- Speaker #0
Bonjour et bienvenue sur Objectif Mental, le podcast où l'on explore le coaching et la préparation mentale. Je suis Kevin et chaque semaine je partage des conseils pratiques, des interviews d'experts, ainsi que des témoignages inspirants d'entrepreneurs, de sportifs et d'artistes. Mon objectif est de vous aider à débloquer votre potentiel pour performer en toute sérénité, que ce soit dans votre vie professionnelle ou... extra-professionnel. Je vous souhaite une excellente écoute. Bonjour Aymeric.
- Speaker #1
Bonjour Kevin.
- Speaker #0
Merci de me recevoir à l'université Claude Bernard Lyon 1. Écoute, je t'ai découvert dans le reportage Arte, comme je t'avais dit en off. Le reportage c'est dans la tête des champions et ça traite de visualisation, imagerie mentale, tu nous diras comment on le définit. Très bon reportage que je conseille d'ailleurs pour apprendre à connaître cette discipline. Et en creusant, j'ai vu que tu étais le spécialiste en France de la visualisation. Je vais te laisser te présenter, mais tu es docteur en neurosciences et motricité. Et tu es aussi professeur ici à l'université Lyon 1. La visualisation est inconnue pour beaucoup de personnes, voire mystique parfois. Alors que les fondements sont purement scientifiques, donc tu vas nous expliquer tout ça. Aujourd'hui, j'aimerais qu'on parle simplement de ce que c'est. On va essayer de l'expliquer simplement. Et je te propose qu'on fonctionne en entonnoir. Donc à partir d'explications et définitions générales et ensuite d'arriver à des éléments plus précis et plus concrets. Et avant tout ça, est-ce que tu peux te présenter s'il te plaît ?
- Speaker #1
Oui, avec plaisir. Mais juste avant de me présenter, je vais rebondir sur un truc que tu as dit, ce que c'est génial. C'est qu'effectivement, c'est un peu inconnu pour plein de personnes. Mais en réalité, tu verras, on va sûrement en parler, tout le monde en fait tout le temps au quotidien. Donc c'est en fait complètement connu. C'est juste que ce n'est pas structuré ou maîtrisé et c'est un peu souvent comme ça dans le domaine de la préparation mentale. Ok. Du coup, oui, Aymeric Guillot, je suis professeur à l'Université Lyon 1 depuis un peu plus de 20 ans. Donc, j'articule mon quotidien entre l'enseignement et la recherche et essentiellement autour de la dimension mentale, de la préparation mentale et en particulier de l'imagerie et de la visualisation avec un éclairage, effectivement, comme tu le disais, un peu plus neuroscientifique, même si j'ai une approche qui essaye de couvrir finalement un peu les différents aspects pour essayer d'avoir à l'esprit vraiment tout ce qu'on peut faire avec cet outil-là. Et en parallèle, parce que je pense que c'est important, j'essaye de garder une casquette de terrain, soit à travers l'accompagnement de sportifs ou de personnes qui veulent développer leurs compétences ou se préparer à un événement ou développer leur potentiel, soit à travers des approches un peu plus cliniques, un peu plus d'accompagnement sur le recouvrement de fonctions motrices en cas de blessure et sur des personnes qui pourraient présenter un certain nombre de pathologies, mais essayer de toujours avoir finalement cette double entrée, celle du scientifique qui essaye de comprendre. et d'avoir les fondements théoriques et les explications, puis celle du praticien, qui permet de faire les liaisons, mais aussi les décalages entre la théorie et la pratique. Ok,
- Speaker #0
donc très laboratoire et aussi terrain pour...
- Speaker #1
C'est ça, j'aime vraiment avoir les deux, c'est-à-dire je serais malheureux si je n'avais pas soit l'un, soit l'autre.
- Speaker #0
Très bien, très très clair pour la présentation. Alors pour commencer, est-ce que tu peux expliquer ce qu'est l'imagerie mentale, comme si tu le faisais à un enfant de 7 ans ?
- Speaker #1
Ouais, sans problème. En fait, l'imagerie mentale, c'est le fait de se représenter mentalement. une personne, un objet, une situation, un mouvement, si on est dans le cas de l'imagerie motrice, sans que ça débouche sur l'activité perceptive réelle, donc sur le fait de voir l'image ou l'objet en question, ou sur la motricité en question. Donc du coup, c'est le fait de simplement simuler dans son esprit, dans sa tête, à travers les différents sens, une expérience qu'on a vécue, une expérience qu'on projette et qu'on n'a pas forcément vécue, et là on bascule tout de suite dans la frontière qui est très fine avec l'imaginaire, l'imagerie et l'imaginaire. Et dans le cadre de la motricité, c'est le fait de simuler mentalement un mouvement, mais sans que ça débouche sur l'exécution du mouvement. Ok,
- Speaker #0
donc on l'a tous, c'est ce que tu disais au début, en fait on l'a tous déjà fait,
- Speaker #1
on le fait tous au quotidien, pour plein de raisons. Chaque fois qu'on se remémore un souvenir, qu'on réévoque quelque chose, c'est une forme d'imagerie. Chaque fois qu'on se projette sur ce qu'on va faire ou sur ce qu'on aimerait faire, c'est une forme d'imagerie. Il y a même une sorte d'amorçage entre ce qu'on observe la plupart du temps et ce que ça induit comme représentation mentale, comme de nouveau une forme d'imagerie. Donc en fait, on le fait vraiment à de multiples reprises au cours de la journée, mais pas toujours de manière appropriée, si on raisonne en termes de performance ou de préparation, et pas toujours de manière structurée.
- Speaker #0
C'est là où vous intervenez. Justement, quels sont les champs d'application de l'imagerie mentale ? À quoi cela peut servir ?
- Speaker #1
Alors, les champs d'application, pour moi, il y en a quatre. Ça permet de vraiment couvrir pratiquement l'intégralité de ce qu'on peut faire. Le premier champ d'application, je vais commencer peut-être par le plus connu, parce que historiquement, c'est celui qui a été le plus utilisé. C'est celui qui vise à mettre la personne dans les meilleures dispositions mentales possibles parce qu'elle a affaire, pour une performance ou de manière générale pour se préparer à quelque chose. Et donc du coup, on va intervenir sur la personne et non pas sur son comportement. L'idée c'est de se dire, on va travailler sur la confiance en soi, la motivation, l'anxiété. Le stress, les émotions, les doutes, les croyances, on va travailler sur tout ce qui va faire qu'elle sera dans une bonne disposition pour être performante. Donc ça peut être très proche de sa performance, comme ça peut être très éloigné, on peut travailler sur un plan très personnel. Et l'idée, c'est que comme elle va être dans une bonne disposition, potentiellement, ce qu'elle va faire sera efficace. Et ça, c'est le premier domaine qui a été historiquement très utilisé et qui est très compatible avec plein d'autres outils, plein d'autres approches qui sont assez connues en prépa mentale. Après, le deuxième domaine, c'est celui de la performance, de l'apprentissage ou du perfectionnement technique, je vais dire. L'idée, c'est de travailler non pas sur la personne, mais sur le comportement ou le mouvement en question. Donc, ça peut être un mouvement sportif, ça peut être un mouvement professionnel, ça peut être quelque chose qui relève d'une pratique même personnelle au quotidien. Mais l'idée, c'est de se dire, OK, je vais travailler sur l'apprentissage de la technique. la mémorisation, la consolidation ou l'automatisation de cette technique-là, voire la correction gestuelle. Peut-être qu'on aura l'occasion d'en discuter, mais la correction, j'adore ça parce que c'est très difficile techniquement. Ça fait désapprendre pour réapprendre. C'est très facile mentalement. Donc le conditionnement qu'on peut intégrer grâce à l'imagerie, il est énorme et il facilite vraiment le processus de correction. Et ça, c'est un domaine qui est un peu différent parce qu'il va être soumis à plein de règles de pratique, des préconisations d'usage vraiment fortes pour qu'on soit... Dans la rigueur extrême, c'est-à-dire là, pour le coup, on fait de l'imagerie, on ne fait pas de l'imaginaire. Alors que quand on travaille sur la confiance, par exemple, on peut se permettre de partir dans des choses qu'on n'a pas forcément vécues.
- Speaker #0
Parce que là, il y a un risque, on ne va pas aller trop loin, mais le risque, c'est de désapprendre un geste.
- Speaker #1
Le risque, c'est de le déstructurer. Donc d'avoir un effet un petit peu délétère ou pervers qui vient créer de la contre-performance, dénaturer un geste, modifier une temporalité et donc du coup être moins efficace derrière. Donc là, pour le coup, une imagerie inappropriée, elle est tout de suite problématique.
- Speaker #0
Donc là, il faut vraiment le faire avec des experts ?
- Speaker #1
Là, il faut vraiment avoir bien les préconisations d'usage en tête. Le troisième domaine, il est un petit peu intermédiaire entre les deux pour moi, il est un peu particulier, c'est celui de la dimension stratégique ou tactique. Donc là, dans le domaine sportif, on va beaucoup parler de technique ou tactique, mais en réalité, tout type de stratégie qu'on pourrait mettre en place, que ce soit du conditionnement, de la mémorisation, de la compréhension, d'une stratégie à adopter, que ce soit un travail, dans les sports qu'on travaille beaucoup sur la coopération, l'imagerie collective, ce genre de choses-là. qui est l'individu au sein du collectif. Donc on a plein de stratégies également qu'on peut mettre en place grâce au travail mental. Ce n'est pas le domaine le plus travaillé, ce n'est peut-être pas le plus illustré non plus, même dans la littérature scientifique, mais il y a plein de belles choses à faire. On parlait en off tout à l'heure des métiers d'intervention soumis à haut risque, comme les forces de l'ordre, comme les pompiers, comme le GIGN. Ce sont des personnes qui font face à des situations qu'ils ne peuvent pas. travailler physiquement. Ils ne pourront jamais se mettre dans les mêmes situations de danger. Ils savent très bien que même s'ils font des parcours de stress, des situations où ils vont être en difficulté, ils ne vont pas jouer leur vie véritablement sur l'entraînement. Par contre, s'ils se retrouvent en situation, ils appellent ça souvent la pédagogie du drill, ils n'ont plus le droit à l'erreur. Donc tout le travail mental de stratégie et de conditionnement peut aussi les préparer à essayer de garder leur lucidité quand ils vont devoir intervenir, essayer de mettre en place les différents scénarios qu'ils pourraient élaborer pour être le plus efficace possible. dans des situations qui, en plus, sont hyper anxiogènes et hyper stressantes. Donc ça, c'est un troisième domaine un peu particulier. Et puis le quatrième, il est un peu en marge par rapport aux autres, c'est celui où il va y avoir une incapacité motrice et où on va chercher à récupérer d'une blessure, d'une incapacité, d'une pathologie ou d'un accident. Et là, l'idée, ça va être d'essayer de couvrir tout ce qu'on peut faire, et c'est immense ce qu'on peut faire, pour permettre une meilleure récupération. Dans les jargons sportifs, on a la phase de réathlétisation, en fin de récupération également. qu'on va pouvoir travailler. Et là, on va travailler de manière très large sur la douleur, l'acceptation, l'état d'esprit, la confiance, la guérison, mais aussi la limitation de perte de force ou d'amplitude articulaire, le fait de pouvoir faciliter la réactivisation, le retour à la pratique, la peur de la récidive, enfin bref. On pourrait détailler vraiment des applications qui sont nombreuses, mais tout ça, si vous voulez, ça va concerner la blessure. Ok.
