- Speaker #0
Les Invisibles. Juin 2020. Ma vie bascule du jour au lendemain dans une maladie neurologique, rare, qui n'a de poétique que le nom. Le syndrome du mal de débarquement. Les symptômes qu'elle m'amène vivent en colocation avec moi. 7 jours sur 7. 24 heures sur 24. Et ne prennent jamais leur week-end. Je n'ai donc pas la place pour un autre combat. Du moins, c'est ce que je crois. Puis vient ce jour où je témoigne dans une émission télé, dans l'espoir de rendre visible l'invisibilité du syndrome dont je suis atteinte. À peine sortie du plateau, forte de cette expérience et encore dans mes talons rouges, une évidence s'installe. Je n'en resterai pas là. Dans le train du retour, je rejoins à la fois ma maison et mon nouveau combat. Offrir un espace de parole au travers d'un podcast, aux personnes qui composent, bien souvent en silence, avec des maladies invisibles, et avec les regards de sociétés qui ne croient que ce qu'elles voient, deux réalités plus souvent subies que choisies. Aujourd'hui, loin de mes talons rouges et au plus proche de l'engagement, l'évidence s'étend. C'est à l'invisible au pluriel que je vous invite. Ceux qui dans la chair, l'esprit et les sociétés se vit, sans pour autant faire de bruit. Si comme le dit Antoine de Saint-Exupéry, l'essentiel est invisible pour les yeux, ici, on compte bien le faire entendre. Bonne écoute !
- Speaker #1
Quel est l'un des points communs entre le fait d'être grosse et de vivre avec des maladies chroniques ? L'in-vi-si-bi-li-té. Si l'on croit encore à tort que les personnes grosses sont vues et entendues, tout comme les personnes malades, il est temps d'écouter cet épisode. Être grosse et malade, c'est aussi recevoir les foudres du validisme et de la grossophobie sans répit. Parce qu'aujourd'hui encore, dans les normes sociales, l'injonction c'est être mince et en bonne santé. Anaïs vit avec une demi-douzaine de troubles et de maladies. Le syndrome Klein-Levin, appelée fréquemment syndrome de la belle au bois dormant, un nom édulcoré qui nie les vraies souffrances, la dyslexie, le TDAH, la dépression, l'obésité et le syndrome des ovaires polycystiques. Elle a accueilli chacun de ces diagnostics à l'âge adulte, dans des conditions difficiles. Pour Anaïs, force est de constater qu'elle s'adapte en permanence à une société qui n'engage aucun effort pour s'adapter à sa condition. Elle décide alors de renverser la vapeur. C'est ainsi que se construit son identité de militante, artiste, performeuse et modèle photo pour dénoncer les violences qu'elle subit. En exposant son corps nu, Anaïs offre un message fort aux personnes qui prétendent que tout ce qui n'est pas normal n'est pas censé exister. Si l'espace public n'est pas pensé pour les personnes grosses et malades, Anaïs choisit de se l'accaparer. Au fur et à mesure de cet échange, On déconstruit un bout de notre validisme et de notre grossophobie intériorisée chez chacune d'entre nous. Une heure de podcast ne vaut pas un bachelor en sociologie, mais quand on déconstruit en direct avec un témoignage poignant comme celui d'Anaïs, on en ressort un peu moins discriminant et discriminante, forcément.
- Speaker #2
Hello Anaïs !
- Speaker #3
Coucou !
- Speaker #2
Comment tu vas aujourd'hui ? Euh,
- Speaker #3
bah aujourd'hui ça va... Pas ouf, en vrai. Moralement, c'est assez compliqué. J'ai beaucoup de pression et beaucoup de stress. Et mon corps, il pèse très lourd. Donc du coup, je suis un peu dans une période plutôt de down et où je me sens assez seule. Et toi ?
- Speaker #2
Ça résonne pas mal. C'est pas ouf moralement en ce moment. C'est pas ouf physiquement non plus. Donc aussi dans des phases un peu... Ouais. Le moral, ça monte, ça descend, ça monte, ça descend. Là, on sent qu'on n'est vraiment pas dans une phase linéaire, en tout cas.
- Speaker #3
Exactement.
- Speaker #2
Alors, pour contextualiser, les deux ont vit à Genève. On s'est rencontrés à plusieurs reprises dans certains milieux, notamment alternatifs, sans vraiment échanger. Et aujourd'hui, on se rend compte pour cette interview qu'en vrai, on a déjà enregistré il y a cinq mois. Mais comme pour un autre épisode, j'ai fait une erreur lors d'une copie et il s'est malheureusement effacé. Donc, je te remercie d'être présente à nouveau.
- Speaker #3
C'est avec plaisir.
- Speaker #1
Très bien.
- Speaker #2
Et du coup, quelles sont les maladies et les souffrances invisibilisées avec lesquelles tu vis ?
- Speaker #3
Alors, il y a une grande liste. J'espère que tu es prête. Mais en gros, je suis une personne obèse. Donc oui, ça se voit, mais c'est invisibilisé. Et ça, il faut que ça soit clair. Ensuite, j'ai le syndrome des ovaires polycystiques. TDAH, c'est trouble de l'attention et de l'hyperactivité. Dyslexique. J'ai une... Je ne sais pas comment on dit, mais je suis dépressive. J'en oublie encore un. J'ai le syndrome Levenkline, qui est un syndrome rare qui touche une personne sur 3 millions. Et je crois que c'est tout. Voilà.
- Speaker #2
Est-ce que tu as envie d'en développer un ou plusieurs, là, comme ça, à chaud ?
- Speaker #3
Alors... Alors, déjà le syndrome Levenkley, je pense que c'est important quand même d'expliquer parce que vu que c'est un syndrome rare, on n'en parle pas du tout, mais c'est ce qu'on appelle le syndrome de la belle au bois dormant, en fait, vulgairement. Mais en gros, c'est des crises qui se passent tous les trois mois à peu près et c'est déclenché par quelque chose. Donc, ça peut être l'alcool, ça peut être les règles, ça dépend des personnes. C'est un syndrome neurologique. Et en gros, les crises, c'est de l'hypersomnie, donc c'est dormir entre 20, enfin c'est 20 heures sur 24 à peu près, de l'hypersexualité, il y a de la dissociation de soi et de son corps, de soi avec son corps, on se voit d'en haut. J'ai toujours de la peine à expliquer ça, mais il peut y avoir plein d'autres choses. Voilà, il faut aller se renseigner, mais c'est assez... Et c'est un syndrome qui, du coup, a plein de répercussions, parce que du coup, ça... faire perdre ton travail, tu ne sais pas ce qui se passe. Les médecins, ils pensent que c'est d'autres maladies et du coup, tu fais plein de tests. Enfin voilà, il y a toute une répercussion. Et je crois que je pensais celui-là un peu à...
- Speaker #2
À développer. Du coup, vu que c'est une maladie rare, comment tu as réussi à avoir un diagnostic ?
- Speaker #3
En gros, moi, j'ai fait une grosse, grosse crise fin 2020. où justement pendant un mois j'ai dormi 20h sur 24 et je me réveillais. En fait, il y a aussi tout ce truc d'angoisse, c'est qu'on se réveille vraiment avec des grosses, grosses angoisses. On ne va plus manger. Il y a vraiment des répercussions assez fortes et c'est moi qui me suis inquiétée. Du coup, j'ai été voir mon généraliste qui m'a fait plein de tests pour la mononucléose, pour, comme on dit, l'apnée du sommeil. Désolée, je perds un peu mes mots, mais ça c'est la dyslexie justement. Et puis, j'ai fait à peu près 4 mois de test jusqu'à faire une nuit dans une clinique du sommeil où j'avais une neurologue. Et cette neurologue, elle m'a posé des questions sur ma vie. Et en fait, en gros, chez moi, c'est déclenché par l'alcool. Et en fait, moi, j'ai fait une pause, je n'ai pas bu pendant 6 ans, de mes 21 ans à mes 27 ans. Et en fait, du coup, je n'avais aucune crise pendant cette période-là. Et c'est quand elle m'a demandé des informations sur mon adolescence. qu'elle s'est dit ah, c'est un peu ça puis après j'ai été voir une spécialiste à Paris, et puis du coup on a diagnostiqué comme ça. Il n'y a pas de test en fait, en gros.
- Speaker #2
C'est un diagnostic d'exclusion en fait, tu réponds à plein de critères et on se rend compte que c'est ça.
- Speaker #3
C'est ça, ouais.
- Speaker #2
J'imagine que ça a dû être vraiment hyper handicapant de dormir 20h sur 24.
- Speaker #3
Bah moi je ne m'en rappelle pas trop, parce que justement il y a des dissociations aussi. En tout cas, là où je suis contente, c'est que je ne me suis pas mise en danger dans les périodes aussi de réveil. Mais par contre, je sais que pour mon entourage, ça faisait très peur. Je me rappelle vraiment d'un moment où ma mère... J'étais chez ma mère, parce que je n'arrivais plus du tout à prendre soin de moi. Je ne pouvais plus rien faire. Faire à manger, c'était compliqué. J'étais tout le temps fatiguée. Du coup, j'étais chez ma mère en attendant ces rendez-vous médecins qui prennent toujours aussi un peu de temps à venir. On ne te prend pas en urgence. Et ma mère, un jour, au bout d'une semaine, je me rappelle, elle est rentrée dans la chambre. Puis elle a vraiment fait, maintenant, ça suffit. Puis elle a ouvert les rideaux, tu sais. Elle a enlevé la couverture. Puis elle a dit, tu te lèves maintenant, tu te lèves, ça suffit. Parce qu'elle aussi, elle était en panique tout d'un coup. Je ne sais pas, elle a dû avoir un truc. Elle s'est dit là, c'est de la dépression grave ou je ne sais pas ce qu'elle a pensé. Et puis ça, je me rappelle où vraiment je me suis réveillée. J'ai dit, maman, je suis malade. Je ne peux rien faire. Je suis désolée. Et puis je l'ai rassurée. Mais de voir les gens en panique aussi, c'était compliqué.
