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Musique de film : Philippe Rombi et François Ozon, une collaboration créative de 25 ans pleine d'émotions - épisode 1/2 cover
Musique de film : Philippe Rombi et François Ozon, une collaboration créative de 25 ans pleine d'émotions - épisode 1/2 cover
Musique de film : une histoire d'inspiration

Musique de film : Philippe Rombi et François Ozon, une collaboration créative de 25 ans pleine d'émotions - épisode 1/2

Musique de film : Philippe Rombi et François Ozon, une collaboration créative de 25 ans pleine d'émotions - épisode 1/2

20min |27/01/2025
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Musique de film : une histoire d'inspiration

Musique de film : Philippe Rombi et François Ozon, une collaboration créative de 25 ans pleine d'émotions - épisode 1/2

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20min |27/01/2025
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Description

Au Festival de Cannes 2024, la Leçon de musique Sacem célébrait les 25 ans d'un binôme compositeur-cinéaste emblématique, Philippe Rombi et François Ozon. Pour un large public, la découverte du compositeur est liée à celle du cinéma de François Ozon, avec d’abord Les Amants criminels, puis Sous le sable, en 2001.

Depuis, avec Ozon, c’est un mariage non-exclusif mais d’une grande fidélité : treize longs-métrages, au fil d’une collaboration sans cesse réactivée par la diversité des sujets qu'aborde le metteur en scène. La dialectique du vrai et du faux, les trompe-l'œil sur l’identité, le dédoublement trouvent chez Rombi un lyrisme trouble, sinon ambigu, en faux-semblants.

Dans ce premier podcast, animé par Stéphane Lerouge, les deux créateurs remontent à la source de leur rencontre fondatrice, à ce moment charnière où, à 30 ans, ils ont démarré ensemble, au même moment, au même endroit.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Les grands entretiens du musée de la SACEM avec Stéphane Lerouge.

  • Speaker #2

    Au festival de Cannes 2024, la leçon de musique SACEM célébrait les 25 ans d'un binôme compositeur-cinéaste emblématique, Philippe Rombi et François Ozon. Pour un large public, la découverte du compositeur est liée à celle du cinéma de Ozon avec d'abord Les Amants Criminels puis Sous le Sable en 2001. Depuis, avec Ozon, c'est un mariage non exclusif mais d'une grande fidélité. 13 longs métrages au fil d'une collaboration sans cesse réactivée par la diversité des sujets qu'aborde le metteur en scène. La dialectique du vrai et du faux, les trompe-l'œil sur l'identité, le dédoublement trouvent chez Rombi un lyrisme trouble, sinon ambigu, en faux semblant. Dans ce premier podcast, les deux créateurs remontent à la source de leur rencontre fondatrice, à ce moment charnière où, à 30 ans, ils ont démarré ensemble, au même moment, au même endroit.

  • Speaker #0

    Ça a été assez facile le contact parce qu'effectivement on avait le même âge, on débutait, moi j'avais fait aussi beaucoup de courts-métrages, Philippe avait fait beaucoup de courts-métrages aussi, moi j'étais un peu méfiant par rapport aux musiciens, parce que tous les films que j'avais fait précédemment, les courts-métrages et le premier long, c'était à partir de musiques déjà existantes. Et au sein de la FEMIS, on apprend à parler avec un chef opérateur, avec un monteur, mais jamais avec un musicien. Donc je ne savais pas exactement le fonctionnement. Et a priori, c'est vrai que j'étais plus dans l'école kubrickienne de se dire que les morceaux existent déjà, autant utiliser des morceaux déjà existants. Et puis finalement, quand j'ai fait Les Amants Criminels, je me suis rendu compte qu'il me manquait quand même quelque chose. Et là, grâce à Olivier Delbos, mon producteur de l'époque au sein de la FEMIS, j'ai rencontré Philippe et à partir de là, un dialogue a débuté.

  • Speaker #1

    Je ne me suis pas rendu compte de ce parcours qui s'annonçait. C'était une quête de films. J'étais jeune, j'avais envie de raconter plein de choses. Parce que depuis mon enfance, je raconte des émotions en musique. et mon piano me servait d'exutoire de jardin secret, de journal intime. Donc le cinéma, c'était un moyen aussi de continuer à raconter des histoires des gens, des sentiments des gens et de les traduire en musique. Donc après tout ces courts-métrages, tout ce parcours, j'étais heureux de faire ce premier long-métrage et surtout avec François.

  • Speaker #2

    Dans cette séquence finale de Sous le sable, avez-vous beaucoup réfléchi à l'entrée de la musique ?

  • Speaker #0

    Alors moi, je savais exactement ce que je voulais pour cette fin. Je voulais du piano et un violoncelle. Voilà, c'est une fois où j'étais le plus directif avec Philippe. Le piano, parce que pour moi, c'était Charles Trampling, c'était sa mélancolie. Et puis le violoncelle, c'était la présence de Bruno Kramer, cet homme qui a disparu. Et voilà, c'était l'alliage des deux. pendant tout le film, le thème est très délicat. On l'entend très peu, surtout il est un peu symphonique.

  • Speaker #1

    Il est plus orchestral. C'est vrai que tu m'avais parlé du violoncelle et du piano au début du projet. Exactement. Et j'ai pensé que c'était beau de réserver ce duo vraiment que uniquement à la fin. Parce que tu avais une très belle idée, je me souviens on était en salle de montage devant l'image et justement on se demandait quand faire rentrer la musique. Est-ce qu'on laissait Charlotte ? Épancher. Voilà. et ne pas surligner cette tristesse. Et à un moment donné, quand l'histoire renaît...

  • Speaker #0

    C'est quand elle sourit, quand elle croit le reconnaître.

  • Speaker #1

    Elle croit le voir, voilà, c'est ça. Et à la fin, je me souviens que François a dit, en écoutant la maquette que je lui avais envoyée, ça serait bien si on enlevait petit à petit, au fur et à mesure que dans ta partition, à un moment donné, il n'y a même plus le violoncelle, il n'y a que le piano. Et j'aime bien cette idée et on va enlever le son de l'océan à ce moment là. Donc le piano se retrouve vraiment tout seul. comme le personnage de Charlotte face à son destin, face à sa tristesse et à ses espoirs aussi.

  • Speaker #2

    Le thème du dédoublement serpente à travers tout ton cinéma. Est-ce qu'à partir de Sous le sable, tu as eu le sentiment d'avoir trouvé un double musical à travers Philippe ? Très vite, je me suis rendu compte qu'il y avait une communication facile. est rentré dans mon univers. On a pu avoir un dialogue. Il aime travailler, il aime proposer des choses. Quand il y a quelque chose que je n'aime pas, il recommence. C'était très agréable. Et puis, c'est vrai que je fais des films assez variés. À chaque fois, il sait s'adapter. Et une amitié est née petit à petit. C'est construit. C'est vrai que ma méfiance a baissé plus j'ai travaillé avec lui. Autant avec le film Sous le sable, il est arrivé une fois que le film était terminé. Je savais que je voulais de la musique, mais je ne savais pas exactement quoi. Enfin, les choses, c'est vraiment au moment du montage que ça a pris sens. Je me suis rendu compte que la présence de Bruno Kremer et le mystère autour de son absence avait besoin d'être accompagné musicalement. Très vite, quand on a fait Swimming Pool, là, je lui ai donné le scénario avant même d'avoir tourné. Donc, je lui ai demandé de composer une musique sans avoir les images. Comment ça se passe quand on part d'un scénario ? C'est-à-dire quand on démarre de l'écrit.

  • Speaker #1

    C'est très mystérieux. J'avoue que je n'ai pas d'explication très claire pour dire. Je lis le scénario, j'écoute les mots. Quand il y en a, parfois on me fait lire, mais on ne me donne aucune indication. Quelques mots de François sur une ambiance, sur un climat, un état d'âme. Et puis après, je rentre dans le film. Je me fais mon film du scénario. J'essaye de trouver l'essence, l'idée maîtresse. Donc ça peut être thématique, la plupart du temps, parce que François et moi, on aime les thèmes. Tu parles de swimming pool, c'est autant mélodiquement que la couleur, l'instrumentation et l'ambiance qui jouent un rôle important dans mon entourage.

