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Les Invisibles

L’interview #49 • Soheila, dormir à contre-courant du monde

L’interview #49 • Soheila, dormir à contre-courant du monde

55min |20/10/2025|

163

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55min |20/10/2025|

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Description

Alors qu’elle n’a que 8 ans, Soheila commence à recevoir des signaux de fatigue extrême après un voyage en famille.

Très vite, son corps lui impose un autre rythme : elle s’endort en pleine journée, parfois même en classe. 👩🏼‍🏫

Enfant, elle vit déjà à contre-courant du monde : ses nuits, elle les passe éveillée ; ses journées, elle s’écroule de fatigue. 😴


S’ensuit un long parcours fait d’incompréhensions et de minimisations. On parle d’« hypersomnie adolescente », sans chercher plus loin. Pendant des années, elle se bat avec ses parents pour être entendue, comprise, et enfin diagnostiquée.


Dix ans plus tard, une ponction lombaire révèle enfin la vérité : Soheila est atteinte de narcolepsie de type 1, une maladie du sommeil incurable qui s’accompagne d’épisodes soudains où le corps s’effondre alors que l’esprit reste parfaitement éveillé.


Refusant d’abord cette réalité, Soheila finira, une nuit, par rejoindre un groupe de parole en ligne, aux États-Unis. 🇺🇸 C’est là qu’elle découvre, pour la première fois, des récits qui résonnent et un soutien inconditionnel. Deux choses qui lui étaient jusque-là inconnues.


Le domaine du travail reste aujourd’hui un défi constant : elle doit composer avec une mémoire, une concentration et une efficience différentes de celles d’une personne non malade - un équilibre précaire qu’elle affronte chaque jour.

Aujourd’hui, Soheila s’engage pour déconstruire les clichés et l’incompréhension qui entourent la narcolepsie et les troubles du sommeil.


𝗧𝘂 𝘃𝗲𝘂𝘅 𝘀𝗼𝘂𝘁𝗲𝗻𝗶𝗿 𝗻𝗼𝘁𝗿𝗲 𝗽𝗼𝗱𝗰𝗮𝘀𝘁 ? Abonne-toi à cette chaîne, mets-lui 5 étoiles et partage cet épisode ! Tous les épisodes de notre podcast Les Invisibles sont aussi disponibles sur Youtube : https://www.youtube.com/@les_invisibles_podcast 🎧


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Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Enfin, tu vois, ça t'impacte parce qu'il y a certains symptômes. En fait, tu te dis peut-être que je suis folle, c'est dans ma tête. Et j'avais jamais, en l'espace de plus de dix ans, j'avais jamais rencontré quelqu'un qui était dans ma situation. Jamais, jamais, jamais, jamais. En dehors de ma neurologue qui traite le sujet, elle ne l'est pas, tu vois. Elle pouvait se refléter scientifiquement à moi, mais des personnes lambda qui étaient comme moi, qui souffraient de difficultés. professionnels comme moi, je me suis dit waouh.

  • Speaker #1

    Les Invisibles Juin 2020 Ma vie bascule du jour au lendemain dans une maladie neurologique rare, qui n'a de poétique que le nom. Le syndrome du mal de débarquement. Les symptômes qu'elle m'amène vivent en colocation avec moi. 7 jours sur 7. 24 heures sur 24, et ne prennent jamais leur week-end. Je n'ai donc pas la place pour un autre combat. Du moins, c'est ce que je crois. Puis vient ce jour où je témoigne dans une émission télé. dans l'espoir de rendre visible l'invisibilité du syndrome dont je suis atteinte. À peine sortie du plateau, forte de cette expérience et encore dans mes talons rouges, une évidence s'installe. Je n'en resterai pas là. Dans le train du retour, je rejoins à la fois ma maison et mon nouveau combat. Offrir un espace de parole au travers d'un podcast, aux personnes qui composent, bien souvent en silence, avec des maladies invisibles et avec les regards de sociétés qui ne croient que ce qu'elles voient, deux réalités plus souvent subies que choisies. Aujourd'hui, loin de mes talons rouges et au plus proche de l'engagement, l'évidence s'étend. C'est à l'invisible au pluriel que je vous invite. Ceux qui dans la chair, l'esprit et les sociétés se vit, sans pour autant faire de bruit. Si comme le dit Antoine de Saint-Exupéry, l'essentiel est invisible pour les yeux, ici, on compte bien le faire entendre. Bonne écoute ! Hello Sohila !

  • Speaker #0

    Hello Tamara !

  • Speaker #1

    Aujourd'hui, j'ai la joie et l'honneur de te recevoir. Tu as 23 ans et tu vis avec la narcolepsie, une maladie neurologique encore largement méconnue, souvent réduite à une image caricaturale, il faut le dire. Quelqu'un qui s'endort n'importe quand, n'importe où, ou même qui aurait la flemme de se réveiller. Mais ce que tu vis, c'est bien, bien plus complexe, et c'est ce qu'on va voir aujourd'hui. Depuis tes 8 ans, ton corps a commencé à envoyer des signaux de fatigue extrême. À 13 ans... tes parents commencent à s'inquiéter et t'emmènent consulter dans un centre du sommeil. On te diagnostique à tort une hypersomnie adolescente. S'en suivent des traitements mal adaptés, des effets secondaires terribles, des pensées noires, des années sans réel suivi. Et une errance médicale qui va durer presque 10 ans. C'est seulement à tes 17 ans, après une ponction lombaire, que le diagnostic de narcolepsie type 1 tombe. Une maladie incurable qui s'accompagne chez toi de cataplexie. cette perte soudaine du tonus musculaire qui fait tomber le corps alors que l'esprit, lui, y reste parfaitement conscient. Malgré ça, tu tiens, malgré ça, tu trouves un traitement qui te convient, une neurologue qui t'écoute enfin, un groupe de paroles aux Etats-Unis que tu rejoins en te réveillant à minuit. Et aujourd'hui, tu as lancé ton podcast, le récit des assoupis, pour parler du sommeil et de ses troubles, pour déconstruire les préjugés, pour faire entendre ce que les corps fatigués... On a dire. Alors Sohéla, avant de démarrer, comment est-ce que tu vas aujourd'hui ?

  • Speaker #0

    J'ai connu des jours meilleurs, en toute transparence. En ce moment à l'heure à laquelle on parle, il fait très très chaud, donc je ne dors pas. Du coup, je suis très très très fatiguée, bien plus qu'à une autre période de l'année, plus d'autres interrogations professionnelles, donc j'ai des jours meilleurs, mais bon. On garde la tête haute. Et toi, comment vas-tu ?

  • Speaker #1

    C'est un peu compliqué dans mon corps ces jours. On est le 2 juillet 2025, il fait une chaleur assez mondiale, assez intense. J'ai eu mes règles qui m'ont mis vraiment dans une humeur très, très, très ronchonne. J'ai très mal au cervical. Je ne me sens vraiment pas au top, mais je suis heureuse d'être là. C'est toujours un moment que j'adore partager.

  • Speaker #0

    Et moi aussi, je suis heureuse d'être avec toi. En tout cas, merci beaucoup encore une fois Tamara.

  • Speaker #1

    Alors, Célia, si tu devais raconter la première fois où tu t'es dit « il y a un truc qui cloche » , ce serait quand et qu'est-ce que tu ressentais petite déjà ?

  • Speaker #0

    Les premiers symptômes, comme tu l'as si bien expliqué, ont commencé à 8 ans. À 8 ans, tu ne connais pas trop la vie, tu n'es pas trop jeune, tu as un enfant. Donc, je dirais plus que j'ai grandi avec cet instinct que quelque chose n'allait pas, mais dans cette incertitude. La seule chose dont je me souviens, c'était qu'il y avait cette fatigue qui n'était pas normale, et que surtout que je comparais avec les jeunes de ma classe à cette époque, et je me disais, ouais, il y a quelque chose qui ne va pas. constamment grandi avec ça sans avoir de réelles réponses. Donc c'était plus une angoisse, tu sais, quand t'es jeune, de dire pourquoi je suis pas normale et les autres le sont.

  • Speaker #1

    C'est quoi qui te faisait sentir pas normale ?

  • Speaker #0

    Ces moments où tu rentres de l'école, tu dors. Tu dors et quand tu es avec tes camarades de classe, tu... Je parle avec eux, ils font des activités. Sauf que moi, je n'avais aucune force de faire une activité. Ou quand je suis à l'école et que j'ai un moment de somnolence et qu'on me crie dessus parce qu'on pense peut-être que je ne dors pas la nuit. Enfin, tu vois, c'est ces petites actions qui, en fait, avec du recul, me faisaient me sentir pas normale. Et il y avait des moments où juste, je me souviens à nombre de fois, Je pleurais parce que je voyais les autres de mon âge faire plein de choses, avoir cette énergie, avoir ce dynamisme qu'on a quand on est petit, que moi je n'avais pas.

  • Speaker #1

    Et là, ça a commencé à 8 ans déjà, tu disais, ces premiers ressentis ?

  • Speaker #0

    C'est ça, les premiers ressentis ont commencé lors d'un voyage familial. En fait, je ne faisais que dormir. Donc c'est dire que la journée, je ne faisais que dormir. La nuit je me réveillais et en fait je voyais tout le monde en train de dormir. Je me dis mais tiens j'ai regardé quelque chose. Les autres faisaient des activités sans moi parce que justement ils me disaient on te voit dormir, on ne veut pas te réveiller. Et moi je me souviens, et même mon père me le raconte encore aujourd'hui, je me réveillais en pleurs parce qu'ils étaient partis sans moi. Mais moi en fait je dormais et la nuit je me réveillais et j'attendais que les autres se réveillent le lendemain. Ça a commencé très très jeune et en fait quand je suis revenue de ce voyage, ça s'est empiré. Et en fait, on est resté quelques années sans réellement comprendre et peut-être se dire que à cette époque, j'étais en carence de fer et j'ai toujours été en carence de fer. Et en fait, à cette époque-là, c'était beaucoup plus important et on mettait le dos sur la carence en fer. Sauf qu'en fait, après avoir pris tous les traitements possibles pour avoir cette carence qui disparaît, la fatigue était toujours autant présente.

  • Speaker #1

    Moi, ça me touche beaucoup ce que tu racontes, probablement aussi parce qu'aujourd'hui, je suis maman et que tout d'un coup, si je fais une sorte de projection sur ma fille, ce n'est pas forcément intelligent de le faire, mais il y a vraiment quelque chose qui vient me toucher dans le fait aussi qu'en tant que parent, ça peut être difficile de voir son enfant rentrer de l'école, aller se coucher. ne pas pouvoir participer aux activités. Je pense qu'il y a quelque chose qui doit être assez douloureux aussi de sentir ce décalage entre son enfant et les autres, ou même comparativement aux autres enfants qu'on a soi-même, parce que je crois que tu viens d'une grande famille, vous êtes cinq frères et sœurs si je ne me trompe pas.

  • Speaker #0

    C'est exactement ça, c'est exactement ça. Tu as réellement tout. Je suis la petite dernière, donc en plus de ça, il y a de quoi faire la comparaison facile, même si encore une fois, chaque enfant est différent. On est très dynamique. Mes frères et sœurs ont toujours fait plein de choses après l'école. Et en fin de compte, il y a moi. Justement, comme mes frères et sœurs ont toujours été actifs, il y a moi, quoi qu'il fasse dormir.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'ils ont mis du temps à identifier, eux aussi, que quelque chose était un petit peu « anormal » ? Pour eux, c'était simplement, voilà, t'étais une enfant qui dormait plus que les autres, qui avait un peu un décalage au niveau du sommeil. Comment ça s'est passé pour eux ? Tu saurais dire un peu ?

  • Speaker #0

    On a souvent cette discussion avec mon père, justement. Au début, il n'y avait pas trop d'inquiétude parce que justement, mon médecin traitant de l'époque disait que c'était à cause de ma carence en fer. Donc voilà, tu vois, naïvement, tout parent, il n'a pas la science qu'un médecin a, donc il va écouter le médecin. Et il y avait des moments, et c'est vraiment où je te parle, là en année, où en fait, mes parents se sont inquiétés parce que... Quand je suis entrée notamment au collège, ça a été un peu l'élément déclencheur. Je pense que la puberté a eu un impact où c'était pire. Je retrouve des copies, j'écris, mais tu vois que mon écriture s'estompe parce que je dors pendant que j'écris. Mon collège était juste à côté de chez moi. Et je rentrais le midi pour manger. Et en fait, ce temps de pause, je ne le consacrais pas pour manger, mais pour dormir. Et il y avait des moments où j'étais fatiguée. Et un jour, et c'est là qu'il a déclenché ce questionnement, je me suis réveillée en retard pour reprendre l'école. Mon père m'a réveillée, mon père m'a dit, il faut faire quelque chose, t'es jamais en retard, ça ne t'arrive jamais, il y a quelque chose qui ne va pas. Et de là, justement, de là... L'intention d'avoir quelqu'un, de voir un neurologue s'est déclenchée.

  • Speaker #1

    Et alors, qu'est-ce qui s'est passé dans cette première consultation ?

  • Speaker #0

    Déjà, je ne savais pas, je n'en ai pas des bons souvenirs en toute transparence. C'est des souvenirs assez particuliers que j'ai. Alors, en fait, les diagnostics, c'était un neurologue qui était en retraite. A chaque fois, comme je le dis, je n'étais pas le cas le plus waouh de sa carrière, je pense. Et en fait, c'était, oh, ne vous inquiétez pas, on est sur une hypersomnie de l'adolescence, votre fille est en plein dedans, ne vous inquiétez pas. Mais si on peut vous rassurer, elle vous fera des examens de sommeil. Donc, chose qui a été faite, c'était une cata. C'était en plein juillet, je crois, c'était en 2014. Et je crois qu'on se souvient tous de cet été où il a fait extrêmement chaud, et encore plus nous, à Amiens. Et en fait, les examens du sommeil n'étaient pas... En fait, à cette époque, il n'y avait pas de centre de sommeil au CHU d'Amiens. Le CHU était vraiment en déménagement, donc du coup, il n'y avait pas du tout officiellement de centre de sommeil. Et en fait, pour la petite anecdote, tous les CHU n'ont pas de centre de sommeil. C'est-à-dire qu'il faut avoir une habilitation. Pour être habilité centre de sommeil, être reconnu centre de sommeil, c'est toute une démarche. Donc à Amiens, à cette époque-là, on n'en avait pas. et le neurologue Elle a fait juste un petit test normal et en fait, du bras, votre fille va bien, jusqu'à là, une petite hypersomnie de l'adolescence. Et en fait, de là, à chaque fois que je me plaignais de certains symptômes que j'avais, je n'étais pas écoutée. Ou on me pointait du doigt, m'est arrêtée. Donc en fait, si tu vois, au tout début, on a donné des médicaments qui étaient des équivalents de ce que je prends aujourd'hui, qu'on ne pouvait pas directement donner parce qu'il n'y avait pas de diagnostic officiellement posé. et en fait c'est c'était des médicaments à une enfant de 13 ans que tu donnes, mais qui sont forts, qui sont forts pour le cœur et même de manière générale pour la santé mentale. Et là, en fait, je voyais que j'avais été crise d'angoisse, parce que c'était à l'époque où je me voyais juste avoir une difficulté de respirer. Je faisais crise d'angoisse sur crise d'angoisse, et à chaque effet secondaire qui était très conséquent, quand j'en parlais, on me pointait du doigt. Et on me disait, c'est votre faute, arrêtez vos médicaments, arrêtez de faire ci, arrêtez de faire ça. Et tu vois, je suis une enfant de 13 ans à cette époque, et tu ne peux pas reprocher à une adolescente de 13 ans tout ça alors qu'elle ne s'y connaît pas. Et de là, j'ai arrêté de prendre les médicaments et j'ai subi la maladie toute ma scolarité au collège et au lycée.

  • Speaker #1

    Et tu disais que tu évoquais d'autres symptômes. Quels étaient les autres symptômes qui vont avec cette maladie, ou en tout cas pour toi ?

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, l'idée qu'on a de la narcolepsie est très caricaturée. Aujourd'hui, quand tu dis à quelqu'un que tu as atteint de narcolepsie, on va facilement dire « Ah, tu dors tout le temps ? C'est trop bien ! » Et c'est vraiment le retour qu'on a. Vraiment, toutes les personnes atteintes de la narcolepsie, c'est ce qu'on a comme retour. Et en fait, dans mon cas, et de manière générale pour la narcolepsie, la narcolepsie, scientifiquement, on l'explique. Aujourd'hui, quelqu'un de normal a un liquide qui tourne dans son cerveau, qui lui permet de savoir quand il doit se réveiller, quand il doit être endormi. Moi aujourd'hui, ce liquide, je ne l'ai plus. d'une manière ou d'une autre, mon corps a arrêté de fonctionner. Donc le symptôme principal, ça va être l'insomnie de la nuit, c'est-à-dire que je ne dors pas la nuit. Et je dors la journée, c'est vraiment tout un dérèglement causé par ce manque de liquide. Et donc l'un des premiers symptômes, c'est le réveil nocturne, littéralement. C'est-à-dire que je ne sais plus ce que ça fait de dormir 8h dans la nuit. Je n'ai jamais dormi 8h dans une nuit. Ensuite, il y a la somnolence dure, donc la somnolence dans la journée. C'est-à-dire que je ne peux pas rester dans une atmosphère sans avoir un moment de somnolence. C'est-à-dire que par exemple, si je suis trop concentrée sur quelque chose, que l'ambiance est tamisée et qu'il n'y a pas de bruit autour, alors là, ça y est, c'est foutu, je vais dormir. Il va y avoir les problèmes de concentration. Ça, c'est très très dur. Aujourd'hui, je prends des médicaments qui m'aident, mais les problèmes de concentration, les troubles de concentration sont assez présents. En tout cas, dans mon cas et dans certains cas d'autres personnes atteintes d'arcolepsie, les troubles cognitifs, c'est-à-dire que je vais oublier plein de choses. Même je peux parler et à tout moment lors de cette interview, je peux oublier un mot parce que c'est justement un des symptômes de la maladie, c'est l'oubli. L'oubli de choses du quotidien, des mots, de plein de choses. Et là aujourd'hui, c'est les symptômes en tout cas conséquents et après la cataplexie qui est aussi présente. Oui, bien sûr. Alors, il existe deux types de cataplexie. En fait, si tu veux, de manière générale, la narcolepsie existe sous deux types. Le type 1 avec la cataplexie et le type 2 sans cataplexie. Le plus courant, c'est le type 1. Et le type 1 avec cataplexie, c'est ce que j'ai. Elle ne se guérit pas, ce n'est pas une maladie que tu peux guérir, tu vis avec, c'est tout. et en fait la cataplexie c'est Des moments où en fait, lors d'émotions fortes ou lors de situations où tu es vraiment juste extrêmement fatigué, tes muscles vont lâcher. Ça peut être n'importe quel muscle. Ça peut être de ton visage, ça peut être ton bras, ça peut être vraiment n'importe quel muscle. Certaines personnes l'ont entièrement, c'est-à-dire que c'est tout leur corps, tous les muscles qui vont lâcher. Ou d'autres personnes, ils vont avoir quelques parties du corps, quelques muscles. Et c'est là, à ce moment-là, qu'on appelle une cataplexie partielle. Dans mon cas, ça va être une cataplexie partielle. Quand je suis extrêmement fatiguée comme en ce moment, mes genoux lâchent. Je ne peux littéralement plus tenir debout. Quand je suis en fourrière, vraiment en gros fourrière, mes bras et mes mains. C'est pas explicable, c'est vraiment soudain et ça dure vraiment très peu de secondes, quelques secondes, mais c'est suffisamment brusque pour te mettre un peu mal à l'aise. Juste après.

  • Speaker #1

    Parce que ces muscles qui lâchent, est-ce que ça se voit de l'extérieur ou c'est qu'un ressenti à l'intérieur ?

  • Speaker #0

    C'est un ressenti et ça se voit aussi. Dans le cas où c'est tout le corps, ça se voit. La personne tombe. Et dans le cas où justement la personne tombe, si tu es en extérieur, les gens peuvent penser que tu fais un malaise alors que tu es entièrement conscient. Pendant que tu tombes, pendant que tes muscles lâchent, tu es entièrement consciente.

  • Speaker #1

    Et toi-même, tu es déjà tombée, non ?

  • Speaker #0

    Je ne crois pas. Je ne crois pas. Je sais que j'ai eu des moments où ça aurait pu être dangereux. Notamment un moment où je n'avais plus de médicaments. Parce qu'aujourd'hui, c'est les médicaments qui me permettent d'avoir une vie un peu plus normale. Même si techniquement, il n'y a pas de normalité. En fait, je n'avais plus de médicaments et j'étais dans une période où j'étais extrêmement fatiguée parce que j'avais une charge de travail assez importante. Et en fait, je n'avais pas pensé à prendre un médicament. Et tu vois, c'est un cercle vicieux où tu es. exténué, tu ne peux pas aller chercher tes médicaments mais sans tes médicaments tu es encore plus fatigué. Et en fait j'étais en ville et puis je sentais que ça flanchait et en fait j'ai dû me positionner, me mettre, le mot je ne l'ai pas, mais me prendre un appui, avoir un appui pour ne pas tomber parce que sinon je tombais devant tout le monde.

  • Speaker #1

    Et on parlait tout à l'heure du coup vraiment de cette enfance où ça a été très difficile pour toi, cette préadolescence, cette adolescence aussi. Mais un jour quand même, à 17 ans, t'as enfin un mot officiel sur ce qui se passe. Comment c'est vécu ? Qui c'est qui t'a accompagné à ce moment-là ?

  • Speaker #0

    C'était encore ce fameux neurologue. En fait, à un moment donné, ma mère a tapé du poing. Et ma mère a dit, écoutez, il n'y a rien qui fonctionne, on a tout essayé, les médicaments ne fonctionnent pas pour ma fille. Elle arrive à des situations où elle a des pensées qui ne sont pas du tout positives. Il y a quelque chose qui ne va pas. Puis lui, il s'est dit, écoutez, il y a quelque chose qui existe. Si vous voulez savoir si votre fille a la narcolepsie ou pas, même si moi je pense que c'est trop tôt. pour dire qu'elle a une narcolepsie, alors qu'aujourd'hui techniquement un enfant de 5 ans peut diagnostiquer une narcoleptique. Et en fait il explique que c'est la fameuse ponction lombaire. Et voilà, je ne savais pas ce que c'était la ponction lombaire à cette époque, donc on m'explique. Tu vois, à cette époque c'est ma mère qui a pris la décision, et vraiment je la remercie, parce que même si ce n'est pas une expérience très agréable, Ça m'a permis d'avoir des réponses. Mais même ça, pour te dire, ça n'a pas permis d'accélérer le dossier. Donc du coup, on a programmé la peau de Solambert. Et en fait, toute contente, je me dis, ça y est, il va enfin avoir un mot sur ce que j'ai. Surtout qu'à l'époque, je passais le bac de français. Quand il y avait la réforme, l'ancienne réforme. Et en fait, si tu veux, pour le brevet, je n'ai pas pu avoir de tiers temps. parce que il n'y avait pas de diagnostic posé. Donc du coup, ma demande de tiers temps pour le brevet a été refusée. Et je voulais à tout prix passer mon bac littéraire. Mon objectif, quand j'étais au lycée, c'était d'avoir un bac L. Et je me suis dit, je veux que mon tiers temps soit accepté parce que je ne veux pas ne pas avoir de tiers temps si je m'endors. Et je sais que je dois m'endormir parce que je n'ai pas de traitement. Et donc du coup, quand la fonction Lambert est terminée et qu'il me reçoit dans son bureau, il me dit... Ben écoutez, ça y est, c'est bon, tout s'est bien passé. Par contre, pour les résultats, il faudra attendre un an.

  • Speaker #1

    Oh mon Dieu ! Un an ! Mais c'est pas possible !

  • Speaker #0

    Un an ! Et je me dis, mais attendez, comment c'est possible ? Je me dis, ben, parce qu'en fait, le liquide qui a été retiré lors de cet examen va à Lyon. Et en fait, il faut attendre qu'il y ait un certain nombre de personnes qui fassent cette fonction d'homébère, qui est ce prélèvement, pour déclencher, vu que c'est des maladies rares, on est sur des fonds privés. Donc du coup, il faut avoir un certain quota pour déclencher les analyses. Donc du coup, il faut attendre un an. Et je me souviens, c'était en novembre. Je me suis dit non, ce n'est pas possible. Je me souviens, je suis rentrée chez moi. Je me suis effondrée, je me suis dit mais je ne vais jamais m'en sortir. Et sur un coup de tête, vu que je ne dors pas la nuit, pas au milieu de la nuit, je me suis retrouvée, j'étais en train de faire des recherches, comment accélérer les dossiers, comment m'adresser à telle personne pour avoir une accélération de dossier. J'étais dans un état d'esprit. Encore aujourd'hui, je me dis mais comment j'ai pensé à ça ? Je me suis retrouvée à envoyer une lettre au ministère de la Santé. J'explique ma situation, je t'explique tout, dans l'espoir d'eux et... en février, donc tout ça se fait en novembre et en février, je reçois une lettre disant que mon cas a été étudié et que du coup, ils allaient faire le nécessaire. Tu vois, je crois que c'était Alice Buzyn à l'époque, la ministère de la Santé. Donc voilà, je vois la lettre et tout. Au début, ma mère a dit mais qu'est-ce qui s'est passé ? Pourquoi t'as une lettre du ministère ? Et je me disais, oh waouh ! Et donc du coup, ça avait fonctionné et une semaine après, j'ai un rendez-vous avec mon neurologue. Et là, dans le bureau, il me dit « Mais écoutez, je ne comprends pas. Ça arrive rarement qu'on ait des personnes qui ont un diagnostic, qui ont le résultat si rapidement. Écoutez, je suis très contente, mais c'est assez impressionnant. Je ne lui avais pas dit que j'avais fait une lettre. Et tu vois, j'étais en mode « Waouh ! » C'est impressionnant. Enfin, tu sais, c'est « Waouh ! » Donc du coup, ça a pu poser le diagnostic. « Vos résultats sont évidents. Vous êtes atteint de narcolepsie. » Soulagement. Mais il me dit... écoutez, on ne peut pas vous basculer maintenant dans le service du sommeil qu'on a au CHU d'Amiens. Donc, il faudra attendre vos 18 ans. Mais le diagnostic, les résultats vont vous permettre de faire votre demande de tiers temps. Donc, du coup, ma demande de tiers temps est acceptée. C'est un soulagement pour moi.

  • Speaker #1

    Ah ouais, j'entends. Et waouh d'avoir trouvé cette force, cette énergie de faire avancer ta cause. Vraiment, c'est ça.

  • Speaker #0

    C'est ça parce que tu vois, je me dis, il y a d'autres personnes, enfin aujourd'hui c'est comme ça que je réfléchis, à cette époque-là je suis sûre que je réfléchissais pas comme ça, mais je me dis, il y a d'autres personnes qui ont des situations beaucoup plus importantes que moi, et c'est malheureux parce que c'est une maladie rare. Ce sont encore une fois des fonds privés, que en fait tout dépend de ça. Et c'est malheureux parce que du coup, il y a une dépendance énorme.

  • Speaker #1

    Et à tes 18 ans alors, la prise en charge, est-ce qu'elle change ? Est-ce que déjà, il y a simplement une prise en charge ?

  • Speaker #0

    Il y a un transfert. Il y a un transfert de service qui me dit, écoutez, on va vous transférer. Je vais transférer votre dossier à ma consoeur. Il me semble que c'est comme ça qu'on dit. À ma consoeur pour qu'elle reprenne vos dossiers. en fait... C'est cette femme-là qui me suit encore aujourd'hui et qui est incroyable, et qui en fait quand elle me reçoit, elle me dit « Mais écoutez, c'est évident, vous êtes narcoductique, je ne comprends même pas pourquoi ils ne vous ont pas transféré dès le début dans ce service. » Et donc du coup la prise en charge a été incroyable. On a dû refaire par question de procédure les examens, et là c'était vraiment les vrais examens du sommeil où j'étais... J'étais vraiment pendant deux nuits, branchée de partout, on t'observe et voilà, le dossier a été fait, la prise en charge a été faite. Et les médicaments, les vrais médicaments que tu donnes aujourd'hui à quelqu'un atteint d'anarcholepsie ont été prescrits.

  • Speaker #1

    Et alors les médicaments, quels effets ont eu sur les symptômes ?

  • Speaker #0

    Quand j'ai intégré justement ce service, honnêtement je crois que j'en ai essayé... trois médicaments avant de vraiment trouver celui qui me correspond. Mais encore une fois, par procédure, elle voulait essayer les médicaments que j'avais. Mais c'était vraiment les médicaments que tu donnes à quelqu'un d'un arc-en-épsi. Et les effets, en fait, c'est déjà crise d'angoisse. Tu as l'anxiété plus que tu as, l'irritabilité. Tu ne manges plus, tu coupes faim. Mais radical, c'est-à-dire un espace de jour où je ne mangeais plus. En fait, c'est un sacrifice parce que tu es angoissé et du coup, tu n'as pas faim. Et l'effet qui m'a terrifiée littéralement, en dehors des pensées négatives, c'était l'effet que ça avait sur moi, c'est-à-dire que je ne voyais plus en fin de journée. C'est-à-dire qu'en fait, tu te retrouves en fin de journée avec une barre et tu ne vois plus. Tu ne vois littéralement plus. En fait, ta main, elle est devant toi, tu la vois floue. Et ça, c'est vraiment l'effet désirable qui m'a fait peur. Et tu vois, là, tu vis ta vie au quotidien, tu es en cours et tu as une énorme crise d'angoisse qui te prend. Tu pleures, tu ne sais pas pourquoi tu pleures. Et tu as juste envie d'essayer d'en finir, quoi.