- Speaker #0
Donc très large la préparation, enfin la préparation, la visualisation à quatre applications qui sont très variées. Est-ce que tu peux nous expliquer très simplement comment ça fonctionne dans le cerveau ? Parce que de ce que j'ai compris, quand on fait un geste ou quand on l'imagine, c'est à peu près la même zone. Est-ce que tu peux aller un peu plus loin là-dedans et nous expliquer comment ça fonctionne ?
- Speaker #1
Alors en fait, je vais le dire parce que je le dis tout le temps, c'est important pour moi. Je me bats un petit peu contre l'argument qui est de dire que le cerveau ne fait pas la différence entre le mouvement imaginé et le mouvement exécuté. C'est vrai qu'on a souvent tendance à l'entendre. Je comprends pourquoi on le dit. C'est pas tout à fait vrai parce que si je te demande d'imaginer un mouvement, quel qu'il soit, dans la fraction de seconde où je te le demande, tu sais très bien que tu le feras pas. Donc on est sur une stratégie consciente de représentation de l'action et on sait très bien qu'on va pas faire le mouvement. En revanche, c'est vrai que du coup, pourquoi est-ce qu'on dit ça ? C'est parce qu'en réalité, quand on va simuler mentalement un mouvement, on va engager le système nerveux de manière fortement comparable. Pas totalement, donc ce sera pas la même intensité, ce sera pas exactement la même chose non plus, mais on va avoir ce qu'on appelle une équivalence neurofonctionnelle. entre effectuer et imaginer. Et ça, ça veut dire qu'en gros, les structures et les régions, les réseaux même nerveux qui sont responsables normalement de la préparation du mouvement, de l'exécution et de son contrôle, vont être activés de manière fortement comparable quand je vais simuler mentalement et quand je vais faire physiquement. Et c'est certainement une des raisons qui expliquent le mieux pourquoi imaginer un geste permet d'améliorer ou de modifier la performance, parce qu'en fait, on va travailler sur les schémas moteurs qui sont responsables du mouvement, on va façonner, moduler le cerveau. Ce qui fait qu'au final, la mélodie que le cerveau va jouer lorsqu'on fait physiquement un mouvement, il va également la jouer lorsqu'on le fait mentalement. Et ça va un petit peu plus loin que ça en réalité, ce qui est déjà pas mal en soi, mais c'est qu'on ne va pas juste activer des régions de manière sensiblement ou globalement comparable, on va vraiment aller activer les populations de neurones qui sont responsables de la contraction des muscles concernés. C'est-à-dire que si je te demande d'imaginer un mouvement avec les membres supérieurs et les membres inférieurs, ce n'est pas exactement la même région du cortex moteur que tu vas aller... activé, c'est vraiment la région dans laquelle vous avez les cartes dans les populations de neurones qui abritent les neurones qui contractent les muscles, enfin qui permettent la contraction des muscles en question. Et donc ça, on respecte, si tu veux, un principe d'organisation qui s'appelle la somatotopie ou l'homunculus au niveau du cerveau, c'est à dire qu'en fait les parties du corps sont représentées de manière disproportionnée et on va vraiment aller activer ces régions là de manière spécifique quand on imagine le mouvement. Si je vais encore un tout petit peu plus loin... ce n'est pas juste des activations qui sont figées, c'est également une dynamique d'activation qui va être similaire. Donc on a ce qu'on appelle la connectivité fonctionnelle, c'est-à-dire qu'on regarde comment les réseaux se construisent et comment les régions communiquent entre elles. Et en fait, que tu t'entraînes physiquement ou que tu t'entraînes mentalement, on va avoir la même connectivité fonctionnelle, en tout cas elle va être fortement comparable. Et si je vais encore un tout petit peu plus loin, on va parler de plasticité cérébrale, c'est-à-dire de réorganisation des réseaux de connectivité dans le système nerveux. Et en fait, la plasticité cérébrale qui s'induit quand on s'entraîne physiquement, on la connaît très très bien. On sait exactement comment ça évolue, comment le cerveau expert se construit, etc. On va observer exactement la même chose en imagerie. Donc on va avoir une sorte de reflet de cette plasticité cérébrale due à l'entraînement physique qu'on va également trouver pendant l'entraînement mental. Et ça, c'est intéressant et c'est probablement une des raisons les plus fortes. Il y a d'autres explications complémentaires qui viennent... pointé sur des éléments un petit peu spécifiques mais c'est une des raisons les plus principales et les plus solides pour expliquer finalement pourquoi s'engager mentalement dans un mouvement ça va aussi te permettre de progresser physiquement ok,
- Speaker #0
alors c'est intéressant c'est pas forcément la même intensité dans le cerveau mais est-ce que tu vois si on a jamais fait le geste en question, l'imaginer peut nous aider à apprendre ce geste là en fait j'ai l'impression qu'il faut quand même avoir fait le geste déjà dans sa vie c'est super important ce que tu dis là merci
- Speaker #1
Alors oui, effectivement, on a à peu près 30% d'activation dans le contexte moteur pour donner un aperçu entre l'imagerie et l'exécution. Donc on est quand même un ton en dessous. Mais c'est intéressant dans l'absolu. Si on réfléchit d'un point de vue conceptuel, on se dit, mais c'est intéressant de se dire, tiens, même si je n'ai jamais fait ce mouvement-là, je suis capable de l'imaginer. Je suis même capable de l'imaginer de manière extrêmement précise. Parce que je vais faire des associations d'images, d'autres personnes que j'ai vues, de films, de vidéos. Et du coup, limite, je peux me transposer et me voir moi-même en train de le faire, comme si je maîtrisais exactement ce mouvement-là. En revanche, quand on ne l'a jamais fait, il n'y a pas du tout de repère. Donc, on n'a pas du tout de base de référence sensorielle sur lesquelles construire la représentation du geste. Donc, il y a de fortes chances que la construction, elle soit quand même approximative sur la base de ce qu'on pense ou ce qu'on estime de ce qu'on a vu des autres. Et ça, ça fait que souvent, on est dans une imagerie qui est inappropriée parce qu'elle est imparfaite.
- Speaker #0
D'accord. Donc, par exemple, si on voit Raphaël Nadal faire un service et qu'on s'imagine le faire. on sera quand même très loin,
- Speaker #1
enfin pas loin mais on aura j'aurais tendance à dire ouais ce serait bien de faire un peu de service dans un premier temps plutôt que de jamais avoir pris une raquette en main et de s'imaginer servir parce qu'on va être capable de le faire et même dans les faits on va se dire bah on va peut-être retrouver une gestuelle qui va s'en rapprocher mais c'est quand même approximatif et le problème c'est que si on se met à ancrer ou à automatiser des choses un peu approximatives bah derrière on l'évoquait tout à l'heure il va falloir déstructurer pour restructurer et on se met en difficulté donc franchement c'est mieux de pratiquer un petit peu avant On n'a pas besoin d'avoir un haut niveau d'expertise, ça par contre c'est une réalité. Mais quand on a pratiqué un petit peu avant, on a suffisamment de repères pour derrière construire sur la base de ce qu'on a pratiqué et venir affiner avec des consignes, des observations, des choses qu'on pourra extraire du travail des autres ou de ce qu'on a vu chez les autres.
- Speaker #0
Tiens, c'est intéressant, ça me fait penser à une question. Est-ce qu'un athlète professionnel, quand il fait de l'imagerie, et un sportif amateur, quand il fait la même imagerie, tu as des différences dans la représentation dans le cerveau ? Est-ce que les deux sont capables d'imaginer de la même manière les gestes ? Est-ce qu'il y a des différences parce que les pratiques ne sont pas les mêmes ? Est-ce que le niveau d'expertise joue aussi là-dedans ?
- Speaker #1
C'est une bonne question. D'ailleurs, ça avait fait l'objet d'un autre reportage sur Arte. On avait vraiment regardé cet élément-là. On a des différences. Déjà, pour situer ce qui se passe indépendamment de l'imagerie, il y a un principe qu'on appelle l'efficience neurale. L'efficience neurale, c'est que chez un expert par rapport à un débutant, lorsqu'on fait un mouvement, On voit qu'il y a moins d'activité cérébrale dans les régions. les plus supérieurs. Ils sont descendus d'un niveau de contrôle, ils sont descendus à un niveau sous-cortical. En fait, en descendant d'un niveau sous-cortical, ils ont libéré les structures supérieures, qu'on appelle les structures corticales, pour aller prendre des informations, traiter d'autres choses en parallèle. Ce qui fait que du coup, le mouvement est mieux maîtrisé, plus efficace, mais à moindre coût. Ça, c'est ce qu'on appelle l'efficience neurale. Ce qui est bien, c'est qu'on retrouve ça en imagerie également. Quand on progresse en imagerie, on retrouve ce principe qu'à un moment donné, il y a ce switch-là. Et on retrouve cette libération en quelque sorte des ressources chez les personnes. Maintenant, quand on compare l'expert et le débutant, on va observer des différences. Effectivement, on va observer principalement deux différences. La première, c'est que l'expert va un peu plus activer des régions qui sont importantes dans la construction des représentations mentales, dans la justesse, la clarté, la richesse de ce qu'on va imaginer. Là où le débutant va avoir un réseau un petit peu plus diffus, un petit peu plus large d'ailleurs, et où il ne va pas forcément venir activer les... les régions dites d'intérêt ou principales. Ce qui fait que du coup, ça retranscrit une sorte de très bonne représentation d'un côté versus représentation plus approximative de l'autre. Et puis, dans le documentaire en question, ce n'est pas forcément quelque chose qu'on illustre toujours, on a aussi un corréla ou un marqueur de la phase préparatoire. Chez l'expert, on avait vraiment vu une sorte de première phase de désengagement où il rentre dans sa bulle. Alors le sportif, il disait je me connecte à ma charge, mais c'était un peu l'équivalent de ce que nous on appelle je me mets dans ma bulle. d'une aide que je me sente sur moi. Et ça, c'était caractérisé par des désactivations de certaines régions cérébrales, un petit peu comme s'ils se préparaient à ce qui allait arriver après. Alors que chez le débutant, on n'a pas forcément ça. Donc on a une approche qualitative qui peut être différente. Et après, on a une sorte, sans dire qu'il y a un template d'experts et un de débutants, et qu'il faut aller de l'un vers l'autre, mais on a des marqueurs, effectivement, qui montrent que ce ne sont pas exactement les mêmes activités cérébrales.