  • Speaker #2

    C'est le thème et son traitement.

  • Speaker #1

    Et son traitement, le traitement du faux semblant, du vrai, du faux, de l'eau. J'avais pensé à faire, essayer d'évoquer en musique. le process d'écriture, le process de création. Donc ça commence par des notes, comme si on notait des petites idées sur un calepin, et puis au fur et à mesure, ces idées s'organisent jusqu'à le flow d'un thème qui arriverait. Enfin bref, voilà, je vais vous le faire musicalement.

  • Speaker #2

    Qu'est-ce que ça fait de pouvoir tourner avec déjà en amont la musique de son film ? Est-ce que ça influe sur le découpage, la mise en scène ?

  • Speaker #0

    Oui, enfin ça m'a imprégné. C'est vrai qu'on l'a écouté, je l'ai fait écouter aux actrices. Et c'est vrai que pour certaines scènes, dans ma mise en scène, j'avais la musique en tête. Et c'est un luxe d'avoir cette possibilité, d'avoir des thèmes avant le tournage. Et puis finalement... Une fois qu'on a été au montage, il y a eu très peu de modifications, ça avait touché juste et c'est vrai qu'à partir de ce moment-là, j'ai plus souvent donné le scénario à Philippe en amont. Ça m'a rangé !

  • Speaker #1

    Au départ, tout de suite quand j'ai commencé à composer le thème, il m'est venu des idées de timbres et j'ai eu cette idée de duo entre des instruments de même famille, mais de timbres différents. Donc on a une guitare à cordes nylon, une guitare à cordes métal. Deux harpes différentes, deux pianos enregistrés d'une façon différente. On a des voix de jeunes filles qui se répondent. Et pareil dans le traitement de la mélodie, c'est une mélodie accompagnée d'harmonie sans fin. Comme vous savez un paysage où les nuages passent au-dessus, et ça crée des ombres, des lumières comme ça, et ça fait des vagues comme l'eau, comme les reflets de l'eau, et quelque part il n'y a pas de résolution. C'est toujours en mouvement, comme quand on écrit.

  • Speaker #0

    C'est comme ça que j'avais briefé Philippe. Je lui avais dit vraiment que la musique devait incarner le travail que fait le personnage de Charlotte Rampling. Elle écrit, elle n'a pas d'inspiration, et puis tout d'un coup l'inspiration vient, et la musique est là pour nous le... Parce qu'on ne voit pas ce qu'elle écrit. Enfin si, on le voit de... Le film est un peu tordu, donc on comprend après que ce qu'on a vu, c'était ce qu'elle avait écrit. Mais la musique est là pour l'incarner. Et donc, c'est pour ça qu'avec Philippe, on était partis sur l'idée qu'il y ait d'abord des arpèges, des petites notes qui arrivent. Et tout d'un coup, là, vraiment, le thème commence à se développer pour la première fois. Mais c'est quelque chose qui n'est pas forcément formulé. C'est vraiment en travaillant qu'on dit ça. Et puis, nous, on dit ça aussi après coup. Ce n'est pas aussi intellectualisé.

  • Speaker #1

    Surtout pas.

  • Speaker #2

    Est-ce que pour toi, c'est aussi facile de transmettre tes envies, tes rêves, tes attentes ? Un compositeur comme Philippe qui a un chef opérateur ou une monteuse, par exemple.

  • Speaker #0

    Je n'avais pas été formé à ça. Je ne suis absolument pas musicien. J'ai fait de la flûte à bec quand j'étais jeune. C'était une catastrophe. Non, donc, je n'ai pas une oreille extraordinaire non plus. Donc, c'est un dialogue très intuitif. C'est voilà, j'aime tel instrument. J'ai envie de ça. J'ai envie que ça commence là. Voilà, mais avec le temps, on a réussi à bien communiquer ensemble. Je crois qu'on prend maintenant.

  • Speaker #1

    Moi, c'est ce qui m'intéresse. Je ne travaille pas avec un cinéaste pour qu'il me dise qu'il aimerait qu'à la quatrième mesure, au troisième temps, le deuxième basson réponde au violoncelle. C'est beaucoup plus intéressant qu'il me dise qu'il se passe une ambiguïté entre les personnages, qu'il faudrait faire quelque chose du point de vue de tel personnage. C'est ça qui m'inspire. Après, à moi de le traduire en musique.

  • Speaker #2

    Alors, en règle générale, dans le cas de Petit, en particulier, quelle idée vous vous faites de la mission de l'ouverture du film, du générique début ?

  • Speaker #0

    Là, il s'agit d'une comédie et de se faire plaisir. Moi, c'était vraiment un film en hommage des comédies que j'avais vues dans les années 70, quand j'étais enfant. Un film avec Louis de Funès, un hommage à ces films-là. Et donc, l'idée, c'était de se faire plaisir, tout simplement. Après, pour le générique, j'avais en tête le générique du Silence des Agneaux de Jonathan Demme. Donc c'est voilà,

  • Speaker #2

    ça ne se voit pas tout de suite.

  • Speaker #0

    C'est Jodie Foster qui court, voilà. Mais Catherine Deneuve court très bien aussi. Donc voilà, après, alors ça, je l'ai montré très vite à Philippe, cette séquence montée. Je lui ai demandé de travailler dessus. Et à partir de ça, on a vraiment décliné. Et surtout, je lui ai dit d'assumer une forme de naïveté, de sincérité, comme le personnage que joue Catherine.

  • Speaker #1

    François m'a fait des surprises parfois. Il m'a appelé, il m'a dit écoute, est-ce que tu es libre demain après-midi ? J'ai quelque chose à te montrer. Très, très intrigué. Je me suis précipité. Il m'a montré ces images de Catherine en vêtements en rouge qui courent. Donc je suis rentré chez moi et je crois que très vite... C'est parti ! C'est parti !

  • Speaker #2

    ce qui est étonnant c'est que dans la pièce de barillet grady date de 80 le film a été tourné en 2010 l'action du film se passe en 77 philippe j'ai envie de te demander mais à quel palier, à quelle époque doit correspondre pour toi le langage musical sur un film comme Potiche ?

  • Speaker #1

    Principalement les années 70, voilà les souvenirs qu'on a en commun de notre enfance, des films, des comédies de notre enfance. Donc je me suis amusé à faire ce qu'on ne fait plus aujourd'hui, c'est-à-dire réunir un orchestre symphonique, lui ajouter une rythmique.

  • Speaker #2

    Un siffleur ?

  • Speaker #1

    Un siffleur accessoirement, n'est-ce pas ? Ça c'est une histoire incroyable. C'est une histoire rigolote, mais bon.

  • Speaker #0

    Parce que c'est le siffleur d'Ennio Morricone. Moi je rêvais d'avoir un sifflement dans un de mes films, donc j'avais dit voilà Philippe c'est le bon film pour avoir un siffleur. Le jour où on enregistre à Davot, moi je viens, je voulais le voir, alors on voit un vieux monsieur tout dégarni, et quand il se met devant le micro, il n'y a aucun souffle qui sort. Donc c'était assez bizarre.

  • Speaker #1

    C'était curieux, disons qu'il avait une technique particulière, il sifflait un petit peu avec la langue pincée comme ça, et ça a étonné un petit peu François, je lui ai dit ne t'inquiète pas, on va se chauffer. Et puis après, c'était très bien.

  • Speaker #2

    Philippe, est-ce que tu pourrais nous montrer comment ce thème de Potiche, tu le variationnes, tu joues avec lui à travers le film en jouant avec les tempos et avec la tonalité ?

  • Speaker #1

    Plutôt que de recréer un thème spécifique, je me suis dit, si je prenais le thème principal qu'on a, si on jouait au début du film et que je le rendais un peu sentimental pour leur retrouvailles.

