- Speaker #0
Salutations les pédagogues, après avoir observé en immersion notre essaye à Sarcelles, il est temps de l'analyser, de comprendre quels en sont les mécanismes et les modalités d'application. Sans tout divulgacher, on va parler de groupe, de sport et d'autorité. Vous n'êtes pas dans Pyramide, mais sur Novagogy, le podcast des innovations pédagogiques de l'Alliance CY. Bienvenue et bonne écoute. Pour ce premier épisode d'analyse, avec moi j'aurai Aïda et Céline. Qui êtes-vous ? Et surtout, pourquoi vous êtes devenus profs ?
- Speaker #1
Je suis Aïda Mimouni-Chaban, je suis enseignante-chercheure en marketing. J'enseigne à CY Sergi Paris Université, plus précisément à l'IUT de Sergi Pontoise sur le site de Sarcelles pour des étudiants qui sont en formation BUT technique de commercialisation. C'était un choix de carrière parce que déjà, tout d'abord j'étais passionnée par la recherche, donc une carrière d'enseignant-chercheur et par cette volonté. de pédagogie, de transmission, de partage de savoir, d'amener aussi des individus citoyens à développer des compétences, des compétences qui sont aussi bien liées à mon domaine d'expertise, la gestion, le management et le marketing en particulier, mais aussi des compétences un peu plus transverses, un peu générales sur des manières d'être. Et encore une fois aujourd'hui sur cette posture. de citoyens.
- Speaker #2
Je suis Céline Provost, professeure d'anglais au département technique de commercialisation de Sarcelles. J'enseigne également la communication commerciale. J'ai toujours voulu être prof quand j'étais plus jeune. J'hésitais entre prof d'anglais et prof de sport. Et quand j'ai vu que prof de sport, en fait, il y avait peu de pratiques, puisque c'est ça que j'aimais, du coup, je me suis tournée vers le... vers l'anglais plutôt, donc j'ai fait des études de langue, mais je n'étais pas encore prête à enseigner. Du coup, j'ai fait une école de commerce, puisque j'aime bien, je suis curieuse. Je me suis dit que ce serait intéressant d'avoir plus de cordes à mon arc. Et après, je suis revenue à mes premiers amours.
- Speaker #0
Ok, et quand tu as commencé à être prof, est-ce que ça ressemblait à ce que tu t'étais imaginée ?
- Speaker #2
Oui, puisque j'ai commencé au collège Paul-Éluard à Garges. En banlieue, là où moi j'ai fait mes études, parce que je viens de Gennevilliers, c'était un cran au-dessus de ce que moi j'ai connu, mais c'était exactement le public auquel je m'attendais, et c'est pourquoi je voulais être prof, parce que je pense que c'est là, dans ces quartiers, qu'on peut vraiment faire la différence. Maintenant, le fait est qu'on partait de très loin, et quand j'ai eu l'opportunité de pouvoir rejoindre la fac, j'ai sauté dessus, parce qu'à titre personnel, j'étais d'utilité en collège, Personnellement, mon épanouissement, je m'épanouis beaucoup plus à la fac.
- Speaker #0
C'est parce qu'en termes de possibilités, tu trouves que tu as plus de choses à faire à la fac ? Ou c'est par rapport au public où ils sont beaucoup plus grands
- Speaker #2
C'est diamétralement opposé. En collège, on leur apprend les bases, sauf qu'on est avec un public où l'anglais, c'est clairement pas la priorité. Donc on est là pour leur donner envie. Si ça marche, c'est des jeunes qui après... Au lycée et puis à la fac, auront l'appétence pour l'anglais, alors qu'à la fac, il y a déjà une base qui est plus ou moins solide, mais de là, je peux construire et construire vraiment des trucs que moi j'ai envie de faire, bien sûr en accord avec le programme, alors qu'en collège, j'ai vraiment une trame hyper spécifique à suivre. Là, je suis plus libre, je peux mettre de la com, du marketing, de l'IA, je peux faire un peu ce que je veux tant que je reste dans les clous. En collège, tu ne peux pas faire ça.
- Speaker #0
Ah du coup, tu as plus de possibilités de faire appel à ton imagination que de rester uniquement...
- Speaker #2
Pédagogiquement, déjà, on est tenu d'utiliser des livres en collège. Moi, je n'utilise pas de livres. Ici, je crée tout de A à Z. Et c'est ça que j'aime, devoir suivre alors que ce n'est pas ça qui marche avec eux. Là, je peux faire à ma sauce et c'est ça que j'aime.
- Speaker #0
Une des questions qui me turlupinent souvent l'esprit, c'est quel type d'élèves ont été les profs que je croise ?
- Speaker #1
Alors, moi j'étais une très bonne élève. J'étais une très bonne élève dans le sens où j'étais l'élève qui participait énormément pendant les cours, qui était curieuse d'apprendre, qui aidait énormément ses camarades et qui était très autonome. Et j'avais quand même mes petits défauts parce que j'étais une élève très bavarde. Et je pouvais être un petit peu rebelle parfois, mais j'aimais apprendre et j'aimais aider les autres à apprendre. Donc, voilà, c'est pas anodin avec le choix de carrière. J'étais surtout une élève qui fonctionnait, et je fonctionne toujours d'ailleurs, par une mémoire visuelle. Donc j'ai besoin de visualiser les choses pour les retenir, pour les comprendre. Et je trouve que même quand je donne des conseils aujourd'hui à mes étudiants, c'est très souvent transformer tout ça en graphique, en petits schémas, faites vraiment des petites fiches, mais illustrées. Donc voilà, j'avais plus tôt et j'ai toujours une mémoire un peu plus visuelle.
- Speaker #2
La première de la classe. J'adorais l'école, donc c'était un plaisir pour moi d'y aller. Je voulais toujours avoir les meilleures notes. Je ne faisais pas d'efforts particuliers puisque j'avais juste à écouter et lire mes cours. Et puis ça marchait jusqu'au bac d'ailleurs. Donc non, ça a toujours été facile. C'était l'école et le sport. mes passions. C'est d'ailleurs le sport qui a fait que je n'ai pas fait normal sup parce que moi, je voulais continuer. Je voulais être athlète de haut niveau. Mais normalement, c'était le chemin que j'aurais dû suivre. Pendant très longtemps, je faisais de l'athlétisme au niveau national. Et puis après, un peu la même histoire que pour beaucoup, tu as une blessure. Et puis après, j'ai changé complètement. J'ai fait de la boxe, du MMA, où j'ai pas mal performé. Et jusqu'à très récemment, mais à un moment donné, on ne peut plus tout mener de front. Et voilà, mais le sport, c'est vraiment un à côté très, très important.
