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Les Vrais Souverains

Les Startupers du Nucléaire

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23min |12/07/2023
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Les Vrais Souverains

Les Startupers du Nucléaire

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23min |12/07/2023
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Description

Les syndicalistes de General Electric Alexis Sesmat et Philippe Petitcolin se transforment en entrepreneurs néo-industriels du nucléaire. Ils nous racontent la genèse des start-ups du nucléaire lancées à Belfort avec l’argent des pénalités arraché à General Electric. Le cofondateur de Neext Engineering, Jean Maillard nous parle de Sparta, leur projet de petit réacteur nucléaire innovant qui bénéficie du soutien financier de la population belfortaine.


Co-réalisé par Renaud Duguet et Maxime Verner. 

Voix off : Elia.

Générique : Guillaume Bérat.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour les Vrais Souverains, je suis Arnaud Montebourg et j'approuve ce podcast. J'ai créé il y a quelques années les Équipes du Made in France qui contribuent à construire, reconstruire la nouvelle agriculture et la nouvelle industrie de notre pays. On le fait modestement, mais on le fait concrètement. Et je vous emmène à la rencontre des vrais souverains, celles et ceux qui se battent au quotidien pour que la France redevienne ce grand pays inspirant que nous aimons tant et où nous voulons vivre longtemps.

  • Speaker #1

    À Belfort, les syndicalistes d'Alstom devenus Général Électrique ont fait quelque chose d'exceptionnel. Pour maintenir les emplois qualifiés dans leur territoire, ils ont décidé de les créer eux-mêmes. Ils se sont transformés en entrepreneurs en lançant une association de préfiguration de sociétés d'intégration et ingénierie système nommée APSIS. Le délégué CGC Philippe Petit-Colin nous raconte ce que c'est et comment elle a permis la naissance de start-up dans le nucléaire à Belfort.

  • Speaker #2

    Donc, Absys, c'était une association éphémère. L'idée, c'était qu'on avait, à un moment donné, des centaines de salariés avec des compétences stratégiques et puis, à un moment donné, des voies qui s'ouvraient, de l'argent qui se déversait sur la partie nucléaire et hydrogène. Donc, comment, en fait, on fait une task force et puis, rapidement, on essaie de développer des nouvelles initiatives.

  • Speaker #0

    Pourquoi avez-vous décidé de vous lancer dans les SMR ?

  • Speaker #2

    Les SMR, c'est quoi ? C'est des petites centrales qui sont la même taille, la même puissance, potentiellement les mêmes clients qu'à ceux qu'on vend des centrales à gaz et charbon depuis des décennies. Vous, vous êtes sur un marché du nucléaire qui est un marché public. C'est tellement gros, c'est des états, etc. Là, le SMR, ça sera un marché privé.

  • Speaker #0

    C'est une centrale thermique, c'est 100 mégawatts, 200, 150 mégawatts.

  • Speaker #2

    Ça peut aller de 50 à 500 mégawatts.

  • Speaker #0

    Et là, votre projet, c'est de petits réacteurs nucléaires.

  • Speaker #2

    C'est ça. Et donc, en fait, toutes les méthodologies qui sont spécifiques au pas nucléaire, c'est-à-dire, nous, comment on vend des centrales, le différenciateur, ça a été longtemps, le délai. Il y avait beaucoup plus de demandes que de capacités de production dans les centrales tubines à gaz. C'est celui qui livrait le plus vite qu'arrivait à vendre. Donc on s'est inspiré en fait des conceptions modulaires automobiles en disant, nous vous commandez votre centrale sur catalogue, vous voulez telle option, telle option, telle option, telle option. On a dans le pipe un tas de centrales qui sont en cours de construction, on ne sait pas à qui on va les vendre parce qu'on va concevoir les modules spécifiques par rapport aux besoins et on va personnaliser au dernier moment au client. Ce qui fait que nous on a été capable de vendre des centrales en Tunisie. à Noël, au mois de juillet, elle délivrait de l'électricité. Donc la révolution qu'on veut faire sur le nucléaire, ça veut dire, nous on peut faire des centrales nucléaires modulaires, clés en main, personnalisables, en deux ans, trois ans. Donc nous on voulait, en fait, que dans le rachat, donc comment ça s'est passé, on fait une note, Bercy, Nucléaire Vallée, machin, etc., en disant voilà comment on peut rattraper notre retard et on peut être les champions, pourquoi on peut le faire aussi ? Parce qu'on l'a fait chez GE. Chez GE, il y a moins de 10 ans, il y avait un segment de marché qui s'appelle les très grosses turbines, H, qui s'est développé, GE n'y est pas allé, attendu que le marché soit mature et profitable. Et là, c'est les équipes d'EDF et les équipes de Belfort qui ont développé dans un temps record une centrale ultra-moderne en France, à Bouchain, avec EDF, qui a battu le record du monde de rendement. Cinq ans après, leader mondial. Cinq ans après, leader mondial. Ce qu'on a pu faire dans les turbines H, on peut le faire dans les SMR. Il n'y a aucun problème. Donc nous, on est arrivé avec ce truc-là, et on fait une note et tout, et ça tombe sur le bureau de Manu, deux jours avant qu'il fasse son discours au Creusot. Emmanuel Macron. Ah,

  • Speaker #0

    pardon.

  • Speaker #2

    C'est un intime. Et là, quand il fait son discours au Creusot en novembre, il dit, ah, on a un projet révolutionnaire pour la France, c'est les SMR. Et il reprend tout notre argumentaire. Et là, on dit, purée, c'est bon, ça a marché. Notre truc, ça a marché. Le courant passe. Le courant passe. Et donc du coup, maintenant on va lui dire, c'est tant de millions, tant de personnes qu'il faut recruter, telle équipe, etc. Et on sait qu'il vient en février, donc on demande à rencontrer son staff en février, et on leur renvoie toutes les notes avant. Et on espère qu'en février, en même temps qu'il annonce le rachat de trucs, il annonce notre petit projet qui était de 50 millions. Nous voulions 50 millions, on ne voulait pas 15 milliards, on ne sait pas quoi, 50 millions. Et là on rencontre le cabinet de l'Elysée, qui nous dit, ah non les gars, on n'a pas prévu ça, on n'a pas prévu de travailler sur nos hards et tout, on a prévu une enveloppe d'un milliard. 500 millions pour New World qui patauge dans la schmoule sévère quoi, parce qu'en même temps EDF n'a pas la volonté d'y aller, je veux dire, il le voit comme un concurrent des EPR. Et puis 511 autres millions sur des projets alternatifs, donc il faut créer une start-up. Les mecs sont tarés. Créer une start-up, l'intégration centrale, ça nécessite des capitaux financiers énormes. Personne ne te prête de l'argent parce que si tu fais sur un projet, tu peux boire le bouillon, faire des centaines de millions d'euros.

  • Speaker #0

    Je vois une start-up de l'État par délégation de confiance. Parce qu'il n'y a pas de moyen de financer par le marché ce type de...

  • Speaker #3

    Ça a été le déclic.

  • Speaker #0

    Ce type de start-up. Mais je comprends que là, vous avez pris conscience que vous pouviez le faire.

  • Speaker #2

    Au début, je me suis dit N'importe quoi, ce truc-là, ils ont craqué, les mecs. C'était tellement plus simple de créer 50 postes chez J-Steam, qui travaille sur l'intégration de petits SMR. Il y a toutes les compétences, etc. Parce que là, il va falloir les débaucher, les mecs. Pour leur dire On fait une startup, ça marchera bien ou peut-être que ça va se casser la gueule dans deux ans, alors qu'ils ont un bon salaire, dans une boîte qui ne va pas couler d'ici 20 ans. Surtout qu'en plus, comme on a vu, il ne fallait plus qu'il y ait des tickets de syndical. Donc c'est APSIS, à l'origine c'était des syndicalistes, mais le groupe de travail syndical était plutôt un groupe de lobbyistes. Là maintenant on va essayer de recruter une ou deux personnes, ils n'ont jamais fait le syndicalisme et tout, c'est des mecs qui sont dans le milieu. Et c'est eux qui vont porter le projet, et nous on est en back office et puis on donne un peu notre avis. Et c'est eux qui sont allés au charbon.

  • Speaker #0

    Donc elle s'appelle comment la startup ?

  • Speaker #2

    Next Engineering.

  • Speaker #3

    Next avec deux E.

  • Speaker #1

    Jean Maillard est donc passé d'animateur d'un groupe de travail chez Apsys à entrepreneur dans le nucléaire.

  • Speaker #3

    On a réfléchi à partir de ce moment-là, à partir de février, comment on peut faire pour créer une startup, qui on va voir parce qu'évidemment on a une belle idée mais il faut aller voir du monde. On est allé voir, alors maintenant que c'est public on peut le dire, on a commencé à aller voir General Electric, donc on a poussé la porte évidemment du voisin d'en face, ça paraîtait assez logique. Un accueil plutôt favorable dans la vision industrielle. Un peu plus compliqué dans le temps, on va dire, l'actualité de General Electric à ce moment-là, mais en tout cas une écoute au moins attentive sur l'idée du projet. Et avec une personne de General Electric, l'un des dirigeants de General Electric, on est allé voir Westinghouse. Pourquoi Westinghouse ? On a balayé un état de l'art des projets innovants dans le nucléaire, mais ceux qui étaient en capacité de fabriquer un réacteur. Donc ça limite un petit peu les gens en capacité de le faire. Et avec, on va dire... Une vision qui était de dire que ce serait très difficile pour nous de nous associer avec une startup, parce qu'une startup qui s'associe avec une startup, ça commence à faire un risque industriel au carré. Donc on était quand même plus sensibles à des gens qui étaient en capacité de mener le projet de manière industrielle et donc des acteurs historiques du secteur. Nous, ce qu'on souhaite faire dans Next Engineering, c'est d'apporter le petit nucléaire pour la décarbonation de l'industrie. Et pas forcément pour la fourniture telle qu'on le faisait historiquement de l'électricité sur les réseaux. Ça, on a un grand projet qui s'appelle New Ward qui va permettre de venir en concurrence du charbon ou en remplacement du charbon pour fournir l'électricité sur les territoires. Ça, c'est l'objectif de New Ward. Nous, on ne joue pas sur le même tableau. On s'est dit, on va faire un petit peu plus petit et on va aller directement s'installer auprès des industriels parce qu'on est des ingénieurs issus de l'industrie et qu'on connaît bien l'industrie et qu'on sait que c'est vraiment eux qui ont des forts besoins d'énergie. C'est ce qu'on appelle les électro-intensifs aujourd'hui, que je vais appeler énergético-intensifs, parce qu'ils n'ont pas besoin que d'électricité. Et donc clairement c'est cela, et nous on pense que l'énergie nucléaire, s'il y a bien un endroit dans notre société où on va encore en avoir besoin, quand on aura beaucoup d'énergie renouvelable, c'est bien ces lieux particuliers de consommation énergétique dans l'industrie. Puisque l'industrie c'est un tiers de besoin d'électricité et deux tiers de besoin de chaleur. Au monde, en France l'équilibre est un petit peu différent parce qu'on est très industrialisé. On a plutôt une industrie avale, donc on utilise beaucoup d'énergie électrique sur des machines-outils par exemple. Par contre, dans le reste du monde, on a beaucoup de production de matières premières, où là on a beaucoup besoin de chaleur. Donc ça veut dire que si on vient avec une énergie électrique décarbonée, verte, on ne résout que un tiers du problème. Le nerf de la guerre pour nous c'est la chaleur industrielle, et la chaleur industrielle c'est très difficile à produire avec des énergies renouvelables. Donc là le nucléaire a une vraie épingle de jeu à tirer, et en plus ce qui est assez intéressant, c'est presque une coïncidence, mais c'est comme ça, l'énergie nucléaire aujourd'hui c'est à peu près un tiers d'électricité et deux tiers de chaleur qui part dans des tuyères, qui part dans la nature. Donc là on se dit, on a un moyen non seulement d'utiliser la chaleur, donc du coup on rentabilise l'installation, et le deux tiers, un tiers, ça s'imbrique parfaitement. Et pour décarboner l'industrie, il faut faire des petits objets. Il faut faire des objets qui soient sûrs, il faut faire des objets qui soient faciles à opérer, et il faut faire des objets qui, par contre, soient multi-énergie. Électricité, chaleur, et pourquoi pas, hydrogène, ammoniaque, éthanol, méthanol, et on prend l'ensemble des composés chimiques qui ont besoin de chaleur dans leur process et d'électricité pour être fabriqués. Et une fois qu'on a dit ça, on a à peu près dit toute l'histoire, c'est-à-dire qu'on est des centrales métusage. Avec les compétences ici, on va les faire clé en main. Un industriel, ce n'est pas son métier de fabriquer l'hydrogène, même s'il en a besoin. Aujourd'hui, il l'achète. Alors certes, c'est de l'hydrogène carboné. Demain, il achètera de l'hydrogène décarboné qui sera produit directement sur site, avec des business models à inventer sur comment on va articuler tout ça. Mais en tout cas, on ne va pas demander à un industriel de récupérer une compétence supplémentaire qui est de dire qu'il va être obligé de se fabriquer son hydrogène alors qu'avant il l'achetait. On est sur de la technologie à neutrons rapides, on espère 8 à 10 ans de fonctionnement de l'installation. Ça aussi c'est très intéressant, c'est-à-dire qu'on installe un objet de production énergétique dans le périmètre de l'industriel et on lui dit là vous êtes assuré d'avoir de l'énergie pendant 10 ans, sans aucune opération, et à un prix qui est fixe, puisque de toute façon on a chargé en combustible, vous l'avez acheté, donc là pendant 10 ans vous avez votre énergie à un tarif qui est complètement stable. En termes de taille, on n'avait plus beaucoup de choix dans la technologie, donc on est allé voir Westinghouse et ils ont accepté d'envisager de créer un nouveau programme de R&D pour faire un réacteur plus petit.

