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Le déclic de Tifany Huot-Marchand (championne short track) cover
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ADN D'ATHLÈTE, l'esprit sport

Le déclic de Tifany Huot-Marchand (championne short track)

Le déclic de Tifany Huot-Marchand (championne short track)

21min |10/04/2024|

1733

Play
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Le déclic de Tifany Huot-Marchand (championne short track)

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21min |10/04/2024|

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Description

"Patiner, chuter, se relever". Ancienne patineuse de vitesse sur piste courte, une discipline appelée short track, Tifany Huot-Marchand a entre autres, été athlète olympique, championne de France et d’Europe et vice-championne du monde. En octobre 2022, elle vit un grave accident, une chute sur la glace lors d’une compétition internationale. Tifany en ressort gravement blessée, avec une fracture des cervicales : sa moelle épinière est touchée. Les médecins lui annoncent qu’elle restera tétraplégique. Pourtant, l’histoire de Tifany prend un tout autre tournant. Alors, à défaut de pouvoir rechausser tes patins, elle se relève, réapprend à marcher puis à courir. Aujourd’hui, elle prépare son premier marathon.


Dans cet épisode du Déclic, elle se livre sur son parcours : un témoignage fort et inspirant.


 📲💻 Retrouvez Tifany Huot Marchant sur Instagram !


💡⚡✨ Le déclic est une série du podcast Conseil Sport de DECATHLON. Un échange avec des invité·es où l’on parle voyages, rencontres, ruptures, joies, échec… En bref, de transformations. Des parcours de vie inspirants qui ont tous commencé par un déclic. Ce format vous est proposé par Manon, journaliste et sportive passionnée.


🎧🗣 Cet épisode vous a plu ? Parlez-en et partagez-le autour de vous ! Qui sait… Vous tomberez peut-être, vous aussi, sur un déclic.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonne compte, rupture, joie, échec, transformation, bonheur. Tout commence par un déclic. Bonjour à toutes et à tous et bienvenue dans ce nouvel épisode. Vous écoutez le déclic de Tiffany Huot Marchand. Salut Tiffany. Salut. Ça va ?

  • Speaker #1

    Ça va.

  • Speaker #0

    Je suis ravie de te recevoir aujourd'hui dans le Déclic. Je vais commencer par te présenter à nos auditeurs qui ne te connaissent pas. Tiffany, tu as 29 ans, tu as été patineuse de vitesse, athlète olympique à deux reprises. Tu as aussi décroché le titre de championne de France et d'Europe et celui de vice-championne du monde. En octobre 2022, tu as été victime d'un grave accident, une chute sur la glace lors d'une compétition internationale de short track aux Pays-Bas. Le short track, c'est du patinage de vitesse sur piste courte, on peut le définir comme ça ?

  • Speaker #1

    Exactement, j'ai bien révisé.

  • Speaker #0

    Tu ressors gravement blessée de cet accident avec une fracture des cervicales, ta moelle épinaire est touchée également et les médecins t'annoncent que tu resteras désormais tétraplégique et que tu marcheras plus. Et pourtant, tu as remarché assez rapidement, un mois après je crois, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Dix jours après. Dix jours après.

  • Speaker #0

    Moins d'un mois du coup. Voilà, assez impressionnant. Et à force de persévérance, d'envie, de passion et puis de rééducation aussi je pense, tu as repris le sport. Et alors, à défaut de pouvoir rechausser tes patins, tu te lances à un nouveau défi dans une toute autre discipline qui m'est très chère, donc ça p'tit ! Aujourd'hui, tu prépares le Marathon pour tous de Paris 2024 qui aura lieu cet été. J'imagine que cette présentation qui reprend ton parcours sportif, ton accident, c'est des choses que tu as l'habitude d'entendre et de réentendre. Qu'est-ce que ça te fait encore aujourd'hui ? Quel rapport est-ce que tu as avec cette période de ta vie, avec cette histoire, avec ton histoire en fait ?

  • Speaker #1

    Ça a été difficile quand on m'a appris que je ne pourrais plus repatiner. Ça reste ma passion et j'ai suivi absolument toutes les courses depuis mon accident. J'ai regardé toutes les Coupes du Monde. Et puis là, tu vois, la semaine prochaine, le week-end prochain, les Championnats du Monde auront lieu à Rotterdam. Et je vais y aller, je vais aller voir les Championnats du Monde. Tu vois, rien que d'en parler, ça me donne un peu des frissons parce que je ne suis pas rentrée de nouveau dans une patinoire pour voir du short track depuis. Donc ça va être une étape importante, je pense, de ma vie. Mais je reste proche du sport, très proche.

  • Speaker #0

    Tu as quand même une vision assez optimiste de tout ça maintenant. J'ai l'impression que tu arrives à en parler là avec le sourire. Est-ce que c'est ce que tu fais illusion ou est-ce que tu es ok avec cette période et ça va, c'est facile d'en parler ?

  • Speaker #1

    Oui et non, j'en parle avec le sourire parce que je me dis qu'il y a bien plus grave dans la vie. Mais ouais, c'est toujours difficile. C'est difficile de se dire, j'ai mis mes patins pendant 20 ans de ma vie et puis maintenant c'est terminé. J'ai fait 13 ans de haut niveau, maintenant c'est terminé aussi. Et ça, c'est toujours dur. De voir ses coéquipiers et coéquipières partir à l'entraînement, toi tu te dis, maintenant ce n'est plus ma vie. Je fais du sport, bien sûr, mais il y a des jours avec, des jours sans. Mais oui, je le prends quand même plus avec le sourire qu'il y a quelques mois.

  • Speaker #0

    Justement, tu partages beaucoup ton quotidien sur les réseaux sociaux. Tu partages quand ça ne va pas et ce n'est pas quelque chose que tout le monde fait. En quoi c'est important pour toi ?

  • Speaker #1

    J'ai vraiment envie d'être naturelle et de montrer qu'il y a des moments où ça ne va pas. Et d'ailleurs, il y en a pas mal. Ça dépend des périodes, mais j'ai pas envie de mentir, j'ai pas envie de faire semblant. J'ai pas envie d'envoyer des faux messages d'espoir pour dire que je remarche, je recours, je prépare mes objectifs sportifs et puis tout va bien. Alors qu'en fait, non, j'ai des séquelles. Alors oui, je prépare tout ça, mais il y a quand même les côtés un peu plus sombres. Et puis, je pense que c'est important de le dire parce que c'est la réalité. Et voilà.

  • Speaker #0

    Et comment les gens reçoivent ça ? Est-ce que tu as beaucoup de retours du coup ? Tu as une communauté qui se crée derrière ça ?

  • Speaker #1

    Oui, je pense que ça aide. En tout cas, moi, quand j'étais tétraplégique et dans mon lit d'hôpital, après quelques mois, du coup, quand j'ai retrouvé l'usage de mes bras et de mes mains, je cherchais vraiment ça, quelqu'un à qui me raccrocher. Je cherchais un livre à lire pour me motiver. J'ai cherché pas mal de choses comme ça. D'ailleurs, je racontais que quand j'étais à l'hôpital, je regardais beaucoup, beaucoup de vidéos de personnes qui étaient en train de courir. Donc après, pendant un temps, mon Instagram était juste rempli de personnes en train de courir parce que j'en avais envie, besoin. J'avais juste la tête qui partait dans tous les sens. Et du coup, ça m'a beaucoup aidée. Mais du coup, tout ça pour dire que je pense que ça aide et je reçois beaucoup de messages pour me remercier. Après, je n'attends rien de tout.

  • Speaker #0

    Mais ça te porte quand même ?

  • Speaker #1

    Oui, ça me porte et puis j'ai vraiment envie d'aider. Je vais intégrer la fondation Wings for Life. C'est une fondation qui, justement, crée un événement de course à pied. Je laisserai aller voir cette course pour ne pas prendre trop de temps avec ça, mais ça aide à ramener des fonds pour cette fondation. qui sert à faire des recherches contre la moelle épinière. Donc participer et être active dans ces milieux-là, c'est important aussi pour moi.

  • Speaker #0

    Je reviens sur ce que tu disais un peu avant, que tu consommais beaucoup de contenu, de personnes qui couraient quand tu étais à l'hôpital. Tu n'as pas fait une sorte de réaction allergique au sport, où je ne vais plus en entendre parler, notamment pour le patinage par exemple ?

  • Speaker #1

    Quand j'étais à l'hôpital, après ma blessure, pas du tout. C'était mon moteur premier, le sport, et encore plus le short track. C'était clairement mon moteur premier de me dire, là, tu vois, je me fixe des objectifs comme une sorte de planification, mais pour ma reprise. Et j'avais la tête très dure grâce à ça, parce que je me suis fixé un objectif.

  • Speaker #0

    On va revenir un peu avant le début de ta carrière, tout ça. Ton histoire avec le sport, est-ce que tu as toujours fait du sport ? Tu étais déjà une petite fille sportive ou quand est-ce que ça a commencé ?

  • Speaker #1

    En fait, j'ai un tout petit village du Doubs et il n'y avait pas de... Pas de boulangerie pour dire du coup, il n'y avait vraiment aucun commerce, donc aucun club sportif. Je faisais du sport à l'école, mais rien de plus. Puis du vélo dans le village, mais c'est tout. Et puis en fait, j'ai commencé mon premier sport, c'était le short track. Et gros coup de cœur avec le short track, vraie, vraie passion. Et depuis ce moment-là, depuis mes 9 ans jusqu'à aujourd'hui, j'ai fait du short track tous les jours. Et puis après, forcément, en grandissant, j'ai commencé à m'ouvrir à d'autres sports. à faire du vélo de route, à faire du trail, de la course à pied, du yoga. Et après, j'ai été clairement amoureuse de sport en général.

  • Speaker #0

    Mais c'est marrant de commencer le sport avec le short track, parce que ce n'est quand même pas un truc hyper répandu. Comment tu t'es retrouvée avec des patins aux pieds ?

  • Speaker #1

    Oui, totalement par hasard. En fait, c'est ma voisine qui nous a conduit à la patinoire. Elle faisait du short track quand elle était plus jeune et elle nous a proposé d'essayer. Donc totalement par hasard, sachant qu'on n'avait jamais fait de patins. Même pour le loisir avant ça. Donc, c'était vraiment cool.

  • Speaker #0

    Tu dis on parce que c'est une histoire de famille. Tu patines avec Natia, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Exactement. En fait, je n'arrive pas à dissocier ce on. Jamais. Enfin, je pense que je ne le ferai jamais. Mais on a débuté avec ma soeur jumelle. Et jusqu'à intégrer l'équipe de France Junior ensemble. Donc, histoire de famille. Histoire qui me tient vraiment, vraiment à cœur.

  • Speaker #0

    Et ta soeur, elle continue toujours aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Non, ma soeur, elle a fait une année en sport et de sud. Du coup, en équipe de France Junior. Et ensuite, elle a arrêté. Elle était moins sportive que moi.

  • Speaker #0

    Et puis après, peut-être qu'il y a eu ton accident aussi. Elle, ça a changé peut-être ? Elle ne pratiquait déjà plus à ce moment-là ?

  • Speaker #1

    Elle ne pratiquait plus depuis bien longtemps, depuis plus de dix ans.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que tu aimais et aimes toujours d'ailleurs comme sensation dans ce sport,

  • Speaker #1

    le short track ? Je pense qu'il y a beaucoup trop de choses. Je pourrais faire un chapitre entier dessus. Mais ce qui m'a fait vraiment mal au cœur quand j'ai arrêté, enfin quand on m'a plutôt contrainte à arrêter, Merci. C'est de me dire, je ne ressentirai plus cette vitesse. On va très vite, donc cette vitesse, cette sensation du vent sur le visage, le froid, même si je n'aime pas ça et que je me plaignais tout le temps d'avoir trop froid. Le froid, quand même, c'est quelque chose de particulier quand tu pratiques un sport dans le froid. Et puis après, la compétition, clairement, ça, c'est ce qui m'anime et c'est ce qui m'a animée pendant 13 ans de ma vie. Et je vivais pour ça. Ce stress d'avant-course, et je sais pertinemment que je ne ressentirai plus jamais ça, que ce soit même dans un autre sport, dans un autre projet. Je sais que ça sera différent parce que c'est une passion qui est tellement forte que tu ne peux pas retrouver le même stress et la même envie avant de faire quelque chose.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu avais déjà eu le stress de la blessure, de la chute ? Est-ce que c'est des choses auxquelles tu pensais avant que ça t'arrive ? Est-ce que ça te faisait peur ou tu étais vraiment loin de tout ça ?

  • Speaker #1

    J'ai eu beaucoup de coéquipiers et coéquipières qui se sont blessés, plein, chaque année. Des blessures quand même assez graves, parfois des fractures, ça pouvait être quand même assez grave. Mais moi je n'y ai jamais pensé et puis je ne m'étais jamais blessée. Donc bien sûr ça trotte un petit peu, tu te dis tu fais attention à ton hygiène de vie, à comment tu t'alimentes, à comment est ton sommeil. Tu rythmes ta vie en fonction de ta pratique sportive, donc tu fais attention à tout ça. Non, je n'avais pas spécialement d'appréhension.

  • Speaker #0

    Mais du coup, j'ai l'impression qu'à ton temps, la blessure, c'est un truc assez fréquent dans ce sport ?