Chapters

  • Introduction et présentation des intervenants

    00:14

  • Célébration des 25 ans de collaboration entre Rombi et Ozon

    00:19

  • La découverte de Rombi à travers le cinéma de François Ozon

    00:31

  • Une collaboration fidèle et diversifiée

    00:41

  • Le lyrisme de Rombi dans les films d'Ozon

    00:54

  • Retour sur leur rencontre et le début de leur collaboration

    01:04

  • Rombi : Une quête de films et d'émotions à travers la musique

    02:11

  • Analyse de la musique dans "Sous le Sable"

    03:27

  • La communication et le dialogue créatif entre Rombi et Ozon

    05:40

  • Processus de création musicale à partir d'un scénario

    07:16

  • L'influence de la musique sur la mise en scène

    10:19

  • La musique comme reflet des émotions des personnages

    12:07

  • L'importance du générique et de l'ouverture du film

    14:32

  • Évocation des années 70 et de l'inspiration musicale

    17:03

Description

Au Festival de Cannes 2024, la Leçon de musique Sacem célébrait les 25 ans d'un binôme compositeur-cinéaste emblématique, Philippe Rombi et François Ozon. Pour un large public, la découverte du compositeur est liée à celle du cinéma de François Ozon, avec d’abord Les Amants criminels, puis Sous le sable, en 2001.

Depuis, avec Ozon, c’est un mariage non-exclusif mais d’une grande fidélité : treize longs-métrages, au fil d’une collaboration sans cesse réactivée par la diversité des sujets qu'aborde le metteur en scène. La dialectique du vrai et du faux, les trompe-l'œil sur l’identité, le dédoublement trouvent chez Rombi un lyrisme trouble, sinon ambigu, en faux-semblants.

Dans ce premier podcast, animé par Stéphane Lerouge, les deux créateurs remontent à la source de leur rencontre fondatrice, à ce moment charnière où, à 30 ans, ils ont démarré ensemble, au même moment, au même endroit.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Les grands entretiens du musée de la SACEM avec Stéphane Lerouge.

  • Speaker #2

    Au festival de Cannes 2024, la leçon de musique SACEM célébrait les 25 ans d'un binôme compositeur-cinéaste emblématique, Philippe Rombi et François Ozon. Pour un large public, la découverte du compositeur est liée à celle du cinéma de Ozon avec d'abord Les Amants Criminels puis Sous le Sable en 2001. Depuis, avec Ozon, c'est un mariage non exclusif mais d'une grande fidélité. 13 longs métrages au fil d'une collaboration sans cesse réactivée par la diversité des sujets qu'aborde le metteur en scène. La dialectique du vrai et du faux, les trompe-l'œil sur l'identité, le dédoublement trouvent chez Rombi un lyrisme trouble, sinon ambigu, en faux semblant. Dans ce premier podcast, les deux créateurs remontent à la source de leur rencontre fondatrice, à ce moment charnière où, à 30 ans, ils ont démarré ensemble, au même moment, au même endroit.

  • Speaker #0

    Ça a été assez facile le contact parce qu'effectivement on avait le même âge, on débutait, moi j'avais fait aussi beaucoup de courts-métrages, Philippe avait fait beaucoup de courts-métrages aussi, moi j'étais un peu méfiant par rapport aux musiciens, parce que tous les films que j'avais fait précédemment, les courts-métrages et le premier long, c'était à partir de musiques déjà existantes. Et au sein de la FEMIS, on apprend à parler avec un chef opérateur, avec un monteur, mais jamais avec un musicien. Donc je ne savais pas exactement le fonctionnement. Et a priori, c'est vrai que j'étais plus dans l'école kubrickienne de se dire que les morceaux existent déjà, autant utiliser des morceaux déjà existants. Et puis finalement, quand j'ai fait Les Amants Criminels, je me suis rendu compte qu'il me manquait quand même quelque chose. Et là, grâce à Olivier Delbos, mon producteur de l'époque au sein de la FEMIS, j'ai rencontré Philippe et à partir de là, un dialogue a débuté.

  • Speaker #1

    Je ne me suis pas rendu compte de ce parcours qui s'annonçait. C'était une quête de films. J'étais jeune, j'avais envie de raconter plein de choses. Parce que depuis mon enfance, je raconte des émotions en musique. et mon piano me servait d'exutoire de jardin secret, de journal intime. Donc le cinéma, c'était un moyen aussi de continuer à raconter des histoires des gens, des sentiments des gens et de les traduire en musique. Donc après tout ces courts-métrages, tout ce parcours, j'étais heureux de faire ce premier long-métrage et surtout avec François.

  • Speaker #2

    Dans cette séquence finale de Sous le sable, avez-vous beaucoup réfléchi à l'entrée de la musique ?

  • Speaker #0

    Alors moi, je savais exactement ce que je voulais pour cette fin. Je voulais du piano et un violoncelle. Voilà, c'est une fois où j'étais le plus directif avec Philippe. Le piano, parce que pour moi, c'était Charles Trampling, c'était sa mélancolie. Et puis le violoncelle, c'était la présence de Bruno Kramer, cet homme qui a disparu. Et voilà, c'était l'alliage des deux. pendant tout le film, le thème est très délicat. On l'entend très peu, surtout il est un peu symphonique.

  • Speaker #1

    Il est plus orchestral. C'est vrai que tu m'avais parlé du violoncelle et du piano au début du projet. Exactement. Et j'ai pensé que c'était beau de réserver ce duo vraiment que uniquement à la fin. Parce que tu avais une très belle idée, je me souviens on était en salle de montage devant l'image et justement on se demandait quand faire rentrer la musique. Est-ce qu'on laissait Charlotte ? Épancher. Voilà. et ne pas surligner cette tristesse. Et à un moment donné, quand l'histoire renaît...

  • Speaker #0

    C'est quand elle sourit, quand elle croit le reconnaître.

  • Speaker #1

    Elle croit le voir, voilà, c'est ça. Et à la fin, je me souviens que François a dit, en écoutant la maquette que je lui avais envoyée, ça serait bien si on enlevait petit à petit, au fur et à mesure que dans ta partition, à un moment donné, il n'y a même plus le violoncelle, il n'y a que le piano. Et j'aime bien cette idée et on va enlever le son de l'océan à ce moment là. Donc le piano se retrouve vraiment tout seul. comme le personnage de Charlotte face à son destin, face à sa tristesse et à ses espoirs aussi.

  • Speaker #2

    Le thème du dédoublement serpente à travers tout ton cinéma. Est-ce qu'à partir de Sous le sable, tu as eu le sentiment d'avoir trouvé un double musical à travers Philippe ? Très vite, je me suis rendu compte qu'il y avait une communication facile. est rentré dans mon univers. On a pu avoir un dialogue. Il aime travailler, il aime proposer des choses. Quand il y a quelque chose que je n'aime pas, il recommence. C'était très agréable. Et puis, c'est vrai que je fais des films assez variés. À chaque fois, il sait s'adapter. Et une amitié est née petit à petit. C'est construit. C'est vrai que ma méfiance a baissé plus j'ai travaillé avec lui. Autant avec le film Sous le sable, il est arrivé une fois que le film était terminé. Je savais que je voulais de la musique, mais je ne savais pas exactement quoi. Enfin, les choses, c'est vraiment au moment du montage que ça a pris sens. Je me suis rendu compte que la présence de Bruno Kremer et le mystère autour de son absence avait besoin d'être accompagné musicalement. Très vite, quand on a fait Swimming Pool, là, je lui ai donné le scénario avant même d'avoir tourné. Donc, je lui ai demandé de composer une musique sans avoir les images. Comment ça se passe quand on part d'un scénario ? C'est-à-dire quand on démarre de l'écrit.

  • Speaker #1

    C'est très mystérieux. J'avoue que je n'ai pas d'explication très claire pour dire. Je lis le scénario, j'écoute les mots. Quand il y en a, parfois on me fait lire, mais on ne me donne aucune indication. Quelques mots de François sur une ambiance, sur un climat, un état d'âme. Et puis après, je rentre dans le film. Je me fais mon film du scénario. J'essaye de trouver l'essence, l'idée maîtresse. Donc ça peut être thématique, la plupart du temps, parce que François et moi, on aime les thèmes. Tu parles de swimming pool, c'est autant mélodiquement que la couleur, l'instrumentation et l'ambiance qui jouent un rôle important dans mon entourage.

  • Speaker #2

    C'est le thème et son traitement.

