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Luso Bribes

25 avril: symboles d'une révolution

25 avril: symboles d'une révolution

15min |20/04/2025
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Description

Nous y sommes, le premier mois d’avril depuis la création du podcast. Au Portugal, depuis 51 ans, ce mois est avant tout celui où l’on célèbre la liberté et la démocratie. Le 25 avril 1974, la Révolution des Oeillets mettait fin à 48 ans de dictature. Depuis, tous les ans, les portugais descendent dans la rue, revendiquant ensemble leur vision d’un futur libre pour leur pays. Alors que l’obscurité progresse, ici comme ailleurs, et que le passé est parfois réécrit par de sordides nostalgiques, impossible de ne pas y consacrer un épisode !


Bonne écoute !

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Logo: © Les artichauts brûlent aussi

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Générique de début: © Pierre Herault


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, hola chers auditeurs et auditrices de l'Usobrib, nous y sommes, le premier mois d'avril depuis la création du podcast. Au Portugal, depuis 51 ans, ce mois est avant tout celui où l'on célèbre la liberté et la démocratie. Le 25 avril 1974... La révolution des OIEM était fin à de trop longues années de dictature. Depuis, tous les ans, les Portugais descendent dans la rue revendiquant ensemble leur vision d'un futur libre pour leur pays. Alors que l'obscurité progresse, ici comme ailleurs, et que le passé est parfois réécrit par de sordides nostalgiques, impossible de ne pas y consacrer un épisode. Je ne suis pas historienne. Faire un épisode sur la Révolution, c'est vertigineux. C'est un événement historique complexe, aux multiples origines, et porté par des courants parfois contradictoires et imbriqués. Alors, avant de m'embarquer pleinement dans l'épisode, laissez-moi vous faire une recommandation. Lisez le livre de Victor Pereira, « C'est le peuple qui commande » , « La Révolution des œillets » 1974-1976, aux éditions du Détour. Clair, accessible et passionnant, il résume bien mieux que ce qui va suivre cette période, tout en donnant des pistes de réflexion et de compréhension sur ce que cette révolution a laissé de trace dans la culture portugaise d'aujourd'hui. En plus, j'ai eu la chance de le rencontrer à Porto l'année dernière, alors je peux vous le dire, le gars est hyper sympa. Il est très bon, je le recommande. Bon, fini de gagner du temps. Je vais vous faire un topo rapide. La Révolution des œillets a donc mis fin à près de 50 ans de dictature au Portugal, ayant commencé avec un coup d'État militaire en 1926, avant l'instauration de l'État de Nouveau, État nouveau, en 1933 par Salazar. Pour la Révolution qui nous intéresse aussi, tout part d'un coup d'État militaire, orchestré par le Mouvement des Forces Armées, MFA. Ce dernier est composé en majorité de jeunes capitaines, qui veulent mettre fin aux guerres coloniales dans lesquelles le pays est embourbé. Cette révolution a la particularité de s'être déroulée sans effusion de sang, seules trois morts, dont deux civils par le régime, et a été soutenue massivement par la population, fatiguée des guerres, de la misère et de la répression. Elle a initié la décolonisation du Portugal et a marqué le début d'une longue transition vers une organisation démocratique du pouvoir. J'ai longuement réfléchi à comment vous parler de cette période tout en respectant mon format et en limitant mon fichu syndrome de l'imposteur. Plutôt que de me risquer sur les pentes glissantes de l'approximation historique, je fais donc le choix de parler symboles. Dans cet épisode, on va parler fleurs, musique, cinéma... Ça vous dit ? Alors commençons par le plus évident. Cette révolution porte le nom d'une fleur, les œillets. Sur les photos de l'événement, on voit des soldats, armes relevées sur l'épaule, fleurs dépassant du canon. C'est un symbole extrêmement fort ici. On les achète par brassée le 25 avant d'aller défiler, on les brode sur les boutonnières ou comme moi récemment, on s'en fabrique des broches en céramique. La meuf n'est pas peu fière. Mais alors, ça vient d'où ? Ce que cette fleur représente avant tout, c'est une surprise, un imprévu, celui du soutien total et massif des habitants de Lisbonne aux militaires du MFA. En effet, lors de la préparation du coup, les capitaines sont clairs. Les civils ne doivent pas sortir, ne doivent pas s'impliquer, pour éviter de prendre des risques et un potentiel bain de sang dans la foule. Lors de tentatives de coups passés, les portugaises, sonnés et domiciles, dominé par les mécanismes oppressifs qu'ils subissent pour certains depuis toujours, sont restés invisibles. Or, le 25 avril, dès que la rumeur se répand, le peuple de la Baïche de Lisbonne acclame les révolutionnaires, leur offrant leur soutien, leur nourriture et des fleurs. Plusieurs histoires circulent à ce propos. Ces dernières années, le nom de Céleste Caillerault a émergé. Cet employé de restaurant de 40 ans avait été chargé par son patron de préparer des œillets, qui devaient être offerts à la clientèle le 25, à l'occasion du premier anniversaire de l'établissement. Manque de bol pour cette petite fiesta, le MFA ordonne la fermeture des établissements commerciaux. Céleste rentre donc chez elle, dans le quartier du Chiado, ses fleurs sous le bras. Quand elle croise un soldat, elle l'interroge. Mais qu'est-ce qui se passe, bon sang ? Celui-ci lui explique et lui demande une clope. La révolution façon décontracte 70's. Notre amie n'en ayant pas, elle lui offre un œillet, qui atterrit dans le canon du fusil. Ni une ni deux, c'est une trend. Ce soldat aurait alors été imité par ses camarades, un symbole d'Odiada Libertad, jour de la liberté, est né. Il n'est pas le seul. L'autre grand marqueur de la Révolution est musical. En effet, le top départ du mouvement s'est passé sur les ondes. Le jour J, les unités militaires tendent une oreille attentive vers leur poste. Les jours précédents, Othello Sarreiva de Carvalho, l'un des grands héros de notre histoire, est entré en contact avec un employé de la radio Emisores Associados. À 22h55 précisément, elle diffusera une chanson signale insoupçonnable. Et Depoige do Adeu, interprété par Paulo de Carvalho, une chanson romantique ayant représenté le Portugal à l'Eurovision la même année. Un des flops complets du concours sur les champions à seulement 3 points.