- Speaker #0
Ok, intéressant. Non mais c'est hyper clair et c'est vrai que je pense que quand on est sportif amateur et qu'on essaie de visualiser, ça peut être difficile au début de se mettre dedans.
- Speaker #1
Oui complètement.
- Speaker #0
Comment, tu vois, quelle est la procédure si on a envie d'essayer l'imagerie mentale ? Comment moi par exemple je pourrais essayer cette pratique ?
- Speaker #1
Ça c'est une super question parce qu'on ne la pose pas souvent et pour moi elle est essentielle. C'est-à-dire qu'en fait on a très vite envie avec l'imagerie, parce que c'est un outil qui paraît simple malgré tout, on a très vite envie... de partir, de mettre en place des protocoles, de mettre en place des exercices, des situations qui vont nous permettre, avec tout de suite une finalité, d'avoir des résultats. Mais là, si on fait ça, on oublie une étape qui est essentielle, c'est de développer les bases. Moi, j'appelle ça développer les fondamentaux. J'ai beaucoup insisté dessus dernièrement dans les ouvrages, dans les formations, parce que c'est vraiment notre ciment de base. Et en fait, il faut prendre le temps de développer ce ciment de base-là. Ce qui est simple, avec des exercices extrêmement simples où on va décliner les différentes modalités sensorielles, parce qu'on peut imaginer le mouvement. à travers tous nos sens. On va jouer, équilibrer un petit peu ces compétences-là. On va développer la clarté, l'exactitude, la maîtrise de la temporalité de nos représentations. Donc, on va jouer un peu sur toutes les dimensions qui vont faire qu'à un moment donné, on va se dire, OK, là, j'ai une représentation mentale qui est correcte. Peu importe le support, je suis capable de bien imaginer, d'imaginer de manière juste, d'imaginer avec la bonne temporalité, donc à la bonne vitesse. Voilà, ça, je maîtrise. Une fois qu'on a ça, ce que j'appelle les fondamentaux, derrière, Tout ce qui va arriver dans les domaines qu'on a évoqués tout à l'heure d'application, ça va être des protocoles. Ces protocoles-là vont être beaucoup plus simples, parce qu'en réalité, notre ciment sera très solide, nos fondations seront très solides, et derrière, on n'aura plus qu'à ajuster, à organiser, à agencer les éléments qui constituent le protocole. Alors que souvent, sinon, on va se rendre compte que la personne, elle va partir tête baissée dans un protocole qu'elle a vu, qu'elle a entendu, ou dont elle a eu une version un peu simplifiée, mais pas tous les prérequis de mise en place. Et en fait, elle va se heurter très rapidement à la difficulté du protocole, qui pourtant sur le papier paraît simple. Et donc, elle va être obligée de revenir en arrière, et finalement de revenir travailler, développer les fondamentaux. Donc la première chose que je ferais, moi, avant d'envisager les exercices, même s'ils peuvent arriver assez vite, c'est de prendre le temps de développer sa capacité. à simuler mentalement, à travers chaque sens. Attirer l'attention sur chacun des sens, c'est aussi donner de l'importance à des informations qu'on laisse parfois un petit peu en arrière-plan. Donc les données, quand on leur donne de l'importance, on les réutilise plus facilement derrière. En fait, on va enrichir comme ça sa capacité d'imagerie. Il y a tout un tas d'exercices qu'on peut envisager qui seront des petits développements de ces fondamentaux-là. Une fois qu'on a ça, sincèrement, on a simplifié largement ce qu'elle est arrivée.
- Speaker #0
La suite, mais donc les fondamentaux, c'est par exemple sur les modalités sensorielles. Donc si je traduis, c'est... Je reprends le tennis parce que c'est facile à comprendre. Ça peut être l'odeur de la balle, ça peut être le son.
- Speaker #1
Oui, on va passer sur les différents sens. On va visualiser avec les images la plupart du temps au début sur une modalité plutôt associée ou dissociée. Si je suis dissocié, je me vois de l'extérieur. C'est un peu comme si j'assiste à un échange ou je suis spectateur. Je vois l'intégralité du corps en mouvement de l'extérieur et ça me permet d'apprécier l'ensemble de la scène. Si je suis associé, je suis forcément acteur ou actrice. Et donc du coup, là, j'incarne le joueur ou la joueuse. Et je vais avoir une sorte de caméra embarquée au niveau des yeux et je vais revivre ce que mes yeux perçoivent et capturent lorsque je fais le mouvement habituellement. Donc généralement, ce qui est intéressant, c'est de développer les deux. On a souvent une préférence sur l'une ou sur l'autre, parfois des facilités sur les deux, parfois des difficultés sur les deux. Mais l'idée, c'est de se dire, OK, je peux en avoir une qui est meilleure que l'autre, mais je vais avoir besoin. On va beaucoup faire de liens entre les deux, d'aller-retour, de switch entre les deux.
- Speaker #0
Parce qu'on ne travaille pas la même chose quand on est associé ou en dissocié ?
- Speaker #1
Ça ne vit pas forcément exactement la même chose. Déjà sur le visuel qu'on a, donc les détails. et symboliquement tout ce que ça va représenter. Mais derrière, on va faire des allers-retours entre les deux. Par exemple, on prend du recul pour superviser, observer, et on incarne pour s'imprégner un peu plus. Puis quand on va travailler sur la personne, si à un moment donné on parle de ça, sur l'affect ou les émotions, quand on est associé, on prend les émotions et les sensations de plein fouet. Quand on est dissocié, on prend de la distance, donc on coupe le rapport au corps. Donc il y a plein de subtilités comme ça qui va faire que c'est important de travailler les deux. Et après, on va décliner les autres sens. Donc on va travailler sur les sensations plutôt corporelles. On va trouver du tactile, on va trouver du proprioceptif. Alors le proprioceptif, on parle d'imagerie kinesthésique, c'est le terme qui est un peu plus utilisé. Puis après, on aurait de l'auditif, on aurait de l'olfactif, on aurait du gustatif. Il y en a qui s'appliquent un petit peu moins dans la pratique sportive, mais en fait, on va décliner les différents sens comme ça et on va développer sa capacité, souvent dans les exercices fondamentaux, sur chaque modalité sensorielle, pour que par la suite, dans la quasi-totalité des cas, on combine. On ne va pas chercher à... à privilégier une modalité sensorielle, ce serait une erreur lorsqu'on va rentrer dans des protocoles ou autre, sauf cas de figure exceptionnelle, mais la plupart du temps on va combiner pour avoir une imagerie la plus complète et la plus riche possible.
- Speaker #0
C'est marrant parce que tu parlais de sensorielle et je pensais aux odeurs là, mais quand tu me parlais je pensais aux sommeliers. Tu sais qui s'imaginent les goûts et tout, en fait c'est ce qu'ils font déjà.
- Speaker #1
Ils ont une maîtrise parfaite de ces senteurs là, et donc derrière ils arrivent à les réévoquer mentalement, ou quand ils les perçoivent ils ont tout de suite les liens avec ce qu'ils ont pu faire auparavant, ils vont réévoquer mentalement des... des situations sur lesquelles ils vont faire ces liens-là. Donc oui, complètement.
- Speaker #0
Et l'imagerie mentale, on voit que dans le sport, on en parle beaucoup. Est-ce que tu vois d'autres domaines d'application dans la vie professionnelle ?
- Speaker #1
Oui, j'ai presque envie de dire que tous les domaines s'y appliquent. En fait, si on raisonne sur la motricité, parce que le sport c'est beaucoup la motricité, mais pas que, tout type de motricité peut être travaillé mentalement. Donc nous, on travaille régulièrement par exemple avec des gens du milieu médical. Que ce soit des chirurgiens pour parfaire un apprentissage de technique, technique de base même, ou que ce soit les kinés pour une motricité professionnelle particulière de manipulation, par exemple. Les musiciens, les musiciens ont énormément l'utilisé. Donc sur le volet motricité, n'importe quel type de motricité, qu'elle soit quotidienne ou professionnelle, en fait peut bénéficier de ce type de travail-là. Sur le versant un peu plus individuel, c'est encore plus large. C'est-à-dire que quand on travaille sur la confiance, sur les émotions, sur la gestion du stress, sur... Être capable d'être moins anxieux, ça s'applique à tout type de situation. Donc les sportifs, bien évidemment, mais on prend souvent la prise de parole en public, on prend souvent la préparation à un entretien ou à un examen. Donc en fait, tout type de situation dans laquelle on va avoir besoin de canaliser, je ne sais pas si c'est le bon terme, mais de jouer avec ses émotions, de maîtriser la situation, l'anxiété, d'être capable d'avoir un travail de... de recentrage, en prise d'information, d'être sur la confiance en soi, le doute, etc. C'est quelque chose qui pourrait s'appliquer à tout le monde. Oui,
- Speaker #0
bien sûr. C'est intéressant ce que tu disais sur la prise de parole en public. C'est souvent la peur qui est autour de ça. L'imagerie mentale peut aider à appréhender cette peur ?
- Speaker #1
L'imagerie peut faire partie de la panoplie. On le fait aussi très intuitivement, très spontanément. On peut trouver des exercices pour rester sur des approches très simples, de conditionnement préparatoire, où on laisse un peu... peu de choses au hasard sur la manière de commencer un discours ou d'intervenir. Ça peut être sur la posture qu'on va adopter, ça peut être sur la symbolique qu'on va dégager, ça peut être sur le discours. Donc on peut trouver plein de choses, en fait, sur lesquelles on va travailler. Ça peut être simplement des évocations mentales ou des simulations de différents types de scénarios qu'on va essayer de vivre pour justement être capable de faire face aussi. Je prends un autre exemple qui sort un petit peu de l'ordinaire, mais sur des réactions qui ne sont pas forcément celles qu'on attend du public.
- Speaker #0
Intéressant ça.
- Speaker #1
Et d'être capable soit de s'en détacher, soit de s'y accrocher si c'est nécessaire. On peut trouver plein d'applications possibles en réalité sur la prise de parole.
- Speaker #0
Ok, donc c'est aussi la gestion des imprévus. Alors sans les anticiper, puisqu'on ne peut jamais anticiper ce qui va arriver. En tout cas, de réussir à se détacher.