  • Speaker #1

    Et son traitement, le traitement du faux semblant, du vrai, du faux, de l'eau. J'avais pensé à faire, essayer d'évoquer en musique. le process d'écriture, le process de création. Donc ça commence par des notes, comme si on notait des petites idées sur un calepin, et puis au fur et à mesure, ces idées s'organisent jusqu'à le flow d'un thème qui arriverait. Enfin bref, voilà, je vais vous le faire musicalement.

  • Speaker #2

    Qu'est-ce que ça fait de pouvoir tourner avec déjà en amont la musique de son film ? Est-ce que ça influe sur le découpage, la mise en scène ?

  • Speaker #0

    Oui, enfin ça m'a imprégné. C'est vrai qu'on l'a écouté, je l'ai fait écouter aux actrices. Et c'est vrai que pour certaines scènes, dans ma mise en scène, j'avais la musique en tête. Et c'est un luxe d'avoir cette possibilité, d'avoir des thèmes avant le tournage. Et puis finalement... Une fois qu'on a été au montage, il y a eu très peu de modifications, ça avait touché juste et c'est vrai qu'à partir de ce moment-là, j'ai plus souvent donné le scénario à Philippe en amont. Ça m'a rangé !

  • Speaker #1

    Au départ, tout de suite quand j'ai commencé à composer le thème, il m'est venu des idées de timbres et j'ai eu cette idée de duo entre des instruments de même famille, mais de timbres différents. Donc on a une guitare à cordes nylon, une guitare à cordes métal. Deux harpes différentes, deux pianos enregistrés d'une façon différente. On a des voix de jeunes filles qui se répondent. Et pareil dans le traitement de la mélodie, c'est une mélodie accompagnée d'harmonie sans fin. Comme vous savez un paysage où les nuages passent au-dessus, et ça crée des ombres, des lumières comme ça, et ça fait des vagues comme l'eau, comme les reflets de l'eau, et quelque part il n'y a pas de résolution. C'est toujours en mouvement, comme quand on écrit.

  • Speaker #0

    C'est comme ça que j'avais briefé Philippe. Je lui avais dit vraiment que la musique devait incarner le travail que fait le personnage de Charlotte Rampling. Elle écrit, elle n'a pas d'inspiration, et puis tout d'un coup l'inspiration vient, et la musique est là pour nous le... Parce qu'on ne voit pas ce qu'elle écrit. Enfin si, on le voit de... Le film est un peu tordu, donc on comprend après que ce qu'on a vu, c'était ce qu'elle avait écrit. Mais la musique est là pour l'incarner. Et donc, c'est pour ça qu'avec Philippe, on était partis sur l'idée qu'il y ait d'abord des arpèges, des petites notes qui arrivent. Et tout d'un coup, là, vraiment, le thème commence à se développer pour la première fois. Mais c'est quelque chose qui n'est pas forcément formulé. C'est vraiment en travaillant qu'on dit ça. Et puis, nous, on dit ça aussi après coup. Ce n'est pas aussi intellectualisé.

  • Speaker #1

    Surtout pas.

  • Speaker #2

    Est-ce que pour toi, c'est aussi facile de transmettre tes envies, tes rêves, tes attentes ? Un compositeur comme Philippe qui a un chef opérateur ou une monteuse, par exemple.

  • Speaker #0

    Je n'avais pas été formé à ça. Je ne suis absolument pas musicien. J'ai fait de la flûte à bec quand j'étais jeune. C'était une catastrophe. Non, donc, je n'ai pas une oreille extraordinaire non plus. Donc, c'est un dialogue très intuitif. C'est voilà, j'aime tel instrument. J'ai envie de ça. J'ai envie que ça commence là. Voilà, mais avec le temps, on a réussi à bien communiquer ensemble. Je crois qu'on prend maintenant.

  • Speaker #1

    Moi, c'est ce qui m'intéresse. Je ne travaille pas avec un cinéaste pour qu'il me dise qu'il aimerait qu'à la quatrième mesure, au troisième temps, le deuxième basson réponde au violoncelle. C'est beaucoup plus intéressant qu'il me dise qu'il se passe une ambiguïté entre les personnages, qu'il faudrait faire quelque chose du point de vue de tel personnage. C'est ça qui m'inspire. Après, à moi de le traduire en musique.

  • Speaker #2

    Alors, en règle générale, dans le cas de Petit, en particulier, quelle idée vous vous faites de la mission de l'ouverture du film, du générique début ?

  • Speaker #0

    Là, il s'agit d'une comédie et de se faire plaisir. Moi, c'était vraiment un film en hommage des comédies que j'avais vues dans les années 70, quand j'étais enfant. Un film avec Louis de Funès, un hommage à ces films-là. Et donc, l'idée, c'était de se faire plaisir, tout simplement. Après, pour le générique, j'avais en tête le générique du Silence des Agneaux de Jonathan Demme. Donc c'est voilà,

  • Speaker #2

    ça ne se voit pas tout de suite.

  • Speaker #0

    C'est Jodie Foster qui court, voilà. Mais Catherine Deneuve court très bien aussi. Donc voilà, après, alors ça, je l'ai montré très vite à Philippe, cette séquence montée. Je lui ai demandé de travailler dessus. Et à partir de ça, on a vraiment décliné. Et surtout, je lui ai dit d'assumer une forme de naïveté, de sincérité, comme le personnage que joue Catherine.

  • Speaker #1

    François m'a fait des surprises parfois. Il m'a appelé, il m'a dit écoute, est-ce que tu es libre demain après-midi ? J'ai quelque chose à te montrer. Très, très intrigué. Je me suis précipité. Il m'a montré ces images de Catherine en vêtements en rouge qui courent. Donc je suis rentré chez moi et je crois que très vite... C'est parti ! C'est parti !

  • Speaker #2

    ce qui est étonnant c'est que dans la pièce de barillet grady date de 80 le film a été tourné en 2010 l'action du film se passe en 77 philippe j'ai envie de te demander mais à quel palier, à quelle époque doit correspondre pour toi le langage musical sur un film comme Potiche ?

  • Speaker #1

    Principalement les années 70, voilà les souvenirs qu'on a en commun de notre enfance, des films, des comédies de notre enfance. Donc je me suis amusé à faire ce qu'on ne fait plus aujourd'hui, c'est-à-dire réunir un orchestre symphonique, lui ajouter une rythmique.

  • Speaker #2

    Un siffleur ?

  • Speaker #1

    Un siffleur accessoirement, n'est-ce pas ? Ça c'est une histoire incroyable. C'est une histoire rigolote, mais bon.

  • Speaker #0

    Parce que c'est le siffleur d'Ennio Morricone. Moi je rêvais d'avoir un sifflement dans un de mes films, donc j'avais dit voilà Philippe c'est le bon film pour avoir un siffleur. Le jour où on enregistre à Davot, moi je viens, je voulais le voir, alors on voit un vieux monsieur tout dégarni, et quand il se met devant le micro, il n'y a aucun souffle qui sort. Donc c'était assez bizarre.

  • Speaker #1

    C'était curieux, disons qu'il avait une technique particulière, il sifflait un petit peu avec la langue pincée comme ça, et ça a étonné un petit peu François, je lui ai dit ne t'inquiète pas, on va se chauffer. Et puis après, c'était très bien.

  • Speaker #2

    Philippe, est-ce que tu pourrais nous montrer comment ce thème de Potiche, tu le variationnes, tu joues avec lui à travers le film en jouant avec les tempos et avec la tonalité ?

  • Speaker #1

    Plutôt que de recréer un thème spécifique, je me suis dit, si je prenais le thème principal qu'on a, si on jouait au début du film et que je le rendais un peu sentimental pour leur retrouvailles.

