- Speaker #0
Bienvenue dans ce nouvel épisode où j'accueille aujourd'hui Stéphanie.
- Speaker #1
Bonjour Barbara,
- Speaker #0
est-ce que tu veux bien commencer par te présenter ? Bien sûr,
- Speaker #1
donc je suis Stéphanie, je suis de métier diététicienne, j'ai actuellement 38 ans et j'exerce en tant que profession libérale, donc j'ai mon propre cabinet.
- Speaker #0
Ok, est-ce que tu peux nous dire de quoi on va parler aujourd'hui et révéler le thème de cette interview à nos auditeurs ?
- Speaker #1
Nous allons parler de burn-out, des conséquences et des signes évocateurs pour essayer de faire un tout petit peu de prévention à notre niveau.
- Speaker #0
Est-ce que tu peux nous raconter ton histoire en lien avec le burn-out ? Alors,
- Speaker #1
ça a démarré en septembre 2023, lors de mon anniversaire. J'étais au restaurant avec mon conjoint, un grand restaurant. Et dès le début du repas, je me suis retrouvée avec un mal de ventre très important. qui ne passait pas, je suis allée aux toilettes, rien ne passait et je me sentais de plus en plus mal. Début septembre 2023, il y avait la canicule encore, il faisait très très chaud donc j'avais des bouffées de chaleur, je me sentais mal, j'avais l'impression que j'allais tomber et donc j'ai dû me retrouver allongée par terre dans le restaurant parce que j'avais vraiment l'impression que j'allais tomber. Et ça ne passait pas du tout, les restaurateurs ont été très gentils, ils m'ont amené de l'eau fraîche, ils ont essayé de me rafraîchir, ils ont monté la clim mais rien n'y faisait. Donc forcément avec mon conjoint, on est rentré à la maison sans manger et s'en s'est suivi une nuit et même 48 heures très compliquées où j'ai fait crise d'angoisse sur crise d'angoisse avec ce qu'on appelle des phobies d'impulsion. Donc c'est des angoisses de passage à l'acte et moi ça s'exprimait. je m'imaginais en train de sauter par la fenêtre, tellement j'étais dans un état insupportable, j'avais l'impression que la seule chose qui allait me libérer, c'était sauter du quatrième étage par la fenêtre de mon salon. Et donc ça a duré bien 36 heures comme ça de crise d'angoisse permanente. J'ai du coup décidé dans la nuit de prendre rendez-vous tout de suite avec une psychologue spécialisée en TCC, donc en thérapie cognitivo-comportementale, parce que je sais que c'est ce qui est indiqué en cas d'angoisse, et avec mon médecin généraliste. Donc j'ai eu la chance d'avoir des rendez-vous assez rapides. Déjà juste le rendez-vous avec mon médecin, c'était le samedi soir, le lundi, j'ai eu mon rendez-vous avec le médecin, ça m'a fait beaucoup de bien parce qu'il a reconnu mes angoisses et que ça allait pas. pas bien, que j'avais des troubles digestifs. Et il m'a prescrit un anxiolytique en me donnant la consigne de le prendre que si j'en avais sans tel besoin. Et bien sûr, il m'orientait vers une psychologue, mais j'avais rendez-vous dès le mardi. Donc c'était déjà prêt. Donc ça, c'était pas mal. Et ce premier rendez-vous avec la psychologue aussi, de pouvoir en parler, d'expliquer ce qui se passait et qu'elle m'explique que c'était des angoisses et qu'elle allait pouvoir m'accompagner pour réduire mon angoisse, ça m'a fait déjà beaucoup de bien. Et il faut savoir qu'à cette période-là, j'avais prévu d'être en congé à la fin de la semaine parce que mon conjoint, il partait. Je partais trois semaines aux Etats-Unis et j'avais décidé de prendre ces trois semaines un peu en allégé au niveau pro pour refaire un point sur ma vie, prendre le temps pour moi. Et du coup, je n'ai pas demandé d'arrêt de travail parce que je savais que j'allais avoir des repos. Voilà un petit peu l'événement, le pic où pour moi, je dis que je me suis pris le mur. En fait, c'est vraiment l'événement où je l'exprime comme ça. Après, tout le monde n'exprime pas le burn-out comme ça. On parle souvent d'effondrement, par exemple. Moi, je dis que je me suis pris un mur, c'est-à-dire un arrêt net dans ma course un peu effrénée que je pourrais vous raconter après. Mais un arrêt sur image où il n'y a plus rien, il n'y a plus personne et tout s'écroule. Ok, voilà.