  • Speaker #1

    Oui et non. En fait, j'ai eu beaucoup de coéquipiers et coéquipières, du coup, comme je disais, blessés. Mais ça dépend vraiment, je pense, des moments. J'ai eu des collègues qui étaient blessés, je ne sais pas, par exemple, d'une élongation, de périocytes. Du coup, ça dépendait vraiment des cas de figure. Donc, pas tant que ça, finalement.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'aujourd'hui ça a un peu changé ton rapport ? au risque justement de blessures, que ce soit pour toi ou pour les autres, où tu as un peu plus peur ? Là, je ne sais pas, tu ne te dis pas quand tu vas aller voir justement les championnats du monde, je ne sais pas, tu n'as pas l'impression pour les autres ?

  • Speaker #1

    Aux championnats du monde, non, parce que la patinoire, elle est adaptée. là où j'ai eu mon accident, elle était à adaptée aussi. Mais là, par contre, où l'équipe de France s'entraîne, elle n'est pas adaptée. Elle n'est pas aux normes aujourd'hui. Et du coup, si ça, ça me fait peur de me dire qu'ils sont là à s'entraîner tous les jours et qu'une chute peut être vraiment fatale parce qu'on dit souvent que ça n'arrive qu'aux autres, alors que pas du tout. Et si j'avais eu cette chute à fond au meu, là, du coup, où on s'entraîne, on m'a clairement dit que je serais morte sur le coup. Donc, ça, ça me fait un peu peur. Mais après, je sais qu'aux Pays-Bas, tout ira bien.

  • Speaker #0

    Et même pour toi, dans les autres sports que tu pratiques, est-ce que la peur reste là, de la blessure, de la chute ?

  • Speaker #1

    Non, pas du tout. D'ailleurs, on m'a dit il n'y a pas longtemps qu'il fallait que je revoie un peu mes pratiques sportives, parce que ce n'était pas raisonnable. Et en fait, ça ne m'intéresse pas du tout leur discours. J'ai vraiment envie de continuer de pratiquer, par exemple, du vélo de route. Ils me disent, oui, mais t'imagines, si tu chutes, tu pourrais juste tout simplement mourir. Les médecins me l'ont dit, sauf que... Sauf que j'ai juste envie de vivre et que ça fait partie de mes passions et que j'adore ça. Donc non, j'appréhende pas.

  • Speaker #0

    Mais du coup, je me demande quel rapport tu as au risque et au danger.

  • Speaker #1

    Non, mais je pense que ça dépend du curseur. Mais ça dépend aussi comment on se sent dans la maîtrise ou pas de tel ou tel sport. Puis après, même dans la vie en général.

  • Speaker #0

    Et peut-être aussi que malgré tout, finalement, cette blessure, ça t'a peut-être appris à davantage connaître et comprendre ton corps, non ?

  • Speaker #1

    Je pense que quand tu es sportif de haut niveau, tu le connais déjà très bien. Parce qu'en fait, je ne sais pas si tu entends souvent cette phrase, mais ton corps, c'est ton outil de travail. Je ne le dis pas, mais c'est pour l'image. Et du coup, je pense que je me connaissais déjà très bien. Tu arrives à t'écouter mieux et à savoir un peu jauger. Après, en fonction des sportifs, je pense que pareil, la barre est plus ou moins haute. Mais oui, je pense que maintenant, je me connais encore mieux qu'avant.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il y a un passage, une période où ça a été difficile ton rapport avec ton corps ?

  • Speaker #1

    En fait, je me suis toujours dit, bon maintenant c'est comme ça, il faut faire avec, tu vas juste avancer. Mais oui, il y a eu des moments où c'était difficile. D'ailleurs, je disais clairement que je me battais avec, mais aussi contre mon corps, parce que j'apprenais à gérer ses séquelles, j'apprenais à avancer, mais doucement. Il a fallu beaucoup de patience. Mon corps, je l'ai apprivoisé petit à petit.

  • Speaker #0

    Tu parles souvent, j'ai vu dans des interviews ou même sur ce réseau, d'handicap invisible. C'est quoi l'handicap invisible ?

  • Speaker #1

    Du coup, c'est simple, c'est tout ce qu'on ne peut pas voir. Là, aujourd'hui, je pense que si tu demandes à n'importe qui dans la rue de me dire si je suis handicapée ou pas, tout le monde va dire que non et que tout va bien, alors qu'en fait, non, tout ne va pas bien. Ça peut être, par exemple, des douleurs neuropathiques, des spasmes, de la spasticité. mais aussi tout ce qui est laid avec la moelle épinière. Donc il y a beaucoup, beaucoup de choses. Et ça, c'est difficile à gérer au quotidien. C'est pour ça que je dois être suivie à vie. Là, je n'ai énuméré que ces quelques jets. En fait, je me suis dit, j'imaginais pas un instant que la moelle épinière puisse contrôler ça, puisse avoir un impact sur ça. Et c'est assez déroutant.

  • Speaker #0

    C'est pour ça que je te disais, l'impression de mieux connaître son corps. Parce que du coup, tu comprends tout. Est-ce que ta tolérance à la douleur, elle a évolué aussi ?

  • Speaker #1

    Là, je vais avoir l'impression de me jeter des fleurs. Ah, mais pas du tout.

  • Speaker #0

    On est là pour ça aussi.

  • Speaker #1

    Non, pas du tout. Mais en fait, je pense que mon niveau de douleur ou plutôt de perception de la douleur est quand même assez élevé. Ouais, je pense que c'est quand même vraiment assez élevé. Et j'en ai déjà parlé aussi avec d'autres personnes. Et ouais, je pense que c'est le cas.

  • Speaker #0

    Mais du coup, c'est un atout pour... Pour certaines choses, par exemple pour le sport, là tu te lances dans un marathon, on sait que dans un marathon tu passes forcément par la caisse douleur à un moment, du coup c'est un plus finalement peut-être pour toi ?

  • Speaker #1

    Ouais, après je pense qu'au-delà de la perception de la douleur, c'est surtout le mental qui fait une différence, je pense que j'arrive à prendre le dessus avec ma tête clairement.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui t'aide à pallier ce manque de sensations fortes dont tu parlais tout à l'heure, tu me disais je pourrais écrire un livre sur tout ce que m'a apporté ce sport, qu'est-ce qui t'aide aujourd'hui à pallier à ça ou en tout cas à... À apaiser peut-être ce manque ?

  • Speaker #1

    À me fixer des objectifs encore et toujours, des nouveaux challenges. Des nouveaux défis en général, que ce soit dans la vie pro, mais aussi perso et sportive. On parlait du marathon. 15 jours avant, je vais faire la traversée des Alpes avec mon vélo. Du coup, j'ai vraiment besoin de défis et besoin de challenges en permanence.

  • Speaker #0

    Tu n'imagines pas ta vie sans sport ?

  • Speaker #1

    Ah non, pas du tout. Non, mais vraiment pas. Quand j'étais paralysée et que j'étais sur la glace, qu'on attendait les urgences, je me disais mais qu'est-ce que je vais faire si je reste comme ça ? Et pendant un temps... Ça a été quand même assez long le temps sur la glace. Mon esprit partait un peu partout et je me disais stop, arrête de penser à ça. Je veux juste pas y penser. D'ailleurs à l'hôpital, au centre de rééducation, pareil, je m'interdisais à penser que ce ne soit pas envisageable de pouvoir reprendre le patin. Donc le sport en général, ça va au-delà de ça.

  • Speaker #0

    Est-ce que ce moment-là que tu racontes sur la glace où tu vois un peu, t'as toutes tes pensées qui perdent tous les sens, c'est un truc qui te revient souvent ?

  • Speaker #1

    Ouais, clairement. Mais plein de moments. J'ai un peu de flashback de l'accident, mais aussi de ma rééducation. Et puis, qu'est-ce que j'ai pu raconter cette histoire du moment de l'accident à ma sœur et à mon copain ? Je leur ai raconté, mais en boucle, en boucle, en boucle, avec les moindres détails. Donc, ça m'a fait du bien d'extérioriser tout ça. Et puis maintenant, ouais, un peu moins, mais il y a quand même beaucoup de flashs. Je pense que ça me suivra probablement toute ma vie. C'était quand même vraiment quelque chose de... d'indescriptibles et de perturbants au possible.

  • Speaker #0

    C'est choquant que ce soit pour le corps comme pour la tête. Oui,

  • Speaker #1

    clairement.

  • Speaker #0

    Et du coup, comment tu prends... J'imagine que quand on vit quelque chose comme ça, c'est hyper important de prendre soin de sa santé mentale. Qu'est-ce qui t'aide aujourd'hui à en prendre soin ? Le sport, tu vas me dire ?

  • Speaker #1

    Clairement, j'allais dire ça. Le sport et les objectifs, mais aussi de relativiser. Tu te prends... Peut-être moins la tête sur certains trucs, même si j'ai tendance à me prendre la tête pour des petits trucs du quotidien encore. Mais ouais, relativiser et puis te dire que... Impermanence, je sais pas, juste l'impermanence des choses et de te focaliser sur ce qui te fait du bien et ce que t'as envie de faire et de t'entourer des bonnes personnes, ça c'est vraiment très important.

  • Speaker #0

    Tu disais plutôt que tu voyais pas ta vie sans sport. Professionnellement, même si... que ce soit lié aussi dans ta profession, est-ce que déjà, enfant, c'était un truc que... Tu savais que tu travaillerais dans le sport ? Ou tu voulais faire quoi ?

  • Speaker #1

    Alors là, pas du tout. Moi, étant enfant, je rêvais pas du tout de faire les Jeux Olympiques. Je rêvais d'être professeure des écoles. Puis ensuite, en grandissant, donc arrivée en équipe de France, c'est devenu un rêve de faire les Jeux Olympiques, c'est devenu un objectif. Et puis j'avais toujours ce double cursus de devenir professeure des écoles. Et à la suite de ce mois d'octobre de mon accident, je me suis dit, en fait, je ne suis pas prête à quitter le milieu du sport. Je n'ai pas envie de tourner la page, même si tu vois, tu fais du sport pour ton loisir à côté. Tu peux faire peut-être certaines compétitions qui te sont autorisées. Mais je m'étais dit, j'ai vraiment envie de rendre tout ce que ça a pu m'apporter d'une certaine manière, parce que je trouve que ça m'a... Ça a tellement embelli ma vie, le sport, que je me sentais un peu redevable, entre guillemets. Et donc, je me suis inscrite dans un DU de préparation mentale.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    Pour suivre des sportifs, mais pas que. Et ça, c'est un sujet qui m'intéresse vraiment. Ça m'intéressait déjà pendant que je patinais, mais encore plus maintenant.

  • Speaker #0

    Et du coup, quels sont tes projets pros pour la suite ? Est-ce que tu as des idées ?

  • Speaker #1

    J'aimerais vraiment travailler pour une cause qui me tiendrait vraiment à cœur. pour la recherche et puis qu'ils soient liés avec le sport. Mais aussi du coup, faire ma profession de prep mentale. Et puis, je suis prof de yoga aussi, en parallèle de tout ça. Donc, un peu articuler ma vie pro autour de ces axes-là.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu rencontres régulièrement des personnes qui ont subi des accidents aussi liés au sport ? Est-ce que tu échanges beaucoup avec des personnes qui ont... Déjà, personne n'aura le même parcours que toi, mais... Des choses qui se ressemblent, qui se recroisent ?

  • Speaker #1

    Oui, quand même pas mal, que ce soit sur les réseaux. Moi aussi, je suis restée en contact avec des amis dans le centre de rééducation, là où j'étais, à l'hôpital. Et ça, c'est vraiment important pour moi parce que je sais que c'est plus qu'important d'avoir un soutien dans un sens comme dans l'autre. Et de voir un peu les histoires des uns et des autres et de se soutenir.

  • Speaker #0

    Ce podcast, il s'appelle Le Déclic. Est-ce que tu dirais que ton incidence a été d'une certaine manière un déclic pour toi et pourquoi ?

  • Speaker #1

    Oui, clairement, je pense que ça a été plus qu'un déclic de se dire, comme je le disais tout à l'heure, que ça n'arrive pas qu'aux autres. Et que malgré tout ça, la vie est très belle et qu'il ne faut pas l'oublier.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu dirais que tu vas bien aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Je vais mieux, c'est sûr. Mais je pense que oui, je vais bien. Je vais bien et puis il y a de belles choses qui sont en train d'arriver.

  • Speaker #0

    Tu as confiance dans les choses ?

  • Speaker #1

    Oui, j'ai sa vie décidée un peu, mais il faut la provoquer de temps en temps. Mais oui, j'ai confiance.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qu'on peut te souhaiter pour la suite, hormis de triompher sur ce marathon ? Je vais rester bloquée sur ça.

  • Speaker #1

    Triompher, triompher. Moi, mon but, c'est de le finir.

  • Speaker #0

    C'est un triomphe d'une certaine manière.

  • Speaker #1

    Je suis d'accord, je suis d'accord. Après tout ça... Me dire que je n'ai pas couru depuis très longtemps et que finalement, il y a un an et demi, j'étais paralysée. Je me dis que ça peut être très beau. Non, je ne sais pas. Encore une fois, je vais dire quelque chose d'ultra bateau et je le dis tout le temps, mais juste d'être heureuse. Puis d'ailleurs, c'est ce que je souhaite à tout le monde.

  • Speaker #0

    C'est chouette. C'est un beau message pour finir cette émission. Écoute, est-ce qu'on peut te suivre dans tes prochaines aventures et aussi sur les réseaux, là où tu racontes ce qui va ? Et ce qui ne va pas, tes comptes Instagram, tes...

  • Speaker #1

    Oui, sur mon compte, du coup, c'est Tiffany Uyomarchand. Enfin, c'est Tiffany HM, parce que mon nom est à rallonge, donc c'est bon.

  • Speaker #0

    Ça marche. Eh bien, on te suivra dans tes prochaines aventures. Écoute, je te souhaite plein de choses, d'être heureuse, tout simplement. Et merci beaucoup. À bientôt.