- Speaker #0
C'était des bonnes élèves, ça c'est sûr. Et est-ce qu'avoir été une bonne élève, ça empêche de réfléchir à la pédagogie, de réfléchir à comment est-ce qu'on apprend ? Et aussi, comment est-ce qu'on nous transmet ?
- Speaker #2
Moi, en fait, ça me convenait. La transmission, le prof qui incarne le savoir et qui transmet, ça m'allait, ça ne me posait pas de problème, jusqu'à ce que j'arrive au lycée en seconde et surtout à la fac, où là j'avais beaucoup plus de problèmes avec ce format. Je pense que c'est parce que j'avais des super profs aussi et que la fac, quand on est jeune, ça joue. J'avais vraiment des profs qui savaient transmettre, donc j'avais juste à boire leurs paroles et puis ça rentrait. Arriver au lycée, c'était un peu différent et à la fac, là, je ne comprenais pas le modèle, le prof qui lit l'explication de texte. Et là, j'ai dit, mais jamais de la vie, si je deviens prof, je fais ça, c'est pas possible. Et je comprends pas qu'on nous enseigne, nous, profs de langue, la langue, de cette façon-là, en fait. Ah, c'est ça. Donc, c'est le premier truc que j'ai fait quand j'ai eu la chance d'être dans le supérieur. Je dis, moi, 90% de mes cours, ça va être de l'oral, quoi. Du coup, peut-être un peu moins, parce qu'il faut un peu d'écrit, mais c'est peut-être 70% d'oral, 30% d'écrit.
- Speaker #1
Alors, ça date maintenant, mais je pense que... Ça dépend, quand j'étais encore lycée ou collège, je pense que je n'avais... Je ne sais pas si j'avais vraiment la maturité de l'évaluer. Peut-être si, peut-être comme tous les élèves un peu, je me disais, oui, ça peut être ennuyeux, oui, c'est trop scolaire. Après, à l'université, je trouve qu'il y a eu un moment de bascule. Pour moi, c'est quand je suis arrivée en France pour finir mes études, parce que moi je les ai commencé en Tunisie. Et en Tunisie, j'avais une formation qui était vraiment excellente sur des aspects académiques. En revanche, on travaillait beaucoup moins les aspects... orale, prise de parole et les aspects critiques. Et il y a eu un... Oui, quand je suis arrivée en France, ce sont les compétences qui m'ont le plus marquée. Et c'est là où j'ai découvert aussi l'importance de ces aspects-là, l'importance de développer des compétences sur une réflexion propre où on n'ingurgite pas des connaissances et puis juste on les... On se pose aussi, on se les réapproprie, on a le droit d'avoir un regard critique et de ne pas tout prendre tel quel. Et puis ces compétences aussi de savoir communiquer, d'être pédagogue à l'oral, de bien transmettre ses messages. Et petit à petit aussi avec l'enseignement, c'est devenu aussi une posture de... Comment on raconte une histoire ? Comment on embarque dans une histoire pour essayer de simplifier et de passer le message de la manière la plus claire possible ?
- Speaker #0
Aïda a sorti un mot qui va être, j'imagine, une marotte dans les épisodes de Novagogie. Compétence. Compétence, c'est un mot qui est tellement utilisé quand on est dans le milieu de l'éducation, on ne se pose plus la question de ce que ça veut dire. Tout le monde doit être au courant de qu'est-ce qu'une compétence et comment la déployer. Moi, je ne suis pas certain de ce que c'est une compétence. Du coup, j'ai demandé à Bruno Robb ce que ça peut bien signifier. Mais avant tout, qui êtes-vous Bruno Robb ?
- Speaker #3
Moi, je suis professeur en sciences de l'éducation et de la formation à CYSRJ Paris Université. Je n'ai pas toujours été enseignant-chercheur. J'ai d'abord été instituteur, puis formateur d'enseignants, directeur d'école, et ensuite je me suis intéressé aux questions de prévention des violences en milieu scolaire au rectorat de Versailles, notamment. Et puis donc, depuis maintenant une quinzaine d'années, je mets mes recherches. En sciences de l'éducation et de la formation, on a beaucoup porté sur la question de la relation d'autorité enseignante, mais au-delà de l'école même, la relation d'autorité dans le champ de l'éducation en général. Et puis je m'intéresse aussi aux pédagogies différentes, alternatives, pédagogies que j'ai moi-même pratiquées quand j'étais enseignant en classe et que je pratique toujours dans le cadre d'une licence de sciences de l'éducation et de la formation dont je suis responsable ici à CY. Une licence dans laquelle on a un projet pédagogique qui cherche à mettre les étudiants en situation de s'exercer à pratiquer des pédagogies coopératives.
- Speaker #0
Maintenant que les présentations sont faites, qu'est-ce qu'une compétence ?
- Speaker #3
Alors, une compétence, c'est mettre ensemble dans des situations vécues, souvent dans des situations réelles, un ensemble de savoirs. de différents ordres. La compétence, c'est quelque chose de complexe parce qu'effectivement, il s'agit de mettre, de vérifier dans une situation qu'on est capable de faire ce qui nous est demandé. Et donc, pour cela, ça nécessite de mobiliser des savoirs de différents ordres, de différents domaines. Et ce qui est compliqué avec une compétence, c'est qu'on ne peut vérifier que l'étudiant la possède qu'une fois qu'il a été capable de la mettre en œuvre, qu'une fois qu'elle est acquise. On sait qu'on détient la compétence une fois qu'on est capable de la mettre en œuvre. Donc c'est quand même assez compliqué parce qu'évaluer des compétences, c'est mobiliser des savoirs de différents ordres dans une situation complexe. Et donc c'est plus difficile que d'évaluer par exemple si l'étudiant a retenu telle notion ou s'il est capable de donner une définition de la relation d'autorité en éducation par exemple. Mais on peut avoir besoin de ces savoirs. Par exemple, connaître cette définition peut être nécessaire après, par exemple, pour faire une étude de cas, analyser une situation où l'étudiant va devoir mobiliser, par exemple, ce savoir d'une définition, d'une notion, mais aussi d'autres éléments. D'autres éléments de savoir, parfois de différents ordres, y compris des savoirs liés à, par exemple, une expérience de stage. Donc, évaluer une compétence, c'est quelque chose de très complexe.