  • Speaker #1

    Ouais, donc à quel prix, en fait ? Sur la balance, prendre ces médicaments n'en valait absolument pas la peine.

  • Speaker #0

    Exactement, exactement. Et donc, du coup, on a changé. On est passé sur un deuxième médicament qui est spécifique aux personnes atteintes de narcolepsie. Pareil, au bout d'un mois, je ne sais plus, c'était des malaises, je faisais beaucoup de malaises. C'était des malaises que je faisais et puis en fait, on avait atteint la dose maximale, donc du coup, il n'y avait pas d'autre choix que de changer. Et là, du coup, je suis sur un traitement qui me va depuis 2022, que mon corps accepte. Ce n'est pas le plus waouh, mais c'est celui avec le moins d'effets indésirables. Et ça reste encore une fois des médicaments lourds. En fait, j'ai littéralement pris des médicaments qui sont des dérivés amineux. J'ai dû avoir tous des examens, des échographies cardiaques pour vraiment s'assurer que mon cœur était capable de prendre tout ça vu que j'avais déjà pris des médicaments qui étaient assez lourds quand j'étais adolescente. Donc ouais, j'en rigole aujourd'hui parce que tu vois, j'étais au travail, on voulait un peu d'enfaite ironiquement. Mais voilà, dans le fond, c'est quand même assez lourd.

  • Speaker #1

    C'est lourd en termes d'effets secondaires aussi ?

  • Speaker #0

    Non, celui-ci, il y a le coupe-fin. C'est-à-dire qu'il suffit que quelque chose me tracasse et je ne mange pas. Et au travail, ce qui se passe en ce moment, au début, justement, je te disais que j'avais des petites inquiétudes professionnelles. Et justement, ces inquiétudes professionnelles ont déclenché que je ne mange plus le midi. Mais ça arrive, ça va. J'arrive à déjeuner le matin, j'arrive à manger le soir. C'est juste le temps du midi où je n'arrive pas à manger parce que du coup j'ai une petite anxiété. Mais ce n'est pas comme avant où vraiment je partais en crise forte.

  • Speaker #1

    Et sur la narcolepsie en elle-même, qu'est-ce que ça a changé ces traitements ?

  • Speaker #0

    C'est absolument ridicule. Il n'y a pas de somnolence. Il n'y a plus du tout de somnolence. Par contre, la condition pour avoir les effets du médicament, c'est de faire une sieste de 20 minutes. à un moment donné de ma journée, pour être bien, et ça change. Donc ça va être vraiment de l'éveil, de l'éveil 100% littéralement, avec un petit moment de pause bien sûr, juste je ferme les yeux, et de la concentration.

  • Speaker #1

    Et la nuit, tu dors ?

  • Speaker #0

    Non, non, ça va, du coup non. En fait, le médicament n'agit que sur la journée. Je peux prendre un médicament pour dormir la nuit, mais psychologiquement, je ne me sens pas prête. J'ai encore un peu peur.

  • Speaker #1

    Donc, tu es très éveillée la journée et très éveillée la nuit, si j'entends bien.

  • Speaker #0

    En fait, c'est ça. Quand est-ce que tu dors ?

  • Speaker #1

    En fait, généralement, je prends le médicament, il est 8h-8h30. Et ça dure vraiment une journée. Donc aux alentours de 18h, les effets retombent. Donc là, la fatigue retombe. Donc c'est là en fait un peu que je dors. Je fais généralement 18h-20h. Aujourd'hui, j'ai réussi un peu à gérer. En fait, vraiment, je gère quand je peux. Et quand je sais que les effets vont retomber, c'est un moment où je ne fais rien. Donc généralement, c'est à 18h, tout retombe, je dors. En fait, la nuit, je ne suis pas entièrement éveillée. En fait, si tu veux, la nuit, je fais des micro-dodos. Je dors toutes les deux heures, en fait.

  • Speaker #0

    Oui, c'est ça. Et à 18h, quand tu dors, quelque part, tu perds aussi une grande partie de la vie sociale. La vie de famille, la vie amoureuse. C'est un peu le moment où les gens se retrouvent après le travail.

  • Speaker #1

    C'est ça. C'est ça. Et en fait, aujourd'hui, j'ai vraiment su gérer ça. C'est-à-dire que quand je sais que j'ai quelque chose de prévu, je vais prendre à une heure stratégique mon médicament pour que ça retarde un peu tout. En fait, c'est une réflexion constante.

  • Speaker #0

    On devient des alchimistes quand on est malade chronique.

  • Speaker #1

    C'est impressionnant. En fait, toute une réflexion, une prise de conscience sur « il ne faut pas que je prenne ça parce que j'ai ça, parce que j'ai ça » . Il y a toute une réflexion qui, en plus de ça, fatigue énormément dans la charge mentale.

  • Speaker #0

    C'est vraiment de la charge mentale.

  • Speaker #1

    C'est pas ce qu'il me faut, mais il n'y a pas de choix.

  • Speaker #0

    Tu parlais du travail tout à l'heure et du fait qu'il y avait un peu d'anxiété en ce moment. La dernière fois qu'on s'est rencontré, tu m'avais dit que tu étais dans une expérience qui était plutôt positive. Peut-être qu'elle a un peu changé et tu pourras nous en dire plus si tu en as l'envie, évidemment. Parce qu'aujourd'hui, tu as été reconnue en qualité de travailleuse handicapée, ce qui fait que tu as un bureau pour toi-même, tu as un fauteuil pour toi-même, qu'on te laisse faire ta sieste de 20 minutes tous les jours. Le cadre semblait assez idyllique quand tu m'en as parlé la dernière fois. Est-ce que c'est toujours le cas ? Qu'est-ce que tu peux dire de cette expérience aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Le cadre, il est encore idyllique. Vraiment, c'est une entreprise qui est top. J'ai en effet des entreprises qui n'ont pas accepté ma maladie ou qui me trouvaient toujours une excuse et qui justement, notamment une qui a dû mettre fin à ma parodie, c'est à cause de la maladie. Honnêtement, c'est une entreprise qui est incroyable. qui a pris en charge tout très très rapidement. C'est juste que je suis en petite inquiétude professionnelle sur ma projection professionnelle. C'est-à-dire que je suis encore avec eux et tout se passe très bien et je resterai avec eux. Mais en fait, ce poste m'a pris conscience que je ne pourrais pas, à cause de la maladie, avoir des... poste à responsabiliser. Et c'est plus là l'inquiétude professionnelle. C'est-à-dire que je suis quelqu'un que je me projette beaucoup. Aujourd'hui, je sais que je suis toujours dans cette idée d'avoir un poste, d'avoir une équipe à manager. C'est un peu l'idée professionnelle qu'on te berce en tête. Aujourd'hui, je sais que je ne pourrais pas avoir ce rêve d'être manageuse ou d'être responsable. d'avoir en tout cas quelque chose en responsabilité parce que c'est trop. Et c'est ça en fait l'inquiétude professionnelle. Encore une fois, je suis très bien, le travail que je fais il est incroyable. Mais je sais que je ne pense pas en tout cas aujourd'hui que je pourrais évoluer, que je ne pense pas que ça sera possible au vu de l'handicap.

  • Speaker #0

    Et comment tu deals avec ces pensées-là ?

  • Speaker #1

    Ah c'est dur ! C'est du rien, beaucoup plus de côté négatif qu'en positif, qui en ressortent. Très positif, qui trouve toujours un moment de se relever, mais là, en ce moment, c'est pas facile. Et c'est aussi pour ça, tu vois, que j'ai annoncé le podcast, parce que je me suis dit, à la rigueur, j'ai mon projet à moi, qui me donne une raison d'avancer tout le temps, et que ça dépend que de moi.

  • Speaker #0

    Des fois, c'est... En tout cas, moi, c'est des questionnements que j'ai beaucoup, cette question du travail. C'est fou, comme des fois, peut-être qu'on n'arrive plus à s'impliquer dans un travail qui est salarié. et qu'on n'arrive pas à gravir les échelons comme on aurait souhaité le faire, mais qu'en effet, construire quelque chose qui est plus personnel, individuel, qui rassemble nos missions et valeurs à notre rythme, et bien des fois on peut avoir un rôle plus important dans cet espace-là parce que ça respecte les besoins et le rythme. En tout cas, moi c'est ce que j'expérimente avec l'association, pareil que toi, dans un travail salarié, moi aujourd'hui je ne rentre plus dans ces normes-là, malheureusement, mais heureusement, j'ai pu aussi créer des choses à côté. qui me stimule énormément et où j'ai des postes que je trouve intéressants, des postes entre guillemets, mais voilà, que je trouve chouette aussi.

  • Speaker #1

    En fait c'est exactement ça, c'est-à-dire que c'est toi qui le gères avec quelque chose d'adapté à ce que toi tu as. Et bien que ça reste quand même tabou les handicaps invisibles aujourd'hui en France, il y a énormément de progrès qui ont été faits sur les handicaps visibles, c'est une très bonne chose, mais ça reste encore un peu compliqué sur les handicaps invisibles. Il y a énormément d'entreprises qui vont adapter, mais... Tu vois, des détails comme l'oubli de certaines missions, ça va être facilement pointé du doigt, mais parce qu'on va te pointer du doigt toi et pas ton escape. Et ça c'est frustrant, tu vois, et parfois c'est pas ce dont tu as besoin.

  • Speaker #0

    Ouais, il y a encore vraiment une méconnaissance dans le domaine du travail autour de ça, et c'est bien dommage, parce que moi j'ai sorti les dernières statistiques, toi t'es en France, donc côté français, il y a une personne sur deux. qui vit avec une maladie chronique, donc c'est presque le synonyme d'invisible, qui est diagnostiqué par un médecin. Donc c'est énorme. Donc finalement, dans une entreprise, il y a 50% des gens qui vivent avec des symptômes qui ne se voient pas.

  • Speaker #1

    Mais c'est énorme, mais c'est énorme. Et c'est à la fois triste parce que, quand tu vois des gens qui ont peur d'en parler, c'est triste et c'est pour ça que des médias et des podcasts comme le tien sont importants parce que ça permet de lever le tableau. De lever le tabou sur des choses, en fait, c'est pas grave de dire des choses qui ne vont pas, parce que justement, en disant des choses qui ne vont pas, peut-être qu'il y a en face de nous quelqu'un qui sera prêt à avoir une certaine adaptabilité. Et dans mon cas, ça a été ça. C'est-à-dire que dès l'instant où j'ai communiqué mon handicap, mais le directeur a été juste incroyable. Et encore une fois, hier, j'ai eu un rendez-vous avec lui, il m'a dit « mais ça, ce qui est là, tu nous dis ce qu'il te faut et on te le fait, quoi. » Et c'est incroyable et je sais que ça se fera.

  • Speaker #0

    C'est vraiment un cadre bienveillant, mais ça n'a pas toujours été le cas pour toi. Tu m'as raconté deux expériences professionnelles que tu as eues précédemment et qui ont été vraiment compliquées. Et tu as notamment reçu une fois une phrase que j'ai trouvée absolument affreuse, où je ne sais plus si c'était ta boss ou une collègue qui disait « tu nous coûtes et on a besoin de voir des évolutions et des chiffres » . Comment est-ce que tu as vécu ces violences ?

  • Speaker #1

    Comme un échec. Comme un échec et c'était ma boss. C'était ma boss et c'était dur. C'était vraiment de la pire expérience, vraiment tellement ça m'a détruite. Mais ça a été une bonne expérience parce que malgré le fait que ça m'a détruit, ça m'a permis d'être plus forte et de ressortir plus forte, et de savoir ce que je voulais professionnellement et de ce que je ne voulais pas. Et en fait, c'était beaucoup d'harcèlement moral par rapport à ça, justement parce que j'étais en plein RQTH, j'étais en pleine reconnaissance, je faisais plein de choses. Et en fait, l'oubli était fréquent au travail, vu que je n'avais pas de traitement. À cette époque-là, l'oubli était fréquent. Donc du coup, j'avais des missions, il y avait des choses que je ne faisais pas. Et pourtant, elle était référente handicap dans l'entreprise, c'était ça le comble.

  • Speaker #0

    Oh mon Dieu !

  • Speaker #1

    Oui, oui, oui.

  • Speaker #0

    Les gens toxiques !

  • Speaker #1

    Et en fait, il n'y avait pas d'évolution, donc du coup, ce n'était pas intéressant pour eux d'investir sur moi. Et je me souviens qu'elle m'avait dit une autre phrase, et ça, c'était toujours le déclenchement. de ma rupture avec eux. Elle m'a dit, dans tous les cas, tu n'iras pas plus loin qu'assistante. Je me suis dit, waouh, ok, merci. Et c'est dur, oui.

  • Speaker #0

    Et dans cette période, tu m'as dit que tu ne souhaitais pas inquiéter tes parents. Et du coup, tu vivais vraiment, tu négociais avec toi-même avec des pensées très rudes. Tu me disais que tu en étais arrivée à t'arracher les cheveux de la tête. Comment tu as fait ? Comment t'as fait ? Est-ce qu'il y a quand même eu une personne ou une situation ou un contexte ressource à ce moment-là ?

  • Speaker #1

    Encore maintenant ? Je ne sais pas comment j'ai fait. En fait, c'est quand je suis partie de cette entreprise, il y a eu tout un mal-être qui s'est déclenché. Et en fait, les cheveux tombaient tellement j'étais mal. J'ai eu des actions de ganglions qui ronflaient parce que j'étais stressée, tellement j'étais mal. Et juste... Je me souviens, tu vois, il y a un jour, je voulais rien dire à mes parents. Parce que, comme tu l'as dit, je ne voulais pas les inquiéter. Puis, enfin, mes parents, et ce sont des parents, s'inquiètent très facilement. Et c'est tout à fait normal. C'est notre rôle. Et je pense que c'est plus mes amis, mes amis qui m'ont aidée. En fait, juste, je pleurais avec eux au téléphone. Et je n'ai juste pas lâché. Je pense qu'après, en dehors de ça, je dois dire beaucoup mes soeurs qui m'ont soutenue. qui m'ont qui m'ont motivée avec des mots que j'avais besoin d'entendre à la fois durant et que j'avais besoin d'entendre et qui m'ont permis de ne pas lâcher prise et d'accepter la maladie pendant toutes ces périodes. Et ça, c'est une erreur que j'ai faite. Enfin, ça, ce n'est pas une erreur, mais ça a été mon défaut. J'acceptais pas la maladie. Donc du coup, je prenais pas de traitement. Et c'est pour ça que cette expérience aussi a mal tourné. C'est-à-dire que j'étais encore en deuil de ma vie d'avant, alors qu'en soi, j'utilisais un manque en vie avec, mais que je voulais pas accepter que j'avais une faiblesse, alors qu'en fin de compte, c'est même pas une faiblesse, c'est une force.

  • Speaker #0

    Mais je crois que c'est des étapes qui nous concernent tous et toutes, en fait. Et c'est un long chemin de reconnaissance, d'acceptation ou de non-acceptation, mais tout ça est un long chemin. Et je pense qu'on peut avoir de la bienveillance envers cette part de toi qui avait de la difficulté à accepter.

  • Speaker #1

    Mais c'était dur. En fait, je le voyais parce que je tardais à faire ma RQTH. Je tardais sur plein de choses, mais sur plein de choses, parce que je ne voulais pas l'accepter, que j'étais malade. Et en fait, c'est une copine à moi qui, je pense que ça a été ce déclic, quand je pensais qu'en fait, jamais j'allais réussir dans la vie. Alors elle m'a dit que tu le veuilles ou non. Tu l'auras cette maladie avec toi. Elle sera avec toi jusqu'à ta vie, que tu le veuilles ou non. Donc apprends à vivre avec et apprends à l'accepter. Parce que que tu le veuilles ou non, elle sera là. Et cette phrase-là, tu vois, elle m'a percutée.

  • Speaker #0

    Merci à cette amie. Est-ce que tu as eu des professionnels qui ont pu être à l'écoute ? Est-ce que tu as fait des thérapies ou des espaces où tu as pu libérer la parole de ce que tu vis au travers de la maladie ?

  • Speaker #1

    Ma neurologue a toujours été très présente, mais justement, en fait, je me sentais seule. Je me sentais seule et il y a une association en France qui est incroyable et ça m'a aidée, mais beaucoup plus tard. Mais l'association qui m'a aidée, en fait, je communique beaucoup en anglais, j'ai beaucoup de correspondants. Et en fait, je ne sais pas pourquoi, un après-midi, je suis partie regarder en anglais la narcolepsie, tu vois. Et je suis tombée sur un groupe de parole. Et ce groupe de parole m'a aidée. Ce groupe de paroles m'a énormément aidée à aller de l'avant, m'a énormément aidée à accepter parce que je ne me sentais pas seule. Et c'était la première fois, en fait, si tu veux, il y avait deux visions. La vision où les personnes expliquaient la narcolepsie, ce que c'était, parce qu'en fait c'est un groupe de paroles sur différentes thématiques, c'est-à-dire la femme enceinte a la narcolepsie, mon enfant est atteint de narcolepsie. Il y a différentes thématiques et tu vois la positivité américaine. C'est pas grave, tu vas réussir, c'est une période. Et en fait, c'est ça que j'appréciais, c'est ça qui m'a rendu cette force. Et le premier groupe de paroles, c'était en visio à 1h du matin sur Zoom. J'étais en train de bégayer parce que j'étais en train de...

  • Speaker #0

    T'étais en train de, j'ai pas compris.

  • Speaker #1

    Pardon, j'étais un peu en train de bégayer parce que j'étais en train de parler en anglais, il fallait que je présente ma situation en anglais.

  • Speaker #0

    J'entends pas le mot que tu dis, t'étais en train de...

  • Speaker #1

    Bégayer. À bégayer. Pardon, pas qu'être. J'étais en train de bégayer justement parce que, ben, il fallait que je fasse ma présentation en anglais, que j'explique la maladie en anglais. Je ne connais pas les termes techniques, tu vois, de la maladie. Et en fait, quand je me suis présentée, il y a quelqu'un juste après qui a pris la parole et qui expliquait plus en détail comment elle, elle vivait la maladie. Et j'ai pleuré. J'ai pleuré, j'étais la seule dans le visio qui était en train de pleurer. Mais j'étais en train de pleurer parce que je me disais, waouh,

  • Speaker #0

    je ne suis pas folle. La résonance.

  • Speaker #1

    C'est un impact parce qu'il y a certains symptômes. En fait, tu te dis peut-être que je suis folle, c'est dans ma tête. Et je n'avais jamais, en l'espace de plus de dix ans, je n'avais jamais rencontré quelqu'un qui était dans ma situation. Jamais, jamais, jamais, jamais. En dehors de ma neurologue qui traite le sujet, à l'épée. pas, tu vois, elles pouvaient se refléter scientifiquement à moi, mais des personnes lambda, qui étaient comme moi, qui souffraient de difficultés professionnelles comme moi, je me suis dit, waouh !

  • Speaker #0

    Waouh ! Moi, je crois beaucoup à la force des groupes de paroles, j'en anime et j'en facilite. Alors, c'est un petit peu différent, j'ai l'impression que ce que toi, tu évoques, c'est vraiment des groupes où il y a de l'échange entre les gens, des discussions au sein des Invisibles, c'est vraiment des cercles de paroles où... J'amène les gens à venir déposer quelque chose sur l'instant, avec des maladies qui sont toutes différentes. Mais c'est jamais repris, ni discuté en fait, avec les autres. C'est une autre manière de faire, les deux sont absolument géniales. Mais j'aime bien aussi animer ce genre de cercle, parce qu'il y a cet aspect où, souvent on a l'habitude que les gens viennent rebondir sur ce qu'on dit, et ça peut des fois minimiser ce qu'on vit en réalité. Et puis là, c'est vraiment, on dépose et ça résonne, ça résonne chez tout le monde. Et c'est vraiment des espaces, et c'est là où je rejoins ce que tu vis dans le groupe de parole, où en fait, juste, ça résonne ce qu'on vit avec les autres, on réalise qu'on n'est pas seul, on réalise qu'on n'est pas fou, et on réalise qu'il y a d'autres personnes qui simplement vivent la même chose. Et quand on se sent dans un tel sentiment de solitude et d'isolement, tellement différent à part des autres, de la société, des gens de notre âge, ça n'a juste pas de prix.

  • Speaker #1

    C'est exactement ça. Et tu vois, tellement ça rapportait un bien-être en moi. Tu vois, j'étais prête à me réveiller tous les deux semaines à une heure du matin juste pour parler avec eux. On a un groupe sur Instagram où on parle et parfois, en fait, on lâche ce qu'on a sur le cœur parce qu'il n'y a que eux qui peuvent nous comprendre. Et tu parles avec quelqu'un qui sait. Et on a chacun la force de choisir les mots qu'on veut pour expliquer ce qu'on ressent. Et certains mots nous parlent. Et aujourd'hui, moi, c'est ça qui m'a touchée. Et je me suis reconnectée. Parce que du coup, d'un certain moment, quand j'ai appris, ça m'a énormément aidée quand j'ai appris à accepter la maladie grâce à eux. Et c'est d'ailleurs à eux que je rends honneur avec le podcast que j'ai créé. Quand je... Quand j'ai réussi à accepter, je me suis un peu... Elle m'a fait du groupe, c'est-à-dire que je ne me connectais pas en visio. J'ai arrêté parce que c'est quand même une heure du matin, le soir. Je ne sais plus ce que je voulais dire. Je suis désolée, justement.

  • Speaker #0

    Quand tu as commencé à accepter la maladie, tu as arrêté de te connecter. C'est ça.

  • Speaker #1

    J'ai arrêté de me connecter au visio, mais bien évidemment, je restais en contact avec eux par message. Et il y a quoi ? Trois mois, je me suis connectée. Ils étaient tellement heureux de me revoir. Et quand je leur ai dit que grâce à eux, j'ai réussi à aller de l'avant, il y avait des petites larmes qui ont coulé dans leurs yeux. Et tu vois, ce qui a été touchant, c'est qu'il y avait une nouvelle dans le groupe. Donc au moment où je me suis connectée, il y avait une nouvelle. Et en fait, pareil, elle a 21 ans, elle avait l'âge que j'avais quand je me suis connectée. Et elle était en larmes totales parce qu'elle en avait marre de la maladie. Elle ne comprenait pas et disait que je suis folle. Et tu vois, j'avais l'impression de me revoir. Et ce qui était beau, c'était que j'ai pu la conseiller comme j'aurais voulu qu'on conseille, comme eux m'ont conseillé. Encore une fois, tout ça est en anglais, mais j'ai pu trouver les mots pour la rassurer. Ça a été d'une gratification et d'une reconnaissance énorme.

  • Speaker #0

    Et dans cette posture que tu as pu avoir avec elle et dans le fait que... Tu projetais finalement la fille que tu as été à ce moment-là quand tu es rentrée dans ce groupe. Moi j'aimerais te demander si tu pouvais parler à l'enfant que tu étais avec déjà ces symptômes, celle qui s'endormait sans comprendre pourquoi et qui vivait vraiment avec des symptômes extrêmement invalidants. Tu m'as aussi dit qu'à certains moments pendant le lycée, tu avais des camarades de classe qui te réveillaient alors que tu t'endormais, c'est une violence inouïe. Qu'est-ce que toi tu lui dirais à cet enfant aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Il va se faire un bon coup pour ne pas pleurer. ça va aller je dirais que ça va aller et que je suis bien plus forte que ce que je pense il

  • Speaker #0

    y a de l'émotion là chez moi aussi beaucoup c'est la fatigue du coup ça aide pas Je vais arriver sur mes deux questions de fin. Ausha, est-ce que toi, tu as envie de déposer quelque chose avant ?

  • Speaker #1

    Désolée. Attends, je veux moucher. C'est bon. C'est bon, c'est bon. Excuse-moi, est-ce que tu peux reposer ta question, s'il te plaît ?

  • Speaker #0

    Oui, je vais arriver sur les deux dernières questions de fin. Est-ce que tu aurais envie de déposer quelque chose avant ?

  • Speaker #1

    Parlez-en. Attends, parce que j'ai encore des émotions. Parlez-en. Parce que ça en vaut la peine. Parce que bien que vous allez avoir quelqu'un qui va se moquer de vous, un jour ou l'autre, vous allez tomber sur une personne qui va vous donner l'envie de changer les choses. Donc parlez-en. Voilà.

  • Speaker #0

    Du coup, je vais te poser la dernière question. Quel super pouvoir la maladie invisible t'a apporté ?

  • Speaker #1

    Super pouvoir ? Super pouvoir, waouh ! La patience, parce que pour moi la patience, tout le monde n'en a pas. Et je dirais la patience c'est... Non, je retire ce que je dis. La positivité. Que même dans les épreuves les plus dures, il y a un brin de lumière et qu'il faut savoir le voir. En fait, il y a tellement de choses. Il y a tellement de choses, si je devrais en choisir plusieurs, en toute transparence, ce serait la patience, le pouvoir et la force. Vraiment la force. La force et la positivité. D'aller de l'avant et de jamais lâcher quoi. Jamais lâcher, continuer. Parce que bien qu'on peut penser qu'à notre hauteur, en tant que simplement, on ne peut rien changer, on peut changer les choses. Et c'est très thérapeutique ton podcast.

  • Speaker #0

    Du coup, oui, on peut changer les choses.

  • Speaker #1

    Il suffit d'en parler et... et que rien n'est fini, c'est-à-dire que ce n'est pas une fatalité d'être malade. Je l'ai souvent cru, et je suis longtemps passée par cette épreuve que je ne ferai jamais rien de ma vie, que je resterai dans mon lit à dormir et à ne jamais rien faire, et qu'en fait, quand il fallait en finir, quoi, et c'est pas une fatalité, au contraire, c'est le début de l'histoire de la vie, parce que c'est ça qui va nous rendre fortes.

  • Speaker #0

    Et dans ce moment d'émotion, j'ai aussi oublié une partie, c'est que je t'ai posé la dernière question sans te poser la précédente. C'est si tu avais un message à faire passer à l'entourage des personnes qui vivent avec la narcolepsie ou en tout cas avec des troubles du sommeil, qu'est-ce que tu leur dirais ?

  • Speaker #1

    Alors, je dirais deux choses. dans un premier temps euh euh Faites attention à votre entourage parce que ça c'est quelque chose que moi j'utilise toujours. Trop dormir ce n'est pas normal et pas assez dormir ce n'est pas normal. En dehors de personnes qui dorment trop, il y a aussi des personnes qui ne dorment pas assez. Et qu'en dehors du trouble, en dehors de la maladie, il y a peut-être quelque chose de plus profond qui les empêche de dormir. Et dans l'inverse, quelque chose de plus profond qui les rend à dormir toujours. Donc je dirais faites attention, faites attention à votre entourage. Posez-leur les bonnes questions. faites en sorte qu'ils soient un petit recueil où ils peuvent se sentir en sécurité pour être un peu, je dirais, cette troisième épaule sur laquelle on peut se reposer. Parce qu'aujourd'hui, c'est une charge énorme pour nous la maladie. Et quand tu as un entourage incroyable, ou juste une simple personne qui peut t'aider, ça fait la différence. Donc, je dirais plus, prenez le temps de les écouter. Et prenez le temps d'être cette troisième école, cette troisième... sur laquelle on peut faire notre sieste, se reposer.

  • Speaker #0

    Merci pour tes mots, Sohéla.

  • Speaker #1

    Merci à toi pour donner l'opportunité aux personnes d'entendre leur voix et de lever le tabou sur quelque chose qui est encore extrêmement tabou en 2025. Et encore une fois, bravo pour ce que tu fais. Parce que c'est juste incroyable de donner cette opportunité de raconter son histoire dans une onde de positivité, parce que la fin est belle au final.

  • Speaker #0

    Où est-ce qu'on peut retrouver ton podcast, le récit des assoupis ?

  • Speaker #1

    Alors, il est sur toutes les plateformes de podcast, Spotify, Deezer, Apple Podcast. On est aussi sur les réseaux sociaux, où parfois on essaie un peu de communiquer sur différents sujets. Tout le monde est le bienvenu, toute personne atteinte de troubles, même de maladies qui ne sont pas encore connues mais qui ont tous les symptômes, comme j'ai pu avoir été dans cette situation. C'est un peu la safe place to be autour du sommeil. C'est un peu bizarre mais bon, du coup c'est un peu la safe place to be. Donc voilà, n'hésitez pas, si vous avez quelqu'un, même si les personnes n'ont pas envie de parler, juste écoutez pour se sentir moins seul. Ça aide, honnêtement ça aide.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup.