- Speaker #1
En tout cas, c'est une utilisation possible. Et là-dessus, on évoquait tout à l'heure le GIGN, le RAID, les polices d'intervention, les unités d'intervention. J'ai le même parallèle avec les personnels de bord aérien ou les pilotes d'avion qui sont en fait face à des situations qui sont potentiellement hyper dangereuses, qui n'ont potentiellement jamais vécu, mais qui doivent être capables d'appréhender. Si on prend les pilotes d'avion, ils font des simulations de trajectoire régulièrement. Si on prend les personnels de bord, ils ont des checklists silencieuses. où ils répètent mentalement tout ce qu'ils doivent faire, d'autant plus qu'ils ont une posture à avoir, où eux, il ne faut pas qu'ils aient de panique, parce que lorsqu'ils sont paniqués, l'avion, c'est les meutes dedans. Donc du coup, eux, ils font une sorte de préparation, ou de conditionnement préparatoire à des situations, et j'ai appris même récemment que très souvent, collectivement, ils choisissaient un scénario, et qu'ils déclinaient tous ensemble ce scénario, avec chacun les rôles qui étaient attitrés. pour faire face à une situation d'urgence. Sur les unités d'intervention, c'est pareil. Eux, ils sont face à des situations qui ne sont jamais celles qui sont toujours nouvelles et qui sont difficiles à prévoir. Et j'avais adoré, parce que j'avais discuté justement avec quelqu'un du RAID sur une intervention qu'on avait faite en commun sur le mental. Il avait dit un truc, alors on pourrait jouer sur les termes, mais l'idée qui était derrière, j'avais trouvé ça fabuleux. Il m'avait dit, nous, si on fait face à l'imprévisible, par définition, on ne peut pas le prévoir, donc ça marche. Par contre, on n'a pas le droit de faire face à l'imprévu. Parce que si on fait face à l'imprévu... c'est qu'on s'est mal préparé. Et donc du coup, il faut être capable de travailler mentalement, d'anticiper, de prévoir, de savoir, parce que plus on va prévoir, plus on va se conditionner, et plus on va répondre de manière automatique, efficace, lucide, moins on va être soumis à du stress potentiel, à une surcharge émotionnelle, à une difficulté à prendre un choix, etc. Et j'avais bien aimé cette petite nuance-là. Alors après, on peut aller gratter un peu sur ce qui est imprévisible, ce qui est imprévu, où est la frontière, etc. Mais en réalité, on n'a pas le droit de ne pas se préparer à... aux différents scénarios les plus probables.
- Speaker #0
J'ai l'impression que l'imprévu, c'est plus nous ce qu'on maîtrise ou pas, ou ce qu'on anticipait, et l'imprévisible, c'est ce que l'extérieur...
- Speaker #1
Oui, c'est ça. Il pourrait y avoir une sorte d'élément dont on n'est absolument pas maître. Bon, ben ça, on est obligé de... Mais ce qui est intéressant d'ailleurs, parce que ça veut dire qu'aussi en imagerie, on va essayer de prévoir l'imprévu, donc de se préparer au type de situation qu'on est susceptible de rencontrer. C'est un peu comme faire de la réalité virtuelle sans dispositif de réalité virtuelle, on le fait mentalement. Mais on va aussi cultiver sa faculté d'adaptation et d'ajustement. Et ça, ça va permettre de répondre éventuellement à des choses imprévisibles ou des choses inattendues si on quitte le côté de l'unité d'intervention. Dans les sports collectifs où il y a énormément d'incertitudes par exemple, on doit être capable de cultiver sa faculté d'adaptation pour éviter d'être stéréotypé. Parce que si on devient stéréotypé, l'adversaire l'est en nous et on n'est plus du tout efficace. Donc c'est aussi cette capacité à d'un coup élaborer un nouveau scénario, une nouvelle stratégie mentalement différente de celle qu'on est en train d'observer ou de celle qu'on a vécue. mais qui nous oblige à nous projeter mentalement sur ce qu'on aurait fait, sur le pourquoi, le comment, et à envisager finalement un autre déroulement. Ok,
- Speaker #0
c'est marrant parce qu'on parle beaucoup d'individuels depuis le début, tu viens d'introduire le sujet du collectif, donc on peut faire aussi la visualisation en collectif, pour par exemple une équipe de foot, essayer d'améliorer la fluidité des systèmes ?
- Speaker #1
Oui, c'est un petit peu en retard par rapport au sport individuel, en fait c'est surtout habileté ouverte, habileté fermée. C'est habileté ouverte où il y a beaucoup d'incertitudes, versus habileté fermée où il y en a peu. Et donc les habiletés ouvertes... dont les sports co font partie, mais pas que, les sports d'opposition de manière générale, on a, et puis d'autres, on a énormément d'incertitudes, temporelles, spatiales, événementielles, et donc on a plein de situations possibles qu'on est susceptible de vivre, et évidemment on ne peut pas tout anticiper, on ne peut pas tout travailler, et on ne doit pas se cloisonner. Mais oui, on peut faire plein de choses. Aujourd'hui, je vais être un peu provocateur, parce que ce n'est plus tout à fait le cas, mais pendant longtemps, on a beaucoup travaillé des situations très fermées, des habiletés ouvertes. C'est-à-dire que dans les sports co ou dans le tennis, on travaillait sur... Un geste technique, un coup franc, un penalty, une transformation pour un essai, un service, un retour de service où il y a un peu d'incertitude mais pas trop. On était sur la chose qui était très fermée. En fait, on peut aller beaucoup plus loin que ça. On peut travailler sur des schémas de jeu qui sont récurrents pour travailler sur la faculté d'adaptation à la réponse la plus probable avec des prises de risque qui sont différenciées. Parce que perdre un point au tennis, ça se compense. Prendre un but au foot ou un essai au rugby, ça se compense déjà moins. Donc du coup, il y a des différences après en fonction des activités, mais on peut aller un petit peu plus loin. Et quand on va plus loin, la première chose qu'on peut faire, c'est de se dire, ok, je vais peut-être travailler sur la compréhension d'un schéma de jeu, sur la compréhension, c'est-à-dire comprendre mon rôle, moi en tant qu'individu, au sein du collectif déjà. Ensuite, je peux mémoriser ce schéma de jeu, je peux le consolider, voire je peux travailler sur la maîtrise de la mise en place comportementale, ce qui fait que je serai peut-être encore plus efficace quand ça va se passer comme ça sur le terrain, avec la prise de risque dont on parlait, de, ok, ça se passe pas comme ça, ça risque d'être pire. donc où est-ce qu'on place le curseur et là il y a des différences entre les activités et puis à côté de ça il va y avoir toute la contextualisation
- Speaker #0
Et là, on peut se dire, envisager les différents cas de figure, le fait de reproduire la même chose, mais dans un contexte différent, environnemental, domicile, à l'extérieur, sur des situations plus ou moins anxiogènes, plus ou moins empreintes ou teintées d'injustice, ce qui peut nous faire dégoupiller en plus. Donc, il y a plein d'applications possibles comme ça dans la préparation en sport co. Et puis, la dernière chose qu'on peut faire, c'est évidemment travailler sur les personnes. Et on peut mener collectivement des séances qu'on fait individuellement, en fait. Où là, on va, par exemple, moi j'aime bien, sur des fins d'entraînement, Permettre à un collectif de revivre une situation de l'entraînement qui a bien fonctionné, pour s'en imprégner, pour la laisser diffuser en quelque sorte, faire une sorte de visualisation de réussite. Donc là c'est plutôt un travail qui est axé sur la confiance, sur la conscientisation de ses capacités. Et en fait en faisant ça, chacun peut aller chercher ce qu'il veut. Et donc on est sur un travail qui est mené collectivement, mais qui en fait est fait individuellement. Parce que ce qui est sûr, on ne va pas chercher à dire ce qu'il ne faut pas dire, c'est que c'est plus difficile à mettre en place dans ce genre d'activité-là. Parce qu'il y a plus de monde, il y a des phénomènes de leader, de leadership, il y a d'autres paramètres qui rentrent en compte que sur une activité où on est seul et où il n'y a pas d'incertitude. Donc forcément, c'est plus difficile, on a moins de temps à investir et il y a plus de situations complexes à appréhender. Mais je pense qu'on peut aller un peu plus loin que ce qu'on fait actuellement. En tout cas, il y a des pistes de travail qui restent tout à fait envisageables.
- Speaker #1
Ok, ça me fait poser une question. Tu vois des sports ou des activités où la visualisation est plus démocratisée que d'autres ?
- Speaker #0
On retombe un peu sur ces idées, habileté fermée, habileté ouverte. Si tu prends par exemple les tireurs, de manière générale, c'est quelque chose qu'ils intègrent énormément dans leur routine. Ils en font tous, ils sont très très forts. Les golfeurs aussi. Dans les activités, on va prendre les sports collectifs qui sont peut-être les plus à l'extrême, c'est en voie de développement. C'est-à-dire qu'il va y avoir des sensibilités individuelles de certains sportifs ou certains sportifs, dont traîneurs également. Mais après, de manière générale, ce n'est pas dans les mœurs. Ça vient dans un... de manière un petit peu plus lointaine ou un petit peu plus récente. Les choses sont en train de changer, très clairement. Il y a des choses qui se mettent en place dans pratiquement toutes les activités.
- Speaker #1
Tu le vois, toi ?
- Speaker #0
Je le vois. Nous, on est sollicités. Il y a pas mal de collègues préparateurs mentaux qui interviennent également. Il y a des demandes des structures. Donc voilà, les choses sont en train de changer. Les consciences sont en train d'évoluer, si ce n'était pas déjà le cas. Et puis, il y a certaines mêmes activités ou structures où ça fait déjà pas mal de temps que les choses sont en place. Donc, c'est en train d'arriver, mais c'est vrai que c'est moins... utilisée et peut-être moins approfondie pour le moment que ce qu'on va trouver dans des activités très fermées comme le tir, ce qu'on pourrait trouver en gym. En réalité, il n'y a pas tant de choses qui sont faites que ça en gym, quand on gratte un petit peu. C'est une activité qui s'y prête à merveille. Mais dans des activités de ce type-là, il y a un peu plus de connaissances, de compréhension et d'accueil de ce type de travail-là que dans des sports collectifs, par exemple, ou les sports d'opposition, où c'est quelque chose qui est un petit peu nouveau. où on a même parfois encore des gens qui sont réfractaires. Et on a des sportifs ou des sportives de haut niveau, et ça, ça fait du mal à la prépa mentale, qui de temps en temps vont avoir un discours en disant que ça ne sert à rien, on n'a pas le temps, on n'en a pas besoin, c'est secondaire, etc. Et c'est vrai que ça, ça fait mal, parce que c'est une voix qui porte, généralement, et un discours qui vient nous faire faire quelques pas en arrière quand on est en train d'essayer d'avancer, même si globalement, les choses vont dans le bon sens.