- Speaker #0
Merci. Est-ce que tu as eu des signes précurseurs à ce mur ? Ou est-ce qu'il est arrivé du jour au lendemain sans que tu ne vois rien ? Ou qu'il y a peut-être eu des signes mais que tu n'as pas vus ?
- Speaker #1
Alors, il y a eu des signes que je n'ai pas vus, il y a eu des annonces que je n'ai pas entendues, et donc le mur, il est arrivé pour moi sans prévenir, mais maintenant avec le recul, je me rends compte que je l'ai préparé pendant trois ans, mon burn-out, où en fait j'augmentais ma charge de travail, j'augmentais mon rythme de vie, j'augmentais la fréquence à laquelle je faisais du sport, j'augmentais l'intensité du sport, et puis petit à petit, ça a démarré par... des douleurs corporelles et notamment au niveau des poignets où j'ai fait des examens médicaux. La médecin, ça a été la première à me dire que je travaillais trop et qu'il fallait peut-être que je travaille moins pour régler mes problèmes de poignets parce qu'en fait, il n'y avait pas de problème sur mes poignets. Sauf que ça devait être des crispations à cause de ma position de travail en consultation. Ça, c'est le message que je n'ai pas entendu. Pour moi, ce n'était pas ça. C'est que je faisais de la course à pied, c'était au niveau des cervicales, ça bloquait, etc. Alors c'est sûr que l'ostéopathie me faisait du bien, mais je n'ai pas entendu ça. Après, j'ai eu des troubles digestifs pas mal. Étant diététicienne, j'ai mis ça sur le compte d'un intestin irritable, toute seule, moi-même, sans consulter personne. Donc j'ai essayé d'adapter l'alimentation, etc. Sauf que ça faisait encore quelque chose de plus. à contrôler et du coup bah en fait je pense que ça a rajouté et puis pour avoir un bon transit au faire d'activités physiques donc hop je re augmente l'activité physique pour gérer mes troubles digestifs qui en fait je pense était plutôt lié à mon état émotionnel et de fatigue et à un moment donné j'arrivais même plus à faire du sport c'est à dire que j'ai remplacé la course à pied par la marche parce que je disais j'ai plus la tête J'ai plus le mental pour aller courir, j'ai plus la force mentale pour aller courir, ça me demandait trop d'efforts, donc j'ai marché, sauf que quand j'allais marcher, j'allais marcher une heure et demie, deux heures, parce que je faisais le même nombre de kilomètres que ce que je faisais. Non mais oui, j'ai bien fait le lit de mon burn-out, il n'y a pas de souci. Et au niveau pro, étant libérale, ça a coïncidé le démarrage de tout ça avec un moment où je me suis retrouvée... Au pied du mur, parce que c'était une séparation avec mon ancien conjoint, je venais de lancer mon cabinet dans la région. Donc autant dire qu'au niveau revenu, j'avais zéro. Il fallait que je trouve un logement. Donc il a fallu que je mette les bouchées 40 pour gagner ma vie. Et donc j'ai mis les bouchées 40. Et là, tout a très bien fonctionné. Donc toutes les pistes que j'avais lancées, tout a fonctionné en même temps. Et je me suis retrouvée avec énormément, énormément de travail. Et une incapacité à dire non à ce qu'on me proposait de faire. Donc j'acceptais tout. Et j'essayais d'y remettre dans des cases qui n'étaient pas vides. Donc je faisais des heures pas possibles. Et voilà, pas de repos. Je travaillais le week-end. J'ai voulu lancer mon organisme de formation partout parce que je m'étais dit que c'est le bon moment. Je n'ai pas de temps et pas d'énergie si je rajoutais un énorme dossier. Et