficultés sur cette fin de parcours, puisqu'il y a des sentiers, je n'ai jamais vu des sentiers aussi techniques. Ce n'est même plus du trail, c'est entre l'alpinisme, le gymkanage. Ce qui est incroyable, c'est la lucidité qu'on a eue, je pense, tous les trois. On n'a jamais douté sur le fait qu'on irait au bout, et dans de plutôt bonnes conditions. Et c'est une surprise parce qu'on n'avait jamais passé autant de temps dehors, ni Thierry, ni Olivier, ni moi, donc on ne savait pas ce que ça allait donner. Et je pense que c'était encore une plus grosse surprise pour Olivier, qui lui, sur le dernier mois, il n'a pas pu s'entraîner, il était blessé. Donc faire 33 heures dans ces conditions, c'était juste magique. On a sur la fin du parcours, sur les 30 derniers kilomètres, moi c'est la première fois que j'ai la première notion de classement. On arrive au 132ème kilomètre et là, on nous scanne. sur la deuxième base de vie et 99, 100 et 102ème. Putain, top 100, Diag, un truc juste impensable quand on est parti l'avant-veille au soir. Là Thierry c'est un compétiteur donc Thierry c'est un taureau dans l'arène donc quand il voit le drapeau rouge, il fonce dedans quoi. Donc là, à partir de là, ça va devenir un peu plus dur pour nous et avec Olivier puisque... Thierry, dès qu'il voit une frontale, il va la chercher. Et puis nous, derrière, on ferme notre gueule et on colle. Et puis on essaye de le ralentir quand il y a besoin de le ralentir. On a tous mal aux pattes, mais Thierry, il a un mental de compétiteur qui fait qu'il va se faire encore plus mal que la douleur qu'il a à l'instant présent. Et puis là, on est en mode conquête. C'est fou parce qu'on est dans le top 100. 90, 87, 70 et on est en chasse. Il y a un dernier secteur pavé qui est super difficile. À côté, les pavés du Nord, c'est super roulant, même en roller. On a galéré, mais mentalement, on était quand même super déterminés. C'était dur de passer ce secteur en marchant. C'est dur à assumer. Et puis après, il y a un dernier coup de cul, une petite bosse. Il nous amène jusqu'à Colorado. Et à Colorado, tu es à 4,6 km de l'arrivée. Il fait super beau, parce qu'il doit être 6h30. Il nous reste trois quarts d'heure de descente, super technique, qu'on passe ensemble. Et là, c'est fou, parce qu'à ce moment-là, tu retrouves des jambes, mais les mêmes jambes que tu avais au départ de la course. Tu oublies tout. 4 km, c'est rien. Et là, tu te reprends à courir à des allures, tu fais des portions de descente à 14, 15, 16, c'est juste incroyable. Et tu sais que tu vas finir et que tu vas retrouver toute la famille et que tu vas avoir ce putain de t-shirt « J'ai survécu » avec la médaille de finisher.

  • Speaker #0

    Découverte de l'arrivée pour moi parce que je ne la connaissais pas. Et donc j'arrive dans ce stade, à 7h du matin, au stade de la Redoute, à Saint-Denis. Autant il y a beaucoup de spectateurs au départ. Mais cette heure du mat', c'était assez calme Et là on entend le commentateur commenter l'arrivée des coureurs et là on est 54ème, 55ème position. On entend les places et là je réalise que mon Dame il a fait une super perf et Thierry et son frère également. Dame en fait ça compense mon échec. C'est le fait que j'étais content pour lui, j'étais content de le voir arriver et je l'avais quitté. au 25e kilomètre en me disant vas-y fais ta course, éclate-toi, et il s'était éclaté. Et ça c'était chouette. Et donc on l'attend. Alors moi je suis un peu dans ma bulle, je suis encore un peu dans ma bulle finalement. Je me pose encore ces questions. Qu'est-ce que tu as fait ? Est-ce que tu as bien fait ? Est-ce que tu n'aurais pas pu faire autrement ? Voilà, tout ça passe dans ma tête. Et là j'entends l'arrivée de Damien. Superbe arrivée, ils arrivent en courant les trois, donc Damien et les deux frangins. Super beau. Belle émotion à l'arrivée, ils étaient frais, c'est ça qui était impressionnant. Ils avaient quand même passé 33 heures à courir et ils étaient encore frais. C'était magnifique, beau soleil du matin, c'était très chouette d'arriver et se vendre. Trois compétences qui nous arrivent ici à l'arrivée des premiers rangs dans le top 60 de cette année.

  • Speaker #2

    On arrive, il n'y a pas beaucoup de monde, mais le peu de personnes qui sont là, ça compte. Il y avait Nicolas, Aline, Olivier, mon frère, forcément. Ouais, quelle joie. Après, l'émotion de la ligne, elle est bizarre parce qu'on était tellement préparés, on savait qu'on allait y arriver. t'exploses pas de joie non plus, tu es soulagé d'en avoir fini. On est satisfait, mais il n'y a pas eu une euphorie, il n'y a pas de trempette ni tambour, ça reste mesuré. Je pense que c'est après que tu prends conscience de ce que tu as fait, ça reste finisher de la Diag, c'est un truc dont tu as rêvé et on l'a fait. Et ça, c'est la plus belle des satisfactions. J'étais content de passer la ligne avec Thierry et Olivier. La prochaine fois, je le ferai avec ma femme et mes enfants. Allez,

  • Speaker #1

    mon pitou ! Tu l'as fait ! Tu l'as fait ! Allez, mon Gigi !

  • Speaker #2

    Allez,

  • Speaker #1

    Gigi ! Ouais ! Donc moi, en fait, là... C'est complètement différent de Damien, c'est-à-dire que moi je ne suis pas un compétiteur dans l'âme. Moi je suis un hédoniste du trail, j'aime vivre l'émotion du trail. Et donc quand Damien, lui, il était de jour, moi j'étais de nuit, je suis loin derrière. Et Mafat, il l'a fait de jour, moi je l'ai fait de nuit. Et donc avant de rentrer dans Mafat, j'ai vu beaucoup de gens abandonner. Jérémy m'avait dit... Si tu rentres dans ma fat, tu finis. Et de voir tous ces gens qui abandonnaient, comme dans le livre que j'avais lu, parce qu'Antoine Guillon, il dit, les gens, ils hésitent à rentrer dans ma fat, un peu comme ce que disait Nico tout à l'heure, c'est-à-dire que ça va être dur. Et donc là, je suis en haut du col du Taïbit, et je me dis, tu l'as fini. Tu rentres, tu finis. Et là, j'avais l'œil du tigre, quoi. Le butique c'est qu'il n'y a plus rien qui va m'arrêter. Et là démarre la nuit, pour moi c'est une des plus belles nuits de ma vie. Le cirque de Mafate, c'est coupé de la civilisation. Il n'y a pas de route, il n'y a pas d'éclairage. Il n'y a rien. Il n'y a que de la nature sauvage et des gens. Et dans cette nuit-là, moi, j'ai fait un voyage presque mystique, dans le sens où c'est un voyage à la fois intérieur et physique. Parce que ça fait déjà la deuxième nuit où tu ne dors pas. Et tu passes par plein de choses, parce que ton cerveau, il est sous les étoiles, dans un endroit unique au monde. Et tu penses à des choses que tu as dans ta vie de tous les jours, tu n'as jamais le temps d'y penser, jamais. Ça, c'est des moments uniques et c'est pour ça que je fais du trail. C'est que le trail, c'est à la fois un sport où tu voyages intérieurement, tu vis des émotions avec les gens. Et cette nuit dans ma fat, c'est quelque chose d'incroyable de par le voyage intellectuel et spirituel que j'ai pu faire. À la sortie de Mafate, il faut en sortir, et là il y a ce fameux Maïdo. Et le Maïdo, moi je l'ai fait en plein cagnard. Et là, la montée des 800 mètres, il y avait Olivier qui est venu me chercher en haut. et quand t'arrives en haut t'es content parce qu'il fait 30 degrés, t'as la saharienne. Les gens t'acclament, t'arrives en haut. Moi, j'avais l'impression d'être, je ne sais pas, Cavendish sur le Tour de France. Et les gens, ils te poussent, ils t'appellent par ton prénom, parce qu'ils veulent le prénom sur le dossard, donc ils t'encouragent. Et t'arrives en haut du Maïdo, ça y est, j'y suis, je l'ai fait. Et après, t'arrives sur la descente. la plus douloureuse pour moi parce que j'avais mal aux pieds, j'avais les pieds qui avaient chauffé. J'ai eu la chance, parce que ma femme m'a fait une surprise avec mes enfants, c'est qu'ils arrivaient le jour J à La Réunion et ils ne m'avaient pas dit et ils sont venus m'attendre à Ilé-Savanna, donc en bas. Et là, quand je les ai vus, j'ai pleuré comme un bébé. C'est fort. Moi, le trail, ça me porte. Le fait de retrouver ma famille, ça m'a galvanisé et après Sur le gâteau, à la possession, c'est taré. Ils venaient de finir leur course et ils sont venus m'encourager comme si j'étais un athlète de haut niveau. J'avais l'impression d'être une Ferrari qui rentrait au stand. Et après, il y a l'aboutissement. Quand tu vois le panneau, la redoute, je descends, je descends et là, je vois un petit gamin en bas. Mon fils, il est là avec son portable, il fait la descente avec moi. Et là, c'est juste incroyable. Et là, c'est ce que disait Damien. Je me remets à courir à 12 à l'heure. Donc là, il y a mes filles qui arrivent, ma femme. On se prend tous dans les bras, on finit. Et là, j'arrive dans le stade de la redoute. Les loulous, ils sont encore là. Donc Damien, Nico, Jérémy, Olivier, leurs femmes et tout, qui sont là. L'arrivée, c'est la visualisation mentale. d'un truc que tu as juste rêvé dans ta vie. Et là, tu te dis, mon rêve, je l'ai fait.

  • Speaker #0

    Émotion, partage, joie, déception. Vous l'avez compris, la Diagonale des Fous, ce n'est pas qu'une épreuve sportive, mais c'est aussi une véritable aventure humaine. J'espère que ce podcast vous a plu. N'hésitez pas à le partager si c'est le cas. Et puis moi, je vous dis à bientôt,

  • Speaker #2

    même à très vite,

  • Speaker #0

    pour d'autres belles histoires de sportifs.

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Description

Une idée lancée lors d’une soirée “rougaille-saucisse” entre collègues : et si on tentait La Diagonale des Fous, trail mythique. Des discussions, quelques minutes de réflexion et une ambition posée pour Damien, Gaëtan et Nicolas : terminer cet ultra-trail de 170 km, dont 10 000 m de dénivelé positif, à travers l’île de la Réunion ! Considérée comme l'une des courses nature les plus difficiles au monde, La Diagonale des Fous nécessite des mois de préparation physique et mentale pour espérer franchir la ligne d'arrivée et se voir récompensé du Graal : un tee-shirt floqué d'une phrase qui en dit long, "J'ai survécu". Plus qu’un trail, La Diagonale des Fous est un véritable voyage intérieur où il faut puiser dans ses ressources, aller chercher la volonté au plus profond de soi, dépasser ses limites, s’accepter et se faire confiance. Grâce à ces trois “Fous”, vous allez vivre l’expérience émotionnelle incroyable d’un tel défi… Préparez-vous, prenez place direction : La Réunion. Bon voyage ! 


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Découvrez également Conseil Sport, le média dont l'objectif est de vous encourager à vous (re)mettre au sport et de vous aider à progresser dans votre pratique.


On nous le dit assez souvent : pratiquer une activité physique, c'est bon pour la santé. Ce qu'on nous dit moins c'est comment on s'y prend ? Par où on commence ? Plus que de vous voir accomplir un exploit sportif, notre plus grande fierté serait de vous faire aimer le sport, durablement. Parce que c'est ça, le secret de la motivation : trouver l'activité qui vous apporte la dose de joie qu'il vous faut dans votre quotidien.


Producteur : Pipo et Lola


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour et bienvenue dans ce podcast Histoire de Sportifs. On se retrouve aujourd'hui pour un épisode hors série avec, une fois n'est pas coutume, trois sportifs. Gaëtan, Damien et Nicolas, des ultra-trailers qui se connaissent bien puisqu'ils travaillent ensemble chez Decathlon. C'est d'ailleurs lors d'une soirée entre collègues qu'ils ont décidé de courir la Diagonale des Fous. Une course nature qui porte bien son nom, 166 km pour 9611 mètres de dénivelé positif à travers l'île de la Réunion. Alors dans cet épisode, ils vont nous raconter cette aventure à la fois solitaire et collective, vous le verrez. Les doutes pendant les préparations, l'ambiance locale et puis la course bien sûr, avec un abandon pour l'un d'entre eux. On retrouve le récit de Gaëtan, Damien et Nicolas juste après l'intro. Bon podcast !

  • Speaker #1

    Je ne sais même pas comment je vais te dire.

  • Speaker #2

    C'était assez fort en émotions.

  • Speaker #1

    Moi j'ai réussi à rester dans le tempo. Moi c'est inoubliable.

  • Speaker #3

    Courir, c'est dur.

  • Speaker #2

    Tu prends une énergie folle.

  • Speaker #1

    Le style c'est comme ça, on partage. C'est fort.

  • Speaker #2

    On l'a fait. C'est mon aventure.

  • Speaker #1

    Alors bonjour à tous, moi c'est Gaëtan, je suis chef de produit au trail running chez Decathlon. J'ai participé à la Diagonale des Fous cette année. C'était un défi qui, quelques années plus tôt, m'aurait paru complètement invraisemblable.

  • Speaker #2

    Bonjour à tous, je m'appelle Damien, je suis responsable d'approvisionnement chez Calenji Trail. Ça fait à peu près huit ans que je fais du trail et je suis plutôt issu du monde du foot. Je suis passé par d'autres activités, karaté, VTT, vélo de route, triathlon. Et naturellement, la course à pied pour finir. Entre la route et le trail, j'ai vite fait mon choix. On s'est retrouvé à la Diague, qui me paraissait une montagne quand j'ai commencé la course à pied. On se dit qu'on ne va jamais réussir à franchir une distance pareille. C'est pas humain et finalement, on l'a fait.

  • Speaker #3

    Bonjour, moi c'est Nicolas. J'ai la chance de travailler au trail. qui est mon sport de prédilection. Puis ingénieur produit et ingénieur etc. Je me suis mis au trail après la course à pied, sur route, parce que j'avais envie justement de découvrir les chemins autour de moi. Et puis au fur et à mesure, on fait 20 kilomètres, on en fait 30, 40. Et puis un beau jour, il y a les collègues qui parlent de la diagonale des fous. C'est un nom finalement qui se traduit bien, puisque les fous partent comme ça au mois de décembre en se disant, allez on s'inscrit. et je me suis laissé embarquer. C'est bien le terme parce que c'était à peine réfléchi en fait. C'est après qu'on y réfléchit, c'est après qu'on en prend conscience.