- Speaker #2
Est-ce qu'il y a des gens qui ne comprenaient pas, limite, qu'ils pouvaient porter un regard jugeant sur toi ?
- Speaker #3
Alors moi, j'étais en arrêt à ce moment-là, donc je ne voyais personne. Et mes amis, je leur ai vraiment dit, en fait, je ne peux pas vous parler, je ne peux pas vous voir, je suis malade. Puis tout le monde a quand même compris, parce que comme les symptômes sont très graves, les gens voient... Je ne sais pas s'ils comprennent, mais en tout cas, ils voyaient très bien que tu es dans l'incapacité totale d'inter-réagir. Du coup, je n'ai pas eu de... Je n'ai pas eu de choses négatives. Ce n'est pas comme, par exemple, si je parle de l'obésité ou du TDAH. Il y a tous les stéréotypes parce que tu peux continuer une vie normale dans le sens où tu vas pouvoir sortir, voir des gens. Là, j'étais vraiment dans l'incapacité totale pour aller chez le médecin. C'était un trajet de bus de 10 minutes. J'étais obligée de prendre le taxi parce que je m'endormais. Je ne pouvais pas rester valide.
- Speaker #2
Et tu parlais de phase de dissociation un peu ? Oui. Où vraiment, tu t'observes depuis le haut ?
- Speaker #3
Alors ça, j'ai eu déjà depuis très jeune, justement. Et en fait, on a pu aussi faire le diagnostic grâce à ça. Parce que quand j'étais ado, je discutais avec mes potes et je leur disais, ils me disaient à moi, je me souviens, ils avaient des souvenirs. Et quand ils expliquaient leurs souvenirs, je me rendais compte qu'ils voyaient leurs souvenirs depuis leurs yeux, en gros. Et en fait, moi, j'étais là, mais je ne me rappelle pas du tout de mes souvenirs comme ça. Moi, mes souvenirs, je me rappelle de la pièce dans son entièreté, comme si je volais un peu au-dessus. Et ça, j'ai raconté à la neuropsy. Et du coup, les phases que j'allais à quand j'étais réveillée, c'était ça aussi. C'était qu'en fait, tout d'un coup, tu ne vois pas par rapport à tes yeux, mais tu vois comme si tu étais un fantôme au-dessus. Donc, tu te vois aussi toi. Et ça, c'est très bizarre. Et ça paraît un peu fou parce que ça paraît inexplicable dans le sens où on se dit comment le cerveau, il réussit. Mais en fait, le cerveau, il recrée en gros avec peu de parties une scène. Mais c'est ça en fait la dissociation, c'est que tu te vois depuis en haut et puis c'est un peu bizarre.
- Speaker #2
Ça me fait vraiment penser, tout d'un coup je ne sais pas pourquoi, mais aux expériences de mort imminente.
- Speaker #3
Moi je n'ai jamais eu ça.
- Speaker #2
Moi non plus. Mais dans les témoignages, les gens disent vraiment qu'ils s'extraient de leur corps et ils se voient au-dessus de la pièce. Ils voient par exemple des personnes les réanimer, les personnes autour d'eux vraiment se mettre sur leur corps, les embrasser. Et en fait, ils sont vraiment au-dessus d'eux-mêmes.
- Speaker #3
La différence, c'est qu'eux, ils ne peuvent pas interréagir. Toi, tu peux interréagir. Quand tu dors, tu dors. Mais quand tu es réveillé, tu as cette interréaction. C'est juste que c'est comme si tu étais à côté de ton corps ou au-dessus. Et puis, quand tu veux interréagir, c'est méga dissocié, en fait. C'est comme s'il y avait un temps de latence entre ce que tu veux faire et comment tu vas le faire.
- Speaker #2
Et tu disais que ce syndrome, c'est un syndrome, Klein-Levin, ça s'appelle aussi le syndrome de la belle au bois dormant ? Oui,
- Speaker #3
alors je ne sais pas pourquoi ils ont donné ça comme nom, parce qu'en plus, majoritairement, c'est plus des hommes qui sont touchés de base, donc en plus, il n'y a pas de réelle logique. Mais c'est, je pense, juste parce qu'un des premiers symptômes, c'est l'hypersomnie.
- Speaker #2
Je trouve un peu particulier parce que ça rend... Ce syndrome un peu édulcoré, comme ça, tout d'un coup, c'est un peu poétique, c'est presque un peu joli, c'est Walt Disney, c'est...
- Speaker #3
Non, mais c'est hyper problématique, mais comme tous les noms, voilà, c'est un peu...
- Speaker #2
En fait, pour moi, ça peut aussi cacher la réelle souffrance qu'il y a derrière. T'es pas juste une belle au bois dormant qui dort, en fait, tu souffres de cette hypersomnie.
- Speaker #3
Ouais, clairement, je suis totalement d'accord avec toi. Puis c'est un peu tout problème des noms qui sont donnés aux maladies comme ça, de vouloir... rendre ça joli alors que ça l'est pas, puis que justement derrière il y a des souffrances et de la panique. Parce qu'en plus tu comprends pas ce qui se passe. La mononucléose tu comprends pas aussi au début, mais quand c'est la même psyché, t'as un médicament, et puis t'as un temps, donc tu sais ce que t'as. Moi j'ai eu de la chance, où je suis très vite, parce que j'étais dans un cursus, mais j'imagine bien que quelqu'un qui sait pas, ça peut amener... Bah d'ailleurs ça amène à plein de choses, ça amène à des... Vu qu'il y a de l'hypersexualité aussi, ça peut amener à des comportements très dangereux. Par rapport à soi, justement, à des notions de non-consentement, de viol. Enfin, pardon, je n'ai pas mis de warning, mais...
- Speaker #2
On en mettra.
- Speaker #3
Ouais. Du coup, voilà. Oui, ça peut être... Si on n'est pas diagnostiqué vite et qu'on n'est pas dans un cursus, et surtout que ça arrive très jeune. Donc, en fait, très jeune, on peut aussi être complètement perdu face à ça, parce que déjà, on n'a pas forcément l'écoute nécessaire quand on est adolescent ou adolescente. Et moi, je pense qu'avec le recul, il y a aussi plein de comportements que j'ai eus. qui justement sont dues à ce syndrome. Et je pense que j'aurais pu mieux me protéger si j'avais su où aller plus tôt ou si on m'avait peut-être alertée.
- Speaker #2
Tu as des exemples que tu veux partager ?
- Speaker #3
L'hypersexualité, moi, très jeune, ça a été une sorte d'arme, entre guillemets. Et je pensais que ce n'était pas parce que j'avais une grande libido, alors que potentiellement, c'est aussi en jeu à cause de ce syndrome. Donc, je pense que j'aurais pu vivre différemment ma sexualité plus jeune,
- Speaker #2
par exemple. Oui. Tu te dis avec le recul que ce n'est pas forcément des choses que tu souhaitais réellement faire, mais peut-être qu'il y avait une partie... Ouais, clairement.
- Speaker #3
Non, mais clairement, c'était des choses, je pense, que j'aurais voulu beaucoup plus me respecter. Mais sur le moment, ça me paraissait normal parce que mon cerveau... Enfin voilà, après, c'est difficile, mais... Puis je ne voyais pas forcément ça comme un comportement étrange ou pas normal. Mais avec le recul, je me dis, en fait, j'aurais pu plus me protéger.
- Speaker #0
Tu parlais de l'alcool. Oui. Tu disais que pour toi, c'était le déclencheur.
- Speaker #1
Oui. Ça, on l'a su parce que justement, j'ai parlé de cette période où j'ai arrêté de boire. Et du coup, la neurologue a dit, c'est bizarre que ça arrive maintenant, alors que ça fait un an et demi que vous buvez justement. Et du coup, c'est un des facteurs, c'est clairement dit. Donc, elle a dit, on va essayer ça, vous arrêtez. Et puis, si vous n'avez plus de crise d'ici six à un an, c'est que c'était ça. Puis en fait, ça a avéré que c'était ça. Donc ça, j'ai aussi eu de la chance sur le... C'est clair que si c'est quelque chose qui est hormonal ou tes règles, c'est beaucoup plus compliqué à gérer.
- Speaker #0
Oui, c'est clair. Et puis tu as pu vite identifier quelque part.
- Speaker #1
Oui, j'ai essayé. J'ai dit bon, j'arrête du jour au lendemain. Puis je regarde. Puis vu que j'avais déjà arrêté, ce n'était pas quelque chose qui me paraissait horrible à faire. Ou enfin, voilà, c'est un peu assez totalement accessible.
- Speaker #0
Et tu as repris depuis l'alcool ?
- Speaker #1
Non, pas du tout. Il ne faut surtout pas que je reprenne. Si je reprends, je refais des crises. Donc, je peux en boire un verre si j'ai envie, tous les deux, trois mois, mais ça ne m'attire en plus pas forcément. Donc non, je suis à l'eau.
- Speaker #0
C'est très bien. Je fais partie de cette team-là aussi et on vit très bien quand même. Enfin, très bien avec des guillemets.
- Speaker #1
Moi, l'alcool, c'est vraiment quelque chose qui m'a rarement... Enfin, ça ne m'a pas attirée plus que ça. Je m'amusais très bien quand je n'avais pas d'alcool. Je m'amuse toujours très bien quand je n'ai pas d'alcool. C'est pas ça qui...