- Speaker #0
Il faut avoir, du coup, la connaissance ne fait pas la compétence, mais on a besoin de la connaissance pour avoir la compétence.
- Speaker #3
Oui, on a besoin même d'un certain nombre de connaissances, de plusieurs types de connaissances. Une compétence combine différents types de connaissances, de différents ordres, théoriques, plus pratiques, expérientiels. Donc, c'est ça qui est complexe.
- Speaker #0
Moi, pour essayer d'expliquer la compétence à des personnes qui ne sont pas dans le milieu de l'ingénierie pédagogique, j'essaye de leur parler des œufs en neige, des blancs en neige, et dire que tout le monde sait plus ou moins comment on fait pour monter des blancs d'œufs en neige. Mais après, pour le faire, l'appliquer dans une situation, ce n'est pas exactement la même chose.
- Speaker #3
Oui, tout à fait. Une compétence, elle est vraiment de l'ordre d'un fer. C'est-à-dire qu'il y a des disciplines, des professions, des métiers qui se prêtent davantage aux compétences. Tout ce qui relève de l'enseignement technique et professionnel, par exemple, y compris à l'université, on a des référentiels de compétences parce qu'on est sur des savoirs procéduraux, des façons de faire. Et évaluer des façons de faire, c'est... C'est des choses que, justement, les ingénieurs, selon les métiers dans différents champs de technique, sont capables de faire quand ils décrivent des procédures. Pour autant, on ne peut pas tout évaluer par compétence non plus. Et comme on est, nous, à l'université, il y a aussi des savoirs conceptuels, des savoirs théoriques. Il y a aussi des questions qui relèvent d'une culture, dans un champ disciplinaire donné. Et ça, ça ne peut pas toujours s'évaluer par compétence. Donc, moi, quand je réfléchis à cette question de compétence, et là, je m'appuie aussi sur des travaux d'autres chercheurs, c'est à Bernard Rey. J'ai un collègue de Bruxelles qui avait beaucoup travaillé sur cette notion de compétence, qui disait qu'on ne peut pas tout évaluer par compétence. Et c'est vrai que la notion de compétence est très à la mode parce qu'elle va de pair avec la notion d'employabilité, c'est-à-dire dans le champ de la vie professionnelle, dans le champ des professions, des métiers, dans le champ de l'entreprise. Bien sûr, on cherche à avoir des salariés qui soient tout de suite opérationnels. Mais pour autant... Le rôle de l'université, c'est sans doute de développer des compétences, mais c'est aussi de développer des savoirs, je dirais de développer un certain nombre de savoirs qui ne sont pas forcément directement opérationnels, mais pourtant qui sont nécessaires pour penser les situations, pour réfléchir, pour avoir une culture générale aussi sur son métier, voire sur la société, parce qu'on forme aussi des citoyens. Donc, cette notion de compétence est intéressante, mais je parlais tout à l'heure de la licence dont je suis responsable. On évalue par compétence, mais en même temps, je dirais qu'on n'est pas dupe, au sens où on sait très bien que tout ne peut pas être évalué par compétence, que certains des items qu'on appelle compétence, c'est plutôt des contenus de savoir, plus que des compétences, et puis qu'on a aussi des projets qui permettent justement aux étudiants de mettre... un certain nombre de savoirs et de compétences qu'ils ont acquis, de les mettre à l'épreuve dans des situations réelles. Voilà un petit peu, je dirais, comment on peut penser cette notion de compétence dans un système un petit peu plus complexe.
- Speaker #0
Revenons à nos situations d'apprentissage et d'évaluation. Comment les sujets sont choisis, Aïda ?
- Speaker #1
Alors la SAE que vous avez suivie, c'est une SAE qui est en marketing à destination d'étudiants de première année de BUT. L'objectif de la SAE, c'est de sensibiliser les étudiants à l'importance de l'inclusion et de la diversité en général et dans les pratiques des entreprises en particulier, et les amener à intégrer cette diversité et cette inclusion. dans les pratiques d'une marque en particulier à travers la cible et le positionnement.
- Speaker #2
En fait, le constat, c'est l'actu avec Aya Nakamura qui devient égérie de l'encombre. Et donc, j'ai trouvé ça intéressant. le choix de Lancôme, parce que je me suis dit que c'était surtout stratégique plus qu'autre chose. Et puis, quand j'ai vu ce qui se passait, ça a corroboré mon intuition. Et c'est surtout aussi le public qu'on a, qui est un public très diversifié. Et c'est les premières personnes qui peuvent souffrir de discrimination, souvent les multiples pour eux. Et donc, on s'est dit que ce serait bien, vu que c'est les futurs managers de demain, marketeurs de demain, de leur montrer un peu ce que c'était. Acquisez la connaissance via la fresque de la diversité et après de les confronter à des problématiques entreprises et voir comment eux peuvent être acteurs du changement en proposant des positionnements différents pour les marques.