voilà, et tout ça, ça augmentait, ça augmentait. Et le dernier signe, c'est l'augmentation de mes crises d'angoisse, enfin de mon angoisse, qui n'avait jamais été vraiment identifiée. On m'a jamais dit que j'étais quelqu'un d'angoissée, à part un nouveau conjoint, qui lui m'a dit « mais en fait, t'es pas stressée, t'es quelqu'un d'angoissée » . Et ça a un peu fait tilt dans ma tête. J'ai eu une augmentation de mes angoisses suite au décès brutal d'un membre de ma famille, quelqu'un dont j'étais très très proche. Il a eu un accident de moto alors que beaucoup de gens dans ma famille sont motards, donc ça a été assez difficile. Et de là, s'en est suivi plein d'augmentations des angoisses. Dès que je partais, j'avais l'impression que je ne reverrais pas mon conjoint. Dès que j'avais mon frère ou ma mère au téléphone, j'avais l'impression que si je ne faisais pas un rituel, un peu comme un toque, J'allais jamais les revoir, des fois j'ai envie de faire pipi et du coup j'ai l'impression que je vais pas arriver à me retenir, ça m'angoissait et du coup j'arrivais plus à faire aucun trajet sans me dire que j'allais me faire pipi dessus. Et du coup, l'hyperactivité professionnelle, l'hyperémotionnalité, je sais pas si on peut le dire comme ça, ou en tout cas l'angoisse permanente que j'avais sur tous les sujets de la vie et dont je m'étais jamais occupée, plus la canicule. Je pense que le fait d'être fatiguée par les fortes chaleurs, ça plus ça plus ça, boum, le mur.
- Speaker #0
Le mur.
- Speaker #1
Le mur.
- Speaker #0
Et comment on gère un mur ?
- Speaker #1
Comment on gère un mur ? On ne le gère pas, parce que le mur il est plus dur que nous, et c'est lui qui décide à notre place, c'est-à-dire que je ne pouvais plus rien faire. Prendre une douche, par exemple, il fallait que je m'allonge après pendant une heure, mais une vraie heure entière, pour m'en remettre de l'effort physique que c'était de prendre une douche. Donc aller au cabinet, 20 minutes de marche, il me fallait une heure et demie pour m'en remettre. Faire une consultation, même une consultation de suivi qui dure une demi-heure, il me fallait au moins une demi-heure allongée, sans rien faire, sans bouger, pour m'en remettre. J'ai allégé, enfin mon planning était un peu allégé pendant trois semaines, j'ai quand même eu des jours de travail, des jours où je suis allée au travail, où j'ai fait des malaises qui n'étaient pas vraiment des malaises mais où en fait j'avais besoin de m'allonger par terre, vraiment, je ne sais pas si vous faites du yoga mais la dernière position, la relaxation finale du yoga, j'avais vraiment besoin de cette position-là, allongée en étoile, par terre, sur un support vraiment qui me maintenait bien, sinon je... tout vrillait en moi, j'avais des sensations de malaise,
- Speaker #0
de vertige comme si ça n'allait pas comme si tu perdais pied quoi complètement est-ce que tu peux nous dire comment tu as géré petit à petit cette situation on a bien compris qu'effectivement t'étais dans une phase où t'avais pas le choix il fallait faire avec ce que tu pouvais faire à ce moment là te reposer quand t'avais besoin de te reposer, ton corps Ton cerveau ne t'a plus du tout laissé le choix pour ça. Et après, comment ça s'est passé ? Aujourd'hui, tu es en face de moi. Tu m'as dit tout à l'heure que ce n'était pas complètement fini. Mais pour autant, tu vas suffisamment bien pour travailler.
- Speaker #1
Fonctionner.