  • Speaker #1

    et sa vie non non

  • Speaker #0

    Problème, cette radio est locale et ne peut pas être écoutée à Porto par exemple ou d'autres équipes attendent elles aussi le signal. Qu'à cela ne tienne, on contacte également Radio Renaissance, une radio détenue par l'église catholique. On leur demande de diffuser cette fois une chanson de José Afonso, dit Zeca Afonso, Grandola Villa Morena. Cette fois, le choix est nettement moins anecdotique. Il s'agit d'un célèbre chanteur contestataire, auteur de textes dénonçant la dictature à Moab. peine couvert. Nombre de ses morceaux sont d'ailleurs interdits par la censure. Cette chanson, étrangement, y a échappé. Elle a été enregistrée en France en 1971 et proclame que c'est le peuple qui commande. Le ton est donné. Elle plane d'ailleurs déjà dans l'air puisque Zeca Afonso l'a fait reprendre par la foule en chœur lors de la première rencontre de la chanson portugaise le 29 mars, soit 28 jours avant la révolution. À minuit 20, la chanson résonne à à travers toutes les... Pour découvrir d'autres musiques engagées de cette période, je vous invite à explorer plus loin ce qu'on appelle les musiques d'intervention. En effet, on nomme ainsi ce genre musical engagé, dénonçant les injustices, l'oppression et les inégalités, tout en lançant un appel à la réflexion et à la mobilisation collective. Si on le retrouve beaucoup au Portugal, où il est né dans le creuset des résistances face à l'Estat de Novo, on retrouve aussi énormément ces musiques en Amérique latine. En ce qui concerne les portugais, je vous invite à explorer notamment le registre de José Mario Branco, Sergio Goudinho, Adriano Correia de Oliveira et Carlos Paredes. J'aime beaucoup aussi la chanson Somos livres, Nous sommes libres, d'Hermelinda Duarte, célébrant la liberté retrouvée après la chute de la dictature. Et comme ça manque encore un peu de femmes, du côté des musiques actuelles, je vous invite à écouter Agarotanaon ou encore Capicua.

  • Speaker #2

    C'est ce que tu portes dans tes bras Ce qui te permet de s'abandonner Ce qui te permet de s'abandonner

  • Speaker #0

    Des fleurs et de la musique, une bonne base pour aborder les commémorations. Mais il nous manque une chose essentielle, des slogans. De nombreuses phrases ont marqué la révolution des œillets. Le 26 avril, la foule est réunie pour assister à la libération d'Herminio da Palma e Nacio de la prison où il est enfermé depuis 6 mois comme prisonnier politique. Franchement, le personnage vaut le coup de quelques recherches, voire d'un futur épisode tant il est épique. Sa libération est un message extrêmement fort, le signal d'un changement jusqu'alors inespéré. Pour l'accueillir, le peuple scande un slogan repris au Chili d'Allende. « Au pauvre unir, jamais se ravincir. » « Le peuple uni ne sera jamais vaincu. » Cette phrase vient d'une chanson chilienne de 73, qui a été traduite et interprétée en portugais par Louis Cillia en 74. Petit extrait.

  • Speaker #3

    Chantons que nous allons triompher Avant le son de la bande Les bandes d'unité vont déjà se développer Doublés de victoire Et tu verras Ton chant et ta bande pour rester à l'aise Et un jour pour le dimanche Millions d'appels Faites la nouvelle histoire De paix Merci. marcher et le peuple va triompher. Maintenant, personne ne...

  • Speaker #0

    Autre message fort scandé par le peuple, « A terra a quem a travail » soit « La terre appartient à ceux qui la travaillent » . Ici, on retrouve l'éternelle question de la lutte des classes et de l'injustice profonde entre ceux qui possèdent la force de travail et ceux qui les exploitent. Ne me lancez pas là-dessus. Cette phrase porte l'espoir d'une nouvelle répartition des richesses ... qui, si elle sera tentée, ne verra finalement jamais le jour pleinement au Portugal. Aujourd'hui, dans les cortèges, résonne également 25 avril pour toujours et fascisme non jamais ! Jamais plus le fascisme. Des messages qu'il est bon de répéter en chœur de temps en temps. Ils sont nombreux, ces souvenirs du 25 avril. Si vous êtes de passage à Lisbonne, n'hésitez pas à passer sur la place du Carmo, où Marcelo Caetano s'est rendu aux forces révolutionnaires. Visitez le musée de la Résistance, dans l'ancienne prison de l'Aljoub, et admirez le pont du 25 avril, anciennement pont Salazar. Pour ceux qui n'auront pas la chance de voyager, je vous conseille un film incroyable qu'une amie m'a fait découvrir l'an dernier. Capitaine d'Avril, sorti en l'an 2000. Réalisé par Maria de Medeiros, il s'agit d'une coproduction européenne. Il se concentre sur la journée même du 25 avril 1974 et accompagne deux capitaines insurgées. J'ai trouvé qu'il montrait magnifiquement l'état du Portugal de l'époque, le miracle d'avoir évité une escalade de la violence, la ferveur de la population et la fragilité du pays, même une fois la liberté à arracher. Je vous invite évidemment à l'acheter ou à le louer, ou à l'emprunter dans votre médiathèque préférée. Mais il est également trouvable sur Youtube avec des sous-titres en français. Alors récapitulons. Des œillets rouges, des chansons badass et des slogans vibrants. Les symboles du 25 avril racontent l'histoire d'un peuple avide de liberté, ayant délogé sans effusion de sang une élite dirigeante fascinante, inapte à maintenir une dictature à bout de souffle contre la volonté populaire. Les soldats du mouvement des forces armées, les voix de Zeca Afonso et de Paolo de Carvalho, les mains anonymes qui ont tendu des fleurs ou brandi des pancartes, tous et toutes ont tissé la trame d'une révolution unique. Ces images, ces musiques, ces mots sont bien plus que des souvenirs. Ils sont la preuve de la force vitale des peuples, d'une soif de liberté qui ne saurait être étouffée pour toujours. À nous de ne pas perdre la mémoire. Le 25 avril n'est pas qu'une date, c'est un appel à la vigilance, à la solidarité et à la célébration d'un courage collectif. Merci pour votre écoute et bon dia da libertad a todos y todos. N'hésitez pas à me laisser un commentaire ou un avis sur votre plateforme de podcast préférée. A bientôt !