Chapters

  • Introduction et présentation des intervenants

    00:14

  • Célébration des 25 ans de collaboration entre Rombi et Ozon

    00:19

  • La découverte de Rombi à travers le cinéma de François Ozon

    00:31

  • Une collaboration fidèle et diversifiée

    00:41

  • Le lyrisme de Rombi dans les films d'Ozon

    00:54

  • Retour sur leur rencontre et le début de leur collaboration

    01:04

  • Rombi : Une quête de films et d'émotions à travers la musique

    02:11

  • Analyse de la musique dans "Sous le Sable"

    03:27

  • La communication et le dialogue créatif entre Rombi et Ozon

    05:40

  • Processus de création musicale à partir d'un scénario

    07:16

  • L'influence de la musique sur la mise en scène

    10:19

  • La musique comme reflet des émotions des personnages

    12:07

  • L'importance du générique et de l'ouverture du film

    14:32

  • Évocation des années 70 et de l'inspiration musicale

    17:03

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Description

Au Festival de Cannes 2024, la Leçon de musique Sacem célébrait les 25 ans d'un binôme compositeur-cinéaste emblématique, Philippe Rombi et François Ozon. Pour un large public, la découverte du compositeur est liée à celle du cinéma de François Ozon, avec d’abord Les Amants criminels, puis Sous le sable, en 2001.

Depuis, avec Ozon, c’est un mariage non-exclusif mais d’une grande fidélité : treize longs-métrages, au fil d’une collaboration sans cesse réactivée par la diversité des sujets qu'aborde le metteur en scène. La dialectique du vrai et du faux, les trompe-l'œil sur l’identité, le dédoublement trouvent chez Rombi un lyrisme trouble, sinon ambigu, en faux-semblants.

Dans ce premier podcast, animé par Stéphane Lerouge, les deux créateurs remontent à la source de leur rencontre fondatrice, à ce moment charnière où, à 30 ans, ils ont démarré ensemble, au même moment, au même endroit.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Les grands entretiens du musée de la SACEM avec Stéphane Lerouge.

  • Speaker #2

    Au festival de Cannes 2024, la leçon de musique SACEM célébrait les 25 ans d'un binôme compositeur-cinéaste emblématique, Philippe Rombi et François Ozon. Pour un large public, la découverte du compositeur est liée à celle du cinéma de Ozon avec d'abord Les Amants Criminels puis Sous le Sable en 2001. Depuis, avec Ozon, c'est un mariage non exclusif mais d'une grande fidélité. 13 longs métrages au fil d'une collaboration sans cesse réactivée par la diversité des sujets qu'aborde le metteur en scène. La dialectique du vrai et du faux, les trompe-l'œil sur l'identité, le dédoublement trouvent chez Rombi un lyrisme trouble, sinon ambigu, en faux semblant. Dans ce premier podcast, les deux créateurs remontent à la source de leur rencontre fondatrice, à ce moment charnière où, à 30 ans, ils ont démarré ensemble, au même moment, au même endroit.

  • Speaker #0

    Ça a été assez facile le contact parce qu'effectivement on avait le même âge, on débutait, moi j'avais fait aussi beaucoup de courts-métrages, Philippe avait fait beaucoup de courts-métrages aussi, moi j'étais un peu méfiant par rapport aux musiciens, parce que tous les films que j'avais fait précédemment, les courts-métrages et le premier long, c'était à partir de musiques déjà existantes. Et au sein de la FEMIS, on apprend à parler avec un chef opérateur, avec un monteur, mais jamais avec un musicien. Donc je ne savais pas exactement le fonctionnement. Et a priori, c'est vrai que j'étais plus dans l'école kubrickienne de se dire que les morceaux existent déjà, autant utiliser des morceaux déjà existants. Et puis finalement, quand j'ai fait Les Amants Criminels, je me suis rendu compte qu'il me manquait quand même quelque chose. Et là, grâce à Olivier Delbos, mon producteur de l'époque au sein de la FEMIS, j'ai rencontré Philippe et à partir de là, un dialogue a débuté.

  • Speaker #1

    Je ne me suis pas rendu compte de ce parcours qui s'annonçait. C'était une quête de films. J'étais jeune, j'avais envie de raconter plein de choses. Parce que depuis mon enfance, je raconte des émotions en musique. et mon piano me servait d'exutoire de jardin secret, de journal intime. Donc le cinéma, c'était un moyen aussi de continuer à raconter des histoires des gens, des sentiments des gens et de les traduire en musique. Donc après tout ces courts-métrages, tout ce parcours, j'étais heureux de faire ce premier long-métrage et surtout avec François.

  • Speaker #2

    Dans cette séquence finale de Sous le sable, avez-vous beaucoup réfléchi à l'entrée de la musique ?

  • Speaker #0

    Alors moi, je savais exactement ce que je voulais pour cette fin. Je voulais du piano et un violoncelle. Voilà, c'est une fois où j'étais le plus directif avec Philippe. Le piano, parce que pour moi, c'était Charles Trampling, c'était sa mélancolie. Et puis le violoncelle, c'était la présence de Bruno Kramer, cet homme qui a disparu. Et voilà, c'était l'alliage des deux. pendant tout le film, le thème est très délicat. On l'entend très peu, surtout il est un peu symphonique.

  • Speaker #1

    Il est plus orchestral. C'est vrai que tu m'avais parlé du violoncelle et du piano au début du projet. Exactement. Et j'ai pensé que c'était beau de réserver ce duo vraiment que uniquement à la fin. Parce que tu avais une très belle idée, je me souviens on était en salle de montage devant l'image et justement on se demandait quand faire rentrer la musique. Est-ce qu'on laissait Charlotte ? Épancher. Voilà. et ne pas surligner cette tristesse. Et à un moment donné, quand l'histoire renaît...

  • Speaker #0

    C'est quand elle sourit, quand elle croit le reconnaître.

  • Speaker #1

    Elle croit le voir, voilà, c'est ça. Et à la fin, je me souviens que François a dit, en écoutant la maquette que je lui avais envoyée, ça serait bien si on enlevait petit à petit, au fur et à mesure que dans ta partition, à un moment donné, il n'y a même plus le violoncelle, il n'y a que le piano. Et j'aime bien cette idée et on va enlever le son de l'océan à ce moment là. Donc le piano se retrouve vraiment tout seul. comme le personnage de Charlotte face à son destin, face à sa tristesse et à ses espoirs aussi.

  • Speaker #2

    Le thème du dédoublement serpente à travers tout ton cinéma. Est-ce qu'à partir de Sous le sable, tu as eu le sentiment d'avoir trouvé un double musical à travers Philippe ? Très vite, je me suis rendu compte qu'il y avait une communication facile. est rentré dans mon univers. On a pu avoir un dialogue. Il aime travailler, il aime proposer des choses. Quand il y a quelque chose que je n'aime pas, il recommence. C'était très agréable. Et puis, c'est vrai que je fais des films assez variés. À chaque fois, il sait s'adapter. Et une amitié est née petit à petit. C'est construit. C'est vrai que ma méfiance a baissé plus j'ai travaillé avec lui. Autant avec le film Sous le sable, il est arrivé une fois que le film était terminé. Je savais que je voulais de la musique, mais je ne savais pas exactement quoi. Enfin, les choses, c'est vraiment au moment du montage que ça a pris sens. Je me suis rendu compte que la présence de Bruno Kremer et le mystère autour de son absence avait besoin d'être accompagné musicalement. Très vite, quand on a fait Swimming Pool, là, je lui ai donné le scénario avant même d'avoir tourné. Donc, je lui ai demandé de composer une musique sans avoir les images. Comment ça se passe quand on part d'un scénario ? C'est-à-dire quand on démarre de l'écrit.

  • Speaker #1

    C'est très mystérieux. J'avoue que je n'ai pas d'explication très claire pour dire. Je lis le scénario, j'écoute les mots. Quand il y en a, parfois on me fait lire, mais on ne me donne aucune indication. Quelques mots de François sur une ambiance, sur un climat, un état d'âme. Et puis après, je rentre dans le film. Je me fais mon film du scénario. J'essaye de trouver l'essence, l'idée maîtresse. Donc ça peut être thématique, la plupart du temps, parce que François et moi, on aime les thèmes. Tu parles de swimming pool, c'est autant mélodiquement que la couleur, l'instrumentation et l'ambiance qui jouent un rôle important dans mon entourage.

  • Speaker #2

    C'est le thème et son traitement.

  • Speaker #1

    Et son traitement, le traitement du faux semblant, du vrai, du faux, de l'eau. J'avais pensé à faire, essayer d'évoquer en musique. le process d'écriture, le process de création. Donc ça commence par des notes, comme si on notait des petites idées sur un calepin, et puis au fur et à mesure, ces idées s'organisent jusqu'à le flow d'un thème qui arriverait. Enfin bref, voilà, je vais vous le faire musicalement.