  • Speaker #1

    Merci à toi Tamara.

  • Speaker #0

    Merci de soutenir ce podcast en vous abonnant pour ne manquer aucun épisode et en lui donnant 5 étoiles sur vos plateformes d'écoute préférées. Rencontrez mes invités et découvrez tous les engagements de la communauté Les Invisibles sur le compte Instagram Les Invisibles Podcast. Ensemble, continuons à visibiliser l'invisible.

Description

Alors qu’elle n’a que 8 ans, Soheila commence à recevoir des signaux de fatigue extrême après un voyage en famille.

Très vite, son corps lui impose un autre rythme : elle s’endort en pleine journée, parfois même en classe. 👩🏼‍🏫

Enfant, elle vit déjà à contre-courant du monde : ses nuits, elle les passe éveillée ; ses journées, elle s’écroule de fatigue. 😴


S’ensuit un long parcours fait d’incompréhensions et de minimisations. On parle d’« hypersomnie adolescente », sans chercher plus loin. Pendant des années, elle se bat avec ses parents pour être entendue, comprise, et enfin diagnostiquée.


Dix ans plus tard, une ponction lombaire révèle enfin la vérité : Soheila est atteinte de narcolepsie de type 1, une maladie du sommeil incurable qui s’accompagne d’épisodes soudains où le corps s’effondre alors que l’esprit reste parfaitement éveillé.


Refusant d’abord cette réalité, Soheila finira, une nuit, par rejoindre un groupe de parole en ligne, aux États-Unis. 🇺🇸 C’est là qu’elle découvre, pour la première fois, des récits qui résonnent et un soutien inconditionnel. Deux choses qui lui étaient jusque-là inconnues.


Le domaine du travail reste aujourd’hui un défi constant : elle doit composer avec une mémoire, une concentration et une efficience différentes de celles d’une personne non malade - un équilibre précaire qu’elle affronte chaque jour.

Aujourd’hui, Soheila s’engage pour déconstruire les clichés et l’incompréhension qui entourent la narcolepsie et les troubles du sommeil.


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Transcription

  • Speaker #0

    Enfin, tu vois, ça t'impacte parce qu'il y a certains symptômes. En fait, tu te dis peut-être que je suis folle, c'est dans ma tête. Et j'avais jamais, en l'espace de plus de dix ans, j'avais jamais rencontré quelqu'un qui était dans ma situation. Jamais, jamais, jamais, jamais. En dehors de ma neurologue qui traite le sujet, elle ne l'est pas, tu vois. Elle pouvait se refléter scientifiquement à moi, mais des personnes lambda qui étaient comme moi, qui souffraient de difficultés. professionnels comme moi, je me suis dit waouh.

  • Speaker #1

    Les Invisibles Juin 2020 Ma vie bascule du jour au lendemain dans une maladie neurologique rare, qui n'a de poétique que le nom. Le syndrome du mal de débarquement. Les symptômes qu'elle m'amène vivent en colocation avec moi. 7 jours sur 7. 24 heures sur 24, et ne prennent jamais leur week-end. Je n'ai donc pas la place pour un autre combat. Du moins, c'est ce que je crois. Puis vient ce jour où je témoigne dans une émission télé. dans l'espoir de rendre visible l'invisibilité du syndrome dont je suis atteinte. À peine sortie du plateau, forte de cette expérience et encore dans mes talons rouges, une évidence s'installe. Je n'en resterai pas là. Dans le train du retour, je rejoins à la fois ma maison et mon nouveau combat. Offrir un espace de parole au travers d'un podcast, aux personnes qui composent, bien souvent en silence, avec des maladies invisibles et avec les regards de sociétés qui ne croient que ce qu'elles voient, deux réalités plus souvent subies que choisies. Aujourd'hui, loin de mes talons rouges et au plus proche de l'engagement, l'évidence s'étend. C'est à l'invisible au pluriel que je vous invite. Ceux qui dans la chair, l'esprit et les sociétés se vit, sans pour autant faire de bruit. Si comme le dit Antoine de Saint-Exupéry, l'essentiel est invisible pour les yeux, ici, on compte bien le faire entendre. Bonne écoute ! Hello Sohila !

  • Speaker #0

    Hello Tamara !

  • Speaker #1

    Aujourd'hui, j'ai la joie et l'honneur de te recevoir. Tu as 23 ans et tu vis avec la narcolepsie, une maladie neurologique encore largement méconnue, souvent réduite à une image caricaturale, il faut le dire. Quelqu'un qui s'endort n'importe quand, n'importe où, ou même qui aurait la flemme de se réveiller. Mais ce que tu vis, c'est bien, bien plus complexe, et c'est ce qu'on va voir aujourd'hui. Depuis tes 8 ans, ton corps a commencé à envoyer des signaux de fatigue extrême. À 13 ans... tes parents commencent à s'inquiéter et t'emmènent consulter dans un centre du sommeil. On te diagnostique à tort une hypersomnie adolescente. S'en suivent des traitements mal adaptés, des effets secondaires terribles, des pensées noires, des années sans réel suivi. Et une errance médicale qui va durer presque 10 ans. C'est seulement à tes 17 ans, après une ponction lombaire, que le diagnostic de narcolepsie type 1 tombe. Une maladie incurable qui s'accompagne chez toi de cataplexie. cette perte soudaine du tonus musculaire qui fait tomber le corps alors que l'esprit, lui, y reste parfaitement conscient. Malgré ça, tu tiens, malgré ça, tu trouves un traitement qui te convient, une neurologue qui t'écoute enfin, un groupe de paroles aux Etats-Unis que tu rejoins en te réveillant à minuit. Et aujourd'hui, tu as lancé ton podcast, le récit des assoupis, pour parler du sommeil et de ses troubles, pour déconstruire les préjugés, pour faire entendre ce que les corps fatigués... On a dire. Alors Sohéla, avant de démarrer, comment est-ce que tu vas aujourd'hui ?

  • Speaker #0

    J'ai connu des jours meilleurs, en toute transparence. En ce moment à l'heure à laquelle on parle, il fait très très chaud, donc je ne dors pas. Du coup, je suis très très très fatiguée, bien plus qu'à une autre période de l'année, plus d'autres interrogations professionnelles, donc j'ai des jours meilleurs, mais bon. On garde la tête haute. Et toi, comment vas-tu ?

  • Speaker #1

    C'est un peu compliqué dans mon corps ces jours. On est le 2 juillet 2025, il fait une chaleur assez mondiale, assez intense. J'ai eu mes règles qui m'ont mis vraiment dans une humeur très, très, très ronchonne. J'ai très mal au cervical. Je ne me sens vraiment pas au top, mais je suis heureuse d'être là. C'est toujours un moment que j'adore partager.

  • Speaker #0

    Et moi aussi, je suis heureuse d'être avec toi. En tout cas, merci beaucoup encore une fois Tamara.

  • Speaker #1

    Alors, Célia, si tu devais raconter la première fois où tu t'es dit « il y a un truc qui cloche » , ce serait quand et qu'est-ce que tu ressentais petite déjà ?

  • Speaker #0

    Les premiers symptômes, comme tu l'as si bien expliqué, ont commencé à 8 ans. À 8 ans, tu ne connais pas trop la vie, tu n'es pas trop jeune, tu as un enfant. Donc, je dirais plus que j'ai grandi avec cet instinct que quelque chose n'allait pas, mais dans cette incertitude. La seule chose dont je me souviens, c'était qu'il y avait cette fatigue qui n'était pas normale, et que surtout que je comparais avec les jeunes de ma classe à cette époque, et je me disais, ouais, il y a quelque chose qui ne va pas. constamment grandi avec ça sans avoir de réelles réponses. Donc c'était plus une angoisse, tu sais, quand t'es jeune, de dire pourquoi je suis pas normale et les autres le sont.

  • Speaker #1

    C'est quoi qui te faisait sentir pas normale ?

  • Speaker #0

    Ces moments où tu rentres de l'école, tu dors. Tu dors et quand tu es avec tes camarades de classe, tu... Je parle avec eux, ils font des activités. Sauf que moi, je n'avais aucune force de faire une activité. Ou quand je suis à l'école et que j'ai un moment de somnolence et qu'on me crie dessus parce qu'on pense peut-être que je ne dors pas la nuit. Enfin, tu vois, c'est ces petites actions qui, en fait, avec du recul, me faisaient me sentir pas normale. Et il y avait des moments où juste, je me souviens à nombre de fois, Je pleurais parce que je voyais les autres de mon âge faire plein de choses, avoir cette énergie, avoir ce dynamisme qu'on a quand on est petit, que moi je n'avais pas.

  • Speaker #1

    Et là, ça a commencé à 8 ans déjà, tu disais, ces premiers ressentis ?

  • Speaker #0

    C'est ça, les premiers ressentis ont commencé lors d'un voyage familial. En fait, je ne faisais que dormir. Donc c'est dire que la journée, je ne faisais que dormir. La nuit je me réveillais et en fait je voyais tout le monde en train de dormir. Je me dis mais tiens j'ai regardé quelque chose. Les autres faisaient des activités sans moi parce que justement ils me disaient on te voit dormir, on ne veut pas te réveiller. Et moi je me souviens, et même mon père me le raconte encore aujourd'hui, je me réveillais en pleurs parce qu'ils étaient partis sans moi. Mais moi en fait je dormais et la nuit je me réveillais et j'attendais que les autres se réveillent le lendemain. Ça a commencé très très jeune et en fait quand je suis revenue de ce voyage, ça s'est empiré. Et en fait, on est resté quelques années sans réellement comprendre et peut-être se dire que à cette époque, j'étais en carence de fer et j'ai toujours été en carence de fer. Et en fait, à cette époque-là, c'était beaucoup plus important et on mettait le dos sur la carence en fer. Sauf qu'en fait, après avoir pris tous les traitements possibles pour avoir cette carence qui disparaît, la fatigue était toujours autant présente.

  • Speaker #1

    Moi, ça me touche beaucoup ce que tu racontes, probablement aussi parce qu'aujourd'hui, je suis maman et que tout d'un coup, si je fais une sorte de projection sur ma fille, ce n'est pas forcément intelligent de le faire, mais il y a vraiment quelque chose qui vient me toucher dans le fait aussi qu'en tant que parent, ça peut être difficile de voir son enfant rentrer de l'école, aller se coucher. ne pas pouvoir participer aux activités. Je pense qu'il y a quelque chose qui doit être assez douloureux aussi de sentir ce décalage entre son enfant et les autres, ou même comparativement aux autres enfants qu'on a soi-même, parce que je crois que tu viens d'une grande famille, vous êtes cinq frères et sœurs si je ne me trompe pas.

  • Speaker #0

    C'est exactement ça, c'est exactement ça. Tu as réellement tout. Je suis la petite dernière, donc en plus de ça, il y a de quoi faire la comparaison facile, même si encore une fois, chaque enfant est différent. On est très dynamique. Mes frères et sœurs ont toujours fait plein de choses après l'école. Et en fin de compte, il y a moi. Justement, comme mes frères et sœurs ont toujours été actifs, il y a moi, quoi qu'il fasse dormir.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'ils ont mis du temps à identifier, eux aussi, que quelque chose était un petit peu « anormal » ? Pour eux, c'était simplement, voilà, t'étais une enfant qui dormait plus que les autres, qui avait un peu un décalage au niveau du sommeil. Comment ça s'est passé pour eux ? Tu saurais dire un peu ?

  • Speaker #0

    On a souvent cette discussion avec mon père, justement. Au début, il n'y avait pas trop d'inquiétude parce que justement, mon médecin traitant de l'époque disait que c'était à cause de ma carence en fer. Donc voilà, tu vois, naïvement, tout parent, il n'a pas la science qu'un médecin a, donc il va écouter le médecin. Et il y avait des moments, et c'est vraiment où je te parle, là en année, où en fait, mes parents se sont inquiétés parce que... Quand je suis entrée notamment au collège, ça a été un peu l'élément déclencheur. Je pense que la puberté a eu un impact où c'était pire. Je retrouve des copies, j'écris, mais tu vois que mon écriture s'estompe parce que je dors pendant que j'écris. Mon collège était juste à côté de chez moi. Et je rentrais le midi pour manger. Et en fait, ce temps de pause, je ne le consacrais pas pour manger, mais pour dormir. Et il y avait des moments où j'étais fatiguée. Et un jour, et c'est là qu'il a déclenché ce questionnement, je me suis réveillée en retard pour reprendre l'école. Mon père m'a réveillée, mon père m'a dit, il faut faire quelque chose, t'es jamais en retard, ça ne t'arrive jamais, il y a quelque chose qui ne va pas. Et de là, justement, de là... L'intention d'avoir quelqu'un, de voir un neurologue s'est déclenchée.

  • Speaker #1

    Et alors, qu'est-ce qui s'est passé dans cette première consultation ?

  • Speaker #0

    Déjà, je ne savais pas, je n'en ai pas des bons souvenirs en toute transparence. C'est des souvenirs assez particuliers que j'ai. Alors, en fait, les diagnostics, c'était un neurologue qui était en retraite. A chaque fois, comme je le dis, je n'étais pas le cas le plus waouh de sa carrière, je pense. Et en fait, c'était, oh, ne vous inquiétez pas, on est sur une hypersomnie de l'adolescence, votre fille est en plein dedans, ne vous inquiétez pas. Mais si on peut vous rassurer, elle vous fera des examens de sommeil. Donc, chose qui a été faite, c'était une cata. C'était en plein juillet, je crois, c'était en 2014. Et je crois qu'on se souvient tous de cet été où il a fait extrêmement chaud, et encore plus nous, à Amiens. Et en fait, les examens du sommeil n'étaient pas... En fait, à cette époque, il n'y avait pas de centre de sommeil au CHU d'Amiens. Le CHU était vraiment en déménagement, donc du coup, il n'y avait pas du tout officiellement de centre de sommeil. Et en fait, pour la petite anecdote, tous les CHU n'ont pas de centre de sommeil. C'est-à-dire qu'il faut avoir une habilitation. Pour être habilité centre de sommeil, être reconnu centre de sommeil, c'est toute une démarche. Donc à Amiens, à cette époque-là, on n'en avait pas. et le neurologue Elle a fait juste un petit test normal et en fait, du bras, votre fille va bien, jusqu'à là, une petite hypersomnie de l'adolescence. Et en fait, de là, à chaque fois que je me plaignais de certains symptômes que j'avais, je n'étais pas écoutée. Ou on me pointait du doigt, m'est arrêtée. Donc en fait, si tu vois, au tout début, on a donné des médicaments qui étaient des équivalents de ce que je prends aujourd'hui, qu'on ne pouvait pas directement donner parce qu'il n'y avait pas de diagnostic officiellement posé. et en fait c'est c'était des médicaments à une enfant de 13 ans que tu donnes, mais qui sont forts, qui sont forts pour le cœur et même de manière générale pour la santé mentale. Et là, en fait, je voyais que j'avais été crise d'angoisse, parce que c'était à l'époque où je me voyais juste avoir une difficulté de respirer. Je faisais crise d'angoisse sur crise d'angoisse, et à chaque effet secondaire qui était très conséquent, quand j'en parlais, on me pointait du doigt. Et on me disait, c'est votre faute, arrêtez vos médicaments, arrêtez de faire ci, arrêtez de faire ça. Et tu vois, je suis une enfant de 13 ans à cette époque, et tu ne peux pas reprocher à une adolescente de 13 ans tout ça alors qu'elle ne s'y connaît pas. Et de là, j'ai arrêté de prendre les médicaments et j'ai subi la maladie toute ma scolarité au collège et au lycée.

  • Speaker #1

    Et tu disais que tu évoquais d'autres symptômes. Quels étaient les autres symptômes qui vont avec cette maladie, ou en tout cas pour toi ?

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, l'idée qu'on a de la narcolepsie est très caricaturée. Aujourd'hui, quand tu dis à quelqu'un que tu as atteint de narcolepsie, on va facilement dire « Ah, tu dors tout le temps ? C'est trop bien ! » Et c'est vraiment le retour qu'on a. Vraiment, toutes les personnes atteintes de la narcolepsie, c'est ce qu'on a comme retour. Et en fait, dans mon cas, et de manière générale pour la narcolepsie, la narcolepsie, scientifiquement, on l'explique. Aujourd'hui, quelqu'un de normal a un liquide qui tourne dans son cerveau, qui lui permet de savoir quand il doit se réveiller, quand il doit être endormi. Moi aujourd'hui, ce liquide, je ne l'ai plus. d'une manière ou d'une autre, mon corps a arrêté de fonctionner. Donc le symptôme principal, ça va être l'insomnie de la nuit, c'est-à-dire que je ne dors pas la nuit. Et je dors la journée, c'est vraiment tout un dérèglement causé par ce manque de liquide. Et donc l'un des premiers symptômes, c'est le réveil nocturne, littéralement. C'est-à-dire que je ne sais plus ce que ça fait de dormir 8h dans la nuit. Je n'ai jamais dormi 8h dans une nuit. Ensuite, il y a la somnolence dure, donc la somnolence dans la journée. C'est-à-dire que je ne peux pas rester dans une atmosphère sans avoir un moment de somnolence. C'est-à-dire que par exemple, si je suis trop concentrée sur quelque chose, que l'ambiance est tamisée et qu'il n'y a pas de bruit autour, alors là, ça y est, c'est foutu, je vais dormir. Il va y avoir les problèmes de concentration. Ça, c'est très très dur. Aujourd'hui, je prends des médicaments qui m'aident, mais les problèmes de concentration, les troubles de concentration sont assez présents. En tout cas, dans mon cas et dans certains cas d'autres personnes atteintes d'arcolepsie, les troubles cognitifs, c'est-à-dire que je vais oublier plein de choses. Même je peux parler et à tout moment lors de cette interview, je peux oublier un mot parce que c'est justement un des symptômes de la maladie, c'est l'oubli. L'oubli de choses du quotidien, des mots, de plein de choses. Et là aujourd'hui, c'est les symptômes en tout cas conséquents et après la cataplexie qui est aussi présente. Oui, bien sûr. Alors, il existe deux types de cataplexie. En fait, si tu veux, de manière générale, la narcolepsie existe sous deux types. Le type 1 avec la cataplexie et le type 2 sans cataplexie. Le plus courant, c'est le type 1. Et le type 1 avec cataplexie, c'est ce que j'ai. Elle ne se guérit pas, ce n'est pas une maladie que tu peux guérir, tu vis avec, c'est tout. et en fait la cataplexie c'est Des moments où en fait, lors d'émotions fortes ou lors de situations où tu es vraiment juste extrêmement fatigué, tes muscles vont lâcher. Ça peut être n'importe quel muscle. Ça peut être de ton visage, ça peut être ton bras, ça peut être vraiment n'importe quel muscle. Certaines personnes l'ont entièrement, c'est-à-dire que c'est tout leur corps, tous les muscles qui vont lâcher. Ou d'autres personnes, ils vont avoir quelques parties du corps, quelques muscles. Et c'est là, à ce moment-là, qu'on appelle une cataplexie partielle. Dans mon cas, ça va être une cataplexie partielle. Quand je suis extrêmement fatiguée comme en ce moment, mes genoux lâchent. Je ne peux littéralement plus tenir debout. Quand je suis en fourrière, vraiment en gros fourrière, mes bras et mes mains. C'est pas explicable, c'est vraiment soudain et ça dure vraiment très peu de secondes, quelques secondes, mais c'est suffisamment brusque pour te mettre un peu mal à l'aise. Juste après.

  • Speaker #1

    Parce que ces muscles qui lâchent, est-ce que ça se voit de l'extérieur ou c'est qu'un ressenti à l'intérieur ?

  • Speaker #0

    C'est un ressenti et ça se voit aussi. Dans le cas où c'est tout le corps, ça se voit. La personne tombe. Et dans le cas où justement la personne tombe, si tu es en extérieur, les gens peuvent penser que tu fais un malaise alors que tu es entièrement conscient. Pendant que tu tombes, pendant que tes muscles lâchent, tu es entièrement consciente.

  • Speaker #1

    Et toi-même, tu es déjà tombée, non ?

  • Speaker #0

    Je ne crois pas. Je ne crois pas. Je sais que j'ai eu des moments où ça aurait pu être dangereux. Notamment un moment où je n'avais plus de médicaments. Parce qu'aujourd'hui, c'est les médicaments qui me permettent d'avoir une vie un peu plus normale. Même si techniquement, il n'y a pas de normalité. En fait, je n'avais plus de médicaments et j'étais dans une période où j'étais extrêmement fatiguée parce que j'avais une charge de travail assez importante. Et en fait, je n'avais pas pensé à prendre un médicament. Et tu vois, c'est un cercle vicieux où tu es. exténué, tu ne peux pas aller chercher tes médicaments mais sans tes médicaments tu es encore plus fatigué. Et en fait j'étais en ville et puis je sentais que ça flanchait et en fait j'ai dû me positionner, me mettre, le mot je ne l'ai pas, mais me prendre un appui, avoir un appui pour ne pas tomber parce que sinon je tombais devant tout le monde.

  • Speaker #1

    Et on parlait tout à l'heure du coup vraiment de cette enfance où ça a été très difficile pour toi, cette préadolescence, cette adolescence aussi. Mais un jour quand même, à 17 ans, t'as enfin un mot officiel sur ce qui se passe. Comment c'est vécu ? Qui c'est qui t'a accompagné à ce moment-là ?

  • Speaker #0

    C'était encore ce fameux neurologue. En fait, à un moment donné, ma mère a tapé du poing. Et ma mère a dit, écoutez, il n'y a rien qui fonctionne, on a tout essayé, les médicaments ne fonctionnent pas pour ma fille. Elle arrive à des situations où elle a des pensées qui ne sont pas du tout positives. Il y a quelque chose qui ne va pas. Puis lui, il s'est dit, écoutez, il y a quelque chose qui existe. Si vous voulez savoir si votre fille a la narcolepsie ou pas, même si moi je pense que c'est trop tôt. pour dire qu'elle a une narcolepsie, alors qu'aujourd'hui techniquement un enfant de 5 ans peut diagnostiquer une narcoleptique. Et en fait il explique que c'est la fameuse ponction lombaire. Et voilà, je ne savais pas ce que c'était la ponction lombaire à cette époque, donc on m'explique. Tu vois, à cette époque c'est ma mère qui a pris la décision, et vraiment je la remercie, parce que même si ce n'est pas une expérience très agréable, Ça m'a permis d'avoir des réponses. Mais même ça, pour te dire, ça n'a pas permis d'accélérer le dossier. Donc du coup, on a programmé la peau de Solambert. Et en fait, toute contente, je me dis, ça y est, il va enfin avoir un mot sur ce que j'ai. Surtout qu'à l'époque, je passais le bac de français. Quand il y avait la réforme, l'ancienne réforme. Et en fait, si tu veux, pour le brevet, je n'ai pas pu avoir de tiers temps. parce que il n'y avait pas de diagnostic posé. Donc du coup, ma demande de tiers temps pour le brevet a été refusée. Et je voulais à tout prix passer mon bac littéraire. Mon objectif, quand j'étais au lycée, c'était d'avoir un bac L. Et je me suis dit, je veux que mon tiers temps soit accepté parce que je ne veux pas ne pas avoir de tiers temps si je m'endors. Et je sais que je dois m'endormir parce que je n'ai pas de traitement. Et donc du coup, quand la fonction Lambert est terminée et qu'il me reçoit dans son bureau, il me dit... Ben écoutez, ça y est, c'est bon, tout s'est bien passé. Par contre, pour les résultats, il faudra attendre un an.

  • Speaker #1

    Oh mon Dieu ! Un an ! Mais c'est pas possible !

  • Speaker #0

    Un an ! Et je me dis, mais attendez, comment c'est possible ? Je me dis, ben, parce qu'en fait, le liquide qui a été retiré lors de cet examen va à Lyon. Et en fait, il faut attendre qu'il y ait un certain nombre de personnes qui fassent cette fonction d'homébère, qui est ce prélèvement, pour déclencher, vu que c'est des maladies rares, on est sur des fonds privés. Donc du coup, il faut avoir un certain quota pour déclencher les analyses. Donc du coup, il faut attendre un an. Et je me souviens, c'était en novembre. Je me suis dit non, ce n'est pas possible. Je me souviens, je suis rentrée chez moi. Je me suis effondrée, je me suis dit mais je ne vais jamais m'en sortir. Et sur un coup de tête, vu que je ne dors pas la nuit, pas au milieu de la nuit, je me suis retrouvée, j'étais en train de faire des recherches, comment accélérer les dossiers, comment m'adresser à telle personne pour avoir une accélération de dossier. J'étais dans un état d'esprit. Encore aujourd'hui, je me dis mais comment j'ai pensé à ça ? Je me suis retrouvée à envoyer une lettre au ministère de la Santé. J'explique ma situation, je t'explique tout, dans l'espoir d'eux et... en février, donc tout ça se fait en novembre et en février, je reçois une lettre disant que mon cas a été étudié et que du coup, ils allaient faire le nécessaire. Tu vois, je crois que c'était Alice Buzyn à l'époque, la ministère de la Santé. Donc voilà, je vois la lettre et tout. Au début, ma mère a dit mais qu'est-ce qui s'est passé ? Pourquoi t'as une lettre du ministère ? Et je me disais, oh waouh ! Et donc du coup, ça avait fonctionné et une semaine après, j'ai un rendez-vous avec mon neurologue. Et là, dans le bureau, il me dit « Mais écoutez, je ne comprends pas. Ça arrive rarement qu'on ait des personnes qui ont un diagnostic, qui ont le résultat si rapidement. Écoutez, je suis très contente, mais c'est assez impressionnant. Je ne lui avais pas dit que j'avais fait une lettre. Et tu vois, j'étais en mode « Waouh ! » C'est impressionnant. Enfin, tu sais, c'est « Waouh ! » Donc du coup, ça a pu poser le diagnostic. « Vos résultats sont évidents. Vous êtes atteint de narcolepsie. » Soulagement. Mais il me dit... écoutez, on ne peut pas vous basculer maintenant dans le service du sommeil qu'on a au CHU d'Amiens. Donc, il faudra attendre vos 18 ans. Mais le diagnostic, les résultats vont vous permettre de faire votre demande de tiers temps. Donc, du coup, ma demande de tiers temps est acceptée. C'est un soulagement pour moi.

  • Speaker #1

    Ah ouais, j'entends. Et waouh d'avoir trouvé cette force, cette énergie de faire avancer ta cause. Vraiment, c'est ça.

  • Speaker #0

    C'est ça parce que tu vois, je me dis, il y a d'autres personnes, enfin aujourd'hui c'est comme ça que je réfléchis, à cette époque-là je suis sûre que je réfléchissais pas comme ça, mais je me dis, il y a d'autres personnes qui ont des situations beaucoup plus importantes que moi, et c'est malheureux parce que c'est une maladie rare. Ce sont encore une fois des fonds privés, que en fait tout dépend de ça. Et c'est malheureux parce que du coup, il y a une dépendance énorme.

  • Speaker #1

    Et à tes 18 ans alors, la prise en charge, est-ce qu'elle change ? Est-ce que déjà, il y a simplement une prise en charge ?

  • Speaker #0

    Il y a un transfert. Il y a un transfert de service qui me dit, écoutez, on va vous transférer. Je vais transférer votre dossier à ma consoeur. Il me semble que c'est comme ça qu'on dit. À ma consoeur pour qu'elle reprenne vos dossiers. en fait... C'est cette femme-là qui me suit encore aujourd'hui et qui est incroyable, et qui en fait quand elle me reçoit, elle me dit « Mais écoutez, c'est évident, vous êtes narcoductique, je ne comprends même pas pourquoi ils ne vous ont pas transféré dès le début dans ce service. » Et donc du coup la prise en charge a été incroyable. On a dû refaire par question de procédure les examens, et là c'était vraiment les vrais examens du sommeil où j'étais... J'étais vraiment pendant deux nuits, branchée de partout, on t'observe et voilà, le dossier a été fait, la prise en charge a été faite. Et les médicaments, les vrais médicaments que tu donnes aujourd'hui à quelqu'un atteint d'anarcholepsie ont été prescrits.

  • Speaker #1

    Et alors les médicaments, quels effets ont eu sur les symptômes ?

  • Speaker #0

    Quand j'ai intégré justement ce service, honnêtement je crois que j'en ai essayé... trois médicaments avant de vraiment trouver celui qui me correspond. Mais encore une fois, par procédure, elle voulait essayer les médicaments que j'avais. Mais c'était vraiment les médicaments que tu donnes à quelqu'un d'un arc-en-épsi. Et les effets, en fait, c'est déjà crise d'angoisse. Tu as l'anxiété plus que tu as, l'irritabilité. Tu ne manges plus, tu coupes faim. Mais radical, c'est-à-dire un espace de jour où je ne mangeais plus. En fait, c'est un sacrifice parce que tu es angoissé et du coup, tu n'as pas faim. Et l'effet qui m'a terrifiée littéralement, en dehors des pensées négatives, c'était l'effet que ça avait sur moi, c'est-à-dire que je ne voyais plus en fin de journée. C'est-à-dire qu'en fait, tu te retrouves en fin de journée avec une barre et tu ne vois plus. Tu ne vois littéralement plus. En fait, ta main, elle est devant toi, tu la vois floue. Et ça, c'est vraiment l'effet désirable qui m'a fait peur. Et tu vois, là, tu vis ta vie au quotidien, tu es en cours et tu as une énorme crise d'angoisse qui te prend. Tu pleures, tu ne sais pas pourquoi tu pleures. Et tu as juste envie d'essayer d'en finir, quoi.