  • Speaker #0

    Sur la base de leur réaction, la réaction qu'on a installée ici, c'est du France Westinghouse, mais réduit, c'est du miniature.

  • Speaker #3

    Alors on innove encore en plus par rapport à ça, parce que c'est sur la base d'un réacteur de génération 4 qui est déjà en développement chez eux. Les promesses de la génération 4, c'est d'éloigner trop rapidement. Et une tronc rapide, c'est Phoenix, Super Phoenix, Astrid. Vous connaissez bien. Avec une différence notable par rapport à Astrid, c'est qu'Astrid, on utilise le sodium comme vecteur de transport de l'énergie. Là, on utilise du plomb. En fait, le sodium et le plomb ont des caractéristiques qui sont très différentes d'un point de vue de transport de l'énergie. Le sodium est légèrement plus performant que le plomb pour transporter l'énergie. Par contre, le sodium a un gros défaut, c'est qu'il est réactif à l'air et à l'eau. C'est qu'il est explosif. Le plomb, c'est inerte. C'est un peu moins performant, c'est un peu plus délicat pour arriver à le faire. Mais c'est inerte et surtout, ça raconte une histoire qui pour moi est très importante. C'est que le plomb, c'est le matériau qui nous protège des radiations. Et le réacteur, il est à l'intérieur d'une bulle de plomb. Donc quelque part, intuitivement, on sait qu'on a un objet qui est plus sûr. Westinghouse développe ce réacteur-là, c'est un 950 MW thermique pour du 450 électrique. Il n'est pas en service, il est en développement depuis 2015. Donc on est en 2023, nous ce qui nous intéresse c'est qu'on est à peu près au bon moment pour faire une variante de leur design miniature. Ils ont beaucoup travaillé, donc ça veut dire qu'on part sur une bonne base. Si vous faites les études...

  • Speaker #0

    C'est quoi la répartition entre Westinghouse et vous ?

  • Speaker #3

    Nous, on vient les voir, on leur dit qu'on en veut un plus petit. Donc ça, ils disent, OK, ça, on va faire avec vous et on va se débrouiller pour en faire un plus petit. Donc c'est eux qui travaillent pour le faire plus petit. Par contre, on va le vouloir plus modulaire et avec des usages différents, c'est-à-dire qu'on va ponctionner de la chaleur différemment pour faire de l'hydrogène, pour faire de l'ammonia, pour faire d'autres choses. Donc ça va induire effectivement des modifications dans la conception. Et là, on va pouvoir le faire nous.

  • Speaker #0

    Vous allez prendre une licence, Westinghouse ? Le brevet, il est Westinghouse ou les Next ?

  • Speaker #3

    Alors, le brevet original, il est forcément Westinghouse, il va rester Westinghouse. Par contre, on est dans un appel à projet France 2030 dans lequel on les embarque. Donc, évidemment, on doit montrer que la souveraineté française est respectée. Donc, on va construire une propriété intellectuelle en France et bien sûr, les emplois en France. C'est-à-dire que c'est bien Westinghouse Électrique France qui est notre partenaire et qui va prendre des emplois en France pour développer leur activité là-dessus. Ce qui nous rassure sur l'idée que c'est une histoire qu'on raconte aujourd'hui, qui va être à peu près celle-ci, c'est que Westinghouse est de toute manière en train d'européaniser son projet, qui a débuté aux Etats-Unis parce que la R&D était aux Etats-Unis, mais aujourd'hui ils se sont mis en partenariat avec Ansaldo Nucleare, les Italiens. On est vraiment sur un projet qui est en train de basculer en R&D sur l'Europe, donc une fusion des deux projets sur l'Europe. Et nous, avec France 2030, ce qu'on dit c'est, vous êtes déjà en Europe, venez mettre un pied supplémentaire en France pour le développement de la filière. Avec cette équipe de 25 personnes, on va rester agile le plus longtemps possible pour faire ces développements-là. Et la phase qui commence là, qui est la phase 2023, enfin fin 2023 jusqu'à fin 2025, c'est vraiment une phase de recherche industrielle. On va poser les grandes contraintes structurantes. Il y a des contraintes qui sont assez logiques aujourd'hui qu'on a là un peu en tête. Par exemple, on s'adresse à l'industrie, on fournit de l'énergie à l'industrie. Si on a des opérations de maintenance à faire, elles doivent durer trois semaines, une fois par an, pas plus.

  • Speaker #0

    Ce regard de l'arrêt d'Astrid a été décidé par le gouvernement actuel, qui est notre projet de recherche publique dans le neutron rapide. Je m'étais battu pour le laisser survivre avec M. Bréchet à l'époque, qui était le haut commissaire de l'énergie atomique, et on avait réussi à éviter que l'austérité budgétaire n'ait eu raison du projet Astrid. Il a été arrêté finalement. Les projets de neutrons rapides existent en Chine, je crois aux États-Unis, en Russie, et il y en a qui fonctionnent. Quel est le combustible que vous allez utiliser ? C'est un point très important. Puisque ce n'est pas de l'uranium, du yellow cake sorti des mines d'Arlit, c'est du recyclage. Mais surtout, comment voyez-vous la question du combustible ? Et deuxièmement, comment vous positionnez-vous par rapport aux acquis du CEA d'Astrid ?

  • Speaker #3

    Les bénéfices de la génération 4 nucléaire, effectivement, parmi les bénéfices de cette génération 4, qui est la génération d'Astrid, c'est clairement d'améliorer la sûreté passive du système, mais c'est aussi... La promesse de pouvoir consommer les combustibles usés des anciennes centrales, en tout cas du parc existant. Si je schématise, parce que ce n'est pas tout à fait ça, notre objectif, c'est de vider la piscine de la Hague. Donc les combustibles usés, de pouvoir les utiliser. Et une autre promesse de la génération 4, c'est d'être en circuit fermé, c'est-à-dire d'être en capacité en plus. Les combustibles usés qui sortent du réacteur de la future centrale Sparta pourront être réinjectés après opération de recyclage, pourront être à nouveau réinjectés dans le système.

  • Speaker #0

    C'est dans la continuité d'Astrid, c'est la même suite. C'est la suite de l'histoire qui rebondit. Ici à Belfort.

  • Speaker #3

    En quelque sorte, il y a des différences techniques et technologiques, mais effectivement pour le grand public et la manière dont on appréhende les choses aujourd'hui, c'est effectivement quelque chose qui est très très proche d'Astrid.

  • Speaker #0

    Aujourd'hui on a 10 ans de réserve d'uranium en France, mais c'est de l'uranium qui doit être extrait, donc de mine. J'avais visité d'ailleurs les mines d'Arlit en Niger. Une négociation difficile avec le président nigérien à l'époque. Et on voit bien que l'uranium est un sujet qui va devenir une terre rare. Donc la stratégie consistant à utiliser l'uranium appauvri, comme vous dites, vider la piscine de l'Ague et réutiliser tous les déchets, règle le problème de la dépendance. d'un pays comme le nôtre, au combustible, quel uranium extrait des mines à l'étranger, car nous n'avons plus d'uranium dans notre pays. Je suis né dans une région, dans la Nièvre, où il y avait des mines d'uranium. Voilà, on allait se promener le dimanche, avec mon grand-père, dans les mines. J'ai découvert qu'elles étaient encore radioactives, donc je suis encore un petit peu radioactif.

  • Speaker #3

    Voilà,

  • Speaker #0

    donc on n'a plus de mines en France. Et donc c'est pour ça que c'est un point très important pour la souveraineté de notre pays.

  • Speaker #3

    On retourne la table vis-à-vis du nucléaire, c'est-à-dire que le nucléaire c'est un monde de technocrates, on développe des technologies, on a des superbes technologies, et puis ensuite derrière on regarde comment on les utilise. Nous on fait le chemin inverse, c'est-à-dire qu'on part du besoin de l'industriel et on se dit quelle technologie on va pouvoir mettre en œuvre pour arriver à répondre à ce besoin-là. Et ça, en fait, c'est tout un boulot d'ingénierie et d'intégration pour, à partir d'une technologie, on va être obligé de prendre des technologies qui sont déjà en cours de développement, qui existent, donc du coup, on fait avec et on doit les adapter pour les besoins des clients. Et c'est clairement l'ingénierie et l'intégration. Moi, j'ai un besoin, j'ai des objets. Comment je les mets en musique, c'est un peu l'histoire des Legos. Nous, on n'est pas des fabricants de briques de Lego, mais par contre, avec des briques de Lego, on peut faire énormément de choses très différentes. Donc nous, on va assembler ces briques de Lego pour obtenir la réponse aux besoins du client. C'est la matière dont on fonctionne aujourd'hui et qui, contre toute attente, paraît très originale dans le monde du nucléaire. On va évidemment présélectionner un certain nombre de technologies existantes qu'on va pouvoir utiliser. Ça, c'est le rôle de la première phase. Et l'assemblage de ces éléments-là, on va faire en sorte qu'ils soient le plus modulaire possible. C'est-à-dire, je vous prends un exemple tout bête. On discute avec la direction d'un aéroport international. Ils nous disent, nous, on a un souci, c'est qu'aujourd'hui, on achète de l'électricité. Et demain, on va peut-être devoir acheter 50, 100 fois plus d'électricité parce qu'on va devoir produire de l'hydrogène ou des carburants synthétiques pour les avions. Premier problème, j'ai des besoins de plusieurs centaines de mégawatts sur mon territoire. Eh bien, je n'ai pas l'appel de puissance, enfin, ce n'est pas possible. Le deuxième problème, c'est qu'en fait, entre l'hydrogène et les fuels synthétiques, Ce qu'on appelle SAF, c'est Sustainable Avionics Fuel. Retenez que c'est un peu l'histoire du bioéthanol, mais pour les avions en gros, même si c'est un peu différent. Il ne sait pas choisir, parce qu'évidemment personne n'a choisi, ça va s'imposer à lui, les avions vont se poser et vont lui demander quelque chose. Il dit, moi j'ai investi quoi ? J'ai investi des milliards dans l'hydrogène, et puis il y a un avion qui va se poser et qui va me dire, bonjour, j'aimerais bien mon plein de SAF. Ça ne va pas marcher. L'approche modulaire, ça va être de pouvoir dire, on va pouvoir vous développer une solution le plus longtemps possible, la plus aboutie possible, et peut-être de faire ce choix au dernier moment, parce qu'en termes de coût d'acquisition, ça va être à peu près équivalent, donc on pourra faire le choix au dernier moment, voire même si vous n'êtes pas en capacité de choisir, vous choisissez l'une des technologies parce que vous voyez que vous avez un débouché quand même pour l'utiliser, et puis dans 5 ans, dans 10 ans, peut-être qu'on la remplace. Donc c'est préfabriqué en usine, un EPR c'est fabriqué sur place. Donc nous ce qu'on dit c'est qu'à mégawatts équivalents, on pèsera beaucoup plus sur la balance extérieure commerciale de la France qu'un EPR. Alors, c'est des petits objets technologiques, évidemment. Donc, si on fait une comparaison avec le PR, c'est très petit. Évidemment, c'est difficile de le comparer. Par contre, on a vocation à en installer plein. Et partout dans le monde, ce n'est pas la France qui va réclamer ce genre d'objet. Nous, on est conscients que notre marché, ce n'est pas la France. On sera heureux d'en installer, bien évidemment. Je peux vous dire,

  • Speaker #0

    vous allez à Saint-Jean-de-Maurienne... qui est le smelter d'aluminium dans la vallée de la Maurienne. Bien sûr. Ils consomment l'équivalent de ce que consomme la ville de Lyon par an.

  • Speaker #3

    Oui, oui.

  • Speaker #0

    Au bout de la ligne, en Savoie, ils avaient les steppes, les barrages voire alimentés. C'est pilotable, les steppes, quand il n'y a plus d'eau.

  • Speaker #3

    L'industriel, son driver, si on doit lui apporter un seul argument sur la table pour qu'il achète la technologie, c'est la stabilité. Et la stabilité, ça s'achète. Donc moi, je n'ai pas de problème à dire que je pourrais imaginer une énergie qui est plus chère. Par contre, sur 10 ans, vous l'avez. Et effectivement, le STEP, c'est génial, mais il faut remonter l'eau. Ou alors, il faut profiter des pluies. Le STEP, c'est pas du tout un gymnastique,

  • Speaker #0

    c'est juste des barrages.

  • Speaker #3

    Oui, oui. Des barrages de montagne.

  • Speaker #0

    Donc on est conduit de forcée.

  • Speaker #3

    Par contre, le rebarrage, il est tributaire des pluies. Et aujourd'hui, quelque part, il profite du réchauffement climatique parce qu'il y a un glacier qui est en train de fondre. Et un jour, il n'y aura plus de glacier. Donc, ce n'est pas anodin, ces questions-là. Donc, la question de la stabilité du prix, pour moi, est plus importante.

  • Speaker #0

    On a encore 150 emplacements pour construire des barrages en France. Il n'y a pas mieux. Et c'est 12% du bouquet énergétique national. Franchement, c'est ce qui a fait une de nos forces, que les deux piliers de notre énergie pilotable, c'est le nucléaire et l'hydraulique. Contrairement au vent et au soleil, qu'on ne décide pas.

  • Speaker #1

    Pour développer Sparta, son SMR à neutrons rapides refroidis au plomb, le consortium coordonné par Next Engineering a déposé son dossier à l'appel à projet Réacteur nucléaire innovant de France 2030. Elle saura d'ici la fin de l'été si elle reçoit les 10 millions d'euros de subvention. La startup Belforten va boucler sa levée de fonds participatif de 400 000 euros auprès de centaines de citoyens.