  • Speaker #1

    Merci à toi.

  • Speaker #0

    Si cet épisode vous a plu, n'hésitez pas à le partager et à en parler autour de vous. Qui sait, il n'est peut-être pas si loin, ce déclic.

Description

"Patiner, chuter, se relever". Ancienne patineuse de vitesse sur piste courte, une discipline appelée short track, Tifany Huot-Marchand a entre autres, été athlète olympique, championne de France et d’Europe et vice-championne du monde. En octobre 2022, elle vit un grave accident, une chute sur la glace lors d’une compétition internationale. Tifany en ressort gravement blessée, avec une fracture des cervicales : sa moelle épinière est touchée. Les médecins lui annoncent qu’elle restera tétraplégique. Pourtant, l’histoire de Tifany prend un tout autre tournant. Alors, à défaut de pouvoir rechausser tes patins, elle se relève, réapprend à marcher puis à courir. Aujourd’hui, elle prépare son premier marathon.


Dans cet épisode du Déclic, elle se livre sur son parcours : un témoignage fort et inspirant.


 📲💻 Retrouvez Tifany Huot Marchant sur Instagram !


💡⚡✨ Le déclic est une série du podcast Conseil Sport de DECATHLON. Un échange avec des invité·es où l’on parle voyages, rencontres, ruptures, joies, échec… En bref, de transformations. Des parcours de vie inspirants qui ont tous commencé par un déclic. Ce format vous est proposé par Manon, journaliste et sportive passionnée.


🎧🗣 Cet épisode vous a plu ? Parlez-en et partagez-le autour de vous ! Qui sait… Vous tomberez peut-être, vous aussi, sur un déclic.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonne compte, rupture, joie, échec, transformation, bonheur. Tout commence par un déclic. Bonjour à toutes et à tous et bienvenue dans ce nouvel épisode. Vous écoutez le déclic de Tiffany Huot Marchand. Salut Tiffany. Salut. Ça va ?

  • Speaker #1

    Ça va.

  • Speaker #0

    Je suis ravie de te recevoir aujourd'hui dans le Déclic. Je vais commencer par te présenter à nos auditeurs qui ne te connaissent pas. Tiffany, tu as 29 ans, tu as été patineuse de vitesse, athlète olympique à deux reprises. Tu as aussi décroché le titre de championne de France et d'Europe et celui de vice-championne du monde. En octobre 2022, tu as été victime d'un grave accident, une chute sur la glace lors d'une compétition internationale de short track aux Pays-Bas. Le short track, c'est du patinage de vitesse sur piste courte, on peut le définir comme ça ?

  • Speaker #1

    Exactement, j'ai bien révisé.

  • Speaker #0

    Tu ressors gravement blessée de cet accident avec une fracture des cervicales, ta moelle épinaire est touchée également et les médecins t'annoncent que tu resteras désormais tétraplégique et que tu marcheras plus. Et pourtant, tu as remarché assez rapidement, un mois après je crois, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Dix jours après. Dix jours après.

  • Speaker #0

    Moins d'un mois du coup. Voilà, assez impressionnant. Et à force de persévérance, d'envie, de passion et puis de rééducation aussi je pense, tu as repris le sport. Et alors, à défaut de pouvoir rechausser tes patins, tu te lances à un nouveau défi dans une toute autre discipline qui m'est très chère, donc ça p'tit ! Aujourd'hui, tu prépares le Marathon pour tous de Paris 2024 qui aura lieu cet été. J'imagine que cette présentation qui reprend ton parcours sportif, ton accident, c'est des choses que tu as l'habitude d'entendre et de réentendre. Qu'est-ce que ça te fait encore aujourd'hui ? Quel rapport est-ce que tu as avec cette période de ta vie, avec cette histoire, avec ton histoire en fait ?

  • Speaker #1

    Ça a été difficile quand on m'a appris que je ne pourrais plus repatiner. Ça reste ma passion et j'ai suivi absolument toutes les courses depuis mon accident. J'ai regardé toutes les Coupes du Monde. Et puis là, tu vois, la semaine prochaine, le week-end prochain, les Championnats du Monde auront lieu à Rotterdam. Et je vais y aller, je vais aller voir les Championnats du Monde. Tu vois, rien que d'en parler, ça me donne un peu des frissons parce que je ne suis pas rentrée de nouveau dans une patinoire pour voir du short track depuis. Donc ça va être une étape importante, je pense, de ma vie. Mais je reste proche du sport, très proche.

  • Speaker #0

    Tu as quand même une vision assez optimiste de tout ça maintenant. J'ai l'impression que tu arrives à en parler là avec le sourire. Est-ce que c'est ce que tu fais illusion ou est-ce que tu es ok avec cette période et ça va, c'est facile d'en parler ?

  • Speaker #1

    Oui et non, j'en parle avec le sourire parce que je me dis qu'il y a bien plus grave dans la vie. Mais ouais, c'est toujours difficile. C'est difficile de se dire, j'ai mis mes patins pendant 20 ans de ma vie et puis maintenant c'est terminé. J'ai fait 13 ans de haut niveau, maintenant c'est terminé aussi. Et ça, c'est toujours dur. De voir ses coéquipiers et coéquipières partir à l'entraînement, toi tu te dis, maintenant ce n'est plus ma vie. Je fais du sport, bien sûr, mais il y a des jours avec, des jours sans. Mais oui, je le prends quand même plus avec le sourire qu'il y a quelques mois.

  • Speaker #0

    Justement, tu partages beaucoup ton quotidien sur les réseaux sociaux. Tu partages quand ça ne va pas et ce n'est pas quelque chose que tout le monde fait. En quoi c'est important pour toi ?

  • Speaker #1

    J'ai vraiment envie d'être naturelle et de montrer qu'il y a des moments où ça ne va pas. Et d'ailleurs, il y en a pas mal. Ça dépend des périodes, mais j'ai pas envie de mentir, j'ai pas envie de faire semblant. J'ai pas envie d'envoyer des faux messages d'espoir pour dire que je remarche, je recours, je prépare mes objectifs sportifs et puis tout va bien. Alors qu'en fait, non, j'ai des séquelles. Alors oui, je prépare tout ça, mais il y a quand même les côtés un peu plus sombres. Et puis, je pense que c'est important de le dire parce que c'est la réalité. Et voilà.

  • Speaker #0

    Et comment les gens reçoivent ça ? Est-ce que tu as beaucoup de retours du coup ? Tu as une communauté qui se crée derrière ça ?

  • Speaker #1

    Oui, je pense que ça aide. En tout cas, moi, quand j'étais tétraplégique et dans mon lit d'hôpital, après quelques mois, du coup, quand j'ai retrouvé l'usage de mes bras et de mes mains, je cherchais vraiment ça, quelqu'un à qui me raccrocher. Je cherchais un livre à lire pour me motiver. J'ai cherché pas mal de choses comme ça. D'ailleurs, je racontais que quand j'étais à l'hôpital, je regardais beaucoup, beaucoup de vidéos de personnes qui étaient en train de courir. Donc après, pendant un temps, mon Instagram était juste rempli de personnes en train de courir parce que j'en avais envie, besoin. J'avais juste la tête qui partait dans tous les sens. Et du coup, ça m'a beaucoup aidée. Mais du coup, tout ça pour dire que je pense que ça aide et je reçois beaucoup de messages pour me remercier. Après, je n'attends rien de tout.

  • Speaker #0

    Mais ça te porte quand même ?

  • Speaker #1

    Oui, ça me porte et puis j'ai vraiment envie d'aider. Je vais intégrer la fondation Wings for Life. C'est une fondation qui, justement, crée un événement de course à pied. Je laisserai aller voir cette course pour ne pas prendre trop de temps avec ça, mais ça aide à ramener des fonds pour cette fondation. qui sert à faire des recherches contre la moelle épinière. Donc participer et être active dans ces milieux-là, c'est important aussi pour moi.

  • Speaker #0

    Je reviens sur ce que tu disais un peu avant, que tu consommais beaucoup de contenu, de personnes qui couraient quand tu étais à l'hôpital. Tu n'as pas fait une sorte de réaction allergique au sport, où je ne vais plus en entendre parler, notamment pour le patinage par exemple ?

  • Speaker #1

    Quand j'étais à l'hôpital, après ma blessure, pas du tout. C'était mon moteur premier, le sport, et encore plus le short track. C'était clairement mon moteur premier de me dire, là, tu vois, je me fixe des objectifs comme une sorte de planification, mais pour ma reprise. Et j'avais la tête très dure grâce à ça, parce que je me suis fixé un objectif.

  • Speaker #0

    On va revenir un peu avant le début de ta carrière, tout ça. Ton histoire avec le sport, est-ce que tu as toujours fait du sport ? Tu étais déjà une petite fille sportive ou quand est-ce que ça a commencé ?

  • Speaker #1

    En fait, j'ai un tout petit village du Doubs et il n'y avait pas de... Pas de boulangerie pour dire du coup, il n'y avait vraiment aucun commerce, donc aucun club sportif. Je faisais du sport à l'école, mais rien de plus. Puis du vélo dans le village, mais c'est tout. Et puis en fait, j'ai commencé mon premier sport, c'était le short track. Et gros coup de cœur avec le short track, vraie, vraie passion. Et depuis ce moment-là, depuis mes 9 ans jusqu'à aujourd'hui, j'ai fait du short track tous les jours. Et puis après, forcément, en grandissant, j'ai commencé à m'ouvrir à d'autres sports. à faire du vélo de route, à faire du trail, de la course à pied, du yoga. Et après, j'ai été clairement amoureuse de sport en général.

  • Speaker #0

    Mais c'est marrant de commencer le sport avec le short track, parce que ce n'est quand même pas un truc hyper répandu. Comment tu t'es retrouvée avec des patins aux pieds ?

  • Speaker #1

    Oui, totalement par hasard. En fait, c'est ma voisine qui nous a conduit à la patinoire. Elle faisait du short track quand elle était plus jeune et elle nous a proposé d'essayer. Donc totalement par hasard, sachant qu'on n'avait jamais fait de patins. Même pour le loisir avant ça. Donc, c'était vraiment cool.

  • Speaker #0

    Tu dis on parce que c'est une histoire de famille. Tu patines avec Natia, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Exactement. En fait, je n'arrive pas à dissocier ce on. Jamais. Enfin, je pense que je ne le ferai jamais. Mais on a débuté avec ma soeur jumelle. Et jusqu'à intégrer l'équipe de France Junior ensemble. Donc, histoire de famille. Histoire qui me tient vraiment, vraiment à cœur.

  • Speaker #0

    Et ta soeur, elle continue toujours aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Non, ma soeur, elle a fait une année en sport et de sud. Du coup, en équipe de France Junior. Et ensuite, elle a arrêté. Elle était moins sportive que moi.

  • Speaker #0

    Et puis après, peut-être qu'il y a eu ton accident aussi. Elle, ça a changé peut-être ? Elle ne pratiquait déjà plus à ce moment-là ?

  • Speaker #1

    Elle ne pratiquait plus depuis bien longtemps, depuis plus de dix ans.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que tu aimais et aimes toujours d'ailleurs comme sensation dans ce sport,

  • Speaker #1

    le short track ? Je pense qu'il y a beaucoup trop de choses. Je pourrais faire un chapitre entier dessus. Mais ce qui m'a fait vraiment mal au cœur quand j'ai arrêté, enfin quand on m'a plutôt contrainte à arrêter, Merci. C'est de me dire, je ne ressentirai plus cette vitesse. On va très vite, donc cette vitesse, cette sensation du vent sur le visage, le froid, même si je n'aime pas ça et que je me plaignais tout le temps d'avoir trop froid. Le froid, quand même, c'est quelque chose de particulier quand tu pratiques un sport dans le froid. Et puis après, la compétition, clairement, ça, c'est ce qui m'anime et c'est ce qui m'a animée pendant 13 ans de ma vie. Et je vivais pour ça. Ce stress d'avant-course, et je sais pertinemment que je ne ressentirai plus jamais ça, que ce soit même dans un autre sport, dans un autre projet. Je sais que ça sera différent parce que c'est une passion qui est tellement forte que tu ne peux pas retrouver le même stress et la même envie avant de faire quelque chose.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu avais déjà eu le stress de la blessure, de la chute ? Est-ce que c'est des choses auxquelles tu pensais avant que ça t'arrive ? Est-ce que ça te faisait peur ou tu étais vraiment loin de tout ça ?

  • Speaker #1

    J'ai eu beaucoup de coéquipiers et coéquipières qui se sont blessés, plein, chaque année. Des blessures quand même assez graves, parfois des fractures, ça pouvait être quand même assez grave. Mais moi je n'y ai jamais pensé et puis je ne m'étais jamais blessée. Donc bien sûr ça trotte un petit peu, tu te dis tu fais attention à ton hygiène de vie, à comment tu t'alimentes, à comment est ton sommeil. Tu rythmes ta vie en fonction de ta pratique sportive, donc tu fais attention à tout ça. Non, je n'avais pas spécialement d'appréhension.

  • Speaker #0

    Mais du coup, j'ai l'impression qu'à ton temps, la blessure, c'est un truc assez fréquent dans ce sport ?

  • Speaker #1

    Oui et non. En fait, j'ai eu beaucoup de coéquipiers et coéquipières, du coup, comme je disais, blessés. Mais ça dépend vraiment, je pense, des moments. J'ai eu des collègues qui étaient blessés, je ne sais pas, par exemple, d'une élongation, de périocytes. Du coup, ça dépendait vraiment des cas de figure. Donc, pas tant que ça, finalement.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'aujourd'hui ça a un peu changé ton rapport ? au risque justement de blessures, que ce soit pour toi ou pour les autres, où tu as un peu plus peur ? Là, je ne sais pas, tu ne te dis pas quand tu vas aller voir justement les championnats du monde, je ne sais pas, tu n'as pas l'impression pour les autres ?

