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OSONS la Mayenne - parcours féminins d'entrepreneurs engagés

OSONS la Mayenne - Saison 2 - Nathalie Feinte Liguine - Tissus d'Avesnière

OSONS la Mayenne - Saison 2 - Nathalie Feinte Liguine - Tissus d'Avesnière

24min |26/06/2025
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Transcription

  • Speaker #0

    Moi je suis tombé dans la soupe, comme Obélix dans sa potion magique, moi je suis né dans le textile. L'histoire est complètement différente, je n'ai jamais envisagé de travailler chez Tissus d'Avenir. Il me semble un devoir moral de ne pas décevoir, même s'il a disparu aujourd'hui. A chaque fois que j'ai un doute, à chaque fois que je me pose une question, je regarde en l'air et je me dis « Papa, que l'auriez-vous fait ? » Mais comme disait papa, travailler en famille, on est condamné à s'entendre.

  • Speaker #1

    Première femme à piloter l'entreprise familiale. Une stature de dirigeante, un tempérament engagé, sous une douceur et une joie de vivre que l'on devine. Nathalie Feint-Cleguine est née avec ses six frères et soeurs dans les jardins de l'usine des tissus d'Avenir. L'odeur des solvants, des colorants, la chaleur des ateliers ont marqué son enfance. Terrain de jeu puis de fête, elle a vu grandir et évoluer l'entreprise. Nathalie rêvait de l'école du Louvre. Elle commence finalement par un BTS assistant de direction et après un appel du pied de son père, elle atterrit finalement il y a 35 ans qu'est Paul Boudet à Laval. Elle nous confie que ce travail non réellement choisi au commencement allie finalement sa passion des arts et celle de l'entreprise familiale. Cette entreprise qui n'aurait jamais dû arriver en Mayenne. En effet, à la fin du XIXe siècle, Constant Feinte, entrepreneur du nord de la France, lance son activité de blanchisserie du lin, puis de tissage. Arrive 1914, l'invasion allemande pousse les ch'tis sur les routes. La famille Feinte arrive en Anjou, puis en Mayenne en 1917. Elle y pose ses valises et son activité industrielle pour ne plus en partir. Excellence française, sens de l'élégance, transmission d'un patrimoine et d'un savoir-faire unique, les tissus d'Avénière, c'est le luxe dans le tissu d'ameublement depuis six générations. Nathalie nous reçoit ce matin au cœur des tissus d'Avénière, face à la basilique du même nom, au pied de la Mayenne. Dans ses murs chargés d'histoire, elle nous transporte dans son univers. où le beau règne en majesté. J'aimerais vous poser une première question. Si vous fermez les yeux et que vous essayez de vous souvenir de votre premier contact avec l'entreprise, quel serait-il ?