  • Speaker #2

    Qu'est-ce que ça fait de pouvoir tourner avec déjà en amont la musique de son film ? Est-ce que ça influe sur le découpage, la mise en scène ?

  • Speaker #0

    Oui, enfin ça m'a imprégné. C'est vrai qu'on l'a écouté, je l'ai fait écouter aux actrices. Et c'est vrai que pour certaines scènes, dans ma mise en scène, j'avais la musique en tête. Et c'est un luxe d'avoir cette possibilité, d'avoir des thèmes avant le tournage. Et puis finalement... Une fois qu'on a été au montage, il y a eu très peu de modifications, ça avait touché juste et c'est vrai qu'à partir de ce moment-là, j'ai plus souvent donné le scénario à Philippe en amont. Ça m'a rangé !

  • Speaker #1

    Au départ, tout de suite quand j'ai commencé à composer le thème, il m'est venu des idées de timbres et j'ai eu cette idée de duo entre des instruments de même famille, mais de timbres différents. Donc on a une guitare à cordes nylon, une guitare à cordes métal. Deux harpes différentes, deux pianos enregistrés d'une façon différente. On a des voix de jeunes filles qui se répondent. Et pareil dans le traitement de la mélodie, c'est une mélodie accompagnée d'harmonie sans fin. Comme vous savez un paysage où les nuages passent au-dessus, et ça crée des ombres, des lumières comme ça, et ça fait des vagues comme l'eau, comme les reflets de l'eau, et quelque part il n'y a pas de résolution. C'est toujours en mouvement, comme quand on écrit.

  • Speaker #0

    C'est comme ça que j'avais briefé Philippe. Je lui avais dit vraiment que la musique devait incarner le travail que fait le personnage de Charlotte Rampling. Elle écrit, elle n'a pas d'inspiration, et puis tout d'un coup l'inspiration vient, et la musique est là pour nous le... Parce qu'on ne voit pas ce qu'elle écrit. Enfin si, on le voit de... Le film est un peu tordu, donc on comprend après que ce qu'on a vu, c'était ce qu'elle avait écrit. Mais la musique est là pour l'incarner. Et donc, c'est pour ça qu'avec Philippe, on était partis sur l'idée qu'il y ait d'abord des arpèges, des petites notes qui arrivent. Et tout d'un coup, là, vraiment, le thème commence à se développer pour la première fois. Mais c'est quelque chose qui n'est pas forcément formulé. C'est vraiment en travaillant qu'on dit ça. Et puis, nous, on dit ça aussi après coup. Ce n'est pas aussi intellectualisé.

  • Speaker #1

    Surtout pas.

  • Speaker #2

    Est-ce que pour toi, c'est aussi facile de transmettre tes envies, tes rêves, tes attentes ? Un compositeur comme Philippe qui a un chef opérateur ou une monteuse, par exemple.

  • Speaker #0

    Je n'avais pas été formé à ça. Je ne suis absolument pas musicien. J'ai fait de la flûte à bec quand j'étais jeune. C'était une catastrophe. Non, donc, je n'ai pas une oreille extraordinaire non plus. Donc, c'est un dialogue très intuitif. C'est voilà, j'aime tel instrument. J'ai envie de ça. J'ai envie que ça commence là. Voilà, mais avec le temps, on a réussi à bien communiquer ensemble. Je crois qu'on prend maintenant.

  • Speaker #1

    Moi, c'est ce qui m'intéresse. Je ne travaille pas avec un cinéaste pour qu'il me dise qu'il aimerait qu'à la quatrième mesure, au troisième temps, le deuxième basson réponde au violoncelle. C'est beaucoup plus intéressant qu'il me dise qu'il se passe une ambiguïté entre les personnages, qu'il faudrait faire quelque chose du point de vue de tel personnage. C'est ça qui m'inspire. Après, à moi de le traduire en musique.

  • Speaker #2

    Alors, en règle générale, dans le cas de Petit, en particulier, quelle idée vous vous faites de la mission de l'ouverture du film, du générique début ?

  • Speaker #0

    Là, il s'agit d'une comédie et de se faire plaisir. Moi, c'était vraiment un film en hommage des comédies que j'avais vues dans les années 70, quand j'étais enfant. Un film avec Louis de Funès, un hommage à ces films-là. Et donc, l'idée, c'était de se faire plaisir, tout simplement. Après, pour le générique, j'avais en tête le générique du Silence des Agneaux de Jonathan Demme. Donc c'est voilà,

  • Speaker #2

    ça ne se voit pas tout de suite.

  • Speaker #0

    C'est Jodie Foster qui court, voilà. Mais Catherine Deneuve court très bien aussi. Donc voilà, après, alors ça, je l'ai montré très vite à Philippe, cette séquence montée. Je lui ai demandé de travailler dessus. Et à partir de ça, on a vraiment décliné. Et surtout, je lui ai dit d'assumer une forme de naïveté, de sincérité, comme le personnage que joue Catherine.

  • Speaker #1

    François m'a fait des surprises parfois. Il m'a appelé, il m'a dit écoute, est-ce que tu es libre demain après-midi ? J'ai quelque chose à te montrer. Très, très intrigué. Je me suis précipité. Il m'a montré ces images de Catherine en vêtements en rouge qui courent. Donc je suis rentré chez moi et je crois que très vite... C'est parti ! C'est parti !

  • Speaker #2

    ce qui est étonnant c'est que dans la pièce de barillet grady date de 80 le film a été tourné en 2010 l'action du film se passe en 77 philippe j'ai envie de te demander mais à quel palier, à quelle époque doit correspondre pour toi le langage musical sur un film comme Potiche ?

  • Speaker #1

    Principalement les années 70, voilà les souvenirs qu'on a en commun de notre enfance, des films, des comédies de notre enfance. Donc je me suis amusé à faire ce qu'on ne fait plus aujourd'hui, c'est-à-dire réunir un orchestre symphonique, lui ajouter une rythmique.

  • Speaker #2

    Un siffleur ?

  • Speaker #1

    Un siffleur accessoirement, n'est-ce pas ? Ça c'est une histoire incroyable. C'est une histoire rigolote, mais bon.

  • Speaker #0

    Parce que c'est le siffleur d'Ennio Morricone. Moi je rêvais d'avoir un sifflement dans un de mes films, donc j'avais dit voilà Philippe c'est le bon film pour avoir un siffleur. Le jour où on enregistre à Davot, moi je viens, je voulais le voir, alors on voit un vieux monsieur tout dégarni, et quand il se met devant le micro, il n'y a aucun souffle qui sort. Donc c'était assez bizarre.

  • Speaker #1

    C'était curieux, disons qu'il avait une technique particulière, il sifflait un petit peu avec la langue pincée comme ça, et ça a étonné un petit peu François, je lui ai dit ne t'inquiète pas, on va se chauffer. Et puis après, c'était très bien.

  • Speaker #2

    Philippe, est-ce que tu pourrais nous montrer comment ce thème de Potiche, tu le variationnes, tu joues avec lui à travers le film en jouant avec les tempos et avec la tonalité ?

  • Speaker #1

    Plutôt que de recréer un thème spécifique, je me suis dit, si je prenais le thème principal qu'on a, si on jouait au début du film et que je le rendais un peu sentimental pour leur retrouvailles.

Chapters

  • Introduction et présentation des intervenants

    00:14

  • Célébration des 25 ans de collaboration entre Rombi et Ozon

    00:19

  • La découverte de Rombi à travers le cinéma de François Ozon

    00:31

  • Une collaboration fidèle et diversifiée

    00:41

  • Le lyrisme de Rombi dans les films d'Ozon

    00:54

  • Retour sur leur rencontre et le début de leur collaboration

    01:04

  • Rombi : Une quête de films et d'émotions à travers la musique

    02:11

  • Analyse de la musique dans "Sous le Sable"

    03:27

  • La communication et le dialogue créatif entre Rombi et Ozon

    05:40

  • Processus de création musicale à partir d'un scénario

    07:16

  • L'influence de la musique sur la mise en scène

    10:19

  • La musique comme reflet des émotions des personnages

    12:07

  • L'importance du générique et de l'ouverture du film

    14:32

  • Évocation des années 70 et de l'inspiration musicale

    17:03

Description

Au Festival de Cannes 2024, la Leçon de musique Sacem célébrait les 25 ans d'un binôme compositeur-cinéaste emblématique, Philippe Rombi et François Ozon. Pour un large public, la découverte du compositeur est liée à celle du cinéma de François Ozon, avec d’abord Les Amants criminels, puis Sous le sable, en 2001.