  • Speaker #1

    Aux championnats du monde, non, parce que la patinoire, elle est adaptée. là où j'ai eu mon accident, elle était à adaptée aussi. Mais là, par contre, où l'équipe de France s'entraîne, elle n'est pas adaptée. Elle n'est pas aux normes aujourd'hui. Et du coup, si ça, ça me fait peur de me dire qu'ils sont là à s'entraîner tous les jours et qu'une chute peut être vraiment fatale parce qu'on dit souvent que ça n'arrive qu'aux autres, alors que pas du tout. Et si j'avais eu cette chute à fond au meu, là, du coup, où on s'entraîne, on m'a clairement dit que je serais morte sur le coup. Donc, ça, ça me fait un peu peur. Mais après, je sais qu'aux Pays-Bas, tout ira bien.

  • Speaker #0

    Et même pour toi, dans les autres sports que tu pratiques, est-ce que la peur reste là, de la blessure, de la chute ?

  • Speaker #1

    Non, pas du tout. D'ailleurs, on m'a dit il n'y a pas longtemps qu'il fallait que je revoie un peu mes pratiques sportives, parce que ce n'était pas raisonnable. Et en fait, ça ne m'intéresse pas du tout leur discours. J'ai vraiment envie de continuer de pratiquer, par exemple, du vélo de route. Ils me disent, oui, mais t'imagines, si tu chutes, tu pourrais juste tout simplement mourir. Les médecins me l'ont dit, sauf que... Sauf que j'ai juste envie de vivre et que ça fait partie de mes passions et que j'adore ça. Donc non, j'appréhende pas.

  • Speaker #0

    Mais du coup, je me demande quel rapport tu as au risque et au danger.

  • Speaker #1

    Non, mais je pense que ça dépend du curseur. Mais ça dépend aussi comment on se sent dans la maîtrise ou pas de tel ou tel sport. Puis après, même dans la vie en général.

  • Speaker #0

    Et peut-être aussi que malgré tout, finalement, cette blessure, ça t'a peut-être appris à davantage connaître et comprendre ton corps, non ?

  • Speaker #1

    Je pense que quand tu es sportif de haut niveau, tu le connais déjà très bien. Parce qu'en fait, je ne sais pas si tu entends souvent cette phrase, mais ton corps, c'est ton outil de travail. Je ne le dis pas, mais c'est pour l'image. Et du coup, je pense que je me connaissais déjà très bien. Tu arrives à t'écouter mieux et à savoir un peu jauger. Après, en fonction des sportifs, je pense que pareil, la barre est plus ou moins haute. Mais oui, je pense que maintenant, je me connais encore mieux qu'avant.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il y a un passage, une période où ça a été difficile ton rapport avec ton corps ?

  • Speaker #1

    En fait, je me suis toujours dit, bon maintenant c'est comme ça, il faut faire avec, tu vas juste avancer. Mais oui, il y a eu des moments où c'était difficile. D'ailleurs, je disais clairement que je me battais avec, mais aussi contre mon corps, parce que j'apprenais à gérer ses séquelles, j'apprenais à avancer, mais doucement. Il a fallu beaucoup de patience. Mon corps, je l'ai apprivoisé petit à petit.

  • Speaker #0

    Tu parles souvent, j'ai vu dans des interviews ou même sur ce réseau, d'handicap invisible. C'est quoi l'handicap invisible ?

  • Speaker #1

    Du coup, c'est simple, c'est tout ce qu'on ne peut pas voir. Là, aujourd'hui, je pense que si tu demandes à n'importe qui dans la rue de me dire si je suis handicapée ou pas, tout le monde va dire que non et que tout va bien, alors qu'en fait, non, tout ne va pas bien. Ça peut être, par exemple, des douleurs neuropathiques, des spasmes, de la spasticité. mais aussi tout ce qui est laid avec la moelle épinière. Donc il y a beaucoup, beaucoup de choses. Et ça, c'est difficile à gérer au quotidien. C'est pour ça que je dois être suivie à vie. Là, je n'ai énuméré que ces quelques jets. En fait, je me suis dit, j'imaginais pas un instant que la moelle épinière puisse contrôler ça, puisse avoir un impact sur ça. Et c'est assez déroutant.

  • Speaker #0

    C'est pour ça que je te disais, l'impression de mieux connaître son corps. Parce que du coup, tu comprends tout. Est-ce que ta tolérance à la douleur, elle a évolué aussi ?

  • Speaker #1

    Là, je vais avoir l'impression de me jeter des fleurs. Ah, mais pas du tout.

  • Speaker #0

    On est là pour ça aussi.

  • Speaker #1

    Non, pas du tout. Mais en fait, je pense que mon niveau de douleur ou plutôt de perception de la douleur est quand même assez élevé. Ouais, je pense que c'est quand même vraiment assez élevé. Et j'en ai déjà parlé aussi avec d'autres personnes. Et ouais, je pense que c'est le cas.

  • Speaker #0

    Mais du coup, c'est un atout pour... Pour certaines choses, par exemple pour le sport, là tu te lances dans un marathon, on sait que dans un marathon tu passes forcément par la caisse douleur à un moment, du coup c'est un plus finalement peut-être pour toi ?

  • Speaker #1

    Ouais, après je pense qu'au-delà de la perception de la douleur, c'est surtout le mental qui fait une différence, je pense que j'arrive à prendre le dessus avec ma tête clairement.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui t'aide à pallier ce manque de sensations fortes dont tu parlais tout à l'heure, tu me disais je pourrais écrire un livre sur tout ce que m'a apporté ce sport, qu'est-ce qui t'aide aujourd'hui à pallier à ça ou en tout cas à... À apaiser peut-être ce manque ?

  • Speaker #1

    À me fixer des objectifs encore et toujours, des nouveaux challenges. Des nouveaux défis en général, que ce soit dans la vie pro, mais aussi perso et sportive. On parlait du marathon. 15 jours avant, je vais faire la traversée des Alpes avec mon vélo. Du coup, j'ai vraiment besoin de défis et besoin de challenges en permanence.

  • Speaker #0

    Tu n'imagines pas ta vie sans sport ?

  • Speaker #1

    Ah non, pas du tout. Non, mais vraiment pas. Quand j'étais paralysée et que j'étais sur la glace, qu'on attendait les urgences, je me disais mais qu'est-ce que je vais faire si je reste comme ça ? Et pendant un temps... Ça a été quand même assez long le temps sur la glace. Mon esprit partait un peu partout et je me disais stop, arrête de penser à ça. Je veux juste pas y penser. D'ailleurs à l'hôpital, au centre de rééducation, pareil, je m'interdisais à penser que ce ne soit pas envisageable de pouvoir reprendre le patin. Donc le sport en général, ça va au-delà de ça.

  • Speaker #0

    Est-ce que ce moment-là que tu racontes sur la glace où tu vois un peu, t'as toutes tes pensées qui perdent tous les sens, c'est un truc qui te revient souvent ?

  • Speaker #1

    Ouais, clairement. Mais plein de moments. J'ai un peu de flashback de l'accident, mais aussi de ma rééducation. Et puis, qu'est-ce que j'ai pu raconter cette histoire du moment de l'accident à ma sœur et à mon copain ? Je leur ai raconté, mais en boucle, en boucle, en boucle, avec les moindres détails. Donc, ça m'a fait du bien d'extérioriser tout ça. Et puis maintenant, ouais, un peu moins, mais il y a quand même beaucoup de flashs. Je pense que ça me suivra probablement toute ma vie. C'était quand même vraiment quelque chose de... d'indescriptibles et de perturbants au possible.

  • Speaker #0

    C'est choquant que ce soit pour le corps comme pour la tête. Oui,

  • Speaker #1

    clairement.

  • Speaker #0

    Et du coup, comment tu prends... J'imagine que quand on vit quelque chose comme ça, c'est hyper important de prendre soin de sa santé mentale. Qu'est-ce qui t'aide aujourd'hui à en prendre soin ? Le sport, tu vas me dire ?

  • Speaker #1

    Clairement, j'allais dire ça. Le sport et les objectifs, mais aussi de relativiser. Tu te prends... Peut-être moins la tête sur certains trucs, même si j'ai tendance à me prendre la tête pour des petits trucs du quotidien encore. Mais ouais, relativiser et puis te dire que... Impermanence, je sais pas, juste l'impermanence des choses et de te focaliser sur ce qui te fait du bien et ce que t'as envie de faire et de t'entourer des bonnes personnes, ça c'est vraiment très important.

  • Speaker #0

    Tu disais plutôt que tu voyais pas ta vie sans sport. Professionnellement, même si... que ce soit lié aussi dans ta profession, est-ce que déjà, enfant, c'était un truc que... Tu savais que tu travaillerais dans le sport ? Ou tu voulais faire quoi ?

  • Speaker #1

    Alors là, pas du tout. Moi, étant enfant, je rêvais pas du tout de faire les Jeux Olympiques. Je rêvais d'être professeure des écoles. Puis ensuite, en grandissant, donc arrivée en équipe de France, c'est devenu un rêve de faire les Jeux Olympiques, c'est devenu un objectif. Et puis j'avais toujours ce double cursus de devenir professeure des écoles. Et à la suite de ce mois d'octobre de mon accident, je me suis dit, en fait, je ne suis pas prête à quitter le milieu du sport. Je n'ai pas envie de tourner la page, même si tu vois, tu fais du sport pour ton loisir à côté. Tu peux faire peut-être certaines compétitions qui te sont autorisées. Mais je m'étais dit, j'ai vraiment envie de rendre tout ce que ça a pu m'apporter d'une certaine manière, parce que je trouve que ça m'a... Ça a tellement embelli ma vie, le sport, que je me sentais un peu redevable, entre guillemets. Et donc, je me suis inscrite dans un DU de préparation mentale.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    Pour suivre des sportifs, mais pas que. Et ça, c'est un sujet qui m'intéresse vraiment. Ça m'intéressait déjà pendant que je patinais, mais encore plus maintenant.

  • Speaker #0

    Et du coup, quels sont tes projets pros pour la suite ? Est-ce que tu as des idées ?

  • Speaker #1

    J'aimerais vraiment travailler pour une cause qui me tiendrait vraiment à cœur. pour la recherche et puis qu'ils soient liés avec le sport. Mais aussi du coup, faire ma profession de prep mentale. Et puis, je suis prof de yoga aussi, en parallèle de tout ça. Donc, un peu articuler ma vie pro autour de ces axes-là.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu rencontres régulièrement des personnes qui ont subi des accidents aussi liés au sport ? Est-ce que tu échanges beaucoup avec des personnes qui ont... Déjà, personne n'aura le même parcours que toi, mais... Des choses qui se ressemblent, qui se recroisent ?

  • Speaker #1

    Oui, quand même pas mal, que ce soit sur les réseaux. Moi aussi, je suis restée en contact avec des amis dans le centre de rééducation, là où j'étais, à l'hôpital. Et ça, c'est vraiment important pour moi parce que je sais que c'est plus qu'important d'avoir un soutien dans un sens comme dans l'autre. Et de voir un peu les histoires des uns et des autres et de se soutenir.

  • Speaker #0

    Ce podcast, il s'appelle Le Déclic. Est-ce que tu dirais que ton incidence a été d'une certaine manière un déclic pour toi et pourquoi ?

  • Speaker #1

    Oui, clairement, je pense que ça a été plus qu'un déclic de se dire, comme je le disais tout à l'heure, que ça n'arrive pas qu'aux autres. Et que malgré tout ça, la vie est très belle et qu'il ne faut pas l'oublier.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu dirais que tu vas bien aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Je vais mieux, c'est sûr. Mais je pense que oui, je vais bien. Je vais bien et puis il y a de belles choses qui sont en train d'arriver.

  • Speaker #0

    Tu as confiance dans les choses ?

  • Speaker #1

    Oui, j'ai sa vie décidée un peu, mais il faut la provoquer de temps en temps. Mais oui, j'ai confiance.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qu'on peut te souhaiter pour la suite, hormis de triompher sur ce marathon ? Je vais rester bloquée sur ça.

  • Speaker #1

    Triompher, triompher. Moi, mon but, c'est de le finir.

  • Speaker #0

    C'est un triomphe d'une certaine manière.

  • Speaker #1

    Je suis d'accord, je suis d'accord. Après tout ça... Me dire que je n'ai pas couru depuis très longtemps et que finalement, il y a un an et demi, j'étais paralysée. Je me dis que ça peut être très beau. Non, je ne sais pas. Encore une fois, je vais dire quelque chose d'ultra bateau et je le dis tout le temps, mais juste d'être heureuse. Puis d'ailleurs, c'est ce que je souhaite à tout le monde.

  • Speaker #0

    C'est chouette. C'est un beau message pour finir cette émission. Écoute, est-ce qu'on peut te suivre dans tes prochaines aventures et aussi sur les réseaux, là où tu racontes ce qui va ? Et ce qui ne va pas, tes comptes Instagram, tes...

  • Speaker #1

    Oui, sur mon compte, du coup, c'est Tiffany Uyomarchand. Enfin, c'est Tiffany HM, parce que mon nom est à rallonge, donc c'est bon.

  • Speaker #0

    Ça marche. Eh bien, on te suivra dans tes prochaines aventures. Écoute, je te souhaite plein de choses, d'être heureuse, tout simplement. Et merci beaucoup. À bientôt.

  • Speaker #1

    Merci à toi.