Description

Les syndicalistes de General Electric Alexis Sesmat et Philippe Petitcolin se transforment en entrepreneurs néo-industriels du nucléaire. Ils nous racontent la genèse des start-ups du nucléaire lancées à Belfort avec l’argent des pénalités arraché à General Electric. Le cofondateur de Neext Engineering, Jean Maillard nous parle de Sparta, leur projet de petit réacteur nucléaire innovant qui bénéficie du soutien financier de la population belfortaine.


Co-réalisé par Renaud Duguet et Maxime Verner. 

Voix off : Elia.

Générique : Guillaume Bérat.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour les Vrais Souverains, je suis Arnaud Montebourg et j'approuve ce podcast. J'ai créé il y a quelques années les Équipes du Made in France qui contribuent à construire, reconstruire la nouvelle agriculture et la nouvelle industrie de notre pays. On le fait modestement, mais on le fait concrètement. Et je vous emmène à la rencontre des vrais souverains, celles et ceux qui se battent au quotidien pour que la France redevienne ce grand pays inspirant que nous aimons tant et où nous voulons vivre longtemps.

  • Speaker #1

    À Belfort, les syndicalistes d'Alstom devenus Général Électrique ont fait quelque chose d'exceptionnel. Pour maintenir les emplois qualifiés dans leur territoire, ils ont décidé de les créer eux-mêmes. Ils se sont transformés en entrepreneurs en lançant une association de préfiguration de sociétés d'intégration et ingénierie système nommée APSIS. Le délégué CGC Philippe Petit-Colin nous raconte ce que c'est et comment elle a permis la naissance de start-up dans le nucléaire à Belfort.

  • Speaker #2

    Donc, Absys, c'était une association éphémère. L'idée, c'était qu'on avait, à un moment donné, des centaines de salariés avec des compétences stratégiques et puis, à un moment donné, des voies qui s'ouvraient, de l'argent qui se déversait sur la partie nucléaire et hydrogène. Donc, comment, en fait, on fait une task force et puis, rapidement, on essaie de développer des nouvelles initiatives.

  • Speaker #0

    Pourquoi avez-vous décidé de vous lancer dans les SMR ?

  • Speaker #2

    Les SMR, c'est quoi ? C'est des petites centrales qui sont la même taille, la même puissance, potentiellement les mêmes clients qu'à ceux qu'on vend des centrales à gaz et charbon depuis des décennies. Vous, vous êtes sur un marché du nucléaire qui est un marché public. C'est tellement gros, c'est des états, etc. Là, le SMR, ça sera un marché privé.

  • Speaker #0

    C'est une centrale thermique, c'est 100 mégawatts, 200, 150 mégawatts.

  • Speaker #2

    Ça peut aller de 50 à 500 mégawatts.

  • Speaker #0

    Et là, votre projet, c'est de petits réacteurs nucléaires.

  • Speaker #2

    C'est ça. Et donc, en fait, toutes les méthodologies qui sont spécifiques au pas nucléaire, c'est-à-dire, nous, comment on vend des centrales, le différenciateur, ça a été longtemps, le délai. Il y avait beaucoup plus de demandes que de capacités de production dans les centrales tubines à gaz. C'est celui qui livrait le plus vite qu'arrivait à vendre. Donc on s'est inspiré en fait des conceptions modulaires automobiles en disant, nous vous commandez votre centrale sur catalogue, vous voulez telle option, telle option, telle option, telle option. On a dans le pipe un tas de centrales qui sont en cours de construction, on ne sait pas à qui on va les vendre parce qu'on va concevoir les modules spécifiques par rapport aux besoins et on va personnaliser au dernier moment au client. Ce qui fait que nous on a été capable de vendre des centrales en Tunisie. à Noël, au mois de juillet, elle délivrait de l'électricité. Donc la révolution qu'on veut faire sur le nucléaire, ça veut dire, nous on peut faire des centrales nucléaires modulaires, clés en main, personnalisables, en deux ans, trois ans. Donc nous on voulait, en fait, que dans le rachat, donc comment ça s'est passé, on fait une note, Bercy, Nucléaire Vallée, machin, etc., en disant voilà comment on peut rattraper notre retard et on peut être les champions, pourquoi on peut le faire aussi ? Parce qu'on l'a fait chez GE. Chez GE, il y a moins de 10 ans, il y avait un segment de marché qui s'appelle les très grosses turbines, H, qui s'est développé, GE n'y est pas allé, attendu que le marché soit mature et profitable. Et là, c'est les équipes d'EDF et les équipes de Belfort qui ont développé dans un temps record une centrale ultra-moderne en France, à Bouchain, avec EDF, qui a battu le record du monde de rendement. Cinq ans après, leader mondial. Cinq ans après, leader mondial. Ce qu'on a pu faire dans les turbines H, on peut le faire dans les SMR. Il n'y a aucun problème. Donc nous, on est arrivé avec ce truc-là, et on fait une note et tout, et ça tombe sur le bureau de Manu, deux jours avant qu'il fasse son discours au Creusot. Emmanuel Macron. Ah,

  • Speaker #0

    pardon.

  • Speaker #2

    C'est un intime. Et là, quand il fait son discours au Creusot en novembre, il dit, ah, on a un projet révolutionnaire pour la France, c'est les SMR. Et il reprend tout notre argumentaire. Et là, on dit, purée, c'est bon, ça a marché. Notre truc, ça a marché. Le courant passe. Le courant passe. Et donc du coup, maintenant on va lui dire, c'est tant de millions, tant de personnes qu'il faut recruter, telle équipe, etc. Et on sait qu'il vient en février, donc on demande à rencontrer son staff en février, et on leur renvoie toutes les notes avant. Et on espère qu'en février, en même temps qu'il annonce le rachat de trucs, il annonce notre petit projet qui était de 50 millions. Nous voulions 50 millions, on ne voulait pas 15 milliards, on ne sait pas quoi, 50 millions. Et là on rencontre le cabinet de l'Elysée, qui nous dit, ah non les gars, on n'a pas prévu ça, on n'a pas prévu de travailler sur nos hards et tout, on a prévu une enveloppe d'un milliard. 500 millions pour New World qui patauge dans la schmoule sévère quoi, parce qu'en même temps EDF n'a pas la volonté d'y aller, je veux dire, il le voit comme un concurrent des EPR. Et puis 511 autres millions sur des projets alternatifs, donc il faut créer une start-up. Les mecs sont tarés. Créer une start-up, l'intégration centrale, ça nécessite des capitaux financiers énormes. Personne ne te prête de l'argent parce que si tu fais sur un projet, tu peux boire le bouillon, faire des centaines de millions d'euros.

  • Speaker #0

    Je vois une start-up de l'État par délégation de confiance. Parce qu'il n'y a pas de moyen de financer par le marché ce type de...

  • Speaker #3

    Ça a été le déclic.

  • Speaker #0

    Ce type de start-up. Mais je comprends que là, vous avez pris conscience que vous pouviez le faire.

  • Speaker #2

    Au début, je me suis dit N'importe quoi, ce truc-là, ils ont craqué, les mecs. C'était tellement plus simple de créer 50 postes chez J-Steam, qui travaille sur l'intégration de petits SMR. Il y a toutes les compétences, etc. Parce que là, il va falloir les débaucher, les mecs. Pour leur dire On fait une startup, ça marchera bien ou peut-être que ça va se casser la gueule dans deux ans, alors qu'ils ont un bon salaire, dans une boîte qui ne va pas couler d'ici 20 ans. Surtout qu'en plus, comme on a vu, il ne fallait plus qu'il y ait des tickets de syndical. Donc c'est APSIS, à l'origine c'était des syndicalistes, mais le groupe de travail syndical était plutôt un groupe de lobbyistes. Là maintenant on va essayer de recruter une ou deux personnes, ils n'ont jamais fait le syndicalisme et tout, c'est des mecs qui sont dans le milieu. Et c'est eux qui vont porter le projet, et nous on est en back office et puis on donne un peu notre avis. Et c'est eux qui sont allés au charbon.

  • Speaker #0

    Donc elle s'appelle comment la startup ?

  • Speaker #2

    Next Engineering.

  • Speaker #3

    Next avec deux E.

  • Speaker #1

    Jean Maillard est donc passé d'animateur d'un groupe de travail chez Apsys à entrepreneur dans le nucléaire.

  • Speaker #3

    On a réfléchi à partir de ce moment-là, à partir de février, comment on peut faire pour créer une startup, qui on va voir parce qu'évidemment on a une belle idée mais il faut aller voir du monde. On est allé voir, alors maintenant que c'est public on peut le dire, on a commencé à aller voir General Electric, donc on a poussé la porte évidemment du voisin d'en face, ça paraîtait assez logique. Un accueil plutôt favorable dans la vision industrielle. Un peu plus compliqué dans le temps, on va dire, l'actualité de General Electric à ce moment-là, mais en tout cas une écoute au moins attentive sur l'idée du projet. Et avec une personne de General Electric, l'un des dirigeants de General Electric, on est allé voir Westinghouse. Pourquoi Westinghouse ? On a balayé un état de l'art des projets innovants dans le nucléaire, mais ceux qui étaient en capacité de fabriquer un réacteur. Donc ça limite un petit peu les gens en capacité de le faire. Et avec, on va dire... Une vision qui était de dire que ce serait très difficile pour nous de nous associer avec une startup, parce qu'une startup qui s'associe avec une startup, ça commence à faire un risque industriel au carré. Donc on était quand même plus sensibles à des gens qui étaient en capacité de mener le projet de manière industrielle et donc des acteurs historiques du secteur. Nous, ce qu'on souhaite faire dans Next Engineering, c'est d'apporter le petit nucléaire pour la décarbonation de l'industrie. Et pas forcément pour la fourniture telle qu'on le faisait historiquement de l'électricité sur les réseaux. Ça, on a un grand projet qui s'appelle New Ward qui va permettre de venir en concurrence du charbon ou en remplacement du charbon pour fournir l'électricité sur les territoires. Ça, c'est l'objectif de New Ward. Nous, on ne joue pas sur le même tableau. On s'est dit, on va faire un petit peu plus petit et on va aller directement s'installer auprès des industriels parce qu'on est des ingénieurs issus de l'industrie et qu'on connaît bien l'industrie et qu'on sait que c'est vraiment eux qui ont des forts besoins d'énergie. C'est ce qu'on appelle les électro-intensifs aujourd'hui, que je vais appeler énergético-intensifs, parce qu'ils n'ont pas besoin que d'électricité. Et donc clairement c'est cela, et nous on pense que l'énergie nucléaire, s'il y a bien un endroit dans notre société où on va encore en avoir besoin, quand on aura beaucoup d'énergie renouvelable, c'est bien ces lieux particuliers de consommation énergétique dans l'industrie. Puisque l'industrie c'est un tiers de besoin d'électricité et deux tiers de besoin de chaleur. Au monde, en France l'équilibre est un petit peu différent parce qu'on est très industrialisé. On a plutôt une industrie avale, donc on utilise beaucoup d'énergie électrique sur des machines-outils par exemple. Par contre, dans le reste du monde, on a beaucoup de production de matières premières, où là on a beaucoup besoin de chaleur. Donc ça veut dire que si on vient avec une énergie électrique décarbonée, verte, on ne résout que un tiers du problème. Le nerf de la guerre pour nous c'est la chaleur industrielle, et la chaleur industrielle c'est très difficile à produire avec des énergies renouvelables. Donc là le nucléaire a une vraie épingle de jeu à tirer, et en plus ce qui est assez intéressant, c'est presque une coïncidence, mais c'est comme ça, l'énergie nucléaire aujourd'hui c'est à peu près un tiers d'électricité et deux tiers de chaleur qui part dans des tuyères, qui part dans la nature. Donc là on se dit, on a un moyen non seulement d'utiliser la chaleur, donc du coup on rentabilise l'installation, et le deux tiers, un tiers, ça s'imbrique parfaitement. Et pour décarboner l'industrie, il faut faire des petits objets. Il faut faire des objets qui soient sûrs, il faut faire des objets qui soient faciles à opérer, et il faut faire des objets qui, par contre, soient multi-énergie. Électricité, chaleur, et pourquoi pas, hydrogène, ammoniaque, éthanol, méthanol, et on prend l'ensemble des composés chimiques qui ont besoin de chaleur dans leur process et d'électricité pour être fabriqués. Et une fois qu'on a dit ça, on a à peu près dit toute l'histoire, c'est-à-dire qu'on est des centrales métusage. Avec les compétences ici, on va les faire clé en main. Un industriel, ce n'est pas son métier de fabriquer l'hydrogène, même s'il en a besoin. Aujourd'hui, il l'achète. Alors certes, c'est de l'hydrogène carboné. Demain, il achètera de l'hydrogène décarboné qui sera produit directement sur site, avec des business models à inventer sur comment on va articuler tout ça. Mais en tout cas, on ne va pas demander à un industriel de récupérer une compétence supplémentaire qui est de dire qu'il va être obligé de se fabriquer son hydrogène alors qu'avant il l'achetait. On est sur de la technologie à neutrons rapides, on espère 8 à 10 ans de fonctionnement de l'installation. Ça aussi c'est très intéressant, c'est-à-dire qu'on installe un objet de production énergétique dans le périmètre de l'industriel et on lui dit là vous êtes assuré d'avoir de l'énergie pendant 10 ans, sans aucune opération, et à un prix qui est fixe, puisque de toute façon on a chargé en combustible, vous l'avez acheté, donc là pendant 10 ans vous avez votre énergie à un tarif qui est complètement stable. En termes de taille, on n'avait plus beaucoup de choix dans la technologie, donc on est allé voir Westinghouse et ils ont accepté d'envisager de créer un nouveau programme de R&D pour faire un réacteur plus petit.