- Speaker #1
Nos sujets de SAE viennent très souvent d'une impulsion un peu au début individuelle et puis après collective. Donc on a une autre SAE qui elle aussi on l'a commencé il y a deux ans autour de vraiment toute la transition environnementale. Et on s'est posé la question de comment la compléter avec une dimension un peu plus sociale. et dont les porteurs de projets, alors ce sont mes collègues Céline Mazard et Céline Provost, qui, de manière, à travers une anecdote qu'ils ont vécue, en rentrant d'une conférence, ils étaient à la gare et l'un d'eux a subi une discrimination. Donc voilà, et c'est en partant de là qu'ils ont réfléchi et qu'il y a eu cette impulsion de se dire, voilà, mais... Parfois, les personnes discriminées subissent tellement de discrimination qu'elles ne s'en rendent même plus compte. Et aussi, il faut former les étudiants pour éviter ce genre de situation. Et c'était surtout là une discrimination reçue lors de la réception d'un service. Donc la dimension marketing est ressortie. Et c'est comme ça que cet ASAE a été réfléchi dans son contenu et dans son objectif. Maintenant, on a une liberté totale. Encore une fois, il y a des compétences que les étudiants doivent valider. Et là, on a un cadrage national à travers ce qu'on appelle le programme national. c'est ce qu'on appelle le PN. En revanche, sur le choix du thème, on est parfaitement libre et donc il n'y a pas eu de réticence et on apprécie cette liberté qu'on a dans le choix de nos thèmes. Sachant que là aussi, au sein de mon département, depuis deux ans et avec la fameuse publication du rapport Jouzel en 2022 sur l'urgence de former les étudiants à la transition en France, environnementales et sociales, nous on a pris un vrai cap pour orienter à la fois nos ressources, leurs contenus et nos SAE sur ces problématiques-là. Alors la SAE, généralement, on est trois enseignants à gérer une SAE. Par exemple, moi, je travaille beaucoup avec deux collègues en particulier, Céline Provo et Salim Hazar. Et ce qu'on fait, c'est que chacun prend le lead sur une des SAE. Donc celui qui prend le lead, il fixe un peu le cap, on discute ensemble. Mais après, c'est la personne qui se charge un peu de la première mouture. du contenu, des diapos qu'ils proposent, les autres interagissent. Et puis après, quand on arrive, on a tout qui est prêt, les grilles d'évaluation, les consignes, tout le contenu pour toute la semaine. Et on y va, quoi. Et c'est vrai que ça prend beaucoup d'énergie, parce que ce sont des journées denses, parce qu'on se retrouve généralement à gérer en moyenne 15 groupes d'étudiants, de 5 étudiants chacun. Donc il faut... tourner entre les différentes salles, répondre aux questions, parfois aussi les motiver, parce qu'on arrive des fois, les étudiants, Ah, j'ai pas de questions ! Donc il faut relancer, il faut dire, Bon, ok, qu'est-ce que vous avez fait ? Montrez-moi ce que vous avez fait. Pourquoi vous avez fait ça ? Est-ce que vous êtes sûr que c'est la bonne piste ? Quel était le plan B ? Généralement, il n'y a jamais de plan B, ou très rarement un plan B. Donc là, on relance, non, non, non, on ne peut pas, la première idée n'est jamais la bonne. Voilà, c'est beaucoup de travail comme ça. Aussi, il faut garder une motivation, parce que des fois, les étudiants iralent. Ils sont là, Ah non, mais mon plan B, il n'y en a pas. Ma première idée est forcément la bonne. Et ne serait-ce que les convaincre de chercher d'autres idées, ça peut prendre de l'énergie. Donc, ils peuvent râler, ils peuvent être mécontents au début, mais très souvent, après, ils sont contents. Donc il faut aussi accepter que les débuts, il faut faire beaucoup de psychologique, beaucoup d'accompagnement pour rassurer et qu'au bout du deuxième jour, troisième jour en max, ça se passe mieux.
- Speaker #2
Alors ça nous a pris du temps cette SAE, donc c'est du temps en dehors, je dirais au moins quatre jours pleins, facile en incluant la formation, la formation c'était une bonne journée. mais au moins trois jours pleins pour tout mettre à plat et créer tous les supports, parce qu'il y a toutes les évales, compiler tous les documents qu'on met à disposition, aller voir comment on crée un avatar, leur trouver les tutos pour faire du montage de son, animer l'avatar, enfin tous ces trucs-là, ça prend du temps. Donc, mi-bout-à-bout, c'est à peu près ça. Après, pour l'animation, en fait, on prépare tout en amont. On a le PowerPoint exactement jour par jour avec la mallette pédagogique, où on leur met tous les supports dedans. qu'on poste sur Teams jour après jour, on ne met jamais tout le premier jour. Comme dans l'amphi, on leur présente les objectifs globaux sur la semaine, mais chaque jour, on leur présente l'objectif du jour. Sinon, ça fait trop d'infos, ils n'arrivent pas.
- Speaker #1
Après, pour gérer le côté indiscipliné, on travaille beaucoup, beaucoup avec des plannings dans la journée. C'est-à-dire, on leur dit de telle heure à telle heure, on a un amphi et il faut être à l'heure, vous êtes en amphi. Ensuite, je ne sais pas, on fonctionne par des créneaux d'1h30. On leur dit pendant 1h30, vous êtes dans vos salles, nous on passe vous voir. C'est ça. Vous avez tel objectif à atteindre en 1h30 et en 1h30, interdiction de se balader dans les couloirs. Vous êtes dans vos salles et ensuite, on vous donne 15 minutes de pause. Donc ça, ça nous permet de gérer vraiment le côté indiscipliné dans le sens où on fait autre chose, on se balade, on ne prend pas au sérieux. Et puis dans les groupes, c'est le fait de passer. de poser des questions individuelles. Ça permet aussi à chacun de s'investir, parce qu'on ne sait jamais quand la question fatidique va tomber et sur qui elle va tomber. Et une dernière manière de gérer cela, c'est d'avoir, même si ce sont des projets de groupe qui sont évalués essentiellement avec des travaux de groupe, on essaie quand même d'avoir 30% de la note qui soit accordée de manière individuelle. qui permettent aussi d'éviter un peu ce qu'on appelle les passagers clandestins, parce que forcément, quand ce sont des groupes de cinq étudiants, ils risquent d'y en avoir, et puis on essaye de minimiser ces risques-là. Ensuite, sur le reste de la semaine, ce qu'ils font, c'est qu'ils sont sensibilisés aussi à une méthode qui est l'empathie, et ils doivent comprendre les pratiques d'inclusion à travers des benchmarks, Utilisez les outils de l'empathie pour eux-mêmes.
- Speaker #0
se mettre à la place de cibles discriminées et essayer de comprendre leurs ressentis, leurs vécus. Et ensuite, ils tirent au sort une entreprise qui n'a pas encore mis en place ces pratiques-là et on leur demande de bien comprendre, analyser l'entreprise et ensuite d'intégrer des pratiques plus inclusives en élargissant la cible et en retravaillant le positionnement de l'entreprise. Merci. Donc voilà, en gros, nous, on a une sorte de cahier de charge dans le programme national pour valider des compétences marketing, notamment bien comprendre le fonctionnement de l'entreprise, sa cible et son positionnement. Et ce qu'on fait à chaque fois, c'est qu'on essaye à travers nos choix de thèmes d'avoir cette dimension plutôt transverse et citoyenne.