- Speaker #0
Et du coup, avant, tu nommais TDAH, donc trouble de l'attention à hyperactivité, le SPOC, donc syndrome des ovaires polycystiques, dyslexie, obésité. Moi, j'ai envie de te demander comment tu deals avec tout ça ?
- Speaker #1
Déjà, le truc que je peux dire, c'est que ce qui, je trouve, est intéressant, c'est que moi, la majorité a été diagnostiquée adulte, déjà. Donc ça, c'est une particularité qui fait que... J'ai plus de facilité à dealer avec tout ça, je pense, parce qu'il y a un truc un peu fataliste. Quand on est enfant, on veut peut-être plus comprendre, essayer de trouver plus de choses, ou on est affligé aussi par ce qui nous arrive. Moi, c'était un peu, bon, voilà, j'ai 22 ans, on me dit ça, il faut bien que j'avance, quoi. Je n'ai pas trop le choix, que ce soit dans le métier ou partout. Donc, je dois m'adapter. Donc, j'ai plus eu ce truc où j'ai dû m'adapter à ma condition. Parce que je me rendais bien compte que, en fait, la société, elle n'est pas adaptée à notre condition. Donc, j'étais là, ben, qu'est-ce que je fais ? Donc, le premier truc, c'était de m'adapter à ma condition, essayer d'arriver à créer ce que j'avais envie de créer et ensuite de pouvoir se battre pour que la société change.
- Speaker #0
Oui, mais je t'imagine que tout ça, c'est quand même avec le temps que c'est arrivé, non ? Au départ, il n'y a pas quand même l'acceptation des diagnostics, toutes ces démarches, elles peuvent être pesantes, non ?
- Speaker #1
Oui, oui, alors c'est très, très pesant. Mais c'est arrivé un peu, ben... C'est arrivé, il y a eu la dyslexie, ensuite il y a eu le TDAH qui est arrivé juste après. Les évers polycystiques, c'est arrivé à cause d'une erreur d'un médecin qui était grossophobe. En fait, tout est arrivé de toute façon avec des choses très dures. Donc, j'ai un peu ce tempérament un peu de soldat où en fait, je suis là, si j'arrête. En plus, maintenant, avec la dépression, je ne vis plus. On n'a pas mis non plus de warning.
- Speaker #0
On en mettra de toute façon dans le résumé du livre. Mais tu as reçu tous ces diagnostics grâce à un bon suivi médical ou c'est toi qui as été les chercher ? Tu avais besoin de réponses à tes questions ?
- Speaker #1
Alors, en gros, si je prends... Je vais essayer d'aller, mais en gros, la dyslexie et le TDAH, c'est parce que j'ai repris mes études à 20 ans et je voyais qu'il y avait un problème avec les langues. Et en fait, les profs me disaient, non Anaïs, tu arrives très bien à expliquer, tu sais, etc. J'étais oui, mais je sais, mais je n'arrive pas à reproduire, c'est-à-dire que je n'arrive pas à parler. Mes notes, elles sont catastrophiques, donc il y a quelque chose qui ne joue pas. Et personne n'a entendu. Donc pour répondre à la question, c'est non. Ça n'a pas été un bon suivi. Mais en gros, moi, oui, je me suis battue et j'ai été voir une logopédiste pour enfants. Je l'ai appelée vraiment en lui disant en fait, j'en suis là, personne ne m'écoute. Et elle, elle m'a dit venez, on va tout de suite regarder. C'est grâce à elle que j'ai pu avancer. Après j'ai eu une logopédiste qui m'a aidé à mettre en place des choses pour aller à l'Uni. Après j'ai eu un suivi correct. Et pour les problèmes d'obésité, c'est la même chose. C'est-à-dire que moi je fais de la résistance à l'insuline. Et en gros, ça fait des années... Déjà, il y a eu tout le côté grossophobe de l'adolescence où on m'a envoyé voir des médecins alors qu'au final, je n'étais pas grosse et je n'avais pas de soucis. Donc ça a créé des problèmes. parce que du coup, j'ai dû contrôler très jeune mon alimentation. Ça a déréglé mon métabolisme. Et plus tard, vers mes 18 ans, j'ai commencé à dire, en fait, j'ai un problème. Il y a quelque chose qui ne va pas. Je prends du poids par pic et je ne mange pas plus et je ne change pas. Et ça, on ne m'a pas écoutée jusqu'à mes 30 ans. Et c'est à mes 30 ans où je suis tombée sur un médecin qui avait bossé au CHUV et qui connaissait bien ces problématiques, qui, lui, m'a pris en compte et a dit, on va tout regarder de A à Z, prise de sang, etc. Et c'est avec lui, maintenant, que je peux évoluer là-dedans.
- Speaker #0
J'ai vraiment l'impression que les personnes grosses sont très peu entendues quand elles disent justement, non mais je mange des fois peu ou je n'ai rien changé. Et en fait, je prends énormément de poids. Puis on va souvent être là, genre oui, oui, c'est ça. Mais en fait, je suis sûre que vous mangez quand même des paquets de chips la nuit. Enfin, j'ai un peu souvent entendu des trucs comme ça. Et moi, pour exemplifier, j'ai eu une période de hyper résistance à l'insuline où je faisais, je crois, entre 15 et 17 kilos de plus. Et vraiment, l'endocrinologue qui m'a diagnostiqué ça et qui m'a donné le traitement m'a dit littéralement, quand vous mangez une pomme, c'est comme si vous en mangez quatre. Je lui disais, mais ouais, je mange une pomme dans la journée entre mes repas. C'est pas ça qui me fait grossir. C'est comme si vous mangez 4 et c'est le cas pour tout en fait. Donc tous les repas sont multipliés par 4. Donc forcément, il y a un moment donné où...
- Speaker #1
Oui, c'est clairement ça. Maintenant, je ne sais pas quel traitement ils t'ont donné, mais en gros, toi, ils t'ont écouté en partie aussi parce que tu collais moins à l'image de personnes grosses, même avec 15 kilos.
- Speaker #0
Totalement.
- Speaker #1
Parce que tout de suite, on t'a amené vers des gens, ce que nous, on ne va pas faire. C'est-à-dire que tout est un problème pour les médecins en général dû à l'évolution de la société. Tout un problème dû au poids. Si tu as mal au pied, ça va être le poids. Si tu as mal, comme moi, là aussi, je mets des warnings. Mais en gros, l'histoire des ovaires, c'est que j'avais très mal à un ovaire. J'étais chez le gynécologue et il n'a pas pu le regarder parce que mes organes cachaient dû au fait que je sois grosse. Du coup, il a regardé l'autre. Il a dit non, mais ça va très bien. Vous avez juste un peu le syndrome des aéropolisquistiques. Tout va bien. Et deux heures après, j'étais à l'hôpital parce que j'avais un kyste qui avait pété. Du coup. Voilà. Il faut pas te dire que c'est très mal. Et le risque, c'est la mort dans ces cas-là. Il faut quand même le savoir. Et ça, c'est pour exemplifier, c'est très trash, mais c'est pour exemplifier vraiment la violence des corps médicaux. Et en fait, ce qui fait, comme tu dis, que nous, on n'est pas diagnostiqués, c'est justement parce qu'aujourd'hui encore, l'idée la plus grande, c'est qu'une personne grosse mange beaucoup. Et en fait, ça prend pas en compte les facteurs socio-économiques. les facteurs de pauvreté aussi, d'accès à plein de choses, parce que accès à une salle de sport, c'est pas donné à tout le monde. La sédendarité, elle est de plus en plus grande. L'accès aux denrées alimentaires aussi, qui sont bonnes pour la santé, pareil. Alors, je dis pas que toutes les personnes obèses ont un... Alors, elles ont un problème médical, parce que l'obésité, ça engendre quand même des problèmes, mais il y en a qui vont beaucoup manger, il y en a qui vont être dans la malbouffe. Mais en fait, ça cache aussi d'autres problèmes. Et c'est ces autres problèmes qu'il faut regarder. Et souvent, ces autres problèmes, c'est justement la société. C'est les violences qu'on a eues à l'école étant petits. Voilà, en fait, il y a tout un travail sociétal qui amène à ce qu'il y ait ces soucis-là. Et malheureusement, si on prend mon exemple, le problème d'avoir vu la résistance à l'insuline à mes 30 ans, c'est que c'était trop tard. C'est-à-dire que toi, on a pu te donner un traitement, et moi, mon traitement, il ne fonctionne plus. Parce qu'en fait, mon pancréas, il a trop de... En gros, pour expliquer, la résistance à l'insuline, c'est... Si vous voulez, j'explique quand même, comme ça les gens peuvent savoir. En gros, le pancréas, il gère deux choses, les sucres et les graisses. Et au-dessus du pancréas, il y a une sorte de petite membrane qui sécrète l'insuline pour pouvoir justement traiter les sucres et les graisses. Et en gros, le corps, la résistance à l'insuline, c'est que le corps, il va combattre cette insuline que la petite membrane au-dessus du pancréas sécrète. Et ça fait que, comme tu dis, quand tu manges... ne serait-ce qu'une pomme, c'est comme si tu en mangeais quatre et en gros, tu vas stocker énormément. Ça, tu peux le traiter, mais si ton corps a beaucoup trop stocké, donc si tu arrives à un poids comme moi, je suis arrivée, par exemple, par rapport à ma taille, en fait, tu auras beau donner ce médicament, ton poc-raye, il n'aura plus assez de place et de temps pour traiter, même s'il a de l'aide. Et du coup, ça fait que tu ne perds plus. Et alors, ça te stabilise, le médicament, quand même, parce que tu peux manger normalement, ça te stabilise, mais tu ne perds plus. Et c'est ça, le problème, en fait, d'être dans une société qui pense que tout est à faute. C'est qu'au final, on voit tout trop tard.