  • Speaker #1

    La participation à la Diagonale c'est un peu particulier parce que c'était un projet plutôt familial puisqu'il y a 20 ans j'ai connu ma femme à l'île de la Réunion où j'étais militaire en service national. Et on avait prévu pour nos 20 ans de rencontre de partir à La Réunion. Et je m'étais dit, si je peux courir, c'est bien. Et puis, il y a eu un petit gros péto qui s'est créé au trail. En fait, là, on est trois autour de la table, mais on était sept. Et puis, il y a eu une soirée qu'on a appelée soirée rougail-saucisse chez notre directeur financier, Jérémy. Pendant cette soirée, il en parlait de la Diagonale des Fous. Moi, j'avais plutôt prévu de faire une petite course. Et puis la soirée a avancé, la soirée a avancé, on a bu quelques bières et puis ils m'ont dit mais tu vas pas faire une petite course, tu vas venir avec nous. Et puis à la fin de la soirée j'ai dit bon bah je vous suis. Et donc c'est comme ça que ça a commencé, partir petit et finir un peu comme un fou.

  • Speaker #2

    C'est vrai que ça a commencé sur cette soirée rougail saucisse. Moi j'ai des vieux souvenirs, je sais plus à quel endroit on était, on a déjà dû échanger dessus. On se disait en 2018, dans deux ans... On ferait bien la Diag, et puis il n'y avait rien de concret pendant quasiment un an. Et puis c'est vrai que ce soir-là, c'était le point de départ. On y va. Ça devenait concret en fait. Une simple idée qu'on ne pensait même pas réaliser. Pour moi, je pensais que c'était encore trop tôt. C'était un doux rêve.

  • Speaker #1

    Moi, c'est pareil. Moi, je m'étais inscrit au Templier, le Grand Trail Templier, qui est une course de 78 kilomètres. Et je n'avais pas imaginé que l'année suivante, je partirais sur un ultra trail.

  • Speaker #3

    Chaque année, on planifie un peu nos trails de l'année. Et je pense que ça arrive à ce moment-là à peu près. On était arrivé à la fin de l'année, on se demandait ce qu'on allait faire l'année suivante. Effectivement, on avait fait des courses de 40 et 70 kilomètres. Et puis Jérémy, qui lui l'a déjà fait, nous en a parlé. Il avait envie de le refaire et donc il nous a emmené avec lui. L'idée a commencé à germer, mais ça va vraiment très vite en fait. On se laisse vraiment embarquer, on connaît à peine la course, on ne sait même pas quel est le dénivelé, par où ça va passer, etc. Et puis on s'inscrit et on se dit que ce n'est pas grave, je découvrirai un peu la difficulté au fur et à mesure. En tout cas, pour moi, ça a été ça.

  • Speaker #2

    Alors la préparation pour la Diag, j'ai envie de dire que mentalement déjà, tu commences la préparation le soir du rougail saucisse quand même. C'est là où tu prends conscience que tu t'engages sur quelque chose que tu n'as jamais fait, tu ne sais même pas si tu en es capable. Mentalement, il faut se faire à l'idée que tu vas devoir courir 170 bornes avec 10 000 mètres de dénivelé alors que tu ne l'as jamais fait. On a fait en moyenne, on était sur des formats... Ils peuvent paraître longs, 70-80 kilomètres pour le max. Et là, passer à plus du double, ça paraissait insurmontable. Donc déjà, il faut se faire à l'idée qu'on va réaliser ça. Et on ne sait pas comment on va y arriver avec l'entraînement qu'on réalise au quotidien autour du lac du Véron.

  • Speaker #1

    Alors moi, de mon côté, la préparation, j'ai été très littéraire puisque j'ai acheté pas mal de livres. Et du coup, j'avais quelques bouquins sur ma table de nuit. Et plus je les lisais, plus la pression montait. Parce que chaque témoignage montre, entre guillemets, l'intensité de la préparation et de l'entraînement, à la fois physique et mental. Et je pense que c'est les livres, moi, qui m'ont fait comprendre dans quoi je m'étais engagé.

  • Speaker #3

    La préparation aussi, elle passe par des courses intermédiaires. C'est-à-dire que si on devait faire un entraînement pendant six mois, ce serait compliqué, il faut se motiver tous les jours. En fait, d'avoir des petites courses intermédiaires, ça permet aussi de se motiver pour le mois suivant, dans trois mois. Et ça, forcément, on s'y implique davantage. Il y a beaucoup de moments passés ensemble pendant les entraînements, c'est ce qui nous motive aussi. On a aussi les groupes WhatsApp, où on est tous connectés, et la veille, c'est des messages, c'est « moi j'y vais demain matin à telle heure, qui va avec moi ? » Et je pense que sans ça, tout seul dans son coin, c'est pas très compliqué. Donc on se retrouvait au Mont-Saint-Aubert, on se retrouvait même au lac du Héron, et l'étape ultime, parce qu'on est dans le nord de la France, c'était dans les Terils. C'était vraiment notre challenge. Si on allait au Terril cette semaine, c'était hyper important. Parce que c'était beaucoup de dénive. On va avoir mal au canne pendant deux heures. Et généralement, il ne faisait pas hyper beau. Donc, ce n'était pas la grosse motivation non plus.

  • Speaker #2

    Donc, en fait, on a tous fait des préparations assez différentes dans un premier temps. C'est-à-dire dans les six premiers mois après l'inscription. On a pris notre package. En fait, c'était plus de l'entretien avec comme objectif, on rallongeait un peu les distances le week-end, mais il n'y avait pas de préparation très structurée, je dirais. Puis, on a quand même mis un événement, le 90 kilomètres du Mont Blanc, comme étape intermédiaire pour la préparation de cette diagonale. On s'est dit, on va faire quand même une distance relativement importante avec un bon dénivelé. Et moi, je me souviens, quand on est sorti de cet événement-là, on s'est dit, on n'est pas prêt. Et là, ça a été un révélateur pour dire qu'on a super mal au cuisse quand même. Il faudrait qu'on s'entraîne peut-être différemment. Et c'est à partir de là qu'on a commencé à mettre le terril en jeu. Je me rappelle la première fois, en deux heures ou trois heures de séance, on attrape entre 1000, 1500 mètres ou 2000 mètres de dénivelé. On fait tout en marchant, sauf les descentes sur lesquelles on trottine parce qu'on est emporté par notre élan tellement c'est raide. Et puis après, on a mal pendant cinq, six jours où on ne peut plus courir du tout. Ça, c'est la première séance. Et puis, on y retourne le week-end suivant. On s'aperçoit que ça va mieux et qu'on récupère plus vite. On se dit qu'on l'intègre de manière régulière pour se familiariser. L'idée, c'était de se forger un peu les muscles des cuisses.

  • Speaker #3

    C'est tout à fait ça. Pour revenir un peu sur la préparation, elle était double. Comme tout sportif et tout trailer, elle était de voir jusqu'où j'étais capable d'aller. Toujours mieux se préparer, mieux s'entraîner, etc. pour aller toujours plus loin. Et puis j'avais un double enjeu, c'était aussi une préparation et une bataille contre la maladie, parce que deux mois après m'être inscrit à la Diag, j'ai déclaré un diabète. Et du coup, j'ai arrêté de courir pendant un mois. Et ma volonté derrière, c'était de pouvoir continuer à tenir tous mes challenges de l'année avec cette maladie-là. Et donc chaque étape, chaque course était un nouveau challenge pour moi.

  • Speaker #1

    Après, moi, dans la préparation, je me suis fait une frayeur. c'est que je me suis inscrit à une course parce que je ne pouvais pas faire le 90 km du Mont-Blanc. Je me suis inscrit à la Maxi Race, qui est une course qui a lieu fin mai à Annecy. Je partais un peu blessé, puisque j'avais une douleur au tendon d'Achille que j'essayais de traiter avec notre ostéo commun, qui est Étienne, et quelqu'un qui a compté aussi dans la prépa de l'équipe. Au 50e kilomètre, j'abandonne. Et alors là, le moral, à zéro. À zéro parce que 50 km, l'objectif, il est à 170. Je suis en vrac. Comment ça va faire ? Et du coup, ça m'a mis comme un aiguillon pour dire, bon, maintenant, déjà, ces tendons, il va falloir bien les remettre. Et puis après, il va falloir vraiment que tu t'y mettes progressivement pour aller chercher cette course de fou en octobre.

  • Speaker #2

    Le Slash, c'est un moment fondateur pour l'événement, puisqu'on ne s'imaginait pas partir sur la diagonale sans avoir fait le traditionnel week-end shock. Le week-end shock, c'est qu'on cumule sur deux jours et demi, trois jours. Un nombre de kilomètres et de dénivelé qui a pour but de nous éprouver physiquement, voir notre capacité de récupération puisqu'on enchaîne trois jours d'affilée. Et puis ça a pour but de tester aussi tout le matériel, voir si on ne va pas avoir un petit pépin avec le sac à dos, avec la chaussure, comment nos pieds vont réagir. Gérer l'alimentation aussi c'est important parce qu'on est tous différents face à ça. On est tous plus ou moins confrontés à des problèmes de digestion pendant une course, c'est pas évident. Le week-end choc, il commence avant le week-end choc aussi. Il commence sur une soirée de préparation du week-end choc. On fait le tracé des parcours, on se réunit autour d'une bière bourbon. On se préparait pour la diag, forcément, on était en couleur locale, après le rougail et saucisse. Et là, on est avec les ordinateurs, les montres, les cartes, et on décide de ce qu'on va faire pendant ces trois jours. Vendredi matin, on fait ça. L'après-midi, on fait une autre. Le samedi, une grosse séance. Et le dimanche, on se recolle encore deux séances. Et au final, on fait le total. Alors, ça fait combien, les gars ? Et puis là, on dit 100 kilomètres. Waouh, c'est quand même épais. Tu te dis, en trois jours, tu vas faire 100 bornes avec 10 000. Sur la diag, il va t'en rester 70. Là, tu n'es pas trop serein. Et tu te dis, est-ce que je vais être capable déjà de passer ce premier créneau ? Et de bien le passer, c'est un mois avant l'événement. Et puis derrière, de récupérer, d'enchaîner mes entraînements. Parce qu'il ne faut pas s'arrêter, c'est qu'un week-end shock, c'est que de la prépa. Après, il reste trois semaines pleine balle. Mentalement, il faut s'y faire.

  • Speaker #1

    Et donc là, dans l'équipe, il y a une espèce d'alchimie, parce qu'on a tous des rythmes un peu différents, mais on a le même objectif. Et ça, ça joue énormément, parce que moi, je suis le plus lent de la bande. Devant, ça galope. et j'avais une grosse appréhension sur est-ce que... pendant ce week-end choc, je vais tenir avec les collègues, avec les copains. Et en fait, on a eu tous un espèce de groupe très uni et ça a très bien fonctionné. Pour moi, c'est inoubliable. Et dans ma tête, c'était si ça se passe mal là, qu'est-ce que je fais ?

  • Speaker #0

    Nous sommes donc le 17 octobre 2019, c'est le jour J. 2863 participants sont donc au départ de cette Diagonale des Fous. Et parmi eux, on retrouve nos trois fous à nous, Gaëtan, Damien et Nicolas.

  • Speaker #1

    Alors on est arrivé le lundi 14 octobre à La Réunion. Il y a un truc qui est génial, c'est que tu arrives à l'aéroport Roland-Garros, et puis tu as « Bienvenue à Azote Trailer » , et puis tu as un comité d'accueil avec l'équipe d'organisation de la Diagonale des Fous qui te remet un petit package avec des danseuses créoles, tu bois du rhum. Il y a une espèce d'ébullition autour de cet événement. Donc à la télé sur Réunion 1ère, il y a diagonale J-1, J-3, J-2, J-1, donc la pression monte. Bienvenue pour cette 27e édition du VORED à tous ceux qui viennent de l'extérieur ! Quand on arrive à Saint-Pierre, ce qui est particulier, c'est qu'il fait un peu froid, il y a du vent, et le départ, il est en bord de mer. dans une espèce d'esplanade. Et là, on comprend tout de suite, au volume de l'organisation, que c'est quelque chose d'énorme comme le Tour de France. Parce que tout est bloqué, il y a un concert de musique, il y a des gens partout, et c'est la cohue pour rentrer dans le sas.

  • Speaker #3

    Le départ se fait à 22h, on arrive à 18h. Alors 18h, effectivement, il y a du vent, il fait un peu frais, la nuit tombe. plus du tout les mêmes conditions que pendant la journée. Donc là, il faut commencer à se couvrir. Là, on arrive sur un de grands parkings, parkings plus sireux. On rentre dans une zone de contrôle, où on présente nos sacs. Là, on a le matériel obligatoire qui est contrôlé par des bénévoles. Donc là, on sent un peu la pression monter parce que on se dit ça y est, on y est. On se regarde un peu tous, on se dit maintenant, on ne peut plus reculer. Puis on passe au premier sas, on regarde derrière nous, on dit ça y est, maintenant On est entré, on ne peut plus en sortir et c'est maintenant que ça commence. On rentre un peu dans notre bulle, mais comme on est à 7-8, on a envie encore de partager ces moments-là. On a envie de revivre encore tous les moments passés parce qu'on se raconte encore notre préparation, etc. On se remémore un peu les instants et on se dit ça y est, on y est. Et puis on arrive sur ce terrain, sur ce parking, grand parking pour oscireux. On avait pris de quoi mettre sur le sol pour ne pas se salir, pour s'asseoir. C'est rudimentaire. C'est-à-dire que quand tu t'assoies, tu sens bien les cailloux au sol. Ce n'est pas hyper confortable. Et puis on s'installe. On le sait, on va devoir attendre 4 heures. Alors on s'installe. Il y a un bruit de folie juste à côté, parce qu'il y a la scène qui est juste à côté. Il y a de la musique, c'est sympa, parce que ça donne un peu d'ambiance. Mais... Merci. Je ne sais pas si tu as envie d'écouter cette musique ou si tu as plutôt envie de t'isoler.

  • Speaker #1

    Et moi, à ce moment-là, j'ai eu peur. Moi, j'ai eu peur parce que je connais les loulous. Et quand je les ai vus se concentrer, ça m'a fait peur parce que je me suis dit, je ne suis pas prêt. Je ne suis pas prêt parce que je regardais Damien qui était concentration ultime dans sa bulle. Je voyais Gildas, Jérémy, des gens avec qui on déconne quand même un peu au quotidien. Et là, je les voyais rentrer dans la compétition. Et quelque part... Moi, ça me stressait parce que je me disais, est-ce que toi, tu y es aussi ? J'ai pensé à tout ce qu'on avait fait, à la préparation. Et je me suis dit, bon, t'as fait le taf quand même. Si t'es là, c'est pas par hasard. Et je me suis détendu.

