- Speaker #0
Le musée SACEM présente Évocation d'une vocation Un podcast imaginé et animé par Stéphane Lerouge Pour ce nouvel épisode, nous accueillons une comédienne, autrice, chanteuse, parolière, dont les six longs métrages emblématiques comme cinéaste s'intitulent « Cadry » , « Le Derrière » , « Palais Royal » , « 100% Cachemire » , « Marie Francine » et « Aline » , film pour lequel elle a été sacrée et consacrée par un César 2022 de la meilleure actrice. Bonjour Valérie Lemercier. Stéphane Lerouge. Vous avez choisi cinq bandes originales qui vous ont marquées à des moments différents de votre vie. Et si vous êtes d'accord, j'aimerais bien qu'on les prenne chronologiquement. Alors, le premier film que j'ai vu au cinéma de ma vie, j'avais 4 ans, c'est Le Livre de la Jungle. Et j'ai adoré ce film, mais plus tard, j'ai découvert la bande originale en anglais. Attendez, mais vous l'avez vu quoi ? Au cinéma. À Dieppe ? À Ifto. Au Viking. Au Viking. Ouais. C'est mon premier film, c'est pas mal quand même pour commencer sa vie de cinéphile, ou en tout cas de spectateur triste de cinéma. C'est ce premier film que j'ai vu à 4 ans, 4 ans et demi. Et j'ai découvert, adulte, la bande originale en anglais, qui m'a émerveillée, surtout le petit bonus où on entend Louis Sprima, on les entend raconter comment ils ont fait les chansons. Je pense que c'est le disque que j'ai le plus écouté de tous les disques. La joie de tout ça, de les voir. On peut les voir sur Internet enregistrer ça. Ils sont en train de marcher avec leurs instruments dans le studio. C'est du génie. C'est très joyeux, c'est drôle, c'est beau, c'est plein d'esprit. C'est génial. Mais est-ce que déjà enfant, vous aviez prolongé le... plaisir du film par l'écoute ? Non, j'avais pas accès à ça, je savais même pas qu'on pouvait acheter le disque, j'avais juste aimé le film, et d'ailleurs je préfère la version en anglais, la version originale. You who's mine too ! Alors, Deuxième choix, qui est un film de Robert Wise, l'adaptation de ce classique de Léonard Bernstein et Stephen Sondheim, qui est West Side Story. À quel moment vous le découvrez dans votre vie ? Eh bien, je le découvre bizarrement sans voir le film. L'album ? Oui. J'ai découvert le film après avoir écouté le disque, que j'ai beaucoup beaucoup écouté, surtout Dance at the Gym, cette espèce de folie de danse très très compliquée. C'était impossible même pour les danseurs, on ne peut pas compter les pas. C'est très très compliqué à danser, ils étaient tous ensemble. Je connais maintenant bien l'histoire, je sais qu'il y avait deux réalisateurs qu'on a fini par en virer un, et qu'il y en avait un qui était chorégraphe et ils avaient tellement trop d'idées tous les deux qu'ils ont fini par en enlever un. qui est revenu après au montage, le chorégraphe. Mais en tout cas, c'est une perfection. Et le documentaire très intéressant, on voit Léonard Bernstein chez lui, faire venir les chanteurs, les chanteuses, et les faire chanter à « I feel pretty » , enfin tout ça, le voir diriger l'orchestre, le voir voir la beauté de lui, la beauté de cette musique. Enfin tout ça, c'est pareil, c'est un moment où on a l'impression que tout le monde avait du talent. Je ne sais pas, c'est un moment de miracle où tout est parfait. Alors, c'est marrant parce que j'ai vu celui que j'ai bien aimé. De Spielberg ? Oui. La direction d'orchestre, c'est Goustadou. Doudamel. Doudamel, voilà. Mais il y a, à un moment donné, une perfection dans la chanson, une joie. C'est florissant, je ne sais pas comment Il n'y a pas un morceau qui n'est pas bien, c'est d'une beauté, et puis le film, bien sûr, mais la musique, Et donc, je me suis intéressée à Léonard Bernstein, à sa vie. J'ai lu le livre que sa fille a écrit sur lui, de cette vie où il y avait des cigarettes dans des timbales, où tout le monde fumait, où il y avait Lorraine Bacal, qui avait été au-dessus, il y avait, bien sûr, le Beatles. John Lennon. John Lennon. Le Dakota Building. Le Dakota Building. Lui était fou des Beatles. Il y avait quelque chose de foisonnant et de très amical dans cette vie-là. C'est peut-être une vie rêvée.