- Speaker #0
Et comment tu expliques qu'on vit dans des sociétés grossophobes ?
- Speaker #1
Alors, ce n'était pas tout le temps le cas, déjà. C'est un truc, il faut prendre la donne historique et géographique. Et encore aujourd'hui, géographiquement, ce n'est pas partout. Alors, c'est en majorité dans le monde, oui, mais il y a des petits endroits encore. Et ça vient du culte de la beauté, en fait. C'est-à-dire qu'on a décidé, je ne pourrais pas dire exactement les années, mais on a décidé à un moment donné que le corps de la femme devait avoir une certaine... Enfin, le corps en général aussi, peu importe le genre, devait avoir un certain standard. Et les gens qui sortaient de ce standard-là, ce n'était pas normal. Et... Du coup, on a décidé de ne pas investiguer plus loin non plus. Maintenant, il y a des études, beaucoup d'études maintenant qui ont été faites sur justement les personnes obèses parce qu'il y en a de plus en plus. Du coup, maintenant, les études montrent qu'une personne obèse, par exemple, n'a pas plus de risque d'avoir une maladie qu'une personne normale. On dit souvent, si tu es obèse ou si tu es grosse, tu vas avoir du diabète ou du cholestérol, mais en fait, je crois que tu as même moins de chances de l'avoir qu'une personne mince. Pourquoi ? Parce que nous, on a toujours été dans un cursus de privation. Donc en fait, comme tu disais avant, souvent elles mangent moins et ça c'est une réalité. Il y a beaucoup, beaucoup de personnes qui sont grosses qui vont se sous-nourrir. Et ça fait que le corps va encore plus stocker. Et parce qu'on a toujours été dans ce truc-là et parce qu'en fait, on associe la nourriture à être quelque chose de mal, parce qu'on va être dans la culpabilité, dans le rejet de soi-même, dans une grossophobie intériorisée très forte. Et la société, elle a évolué comme ça. Donc pour elle, tout ce qui n'est pas normal n'est pas censé exister, n'est pas censé avoir de la place. Et il y a cette idée de... Oui, mais bon, on ne va pas tout adapter pour tout le monde. Mais en fait, c'est faux de penser que le tout le monde, c'est une personne qui fait du 34 qui est valide. Parce qu'en fait, ce n'est pas vrai. C'est juste que c'est les gens qu'on voit, parce que c'est les gens qu'on met le plus en avant.
- Speaker #0
Et puis souvent aussi, c'est des personnes qui se suradaptent et qui cachent d'autres choses aussi. Des fois, des maladies aussi. Voilà. Mais moi, je trouve ça toujours un peu triste de me dire qu'à un moment donné, une société donnée a changé de critères. Parce que moi, je me rappelle quand même, enfin, pas que je ne me rappelle pas, je l'ai vécu. Mais dans les livres d'histoire et dans l'art aussi, à quel point les corps gros ont pu être valorisés à un moment donné. Et tout d'un coup, ça a switché.
- Speaker #1
Bon, alors, c'était valorisé parce que ça...
- Speaker #0
C'était la richesse,
- Speaker #1
en fait. C'était la richesse et l'abondance.
- Speaker #0
C'est vrai.
- Speaker #1
Donc, je pense qu'il n'y a pas trop... Historiquement, on ne sait pas trop, mais je pense que si on prend dans ce qu'on appelait le... bas peuple à l'époque. Mais si on prend dans le peuple en général, je ne sais pas si c'était autant valorisé que ça, justement, d'être gros. Ça, je ne peux pas te répondre.
- Speaker #0
C'était certainement plus associé à la richesse.
- Speaker #1
Oui, c'est ça, et à l'abondance. Et du coup, il y avait une sorte de fétichisation aussi et d'hypersexualité de la femme grosse, ce qui existe toujours au final, ce qui est juste moins montré, justement. Donc, les violences, elles sont deux fois plus fortes.
- Speaker #0
C'est-à-dire, quand tu parles d'hypersexualisation de la femme grosse aujourd'hui, ça veut dire ?
- Speaker #1
Ça veut dire que certains hommes vont fétichiser la femme grosse parce qu'elle va rappeler justement l'abondance, le truc maternel. Ça va se retranscrire par des oui, mais il y a plus de matière Enfin voilà, ça va être vu que pour le sexe et pas assumé en public, entre guillemets. Ça ne devrait pas s'assumer, mais c'est ce qu'ils disent. En fait, ils le disent comme ça. Moi, je ne pourrais jamais sortir avec une femme grosse. Parce qu'en fait, c'est toute cette grossophobie ambiante. C'est-à-dire que, oui, c'est grave les personnes qui disent ça, mais ils le disent aussi parce que, justement, s'ils sont avec une personne grosse dans l'espace public, ils vont avoir des regards, des remarques, etc. Donc, voilà, c'est un peu le serpent qui se met en la queue.
- Speaker #0
Ouais. Moi j'ai essayé un peu de prendre du recul avec ma grossophobie intériorisée et des fois je me dis, oh là là, l'autre jour, un exemple, j'étais avec mon conjoint en train de me balader et tout d'un coup je vois un homme gros sur une trottinette et je me dis, mais pourquoi il prend une trottinette alors qu'il est gros, il pourrait prendre un vélo. Et là je me suis dit, mais mon Dieu, comment je peux penser ça ? Et en fait c'est terrible parce que c'est pas pour désassumer, c'est réellement ma pensée qui est venue. Mais je sens tout de suite que j'ai un mouvement de recul et je me dis, mais j'ai presque l'impression que ça ne m'appartient pas de dire ça. Parce que je ne suis pas quelqu'un d'extrêmement jugeant. Et tout d'un coup, c'est comme si j'avais tellement entendu des trucs pareils que je ressortais ça. Et du coup, je disais à mon mari, non mais en fait, oublie ce que j'ai dit, c'est immonde.
- Speaker #1
Oui, c'est exact. Alors, je valide le fait que c'est immonde.
- Speaker #0
Non, mais totalement.
- Speaker #1
Et oui, c'est clairement un très bon exemple de ce qu'on appelle la grossophobie intériorisée. C'est vraiment ce truc de se dire... Déjà de penser que cette personne, elle peut prendre un vélo. En fait, souvent, par exemple, moi, typiquement, je ne peux pas aller sur un vélo. Genre vraiment, j'ai trop mal, je n'ai pas l'endurance pour. Et en fait, ça va plus me faire mal qu'autre chose. Je peux me mettre en danger en faisant ça. Mes articulations, elles ne peuvent pas tenir. Enfin voilà, c'est aussi du coup, tout d'un coup, se dire que par le sport, en plus, on va maigrir. Alors qu'en fait, ce n'est pas vrai. Souvent, quel sport, ça peut justement engendrer plus de problématiques. Et puis, on a le droit, comme tout le monde, d'avoir les envies qu'on veut. En fait, on kiffe de la trottinette électrique, genre vas-y. Mais il y a ce truc vraiment. Moi, je me rappelle de quelqu'un derrière moi où justement, j'ai dit oui, j'aimerais trop m'acheter un vélo électrique pour après, parce qu'on pourra peut-être en parler. Moi, je vais faire une chirurgie bariatrique. Et cette personne m'a dit oui, mais tu pourrais t'acheter un vélo maintenant. Et j'ai dit non, parce que maintenant, je ne peux pas. Je ne peux pas faire de vélo, ça me fait trop mal. Et la personne a dit Ah non, mais moi, je suis sûre que tu peux. Et ça, c'est un truc genre, déjà de un, je m'en bats les coulisses, enfin pardon, je m'en bats les oeufs verts de ce que tu penses, mais je suis sûre que tu peux. Enfin, qu'est-ce que ça veut dire ? C'est vraiment, je ne sais pas, c'est vraiment tous ces stéréotypes, la même chose dans la dépression. Ouais, mais je suis sûr que tu as qu'à te lever. Enfin, c'est un peu ce que tu as qu'à faire.
- Speaker #0
Je suis sûre que tu peux me lever.
- Speaker #1
Et ça, c'est très grave. Et puis, autre chose que je voulais ajouter. Pour la grossophobie intériorisée, ce qui est important à dire, c'est que c'est aussi toutes les fois où les gens vont faire du sport pour maigrir. Faire du sport, c'est hyper bien pour ta santé. Du moment où tu te dis Ouais, mais moi, je ne veux pas être grosse, je veux vraiment maigrir en fait, tu ne le fais plus pour ta santé, tu ne le fais plus pour ton métabolisme. Tu le fais d'une manière justement grossophobe, tu le fais pour essayer de ne pas ressembler à ce que moi je suis, donc c'est hyper violent. mais pour la personne qui le pense aussi. Parce qu'au final, ce n'est pas pour être en meilleure santé, ce n'est pas pour avoir plus de muscles, ce n'est pas pour pouvoir plus facilement monter les escaliers. Et ça, c'est important à dire aussi, que la grossophobie, ce n'est pas qu'envers les autres, c'est aussi envers soi-même.
- Speaker #0
Totalement. Et qu'en est-il de ta grossophobie intériorisée ?