  • Speaker #2

    Au départ, on s'installe, on met les ponchos au sol. Et puis, on commence à s'alimenter puisqu'on fait notre repas du soir. Je pense que chacun regarde ce que l'autre a appris avant le départ. Et là, c'est un pique-nique géant. Donc, c'est plutôt encore sympa. Et effectivement, après, au bout d'une heure, ça commence à s'éteindre, malgré le bruit. Tu as le silence qui me revient en mémoire. C'est bizarre parce que c'est sourd. Et on se met dans notre bulle parce qu'on n'a pas envie de perdre d'énergie non plus. Parce qu'on sait que la moindre réserve ressource, on va en avoir besoin pour les jours qui viennent. On sait que ça va être long et on ne sait pas si on va y arriver. On n'a pas l'expérience.

  • Speaker #1

    Et juste après, ils ouvrent les portes pour aller se diriger sous l'arche de départ. Et là, ça se met à pousser quelque chose de terrible. et là on est tous à se tenir pareil bras dessus, bras dessous pour pas se perdre et puis là l'ambiance de Saint-Pierre qui monte avec l'impression d'être des stars de rock quoi, il y a des milliers de personnes qui hurlent, qui crient,

  • Speaker #2

    et on va jusqu'à cette fameuse ligne de départ, sous la pression des 2700 coureurs qui sont derrière

  • Speaker #1

    Et là, il y a le feu d'artifice qui éclate au-dessus du port de Saint-Pierre. Donc vous, vous deviez l'avoir dans le dos. On traverse Saint-Pierre, mais c'est l'ambiance, l'euphorie, les tam-tams, les tambours, les familles, tout le monde. Donc c'est un moment d'émotion vraiment très fort pour moi. Et là, on arrive dans les champs de canne à sucre. Il y a de la poussière parce qu'ils ont du coup... couper la canne sur un terrain sec. Et moi, j'ai le souvenir de mal respirer parce qu'il y a de la poussière. Et il y a la lune qui est en face et les étoiles. Et je me dis, là, tu vas profiter. Mon gars, là, t'es là, t'as fait l'entraînement, t'as fait 8 000 bornes et là, tu profites. Et donc, le stress, il est parti là.

  • Speaker #2

    Personnellement, j'ai greffé mon frère au groupe. Mon frère, c'est le local de l'étape. ça fait un an et demi qu'il est sur l'île de la Réunion et ça a... peu motivé aussi mon inscription à cette course là et j'avais prévu de faire la course avec lui et là il ya le fameux coup de départ je suis bien et là mon frère il est pas bien quoi et là dès le premier kilomètre il me dit je me sens fatigué et je vois tout de suite qu'on perd des places quoi je reste à côté de lui faut que je sois super attentif parce que on se fait doubler dans tous les sens il est vraiment fatigué il transpire dès le début quoi À ce moment-là, déjà, je me dis que ça va être dur. Et il me fait, vas-y, pars, je vais attendre Gaëtan. Je sais très bien qu'il ne va pas attendre Gaëtan. C'est très bien qu'il va abandonner. C'est ce qu'il fera au 25e kilomètre, le soir vers mon arrivée quasiment. Et là, je pars. Sauf qu'à ce moment-là, on n'est plus dans les 200 premiers comme au moment du départ. On avait passé 4 heures quand même dans le sas. Arriver de bonne heure, à se placer pour éviter les bouchons, pour être bien positionné. Et là, on se retrouve millième. Le premier ravitaillement, il est au 15e. C'est juste après ce ravitaillement-là, on sait que ça bouchonne parce qu'on arrive sur un sentier, un single. Il y a quelques passages techniques et ça commence à bouchonner. Ça marche, ça s'arrête. Je double quand c'est possible, mais ce n'est pas souvent possible. Au 26e kilomètre, il y a un ravitaillement, Notre-Dame-de-la-Paix. Et là, je vois Nico.

  • Speaker #3

    Moi, super content parce que je suis devant Damien. Je suis champion du monde. Je pouvais m'arrêter, c'est bon, j'avais fait ma course. Damien, c'est le mec qui te dit au revoir dès le début. Et donc là, ce n'était pas normal. Il y avait quelque chose qui clochait. Et de le voir arriver comme ça au Ravito, finalement, ça m'a rassuré et m'a fait plaisir. Même si pour ton frère, j'étais forcément déçu. Et là, je lui dis, vas-y maintenant, fais ta course, t'es bien. Parce que bien sûr, Damien, il aime bien partager la course avec les gens. Et il me dit, c'est sympa parce que je vous vois tous ensemble. Effectivement, on était, depuis le début de la course, j'étais avec Jérémy, j'étais avec Jean-Luc, avec Gildas. Et puis là, Damien nous retrouve et il nous dit, je courrais bien avec vous. Ça a l'air d'être sympa. Et là, je lui dis, je me souviens de ces mots, je lui dis, écoute Damien, c'est super sympa, mais fais ta course. Cette course, elle est pour toi. Éclate-toi, là t'as l'air super bien et vas-y échappe-toi.

  • Speaker #2

    Là tu vois on est au 26ème kilomètre, on fait quelques kilomètres ensemble avec Jérémy et Nicolas. Et là il commence à faire froid, on avait Gildas qui était censé nous rattraper, on l'appelle, on s'habille. Nicolas ne profite pas des ravitaillements pour se changer, donc il préfère faire ça après. Il perd du temps au ravitaillement et après il perd du temps à s'habiller.

  • Speaker #3

    Je me fais charrier sur les ravitaux parce que je passe trop de temps. Et là en l'occurrence, je n'avais pas senti le froid arriver au ravitaux où j'ai retrouvé Damien. Et en sortant du ravitaux, le froid est arrivé et je me suis dit que je n'étais pas assez couvert pour la nuit. Et donc j'en ai profité pour me changer au bord de la route. C'était l'occasion aussi de tous se regrouper. Puis une fois habillé plus chaudement, là on est parti.

  • Speaker #1

    Et on part dans une montée pour rejoindre Colnay-de-Boeuf. Et là, il y a des sapins. Mais des sapins, je me dis, mais c'est pas possible, j'ai l'impression d'être dans les Alpes. Et il y a du gel au sol. Et c'est parti comme ça, dans la nuit, sous la lune et tout. Et c'est tellement beau que dans les sapins, à un moment, je me dis, il y a la pleine lune, j'éteins ma frontale. Et là, je suis dans le noir et je me dis, mais c'est magnifique. C'est des moments comme ça que je suis venu chercher et c'est pour ça que j'aime le trail. Et là, ça dure, je ne sais pas, peut-être une heure comme ça. Et puis après, on voit l'aube du jour qui commence à arriver. Et là, j'arrive au Colnay de Bœuf et là, il y a du vent et il fait un froid de canard. Le ravitaillement est là et je me dis, là, si tu t'arrêtes, tu vas geler sur place. Donc j'arrive, je prends un thé, je bois, le soleil se lève. et il y a la beauté de l'île qui s'offre à nous, et il y a une vue sur le piton des neiges là, qui est extraordinaire, et c'est un moment, on parle de trail comme l'évasion, l'aventure, et c'est des moments comme ça. Moi c'est ce qui m'a marqué jusqu'à la descente de Marabout, où là il s'est passé une belle surprise.

  • Speaker #3

    Et là, on arrive à Marabout et il y a une belle surprise qui nous attend. J'étais avec Jean-Luc et Jérémy, on courait à trois, on était bien. Il y a Jean-Luc, il voit une banderole avec le nom de notre marque, notre chaîne. Il me dit, mais c'est bizarre cette banderole quand même en plein milieu de la Réunion. Et puis nous, un peu naïvement, on dit, ce nom, c'est que peut-être il y a des gens qui ont voulu l'identifier ou qui sont supporters, etc. Et là, quelques mètres après, 200-300 mètres après, on voit un bonhomme sous une grosse doudoune avec une capuche. Et là, on découvre notre leader qui était venu nous rendre visite, nous supporter. Alors, ce n'était pas du tout prévu. Entre la nuit passée, le soleil qui se lève, les belles couleurs, je crois qu'émotionnellement, d'avoir en plus son leader qui débarque pour nous supporter, là, on était au summum. Donc génial, là, on était vraiment... dans ce qu'on pouvait rêver de mieux pour cette course parce qu'on était ensemble, on avançait bien et en plus on avait des belles surprises.

  • Speaker #2

    Alors Thierry, comment tu te sens ?

  • Speaker #3

    Ah putain,

  • Speaker #2

    on dit qu'est-ce que tu fais ? Eh ben je suis nul.

  • Speaker #3

    Comment ça se passe les gars ?

  • Speaker #1

    C'est la fin !

  • Speaker #2

    C'est la fin !

  • Speaker #1

    C'est la fin !

  • Speaker #2

    C'est moi la banderole ! Et puis, je suis à l'approche de Marabout, 49e kilomètre. Et là, je croise un coureur du relais, il me double. Et puis, il me dit, t'es parti sur des bases de combien ? Je fais, je ne sais pas, j'avais prévu de faire 42, 44 heures avec mon frère. Et puis, il me fait faire gaffe parce que l'année dernière, j'ai fait la diag. Et à cette heure-là, j'étais dans les mêmes temps de passage que toi et j'ai mis 33 heures. Moi, 33 heures, ce n'est pas du tout ce que j'avais. imaginer, je m'en sentais déjà pas capable parce que j'ai pas l'expérience quoi je sais pas si je vais aller au bout ouais je suis bien mais jusqu'où ça va durer quoi il y aura bien une panne de carburant tôt ou tard quoi Je continue à avancer, je suis bien, j'avance à mon rythme sans être en sur-régime. Et puis là, Marabout, effectivement, c'est le moment magique. Moi, je garde cette image. Tu as une terre qui est rouge au sol, à côté de ce chemin de couleur ocre, tu as l'herbe verte couverte de gel. Et cette lumière de 5h30 du matin, c'est juste magique. C'est une image, tu prends plaisir à être là. Tu prends conscience de la chance que tu as. T'es pas dans la course, t'es dans une aventure, t'es dans l'exploration, t'es dans la découverte. C'est juste magique. Tu viens un moment et tu profites. Peu importe ce qui va arriver, t'as vécu ce moment-là. Ce lever de soleil, je le garde en mémoire, je l'emmène avec moi. Donc je continue dans Marabout et Marabout, ça porte bien son nom. Parce qu'on met les pieds dans des mares, c'est dégueulasse. Tu te charges et tu as l'impression de faire une épreuve de Koh Lanta. Ce n'est pas possible. Et puis après, tu arrives sur une descente, la descente de la mort, la descente de Kotok Air Vegan. J'en avais entendu parler, mais je ne l'imaginais pas comme ça. C'est super vertical et tu dois descendre.

  • Speaker #3

    C'est terrible parce que dans la course, tu entends les commentaires des autres coureurs. Ils connaissent ce parcours. Et donc là, ils disent, là, on va arriver sur la descente de Kerwegan. Il y en a un qui dit, ah oui, c'est la descente technique. Et là, il y a le mec qui dit, c'est pas une descente technique, c'est une descente à la con. Et là, toi, tu te dis, mais qu'est-ce qui m'attend ?

  • Speaker #2

    Puis en fait, là, t'es qu'au 55e kilomètre, 60e, tu descends un escalier qui est super raide. Même une échelle, tu la mets moins verticale que ce sentier-là ne descend. Et t'es tôt dans la course. tu te dis j'ai envie d'économiser mes cuisses parce que je sais pas jusqu'où elles vont me supporter et quand on arrive en bas on se retourne avec

  • Speaker #3

    Jérémy et Jean-Luc et on regarde le chemin qu'on vient de parcourir cette descente impressionnante et là on dit on l'a fait c'est sûr qu'on a fait ça et c'est déjà impressionnant donc là on arrive à ce moment là moi en l'occurrence j'avais déjà mal depuis le cinquième kilomètre douleur à la cheville que j'avais ressenti depuis le le week-end de préparation. J'avais essayé de me faire soigner cette douleur les quelques semaines avant la course, mais depuis le départ, cette douleur était présente. Au fur et à mesure des kilomètres, quand tes muscles sont chauds, etc., tu ne le sens plus trop. Et puis j'ai commencé à avoir une douleur au quadriceps. Je pense que c'est le fait de compenser. Et là, j'ai senti que ce n'était pas très bon. Et là arrive le ravito. Donc là, c'est le ravito, le premier gros ravito de première base de vie à Sillaos. C'est là qu'on peut effectivement se changer, se poser un peu, on a notre sac d'allègement qui arrive, etc. Et là je dis, je suis bien, mais j'ai cette douleur, j'ai besoin de me faire masser parce que, en l'occurrence, je veux essayer de soulager cette douleur.

  • Speaker #0

    Les kinés me disent que ça fait un peu mal, mais je sens que ça ne passe pas et en même temps j'ai envie de repartir. Et là je repars avec l'espoir de pouvoir continuer et que la douleur se passe. Je n'ai pas une grosse expérience en trail, mais ça peut arriver, une douleur peut arriver et peut partir aussi vite. Donc je me dis que je vais me remettre à courir et ça va peut-être se passer. Sauf que ça ne s'est pas passé. Rapidement j'ai senti que dans les descentes comme dans les montées, ça allait être compliqué. Et là, le chemin de croix a débuté. Donc là, on est au cœur de la course, Mafate, c'est la jungle. C'est l'endroit où on ne peut pas accéder en voiture ou par d'autres moyens de transport plutôt classiques. Il n'y a que l'hélico qui peut y aller. Jérémy m'avait dit, si tu entres dans Mafate, tu ne peux plus en sortir facilement, donc tu es parti pour 20-24 heures de course. L'inquiétude grandit parce que je me dis, j'ai mal, je ne suis pas bien. Je ne sais pas comment ça va se passer, comment je vais en sortir surtout. Et puis j'y suis allé quand même, avec des conseils, des encouragements, des motivations à droite à gauche. Puis moi surtout l'envie de ne pas abandonner, parce que quand tu as fait tout ce chemin pour arriver sur cette belle île, ce n'est pas pour te dire que tu vas t'arrêter au 60ème. Je me suis dit tant pis, je vais y aller, je vais rentrer dans ma fat. Donc avant de rentrer dans ma fat, il y a déjà cette première montée qui s'appelle Taïbit.

  • Speaker #1

    Le fameux col du Taïbit.