- Speaker #1
C'est marrant parce que tu vois, j'ai fait du foot et du basket en club et en basket on apprenait des systèmes. Ces systèmes-là en fait, on les apprenait en faisant, mais si on visualisait chacun individuellement ce qu'on devait faire dans le système, peut-être que collectivement ça aurait amené beaucoup plus de difficultés. Alors qu'en entraînement, combien de fois on a recommencé des systèmes, on se plantait parce que x personnes avaient oublié de faire ça.
- Speaker #0
Complètement, mais c'est exactement ce qu'on évoquait tout à l'heure, le fait de comprendre son rôle au sein du collectif, puis ensuite de commencer à le maîtriser individuellement puis collectivement, c'est génial. J'ai un collègue. qui avait développé des exercices un collègue qui est en Belgique qui nous a quittés malheureusement il n'y a pas très longtemps mais il avait lui carrément mis en place de l'imagerie coopérative et donc il les faisait mener collectivement où il se passait le relais en quelque sorte sur la représentation mentale que les personnes faisaient alors c'est pas forcément évident, ça demande un petit peu de pratique mais c'était hyper intéressant parce qu'en fait il y avait une sorte de travail commun sur un support commun qui laissait la place à des ajustements individuels, mais qui forçait les personnes à être dans une temporalité à peu près équivalente également. Et on retrouvait finalement cette ouverture vers des situations un peu plus globalisées, un peu plus ouvertes.
- Speaker #1
Hyper intéressant. Je reviens sur une partie que tu as évoquée avant, c'était la partie correction du geste, qui est le champ où tu me disais que c'était le plus commun où on utilisait la visualisation. Comment on fait pour justement progresser dans un geste en tant que sportif amateur, pour ne pas non plus se désentraîner, puisqu'il y a peut-être le risque aussi de...
- Speaker #0
Alors c'est pas le plus commun, je trouve que c'est un des plus parlants en réalité, mais c'est pas forcément le plus commun. En fait, je vais te le donner en trois stades. Quand on va travailler globalement sur les techniques gestuelles, ce qu'on va faire le plus, c'est de la répétition mentale. Donc on va intégrer ça, et idéalement on va le faire pendant les séances d'entraînement, pas sur des séances à part, mais pendant l'entraînement, sur des petits temps morts, sur des petites situations où... où on a le temps de le faire, on va intégrer, on va saupoudrer l'entraînement sans que ça change rien par des répétitions mentales. Et en fait, l'idée de ce premier travail, ça va être de répéter ce qu'on a fait physiquement, d'ancrer ce qu'on a fait physiquement. C'est un peu comme si je faisais un essai supplémentaire, mais qui ne débouchait pas sur les... Pardon, sur l'exécution. La consigne qui est hyper importante là-dessus, enfin il y en a plein, parce qu'on l'a dit tout à l'heure, c'est hyper rigoureux, mais il y en a une qui est essentielle vraiment à avoir à l'esprit, c'est que je vais toujours réussir ce mouvement-là. Donc à l'entraînement, même si je perds mon face-à-face ou je perds mon point, je m'imagine que j'ai réussi derrière. Si je ne suis pas capable d'imaginer que j'ai réussi, je ne vais certainement pas en créer un échec. Donc du coup, je ne fais pas forcément le travail mental à ce moment-là. Ça, c'est la première phase. En fait, c'est la phase où on va renforcer entre guillemets, répéter mentalement. et consolider en quelque sorte, ça va contribuer à l'automatisation, à l'apprentissage et à la consolidation, la technique. Une fois qu'on a mis en place ce travail-là, ou une fois qu'il est bien installé, on va contextualiser. Donc là, ça devient intéressant de se dire, ok, maintenant, surtout si je suis dans une habileté ouverte, je vais continuer à travailler, mais je vais envisager plein d'applications différentes, dans des environnements différents, dans des situations différentes, début de match, fin de match, il y a un enjeu, il n'y en a pas, je mène largement, je suis mené. le geste est déterminant pour le gain du match. Donc on va envisager comme ça différentes contextualisations. Et puis, on peut être amené, et c'est pour ça que je disais que ce n'est pas forcément le plus commun, c'est un cas particulier malgré tout, c'est la correction gestuelle. Et la correction gestuelle, ce qui est hyper intéressant, là on voit vraiment la force du mental, c'est que quand vous voulez modifier un geste que vous avez appris, c'est super difficile. Puisque quand on automatise un mouvement, l'automatisme a pour caractéristique de devenir... hyper robuste et donc imperméable aux perturbations externes. C'est ce qui le rend robuste. Et c'est tout l'objectif de l'entraînement. Le problème, c'est que du coup, comme il est imperméable à tout changement pour rester efficace, quand on veut amener une petite modification, ce n'est pas aussi simple que ça. Donc, on est obligé de désapprendre ou de déstructurer pour réapprendre et restructurer. Et ça, c'est dur. Quand on l'a tous vécu physiquement, à l'entraînement, ou techniquement, ça demande un gros travail. Ça fait passer par une sorte de phase de contre-performance. Ce n'est pas très agréable, pas très confortable. Mentalement, c'est très simple. Donc là, on va plutôt faire le travail mental avant, on va se conditionner, et en quelque sorte, on va commencer à réorganiser dans le système nerveux, à construire les modifications, pour le dire simplement, les schémas d'activation neuronale qui vont nous permettre peut-être de modifier un peu plus facilement le geste, et qui va faire que ça va booster ou ça va faciliter un petit peu ce qu'on va chercher à faire techniquement et physiquement. Et comme c'est très malléable, la représentation mentale, c'est très facile, ça ne demande pas beaucoup d'efforts, et donc on peut mettre en place des protocoles qui sont... assez subtile mais assez redoutable d'efficacité pour venir commencer à corriger la gestuelle, s'imprégner de cette correction-là et faire que quand on va la faire physiquement, du coup c'est un peu plus facile. Et ça, ça marche très bien.
- Speaker #1
Ça me fait penser à une interview de Tony Parker qui racontait, après ses 4-5 premières années en NBA, justement il est passé par cette phase de désapprendre son shoot pour l'améliorer, mais il avait une phase de flottement qui était...
- Speaker #0
Ah oui, c'est phénoménal ça généralement.
- Speaker #1
C'est ce que tu disais. Et alors là, on parle de la technique. Il y a un autre sujet que je voulais aborder avec toi sur la visualisation, c'est la gestion de la douleur. Tu vas en course à pied, en trail, tous les sports où il y a un moment où ça devient vraiment très difficile. Est-ce que l'imagerie mentale peut aussi aider là-dedans ?
- Speaker #0
Oui, d'ailleurs, dans ces activités-là, c'est surtout sur des choses comme ça. Parce que la technique, elle est assez vite acquise. Mais on va aller sur... Alors, il peut y avoir le domaine stratégique, effectivement. Il peut y avoir le domaine de disposition mentale. Et en fait, on va pouvoir intervenir de manière assez spécifique sur des aspects comme le seuil de tolérance à la douleur. que tu évoques, le repousser la sensation de fatigue, parce que c'est souvent le cerveau qui décide d'arrêter alors que le corps est encore capable de fournir des efforts, de travailler également sur le dépassement de soi. Donc on va être sur des choses qui relèvent d'une forme de préparation mentale qu'on peut utiliser soit en préparation, en conditionnement et en entraînement, préalablement à la compétition, mais également pendant l'effort. puisqu'on est dans une activité où on a la possibilité d'avoir ce travail mental simultanément à l'effort et là il y a plein de stratégies possibles évidemment pour en prendre deux vraiment extrêmes et montrer qu'en réalité ça va beaucoup dépendre de l'individu, vous pouvez avoir des gens qui vont avoir besoin dans la difficulté de s'imaginer que c'est beaucoup plus simple donc ils vont en fait faire une sorte de switch attentionnel et ils vont se sortir, s'extraire de la difficulté pour s'imaginer quelque chose de réussi, essayer de se laisser porter par ces choses là j'en ai vraiment simpliste et extrême Merci Et à l'inverse, il y en a d'autres qui vont dire Ouais, mais ça, c'est pas la réalité. Et moi, je suis confronté, j'ai des retours, je sens que c'est dur, j'ai des douleurs, j'ai des sensations désagréables, j'ai de la fatigue, j'ai des nausées. Donc, je suis dans l'inconfort. Et donc, j'ai besoin d'être dans l'adversité de cet inconfort-là pour le surmonter. Mais l'objectif, c'est que je finisse toujours par trouver une solution pour le surmonter. Et donc, ils vont avoir une approche qui va être beaucoup plus réaliste, beaucoup plus collée au fait qu'ils sont en train d'en chier, pour le dire un peu vulnérablement, et que derrière, ils vont trouver quand même la solution pour s'en sortir. J'aurais exactement la même... La même approche sur quelqu'un qui veut faire son ARM en muscu et qui est sur une barre très très lourde, il y en a qui vont s'imaginer que ça passe assez facilement, ce qui n'est pas du tout réaliste, mais ça va les mettre dans des dispositions qui vont leur permettre d'être très confiants et de dédramatiser ou de sortir un petit peu de l'enjeu. Puis d'autres qui vont avoir à dire, non mais moi ma barre elle va monter à moins de 0,3 mètres par seconde, je sais que ça va être un enfer jusqu'au dernier centimètre, donc j'ai besoin de me confronter à ça. Par contre, je vais trouver la solution pour surmonter cette difficulté-là. C'est deux stratégies qui sont complètement opposées. C'est une sorte de continuum. À l'intérieur, il y aura plein de stratégies ou d'exercices qui permettront d'aller travailler sur ce dépassement de soi, cette sensation de repousser la douleur en restant au minimum prudent, malgré tout. Cette tolérance à l'effort également. Ce sont des choses qu'on va aller travailler dans ces activités.
- Speaker #1
Les stratégies vont quand même vachement varier entre les personnes.
- Speaker #0
Elles sont plus et plus petites. sur ce type Ausha, beaucoup plus que sur d'autres. Parce que là, il y a un besoin, il y a quelque chose qui est propre à la personne. C'est comme ce qu'on va trouver dans les routines de préparation juste avant un effort. Ça part dans tous les sens parce que chacun va mettre ce qu'il veut dedans. Donc c'est très individualisé en réalité. Et ces stratégies-là, elles vont être individualisées.