  • Speaker #1

    Ouais, donc à quel prix, en fait ? Sur la balance, prendre ces médicaments n'en valait absolument pas la peine.

  • Speaker #0

    Exactement, exactement. Et donc, du coup, on a changé. On est passé sur un deuxième médicament qui est spécifique aux personnes atteintes de narcolepsie. Pareil, au bout d'un mois, je ne sais plus, c'était des malaises, je faisais beaucoup de malaises. C'était des malaises que je faisais et puis en fait, on avait atteint la dose maximale, donc du coup, il n'y avait pas d'autre choix que de changer. Et là, du coup, je suis sur un traitement qui me va depuis 2022, que mon corps accepte. Ce n'est pas le plus waouh, mais c'est celui avec le moins d'effets indésirables. Et ça reste encore une fois des médicaments lourds. En fait, j'ai littéralement pris des médicaments qui sont des dérivés amineux. J'ai dû avoir tous des examens, des échographies cardiaques pour vraiment s'assurer que mon cœur était capable de prendre tout ça vu que j'avais déjà pris des médicaments qui étaient assez lourds quand j'étais adolescente. Donc ouais, j'en rigole aujourd'hui parce que tu vois, j'étais au travail, on voulait un peu d'enfaite ironiquement. Mais voilà, dans le fond, c'est quand même assez lourd.

  • Speaker #1

    C'est lourd en termes d'effets secondaires aussi ?

  • Speaker #0

    Non, celui-ci, il y a le coupe-fin. C'est-à-dire qu'il suffit que quelque chose me tracasse et je ne mange pas. Et au travail, ce qui se passe en ce moment, au début, justement, je te disais que j'avais des petites inquiétudes professionnelles. Et justement, ces inquiétudes professionnelles ont déclenché que je ne mange plus le midi. Mais ça arrive, ça va. J'arrive à déjeuner le matin, j'arrive à manger le soir. C'est juste le temps du midi où je n'arrive pas à manger parce que du coup j'ai une petite anxiété. Mais ce n'est pas comme avant où vraiment je partais en crise forte.

  • Speaker #1

    Et sur la narcolepsie en elle-même, qu'est-ce que ça a changé ces traitements ?

  • Speaker #0

    C'est absolument ridicule. Il n'y a pas de somnolence. Il n'y a plus du tout de somnolence. Par contre, la condition pour avoir les effets du médicament, c'est de faire une sieste de 20 minutes. à un moment donné de ma journée, pour être bien, et ça change. Donc ça va être vraiment de l'éveil, de l'éveil 100% littéralement, avec un petit moment de pause bien sûr, juste je ferme les yeux, et de la concentration.

  • Speaker #1

    Et la nuit, tu dors ?

  • Speaker #0

    Non, non, ça va, du coup non. En fait, le médicament n'agit que sur la journée. Je peux prendre un médicament pour dormir la nuit, mais psychologiquement, je ne me sens pas prête. J'ai encore un peu peur.

  • Speaker #1

    Donc, tu es très éveillée la journée et très éveillée la nuit, si j'entends bien.

  • Speaker #0

    En fait, c'est ça. Quand est-ce que tu dors ?

  • Speaker #1

    En fait, généralement, je prends le médicament, il est 8h-8h30. Et ça dure vraiment une journée. Donc aux alentours de 18h, les effets retombent. Donc là, la fatigue retombe. Donc c'est là en fait un peu que je dors. Je fais généralement 18h-20h. Aujourd'hui, j'ai réussi un peu à gérer. En fait, vraiment, je gère quand je peux. Et quand je sais que les effets vont retomber, c'est un moment où je ne fais rien. Donc généralement, c'est à 18h, tout retombe, je dors. En fait, la nuit, je ne suis pas entièrement éveillée. En fait, si tu veux, la nuit, je fais des micro-dodos. Je dors toutes les deux heures, en fait.

  • Speaker #0

    Oui, c'est ça. Et à 18h, quand tu dors, quelque part, tu perds aussi une grande partie de la vie sociale. La vie de famille, la vie amoureuse. C'est un peu le moment où les gens se retrouvent après le travail.

  • Speaker #1

    C'est ça. C'est ça. Et en fait, aujourd'hui, j'ai vraiment su gérer ça. C'est-à-dire que quand je sais que j'ai quelque chose de prévu, je vais prendre à une heure stratégique mon médicament pour que ça retarde un peu tout. En fait, c'est une réflexion constante.

  • Speaker #0

    On devient des alchimistes quand on est malade chronique.

  • Speaker #1

    C'est impressionnant. En fait, toute une réflexion, une prise de conscience sur « il ne faut pas que je prenne ça parce que j'ai ça, parce que j'ai ça » . Il y a toute une réflexion qui, en plus de ça, fatigue énormément dans la charge mentale.

  • Speaker #0

    C'est vraiment de la charge mentale.

  • Speaker #1

    C'est pas ce qu'il me faut, mais il n'y a pas de choix.

  • Speaker #0

    Tu parlais du travail tout à l'heure et du fait qu'il y avait un peu d'anxiété en ce moment. La dernière fois qu'on s'est rencontré, tu m'avais dit que tu étais dans une expérience qui était plutôt positive. Peut-être qu'elle a un peu changé et tu pourras nous en dire plus si tu en as l'envie, évidemment. Parce qu'aujourd'hui, tu as été reconnue en qualité de travailleuse handicapée, ce qui fait que tu as un bureau pour toi-même, tu as un fauteuil pour toi-même, qu'on te laisse faire ta sieste de 20 minutes tous les jours. Le cadre semblait assez idyllique quand tu m'en as parlé la dernière fois. Est-ce que c'est toujours le cas ? Qu'est-ce que tu peux dire de cette expérience aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Le cadre, il est encore idyllique. Vraiment, c'est une entreprise qui est top. J'ai en effet des entreprises qui n'ont pas accepté ma maladie ou qui me trouvaient toujours une excuse et qui justement, notamment une qui a dû mettre fin à ma parodie, c'est à cause de la maladie. Honnêtement, c'est une entreprise qui est incroyable. qui a pris en charge tout très très rapidement. C'est juste que je suis en petite inquiétude professionnelle sur ma projection professionnelle. C'est-à-dire que je suis encore avec eux et tout se passe très bien et je resterai avec eux. Mais en fait, ce poste m'a pris conscience que je ne pourrais pas, à cause de la maladie, avoir des... poste à responsabiliser. Et c'est plus là l'inquiétude professionnelle. C'est-à-dire que je suis quelqu'un que je me projette beaucoup. Aujourd'hui, je sais que je suis toujours dans cette idée d'avoir un poste, d'avoir une équipe à manager. C'est un peu l'idée professionnelle qu'on te berce en tête. Aujourd'hui, je sais que je ne pourrais pas avoir ce rêve d'être manageuse ou d'être responsable. d'avoir en tout cas quelque chose en responsabilité parce que c'est trop. Et c'est ça en fait l'inquiétude professionnelle. Encore une fois, je suis très bien, le travail que je fais il est incroyable. Mais je sais que je ne pense pas en tout cas aujourd'hui que je pourrais évoluer, que je ne pense pas que ça sera possible au vu de l'handicap.

  • Speaker #0

    Et comment tu deals avec ces pensées-là ?

  • Speaker #1

    Ah c'est dur ! C'est du rien, beaucoup plus de côté négatif qu'en positif, qui en ressortent. Très positif, qui trouve toujours un moment de se relever, mais là, en ce moment, c'est pas facile. Et c'est aussi pour ça, tu vois, que j'ai annoncé le podcast, parce que je me suis dit, à la rigueur, j'ai mon projet à moi, qui me donne une raison d'avancer tout le temps, et que ça dépend que de moi.

  • Speaker #0

    Des fois, c'est... En tout cas, moi, c'est des questionnements que j'ai beaucoup, cette question du travail. C'est fou, comme des fois, peut-être qu'on n'arrive plus à s'impliquer dans un travail qui est salarié. et qu'on n'arrive pas à gravir les échelons comme on aurait souhaité le faire, mais qu'en effet, construire quelque chose qui est plus personnel, individuel, qui rassemble nos missions et valeurs à notre rythme, et bien des fois on peut avoir un rôle plus important dans cet espace-là parce que ça respecte les besoins et le rythme. En tout cas, moi c'est ce que j'expérimente avec l'association, pareil que toi, dans un travail salarié, moi aujourd'hui je ne rentre plus dans ces normes-là, malheureusement, mais heureusement, j'ai pu aussi créer des choses à côté. qui me stimule énormément et où j'ai des postes que je trouve intéressants, des postes entre guillemets, mais voilà, que je trouve chouette aussi.

  • Speaker #1

    En fait c'est exactement ça, c'est-à-dire que c'est toi qui le gères avec quelque chose d'adapté à ce que toi tu as. Et bien que ça reste quand même tabou les handicaps invisibles aujourd'hui en France, il y a énormément de progrès qui ont été faits sur les handicaps visibles, c'est une très bonne chose, mais ça reste encore un peu compliqué sur les handicaps invisibles. Il y a énormément d'entreprises qui vont adapter, mais... Tu vois, des détails comme l'oubli de certaines missions, ça va être facilement pointé du doigt, mais parce qu'on va te pointer du doigt toi et pas ton escape. Et ça c'est frustrant, tu vois, et parfois c'est pas ce dont tu as besoin.

  • Speaker #0

    Ouais, il y a encore vraiment une méconnaissance dans le domaine du travail autour de ça, et c'est bien dommage, parce que moi j'ai sorti les dernières statistiques, toi t'es en France, donc côté français, il y a une personne sur deux. qui vit avec une maladie chronique, donc c'est presque le synonyme d'invisible, qui est diagnostiqué par un médecin. Donc c'est énorme. Donc finalement, dans une entreprise, il y a 50% des gens qui vivent avec des symptômes qui ne se voient pas.

  • Speaker #1

    Mais c'est énorme, mais c'est énorme. Et c'est à la fois triste parce que, quand tu vois des gens qui ont peur d'en parler, c'est triste et c'est pour ça que des médias et des podcasts comme le tien sont importants parce que ça permet de lever le tableau. De lever le tabou sur des choses, en fait, c'est pas grave de dire des choses qui ne vont pas, parce que justement, en disant des choses qui ne vont pas, peut-être qu'il y a en face de nous quelqu'un qui sera prêt à avoir une certaine adaptabilité. Et dans mon cas, ça a été ça. C'est-à-dire que dès l'instant où j'ai communiqué mon handicap, mais le directeur a été juste incroyable. Et encore une fois, hier, j'ai eu un rendez-vous avec lui, il m'a dit « mais ça, ce qui est là, tu nous dis ce qu'il te faut et on te le fait, quoi. » Et c'est incroyable et je sais que ça se fera.

  • Speaker #0

    C'est vraiment un cadre bienveillant, mais ça n'a pas toujours été le cas pour toi. Tu m'as raconté deux expériences professionnelles que tu as eues précédemment et qui ont été vraiment compliquées. Et tu as notamment reçu une fois une phrase que j'ai trouvée absolument affreuse, où je ne sais plus si c'était ta boss ou une collègue qui disait « tu nous coûtes et on a besoin de voir des évolutions et des chiffres » . Comment est-ce que tu as vécu ces violences ?

  • Speaker #1

    Comme un échec. Comme un échec et c'était ma boss. C'était ma boss et c'était dur. C'était vraiment de la pire expérience, vraiment tellement ça m'a détruite. Mais ça a été une bonne expérience parce que malgré le fait que ça m'a détruit, ça m'a permis d'être plus forte et de ressortir plus forte, et de savoir ce que je voulais professionnellement et de ce que je ne voulais pas. Et en fait, c'était beaucoup d'harcèlement moral par rapport à ça, justement parce que j'étais en plein RQTH, j'étais en pleine reconnaissance, je faisais plein de choses. Et en fait, l'oubli était fréquent au travail, vu que je n'avais pas de traitement. À cette époque-là, l'oubli était fréquent. Donc du coup, j'avais des missions, il y avait des choses que je ne faisais pas. Et pourtant, elle était référente handicap dans l'entreprise, c'était ça le comble.

  • Speaker #0

    Oh mon Dieu !

  • Speaker #1

    Oui, oui, oui.

  • Speaker #0

    Les gens toxiques !

  • Speaker #1

    Et en fait, il n'y avait pas d'évolution, donc du coup, ce n'était pas intéressant pour eux d'investir sur moi. Et je me souviens qu'elle m'avait dit une autre phrase, et ça, c'était toujours le déclenchement. de ma rupture avec eux. Elle m'a dit, dans tous les cas, tu n'iras pas plus loin qu'assistante. Je me suis dit, waouh, ok, merci. Et c'est dur, oui.

  • Speaker #0

    Et dans cette période, tu m'as dit que tu ne souhaitais pas inquiéter tes parents. Et du coup, tu vivais vraiment, tu négociais avec toi-même avec des pensées très rudes. Tu me disais que tu en étais arrivée à t'arracher les cheveux de la tête. Comment tu as fait ? Comment t'as fait ? Est-ce qu'il y a quand même eu une personne ou une situation ou un contexte ressource à ce moment-là ?

  • Speaker #1

    Encore maintenant ? Je ne sais pas comment j'ai fait. En fait, c'est quand je suis partie de cette entreprise, il y a eu tout un mal-être qui s'est déclenché. Et en fait, les cheveux tombaient tellement j'étais mal. J'ai eu des actions de ganglions qui ronflaient parce que j'étais stressée, tellement j'étais mal. Et juste... Je me souviens, tu vois, il y a un jour, je voulais rien dire à mes parents. Parce que, comme tu l'as dit, je ne voulais pas les inquiéter. Puis, enfin, mes parents, et ce sont des parents, s'inquiètent très facilement. Et c'est tout à fait normal. C'est notre rôle. Et je pense que c'est plus mes amis, mes amis qui m'ont aidée. En fait, juste, je pleurais avec eux au téléphone. Et je n'ai juste pas lâché. Je pense qu'après, en dehors de ça, je dois dire beaucoup mes soeurs qui m'ont soutenue. qui m'ont qui m'ont motivée avec des mots que j'avais besoin d'entendre à la fois durant et que j'avais besoin d'entendre et qui m'ont permis de ne pas lâcher prise et d'accepter la maladie pendant toutes ces périodes. Et ça, c'est une erreur que j'ai faite. Enfin, ça, ce n'est pas une erreur, mais ça a été mon défaut. J'acceptais pas la maladie. Donc du coup, je prenais pas de traitement. Et c'est pour ça que cette expérience aussi a mal tourné. C'est-à-dire que j'étais encore en deuil de ma vie d'avant, alors qu'en soi, j'utilisais un manque en vie avec, mais que je voulais pas accepter que j'avais une faiblesse, alors qu'en fin de compte, c'est même pas une faiblesse, c'est une force.

  • Speaker #0

    Mais je crois que c'est des étapes qui nous concernent tous et toutes, en fait. Et c'est un long chemin de reconnaissance, d'acceptation ou de non-acceptation, mais tout ça est un long chemin. Et je pense qu'on peut avoir de la bienveillance envers cette part de toi qui avait de la difficulté à accepter.

  • Speaker #1

    Mais c'était dur. En fait, je le voyais parce que je tardais à faire ma RQTH. Je tardais sur plein de choses, mais sur plein de choses, parce que je ne voulais pas l'accepter, que j'étais malade. Et en fait, c'est une copine à moi qui, je pense que ça a été ce déclic, quand je pensais qu'en fait, jamais j'allais réussir dans la vie. Alors elle m'a dit que tu le veuilles ou non. Tu l'auras cette maladie avec toi. Elle sera avec toi jusqu'à ta vie, que tu le veuilles ou non. Donc apprends à vivre avec et apprends à l'accepter. Parce que que tu le veuilles ou non, elle sera là. Et cette phrase-là, tu vois, elle m'a percutée.

  • Speaker #0

    Merci à cette amie. Est-ce que tu as eu des professionnels qui ont pu être à l'écoute ? Est-ce que tu as fait des thérapies ou des espaces où tu as pu libérer la parole de ce que tu vis au travers de la maladie ?

  • Speaker #1

    Ma neurologue a toujours été très présente, mais justement, en fait, je me sentais seule. Je me sentais seule et il y a une association en France qui est incroyable et ça m'a aidée, mais beaucoup plus tard. Mais l'association qui m'a aidée, en fait, je communique beaucoup en anglais, j'ai beaucoup de correspondants. Et en fait, je ne sais pas pourquoi, un après-midi, je suis partie regarder en anglais la narcolepsie, tu vois. Et je suis tombée sur un groupe de parole. Et ce groupe de parole m'a aidée. Ce groupe de paroles m'a énormément aidée à aller de l'avant, m'a énormément aidée à accepter parce que je ne me sentais pas seule. Et c'était la première fois, en fait, si tu veux, il y avait deux visions. La vision où les personnes expliquaient la narcolepsie, ce que c'était, parce qu'en fait c'est un groupe de paroles sur différentes thématiques, c'est-à-dire la femme enceinte a la narcolepsie, mon enfant est atteint de narcolepsie. Il y a différentes thématiques et tu vois la positivité américaine. C'est pas grave, tu vas réussir, c'est une période. Et en fait, c'est ça que j'appréciais, c'est ça qui m'a rendu cette force. Et le premier groupe de paroles, c'était en visio à 1h du matin sur Zoom. J'étais en train de bégayer parce que j'étais en train de...

  • Speaker #0

    T'étais en train de, j'ai pas compris.

  • Speaker #1

    Pardon, j'étais un peu en train de bégayer parce que j'étais en train de parler en anglais, il fallait que je présente ma situation en anglais.

  • Speaker #0

    J'entends pas le mot que tu dis, t'étais en train de...

  • Speaker #1

    Bégayer. À bégayer. Pardon, pas qu'être. J'étais en train de bégayer justement parce que, ben, il fallait que je fasse ma présentation en anglais, que j'explique la maladie en anglais. Je ne connais pas les termes techniques, tu vois, de la maladie. Et en fait, quand je me suis présentée, il y a quelqu'un juste après qui a pris la parole et qui expliquait plus en détail comment elle, elle vivait la maladie. Et j'ai pleuré. J'ai pleuré, j'étais la seule dans le visio qui était en train de pleurer. Mais j'étais en train de pleurer parce que je me disais, waouh,

  • Speaker #0

    je ne suis pas folle. La résonance.

  • Speaker #1

    C'est un impact parce qu'il y a certains symptômes. En fait, tu te dis peut-être que je suis folle, c'est dans ma tête. Et je n'avais jamais, en l'espace de plus de dix ans, je n'avais jamais rencontré quelqu'un qui était dans ma situation. Jamais, jamais, jamais, jamais. En dehors de ma neurologue qui traite le sujet, à l'épée. pas, tu vois, elles pouvaient se refléter scientifiquement à moi, mais des personnes lambda, qui étaient comme moi, qui souffraient de difficultés professionnelles comme moi, je me suis dit, waouh !

  • Speaker #0

    Waouh ! Moi, je crois beaucoup à la force des groupes de paroles, j'en anime et j'en facilite. Alors, c'est un petit peu différent, j'ai l'impression que ce que toi, tu évoques, c'est vraiment des groupes où il y a de l'échange entre les gens, des discussions au sein des Invisibles, c'est vraiment des cercles de paroles où... J'amène les gens à venir déposer quelque chose sur l'instant, avec des maladies qui sont toutes différentes. Mais c'est jamais repris, ni discuté en fait, avec les autres. C'est une autre manière de faire, les deux sont absolument géniales. Mais j'aime bien aussi animer ce genre de cercle, parce qu'il y a cet aspect où, souvent on a l'habitude que les gens viennent rebondir sur ce qu'on dit, et ça peut des fois minimiser ce qu'on vit en réalité. Et puis là, c'est vraiment, on dépose et ça résonne, ça résonne chez tout le monde. Et c'est vraiment des espaces, et c'est là où je rejoins ce que tu vis dans le groupe de parole, où en fait, juste, ça résonne ce qu'on vit avec les autres, on réalise qu'on n'est pas seul, on réalise qu'on n'est pas fou, et on réalise qu'il y a d'autres personnes qui simplement vivent la même chose. Et quand on se sent dans un tel sentiment de solitude et d'isolement, tellement différent à part des autres, de la société, des gens de notre âge, ça n'a juste pas de prix.

  • Speaker #1

    C'est exactement ça. Et tu vois, tellement ça rapportait un bien-être en moi. Tu vois, j'étais prête à me réveiller tous les deux semaines à une heure du matin juste pour parler avec eux. On a un groupe sur Instagram où on parle et parfois, en fait, on lâche ce qu'on a sur le cœur parce qu'il n'y a que eux qui peuvent nous comprendre. Et tu parles avec quelqu'un qui sait. Et on a chacun la force de choisir les mots qu'on veut pour expliquer ce qu'on ressent. Et certains mots nous parlent. Et aujourd'hui, moi, c'est ça qui m'a touchée. Et je me suis reconnectée. Parce que du coup, d'un certain moment, quand j'ai appris, ça m'a énormément aidée quand j'ai appris à accepter la maladie grâce à eux. Et c'est d'ailleurs à eux que je rends honneur avec le podcast que j'ai créé. Quand je... Quand j'ai réussi à accepter, je me suis un peu... Elle m'a fait du groupe, c'est-à-dire que je ne me connectais pas en visio. J'ai arrêté parce que c'est quand même une heure du matin, le soir. Je ne sais plus ce que je voulais dire. Je suis désolée, justement.

  • Speaker #0

    Quand tu as commencé à accepter la maladie, tu as arrêté de te connecter. C'est ça.

  • Speaker #1

    J'ai arrêté de me connecter au visio, mais bien évidemment, je restais en contact avec eux par message. Et il y a quoi ? Trois mois, je me suis connectée. Ils étaient tellement heureux de me revoir. Et quand je leur ai dit que grâce à eux, j'ai réussi à aller de l'avant, il y avait des petites larmes qui ont coulé dans leurs yeux. Et tu vois, ce qui a été touchant, c'est qu'il y avait une nouvelle dans le groupe. Donc au moment où je me suis connectée, il y avait une nouvelle. Et en fait, pareil, elle a 21 ans, elle avait l'âge que j'avais quand je me suis connectée. Et elle était en larmes totales parce qu'elle en avait marre de la maladie. Elle ne comprenait pas et disait que je suis folle. Et tu vois, j'avais l'impression de me revoir. Et ce qui était beau, c'était que j'ai pu la conseiller comme j'aurais voulu qu'on conseille, comme eux m'ont conseillé. Encore une fois, tout ça est en anglais, mais j'ai pu trouver les mots pour la rassurer. Ça a été d'une gratification et d'une reconnaissance énorme.

  • Speaker #0

    Et dans cette posture que tu as pu avoir avec elle et dans le fait que... Tu projetais finalement la fille que tu as été à ce moment-là quand tu es rentrée dans ce groupe. Moi j'aimerais te demander si tu pouvais parler à l'enfant que tu étais avec déjà ces symptômes, celle qui s'endormait sans comprendre pourquoi et qui vivait vraiment avec des symptômes extrêmement invalidants. Tu m'as aussi dit qu'à certains moments pendant le lycée, tu avais des camarades de classe qui te réveillaient alors que tu t'endormais, c'est une violence inouïe. Qu'est-ce que toi tu lui dirais à cet enfant aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Il va se faire un bon coup pour ne pas pleurer. ça va aller je dirais que ça va aller et que je suis bien plus forte que ce que je pense il

  • Speaker #0

    y a de l'émotion là chez moi aussi beaucoup c'est la fatigue du coup ça aide pas Je vais arriver sur mes deux questions de fin. Ausha, est-ce que toi, tu as envie de déposer quelque chose avant ?

  • Speaker #1

    Désolée. Attends, je veux moucher. C'est bon. C'est bon, c'est bon. Excuse-moi, est-ce que tu peux reposer ta question, s'il te plaît ?

  • Speaker #0

    Oui, je vais arriver sur les deux dernières questions de fin. Est-ce que tu aurais envie de déposer quelque chose avant ?

  • Speaker #1

    Parlez-en. Attends, parce que j'ai encore des émotions. Parlez-en. Parce que ça en vaut la peine. Parce que bien que vous allez avoir quelqu'un qui va se moquer de vous, un jour ou l'autre, vous allez tomber sur une personne qui va vous donner l'envie de changer les choses. Donc parlez-en. Voilà.

  • Speaker #0

    Du coup, je vais te poser la dernière question. Quel super pouvoir la maladie invisible t'a apporté ?

  • Speaker #1

    Super pouvoir ? Super pouvoir, waouh ! La patience, parce que pour moi la patience, tout le monde n'en a pas. Et je dirais la patience c'est... Non, je retire ce que je dis. La positivité. Que même dans les épreuves les plus dures, il y a un brin de lumière et qu'il faut savoir le voir. En fait, il y a tellement de choses. Il y a tellement de choses, si je devrais en choisir plusieurs, en toute transparence, ce serait la patience, le pouvoir et la force. Vraiment la force. La force et la positivité. D'aller de l'avant et de jamais lâcher quoi. Jamais lâcher, continuer. Parce que bien qu'on peut penser qu'à notre hauteur, en tant que simplement, on ne peut rien changer, on peut changer les choses. Et c'est très thérapeutique ton podcast.

  • Speaker #0

    Du coup, oui, on peut changer les choses.

  • Speaker #1

    Il suffit d'en parler et... et que rien n'est fini, c'est-à-dire que ce n'est pas une fatalité d'être malade. Je l'ai souvent cru, et je suis longtemps passée par cette épreuve que je ne ferai jamais rien de ma vie, que je resterai dans mon lit à dormir et à ne jamais rien faire, et qu'en fait, quand il fallait en finir, quoi, et c'est pas une fatalité, au contraire, c'est le début de l'histoire de la vie, parce que c'est ça qui va nous rendre fortes.

  • Speaker #0

    Et dans ce moment d'émotion, j'ai aussi oublié une partie, c'est que je t'ai posé la dernière question sans te poser la précédente. C'est si tu avais un message à faire passer à l'entourage des personnes qui vivent avec la narcolepsie ou en tout cas avec des troubles du sommeil, qu'est-ce que tu leur dirais ?

  • Speaker #1

    Alors, je dirais deux choses. dans un premier temps euh euh Faites attention à votre entourage parce que ça c'est quelque chose que moi j'utilise toujours. Trop dormir ce n'est pas normal et pas assez dormir ce n'est pas normal. En dehors de personnes qui dorment trop, il y a aussi des personnes qui ne dorment pas assez. Et qu'en dehors du trouble, en dehors de la maladie, il y a peut-être quelque chose de plus profond qui les empêche de dormir. Et dans l'inverse, quelque chose de plus profond qui les rend à dormir toujours. Donc je dirais faites attention, faites attention à votre entourage. Posez-leur les bonnes questions. faites en sorte qu'ils soient un petit recueil où ils peuvent se sentir en sécurité pour être un peu, je dirais, cette troisième épaule sur laquelle on peut se reposer. Parce qu'aujourd'hui, c'est une charge énorme pour nous la maladie. Et quand tu as un entourage incroyable, ou juste une simple personne qui peut t'aider, ça fait la différence. Donc, je dirais plus, prenez le temps de les écouter. Et prenez le temps d'être cette troisième école, cette troisième... sur laquelle on peut faire notre sieste, se reposer.

  • Speaker #0

    Merci pour tes mots, Sohéla.

  • Speaker #1

    Merci à toi pour donner l'opportunité aux personnes d'entendre leur voix et de lever le tabou sur quelque chose qui est encore extrêmement tabou en 2025. Et encore une fois, bravo pour ce que tu fais. Parce que c'est juste incroyable de donner cette opportunité de raconter son histoire dans une onde de positivité, parce que la fin est belle au final.

  • Speaker #0

    Où est-ce qu'on peut retrouver ton podcast, le récit des assoupis ?

  • Speaker #1

    Alors, il est sur toutes les plateformes de podcast, Spotify, Deezer, Apple Podcast. On est aussi sur les réseaux sociaux, où parfois on essaie un peu de communiquer sur différents sujets. Tout le monde est le bienvenu, toute personne atteinte de troubles, même de maladies qui ne sont pas encore connues mais qui ont tous les symptômes, comme j'ai pu avoir été dans cette situation. C'est un peu la safe place to be autour du sommeil. C'est un peu bizarre mais bon, du coup c'est un peu la safe place to be. Donc voilà, n'hésitez pas, si vous avez quelqu'un, même si les personnes n'ont pas envie de parler, juste écoutez pour se sentir moins seul. Ça aide, honnêtement ça aide.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup.

  • Speaker #1

    Merci à toi Tamara.