- Speaker #1
Alors moi, je travaille beaucoup dessus, encore aujourd'hui. Moi, elle est plutôt sur les normes de beauté. J'ai beaucoup de peine à... j'ai beaucoup de peine à prendre soin de mon corps à aimer mon corps alors je pense qu'il ya plein de gens dans mon cas mais moi j'ai vraiment un sentiment c'est assez trash que j'ai vraiment un sentiment de dégoût souvent vers moi même et c'est peu compréhensible de part tout ce que je fais à côté tu vois parce que ben on l'a pas dit mais comme je suis artiste et super forme Je suis aussi modèle photo, je fais beaucoup de photos de nu, je mets beaucoup en scène mon corps. Et en fait, ça, je le fais justement parce que, déjà, c'est un moment où je me sens bien, en accord avec moi-même. Et c'est pour justement aussi dénoncer toutes les violences. Mais c'est vrai que dans un rapport de sexualité, de sensualité ou de rapport à l'autre, j'ai beaucoup de peine. Si je me regarde dans un miroir, j'ai beaucoup de peine à me dire oui, t'es jolie Ça, c'est ma grossophobie intériorisée de fou.
- Speaker #0
Et on n'associe pas les personnes grosses à l'invisible. On peut se dire que pour les personnes... Ouais, on a tendance à se dire que les personnes grosses, c'est quelque chose de visible. Pourtant, moi, j'ai l'impression que les souffrances des personnes grosses sont invisibilisées, car il y a des sous-entendus. Tu vois, tu es un peu citée grosse, c'est ta faute. Enfin, qu'est-ce que tu en penses de ça ?
- Speaker #1
Alors, ce n'est pas que les souffrances. Elles sont invisibilisées dans la totalité. Parce qu'en gros, on va dire... Oui, on se dit qu'une personne grosse, on la voit, mais en fait, on ne te calcule pas. Moi, quand je vais faire mes courses et qu'il y a beaucoup de monde, les gens se poussent pour les autres gens, moi, ils me poussent. Comme si, parce que c'est ma faute si je prends de la place, du coup, c'est eux qui me poussent. On ne va pas faire l'effort de me contourner. Ça, c'est par exemple une violence quotidienne. Et l'invisibilisation, c'est aussi l'espace public. C'est que tu n'as pas, tu peux aller, tu as de la place nulle part. Tu ne peux pas t'asseoir. Souvent, dans la majorité des restaurants, les chaises sont trop petites et ça fait très, très mal. Ce n'est pas des douleurs minimisantes. Moi, je dis souvent, essaye de t'asseoir dans une chaise pour enfants, puis reste-y une heure en essayant de faire autre chose, puis tu verras si tu n'as pas mal. Justement, aussi toute l'accessibilité. Tu vois, porter le poids, c'est aussi pareil. Porter un sac. de 70 kilos et puis marcher pendant 15 minutes. Puis voilà, il y a un peu tous... La société en général et puis l'espace public n'est pas fait pour les personnes grosses. Il n'y a pas d'accessibilité. Et après, il y a toutes les violences à côté. Il y a trouver moins de travail parce que tu es grosse et que du coup, il y a de la grossophobie. Ne pas oser aller quelque part parce qu'on va te dire des choses méchantes. Ne pas oser manger quand t'as faim ou t'as envie parce qu'on va trop mal te regarder. Voilà, il va vraiment y avoir tout ça. Et aussi, justement, les souffrances intérieures, tout ce rejet, cette non-écoute, ne pas avoir des lieux pour soi et puis être toujours dévisagé. Ça, c'est une réalité que peu de gens connaissent. vraiment peu de gens. Les gens qui vont peut-être connaître, c'est des gens qui vont être très tatoués ou qui vont avoir des personnes en situation de handicap, qui vont savoir ce que c'est d'être tout le temps dévisagé. Et ça, c'est une violence hyper forte. Ou aussi les femmes dans l'espace public qui se font regarder régulièrement, elles savent aussi ce que ça fait. Mais non, moi, je dis que pour moi, on est vraiment invisibilisés. Et c'est ça qui est hyper dissonant, c'est ce fait de... D'avoir l'impression que tu prends tout le temps de la place et que t'es pas la bienvenue, puis qu'en même temps, on s'en fout de toi. Et à ça, tu peux culminer les violences intersectionnelles si t'es une femme, et du coup, on va encore moins t'écouter. Si en plus, t'es une femme racisée, si en plus, t'es une personne grosse en situation de handicap.
- Speaker #0
Totalement. Moi, je suis hyper sensible à l'environnement et son adaptation, et c'est vrai que j'ai vraiment constaté ces derniers temps que Il n'y a rien qui est adapté aux personnes grosses. Je suis passée l'autre jour dans un bâtiment hyper connu à Genève. Et vraiment, c'était ces portes tourniquées. Mais j'avais déjà du mal à passer. Je me suis dit, mais je fais 20 kilos de plus, je fais comment ? Je vois certaines toilettes où, quand tu ouvres la porte, tu dois pousser la porte, puis tu arrives directement sur le shot. Mais du coup, tu dois passer comme ça. Enfin bon, on ne voit pas dans le podcast. Ouais,
- Speaker #1
mais tu peux.
- Speaker #0
Je me dis, j'ai du mal, comment je ferais si j'étais grosse ? Et je pense aux avions, certains transports publics. Et ça me choque vraiment. Et je pense que quand tu es dans l'espace public, tu es sans cesse confrontée à ça.
- Speaker #1
Ouais, en fait, tu es sans cesse confrontée à ça. Donc, tu es sans cesse en train de te dire que tu n'es pas la bienvenue. Et tu es sans cesse en train de te dire qu'en fait, est-ce que c'est ma faute ? Et je pense que c'est ça dont on parle moins. Parce que... toutes les personnes, enfin nous, quand je dis nous, je dis les personnes militantes anti-grossophobie, on est dans un truc de revendiquer, revendiquer, et du coup c'est vrai qu'on parle beaucoup moins de la grossophobie intériorisée comme on vient de dire, et aussi de ce truc d'être tout le temps dans la culpabilité, et dans l'angoisse, parce que moi dernièrement, tu parles de l'avion, j'ai pris l'avion, j'étais avec une de mes très chères amies, qui est totalement sensibilisée, qui a été d'un support énorme, et je la remercie, mais qui a dû tout le temps me rassurer. Parce qu'elle voyait, même si je disais rien, elle savait qu'en fait, rien que le stress de ne pas savoir si je vais rentrer dans le siège, de devoir demander une rallonge à des gens souvent qui ne vont pas forcément parler ta langue, parce que du coup, suivant où tu vas, tu vois, elle ne parle pas. Enfin voilà, il ne faut pas savoir si à côté de toi, il y aura d'autres personnes qui vont prendre de la place ou pas. Et que du coup, tout ce truc-là, en fait... C'est hyper... T'es tout le temps dans l'angoisse, tout le temps, tout le temps, et t'es tout le temps dans la culpabilisation. Est-ce que j'ai le droit, pas le droit ? Est-ce que je peux ? Est-ce qu'il faut ? Est-ce qu'il y a tout ça ? Sans parler du rapport à la nourriture. Et puis, il y a ce truc de, comme je disais avant, les gens te touchent tout le temps. Quand t'es dans un bus, tu veux t'asseoir, la personne qui s'assoit à côté de toi, elle te touche. Ça, c'est un truc que les gens, ils réalisent pas, en fait, que t'es tout le temps... Si t'es en plus hyper sensible, par exemple, comme moi, c'est vraiment... C'est l'horreur. Et c'est tout le temps comme ça. C'est pareil pour les chaises, mais comme tu disais, les toilettes. Du coup, tu mets des stratégies en place. Mais après, c'est souvent comment est ton entourage ? C'est aussi difficile de pouvoir le dire. Et c'est pour ça qu'il y a beaucoup aussi de retrait sociétal. Et que ça amène aussi beaucoup de dépression. Enfin, voilà, de tout ce qui va avec.
- Speaker #0
L'autre jour, je lisais un article de la RTS, donc Radio Télévision Suisse, qui disait L'OMS s'alarme sur une épidémie de surpoids Et je me demandais, la comparaison entre maladie et surpoids, est-ce qu'elle te convient ?
- Speaker #1
Alors, c'est une très très bonne question. En gros, alors moi j'utilise le mot grosse tout le temps, parce que pour moi c'est un adjectif, comme je dirais par exemple que toi t'es mince. ou que je dirais quelqu'un que je considère qu'elle est maigre, je dirais maigre. Après, c'est aux personnes concernées de savoir ce qu'elles veulent utiliser. Et moi, actuellement, j'utilise le terme aussi obèse parce que je l'associe à la maladie. Et que moi, actuellement, je suis quelqu'un qui suis en situation de handicap dû à ma maladie, donc dû à mon obésité, donc je dis que je suis obèse. Mais ça m'appartient et c'est mon choix. Maintenant, le problème de ces titres et de l'OMS, c'est qu'en gros... Les calculs, déjà, ils sont faits sur ce qu'on appelle l'IMC, donc l'indice de masse corporelle. Maintenant, j'ai plus tout en tête, mais en gros, c'est une... Un calcul qui a été de base, ce n'était pas du tout pour calculer l'indice de masse corporelle, mais qui était pour calculer quelque chose de tangible. Je ne sais plus exactement. Et ça a été pris comme ça. Mais ça ne prend pas du tout en compte ta masse musculaire, ta masse osseuse, ni tes conditions de vie, ni justement, comme on parlait avant, si tu viens d'un système économique. Enfin, voilà, ça ne prend pas en compte tout ça. Ça ne prend pas en compte les notions géographiques. Parce qu'aux États-Unis, il y a un énorme problème sur les denrées alimentaires quand tu sais que tu peux payer moins cher un litre de coca au lieu d'un litre d'eau. Voilà, donc ça ne prend pas en compte tout ça. Et ça fait qu'on considère certaines personnes en surpoids, alors qu'elles ne le sont pas, déjà. Ou que ce n'est pas un problème. Parce qu'il faut aussi le dire, tu peux être grosse et que ça ne soit pas un problème, ni pour ta santé, ni pour rien. Et puis, l'argument en face, c'est oui, mais d'en vivre 20 ans, non. Voilà, tu peux très bien... Faire 1m60 et faire 80 kilos toute ta vie et très bien vieillir.