  • Speaker #0

    Si cet épisode vous a plu, n'hésitez pas à le partager et à en parler autour de vous. Qui sait, il n'est peut-être pas si loin, ce déclic.

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Description

"Patiner, chuter, se relever". Ancienne patineuse de vitesse sur piste courte, une discipline appelée short track, Tifany Huot-Marchand a entre autres, été athlète olympique, championne de France et d’Europe et vice-championne du monde. En octobre 2022, elle vit un grave accident, une chute sur la glace lors d’une compétition internationale. Tifany en ressort gravement blessée, avec une fracture des cervicales : sa moelle épinière est touchée. Les médecins lui annoncent qu’elle restera tétraplégique. Pourtant, l’histoire de Tifany prend un tout autre tournant. Alors, à défaut de pouvoir rechausser tes patins, elle se relève, réapprend à marcher puis à courir. Aujourd’hui, elle prépare son premier marathon.


Dans cet épisode du Déclic, elle se livre sur son parcours : un témoignage fort et inspirant.


 📲💻 Retrouvez Tifany Huot Marchant sur Instagram !


💡⚡✨ Le déclic est une série du podcast Conseil Sport de DECATHLON. Un échange avec des invité·es où l’on parle voyages, rencontres, ruptures, joies, échec… En bref, de transformations. Des parcours de vie inspirants qui ont tous commencé par un déclic. Ce format vous est proposé par Manon, journaliste et sportive passionnée.


🎧🗣 Cet épisode vous a plu ? Parlez-en et partagez-le autour de vous ! Qui sait… Vous tomberez peut-être, vous aussi, sur un déclic.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonne compte, rupture, joie, échec, transformation, bonheur. Tout commence par un déclic. Bonjour à toutes et à tous et bienvenue dans ce nouvel épisode. Vous écoutez le déclic de Tiffany Huot Marchand. Salut Tiffany. Salut. Ça va ?

  • Speaker #1

    Ça va.

  • Speaker #0

    Je suis ravie de te recevoir aujourd'hui dans le Déclic. Je vais commencer par te présenter à nos auditeurs qui ne te connaissent pas. Tiffany, tu as 29 ans, tu as été patineuse de vitesse, athlète olympique à deux reprises. Tu as aussi décroché le titre de championne de France et d'Europe et celui de vice-championne du monde. En octobre 2022, tu as été victime d'un grave accident, une chute sur la glace lors d'une compétition internationale de short track aux Pays-Bas. Le short track, c'est du patinage de vitesse sur piste courte, on peut le définir comme ça ?

  • Speaker #1

    Exactement, j'ai bien révisé.

  • Speaker #0

    Tu ressors gravement blessée de cet accident avec une fracture des cervicales, ta moelle épinaire est touchée également et les médecins t'annoncent que tu resteras désormais tétraplégique et que tu marcheras plus. Et pourtant, tu as remarché assez rapidement, un mois après je crois, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Dix jours après. Dix jours après.

  • Speaker #0

    Moins d'un mois du coup. Voilà, assez impressionnant. Et à force de persévérance, d'envie, de passion et puis de rééducation aussi je pense, tu as repris le sport. Et alors, à défaut de pouvoir rechausser tes patins, tu te lances à un nouveau défi dans une toute autre discipline qui m'est très chère, donc ça p'tit ! Aujourd'hui, tu prépares le Marathon pour tous de Paris 2024 qui aura lieu cet été. J'imagine que cette présentation qui reprend ton parcours sportif, ton accident, c'est des choses que tu as l'habitude d'entendre et de réentendre. Qu'est-ce que ça te fait encore aujourd'hui ? Quel rapport est-ce que tu as avec cette période de ta vie, avec cette histoire, avec ton histoire en fait ?

  • Speaker #1

    Ça a été difficile quand on m'a appris que je ne pourrais plus repatiner. Ça reste ma passion et j'ai suivi absolument toutes les courses depuis mon accident. J'ai regardé toutes les Coupes du Monde. Et puis là, tu vois, la semaine prochaine, le week-end prochain, les Championnats du Monde auront lieu à Rotterdam. Et je vais y aller, je vais aller voir les Championnats du Monde. Tu vois, rien que d'en parler, ça me donne un peu des frissons parce que je ne suis pas rentrée de nouveau dans une patinoire pour voir du short track depuis. Donc ça va être une étape importante, je pense, de ma vie. Mais je reste proche du sport, très proche.

  • Speaker #0

    Tu as quand même une vision assez optimiste de tout ça maintenant. J'ai l'impression que tu arrives à en parler là avec le sourire. Est-ce que c'est ce que tu fais illusion ou est-ce que tu es ok avec cette période et ça va, c'est facile d'en parler ?

  • Speaker #1

    Oui et non, j'en parle avec le sourire parce que je me dis qu'il y a bien plus grave dans la vie. Mais ouais, c'est toujours difficile. C'est difficile de se dire, j'ai mis mes patins pendant 20 ans de ma vie et puis maintenant c'est terminé. J'ai fait 13 ans de haut niveau, maintenant c'est terminé aussi. Et ça, c'est toujours dur. De voir ses coéquipiers et coéquipières partir à l'entraînement, toi tu te dis, maintenant ce n'est plus ma vie. Je fais du sport, bien sûr, mais il y a des jours avec, des jours sans. Mais oui, je le prends quand même plus avec le sourire qu'il y a quelques mois.

  • Speaker #0

    Justement, tu partages beaucoup ton quotidien sur les réseaux sociaux. Tu partages quand ça ne va pas et ce n'est pas quelque chose que tout le monde fait. En quoi c'est important pour toi ?

  • Speaker #1

    J'ai vraiment envie d'être naturelle et de montrer qu'il y a des moments où ça ne va pas. Et d'ailleurs, il y en a pas mal. Ça dépend des périodes, mais j'ai pas envie de mentir, j'ai pas envie de faire semblant. J'ai pas envie d'envoyer des faux messages d'espoir pour dire que je remarche, je recours, je prépare mes objectifs sportifs et puis tout va bien. Alors qu'en fait, non, j'ai des séquelles. Alors oui, je prépare tout ça, mais il y a quand même les côtés un peu plus sombres. Et puis, je pense que c'est important de le dire parce que c'est la réalité. Et voilà.

  • Speaker #0

    Et comment les gens reçoivent ça ? Est-ce que tu as beaucoup de retours du coup ? Tu as une communauté qui se crée derrière ça ?

  • Speaker #1

    Oui, je pense que ça aide. En tout cas, moi, quand j'étais tétraplégique et dans mon lit d'hôpital, après quelques mois, du coup, quand j'ai retrouvé l'usage de mes bras et de mes mains, je cherchais vraiment ça, quelqu'un à qui me raccrocher. Je cherchais un livre à lire pour me motiver. J'ai cherché pas mal de choses comme ça. D'ailleurs, je racontais que quand j'étais à l'hôpital, je regardais beaucoup, beaucoup de vidéos de personnes qui étaient en train de courir. Donc après, pendant un temps, mon Instagram était juste rempli de personnes en train de courir parce que j'en avais envie, besoin. J'avais juste la tête qui partait dans tous les sens. Et du coup, ça m'a beaucoup aidée. Mais du coup, tout ça pour dire que je pense que ça aide et je reçois beaucoup de messages pour me remercier. Après, je n'attends rien de tout.

  • Speaker #0

    Mais ça te porte quand même ?

  • Speaker #1

    Oui, ça me porte et puis j'ai vraiment envie d'aider. Je vais intégrer la fondation Wings for Life. C'est une fondation qui, justement, crée un événement de course à pied. Je laisserai aller voir cette course pour ne pas prendre trop de temps avec ça, mais ça aide à ramener des fonds pour cette fondation. qui sert à faire des recherches contre la moelle épinière. Donc participer et être active dans ces milieux-là, c'est important aussi pour moi.

  • Speaker #0

    Je reviens sur ce que tu disais un peu avant, que tu consommais beaucoup de contenu, de personnes qui couraient quand tu étais à l'hôpital. Tu n'as pas fait une sorte de réaction allergique au sport, où je ne vais plus en entendre parler, notamment pour le patinage par exemple ?

  • Speaker #1

    Quand j'étais à l'hôpital, après ma blessure, pas du tout. C'était mon moteur premier, le sport, et encore plus le short track. C'était clairement mon moteur premier de me dire, là, tu vois, je me fixe des objectifs comme une sorte de planification, mais pour ma reprise. Et j'avais la tête très dure grâce à ça, parce que je me suis fixé un objectif.

  • Speaker #0

    On va revenir un peu avant le début de ta carrière, tout ça. Ton histoire avec le sport, est-ce que tu as toujours fait du sport ? Tu étais déjà une petite fille sportive ou quand est-ce que ça a commencé ?

  • Speaker #1

    En fait, j'ai un tout petit village du Doubs et il n'y avait pas de... Pas de boulangerie pour dire du coup, il n'y avait vraiment aucun commerce, donc aucun club sportif. Je faisais du sport à l'école, mais rien de plus. Puis du vélo dans le village, mais c'est tout. Et puis en fait, j'ai commencé mon premier sport, c'était le short track. Et gros coup de cœur avec le short track, vraie, vraie passion. Et depuis ce moment-là, depuis mes 9 ans jusqu'à aujourd'hui, j'ai fait du short track tous les jours. Et puis après, forcément, en grandissant, j'ai commencé à m'ouvrir à d'autres sports. à faire du vélo de route, à faire du trail, de la course à pied, du yoga. Et après, j'ai été clairement amoureuse de sport en général.

  • Speaker #0

    Mais c'est marrant de commencer le sport avec le short track, parce que ce n'est quand même pas un truc hyper répandu. Comment tu t'es retrouvée avec des patins aux pieds ?

  • Speaker #1

    Oui, totalement par hasard. En fait, c'est ma voisine qui nous a conduit à la patinoire. Elle faisait du short track quand elle était plus jeune et elle nous a proposé d'essayer. Donc totalement par hasard, sachant qu'on n'avait jamais fait de patins. Même pour le loisir avant ça. Donc, c'était vraiment cool.

  • Speaker #0

    Tu dis on parce que c'est une histoire de famille. Tu patines avec Natia, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Exactement. En fait, je n'arrive pas à dissocier ce on. Jamais. Enfin, je pense que je ne le ferai jamais. Mais on a débuté avec ma soeur jumelle. Et jusqu'à intégrer l'équipe de France Junior ensemble. Donc, histoire de famille. Histoire qui me tient vraiment, vraiment à cœur.

  • Speaker #0

    Et ta soeur, elle continue toujours aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Non, ma soeur, elle a fait une année en sport et de sud. Du coup, en équipe de France Junior. Et ensuite, elle a arrêté. Elle était moins sportive que moi.

  • Speaker #0

    Et puis après, peut-être qu'il y a eu ton accident aussi. Elle, ça a changé peut-être ? Elle ne pratiquait déjà plus à ce moment-là ?

  • Speaker #1

    Elle ne pratiquait plus depuis bien longtemps, depuis plus de dix ans.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que tu aimais et aimes toujours d'ailleurs comme sensation dans ce sport,

  • Speaker #1

    le short track ? Je pense qu'il y a beaucoup trop de choses. Je pourrais faire un chapitre entier dessus. Mais ce qui m'a fait vraiment mal au cœur quand j'ai arrêté, enfin quand on m'a plutôt contrainte à arrêter, Merci. C'est de me dire, je ne ressentirai plus cette vitesse. On va très vite, donc cette vitesse, cette sensation du vent sur le visage, le froid, même si je n'aime pas ça et que je me plaignais tout le temps d'avoir trop froid. Le froid, quand même, c'est quelque chose de particulier quand tu pratiques un sport dans le froid. Et puis après, la compétition, clairement, ça, c'est ce qui m'anime et c'est ce qui m'a animée pendant 13 ans de ma vie. Et je vivais pour ça. Ce stress d'avant-course, et je sais pertinemment que je ne ressentirai plus jamais ça, que ce soit même dans un autre sport, dans un autre projet. Je sais que ça sera différent parce que c'est une passion qui est tellement forte que tu ne peux pas retrouver le même stress et la même envie avant de faire quelque chose.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu avais déjà eu le stress de la blessure, de la chute ? Est-ce que c'est des choses auxquelles tu pensais avant que ça t'arrive ? Est-ce que ça te faisait peur ou tu étais vraiment loin de tout ça ?

  • Speaker #1

    J'ai eu beaucoup de coéquipiers et coéquipières qui se sont blessés, plein, chaque année. Des blessures quand même assez graves, parfois des fractures, ça pouvait être quand même assez grave. Mais moi je n'y ai jamais pensé et puis je ne m'étais jamais blessée. Donc bien sûr ça trotte un petit peu, tu te dis tu fais attention à ton hygiène de vie, à comment tu t'alimentes, à comment est ton sommeil. Tu rythmes ta vie en fonction de ta pratique sportive, donc tu fais attention à tout ça. Non, je n'avais pas spécialement d'appréhension.

  • Speaker #0

    Mais du coup, j'ai l'impression qu'à ton temps, la blessure, c'est un truc assez fréquent dans ce sport ?

  • Speaker #1

    Oui et non. En fait, j'ai eu beaucoup de coéquipiers et coéquipières, du coup, comme je disais, blessés. Mais ça dépend vraiment, je pense, des moments. J'ai eu des collègues qui étaient blessés, je ne sais pas, par exemple, d'une élongation, de périocytes. Du coup, ça dépendait vraiment des cas de figure. Donc, pas tant que ça, finalement.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'aujourd'hui ça a un peu changé ton rapport ? au risque justement de blessures, que ce soit pour toi ou pour les autres, où tu as un peu plus peur ? Là, je ne sais pas, tu ne te dis pas quand tu vas aller voir justement les championnats du monde, je ne sais pas, tu n'as pas l'impression pour les autres ?