- Speaker #0
Est-ce que tu peux nous dire comment tu as remonté la pente ? Notamment, est-ce que tu t'es fait accompagner ? Pendant combien de temps ? Alors, tu nous as parlé d'un rendez-vous psy. Est-ce que ça a duré ? Et où est-ce que tu en es aujourd'hui ? Ouais,
- Speaker #1
donc déjà ça va petit à petit et ça prend du temps. Donc en fait, il faut s'accorder du temps, il faut être patient, ce qui n'est pas ma qualité première. Donc j'ai eu beaucoup, beaucoup de mal à gérer cette période d'impatience. C'était vraiment long parce que quand on dit long, c'est vraiment la phase très, très difficile à bien durer six mois. Donc la priorité pour moi, c'était arriver à travailler. Mais pour ça, j'avais besoin de faire des micro-journées. Donc j'ai dû fermer tout mon planning pour ne pas avoir de nouvelles prises de rendez-vous. J'ai arrêté plein de projets. J'ai vraiment priorisé sur toutes mes activités professionnelles. Je me suis dit, je garde celle qui m'intéresse le plus et celle qui me paye le plus. Parce que vu que je vais devoir travailler moins, il faut aussi que je gagne ma vie. Donc il y avait les deux critères, rentabilité et le plaisir. Et j'ai éliminé, je pense, 60% de mon activité sur cette période-là. Je faisais maximum des demi-journées. Donc moi, ce que j'appelle une demi-journée, c'est une journée de 5 heures avec des pauses. Donc j'ai matérialisé dans mon planning des pauses très régulières. Donc au début, je faisais une pause après chaque consultation. Après, au bout de quelques semaines, j'arrivais à faire deux consultations de suite et je faisais une pause. Après quelques semaines, j'arrivais à faire trois consultations. Jusqu'à maintenant où j'arrive à faire une demi-journée sans pause, même si je me rends compte que ce n'est pas encore optimal. et qu'une pause toutes les deux heures et demie, trois heures, ça serait encore nécessaire. Et j'ai appris à faire des pauses, parce que moi les pauses jusqu'alors c'était, on en profite pour répondre au téléphone, faire des mails, faire un coup de ménage dans le cabinet, etc. Et là j'ai été obligée de faire des pauses où je m'assois sur mon canapé que j'ai au cabinet et je ne fais rien, je pose le téléphone. Donc pendant quelques semaines j'avais besoin de m'allonger, puis au bout de quelques semaines j'arrivais à rester assise. Mais encore aujourd'hui, ce que je ne faisais jamais avant, j'ai besoin de temps dans la journée. Alors maintenant, c'est plus que 10-15 minutes, mais où j'arrête tout, toutes les sollicitations extérieures, et je reviens à moi, à rien du tout, à mon esprit qui peut vagabonder. Pour l'accompagnement, il y a déjà l'accompagnement de mon conjoint, qui a été primordial, qui a été un rock, qui a été hyper solide, qui m'a aidé à comprendre beaucoup de choses, il m'a fait beaucoup parler, parce que je ne suis pas quelqu'un qui parle. beaucoup de moi du coup il m'a fait beaucoup parler il m'a beaucoup aidé sur l'impatience justement à me redire que c'est normal que ça prenait du temps qu'il fallait que je sois patiente il a tout géré dans la maison parce que j'étais en incapacité de gérer des courses parce que réfléchir au menu de la semaine alors que je suis diététicienne j'arrivais à le faire pour mes patients mais pour moi incapable incapable c'était trop de charge mentale et en fait ça me faisait partir en panique en fait et C'est ce brouillard mental où on n'arrive plus à prendre de décision, parce qu'on n'arrive plus à réfléchir. Même sur des choses simples, ça m'arrive encore quand je suis fatiguée. où il y a cette espèce de brouillard mental, où pas de possibilité de réflexion. Et encore une fois, là où c'est quand même formidable, c'est que ça n'arrive jamais quand je travaille. Comme quoi je pense que je priorise un peu le travail à ma vie perso, ça en dit beaucoup sur moi je pense. En accompagnement, j'ai eu mon médecin traitant, qui a été formidable, parce qu'il m'a beaucoup écoutée. Quand j'ai eu besoin de me rassurer au niveau somatique de toutes les plaintes que j'avais, parce que j'avais mal partout, j'avais des douleurs digestives, etc., il a su prescrire. des examens en me disant on va vérifier que c'est rien, c'était rien, j'étais rassurée, d'un coup pouf, ça allait mieux. Et des fois il a su me dire, non Stéphanie, là c'est ta tête qui te dit, il faut que tu te reposes. Quand j'ai voulu reprendre le sport, il m'a guidée pour y aller en douceur et éviter de refaire trop, trop vite, trop fort. Et j'ai eu surtout un accompagnement psychologique, avec cette psychologue en TCC qui a été formidable, parce qu'en fait elle m'a vraiment appris à gérer mes angoisses et c'est là où je me suis rendue compte à quel point j'avais des angoisses sur tous les domaines de ma vie et elle m'a donné une méthodologie pour faire baisser ses angoisses et c'est salvateur parce que maintenant j'ai les clés j'angoise toujours parce que quand on est de quand on a l'habitude enfin quand on angoisse quand c'est notre manière de penser on angoisse toujours sauf que maintenant je sais le gérer et donc ça prend plus le dessus et ça me et ça maintient pas et ça c'est une grande force Et du coup, ça, avec elle, j'ai eu un suivi pendant trois mois à raison d'une séance tous les 15 jours ou trois semaines en fonction de mon besoin. Donc avec des exercices à faire, vraiment de la TCC, des exercices à faire entre deux. Et ça a changé ma vie sur plein de choses.