  • Speaker #0

    Merci de soutenir ce podcast en vous abonnant pour ne manquer aucun épisode et en lui donnant 5 étoiles sur vos plateformes d'écoute préférées. Rencontrez mes invités et découvrez tous les engagements de la communauté Les Invisibles sur le compte Instagram Les Invisibles Podcast. Ensemble, continuons à visibiliser l'invisible.

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Description

Alors qu’elle n’a que 8 ans, Soheila commence à recevoir des signaux de fatigue extrême après un voyage en famille.

Très vite, son corps lui impose un autre rythme : elle s’endort en pleine journée, parfois même en classe. 👩🏼‍🏫

Enfant, elle vit déjà à contre-courant du monde : ses nuits, elle les passe éveillée ; ses journées, elle s’écroule de fatigue. 😴


S’ensuit un long parcours fait d’incompréhensions et de minimisations. On parle d’« hypersomnie adolescente », sans chercher plus loin. Pendant des années, elle se bat avec ses parents pour être entendue, comprise, et enfin diagnostiquée.


Dix ans plus tard, une ponction lombaire révèle enfin la vérité : Soheila est atteinte de narcolepsie de type 1, une maladie du sommeil incurable qui s’accompagne d’épisodes soudains où le corps s’effondre alors que l’esprit reste parfaitement éveillé.


Refusant d’abord cette réalité, Soheila finira, une nuit, par rejoindre un groupe de parole en ligne, aux États-Unis. 🇺🇸 C’est là qu’elle découvre, pour la première fois, des récits qui résonnent et un soutien inconditionnel. Deux choses qui lui étaient jusque-là inconnues.


Le domaine du travail reste aujourd’hui un défi constant : elle doit composer avec une mémoire, une concentration et une efficience différentes de celles d’une personne non malade - un équilibre précaire qu’elle affronte chaque jour.

Aujourd’hui, Soheila s’engage pour déconstruire les clichés et l’incompréhension qui entourent la narcolepsie et les troubles du sommeil.


𝗧𝘂 𝘃𝗲𝘂𝘅 𝘀𝗼𝘂𝘁𝗲𝗻𝗶𝗿 𝗻𝗼𝘁𝗿𝗲 𝗽𝗼𝗱𝗰𝗮𝘀𝘁 ? Abonne-toi à cette chaîne, mets-lui 5 étoiles et partage cet épisode ! Tous les épisodes de notre podcast Les Invisibles sont aussi disponibles sur Youtube : https://www.youtube.com/@les_invisibles_podcast 🎧


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Transcription

  • Speaker #0

    Enfin, tu vois, ça t'impacte parce qu'il y a certains symptômes. En fait, tu te dis peut-être que je suis folle, c'est dans ma tête. Et j'avais jamais, en l'espace de plus de dix ans, j'avais jamais rencontré quelqu'un qui était dans ma situation. Jamais, jamais, jamais, jamais. En dehors de ma neurologue qui traite le sujet, elle ne l'est pas, tu vois. Elle pouvait se refléter scientifiquement à moi, mais des personnes lambda qui étaient comme moi, qui souffraient de difficultés. professionnels comme moi, je me suis dit waouh.

  • Speaker #1

    Les Invisibles Juin 2020 Ma vie bascule du jour au lendemain dans une maladie neurologique rare, qui n'a de poétique que le nom. Le syndrome du mal de débarquement. Les symptômes qu'elle m'amène vivent en colocation avec moi. 7 jours sur 7. 24 heures sur 24, et ne prennent jamais leur week-end. Je n'ai donc pas la place pour un autre combat. Du moins, c'est ce que je crois. Puis vient ce jour où je témoigne dans une émission télé. dans l'espoir de rendre visible l'invisibilité du syndrome dont je suis atteinte. À peine sortie du plateau, forte de cette expérience et encore dans mes talons rouges, une évidence s'installe. Je n'en resterai pas là. Dans le train du retour, je rejoins à la fois ma maison et mon nouveau combat. Offrir un espace de parole au travers d'un podcast, aux personnes qui composent, bien souvent en silence, avec des maladies invisibles et avec les regards de sociétés qui ne croient que ce qu'elles voient, deux réalités plus souvent subies que choisies. Aujourd'hui, loin de mes talons rouges et au plus proche de l'engagement, l'évidence s'étend. C'est à l'invisible au pluriel que je vous invite. Ceux qui dans la chair, l'esprit et les sociétés se vit, sans pour autant faire de bruit. Si comme le dit Antoine de Saint-Exupéry, l'essentiel est invisible pour les yeux, ici, on compte bien le faire entendre. Bonne écoute ! Hello Sohila !

  • Speaker #0

    Hello Tamara !

  • Speaker #1

    Aujourd'hui, j'ai la joie et l'honneur de te recevoir. Tu as 23 ans et tu vis avec la narcolepsie, une maladie neurologique encore largement méconnue, souvent réduite à une image caricaturale, il faut le dire. Quelqu'un qui s'endort n'importe quand, n'importe où, ou même qui aurait la flemme de se réveiller. Mais ce que tu vis, c'est bien, bien plus complexe, et c'est ce qu'on va voir aujourd'hui. Depuis tes 8 ans, ton corps a commencé à envoyer des signaux de fatigue extrême. À 13 ans... tes parents commencent à s'inquiéter et t'emmènent consulter dans un centre du sommeil. On te diagnostique à tort une hypersomnie adolescente. S'en suivent des traitements mal adaptés, des effets secondaires terribles, des pensées noires, des années sans réel suivi. Et une errance médicale qui va durer presque 10 ans. C'est seulement à tes 17 ans, après une ponction lombaire, que le diagnostic de narcolepsie type 1 tombe. Une maladie incurable qui s'accompagne chez toi de cataplexie. cette perte soudaine du tonus musculaire qui fait tomber le corps alors que l'esprit, lui, y reste parfaitement conscient. Malgré ça, tu tiens, malgré ça, tu trouves un traitement qui te convient, une neurologue qui t'écoute enfin, un groupe de paroles aux Etats-Unis que tu rejoins en te réveillant à minuit. Et aujourd'hui, tu as lancé ton podcast, le récit des assoupis, pour parler du sommeil et de ses troubles, pour déconstruire les préjugés, pour faire entendre ce que les corps fatigués... On a dire. Alors Sohéla, avant de démarrer, comment est-ce que tu vas aujourd'hui ?

  • Speaker #0

    J'ai connu des jours meilleurs, en toute transparence. En ce moment à l'heure à laquelle on parle, il fait très très chaud, donc je ne dors pas. Du coup, je suis très très très fatiguée, bien plus qu'à une autre période de l'année, plus d'autres interrogations professionnelles, donc j'ai des jours meilleurs, mais bon. On garde la tête haute. Et toi, comment vas-tu ?

  • Speaker #1

    C'est un peu compliqué dans mon corps ces jours. On est le 2 juillet 2025, il fait une chaleur assez mondiale, assez intense. J'ai eu mes règles qui m'ont mis vraiment dans une humeur très, très, très ronchonne. J'ai très mal au cervical. Je ne me sens vraiment pas au top, mais je suis heureuse d'être là. C'est toujours un moment que j'adore partager.

  • Speaker #0

    Et moi aussi, je suis heureuse d'être avec toi. En tout cas, merci beaucoup encore une fois Tamara.

  • Speaker #1

    Alors, Célia, si tu devais raconter la première fois où tu t'es dit « il y a un truc qui cloche » , ce serait quand et qu'est-ce que tu ressentais petite déjà ?

  • Speaker #0

    Les premiers symptômes, comme tu l'as si bien expliqué, ont commencé à 8 ans. À 8 ans, tu ne connais pas trop la vie, tu n'es pas trop jeune, tu as un enfant. Donc, je dirais plus que j'ai grandi avec cet instinct que quelque chose n'allait pas, mais dans cette incertitude. La seule chose dont je me souviens, c'était qu'il y avait cette fatigue qui n'était pas normale, et que surtout que je comparais avec les jeunes de ma classe à cette époque, et je me disais, ouais, il y a quelque chose qui ne va pas. constamment grandi avec ça sans avoir de réelles réponses. Donc c'était plus une angoisse, tu sais, quand t'es jeune, de dire pourquoi je suis pas normale et les autres le sont.

  • Speaker #1

    C'est quoi qui te faisait sentir pas normale ?

  • Speaker #0

    Ces moments où tu rentres de l'école, tu dors. Tu dors et quand tu es avec tes camarades de classe, tu... Je parle avec eux, ils font des activités. Sauf que moi, je n'avais aucune force de faire une activité. Ou quand je suis à l'école et que j'ai un moment de somnolence et qu'on me crie dessus parce qu'on pense peut-être que je ne dors pas la nuit. Enfin, tu vois, c'est ces petites actions qui, en fait, avec du recul, me faisaient me sentir pas normale. Et il y avait des moments où juste, je me souviens à nombre de fois, Je pleurais parce que je voyais les autres de mon âge faire plein de choses, avoir cette énergie, avoir ce dynamisme qu'on a quand on est petit, que moi je n'avais pas.

  • Speaker #1

    Et là, ça a commencé à 8 ans déjà, tu disais, ces premiers ressentis ?

  • Speaker #0

    C'est ça, les premiers ressentis ont commencé lors d'un voyage familial. En fait, je ne faisais que dormir. Donc c'est dire que la journée, je ne faisais que dormir. La nuit je me réveillais et en fait je voyais tout le monde en train de dormir. Je me dis mais tiens j'ai regardé quelque chose. Les autres faisaient des activités sans moi parce que justement ils me disaient on te voit dormir, on ne veut pas te réveiller. Et moi je me souviens, et même mon père me le raconte encore aujourd'hui, je me réveillais en pleurs parce qu'ils étaient partis sans moi. Mais moi en fait je dormais et la nuit je me réveillais et j'attendais que les autres se réveillent le lendemain. Ça a commencé très très jeune et en fait quand je suis revenue de ce voyage, ça s'est empiré. Et en fait, on est resté quelques années sans réellement comprendre et peut-être se dire que à cette époque, j'étais en carence de fer et j'ai toujours été en carence de fer. Et en fait, à cette époque-là, c'était beaucoup plus important et on mettait le dos sur la carence en fer. Sauf qu'en fait, après avoir pris tous les traitements possibles pour avoir cette carence qui disparaît, la fatigue était toujours autant présente.

  • Speaker #1

    Moi, ça me touche beaucoup ce que tu racontes, probablement aussi parce qu'aujourd'hui, je suis maman et que tout d'un coup, si je fais une sorte de projection sur ma fille, ce n'est pas forcément intelligent de le faire, mais il y a vraiment quelque chose qui vient me toucher dans le fait aussi qu'en tant que parent, ça peut être difficile de voir son enfant rentrer de l'école, aller se coucher. ne pas pouvoir participer aux activités. Je pense qu'il y a quelque chose qui doit être assez douloureux aussi de sentir ce décalage entre son enfant et les autres, ou même comparativement aux autres enfants qu'on a soi-même, parce que je crois que tu viens d'une grande famille, vous êtes cinq frères et sœurs si je ne me trompe pas.

  • Speaker #0

    C'est exactement ça, c'est exactement ça. Tu as réellement tout. Je suis la petite dernière, donc en plus de ça, il y a de quoi faire la comparaison facile, même si encore une fois, chaque enfant est différent. On est très dynamique. Mes frères et sœurs ont toujours fait plein de choses après l'école. Et en fin de compte, il y a moi. Justement, comme mes frères et sœurs ont toujours été actifs, il y a moi, quoi qu'il fasse dormir.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'ils ont mis du temps à identifier, eux aussi, que quelque chose était un petit peu « anormal » ? Pour eux, c'était simplement, voilà, t'étais une enfant qui dormait plus que les autres, qui avait un peu un décalage au niveau du sommeil. Comment ça s'est passé pour eux ? Tu saurais dire un peu ?

  • Speaker #0

    On a souvent cette discussion avec mon père, justement. Au début, il n'y avait pas trop d'inquiétude parce que justement, mon médecin traitant de l'époque disait que c'était à cause de ma carence en fer. Donc voilà, tu vois, naïvement, tout parent, il n'a pas la science qu'un médecin a, donc il va écouter le médecin. Et il y avait des moments, et c'est vraiment où je te parle, là en année, où en fait, mes parents se sont inquiétés parce que... Quand je suis entrée notamment au collège, ça a été un peu l'élément déclencheur. Je pense que la puberté a eu un impact où c'était pire. Je retrouve des copies, j'écris, mais tu vois que mon écriture s'estompe parce que je dors pendant que j'écris. Mon collège était juste à côté de chez moi. Et je rentrais le midi pour manger. Et en fait, ce temps de pause, je ne le consacrais pas pour manger, mais pour dormir. Et il y avait des moments où j'étais fatiguée. Et un jour, et c'est là qu'il a déclenché ce questionnement, je me suis réveillée en retard pour reprendre l'école. Mon père m'a réveillée, mon père m'a dit, il faut faire quelque chose, t'es jamais en retard, ça ne t'arrive jamais, il y a quelque chose qui ne va pas. Et de là, justement, de là... L'intention d'avoir quelqu'un, de voir un neurologue s'est déclenchée.

  • Speaker #1

    Et alors, qu'est-ce qui s'est passé dans cette première consultation ?

  • Speaker #0

    Déjà, je ne savais pas, je n'en ai pas des bons souvenirs en toute transparence. C'est des souvenirs assez particuliers que j'ai. Alors, en fait, les diagnostics, c'était un neurologue qui était en retraite. A chaque fois, comme je le dis, je n'étais pas le cas le plus waouh de sa carrière, je pense. Et en fait, c'était, oh, ne vous inquiétez pas, on est sur une hypersomnie de l'adolescence, votre fille est en plein dedans, ne vous inquiétez pas. Mais si on peut vous rassurer, elle vous fera des examens de sommeil. Donc, chose qui a été faite, c'était une cata. C'était en plein juillet, je crois, c'était en 2014. Et je crois qu'on se souvient tous de cet été où il a fait extrêmement chaud, et encore plus nous, à Amiens. Et en fait, les examens du sommeil n'étaient pas... En fait, à cette époque, il n'y avait pas de centre de sommeil au CHU d'Amiens. Le CHU était vraiment en déménagement, donc du coup, il n'y avait pas du tout officiellement de centre de sommeil. Et en fait, pour la petite anecdote, tous les CHU n'ont pas de centre de sommeil. C'est-à-dire qu'il faut avoir une habilitation. Pour être habilité centre de sommeil, être reconnu centre de sommeil, c'est toute une démarche. Donc à Amiens, à cette époque-là, on n'en avait pas. et le neurologue Elle a fait juste un petit test normal et en fait, du bras, votre fille va bien, jusqu'à là, une petite hypersomnie de l'adolescence. Et en fait, de là, à chaque fois que je me plaignais de certains symptômes que j'avais, je n'étais pas écoutée. Ou on me pointait du doigt, m'est arrêtée. Donc en fait, si tu vois, au tout début, on a donné des médicaments qui étaient des équivalents de ce que je prends aujourd'hui, qu'on ne pouvait pas directement donner parce qu'il n'y avait pas de diagnostic officiellement posé. et en fait c'est c'était des médicaments à une enfant de 13 ans que tu donnes, mais qui sont forts, qui sont forts pour le cœur et même de manière générale pour la santé mentale. Et là, en fait, je voyais que j'avais été crise d'angoisse, parce que c'était à l'époque où je me voyais juste avoir une difficulté de respirer. Je faisais crise d'angoisse sur crise d'angoisse, et à chaque effet secondaire qui était très conséquent, quand j'en parlais, on me pointait du doigt. Et on me disait, c'est votre faute, arrêtez vos médicaments, arrêtez de faire ci, arrêtez de faire ça. Et tu vois, je suis une enfant de 13 ans à cette époque, et tu ne peux pas reprocher à une adolescente de 13 ans tout ça alors qu'elle ne s'y connaît pas. Et de là, j'ai arrêté de prendre les médicaments et j'ai subi la maladie toute ma scolarité au collège et au lycée.

  • Speaker #1

    Et tu disais que tu évoquais d'autres symptômes. Quels étaient les autres symptômes qui vont avec cette maladie, ou en tout cas pour toi ?

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, l'idée qu'on a de la narcolepsie est très caricaturée. Aujourd'hui, quand tu dis à quelqu'un que tu as atteint de narcolepsie, on va facilement dire « Ah, tu dors tout le temps ? C'est trop bien ! » Et c'est vraiment le retour qu'on a. Vraiment, toutes les personnes atteintes de la narcolepsie, c'est ce qu'on a comme retour. Et en fait, dans mon cas, et de manière générale pour la narcolepsie, la narcolepsie, scientifiquement, on l'explique. Aujourd'hui, quelqu'un de normal a un liquide qui tourne dans son cerveau, qui lui permet de savoir quand il doit se réveiller, quand il doit être endormi. Moi aujourd'hui, ce liquide, je ne l'ai plus. d'une manière ou d'une autre, mon corps a arrêté de fonctionner. Donc le symptôme principal, ça va être l'insomnie de la nuit, c'est-à-dire que je ne dors pas la nuit. Et je dors la journée, c'est vraiment tout un dérèglement causé par ce manque de liquide. Et donc l'un des premiers symptômes, c'est le réveil nocturne, littéralement. C'est-à-dire que je ne sais plus ce que ça fait de dormir 8h dans la nuit. Je n'ai jamais dormi 8h dans une nuit. Ensuite, il y a la somnolence dure, donc la somnolence dans la journée. C'est-à-dire que je ne peux pas rester dans une atmosphère sans avoir un moment de somnolence. C'est-à-dire que par exemple, si je suis trop concentrée sur quelque chose, que l'ambiance est tamisée et qu'il n'y a pas de bruit autour, alors là, ça y est, c'est foutu, je vais dormir. Il va y avoir les problèmes de concentration. Ça, c'est très très dur. Aujourd'hui, je prends des médicaments qui m'aident, mais les problèmes de concentration, les troubles de concentration sont assez présents. En tout cas, dans mon cas et dans certains cas d'autres personnes atteintes d'arcolepsie, les troubles cognitifs, c'est-à-dire que je vais oublier plein de choses. Même je peux parler et à tout moment lors de cette interview, je peux oublier un mot parce que c'est justement un des symptômes de la maladie, c'est l'oubli. L'oubli de choses du quotidien, des mots, de plein de choses. Et là aujourd'hui, c'est les symptômes en tout cas conséquents et après la cataplexie qui est aussi présente. Oui, bien sûr. Alors, il existe deux types de cataplexie. En fait, si tu veux, de manière générale, la narcolepsie existe sous deux types. Le type 1 avec la cataplexie et le type 2 sans cataplexie. Le plus courant, c'est le type 1. Et le type 1 avec cataplexie, c'est ce que j'ai. Elle ne se guérit pas, ce n'est pas une maladie que tu peux guérir, tu vis avec, c'est tout. et en fait la cataplexie c'est Des moments où en fait, lors d'émotions fortes ou lors de situations où tu es vraiment juste extrêmement fatigué, tes muscles vont lâcher. Ça peut être n'importe quel muscle. Ça peut être de ton visage, ça peut être ton bras, ça peut être vraiment n'importe quel muscle. Certaines personnes l'ont entièrement, c'est-à-dire que c'est tout leur corps, tous les muscles qui vont lâcher. Ou d'autres personnes, ils vont avoir quelques parties du corps, quelques muscles. Et c'est là, à ce moment-là, qu'on appelle une cataplexie partielle. Dans mon cas, ça va être une cataplexie partielle. Quand je suis extrêmement fatiguée comme en ce moment, mes genoux lâchent. Je ne peux littéralement plus tenir debout. Quand je suis en fourrière, vraiment en gros fourrière, mes bras et mes mains. C'est pas explicable, c'est vraiment soudain et ça dure vraiment très peu de secondes, quelques secondes, mais c'est suffisamment brusque pour te mettre un peu mal à l'aise. Juste après.

  • Speaker #1

    Parce que ces muscles qui lâchent, est-ce que ça se voit de l'extérieur ou c'est qu'un ressenti à l'intérieur ?

  • Speaker #0

    C'est un ressenti et ça se voit aussi. Dans le cas où c'est tout le corps, ça se voit. La personne tombe. Et dans le cas où justement la personne tombe, si tu es en extérieur, les gens peuvent penser que tu fais un malaise alors que tu es entièrement conscient. Pendant que tu tombes, pendant que tes muscles lâchent, tu es entièrement consciente.

  • Speaker #1

    Et toi-même, tu es déjà tombée, non ?

  • Speaker #0

    Je ne crois pas. Je ne crois pas. Je sais que j'ai eu des moments où ça aurait pu être dangereux. Notamment un moment où je n'avais plus de médicaments. Parce qu'aujourd'hui, c'est les médicaments qui me permettent d'avoir une vie un peu plus normale. Même si techniquement, il n'y a pas de normalité. En fait, je n'avais plus de médicaments et j'étais dans une période où j'étais extrêmement fatiguée parce que j'avais une charge de travail assez importante. Et en fait, je n'avais pas pensé à prendre un médicament. Et tu vois, c'est un cercle vicieux où tu es. exténué, tu ne peux pas aller chercher tes médicaments mais sans tes médicaments tu es encore plus fatigué. Et en fait j'étais en ville et puis je sentais que ça flanchait et en fait j'ai dû me positionner, me mettre, le mot je ne l'ai pas, mais me prendre un appui, avoir un appui pour ne pas tomber parce que sinon je tombais devant tout le monde.

  • Speaker #1

    Et on parlait tout à l'heure du coup vraiment de cette enfance où ça a été très difficile pour toi, cette préadolescence, cette adolescence aussi. Mais un jour quand même, à 17 ans, t'as enfin un mot officiel sur ce qui se passe. Comment c'est vécu ? Qui c'est qui t'a accompagné à ce moment-là ?

  • Speaker #0

    C'était encore ce fameux neurologue. En fait, à un moment donné, ma mère a tapé du poing. Et ma mère a dit, écoutez, il n'y a rien qui fonctionne, on a tout essayé, les médicaments ne fonctionnent pas pour ma fille. Elle arrive à des situations où elle a des pensées qui ne sont pas du tout positives. Il y a quelque chose qui ne va pas. Puis lui, il s'est dit, écoutez, il y a quelque chose qui existe. Si vous voulez savoir si votre fille a la narcolepsie ou pas, même si moi je pense que c'est trop tôt. pour dire qu'elle a une narcolepsie, alors qu'aujourd'hui techniquement un enfant de 5 ans peut diagnostiquer une narcoleptique. Et en fait il explique que c'est la fameuse ponction lombaire. Et voilà, je ne savais pas ce que c'était la ponction lombaire à cette époque, donc on m'explique. Tu vois, à cette époque c'est ma mère qui a pris la décision, et vraiment je la remercie, parce que même si ce n'est pas une expérience très agréable, Ça m'a permis d'avoir des réponses. Mais même ça, pour te dire, ça n'a pas permis d'accélérer le dossier. Donc du coup, on a programmé la peau de Solambert. Et en fait, toute contente, je me dis, ça y est, il va enfin avoir un mot sur ce que j'ai. Surtout qu'à l'époque, je passais le bac de français. Quand il y avait la réforme, l'ancienne réforme. Et en fait, si tu veux, pour le brevet, je n'ai pas pu avoir de tiers temps. parce que il n'y avait pas de diagnostic posé. Donc du coup, ma demande de tiers temps pour le brevet a été refusée. Et je voulais à tout prix passer mon bac littéraire. Mon objectif, quand j'étais au lycée, c'était d'avoir un bac L. Et je me suis dit, je veux que mon tiers temps soit accepté parce que je ne veux pas ne pas avoir de tiers temps si je m'endors. Et je sais que je dois m'endormir parce que je n'ai pas de traitement. Et donc du coup, quand la fonction Lambert est terminée et qu'il me reçoit dans son bureau, il me dit... Ben écoutez, ça y est, c'est bon, tout s'est bien passé. Par contre, pour les résultats, il faudra attendre un an.

  • Speaker #1

    Oh mon Dieu ! Un an ! Mais c'est pas possible !

  • Speaker #0

    Un an ! Et je me dis, mais attendez, comment c'est possible ? Je me dis, ben, parce qu'en fait, le liquide qui a été retiré lors de cet examen va à Lyon. Et en fait, il faut attendre qu'il y ait un certain nombre de personnes qui fassent cette fonction d'homébère, qui est ce prélèvement, pour déclencher, vu que c'est des maladies rares, on est sur des fonds privés. Donc du coup, il faut avoir un certain quota pour déclencher les analyses. Donc du coup, il faut attendre un an. Et je me souviens, c'était en novembre. Je me suis dit non, ce n'est pas possible. Je me souviens, je suis rentrée chez moi. Je me suis effondrée, je me suis dit mais je ne vais jamais m'en sortir. Et sur un coup de tête, vu que je ne dors pas la nuit, pas au milieu de la nuit, je me suis retrouvée, j'étais en train de faire des recherches, comment accélérer les dossiers, comment m'adresser à telle personne pour avoir une accélération de dossier. J'étais dans un état d'esprit. Encore aujourd'hui, je me dis mais comment j'ai pensé à ça ? Je me suis retrouvée à envoyer une lettre au ministère de la Santé. J'explique ma situation, je t'explique tout, dans l'espoir d'eux et... en février, donc tout ça se fait en novembre et en février, je reçois une lettre disant que mon cas a été étudié et que du coup, ils allaient faire le nécessaire. Tu vois, je crois que c'était Alice Buzyn à l'époque, la ministère de la Santé. Donc voilà, je vois la lettre et tout. Au début, ma mère a dit mais qu'est-ce qui s'est passé ? Pourquoi t'as une lettre du ministère ? Et je me disais, oh waouh ! Et donc du coup, ça avait fonctionné et une semaine après, j'ai un rendez-vous avec mon neurologue. Et là, dans le bureau, il me dit « Mais écoutez, je ne comprends pas. Ça arrive rarement qu'on ait des personnes qui ont un diagnostic, qui ont le résultat si rapidement. Écoutez, je suis très contente, mais c'est assez impressionnant. Je ne lui avais pas dit que j'avais fait une lettre. Et tu vois, j'étais en mode « Waouh ! » C'est impressionnant. Enfin, tu sais, c'est « Waouh ! » Donc du coup, ça a pu poser le diagnostic. « Vos résultats sont évidents. Vous êtes atteint de narcolepsie. » Soulagement. Mais il me dit... écoutez, on ne peut pas vous basculer maintenant dans le service du sommeil qu'on a au CHU d'Amiens. Donc, il faudra attendre vos 18 ans. Mais le diagnostic, les résultats vont vous permettre de faire votre demande de tiers temps. Donc, du coup, ma demande de tiers temps est acceptée. C'est un soulagement pour moi.

  • Speaker #1

    Ah ouais, j'entends. Et waouh d'avoir trouvé cette force, cette énergie de faire avancer ta cause. Vraiment, c'est ça.

  • Speaker #0

    C'est ça parce que tu vois, je me dis, il y a d'autres personnes, enfin aujourd'hui c'est comme ça que je réfléchis, à cette époque-là je suis sûre que je réfléchissais pas comme ça, mais je me dis, il y a d'autres personnes qui ont des situations beaucoup plus importantes que moi, et c'est malheureux parce que c'est une maladie rare. Ce sont encore une fois des fonds privés, que en fait tout dépend de ça. Et c'est malheureux parce que du coup, il y a une dépendance énorme.

  • Speaker #1

    Et à tes 18 ans alors, la prise en charge, est-ce qu'elle change ? Est-ce que déjà, il y a simplement une prise en charge ?

  • Speaker #0

    Il y a un transfert. Il y a un transfert de service qui me dit, écoutez, on va vous transférer. Je vais transférer votre dossier à ma consoeur. Il me semble que c'est comme ça qu'on dit. À ma consoeur pour qu'elle reprenne vos dossiers. en fait... C'est cette femme-là qui me suit encore aujourd'hui et qui est incroyable, et qui en fait quand elle me reçoit, elle me dit « Mais écoutez, c'est évident, vous êtes narcoductique, je ne comprends même pas pourquoi ils ne vous ont pas transféré dès le début dans ce service. » Et donc du coup la prise en charge a été incroyable. On a dû refaire par question de procédure les examens, et là c'était vraiment les vrais examens du sommeil où j'étais... J'étais vraiment pendant deux nuits, branchée de partout, on t'observe et voilà, le dossier a été fait, la prise en charge a été faite. Et les médicaments, les vrais médicaments que tu donnes aujourd'hui à quelqu'un atteint d'anarcholepsie ont été prescrits.

  • Speaker #1

    Et alors les médicaments, quels effets ont eu sur les symptômes ?