- Speaker #1
Une chose que l'on a pu observer, c'est l'engagement des élèves. Et ils étaient tous et toutes à fond dans leur taf. Et franchement, moi, j'ai trouvé ça assez réconfortant. Et je me suis dit, d'où est-ce que ça vient ? Est-ce que ça vient uniquement du sujet ? Ou est-ce que l'autorité des profs, parce que c'est quelque chose qu'on entend beaucoup actuellement, le manque d'autorité, est-ce que c'est l'autorité des profs qui a amené ça ? D'ailleurs, comment est-ce qu'on définit l'autorité ? Est-ce que c'est juste le fait d'avoir la capacité à imposer des choses, des manières de faire, des manières de travailler ?
- Speaker #2
Alors non, en fait, il y a des travaux de sciences humaines et sociales, notamment la philosophe Hannah Arendt, qu'on cite beaucoup quand on parle d'autorité, qui a bien montré... Comment Wallah, philosophe allemande qui est exilé aux États-Unis, à l'époque de la Seconde Guerre mondiale, et qui a beaucoup écrit sur notamment la banalité du mal, mais elle a aussi écrit sur la question de l'autorité, sur la culture. Dans un ouvrage, La crise de la culture, elle explique justement que l'autorité, c'est une influence qui s'exerce sans recourir à la force. Dans l'encyclopédie universaliste aussi, on retrouve, quand on cherche le terme autorité, on retrouve ces définitions-là. Donc il y a un consensus en sciences humaines et sociales pour dire que l'autorité, c'est une relation qui cherche à exercer une influence sur l'autre, sur celui sur lequel effectivement on exerce l'autorité, mais sans recourir à la force. Et souvent, malheureusement, on confond l'autorité avec le pouvoir. Et le pouvoir, lui, peut utiliser la force. Alors, tous les pouvoirs, évidemment, ne sont pas autoritaristes ou ne sont pas abusifs ou ne recourent pas nécessairement à la force. On peut exercer un pouvoir sans recourir à la force. Pour autant, la grande distinction entre autorité et pouvoir, c'est cette impossibilité qu'a l'autorité de recourir à la force. Dès qu'on parle d'un arrêt dit, dès que la force est utilisée, l'autorité proprement dite a échoué. Donc voilà, c'est vraiment cette grande distinction et il est important de le rappeler parce que dans le sens commun, dans les médias, dans l'opinion publique, y compris aussi chez les responsables politiques, quand on parle en éducation en ce moment, c'est un discours assez pas courant, qui est assez, je dirais, asséné par nos responsables politiques et il y a une confusion majeure, de mon point de vue, dans leurs propos, c'est-à-dire qu'il y a effectivement... une confusion entre autorité et pouvoir, clairement. Donc voilà, exercer l'autorité, c'est chercher à exercer une influence sur l'autre sans recourir à la force.
- Speaker #1
Ok. Du coup, je vais enchaîner sur une autre question. D'après ce que vous me dites, ça veut dire que ce n'est pas du tout pertinent dans la pédagogie du...
- Speaker #2
Alors si, c'est d'autant plus pertinent que... Souvent, quand on parle d'éducation, d'enseignement, les finalités, c'est l'émancipation, c'est, par le savoir, permettre à des personnes, à des sujets de se construire comme responsables de leurs actes, responsables d'eux-mêmes, de s'élever. Le sens du mot élève, à l'école, c'est bien celui-là. Donc, pour compléter la définition que je donnais tout à l'heure de la relation d'autorité, d'ailleurs, moi, je parle de relation d'autorité, C'est une relation qui cherche à exercer une influence sur l'autre sans recourir à la force, mais l'enjeu de cette relation, c'est que l'autre reconnaisse le caractère bénéfique de l'influence qu'on exerce sur lui. Donc le registre de la relation d'autorité en éducation, c'est le registre de l'obéissance, non confondu avec la soumission, parce que sinon on bascule dans l'autoritarisme ou dans l'abus de pouvoir. mais une obéissance qui cherche au contraire le consentement de l'autre. L'autre doit consentir. L'objectif de celui qui exerce l'autorité, c'est que l'autre consente à obéir, l'autre reconnaisse que l'autorité qu'on cherche à exercer sur lui, elle l'est pour son bien, dans son intérêt, c'est-à-dire l'intérêt d'émancipation, de s'élever, de grandir, d'apprendre des choses. Donc c'est une notion tout à fait pertinente en éducation.
- Speaker #1
On vous dit en passant, les travaux de Bruno Robe sont très intéressants et on vous laissera des liens en description pour aller plus loin dans les recherches. Revenons au BUT, qui est ?
- Speaker #0
Un bachelor universitaire de technologie, c'est un diplôme national qui est sur trois ans. Donc les étudiants, quand ils arrivent en première année de technique de commercialisation, ils ont... Des modules, des ressources principalement qui sont orientés sur le marketing, la négociation, l'économie. Et puis à la fin de leur première année, ils se spécialisent dans un parcours pour développer des compétences marketing plus spécifiques, par exemple autour de la stratégie de la marque, autour du digital ou autour de la relation client. Et donc ils font encore deux années qui sont très spécialisées en fonction du parcours qu'ils ont choisi. Et dans ce fameux BUT, ce qu'il y a d'important, ce sont les fameuses situations d'évaluation et d'apprentissage qu'on appelle les SAE et qui fonctionnent en mode projet, où les étudiants s'approprient une problématique terrain et essayent de traiter cette problématique et d'apporter une solution par des travaux de groupe à cette problématique-là. Et donc dans ce type de formation, effectivement, les soft skills, les compétences transverses sont essentielles. Il faut savoir que ces SAE dans le programme, elles sont nouvelles, donc elles sont accompagnées par ce qu'on appelle la réforme, la réforme qui fait passer le diplôme de deux ans, qu'on appelait avant DUT, à un diplôme en trois ans, donc un diplôme en... B-U-T, et ça c'est récent parce que ça a été mis en place en 2021. Avant cela, au sein de mon département, donc moi je suis arrivée dans ce département en 2007, deux ans après, on a commencé à mettre en place un fonctionnement par mode projet. Donc indépendamment, nous on le faisait et on travaillait avec des modes projet, un projet en première année, un projet de groupe qu'on appelait le challenge marketing à l'époque, et un projet en deuxième année qui se faisait plus avec... Un jeu de simulation d'entreprise. Donc pour nous, ce n'était pas en termes de fonctionnement une nouveauté. Ce n'était pas une révolution parce qu'on avait ces pratiques. Ce qui change maintenant, donc depuis 2021, c'est le nombre de ces projets. On passe d'un projet... à, je ne sais plus, peut-être 5 ou 6 en première année, et presque autant en deuxième année, et 2 en troisième année. Donc c'est le nombre qui a changé, et peut-être aussi l'angle d'attaque, puisque maintenant... On a des projets pour certains, surtout qui sont des projets de SAE de parcours, qui sont très spécifiques et qui développent des compétences spécifiques par parcours. Encore une fois, par exemple autour du digital ou de l'animation d'un événement, etc. Donc ce sont les deux grosses modifications qu'il y a eu chez nous, c'est le nombre et le contenu.