  • Speaker #0

    Sur la base de leur réaction, la réaction qu'on a installée ici, c'est du France Westinghouse, mais réduit, c'est du miniature.

  • Speaker #3

    Alors on innove encore en plus par rapport à ça, parce que c'est sur la base d'un réacteur de génération 4 qui est déjà en développement chez eux. Les promesses de la génération 4, c'est d'éloigner trop rapidement. Et une tronc rapide, c'est Phoenix, Super Phoenix, Astrid. Vous connaissez bien. Avec une différence notable par rapport à Astrid, c'est qu'Astrid, on utilise le sodium comme vecteur de transport de l'énergie. Là, on utilise du plomb. En fait, le sodium et le plomb ont des caractéristiques qui sont très différentes d'un point de vue de transport de l'énergie. Le sodium est légèrement plus performant que le plomb pour transporter l'énergie. Par contre, le sodium a un gros défaut, c'est qu'il est réactif à l'air et à l'eau. C'est qu'il est explosif. Le plomb, c'est inerte. C'est un peu moins performant, c'est un peu plus délicat pour arriver à le faire. Mais c'est inerte et surtout, ça raconte une histoire qui pour moi est très importante. C'est que le plomb, c'est le matériau qui nous protège des radiations. Et le réacteur, il est à l'intérieur d'une bulle de plomb. Donc quelque part, intuitivement, on sait qu'on a un objet qui est plus sûr. Westinghouse développe ce réacteur-là, c'est un 950 MW thermique pour du 450 électrique. Il n'est pas en service, il est en développement depuis 2015. Donc on est en 2023, nous ce qui nous intéresse c'est qu'on est à peu près au bon moment pour faire une variante de leur design miniature. Ils ont beaucoup travaillé, donc ça veut dire qu'on part sur une bonne base. Si vous faites les études...

  • Speaker #0

    C'est quoi la répartition entre Westinghouse et vous ?

  • Speaker #3

    Nous, on vient les voir, on leur dit qu'on en veut un plus petit. Donc ça, ils disent, OK, ça, on va faire avec vous et on va se débrouiller pour en faire un plus petit. Donc c'est eux qui travaillent pour le faire plus petit. Par contre, on va le vouloir plus modulaire et avec des usages différents, c'est-à-dire qu'on va ponctionner de la chaleur différemment pour faire de l'hydrogène, pour faire de l'ammonia, pour faire d'autres choses. Donc ça va induire effectivement des modifications dans la conception. Et là, on va pouvoir le faire nous.

  • Speaker #0

    Vous allez prendre une licence, Westinghouse ? Le brevet, il est Westinghouse ou les Next ?

  • Speaker #3

    Alors, le brevet original, il est forcément Westinghouse, il va rester Westinghouse. Par contre, on est dans un appel à projet France 2030 dans lequel on les embarque. Donc, évidemment, on doit montrer que la souveraineté française est respectée. Donc, on va construire une propriété intellectuelle en France et bien sûr, les emplois en France. C'est-à-dire que c'est bien Westinghouse Électrique France qui est notre partenaire et qui va prendre des emplois en France pour développer leur activité là-dessus. Ce qui nous rassure sur l'idée que c'est une histoire qu'on raconte aujourd'hui, qui va être à peu près celle-ci, c'est que Westinghouse est de toute manière en train d'européaniser son projet, qui a débuté aux Etats-Unis parce que la R&D était aux Etats-Unis, mais aujourd'hui ils se sont mis en partenariat avec Ansaldo Nucleare, les Italiens. On est vraiment sur un projet qui est en train de basculer en R&D sur l'Europe, donc une fusion des deux projets sur l'Europe. Et nous, avec France 2030, ce qu'on dit c'est, vous êtes déjà en Europe, venez mettre un pied supplémentaire en France pour le développement de la filière. Avec cette équipe de 25 personnes, on va rester agile le plus longtemps possible pour faire ces développements-là. Et la phase qui commence là, qui est la phase 2023, enfin fin 2023 jusqu'à fin 2025, c'est vraiment une phase de recherche industrielle. On va poser les grandes contraintes structurantes. Il y a des contraintes qui sont assez logiques aujourd'hui qu'on a là un peu en tête. Par exemple, on s'adresse à l'industrie, on fournit de l'énergie à l'industrie. Si on a des opérations de maintenance à faire, elles doivent durer trois semaines, une fois par an, pas plus.

  • Speaker #0

    Ce regard de l'arrêt d'Astrid a été décidé par le gouvernement actuel, qui est notre projet de recherche publique dans le neutron rapide. Je m'étais battu pour le laisser survivre avec M. Bréchet à l'époque, qui était le haut commissaire de l'énergie atomique, et on avait réussi à éviter que l'austérité budgétaire n'ait eu raison du projet Astrid. Il a été arrêté finalement. Les projets de neutrons rapides existent en Chine, je crois aux États-Unis, en Russie, et il y en a qui fonctionnent. Quel est le combustible que vous allez utiliser ? C'est un point très important. Puisque ce n'est pas de l'uranium, du yellow cake sorti des mines d'Arlit, c'est du recyclage. Mais surtout, comment voyez-vous la question du combustible ? Et deuxièmement, comment vous positionnez-vous par rapport aux acquis du CEA d'Astrid ?

  • Speaker #3

    Les bénéfices de la génération 4 nucléaire, effectivement, parmi les bénéfices de cette génération 4, qui est la génération d'Astrid, c'est clairement d'améliorer la sûreté passive du système, mais c'est aussi... La promesse de pouvoir consommer les combustibles usés des anciennes centrales, en tout cas du parc existant. Si je schématise, parce que ce n'est pas tout à fait ça, notre objectif, c'est de vider la piscine de la Hague. Donc les combustibles usés, de pouvoir les utiliser. Et une autre promesse de la génération 4, c'est d'être en circuit fermé, c'est-à-dire d'être en capacité en plus. Les combustibles usés qui sortent du réacteur de la future centrale Sparta pourront être réinjectés après opération de recyclage, pourront être à nouveau réinjectés dans le système.

  • Speaker #0

    C'est dans la continuité d'Astrid, c'est la même suite. C'est la suite de l'histoire qui rebondit. Ici à Belfort.

  • Speaker #3

    En quelque sorte, il y a des différences techniques et technologiques, mais effectivement pour le grand public et la manière dont on appréhende les choses aujourd'hui, c'est effectivement quelque chose qui est très très proche d'Astrid.

  • Speaker #0

    Aujourd'hui on a 10 ans de réserve d'uranium en France, mais c'est de l'uranium qui doit être extrait, donc de mine. J'avais visité d'ailleurs les mines d'Arlit en Niger. Une négociation difficile avec le président nigérien à l'époque. Et on voit bien que l'uranium est un sujet qui va devenir une terre rare. Donc la stratégie consistant à utiliser l'uranium appauvri, comme vous dites, vider la piscine de l'Ague et réutiliser tous les déchets, règle le problème de la dépendance. d'un pays comme le nôtre, au combustible, quel uranium extrait des mines à l'étranger, car nous n'avons plus d'uranium dans notre pays. Je suis né dans une région, dans la Nièvre, où il y avait des mines d'uranium. Voilà, on allait se promener le dimanche, avec mon grand-père, dans les mines. J'ai découvert qu'elles étaient encore radioactives, donc je suis encore un petit peu radioactif.

  • Speaker #3

    Voilà,

  • Speaker #0

    donc on n'a plus de mines en France. Et donc c'est pour ça que c'est un point très important pour la souveraineté de notre pays.

  • Speaker #3

    On retourne la table vis-à-vis du nucléaire, c'est-à-dire que le nucléaire c'est un monde de technocrates, on développe des technologies, on a des superbes technologies, et puis ensuite derrière on regarde comment on les utilise. Nous on fait le chemin inverse, c'est-à-dire qu'on part du besoin de l'industriel et on se dit quelle technologie on va pouvoir mettre en œuvre pour arriver à répondre à ce besoin-là. Et ça, en fait, c'est tout un boulot d'ingénierie et d'intégration pour, à partir d'une technologie, on va être obligé de prendre des technologies qui sont déjà en cours de développement, qui existent, donc du coup, on fait avec et on doit les adapter pour les besoins des clients. Et c'est clairement l'ingénierie et l'intégration. Moi, j'ai un besoin, j'ai des objets. Comment je les mets en musique, c'est un peu l'histoire des Legos. Nous, on n'est pas des fabricants de briques de Lego, mais par contre, avec des briques de Lego, on peut faire énormément de choses très différentes. Donc nous, on va assembler ces briques de Lego pour obtenir la réponse aux besoins du client. C'est la matière dont on fonctionne aujourd'hui et qui, contre toute attente, paraît très originale dans le monde du nucléaire. On va évidemment présélectionner un certain nombre de technologies existantes qu'on va pouvoir utiliser. Ça, c'est le rôle de la première phase. Et l'assemblage de ces éléments-là, on va faire en sorte qu'ils soient le plus modulaire possible. C'est-à-dire, je vous prends un exemple tout bête. On discute avec la direction d'un aéroport international. Ils nous disent, nous, on a un souci, c'est qu'aujourd'hui, on achète de l'électricité. Et demain, on va peut-être devoir acheter 50, 100 fois plus d'électricité parce qu'on va devoir produire de l'hydrogène ou des carburants synthétiques pour les avions. Premier problème, j'ai des besoins de plusieurs centaines de mégawatts sur mon territoire. Eh bien, je n'ai pas l'appel de puissance, enfin, ce n'est pas possible. Le deuxième problème, c'est qu'en fait, entre l'hydrogène et les fuels synthétiques, Ce qu'on appelle SAF, c'est Sustainable Avionics Fuel. Retenez que c'est un peu l'histoire du bioéthanol, mais pour les avions en gros, même si c'est un peu différent. Il ne sait pas choisir, parce qu'évidemment personne n'a choisi, ça va s'imposer à lui, les avions vont se poser et vont lui demander quelque chose. Il dit, moi j'ai investi quoi ? J'ai investi des milliards dans l'hydrogène, et puis il y a un avion qui va se poser et qui va me dire, bonjour, j'aimerais bien mon plein de SAF. Ça ne va pas marcher. L'approche modulaire, ça va être de pouvoir dire, on va pouvoir vous développer une solution le plus longtemps possible, la plus aboutie possible, et peut-être de faire ce choix au dernier moment, parce qu'en termes de coût d'acquisition, ça va être à peu près équivalent, donc on pourra faire le choix au dernier moment, voire même si vous n'êtes pas en capacité de choisir, vous choisissez l'une des technologies parce que vous voyez que vous avez un débouché quand même pour l'utiliser, et puis dans 5 ans, dans 10 ans, peut-être qu'on la remplace. Donc c'est préfabriqué en usine, un EPR c'est fabriqué sur place. Donc nous ce qu'on dit c'est qu'à mégawatts équivalents, on pèsera beaucoup plus sur la balance extérieure commerciale de la France qu'un EPR. Alors, c'est des petits objets technologiques, évidemment. Donc, si on fait une comparaison avec le PR, c'est très petit. Évidemment, c'est difficile de le comparer. Par contre, on a vocation à en installer plein. Et partout dans le monde, ce n'est pas la France qui va réclamer ce genre d'objet. Nous, on est conscients que notre marché, ce n'est pas la France. On sera heureux d'en installer, bien évidemment. Je peux vous dire,

  • Speaker #0

    vous allez à Saint-Jean-de-Maurienne... qui est le smelter d'aluminium dans la vallée de la Maurienne. Bien sûr. Ils consomment l'équivalent de ce que consomme la ville de Lyon par an.

  • Speaker #3

    Oui, oui.

  • Speaker #0

    Au bout de la ligne, en Savoie, ils avaient les steppes, les barrages voire alimentés. C'est pilotable, les steppes, quand il n'y a plus d'eau.

  • Speaker #3

    L'industriel, son driver, si on doit lui apporter un seul argument sur la table pour qu'il achète la technologie, c'est la stabilité. Et la stabilité, ça s'achète. Donc moi, je n'ai pas de problème à dire que je pourrais imaginer une énergie qui est plus chère. Par contre, sur 10 ans, vous l'avez. Et effectivement, le STEP, c'est génial, mais il faut remonter l'eau. Ou alors, il faut profiter des pluies. Le STEP, c'est pas du tout un gymnastique,

  • Speaker #0

    c'est juste des barrages.

  • Speaker #3

    Oui, oui. Des barrages de montagne.

  • Speaker #0

    Donc on est conduit de forcée.

  • Speaker #3

    Par contre, le rebarrage, il est tributaire des pluies. Et aujourd'hui, quelque part, il profite du réchauffement climatique parce qu'il y a un glacier qui est en train de fondre. Et un jour, il n'y aura plus de glacier. Donc, ce n'est pas anodin, ces questions-là. Donc, la question de la stabilité du prix, pour moi, est plus importante.

  • Speaker #0

    On a encore 150 emplacements pour construire des barrages en France. Il n'y a pas mieux. Et c'est 12% du bouquet énergétique national. Franchement, c'est ce qui a fait une de nos forces, que les deux piliers de notre énergie pilotable, c'est le nucléaire et l'hydraulique. Contrairement au vent et au soleil, qu'on ne décide pas.

  • Speaker #1

    Pour développer Sparta, son SMR à neutrons rapides refroidis au plomb, le consortium coordonné par Next Engineering a déposé son dossier à l'appel à projet Réacteur nucléaire innovant de France 2030. Elle saura d'ici la fin de l'été si elle reçoit les 10 millions d'euros de subvention. La startup Belforten va boucler sa levée de fonds participatif de 400 000 euros auprès de centaines de citoyens.