- Speaker #1
Ok. Tiens, je repense, tu parlais de musculation dans le reportage Arte que j'avais vu le dernier. Alors ça m'avait vachement surpris et j'aimerais bien en parler avec toi. C'est le fait que Quand on imagine faire de la musculation, les muscles en tout cas prennent un peu de masse, comme si on faisait réellement de la musculation, je trouve ça vachement étrange.
- Speaker #0
Oui, alors ils prennent de la force, ils ne prennent pas de la masse. C'est-à-dire qu'en fait, un sujet super intéressant.
- Speaker #1
Allons-y, allons-y.
- Speaker #0
On va effectivement, c'est très provocateur, mais on va être capable de développer la force, la force maximale. Ça a été surtout étudié aux forces maximales isométriques, mais pas que. Les résultats récents montrent que sur des efforts un peu plus de musculation, également, on a des résultats. Et donc, on va augmenter la force rien qu'en simulant mentalement, même s'il n'y a pas de contraction réelle.
- Speaker #1
Ça me...
- Speaker #0
Oui, c'est provocatoire, toujours. Ça, on va l'expliquer comment, puis après, on va nuancer quand même. On va l'expliquer par le fait qu'on va développer les facteurs nerveux de développement de la force. Donc, il n'y a pas du tout d'hypertrophie. Donc, on ne prend pas en masse musculaire, on prend en circonférence. C'est vraiment les facteurs nerveux. Pourquoi ? Parce qu'en fait, quand on fait de l'imagerie, on réorganise les réseaux de connectivité au niveau du cortex moteur, notamment au niveau cérébral. Et ces réorganisations en bout de chaîne vont se traduire par une meilleure synchronisation des unités motrices. Et ça, ça va nous permettre de développer plus de force, un meilleur recrutement spatio-temporel des unités motrices, meilleure synchronisation de ces unités motrices-là, donc plus de force développée. On va avoir un deuxième effet qu'on a montré assez récemment, qui est bien connu dans l'entraînement physique, mais qui n'était pas dans le travail mental, c'est qu'on va diminuer la co-contraction agoniste-antagoniste.
- Speaker #1
L'agoniste,
- Speaker #0
c'est celui qui permet de faire le mouvement. Sur la flexion de bras, par exemple, c'est le muscle du biceps. Et l'antagoniste, c'est celui qui est opposé à ce mouvement-là. Donc c'est celui qui va permettre l'extension, c'est le biceps. Et dans tous ces jeux d'agoniste-antagoniste, au départ, on a des co-contractions. C'est ce qui permet de préserver le corps, des chocs articulaires et des blessures éventuelles. C'est un principe de précaution. Et en fait, un des premiers gains de force qu'on obtient avec l'entraînement, quand on se met dans une séance de muscu, c'est qu'on diminue la co-contraction de l'organiste, l'antagoniste qui est donc freinateur. Et ça permet de développer plus de force. Donc ça c'est bien connu, et ça on le retrouve en imagerie également. Donc on est vraiment sur des facteurs nerveux. Ça, ça explique les gains de force. Maintenant, si on creuse un tout petit peu, ces gains de force-là, on les observe surtout pour des muscles qui sont très représentés au niveau cortical. Je te disais tout à l'heure, on a parlé de la somatotopie tout à l'heure, ou de l'homonculus, c'est que tous les muscles, toutes les parties du corps sont représentées dans le cortex moteur primaire, mais de manière disproportionnée. Les mains et le visage occupent deux tiers de cette surface. Et tout le reste du corps, un petit tiers. Ce qui fait que du coup, quand tu vas imaginer un mouvement avec les muscles de la main, notamment, là tu vas avoir des gains de force qui vont être énormes. Parce que la réorganisation est très importante, donc en bout de chaîne, la synchronisation des dynamites rotrices l'est également. Dès que tu vas te focaliser sur un muscle qui est beaucoup moins représenté au niveau cortical, mais qui est beaucoup plus gros, comme les muscles des membres inférieurs, les muscles du dos, tout de suite les effets vont être beaucoup plus limités puisque la réorganisation est beaucoup moins importante, donc l'effet est beaucoup moins marqué. Et au final... Quand on creuse un petit peu, on se rend compte que ça marche mieux, très très bien et mieux pour les muscles très représentés au niveau cortical, qui ne sont pas les muscles ou qui ne contrôlent pas les mouvements qui nous intéressent le plus en préparation physique ou en musculation.
- Speaker #1
J'ai l'impression que, par exemple, pour l'escalade, ça serait plus simple.
- Speaker #0
Oui, alors par contre, ça pourrait être hyper intéressant pour des choses de ce type-là. Effectivement. Après, il y a quand même des études qui commencent à montrer que ça marche aussi, malgré tout, et que ça vaudrait le coup. Mais si on a le temps, je vais creuser un petit peu. Oui, on a le temps. On a des résultats récents qui éclairent peut-être un petit peu différemment. En fait, ça permet de progresser. Il y a effectivement quelques études qui permettent de montrer qu'on progresse. Le problème, c'est qu'on n'est pas certain que ce soit des gains de force à proprement parler. Parce qu'on est sur des mouvements complexes, de musculation. On va peut-être gagner au niveau coordination, au niveau équilibration, au niveau motivation, confiance en soi. Ce qui fait que du coup, la perfe, la charge qu'on va soulever, c'est très important. Mais ce n'est pas forcément un gain de force au même titre que quand on va être sur de la force maxillométrique des muscles des doigts qu'on peut mesurer très précisément. Donc du coup... Je ne suis pas convaincu encore à 100% que l'investissement... envahie par rapport au rendement qu'on va en avoir sur ces gros muscles-là. En revanche, deux choses. Chez les blessés, ça marche mieux. Parce que chez les blessés, cette histoire de représentation corticale, elle n'existe plus. Elle nous intéresse moins, parce que ce qu'on veut, c'est préserver l'existant. Donc même si c'est peu représenté, on arrive à préserver ce qui existe. Donc ça marche aussi bien, quels que soient les muscles, pour limiter la perte de force. Ça, c'est génial. Et puis, chez les sportifs, on s'est posé les questions un petit peu autrement. On s'est dit... Ok, on peut arriver à avoir des gains de force. On l'a encore remontré récemment chez des crossfitters, sur des mouvements de squat où ils progressent effectivement jusqu'à 10% grâce à l'entraînement mental. En revanche, on peut aussi l'utiliser d'une manière un peu plus subtile. C'est par exemple travailler sur le transfert de force. Et là, on a montré récemment que quand on les entraînait en squat, mais qu'on leur demandait d'imaginer soit le squat, soit le soulevé de terre, en fait, ceux qui imaginaient le soulevé de terre progressaient à la fois en squat et en soulevé de terre. Donc c'était intéressant, ça permet de transférer les effets à un autre mouvement. Et là, ça devient peut-être plus pertinent parce qu'on a une retombée des effets qui est un peu plus large et qui vient toucher un mouvement qu'on n'a pas forcément travaillé. Donc ça peut être un gain de temps, on ne peut pas le dire forcément comme ça, mais il y aura une forme de gain de temps malgré tout, puisque ce transfert se terminera entre deux mouvements. Une optimisation d'effort en tout cas. Oui, ça c'est intéressant. Et par exemple, moi je l'ai réutilisé avec une athlète récemment qui... qui se préparait pour les JO et qui ne pouvait pas le faire pendant ses séances, enfin ne pouvait pas le faire aussi facilement que ça. Donc avec elle, ce qu'on faisait, c'est qu'à la fin des séances de muscu, on faisait le même type de transfert, mais pas entre deux mouvements de muscu, en direction, elle était rameuse, en direction d'un mouvement en bateau. Et donc de réinvestissement de force, donc ce transfert d'une compétence développée à l'entraînement en direction d'un mouvement pendant la compétition. Ça c'est intéressant.
- Speaker #1
Sachant que c'était des mouvements différents.
- Speaker #0
En sachant que c'est des mouvements différents, c'est la qualité physique qu'on va chercher à réutiliser ici. Et puis rapidement, on avait une autre étude aussi, on avait montré que faire de l'imagerie de récupération, c'était intéressant aussi. Et notamment de la récupération active. Un peu comme quand on marche sur un travail d'intermittent en athlée, on fait de la récup active, là on a fait de l'imagerie active de récup. On a fait de l'imagerie passive, de relâchement, mais de l'imagerie active sur des contractions à très légère intensité. Et en fait, s'imaginer des contractions à très légère intensité pendant les phases de récup, permettait d'avoir un rendement musculaire plus intéressant à l'échelle de la séance d'entraînement.
- Speaker #1
C'est ça intéressant. Alors c'est pendant qu'on fait la récupération active, on imagine aussi faire cette récupération active ?
- Speaker #0
C'est ça. On a fait imaginer deux situations et puis une situation de contrôle. Il y en a une, on était sur les fléchisseurs de l'avant-bras sur le bras, donc les muscles du biceps. Il y en a une où il s'imaginait le relâchement complet du muscle en question, ça c'était une énergie passive de récupération. Et une où il s'imaginait des contractions du biceps, mais à très faible intensité. et ça, ça reflétait une sorte d'imagerie principe active de récupération et les deux types d'imagerie étaient plus intéressantes que la situation contrôle, mais si on comparait les deux entre elles, l'imagerie active était plus intéressante sur le rendement musculaire global de la séance, ça n'allait pas jusqu'à des répétitions supplémentaires mais c'était plus intéressant que l'imagerie passive Waouh,
- Speaker #1
ok, hyper intéressant je n'étais pas parti pour sur la récupération, mais c'est génial c'est hyper... en fait ça ouvre le champ des possibles quand même c'est ça,
- Speaker #0
c'est hyper diversifié en réalité, c'est ça qui est intéressant...
- Speaker #1
Alors quand on est sportif professionnel, on a quand même accès à des préparateurs mentaux. Quand on est sportif amateur, comment on peut s'y mettre à notre niveau pour profiter finalement de ces recherches ?
- Speaker #0
Alors ça reste un outil qui est accessible. Et moi en plus, je suis partisan de la non-dépendance, ce qui fait que j'aime que la personne comprenne ce qu'elle fait et qu'elle puisse se l'approprier pour pouvoir le réutiliser. Ça ne veut pas dire que les gens qui sont préparateurs mentaux et accompagnateurs auront... on n'a plus de travail, c'est quelque chose de parallèle. Mais c'est important que la personne puisse acquérir ces premiers éléments-là. Et je dirais qu'il commence à y avoir de plus en plus de liens, de vulgarisation, d'explications justement sur ces règles de pratique, sur ces exercices de développement fondamentaux, sur ces préconisations d'usage, qui vont permettre à la personne d'avoir un peu les tenants et les aboutissants de ce qu'il faut faire ou pas faire, et de pouvoir commencer à travailler même si elle n'a pas un suivi qui est personnalisé ou qui est structuré. Mais je pense que les premiers pas, on peut les faire. Si on respecte les principes de base, on évite les gros dangers, parce qu'il y a des dangers à un travail qui est mal fait. Et une fois qu'on évite ces dangers-là, on se met sur les rails d'un développement, même si ça prend un petit peu plus de temps, c'est des choses qui peuvent s'envisager.