- Speaker #3
En fait, il y a plein de façons de faire. Des fois, on les laisse libres de former leur groupe. Et là, on a fait des groupes pour qui on les mélange entre TD, par rapport au niveau aussi, pour que ce soit des groupes relativement homogènes, avec un leader, idéalement, dans chaque groupe, parce qu'à force, on les connaît, on les identifie. Et du coup, c'est intéressant de voir qu'il y a des groupes où il y avait ce fameux leader, et puis des groupes où ils se sont répartis. Mais c'est vrai qu'après, oui, ils prennent le pli, ils ont une façon de travailler qu'ils aiment bien. Et quand des fois on leur impose des groupes, ils aiment moins parce qu'ils se retrouvent, c'est pas ce qu'ils ont aimé faire. Et par contre, on remarque que souvent, quand on les laisse former les groupes, ça marche moins bien que quand on leur impose parce qu'ils vont aller par affinité. Et ils se rendent compte que c'est cool de travailler avec les copains et les copines, mais c'est pas forcément efficace.
- Speaker #0
Non seulement ils découvrent le travail de groupe, mais ils découvrent aussi le travail en mode projet, avec comme ça une manière de se gérer qui est un peu autonome, mais en même temps ils ont des objectifs à atteindre. Voilà, ce n'est pas facile pour eux, mais il faut prendre le temps de les accompagner, il faut être conscient de ses difficultés. Et nous on est aidés avec cette réforme parce qu'il y a tellement de SAE que ne serait-ce qu'après le premier semestre, ils ont pris le pli, ils savent comment ça fonctionne et puis ça roule après.
- Speaker #3
Souvent, on voit, parce qu'on connaît un peu leur niveau, souvent, plus nous c'est après la période d'examen. On regroupe sur une semaine les DS, donc on sait les notes qu'ils ont obtenues. Les devoirs sur table, en fait on est en contrôle continu, mais à Sarcelles on a décidé un peu de sacraliser un temps fort en décembre, où ils sont tous en amphi pour qu'il y ait des conditions équitables, mais ça reste juste un DS. Donc on sait les notes qu'ils ont obtenues, et on sait d'où on part, surtout comme c'est une SAE marketing. Et de là, on voit, pour certains, on voit vraiment une différence. Ils ont enfin compris le concept. Ou c'est surtout après, c'est tout ce qui est soft skills, le travail avec les autres, la prise d'initiative, l'autonomie. Sur les concepts clés, généralement, c'est à la deuxième SAE, au S2, où là, on voit, OK, vraiment, il y a eu un progrès. Parce que là, c'est dur à dire sur une semaine, ce n'est pas assez pérenne. Mais sur les soft skills, oui, ils capitalisent. Mais ils capitalisent aussi parce qu'ils ont eu la SAE vente avant. Donc, c'est un peu ce qu'on attend. Là, on les fait travailler en groupe et après, moi, je les ai eus avec mes deux autres collègues SAEcom. Et oui, là, on voit, ils ont pris le pli, ils savent utiliser les outils collaboratifs.
- Speaker #1
Avant de commencer l'interview, on a discuté avec Céline de choses qui ont été différentes entre les premières SAE qu'elle a faites et les dernières qu'elle est en train de réaliser. Et l'une des grosses différences, c'est la pandémie qui les a amenées. Est-ce que tu peux m'en parler, s'il te plaît, Céline ?
- Speaker #3
Oui, alors là, ça s'atténue. Mais les premières générations Covid, là, c'était compliqué. La tension en classe, rester assis en classe, parce que c'est des longues journées chez nous. Ils peuvent faire 8h15, 18h45, donc 9h de cours, c'est pas rien. Ils avaient du mal à retravailler entre eux, reparler entre eux. C'était fou, les promos, elles ne se parlaient pas. Là, on voit qu'elles se parlent plus. Et puis nous, on veut mettre en place plein de choses avec le séminaire de rentrée, etc. Et les SAE, c'est l'occasion d'eux aussi. Mais il y a eu ça. Et le temps d'attention, si on leur met de la ressource, c'est trois minutes maxi, sinon ils décrochent. Donc là, pour cet essayé, tous les tutos, il faut qu'on aille revérifier qu'ils soient toujours d'actualité, parce que l'IA, elle évolue tellement vite, peut-être que l'année prochaine, les avatars, ce sera encore un cran au-dessus. Donc on ne peut pas garder ce qu'on a fait et repartir dessus. Même là, ce qu'on a appris, c'était qu'on a vérifié les liens trois semaines avant, deux semaines avant. On aurait dû le faire la veille, parce que le jour où vous êtes venus et Aïda la pauvre, les liens ne marchaient pas. Voilà.
- Speaker #1
Ah oui, c'est un truc qui demande une adaptation, une adaptabilité au quotidien, limite par heure.
- Speaker #3
Là, franchement, c'était la veille, il aurait fallu tout checker.