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Description

Les syndicalistes de General Electric Alexis Sesmat et Philippe Petitcolin se transforment en entrepreneurs néo-industriels du nucléaire. Ils nous racontent la genèse des start-ups du nucléaire lancées à Belfort avec l’argent des pénalités arraché à General Electric. Le cofondateur de Neext Engineering, Jean Maillard nous parle de Sparta, leur projet de petit réacteur nucléaire innovant qui bénéficie du soutien financier de la population belfortaine.


Co-réalisé par Renaud Duguet et Maxime Verner. 

Voix off : Elia.

Générique : Guillaume Bérat.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour les Vrais Souverains, je suis Arnaud Montebourg et j'approuve ce podcast. J'ai créé il y a quelques années les Équipes du Made in France qui contribuent à construire, reconstruire la nouvelle agriculture et la nouvelle industrie de notre pays. On le fait modestement, mais on le fait concrètement. Et je vous emmène à la rencontre des vrais souverains, celles et ceux qui se battent au quotidien pour que la France redevienne ce grand pays inspirant que nous aimons tant et où nous voulons vivre longtemps.

  • Speaker #1

    À Belfort, les syndicalistes d'Alstom devenus Général Électrique ont fait quelque chose d'exceptionnel. Pour maintenir les emplois qualifiés dans leur territoire, ils ont décidé de les créer eux-mêmes. Ils se sont transformés en entrepreneurs en lançant une association de préfiguration de sociétés d'intégration et ingénierie système nommée APSIS. Le délégué CGC Philippe Petit-Colin nous raconte ce que c'est et comment elle a permis la naissance de start-up dans le nucléaire à Belfort.

  • Speaker #2

    Donc, Absys, c'était une association éphémère. L'idée, c'était qu'on avait, à un moment donné, des centaines de salariés avec des compétences stratégiques et puis, à un moment donné, des voies qui s'ouvraient, de l'argent qui se déversait sur la partie nucléaire et hydrogène. Donc, comment, en fait, on fait une task force et puis, rapidement, on essaie de développer des nouvelles initiatives.

  • Speaker #0

    Pourquoi avez-vous décidé de vous lancer dans les SMR ?

  • Speaker #2

    Les SMR, c'est quoi ? C'est des petites centrales qui sont la même taille, la même puissance, potentiellement les mêmes clients qu'à ceux qu'on vend des centrales à gaz et charbon depuis des décennies. Vous, vous êtes sur un marché du nucléaire qui est un marché public. C'est tellement gros, c'est des états, etc. Là, le SMR, ça sera un marché privé.

  • Speaker #0

    C'est une centrale thermique, c'est 100 mégawatts, 200, 150 mégawatts.

  • Speaker #2

    Ça peut aller de 50 à 500 mégawatts.

  • Speaker #0

    Et là, votre projet, c'est de petits réacteurs nucléaires.

  • Speaker #2

    C'est ça. Et donc, en fait, toutes les méthodologies qui sont spécifiques au pas nucléaire, c'est-à-dire, nous, comment on vend des centrales, le différenciateur, ça a été longtemps, le délai. Il y avait beaucoup plus de demandes que de capacités de production dans les centrales tubines à gaz. C'est celui qui livrait le plus vite qu'arrivait à vendre. Donc on s'est inspiré en fait des conceptions modulaires automobiles en disant, nous vous commandez votre centrale sur catalogue, vous voulez telle option, telle option, telle option, telle option. On a dans le pipe un tas de centrales qui sont en cours de construction, on ne sait pas à qui on va les vendre parce qu'on va concevoir les modules spécifiques par rapport aux besoins et on va personnaliser au dernier moment au client. Ce qui fait que nous on a été capable de vendre des centrales en Tunisie. à Noël, au mois de juillet, elle délivrait de l'électricité. Donc la révolution qu'on veut faire sur le nucléaire, ça veut dire, nous on peut faire des centrales nucléaires modulaires, clés en main, personnalisables, en deux ans, trois ans. Donc nous on voulait, en fait, que dans le rachat, donc comment ça s'est passé, on fait une note, Bercy, Nucléaire Vallée, machin, etc., en disant voilà comment on peut rattraper notre retard et on peut être les champions, pourquoi on peut le faire aussi ? Parce qu'on l'a fait chez GE. Chez GE, il y a moins de 10 ans, il y avait un segment de marché qui s'appelle les très grosses turbines, H, qui s'est développé, GE n'y est pas allé, attendu que le marché soit mature et profitable. Et là, c'est les équipes d'EDF et les équipes de Belfort qui ont développé dans un temps record une centrale ultra-moderne en France, à Bouchain, avec EDF, qui a battu le record du monde de rendement. Cinq ans après, leader mondial. Cinq ans après, leader mondial. Ce qu'on a pu faire dans les turbines H, on peut le faire dans les SMR. Il n'y a aucun problème. Donc nous, on est arrivé avec ce truc-là, et on fait une note et tout, et ça tombe sur le bureau de Manu, deux jours avant qu'il fasse son discours au Creusot. Emmanuel Macron. Ah,

  • Speaker #0

    pardon.

  • Speaker #2

    C'est un intime. Et là, quand il fait son discours au Creusot en novembre, il dit, ah, on a un projet révolutionnaire pour la France, c'est les SMR. Et il reprend tout notre argumentaire. Et là, on dit, purée, c'est bon, ça a marché. Notre truc, ça a marché. Le courant passe. Le courant passe. Et donc du coup, maintenant on va lui dire, c'est tant de millions, tant de personnes qu'il faut recruter, telle équipe, etc. Et on sait qu'il vient en février, donc on demande à rencontrer son staff en février, et on leur renvoie toutes les notes avant. Et on espère qu'en février, en même temps qu'il annonce le rachat de trucs, il annonce notre petit projet qui était de 50 millions. Nous voulions 50 millions, on ne voulait pas 15 milliards, on ne sait pas quoi, 50 millions. Et là on rencontre le cabinet de l'Elysée, qui nous dit, ah non les gars, on n'a pas prévu ça, on n'a pas prévu de travailler sur nos hards et tout, on a prévu une enveloppe d'un milliard. 500 millions pour New World qui patauge dans la schmoule sévère quoi, parce qu'en même temps EDF n'a pas la volonté d'y aller, je veux dire, il le voit comme un concurrent des EPR. Et puis 511 autres millions sur des projets alternatifs, donc il faut créer une start-up. Les mecs sont tarés. Créer une start-up, l'intégration centrale, ça nécessite des capitaux financiers énormes. Personne ne te prête de l'argent parce que si tu fais sur un projet, tu peux boire le bouillon, faire des centaines de millions d'euros.

  • Speaker #0

    Je vois une start-up de l'État par délégation de confiance. Parce qu'il n'y a pas de moyen de financer par le marché ce type de...

  • Speaker #3

    Ça a été le déclic.

  • Speaker #0

    Ce type de start-up. Mais je comprends que là, vous avez pris conscience que vous pouviez le faire.

  • Speaker #2

    Au début, je me suis dit N'importe quoi, ce truc-là, ils ont craqué, les mecs. C'était tellement plus simple de créer 50 postes chez J-Steam, qui travaille sur l'intégration de petits SMR. Il y a toutes les compétences, etc. Parce que là, il va falloir les débaucher, les mecs. Pour leur dire On fait une startup, ça marchera bien ou peut-être que ça va se casser la gueule dans deux ans, alors qu'ils ont un bon salaire, dans une boîte qui ne va pas couler d'ici 20 ans. Surtout qu'en plus, comme on a vu, il ne fallait plus qu'il y ait des tickets de syndical. Donc c'est APSIS, à l'origine c'était des syndicalistes, mais le groupe de travail syndical était plutôt un groupe de lobbyistes. Là maintenant on va essayer de recruter une ou deux personnes, ils n'ont jamais fait le syndicalisme et tout, c'est des mecs qui sont dans le milieu. Et c'est eux qui vont porter le projet, et nous on est en back office et puis on donne un peu notre avis. Et c'est eux qui sont allés au charbon.

  • Speaker #0

    Donc elle s'appelle comment la startup ?

  • Speaker #2

    Next Engineering.

  • Speaker #3

    Next avec deux E.

  • Speaker #1

    Jean Maillard est donc passé d'animateur d'un groupe de travail chez Apsys à entrepreneur dans le nucléaire.

  • Speaker #3

    On a réfléchi à partir de ce moment-là, à partir de février, comment on peut faire pour créer une startup, qui on va voir parce qu'évidemment on a une belle idée mais il faut aller voir du monde. On est allé voir, alors maintenant que c'est public on peut le dire, on a commencé à aller voir General Electric, donc on a poussé la porte évidemment du voisin d'en face, ça paraîtait assez logique. Un accueil plutôt favorable dans la vision industrielle. Un peu plus compliqué dans le temps, on va dire, l'actualité de General Electric à ce moment-là, mais en tout cas une écoute au moins attentive sur l'idée du projet. Et avec une personne de General Electric, l'un des dirigeants de General Electric, on est allé voir Westinghouse. Pourquoi Westinghouse ? On a balayé un état de l'art des projets innovants dans le nucléaire, mais ceux qui étaient en capacité de fabriquer un réacteur. Donc ça limite un petit peu les gens en capacité de le faire. Et avec, on va dire... Une vision qui était de dire que ce serait très difficile pour nous de nous associer avec une startup, parce qu'une startup qui s'associe avec une startup, ça commence à faire un risque industriel au carré. Donc on était quand même plus sensibles à des gens qui étaient en capacité de mener le projet de manière industrielle et donc des acteurs historiques du secteur. Nous, ce qu'on souhaite faire dans Next Engineering, c'est d'apporter le petit nucléaire pour la décarbonation de l'industrie. Et pas forcément pour la fourniture telle qu'on le faisait historiquement de l'électricité sur les réseaux. Ça, on a un grand projet qui s'appelle New Ward qui va permettre de venir en concurrence du charbon ou en remplacement du charbon pour fournir l'électricité sur les territoires. Ça, c'est l'objectif de New Ward. Nous, on ne joue pas sur le même tableau. On s'est dit, on va faire un petit peu plus petit et on va aller directement s'installer auprès des industriels parce qu'on est des ingénieurs issus de l'industrie et qu'on connaît bien l'industrie et qu'on sait que c'est vraiment eux qui ont des forts besoins d'énergie. C'est ce qu'on appelle les électro-intensifs aujourd'hui, que je vais appeler énergético-intensifs, parce qu'ils n'ont pas besoin que d'électricité. Et donc clairement c'est cela, et nous on pense que l'énergie nucléaire, s'il y a bien un endroit dans notre société où on va encore en avoir besoin, quand on aura beaucoup d'énergie renouvelable, c'est bien ces lieux particuliers de consommation énergétique dans l'industrie. Puisque l'industrie c'est un tiers de besoin d'électricité et deux tiers de besoin de chaleur. Au monde, en France l'équilibre est un petit peu différent parce qu'on est très industrialisé. On a plutôt une industrie avale, donc on utilise beaucoup d'énergie électrique sur des machines-outils par exemple. Par contre, dans le reste du monde, on a beaucoup de production de matières premières, où là on a beaucoup besoin de chaleur. Donc ça veut dire que si on vient avec une énergie électrique décarbonée, verte, on ne résout que un tiers du problème. Le nerf de la guerre pour nous c'est la chaleur industrielle, et la chaleur industrielle c'est très difficile à produire avec des énergies renouvelables. Donc là le nucléaire a une vraie épingle de jeu à tirer, et en plus ce qui est assez intéressant, c'est presque une coïncidence, mais c'est comme ça, l'énergie nucléaire aujourd'hui c'est à peu près un tiers d'électricité et deux tiers de chaleur qui part dans des tuyères, qui part dans la nature. Donc là on se dit, on a un moyen non seulement d'utiliser la chaleur, donc du coup on rentabilise l'installation, et le deux tiers, un tiers, ça s'imbrique parfaitement. Et pour décarboner l'industrie, il faut faire des petits objets. Il faut faire des objets qui soient sûrs, il faut faire des objets qui soient faciles à opérer, et il faut faire des objets qui, par contre, soient multi-énergie. Électricité, chaleur, et pourquoi pas, hydrogène, ammoniaque, éthanol, méthanol, et on prend l'ensemble des composés chimiques qui ont besoin de chaleur dans leur process et d'électricité pour être fabriqués. Et une fois qu'on a dit ça, on a à peu près dit toute l'histoire, c'est-à-dire qu'on est des centrales métusage. Avec les compétences ici, on va les faire clé en main. Un industriel, ce n'est pas son métier de fabriquer l'hydrogène, même s'il en a besoin. Aujourd'hui, il l'achète. Alors certes, c'est de l'hydrogène carboné. Demain, il achètera de l'hydrogène décarboné qui sera produit directement sur site, avec des business models à inventer sur comment on va articuler tout ça. Mais en tout cas, on ne va pas demander à un industriel de récupérer une compétence supplémentaire qui est de dire qu'il va être obligé de se fabriquer son hydrogène alors qu'avant il l'achetait. On est sur de la technologie à neutrons rapides, on espère 8 à 10 ans de fonctionnement de l'installation. Ça aussi c'est très intéressant, c'est-à-dire qu'on installe un objet de production énergétique dans le périmètre de l'industriel et on lui dit là vous êtes assuré d'avoir de l'énergie pendant 10 ans, sans aucune opération, et à un prix qui est fixe, puisque de toute façon on a chargé en combustible, vous l'avez acheté, donc là pendant 10 ans vous avez votre énergie à un tarif qui est complètement stable. En termes de taille, on n'avait plus beaucoup de choix dans la technologie, donc on est allé voir Westinghouse et ils ont accepté d'envisager de créer un nouveau programme de R&D pour faire un réacteur plus petit.