  • Speaker #1

    Aux championnats du monde, non, parce que la patinoire, elle est adaptée. là où j'ai eu mon accident, elle était à adaptée aussi. Mais là, par contre, où l'équipe de France s'entraîne, elle n'est pas adaptée. Elle n'est pas aux normes aujourd'hui. Et du coup, si ça, ça me fait peur de me dire qu'ils sont là à s'entraîner tous les jours et qu'une chute peut être vraiment fatale parce qu'on dit souvent que ça n'arrive qu'aux autres, alors que pas du tout. Et si j'avais eu cette chute à fond au meu, là, du coup, où on s'entraîne, on m'a clairement dit que je serais morte sur le coup. Donc, ça, ça me fait un peu peur. Mais après, je sais qu'aux Pays-Bas, tout ira bien.

  • Speaker #0

    Et même pour toi, dans les autres sports que tu pratiques, est-ce que la peur reste là, de la blessure, de la chute ?

  • Speaker #1

    Non, pas du tout. D'ailleurs, on m'a dit il n'y a pas longtemps qu'il fallait que je revoie un peu mes pratiques sportives, parce que ce n'était pas raisonnable. Et en fait, ça ne m'intéresse pas du tout leur discours. J'ai vraiment envie de continuer de pratiquer, par exemple, du vélo de route. Ils me disent, oui, mais t'imagines, si tu chutes, tu pourrais juste tout simplement mourir. Les médecins me l'ont dit, sauf que... Sauf que j'ai juste envie de vivre et que ça fait partie de mes passions et que j'adore ça. Donc non, j'appréhende pas.

  • Speaker #0

    Mais du coup, je me demande quel rapport tu as au risque et au danger.

  • Speaker #1

    Non, mais je pense que ça dépend du curseur. Mais ça dépend aussi comment on se sent dans la maîtrise ou pas de tel ou tel sport. Puis après, même dans la vie en général.

  • Speaker #0

    Et peut-être aussi que malgré tout, finalement, cette blessure, ça t'a peut-être appris à davantage connaître et comprendre ton corps, non ?

  • Speaker #1

    Je pense que quand tu es sportif de haut niveau, tu le connais déjà très bien. Parce qu'en fait, je ne sais pas si tu entends souvent cette phrase, mais ton corps, c'est ton outil de travail. Je ne le dis pas, mais c'est pour l'image. Et du coup, je pense que je me connaissais déjà très bien. Tu arrives à t'écouter mieux et à savoir un peu jauger. Après, en fonction des sportifs, je pense que pareil, la barre est plus ou moins haute. Mais oui, je pense que maintenant, je me connais encore mieux qu'avant.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il y a un passage, une période où ça a été difficile ton rapport avec ton corps ?

  • Speaker #1

    En fait, je me suis toujours dit, bon maintenant c'est comme ça, il faut faire avec, tu vas juste avancer. Mais oui, il y a eu des moments où c'était difficile. D'ailleurs, je disais clairement que je me battais avec, mais aussi contre mon corps, parce que j'apprenais à gérer ses séquelles, j'apprenais à avancer, mais doucement. Il a fallu beaucoup de patience. Mon corps, je l'ai apprivoisé petit à petit.

  • Speaker #0

    Tu parles souvent, j'ai vu dans des interviews ou même sur ce réseau, d'handicap invisible. C'est quoi l'handicap invisible ?

  • Speaker #1

    Du coup, c'est simple, c'est tout ce qu'on ne peut pas voir. Là, aujourd'hui, je pense que si tu demandes à n'importe qui dans la rue de me dire si je suis handicapée ou pas, tout le monde va dire que non et que tout va bien, alors qu'en fait, non, tout ne va pas bien. Ça peut être, par exemple, des douleurs neuropathiques, des spasmes, de la spasticité. mais aussi tout ce qui est laid avec la moelle épinière. Donc il y a beaucoup, beaucoup de choses. Et ça, c'est difficile à gérer au quotidien. C'est pour ça que je dois être suivie à vie. Là, je n'ai énuméré que ces quelques jets. En fait, je me suis dit, j'imaginais pas un instant que la moelle épinière puisse contrôler ça, puisse avoir un impact sur ça. Et c'est assez déroutant.

  • Speaker #0

    C'est pour ça que je te disais, l'impression de mieux connaître son corps. Parce que du coup, tu comprends tout. Est-ce que ta tolérance à la douleur, elle a évolué aussi ?

  • Speaker #1

    Là, je vais avoir l'impression de me jeter des fleurs. Ah, mais pas du tout.

  • Speaker #0

    On est là pour ça aussi.

  • Speaker #1

    Non, pas du tout. Mais en fait, je pense que mon niveau de douleur ou plutôt de perception de la douleur est quand même assez élevé. Ouais, je pense que c'est quand même vraiment assez élevé. Et j'en ai déjà parlé aussi avec d'autres personnes. Et ouais, je pense que c'est le cas.

  • Speaker #0

    Mais du coup, c'est un atout pour... Pour certaines choses, par exemple pour le sport, là tu te lances dans un marathon, on sait que dans un marathon tu passes forcément par la caisse douleur à un moment, du coup c'est un plus finalement peut-être pour toi ?

  • Speaker #1

    Ouais, après je pense qu'au-delà de la perception de la douleur, c'est surtout le mental qui fait une différence, je pense que j'arrive à prendre le dessus avec ma tête clairement.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui t'aide à pallier ce manque de sensations fortes dont tu parlais tout à l'heure, tu me disais je pourrais écrire un livre sur tout ce que m'a apporté ce sport, qu'est-ce qui t'aide aujourd'hui à pallier à ça ou en tout cas à... À apaiser peut-être ce manque ?

  • Speaker #1

    À me fixer des objectifs encore et toujours, des nouveaux challenges. Des nouveaux défis en général, que ce soit dans la vie pro, mais aussi perso et sportive. On parlait du marathon. 15 jours avant, je vais faire la traversée des Alpes avec mon vélo. Du coup, j'ai vraiment besoin de défis et besoin de challenges en permanence.

  • Speaker #0

    Tu n'imagines pas ta vie sans sport ?

  • Speaker #1

    Ah non, pas du tout. Non, mais vraiment pas. Quand j'étais paralysée et que j'étais sur la glace, qu'on attendait les urgences, je me disais mais qu'est-ce que je vais faire si je reste comme ça ? Et pendant un temps... Ça a été quand même assez long le temps sur la glace. Mon esprit partait un peu partout et je me disais stop, arrête de penser à ça. Je veux juste pas y penser. D'ailleurs à l'hôpital, au centre de rééducation, pareil, je m'interdisais à penser que ce ne soit pas envisageable de pouvoir reprendre le patin. Donc le sport en général, ça va au-delà de ça.

  • Speaker #0

    Est-ce que ce moment-là que tu racontes sur la glace où tu vois un peu, t'as toutes tes pensées qui perdent tous les sens, c'est un truc qui te revient souvent ?

  • Speaker #1

    Ouais, clairement. Mais plein de moments. J'ai un peu de flashback de l'accident, mais aussi de ma rééducation. Et puis, qu'est-ce que j'ai pu raconter cette histoire du moment de l'accident à ma sœur et à mon copain ? Je leur ai raconté, mais en boucle, en boucle, en boucle, avec les moindres détails. Donc, ça m'a fait du bien d'extérioriser tout ça. Et puis maintenant, ouais, un peu moins, mais il y a quand même beaucoup de flashs. Je pense que ça me suivra probablement toute ma vie. C'était quand même vraiment quelque chose de... d'indescriptibles et de perturbants au possible.

  • Speaker #0

    C'est choquant que ce soit pour le corps comme pour la tête. Oui,

  • Speaker #1

    clairement.

  • Speaker #0

    Et du coup, comment tu prends... J'imagine que quand on vit quelque chose comme ça, c'est hyper important de prendre soin de sa santé mentale. Qu'est-ce qui t'aide aujourd'hui à en prendre soin ? Le sport, tu vas me dire ?

  • Speaker #1

    Clairement, j'allais dire ça. Le sport et les objectifs, mais aussi de relativiser. Tu te prends... Peut-être moins la tête sur certains trucs, même si j'ai tendance à me prendre la tête pour des petits trucs du quotidien encore. Mais ouais, relativiser et puis te dire que... Impermanence, je sais pas, juste l'impermanence des choses et de te focaliser sur ce qui te fait du bien et ce que t'as envie de faire et de t'entourer des bonnes personnes, ça c'est vraiment très important.

  • Speaker #0

    Tu disais plutôt que tu voyais pas ta vie sans sport. Professionnellement, même si... que ce soit lié aussi dans ta profession, est-ce que déjà, enfant, c'était un truc que... Tu savais que tu travaillerais dans le sport ? Ou tu voulais faire quoi ?

  • Speaker #1

    Alors là, pas du tout. Moi, étant enfant, je rêvais pas du tout de faire les Jeux Olympiques. Je rêvais d'être professeure des écoles. Puis ensuite, en grandissant, donc arrivée en équipe de France, c'est devenu un rêve de faire les Jeux Olympiques, c'est devenu un objectif. Et puis j'avais toujours ce double cursus de devenir professeure des écoles. Et à la suite de ce mois d'octobre de mon accident, je me suis dit, en fait, je ne suis pas prête à quitter le milieu du sport. Je n'ai pas envie de tourner la page, même si tu vois, tu fais du sport pour ton loisir à côté. Tu peux faire peut-être certaines compétitions qui te sont autorisées. Mais je m'étais dit, j'ai vraiment envie de rendre tout ce que ça a pu m'apporter d'une certaine manière, parce que je trouve que ça m'a... Ça a tellement embelli ma vie, le sport, que je me sentais un peu redevable, entre guillemets. Et donc, je me suis inscrite dans un DU de préparation mentale.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    Pour suivre des sportifs, mais pas que. Et ça, c'est un sujet qui m'intéresse vraiment. Ça m'intéressait déjà pendant que je patinais, mais encore plus maintenant.

  • Speaker #0

    Et du coup, quels sont tes projets pros pour la suite ? Est-ce que tu as des idées ?

  • Speaker #1

    J'aimerais vraiment travailler pour une cause qui me tiendrait vraiment à cœur. pour la recherche et puis qu'ils soient liés avec le sport. Mais aussi du coup, faire ma profession de prep mentale. Et puis, je suis prof de yoga aussi, en parallèle de tout ça. Donc, un peu articuler ma vie pro autour de ces axes-là.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu rencontres régulièrement des personnes qui ont subi des accidents aussi liés au sport ? Est-ce que tu échanges beaucoup avec des personnes qui ont... Déjà, personne n'aura le même parcours que toi, mais... Des choses qui se ressemblent, qui se recroisent ?

  • Speaker #1

    Oui, quand même pas mal, que ce soit sur les réseaux. Moi aussi, je suis restée en contact avec des amis dans le centre de rééducation, là où j'étais, à l'hôpital. Et ça, c'est vraiment important pour moi parce que je sais que c'est plus qu'important d'avoir un soutien dans un sens comme dans l'autre. Et de voir un peu les histoires des uns et des autres et de se soutenir.

  • Speaker #0

    Ce podcast, il s'appelle Le Déclic. Est-ce que tu dirais que ton incidence a été d'une certaine manière un déclic pour toi et pourquoi ?

  • Speaker #1

    Oui, clairement, je pense que ça a été plus qu'un déclic de se dire, comme je le disais tout à l'heure, que ça n'arrive pas qu'aux autres. Et que malgré tout ça, la vie est très belle et qu'il ne faut pas l'oublier.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu dirais que tu vas bien aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Je vais mieux, c'est sûr. Mais je pense que oui, je vais bien. Je vais bien et puis il y a de belles choses qui sont en train d'arriver.

  • Speaker #0

    Tu as confiance dans les choses ?

  • Speaker #1

    Oui, j'ai sa vie décidée un peu, mais il faut la provoquer de temps en temps. Mais oui, j'ai confiance.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qu'on peut te souhaiter pour la suite, hormis de triompher sur ce marathon ? Je vais rester bloquée sur ça.

  • Speaker #1

    Triompher, triompher. Moi, mon but, c'est de le finir.

  • Speaker #0

    C'est un triomphe d'une certaine manière.

  • Speaker #1

    Je suis d'accord, je suis d'accord. Après tout ça... Me dire que je n'ai pas couru depuis très longtemps et que finalement, il y a un an et demi, j'étais paralysée. Je me dis que ça peut être très beau. Non, je ne sais pas. Encore une fois, je vais dire quelque chose d'ultra bateau et je le dis tout le temps, mais juste d'être heureuse. Puis d'ailleurs, c'est ce que je souhaite à tout le monde.

  • Speaker #0

    C'est chouette. C'est un beau message pour finir cette émission. Écoute, est-ce qu'on peut te suivre dans tes prochaines aventures et aussi sur les réseaux, là où tu racontes ce qui va ? Et ce qui ne va pas, tes comptes Instagram, tes...

  • Speaker #1

    Oui, sur mon compte, du coup, c'est Tiffany Uyomarchand. Enfin, c'est Tiffany HM, parce que mon nom est à rallonge, donc c'est bon.

  • Speaker #0

    Ça marche. Eh bien, on te suivra dans tes prochaines aventures. Écoute, je te souhaite plein de choses, d'être heureuse, tout simplement. Et merci beaucoup. À bientôt.

  • Speaker #1

    Merci à toi.

  • Speaker #0

    Si cet épisode vous a plu, n'hésitez pas à le partager et à en parler autour de vous. Qui sait, il n'est peut-être pas si loin, ce déclic.