Description

Nous y sommes, le premier mois d’avril depuis la création du podcast. Au Portugal, depuis 51 ans, ce mois est avant tout celui où l’on célèbre la liberté et la démocratie. Le 25 avril 1974, la Révolution des Oeillets mettait fin à 48 ans de dictature. Depuis, tous les ans, les portugais descendent dans la rue, revendiquant ensemble leur vision d’un futur libre pour leur pays. Alors que l’obscurité progresse, ici comme ailleurs, et que le passé est parfois réécrit par de sordides nostalgiques, impossible de ne pas y consacrer un épisode !


Bonne écoute !

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  • Speaker #0

    Bonjour, hola chers auditeurs et auditrices de l'Usobrib, nous y sommes, le premier mois d'avril depuis la création du podcast. Au Portugal, depuis 51 ans, ce mois est avant tout celui où l'on célèbre la liberté et la démocratie. Le 25 avril 1974... La révolution des OIEM était fin à de trop longues années de dictature. Depuis, tous les ans, les Portugais descendent dans la rue revendiquant ensemble leur vision d'un futur libre pour leur pays. Alors que l'obscurité progresse, ici comme ailleurs, et que le passé est parfois réécrit par de sordides nostalgiques, impossible de ne pas y consacrer un épisode. Je ne suis pas historienne. Faire un épisode sur la Révolution, c'est vertigineux. C'est un événement historique complexe, aux multiples origines, et porté par des courants parfois contradictoires et imbriqués. Alors, avant de m'embarquer pleinement dans l'épisode, laissez-moi vous faire une recommandation. Lisez le livre de Victor Pereira, « C'est le peuple qui commande » , « La Révolution des œillets » 1974-1976, aux éditions du Détour. Clair, accessible et passionnant, il résume bien mieux que ce qui va suivre cette période, tout en donnant des pistes de réflexion et de compréhension sur ce que cette révolution a laissé de trace dans la culture portugaise d'aujourd'hui. En plus, j'ai eu la chance de le rencontrer à Porto l'année dernière, alors je peux vous le dire, le gars est hyper sympa. Il est très bon, je le recommande. Bon, fini de gagner du temps. Je vais vous faire un topo rapide. La Révolution des œillets a donc mis fin à près de 50 ans de dictature au Portugal, ayant commencé avec un coup d'État militaire en 1926, avant l'instauration de l'État de Nouveau, État nouveau, en 1933 par Salazar. Pour la Révolution qui nous intéresse aussi, tout part d'un coup d'État militaire, orchestré par le Mouvement des Forces Armées, MFA. Ce dernier est composé en majorité de jeunes capitaines, qui veulent mettre fin aux guerres coloniales dans lesquelles le pays est embourbé. Cette révolution a la particularité de s'être déroulée sans effusion de sang, seules trois morts, dont deux civils par le régime, et a été soutenue massivement par la population, fatiguée des guerres, de la misère et de la répression. Elle a initié la décolonisation du Portugal et a marqué le début d'une longue transition vers une organisation démocratique du pouvoir. J'ai longuement réfléchi à comment vous parler de cette période tout en respectant mon format et en limitant mon fichu syndrome de l'imposteur. Plutôt que de me risquer sur les pentes glissantes de l'approximation historique, je fais donc le choix de parler symboles. Dans cet épisode, on va parler fleurs, musique, cinéma... Ça vous dit ? Alors commençons par le plus évident. Cette révolution porte le nom d'une fleur, les œillets. Sur les photos de l'événement, on voit des soldats, armes relevées sur l'épaule, fleurs dépassant du canon. C'est un symbole extrêmement fort ici. On les achète par brassée le 25 avant d'aller défiler, on les brode sur les boutonnières ou comme moi récemment, on s'en fabrique des broches en céramique. La meuf n'est pas peu fière. Mais alors, ça vient d'où ? Ce que cette fleur représente avant tout, c'est une surprise, un imprévu, celui du soutien total et massif des habitants de Lisbonne aux militaires du MFA. En effet, lors de la préparation du coup, les capitaines sont clairs. Les civils ne doivent pas sortir, ne doivent pas s'impliquer, pour éviter de prendre des risques et un potentiel bain de sang dans la foule. Lors de tentatives de coups passés, les portugaises, sonnés et domiciles, dominé par les mécanismes oppressifs qu'ils subissent pour certains depuis toujours, sont restés invisibles. Or, le 25 avril, dès que la rumeur se répand, le peuple de la Baïche de Lisbonne acclame les révolutionnaires, leur offrant leur soutien, leur nourriture et des fleurs. Plusieurs histoires circulent à ce propos. Ces dernières années, le nom de Céleste Caillerault a émergé. Cet employé de restaurant de 40 ans avait été chargé par son patron de préparer des œillets, qui devaient être offerts à la clientèle le 25, à l'occasion du premier anniversaire de l'établissement. Manque de bol pour cette petite fiesta, le MFA ordonne la fermeture des établissements commerciaux. Céleste rentre donc chez elle, dans le quartier du Chiado, ses fleurs sous le bras. Quand elle croise un soldat, elle l'interroge. Mais qu'est-ce qui se passe, bon sang ? Celui-ci lui explique et lui demande une clope. La révolution façon décontracte 70's. Notre amie n'en ayant pas, elle lui offre un œillet, qui atterrit dans le canon du fusil. Ni une ni deux, c'est une trend. Ce soldat aurait alors été imité par ses camarades, un symbole d'Odiada Libertad, jour de la liberté, est né. Il n'est pas le seul. L'autre grand marqueur de la Révolution est musical. En effet, le top départ du mouvement s'est passé sur les ondes. Le jour J, les unités militaires tendent une oreille attentive vers leur poste. Les jours précédents, Othello Sarreiva de Carvalho, l'un des grands héros de notre histoire, est entré en contact avec un employé de la radio Emisores Associados. À 22h55 précisément, elle diffusera une chanson signale insoupçonnable. Et Depoige do Adeu, interprété par Paulo de Carvalho, une chanson romantique ayant représenté le Portugal à l'Eurovision la même année. Un des flops complets du concours sur les champions à seulement 3 points.