- Speaker #0
Non, mais attends, c'est pas compliqué pour tout le monde. C'est gros,
- Speaker #1
pas gros. Mais tu vois, ce truc où tu peux aussi très bien t'alimenter, avoir tout qui est OK et faire 80 kilos pour 1m60, et c'est tout à fait OK. Et en fait, l'EMS ne prend pas du tout en compte tout ça. Et c'est très problématique parce que du coup, ils stigmatisent encore et encore. Et alors qu'en parallèle, il y a plein d'études de médecins, comme je te disais avant, qui prouvent que toutes les maladies dont l'EMS parle, une personne lambda les a tout au tout. de temps. Et ça, on n'en parle pas. Et je trouve qu'à nouveau, les gens véhiculent ce qu'ils ont envie de voir. Et puis, épidémie, je ne sais pas si tu veux revenir dessus, mais... C'est comme si... On nous dit que c'est tout le temps de notre faute. Une épidémie de base, ce n'est pas censé pouvoir gérer, comme on a eu le coronavirus, etc.
- Speaker #0
Je trouve que c'est franchement de sortir le mot épidémie à l'heure actuelle, dans ce qu'on vit. Et vraiment, il y a ce sous-entendu de c'est transmissible
- Speaker #1
C'est transmissible, il y a sous-entendu, tout d'un coup, c'est quelque chose que, on nous dit que ça a toujours été notre faute, et puis là, bref, c'est un peu pas du tout, c'est un argument nul. Et c'est surtout, épidémie, c'est négatif. C'est surtout dire qu'on n'est pas censé exister. Et ça, c'est sur quoi je lutte le plus. Il y a un moment donné où on existe, on est là, puis il faut arrêter de nous dire qu'on n'a pas le droit d'être là et qu'on est un problème. Le problème, c'est le réchauffement climatique.
- Speaker #0
Mais j'ai l'impression que, normalement, il existe quand même des similitudes, notamment sur le regard de la société, sur les personnes et malades et les personnes grosses.
- Speaker #1
Ah oui, c'est pour ça que tu dis... C'est pour ça que moi, je différencie quand même les deux, parce que moi, j'ai été grosse pendant très longtemps sans être malade.
- Speaker #0
Ouais, donc toi, tu... Tu vois ? Ouais, mais je voulais simplement dire, là où je pourrais voir une similitude entre le fait d'être grosse et le fait d'être malade, c'est le regard qui peut porter la société dessus.
- Speaker #1
Bien sûr.
- Speaker #0
où on est invalide, on ne sert à rien, on est inutile, c'est de notre faute. Elle est tombée malade parce qu'elle n'a pas mangé bio, elle est grosse parce qu'elle ne bouffe que des burgers.
- Speaker #1
Soit elle tout s'en sert en mangeant bio aussi.
- Speaker #0
En vivant du jus de céleri tous les jours. Pour moi, c'est hyper dangereux, tout ce regard-là. Et j'ai l'impression qu'il peut être... Je ne veux pas comparer le fait d'être gros et à la maladie, mais il y a quand même un regard qui est posé.
- Speaker #1
Oui, il y a deux choses là-dessus. C'est là où moi, je fais toute attention, c'est de ne pas associer grosses et maladies dans le sens où tu peux être grosse et malade et grosse et pas malade. Ça, je le redis parce que souvent, même dans les milieux militants, il y a eu des injonctions à ça. Et justement, le but, c'est que non. Mais par contre, oui, clairement, que toutes les discriminations, en fait, en général, que ça soit le racisme, que ça soit les LGBTQIAphobes, que ça soit justement le validisme. ou justement la grossophobie, en fait, elles se regroupent sur une seule chose, c'est qu'on nous invisibilise, alors qu'en fait, on est un énorme nombre. Et que ce n'est pas juste de penser que la société est justement, je ne sais pas, valide normative. Je ne sais pas du tout si ça existe comme terme,
- Speaker #0
mais on va l'envoquer.
- Speaker #1
Et c'est complètement faux. Et je suis totalement d'accord avec toi. Et c'est pour ça que nos combats, ils se rejoignent aussi. Et c'est pour ça qu'aujourd'hui, je pense que ce qu'il faut être, c'est ce qu'on appelle intersectionnel. C'est-à-dire qu'il faut parler des combats, de tous les combats, parce qu'ils se regroupent en fait. Et puis comme je disais avant, on peut les mettre en couche et que ce n'est pas normal. Et qu'on devrait avoir accès à ce qu'on veut et qu'on ne devrait pas subir des violences, on ne devrait pas mourir en fait. Parce que la réalité, et c'est ce qu'on ne parle pas, c'est qu'en fait il y a des gens qui meurent de ça. Et je pense que c'est important à dire, tu vois, et à conscientiser. En fait il y a des gens qui meurent parce que les médecins n'ont pas bien fait leur job. parce qu'ils ont eu des biais validistes ou grossophobes. Il y a des gens qui restent chez eux ou qui tombent et qui n'ont pas accès à des soins corrects parce que, justement, derrière, il y a des gens qui sont validistes et qui disent t'as qu'à faire un effort, t'es sûr que t'as pas essayé de remarcher Enfin, voilà, c'est un peu...
- Speaker #0
Une fois, on échangeait, puis tu m'as dit tout est fait pour les personnes dites normales et valides, pourtant,
- Speaker #1
elles ramènent tout à elles Est-ce que je dis ça ?
- Speaker #0
Je l'ai chopée, celle-là. Est-ce que tu peux développer ?
- Speaker #1
Moi, je ne sais plus dans quel contexte je dis ça, du coup.
- Speaker #0
Je crois que c'était lors de notre premier appel. Oui.
- Speaker #1
Mais en gros, oui, elle ramène toi, elle, parce que... Ah oui, je sais pourquoi j'ai dit ça. J'ai dit ça pour... Typiquement, je disais ça... Par exemple, moi, quand j'explique mon... tdh souvent j'explique aussi si tu expliques ce qui est une force est aussi basse qui ce que je considère comme étant moins une force en fait les gens souvent ils disent oui mais moi aussi c'est ça et oui mais moi aussi et c'est comme si tout d'un coup quand tu parlais que ça peut être aussi bas la grosse phobie ça peut être aussi bas typiquement des malades d'autres maladies invisibles mais c'est comme si tout d'un coup quand tu t'as propres i 5 minutes bas comme là on est en train de faire On s'approprie du temps pour nous pour en discuter.
- Speaker #0
Au moins, on fait qu'on est tranquille.
- Speaker #1
Là, au moins, on sait, c'est ça. Mais quand tu veux le faire avec quelqu'un qui n'est pas sensibilisé et que tu veux juste dire, ah putain, comme on a fait au début, ah mais moi, j'ai passé une journée de merde parce qu'en fait, j'ai eu cinq fois des trucs grossophobes. En plus, j'ai oublié un truc au boulot à cause du TDAH et c'était grave. Je ne me sens pas bien. Il y a tout de suite de, oui, mais moi aussi, j'ai eu ça. Comme si tout d'un coup, on leur enlevait le soleil qu'ils avaient sur eux, alors que t'es là, mais en fait, c'est pas un concours de qui vit les pires choses.
- Speaker #0
Totalement.
- Speaker #1
Sois contente que toi, il t'arrive pas ce genre de choses. C'est un peu... Ouais. Et ça, je le ressens hyper souvent.
- Speaker #0
Moi, je le ressens beaucoup aussi. Notamment, tout ce qui concerne la fatigue et l'épuisement. On sait vraiment aujourd'hui que les personnes qui vivent avec une maladie, leur épuisement, c'est incomparable avec la fatigue d'une personne valide. Moi-même, je peux le dire parce que j'étais valide pendant longtemps et j'ai su ce que c'était la fatigue, mais c'est juste incomparable avec ce que je vis maintenant, même avec 9 heures de sommeil. Et dès que j'arrive à un endroit et qu'on me dit comment ça va et je dis je suis épuisée, on va me dire moi aussi en ce moment, j'en peux plus.
- Speaker #1
Oui, mais c'est exactement ça. Et les gens, ils ne mettent pas en place des choses, tu vois. Moi, je me suis rendue compte parce que là, depuis le Covid, ça fait depuis le Covid que je me considère en situation de handicap parce que justement, je me suis retirée de la société et que je peux plus. plus faire la même chose qu'avant, mais vraiment pas. C'est-à-dire que je dois trier. Je dois faire une chose par journée, en gros. Donc, je dois trier. C'est soit le travail, soit justement te rencontrer toi, soit faire mon sport. Enfin, je veux dire, et ça, les gens, déjà, cette notion-là, ils l'ont pas du tout. Et puis, quand tu leur dis J'aimerais beaucoup vous voir, mais je peux pas aller dans un bar, ou je peux pas parce que t'es trop fatiguée, ou que t'as déjà fait ta... Les gens ne vont pas mettre en place des choses pour toi, tu vois. Ils vont faire, oui, mais bon, m'enfermer, ça me saoule un peu. Puis tu es un peu là, mais en fait, toi...
- Speaker #0
Genre pour moi, c'est vital.