  • Speaker #0

    Quand j'ai intégré justement ce service, honnêtement je crois que j'en ai essayé... trois médicaments avant de vraiment trouver celui qui me correspond. Mais encore une fois, par procédure, elle voulait essayer les médicaments que j'avais. Mais c'était vraiment les médicaments que tu donnes à quelqu'un d'un arc-en-épsi. Et les effets, en fait, c'est déjà crise d'angoisse. Tu as l'anxiété plus que tu as, l'irritabilité. Tu ne manges plus, tu coupes faim. Mais radical, c'est-à-dire un espace de jour où je ne mangeais plus. En fait, c'est un sacrifice parce que tu es angoissé et du coup, tu n'as pas faim. Et l'effet qui m'a terrifiée littéralement, en dehors des pensées négatives, c'était l'effet que ça avait sur moi, c'est-à-dire que je ne voyais plus en fin de journée. C'est-à-dire qu'en fait, tu te retrouves en fin de journée avec une barre et tu ne vois plus. Tu ne vois littéralement plus. En fait, ta main, elle est devant toi, tu la vois floue. Et ça, c'est vraiment l'effet désirable qui m'a fait peur. Et tu vois, là, tu vis ta vie au quotidien, tu es en cours et tu as une énorme crise d'angoisse qui te prend. Tu pleures, tu ne sais pas pourquoi tu pleures. Et tu as juste envie d'essayer d'en finir, quoi.

  • Speaker #1

    Ouais, donc à quel prix, en fait ? Sur la balance, prendre ces médicaments n'en valait absolument pas la peine.

  • Speaker #0

    Exactement, exactement. Et donc, du coup, on a changé. On est passé sur un deuxième médicament qui est spécifique aux personnes atteintes de narcolepsie. Pareil, au bout d'un mois, je ne sais plus, c'était des malaises, je faisais beaucoup de malaises. C'était des malaises que je faisais et puis en fait, on avait atteint la dose maximale, donc du coup, il n'y avait pas d'autre choix que de changer. Et là, du coup, je suis sur un traitement qui me va depuis 2022, que mon corps accepte. Ce n'est pas le plus waouh, mais c'est celui avec le moins d'effets indésirables. Et ça reste encore une fois des médicaments lourds. En fait, j'ai littéralement pris des médicaments qui sont des dérivés amineux. J'ai dû avoir tous des examens, des échographies cardiaques pour vraiment s'assurer que mon cœur était capable de prendre tout ça vu que j'avais déjà pris des médicaments qui étaient assez lourds quand j'étais adolescente. Donc ouais, j'en rigole aujourd'hui parce que tu vois, j'étais au travail, on voulait un peu d'enfaite ironiquement. Mais voilà, dans le fond, c'est quand même assez lourd.

  • Speaker #1

    C'est lourd en termes d'effets secondaires aussi ?

  • Speaker #0

    Non, celui-ci, il y a le coupe-fin. C'est-à-dire qu'il suffit que quelque chose me tracasse et je ne mange pas. Et au travail, ce qui se passe en ce moment, au début, justement, je te disais que j'avais des petites inquiétudes professionnelles. Et justement, ces inquiétudes professionnelles ont déclenché que je ne mange plus le midi. Mais ça arrive, ça va. J'arrive à déjeuner le matin, j'arrive à manger le soir. C'est juste le temps du midi où je n'arrive pas à manger parce que du coup j'ai une petite anxiété. Mais ce n'est pas comme avant où vraiment je partais en crise forte.

  • Speaker #1

    Et sur la narcolepsie en elle-même, qu'est-ce que ça a changé ces traitements ?

  • Speaker #0

    C'est absolument ridicule. Il n'y a pas de somnolence. Il n'y a plus du tout de somnolence. Par contre, la condition pour avoir les effets du médicament, c'est de faire une sieste de 20 minutes. à un moment donné de ma journée, pour être bien, et ça change. Donc ça va être vraiment de l'éveil, de l'éveil 100% littéralement, avec un petit moment de pause bien sûr, juste je ferme les yeux, et de la concentration.

  • Speaker #1

    Et la nuit, tu dors ?

  • Speaker #0

    Non, non, ça va, du coup non. En fait, le médicament n'agit que sur la journée. Je peux prendre un médicament pour dormir la nuit, mais psychologiquement, je ne me sens pas prête. J'ai encore un peu peur.

  • Speaker #1

    Donc, tu es très éveillée la journée et très éveillée la nuit, si j'entends bien.

  • Speaker #0

    En fait, c'est ça. Quand est-ce que tu dors ?

  • Speaker #1

    En fait, généralement, je prends le médicament, il est 8h-8h30. Et ça dure vraiment une journée. Donc aux alentours de 18h, les effets retombent. Donc là, la fatigue retombe. Donc c'est là en fait un peu que je dors. Je fais généralement 18h-20h. Aujourd'hui, j'ai réussi un peu à gérer. En fait, vraiment, je gère quand je peux. Et quand je sais que les effets vont retomber, c'est un moment où je ne fais rien. Donc généralement, c'est à 18h, tout retombe, je dors. En fait, la nuit, je ne suis pas entièrement éveillée. En fait, si tu veux, la nuit, je fais des micro-dodos. Je dors toutes les deux heures, en fait.

  • Speaker #0

    Oui, c'est ça. Et à 18h, quand tu dors, quelque part, tu perds aussi une grande partie de la vie sociale. La vie de famille, la vie amoureuse. C'est un peu le moment où les gens se retrouvent après le travail.

  • Speaker #1

    C'est ça. C'est ça. Et en fait, aujourd'hui, j'ai vraiment su gérer ça. C'est-à-dire que quand je sais que j'ai quelque chose de prévu, je vais prendre à une heure stratégique mon médicament pour que ça retarde un peu tout. En fait, c'est une réflexion constante.

  • Speaker #0

    On devient des alchimistes quand on est malade chronique.

  • Speaker #1

    C'est impressionnant. En fait, toute une réflexion, une prise de conscience sur « il ne faut pas que je prenne ça parce que j'ai ça, parce que j'ai ça » . Il y a toute une réflexion qui, en plus de ça, fatigue énormément dans la charge mentale.

  • Speaker #0

    C'est vraiment de la charge mentale.

  • Speaker #1

    C'est pas ce qu'il me faut, mais il n'y a pas de choix.

  • Speaker #0

    Tu parlais du travail tout à l'heure et du fait qu'il y avait un peu d'anxiété en ce moment. La dernière fois qu'on s'est rencontré, tu m'avais dit que tu étais dans une expérience qui était plutôt positive. Peut-être qu'elle a un peu changé et tu pourras nous en dire plus si tu en as l'envie, évidemment. Parce qu'aujourd'hui, tu as été reconnue en qualité de travailleuse handicapée, ce qui fait que tu as un bureau pour toi-même, tu as un fauteuil pour toi-même, qu'on te laisse faire ta sieste de 20 minutes tous les jours. Le cadre semblait assez idyllique quand tu m'en as parlé la dernière fois. Est-ce que c'est toujours le cas ? Qu'est-ce que tu peux dire de cette expérience aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Le cadre, il est encore idyllique. Vraiment, c'est une entreprise qui est top. J'ai en effet des entreprises qui n'ont pas accepté ma maladie ou qui me trouvaient toujours une excuse et qui justement, notamment une qui a dû mettre fin à ma parodie, c'est à cause de la maladie. Honnêtement, c'est une entreprise qui est incroyable. qui a pris en charge tout très très rapidement. C'est juste que je suis en petite inquiétude professionnelle sur ma projection professionnelle. C'est-à-dire que je suis encore avec eux et tout se passe très bien et je resterai avec eux. Mais en fait, ce poste m'a pris conscience que je ne pourrais pas, à cause de la maladie, avoir des... poste à responsabiliser. Et c'est plus là l'inquiétude professionnelle. C'est-à-dire que je suis quelqu'un que je me projette beaucoup. Aujourd'hui, je sais que je suis toujours dans cette idée d'avoir un poste, d'avoir une équipe à manager. C'est un peu l'idée professionnelle qu'on te berce en tête. Aujourd'hui, je sais que je ne pourrais pas avoir ce rêve d'être manageuse ou d'être responsable. d'avoir en tout cas quelque chose en responsabilité parce que c'est trop. Et c'est ça en fait l'inquiétude professionnelle. Encore une fois, je suis très bien, le travail que je fais il est incroyable. Mais je sais que je ne pense pas en tout cas aujourd'hui que je pourrais évoluer, que je ne pense pas que ça sera possible au vu de l'handicap.

  • Speaker #0

    Et comment tu deals avec ces pensées-là ?

  • Speaker #1

    Ah c'est dur ! C'est du rien, beaucoup plus de côté négatif qu'en positif, qui en ressortent. Très positif, qui trouve toujours un moment de se relever, mais là, en ce moment, c'est pas facile. Et c'est aussi pour ça, tu vois, que j'ai annoncé le podcast, parce que je me suis dit, à la rigueur, j'ai mon projet à moi, qui me donne une raison d'avancer tout le temps, et que ça dépend que de moi.

  • Speaker #0

    Des fois, c'est... En tout cas, moi, c'est des questionnements que j'ai beaucoup, cette question du travail. C'est fou, comme des fois, peut-être qu'on n'arrive plus à s'impliquer dans un travail qui est salarié. et qu'on n'arrive pas à gravir les échelons comme on aurait souhaité le faire, mais qu'en effet, construire quelque chose qui est plus personnel, individuel, qui rassemble nos missions et valeurs à notre rythme, et bien des fois on peut avoir un rôle plus important dans cet espace-là parce que ça respecte les besoins et le rythme. En tout cas, moi c'est ce que j'expérimente avec l'association, pareil que toi, dans un travail salarié, moi aujourd'hui je ne rentre plus dans ces normes-là, malheureusement, mais heureusement, j'ai pu aussi créer des choses à côté. qui me stimule énormément et où j'ai des postes que je trouve intéressants, des postes entre guillemets, mais voilà, que je trouve chouette aussi.

  • Speaker #1

    En fait c'est exactement ça, c'est-à-dire que c'est toi qui le gères avec quelque chose d'adapté à ce que toi tu as. Et bien que ça reste quand même tabou les handicaps invisibles aujourd'hui en France, il y a énormément de progrès qui ont été faits sur les handicaps visibles, c'est une très bonne chose, mais ça reste encore un peu compliqué sur les handicaps invisibles. Il y a énormément d'entreprises qui vont adapter, mais... Tu vois, des détails comme l'oubli de certaines missions, ça va être facilement pointé du doigt, mais parce qu'on va te pointer du doigt toi et pas ton escape. Et ça c'est frustrant, tu vois, et parfois c'est pas ce dont tu as besoin.

  • Speaker #0

    Ouais, il y a encore vraiment une méconnaissance dans le domaine du travail autour de ça, et c'est bien dommage, parce que moi j'ai sorti les dernières statistiques, toi t'es en France, donc côté français, il y a une personne sur deux. qui vit avec une maladie chronique, donc c'est presque le synonyme d'invisible, qui est diagnostiqué par un médecin. Donc c'est énorme. Donc finalement, dans une entreprise, il y a 50% des gens qui vivent avec des symptômes qui ne se voient pas.

  • Speaker #1

    Mais c'est énorme, mais c'est énorme. Et c'est à la fois triste parce que, quand tu vois des gens qui ont peur d'en parler, c'est triste et c'est pour ça que des médias et des podcasts comme le tien sont importants parce que ça permet de lever le tableau. De lever le tabou sur des choses, en fait, c'est pas grave de dire des choses qui ne vont pas, parce que justement, en disant des choses qui ne vont pas, peut-être qu'il y a en face de nous quelqu'un qui sera prêt à avoir une certaine adaptabilité. Et dans mon cas, ça a été ça. C'est-à-dire que dès l'instant où j'ai communiqué mon handicap, mais le directeur a été juste incroyable. Et encore une fois, hier, j'ai eu un rendez-vous avec lui, il m'a dit « mais ça, ce qui est là, tu nous dis ce qu'il te faut et on te le fait, quoi. » Et c'est incroyable et je sais que ça se fera.

  • Speaker #0

    C'est vraiment un cadre bienveillant, mais ça n'a pas toujours été le cas pour toi. Tu m'as raconté deux expériences professionnelles que tu as eues précédemment et qui ont été vraiment compliquées. Et tu as notamment reçu une fois une phrase que j'ai trouvée absolument affreuse, où je ne sais plus si c'était ta boss ou une collègue qui disait « tu nous coûtes et on a besoin de voir des évolutions et des chiffres » . Comment est-ce que tu as vécu ces violences ?

  • Speaker #1

    Comme un échec. Comme un échec et c'était ma boss. C'était ma boss et c'était dur. C'était vraiment de la pire expérience, vraiment tellement ça m'a détruite. Mais ça a été une bonne expérience parce que malgré le fait que ça m'a détruit, ça m'a permis d'être plus forte et de ressortir plus forte, et de savoir ce que je voulais professionnellement et de ce que je ne voulais pas. Et en fait, c'était beaucoup d'harcèlement moral par rapport à ça, justement parce que j'étais en plein RQTH, j'étais en pleine reconnaissance, je faisais plein de choses. Et en fait, l'oubli était fréquent au travail, vu que je n'avais pas de traitement. À cette époque-là, l'oubli était fréquent. Donc du coup, j'avais des missions, il y avait des choses que je ne faisais pas. Et pourtant, elle était référente handicap dans l'entreprise, c'était ça le comble.

  • Speaker #0

    Oh mon Dieu !

  • Speaker #1

    Oui, oui, oui.

  • Speaker #0

    Les gens toxiques !

  • Speaker #1

    Et en fait, il n'y avait pas d'évolution, donc du coup, ce n'était pas intéressant pour eux d'investir sur moi. Et je me souviens qu'elle m'avait dit une autre phrase, et ça, c'était toujours le déclenchement. de ma rupture avec eux. Elle m'a dit, dans tous les cas, tu n'iras pas plus loin qu'assistante. Je me suis dit, waouh, ok, merci. Et c'est dur, oui.

  • Speaker #0

    Et dans cette période, tu m'as dit que tu ne souhaitais pas inquiéter tes parents. Et du coup, tu vivais vraiment, tu négociais avec toi-même avec des pensées très rudes. Tu me disais que tu en étais arrivée à t'arracher les cheveux de la tête. Comment tu as fait ? Comment t'as fait ? Est-ce qu'il y a quand même eu une personne ou une situation ou un contexte ressource à ce moment-là ?

  • Speaker #1

    Encore maintenant ? Je ne sais pas comment j'ai fait. En fait, c'est quand je suis partie de cette entreprise, il y a eu tout un mal-être qui s'est déclenché. Et en fait, les cheveux tombaient tellement j'étais mal. J'ai eu des actions de ganglions qui ronflaient parce que j'étais stressée, tellement j'étais mal. Et juste... Je me souviens, tu vois, il y a un jour, je voulais rien dire à mes parents. Parce que, comme tu l'as dit, je ne voulais pas les inquiéter. Puis, enfin, mes parents, et ce sont des parents, s'inquiètent très facilement. Et c'est tout à fait normal. C'est notre rôle. Et je pense que c'est plus mes amis, mes amis qui m'ont aidée. En fait, juste, je pleurais avec eux au téléphone. Et je n'ai juste pas lâché. Je pense qu'après, en dehors de ça, je dois dire beaucoup mes soeurs qui m'ont soutenue. qui m'ont qui m'ont motivée avec des mots que j'avais besoin d'entendre à la fois durant et que j'avais besoin d'entendre et qui m'ont permis de ne pas lâcher prise et d'accepter la maladie pendant toutes ces périodes. Et ça, c'est une erreur que j'ai faite. Enfin, ça, ce n'est pas une erreur, mais ça a été mon défaut. J'acceptais pas la maladie. Donc du coup, je prenais pas de traitement. Et c'est pour ça que cette expérience aussi a mal tourné. C'est-à-dire que j'étais encore en deuil de ma vie d'avant, alors qu'en soi, j'utilisais un manque en vie avec, mais que je voulais pas accepter que j'avais une faiblesse, alors qu'en fin de compte, c'est même pas une faiblesse, c'est une force.

  • Speaker #0

    Mais je crois que c'est des étapes qui nous concernent tous et toutes, en fait. Et c'est un long chemin de reconnaissance, d'acceptation ou de non-acceptation, mais tout ça est un long chemin. Et je pense qu'on peut avoir de la bienveillance envers cette part de toi qui avait de la difficulté à accepter.

  • Speaker #1

    Mais c'était dur. En fait, je le voyais parce que je tardais à faire ma RQTH. Je tardais sur plein de choses, mais sur plein de choses, parce que je ne voulais pas l'accepter, que j'étais malade. Et en fait, c'est une copine à moi qui, je pense que ça a été ce déclic, quand je pensais qu'en fait, jamais j'allais réussir dans la vie. Alors elle m'a dit que tu le veuilles ou non. Tu l'auras cette maladie avec toi. Elle sera avec toi jusqu'à ta vie, que tu le veuilles ou non. Donc apprends à vivre avec et apprends à l'accepter. Parce que que tu le veuilles ou non, elle sera là. Et cette phrase-là, tu vois, elle m'a percutée.

  • Speaker #0

    Merci à cette amie. Est-ce que tu as eu des professionnels qui ont pu être à l'écoute ? Est-ce que tu as fait des thérapies ou des espaces où tu as pu libérer la parole de ce que tu vis au travers de la maladie ?

  • Speaker #1

    Ma neurologue a toujours été très présente, mais justement, en fait, je me sentais seule. Je me sentais seule et il y a une association en France qui est incroyable et ça m'a aidée, mais beaucoup plus tard. Mais l'association qui m'a aidée, en fait, je communique beaucoup en anglais, j'ai beaucoup de correspondants. Et en fait, je ne sais pas pourquoi, un après-midi, je suis partie regarder en anglais la narcolepsie, tu vois. Et je suis tombée sur un groupe de parole. Et ce groupe de parole m'a aidée. Ce groupe de paroles m'a énormément aidée à aller de l'avant, m'a énormément aidée à accepter parce que je ne me sentais pas seule. Et c'était la première fois, en fait, si tu veux, il y avait deux visions. La vision où les personnes expliquaient la narcolepsie, ce que c'était, parce qu'en fait c'est un groupe de paroles sur différentes thématiques, c'est-à-dire la femme enceinte a la narcolepsie, mon enfant est atteint de narcolepsie. Il y a différentes thématiques et tu vois la positivité américaine. C'est pas grave, tu vas réussir, c'est une période. Et en fait, c'est ça que j'appréciais, c'est ça qui m'a rendu cette force. Et le premier groupe de paroles, c'était en visio à 1h du matin sur Zoom. J'étais en train de bégayer parce que j'étais en train de...

  • Speaker #0

    T'étais en train de, j'ai pas compris.

  • Speaker #1

    Pardon, j'étais un peu en train de bégayer parce que j'étais en train de parler en anglais, il fallait que je présente ma situation en anglais.

  • Speaker #0

    J'entends pas le mot que tu dis, t'étais en train de...

  • Speaker #1

    Bégayer. À bégayer. Pardon, pas qu'être. J'étais en train de bégayer justement parce que, ben, il fallait que je fasse ma présentation en anglais, que j'explique la maladie en anglais. Je ne connais pas les termes techniques, tu vois, de la maladie. Et en fait, quand je me suis présentée, il y a quelqu'un juste après qui a pris la parole et qui expliquait plus en détail comment elle, elle vivait la maladie. Et j'ai pleuré. J'ai pleuré, j'étais la seule dans le visio qui était en train de pleurer. Mais j'étais en train de pleurer parce que je me disais, waouh,

  • Speaker #0

    je ne suis pas folle. La résonance.

  • Speaker #1

    C'est un impact parce qu'il y a certains symptômes. En fait, tu te dis peut-être que je suis folle, c'est dans ma tête. Et je n'avais jamais, en l'espace de plus de dix ans, je n'avais jamais rencontré quelqu'un qui était dans ma situation. Jamais, jamais, jamais, jamais. En dehors de ma neurologue qui traite le sujet, à l'épée. pas, tu vois, elles pouvaient se refléter scientifiquement à moi, mais des personnes lambda, qui étaient comme moi, qui souffraient de difficultés professionnelles comme moi, je me suis dit, waouh !

  • Speaker #0

    Waouh ! Moi, je crois beaucoup à la force des groupes de paroles, j'en anime et j'en facilite. Alors, c'est un petit peu différent, j'ai l'impression que ce que toi, tu évoques, c'est vraiment des groupes où il y a de l'échange entre les gens, des discussions au sein des Invisibles, c'est vraiment des cercles de paroles où... J'amène les gens à venir déposer quelque chose sur l'instant, avec des maladies qui sont toutes différentes. Mais c'est jamais repris, ni discuté en fait, avec les autres. C'est une autre manière de faire, les deux sont absolument géniales. Mais j'aime bien aussi animer ce genre de cercle, parce qu'il y a cet aspect où, souvent on a l'habitude que les gens viennent rebondir sur ce qu'on dit, et ça peut des fois minimiser ce qu'on vit en réalité. Et puis là, c'est vraiment, on dépose et ça résonne, ça résonne chez tout le monde. Et c'est vraiment des espaces, et c'est là où je rejoins ce que tu vis dans le groupe de parole, où en fait, juste, ça résonne ce qu'on vit avec les autres, on réalise qu'on n'est pas seul, on réalise qu'on n'est pas fou, et on réalise qu'il y a d'autres personnes qui simplement vivent la même chose. Et quand on se sent dans un tel sentiment de solitude et d'isolement, tellement différent à part des autres, de la société, des gens de notre âge, ça n'a juste pas de prix.

  • Speaker #1

    C'est exactement ça. Et tu vois, tellement ça rapportait un bien-être en moi. Tu vois, j'étais prête à me réveiller tous les deux semaines à une heure du matin juste pour parler avec eux. On a un groupe sur Instagram où on parle et parfois, en fait, on lâche ce qu'on a sur le cœur parce qu'il n'y a que eux qui peuvent nous comprendre. Et tu parles avec quelqu'un qui sait. Et on a chacun la force de choisir les mots qu'on veut pour expliquer ce qu'on ressent. Et certains mots nous parlent. Et aujourd'hui, moi, c'est ça qui m'a touchée. Et je me suis reconnectée. Parce que du coup, d'un certain moment, quand j'ai appris, ça m'a énormément aidée quand j'ai appris à accepter la maladie grâce à eux. Et c'est d'ailleurs à eux que je rends honneur avec le podcast que j'ai créé. Quand je... Quand j'ai réussi à accepter, je me suis un peu... Elle m'a fait du groupe, c'est-à-dire que je ne me connectais pas en visio. J'ai arrêté parce que c'est quand même une heure du matin, le soir. Je ne sais plus ce que je voulais dire. Je suis désolée, justement.

  • Speaker #0

    Quand tu as commencé à accepter la maladie, tu as arrêté de te connecter. C'est ça.

  • Speaker #1

    J'ai arrêté de me connecter au visio, mais bien évidemment, je restais en contact avec eux par message. Et il y a quoi ? Trois mois, je me suis connectée. Ils étaient tellement heureux de me revoir. Et quand je leur ai dit que grâce à eux, j'ai réussi à aller de l'avant, il y avait des petites larmes qui ont coulé dans leurs yeux. Et tu vois, ce qui a été touchant, c'est qu'il y avait une nouvelle dans le groupe. Donc au moment où je me suis connectée, il y avait une nouvelle. Et en fait, pareil, elle a 21 ans, elle avait l'âge que j'avais quand je me suis connectée. Et elle était en larmes totales parce qu'elle en avait marre de la maladie. Elle ne comprenait pas et disait que je suis folle. Et tu vois, j'avais l'impression de me revoir. Et ce qui était beau, c'était que j'ai pu la conseiller comme j'aurais voulu qu'on conseille, comme eux m'ont conseillé. Encore une fois, tout ça est en anglais, mais j'ai pu trouver les mots pour la rassurer. Ça a été d'une gratification et d'une reconnaissance énorme.

  • Speaker #0

    Et dans cette posture que tu as pu avoir avec elle et dans le fait que... Tu projetais finalement la fille que tu as été à ce moment-là quand tu es rentrée dans ce groupe. Moi j'aimerais te demander si tu pouvais parler à l'enfant que tu étais avec déjà ces symptômes, celle qui s'endormait sans comprendre pourquoi et qui vivait vraiment avec des symptômes extrêmement invalidants. Tu m'as aussi dit qu'à certains moments pendant le lycée, tu avais des camarades de classe qui te réveillaient alors que tu t'endormais, c'est une violence inouïe. Qu'est-ce que toi tu lui dirais à cet enfant aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Il va se faire un bon coup pour ne pas pleurer. ça va aller je dirais que ça va aller et que je suis bien plus forte que ce que je pense il

  • Speaker #0

    y a de l'émotion là chez moi aussi beaucoup c'est la fatigue du coup ça aide pas Je vais arriver sur mes deux questions de fin. Ausha, est-ce que toi, tu as envie de déposer quelque chose avant ?

  • Speaker #1

    Désolée. Attends, je veux moucher. C'est bon. C'est bon, c'est bon. Excuse-moi, est-ce que tu peux reposer ta question, s'il te plaît ?

  • Speaker #0

    Oui, je vais arriver sur les deux dernières questions de fin. Est-ce que tu aurais envie de déposer quelque chose avant ?

  • Speaker #1

    Parlez-en. Attends, parce que j'ai encore des émotions. Parlez-en. Parce que ça en vaut la peine. Parce que bien que vous allez avoir quelqu'un qui va se moquer de vous, un jour ou l'autre, vous allez tomber sur une personne qui va vous donner l'envie de changer les choses. Donc parlez-en. Voilà.

  • Speaker #0

    Du coup, je vais te poser la dernière question. Quel super pouvoir la maladie invisible t'a apporté ?

  • Speaker #1

    Super pouvoir ? Super pouvoir, waouh ! La patience, parce que pour moi la patience, tout le monde n'en a pas. Et je dirais la patience c'est... Non, je retire ce que je dis. La positivité. Que même dans les épreuves les plus dures, il y a un brin de lumière et qu'il faut savoir le voir. En fait, il y a tellement de choses. Il y a tellement de choses, si je devrais en choisir plusieurs, en toute transparence, ce serait la patience, le pouvoir et la force. Vraiment la force. La force et la positivité. D'aller de l'avant et de jamais lâcher quoi. Jamais lâcher, continuer. Parce que bien qu'on peut penser qu'à notre hauteur, en tant que simplement, on ne peut rien changer, on peut changer les choses. Et c'est très thérapeutique ton podcast.

  • Speaker #0

    Du coup, oui, on peut changer les choses.

  • Speaker #1

    Il suffit d'en parler et... et que rien n'est fini, c'est-à-dire que ce n'est pas une fatalité d'être malade. Je l'ai souvent cru, et je suis longtemps passée par cette épreuve que je ne ferai jamais rien de ma vie, que je resterai dans mon lit à dormir et à ne jamais rien faire, et qu'en fait, quand il fallait en finir, quoi, et c'est pas une fatalité, au contraire, c'est le début de l'histoire de la vie, parce que c'est ça qui va nous rendre fortes.

  • Speaker #0

    Et dans ce moment d'émotion, j'ai aussi oublié une partie, c'est que je t'ai posé la dernière question sans te poser la précédente. C'est si tu avais un message à faire passer à l'entourage des personnes qui vivent avec la narcolepsie ou en tout cas avec des troubles du sommeil, qu'est-ce que tu leur dirais ?

  • Speaker #1

    Alors, je dirais deux choses. dans un premier temps euh euh Faites attention à votre entourage parce que ça c'est quelque chose que moi j'utilise toujours. Trop dormir ce n'est pas normal et pas assez dormir ce n'est pas normal. En dehors de personnes qui dorment trop, il y a aussi des personnes qui ne dorment pas assez. Et qu'en dehors du trouble, en dehors de la maladie, il y a peut-être quelque chose de plus profond qui les empêche de dormir. Et dans l'inverse, quelque chose de plus profond qui les rend à dormir toujours. Donc je dirais faites attention, faites attention à votre entourage. Posez-leur les bonnes questions. faites en sorte qu'ils soient un petit recueil où ils peuvent se sentir en sécurité pour être un peu, je dirais, cette troisième épaule sur laquelle on peut se reposer. Parce qu'aujourd'hui, c'est une charge énorme pour nous la maladie. Et quand tu as un entourage incroyable, ou juste une simple personne qui peut t'aider, ça fait la différence. Donc, je dirais plus, prenez le temps de les écouter. Et prenez le temps d'être cette troisième école, cette troisième... sur laquelle on peut faire notre sieste, se reposer.

  • Speaker #0

    Merci pour tes mots, Sohéla.

  • Speaker #1

    Merci à toi pour donner l'opportunité aux personnes d'entendre leur voix et de lever le tabou sur quelque chose qui est encore extrêmement tabou en 2025. Et encore une fois, bravo pour ce que tu fais. Parce que c'est juste incroyable de donner cette opportunité de raconter son histoire dans une onde de positivité, parce que la fin est belle au final.

  • Speaker #0

    Où est-ce qu'on peut retrouver ton podcast, le récit des assoupis ?

  • Speaker #1

    Alors, il est sur toutes les plateformes de podcast, Spotify, Deezer, Apple Podcast. On est aussi sur les réseaux sociaux, où parfois on essaie un peu de communiquer sur différents sujets. Tout le monde est le bienvenu, toute personne atteinte de troubles, même de maladies qui ne sont pas encore connues mais qui ont tous les symptômes, comme j'ai pu avoir été dans cette situation. C'est un peu la safe place to be autour du sommeil. C'est un peu bizarre mais bon, du coup c'est un peu la safe place to be. Donc voilà, n'hésitez pas, si vous avez quelqu'un, même si les personnes n'ont pas envie de parler, juste écoutez pour se sentir moins seul. Ça aide, honnêtement ça aide.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup.