  • Speaker #1

    et sa vie non non

  • Speaker #0

    Problème, cette radio est locale et ne peut pas être écoutée à Porto par exemple ou d'autres équipes attendent elles aussi le signal. Qu'à cela ne tienne, on contacte également Radio Renaissance, une radio détenue par l'église catholique. On leur demande de diffuser cette fois une chanson de José Afonso, dit Zeca Afonso, Grandola Villa Morena. Cette fois, le choix est nettement moins anecdotique. Il s'agit d'un célèbre chanteur contestataire, auteur de textes dénonçant la dictature à Moab. peine couvert. Nombre de ses morceaux sont d'ailleurs interdits par la censure. Cette chanson, étrangement, y a échappé. Elle a été enregistrée en France en 1971 et proclame que c'est le peuple qui commande. Le ton est donné. Elle plane d'ailleurs déjà dans l'air puisque Zeca Afonso l'a fait reprendre par la foule en chœur lors de la première rencontre de la chanson portugaise le 29 mars, soit 28 jours avant la révolution. À minuit 20, la chanson résonne à à travers toutes les... Pour découvrir d'autres musiques engagées de cette période, je vous invite à explorer plus loin ce qu'on appelle les musiques d'intervention. En effet, on nomme ainsi ce genre musical engagé, dénonçant les injustices, l'oppression et les inégalités, tout en lançant un appel à la réflexion et à la mobilisation collective. Si on le retrouve beaucoup au Portugal, où il est né dans le creuset des résistances face à l'Estat de Novo, on retrouve aussi énormément ces musiques en Amérique latine. En ce qui concerne les portugais, je vous invite à explorer notamment le registre de José Mario Branco, Sergio Goudinho, Adriano Correia de Oliveira et Carlos Paredes. J'aime beaucoup aussi la chanson Somos livres, Nous sommes libres, d'Hermelinda Duarte, célébrant la liberté retrouvée après la chute de la dictature. Et comme ça manque encore un peu de femmes, du côté des musiques actuelles, je vous invite à écouter Agarotanaon ou encore Capicua.

  • Speaker #2

    C'est ce que tu portes dans tes bras Ce qui te permet de s'abandonner Ce qui te permet de s'abandonner

  • Speaker #0

    Des fleurs et de la musique, une bonne base pour aborder les commémorations. Mais il nous manque une chose essentielle, des slogans. De nombreuses phrases ont marqué la révolution des œillets. Le 26 avril, la foule est réunie pour assister à la libération d'Herminio da Palma e Nacio de la prison où il est enfermé depuis 6 mois comme prisonnier politique. Franchement, le personnage vaut le coup de quelques recherches, voire d'un futur épisode tant il est épique. Sa libération est un message extrêmement fort, le signal d'un changement jusqu'alors inespéré. Pour l'accueillir, le peuple scande un slogan repris au Chili d'Allende. « Au pauvre unir, jamais se ravincir. » « Le peuple uni ne sera jamais vaincu. » Cette phrase vient d'une chanson chilienne de 73, qui a été traduite et interprétée en portugais par Louis Cillia en 74. Petit extrait.

  • Speaker #3

    Chantons que nous allons triompher Avant le son de la bande Les bandes d'unité vont déjà se développer Doublés de victoire Et tu verras Ton chant et ta bande pour rester à l'aise Et un jour pour le dimanche Millions d'appels Faites la nouvelle histoire De paix Merci. marcher et le peuple va triompher. Maintenant, personne ne...

  • Speaker #0

    Autre message fort scandé par le peuple, « A terra a quem a travail » soit « La terre appartient à ceux qui la travaillent » . Ici, on retrouve l'éternelle question de la lutte des classes et de l'injustice profonde entre ceux qui possèdent la force de travail et ceux qui les exploitent. Ne me lancez pas là-dessus. Cette phrase porte l'espoir d'une nouvelle répartition des richesses ... qui, si elle sera tentée, ne verra finalement jamais le jour pleinement au Portugal. Aujourd'hui, dans les cortèges, résonne également 25 avril pour toujours et fascisme non jamais ! Jamais plus le fascisme. Des messages qu'il est bon de répéter en chœur de temps en temps. Ils sont nombreux, ces souvenirs du 25 avril. Si vous êtes de passage à Lisbonne, n'hésitez pas à passer sur la place du Carmo, où Marcelo Caetano s'est rendu aux forces révolutionnaires. Visitez le musée de la Résistance, dans l'ancienne prison de l'Aljoub, et admirez le pont du 25 avril, anciennement pont Salazar. Pour ceux qui n'auront pas la chance de voyager, je vous conseille un film incroyable qu'une amie m'a fait découvrir l'an dernier. Capitaine d'Avril, sorti en l'an 2000. Réalisé par Maria de Medeiros, il s'agit d'une coproduction européenne. Il se concentre sur la journée même du 25 avril 1974 et accompagne deux capitaines insurgées. J'ai trouvé qu'il montrait magnifiquement l'état du Portugal de l'époque, le miracle d'avoir évité une escalade de la violence, la ferveur de la population et la fragilité du pays, même une fois la liberté à arracher. Je vous invite évidemment à l'acheter ou à le louer, ou à l'emprunter dans votre médiathèque préférée. Mais il est également trouvable sur Youtube avec des sous-titres en français. Alors récapitulons. Des œillets rouges, des chansons badass et des slogans vibrants. Les symboles du 25 avril racontent l'histoire d'un peuple avide de liberté, ayant délogé sans effusion de sang une élite dirigeante fascinante, inapte à maintenir une dictature à bout de souffle contre la volonté populaire. Les soldats du mouvement des forces armées, les voix de Zeca Afonso et de Paolo de Carvalho, les mains anonymes qui ont tendu des fleurs ou brandi des pancartes, tous et toutes ont tissé la trame d'une révolution unique. Ces images, ces musiques, ces mots sont bien plus que des souvenirs. Ils sont la preuve de la force vitale des peuples, d'une soif de liberté qui ne saurait être étouffée pour toujours. À nous de ne pas perdre la mémoire. Le 25 avril n'est pas qu'une date, c'est un appel à la vigilance, à la solidarité et à la célébration d'un courage collectif. Merci pour votre écoute et bon dia da libertad a todos y todos. N'hésitez pas à me laisser un commentaire ou un avis sur votre plateforme de podcast préférée. A bientôt !