- Speaker #2
New Yorkaise rêvée. Mais vous, vous aviez quel âge quand vous avez écouté l'album ? Et surtout J'étais vieille. J'avais déjà 30 ans. Est-ce que les images ensuite du film de Robert Wise, quand vous l'avez découvert... correspondait aux images mentales que vous faisiez ?
- Speaker #0
Pas tout à fait. Pas tout à fait, non. J'avais d'autres images dans la tête. Et j'ai adoré le film après, mais la musique, je ne m'en lasse pas. Et j'écoute beaucoup aussi la bande originale du West Side Story de Spielberg. Il y a certains morceaux même qui sont plus réussis.
- Speaker #2
On n'a jamais vu une œuvre populaire qui doit toucher vraiment un large public. qui soit d'une telle complexité rythmique. Tout est quasiment construit sur des murs composés. Rien n'est jamais carré.
- Speaker #0
C'est ça qui est fou. C'est d'être indansable. Très, très compliqué. Normalement, on compte les pas. C'est quand même simple, la danse. Il y a quelque chose si on sait compter, si on sait danser. Mais là, même ça était impossible tellement tout est dérythmé. Tellement quand ils dansent. La plus belle scène pour moi, c'est quand ils dansent dans The Gym. Là, ça, c'est une folie. C'est la beauté de tous les costumes, comment ils dansent. C'est d'ailleurs marrant de voir les corps, parce qu'aujourd'hui, les danseurs, ils ont 10 kilos de plus, parce qu'ils font de la musculation. Et dans l'original, ils sont très, très minces. Et les nouveaux, qui sont très bons d'ailleurs, les chefs de bande sont des acteurs extraordinaires, des danseurs extraordinaires, mais ils ne sont pas du tout les mêmes corps. Ils sont beaucoup plus musclés, parce qu'ils font de la muscu maintenant, les danseurs. Ils ont des machines.
- Speaker #2
Mais alors, j'allais vous proposer de choisir entre America et Feel Pretty, mais vous, c'est Dance of the Genes.
- Speaker #0
Ah oui, c'est sûr. Parce que c'est une folie, parce qu'on rentre en transe quand on entend ça.
- Speaker #2
On parlait de West Side Story, il y a George Akiris dans le film. George Akiris qui va revenir, Jacques Demy, quelques années plus tard.
- Speaker #0
Et quelques idées de mise en scène aussi, à voir bien chez Jacques Demy.
- Speaker #2
C'est vrai.
- Speaker #0
The West Side Story.
- Speaker #2
Mais si Jacques Demy, vous avez choisi, non pas les Demoiselles, mais plutôt les Parapluies, pourquoi ?
- Speaker #0
Parce que c'est encore plus prenant, parce que je pense que c'est avant, c'est plus nouveau. ça vous arrache les larmes un peu plus probablement c'est aussi une continuité chantée d'un bout à l'autre peut-être parce qu'on l'entend moins et
- Speaker #2
vous connaissez Cherbourg enfant ?
- Speaker #0
non pas du tout c'est pas la même Normandie moi c'est Dieppe c'est pas le même non mais c'est plus expérimental peut-être
- Speaker #2
Là aussi, la découverte se fait par le film, par la bande originale.
- Speaker #0
Par le film.
- Speaker #2
Par le film. Quel âge, à peu près ?
- Speaker #0
Je dirais 25 ans, par là. J'ai beaucoup vu Les Demoiselles de Rochefort, plus probablement, mais l'autre me fait pleurer, plus.
- Speaker #2
C'est-à-dire que vous vous êtes identifiée, à l'époque, au personnage de
- Speaker #0
De Hoevre ? C'est-à-dire, voilà, la séparation, c'est ce qui est le plus... Et je pense que je sais ça. Enfin bon, que Demi disait, il faut que tu me fasses pleurer. Pardon, mais il faut pleurer, il faut les faire pleurer. Et ils ont réussi. Ils nous ont fait pleurer.