- Speaker #0
Cette méthode de gestion des angoisses, c'est quelque chose que vous avez peut-être co-construit ensemble et qui est fait sur mesure pour... toi ou c'est une méthode en particulière dont on pourrait rapidement...
- Speaker #1
Alors en fait, il y a un peu une méthode sur les TCC et après qui est adaptée au cas de la personne. Donc le premier exercice qu'elle m'a fait faire, moi c'était sur arriver à se poser et à écrire toutes les pensées qui me venaient. Donc déjà prendre le temps de laisser la place à son esprit, etc. C'était pas facile. Donc après on a repris ça en séance voir ce qui émergeait un petit peu. Ça met en lumière les angoisses principales. Et donc après, sur chaque angoisse, par exemple l'angoisse de la disparition de mes proches, qui était très très forte à ce moment-là, elle m'a fait faire plusieurs choses. C'est s'exposer à cette angoisse. Plutôt que d'avoir ce que j'appelle un rituel d'évitement que je mettais en place, comme des tocs, j'avais l'impression que ça réglait le problème, et bien elle me dit il faut penser À ça, il faut que tu te répètes ton angoisse à fond dans la tête jusqu'au moment où tu n'as plus de sensation corporelle liée à cette pensée. Donc ça, et l'exercice suivant, c'était ce qu'on appelle le scénario catastrophe. C'est-à-dire, si ton conjoint meurt, qu'est-ce qui se passe ? Eh bien, tu vas devoir gérer l'appartement, tu vas devoir te faire l'administratif, tu vas être très triste. C'est vraiment aller au bout de la pensée parce que quand on angoisse, en fait, on pense juste, oh là là, s'il meurt, ça va être l'horreur. Et on ne définit pas ce que c'est l'horreur. Et donc, le fait de s'entraîner à penser à toutes les conséquences, ça fait descendre l'angoisse. Pour moi, ça a vraiment marché et c'est hyper puissant, je trouve.
- Speaker #0
Ok. J'aimerais bien qu'on revienne juste rapidement sur le fait que tu ne te sois pas complètement arrêtée. Est-ce que c'était un choix conscient ? Est-ce que finalement, tu ne t'es pas posé la question ? Est-ce que ton médecin te l'a proposé ou ne te l'a pas proposé ?
- Speaker #1
Alors, ce n'était pas conscient parce que je n'avais pas conscience d'être en burn-out. Et parce que personne ne m'a dit que j'étais en burn-out, c'est mon diagnostic personnel au fur et à mesure des mois et des discussions que j'ai eues avec mon conjoint. C'est lui aussi qui m'a dit « si on regarde les cases du burn-out, tu coches tout dedans » . Et c'est vrai que souvent, on associe le burn-out au travail. Et pour moi, c'était impensable que mon travail passion, le truc que j'adore, qui me motive, ait créé ce choc-là et cet état-là. Mais après, au fur et à mesure, je me suis rendu compte qu'en fait, le burn-out, pour moi, c'est un épuisement général. Et il est lié, certes, au travail, mais aussi à un contexte émotionnel, de vie, physique, global. Donc, pourquoi je ne me suis pas arrêtée ? Parce que, déjà, je n'avais pas conscience d'être en burn-out. Donc, c'était en partie dû à mon travail. Le médecin me l'a proposé. Et à la fois, il m'a dit... Parce que je le connais depuis très très longtemps, il me dit je sais que ton travail c'est ce qui te fait tenir et ce qui te fait avancer, parce qu'il me connaît effectivement très bien. Il me dit donc je te laisse le choix, si tu veux un arrêt, je te le fais, si tu veux pouvoir continuer à travailler, parce que pour moi si j'arrête de travailler c'est vraiment que ça va pas, et j'étais un peu dans le déni. voilà donc il m'a laissé gérer donc j'ai pas pris d'arrêt peut-être que j'aurais dû mais à la fois je pense que ça aurait été aussi me laisser plus de temps face à mes angoisses que j'arrivais pas à