  • Speaker #0

    Le fameux col du Taïbit. Et là, ça a été déjà la première épreuve. Difficile de monter. Finalement, je poussais qu'avec la jambe droite. Et en descente, c'est pareil, je ne descendais que sur une jambe. Donc ça devenait compliqué. Donc là, on arrive début de nuit. 19h, 19h30 de mémoire sur le ravito de Marla. Il commençait à faire froid. Je n'étais pas très bien et pas très serein. Le fait de passer la nuit comme ça dans la jungle. Je me pose, je me pose une demi-heure. Je me pose des questions aussi. parce que je vois le médecin qui me dit si tu arrêtes, il faut que tu fasses le chemin inverse c'est à dire que tu repartes vers Sillaos ou alors que tu trouves un moyen de te faire emmener c'était au niveau des Col des Beux et là c'était à 10 km 10-15 km après et puis il était hors de question que je fasse demi-tour parce que quand t'as passé des difficultés t'as surtout pas envie de les faire en sens inverse, c'était comme si tu effaçais tout donc je dis je continue ... Et là, entre temps, j'ai une amie à la réunion qui m'avait dit, de toute façon, avant la course, si t'arrives quoi que ce soit, t'hésites pas, tu m'appelles, etc. On viendra te chercher. Et donc, elle était avec son mari. Et là, je lui dis, écoute, j'en peux plus, je suis coincé, j'ai très mal. Je pense que je pourrais pas continuer parce que je prends plus plaisir à avancer parce que c'était vraiment très douloureux. Je pense que je vais arrêter. J'ai donné mon dossard, ça ça a été dur. J'ai donné mon dossard, j'ai dégrafé moi-même mon dossard pour le donner à un coureur. Et là, psychologiquement, ça a été dur. Parce que ça y est, c'était fait. À un moment donné, je me suis posé la question. Est-ce que je cours après pour rechercher mon dossard ? Et là, il y a plein de choses qui passent par la tête. C'est dur. Je me souviens toujours des mots d'Eric, qui est un collègue qui a fait le coup de trail. il y a beaucoup d'expérience dans le trail, il m'a écrit après mon abandon, il m'a dit tu sais Nico l'abandon c'est aussi un apprentissage de la course et on finit des courses c'est super mais apprendre à abandonner c'est important aussi parce que c'est une épreuve difficile

  • Speaker #1

    Moi, c'est le seul moment de grand doute que j'ai eu dans la course. Donc, c'est dans la montée et je fais une erreur de débutant, mais vraiment de débutant, c'est-à-dire que je commence à discuter avec des gars et là, on s'entend super bien. On est trois, on discute, on raconte nos vies, nos enfants, la vie. Le trail, c'est comme ça, on partage. Et en fait, ils vont plus vite que moi. Et je ne me rends pas compte, mais j'accélère. Et donc, je reste peut-être, je ne sais pas, trois quarts d'heure, une heure avec eux. Et la montée arrive et là je suis sec parce que j'ai accéléré sans me rendre compte. Et donc là j'ai plus de jus et je m'arrête. Donc je m'assieds sur une pierre, je prends une barre de protéines ou de je sais pas quoi. Et là je suis au plus bas quoi, j'ai presque, je me dis mais j'y arriverai pas quoi. Et là il y a une créole qui arrive derrière qui avait sans doute beaucoup d'expérience sur la diagonale. Elle s'arrête, elle s'assied à côté de moi, elle me regarde, elle me fait « C'est bon, tu vas y arriver » . Et elle me dit… Tipa tipa, tu finiras à la redoute. Et pour eux, c'est en clair, si tu vas petit à petit, tu vas y arriver. Et du coup, ça m'a marqué. Donc, je suis resté dix minutes, un quart d'heure sur mon rocher et je suis reparti comme ça, comme un blessé. Et puis, c'est ça qui est dingue entre elles. C'est que tu peux être au plus bas pendant un moment et puis ça va repartir. Et c'est reparti. Et là, après, c'est la... la fameuse descente infernale vers Sillaos, que j'ai faite doucement, parce que moi, alors Damien, il a couru dans cette descente, moi, je la trouvais tellement dangereuse. C'est-à-dire, tu cours, tu marches, tu cours, et puis tu vois les gars en dessous. Tu les vois, mais c'est droit, c'est un mur. Et là, tu descends vers Sillaos, et alors, il paraît de la base de vie de Sillaos, et moi, Sillaos, c'était, dans le conte que nous a raconté Jérémy, pour moi, Sillaos, c'était un coin de paradis, parce que... Tu peux te poser, tu peux te doucher, tu peux manger, tu peux te faire masser et tu repars. Et donc je suis arrivé à Sillaos, déjà, clac, ça s'est coché. Et j'ai pris mon temps, je suis allé me doucher à l'eau froide. J'ai mangé et il y avait une école de kiné de La Réunion. Et j'ai eu droit à deux filles et deux massages. Alors là, c'est le top. Et donc je me suis fait masser les mollets, les cuisses. Et après, j'ai rebut deux, trois verres. et c'est reparti.

  • Speaker #2

    Après la descente de Côte-aux-Coeurs vegan, on a l'impression de marcher sur la tête de ceux qui nous précèdent. Tu arrives effectivement à Sillaos et tu retrouves un autre coin de paradis. Par contre, tu retournes un peu à la civilisation. Tu as l'impression que c'est un des plus beaux villages fleuris de France. C'est magique. C'est une base de vie. Il fait bon y arriver. Tu es content. Moi, c'est un moment qui était important puisque là, je retrouve ma femme. qui est venu m'encourager. Mon portable, il est à chaise depuis le départ de la course. La batterie ne tient pas. Et là, elle me tend le sien et elle me montre tous les WhatsApp qu'il y a eu dans notre groupe de supporters et de coureurs. Et putain, ça te requinque. Moi, je suis bien à ce moment-là, mais tu prends une énergie folle à voir toute cette émulation. Alors déjà, tu as l'énergie parce que tu sais que les collègues, tu es obligé d'aller au bout parce que les collègues, ils vont aller au bout. Quoi qu'il arrive, tu ne peux pas lâcher. Si tu n'as pas un souci physique, tu vas au bout. Et de voir toute cette émulation qu'une course d'une telle ampleur génère parmi des personnes qui sont trailer ou pas du tout trailer. Ils ne connaissent rien à la course à pied, mais ils vivent l'événement avec toi. Et là, c'est juste magique. Tu as les frissons. Et par-dessus, il y a le message justement d'Olivier qui a fait la surprise aux collègues à Marabout et que moi j'ai loupé. Il avait fait une petite vidéo et je la capte à ce moment-là, au 65e kilomètre, là, à Sillaos, je vois la vidéo. Et c'est la goutte d'eau, quoi, t'as presque envie de pleurer. Et là, je me dis, c'est bon, il ne reste plus que 100 bornes, quoi. Je suis au 65e, il me reste 105, je suis bien, je continue. Par contre, tu sais qu'il y a peu de temps après, à l'horizon, il y a le Taïbit qui se pointe. Et je m'en fous, je suis bien. Sauf que dès les premières marches du Taïbit, plus si bien que ça. Et là, ça commence à devenir compliqué. Physiquement, je n'avance plus. J'ai l'impression d'aller moins vite que des randonneurs. Merde, qu'est-ce qui se passe ? Et puis quand tu bascules au col des Bœufs, tu es dans le brouillard, tu ne vois rien. Les conditions ne sont pas top. Tu as l'impression d'être en hiver. Tu n'as aucune visibilité. Je m'arrête au ravito suivant, je prends une soupe, etc. Et puis après, on arrive sur un terrain de jeu, moi, que j'apprécie plus particulièrement, puisqu'on arrive sur un sentier qui s'appelle le sentier scout. C'est comme un toboggan. J'ai l'impression d'être dans un parc d'attractions géant. C'est des up and down. Ça descend, ça monte un tout petit peu, c'est des coups de cul. Et puis, t'es en sous-bois et c'est super ludique. Pif, paf, à droite, à gauche. Et puis là, je recommence à trouver des sensations. Je prends de nouveau du plaisir en tout cas. J'avais tellement mal vécu cette montée du Taïbit que là je profite de Sentier Scout. Et puis il y a un moment sur Sentier Scout, tu débouches sur une crête, tu as le vide à gauche, tu as le vide à droite. Et par contre tu te projettes sur le cirque qui t'entoure et les massifs que tu as, les crêtes volcaniques que tu as devant toi qui sont recouvertes de verdure et qui sont juste magnifiques. J'arrive au pied de la deuxième grosse difficulté, c'est la montée du Maïdo. La montée du Maïdo, elle se fait en deux portions. Une portion de 600 mètres de dénivelé positif, un plat sur lequel on va trouver le ravitaillement de roches plates, et encore 800 mètres qui sont annoncés très terribles. Je me dis que je vais resubir. Et puis en fait, dans la première partie de 600 mètres, ça se passe bien. Et ça se passe tellement bien que là, à un moment, il y a un coureur qui m'interpelle et qui me dit « C'est toi Nils ? » « Nils ? Non, je ne connais pas Nils. » Parce qu'il y a deux gars qui étaient habillés comme toi et qui cherchaient un certain Nils. Et là, je comprends que je reviens sur Thierry et son frère. Et effectivement, juste avant le ravitaillement de Ausha, il reste 2 km avant le ravito, je retrouve Thierry et son frère qui sont là. Là, il nous reste 60-65 km. Et là, je demande à Thierry, ça vous dérange si je fais la course avec vous ? Et puis là, pas de problème. Et puis là, à partir de ce moment-là, on va suivre le parcours ensemble. Et ça sera un autre bon moment de la course. Avec Thierry et Olivier, on repart du Maïdo et on fait une longue descente qui nous paraît interminable. Mais par contre, ça y est, on est dans la cohésion et on fait tout ensemble. Il y en a un qui s'arrête pisser, tout le monde s'arrête pisser. On fait tout jusqu'au bout. On est déterminés à finir ensemble la course. Il reste 60 bornes, on sait que c'est encore long. Pour nous, 60 km, c'est un trail normal. Et on sait qu'il y a encore des difficultés qui arrivent. Et effectivement, il y aura des difficultés sur cette fin de parcours, puisqu'il y a des sentiers, je n'ai jamais vu des sentiers aussi techniques. Ce n'est même plus du trail, c'est entre l'alpinisme, le gymkanage. Ce qui est incroyable, c'est la lucidité qu'on a eue, je pense, tous les trois. On n'a jamais douté sur le fait qu'on irait au bout, et dans de plutôt bonnes conditions. Et c'est une surprise parce qu'on n'avait jamais passé autant de temps dehors, ni Thierry, ni Olivier, ni moi, donc on ne savait pas ce que ça allait donner. Et je pense que c'était encore une plus grosse surprise pour Olivier, qui lui, sur le dernier mois, il n'a pas pu s'entraîner, il était blessé. Donc faire 33 heures dans ces conditions, c'était juste magique. On a sur la fin du parcours, sur les 30 derniers kilomètres, moi c'est la première fois que j'ai la première notion de classement. On arrive au 132ème kilomètre et là, on nous scanne. sur la deuxième base de vie et 99, 100 et 102ème. Putain, top 100, Diag, un truc juste impensable quand on est parti l'avant-veille au soir. Là Thierry c'est un compétiteur donc Thierry c'est un taureau dans l'arène donc quand il voit le drapeau rouge, il fonce dedans quoi. Donc là, à partir de là, ça va devenir un peu plus dur pour nous et avec Olivier puisque... Thierry, dès qu'il voit une frontale, il va la chercher. Et puis nous, derrière, on ferme notre gueule et on colle. Et puis on essaye de le ralentir quand il y a besoin de le ralentir. On a tous mal aux pattes, mais Thierry, il a un mental de compétiteur qui fait qu'il va se faire encore plus mal que la douleur qu'il a à l'instant présent. Et puis là, on est en mode conquête. C'est fou parce qu'on est dans le top 100. 90, 87, 70 et on est en chasse. Il y a un dernier secteur pavé qui est super difficile. À côté, les pavés du Nord, c'est super roulant, même en roller. On a galéré, mais mentalement, on était quand même super déterminés. C'était dur de passer ce secteur en marchant. C'est dur à assumer. Et puis après, il y a un dernier coup de cul, une petite bosse. Il nous amène jusqu'à Colorado. Et à Colorado, tu es à 4,6 km de l'arrivée. Il fait super beau, parce qu'il doit être 6h30. Il nous reste trois quarts d'heure de descente, super technique, qu'on passe ensemble. Et là, c'est fou, parce qu'à ce moment-là, tu retrouves des jambes, mais les mêmes jambes que tu avais au départ de la course. Tu oublies tout. 4 km, c'est rien. Et là, tu te reprends à courir à des allures, tu fais des portions de descente à 14, 15, 16, c'est juste incroyable. Et tu sais que tu vas finir et que tu vas retrouver toute la famille et que tu vas avoir ce putain de t-shirt « J'ai survécu » avec la médaille de finisher.

  • Speaker #0

    Découverte de l'arrivée pour moi parce que je ne la connaissais pas. Et donc j'arrive dans ce stade, à 7h du matin, au stade de la Redoute, à Saint-Denis. Autant il y a beaucoup de spectateurs au départ. Mais cette heure du mat', c'était assez calme Et là on entend le commentateur commenter l'arrivée des coureurs et là on est 54ème, 55ème position. On entend les places et là je réalise que mon Dame il a fait une super perf et Thierry et son frère également. Dame en fait ça compense mon échec. C'est le fait que j'étais content pour lui, j'étais content de le voir arriver et je l'avais quitté. au 25e kilomètre en me disant vas-y fais ta course, éclate-toi, et il s'était éclaté. Et ça c'était chouette. Et donc on l'attend. Alors moi je suis un peu dans ma bulle, je suis encore un peu dans ma bulle finalement. Je me pose encore ces questions. Qu'est-ce que tu as fait ? Est-ce que tu as bien fait ? Est-ce que tu n'aurais pas pu faire autrement ? Voilà, tout ça passe dans ma tête. Et là j'entends l'arrivée de Damien. Superbe arrivée, ils arrivent en courant les trois, donc Damien et les deux frangins. Super beau. Belle émotion à l'arrivée, ils étaient frais, c'est ça qui était impressionnant. Ils avaient quand même passé 33 heures à courir et ils étaient encore frais. C'était magnifique, beau soleil du matin, c'était très chouette d'arriver et se vendre. Trois compétences qui nous arrivent ici à l'arrivée des premiers rangs dans le top 60 de cette année.

  • Speaker #2

    On arrive, il n'y a pas beaucoup de monde, mais le peu de personnes qui sont là, ça compte. Il y avait Nicolas, Aline, Olivier, mon frère, forcément. Ouais, quelle joie. Après, l'émotion de la ligne, elle est bizarre parce qu'on était tellement préparés, on savait qu'on allait y arriver. t'exploses pas de joie non plus, tu es soulagé d'en avoir fini. On est satisfait, mais il n'y a pas eu une euphorie, il n'y a pas de trempette ni tambour, ça reste mesuré. Je pense que c'est après que tu prends conscience de ce que tu as fait, ça reste finisher de la Diag, c'est un truc dont tu as rêvé et on l'a fait. Et ça, c'est la plus belle des satisfactions. J'étais content de passer la ligne avec Thierry et Olivier. La prochaine fois, je le ferai avec ma femme et mes enfants. Allez,

  • Speaker #1

    mon pitou ! Tu l'as fait ! Tu l'as fait ! Allez, mon Gigi !