Description

"Patiner, chuter, se relever". Ancienne patineuse de vitesse sur piste courte, une discipline appelée short track, Tifany Huot-Marchand a entre autres, été athlète olympique, championne de France et d’Europe et vice-championne du monde. En octobre 2022, elle vit un grave accident, une chute sur la glace lors d’une compétition internationale. Tifany en ressort gravement blessée, avec une fracture des cervicales : sa moelle épinière est touchée. Les médecins lui annoncent qu’elle restera tétraplégique. Pourtant, l’histoire de Tifany prend un tout autre tournant. Alors, à défaut de pouvoir rechausser tes patins, elle se relève, réapprend à marcher puis à courir. Aujourd’hui, elle prépare son premier marathon.


Dans cet épisode du Déclic, elle se livre sur son parcours : un témoignage fort et inspirant.


 📲💻 Retrouvez Tifany Huot Marchant sur Instagram !


💡⚡✨ Le déclic est une série du podcast Conseil Sport de DECATHLON. Un échange avec des invité·es où l’on parle voyages, rencontres, ruptures, joies, échec… En bref, de transformations. Des parcours de vie inspirants qui ont tous commencé par un déclic. Ce format vous est proposé par Manon, journaliste et sportive passionnée.


🎧🗣 Cet épisode vous a plu ? Parlez-en et partagez-le autour de vous ! Qui sait… Vous tomberez peut-être, vous aussi, sur un déclic.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonne compte, rupture, joie, échec, transformation, bonheur. Tout commence par un déclic. Bonjour à toutes et à tous et bienvenue dans ce nouvel épisode. Vous écoutez le déclic de Tiffany Huot Marchand. Salut Tiffany. Salut. Ça va ?

  • Speaker #1

    Ça va.

  • Speaker #0

    Je suis ravie de te recevoir aujourd'hui dans le Déclic. Je vais commencer par te présenter à nos auditeurs qui ne te connaissent pas. Tiffany, tu as 29 ans, tu as été patineuse de vitesse, athlète olympique à deux reprises. Tu as aussi décroché le titre de championne de France et d'Europe et celui de vice-championne du monde. En octobre 2022, tu as été victime d'un grave accident, une chute sur la glace lors d'une compétition internationale de short track aux Pays-Bas. Le short track, c'est du patinage de vitesse sur piste courte, on peut le définir comme ça ?

  • Speaker #1

    Exactement, j'ai bien révisé.

  • Speaker #0

    Tu ressors gravement blessée de cet accident avec une fracture des cervicales, ta moelle épinaire est touchée également et les médecins t'annoncent que tu resteras désormais tétraplégique et que tu marcheras plus. Et pourtant, tu as remarché assez rapidement, un mois après je crois, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Dix jours après. Dix jours après.

  • Speaker #0

    Moins d'un mois du coup. Voilà, assez impressionnant. Et à force de persévérance, d'envie, de passion et puis de rééducation aussi je pense, tu as repris le sport. Et alors, à défaut de pouvoir rechausser tes patins, tu te lances à un nouveau défi dans une toute autre discipline qui m'est très chère, donc ça p'tit ! Aujourd'hui, tu prépares le Marathon pour tous de Paris 2024 qui aura lieu cet été. J'imagine que cette présentation qui reprend ton parcours sportif, ton accident, c'est des choses que tu as l'habitude d'entendre et de réentendre. Qu'est-ce que ça te fait encore aujourd'hui ? Quel rapport est-ce que tu as avec cette période de ta vie, avec cette histoire, avec ton histoire en fait ?

  • Speaker #1

    Ça a été difficile quand on m'a appris que je ne pourrais plus repatiner. Ça reste ma passion et j'ai suivi absolument toutes les courses depuis mon accident. J'ai regardé toutes les Coupes du Monde. Et puis là, tu vois, la semaine prochaine, le week-end prochain, les Championnats du Monde auront lieu à Rotterdam. Et je vais y aller, je vais aller voir les Championnats du Monde. Tu vois, rien que d'en parler, ça me donne un peu des frissons parce que je ne suis pas rentrée de nouveau dans une patinoire pour voir du short track depuis. Donc ça va être une étape importante, je pense, de ma vie. Mais je reste proche du sport, très proche.

  • Speaker #0

    Tu as quand même une vision assez optimiste de tout ça maintenant. J'ai l'impression que tu arrives à en parler là avec le sourire. Est-ce que c'est ce que tu fais illusion ou est-ce que tu es ok avec cette période et ça va, c'est facile d'en parler ?

  • Speaker #1

    Oui et non, j'en parle avec le sourire parce que je me dis qu'il y a bien plus grave dans la vie. Mais ouais, c'est toujours difficile. C'est difficile de se dire, j'ai mis mes patins pendant 20 ans de ma vie et puis maintenant c'est terminé. J'ai fait 13 ans de haut niveau, maintenant c'est terminé aussi. Et ça, c'est toujours dur. De voir ses coéquipiers et coéquipières partir à l'entraînement, toi tu te dis, maintenant ce n'est plus ma vie. Je fais du sport, bien sûr, mais il y a des jours avec, des jours sans. Mais oui, je le prends quand même plus avec le sourire qu'il y a quelques mois.

  • Speaker #0

    Justement, tu partages beaucoup ton quotidien sur les réseaux sociaux. Tu partages quand ça ne va pas et ce n'est pas quelque chose que tout le monde fait. En quoi c'est important pour toi ?

  • Speaker #1

    J'ai vraiment envie d'être naturelle et de montrer qu'il y a des moments où ça ne va pas. Et d'ailleurs, il y en a pas mal. Ça dépend des périodes, mais j'ai pas envie de mentir, j'ai pas envie de faire semblant. J'ai pas envie d'envoyer des faux messages d'espoir pour dire que je remarche, je recours, je prépare mes objectifs sportifs et puis tout va bien. Alors qu'en fait, non, j'ai des séquelles. Alors oui, je prépare tout ça, mais il y a quand même les côtés un peu plus sombres. Et puis, je pense que c'est important de le dire parce que c'est la réalité. Et voilà.

  • Speaker #0

    Et comment les gens reçoivent ça ? Est-ce que tu as beaucoup de retours du coup ? Tu as une communauté qui se crée derrière ça ?

  • Speaker #1

    Oui, je pense que ça aide. En tout cas, moi, quand j'étais tétraplégique et dans mon lit d'hôpital, après quelques mois, du coup, quand j'ai retrouvé l'usage de mes bras et de mes mains, je cherchais vraiment ça, quelqu'un à qui me raccrocher. Je cherchais un livre à lire pour me motiver. J'ai cherché pas mal de choses comme ça. D'ailleurs, je racontais que quand j'étais à l'hôpital, je regardais beaucoup, beaucoup de vidéos de personnes qui étaient en train de courir. Donc après, pendant un temps, mon Instagram était juste rempli de personnes en train de courir parce que j'en avais envie, besoin. J'avais juste la tête qui partait dans tous les sens. Et du coup, ça m'a beaucoup aidée. Mais du coup, tout ça pour dire que je pense que ça aide et je reçois beaucoup de messages pour me remercier. Après, je n'attends rien de tout.

  • Speaker #0

    Mais ça te porte quand même ?

  • Speaker #1

    Oui, ça me porte et puis j'ai vraiment envie d'aider. Je vais intégrer la fondation Wings for Life. C'est une fondation qui, justement, crée un événement de course à pied. Je laisserai aller voir cette course pour ne pas prendre trop de temps avec ça, mais ça aide à ramener des fonds pour cette fondation. qui sert à faire des recherches contre la moelle épinière. Donc participer et être active dans ces milieux-là, c'est important aussi pour moi.

  • Speaker #0

    Je reviens sur ce que tu disais un peu avant, que tu consommais beaucoup de contenu, de personnes qui couraient quand tu étais à l'hôpital. Tu n'as pas fait une sorte de réaction allergique au sport, où je ne vais plus en entendre parler, notamment pour le patinage par exemple ?

  • Speaker #1

    Quand j'étais à l'hôpital, après ma blessure, pas du tout. C'était mon moteur premier, le sport, et encore plus le short track. C'était clairement mon moteur premier de me dire, là, tu vois, je me fixe des objectifs comme une sorte de planification, mais pour ma reprise. Et j'avais la tête très dure grâce à ça, parce que je me suis fixé un objectif.

  • Speaker #0

    On va revenir un peu avant le début de ta carrière, tout ça. Ton histoire avec le sport, est-ce que tu as toujours fait du sport ? Tu étais déjà une petite fille sportive ou quand est-ce que ça a commencé ?

  • Speaker #1

    En fait, j'ai un tout petit village du Doubs et il n'y avait pas de... Pas de boulangerie pour dire du coup, il n'y avait vraiment aucun commerce, donc aucun club sportif. Je faisais du sport à l'école, mais rien de plus. Puis du vélo dans le village, mais c'est tout. Et puis en fait, j'ai commencé mon premier sport, c'était le short track. Et gros coup de cœur avec le short track, vraie, vraie passion. Et depuis ce moment-là, depuis mes 9 ans jusqu'à aujourd'hui, j'ai fait du short track tous les jours. Et puis après, forcément, en grandissant, j'ai commencé à m'ouvrir à d'autres sports. à faire du vélo de route, à faire du trail, de la course à pied, du yoga. Et après, j'ai été clairement amoureuse de sport en général.

  • Speaker #0

    Mais c'est marrant de commencer le sport avec le short track, parce que ce n'est quand même pas un truc hyper répandu. Comment tu t'es retrouvée avec des patins aux pieds ?

  • Speaker #1

    Oui, totalement par hasard. En fait, c'est ma voisine qui nous a conduit à la patinoire. Elle faisait du short track quand elle était plus jeune et elle nous a proposé d'essayer. Donc totalement par hasard, sachant qu'on n'avait jamais fait de patins. Même pour le loisir avant ça. Donc, c'était vraiment cool.

  • Speaker #0

    Tu dis on parce que c'est une histoire de famille. Tu patines avec Natia, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Exactement. En fait, je n'arrive pas à dissocier ce on. Jamais. Enfin, je pense que je ne le ferai jamais. Mais on a débuté avec ma soeur jumelle. Et jusqu'à intégrer l'équipe de France Junior ensemble. Donc, histoire de famille. Histoire qui me tient vraiment, vraiment à cœur.

  • Speaker #0

    Et ta soeur, elle continue toujours aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Non, ma soeur, elle a fait une année en sport et de sud. Du coup, en équipe de France Junior. Et ensuite, elle a arrêté. Elle était moins sportive que moi.

  • Speaker #0

    Et puis après, peut-être qu'il y a eu ton accident aussi. Elle, ça a changé peut-être ? Elle ne pratiquait déjà plus à ce moment-là ?

  • Speaker #1

    Elle ne pratiquait plus depuis bien longtemps, depuis plus de dix ans.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que tu aimais et aimes toujours d'ailleurs comme sensation dans ce sport,

  • Speaker #1

    le short track ? Je pense qu'il y a beaucoup trop de choses. Je pourrais faire un chapitre entier dessus. Mais ce qui m'a fait vraiment mal au cœur quand j'ai arrêté, enfin quand on m'a plutôt contrainte à arrêter, Merci. C'est de me dire, je ne ressentirai plus cette vitesse. On va très vite, donc cette vitesse, cette sensation du vent sur le visage, le froid, même si je n'aime pas ça et que je me plaignais tout le temps d'avoir trop froid. Le froid, quand même, c'est quelque chose de particulier quand tu pratiques un sport dans le froid. Et puis après, la compétition, clairement, ça, c'est ce qui m'anime et c'est ce qui m'a animée pendant 13 ans de ma vie. Et je vivais pour ça. Ce stress d'avant-course, et je sais pertinemment que je ne ressentirai plus jamais ça, que ce soit même dans un autre sport, dans un autre projet. Je sais que ça sera différent parce que c'est une passion qui est tellement forte que tu ne peux pas retrouver le même stress et la même envie avant de faire quelque chose.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu avais déjà eu le stress de la blessure, de la chute ? Est-ce que c'est des choses auxquelles tu pensais avant que ça t'arrive ? Est-ce que ça te faisait peur ou tu étais vraiment loin de tout ça ?

  • Speaker #1

    J'ai eu beaucoup de coéquipiers et coéquipières qui se sont blessés, plein, chaque année. Des blessures quand même assez graves, parfois des fractures, ça pouvait être quand même assez grave. Mais moi je n'y ai jamais pensé et puis je ne m'étais jamais blessée. Donc bien sûr ça trotte un petit peu, tu te dis tu fais attention à ton hygiène de vie, à comment tu t'alimentes, à comment est ton sommeil. Tu rythmes ta vie en fonction de ta pratique sportive, donc tu fais attention à tout ça. Non, je n'avais pas spécialement d'appréhension.

  • Speaker #0

    Mais du coup, j'ai l'impression qu'à ton temps, la blessure, c'est un truc assez fréquent dans ce sport ?

  • Speaker #1

    Oui et non. En fait, j'ai eu beaucoup de coéquipiers et coéquipières, du coup, comme je disais, blessés. Mais ça dépend vraiment, je pense, des moments. J'ai eu des collègues qui étaient blessés, je ne sais pas, par exemple, d'une élongation, de périocytes. Du coup, ça dépendait vraiment des cas de figure. Donc, pas tant que ça, finalement.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'aujourd'hui ça a un peu changé ton rapport ? au risque justement de blessures, que ce soit pour toi ou pour les autres, où tu as un peu plus peur ? Là, je ne sais pas, tu ne te dis pas quand tu vas aller voir justement les championnats du monde, je ne sais pas, tu n'as pas l'impression pour les autres ?