  • Speaker #0

    Je suis dernier à l'entreprise, donc en fait, puisque la maison de mes grands-parents était au fond de l'usine, j'ai mon souvenir le plus marquant, c'est celui de mon grand-père. qui était un monsieur que je trouvais très intimidant, qui était costaud, qui était mon grand-père derrière son énorme bureau, sa cigarette à la bouche. Ça, c'est un souvenir. Je ne suis pas tétanisé en en parlant, mais je le trouvais très, très impressionnant. Autre souvenir, les odeurs. Les odeurs, parce que comme nous nous habituons derrière l'entreprise, en fait, il y avait toutes ces odeurs de produits. de blanchiment de produits, quand on flambait les tissus. Donc les odeurs c'est quelque chose qui m'a beaucoup marqué enfant. Et aussi le vieux concierge, Monsieur Valentin, qui a vécu dans l'entreprise jusqu'à sa mort bien après 90 ans. Le telex aussi, le telex. Enfant, le telex c'est quelque chose qui me fascinait. De voir tous ces petits trous dans les bandes de papier, je ne comprenais pas comment on arrivait à dialoguer avec ça. Voilà. Ça, ce sont vraiment mes souvenirs d'enfance. Mais je suis tombé dans la soupe, comme Obélix dans sa concession magique. Moi, je suis né dans le textile, donc c'était quelque chose de très naturel. Le jour où je suis rentré chez Tiffy Lévenière, j'avais encore énormément de choses à découvrir, mais j'avais quand même l'impression d'y être né. Mais oui, des images, j'en ai plein, j'en ai plein, j'en ai plein, de toutes les bêtises qu'on a pu faire enfant. Quand on allait dans les ateliers les dimanches et que nos parents ne nous voyaient pas, et des fêtes qu'on a faites avec nos amis, où on leur faisait visiter l'usine à 3h du matin. Mais bon, voilà, ce sont des lieux du souvenir. C'est vraiment un peu ma Madeleine de Proust, tout ça, de repenser. Et quand je retravaille à certains ateliers, parce que les choses ont quand même terriblement évolué dans les ateliers, mais certains sont restés identiques il y a 50 ou 60 ans. J'ai toujours un petit coup au cœur de revivre ces souvenirs d'enfance.

  • Speaker #1

    Et alors, vous êtes tombé dans la marmite de l'entreprise familiale. Aujourd'hui, vous y travaillez. Est-ce que c'était une évidence dès votre plus jeune âge ou l'histoire est-elle un peu différente ?

  • Speaker #0

    L'histoire est complètement différente. Je n'ai jamais envisagé de travailler chez Tissus d'Avenir, en fait. J'étais passionné d'histoire de l'art et de dessin. Les circonstances ont fait que je suis parti à un moment... Aux États-Unis, où papa m'a envoyé travailler chez un de ses clients, qui était un éditeur, et j'ai travaillé d'abord dans le studio de création, et après j'ai fait tous les services de l'entreprise. Je me demandais pourquoi papa m'avait envoyé aussi précipitamment sans m'en parler, mais il avait tout organisé pour moi. En venant des États-Unis, où au début je souhaitais faire l'école du Louvre, En fait, après avoir travaillé pratiquement un an aux États-Unis, je me suis rendu compte que gagner de l'argent, c'était quand même très sympa et que je ferais mieux de travailler et que l'école du Louvre, je le ferais une fois retraité. Ce qui s'approche, ce qui s'approche. Donc, je finirai peut-être par prendre des cours de l'histoire du Louvre. J'ai donc commencé à travailler d'abord chez Dupont de Nemours. Pas beaucoup d'intérêt pour moi parce que c'était vraiment que de la chimie, de la technique, tout ce que j'ai un petit peu en horreur, je dois dire. ce qui n'était pas du tout dans mes intérêts à l'époque. Et puis un deuxième travail, j'ai été embauché par un cabinet américain de chasseurs de tête, un gros, gros cabinet qui avait besoin d'assistantes parlant bien anglais. Là, c'était une très, très belle expérience, très fatigante parce qu'on avait vraiment un rythme un peu épuisant. On était très gâtés, on était très bien payés, mais à 24 ans, papa estimait que je m'abîmais à la santé, que je ne voyais plus personne, que de travailler jusqu'à 10h ou 11h tous les soirs à 24 ans, c'était juste pas possible. Et du coup, il m'a proposé, comme ça, comme un cheveu sur la soupe, il m'a proposé de venir travailler avec lui, me donnant comme argument qu'il aimerait bien faire rentrer une femme dans l'entreprise, qu'il aimerait bien quelqu'un d'un peu créatif. Donc ça rejoignait ma passion de l'histoire de l'art et du dessin. Et que si j'étais d'accord, on ferait un test pendant un an. Donc pas de contrat ni rien. Je suis rentré dans la société. Un 1er avril 1988, donc ça remonte à quelques années et j'y suis toujours. Donc le contrat s'est prolongé sans contrat en fait.