- Speaker #1
Quels sont les dangers, justement ?
- Speaker #0
Les dangers, ça va dépendre des domaines d'application, mais il y a un danger qui est transversal, c'est l'imagerie négative. Faire de l'imagerie négative, s'imaginer un échec, c'est catastrophique. On peut trouver des cas de figure très exceptionnels, sur lesquels ça m'a déjà été amené. J'ai déjà été amené de travailler. Mais globalement, on fait de l'imagerie positive. Que ce soit sur de la technique ou que ce soit sur de la préparation. Si on fait de l'imagerie négative, il y a pas mal d'études qui démontrent que ça perturbe l'exécution du mouvement et donc ça met dans des dispositions plus mentales qui ne sont pas du tout propices à la performance. Ce qu'on peut faire, et Michael Phelps le disait très bien sur sa fin de carrière, c'est qu'on peut envisager des difficultés. Mais on trouve toujours la solution alternative. Donc ça, on reste sur un travail qui est positif. On est capable d'aller jusqu'au bout du processus.
- Speaker #1
De correction plutôt.
- Speaker #0
Donc ça, c'est une erreur. Faire de l'imagerie négative ou laisser s'installer des représentations négatives, des sensations négatives, c'est le petit grain de sable qu'on met dans l'engrenage et qui va foutre le bordel.
- Speaker #1
Ça me fait sourire parce que quand je joue au foot, mes potes vont se souvenir de ça. En gros, il y a une scène dont je me souviens. où j'arrive devant le but, il n'y a plus de gardien, je tire les gardiens et je tire à côté. Et cette image-là, je l'ai gardée des années.
- Speaker #0
Alors parce que tu l'as vécue. Je l'ai vécue,
- Speaker #1
je l'ai vraiment raté.
- Speaker #0
Donc là, ça me permet de faire un parallèle, c'est-à-dire que spontanément, il ne faut pas le faire. Par contre, quand tu l'as vécue et que tu n'arrives pas à t'en défaire, tu es typiquement dans ce que j'appelle une situation où tu vas ruminer et où tu vas être en incapacité de t'extraire de cette situation de vécu. Et là, on peut mettre en place des exercices qui vont avoir pour objectif de recadrer, ou de décaler, de repartir. de reconstruire une version positive, non pas pour créer un faux souvenir et te faire croire que ce n'est pas arrivé, c'est arrivé, ce n'est pas l'objectif, mais pour construire une nouvelle base de travail et arriver à te faire sortir en quelque sorte de cette rumination et de cette emprise que la situation a eue sur toi. Mais ça, c'est typiquement le cas de figure où tout va bien et je vais développer des capacités ou renforcer des capacités, ou tout ne va pas bien. C'est un très bon exemple que tu donnes. Là, je rumine, ça revient en boucle, je ne peux pas m'en empêcher, les images sont présentes, même quand je veux essayer de faire autre chose. Là, il faut que je fasse un travail de recadrage, c'est un peu plus compliqué déjà.
- Speaker #1
Je t'ai rencontré trop tard.
- Speaker #0
Mais ça, si tu veux, c'est un des premiers dangers. Un deuxième danger, si on va sur la technique, et là, il y en a beaucoup plus sur la technique, il y a vraiment plein de règles à avoir à l'esprit, c'est par exemple de ne pas maîtriser la temporité de son geste. Et ça, c'est une erreur que beaucoup ont fait pendant longtemps. Aujourd'hui, c'est un peu mieux connu, mais c'est quelque chose qui vient toujours dans un deuxième temps en plus, donc on ne le fait pas tout de suite au début. En gros, quand j'imagine une technique gestuelle, je n'ai pas le droit à l'approximation. Si je l'accélère ou que je la ralentis, je deviens approximatif. Même si on peut l'utiliser dans un deuxième temps, après, pour des raisons pertinentes, il faut d'abord contrôler la temporalité. Parce qu'en réalité, qu'est-ce qui va se passer ? Si tu t'imagines un mouvement au ralenti, tu vas décortiquer. Ça peut partir d'une bonne intention. Tu vas décortiquer pour bien comprendre, etc. Ce qui va se passer, c'est que très rapidement, tu vas ralentir ton geste. sans forcément en avoir conscience. Ça, nous, on l'a observé même chez des judokas, ceinture noire, qui avaient l'habitude de faire des techniques de projection qu'ils maîtrisaient parfaitement. On les a entraînés à imaginer vraiment en ralenti, à décortiquer. Résultat, ils ont ralenti leur mouvement, ils ne s'en rendaient même pas compte. Et à l'inverse, si tu t'imagines en accéléré, tu vas gagner en vitesse d'exécution. Alors ça, ça peut être intéressant dans un deuxième temps, pour des ruptures entre deux situations, des mises en action, mais c'est surtout dangereux au départ. Parce que si tu ne le maîtrises pas, tu vas confondre vitesse et précipitation. Et donc tu vas arriver, tu vas devenir un peu approximatif sur ta technique pour répondre à ce souci d'accélération. Et ça, c'est une erreur hyper classique que tout le monde est capable de faire sans le vouloir. Ton sportif, toi tu veux l'accompagner, alors soit le mental ne t'intéresse pas et tu n'en parles pas, donc tu le laisses faire ce qu'il veut, soit tu veux l'accompagner mais tu n'as pas à l'esprit cette temporalité-là. Le soir chez lui, il prend un moment, il ne te le dit même pas, il prend son temps et il ralentit, il décortique parce qu'il veut répéter, etc. le problème, c'est qu'il va ralentir son geste. En tout cas, il va s'y exposer à ce risque-là. Donc ça, c'est une des règles d'usage, c'est je dois maîtriser la temporalité, être à ce qu'on appelle, se rapprocher de ce qu'on appelle l'équivalence temporelle. Et une fois que j'ai ça, dans un deuxième temps, je peux décider du coup, volontairement, d'accélérer ou de ralentir pour un objectif particulier. Par exemple, je peux ralentir pour corriger parce que j'ai un défaut à corriger. Temporairement, je vais ralentir un petit peu, mais je vais faire attention que ça ne s'installe pas. Si j'ai besoin de gagner un peu en vitesse d'exécution ou sur la transition entre deux actions... là je vais peut-être accélérer certaines phases mais il faudra le faire sous couvert de je maîtrise bien la chose dans un premier temps et je contrôle bien comment je le mets en place dans un deuxième temps, ça c'est un exemple de règles sur la technique qui fait que si tu le fais pas ou si tu le fais mal très très vite tu peux foutre le bordel sur le mouvement
- Speaker #1
Tu aurais des références si on a envie de découvrir cette discipline sur la visualisation des références de base que n'importe qui peut comprendre pour justement découvrir ces procédures ces règles...
- Speaker #0
Ouais, il n'y a pas grand chose, sincèrement, de vulgarisation. Je vais me perdre la pub après, parce que c'est un peu dans ce sens-là que je l'avais fait. En réalité, c'est à force de faire des formations, de proposer des formations, d'être avec des intervenants, etc. Il y a beaucoup d'ouvrages qui vont parler, qui sont accessibles, parce que la littérature scientifique, ça reste pas forcément toujours accessible. En tout cas, pas si facilement que ça, mais c'est un truc que je regrette. Mais dans les ouvrages, il y a beaucoup d'ouvrages qui vont traiter de la préparation mentale et donc de l'imagerie, mais beaucoup d'ouvrages qui vont être... très approximatifs sur ce qu'ils vont en dire, ou très incomplets, et qui ne vont pas forcément venir lister les principales règles de pratique. Ils vont peut-être mettre le point, la lumière sur une ou deux. Et c'est un peu dans cet esprit-là que j'avais sorti mon premier bouquin, d'ailleurs, dans le dire j'ai envie qu'il y ait un ouvrage qui soit vraiment accessible et qui puisse permettre de faire le lien. Et là, donc, il y en a un deuxième qui va arriver, que j'ai vraiment approfondi sur la question, qui sort jeudi prochain, enfin jeudi prochain, dans deux jours. Et donc du coup, c'est quelque chose vraiment que... qui a à la fois le bénéfice d'apporter les explications sur pourquoi ça fonctionne, comment ça fonctionne, donc faire les liaisons théorie-pratique avec beaucoup de références également à l'appui des études sur certaines activités que les gens peuvent aller récupérer, mais aussi que ce soit très accessible aux praticiens, quel que soit le domaine de ces praticiens, parce que l'objectif c'est qu'on puisse à un moment donné édicter les règles de bonne pratique ou les préconisations d'usage, que chacun puisse se les approprier, comprendre et maîtriser finalement le travail qu'on va mettre en jeu. Et on va retrouver également le développement des fondamentaux que j'expliquais tout à l'heure, donc la logique de comment on peut mettre en place les choses progressivement. Et je l'ai un peu fait dans cet esprit-là. C'est-à-dire vraiment donner un outil qui aurait un souci d'exhaustivité et qui soit complet pour pouvoir permettre aux différentes personnes de commencer à travailler, même seul, avec suffisamment de consistance et de contenu pour avoir le sentiment de maîtriser ce qu'elles mettent en place. Il y a pas mal d'exemples en plus dedans.
- Speaker #1
Le titre que vous l'ayez, c'est Les pouvoirs insoupçonnés de la visualisation aux éditions Solar. C'est ça. On va regarder tout ça. Moi je vais me le procurer pour ça m'intéresse énormément. Est-ce qu'il y a des choses que tu voulais ajouter sur la visualisation ou l'imagerie mentale que je n'ai pas abordé aujourd'hui ?
- Speaker #0
Il y a tellement de choses que si je creusais un peu je trouverais bien des éclairages ou des pistes, mais on a quand même fait un tour de la question qui me paraît assez, sur une première approche en tout cas, qui est assez exhaustif.
- Speaker #1
J'ai l'impression aussi.