- Speaker #1
Voilà, c'est ça. Moi, je n'ai pas le choix, en fait. Et tu es en train de me punir de ta présence et de me punir des relations sociales parce que tu n'arrives juste pas à comprendre qu'en fait, j'ai besoin que tu viennes jusqu'à chez moi. Et ça, moi, j'ai déménagé aussi pendant cette période-là. Du coup, je suis moins en ville. Et ça, vraiment, le sentiment de solitude que je disais au tout début de l'interview, il vient de là. C'est qu'en fait... Genève c'est tout petit, avant je faisais tout à pied et là les gens me disent oui mais tu habites long alors que mon bus il a dix minutes de bel air.
- Speaker #0
Pardon mais moi ça me fait juste sourire, t'es vraiment, pour moi t'es au centre.
- Speaker #1
C'est une réalité tu vois et en fait les gens ils vont, ils viennent ils viennent du coup ils viennent me voir mais très peu et et puis souvent bah là dernièrement j'ai oui mais c'était un effort, enfin j'ai fait un effort pour toi et j'étais un peu là Ok, en fait, moi, c'est un effort aussi de te voir, mais moi, ça me fait plaisir. Trop cool, merci d'avoir fait un effort. Mais en gros, pour toi, il ne te coûte rien ton effort en vrai. Enfin, il ne te coûte pas. Tu vois, oui, tu as un petit peu bougé. Ouais, ouais. Je ne sais pas. Et ça, c'est un truc que je me suis vraiment rendu compte que, en fait, la notion de fatigue, elle est très peu prise en compte par les gens qui sont valides. Et moi aussi, j'étais valide avant et je faisais plein de trucs. Puis en plus, moi, j'étais quelqu'un qui sortait. énormément. Donc, je pense que les gens, ils ont aussi eu un peu un choc. Tout d'un coup, elle a disparu de la circulation. Mais c'est vrai que c'est dur à faire comprendre.
- Speaker #0
Ça me fait penser aussi souvent... Moi, c'est pareil. Je peux faire une, voire deux activités par jour. Et du coup, quand on me demande quand est-ce qu'on peut se voir, ça m'arrive très souvent de dire, bon, ben... ça peut être dans trois semaines parce qu'en fait c'est pas, et puis en fait la personne en face elle va dire non mais t'as un agenda de mini c'était tellement charré, je suis là non mais en fait c'est que si je veux faire une à deux activités par jour je sais pas si tu te rends compte à quel point je dois étaler les activités sur mon agenda c'est un truc de fou et c'est pas genre je peux faire mon sport voir une pote, étudier un truc, faire mon podcast enfin c'est pas possible et en fait du coup si tu dois faire tout ça, tu dois le faire sur une semaine alors qu'une personne valide va peut-être le faire en un jour et du coup... Il va presque y avoir... Moi, j'ai souvent sous-entendu, genre, t'es tellement occupée,
- Speaker #1
blablabla.
- Speaker #0
Et je fais, non, c'est juste qu'en fait, je fais une activité par jour.
- Speaker #1
C'est exactement ça. Puis, il y a aussi tout ce qu'on montre. C'est-à-dire qu'on va aussi beaucoup... Enfin, en tout cas, moi, je vais beaucoup montrer mes projets. Et du coup, les gens ont l'impression que je fais plein de choses. Et du coup, il y a cette impression de ne pas réussir à me libérer pour elles, tu vois. Et en fait, ils ne comprennent pas que, justement, en fait, c'est pas... Oui, je visibilise mes projets parce qu'il y en a besoin pour pouvoir vivre. Mais en gros, j'ai un projet par jour. Et puis, il ne passe pas moins. En fait, les gens que je vois, ils ont tout le même... Je ne sais pas comment dire, la même place. Et ils ont même plus de place dans mon cas. C'est juste que malheureusement, comme tu dis, tu ne peux pas faire autrement. Mais c'est vrai que ça, c'est dur à comprendre. C'est très dur. Et pareil, on dit, on n'a qu'à se voir à midi. Et puis moi, je suis un peu là, mais en fait, non. enfin un midi pour moi c'est trop contraignant et puis si je dois couper ma journée en deux enfin voilà il y a plein de mais ouais c'est dur à comprendre pour les personnes et je pense que ça si les gens ils étaient ils réfléchissaient un tout petit peu plus peut-être que il y a des gens qui se retrouvaient quand même moins seuls et puis ils pourraient avoir d'autres choses mises en place c'est une des raisons de pourquoi on fait ces podcasts oui
- Speaker #0
Et tu l'évoquais un petit peu tout à l'heure, et toi, tu es une personne engagée, notamment à travers ton art. Est-ce que tu peux nous parler de tes projets plus précisément ?
- Speaker #1
Oui. En gros, je suis artiste plasticienne, donc mes médias, c'est la peinture et les illustrations, et puis la performance. Et actuellement, j'ai plusieurs expositions dans lesquelles j'expose des œuvres qui sont abstraites. que j'associe à des audios. Et ces audios, en fait, ils se veulent militants, agressifs. C'est-à-dire qu'en fait, j'ai plusieurs biais d'expression et l'abstrait, c'est une expression qui me permet de lâcher toute la violence que j'ai vécue, toute la violence que j'ai en moi. Donc ces audios, ils sont dénonciateurs et oui, ils sont accusateurs. Et c'est pour moi hyper important de le dire parce que je trouve que c'est important aussi d'avoir des endroits. On peut dénoncer sans devoir faire attention, tu vois, sans devoir prendre en compte.
- Speaker #0
Il n'y a pas de politiquement correct,
- Speaker #1
quoi. Voilà. Et il y a surtout des vérités très crues sur ce que j'ai vécu, où je parle très ouvertement, justement. Donc, je mets un warning de viol, d'agression sexuelle, justement de violence grossophobe, mais vraiment en expliquant réellement. Et du coup, ça peut être très choquant, mais le but, c'est ça. Le but, c'est de choquer et de dire, en fait, vous pensez que ce n'est pas vrai. Moi, j'ai à peine 30 ans et dans un prène 30 ans, toutes les violences que j'ai vécues, tu peux en mettre tant par année. Puis bientôt, par rapport aux années vécues, c'est qu'on s'affaire un peu beaucoup. Et mes illustrations se veulent beaucoup plus douces et elles combattent du coup les injonctions liées au corps. Et c'est la visibilisation des corps différents, qu'ils soient gros, minces. L'idée, c'est de faire un panel de corps et ces corps sont agrémentés d'une... tête de fleur parce que justement je voulais quelque chose de doux pour dire prenez soin de vous prenez soin de votre corps votre corps c'est votre meilleur ami c'est celui qui va vous porter tout le temps et en fait il faut arrêter de lui vouloir du mal parce qu'on nous a dit qu'il fallait mal le traiter parce qu'il fallait être souffrir pour être belle qu'en fait non c'est quelque chose de beau donc en fait j'ai vraiment ces deux en gros ces deux personnalités qui sont dans mon art désolé je regarde en haut mais il ya un petit oiseau ça se verra pas au maximum je sais mais je le dis parce qu'il est trop mignon et puis la performance ça allie les deux et la performance c'est plus ce fait de pouvoir tout d'un coup avoir un moment où je peux bouger comme j'ai envie et me montrer, alors les performances elles sont nues et je mets un point d'honneur là dessus parce que je disais moi comme je suis hypersensible le vêtement par exemple je le sens tout le temps et c'est quelque chose qui me contraint parce que du coup c'est une charge mentale... Et le fait d'être nue, j'ai l'impression d'être libre. Et en plus de ça, je peux me militer et dire, Regardez-moi, je suis là, j'existe. Et mes performances, en fait, elles vont être tout le temps là-dedans. Donc peut-être qu'au bout d'un moment, on aura marre de me voir toute nue, mais je m'en fiche.
- Speaker #0
Et pourquoi tu t'engages ?
- Speaker #1
Parce que j'ai toujours été quelqu'un d'engagée, depuis toute petite. Ma mère, elle a des souvenirs où j'ai trois ans, où je crie sur les gens parce que je ne suis pas contente, parce que je trouve ça injuste. Donc, j'ai toujours eu ça, j'ai beaucoup... J'ai toujours une sensibilité à l'injustice, j'ai énormément pleuré pour des choses sur lesquelles je n'avais aucun impact. La violence contre les animaux, la Deuxième Guerre mondiale, c'est toutes des choses où ça m'a atteint au plus profond de moi-même, comme si je le vivais. Et je me suis vraiment questionnée en me disant Mais en fait, tu ne peux pas continuer à vivre ces émotions ? C'est horrible d'être triste pour tout. tout le temps sans rien pouvoir faire. Donc du coup, je me suis dit, ok, il y a des choses sur lesquelles tu ne peux pas faire, malheureusement, mais il y en a d'autres sur lesquelles tu peux. Et le but, c'est vraiment de réussir par des projets concrets de faire évoluer la société. Donc c'est vrai que je ne vais pas avoir du contenu pédagogique. sur mes comptes parce que c'est pas mon but c'est vraiment plutôt de créer des espaces je suis plus dans ce côté parce que je viens du milieu culturel donc je suis plus dans ce côté de visibilité de créer des espaces de dénoncer mon engagement il va plus être plutôt être comme ça est ce que tu as l'impression que ton engagement c'est quelque chose de vital pour toi oui clairement ouais clairement et je peux le dire même dans le par exemple moi j'ai jamais voulu d'enfants sauf à une période à mes 30 ans où je dirais que c'est les hormones qui m'ont qui m'ont un peu labouré le cerveau pendant un an, je voulais des enfants. Et tout d'un coup, ça s'est arrêté du jour au lendemain. Mais la question, du coup, s'est posée en se disant, mais en fait, est-ce que j'en veux ou pas, du coup ? Parce que vu que pendant un an, tout d'un coup, je ne sais pas ce qui s'est passé. Et en fait, une des premières choses qui me fait dire que je n'en veux pas, et ça paraît très égoïste, c'est qu'en fait, je ne veux pas dédier ma vie à quelque chose d'autre que ce que je fais actuellement. Et en fait, je sais que je serai quelqu'un qui va être mentalement... très triste et qui peut avoir... Enfin, je me dis, je peux même... Je ne sais pas comment mon mental va évoluer là-dedans si je dois être tout le temps avec quelqu'un et m'occuper en plus de cette personne, c'est-à-dire être le pilier de cette personne. Moi, ce qui me fait vivre aujourd'hui et ce qui me fait... Enfin, ce que j'aime et ce qui me fait justement pouvoir... Ce qui me fait vivre, en vrai, ce qui me fait respirer, c'est justement d'avoir mes projets. Et de voir l'impact qu'ils ont aussi.