gérer à l'époque quand tu dis peut-être que j'aurais dû c'est ce que tu penses aujourd'hui ou c'est une question que tu te poses ou tu te dis peut-être que les gens m'écoutent ils vont penser ça je pense que maintenant avec ma capacité à gérer mes angoisses ça serait une bonne chose Que je m'arrête si je me retrouve dans des états proches des états dans lesquels j'étais. Mais à l'époque, je pense que m'arrêter, j'aurais été en angoisse perpétuelle et ça m'aurait créé de nouvelles angoisses, le fait de ne pas être en capacité de travailler. Est-ce que je vais arriver un jour à retravailler ? Est-ce que je vais gagner ma vie ? Est-ce qu'il faut que j'arrête ? Est-ce qu'il faut que je me reconvertisse ? Et je pense que ça aurait peut-être été pire pour moi à ce moment-là, mais j'ai dû vraiment, vraiment, je ne me suis pas arrêtée, mais... Je suis passée de 70 à 80 heures de travail par semaine à 10. Quand je dis que j'ai pas arrêté de travailler, j'ai quand même fait une division par 8 de mes heures de travail sur la semaine. Donc c'est tout comme si j'étais arrêtée.
- Speaker #0
Oui, et en même temps, je trouve que c'est intéressant aussi d'être conscient que finalement, tu as probablement pris l'option qui te convenait, c'est-à-dire que pour toi, complètement lâchée. ça aurait peut-être été encore plus brutal, encore plus difficile. Et je pense aussi qu'en fonction des cas, parfois, tout arrêter, ça peut aussi s'enchaîner avec une reprise d'autant plus difficile parce qu'on s'est complètement arrêté. Pour ça comme pour le reste, il n'y a probablement pas de bonne manière de faire et c'est à chacun de gérer comme il le sent.
- Speaker #1
C'est probable.
- Speaker #0
Est-ce qu'aujourd'hui, tu as complètement récupéré ou pas ?
- Speaker #1
Alors, récupérer complètement, c'est... En fait, on ne revient jamais à qui on était avant. Moi, ça fait du coup septembre 2023, maintenant, donc ça fait plus d'un an et demi. On ne peut pas redevenir la personne qu'on était avant, puisque la personne qu'on était avant, c'est celle qui nous a fait prendre le mur. Donc, on sait qu'on ne peut pas. Donc, il y a un petit deuil à faire, quand même, sur sa capacité. pour moi de travail par exemple ou même de sport parce que j'ai repris le sport vraiment sérieusement depuis un an et j'ai encore des moments où je dois re-arrêter parce que j'ai poussé le bouchon un peu trop loin voilà et non j'ai toujours des moments de fatigue très important j'ai encore des moments où j'ai du brouillard mental j'ai encore des moments où où j'ai besoin de remettre plus de poses. De reprendre l'habitude de m'arrêter, de m'allonger, de faire de la méditation, de la respiration, enfin faire des temps complètement off. Par contre, la différence, c'est que maintenant, j'espère en tout cas, je reconnais les signes plus tôt et j'ai trouvé des méthodes qui me permettent d'aller mieux assez rapidement. C'est-à-dire que quand je sens que j'ai une grosse période et que j'ai trop cumulé de trucs pros et persos, En même temps, si j'arrive à alléger mon planning pro et perso pendant une, deux, trois semaines, ça va tout de suite beaucoup mieux. Donc je suis beaucoup plus forte, beaucoup plus à l'écoute qu'avant. Mais il y a ce côté difficile de se sentir quand même moins... enfin de se sentir plus fatigable. Alors qu'avant, je n'avais pas du tout cette impression. J'avais l'impression que je n'étais jamais fatiguée. Mais en fait, c'est juste que je ne savais pas ce que c'était la fatigue et que je ne l'écoutais pas. Mais maintenant, je reconnais. Je pense qu'on ne s'en remet pas parce qu'on ne revient pas comme on était avant. Je pense qu'il est nécessaire de changer.