- Speaker #1
Et du coup, là, ça fait partie des... Je ne sais pas si on doit appeler ça des erreurs, mais des difficultés que tu as pu voir. Et toi, est-ce qu'il y a des choses que tu as vues sur tes premières années que tu considérais comme erreurs ? Et encore une fois, erreurs, nous, on ne considère pas que c'est quelque chose de négatif. C'est quelque chose qui fait partie du processus et qui est obligatoire quand on fait des choses innovantes. En fait, s'il n'y a pas d'erreurs, c'est que ce n'est pas innovant. C'est que ça reste... Enfin, c'est que soit que les erreurs, elles n'ont pas été prises en compte, ou soit que ce n'est pas du tout innovant. Est-ce qu'il y avait des choses que tu avais remarquées sur les premières années, ou même sur la dernière peut-être ? Et comment est-ce que tu veux pallier ces erreurs ?
- Speaker #3
Il y a plein de choses pour nous, profs, c'était des évidences. Le ciblage, la segmentation, c'est... Non, en fait, il faut vraiment décortiquer étape par étape. Ça, c'est fondamental pour que l'étudiant intègre le concept. Et c'est des étapes, des fois, dans la SAE, on se disait, c'est bon, ils ont fait ça pendant un semestre. On va regrouper, non. Il fallait vraiment qu'on décortique. Donc ça, c'est hyper important, ce qui fait que la trame prof... Ça ne peut pas être comme quand on anime nos cours, c'est assez vague parce qu'on sait exactement ce qu'on va faire. Là, il faut que même pour nous, ce soit hyper descriptif, hyper détaillé, avec à chaque fois la ressource, l'objectif et les outils, pour ensuite pouvoir adapter et se dire Ah, là, cette ressource, ça n'allait pas, ça ne matchait pas et adapter en temps réel. Et à chaque fin de journée, on faisait un bilan et on notait les axes d'amélioration, ce qui fait qu'à la fin, à chaud, on a un document. Avec tous les axes d'amélioration, et puis généralement en mai-juin quand c'est un peu plus cool, on se revoit et on essaye de voir à froid qu'est-ce qu'on pourrait encore améliorer. On réédite tous les documents et puis on refait un point à la rentrée. Mais le coup de tout ce qui n'allait pas ou tout ce qui a été bien et qu'on pourrait améliorer, on a un long document qu'on compile à froid et à chaud.
- Speaker #1
Les travaux de groupe ont été une grosse partie du premier épisode. On essayait de savoir comment est-ce que les jeunes travaillaient, pourquoi est-ce qu'ils avaient choisi ces conditions, et je me suis dit que ça pourrait être intéressant de réentendre Leïla sur le sujet.
- Speaker #3
C'est Leïla. Et du coup, vu qu'avec notre groupe, on a direct bien accroché, on avait une certaine entente et tout, on s'est dit que, contrairement aux autres, on allait essayer d'optimiser notre temps en se répartissant les tâches. Donc c'est pour ça que, en fait, le fait d'être tous sur une même chose, c'est vrai qu'on aurait pu être un peu plus productifs, mais là, ça nous permet aussi d'être plus productifs en faisant tous des choses différentes. en même temps. Et du coup, à la fin, on a aussi tout ce qu'on a fait et ça donne un rendu final. Donc,
- Speaker #1
je trouve que c'était plus pertinent de le faire comme ça.
- Speaker #3
Après, ça dépend de chacun. Mais là, c'était l'organisation qu'on a décidé de choisir.
- Speaker #2
Oui, c'est très intéressant là. Ce qu'elle dit est très intéressant parce que ça pose les questions qu'on évoquait tout à l'heure sur le travail en groupe et sur la question du groupe d'apprentissage. C'est-à-dire, à quelles conditions dans un groupe chacun apprend ? Et la notion de groupe d'apprentissage, c'est mon collègue Philippe Mérieux, de l'Université de Lyon, qui a travaillé cette question déjà dans les années 80. Ce qui est très important dans un groupe, c'est quand on met des étudiants en groupe, c'est qu'au bout du compte, chacun est appris et satisfait aux objectifs que l'enseignant avait. Et là, dans ce qu'explique Leïla, je crois, dans ce qu'elle explique, on voit bien qu'en fait, elle dit qu'on aurait tous pu faire le travail. C'est déjà intéressant parce qu'on s'aperçoit que finalement, ce qu'a proposé l'enseignant, je parlais tout à l'heure de la zone proximale de développement, semble-t-il s'était adapté au niveau de chacune des étudiantes. Mais pour aller plus vite, elles se sont partagées le travail. Chacune a fait un bout du travail. Alors, ça y est, une... ...télorisation du travail, oui, mais il faut le dire comme ça. La difficulté, le problème de ça, c'est que s'il n'y a pas eu... si les responsabilités, si les tâches n'ont pas tourné, que chacune est restée dans sa zone de spécialisation, on n'est pas certain qu'au bout du compte... Je ne sais pas combien elles étaient, si elles étaient quatre, par exemple. Chacune des quatre étudiantes ait vraiment acquis toutes les compétences que la situation exigeait et qu'elle devait effectivement acquérir au cours de la situation. Donc souvent, les étudiants font ça. Je l'observe aussi moi dans la licence. On a des étudiants qui, effectivement, ils résolvent le problème en se partageant les tâches et en allant vers ce qu'ils savent déjà faire. Donc du coup, ils n'apprennent pas. Et c'est ça qui est problématique. Alors là, ce qui est intéressant quand même, à la fin, elle dit qu'on a mis en commun ce qu'on avait fait. Donc là, on peut penser qu'il y a effectivement un partage de connaissances et que peut-être chacune des étudiantes s'est appropriée le travail de l'autre et a compris ce que l'autre avait fait. Donc, voilà, je ne sais pas, encore une fois, ce que l'enseignante a donné comme consigne, mais en tout cas, sur les trois points à lesquels elle explique, il y a effectivement matière à réfléchir. On peut faire l'hypothèse, effectivement, qu'il y a quand même des savoirs qui ont circulé entre les étudiantes du groupe.
- Speaker #1
Et ça, ça pose la question de comment évaluer individuellement des groupes.
- Speaker #2
Oui, c'est-à-dire que Philippe Mérieux, que j'évoquais tout à l'heure, dans ses recherches, il dit, pour qu'on s'assure que chacun ait appris dans le groupe, à la fin d'un travail en groupe d'apprentissage, il faut vérifier, il faut une évaluation individuelle. Il faut que l'enseignant évalue ce que chaque étudiant a compris, a appris de la situation. Ça, c'est essentiel. S'il n'y a pas ça... On ne peut pas s'assurer que le groupe a été bénéfique à chacun et à chacune. Le risque, c'est que ceux qui savaient faire ont réussi, ou ceux qui étaient en mesure d'y arriver ont réussi ce qui était demandé, et puis un certain nombre d'autres soient restés sur le côté parce que c'était trop dur pour eux, parce que pour un tas de raisons, ils n'ont pas été suffisamment aidés, ou ils n'étaient pas en mesure de réussir. Donc ça, c'est tout à fait essentiel.