  • Speaker #1

    Aux championnats du monde, non, parce que la patinoire, elle est adaptée. là où j'ai eu mon accident, elle était à adaptée aussi. Mais là, par contre, où l'équipe de France s'entraîne, elle n'est pas adaptée. Elle n'est pas aux normes aujourd'hui. Et du coup, si ça, ça me fait peur de me dire qu'ils sont là à s'entraîner tous les jours et qu'une chute peut être vraiment fatale parce qu'on dit souvent que ça n'arrive qu'aux autres, alors que pas du tout. Et si j'avais eu cette chute à fond au meu, là, du coup, où on s'entraîne, on m'a clairement dit que je serais morte sur le coup. Donc, ça, ça me fait un peu peur. Mais après, je sais qu'aux Pays-Bas, tout ira bien.

  • Speaker #0

    Et même pour toi, dans les autres sports que tu pratiques, est-ce que la peur reste là, de la blessure, de la chute ?

  • Speaker #1

    Non, pas du tout. D'ailleurs, on m'a dit il n'y a pas longtemps qu'il fallait que je revoie un peu mes pratiques sportives, parce que ce n'était pas raisonnable. Et en fait, ça ne m'intéresse pas du tout leur discours. J'ai vraiment envie de continuer de pratiquer, par exemple, du vélo de route. Ils me disent, oui, mais t'imagines, si tu chutes, tu pourrais juste tout simplement mourir. Les médecins me l'ont dit, sauf que... Sauf que j'ai juste envie de vivre et que ça fait partie de mes passions et que j'adore ça. Donc non, j'appréhende pas.

  • Speaker #0

    Mais du coup, je me demande quel rapport tu as au risque et au danger.

  • Speaker #1

    Non, mais je pense que ça dépend du curseur. Mais ça dépend aussi comment on se sent dans la maîtrise ou pas de tel ou tel sport. Puis après, même dans la vie en général.

  • Speaker #0

    Et peut-être aussi que malgré tout, finalement, cette blessure, ça t'a peut-être appris à davantage connaître et comprendre ton corps, non ?

  • Speaker #1

    Je pense que quand tu es sportif de haut niveau, tu le connais déjà très bien. Parce qu'en fait, je ne sais pas si tu entends souvent cette phrase, mais ton corps, c'est ton outil de travail. Je ne le dis pas, mais c'est pour l'image. Et du coup, je pense que je me connaissais déjà très bien. Tu arrives à t'écouter mieux et à savoir un peu jauger. Après, en fonction des sportifs, je pense que pareil, la barre est plus ou moins haute. Mais oui, je pense que maintenant, je me connais encore mieux qu'avant.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il y a un passage, une période où ça a été difficile ton rapport avec ton corps ?

  • Speaker #1

    En fait, je me suis toujours dit, bon maintenant c'est comme ça, il faut faire avec, tu vas juste avancer. Mais oui, il y a eu des moments où c'était difficile. D'ailleurs, je disais clairement que je me battais avec, mais aussi contre mon corps, parce que j'apprenais à gérer ses séquelles, j'apprenais à avancer, mais doucement. Il a fallu beaucoup de patience. Mon corps, je l'ai apprivoisé petit à petit.

  • Speaker #0

    Tu parles souvent, j'ai vu dans des interviews ou même sur ce réseau, d'handicap invisible. C'est quoi l'handicap invisible ?

  • Speaker #1

    Du coup, c'est simple, c'est tout ce qu'on ne peut pas voir. Là, aujourd'hui, je pense que si tu demandes à n'importe qui dans la rue de me dire si je suis handicapée ou pas, tout le monde va dire que non et que tout va bien, alors qu'en fait, non, tout ne va pas bien. Ça peut être, par exemple, des douleurs neuropathiques, des spasmes, de la spasticité. mais aussi tout ce qui est laid avec la moelle épinière. Donc il y a beaucoup, beaucoup de choses. Et ça, c'est difficile à gérer au quotidien. C'est pour ça que je dois être suivie à vie. Là, je n'ai énuméré que ces quelques jets. En fait, je me suis dit, j'imaginais pas un instant que la moelle épinière puisse contrôler ça, puisse avoir un impact sur ça. Et c'est assez déroutant.

  • Speaker #0

    C'est pour ça que je te disais, l'impression de mieux connaître son corps. Parce que du coup, tu comprends tout. Est-ce que ta tolérance à la douleur, elle a évolué aussi ?

  • Speaker #1

    Là, je vais avoir l'impression de me jeter des fleurs. Ah, mais pas du tout.

  • Speaker #0

    On est là pour ça aussi.

  • Speaker #1

    Non, pas du tout. Mais en fait, je pense que mon niveau de douleur ou plutôt de perception de la douleur est quand même assez élevé. Ouais, je pense que c'est quand même vraiment assez élevé. Et j'en ai déjà parlé aussi avec d'autres personnes. Et ouais, je pense que c'est le cas.

  • Speaker #0

    Mais du coup, c'est un atout pour... Pour certaines choses, par exemple pour le sport, là tu te lances dans un marathon, on sait que dans un marathon tu passes forcément par la caisse douleur à un moment, du coup c'est un plus finalement peut-être pour toi ?

  • Speaker #1

    Ouais, après je pense qu'au-delà de la perception de la douleur, c'est surtout le mental qui fait une différence, je pense que j'arrive à prendre le dessus avec ma tête clairement.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui t'aide à pallier ce manque de sensations fortes dont tu parlais tout à l'heure, tu me disais je pourrais écrire un livre sur tout ce que m'a apporté ce sport, qu'est-ce qui t'aide aujourd'hui à pallier à ça ou en tout cas à... À apaiser peut-être ce manque ?

  • Speaker #1

    À me fixer des objectifs encore et toujours, des nouveaux challenges. Des nouveaux défis en général, que ce soit dans la vie pro, mais aussi perso et sportive. On parlait du marathon. 15 jours avant, je vais faire la traversée des Alpes avec mon vélo. Du coup, j'ai vraiment besoin de défis et besoin de challenges en permanence.

  • Speaker #0

    Tu n'imagines pas ta vie sans sport ?

  • Speaker #1

    Ah non, pas du tout. Non, mais vraiment pas. Quand j'étais paralysée et que j'étais sur la glace, qu'on attendait les urgences, je me disais mais qu'est-ce que je vais faire si je reste comme ça ? Et pendant un temps... Ça a été quand même assez long le temps sur la glace. Mon esprit partait un peu partout et je me disais stop, arrête de penser à ça. Je veux juste pas y penser. D'ailleurs à l'hôpital, au centre de rééducation, pareil, je m'interdisais à penser que ce ne soit pas envisageable de pouvoir reprendre le patin. Donc le sport en général, ça va au-delà de ça.

  • Speaker #0

    Est-ce que ce moment-là que tu racontes sur la glace où tu vois un peu, t'as toutes tes pensées qui perdent tous les sens, c'est un truc qui te revient souvent ?

  • Speaker #1

    Ouais, clairement. Mais plein de moments. J'ai un peu de flashback de l'accident, mais aussi de ma rééducation. Et puis, qu'est-ce que j'ai pu raconter cette histoire du moment de l'accident à ma sœur et à mon copain ? Je leur ai raconté, mais en boucle, en boucle, en boucle, avec les moindres détails. Donc, ça m'a fait du bien d'extérioriser tout ça. Et puis maintenant, ouais, un peu moins, mais il y a quand même beaucoup de flashs. Je pense que ça me suivra probablement toute ma vie. C'était quand même vraiment quelque chose de... d'indescriptibles et de perturbants au possible.

  • Speaker #0

    C'est choquant que ce soit pour le corps comme pour la tête. Oui,

  • Speaker #1

    clairement.

  • Speaker #0

    Et du coup, comment tu prends... J'imagine que quand on vit quelque chose comme ça, c'est hyper important de prendre soin de sa santé mentale. Qu'est-ce qui t'aide aujourd'hui à en prendre soin ? Le sport, tu vas me dire ?

  • Speaker #1

    Clairement, j'allais dire ça. Le sport et les objectifs, mais aussi de relativiser. Tu te prends... Peut-être moins la tête sur certains trucs, même si j'ai tendance à me prendre la tête pour des petits trucs du quotidien encore. Mais ouais, relativiser et puis te dire que... Impermanence, je sais pas, juste l'impermanence des choses et de te focaliser sur ce qui te fait du bien et ce que t'as envie de faire et de t'entourer des bonnes personnes, ça c'est vraiment très important.

  • Speaker #0

    Tu disais plutôt que tu voyais pas ta vie sans sport. Professionnellement, même si... que ce soit lié aussi dans ta profession, est-ce que déjà, enfant, c'était un truc que... Tu savais que tu travaillerais dans le sport ? Ou tu voulais faire quoi ?

  • Speaker #1

    Alors là, pas du tout. Moi, étant enfant, je rêvais pas du tout de faire les Jeux Olympiques. Je rêvais d'être professeure des écoles. Puis ensuite, en grandissant, donc arrivée en équipe de France, c'est devenu un rêve de faire les Jeux Olympiques, c'est devenu un objectif. Et puis j'avais toujours ce double cursus de devenir professeure des écoles. Et à la suite de ce mois d'octobre de mon accident, je me suis dit, en fait, je ne suis pas prête à quitter le milieu du sport. Je n'ai pas envie de tourner la page, même si tu vois, tu fais du sport pour ton loisir à côté. Tu peux faire peut-être certaines compétitions qui te sont autorisées. Mais je m'étais dit, j'ai vraiment envie de rendre tout ce que ça a pu m'apporter d'une certaine manière, parce que je trouve que ça m'a... Ça a tellement embelli ma vie, le sport, que je me sentais un peu redevable, entre guillemets. Et donc, je me suis inscrite dans un DU de préparation mentale.

  • Speaker #0

    Ok.

  • Speaker #1

    Pour suivre des sportifs, mais pas que. Et ça, c'est un sujet qui m'intéresse vraiment. Ça m'intéressait déjà pendant que je patinais, mais encore plus maintenant.

  • Speaker #0

    Et du coup, quels sont tes projets pros pour la suite ? Est-ce que tu as des idées ?

  • Speaker #1

    J'aimerais vraiment travailler pour une cause qui me tiendrait vraiment à cœur. pour la recherche et puis qu'ils soient liés avec le sport. Mais aussi du coup, faire ma profession de prep mentale. Et puis, je suis prof de yoga aussi, en parallèle de tout ça. Donc, un peu articuler ma vie pro autour de ces axes-là.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu rencontres régulièrement des personnes qui ont subi des accidents aussi liés au sport ? Est-ce que tu échanges beaucoup avec des personnes qui ont... Déjà, personne n'aura le même parcours que toi, mais... Des choses qui se ressemblent, qui se recroisent ?

  • Speaker #1

    Oui, quand même pas mal, que ce soit sur les réseaux. Moi aussi, je suis restée en contact avec des amis dans le centre de rééducation, là où j'étais, à l'hôpital. Et ça, c'est vraiment important pour moi parce que je sais que c'est plus qu'important d'avoir un soutien dans un sens comme dans l'autre. Et de voir un peu les histoires des uns et des autres et de se soutenir.

  • Speaker #0

    Ce podcast, il s'appelle Le Déclic. Est-ce que tu dirais que ton incidence a été d'une certaine manière un déclic pour toi et pourquoi ?

  • Speaker #1

    Oui, clairement, je pense que ça a été plus qu'un déclic de se dire, comme je le disais tout à l'heure, que ça n'arrive pas qu'aux autres. Et que malgré tout ça, la vie est très belle et qu'il ne faut pas l'oublier.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu dirais que tu vas bien aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Je vais mieux, c'est sûr. Mais je pense que oui, je vais bien. Je vais bien et puis il y a de belles choses qui sont en train d'arriver.

  • Speaker #0

    Tu as confiance dans les choses ?

  • Speaker #1

    Oui, j'ai sa vie décidée un peu, mais il faut la provoquer de temps en temps. Mais oui, j'ai confiance.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qu'on peut te souhaiter pour la suite, hormis de triompher sur ce marathon ? Je vais rester bloquée sur ça.

  • Speaker #1

    Triompher, triompher. Moi, mon but, c'est de le finir.

  • Speaker #0

    C'est un triomphe d'une certaine manière.

  • Speaker #1

    Je suis d'accord, je suis d'accord. Après tout ça... Me dire que je n'ai pas couru depuis très longtemps et que finalement, il y a un an et demi, j'étais paralysée. Je me dis que ça peut être très beau. Non, je ne sais pas. Encore une fois, je vais dire quelque chose d'ultra bateau et je le dis tout le temps, mais juste d'être heureuse. Puis d'ailleurs, c'est ce que je souhaite à tout le monde.

  • Speaker #0

    C'est chouette. C'est un beau message pour finir cette émission. Écoute, est-ce qu'on peut te suivre dans tes prochaines aventures et aussi sur les réseaux, là où tu racontes ce qui va ? Et ce qui ne va pas, tes comptes Instagram, tes...

  • Speaker #1

    Oui, sur mon compte, du coup, c'est Tiffany Uyomarchand. Enfin, c'est Tiffany HM, parce que mon nom est à rallonge, donc c'est bon.

  • Speaker #0

    Ça marche. Eh bien, on te suivra dans tes prochaines aventures. Écoute, je te souhaite plein de choses, d'être heureuse, tout simplement. Et merci beaucoup. À bientôt.

  • Speaker #1

    Merci à toi.

  • Speaker #0

    Si cet épisode vous a plu, n'hésitez pas à le partager et à en parler autour de vous. Qui sait, il n'est peut-être pas si loin, ce déclic.

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