- Speaker #0
Finalement, tu penses que c'est important que la personne d'avant ne s'en remette pas complètement pour que la nouvelle personne, qu'il y ait quelque part une forme de renaissance. En tout cas, c'est ça. C'est rigolo parce que j'avais jamais envisagé des choses comme ça et c'est marrant de t'entendre le percevoir et le dire comme ça, je trouve ça marrant. Ok, est-ce que tu as mis des choses en place dans ton quotidien ? Alors quand je dis ton quotidien, peut-être mensuellement ou voilà, est-ce que tu as des échéances où tu fais le point ? Est-ce que tu t'es fixé des règles de fonctionnement ? Parce que là finalement tu nous dis, quand je sens que c'est un peu trop, je lève le pied tout de suite. Oui. Ok, super. Est-ce qu'à côté de ça, tu anticipes aussi les choses en t'ayant fixé des règles depuis que tu remontes la pente ou pas encore ?
- Speaker #1
Alors j'ai fixé des choses. Déjà, c'est des temps de travail et des horaires fixes avec des journées de maximum 8 heures par jour, d'amplitude de 8 heures avec des pauses. C'est figé, et du coup tout ce qui ne rentre pas dans ces heures-là, c'est non. Je ne travaille plus le soir, je ne travaille plus le matin, je ne travaille plus le week-end. J'ai vraiment limité là-dessus. Je dis beaucoup plus facilement non à des nouveaux projets pro, c'est-à-dire je garde toujours les deux critères. Est-ce que ça m'intéresse ? Est-ce que c'est suffisamment payé ? Et si ça ne remplit pas les deux cases, c'est non. Puis je me débrouillerai financièrement, je trouverai un autre moyen. J'ai mis en place le fait d'écrire et de prendre le temps d'écrire, de reprendre un journal intime où au démarrage, pendant bien un an, c'était tous les jours. Je me l'imposais dès le matin de me sonder un peu, de savoir comment j'allais, dans quelle énergie j'étais et ce que j'avais envie de faire de ma journée. Et pas ce qu'il fallait que je fasse, mais ce que j'avais envie de faire. Et ça, pareil, ça change tout dans la vie. Et là, maintenant, je suis plutôt sur une fois par semaine. C'est-à-dire, dans le week-end, je sais qu'il y a un moment où je vais me poser, je vais prendre une demi-heure où je vais juste écrire ce que j'ai fait de ma semaine, ce que je retiens, comment je vais, ce à quoi il faut que je fasse attention. Et je sonde un peu tout ça. Est-ce que j'ai des douleurs ? Est-ce qu'au niveau digestif, ça va ? Est-ce que le sommeil, ça va ? Parce que très important aussi de dormir suffisamment. Pareil, quelque chose que j'ai mis en place, je vais me coucher tous les soirs entre 22h et 22h30. C'est non négociable, sauf soirée exceptionnelle. Mais sinon, c'est obligatoire. Je commence plus tard le matin pour me réveiller naturellement et pas avoir besoin de mettre un réveil pour aussi favoriser un bon sommeil. Je mets en place de l'activité physique que j'ai appris à adapter à mon énergie du moment. Alors, ça ne marche pas toutes les semaines. Il y a des semaines, je pousse un peu trop, mais globalement, j'arrive à me dire non, là, en fait, je suis fatiguée. J'ai dit que je faisais du sport. Je n'en fais pas. Ou alors, je fais une séance plus courte, plus légère. J'essaye de moduler comme ça. Et je continue d'en parler beaucoup, d'en parler à mon conjoint, d'en parler à des amis qui ont été très présents pendant cette période-là, pour qu'ils m'aident aussi à voir les signes à côté desquels moi je pourrais passer toute seule, parce que j'ai pas trop envie de les voir des fois.
- Speaker #0
T'as mis en place, j'allais dire, des petits gendarmes.
- Speaker #1
Exactement. Et la différence avec avant, c'est que je les écoute. J'essaye de les écouter et d'entendre ce qu'ils me disent et que peut-être ils ont raison.
- Speaker #0
Ok. Est-ce que t'aurais l'un ou l'autre conseil à donner aux gens qui nous écoutent en lien avec ton histoire, un truc que t'aurais à cœur de partager ? Oui.