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Nous y sommes, le premier mois d’avril depuis la création du podcast. Au Portugal, depuis 51 ans, ce mois est avant tout celui où l’on célèbre la liberté et la démocratie. Le 25 avril 1974, la Révolution des Oeillets mettait fin à 48 ans de dictature. Depuis, tous les ans, les portugais descendent dans la rue, revendiquant ensemble leur vision d’un futur libre pour leur pays. Alors que l’obscurité progresse, ici comme ailleurs, et que le passé est parfois réécrit par de sordides nostalgiques, impossible de ne pas y consacrer un épisode !


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    Bonjour, hola chers auditeurs et auditrices de l'Usobrib, nous y sommes, le premier mois d'avril depuis la création du podcast. Au Portugal, depuis 51 ans, ce mois est avant tout celui où l'on célèbre la liberté et la démocratie. Le 25 avril 1974... La révolution des OIEM était fin à de trop longues années de dictature. Depuis, tous les ans, les Portugais descendent dans la rue revendiquant ensemble leur vision d'un futur libre pour leur pays. Alors que l'obscurité progresse, ici comme ailleurs, et que le passé est parfois réécrit par de sordides nostalgiques, impossible de ne pas y consacrer un épisode. Je ne suis pas historienne. Faire un épisode sur la Révolution, c'est vertigineux. C'est un événement historique complexe, aux multiples origines, et porté par des courants parfois contradictoires et imbriqués. Alors, avant de m'embarquer pleinement dans l'épisode, laissez-moi vous faire une recommandation. Lisez le livre de Victor Pereira, « C'est le peuple qui commande » , « La Révolution des œillets » 1974-1976, aux éditions du Détour. Clair, accessible et passionnant, il résume bien mieux que ce qui va suivre cette période, tout en donnant des pistes de réflexion et de compréhension sur ce que cette révolution a laissé de trace dans la culture portugaise d'aujourd'hui. En plus, j'ai eu la chance de le rencontrer à Porto l'année dernière, alors je peux vous le dire, le gars est hyper sympa. Il est très bon, je le recommande. Bon, fini de gagner du temps. Je vais vous faire un topo rapide. La Révolution des œillets a donc mis fin à près de 50 ans de dictature au Portugal, ayant commencé avec un coup d'État militaire en 1926, avant l'instauration de l'État de Nouveau, État nouveau, en 1933 par Salazar. Pour la Révolution qui nous intéresse aussi, tout part d'un coup d'État militaire, orchestré par le Mouvement des Forces Armées, MFA. Ce dernier est composé en majorité de jeunes capitaines, qui veulent mettre fin aux guerres coloniales dans lesquelles le pays est embourbé. Cette révolution a la particularité de s'être déroulée sans effusion de sang, seules trois morts, dont deux civils par le régime, et a été soutenue massivement par la population, fatiguée des guerres, de la misère et de la répression. Elle a initié la décolonisation du Portugal et a marqué le début d'une longue transition vers une organisation démocratique du pouvoir. J'ai longuement réfléchi à comment vous parler de cette période tout en respectant mon format et en limitant mon fichu syndrome de l'imposteur. Plutôt que de me risquer sur les pentes glissantes de l'approximation historique, je fais donc le choix de parler symboles. Dans cet épisode, on va parler fleurs, musique, cinéma... Ça vous dit ? Alors commençons par le plus évident. Cette révolution porte le nom d'une fleur, les œillets. Sur les photos de l'événement, on voit des soldats, armes relevées sur l'épaule, fleurs dépassant du canon. C'est un symbole extrêmement fort ici. On les achète par brassée le 25 avant d'aller défiler, on les brode sur les boutonnières ou comme moi récemment, on s'en fabrique des broches en céramique. La meuf n'est pas peu fière. Mais alors, ça vient d'où ? Ce que cette fleur représente avant tout, c'est une surprise, un imprévu, celui du soutien total et massif des habitants de Lisbonne aux militaires du MFA. En effet, lors de la préparation du coup, les capitaines sont clairs. Les civils ne doivent pas sortir, ne doivent pas s'impliquer, pour éviter de prendre des risques et un potentiel bain de sang dans la foule. Lors de tentatives de coups passés, les portugaises, sonnés et domiciles, dominé par les mécanismes oppressifs qu'ils subissent pour certains depuis toujours, sont restés invisibles. Or, le 25 avril, dès que la rumeur se répand, le peuple de la Baïche de Lisbonne acclame les révolutionnaires, leur offrant leur soutien, leur nourriture et des fleurs. Plusieurs histoires circulent à ce propos. Ces dernières années, le nom de Céleste Caillerault a émergé. Cet employé de restaurant de 40 ans avait été chargé par son patron de préparer des œillets, qui devaient être offerts à la clientèle le 25, à l'occasion du premier anniversaire de l'établissement. Manque de bol pour cette petite fiesta, le MFA ordonne la fermeture des établissements commerciaux. Céleste rentre donc chez elle, dans le quartier du Chiado, ses fleurs sous le bras. Quand elle croise un soldat, elle l'interroge. Mais qu'est-ce qui se passe, bon sang ? Celui-ci lui explique et lui demande une clope. La révolution façon décontracte 70's. Notre amie n'en ayant pas, elle lui offre un œillet, qui atterrit dans le canon du fusil. Ni une ni deux, c'est une trend. Ce soldat aurait alors été imité par ses camarades, un symbole d'Odiada Libertad, jour de la liberté, est né. Il n'est pas le seul. L'autre grand marqueur de la Révolution est musical. En effet, le top départ du mouvement s'est passé sur les ondes. Le jour J, les unités militaires tendent une oreille attentive vers leur poste. Les jours précédents, Othello Sarreiva de Carvalho, l'un des grands héros de notre histoire, est entré en contact avec un employé de la radio Emisores Associados. À 22h55 précisément, elle diffusera une chanson signale insoupçonnable. Et Depoige do Adeu, interprété par Paulo de Carvalho, une chanson romantique ayant représenté le Portugal à l'Eurovision la même année. Un des flops complets du concours sur les champions à seulement 3 points.