  • Speaker #0

    Sur la base de leur réaction, la réaction qu'on a installée ici, c'est du France Westinghouse, mais réduit, c'est du miniature.

  • Speaker #3

    Alors on innove encore en plus par rapport à ça, parce que c'est sur la base d'un réacteur de génération 4 qui est déjà en développement chez eux. Les promesses de la génération 4, c'est d'éloigner trop rapidement. Et une tronc rapide, c'est Phoenix, Super Phoenix, Astrid. Vous connaissez bien. Avec une différence notable par rapport à Astrid, c'est qu'Astrid, on utilise le sodium comme vecteur de transport de l'énergie. Là, on utilise du plomb. En fait, le sodium et le plomb ont des caractéristiques qui sont très différentes d'un point de vue de transport de l'énergie. Le sodium est légèrement plus performant que le plomb pour transporter l'énergie. Par contre, le sodium a un gros défaut, c'est qu'il est réactif à l'air et à l'eau. C'est qu'il est explosif. Le plomb, c'est inerte. C'est un peu moins performant, c'est un peu plus délicat pour arriver à le faire. Mais c'est inerte et surtout, ça raconte une histoire qui pour moi est très importante. C'est que le plomb, c'est le matériau qui nous protège des radiations. Et le réacteur, il est à l'intérieur d'une bulle de plomb. Donc quelque part, intuitivement, on sait qu'on a un objet qui est plus sûr. Westinghouse développe ce réacteur-là, c'est un 950 MW thermique pour du 450 électrique. Il n'est pas en service, il est en développement depuis 2015. Donc on est en 2023, nous ce qui nous intéresse c'est qu'on est à peu près au bon moment pour faire une variante de leur design miniature. Ils ont beaucoup travaillé, donc ça veut dire qu'on part sur une bonne base. Si vous faites les études...

  • Speaker #0

    C'est quoi la répartition entre Westinghouse et vous ?

  • Speaker #3

    Nous, on vient les voir, on leur dit qu'on en veut un plus petit. Donc ça, ils disent, OK, ça, on va faire avec vous et on va se débrouiller pour en faire un plus petit. Donc c'est eux qui travaillent pour le faire plus petit. Par contre, on va le vouloir plus modulaire et avec des usages différents, c'est-à-dire qu'on va ponctionner de la chaleur différemment pour faire de l'hydrogène, pour faire de l'ammonia, pour faire d'autres choses. Donc ça va induire effectivement des modifications dans la conception. Et là, on va pouvoir le faire nous.

  • Speaker #0

    Vous allez prendre une licence, Westinghouse ? Le brevet, il est Westinghouse ou les Next ?

  • Speaker #3

    Alors, le brevet original, il est forcément Westinghouse, il va rester Westinghouse. Par contre, on est dans un appel à projet France 2030 dans lequel on les embarque. Donc, évidemment, on doit montrer que la souveraineté française est respectée. Donc, on va construire une propriété intellectuelle en France et bien sûr, les emplois en France. C'est-à-dire que c'est bien Westinghouse Électrique France qui est notre partenaire et qui va prendre des emplois en France pour développer leur activité là-dessus. Ce qui nous rassure sur l'idée que c'est une histoire qu'on raconte aujourd'hui, qui va être à peu près celle-ci, c'est que Westinghouse est de toute manière en train d'européaniser son projet, qui a débuté aux Etats-Unis parce que la R&D était aux Etats-Unis, mais aujourd'hui ils se sont mis en partenariat avec Ansaldo Nucleare, les Italiens. On est vraiment sur un projet qui est en train de basculer en R&D sur l'Europe, donc une fusion des deux projets sur l'Europe. Et nous, avec France 2030, ce qu'on dit c'est, vous êtes déjà en Europe, venez mettre un pied supplémentaire en France pour le développement de la filière. Avec cette équipe de 25 personnes, on va rester agile le plus longtemps possible pour faire ces développements-là. Et la phase qui commence là, qui est la phase 2023, enfin fin 2023 jusqu'à fin 2025, c'est vraiment une phase de recherche industrielle. On va poser les grandes contraintes structurantes. Il y a des contraintes qui sont assez logiques aujourd'hui qu'on a là un peu en tête. Par exemple, on s'adresse à l'industrie, on fournit de l'énergie à l'industrie. Si on a des opérations de maintenance à faire, elles doivent durer trois semaines, une fois par an, pas plus.

  • Speaker #0

    Ce regard de l'arrêt d'Astrid a été décidé par le gouvernement actuel, qui est notre projet de recherche publique dans le neutron rapide. Je m'étais battu pour le laisser survivre avec M. Bréchet à l'époque, qui était le haut commissaire de l'énergie atomique, et on avait réussi à éviter que l'austérité budgétaire n'ait eu raison du projet Astrid. Il a été arrêté finalement. Les projets de neutrons rapides existent en Chine, je crois aux États-Unis, en Russie, et il y en a qui fonctionnent. Quel est le combustible que vous allez utiliser ? C'est un point très important. Puisque ce n'est pas de l'uranium, du yellow cake sorti des mines d'Arlit, c'est du recyclage. Mais surtout, comment voyez-vous la question du combustible ? Et deuxièmement, comment vous positionnez-vous par rapport aux acquis du CEA d'Astrid ?

  • Speaker #3

    Les bénéfices de la génération 4 nucléaire, effectivement, parmi les bénéfices de cette génération 4, qui est la génération d'Astrid, c'est clairement d'améliorer la sûreté passive du système, mais c'est aussi... La promesse de pouvoir consommer les combustibles usés des anciennes centrales, en tout cas du parc existant. Si je schématise, parce que ce n'est pas tout à fait ça, notre objectif, c'est de vider la piscine de la Hague. Donc les combustibles usés, de pouvoir les utiliser. Et une autre promesse de la génération 4, c'est d'être en circuit fermé, c'est-à-dire d'être en capacité en plus. Les combustibles usés qui sortent du réacteur de la future centrale Sparta pourront être réinjectés après opération de recyclage, pourront être à nouveau réinjectés dans le système.

  • Speaker #0

    C'est dans la continuité d'Astrid, c'est la même suite. C'est la suite de l'histoire qui rebondit. Ici à Belfort.

  • Speaker #3

    En quelque sorte, il y a des différences techniques et technologiques, mais effectivement pour le grand public et la manière dont on appréhende les choses aujourd'hui, c'est effectivement quelque chose qui est très très proche d'Astrid.

  • Speaker #0

    Aujourd'hui on a 10 ans de réserve d'uranium en France, mais c'est de l'uranium qui doit être extrait, donc de mine. J'avais visité d'ailleurs les mines d'Arlit en Niger. Une négociation difficile avec le président nigérien à l'époque. Et on voit bien que l'uranium est un sujet qui va devenir une terre rare. Donc la stratégie consistant à utiliser l'uranium appauvri, comme vous dites, vider la piscine de l'Ague et réutiliser tous les déchets, règle le problème de la dépendance. d'un pays comme le nôtre, au combustible, quel uranium extrait des mines à l'étranger, car nous n'avons plus d'uranium dans notre pays. Je suis né dans une région, dans la Nièvre, où il y avait des mines d'uranium. Voilà, on allait se promener le dimanche, avec mon grand-père, dans les mines. J'ai découvert qu'elles étaient encore radioactives, donc je suis encore un petit peu radioactif.

  • Speaker #3

    Voilà,

  • Speaker #0

    donc on n'a plus de mines en France. Et donc c'est pour ça que c'est un point très important pour la souveraineté de notre pays.

  • Speaker #3

    On retourne la table vis-à-vis du nucléaire, c'est-à-dire que le nucléaire c'est un monde de technocrates, on développe des technologies, on a des superbes technologies, et puis ensuite derrière on regarde comment on les utilise. Nous on fait le chemin inverse, c'est-à-dire qu'on part du besoin de l'industriel et on se dit quelle technologie on va pouvoir mettre en œuvre pour arriver à répondre à ce besoin-là. Et ça, en fait, c'est tout un boulot d'ingénierie et d'intégration pour, à partir d'une technologie, on va être obligé de prendre des technologies qui sont déjà en cours de développement, qui existent, donc du coup, on fait avec et on doit les adapter pour les besoins des clients. Et c'est clairement l'ingénierie et l'intégration. Moi, j'ai un besoin, j'ai des objets. Comment je les mets en musique, c'est un peu l'histoire des Legos. Nous, on n'est pas des fabricants de briques de Lego, mais par contre, avec des briques de Lego, on peut faire énormément de choses très différentes. Donc nous, on va assembler ces briques de Lego pour obtenir la réponse aux besoins du client. C'est la matière dont on fonctionne aujourd'hui et qui, contre toute attente, paraît très originale dans le monde du nucléaire. On va évidemment présélectionner un certain nombre de technologies existantes qu'on va pouvoir utiliser. Ça, c'est le rôle de la première phase. Et l'assemblage de ces éléments-là, on va faire en sorte qu'ils soient le plus modulaire possible. C'est-à-dire, je vous prends un exemple tout bête. On discute avec la direction d'un aéroport international. Ils nous disent, nous, on a un souci, c'est qu'aujourd'hui, on achète de l'électricité. Et demain, on va peut-être devoir acheter 50, 100 fois plus d'électricité parce qu'on va devoir produire de l'hydrogène ou des carburants synthétiques pour les avions. Premier problème, j'ai des besoins de plusieurs centaines de mégawatts sur mon territoire. Eh bien, je n'ai pas l'appel de puissance, enfin, ce n'est pas possible. Le deuxième problème, c'est qu'en fait, entre l'hydrogène et les fuels synthétiques, Ce qu'on appelle SAF, c'est Sustainable Avionics Fuel. Retenez que c'est un peu l'histoire du bioéthanol, mais pour les avions en gros, même si c'est un peu différent. Il ne sait pas choisir, parce qu'évidemment personne n'a choisi, ça va s'imposer à lui, les avions vont se poser et vont lui demander quelque chose. Il dit, moi j'ai investi quoi ? J'ai investi des milliards dans l'hydrogène, et puis il y a un avion qui va se poser et qui va me dire, bonjour, j'aimerais bien mon plein de SAF. Ça ne va pas marcher. L'approche modulaire, ça va être de pouvoir dire, on va pouvoir vous développer une solution le plus longtemps possible, la plus aboutie possible, et peut-être de faire ce choix au dernier moment, parce qu'en termes de coût d'acquisition, ça va être à peu près équivalent, donc on pourra faire le choix au dernier moment, voire même si vous n'êtes pas en capacité de choisir, vous choisissez l'une des technologies parce que vous voyez que vous avez un débouché quand même pour l'utiliser, et puis dans 5 ans, dans 10 ans, peut-être qu'on la remplace. Donc c'est préfabriqué en usine, un EPR c'est fabriqué sur place. Donc nous ce qu'on dit c'est qu'à mégawatts équivalents, on pèsera beaucoup plus sur la balance extérieure commerciale de la France qu'un EPR. Alors, c'est des petits objets technologiques, évidemment. Donc, si on fait une comparaison avec le PR, c'est très petit. Évidemment, c'est difficile de le comparer. Par contre, on a vocation à en installer plein. Et partout dans le monde, ce n'est pas la France qui va réclamer ce genre d'objet. Nous, on est conscients que notre marché, ce n'est pas la France. On sera heureux d'en installer, bien évidemment. Je peux vous dire,

  • Speaker #0

    vous allez à Saint-Jean-de-Maurienne... qui est le smelter d'aluminium dans la vallée de la Maurienne. Bien sûr. Ils consomment l'équivalent de ce que consomme la ville de Lyon par an.

  • Speaker #3

    Oui, oui.

  • Speaker #0

    Au bout de la ligne, en Savoie, ils avaient les steppes, les barrages voire alimentés. C'est pilotable, les steppes, quand il n'y a plus d'eau.

  • Speaker #3

    L'industriel, son driver, si on doit lui apporter un seul argument sur la table pour qu'il achète la technologie, c'est la stabilité. Et la stabilité, ça s'achète. Donc moi, je n'ai pas de problème à dire que je pourrais imaginer une énergie qui est plus chère. Par contre, sur 10 ans, vous l'avez. Et effectivement, le STEP, c'est génial, mais il faut remonter l'eau. Ou alors, il faut profiter des pluies. Le STEP, c'est pas du tout un gymnastique,

  • Speaker #0

    c'est juste des barrages.

  • Speaker #3

    Oui, oui. Des barrages de montagne.

  • Speaker #0

    Donc on est conduit de forcée.

  • Speaker #3

    Par contre, le rebarrage, il est tributaire des pluies. Et aujourd'hui, quelque part, il profite du réchauffement climatique parce qu'il y a un glacier qui est en train de fondre. Et un jour, il n'y aura plus de glacier. Donc, ce n'est pas anodin, ces questions-là. Donc, la question de la stabilité du prix, pour moi, est plus importante.

  • Speaker #0

    On a encore 150 emplacements pour construire des barrages en France. Il n'y a pas mieux. Et c'est 12% du bouquet énergétique national. Franchement, c'est ce qui a fait une de nos forces, que les deux piliers de notre énergie pilotable, c'est le nucléaire et l'hydraulique. Contrairement au vent et au soleil, qu'on ne décide pas.

  • Speaker #1

    Pour développer Sparta, son SMR à neutrons rapides refroidis au plomb, le consortium coordonné par Next Engineering a déposé son dossier à l'appel à projet Réacteur nucléaire innovant de France 2030. Elle saura d'ici la fin de l'été si elle reçoit les 10 millions d'euros de subvention. La startup Belforten va boucler sa levée de fonds participatif de 400 000 euros auprès de centaines de citoyens.