- Speaker #0
Moi souvent ce que je dis, ce que j'aime que les gens retiennent d'une intervention de ce type-là, c'est de comprendre que c'est un outil qui est hyper intéressant parce qu'il y a un panel. d'intervention ou d'application qui est extrêmement riche, que c'est également quelque chose qui ne se fait pas au hasard, qui paraît simple mais qui est finalement beaucoup moins simple que ce qu'on pense à utiliser. Et donc c'est important d'avoir ces préconisations d'usage à l'esprit, en tout cas de savoir qu'elles existent et de se tourner vers des gens ou des ouvrages qui nous permettent de les référencer, et derrière de ne pas hésiter à tester les choses. Il y a des domaines qui sont plus simples à aborder que d'autres, celui sur la confiance, la motivation, l'anxiété, il y a peu de chances de se tromper. Il y a deux ou trois petits éléments, il faut faire attention à l'excès de confiance, il faut faire attention au désinvestissement ou à la frustration, mais il y a peu de chances de se tromper. Le domaine sur la technique, c'est beaucoup plus complexe. Il faut peut-être maîtriser un petit peu mieux les concepts avant de s'engager. Mais souvent, j'ai aussi le coutume de dire, il faut passer à la phase d'opérationnalisation. Parce qu'entendre des choses, comprendre des choses, faire même... je dirais même des liens conceptuels entre ce que ça peut apporter et la manière dont ça peut l'apporter, c'est bien. Mais si ça reste de la connaissance, c'est pas utile. Donc il faut passer à la phase de compétence. Et pour ça, il faut tester sur le terrain, il faut tester sur soi, il faut sentir et passer par l'expérience. C'est vraiment important. Et puis peut-être le dernier élément que j'aimerais souligner, c'est pourquoi moi je donne autant d'importance à la visualisation. Parce que finalement, la visualisation c'est un outil parmi d'autres. Et ça fait 30 ans quarantaine, quarantaine d'années maintenant qu'il est très utilisé. Mais il y en a d'autres, plus récents, qui sont tout aussi intéressants et complémentaires. Mais pourquoi la visualisation ? Parce que pour moi, la visualisation, elle a une particularité par rapport à de nombreuses autres approches, c'est sa transversalité. C'est-à-dire qu'en fait, c'est un outil qu'on va retrouver dans pratiquement toutes les autres pratiques. Quand on fait de la relaxation, il y a de la visualisation. Quand on fait de l'hypnose, il y a de la visualisation. Quand on fait de la sophrologie, il y a une part de visualisation. Il y a aussi des choses très spécifiques.
- Speaker #1
La méditation aussi.
- Speaker #0
Mais c'est aussi un outil. qu'on peut utiliser seul. C'est un peu plus comme ça que je l'ai présenté aujourd'hui. De temps en temps, le mariage ou la combinaison avec d'autres approches, c'est parfait. De temps en temps, c'est déconseillé. Donc du coup, il faut faire la part des choses. Mais j'aime bien ce côté-là, qui est à la fois finalement un élément constituant des autres approches et un outil de manière spécifique, qu'on peut utiliser, on va dire simplement. Et j'aime bien cet aspect-là, parce que du coup, ça le rend... presque indispensable. Et comme on en fait tous les jours, de toute façon, l'idée, c'est de formater, de structurer.
- Speaker #1
En fait, c'est marrant que tu dises ça, parce qu'on en fait depuis tout petit, finalement. Depuis enfant, en fait, on s'imagine des choses. C'est juste que ce n'était pas structuré, mais finalement...
- Speaker #0
Avec une part d'imaginaire très développée chez l'enfant. Créative et très développée, qu'il faut d'ailleurs cultiver à cet âge-là. Je ne dis pas qu'il faut l'arrêter par la suite, mais ça dépend ce qu'on vise. Mais oui, c'est effectivement quelque chose qui est très présent très rapidement. Même si l'enfant, au départ, quand on s'intéresse à l'imagerie motrice, il a du mal à être déconnecté du mouvement. Donc, être capable, parce que c'est une capacité d'attraction malgré tout, donc se projeter sur quelque chose qu'il ne fait pas, où il n'y a pas de retour sensoriel, il n'y a pas de résultat, il n'y a pas d'effort, ce n'est pas forcément évident. Ça, ça vient avec le mouvement. C'est quelque chose qui va arriver. Et globalement, il faut qu'il soit... C'est à des opérations abstraites, 11-12 ans et peut-être même un peu plus sur certains aspects pour qu'ils puissent complètement se déconnecter et maîtriser la temporalité. Mais ces difficultés-là, mis à part, effectivement, c'est quelque chose que les enfants utilisent énormément.
- Speaker #1
Très bien. Merci pour cet apport. J'ai deux questions pour finir l'interview. Déjà, est-ce qu'il y a une personne qui t'inspire particulièrement ?
- Speaker #0
Il y a beaucoup de personnes qui sont susceptibles de m'inspirer ou qui m'ont re-inspiré sur mon parcours, d'ailleurs en lien ou pas du tout avec ce que je fais. Je pourrais en trouver plein sur le plan scientifique, ou sur le plan sportif, ou de la dimension mentale. Volontairement, peut-être que je vais aller en chercher un qui est un peu différent. Moi, depuis gamin, j'ai toujours été assez... impressionné par le métier d'acteur et la capacité de partir, de jouer des rôles, d'incarner des rôles de manière assez saisissante, de faire voyer les gens et du coup de faire voyager l'imaginaire des gens et la projection qu'ils en ont. Et il y a un ou deux films d'un acteur qui m'ont marqué et c'est vrai que du coup je l'ai un peu catalogué comme étant quelqu'un qui je trouve vit vraiment pleinement ses rôles et très convaincant, c'est Russell Crowe. Eric Gladiator, évidemment, qui est un occulte pour moi.
- Speaker #1
Qui fait plaisir à mes copains.
- Speaker #0
Oui, c'est vraiment le kiff absolu. Et il en avait fait un autre quelques années plus tard. J'ai bouffé le titre d'ailleurs. C'était, ça ne me revient plus. Où il jouait le rôle de John Nash, mathématicien qui avait eu le prix Nobel. Ah oui. Et qui était juste exceptionnel. Et donc voilà, c'est quelqu'un que je trouve d'une certaine manière assez inspirante sur... La façon dont il s'engage dans ses rôles, même si je ne le connais pas plus que ça en réalité, sur sa vie et sur sa carrière. Mais c'est quelqu'un qui a cette résonance-là quand j'y pense.
- Speaker #1
Ok, très bien.
- Speaker #0
Un homme d'exception, c'était ça. Un homme d'exception.
- Speaker #1
J'irais voir ça. La deuxième question, c'est de quoi rêves-tu maintenant ?
- Speaker #0
De quoi je rêve ? Alors, évidemment, il y a beaucoup de rêves par rapport à notre actualité. Je ne vais pas rentrer dans ces considérations-là. Il y aurait des choses, c'est certainement ce que je mettrais en priorité. Si j'ai un rêve un tout petit peu plus perso, et là, du coup, je vais recentrer un petit peu sur le travail, moi, j'aimerais bien qu'on arrive de manière définitive à casser ou à briser la cassure, plutôt, entre le monde scientifique et le monde des praticiens. C'est un peu le cheval de bataille que j'ai dans mon approche, puisque je suis enseignant-chercheur, mais que j'ai ce côté fondamental et ce côté appliqué et que je veux garder un pied dans la pratique. Et du coup, je trouve que malheureusement, la communication, elle n'est pas encore, c'est mieux, mais elle n'est pas encore optimale entre le monde des chercheurs qui fait un boulot incroyable, mais qui ne fait pas toujours l'effort de se frotter au décalage entre la théorie et la pratique. Et puis le monde des praticiens qui fait de son côté un boulot incroyable. mais qui n'a pas toujours l'ouverture d'esprit pour accueillir les approches qui sont décontextualisées et les liaisons, pour le coup, théorie-pratique. Et c'est vrai que du coup, moi, j'essaye un peu tout le temps, que ce soit dans les formations ou dans mes travaux de recherche, d'alimenter, de nourrir un petit peu ce lien-là. Je pense que je suis loin d'être le seul, évidemment, mais il y a du travail. Et c'est vrai que je me dis, mais si tout le monde travaillait de manière systémique ou en cohérence dans ces deux milieux-là, on pourrait peut-être accélérer encore plus. la mise en place des éléments qui nous conduisent au succès ou qui sont susceptibles de nous conduire au succès. Donc c'est vrai que j'aimerais bien que ces deux mondes-là arrêtent de fonctionner en parallèle et cohabitent beaucoup plus et de manière concrète, véritable, et pas simplement de façade.
- Speaker #1
C'est marrant, mais j'ai l'impression qu'aux États-Unis, les universités sont beaucoup plus proches du monde...
- Speaker #0
Oui, moi j'y étais beaucoup au Canada, parce que j'ai eu des expériences d'un post-doc notamment au Canada. Et c'est vrai que du coup... On a le sentiment, je ne veux pas cracher sur la manière dont on fonctionne, d'une meilleure considération, en tout cas d'un meilleur positionnement, de la dimension, ils appellent ça la kinésiologie, mais l'étude des sciences du sport au sein de l'université et au sein même de l'approche. Et on a ce sentiment-là de l'extérieur. Après, on a toujours l'impression que l'herbe est plus verte ailleurs. C'est vrai. Mais j'ai le sentiment que ce n'est pas pour rien que certains pays, de ce point de vue-là, ont de l'avance sur nous. de combler un petit peu ce retard-là. Et c'est vrai que du coup, ça donne cette impression-là qu'il y a un peu plus d'écoute, il y a surtout un peu plus de moyens en réalité. Et du coup, comme il y a plus de moyens, il y a plus de choses qui sont mises en place, il y a peut-être un peu plus d'échanges également entre les différents mondes. Et peut-être qu'il y a une partie, en tout cas, je ne dis pas peut-être pas la manière dont ils fonctionnent, mais il y a une partie de ce qu'ils font dont on devrait certainement s'inspirer.
- Speaker #1
Oui, bien sûr, bien sûr. Carrément, écoute, merci. Merci, Aymeric, pour cet échange.
- Speaker #0
Merci à toi.
- Speaker #1
Tout est partagé, c'était hyper riche. Je pense qu'on a bien vulgarisé, dans le bon sens du terme, le sujet.
- Speaker #0
J'espère que ça aura fait naître plein de questions. Ce sera bon signe, comme ça, sensibiliser les gens et les induire ou les conduire à se poser des questions, à tester des choses, à se documenter. On aura réussi le pari.
- Speaker #1
Je pense que déjà, ça va créer de la curiosité. Merci, Emeric.
- Speaker #0
Merci beaucoup.
- Speaker #2
Merci d'avoir écouté cet épisode jusqu'au bout. J'espère qu'il vous a plu et que vous avez appris des choses. Si c'est le cas, merci de mettre 5 étoiles sur Apple Podcasts ou Spotify et surtout de partager cet épisode autour de vous. N'hésitez pas à me faire part de vos retours pour les prochains épisodes. Je vous dis à bientôt sur Objectif Mental.