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    et sa vie non non

  • Speaker #0

    Problème, cette radio est locale et ne peut pas être écoutée à Porto par exemple ou d'autres équipes attendent elles aussi le signal. Qu'à cela ne tienne, on contacte également Radio Renaissance, une radio détenue par l'église catholique. On leur demande de diffuser cette fois une chanson de José Afonso, dit Zeca Afonso, Grandola Villa Morena. Cette fois, le choix est nettement moins anecdotique. Il s'agit d'un célèbre chanteur contestataire, auteur de textes dénonçant la dictature à Moab. peine couvert. Nombre de ses morceaux sont d'ailleurs interdits par la censure. Cette chanson, étrangement, y a échappé. Elle a été enregistrée en France en 1971 et proclame que c'est le peuple qui commande. Le ton est donné. Elle plane d'ailleurs déjà dans l'air puisque Zeca Afonso l'a fait reprendre par la foule en chœur lors de la première rencontre de la chanson portugaise le 29 mars, soit 28 jours avant la révolution. À minuit 20, la chanson résonne à à travers toutes les... Pour découvrir d'autres musiques engagées de cette période, je vous invite à explorer plus loin ce qu'on appelle les musiques d'intervention. En effet, on nomme ainsi ce genre musical engagé, dénonçant les injustices, l'oppression et les inégalités, tout en lançant un appel à la réflexion et à la mobilisation collective. Si on le retrouve beaucoup au Portugal, où il est né dans le creuset des résistances face à l'Estat de Novo, on retrouve aussi énormément ces musiques en Amérique latine. En ce qui concerne les portugais, je vous invite à explorer notamment le registre de José Mario Branco, Sergio Goudinho, Adriano Correia de Oliveira et Carlos Paredes. J'aime beaucoup aussi la chanson Somos livres, Nous sommes libres, d'Hermelinda Duarte, célébrant la liberté retrouvée après la chute de la dictature. Et comme ça manque encore un peu de femmes, du côté des musiques actuelles, je vous invite à écouter Agarotanaon ou encore Capicua.

  • Speaker #2

    C'est ce que tu portes dans tes bras Ce qui te permet de s'abandonner Ce qui te permet de s'abandonner

  • Speaker #0

    Des fleurs et de la musique, une bonne base pour aborder les commémorations. Mais il nous manque une chose essentielle, des slogans. De nombreuses phrases ont marqué la révolution des œillets. Le 26 avril, la foule est réunie pour assister à la libération d'Herminio da Palma e Nacio de la prison où il est enfermé depuis 6 mois comme prisonnier politique. Franchement, le personnage vaut le coup de quelques recherches, voire d'un futur épisode tant il est épique. Sa libération est un message extrêmement fort, le signal d'un changement jusqu'alors inespéré. Pour l'accueillir, le peuple scande un slogan repris au Chili d'Allende. « Au pauvre unir, jamais se ravincir. » « Le peuple uni ne sera jamais vaincu. » Cette phrase vient d'une chanson chilienne de 73, qui a été traduite et interprétée en portugais par Louis Cillia en 74. Petit extrait.

  • Speaker #3

    Chantons que nous allons triompher Avant le son de la bande Les bandes d'unité vont déjà se développer Doublés de victoire Et tu verras Ton chant et ta bande pour rester à l'aise Et un jour pour le dimanche Millions d'appels Faites la nouvelle histoire De paix Merci. marcher et le peuple va triompher. Maintenant, personne ne...

  • Speaker #0

    Autre message fort scandé par le peuple, « A terra a quem a travail » soit « La terre appartient à ceux qui la travaillent » . Ici, on retrouve l'éternelle question de la lutte des classes et de l'injustice profonde entre ceux qui possèdent la force de travail et ceux qui les exploitent. Ne me lancez pas là-dessus. Cette phrase porte l'espoir d'une nouvelle répartition des richesses ... qui, si elle sera tentée, ne verra finalement jamais le jour pleinement au Portugal. Aujourd'hui, dans les cortèges, résonne également 25 avril pour toujours et fascisme non jamais ! Jamais plus le fascisme. Des messages qu'il est bon de répéter en chœur de temps en temps. Ils sont nombreux, ces souvenirs du 25 avril. Si vous êtes de passage à Lisbonne, n'hésitez pas à passer sur la place du Carmo, où Marcelo Caetano s'est rendu aux forces révolutionnaires. Visitez le musée de la Résistance, dans l'ancienne prison de l'Aljoub, et admirez le pont du 25 avril, anciennement pont Salazar. Pour ceux qui n'auront pas la chance de voyager, je vous conseille un film incroyable qu'une amie m'a fait découvrir l'an dernier. Capitaine d'Avril, sorti en l'an 2000. Réalisé par Maria de Medeiros, il s'agit d'une coproduction européenne. Il se concentre sur la journée même du 25 avril 1974 et accompagne deux capitaines insurgées. J'ai trouvé qu'il montrait magnifiquement l'état du Portugal de l'époque, le miracle d'avoir évité une escalade de la violence, la ferveur de la population et la fragilité du pays, même une fois la liberté à arracher. Je vous invite évidemment à l'acheter ou à le louer, ou à l'emprunter dans votre médiathèque préférée. Mais il est également trouvable sur Youtube avec des sous-titres en français. Alors récapitulons. Des œillets rouges, des chansons badass et des slogans vibrants. Les symboles du 25 avril racontent l'histoire d'un peuple avide de liberté, ayant délogé sans effusion de sang une élite dirigeante fascinante, inapte à maintenir une dictature à bout de souffle contre la volonté populaire. Les soldats du mouvement des forces armées, les voix de Zeca Afonso et de Paolo de Carvalho, les mains anonymes qui ont tendu des fleurs ou brandi des pancartes, tous et toutes ont tissé la trame d'une révolution unique. Ces images, ces musiques, ces mots sont bien plus que des souvenirs. Ils sont la preuve de la force vitale des peuples, d'une soif de liberté qui ne saurait être étouffée pour toujours. À nous de ne pas perdre la mémoire. Le 25 avril n'est pas qu'une date, c'est un appel à la vigilance, à la solidarité et à la célébration d'un courage collectif. Merci pour votre écoute et bon dia da libertad a todos y todos. N'hésitez pas à me laisser un commentaire ou un avis sur votre plateforme de podcast préférée. A bientôt !