Description

Les syndicalistes de General Electric Alexis Sesmat et Philippe Petitcolin se transforment en entrepreneurs néo-industriels du nucléaire. Ils nous racontent la genèse des start-ups du nucléaire lancées à Belfort avec l’argent des pénalités arraché à General Electric. Le cofondateur de Neext Engineering, Jean Maillard nous parle de Sparta, leur projet de petit réacteur nucléaire innovant qui bénéficie du soutien financier de la population belfortaine.


Co-réalisé par Renaud Duguet et Maxime Verner. 

Voix off : Elia.

Générique : Guillaume Bérat.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour les Vrais Souverains, je suis Arnaud Montebourg et j'approuve ce podcast. J'ai créé il y a quelques années les Équipes du Made in France qui contribuent à construire, reconstruire la nouvelle agriculture et la nouvelle industrie de notre pays. On le fait modestement, mais on le fait concrètement. Et je vous emmène à la rencontre des vrais souverains, celles et ceux qui se battent au quotidien pour que la France redevienne ce grand pays inspirant que nous aimons tant et où nous voulons vivre longtemps.

  • Speaker #1

    À Belfort, les syndicalistes d'Alstom devenus Général Électrique ont fait quelque chose d'exceptionnel. Pour maintenir les emplois qualifiés dans leur territoire, ils ont décidé de les créer eux-mêmes. Ils se sont transformés en entrepreneurs en lançant une association de préfiguration de sociétés d'intégration et ingénierie système nommée APSIS. Le délégué CGC Philippe Petit-Colin nous raconte ce que c'est et comment elle a permis la naissance de start-up dans le nucléaire à Belfort.

  • Speaker #2

    Donc, Absys, c'était une association éphémère. L'idée, c'était qu'on avait, à un moment donné, des centaines de salariés avec des compétences stratégiques et puis, à un moment donné, des voies qui s'ouvraient, de l'argent qui se déversait sur la partie nucléaire et hydrogène. Donc, comment, en fait, on fait une task force et puis, rapidement, on essaie de développer des nouvelles initiatives.

  • Speaker #0

    Pourquoi avez-vous décidé de vous lancer dans les SMR ?

  • Speaker #2

    Les SMR, c'est quoi ? C'est des petites centrales qui sont la même taille, la même puissance, potentiellement les mêmes clients qu'à ceux qu'on vend des centrales à gaz et charbon depuis des décennies. Vous, vous êtes sur un marché du nucléaire qui est un marché public. C'est tellement gros, c'est des états, etc. Là, le SMR, ça sera un marché privé.

  • Speaker #0

    C'est une centrale thermique, c'est 100 mégawatts, 200, 150 mégawatts.

  • Speaker #2

    Ça peut aller de 50 à 500 mégawatts.

  • Speaker #0

    Et là, votre projet, c'est de petits réacteurs nucléaires.

  • Speaker #2

    C'est ça. Et donc, en fait, toutes les méthodologies qui sont spécifiques au pas nucléaire, c'est-à-dire, nous, comment on vend des centrales, le différenciateur, ça a été longtemps, le délai. Il y avait beaucoup plus de demandes que de capacités de production dans les centrales tubines à gaz. C'est celui qui livrait le plus vite qu'arrivait à vendre. Donc on s'est inspiré en fait des conceptions modulaires automobiles en disant, nous vous commandez votre centrale sur catalogue, vous voulez telle option, telle option, telle option, telle option. On a dans le pipe un tas de centrales qui sont en cours de construction, on ne sait pas à qui on va les vendre parce qu'on va concevoir les modules spécifiques par rapport aux besoins et on va personnaliser au dernier moment au client. Ce qui fait que nous on a été capable de vendre des centrales en Tunisie. à Noël, au mois de juillet, elle délivrait de l'électricité. Donc la révolution qu'on veut faire sur le nucléaire, ça veut dire, nous on peut faire des centrales nucléaires modulaires, clés en main, personnalisables, en deux ans, trois ans. Donc nous on voulait, en fait, que dans le rachat, donc comment ça s'est passé, on fait une note, Bercy, Nucléaire Vallée, machin, etc., en disant voilà comment on peut rattraper notre retard et on peut être les champions, pourquoi on peut le faire aussi ? Parce qu'on l'a fait chez GE. Chez GE, il y a moins de 10 ans, il y avait un segment de marché qui s'appelle les très grosses turbines, H, qui s'est développé, GE n'y est pas allé, attendu que le marché soit mature et profitable. Et là, c'est les équipes d'EDF et les équipes de Belfort qui ont développé dans un temps record une centrale ultra-moderne en France, à Bouchain, avec EDF, qui a battu le record du monde de rendement. Cinq ans après, leader mondial. Cinq ans après, leader mondial. Ce qu'on a pu faire dans les turbines H, on peut le faire dans les SMR. Il n'y a aucun problème. Donc nous, on est arrivé avec ce truc-là, et on fait une note et tout, et ça tombe sur le bureau de Manu, deux jours avant qu'il fasse son discours au Creusot. Emmanuel Macron. Ah,

  • Speaker #0

    pardon.

  • Speaker #2

    C'est un intime. Et là, quand il fait son discours au Creusot en novembre, il dit, ah, on a un projet révolutionnaire pour la France, c'est les SMR. Et il reprend tout notre argumentaire. Et là, on dit, purée, c'est bon, ça a marché. Notre truc, ça a marché. Le courant passe. Le courant passe. Et donc du coup, maintenant on va lui dire, c'est tant de millions, tant de personnes qu'il faut recruter, telle équipe, etc. Et on sait qu'il vient en février, donc on demande à rencontrer son staff en février, et on leur renvoie toutes les notes avant. Et on espère qu'en février, en même temps qu'il annonce le rachat de trucs, il annonce notre petit projet qui était de 50 millions. Nous voulions 50 millions, on ne voulait pas 15 milliards, on ne sait pas quoi, 50 millions. Et là on rencontre le cabinet de l'Elysée, qui nous dit, ah non les gars, on n'a pas prévu ça, on n'a pas prévu de travailler sur nos hards et tout, on a prévu une enveloppe d'un milliard. 500 millions pour New World qui patauge dans la schmoule sévère quoi, parce qu'en même temps EDF n'a pas la volonté d'y aller, je veux dire, il le voit comme un concurrent des EPR. Et puis 511 autres millions sur des projets alternatifs, donc il faut créer une start-up. Les mecs sont tarés. Créer une start-up, l'intégration centrale, ça nécessite des capitaux financiers énormes. Personne ne te prête de l'argent parce que si tu fais sur un projet, tu peux boire le bouillon, faire des centaines de millions d'euros.

  • Speaker #0

    Je vois une start-up de l'État par délégation de confiance. Parce qu'il n'y a pas de moyen de financer par le marché ce type de...

  • Speaker #3

    Ça a été le déclic.

  • Speaker #0

    Ce type de start-up. Mais je comprends que là, vous avez pris conscience que vous pouviez le faire.

  • Speaker #2

    Au début, je me suis dit N'importe quoi, ce truc-là, ils ont craqué, les mecs. C'était tellement plus simple de créer 50 postes chez J-Steam, qui travaille sur l'intégration de petits SMR. Il y a toutes les compétences, etc. Parce que là, il va falloir les débaucher, les mecs. Pour leur dire On fait une startup, ça marchera bien ou peut-être que ça va se casser la gueule dans deux ans, alors qu'ils ont un bon salaire, dans une boîte qui ne va pas couler d'ici 20 ans. Surtout qu'en plus, comme on a vu, il ne fallait plus qu'il y ait des tickets de syndical. Donc c'est APSIS, à l'origine c'était des syndicalistes, mais le groupe de travail syndical était plutôt un groupe de lobbyistes. Là maintenant on va essayer de recruter une ou deux personnes, ils n'ont jamais fait le syndicalisme et tout, c'est des mecs qui sont dans le milieu. Et c'est eux qui vont porter le projet, et nous on est en back office et puis on donne un peu notre avis. Et c'est eux qui sont allés au charbon.

  • Speaker #0

    Donc elle s'appelle comment la startup ?

  • Speaker #2

    Next Engineering.

  • Speaker #3

    Next avec deux E.

  • Speaker #1

    Jean Maillard est donc passé d'animateur d'un groupe de travail chez Apsys à entrepreneur dans le nucléaire.

  • Speaker #3

    On a réfléchi à partir de ce moment-là, à partir de février, comment on peut faire pour créer une startup, qui on va voir parce qu'évidemment on a une belle idée mais il faut aller voir du monde. On est allé voir, alors maintenant que c'est public on peut le dire, on a commencé à aller voir General Electric, donc on a poussé la porte évidemment du voisin d'en face, ça paraîtait assez logique. Un accueil plutôt favorable dans la vision industrielle. Un peu plus compliqué dans le temps, on va dire, l'actualité de General Electric à ce moment-là, mais en tout cas une écoute au moins attentive sur l'idée du projet. Et avec une personne de General Electric, l'un des dirigeants de General Electric, on est allé voir Westinghouse. Pourquoi Westinghouse ? On a balayé un état de l'art des projets innovants dans le nucléaire, mais ceux qui étaient en capacité de fabriquer un réacteur. Donc ça limite un petit peu les gens en capacité de le faire. Et avec, on va dire... Une vision qui était de dire que ce serait très difficile pour nous de nous associer avec une startup, parce qu'une startup qui s'associe avec une startup, ça commence à faire un risque industriel au carré. Donc on était quand même plus sensibles à des gens qui étaient en capacité de mener le projet de manière industrielle et donc des acteurs historiques du secteur. Nous, ce qu'on souhaite faire dans Next Engineering, c'est d'apporter le petit nucléaire pour la décarbonation de l'industrie. Et pas forcément pour la fourniture telle qu'on le faisait historiquement de l'électricité sur les réseaux. Ça, on a un grand projet qui s'appelle New Ward qui va permettre de venir en concurrence du charbon ou en remplacement du charbon pour fournir l'électricité sur les territoires. Ça, c'est l'objectif de New Ward. Nous, on ne joue pas sur le même tableau. On s'est dit, on va faire un petit peu plus petit et on va aller directement s'installer auprès des industriels parce qu'on est des ingénieurs issus de l'industrie et qu'on connaît bien l'industrie et qu'on sait que c'est vraiment eux qui ont des forts besoins d'énergie. C'est ce qu'on appelle les électro-intensifs aujourd'hui, que je vais appeler énergético-intensifs, parce qu'ils n'ont pas besoin que d'électricité. Et donc clairement c'est cela, et nous on pense que l'énergie nucléaire, s'il y a bien un endroit dans notre société où on va encore en avoir besoin, quand on aura beaucoup d'énergie renouvelable, c'est bien ces lieux particuliers de consommation énergétique dans l'industrie. Puisque l'industrie c'est un tiers de besoin d'électricité et deux tiers de besoin de chaleur. Au monde, en France l'équilibre est un petit peu différent parce qu'on est très industrialisé. On a plutôt une industrie avale, donc on utilise beaucoup d'énergie électrique sur des machines-outils par exemple. Par contre, dans le reste du monde, on a beaucoup de production de matières premières, où là on a beaucoup besoin de chaleur. Donc ça veut dire que si on vient avec une énergie électrique décarbonée, verte, on ne résout que un tiers du problème. Le nerf de la guerre pour nous c'est la chaleur industrielle, et la chaleur industrielle c'est très difficile à produire avec des énergies renouvelables. Donc là le nucléaire a une vraie épingle de jeu à tirer, et en plus ce qui est assez intéressant, c'est presque une coïncidence, mais c'est comme ça, l'énergie nucléaire aujourd'hui c'est à peu près un tiers d'électricité et deux tiers de chaleur qui part dans des tuyères, qui part dans la nature. Donc là on se dit, on a un moyen non seulement d'utiliser la chaleur, donc du coup on rentabilise l'installation, et le deux tiers, un tiers, ça s'imbrique parfaitement. Et pour décarboner l'industrie, il faut faire des petits objets. Il faut faire des objets qui soient sûrs, il faut faire des objets qui soient faciles à opérer, et il faut faire des objets qui, par contre, soient multi-énergie. Électricité, chaleur, et pourquoi pas, hydrogène, ammoniaque, éthanol, méthanol, et on prend l'ensemble des composés chimiques qui ont besoin de chaleur dans leur process et d'électricité pour être fabriqués. Et une fois qu'on a dit ça, on a à peu près dit toute l'histoire, c'est-à-dire qu'on est des centrales métusage. Avec les compétences ici, on va les faire clé en main. Un industriel, ce n'est pas son métier de fabriquer l'hydrogène, même s'il en a besoin. Aujourd'hui, il l'achète. Alors certes, c'est de l'hydrogène carboné. Demain, il achètera de l'hydrogène décarboné qui sera produit directement sur site, avec des business models à inventer sur comment on va articuler tout ça. Mais en tout cas, on ne va pas demander à un industriel de récupérer une compétence supplémentaire qui est de dire qu'il va être obligé de se fabriquer son hydrogène alors qu'avant il l'achetait. On est sur de la technologie à neutrons rapides, on espère 8 à 10 ans de fonctionnement de l'installation. Ça aussi c'est très intéressant, c'est-à-dire qu'on installe un objet de production énergétique dans le périmètre de l'industriel et on lui dit là vous êtes assuré d'avoir de l'énergie pendant 10 ans, sans aucune opération, et à un prix qui est fixe, puisque de toute façon on a chargé en combustible, vous l'avez acheté, donc là pendant 10 ans vous avez votre énergie à un tarif qui est complètement stable. En termes de taille, on n'avait plus beaucoup de choix dans la technologie, donc on est allé voir Westinghouse et ils ont accepté d'envisager de créer un nouveau programme de R&D pour faire un réacteur plus petit.