  • Speaker #1

    Donc votre papa a très bien joué parce qu'il ne vous a rien annoncé et finalement vous êtes venu par vous-même.

  • Speaker #0

    Voilà. Voilà, mais on m'aurait dit il y a 35 ans que je serais toujours chez Tissier-Vénière, j'aurais, je pense, beaucoup rire.

  • Speaker #1

    Donc si je peux me permettre une petite synthèse de l'histoire familiale et de l'histoire de l'entreprise en lien avec la famille. Donc aujourd'hui... Vous êtes, vous, membre de la cinquième génération. L'entreprise est née à la fin du XIXe siècle, avec un premier tournant dans le nord de la France, parce que c'est quand même important, vous n'êtes pas originaire de la Mayenne. Vous êtes arrivé en Mayenne, et vous êtes arrivé en Mayenne à cause de la Première Guerre mondiale, qui vous a poussé à quitter le nord de la France et à venir vous implanter dans l'ouest.

  • Speaker #0

    Comme toutes les usines, d'ailleurs, toutes les entreprises textiles, les restantes TDV. et notre voisin est également originaire du Nord, c'est le groupe Poney Lambert. Beaucoup d'entreprises, comme l'entreprise Duchemin qui n'existe plus, ou était également une entreprise du Nord. En fait, les ch'tis ont débarqué dans l'Ouest avec les guerres mondiales.

  • Speaker #1

    Et après, vous avez eu cet incident majeur lié à une grande crue à Laval en 1966, qui... a détruit votre premier métier, puisque votre premier métier, c'était le tissage, et vous a orienté vers l'impression textile. Impulsé aussi par votre papa qui avait découvert ces techniques-là et qui, du coup, voulait l'implanter au niveau de l'entreprise.

  • Speaker #0

    Ça, c'était vraiment une très, très grosse crise, en fait. L'entreprise, s'il n'y avait pas eu ces développements, aurait vraiment fermé ses portes. Je pense qu'ils se sont... C'est les coudes, la ceinture, qui ont décidé qu'on ne pouvait pas lâcher Tissus de Vénère, qui à l'époque était de la troisième et quatrième génération, et qu'il fallait continuer l'histoire. Donc c'est là qu'on voit que... Le côté familial est très important, on ne baisse jamais les bras en fait, on se bat jusqu'au bout.

  • Speaker #1

    Et selon vous, qu'est-ce qui fait la spécificité de l'entreprise familiale ?

  • Speaker #0

    D'abord, elle requiert, je pense, le respect entre les membres de la famille, parce que pour bien travailler ensemble, il faut se respecter, il faut avoir confiance. les uns dans les autres. Mais comme disait papa, travailler en famille, on est condamné à s'entendre. Et la première fois qu'il m'a dit ça, je me suis dit, waouh, c'est rude. Il travaillait avec ses deux frères, mais c'est vrai qu'ils étaient condamnés à s'entendre. Mais ils ont toujours fait les choses très très bien. Et même si de temps en temps, il y avait des petits clashs, comme dans toutes les familles, je pense, en fait, ils ont réussi à mener leur carrière de A à Z en travaillant ensemble. les deux aînés, les deux fils aînés, avec le petit dernier qui a rejoint l'entreprise une dizaine d'années après les autres. Mais en fait, il y avait une belle cohésion. Chacun avait son domaine, il y avait la gestion qui était plus technique, etc. Et ça fonctionnait, ça fonctionnait très très bien. Maintenant, oui, ça demande une bonne dose quand même de confiance, de respect, de communication, d'entraide. Mais une entreprise familiale c'est avant tout un héritage, une transmission de quelque chose qui ne nous appartient pas. On est juste un chaînon de l'aventure. On fait tout ce qu'on peut pour se transmettre avec intelligence.

  • Speaker #1

    Et alors, puisque nous parlons de transmission, est-ce que déjà vous avez imaginé l'après, la génération suivante, sa place et son rôle futur dans l'entreprise ?