  • Speaker #1

    Merci à toi Tamara.

  • Speaker #0

    Merci de soutenir ce podcast en vous abonnant pour ne manquer aucun épisode et en lui donnant 5 étoiles sur vos plateformes d'écoute préférées. Rencontrez mes invités et découvrez tous les engagements de la communauté Les Invisibles sur le compte Instagram Les Invisibles Podcast. Ensemble, continuons à visibiliser l'invisible.

Description

Alors qu’elle n’a que 8 ans, Soheila commence à recevoir des signaux de fatigue extrême après un voyage en famille.

Très vite, son corps lui impose un autre rythme : elle s’endort en pleine journée, parfois même en classe. 👩🏼‍🏫

Enfant, elle vit déjà à contre-courant du monde : ses nuits, elle les passe éveillée ; ses journées, elle s’écroule de fatigue. 😴


S’ensuit un long parcours fait d’incompréhensions et de minimisations. On parle d’« hypersomnie adolescente », sans chercher plus loin. Pendant des années, elle se bat avec ses parents pour être entendue, comprise, et enfin diagnostiquée.


Dix ans plus tard, une ponction lombaire révèle enfin la vérité : Soheila est atteinte de narcolepsie de type 1, une maladie du sommeil incurable qui s’accompagne d’épisodes soudains où le corps s’effondre alors que l’esprit reste parfaitement éveillé.


Refusant d’abord cette réalité, Soheila finira, une nuit, par rejoindre un groupe de parole en ligne, aux États-Unis. 🇺🇸 C’est là qu’elle découvre, pour la première fois, des récits qui résonnent et un soutien inconditionnel. Deux choses qui lui étaient jusque-là inconnues.


Le domaine du travail reste aujourd’hui un défi constant : elle doit composer avec une mémoire, une concentration et une efficience différentes de celles d’une personne non malade - un équilibre précaire qu’elle affronte chaque jour.

Aujourd’hui, Soheila s’engage pour déconstruire les clichés et l’incompréhension qui entourent la narcolepsie et les troubles du sommeil.


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Transcription

  • Speaker #0

    Enfin, tu vois, ça t'impacte parce qu'il y a certains symptômes. En fait, tu te dis peut-être que je suis folle, c'est dans ma tête. Et j'avais jamais, en l'espace de plus de dix ans, j'avais jamais rencontré quelqu'un qui était dans ma situation. Jamais, jamais, jamais, jamais. En dehors de ma neurologue qui traite le sujet, elle ne l'est pas, tu vois. Elle pouvait se refléter scientifiquement à moi, mais des personnes lambda qui étaient comme moi, qui souffraient de difficultés. professionnels comme moi, je me suis dit waouh.

  • Speaker #1

    Les Invisibles Juin 2020 Ma vie bascule du jour au lendemain dans une maladie neurologique rare, qui n'a de poétique que le nom. Le syndrome du mal de débarquement. Les symptômes qu'elle m'amène vivent en colocation avec moi. 7 jours sur 7. 24 heures sur 24, et ne prennent jamais leur week-end. Je n'ai donc pas la place pour un autre combat. Du moins, c'est ce que je crois. Puis vient ce jour où je témoigne dans une émission télé. dans l'espoir de rendre visible l'invisibilité du syndrome dont je suis atteinte. À peine sortie du plateau, forte de cette expérience et encore dans mes talons rouges, une évidence s'installe. Je n'en resterai pas là. Dans le train du retour, je rejoins à la fois ma maison et mon nouveau combat. Offrir un espace de parole au travers d'un podcast, aux personnes qui composent, bien souvent en silence, avec des maladies invisibles et avec les regards de sociétés qui ne croient que ce qu'elles voient, deux réalités plus souvent subies que choisies. Aujourd'hui, loin de mes talons rouges et au plus proche de l'engagement, l'évidence s'étend. C'est à l'invisible au pluriel que je vous invite. Ceux qui dans la chair, l'esprit et les sociétés se vit, sans pour autant faire de bruit. Si comme le dit Antoine de Saint-Exupéry, l'essentiel est invisible pour les yeux, ici, on compte bien le faire entendre. Bonne écoute ! Hello Sohila !

  • Speaker #0

    Hello Tamara !

  • Speaker #1

    Aujourd'hui, j'ai la joie et l'honneur de te recevoir. Tu as 23 ans et tu vis avec la narcolepsie, une maladie neurologique encore largement méconnue, souvent réduite à une image caricaturale, il faut le dire. Quelqu'un qui s'endort n'importe quand, n'importe où, ou même qui aurait la flemme de se réveiller. Mais ce que tu vis, c'est bien, bien plus complexe, et c'est ce qu'on va voir aujourd'hui. Depuis tes 8 ans, ton corps a commencé à envoyer des signaux de fatigue extrême. À 13 ans... tes parents commencent à s'inquiéter et t'emmènent consulter dans un centre du sommeil. On te diagnostique à tort une hypersomnie adolescente. S'en suivent des traitements mal adaptés, des effets secondaires terribles, des pensées noires, des années sans réel suivi. Et une errance médicale qui va durer presque 10 ans. C'est seulement à tes 17 ans, après une ponction lombaire, que le diagnostic de narcolepsie type 1 tombe. Une maladie incurable qui s'accompagne chez toi de cataplexie. cette perte soudaine du tonus musculaire qui fait tomber le corps alors que l'esprit, lui, y reste parfaitement conscient. Malgré ça, tu tiens, malgré ça, tu trouves un traitement qui te convient, une neurologue qui t'écoute enfin, un groupe de paroles aux Etats-Unis que tu rejoins en te réveillant à minuit. Et aujourd'hui, tu as lancé ton podcast, le récit des assoupis, pour parler du sommeil et de ses troubles, pour déconstruire les préjugés, pour faire entendre ce que les corps fatigués... On a dire. Alors Sohéla, avant de démarrer, comment est-ce que tu vas aujourd'hui ?

  • Speaker #0

    J'ai connu des jours meilleurs, en toute transparence. En ce moment à l'heure à laquelle on parle, il fait très très chaud, donc je ne dors pas. Du coup, je suis très très très fatiguée, bien plus qu'à une autre période de l'année, plus d'autres interrogations professionnelles, donc j'ai des jours meilleurs, mais bon. On garde la tête haute. Et toi, comment vas-tu ?

  • Speaker #1

    C'est un peu compliqué dans mon corps ces jours. On est le 2 juillet 2025, il fait une chaleur assez mondiale, assez intense. J'ai eu mes règles qui m'ont mis vraiment dans une humeur très, très, très ronchonne. J'ai très mal au cervical. Je ne me sens vraiment pas au top, mais je suis heureuse d'être là. C'est toujours un moment que j'adore partager.

  • Speaker #0

    Et moi aussi, je suis heureuse d'être avec toi. En tout cas, merci beaucoup encore une fois Tamara.

  • Speaker #1

    Alors, Célia, si tu devais raconter la première fois où tu t'es dit « il y a un truc qui cloche » , ce serait quand et qu'est-ce que tu ressentais petite déjà ?

  • Speaker #0

    Les premiers symptômes, comme tu l'as si bien expliqué, ont commencé à 8 ans. À 8 ans, tu ne connais pas trop la vie, tu n'es pas trop jeune, tu as un enfant. Donc, je dirais plus que j'ai grandi avec cet instinct que quelque chose n'allait pas, mais dans cette incertitude. La seule chose dont je me souviens, c'était qu'il y avait cette fatigue qui n'était pas normale, et que surtout que je comparais avec les jeunes de ma classe à cette époque, et je me disais, ouais, il y a quelque chose qui ne va pas. constamment grandi avec ça sans avoir de réelles réponses. Donc c'était plus une angoisse, tu sais, quand t'es jeune, de dire pourquoi je suis pas normale et les autres le sont.

  • Speaker #1

    C'est quoi qui te faisait sentir pas normale ?

  • Speaker #0

    Ces moments où tu rentres de l'école, tu dors. Tu dors et quand tu es avec tes camarades de classe, tu... Je parle avec eux, ils font des activités. Sauf que moi, je n'avais aucune force de faire une activité. Ou quand je suis à l'école et que j'ai un moment de somnolence et qu'on me crie dessus parce qu'on pense peut-être que je ne dors pas la nuit. Enfin, tu vois, c'est ces petites actions qui, en fait, avec du recul, me faisaient me sentir pas normale. Et il y avait des moments où juste, je me souviens à nombre de fois, Je pleurais parce que je voyais les autres de mon âge faire plein de choses, avoir cette énergie, avoir ce dynamisme qu'on a quand on est petit, que moi je n'avais pas.

  • Speaker #1

    Et là, ça a commencé à 8 ans déjà, tu disais, ces premiers ressentis ?

  • Speaker #0

    C'est ça, les premiers ressentis ont commencé lors d'un voyage familial. En fait, je ne faisais que dormir. Donc c'est dire que la journée, je ne faisais que dormir. La nuit je me réveillais et en fait je voyais tout le monde en train de dormir. Je me dis mais tiens j'ai regardé quelque chose. Les autres faisaient des activités sans moi parce que justement ils me disaient on te voit dormir, on ne veut pas te réveiller. Et moi je me souviens, et même mon père me le raconte encore aujourd'hui, je me réveillais en pleurs parce qu'ils étaient partis sans moi. Mais moi en fait je dormais et la nuit je me réveillais et j'attendais que les autres se réveillent le lendemain. Ça a commencé très très jeune et en fait quand je suis revenue de ce voyage, ça s'est empiré. Et en fait, on est resté quelques années sans réellement comprendre et peut-être se dire que à cette époque, j'étais en carence de fer et j'ai toujours été en carence de fer. Et en fait, à cette époque-là, c'était beaucoup plus important et on mettait le dos sur la carence en fer. Sauf qu'en fait, après avoir pris tous les traitements possibles pour avoir cette carence qui disparaît, la fatigue était toujours autant présente.

  • Speaker #1

    Moi, ça me touche beaucoup ce que tu racontes, probablement aussi parce qu'aujourd'hui, je suis maman et que tout d'un coup, si je fais une sorte de projection sur ma fille, ce n'est pas forcément intelligent de le faire, mais il y a vraiment quelque chose qui vient me toucher dans le fait aussi qu'en tant que parent, ça peut être difficile de voir son enfant rentrer de l'école, aller se coucher. ne pas pouvoir participer aux activités. Je pense qu'il y a quelque chose qui doit être assez douloureux aussi de sentir ce décalage entre son enfant et les autres, ou même comparativement aux autres enfants qu'on a soi-même, parce que je crois que tu viens d'une grande famille, vous êtes cinq frères et sœurs si je ne me trompe pas.

  • Speaker #0

    C'est exactement ça, c'est exactement ça. Tu as réellement tout. Je suis la petite dernière, donc en plus de ça, il y a de quoi faire la comparaison facile, même si encore une fois, chaque enfant est différent. On est très dynamique. Mes frères et sœurs ont toujours fait plein de choses après l'école. Et en fin de compte, il y a moi. Justement, comme mes frères et sœurs ont toujours été actifs, il y a moi, quoi qu'il fasse dormir.

  • Speaker #1

    Est-ce qu'ils ont mis du temps à identifier, eux aussi, que quelque chose était un petit peu « anormal » ? Pour eux, c'était simplement, voilà, t'étais une enfant qui dormait plus que les autres, qui avait un peu un décalage au niveau du sommeil. Comment ça s'est passé pour eux ? Tu saurais dire un peu ?

  • Speaker #0

    On a souvent cette discussion avec mon père, justement. Au début, il n'y avait pas trop d'inquiétude parce que justement, mon médecin traitant de l'époque disait que c'était à cause de ma carence en fer. Donc voilà, tu vois, naïvement, tout parent, il n'a pas la science qu'un médecin a, donc il va écouter le médecin. Et il y avait des moments, et c'est vraiment où je te parle, là en année, où en fait, mes parents se sont inquiétés parce que... Quand je suis entrée notamment au collège, ça a été un peu l'élément déclencheur. Je pense que la puberté a eu un impact où c'était pire. Je retrouve des copies, j'écris, mais tu vois que mon écriture s'estompe parce que je dors pendant que j'écris. Mon collège était juste à côté de chez moi. Et je rentrais le midi pour manger. Et en fait, ce temps de pause, je ne le consacrais pas pour manger, mais pour dormir. Et il y avait des moments où j'étais fatiguée. Et un jour, et c'est là qu'il a déclenché ce questionnement, je me suis réveillée en retard pour reprendre l'école. Mon père m'a réveillée, mon père m'a dit, il faut faire quelque chose, t'es jamais en retard, ça ne t'arrive jamais, il y a quelque chose qui ne va pas. Et de là, justement, de là... L'intention d'avoir quelqu'un, de voir un neurologue s'est déclenchée.

  • Speaker #1

    Et alors, qu'est-ce qui s'est passé dans cette première consultation ?

  • Speaker #0

    Déjà, je ne savais pas, je n'en ai pas des bons souvenirs en toute transparence. C'est des souvenirs assez particuliers que j'ai. Alors, en fait, les diagnostics, c'était un neurologue qui était en retraite. A chaque fois, comme je le dis, je n'étais pas le cas le plus waouh de sa carrière, je pense. Et en fait, c'était, oh, ne vous inquiétez pas, on est sur une hypersomnie de l'adolescence, votre fille est en plein dedans, ne vous inquiétez pas. Mais si on peut vous rassurer, elle vous fera des examens de sommeil. Donc, chose qui a été faite, c'était une cata. C'était en plein juillet, je crois, c'était en 2014. Et je crois qu'on se souvient tous de cet été où il a fait extrêmement chaud, et encore plus nous, à Amiens. Et en fait, les examens du sommeil n'étaient pas... En fait, à cette époque, il n'y avait pas de centre de sommeil au CHU d'Amiens. Le CHU était vraiment en déménagement, donc du coup, il n'y avait pas du tout officiellement de centre de sommeil. Et en fait, pour la petite anecdote, tous les CHU n'ont pas de centre de sommeil. C'est-à-dire qu'il faut avoir une habilitation. Pour être habilité centre de sommeil, être reconnu centre de sommeil, c'est toute une démarche. Donc à Amiens, à cette époque-là, on n'en avait pas. et le neurologue Elle a fait juste un petit test normal et en fait, du bras, votre fille va bien, jusqu'à là, une petite hypersomnie de l'adolescence. Et en fait, de là, à chaque fois que je me plaignais de certains symptômes que j'avais, je n'étais pas écoutée. Ou on me pointait du doigt, m'est arrêtée. Donc en fait, si tu vois, au tout début, on a donné des médicaments qui étaient des équivalents de ce que je prends aujourd'hui, qu'on ne pouvait pas directement donner parce qu'il n'y avait pas de diagnostic officiellement posé. et en fait c'est c'était des médicaments à une enfant de 13 ans que tu donnes, mais qui sont forts, qui sont forts pour le cœur et même de manière générale pour la santé mentale. Et là, en fait, je voyais que j'avais été crise d'angoisse, parce que c'était à l'époque où je me voyais juste avoir une difficulté de respirer. Je faisais crise d'angoisse sur crise d'angoisse, et à chaque effet secondaire qui était très conséquent, quand j'en parlais, on me pointait du doigt. Et on me disait, c'est votre faute, arrêtez vos médicaments, arrêtez de faire ci, arrêtez de faire ça. Et tu vois, je suis une enfant de 13 ans à cette époque, et tu ne peux pas reprocher à une adolescente de 13 ans tout ça alors qu'elle ne s'y connaît pas. Et de là, j'ai arrêté de prendre les médicaments et j'ai subi la maladie toute ma scolarité au collège et au lycée.

  • Speaker #1

    Et tu disais que tu évoquais d'autres symptômes. Quels étaient les autres symptômes qui vont avec cette maladie, ou en tout cas pour toi ?

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, l'idée qu'on a de la narcolepsie est très caricaturée. Aujourd'hui, quand tu dis à quelqu'un que tu as atteint de narcolepsie, on va facilement dire « Ah, tu dors tout le temps ? C'est trop bien ! » Et c'est vraiment le retour qu'on a. Vraiment, toutes les personnes atteintes de la narcolepsie, c'est ce qu'on a comme retour. Et en fait, dans mon cas, et de manière générale pour la narcolepsie, la narcolepsie, scientifiquement, on l'explique. Aujourd'hui, quelqu'un de normal a un liquide qui tourne dans son cerveau, qui lui permet de savoir quand il doit se réveiller, quand il doit être endormi. Moi aujourd'hui, ce liquide, je ne l'ai plus. d'une manière ou d'une autre, mon corps a arrêté de fonctionner. Donc le symptôme principal, ça va être l'insomnie de la nuit, c'est-à-dire que je ne dors pas la nuit. Et je dors la journée, c'est vraiment tout un dérèglement causé par ce manque de liquide. Et donc l'un des premiers symptômes, c'est le réveil nocturne, littéralement. C'est-à-dire que je ne sais plus ce que ça fait de dormir 8h dans la nuit. Je n'ai jamais dormi 8h dans une nuit. Ensuite, il y a la somnolence dure, donc la somnolence dans la journée. C'est-à-dire que je ne peux pas rester dans une atmosphère sans avoir un moment de somnolence. C'est-à-dire que par exemple, si je suis trop concentrée sur quelque chose, que l'ambiance est tamisée et qu'il n'y a pas de bruit autour, alors là, ça y est, c'est foutu, je vais dormir. Il va y avoir les problèmes de concentration. Ça, c'est très très dur. Aujourd'hui, je prends des médicaments qui m'aident, mais les problèmes de concentration, les troubles de concentration sont assez présents. En tout cas, dans mon cas et dans certains cas d'autres personnes atteintes d'arcolepsie, les troubles cognitifs, c'est-à-dire que je vais oublier plein de choses. Même je peux parler et à tout moment lors de cette interview, je peux oublier un mot parce que c'est justement un des symptômes de la maladie, c'est l'oubli. L'oubli de choses du quotidien, des mots, de plein de choses. Et là aujourd'hui, c'est les symptômes en tout cas conséquents et après la cataplexie qui est aussi présente. Oui, bien sûr. Alors, il existe deux types de cataplexie. En fait, si tu veux, de manière générale, la narcolepsie existe sous deux types. Le type 1 avec la cataplexie et le type 2 sans cataplexie. Le plus courant, c'est le type 1. Et le type 1 avec cataplexie, c'est ce que j'ai. Elle ne se guérit pas, ce n'est pas une maladie que tu peux guérir, tu vis avec, c'est tout. et en fait la cataplexie c'est Des moments où en fait, lors d'émotions fortes ou lors de situations où tu es vraiment juste extrêmement fatigué, tes muscles vont lâcher. Ça peut être n'importe quel muscle. Ça peut être de ton visage, ça peut être ton bras, ça peut être vraiment n'importe quel muscle. Certaines personnes l'ont entièrement, c'est-à-dire que c'est tout leur corps, tous les muscles qui vont lâcher. Ou d'autres personnes, ils vont avoir quelques parties du corps, quelques muscles. Et c'est là, à ce moment-là, qu'on appelle une cataplexie partielle. Dans mon cas, ça va être une cataplexie partielle. Quand je suis extrêmement fatiguée comme en ce moment, mes genoux lâchent. Je ne peux littéralement plus tenir debout. Quand je suis en fourrière, vraiment en gros fourrière, mes bras et mes mains. C'est pas explicable, c'est vraiment soudain et ça dure vraiment très peu de secondes, quelques secondes, mais c'est suffisamment brusque pour te mettre un peu mal à l'aise. Juste après.

  • Speaker #1

    Parce que ces muscles qui lâchent, est-ce que ça se voit de l'extérieur ou c'est qu'un ressenti à l'intérieur ?

  • Speaker #0

    C'est un ressenti et ça se voit aussi. Dans le cas où c'est tout le corps, ça se voit. La personne tombe. Et dans le cas où justement la personne tombe, si tu es en extérieur, les gens peuvent penser que tu fais un malaise alors que tu es entièrement conscient. Pendant que tu tombes, pendant que tes muscles lâchent, tu es entièrement consciente.

  • Speaker #1

    Et toi-même, tu es déjà tombée, non ?

  • Speaker #0

    Je ne crois pas. Je ne crois pas. Je sais que j'ai eu des moments où ça aurait pu être dangereux. Notamment un moment où je n'avais plus de médicaments. Parce qu'aujourd'hui, c'est les médicaments qui me permettent d'avoir une vie un peu plus normale. Même si techniquement, il n'y a pas de normalité. En fait, je n'avais plus de médicaments et j'étais dans une période où j'étais extrêmement fatiguée parce que j'avais une charge de travail assez importante. Et en fait, je n'avais pas pensé à prendre un médicament. Et tu vois, c'est un cercle vicieux où tu es. exténué, tu ne peux pas aller chercher tes médicaments mais sans tes médicaments tu es encore plus fatigué. Et en fait j'étais en ville et puis je sentais que ça flanchait et en fait j'ai dû me positionner, me mettre, le mot je ne l'ai pas, mais me prendre un appui, avoir un appui pour ne pas tomber parce que sinon je tombais devant tout le monde.

  • Speaker #1

    Et on parlait tout à l'heure du coup vraiment de cette enfance où ça a été très difficile pour toi, cette préadolescence, cette adolescence aussi. Mais un jour quand même, à 17 ans, t'as enfin un mot officiel sur ce qui se passe. Comment c'est vécu ? Qui c'est qui t'a accompagné à ce moment-là ?

  • Speaker #0

    C'était encore ce fameux neurologue. En fait, à un moment donné, ma mère a tapé du poing. Et ma mère a dit, écoutez, il n'y a rien qui fonctionne, on a tout essayé, les médicaments ne fonctionnent pas pour ma fille. Elle arrive à des situations où elle a des pensées qui ne sont pas du tout positives. Il y a quelque chose qui ne va pas. Puis lui, il s'est dit, écoutez, il y a quelque chose qui existe. Si vous voulez savoir si votre fille a la narcolepsie ou pas, même si moi je pense que c'est trop tôt. pour dire qu'elle a une narcolepsie, alors qu'aujourd'hui techniquement un enfant de 5 ans peut diagnostiquer une narcoleptique. Et en fait il explique que c'est la fameuse ponction lombaire. Et voilà, je ne savais pas ce que c'était la ponction lombaire à cette époque, donc on m'explique. Tu vois, à cette époque c'est ma mère qui a pris la décision, et vraiment je la remercie, parce que même si ce n'est pas une expérience très agréable, Ça m'a permis d'avoir des réponses. Mais même ça, pour te dire, ça n'a pas permis d'accélérer le dossier. Donc du coup, on a programmé la peau de Solambert. Et en fait, toute contente, je me dis, ça y est, il va enfin avoir un mot sur ce que j'ai. Surtout qu'à l'époque, je passais le bac de français. Quand il y avait la réforme, l'ancienne réforme. Et en fait, si tu veux, pour le brevet, je n'ai pas pu avoir de tiers temps. parce que il n'y avait pas de diagnostic posé. Donc du coup, ma demande de tiers temps pour le brevet a été refusée. Et je voulais à tout prix passer mon bac littéraire. Mon objectif, quand j'étais au lycée, c'était d'avoir un bac L. Et je me suis dit, je veux que mon tiers temps soit accepté parce que je ne veux pas ne pas avoir de tiers temps si je m'endors. Et je sais que je dois m'endormir parce que je n'ai pas de traitement. Et donc du coup, quand la fonction Lambert est terminée et qu'il me reçoit dans son bureau, il me dit... Ben écoutez, ça y est, c'est bon, tout s'est bien passé. Par contre, pour les résultats, il faudra attendre un an.

  • Speaker #1

    Oh mon Dieu ! Un an ! Mais c'est pas possible !

  • Speaker #0

    Un an ! Et je me dis, mais attendez, comment c'est possible ? Je me dis, ben, parce qu'en fait, le liquide qui a été retiré lors de cet examen va à Lyon. Et en fait, il faut attendre qu'il y ait un certain nombre de personnes qui fassent cette fonction d'homébère, qui est ce prélèvement, pour déclencher, vu que c'est des maladies rares, on est sur des fonds privés. Donc du coup, il faut avoir un certain quota pour déclencher les analyses. Donc du coup, il faut attendre un an. Et je me souviens, c'était en novembre. Je me suis dit non, ce n'est pas possible. Je me souviens, je suis rentrée chez moi. Je me suis effondrée, je me suis dit mais je ne vais jamais m'en sortir. Et sur un coup de tête, vu que je ne dors pas la nuit, pas au milieu de la nuit, je me suis retrouvée, j'étais en train de faire des recherches, comment accélérer les dossiers, comment m'adresser à telle personne pour avoir une accélération de dossier. J'étais dans un état d'esprit. Encore aujourd'hui, je me dis mais comment j'ai pensé à ça ? Je me suis retrouvée à envoyer une lettre au ministère de la Santé. J'explique ma situation, je t'explique tout, dans l'espoir d'eux et... en février, donc tout ça se fait en novembre et en février, je reçois une lettre disant que mon cas a été étudié et que du coup, ils allaient faire le nécessaire. Tu vois, je crois que c'était Alice Buzyn à l'époque, la ministère de la Santé. Donc voilà, je vois la lettre et tout. Au début, ma mère a dit mais qu'est-ce qui s'est passé ? Pourquoi t'as une lettre du ministère ? Et je me disais, oh waouh ! Et donc du coup, ça avait fonctionné et une semaine après, j'ai un rendez-vous avec mon neurologue. Et là, dans le bureau, il me dit « Mais écoutez, je ne comprends pas. Ça arrive rarement qu'on ait des personnes qui ont un diagnostic, qui ont le résultat si rapidement. Écoutez, je suis très contente, mais c'est assez impressionnant. Je ne lui avais pas dit que j'avais fait une lettre. Et tu vois, j'étais en mode « Waouh ! » C'est impressionnant. Enfin, tu sais, c'est « Waouh ! » Donc du coup, ça a pu poser le diagnostic. « Vos résultats sont évidents. Vous êtes atteint de narcolepsie. » Soulagement. Mais il me dit... écoutez, on ne peut pas vous basculer maintenant dans le service du sommeil qu'on a au CHU d'Amiens. Donc, il faudra attendre vos 18 ans. Mais le diagnostic, les résultats vont vous permettre de faire votre demande de tiers temps. Donc, du coup, ma demande de tiers temps est acceptée. C'est un soulagement pour moi.

  • Speaker #1

    Ah ouais, j'entends. Et waouh d'avoir trouvé cette force, cette énergie de faire avancer ta cause. Vraiment, c'est ça.

  • Speaker #0

    C'est ça parce que tu vois, je me dis, il y a d'autres personnes, enfin aujourd'hui c'est comme ça que je réfléchis, à cette époque-là je suis sûre que je réfléchissais pas comme ça, mais je me dis, il y a d'autres personnes qui ont des situations beaucoup plus importantes que moi, et c'est malheureux parce que c'est une maladie rare. Ce sont encore une fois des fonds privés, que en fait tout dépend de ça. Et c'est malheureux parce que du coup, il y a une dépendance énorme.

  • Speaker #1

    Et à tes 18 ans alors, la prise en charge, est-ce qu'elle change ? Est-ce que déjà, il y a simplement une prise en charge ?

  • Speaker #0

    Il y a un transfert. Il y a un transfert de service qui me dit, écoutez, on va vous transférer. Je vais transférer votre dossier à ma consoeur. Il me semble que c'est comme ça qu'on dit. À ma consoeur pour qu'elle reprenne vos dossiers. en fait... C'est cette femme-là qui me suit encore aujourd'hui et qui est incroyable, et qui en fait quand elle me reçoit, elle me dit « Mais écoutez, c'est évident, vous êtes narcoductique, je ne comprends même pas pourquoi ils ne vous ont pas transféré dès le début dans ce service. » Et donc du coup la prise en charge a été incroyable. On a dû refaire par question de procédure les examens, et là c'était vraiment les vrais examens du sommeil où j'étais... J'étais vraiment pendant deux nuits, branchée de partout, on t'observe et voilà, le dossier a été fait, la prise en charge a été faite. Et les médicaments, les vrais médicaments que tu donnes aujourd'hui à quelqu'un atteint d'anarcholepsie ont été prescrits.

  • Speaker #1

    Et alors les médicaments, quels effets ont eu sur les symptômes ?

  • Speaker #0

    Quand j'ai intégré justement ce service, honnêtement je crois que j'en ai essayé... trois médicaments avant de vraiment trouver celui qui me correspond. Mais encore une fois, par procédure, elle voulait essayer les médicaments que j'avais. Mais c'était vraiment les médicaments que tu donnes à quelqu'un d'un arc-en-épsi. Et les effets, en fait, c'est déjà crise d'angoisse. Tu as l'anxiété plus que tu as, l'irritabilité. Tu ne manges plus, tu coupes faim. Mais radical, c'est-à-dire un espace de jour où je ne mangeais plus. En fait, c'est un sacrifice parce que tu es angoissé et du coup, tu n'as pas faim. Et l'effet qui m'a terrifiée littéralement, en dehors des pensées négatives, c'était l'effet que ça avait sur moi, c'est-à-dire que je ne voyais plus en fin de journée. C'est-à-dire qu'en fait, tu te retrouves en fin de journée avec une barre et tu ne vois plus. Tu ne vois littéralement plus. En fait, ta main, elle est devant toi, tu la vois floue. Et ça, c'est vraiment l'effet désirable qui m'a fait peur. Et tu vois, là, tu vis ta vie au quotidien, tu es en cours et tu as une énorme crise d'angoisse qui te prend. Tu pleures, tu ne sais pas pourquoi tu pleures. Et tu as juste envie d'essayer d'en finir, quoi.