- Speaker #1
Une fois que cette essaye est terminée, je pense qu'il est très important de savoir ce que ça produit comme effet sur les étudiantes et étudiants. Est-ce qu'il y a des bilans, des retours, des feedbacks qui sont effectués ?
- Speaker #0
Oui, on fait le bilan en passant un questionnaire aux étudiants. Donc ça c'est pour pouvoir collecter un peu la parole et le feedback de nos étudiants. Donc nous on l'a fait pour cette SAE et on mesure à la fois leur satisfaction par rapport au thème. par rapport au déroulement de la semaine et ce qu'ils ont appris. Et donc on a analysé ce premier retour, on a de très bons taux de satisfaction, de l'ordre de 80% et plus, donc ils sont satisfaits du thème. Et surtout ce qu'on a, c'est qu'ils disent... Tous, que ce soit quand on les interroge avec des questions fermées ou des questions ouvertes, ils mettent en avant l'importance du sujet, le fait qu'ils aient vraiment appris des choses sur les sources de discrimination et comment lutter concrètement contre, quelles sont les stratégies qui luttent contre ces discriminations. Et puis l'autre chose qu'on fait, c'est que quand ils arrivent en début de SAE, on leur donne un questionnaire. une sorte de QCM sur le sujet pour tester leur connaissance. Ils le remplissent, ils ont des notes qu'on ne prend pas en compte. Et à la fin de la SAE, on leur donne exactement le même QCM et on voit la progression en termes de notes. Et ça, là, on l'a fait cette année aussi et on est sur une progression des notes en moyenne de 40%. Donc ça, c'est un premier retour sur expérience, un premier feedback qu'on fait avec les étudiants. Et puis le second, on le fait entre nous. Donc tous les jours, à la fin de la journée, on note. ce qui a bien marché, ce qui a bien moins marché, et on regarde comment l'année d'après, on peut l'améliorer.
- Speaker #1
Votre essai, moi, il m'a assez impressionné. J'étais très heureux de passer ces quelques jours avec vous, que ce soit avec vos étudiantes et étudiants, ou avec vous, les profs. Et j'aurais voulu savoir, ce serait bien de communiquer dessus. Est-ce que vous faites en sorte que ce soit au point de votre essai ?
- Speaker #3
Oui, comme pour la SAE Écoute le Monde de Demain, on a candidaté au prix de l'innovation pédagogique de l'AFM. On va faire pareil pour la FNEJ et on espère gagner cette année. Après, c'est l'esprit compétition. On est arrivé troisième, on doit gagner. Et je pense qu'on va recandidater pour l'ANSMAC aussi, parce que pareil, on a fait troisième à l'ANSMAC. Et si on pouvait gagner, parce que là, je pense qu'on a vraiment tout pour gagner, ce serait top. Et après, on continuera avec peut-être une autre SAE ou le projet DSF avec Aïda, parce que là, c'est un cran au-dessus. On est moins micro, on est plus macro. Mais ouais, d'en parler, oui. En fait, c'est pas quelque chose qu'on faisait. Et on s'est dit que c'était dommage, parce que les SAE, en fait, quand moi, je suis arrivée, on appelait ça des projets, mais il y avait cette idée de travailler en transversalité. Et quand il y a eu la réforme, on s'est dit, mais c'est des trucs qu'on fait déjà. Bon, on a adapté, bien sûr. Mais on s'est dit que c'est dommage de garder ça pour nous. Il faut partager. Donc on s'est dit qu'on allait faire ça.
- Speaker #0
Alors, cette SAE, elle est encore toute nouvelle parce qu'on l'a mise en place cette année. On a changé une et puis c'est la première année. Ce qu'on a fait, on l'a soumise à un prix d'innovation pédagogique. Donc, on l'a soumise, on verra ce que ça va donner. Et on l'a fait parce que la SAE précédente, celle dont je parlais, qui a vraiment aussi impulsé une dynamique sur la transition. transition environnementale avec la création de podcasts. Donc, on l'a mise en place en 2022 et on a beaucoup communiqué sur cette SAE. Par exemple, moi, je l'ai présentée à une journée avec des enseignants-chercheurs. J'ai été invitée à une école, Toulouse Business School, pour partager cette innovation. Et l'année dernière, en 2023, on est arrivée finaliste. De deux prix d'innovation pédagogique avec SAE, l'un c'est celui de l'Association française du marketing, l'autre c'est de la FNEJ, donc la Fondation nationale pour l'enseignement de la gestion, qui a labellisé cette innovation. Et on a une sorte de padlet, qui est un peu un petit site internet, sur lequel on a partagé tous les contenus et quelques exemples de réalisation d'étudiants. Et la dernière manière avec laquelle on a valorisé cet SAE, c'est qu'on a partagé aussi lors d'un congrès scientifique international qui s'est tenu en 2023 en Nouvelle-Zélande. Et donc oui, on partage, on dissémine et surtout, nous, on milite pour de l'open access. Donc, on met tout à disposition.
- Speaker #1
C'est sur ce discours de partage que se termine la première série de podcast Novagogy. Un immense merci à nos invités du jour, Aïda Mimouni, Céline Provo et Benoît Robbe. Des liens sont disponibles en description pour revenir sur les thématiques et auteurs mentionnés dans l'épisode. Je souhaiterais aussi personnellement remercier à la production Alice Mokroziki et Florent Maciot. ainsi que tout le reste de l'équipe de l'Opagogy, dispersée entre l'ISAE-SUPMECA et CY-SERGY-UNIVERSITY. Ce podcast se veut collaboratif. N'hésitez pas à nous contacter sur LinkedIn ou Instagram et à communiquer et partager nos comptes. On se donne rendez-vous dans un mois pour découvrir une autre innovation de l'Alliance CY. Laissons les élèves s'élever Et à très bientôt. Ciao les pédagos.