  • Speaker #2

    Allez,

  • Speaker #1

    Gigi ! Ouais ! Donc moi, en fait, là... C'est complètement différent de Damien, c'est-à-dire que moi je ne suis pas un compétiteur dans l'âme. Moi je suis un hédoniste du trail, j'aime vivre l'émotion du trail. Et donc quand Damien, lui, il était de jour, moi j'étais de nuit, je suis loin derrière. Et Mafat, il l'a fait de jour, moi je l'ai fait de nuit. Et donc avant de rentrer dans Mafat, j'ai vu beaucoup de gens abandonner. Jérémy m'avait dit... Si tu rentres dans ma fat, tu finis. Et de voir tous ces gens qui abandonnaient, comme dans le livre que j'avais lu, parce qu'Antoine Guillon, il dit, les gens, ils hésitent à rentrer dans ma fat, un peu comme ce que disait Nico tout à l'heure, c'est-à-dire que ça va être dur. Et donc là, je suis en haut du col du Taïbit, et je me dis, tu l'as fini. Tu rentres, tu finis. Et là, j'avais l'œil du tigre, quoi. Le butique c'est qu'il n'y a plus rien qui va m'arrêter. Et là démarre la nuit, pour moi c'est une des plus belles nuits de ma vie. Le cirque de Mafate, c'est coupé de la civilisation. Il n'y a pas de route, il n'y a pas d'éclairage. Il n'y a rien. Il n'y a que de la nature sauvage et des gens. Et dans cette nuit-là, moi, j'ai fait un voyage presque mystique, dans le sens où c'est un voyage à la fois intérieur et physique. Parce que ça fait déjà la deuxième nuit où tu ne dors pas. Et tu passes par plein de choses, parce que ton cerveau, il est sous les étoiles, dans un endroit unique au monde. Et tu penses à des choses que tu as dans ta vie de tous les jours, tu n'as jamais le temps d'y penser, jamais. Ça, c'est des moments uniques et c'est pour ça que je fais du trail. C'est que le trail, c'est à la fois un sport où tu voyages intérieurement, tu vis des émotions avec les gens. Et cette nuit dans ma fat, c'est quelque chose d'incroyable de par le voyage intellectuel et spirituel que j'ai pu faire. À la sortie de Mafate, il faut en sortir, et là il y a ce fameux Maïdo. Et le Maïdo, moi je l'ai fait en plein cagnard. Et là, la montée des 800 mètres, il y avait Olivier qui est venu me chercher en haut. et quand t'arrives en haut t'es content parce qu'il fait 30 degrés, t'as la saharienne. Les gens t'acclament, t'arrives en haut. Moi, j'avais l'impression d'être, je ne sais pas, Cavendish sur le Tour de France. Et les gens, ils te poussent, ils t'appellent par ton prénom, parce qu'ils veulent le prénom sur le dossard, donc ils t'encouragent. Et t'arrives en haut du Maïdo, ça y est, j'y suis, je l'ai fait. Et après, t'arrives sur la descente. la plus douloureuse pour moi parce que j'avais mal aux pieds, j'avais les pieds qui avaient chauffé. J'ai eu la chance, parce que ma femme m'a fait une surprise avec mes enfants, c'est qu'ils arrivaient le jour J à La Réunion et ils ne m'avaient pas dit et ils sont venus m'attendre à Ilé-Savanna, donc en bas. Et là, quand je les ai vus, j'ai pleuré comme un bébé. C'est fort. Moi, le trail, ça me porte. Le fait de retrouver ma famille, ça m'a galvanisé et après Sur le gâteau, à la possession, c'est taré. Ils venaient de finir leur course et ils sont venus m'encourager comme si j'étais un athlète de haut niveau. J'avais l'impression d'être une Ferrari qui rentrait au stand. Et après, il y a l'aboutissement. Quand tu vois le panneau, la redoute, je descends, je descends et là, je vois un petit gamin en bas. Mon fils, il est là avec son portable, il fait la descente avec moi. Et là, c'est juste incroyable. Et là, c'est ce que disait Damien. Je me remets à courir à 12 à l'heure. Donc là, il y a mes filles qui arrivent, ma femme. On se prend tous dans les bras, on finit. Et là, j'arrive dans le stade de la redoute. Les loulous, ils sont encore là. Donc Damien, Nico, Jérémy, Olivier, leurs femmes et tout, qui sont là. L'arrivée, c'est la visualisation mentale. d'un truc que tu as juste rêvé dans ta vie. Et là, tu te dis, mon rêve, je l'ai fait.

  • Speaker #0

    Émotion, partage, joie, déception. Vous l'avez compris, la Diagonale des Fous, ce n'est pas qu'une épreuve sportive, mais c'est aussi une véritable aventure humaine. J'espère que ce podcast vous a plu. N'hésitez pas à le partager si c'est le cas. Et puis moi, je vous dis à bientôt,

  • Speaker #2

    même à très vite,

  • Speaker #0

    pour d'autres belles histoires de sportifs.

Description

Une idée lancée lors d’une soirée “rougaille-saucisse” entre collègues : et si on tentait La Diagonale des Fous, trail mythique. Des discussions, quelques minutes de réflexion et une ambition posée pour Damien, Gaëtan et Nicolas : terminer cet ultra-trail de 170 km, dont 10 000 m de dénivelé positif, à travers l’île de la Réunion ! Considérée comme l'une des courses nature les plus difficiles au monde, La Diagonale des Fous nécessite des mois de préparation physique et mentale pour espérer franchir la ligne d'arrivée et se voir récompensé du Graal : un tee-shirt floqué d'une phrase qui en dit long, "J'ai survécu". Plus qu’un trail, La Diagonale des Fous est un véritable voyage intérieur où il faut puiser dans ses ressources, aller chercher la volonté au plus profond de soi, dépasser ses limites, s’accepter et se faire confiance. Grâce à ces trois “Fous”, vous allez vivre l’expérience émotionnelle incroyable d’un tel défi… Préparez-vous, prenez place direction : La Réunion. Bon voyage ! 


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Les Conseils de sportifs et des sportives, c’est le podcast de DECATHLON qui vous accompagne dans votre pratique sportive, qui vous aide à débuter ou à reprendre le sport. C’est aussi le podcast qui vous prouve que l’activité physique, c’est avant tout du plaisir ! Grâce aux conseils et astuces d'expert•es en la matière et aux partages d'expériences de vie de pratiquant•es, chaque épisode est une nouvelle occasion d'en apprendre un peu plus sur votre (future) passion !


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On nous le dit assez souvent : pratiquer une activité physique, c'est bon pour la santé. Ce qu'on nous dit moins c'est comment on s'y prend ? Par où on commence ? Plus que de vous voir accomplir un exploit sportif, notre plus grande fierté serait de vous faire aimer le sport, durablement. Parce que c'est ça, le secret de la motivation : trouver l'activité qui vous apporte la dose de joie qu'il vous faut dans votre quotidien.


Producteur : Pipo et Lola


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour et bienvenue dans ce podcast Histoire de Sportifs. On se retrouve aujourd'hui pour un épisode hors série avec, une fois n'est pas coutume, trois sportifs. Gaëtan, Damien et Nicolas, des ultra-trailers qui se connaissent bien puisqu'ils travaillent ensemble chez Decathlon. C'est d'ailleurs lors d'une soirée entre collègues qu'ils ont décidé de courir la Diagonale des Fous. Une course nature qui porte bien son nom, 166 km pour 9611 mètres de dénivelé positif à travers l'île de la Réunion. Alors dans cet épisode, ils vont nous raconter cette aventure à la fois solitaire et collective, vous le verrez. Les doutes pendant les préparations, l'ambiance locale et puis la course bien sûr, avec un abandon pour l'un d'entre eux. On retrouve le récit de Gaëtan, Damien et Nicolas juste après l'intro. Bon podcast !

  • Speaker #1

    Je ne sais même pas comment je vais te dire.

  • Speaker #2

    C'était assez fort en émotions.

  • Speaker #1

    Moi j'ai réussi à rester dans le tempo. Moi c'est inoubliable.

  • Speaker #3

    Courir, c'est dur.

  • Speaker #2

    Tu prends une énergie folle.

  • Speaker #1

    Le style c'est comme ça, on partage. C'est fort.

  • Speaker #2

    On l'a fait. C'est mon aventure.

  • Speaker #1

    Alors bonjour à tous, moi c'est Gaëtan, je suis chef de produit au trail running chez Decathlon. J'ai participé à la Diagonale des Fous cette année. C'était un défi qui, quelques années plus tôt, m'aurait paru complètement invraisemblable.

  • Speaker #2

    Bonjour à tous, je m'appelle Damien, je suis responsable d'approvisionnement chez Calenji Trail. Ça fait à peu près huit ans que je fais du trail et je suis plutôt issu du monde du foot. Je suis passé par d'autres activités, karaté, VTT, vélo de route, triathlon. Et naturellement, la course à pied pour finir. Entre la route et le trail, j'ai vite fait mon choix. On s'est retrouvé à la Diague, qui me paraissait une montagne quand j'ai commencé la course à pied. On se dit qu'on ne va jamais réussir à franchir une distance pareille. C'est pas humain et finalement, on l'a fait.

  • Speaker #3

    Bonjour, moi c'est Nicolas. J'ai la chance de travailler au trail. qui est mon sport de prédilection. Puis ingénieur produit et ingénieur etc. Je me suis mis au trail après la course à pied, sur route, parce que j'avais envie justement de découvrir les chemins autour de moi. Et puis au fur et à mesure, on fait 20 kilomètres, on en fait 30, 40. Et puis un beau jour, il y a les collègues qui parlent de la diagonale des fous. C'est un nom finalement qui se traduit bien, puisque les fous partent comme ça au mois de décembre en se disant, allez on s'inscrit. et je me suis laissé embarquer. C'est bien le terme parce que c'était à peine réfléchi en fait. C'est après qu'on y réfléchit, c'est après qu'on en prend conscience.

  • Speaker #1

    La participation à la Diagonale c'est un peu particulier parce que c'était un projet plutôt familial puisqu'il y a 20 ans j'ai connu ma femme à l'île de la Réunion où j'étais militaire en service national. Et on avait prévu pour nos 20 ans de rencontre de partir à La Réunion. Et je m'étais dit, si je peux courir, c'est bien. Et puis, il y a eu un petit gros péto qui s'est créé au trail. En fait, là, on est trois autour de la table, mais on était sept. Et puis, il y a eu une soirée qu'on a appelée soirée rougail-saucisse chez notre directeur financier, Jérémy. Pendant cette soirée, il en parlait de la Diagonale des Fous. Moi, j'avais plutôt prévu de faire une petite course. Et puis la soirée a avancé, la soirée a avancé, on a bu quelques bières et puis ils m'ont dit mais tu vas pas faire une petite course, tu vas venir avec nous. Et puis à la fin de la soirée j'ai dit bon bah je vous suis. Et donc c'est comme ça que ça a commencé, partir petit et finir un peu comme un fou.

  • Speaker #2

    C'est vrai que ça a commencé sur cette soirée rougail saucisse. Moi j'ai des vieux souvenirs, je sais plus à quel endroit on était, on a déjà dû échanger dessus. On se disait en 2018, dans deux ans... On ferait bien la Diag, et puis il n'y avait rien de concret pendant quasiment un an. Et puis c'est vrai que ce soir-là, c'était le point de départ. On y va. Ça devenait concret en fait. Une simple idée qu'on ne pensait même pas réaliser. Pour moi, je pensais que c'était encore trop tôt. C'était un doux rêve.

  • Speaker #1

    Moi, c'est pareil. Moi, je m'étais inscrit au Templier, le Grand Trail Templier, qui est une course de 78 kilomètres. Et je n'avais pas imaginé que l'année suivante, je partirais sur un ultra trail.

  • Speaker #3

    Chaque année, on planifie un peu nos trails de l'année. Et je pense que ça arrive à ce moment-là à peu près. On était arrivé à la fin de l'année, on se demandait ce qu'on allait faire l'année suivante. Effectivement, on avait fait des courses de 40 et 70 kilomètres. Et puis Jérémy, qui lui l'a déjà fait, nous en a parlé. Il avait envie de le refaire et donc il nous a emmené avec lui. L'idée a commencé à germer, mais ça va vraiment très vite en fait. On se laisse vraiment embarquer, on connaît à peine la course, on ne sait même pas quel est le dénivelé, par où ça va passer, etc. Et puis on s'inscrit et on se dit que ce n'est pas grave, je découvrirai un peu la difficulté au fur et à mesure. En tout cas, pour moi, ça a été ça.

  • Speaker #2

    Alors la préparation pour la Diag, j'ai envie de dire que mentalement déjà, tu commences la préparation le soir du rougail saucisse quand même. C'est là où tu prends conscience que tu t'engages sur quelque chose que tu n'as jamais fait, tu ne sais même pas si tu en es capable. Mentalement, il faut se faire à l'idée que tu vas devoir courir 170 bornes avec 10 000 mètres de dénivelé alors que tu ne l'as jamais fait. On a fait en moyenne, on était sur des formats... Ils peuvent paraître longs, 70-80 kilomètres pour le max. Et là, passer à plus du double, ça paraissait insurmontable. Donc déjà, il faut se faire à l'idée qu'on va réaliser ça. Et on ne sait pas comment on va y arriver avec l'entraînement qu'on réalise au quotidien autour du lac du Véron.

  • Speaker #1

    Alors moi, de mon côté, la préparation, j'ai été très littéraire puisque j'ai acheté pas mal de livres. Et du coup, j'avais quelques bouquins sur ma table de nuit. Et plus je les lisais, plus la pression montait. Parce que chaque témoignage montre, entre guillemets, l'intensité de la préparation et de l'entraînement, à la fois physique et mental. Et je pense que c'est les livres, moi, qui m'ont fait comprendre dans quoi je m'étais engagé.

  • Speaker #3

    La préparation aussi, elle passe par des courses intermédiaires. C'est-à-dire que si on devait faire un entraînement pendant six mois, ce serait compliqué, il faut se motiver tous les jours. En fait, d'avoir des petites courses intermédiaires, ça permet aussi de se motiver pour le mois suivant, dans trois mois. Et ça, forcément, on s'y implique davantage. Il y a beaucoup de moments passés ensemble pendant les entraînements, c'est ce qui nous motive aussi. On a aussi les groupes WhatsApp, où on est tous connectés, et la veille, c'est des messages, c'est « moi j'y vais demain matin à telle heure, qui va avec moi ? » Et je pense que sans ça, tout seul dans son coin, c'est pas très compliqué. Donc on se retrouvait au Mont-Saint-Aubert, on se retrouvait même au lac du Héron, et l'étape ultime, parce qu'on est dans le nord de la France, c'était dans les Terils. C'était vraiment notre challenge. Si on allait au Terril cette semaine, c'était hyper important. Parce que c'était beaucoup de dénive. On va avoir mal au canne pendant deux heures. Et généralement, il ne faisait pas hyper beau. Donc, ce n'était pas la grosse motivation non plus.