  • Speaker #0

    Sur la base de leur réaction, la réaction qu'on a installée ici, c'est du France Westinghouse, mais réduit, c'est du miniature.

  • Speaker #3

    Alors on innove encore en plus par rapport à ça, parce que c'est sur la base d'un réacteur de génération 4 qui est déjà en développement chez eux. Les promesses de la génération 4, c'est d'éloigner trop rapidement. Et une tronc rapide, c'est Phoenix, Super Phoenix, Astrid. Vous connaissez bien. Avec une différence notable par rapport à Astrid, c'est qu'Astrid, on utilise le sodium comme vecteur de transport de l'énergie. Là, on utilise du plomb. En fait, le sodium et le plomb ont des caractéristiques qui sont très différentes d'un point de vue de transport de l'énergie. Le sodium est légèrement plus performant que le plomb pour transporter l'énergie. Par contre, le sodium a un gros défaut, c'est qu'il est réactif à l'air et à l'eau. C'est qu'il est explosif. Le plomb, c'est inerte. C'est un peu moins performant, c'est un peu plus délicat pour arriver à le faire. Mais c'est inerte et surtout, ça raconte une histoire qui pour moi est très importante. C'est que le plomb, c'est le matériau qui nous protège des radiations. Et le réacteur, il est à l'intérieur d'une bulle de plomb. Donc quelque part, intuitivement, on sait qu'on a un objet qui est plus sûr. Westinghouse développe ce réacteur-là, c'est un 950 MW thermique pour du 450 électrique. Il n'est pas en service, il est en développement depuis 2015. Donc on est en 2023, nous ce qui nous intéresse c'est qu'on est à peu près au bon moment pour faire une variante de leur design miniature. Ils ont beaucoup travaillé, donc ça veut dire qu'on part sur une bonne base. Si vous faites les études...

  • Speaker #0

    C'est quoi la répartition entre Westinghouse et vous ?

  • Speaker #3

    Nous, on vient les voir, on leur dit qu'on en veut un plus petit. Donc ça, ils disent, OK, ça, on va faire avec vous et on va se débrouiller pour en faire un plus petit. Donc c'est eux qui travaillent pour le faire plus petit. Par contre, on va le vouloir plus modulaire et avec des usages différents, c'est-à-dire qu'on va ponctionner de la chaleur différemment pour faire de l'hydrogène, pour faire de l'ammonia, pour faire d'autres choses. Donc ça va induire effectivement des modifications dans la conception. Et là, on va pouvoir le faire nous.

  • Speaker #0

    Vous allez prendre une licence, Westinghouse ? Le brevet, il est Westinghouse ou les Next ?

  • Speaker #3

    Alors, le brevet original, il est forcément Westinghouse, il va rester Westinghouse. Par contre, on est dans un appel à projet France 2030 dans lequel on les embarque. Donc, évidemment, on doit montrer que la souveraineté française est respectée. Donc, on va construire une propriété intellectuelle en France et bien sûr, les emplois en France. C'est-à-dire que c'est bien Westinghouse Électrique France qui est notre partenaire et qui va prendre des emplois en France pour développer leur activité là-dessus. Ce qui nous rassure sur l'idée que c'est une histoire qu'on raconte aujourd'hui, qui va être à peu près celle-ci, c'est que Westinghouse est de toute manière en train d'européaniser son projet, qui a débuté aux Etats-Unis parce que la R&D était aux Etats-Unis, mais aujourd'hui ils se sont mis en partenariat avec Ansaldo Nucleare, les Italiens. On est vraiment sur un projet qui est en train de basculer en R&D sur l'Europe, donc une fusion des deux projets sur l'Europe. Et nous, avec France 2030, ce qu'on dit c'est, vous êtes déjà en Europe, venez mettre un pied supplémentaire en France pour le développement de la filière. Avec cette équipe de 25 personnes, on va rester agile le plus longtemps possible pour faire ces développements-là. Et la phase qui commence là, qui est la phase 2023, enfin fin 2023 jusqu'à fin 2025, c'est vraiment une phase de recherche industrielle. On va poser les grandes contraintes structurantes. Il y a des contraintes qui sont assez logiques aujourd'hui qu'on a là un peu en tête. Par exemple, on s'adresse à l'industrie, on fournit de l'énergie à l'industrie. Si on a des opérations de maintenance à faire, elles doivent durer trois semaines, une fois par an, pas plus.

  • Speaker #0

    Ce regard de l'arrêt d'Astrid a été décidé par le gouvernement actuel, qui est notre projet de recherche publique dans le neutron rapide. Je m'étais battu pour le laisser survivre avec M. Bréchet à l'époque, qui était le haut commissaire de l'énergie atomique, et on avait réussi à éviter que l'austérité budgétaire n'ait eu raison du projet Astrid. Il a été arrêté finalement. Les projets de neutrons rapides existent en Chine, je crois aux États-Unis, en Russie, et il y en a qui fonctionnent. Quel est le combustible que vous allez utiliser ? C'est un point très important. Puisque ce n'est pas de l'uranium, du yellow cake sorti des mines d'Arlit, c'est du recyclage. Mais surtout, comment voyez-vous la question du combustible ? Et deuxièmement, comment vous positionnez-vous par rapport aux acquis du CEA d'Astrid ?

  • Speaker #3

    Les bénéfices de la génération 4 nucléaire, effectivement, parmi les bénéfices de cette génération 4, qui est la génération d'Astrid, c'est clairement d'améliorer la sûreté passive du système, mais c'est aussi... La promesse de pouvoir consommer les combustibles usés des anciennes centrales, en tout cas du parc existant. Si je schématise, parce que ce n'est pas tout à fait ça, notre objectif, c'est de vider la piscine de la Hague. Donc les combustibles usés, de pouvoir les utiliser. Et une autre promesse de la génération 4, c'est d'être en circuit fermé, c'est-à-dire d'être en capacité en plus. Les combustibles usés qui sortent du réacteur de la future centrale Sparta pourront être réinjectés après opération de recyclage, pourront être à nouveau réinjectés dans le système.

  • Speaker #0

    C'est dans la continuité d'Astrid, c'est la même suite. C'est la suite de l'histoire qui rebondit. Ici à Belfort.

  • Speaker #3

    En quelque sorte, il y a des différences techniques et technologiques, mais effectivement pour le grand public et la manière dont on appréhende les choses aujourd'hui, c'est effectivement quelque chose qui est très très proche d'Astrid.

  • Speaker #0

    Aujourd'hui on a 10 ans de réserve d'uranium en France, mais c'est de l'uranium qui doit être extrait, donc de mine. J'avais visité d'ailleurs les mines d'Arlit en Niger. Une négociation difficile avec le président nigérien à l'époque. Et on voit bien que l'uranium est un sujet qui va devenir une terre rare. Donc la stratégie consistant à utiliser l'uranium appauvri, comme vous dites, vider la piscine de l'Ague et réutiliser tous les déchets, règle le problème de la dépendance. d'un pays comme le nôtre, au combustible, quel uranium extrait des mines à l'étranger, car nous n'avons plus d'uranium dans notre pays. Je suis né dans une région, dans la Nièvre, où il y avait des mines d'uranium. Voilà, on allait se promener le dimanche, avec mon grand-père, dans les mines. J'ai découvert qu'elles étaient encore radioactives, donc je suis encore un petit peu radioactif.

  • Speaker #3

    Voilà,

  • Speaker #0

    donc on n'a plus de mines en France. Et donc c'est pour ça que c'est un point très important pour la souveraineté de notre pays.

  • Speaker #3

    On retourne la table vis-à-vis du nucléaire, c'est-à-dire que le nucléaire c'est un monde de technocrates, on développe des technologies, on a des superbes technologies, et puis ensuite derrière on regarde comment on les utilise. Nous on fait le chemin inverse, c'est-à-dire qu'on part du besoin de l'industriel et on se dit quelle technologie on va pouvoir mettre en œuvre pour arriver à répondre à ce besoin-là. Et ça, en fait, c'est tout un boulot d'ingénierie et d'intégration pour, à partir d'une technologie, on va être obligé de prendre des technologies qui sont déjà en cours de développement, qui existent, donc du coup, on fait avec et on doit les adapter pour les besoins des clients. Et c'est clairement l'ingénierie et l'intégration. Moi, j'ai un besoin, j'ai des objets. Comment je les mets en musique, c'est un peu l'histoire des Legos. Nous, on n'est pas des fabricants de briques de Lego, mais par contre, avec des briques de Lego, on peut faire énormément de choses très différentes. Donc nous, on va assembler ces briques de Lego pour obtenir la réponse aux besoins du client. C'est la matière dont on fonctionne aujourd'hui et qui, contre toute attente, paraît très originale dans le monde du nucléaire. On va évidemment présélectionner un certain nombre de technologies existantes qu'on va pouvoir utiliser. Ça, c'est le rôle de la première phase. Et l'assemblage de ces éléments-là, on va faire en sorte qu'ils soient le plus modulaire possible. C'est-à-dire, je vous prends un exemple tout bête. On discute avec la direction d'un aéroport international. Ils nous disent, nous, on a un souci, c'est qu'aujourd'hui, on achète de l'électricité. Et demain, on va peut-être devoir acheter 50, 100 fois plus d'électricité parce qu'on va devoir produire de l'hydrogène ou des carburants synthétiques pour les avions. Premier problème, j'ai des besoins de plusieurs centaines de mégawatts sur mon territoire. Eh bien, je n'ai pas l'appel de puissance, enfin, ce n'est pas possible. Le deuxième problème, c'est qu'en fait, entre l'hydrogène et les fuels synthétiques, Ce qu'on appelle SAF, c'est Sustainable Avionics Fuel. Retenez que c'est un peu l'histoire du bioéthanol, mais pour les avions en gros, même si c'est un peu différent. Il ne sait pas choisir, parce qu'évidemment personne n'a choisi, ça va s'imposer à lui, les avions vont se poser et vont lui demander quelque chose. Il dit, moi j'ai investi quoi ? J'ai investi des milliards dans l'hydrogène, et puis il y a un avion qui va se poser et qui va me dire, bonjour, j'aimerais bien mon plein de SAF. Ça ne va pas marcher. L'approche modulaire, ça va être de pouvoir dire, on va pouvoir vous développer une solution le plus longtemps possible, la plus aboutie possible, et peut-être de faire ce choix au dernier moment, parce qu'en termes de coût d'acquisition, ça va être à peu près équivalent, donc on pourra faire le choix au dernier moment, voire même si vous n'êtes pas en capacité de choisir, vous choisissez l'une des technologies parce que vous voyez que vous avez un débouché quand même pour l'utiliser, et puis dans 5 ans, dans 10 ans, peut-être qu'on la remplace. Donc c'est préfabriqué en usine, un EPR c'est fabriqué sur place. Donc nous ce qu'on dit c'est qu'à mégawatts équivalents, on pèsera beaucoup plus sur la balance extérieure commerciale de la France qu'un EPR. Alors, c'est des petits objets technologiques, évidemment. Donc, si on fait une comparaison avec le PR, c'est très petit. Évidemment, c'est difficile de le comparer. Par contre, on a vocation à en installer plein. Et partout dans le monde, ce n'est pas la France qui va réclamer ce genre d'objet. Nous, on est conscients que notre marché, ce n'est pas la France. On sera heureux d'en installer, bien évidemment. Je peux vous dire,

  • Speaker #0

    vous allez à Saint-Jean-de-Maurienne... qui est le smelter d'aluminium dans la vallée de la Maurienne. Bien sûr. Ils consomment l'équivalent de ce que consomme la ville de Lyon par an.

  • Speaker #3

    Oui, oui.

  • Speaker #0

    Au bout de la ligne, en Savoie, ils avaient les steppes, les barrages voire alimentés. C'est pilotable, les steppes, quand il n'y a plus d'eau.

  • Speaker #3

    L'industriel, son driver, si on doit lui apporter un seul argument sur la table pour qu'il achète la technologie, c'est la stabilité. Et la stabilité, ça s'achète. Donc moi, je n'ai pas de problème à dire que je pourrais imaginer une énergie qui est plus chère. Par contre, sur 10 ans, vous l'avez. Et effectivement, le STEP, c'est génial, mais il faut remonter l'eau. Ou alors, il faut profiter des pluies. Le STEP, c'est pas du tout un gymnastique,

  • Speaker #0

    c'est juste des barrages.

  • Speaker #3

    Oui, oui. Des barrages de montagne.

  • Speaker #0

    Donc on est conduit de forcée.

  • Speaker #3

    Par contre, le rebarrage, il est tributaire des pluies. Et aujourd'hui, quelque part, il profite du réchauffement climatique parce qu'il y a un glacier qui est en train de fondre. Et un jour, il n'y aura plus de glacier. Donc, ce n'est pas anodin, ces questions-là. Donc, la question de la stabilité du prix, pour moi, est plus importante.

  • Speaker #0

    On a encore 150 emplacements pour construire des barrages en France. Il n'y a pas mieux. Et c'est 12% du bouquet énergétique national. Franchement, c'est ce qui a fait une de nos forces, que les deux piliers de notre énergie pilotable, c'est le nucléaire et l'hydraulique. Contrairement au vent et au soleil, qu'on ne décide pas.

  • Speaker #1

    Pour développer Sparta, son SMR à neutrons rapides refroidis au plomb, le consortium coordonné par Next Engineering a déposé son dossier à l'appel à projet Réacteur nucléaire innovant de France 2030. Elle saura d'ici la fin de l'été si elle reçoit les 10 millions d'euros de subvention. La startup Belforten va boucler sa levée de fonds participatif de 400 000 euros auprès de centaines de citoyens.

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