Depuis, avec Ozon, c’est un mariage non-exclusif mais d’une grande fidélité : treize longs-métrages, au fil d’une collaboration sans cesse réactivée par la diversité des sujets qu'aborde le metteur en scène. La dialectique du vrai et du faux, les trompe-l'œil sur l’identité, le dédoublement trouvent chez Rombi un lyrisme trouble, sinon ambigu, en faux-semblants.

Dans ce premier podcast, animé par Stéphane Lerouge, les deux créateurs remontent à la source de leur rencontre fondatrice, à ce moment charnière où, à 30 ans, ils ont démarré ensemble, au même moment, au même endroit.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Les grands entretiens du musée de la SACEM avec Stéphane Lerouge.

  • Speaker #2

    Au festival de Cannes 2024, la leçon de musique SACEM célébrait les 25 ans d'un binôme compositeur-cinéaste emblématique, Philippe Rombi et François Ozon. Pour un large public, la découverte du compositeur est liée à celle du cinéma de Ozon avec d'abord Les Amants Criminels puis Sous le Sable en 2001. Depuis, avec Ozon, c'est un mariage non exclusif mais d'une grande fidélité. 13 longs métrages au fil d'une collaboration sans cesse réactivée par la diversité des sujets qu'aborde le metteur en scène. La dialectique du vrai et du faux, les trompe-l'œil sur l'identité, le dédoublement trouvent chez Rombi un lyrisme trouble, sinon ambigu, en faux semblant. Dans ce premier podcast, les deux créateurs remontent à la source de leur rencontre fondatrice, à ce moment charnière où, à 30 ans, ils ont démarré ensemble, au même moment, au même endroit.

  • Speaker #0

    Ça a été assez facile le contact parce qu'effectivement on avait le même âge, on débutait, moi j'avais fait aussi beaucoup de courts-métrages, Philippe avait fait beaucoup de courts-métrages aussi, moi j'étais un peu méfiant par rapport aux musiciens, parce que tous les films que j'avais fait précédemment, les courts-métrages et le premier long, c'était à partir de musiques déjà existantes. Et au sein de la FEMIS, on apprend à parler avec un chef opérateur, avec un monteur, mais jamais avec un musicien. Donc je ne savais pas exactement le fonctionnement. Et a priori, c'est vrai que j'étais plus dans l'école kubrickienne de se dire que les morceaux existent déjà, autant utiliser des morceaux déjà existants. Et puis finalement, quand j'ai fait Les Amants Criminels, je me suis rendu compte qu'il me manquait quand même quelque chose. Et là, grâce à Olivier Delbos, mon producteur de l'époque au sein de la FEMIS, j'ai rencontré Philippe et à partir de là, un dialogue a débuté.

  • Speaker #1

    Je ne me suis pas rendu compte de ce parcours qui s'annonçait. C'était une quête de films. J'étais jeune, j'avais envie de raconter plein de choses. Parce que depuis mon enfance, je raconte des émotions en musique. et mon piano me servait d'exutoire de jardin secret, de journal intime. Donc le cinéma, c'était un moyen aussi de continuer à raconter des histoires des gens, des sentiments des gens et de les traduire en musique. Donc après tout ces courts-métrages, tout ce parcours, j'étais heureux de faire ce premier long-métrage et surtout avec François.

  • Speaker #2

    Dans cette séquence finale de Sous le sable, avez-vous beaucoup réfléchi à l'entrée de la musique ?

  • Speaker #0

    Alors moi, je savais exactement ce que je voulais pour cette fin. Je voulais du piano et un violoncelle. Voilà, c'est une fois où j'étais le plus directif avec Philippe. Le piano, parce que pour moi, c'était Charles Trampling, c'était sa mélancolie. Et puis le violoncelle, c'était la présence de Bruno Kramer, cet homme qui a disparu. Et voilà, c'était l'alliage des deux. pendant tout le film, le thème est très délicat. On l'entend très peu, surtout il est un peu symphonique.

  • Speaker #1

    Il est plus orchestral. C'est vrai que tu m'avais parlé du violoncelle et du piano au début du projet. Exactement. Et j'ai pensé que c'était beau de réserver ce duo vraiment que uniquement à la fin. Parce que tu avais une très belle idée, je me souviens on était en salle de montage devant l'image et justement on se demandait quand faire rentrer la musique. Est-ce qu'on laissait Charlotte ? Épancher. Voilà. et ne pas surligner cette tristesse. Et à un moment donné, quand l'histoire renaît...

  • Speaker #0

    C'est quand elle sourit, quand elle croit le reconnaître.

  • Speaker #1

    Elle croit le voir, voilà, c'est ça. Et à la fin, je me souviens que François a dit, en écoutant la maquette que je lui avais envoyée, ça serait bien si on enlevait petit à petit, au fur et à mesure que dans ta partition, à un moment donné, il n'y a même plus le violoncelle, il n'y a que le piano. Et j'aime bien cette idée et on va enlever le son de l'océan à ce moment là. Donc le piano se retrouve vraiment tout seul. comme le personnage de Charlotte face à son destin, face à sa tristesse et à ses espoirs aussi.

  • Speaker #2

    Le thème du dédoublement serpente à travers tout ton cinéma. Est-ce qu'à partir de Sous le sable, tu as eu le sentiment d'avoir trouvé un double musical à travers Philippe ? Très vite, je me suis rendu compte qu'il y avait une communication facile. est rentré dans mon univers. On a pu avoir un dialogue. Il aime travailler, il aime proposer des choses. Quand il y a quelque chose que je n'aime pas, il recommence. C'était très agréable. Et puis, c'est vrai que je fais des films assez variés. À chaque fois, il sait s'adapter. Et une amitié est née petit à petit. C'est construit. C'est vrai que ma méfiance a baissé plus j'ai travaillé avec lui. Autant avec le film Sous le sable, il est arrivé une fois que le film était terminé. Je savais que je voulais de la musique, mais je ne savais pas exactement quoi. Enfin, les choses, c'est vraiment au moment du montage que ça a pris sens. Je me suis rendu compte que la présence de Bruno Kremer et le mystère autour de son absence avait besoin d'être accompagné musicalement. Très vite, quand on a fait Swimming Pool, là, je lui ai donné le scénario avant même d'avoir tourné. Donc, je lui ai demandé de composer une musique sans avoir les images. Comment ça se passe quand on part d'un scénario ? C'est-à-dire quand on démarre de l'écrit.

  • Speaker #1

    C'est très mystérieux. J'avoue que je n'ai pas d'explication très claire pour dire. Je lis le scénario, j'écoute les mots. Quand il y en a, parfois on me fait lire, mais on ne me donne aucune indication. Quelques mots de François sur une ambiance, sur un climat, un état d'âme. Et puis après, je rentre dans le film. Je me fais mon film du scénario. J'essaye de trouver l'essence, l'idée maîtresse. Donc ça peut être thématique, la plupart du temps, parce que François et moi, on aime les thèmes. Tu parles de swimming pool, c'est autant mélodiquement que la couleur, l'instrumentation et l'ambiance qui jouent un rôle important dans mon entourage.

  • Speaker #2

    C'est le thème et son traitement.

  • Speaker #1

    Et son traitement, le traitement du faux semblant, du vrai, du faux, de l'eau. J'avais pensé à faire, essayer d'évoquer en musique. le process d'écriture, le process de création. Donc ça commence par des notes, comme si on notait des petites idées sur un calepin, et puis au fur et à mesure, ces idées s'organisent jusqu'à le flow d'un thème qui arriverait. Enfin bref, voilà, je vais vous le faire musicalement.