Description

Nous y sommes, le premier mois d’avril depuis la création du podcast. Au Portugal, depuis 51 ans, ce mois est avant tout celui où l’on célèbre la liberté et la démocratie. Le 25 avril 1974, la Révolution des Oeillets mettait fin à 48 ans de dictature. Depuis, tous les ans, les portugais descendent dans la rue, revendiquant ensemble leur vision d’un futur libre pour leur pays. Alors que l’obscurité progresse, ici comme ailleurs, et que le passé est parfois réécrit par de sordides nostalgiques, impossible de ne pas y consacrer un épisode !


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Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, hola chers auditeurs et auditrices de l'Usobrib, nous y sommes, le premier mois d'avril depuis la création du podcast. Au Portugal, depuis 51 ans, ce mois est avant tout celui où l'on célèbre la liberté et la démocratie. Le 25 avril 1974... La révolution des OIEM était fin à de trop longues années de dictature. Depuis, tous les ans, les Portugais descendent dans la rue revendiquant ensemble leur vision d'un futur libre pour leur pays. Alors que l'obscurité progresse, ici comme ailleurs, et que le passé est parfois réécrit par de sordides nostalgiques, impossible de ne pas y consacrer un épisode. Je ne suis pas historienne. Faire un épisode sur la Révolution, c'est vertigineux. C'est un événement historique complexe, aux multiples origines, et porté par des courants parfois contradictoires et imbriqués. Alors, avant de m'embarquer pleinement dans l'épisode, laissez-moi vous faire une recommandation. Lisez le livre de Victor Pereira, « C'est le peuple qui commande » , « La Révolution des œillets » 1974-1976, aux éditions du Détour. Clair, accessible et passionnant, il résume bien mieux que ce qui va suivre cette période, tout en donnant des pistes de réflexion et de compréhension sur ce que cette révolution a laissé de trace dans la culture portugaise d'aujourd'hui. En plus, j'ai eu la chance de le rencontrer à Porto l'année dernière, alors je peux vous le dire, le gars est hyper sympa. Il est très bon, je le recommande. Bon, fini de gagner du temps. Je vais vous faire un topo rapide. La Révolution des œillets a donc mis fin à près de 50 ans de dictature au Portugal, ayant commencé avec un coup d'État militaire en 1926, avant l'instauration de l'État de Nouveau, État nouveau, en 1933 par Salazar. Pour la Révolution qui nous intéresse aussi, tout part d'un coup d'État militaire, orchestré par le Mouvement des Forces Armées, MFA. Ce dernier est composé en majorité de jeunes capitaines, qui veulent mettre fin aux guerres coloniales dans lesquelles le pays est embourbé. Cette révolution a la particularité de s'être déroulée sans effusion de sang, seules trois morts, dont deux civils par le régime, et a été soutenue massivement par la population, fatiguée des guerres, de la misère et de la répression. Elle a initié la décolonisation du Portugal et a marqué le début d'une longue transition vers une organisation démocratique du pouvoir. J'ai longuement réfléchi à comment vous parler de cette période tout en respectant mon format et en limitant mon fichu syndrome de l'imposteur. Plutôt que de me risquer sur les pentes glissantes de l'approximation historique, je fais donc le choix de parler symboles. Dans cet épisode, on va parler fleurs, musique, cinéma... Ça vous dit ? Alors commençons par le plus évident. Cette révolution porte le nom d'une fleur, les œillets. Sur les photos de l'événement, on voit des soldats, armes relevées sur l'épaule, fleurs dépassant du canon. C'est un symbole extrêmement fort ici. On les achète par brassée le 25 avant d'aller défiler, on les brode sur les boutonnières ou comme moi récemment, on s'en fabrique des broches en céramique. La meuf n'est pas peu fière. Mais alors, ça vient d'où ? Ce que cette fleur représente avant tout, c'est une surprise, un imprévu, celui du soutien total et massif des habitants de Lisbonne aux militaires du MFA. En effet, lors de la préparation du coup, les capitaines sont clairs. Les civils ne doivent pas sortir, ne doivent pas s'impliquer, pour éviter de prendre des risques et un potentiel bain de sang dans la foule. Lors de tentatives de coups passés, les portugaises, sonnés et domiciles, dominé par les mécanismes oppressifs qu'ils subissent pour certains depuis toujours, sont restés invisibles. Or, le 25 avril, dès que la rumeur se répand, le peuple de la Baïche de Lisbonne acclame les révolutionnaires, leur offrant leur soutien, leur nourriture et des fleurs. Plusieurs histoires circulent à ce propos. Ces dernières années, le nom de Céleste Caillerault a émergé. Cet employé de restaurant de 40 ans avait été chargé par son patron de préparer des œillets, qui devaient être offerts à la clientèle le 25, à l'occasion du premier anniversaire de l'établissement. Manque de bol pour cette petite fiesta, le MFA ordonne la fermeture des établissements commerciaux. Céleste rentre donc chez elle, dans le quartier du Chiado, ses fleurs sous le bras. Quand elle croise un soldat, elle l'interroge. Mais qu'est-ce qui se passe, bon sang ? Celui-ci lui explique et lui demande une clope. La révolution façon décontracte 70's. Notre amie n'en ayant pas, elle lui offre un œillet, qui atterrit dans le canon du fusil. Ni une ni deux, c'est une trend. Ce soldat aurait alors été imité par ses camarades, un symbole d'Odiada Libertad, jour de la liberté, est né. Il n'est pas le seul. L'autre grand marqueur de la Révolution est musical. En effet, le top départ du mouvement s'est passé sur les ondes. Le jour J, les unités militaires tendent une oreille attentive vers leur poste. Les jours précédents, Othello Sarreiva de Carvalho, l'un des grands héros de notre histoire, est entré en contact avec un employé de la radio Emisores Associados. À 22h55 précisément, elle diffusera une chanson signale insoupçonnable. Et Depoige do Adeu, interprété par Paulo de Carvalho, une chanson romantique ayant représenté le Portugal à l'Eurovision la même année. Un des flops complets du concours sur les champions à seulement 3 points.