  • Speaker #1

    Ouais, donc à quel prix, en fait ? Sur la balance, prendre ces médicaments n'en valait absolument pas la peine.

  • Speaker #0

    Exactement, exactement. Et donc, du coup, on a changé. On est passé sur un deuxième médicament qui est spécifique aux personnes atteintes de narcolepsie. Pareil, au bout d'un mois, je ne sais plus, c'était des malaises, je faisais beaucoup de malaises. C'était des malaises que je faisais et puis en fait, on avait atteint la dose maximale, donc du coup, il n'y avait pas d'autre choix que de changer. Et là, du coup, je suis sur un traitement qui me va depuis 2022, que mon corps accepte. Ce n'est pas le plus waouh, mais c'est celui avec le moins d'effets indésirables. Et ça reste encore une fois des médicaments lourds. En fait, j'ai littéralement pris des médicaments qui sont des dérivés amineux. J'ai dû avoir tous des examens, des échographies cardiaques pour vraiment s'assurer que mon cœur était capable de prendre tout ça vu que j'avais déjà pris des médicaments qui étaient assez lourds quand j'étais adolescente. Donc ouais, j'en rigole aujourd'hui parce que tu vois, j'étais au travail, on voulait un peu d'enfaite ironiquement. Mais voilà, dans le fond, c'est quand même assez lourd.

  • Speaker #1

    C'est lourd en termes d'effets secondaires aussi ?

  • Speaker #0

    Non, celui-ci, il y a le coupe-fin. C'est-à-dire qu'il suffit que quelque chose me tracasse et je ne mange pas. Et au travail, ce qui se passe en ce moment, au début, justement, je te disais que j'avais des petites inquiétudes professionnelles. Et justement, ces inquiétudes professionnelles ont déclenché que je ne mange plus le midi. Mais ça arrive, ça va. J'arrive à déjeuner le matin, j'arrive à manger le soir. C'est juste le temps du midi où je n'arrive pas à manger parce que du coup j'ai une petite anxiété. Mais ce n'est pas comme avant où vraiment je partais en crise forte.

  • Speaker #1

    Et sur la narcolepsie en elle-même, qu'est-ce que ça a changé ces traitements ?

  • Speaker #0

    C'est absolument ridicule. Il n'y a pas de somnolence. Il n'y a plus du tout de somnolence. Par contre, la condition pour avoir les effets du médicament, c'est de faire une sieste de 20 minutes. à un moment donné de ma journée, pour être bien, et ça change. Donc ça va être vraiment de l'éveil, de l'éveil 100% littéralement, avec un petit moment de pause bien sûr, juste je ferme les yeux, et de la concentration.

  • Speaker #1

    Et la nuit, tu dors ?

  • Speaker #0

    Non, non, ça va, du coup non. En fait, le médicament n'agit que sur la journée. Je peux prendre un médicament pour dormir la nuit, mais psychologiquement, je ne me sens pas prête. J'ai encore un peu peur.

  • Speaker #1

    Donc, tu es très éveillée la journée et très éveillée la nuit, si j'entends bien.

  • Speaker #0

    En fait, c'est ça. Quand est-ce que tu dors ?

  • Speaker #1

    En fait, généralement, je prends le médicament, il est 8h-8h30. Et ça dure vraiment une journée. Donc aux alentours de 18h, les effets retombent. Donc là, la fatigue retombe. Donc c'est là en fait un peu que je dors. Je fais généralement 18h-20h. Aujourd'hui, j'ai réussi un peu à gérer. En fait, vraiment, je gère quand je peux. Et quand je sais que les effets vont retomber, c'est un moment où je ne fais rien. Donc généralement, c'est à 18h, tout retombe, je dors. En fait, la nuit, je ne suis pas entièrement éveillée. En fait, si tu veux, la nuit, je fais des micro-dodos. Je dors toutes les deux heures, en fait.

  • Speaker #0

    Oui, c'est ça. Et à 18h, quand tu dors, quelque part, tu perds aussi une grande partie de la vie sociale. La vie de famille, la vie amoureuse. C'est un peu le moment où les gens se retrouvent après le travail.

  • Speaker #1

    C'est ça. C'est ça. Et en fait, aujourd'hui, j'ai vraiment su gérer ça. C'est-à-dire que quand je sais que j'ai quelque chose de prévu, je vais prendre à une heure stratégique mon médicament pour que ça retarde un peu tout. En fait, c'est une réflexion constante.

  • Speaker #0

    On devient des alchimistes quand on est malade chronique.

  • Speaker #1

    C'est impressionnant. En fait, toute une réflexion, une prise de conscience sur « il ne faut pas que je prenne ça parce que j'ai ça, parce que j'ai ça » . Il y a toute une réflexion qui, en plus de ça, fatigue énormément dans la charge mentale.

  • Speaker #0

    C'est vraiment de la charge mentale.

  • Speaker #1

    C'est pas ce qu'il me faut, mais il n'y a pas de choix.

  • Speaker #0

    Tu parlais du travail tout à l'heure et du fait qu'il y avait un peu d'anxiété en ce moment. La dernière fois qu'on s'est rencontré, tu m'avais dit que tu étais dans une expérience qui était plutôt positive. Peut-être qu'elle a un peu changé et tu pourras nous en dire plus si tu en as l'envie, évidemment. Parce qu'aujourd'hui, tu as été reconnue en qualité de travailleuse handicapée, ce qui fait que tu as un bureau pour toi-même, tu as un fauteuil pour toi-même, qu'on te laisse faire ta sieste de 20 minutes tous les jours. Le cadre semblait assez idyllique quand tu m'en as parlé la dernière fois. Est-ce que c'est toujours le cas ? Qu'est-ce que tu peux dire de cette expérience aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Le cadre, il est encore idyllique. Vraiment, c'est une entreprise qui est top. J'ai en effet des entreprises qui n'ont pas accepté ma maladie ou qui me trouvaient toujours une excuse et qui justement, notamment une qui a dû mettre fin à ma parodie, c'est à cause de la maladie. Honnêtement, c'est une entreprise qui est incroyable. qui a pris en charge tout très très rapidement. C'est juste que je suis en petite inquiétude professionnelle sur ma projection professionnelle. C'est-à-dire que je suis encore avec eux et tout se passe très bien et je resterai avec eux. Mais en fait, ce poste m'a pris conscience que je ne pourrais pas, à cause de la maladie, avoir des... poste à responsabiliser. Et c'est plus là l'inquiétude professionnelle. C'est-à-dire que je suis quelqu'un que je me projette beaucoup. Aujourd'hui, je sais que je suis toujours dans cette idée d'avoir un poste, d'avoir une équipe à manager. C'est un peu l'idée professionnelle qu'on te berce en tête. Aujourd'hui, je sais que je ne pourrais pas avoir ce rêve d'être manageuse ou d'être responsable. d'avoir en tout cas quelque chose en responsabilité parce que c'est trop. Et c'est ça en fait l'inquiétude professionnelle. Encore une fois, je suis très bien, le travail que je fais il est incroyable. Mais je sais que je ne pense pas en tout cas aujourd'hui que je pourrais évoluer, que je ne pense pas que ça sera possible au vu de l'handicap.

  • Speaker #0

    Et comment tu deals avec ces pensées-là ?

  • Speaker #1

    Ah c'est dur ! C'est du rien, beaucoup plus de côté négatif qu'en positif, qui en ressortent. Très positif, qui trouve toujours un moment de se relever, mais là, en ce moment, c'est pas facile. Et c'est aussi pour ça, tu vois, que j'ai annoncé le podcast, parce que je me suis dit, à la rigueur, j'ai mon projet à moi, qui me donne une raison d'avancer tout le temps, et que ça dépend que de moi.

  • Speaker #0

    Des fois, c'est... En tout cas, moi, c'est des questionnements que j'ai beaucoup, cette question du travail. C'est fou, comme des fois, peut-être qu'on n'arrive plus à s'impliquer dans un travail qui est salarié. et qu'on n'arrive pas à gravir les échelons comme on aurait souhaité le faire, mais qu'en effet, construire quelque chose qui est plus personnel, individuel, qui rassemble nos missions et valeurs à notre rythme, et bien des fois on peut avoir un rôle plus important dans cet espace-là parce que ça respecte les besoins et le rythme. En tout cas, moi c'est ce que j'expérimente avec l'association, pareil que toi, dans un travail salarié, moi aujourd'hui je ne rentre plus dans ces normes-là, malheureusement, mais heureusement, j'ai pu aussi créer des choses à côté. qui me stimule énormément et où j'ai des postes que je trouve intéressants, des postes entre guillemets, mais voilà, que je trouve chouette aussi.

  • Speaker #1

    En fait c'est exactement ça, c'est-à-dire que c'est toi qui le gères avec quelque chose d'adapté à ce que toi tu as. Et bien que ça reste quand même tabou les handicaps invisibles aujourd'hui en France, il y a énormément de progrès qui ont été faits sur les handicaps visibles, c'est une très bonne chose, mais ça reste encore un peu compliqué sur les handicaps invisibles. Il y a énormément d'entreprises qui vont adapter, mais... Tu vois, des détails comme l'oubli de certaines missions, ça va être facilement pointé du doigt, mais parce qu'on va te pointer du doigt toi et pas ton escape. Et ça c'est frustrant, tu vois, et parfois c'est pas ce dont tu as besoin.

  • Speaker #0

    Ouais, il y a encore vraiment une méconnaissance dans le domaine du travail autour de ça, et c'est bien dommage, parce que moi j'ai sorti les dernières statistiques, toi t'es en France, donc côté français, il y a une personne sur deux. qui vit avec une maladie chronique, donc c'est presque le synonyme d'invisible, qui est diagnostiqué par un médecin. Donc c'est énorme. Donc finalement, dans une entreprise, il y a 50% des gens qui vivent avec des symptômes qui ne se voient pas.

  • Speaker #1

    Mais c'est énorme, mais c'est énorme. Et c'est à la fois triste parce que, quand tu vois des gens qui ont peur d'en parler, c'est triste et c'est pour ça que des médias et des podcasts comme le tien sont importants parce que ça permet de lever le tableau. De lever le tabou sur des choses, en fait, c'est pas grave de dire des choses qui ne vont pas, parce que justement, en disant des choses qui ne vont pas, peut-être qu'il y a en face de nous quelqu'un qui sera prêt à avoir une certaine adaptabilité. Et dans mon cas, ça a été ça. C'est-à-dire que dès l'instant où j'ai communiqué mon handicap, mais le directeur a été juste incroyable. Et encore une fois, hier, j'ai eu un rendez-vous avec lui, il m'a dit « mais ça, ce qui est là, tu nous dis ce qu'il te faut et on te le fait, quoi. » Et c'est incroyable et je sais que ça se fera.

  • Speaker #0

    C'est vraiment un cadre bienveillant, mais ça n'a pas toujours été le cas pour toi. Tu m'as raconté deux expériences professionnelles que tu as eues précédemment et qui ont été vraiment compliquées. Et tu as notamment reçu une fois une phrase que j'ai trouvée absolument affreuse, où je ne sais plus si c'était ta boss ou une collègue qui disait « tu nous coûtes et on a besoin de voir des évolutions et des chiffres » . Comment est-ce que tu as vécu ces violences ?

  • Speaker #1

    Comme un échec. Comme un échec et c'était ma boss. C'était ma boss et c'était dur. C'était vraiment de la pire expérience, vraiment tellement ça m'a détruite. Mais ça a été une bonne expérience parce que malgré le fait que ça m'a détruit, ça m'a permis d'être plus forte et de ressortir plus forte, et de savoir ce que je voulais professionnellement et de ce que je ne voulais pas. Et en fait, c'était beaucoup d'harcèlement moral par rapport à ça, justement parce que j'étais en plein RQTH, j'étais en pleine reconnaissance, je faisais plein de choses. Et en fait, l'oubli était fréquent au travail, vu que je n'avais pas de traitement. À cette époque-là, l'oubli était fréquent. Donc du coup, j'avais des missions, il y avait des choses que je ne faisais pas. Et pourtant, elle était référente handicap dans l'entreprise, c'était ça le comble.

  • Speaker #0

    Oh mon Dieu !

  • Speaker #1

    Oui, oui, oui.

  • Speaker #0

    Les gens toxiques !

  • Speaker #1

    Et en fait, il n'y avait pas d'évolution, donc du coup, ce n'était pas intéressant pour eux d'investir sur moi. Et je me souviens qu'elle m'avait dit une autre phrase, et ça, c'était toujours le déclenchement. de ma rupture avec eux. Elle m'a dit, dans tous les cas, tu n'iras pas plus loin qu'assistante. Je me suis dit, waouh, ok, merci. Et c'est dur, oui.

  • Speaker #0

    Et dans cette période, tu m'as dit que tu ne souhaitais pas inquiéter tes parents. Et du coup, tu vivais vraiment, tu négociais avec toi-même avec des pensées très rudes. Tu me disais que tu en étais arrivée à t'arracher les cheveux de la tête. Comment tu as fait ? Comment t'as fait ? Est-ce qu'il y a quand même eu une personne ou une situation ou un contexte ressource à ce moment-là ?

  • Speaker #1

    Encore maintenant ? Je ne sais pas comment j'ai fait. En fait, c'est quand je suis partie de cette entreprise, il y a eu tout un mal-être qui s'est déclenché. Et en fait, les cheveux tombaient tellement j'étais mal. J'ai eu des actions de ganglions qui ronflaient parce que j'étais stressée, tellement j'étais mal. Et juste... Je me souviens, tu vois, il y a un jour, je voulais rien dire à mes parents. Parce que, comme tu l'as dit, je ne voulais pas les inquiéter. Puis, enfin, mes parents, et ce sont des parents, s'inquiètent très facilement. Et c'est tout à fait normal. C'est notre rôle. Et je pense que c'est plus mes amis, mes amis qui m'ont aidée. En fait, juste, je pleurais avec eux au téléphone. Et je n'ai juste pas lâché. Je pense qu'après, en dehors de ça, je dois dire beaucoup mes soeurs qui m'ont soutenue. qui m'ont qui m'ont motivée avec des mots que j'avais besoin d'entendre à la fois durant et que j'avais besoin d'entendre et qui m'ont permis de ne pas lâcher prise et d'accepter la maladie pendant toutes ces périodes. Et ça, c'est une erreur que j'ai faite. Enfin, ça, ce n'est pas une erreur, mais ça a été mon défaut. J'acceptais pas la maladie. Donc du coup, je prenais pas de traitement. Et c'est pour ça que cette expérience aussi a mal tourné. C'est-à-dire que j'étais encore en deuil de ma vie d'avant, alors qu'en soi, j'utilisais un manque en vie avec, mais que je voulais pas accepter que j'avais une faiblesse, alors qu'en fin de compte, c'est même pas une faiblesse, c'est une force.

  • Speaker #0

    Mais je crois que c'est des étapes qui nous concernent tous et toutes, en fait. Et c'est un long chemin de reconnaissance, d'acceptation ou de non-acceptation, mais tout ça est un long chemin. Et je pense qu'on peut avoir de la bienveillance envers cette part de toi qui avait de la difficulté à accepter.

  • Speaker #1

    Mais c'était dur. En fait, je le voyais parce que je tardais à faire ma RQTH. Je tardais sur plein de choses, mais sur plein de choses, parce que je ne voulais pas l'accepter, que j'étais malade. Et en fait, c'est une copine à moi qui, je pense que ça a été ce déclic, quand je pensais qu'en fait, jamais j'allais réussir dans la vie. Alors elle m'a dit que tu le veuilles ou non. Tu l'auras cette maladie avec toi. Elle sera avec toi jusqu'à ta vie, que tu le veuilles ou non. Donc apprends à vivre avec et apprends à l'accepter. Parce que que tu le veuilles ou non, elle sera là. Et cette phrase-là, tu vois, elle m'a percutée.

  • Speaker #0

    Merci à cette amie. Est-ce que tu as eu des professionnels qui ont pu être à l'écoute ? Est-ce que tu as fait des thérapies ou des espaces où tu as pu libérer la parole de ce que tu vis au travers de la maladie ?

  • Speaker #1

    Ma neurologue a toujours été très présente, mais justement, en fait, je me sentais seule. Je me sentais seule et il y a une association en France qui est incroyable et ça m'a aidée, mais beaucoup plus tard. Mais l'association qui m'a aidée, en fait, je communique beaucoup en anglais, j'ai beaucoup de correspondants. Et en fait, je ne sais pas pourquoi, un après-midi, je suis partie regarder en anglais la narcolepsie, tu vois. Et je suis tombée sur un groupe de parole. Et ce groupe de parole m'a aidée. Ce groupe de paroles m'a énormément aidée à aller de l'avant, m'a énormément aidée à accepter parce que je ne me sentais pas seule. Et c'était la première fois, en fait, si tu veux, il y avait deux visions. La vision où les personnes expliquaient la narcolepsie, ce que c'était, parce qu'en fait c'est un groupe de paroles sur différentes thématiques, c'est-à-dire la femme enceinte a la narcolepsie, mon enfant est atteint de narcolepsie. Il y a différentes thématiques et tu vois la positivité américaine. C'est pas grave, tu vas réussir, c'est une période. Et en fait, c'est ça que j'appréciais, c'est ça qui m'a rendu cette force. Et le premier groupe de paroles, c'était en visio à 1h du matin sur Zoom. J'étais en train de bégayer parce que j'étais en train de...

  • Speaker #0

    T'étais en train de, j'ai pas compris.

  • Speaker #1

    Pardon, j'étais un peu en train de bégayer parce que j'étais en train de parler en anglais, il fallait que je présente ma situation en anglais.

  • Speaker #0

    J'entends pas le mot que tu dis, t'étais en train de...

  • Speaker #1

    Bégayer. À bégayer. Pardon, pas qu'être. J'étais en train de bégayer justement parce que, ben, il fallait que je fasse ma présentation en anglais, que j'explique la maladie en anglais. Je ne connais pas les termes techniques, tu vois, de la maladie. Et en fait, quand je me suis présentée, il y a quelqu'un juste après qui a pris la parole et qui expliquait plus en détail comment elle, elle vivait la maladie. Et j'ai pleuré. J'ai pleuré, j'étais la seule dans le visio qui était en train de pleurer. Mais j'étais en train de pleurer parce que je me disais, waouh,

  • Speaker #0

    je ne suis pas folle. La résonance.

  • Speaker #1

    C'est un impact parce qu'il y a certains symptômes. En fait, tu te dis peut-être que je suis folle, c'est dans ma tête. Et je n'avais jamais, en l'espace de plus de dix ans, je n'avais jamais rencontré quelqu'un qui était dans ma situation. Jamais, jamais, jamais, jamais. En dehors de ma neurologue qui traite le sujet, à l'épée. pas, tu vois, elles pouvaient se refléter scientifiquement à moi, mais des personnes lambda, qui étaient comme moi, qui souffraient de difficultés professionnelles comme moi, je me suis dit, waouh !

  • Speaker #0

    Waouh ! Moi, je crois beaucoup à la force des groupes de paroles, j'en anime et j'en facilite. Alors, c'est un petit peu différent, j'ai l'impression que ce que toi, tu évoques, c'est vraiment des groupes où il y a de l'échange entre les gens, des discussions au sein des Invisibles, c'est vraiment des cercles de paroles où... J'amène les gens à venir déposer quelque chose sur l'instant, avec des maladies qui sont toutes différentes. Mais c'est jamais repris, ni discuté en fait, avec les autres. C'est une autre manière de faire, les deux sont absolument géniales. Mais j'aime bien aussi animer ce genre de cercle, parce qu'il y a cet aspect où, souvent on a l'habitude que les gens viennent rebondir sur ce qu'on dit, et ça peut des fois minimiser ce qu'on vit en réalité. Et puis là, c'est vraiment, on dépose et ça résonne, ça résonne chez tout le monde. Et c'est vraiment des espaces, et c'est là où je rejoins ce que tu vis dans le groupe de parole, où en fait, juste, ça résonne ce qu'on vit avec les autres, on réalise qu'on n'est pas seul, on réalise qu'on n'est pas fou, et on réalise qu'il y a d'autres personnes qui simplement vivent la même chose. Et quand on se sent dans un tel sentiment de solitude et d'isolement, tellement différent à part des autres, de la société, des gens de notre âge, ça n'a juste pas de prix.

  • Speaker #1

    C'est exactement ça. Et tu vois, tellement ça rapportait un bien-être en moi. Tu vois, j'étais prête à me réveiller tous les deux semaines à une heure du matin juste pour parler avec eux. On a un groupe sur Instagram où on parle et parfois, en fait, on lâche ce qu'on a sur le cœur parce qu'il n'y a que eux qui peuvent nous comprendre. Et tu parles avec quelqu'un qui sait. Et on a chacun la force de choisir les mots qu'on veut pour expliquer ce qu'on ressent. Et certains mots nous parlent. Et aujourd'hui, moi, c'est ça qui m'a touchée. Et je me suis reconnectée. Parce que du coup, d'un certain moment, quand j'ai appris, ça m'a énormément aidée quand j'ai appris à accepter la maladie grâce à eux. Et c'est d'ailleurs à eux que je rends honneur avec le podcast que j'ai créé. Quand je... Quand j'ai réussi à accepter, je me suis un peu... Elle m'a fait du groupe, c'est-à-dire que je ne me connectais pas en visio. J'ai arrêté parce que c'est quand même une heure du matin, le soir. Je ne sais plus ce que je voulais dire. Je suis désolée, justement.

  • Speaker #0

    Quand tu as commencé à accepter la maladie, tu as arrêté de te connecter. C'est ça.

  • Speaker #1

    J'ai arrêté de me connecter au visio, mais bien évidemment, je restais en contact avec eux par message. Et il y a quoi ? Trois mois, je me suis connectée. Ils étaient tellement heureux de me revoir. Et quand je leur ai dit que grâce à eux, j'ai réussi à aller de l'avant, il y avait des petites larmes qui ont coulé dans leurs yeux. Et tu vois, ce qui a été touchant, c'est qu'il y avait une nouvelle dans le groupe. Donc au moment où je me suis connectée, il y avait une nouvelle. Et en fait, pareil, elle a 21 ans, elle avait l'âge que j'avais quand je me suis connectée. Et elle était en larmes totales parce qu'elle en avait marre de la maladie. Elle ne comprenait pas et disait que je suis folle. Et tu vois, j'avais l'impression de me revoir. Et ce qui était beau, c'était que j'ai pu la conseiller comme j'aurais voulu qu'on conseille, comme eux m'ont conseillé. Encore une fois, tout ça est en anglais, mais j'ai pu trouver les mots pour la rassurer. Ça a été d'une gratification et d'une reconnaissance énorme.

  • Speaker #0

    Et dans cette posture que tu as pu avoir avec elle et dans le fait que... Tu projetais finalement la fille que tu as été à ce moment-là quand tu es rentrée dans ce groupe. Moi j'aimerais te demander si tu pouvais parler à l'enfant que tu étais avec déjà ces symptômes, celle qui s'endormait sans comprendre pourquoi et qui vivait vraiment avec des symptômes extrêmement invalidants. Tu m'as aussi dit qu'à certains moments pendant le lycée, tu avais des camarades de classe qui te réveillaient alors que tu t'endormais, c'est une violence inouïe. Qu'est-ce que toi tu lui dirais à cet enfant aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Il va se faire un bon coup pour ne pas pleurer. ça va aller je dirais que ça va aller et que je suis bien plus forte que ce que je pense il

  • Speaker #0

    y a de l'émotion là chez moi aussi beaucoup c'est la fatigue du coup ça aide pas Je vais arriver sur mes deux questions de fin. Ausha, est-ce que toi, tu as envie de déposer quelque chose avant ?

  • Speaker #1

    Désolée. Attends, je veux moucher. C'est bon. C'est bon, c'est bon. Excuse-moi, est-ce que tu peux reposer ta question, s'il te plaît ?

  • Speaker #0

    Oui, je vais arriver sur les deux dernières questions de fin. Est-ce que tu aurais envie de déposer quelque chose avant ?

  • Speaker #1

    Parlez-en. Attends, parce que j'ai encore des émotions. Parlez-en. Parce que ça en vaut la peine. Parce que bien que vous allez avoir quelqu'un qui va se moquer de vous, un jour ou l'autre, vous allez tomber sur une personne qui va vous donner l'envie de changer les choses. Donc parlez-en. Voilà.

  • Speaker #0

    Du coup, je vais te poser la dernière question. Quel super pouvoir la maladie invisible t'a apporté ?

  • Speaker #1

    Super pouvoir ? Super pouvoir, waouh ! La patience, parce que pour moi la patience, tout le monde n'en a pas. Et je dirais la patience c'est... Non, je retire ce que je dis. La positivité. Que même dans les épreuves les plus dures, il y a un brin de lumière et qu'il faut savoir le voir. En fait, il y a tellement de choses. Il y a tellement de choses, si je devrais en choisir plusieurs, en toute transparence, ce serait la patience, le pouvoir et la force. Vraiment la force. La force et la positivité. D'aller de l'avant et de jamais lâcher quoi. Jamais lâcher, continuer. Parce que bien qu'on peut penser qu'à notre hauteur, en tant que simplement, on ne peut rien changer, on peut changer les choses. Et c'est très thérapeutique ton podcast.

  • Speaker #0

    Du coup, oui, on peut changer les choses.

  • Speaker #1

    Il suffit d'en parler et... et que rien n'est fini, c'est-à-dire que ce n'est pas une fatalité d'être malade. Je l'ai souvent cru, et je suis longtemps passée par cette épreuve que je ne ferai jamais rien de ma vie, que je resterai dans mon lit à dormir et à ne jamais rien faire, et qu'en fait, quand il fallait en finir, quoi, et c'est pas une fatalité, au contraire, c'est le début de l'histoire de la vie, parce que c'est ça qui va nous rendre fortes.

  • Speaker #0

    Et dans ce moment d'émotion, j'ai aussi oublié une partie, c'est que je t'ai posé la dernière question sans te poser la précédente. C'est si tu avais un message à faire passer à l'entourage des personnes qui vivent avec la narcolepsie ou en tout cas avec des troubles du sommeil, qu'est-ce que tu leur dirais ?

  • Speaker #1

    Alors, je dirais deux choses. dans un premier temps euh euh Faites attention à votre entourage parce que ça c'est quelque chose que moi j'utilise toujours. Trop dormir ce n'est pas normal et pas assez dormir ce n'est pas normal. En dehors de personnes qui dorment trop, il y a aussi des personnes qui ne dorment pas assez. Et qu'en dehors du trouble, en dehors de la maladie, il y a peut-être quelque chose de plus profond qui les empêche de dormir. Et dans l'inverse, quelque chose de plus profond qui les rend à dormir toujours. Donc je dirais faites attention, faites attention à votre entourage. Posez-leur les bonnes questions. faites en sorte qu'ils soient un petit recueil où ils peuvent se sentir en sécurité pour être un peu, je dirais, cette troisième épaule sur laquelle on peut se reposer. Parce qu'aujourd'hui, c'est une charge énorme pour nous la maladie. Et quand tu as un entourage incroyable, ou juste une simple personne qui peut t'aider, ça fait la différence. Donc, je dirais plus, prenez le temps de les écouter. Et prenez le temps d'être cette troisième école, cette troisième... sur laquelle on peut faire notre sieste, se reposer.

  • Speaker #0

    Merci pour tes mots, Sohéla.

  • Speaker #1

    Merci à toi pour donner l'opportunité aux personnes d'entendre leur voix et de lever le tabou sur quelque chose qui est encore extrêmement tabou en 2025. Et encore une fois, bravo pour ce que tu fais. Parce que c'est juste incroyable de donner cette opportunité de raconter son histoire dans une onde de positivité, parce que la fin est belle au final.

  • Speaker #0

    Où est-ce qu'on peut retrouver ton podcast, le récit des assoupis ?

  • Speaker #1

    Alors, il est sur toutes les plateformes de podcast, Spotify, Deezer, Apple Podcast. On est aussi sur les réseaux sociaux, où parfois on essaie un peu de communiquer sur différents sujets. Tout le monde est le bienvenu, toute personne atteinte de troubles, même de maladies qui ne sont pas encore connues mais qui ont tous les symptômes, comme j'ai pu avoir été dans cette situation. C'est un peu la safe place to be autour du sommeil. C'est un peu bizarre mais bon, du coup c'est un peu la safe place to be. Donc voilà, n'hésitez pas, si vous avez quelqu'un, même si les personnes n'ont pas envie de parler, juste écoutez pour se sentir moins seul. Ça aide, honnêtement ça aide.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup.

  • Speaker #1

    Merci à toi Tamara.

  • Speaker #0

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