  • Speaker #2

    Donc, en fait, on a tous fait des préparations assez différentes dans un premier temps. C'est-à-dire dans les six premiers mois après l'inscription. On a pris notre package. En fait, c'était plus de l'entretien avec comme objectif, on rallongeait un peu les distances le week-end, mais il n'y avait pas de préparation très structurée, je dirais. Puis, on a quand même mis un événement, le 90 kilomètres du Mont Blanc, comme étape intermédiaire pour la préparation de cette diagonale. On s'est dit, on va faire quand même une distance relativement importante avec un bon dénivelé. Et moi, je me souviens, quand on est sorti de cet événement-là, on s'est dit, on n'est pas prêt. Et là, ça a été un révélateur pour dire qu'on a super mal au cuisse quand même. Il faudrait qu'on s'entraîne peut-être différemment. Et c'est à partir de là qu'on a commencé à mettre le terril en jeu. Je me rappelle la première fois, en deux heures ou trois heures de séance, on attrape entre 1000, 1500 mètres ou 2000 mètres de dénivelé. On fait tout en marchant, sauf les descentes sur lesquelles on trottine parce qu'on est emporté par notre élan tellement c'est raide. Et puis après, on a mal pendant cinq, six jours où on ne peut plus courir du tout. Ça, c'est la première séance. Et puis, on y retourne le week-end suivant. On s'aperçoit que ça va mieux et qu'on récupère plus vite. On se dit qu'on l'intègre de manière régulière pour se familiariser. L'idée, c'était de se forger un peu les muscles des cuisses.

  • Speaker #3

    C'est tout à fait ça. Pour revenir un peu sur la préparation, elle était double. Comme tout sportif et tout trailer, elle était de voir jusqu'où j'étais capable d'aller. Toujours mieux se préparer, mieux s'entraîner, etc. pour aller toujours plus loin. Et puis j'avais un double enjeu, c'était aussi une préparation et une bataille contre la maladie, parce que deux mois après m'être inscrit à la Diag, j'ai déclaré un diabète. Et du coup, j'ai arrêté de courir pendant un mois. Et ma volonté derrière, c'était de pouvoir continuer à tenir tous mes challenges de l'année avec cette maladie-là. Et donc chaque étape, chaque course était un nouveau challenge pour moi.

  • Speaker #1

    Après, moi, dans la préparation, je me suis fait une frayeur. c'est que je me suis inscrit à une course parce que je ne pouvais pas faire le 90 km du Mont-Blanc. Je me suis inscrit à la Maxi Race, qui est une course qui a lieu fin mai à Annecy. Je partais un peu blessé, puisque j'avais une douleur au tendon d'Achille que j'essayais de traiter avec notre ostéo commun, qui est Étienne, et quelqu'un qui a compté aussi dans la prépa de l'équipe. Au 50e kilomètre, j'abandonne. Et alors là, le moral, à zéro. À zéro parce que 50 km, l'objectif, il est à 170. Je suis en vrac. Comment ça va faire ? Et du coup, ça m'a mis comme un aiguillon pour dire, bon, maintenant, déjà, ces tendons, il va falloir bien les remettre. Et puis après, il va falloir vraiment que tu t'y mettes progressivement pour aller chercher cette course de fou en octobre.

  • Speaker #2

    Le Slash, c'est un moment fondateur pour l'événement, puisqu'on ne s'imaginait pas partir sur la diagonale sans avoir fait le traditionnel week-end shock. Le week-end shock, c'est qu'on cumule sur deux jours et demi, trois jours. Un nombre de kilomètres et de dénivelé qui a pour but de nous éprouver physiquement, voir notre capacité de récupération puisqu'on enchaîne trois jours d'affilée. Et puis ça a pour but de tester aussi tout le matériel, voir si on ne va pas avoir un petit pépin avec le sac à dos, avec la chaussure, comment nos pieds vont réagir. Gérer l'alimentation aussi c'est important parce qu'on est tous différents face à ça. On est tous plus ou moins confrontés à des problèmes de digestion pendant une course, c'est pas évident. Le week-end choc, il commence avant le week-end choc aussi. Il commence sur une soirée de préparation du week-end choc. On fait le tracé des parcours, on se réunit autour d'une bière bourbon. On se préparait pour la diag, forcément, on était en couleur locale, après le rougail et saucisse. Et là, on est avec les ordinateurs, les montres, les cartes, et on décide de ce qu'on va faire pendant ces trois jours. Vendredi matin, on fait ça. L'après-midi, on fait une autre. Le samedi, une grosse séance. Et le dimanche, on se recolle encore deux séances. Et au final, on fait le total. Alors, ça fait combien, les gars ? Et puis là, on dit 100 kilomètres. Waouh, c'est quand même épais. Tu te dis, en trois jours, tu vas faire 100 bornes avec 10 000. Sur la diag, il va t'en rester 70. Là, tu n'es pas trop serein. Et tu te dis, est-ce que je vais être capable déjà de passer ce premier créneau ? Et de bien le passer, c'est un mois avant l'événement. Et puis derrière, de récupérer, d'enchaîner mes entraînements. Parce qu'il ne faut pas s'arrêter, c'est qu'un week-end shock, c'est que de la prépa. Après, il reste trois semaines pleine balle. Mentalement, il faut s'y faire.

  • Speaker #1

    Et donc là, dans l'équipe, il y a une espèce d'alchimie, parce qu'on a tous des rythmes un peu différents, mais on a le même objectif. Et ça, ça joue énormément, parce que moi, je suis le plus lent de la bande. Devant, ça galope. et j'avais une grosse appréhension sur est-ce que... pendant ce week-end choc, je vais tenir avec les collègues, avec les copains. Et en fait, on a eu tous un espèce de groupe très uni et ça a très bien fonctionné. Pour moi, c'est inoubliable. Et dans ma tête, c'était si ça se passe mal là, qu'est-ce que je fais ?

  • Speaker #0

    Nous sommes donc le 17 octobre 2019, c'est le jour J. 2863 participants sont donc au départ de cette Diagonale des Fous. Et parmi eux, on retrouve nos trois fous à nous, Gaëtan, Damien et Nicolas.

  • Speaker #1

    Alors on est arrivé le lundi 14 octobre à La Réunion. Il y a un truc qui est génial, c'est que tu arrives à l'aéroport Roland-Garros, et puis tu as « Bienvenue à Azote Trailer » , et puis tu as un comité d'accueil avec l'équipe d'organisation de la Diagonale des Fous qui te remet un petit package avec des danseuses créoles, tu bois du rhum. Il y a une espèce d'ébullition autour de cet événement. Donc à la télé sur Réunion 1ère, il y a diagonale J-1, J-3, J-2, J-1, donc la pression monte. Bienvenue pour cette 27e édition du VORED à tous ceux qui viennent de l'extérieur ! Quand on arrive à Saint-Pierre, ce qui est particulier, c'est qu'il fait un peu froid, il y a du vent, et le départ, il est en bord de mer. dans une espèce d'esplanade. Et là, on comprend tout de suite, au volume de l'organisation, que c'est quelque chose d'énorme comme le Tour de France. Parce que tout est bloqué, il y a un concert de musique, il y a des gens partout, et c'est la cohue pour rentrer dans le sas.

  • Speaker #3

    Le départ se fait à 22h, on arrive à 18h. Alors 18h, effectivement, il y a du vent, il fait un peu frais, la nuit tombe. plus du tout les mêmes conditions que pendant la journée. Donc là, il faut commencer à se couvrir. Là, on arrive sur un de grands parkings, parkings plus sireux. On rentre dans une zone de contrôle, où on présente nos sacs. Là, on a le matériel obligatoire qui est contrôlé par des bénévoles. Donc là, on sent un peu la pression monter parce que on se dit ça y est, on y est. On se regarde un peu tous, on se dit maintenant, on ne peut plus reculer. Puis on passe au premier sas, on regarde derrière nous, on dit ça y est, maintenant On est entré, on ne peut plus en sortir et c'est maintenant que ça commence. On rentre un peu dans notre bulle, mais comme on est à 7-8, on a envie encore de partager ces moments-là. On a envie de revivre encore tous les moments passés parce qu'on se raconte encore notre préparation, etc. On se remémore un peu les instants et on se dit ça y est, on y est. Et puis on arrive sur ce terrain, sur ce parking, grand parking pour oscireux. On avait pris de quoi mettre sur le sol pour ne pas se salir, pour s'asseoir. C'est rudimentaire. C'est-à-dire que quand tu t'assoies, tu sens bien les cailloux au sol. Ce n'est pas hyper confortable. Et puis on s'installe. On le sait, on va devoir attendre 4 heures. Alors on s'installe. Il y a un bruit de folie juste à côté, parce qu'il y a la scène qui est juste à côté. Il y a de la musique, c'est sympa, parce que ça donne un peu d'ambiance. Mais... Merci. Je ne sais pas si tu as envie d'écouter cette musique ou si tu as plutôt envie de t'isoler.

  • Speaker #1

    Et moi, à ce moment-là, j'ai eu peur. Moi, j'ai eu peur parce que je connais les loulous. Et quand je les ai vus se concentrer, ça m'a fait peur parce que je me suis dit, je ne suis pas prêt. Je ne suis pas prêt parce que je regardais Damien qui était concentration ultime dans sa bulle. Je voyais Gildas, Jérémy, des gens avec qui on déconne quand même un peu au quotidien. Et là, je les voyais rentrer dans la compétition. Et quelque part... Moi, ça me stressait parce que je me disais, est-ce que toi, tu y es aussi ? J'ai pensé à tout ce qu'on avait fait, à la préparation. Et je me suis dit, bon, t'as fait le taf quand même. Si t'es là, c'est pas par hasard. Et je me suis détendu.

  • Speaker #2

    Au départ, on s'installe, on met les ponchos au sol. Et puis, on commence à s'alimenter puisqu'on fait notre repas du soir. Je pense que chacun regarde ce que l'autre a appris avant le départ. Et là, c'est un pique-nique géant. Donc, c'est plutôt encore sympa. Et effectivement, après, au bout d'une heure, ça commence à s'éteindre, malgré le bruit. Tu as le silence qui me revient en mémoire. C'est bizarre parce que c'est sourd. Et on se met dans notre bulle parce qu'on n'a pas envie de perdre d'énergie non plus. Parce qu'on sait que la moindre réserve ressource, on va en avoir besoin pour les jours qui viennent. On sait que ça va être long et on ne sait pas si on va y arriver. On n'a pas l'expérience.

  • Speaker #1

    Et juste après, ils ouvrent les portes pour aller se diriger sous l'arche de départ. Et là, ça se met à pousser quelque chose de terrible. et là on est tous à se tenir pareil bras dessus, bras dessous pour pas se perdre et puis là l'ambiance de Saint-Pierre qui monte avec l'impression d'être des stars de rock quoi, il y a des milliers de personnes qui hurlent, qui crient,

  • Speaker #2

    et on va jusqu'à cette fameuse ligne de départ, sous la pression des 2700 coureurs qui sont derrière

  • Speaker #1

    Et là, il y a le feu d'artifice qui éclate au-dessus du port de Saint-Pierre. Donc vous, vous deviez l'avoir dans le dos. On traverse Saint-Pierre, mais c'est l'ambiance, l'euphorie, les tam-tams, les tambours, les familles, tout le monde. Donc c'est un moment d'émotion vraiment très fort pour moi. Et là, on arrive dans les champs de canne à sucre. Il y a de la poussière parce qu'ils ont du coup... couper la canne sur un terrain sec. Et moi, j'ai le souvenir de mal respirer parce qu'il y a de la poussière. Et il y a la lune qui est en face et les étoiles. Et je me dis, là, tu vas profiter. Mon gars, là, t'es là, t'as fait l'entraînement, t'as fait 8 000 bornes et là, tu profites. Et donc, le stress, il est parti là.

  • Speaker #2

    Personnellement, j'ai greffé mon frère au groupe. Mon frère, c'est le local de l'étape. ça fait un an et demi qu'il est sur l'île de la Réunion et ça a... peu motivé aussi mon inscription à cette course là et j'avais prévu de faire la course avec lui et là il ya le fameux coup de départ je suis bien et là mon frère il est pas bien quoi et là dès le premier kilomètre il me dit je me sens fatigué et je vois tout de suite qu'on perd des places quoi je reste à côté de lui faut que je sois super attentif parce que on se fait doubler dans tous les sens il est vraiment fatigué il transpire dès le début quoi À ce moment-là, déjà, je me dis que ça va être dur. Et il me fait, vas-y, pars, je vais attendre Gaëtan. Je sais très bien qu'il ne va pas attendre Gaëtan. C'est très bien qu'il va abandonner. C'est ce qu'il fera au 25e kilomètre, le soir vers mon arrivée quasiment. Et là, je pars. Sauf qu'à ce moment-là, on n'est plus dans les 200 premiers comme au moment du départ. On avait passé 4 heures quand même dans le sas. Arriver de bonne heure, à se placer pour éviter les bouchons, pour être bien positionné. Et là, on se retrouve millième. Le premier ravitaillement, il est au 15e. C'est juste après ce ravitaillement-là, on sait que ça bouchonne parce qu'on arrive sur un sentier, un single. Il y a quelques passages techniques et ça commence à bouchonner. Ça marche, ça s'arrête. Je double quand c'est possible, mais ce n'est pas souvent possible. Au 26e kilomètre, il y a un ravitaillement, Notre-Dame-de-la-Paix. Et là, je vois Nico.

  • Speaker #3

    Moi, super content parce que je suis devant Damien. Je suis champion du monde. Je pouvais m'arrêter, c'est bon, j'avais fait ma course. Damien, c'est le mec qui te dit au revoir dès le début. Et donc là, ce n'était pas normal. Il y avait quelque chose qui clochait. Et de le voir arriver comme ça au Ravito, finalement, ça m'a rassuré et m'a fait plaisir. Même si pour ton frère, j'étais forcément déçu. Et là, je lui dis, vas-y maintenant, fais ta course, t'es bien. Parce que bien sûr, Damien, il aime bien partager la course avec les gens. Et il me dit, c'est sympa parce que je vous vois tous ensemble. Effectivement, on était, depuis le début de la course, j'étais avec Jérémy, j'étais avec Jean-Luc, avec Gildas. Et puis là, Damien nous retrouve et il nous dit, je courrais bien avec vous. Ça a l'air d'être sympa. Et là, je lui dis, je me souviens de ces mots, je lui dis, écoute Damien, c'est super sympa, mais fais ta course. Cette course, elle est pour toi. Éclate-toi, là t'as l'air super bien et vas-y échappe-toi.