  • Speaker #1

    et sa vie non non

  • Speaker #0

    Problème, cette radio est locale et ne peut pas être écoutée à Porto par exemple ou d'autres équipes attendent elles aussi le signal. Qu'à cela ne tienne, on contacte également Radio Renaissance, une radio détenue par l'église catholique. On leur demande de diffuser cette fois une chanson de José Afonso, dit Zeca Afonso, Grandola Villa Morena. Cette fois, le choix est nettement moins anecdotique. Il s'agit d'un célèbre chanteur contestataire, auteur de textes dénonçant la dictature à Moab. peine couvert. Nombre de ses morceaux sont d'ailleurs interdits par la censure. Cette chanson, étrangement, y a échappé. Elle a été enregistrée en France en 1971 et proclame que c'est le peuple qui commande. Le ton est donné. Elle plane d'ailleurs déjà dans l'air puisque Zeca Afonso l'a fait reprendre par la foule en chœur lors de la première rencontre de la chanson portugaise le 29 mars, soit 28 jours avant la révolution. À minuit 20, la chanson résonne à à travers toutes les... Pour découvrir d'autres musiques engagées de cette période, je vous invite à explorer plus loin ce qu'on appelle les musiques d'intervention. En effet, on nomme ainsi ce genre musical engagé, dénonçant les injustices, l'oppression et les inégalités, tout en lançant un appel à la réflexion et à la mobilisation collective. Si on le retrouve beaucoup au Portugal, où il est né dans le creuset des résistances face à l'Estat de Novo, on retrouve aussi énormément ces musiques en Amérique latine. En ce qui concerne les portugais, je vous invite à explorer notamment le registre de José Mario Branco, Sergio Goudinho, Adriano Correia de Oliveira et Carlos Paredes. J'aime beaucoup aussi la chanson Somos livres, Nous sommes libres, d'Hermelinda Duarte, célébrant la liberté retrouvée après la chute de la dictature. Et comme ça manque encore un peu de femmes, du côté des musiques actuelles, je vous invite à écouter Agarotanaon ou encore Capicua.

  • Speaker #2

    C'est ce que tu portes dans tes bras Ce qui te permet de s'abandonner Ce qui te permet de s'abandonner

  • Speaker #0

    Des fleurs et de la musique, une bonne base pour aborder les commémorations. Mais il nous manque une chose essentielle, des slogans. De nombreuses phrases ont marqué la révolution des œillets. Le 26 avril, la foule est réunie pour assister à la libération d'Herminio da Palma e Nacio de la prison où il est enfermé depuis 6 mois comme prisonnier politique. Franchement, le personnage vaut le coup de quelques recherches, voire d'un futur épisode tant il est épique. Sa libération est un message extrêmement fort, le signal d'un changement jusqu'alors inespéré. Pour l'accueillir, le peuple scande un slogan repris au Chili d'Allende. « Au pauvre unir, jamais se ravincir. » « Le peuple uni ne sera jamais vaincu. » Cette phrase vient d'une chanson chilienne de 73, qui a été traduite et interprétée en portugais par Louis Cillia en 74. Petit extrait.

  • Speaker #3

    Chantons que nous allons triompher Avant le son de la bande Les bandes d'unité vont déjà se développer Doublés de victoire Et tu verras Ton chant et ta bande pour rester à l'aise Et un jour pour le dimanche Millions d'appels Faites la nouvelle histoire De paix Merci. marcher et le peuple va triompher. Maintenant, personne ne...

  • Speaker #0

    Autre message fort scandé par le peuple, « A terra a quem a travail » soit « La terre appartient à ceux qui la travaillent » . Ici, on retrouve l'éternelle question de la lutte des classes et de l'injustice profonde entre ceux qui possèdent la force de travail et ceux qui les exploitent. Ne me lancez pas là-dessus. Cette phrase porte l'espoir d'une nouvelle répartition des richesses ... qui, si elle sera tentée, ne verra finalement jamais le jour pleinement au Portugal. Aujourd'hui, dans les cortèges, résonne également 25 avril pour toujours et fascisme non jamais ! Jamais plus le fascisme. Des messages qu'il est bon de répéter en chœur de temps en temps. Ils sont nombreux, ces souvenirs du 25 avril. Si vous êtes de passage à Lisbonne, n'hésitez pas à passer sur la place du Carmo, où Marcelo Caetano s'est rendu aux forces révolutionnaires. Visitez le musée de la Résistance, dans l'ancienne prison de l'Aljoub, et admirez le pont du 25 avril, anciennement pont Salazar. Pour ceux qui n'auront pas la chance de voyager, je vous conseille un film incroyable qu'une amie m'a fait découvrir l'an dernier. Capitaine d'Avril, sorti en l'an 2000. Réalisé par Maria de Medeiros, il s'agit d'une coproduction européenne. Il se concentre sur la journée même du 25 avril 1974 et accompagne deux capitaines insurgées. J'ai trouvé qu'il montrait magnifiquement l'état du Portugal de l'époque, le miracle d'avoir évité une escalade de la violence, la ferveur de la population et la fragilité du pays, même une fois la liberté à arracher. Je vous invite évidemment à l'acheter ou à le louer, ou à l'emprunter dans votre médiathèque préférée. Mais il est également trouvable sur Youtube avec des sous-titres en français. Alors récapitulons. Des œillets rouges, des chansons badass et des slogans vibrants. Les symboles du 25 avril racontent l'histoire d'un peuple avide de liberté, ayant délogé sans effusion de sang une élite dirigeante fascinante, inapte à maintenir une dictature à bout de souffle contre la volonté populaire. Les soldats du mouvement des forces armées, les voix de Zeca Afonso et de Paolo de Carvalho, les mains anonymes qui ont tendu des fleurs ou brandi des pancartes, tous et toutes ont tissé la trame d'une révolution unique. Ces images, ces musiques, ces mots sont bien plus que des souvenirs. Ils sont la preuve de la force vitale des peuples, d'une soif de liberté qui ne saurait être étouffée pour toujours. À nous de ne pas perdre la mémoire. Le 25 avril n'est pas qu'une date, c'est un appel à la vigilance, à la solidarité et à la célébration d'un courage collectif. Merci pour votre écoute et bon dia da libertad a todos y todos. N'hésitez pas à me laisser un commentaire ou un avis sur votre plateforme de podcast préférée. A bientôt !

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