- Speaker #1
De ne pas minimiser les signes. Avant-coureur, de se dire que la fatigue chronique, la perte de plaisir, c'est vrai que c'est quelque chose dont je n'ai pas parlé, mais la perte de plaisir sur des activités qu'on adorait, qui nous passionnent, et finalement on les fait par contrainte. Moi pendant les trois ans avant mon burn-out, je disais j'ai hâte d'être à la retraite. Alors que j'adore mon métier, j'adore, mais en fait tout était surcharge trop. Donc vraiment prendre du temps pour se connecter à son corps, se poser la question de comment je vais. Est-ce que je suis en forme ? Est-ce que je suis fatiguée ? Est-ce que ma journée là, elle me plaît ? Est-ce que je suis dans la contrainte ? Est-ce que je suis dans l'obligation tout le temps ou pas ? Vraiment prendre en compte ces signaux-là pour éviter d'arriver au stade où en fait l'univers devient plus fort que vous, quoi. De changer avant.
- Speaker #0
Et est-ce que dans cette période-là ou depuis, tu as lu un bouquin que tu nous conseillerais ?
- Speaker #1
Alors j'en ai lu deux. dont j'ai pas les titres là, donc je pourrais pas te les relire. Il y en a un qui était trop partie médicale, physio, et du coup qui parlait pas du tout de la partie émotionnelle, et du coup je trouvais que c'était un peu froid et que ça minimisait un peu. Et un autre livre qui était pas mal, qui m'a fait comprendre que quand on est épuisé, même d'aller marcher 10 minutes, en fait ça peut être trop. Et ça c'était une révolution pour moi d'entendre, de lire du coup que des fois juste de marcher 10 minutes c'est trop et qu'il ne faut pas le faire il faut savoir pas le faire mais dans ce bouquin là le problème c'est les conseils qu'il donne sur l'alimentation avec lesquels je ne suis pas du tout d'accord et du coup j'ai pas trop envie de donner le titre et il y en a certainement plein d'autres qui sont très bien mais voilà ok et est-ce que t'as d'autres qu'est-ce que tu fais aujourd'hui pour te faire du bien Des pauses et du temps pour moi toute seule où je fais rien et vraiment où juste je laisse mon esprit divaguer, penser à plein de trucs et en fait j'adore passer du temps avec moi. C'est sympa ? Ah ouais, moi je me trouve vachement sympa et très intéressante donc je comprends pas pourquoi j'ai pas plus d'amis. Mais ouais j'apprécie alors qu'avant c'était une source d'angoisse de me retrouver seule etc et maintenant ça me fait un bien fou.
- Speaker #0
Tu t'es réconciliée avec toi-même ? Ouais. Ou est-ce que tu t'es découverte et tu apprends à te connaître toi-même ?
- Speaker #1
Je pense que je me suis découverte et qu'en plus, il y a des parties de moi avec lesquelles je n'étais pas très au clair et avec lesquelles je me suis réconciliée. Ok.
- Speaker #0
Est-ce que tu penses que la connaissance de soi peut être un bon moyen de prévenir l'épuisement ?
- Speaker #1
Oui, si on s'écoute. Parce que ce n'est pas parce qu'on se connaît qu'on va vraiment s'écouter. donc je pense que les Les deux sont importants, se connaître et aussi s'écouter et agir en fonction de ce qu'on détecte vraiment.
- Speaker #0
Merci.
- Speaker #1
Avec plaisir.
- Speaker #0
Merci Stéphanie pour cette interview. Alors il faut qu'on vous dise qu'il a été complètement improvisé, puisqu'on s'est vu pour autre chose avec Stéphanie et qu'on s'est dit tiens, ce serait sympa de faire cette interview.
- Speaker #1
Eh bien avec plaisir et peut-être juste un petit mot de la fin, dire que c'est que mon vécu et que... chacun vit les choses de manière très différente et qu'il n'y a pas une bonne méthode et qu'il n'y a pas un burn-out où chacun le vit différemment et du coup s'en remet aussi va mieux de manière différente et il faut tester des choses en fait pour trouver les bonnes solutions tout à fait,
- Speaker #0
merci beaucoup avec plaisir, au revoir