  • Speaker #2

    Là tu vois on est au 26ème kilomètre, on fait quelques kilomètres ensemble avec Jérémy et Nicolas. Et là il commence à faire froid, on avait Gildas qui était censé nous rattraper, on l'appelle, on s'habille. Nicolas ne profite pas des ravitaillements pour se changer, donc il préfère faire ça après. Il perd du temps au ravitaillement et après il perd du temps à s'habiller.

  • Speaker #3

    Je me fais charrier sur les ravitaux parce que je passe trop de temps. Et là en l'occurrence, je n'avais pas senti le froid arriver au ravitaux où j'ai retrouvé Damien. Et en sortant du ravitaux, le froid est arrivé et je me suis dit que je n'étais pas assez couvert pour la nuit. Et donc j'en ai profité pour me changer au bord de la route. C'était l'occasion aussi de tous se regrouper. Puis une fois habillé plus chaudement, là on est parti.

  • Speaker #1

    Et on part dans une montée pour rejoindre Colnay-de-Boeuf. Et là, il y a des sapins. Mais des sapins, je me dis, mais c'est pas possible, j'ai l'impression d'être dans les Alpes. Et il y a du gel au sol. Et c'est parti comme ça, dans la nuit, sous la lune et tout. Et c'est tellement beau que dans les sapins, à un moment, je me dis, il y a la pleine lune, j'éteins ma frontale. Et là, je suis dans le noir et je me dis, mais c'est magnifique. C'est des moments comme ça que je suis venu chercher et c'est pour ça que j'aime le trail. Et là, ça dure, je ne sais pas, peut-être une heure comme ça. Et puis après, on voit l'aube du jour qui commence à arriver. Et là, j'arrive au Colnay de Bœuf et là, il y a du vent et il fait un froid de canard. Le ravitaillement est là et je me dis, là, si tu t'arrêtes, tu vas geler sur place. Donc j'arrive, je prends un thé, je bois, le soleil se lève. et il y a la beauté de l'île qui s'offre à nous, et il y a une vue sur le piton des neiges là, qui est extraordinaire, et c'est un moment, on parle de trail comme l'évasion, l'aventure, et c'est des moments comme ça. Moi c'est ce qui m'a marqué jusqu'à la descente de Marabout, où là il s'est passé une belle surprise.

  • Speaker #3

    Et là, on arrive à Marabout et il y a une belle surprise qui nous attend. J'étais avec Jean-Luc et Jérémy, on courait à trois, on était bien. Il y a Jean-Luc, il voit une banderole avec le nom de notre marque, notre chaîne. Il me dit, mais c'est bizarre cette banderole quand même en plein milieu de la Réunion. Et puis nous, un peu naïvement, on dit, ce nom, c'est que peut-être il y a des gens qui ont voulu l'identifier ou qui sont supporters, etc. Et là, quelques mètres après, 200-300 mètres après, on voit un bonhomme sous une grosse doudoune avec une capuche. Et là, on découvre notre leader qui était venu nous rendre visite, nous supporter. Alors, ce n'était pas du tout prévu. Entre la nuit passée, le soleil qui se lève, les belles couleurs, je crois qu'émotionnellement, d'avoir en plus son leader qui débarque pour nous supporter, là, on était au summum. Donc génial, là, on était vraiment... dans ce qu'on pouvait rêver de mieux pour cette course parce qu'on était ensemble, on avançait bien et en plus on avait des belles surprises.

  • Speaker #2

    Alors Thierry, comment tu te sens ?

  • Speaker #3

    Ah putain,

  • Speaker #2

    on dit qu'est-ce que tu fais ? Eh ben je suis nul.

  • Speaker #3

    Comment ça se passe les gars ?

  • Speaker #1

    C'est la fin !

  • Speaker #2

    C'est la fin !

  • Speaker #1

    C'est la fin !

  • Speaker #2

    C'est moi la banderole ! Et puis, je suis à l'approche de Marabout, 49e kilomètre. Et là, je croise un coureur du relais, il me double. Et puis, il me dit, t'es parti sur des bases de combien ? Je fais, je ne sais pas, j'avais prévu de faire 42, 44 heures avec mon frère. Et puis, il me fait faire gaffe parce que l'année dernière, j'ai fait la diag. Et à cette heure-là, j'étais dans les mêmes temps de passage que toi et j'ai mis 33 heures. Moi, 33 heures, ce n'est pas du tout ce que j'avais. imaginer, je m'en sentais déjà pas capable parce que j'ai pas l'expérience quoi je sais pas si je vais aller au bout ouais je suis bien mais jusqu'où ça va durer quoi il y aura bien une panne de carburant tôt ou tard quoi Je continue à avancer, je suis bien, j'avance à mon rythme sans être en sur-régime. Et puis là, Marabout, effectivement, c'est le moment magique. Moi, je garde cette image. Tu as une terre qui est rouge au sol, à côté de ce chemin de couleur ocre, tu as l'herbe verte couverte de gel. Et cette lumière de 5h30 du matin, c'est juste magique. C'est une image, tu prends plaisir à être là. Tu prends conscience de la chance que tu as. T'es pas dans la course, t'es dans une aventure, t'es dans l'exploration, t'es dans la découverte. C'est juste magique. Tu viens un moment et tu profites. Peu importe ce qui va arriver, t'as vécu ce moment-là. Ce lever de soleil, je le garde en mémoire, je l'emmène avec moi. Donc je continue dans Marabout et Marabout, ça porte bien son nom. Parce qu'on met les pieds dans des mares, c'est dégueulasse. Tu te charges et tu as l'impression de faire une épreuve de Koh Lanta. Ce n'est pas possible. Et puis après, tu arrives sur une descente, la descente de la mort, la descente de Kotok Air Vegan. J'en avais entendu parler, mais je ne l'imaginais pas comme ça. C'est super vertical et tu dois descendre.

  • Speaker #3

    C'est terrible parce que dans la course, tu entends les commentaires des autres coureurs. Ils connaissent ce parcours. Et donc là, ils disent, là, on va arriver sur la descente de Kerwegan. Il y en a un qui dit, ah oui, c'est la descente technique. Et là, il y a le mec qui dit, c'est pas une descente technique, c'est une descente à la con. Et là, toi, tu te dis, mais qu'est-ce qui m'attend ?

  • Speaker #2

    Puis en fait, là, t'es qu'au 55e kilomètre, 60e, tu descends un escalier qui est super raide. Même une échelle, tu la mets moins verticale que ce sentier-là ne descend. Et t'es tôt dans la course. tu te dis j'ai envie d'économiser mes cuisses parce que je sais pas jusqu'où elles vont me supporter et quand on arrive en bas on se retourne avec

  • Speaker #3

    Jérémy et Jean-Luc et on regarde le chemin qu'on vient de parcourir cette descente impressionnante et là on dit on l'a fait c'est sûr qu'on a fait ça et c'est déjà impressionnant donc là on arrive à ce moment là moi en l'occurrence j'avais déjà mal depuis le cinquième kilomètre douleur à la cheville que j'avais ressenti depuis le le week-end de préparation. J'avais essayé de me faire soigner cette douleur les quelques semaines avant la course, mais depuis le départ, cette douleur était présente. Au fur et à mesure des kilomètres, quand tes muscles sont chauds, etc., tu ne le sens plus trop. Et puis j'ai commencé à avoir une douleur au quadriceps. Je pense que c'est le fait de compenser. Et là, j'ai senti que ce n'était pas très bon. Et là arrive le ravito. Donc là, c'est le ravito, le premier gros ravito de première base de vie à Sillaos. C'est là qu'on peut effectivement se changer, se poser un peu, on a notre sac d'allègement qui arrive, etc. Et là je dis, je suis bien, mais j'ai cette douleur, j'ai besoin de me faire masser parce que, en l'occurrence, je veux essayer de soulager cette douleur.

  • Speaker #0

    Les kinés me disent que ça fait un peu mal, mais je sens que ça ne passe pas et en même temps j'ai envie de repartir. Et là je repars avec l'espoir de pouvoir continuer et que la douleur se passe. Je n'ai pas une grosse expérience en trail, mais ça peut arriver, une douleur peut arriver et peut partir aussi vite. Donc je me dis que je vais me remettre à courir et ça va peut-être se passer. Sauf que ça ne s'est pas passé. Rapidement j'ai senti que dans les descentes comme dans les montées, ça allait être compliqué. Et là, le chemin de croix a débuté. Donc là, on est au cœur de la course, Mafate, c'est la jungle. C'est l'endroit où on ne peut pas accéder en voiture ou par d'autres moyens de transport plutôt classiques. Il n'y a que l'hélico qui peut y aller. Jérémy m'avait dit, si tu entres dans Mafate, tu ne peux plus en sortir facilement, donc tu es parti pour 20-24 heures de course. L'inquiétude grandit parce que je me dis, j'ai mal, je ne suis pas bien. Je ne sais pas comment ça va se passer, comment je vais en sortir surtout. Et puis j'y suis allé quand même, avec des conseils, des encouragements, des motivations à droite à gauche. Puis moi surtout l'envie de ne pas abandonner, parce que quand tu as fait tout ce chemin pour arriver sur cette belle île, ce n'est pas pour te dire que tu vas t'arrêter au 60ème. Je me suis dit tant pis, je vais y aller, je vais rentrer dans ma fat. Donc avant de rentrer dans ma fat, il y a déjà cette première montée qui s'appelle Taïbit.

  • Speaker #1

    Le fameux col du Taïbit.

  • Speaker #0

    Le fameux col du Taïbit. Et là, ça a été déjà la première épreuve. Difficile de monter. Finalement, je poussais qu'avec la jambe droite. Et en descente, c'est pareil, je ne descendais que sur une jambe. Donc ça devenait compliqué. Donc là, on arrive début de nuit. 19h, 19h30 de mémoire sur le ravito de Marla. Il commençait à faire froid. Je n'étais pas très bien et pas très serein. Le fait de passer la nuit comme ça dans la jungle. Je me pose, je me pose une demi-heure. Je me pose des questions aussi. parce que je vois le médecin qui me dit si tu arrêtes, il faut que tu fasses le chemin inverse c'est à dire que tu repartes vers Sillaos ou alors que tu trouves un moyen de te faire emmener c'était au niveau des Col des Beux et là c'était à 10 km 10-15 km après et puis il était hors de question que je fasse demi-tour parce que quand t'as passé des difficultés t'as surtout pas envie de les faire en sens inverse, c'était comme si tu effaçais tout donc je dis je continue ... Et là, entre temps, j'ai une amie à la réunion qui m'avait dit, de toute façon, avant la course, si t'arrives quoi que ce soit, t'hésites pas, tu m'appelles, etc. On viendra te chercher. Et donc, elle était avec son mari. Et là, je lui dis, écoute, j'en peux plus, je suis coincé, j'ai très mal. Je pense que je pourrais pas continuer parce que je prends plus plaisir à avancer parce que c'était vraiment très douloureux. Je pense que je vais arrêter. J'ai donné mon dossard, ça ça a été dur. J'ai donné mon dossard, j'ai dégrafé moi-même mon dossard pour le donner à un coureur. Et là, psychologiquement, ça a été dur. Parce que ça y est, c'était fait. À un moment donné, je me suis posé la question. Est-ce que je cours après pour rechercher mon dossard ? Et là, il y a plein de choses qui passent par la tête. C'est dur. Je me souviens toujours des mots d'Eric, qui est un collègue qui a fait le coup de trail. il y a beaucoup d'expérience dans le trail, il m'a écrit après mon abandon, il m'a dit tu sais Nico l'abandon c'est aussi un apprentissage de la course et on finit des courses c'est super mais apprendre à abandonner c'est important aussi parce que c'est une épreuve difficile

  • Speaker #1

    Moi, c'est le seul moment de grand doute que j'ai eu dans la course. Donc, c'est dans la montée et je fais une erreur de débutant, mais vraiment de débutant, c'est-à-dire que je commence à discuter avec des gars et là, on s'entend super bien. On est trois, on discute, on raconte nos vies, nos enfants, la vie. Le trail, c'est comme ça, on partage. Et en fait, ils vont plus vite que moi. Et je ne me rends pas compte, mais j'accélère. Et donc, je reste peut-être, je ne sais pas, trois quarts d'heure, une heure avec eux. Et la montée arrive et là je suis sec parce que j'ai accéléré sans me rendre compte. Et donc là j'ai plus de jus et je m'arrête. Donc je m'assieds sur une pierre, je prends une barre de protéines ou de je sais pas quoi. Et là je suis au plus bas quoi, j'ai presque, je me dis mais j'y arriverai pas quoi. Et là il y a une créole qui arrive derrière qui avait sans doute beaucoup d'expérience sur la diagonale. Elle s'arrête, elle s'assied à côté de moi, elle me regarde, elle me fait « C'est bon, tu vas y arriver » . Et elle me dit… Tipa tipa, tu finiras à la redoute. Et pour eux, c'est en clair, si tu vas petit à petit, tu vas y arriver. Et du coup, ça m'a marqué. Donc, je suis resté dix minutes, un quart d'heure sur mon rocher et je suis reparti comme ça, comme un blessé. Et puis, c'est ça qui est dingue entre elles. C'est que tu peux être au plus bas pendant un moment et puis ça va repartir. Et c'est reparti. Et là, après, c'est la... la fameuse descente infernale vers Sillaos, que j'ai faite doucement, parce que moi, alors Damien, il a couru dans cette descente, moi, je la trouvais tellement dangereuse. C'est-à-dire, tu cours, tu marches, tu cours, et puis tu vois les gars en dessous. Tu les vois, mais c'est droit, c'est un mur. Et là, tu descends vers Sillaos, et alors, il paraît de la base de vie de Sillaos, et moi, Sillaos, c'était, dans le conte que nous a raconté Jérémy, pour moi, Sillaos, c'était un coin de paradis, parce que... Tu peux te poser, tu peux te doucher, tu peux manger, tu peux te faire masser et tu repars. Et donc je suis arrivé à Sillaos, déjà, clac, ça s'est coché. Et j'ai pris mon temps, je suis allé me doucher à l'eau froide. J'ai mangé et il y avait une école de kiné de La Réunion. Et j'ai eu droit à deux filles et deux massages. Alors là, c'est le top. Et donc je me suis fait masser les mollets, les cuisses. Et après, j'ai rebut deux, trois verres. et c'est reparti.