- Speaker #2
C'était marqué, paraît-il, disait Michel Legrand, sur la partition. Je n'ai jamais vérifié, mais normalement, ils avaient marqué.
- Speaker #0
C'était pour faire pleurer. Là, on doit pleurer.
- Speaker #2
Non, ils avaient marqué, à tel endroit, à telle fin de scène, premier mouchoir, deuxième mouchoir.
- Speaker #0
Ah, c'est drôle.
- Speaker #2
Il y avait 30 mouchoirs indiqués comme ça.
- Speaker #0
Ben ouais, mais oui. Et en même temps, faire pleurer, il y a une recette qui existe. Vous prenez un enfant, vous l'arrachez à sa mère, maman... Faire rire, on ne peut pas écrire premier rire, deuxième rire. On a moins, c'est encore plus immatériel. Il y a moins de recettes pour faire rire. Il faut que ce soit très intime, il faut que ce soit très sincère. Mais des recettes pour faire rire, il y en a moins pour faire pleurer. Je pense que c'est plus difficile. Faire pleurer, il y a une petite technique quand même.
- Speaker #2
Et là, si justement il fallait faire pleurer les auditeurs de ce podcast, ce serait avec quel titre des Parapluies ?
- Speaker #0
I will wait for you.
- Speaker #1
d'amour je t'attendrais toute ma vie je ne penserai qu'à toi ne parle pas je Tant sublime reste mon amour, ce n'est pas encore bien. Je m'éloigne de toi, ne me regarde pas. Je ne peux pas, je ne peux pas,
- Speaker #0
je ne peux pas.
- Speaker #2
Il y a un choix qui m'a un peu surpris, qui m'a un tout petit peu défrisé, parce que je me dis, mais ce n'est pas possible, elle n'a pas pu voir le film quand elle était petite fille, c'est l'étrange Noël de Monsieur Jack.
- Speaker #0
Ça, c'est venu par une de mes sœurs, dont les enfants ont regardé ça tous les jours. Louis et Joseph, mes neveux, pendant toute leur vie, ils regardaient ça. Et donc, je crois n'avoir pas vu le film. ou une seule fois.
- Speaker #2
Vous ne le connaissez que par les chansons.
- Speaker #0
Oui, et je trouve cette bande de son incroyable. J'écoute beaucoup ce disque. J'ai dû voir une fois le film, mais j'avais moi-même un bel enfant à qui ça faisait trop peur. Je n'ai pas vraiment réussi à le regarder avec lui. Mais j'ai beaucoup, beaucoup écouté. la musique. Moi, j'ai beaucoup fait des tournées en voiture. J'aime bien écouter des disques en entier. J'aime bien écouter une œuvre en entier, avec toutes les chansons à la suite. Et quand on fait des grands trajets, c'est bien. Et c'est un des disques que j'ai beaucoup écouté aussi. Alors là, pour le coup, j'ai dû voir qu'une fois le film.
- Speaker #2
C'est-à-dire que là, on écoute la musique comme une œuvre en tant que telle, complètement détachée des images. Et il y a un univers assez étrange dans lequel la norme est le macabre. C'est-à-dire que c'est presque l'univers de Noël qui est presque une anomalie. C'est ça. C'est un renversement complet.
- Speaker #0
Je crois que le film est très, très beau. Mais moi, c'est la musique que j'ai le plus écoutée sans images. Oui, c'est ça. Et là, il y a un côté... On s'amuse avec ça, le côté gothique et tout ça. On s'amuse avec ce qui fait peur. Donc je comprends que ça puisse faire peur à des enfants, mais ces enfants-là, ils se délectaient d'avoir peur.
- Speaker #2
Alors, vous avez choisi...
- Speaker #0
What's this ?
- Speaker #2
...qui est le moment où Jack Skellington découvre l'univers de Noël, qu'il n'en croit pas ses yeux.