- Speaker #0
Quel message souhaites-tu faire passer aux personnes chez qui ton témoignage va résonner et à leur entourage ?
- Speaker #1
Oh, c'est dur ! C'est trop dur. Parce qu'en vrai, il y aurait plein de messages super jolis, genre aimez-vous, tout ce que vous voulez. Mais ça, c'est un peu des trucs où, en fait, on a beau te le dire, si t'arrives pas, t'arrives pas. Voilà, comme tu le savais avant. Du coup... Moi, je dirais aux personnes qui sont concernées d'être un peu égoïstes et du coup, d'essayer de faire quelque chose qui leur font plaisir une fois par jour ou une fois par semaine, quand ils ont le temps et l'énergie. Que ça soit s'accorder de manger une mousse au chocolat, une pizza, que ça soit de faire un bain, que ça soit de pleurer, que ça soit de danser comme une malade sur une musique qu'on aime bien, mais faire juste, s'accorder juste ce petit moment. Et ça, j'ai l'impression que c'est un truc qu'on oublie de faire, parce que même si on a du temps, mais quand on est dans certaines pensées ou même quand on a beaucoup de travail, je pense que ça, c'est un truc qui te permet justement de te connecter un peu et puis d'avoir autre chose que toutes ces injonctions. Parce qu'il faut savoir que le problème aussi de tout ce qui est grossophobie ou autre, tout ce qui est discrimination, c'est que ça prend énormément de charge mentale. Donc je dirais ça. Et l'entourage, soyez des alliés et pas des bourreaux. Mais allez vous renseigner sur ce qu'est la notion d'allié. Je vais pas faire un cours ici. Mais plutôt, en fait, au bout d'un moment, ce que j'ai pas dit, moi je suis quelqu'un qui suis formatrice contre les violences sexistes et sexuelles, c'est mon travail. Et en fait, ce que je retrouve le plus dans ma formation, c'est ce que je me rends compte, c'est qu'en fait, aujourd'hui, ce qui manque, c'est le respect. Et ça, je m'en rends vraiment compte. Il y a vraiment un manque de respect, c'est-à-dire que les gens se permettent de dire des choses sans respecter la personne en face. Et en fait, posez-vous juste la question d'abord, est-ce que je respecte l'autre quand je lui dis ça ? Ou est-ce que je ne suis juste pas en train de m'écouter moi et puis de vouloir juste sortir en me disant oui, mais c'est pour son bien, puis qu'au final, c'est sous couvert de la bienveillance, c'est une violence. Donc juste des fois se rappeler ça.
- Speaker #0
Normalement, avant de poser cette question, je demande toujours à la personne si elle a quelque chose à rajouter. Donc, je suis désolée, j'ai un peu coupé l'herbe sur les pieds. Est-ce que tu as quelque chose à rajouter avant les deux dernières questions ?
- Speaker #1
Non, je pense juste que... On a dit des choses très... très intenses pour moi. Je ne sais pas pour toi, mais pour moi, c'était... Pour moi, c'était très personnel. Il y a des choses que je n'ai jamais dites, même à mon entourage ou comme ça. Donc, je trouve... Donc... Je te remercie pour ce moment.
- Speaker #0
J'espère que tu es OK avec ça. Oui,
- Speaker #1
oui, c'est très bien. Mais j'espère que les gens vont quand même ressortir des choses positives de cette interview. Et oui, j'ai dit, la notion de respect, pour moi, elle est hyper importante. Et puis, en fait, comme toi, tu l'as fait en te posant la question, où est-ce que les personnes grosses ou invalides aussi, ou toutes les personnes, où est-ce qu'elles peuvent être dans l'espace public ? Pensez-y. Par exemple, quand vous faites un événement, regarder les chaises, regarder l'accès, etc. Parce qu'en fait, par exemple, moi, il y a plein d'événements où je ne vais pas parce que je sais que typiquement, l'endroit, il n'est pas accessible à moi et que je ne peux pas rester debout plus de 15 minutes. Donc, un peu avoir cette conscience-là, je sais que un des... Un des souvenirs que j'ai que je trouve hyper joli pour moi, par exemple, c'est une fois, j'étais au resto au bol avec trois potes. Et un des premiers potes est arrivé dans le resto et a dit Excusez-moi, il faut que je change cette chaise. Et il a changé la chaise avant même que moi, j'ai dû faire quelque chose. Parce qu'il a vu. Et ça, c'était un truc où moi, ça m'a vraiment soulagée. Je me suis dit Waouh, putain ! Enfin, pardon, j'ai dit un mot, parce que c'est l'émotion. Mais merci, quoi !
- Speaker #0
C'est pas interdit, si jamais !
- Speaker #1
Mais voilà, et ça, c'est un truc où moi, je n'ai même pas besoin de me poser la question. En fait, tout était déjà fait, alors que ce n'était pas calculé comme rendez-vous. Et ça, c'était chouette. Donc, c'est ça, être un ou une alliée.
- Speaker #0
Vivre avec des maladies au pluriel, est-ce que ça t'a amené des super pouvoirs ?
- Speaker #1
C'est une très bonne question. Oui, de ouf ! De ouf ! Alors, ça m'a amené déjà l'altruisme. Je pense que j'avais déjà, mais encore plus. Ça m'a amené des amis. Ça m'a amené aussi le TDAH. Ça a énormément de super pouvoirs. Parce que du coup, je suis très peu fatiguée. C'est pour ça que j'ai aussi autant de... Enfin, je suis très peu fatiguée. Non, je suis très fatiguée, mais je peux être très focus. C'est de l'hyper focus. Et du coup, c'est pour ça que j'ai aussi beaucoup de projets. Parce que j'ai besoin d'être tout le temps stimulée. Donc ça, c'est un super pouvoir. Et d'avoir ça, et aussi ma vision, elle est, comme les maladies, elle est plurielle, quoi. Et ça, je pense que c'est un super pouvoir.
- Speaker #0
Et le fait d'être grosse ?
- Speaker #1
Et le fait d'être grosse, c'est un super pouvoir, parce qu'on n'est pas comme tout le monde. Mais bon, ça, on n'en a pas parlé, mais du coup, chez moi, ça va changer, parce que je vais faire une opération. Et ça, c'est un gros enjeu, parce qu'aujourd'hui, c'est très critiqué. Et du coup, et du coup, voilà, j'appréhende quand même. Parce que du coup, j'ai l'impression de perdre une partie de mon identité. Et en même temps, je sais que c'est pour ma vie et ma santé. Et je sais que je vais continuer mon combat, même si physiquement, je ne ressemble plus à une personne grosse. Mais je serai toujours une personne grosse dans ma tête.
- Speaker #0
C'est vrai que c'est intéressant. On me dit souvent, si un jour tu es plus malade, est-ce que tu continues à t'engager auprès des invisibles ? Pour moi, c'est l'évidence même. Parce que ça a été vécu dans la chair. Pour l'instant, ça l'est encore. Donc, c'est du présent. Mais c'est intéressant de te poser du coup la question. à toi aussi maintenant parce qu'il va y avoir ce changement physique ?
- Speaker #1
Ça va être dur parce que les gens du coup ne vont plus voir. Puis à nouveau, il y a ce fait de tout d'un coup on ne voit pas, parce que là je représente toute une partie de personne et je le représente par le power full parce que du coup je me montre. Et bien là il y aura un travail à faire et c'est à moi de le faire, c'est-à-dire que visuellement je devrais me mettre moins en avant, mais par contre je continuerai à continuer le combat parce qu'en fait justement je l'ai vécu. Et je le vivrai potentiellement d'autres manières parce que je ne vais pas non plus devenir... Enfin voilà, je vais rester quand même avec... Je vais rester quand même, je pense, on verra, mais avec des rondeurs. Et puis, c'est vrai que c'est toute une question d'appréhension. Et puis, le but, c'est de communiquer aussi là-dessus, de dire aux gens que moi, je veux aussi faire un travail, que je vais essayer de dénoncer autrement. Mais par exemple, mon art, il ne va pas changer. Je ne vais pas arrêter de dessiner des corps gros en aucun cas.
- Speaker #0
voilà et c'est pour quand cette opération ? c'est pour novembre ok on se souhaite tout de bon d'ici là ça sortira le podcast sortira après ouais on pourra faire un podcast post post opération totalement merci beaucoup Anaïs merci à toi c'est trop cool à fond Merci de soutenir ce podcast en vous abonnant pour ne manquer aucun épisode et en lui donnant 5 étoiles sur vos plateformes d'écoute préférées. Rencontrez mes invités et découvrez tous les engagements de la communauté Les Invisibles sur le compte Instagram Les Invisibles Podcast. Ensemble, continuons à visibiliser l'invisible.