  • Speaker #2

    Après la descente de Côte-aux-Coeurs vegan, on a l'impression de marcher sur la tête de ceux qui nous précèdent. Tu arrives effectivement à Sillaos et tu retrouves un autre coin de paradis. Par contre, tu retournes un peu à la civilisation. Tu as l'impression que c'est un des plus beaux villages fleuris de France. C'est magique. C'est une base de vie. Il fait bon y arriver. Tu es content. Moi, c'est un moment qui était important puisque là, je retrouve ma femme. qui est venu m'encourager. Mon portable, il est à chaise depuis le départ de la course. La batterie ne tient pas. Et là, elle me tend le sien et elle me montre tous les WhatsApp qu'il y a eu dans notre groupe de supporters et de coureurs. Et putain, ça te requinque. Moi, je suis bien à ce moment-là, mais tu prends une énergie folle à voir toute cette émulation. Alors déjà, tu as l'énergie parce que tu sais que les collègues, tu es obligé d'aller au bout parce que les collègues, ils vont aller au bout. Quoi qu'il arrive, tu ne peux pas lâcher. Si tu n'as pas un souci physique, tu vas au bout. Et de voir toute cette émulation qu'une course d'une telle ampleur génère parmi des personnes qui sont trailer ou pas du tout trailer. Ils ne connaissent rien à la course à pied, mais ils vivent l'événement avec toi. Et là, c'est juste magique. Tu as les frissons. Et par-dessus, il y a le message justement d'Olivier qui a fait la surprise aux collègues à Marabout et que moi j'ai loupé. Il avait fait une petite vidéo et je la capte à ce moment-là, au 65e kilomètre, là, à Sillaos, je vois la vidéo. Et c'est la goutte d'eau, quoi, t'as presque envie de pleurer. Et là, je me dis, c'est bon, il ne reste plus que 100 bornes, quoi. Je suis au 65e, il me reste 105, je suis bien, je continue. Par contre, tu sais qu'il y a peu de temps après, à l'horizon, il y a le Taïbit qui se pointe. Et je m'en fous, je suis bien. Sauf que dès les premières marches du Taïbit, plus si bien que ça. Et là, ça commence à devenir compliqué. Physiquement, je n'avance plus. J'ai l'impression d'aller moins vite que des randonneurs. Merde, qu'est-ce qui se passe ? Et puis quand tu bascules au col des Bœufs, tu es dans le brouillard, tu ne vois rien. Les conditions ne sont pas top. Tu as l'impression d'être en hiver. Tu n'as aucune visibilité. Je m'arrête au ravito suivant, je prends une soupe, etc. Et puis après, on arrive sur un terrain de jeu, moi, que j'apprécie plus particulièrement, puisqu'on arrive sur un sentier qui s'appelle le sentier scout. C'est comme un toboggan. J'ai l'impression d'être dans un parc d'attractions géant. C'est des up and down. Ça descend, ça monte un tout petit peu, c'est des coups de cul. Et puis, t'es en sous-bois et c'est super ludique. Pif, paf, à droite, à gauche. Et puis là, je recommence à trouver des sensations. Je prends de nouveau du plaisir en tout cas. J'avais tellement mal vécu cette montée du Taïbit que là je profite de Sentier Scout. Et puis il y a un moment sur Sentier Scout, tu débouches sur une crête, tu as le vide à gauche, tu as le vide à droite. Et par contre tu te projettes sur le cirque qui t'entoure et les massifs que tu as, les crêtes volcaniques que tu as devant toi qui sont recouvertes de verdure et qui sont juste magnifiques. J'arrive au pied de la deuxième grosse difficulté, c'est la montée du Maïdo. La montée du Maïdo, elle se fait en deux portions. Une portion de 600 mètres de dénivelé positif, un plat sur lequel on va trouver le ravitaillement de roches plates, et encore 800 mètres qui sont annoncés très terribles. Je me dis que je vais resubir. Et puis en fait, dans la première partie de 600 mètres, ça se passe bien. Et ça se passe tellement bien que là, à un moment, il y a un coureur qui m'interpelle et qui me dit « C'est toi Nils ? » « Nils ? Non, je ne connais pas Nils. » Parce qu'il y a deux gars qui étaient habillés comme toi et qui cherchaient un certain Nils. Et là, je comprends que je reviens sur Thierry et son frère. Et effectivement, juste avant le ravitaillement de Ausha, il reste 2 km avant le ravito, je retrouve Thierry et son frère qui sont là. Là, il nous reste 60-65 km. Et là, je demande à Thierry, ça vous dérange si je fais la course avec vous ? Et puis là, pas de problème. Et puis là, à partir de ce moment-là, on va suivre le parcours ensemble. Et ça sera un autre bon moment de la course. Avec Thierry et Olivier, on repart du Maïdo et on fait une longue descente qui nous paraît interminable. Mais par contre, ça y est, on est dans la cohésion et on fait tout ensemble. Il y en a un qui s'arrête pisser, tout le monde s'arrête pisser. On fait tout jusqu'au bout. On est déterminés à finir ensemble la course. Il reste 60 bornes, on sait que c'est encore long. Pour nous, 60 km, c'est un trail normal. Et on sait qu'il y a encore des difficultés qui arrivent. Et effectivement, il y aura des difficultés sur cette fin de parcours, puisqu'il y a des sentiers, je n'ai jamais vu des sentiers aussi techniques. Ce n'est même plus du trail, c'est entre l'alpinisme, le gymkanage. Ce qui est incroyable, c'est la lucidité qu'on a eue, je pense, tous les trois. On n'a jamais douté sur le fait qu'on irait au bout, et dans de plutôt bonnes conditions. Et c'est une surprise parce qu'on n'avait jamais passé autant de temps dehors, ni Thierry, ni Olivier, ni moi, donc on ne savait pas ce que ça allait donner. Et je pense que c'était encore une plus grosse surprise pour Olivier, qui lui, sur le dernier mois, il n'a pas pu s'entraîner, il était blessé. Donc faire 33 heures dans ces conditions, c'était juste magique. On a sur la fin du parcours, sur les 30 derniers kilomètres, moi c'est la première fois que j'ai la première notion de classement. On arrive au 132ème kilomètre et là, on nous scanne. sur la deuxième base de vie et 99, 100 et 102ème. Putain, top 100, Diag, un truc juste impensable quand on est parti l'avant-veille au soir. Là Thierry c'est un compétiteur donc Thierry c'est un taureau dans l'arène donc quand il voit le drapeau rouge, il fonce dedans quoi. Donc là, à partir de là, ça va devenir un peu plus dur pour nous et avec Olivier puisque... Thierry, dès qu'il voit une frontale, il va la chercher. Et puis nous, derrière, on ferme notre gueule et on colle. Et puis on essaye de le ralentir quand il y a besoin de le ralentir. On a tous mal aux pattes, mais Thierry, il a un mental de compétiteur qui fait qu'il va se faire encore plus mal que la douleur qu'il a à l'instant présent. Et puis là, on est en mode conquête. C'est fou parce qu'on est dans le top 100. 90, 87, 70 et on est en chasse. Il y a un dernier secteur pavé qui est super difficile. À côté, les pavés du Nord, c'est super roulant, même en roller. On a galéré, mais mentalement, on était quand même super déterminés. C'était dur de passer ce secteur en marchant. C'est dur à assumer. Et puis après, il y a un dernier coup de cul, une petite bosse. Il nous amène jusqu'à Colorado. Et à Colorado, tu es à 4,6 km de l'arrivée. Il fait super beau, parce qu'il doit être 6h30. Il nous reste trois quarts d'heure de descente, super technique, qu'on passe ensemble. Et là, c'est fou, parce qu'à ce moment-là, tu retrouves des jambes, mais les mêmes jambes que tu avais au départ de la course. Tu oublies tout. 4 km, c'est rien. Et là, tu te reprends à courir à des allures, tu fais des portions de descente à 14, 15, 16, c'est juste incroyable. Et tu sais que tu vas finir et que tu vas retrouver toute la famille et que tu vas avoir ce putain de t-shirt « J'ai survécu » avec la médaille de finisher.

  • Speaker #0

    Découverte de l'arrivée pour moi parce que je ne la connaissais pas. Et donc j'arrive dans ce stade, à 7h du matin, au stade de la Redoute, à Saint-Denis. Autant il y a beaucoup de spectateurs au départ. Mais cette heure du mat', c'était assez calme Et là on entend le commentateur commenter l'arrivée des coureurs et là on est 54ème, 55ème position. On entend les places et là je réalise que mon Dame il a fait une super perf et Thierry et son frère également. Dame en fait ça compense mon échec. C'est le fait que j'étais content pour lui, j'étais content de le voir arriver et je l'avais quitté. au 25e kilomètre en me disant vas-y fais ta course, éclate-toi, et il s'était éclaté. Et ça c'était chouette. Et donc on l'attend. Alors moi je suis un peu dans ma bulle, je suis encore un peu dans ma bulle finalement. Je me pose encore ces questions. Qu'est-ce que tu as fait ? Est-ce que tu as bien fait ? Est-ce que tu n'aurais pas pu faire autrement ? Voilà, tout ça passe dans ma tête. Et là j'entends l'arrivée de Damien. Superbe arrivée, ils arrivent en courant les trois, donc Damien et les deux frangins. Super beau. Belle émotion à l'arrivée, ils étaient frais, c'est ça qui était impressionnant. Ils avaient quand même passé 33 heures à courir et ils étaient encore frais. C'était magnifique, beau soleil du matin, c'était très chouette d'arriver et se vendre. Trois compétences qui nous arrivent ici à l'arrivée des premiers rangs dans le top 60 de cette année.

  • Speaker #2

    On arrive, il n'y a pas beaucoup de monde, mais le peu de personnes qui sont là, ça compte. Il y avait Nicolas, Aline, Olivier, mon frère, forcément. Ouais, quelle joie. Après, l'émotion de la ligne, elle est bizarre parce qu'on était tellement préparés, on savait qu'on allait y arriver. t'exploses pas de joie non plus, tu es soulagé d'en avoir fini. On est satisfait, mais il n'y a pas eu une euphorie, il n'y a pas de trempette ni tambour, ça reste mesuré. Je pense que c'est après que tu prends conscience de ce que tu as fait, ça reste finisher de la Diag, c'est un truc dont tu as rêvé et on l'a fait. Et ça, c'est la plus belle des satisfactions. J'étais content de passer la ligne avec Thierry et Olivier. La prochaine fois, je le ferai avec ma femme et mes enfants. Allez,

  • Speaker #1

    mon pitou ! Tu l'as fait ! Tu l'as fait ! Allez, mon Gigi !

  • Speaker #2

    Allez,

  • Speaker #1

    Gigi ! Ouais ! Donc moi, en fait, là... C'est complètement différent de Damien, c'est-à-dire que moi je ne suis pas un compétiteur dans l'âme. Moi je suis un hédoniste du trail, j'aime vivre l'émotion du trail. Et donc quand Damien, lui, il était de jour, moi j'étais de nuit, je suis loin derrière. Et Mafat, il l'a fait de jour, moi je l'ai fait de nuit. Et donc avant de rentrer dans Mafat, j'ai vu beaucoup de gens abandonner. Jérémy m'avait dit... Si tu rentres dans ma fat, tu finis. Et de voir tous ces gens qui abandonnaient, comme dans le livre que j'avais lu, parce qu'Antoine Guillon, il dit, les gens, ils hésitent à rentrer dans ma fat, un peu comme ce que disait Nico tout à l'heure, c'est-à-dire que ça va être dur. Et donc là, je suis en haut du col du Taïbit, et je me dis, tu l'as fini. Tu rentres, tu finis. Et là, j'avais l'œil du tigre, quoi. Le butique c'est qu'il n'y a plus rien qui va m'arrêter. Et là démarre la nuit, pour moi c'est une des plus belles nuits de ma vie. Le cirque de Mafate, c'est coupé de la civilisation. Il n'y a pas de route, il n'y a pas d'éclairage. Il n'y a rien. Il n'y a que de la nature sauvage et des gens. Et dans cette nuit-là, moi, j'ai fait un voyage presque mystique, dans le sens où c'est un voyage à la fois intérieur et physique. Parce que ça fait déjà la deuxième nuit où tu ne dors pas. Et tu passes par plein de choses, parce que ton cerveau, il est sous les étoiles, dans un endroit unique au monde. Et tu penses à des choses que tu as dans ta vie de tous les jours, tu n'as jamais le temps d'y penser, jamais. Ça, c'est des moments uniques et c'est pour ça que je fais du trail. C'est que le trail, c'est à la fois un sport où tu voyages intérieurement, tu vis des émotions avec les gens. Et cette nuit dans ma fat, c'est quelque chose d'incroyable de par le voyage intellectuel et spirituel que j'ai pu faire. À la sortie de Mafate, il faut en sortir, et là il y a ce fameux Maïdo. Et le Maïdo, moi je l'ai fait en plein cagnard. Et là, la montée des 800 mètres, il y avait Olivier qui est venu me chercher en haut. et quand t'arrives en haut t'es content parce qu'il fait 30 degrés, t'as la saharienne. Les gens t'acclament, t'arrives en haut. Moi, j'avais l'impression d'être, je ne sais pas, Cavendish sur le Tour de France. Et les gens, ils te poussent, ils t'appellent par ton prénom, parce qu'ils veulent le prénom sur le dossard, donc ils t'encouragent. Et t'arrives en haut du Maïdo, ça y est, j'y suis, je l'ai fait. Et après, t'arrives sur la descente. la plus douloureuse pour moi parce que j'avais mal aux pieds, j'avais les pieds qui avaient chauffé. J'ai eu la chance, parce que ma femme m'a fait une surprise avec mes enfants, c'est qu'ils arrivaient le jour J à La Réunion et ils ne m'avaient pas dit et ils sont venus m'attendre à Ilé-Savanna, donc en bas. Et là, quand je les ai vus, j'ai pleuré comme un bébé. C'est fort. Moi, le trail, ça me porte. Le fait de retrouver ma famille, ça m'a galvanisé et après Sur le gâteau, à la possession, c'est taré. Ils venaient de finir leur course et ils sont venus m'encourager comme si j'étais un athlète de haut niveau. J'avais l'impression d'être une Ferrari qui rentrait au stand. Et après, il y a l'aboutissement. Quand tu vois le panneau, la redoute, je descends, je descends et là, je vois un petit gamin en bas. Mon fils, il est là avec son portable, il fait la descente avec moi. Et là, c'est juste incroyable. Et là, c'est ce que disait Damien. Je me remets à courir à 12 à l'heure. Donc là, il y a mes filles qui arrivent, ma femme. On se prend tous dans les bras, on finit. Et là, j'arrive dans le stade de la redoute. Les loulous, ils sont encore là. Donc Damien, Nico, Jérémy, Olivier, leurs femmes et tout, qui sont là. L'arrivée, c'est la visualisation mentale. d'un truc que tu as juste rêvé dans ta vie. Et là, tu te dis, mon rêve, je l'ai fait.

  • Speaker #0

    Émotion, partage, joie, déception. Vous l'avez compris, la Diagonale des Fous, ce n'est pas qu'une épreuve sportive, mais c'est aussi une véritable aventure humaine. J'espère que ce podcast vous a plu. N'hésitez pas à le partager si c'est le cas. Et puis moi, je vous dis à bientôt,

  • Speaker #2

    même à très vite,

  • Speaker #0

    pour d'autres belles histoires de sportifs.

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