Speaker #0Bonjour et bienvenue sur les Détours d'Olivia. C'est top, j'ai eu quelques écoutes pour mes premiers épisodes, merci beaucoup. Je vois qu'il y a des écoutes qui grimpent. Plus précisément, je suis notifiée quand il y a une écoute de plus en fait, à moins que ce soit moi, mais je pense pas, et merci. Donc, aujourd'hui, un nouveau sujet croustillant, la dépression. Comment est-ce qu'on peut différencier un passage de déprime ? d'une vraie dépression. Ça a été évoqué maintes fois, ce truc-là, mais c'est jamais simple, en fait, de mettre le curseur au bon endroit. Parce que la vie nous confronte. On peut donc avoir des réactions tout à fait ajustées à la situation. Mais des fois, il s'agit d'événements aussi en apparence très bénins qui nous font complètement perdre pied. On est dans quelque chose qui va bien au-delà de la pensée et de la volonté. Alors, quand on fait une dépression, c'est sûr qu'un psychiatre... Ce sera d'une aide précieuse, notamment en matière de diagnostic, traitement, etc. Mais il y a quand même des signes à l'intérieur de soi qui peuvent nous guider. Pour moi, la dépression, ça se traduit par une vraie paralysie du corps et de l'esprit. C'est-à-dire qu'il y a un truc qui fait qu'on va mal et on tombe dans une espèce de puits sans fond, un cercle vicieux. qui nous fatiguent de plus en plus. Et en fait, là, c'est le serpent qui se mord la queue parce qu'on a de moins en moins d'énergie. C'est cette petite lueur d'énergie qui, en général, nous permet de sortir d'une mauvaise passe. On n'a plus quand on est dépressif. Et on n'a plus les ressources nécessaires pour sortir de là. Donc, on perd toute capacité d'analyse, on ne comprend plus rien de ce qui nous arrive. On s'en veut de ne rien comprendre. Plus on s'en veut, plus on s'en veut. On culpabilise, on culpabilise de culpabiliser. Et hop, c'est parti. Et là, c'est une spirale. Les proches sont parfois démunis, et on les voit démunis. Et c'est là qu'on peut basculer dans quelque chose d'un peu plus sombre encore, parce qu'on se dit « Merde, je suis un fardeau pour les autres, en fait. » Et du coup, on pense réellement qu'on est un fardeau pour les autres. Donc c'est là que les idées suicidaires peuvent commencer à émerger. Parce que oui, c'est dur pour les proches. Ça l'est. Mais de là à dire qu'on est un fardeau, il y a quand même... tout un monde. Mais encore une fois, quand on est dépressif, on est à côté de ses pompes. On n'est pas en mesure d'avoir du recul sur les choses. Ce qui a déclenché ça, chez moi, cette dernière dépression, c'est ce que je vivais par rapport à ma fille, qui, comme tout enfant de son âge, se mettait dans des colères noires. Seulement, ça me foutait moi-même dans des zones vraiment compliquées et colériques. C'est venu... titiller ma partie sombre et violente. Et je me suis vue en train de basculer vers une maternité qui était complètement à l'opposé de mes valeurs. J'avais peur de devenir une mère violente. Moi, j'avais vraiment peur d'en venir aux mains, alors que c'est la dernière des choses que je veux pour ma fille. Et je pense que j'aurais dû me faire aider un peu plus tôt. Peut-être que je ne voulais pas aussi regarder ça. chez moi. C'était quelque part admettre que je commençais à aller trop loin et que j'étais en train de devenir maltraitante avec ma fille. C'est vraiment ça. Si ma fille m'écoute un peu plus tard, j'ai envie de lui dire que je l'aime très fort et que ça, c'est en lien avec ce que je vivais moi et que c'est un travail par rapport à mon histoire, etc. Et je la remercie d'ailleurs. de m'avoir donné l'occasion finalement de confronter certaines parties sombres chez moi. Donc je n'ai pas supporté me voir glisser sur une pente aussi dangereuse, je n'ai pas supporté devenir cette mère complètement à l'opposé du rôle de mère que je m'imaginais, ça aussi on pourra en parler, la réalité et ce qu'on imaginait avant de devenir parent. Et je me suis mise à culpabiliser. Vraiment, je n'ai pas supporté me voir comme ça. Je me suis mise à culpabiliser au point où j'ai commencé à basculer un petit peu. J'ai eu des espèces