- Speaker #1
What's this ? What's this ? There's cover everywhere. What's this ? There's white things in the air. What's this ? I can't believe my eyes. I must be dreaming. Wake up, Jack. This is a... C'est quoi ? C'est quoi ? Il y a quelque chose de très mauvais. C'est quoi ? Il y a des gens qui chantent des chansons. C'est quoi ? Les rues sont alignées avec des petites plages. Tout le monde semble si heureux. Il y a un concert. Les gens veulent se faire plaisir. C'est quoi ? Il y a un beau symbole, c'est qu'il y a un film qu'on a découvert à Cannes en 2021.
- Speaker #2
Donc, qui a été projeté à quelques jours de votre propre film.
- Speaker #0
En ouverture de Cannes.
- Speaker #2
Aline, c'était l'ouverture de Cannes. C'est le dernier film de Léo Scarrax, qui est un film musical. Et qui est un film dont la matrice, l'œuvre en soi, a été écrite il y a déjà des années.
- Speaker #0
Initiée par les Sparks.
- Speaker #2
Par les Sparks.
- Speaker #0
C'est une demande des Sparks. Alors, moi, j'ai découvert le film tard. C'est-à-dire, je ne sais pas pourquoi, je n'allais pas y aller. et Et ça a été un grand choc. C'est-à-dire que je ne pensais pas que ça allait être aussi inspirant, aussi inventif, que la musique allait tant me plaire. Je ne savais pas que ça parlait d'un comique quand même. C'est un comique qui fait du stand-up. Destructeur. Voilà, avec une chanteuse d'opéra. Je ne savais pas tout ça. J'ai trouvé merveilleux parce que j'en vois tellement de faux bébés en plastique, en latex, ce qui coûte très cher d'ailleurs, qu'on met dans les films pour faire croire qu'on a des bébés qui ne bougent pas. Je trouve que d'avoir mis une marionnette, parce que bizarrement, une marionnette, c'est vivant. Alors qu'un bébé en plastique qui coûte une blinde, ça ne l'est pas. On les voit, ils sont dans les bras des gens, on voit qu'ils sont immobiles, ça n'a aucun intérêt. Et là, d'avoir la fantaisie, les scènes d'amour, les scènes d'accouchement qui sont complètement habituellement rebutées, sont belles. Les scènes d'amour, quand ils font l'amour, c'est beau. quand cet enfant qui naît... C'est une merveille, c'est une marionnette qui finit par être une vraie petite fille qui est incroyable à la scène de la fin. La dernière scène entre Adam Driver et cette vraie petite fille qui défait ses habits de marionnette et qui devient une vraie enfant. C'est sublime. Les chansons sont sublimes. J'écoute... Alors, j'ai vu une seule fois le film, mais j'écoute tout le temps. Avant de jouer au théâtre, j'écoute les Sparks. J'écoute... Alors, pour le coup, que je ne connaissais pas du tout. Et... We love each other. Voilà, cette chanson, on entend peut-être plus souvent l'ouverture qui est... Mais la chanson d'amour est sublime, c'est sublime. J'ai adoré l'inventivité du film, la mise en scène, les acteurs, l'histoire, et je ne m'attendais pas du tout à aimer tant que ça. C'est une très bonne surprise. Pour moi, c'est le grand film de cette année.
- Speaker #2
Et ça vous a fait quoi ? quoi d'être nommée au César, d'ailleurs d'obtenir celui de la meilleure comédienne, et d'avoir devant vous les Sparks chantant. J'étais là,
- Speaker #0
je chantais avec eux, j'étais trop contente, j'ai une photo avec eux, voilà, j'étais très heureuse, ils s'en foutaient de moi, ils ne savent pas du tout qui je suis et tout, mais j'étais contente d'être sur la même scène qu'eux à la fin. Et moi, c'est le film que j'ai aimé cette année.
- Speaker #2
Alors vous choisissez quoi ?
- Speaker #0
Sommet Wista.
- Speaker #2
Merci Valérie Lemercier.
- Speaker #0
Merci Stéphane.
- Speaker #1
C'est pour ce qui est de la vie. Il y a des sphères dans le monde. Les pays, les pays, les pays, ils sont en train de se faire. Mais, il y a des choses. Le budget est pas là. C'est C'est parti !