  • Speaker #2

    Qu'est-ce que ça fait de pouvoir tourner avec déjà en amont la musique de son film ? Est-ce que ça influe sur le découpage, la mise en scène ?

  • Speaker #0

    Oui, enfin ça m'a imprégné. C'est vrai qu'on l'a écouté, je l'ai fait écouter aux actrices. Et c'est vrai que pour certaines scènes, dans ma mise en scène, j'avais la musique en tête. Et c'est un luxe d'avoir cette possibilité, d'avoir des thèmes avant le tournage. Et puis finalement... Une fois qu'on a été au montage, il y a eu très peu de modifications, ça avait touché juste et c'est vrai qu'à partir de ce moment-là, j'ai plus souvent donné le scénario à Philippe en amont. Ça m'a rangé !

  • Speaker #1

    Au départ, tout de suite quand j'ai commencé à composer le thème, il m'est venu des idées de timbres et j'ai eu cette idée de duo entre des instruments de même famille, mais de timbres différents. Donc on a une guitare à cordes nylon, une guitare à cordes métal. Deux harpes différentes, deux pianos enregistrés d'une façon différente. On a des voix de jeunes filles qui se répondent. Et pareil dans le traitement de la mélodie, c'est une mélodie accompagnée d'harmonie sans fin. Comme vous savez un paysage où les nuages passent au-dessus, et ça crée des ombres, des lumières comme ça, et ça fait des vagues comme l'eau, comme les reflets de l'eau, et quelque part il n'y a pas de résolution. C'est toujours en mouvement, comme quand on écrit.

  • Speaker #0

    C'est comme ça que j'avais briefé Philippe. Je lui avais dit vraiment que la musique devait incarner le travail que fait le personnage de Charlotte Rampling. Elle écrit, elle n'a pas d'inspiration, et puis tout d'un coup l'inspiration vient, et la musique est là pour nous le... Parce qu'on ne voit pas ce qu'elle écrit. Enfin si, on le voit de... Le film est un peu tordu, donc on comprend après que ce qu'on a vu, c'était ce qu'elle avait écrit. Mais la musique est là pour l'incarner. Et donc, c'est pour ça qu'avec Philippe, on était partis sur l'idée qu'il y ait d'abord des arpèges, des petites notes qui arrivent. Et tout d'un coup, là, vraiment, le thème commence à se développer pour la première fois. Mais c'est quelque chose qui n'est pas forcément formulé. C'est vraiment en travaillant qu'on dit ça. Et puis, nous, on dit ça aussi après coup. Ce n'est pas aussi intellectualisé.

  • Speaker #1

    Surtout pas.

  • Speaker #2

    Est-ce que pour toi, c'est aussi facile de transmettre tes envies, tes rêves, tes attentes ? Un compositeur comme Philippe qui a un chef opérateur ou une monteuse, par exemple.

  • Speaker #0

    Je n'avais pas été formé à ça. Je ne suis absolument pas musicien. J'ai fait de la flûte à bec quand j'étais jeune. C'était une catastrophe. Non, donc, je n'ai pas une oreille extraordinaire non plus. Donc, c'est un dialogue très intuitif. C'est voilà, j'aime tel instrument. J'ai envie de ça. J'ai envie que ça commence là. Voilà, mais avec le temps, on a réussi à bien communiquer ensemble. Je crois qu'on prend maintenant.

  • Speaker #1

    Moi, c'est ce qui m'intéresse. Je ne travaille pas avec un cinéaste pour qu'il me dise qu'il aimerait qu'à la quatrième mesure, au troisième temps, le deuxième basson réponde au violoncelle. C'est beaucoup plus intéressant qu'il me dise qu'il se passe une ambiguïté entre les personnages, qu'il faudrait faire quelque chose du point de vue de tel personnage. C'est ça qui m'inspire. Après, à moi de le traduire en musique.

  • Speaker #2

    Alors, en règle générale, dans le cas de Petit, en particulier, quelle idée vous vous faites de la mission de l'ouverture du film, du générique début ?

  • Speaker #0

    Là, il s'agit d'une comédie et de se faire plaisir. Moi, c'était vraiment un film en hommage des comédies que j'avais vues dans les années 70, quand j'étais enfant. Un film avec Louis de Funès, un hommage à ces films-là. Et donc, l'idée, c'était de se faire plaisir, tout simplement. Après, pour le générique, j'avais en tête le générique du Silence des Agneaux de Jonathan Demme. Donc c'est voilà,

  • Speaker #2

    ça ne se voit pas tout de suite.

  • Speaker #0

    C'est Jodie Foster qui court, voilà. Mais Catherine Deneuve court très bien aussi. Donc voilà, après, alors ça, je l'ai montré très vite à Philippe, cette séquence montée. Je lui ai demandé de travailler dessus. Et à partir de ça, on a vraiment décliné. Et surtout, je lui ai dit d'assumer une forme de naïveté, de sincérité, comme le personnage que joue Catherine.

  • Speaker #1

    François m'a fait des surprises parfois. Il m'a appelé, il m'a dit écoute, est-ce que tu es libre demain après-midi ? J'ai quelque chose à te montrer. Très, très intrigué. Je me suis précipité. Il m'a montré ces images de Catherine en vêtements en rouge qui courent. Donc je suis rentré chez moi et je crois que très vite... C'est parti ! C'est parti !

  • Speaker #2

    ce qui est étonnant c'est que dans la pièce de barillet grady date de 80 le film a été tourné en 2010 l'action du film se passe en 77 philippe j'ai envie de te demander mais à quel palier, à quelle époque doit correspondre pour toi le langage musical sur un film comme Potiche ?

  • Speaker #1

    Principalement les années 70, voilà les souvenirs qu'on a en commun de notre enfance, des films, des comédies de notre enfance. Donc je me suis amusé à faire ce qu'on ne fait plus aujourd'hui, c'est-à-dire réunir un orchestre symphonique, lui ajouter une rythmique.

  • Speaker #2

    Un siffleur ?

  • Speaker #1

    Un siffleur accessoirement, n'est-ce pas ? Ça c'est une histoire incroyable. C'est une histoire rigolote, mais bon.

  • Speaker #0

    Parce que c'est le siffleur d'Ennio Morricone. Moi je rêvais d'avoir un sifflement dans un de mes films, donc j'avais dit voilà Philippe c'est le bon film pour avoir un siffleur. Le jour où on enregistre à Davot, moi je viens, je voulais le voir, alors on voit un vieux monsieur tout dégarni, et quand il se met devant le micro, il n'y a aucun souffle qui sort. Donc c'était assez bizarre.

  • Speaker #1

    C'était curieux, disons qu'il avait une technique particulière, il sifflait un petit peu avec la langue pincée comme ça, et ça a étonné un petit peu François, je lui ai dit ne t'inquiète pas, on va se chauffer. Et puis après, c'était très bien.

  • Speaker #2

    Philippe, est-ce que tu pourrais nous montrer comment ce thème de Potiche, tu le variationnes, tu joues avec lui à travers le film en jouant avec les tempos et avec la tonalité ?

  • Speaker #1

    Plutôt que de recréer un thème spécifique, je me suis dit, si je prenais le thème principal qu'on a, si on jouait au début du film et que je le rendais un peu sentimental pour leur retrouvailles.

Chapters

  • Introduction et présentation des intervenants

    00:14

  • Célébration des 25 ans de collaboration entre Rombi et Ozon

    00:19

  • La découverte de Rombi à travers le cinéma de François Ozon

    00:31

  • Une collaboration fidèle et diversifiée

    00:41

  • Le lyrisme de Rombi dans les films d'Ozon

    00:54

  • Retour sur leur rencontre et le début de leur collaboration

    01:04

  • Rombi : Une quête de films et d'émotions à travers la musique

    02:11

  • Analyse de la musique dans "Sous le Sable"

    03:27

  • La communication et le dialogue créatif entre Rombi et Ozon

    05:40

  • Processus de création musicale à partir d'un scénario

    07:16

  • L'influence de la musique sur la mise en scène

    10:19

  • La musique comme reflet des émotions des personnages

    12:07

  • L'importance du générique et de l'ouverture du film

    14:32

  • Évocation des années 70 et de l'inspiration musicale

    17:03

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