de délires, de persécutions, où j'ai commencé à croire des trucs un peu paranormaux, comme quoi quelque chose de terrible allait se passer, que des espèces de démons allaient finir par m'avoir et voulaient ma peau. et tout ça, ça se matérialisait par... Les regards, le regard des autres, j'avais peur des gens, j'avais peur des transports en commun, j'avais peur que les services sociaux débarquent du jour au lendemain et qu'on prenne ma fille. Donc j'avais tellement peur de tout ça, tellement peur des gens et c'était difficile d'en parler parce que d'une part je me disais mais t'es en train de devenir complètement zinzin et je voulais pas inquiéter les autres. Mais j'ai pu en parler à ma psychiatre et ça a été un bonheur. C'est apparemment extrêmement fréquent dans les cas de dépression sévère, on peut basculer dans un truc un peu psychotique. Et ça ne veut pas dire qu'on est fou, nécessairement. C'est notre psyché qui trouve une idée de génie pour venir projeter à l'extérieur une part de soi qui est tellement coupable, qui se sent tellement coupable, qui est juste trop difficile à regarder. En tout cas, c'est un peu comme ça que je le vois pour moi. Évidemment, très difficile de bosser, très difficile de m'occuper de ma fille comme il se doit. Ma sœur m'a aidée, une amie très proche m'a aidée, je pense qu'elle m'a un peu sauvé la vie. Et ma psychiatre, j'ai deux psychiatres, et une gestaltérapeute que j'ai pu consulter après, qui m'ont beaucoup aidée. Et j'ai commencé un traitement antidépresseur, un régulateur d'humeur aussi. Et ça aussi, ça m'a sauvé la vie, ce truc-là. Ça m'a donné l'énergie nécessaire. J'ai eu un petit effet qui se coule au bout de 2-3 semaines, apparemment, c'est le délai habituel. Et ça m'a donné l'énergie nécessaire pour me lever le matin, faire des choses très simples comme me doucher, manger, et pour commencer à faire un travail sur moi, et commencer à regarder un petit peu ce qui s'est passé. Ce qui caractérise aussi pour moi la vraie dépression, je reviens là-dessus, c'est l'hygiène de vie. Je veux dire, on devient crade. Je ne me brossais plus les dents, je ne me douche plus, je vis un peu dans une poubelle, déjà que je suis bordélique à la base. Et il y a vraiment un mépris de soi, quoi. On ne prend plus soin de soi. Et du coup, quand je fais des déprimes passagères, entre guillemets, c'est dur. C'est vraiment dur, mais j'ai suffisamment de capacité de réflexion et d'analyse pour comprendre ce qui m'arrive. Et je me dis, ouais, là, j'en chie vraiment, mais... On voit quand même une lumière au bout du tunnel et on n'a pas cette perte de sens. On arrive à trouver du sens quand même dans ces expériences. Alors tout ça, c'est quelque chose dont on parle de plus en plus en société. On ose de plus en plus être vulnérable. La dépression, on en parle. Néanmoins, il y a un petit effet sournois, c'est qu'il se passe tellement de choses dans le monde, des trucs affreux, les guerres, les dictatures, les enfants qui meurent sous les bombes, tout ça, que ça peut être tentant de fermer sa gueule. ne serait-ce que par respect pour les gens qui vivent des choses comme ça. Je dis ça parce que c'est un peu ce que les gens autour peuvent aussi vous dire. Des gens un peu bourrins qui disent des trucs du style « Mais tu ne te rends pas compte, tu n'as pas de gratitude, tu ne te rends pas compte de la chance que tu as. Il y a des gens qui t'aiment, tu as un job, tu as un toit, des enfants, pour ma part une fille. » Et ça, c'est... C'est vraiment une erreur grossière de sortir ce truc-là, parce qu'on peut être plein de gratitude. Je suis pleine de gratitude. Mais quand on est dépressif, on n'a pas la capacité de goûter et de savourer les belles choses qu'on vit, les belles choses qu'on a. C'est ça qu'il faut bien comprendre. Et c'est une fois qu'on en sort, que là, on peut commencer à retrouver goût aux petits plaisirs simples, ne serait-ce que de manger. La dépression, c'est malheureusement extrêmement fréquent. Donc d'un côté c'est absolument terrible, et de l'autre, ça veut aussi dire que vous n'êtes pas seul. A bientôt, ciao !