  • Speaker #0

    Alors, il y a plein de petits feintes, ça pullule. Donc, je ne parle pas de mes enfants qui, a priori, pour l'instant, ont choisi une voie différente. Donc, c'est très, très bien. parce que je ne les pousserai jamais à venir par obligation chez Tissus La Vénière. Mais il y a plein de petits fins. Donc, je pense que certains sont en train de faire leurs études, d'autres travaillent déjà depuis 4-5 ans ailleurs. Et c'est très bien parce que de toute façon, rejoindre Tissus La Vénière, c'est rejoindre avec une expérience et non pas en sortant tout frais d'une école en disant « je vaux tant et je sais faire ça » parce que ce n'est pas comme ça que ça se passe. Mais oui, il y aura certainement, j'y crois très fermement, je me dis qu'il y aura forcément des jeunes de la sixième génération à rejoindre l'entreprise. Après, il ne faut pas qu'il y en ait cinq. Plus on multiplie le nombre de personnes, plus il y a de personnes et plus c'est compliqué. Mais s'il y a deux ou trois jeunes qui veulent rejoindre l'entreprise, ce serait génial.

  • Speaker #1

    Est-ce que vous diriez que naître au sein d'une famille où il y a une entreprise, Est-ce une chance ?

  • Speaker #0

    Ah ! Oui et non. Oui, parce que si on a cet amour justement de la famille, de la transmission, c'est quand même une très belle aventure. À côté de ça, dans les moments plus difficiles, ça nous pèse très très lourd sur les épaules. On ne pose pas son cartable le soir en rentrant à la maison en disant « j'y repense que demain matin » . Diriger une entreprise familiale, c'est vivre avec 24 heures sur 24. C'est savoir faire des pauses pour ses enfants, pour sa famille. Mais je dirais que c'est un sujet permanent en tête, tant sur le plan RH que sur le plan technique. Financiers, gestion, etc. On peut tomber dedans comme Obélix dans sa potion magique, mais la contrepartie c'est qu'on n'a pas la liberté qu'on pourrait avoir dans un job où on est juste cadre et où au bout de 5 ans on en a assez et on dit « Bon allez, je vais voir ailleurs » . Moi je ne sais pas pourquoi papa m'a choisi moi. J'ai été extrêmement touché et je me sens à devoir moral de ne pas décevoir, même s'il a disparu aujourd'hui. À chaque fois que j'ai un doute, à chaque fois que je me pose une question, je regarde en l'air et je me dis « Papa, qu'auriez-vous fait ? » Voilà, il y a beaucoup de très positifs et quelquefois, c'est un poids. C'est un poids qu'on décide ou non d'assumer. Donc, il faut la négation, la résilience. Et puis, pousser un petit peu le matin en disant, allez ma fille, tu peux y arriver, tu vas y arriver.

  • Speaker #1

    Et si vous deviez définir l'entreprise familiale en un mot ou une expression ?

  • Speaker #0

    Pérennité, je dirais. Respect aussi, c'est quelque chose qui est essentiel, aussi bien vis-à-vis du personnel. On travaille avec une équipe, en fait, où on a eu les mères et les filles, les frères et sœurs, etc., pendant très longtemps. on a eu des équipes, à chaque fois où il y avait deux ou trois membres de la même famille. J'ai connu les mères alors que moi j'étais enfant, quand je sortais de la maison et que je traversais les ateliers pour aller à l'école. Je connais des enfants qui, certains ont mon âge, je connais certains petits-enfants. C'est une histoire de famille, aussi au niveau du personnel en fait. Donc ça c'est assez chouette. Et comme nous sommes une petite entreprise, puisqu'on est 40 maxi, en fait tout le monde se connaît. Et on a vraiment une relation qui n'est pas la relation de bonjour madame la directrice. on ne s'appelle pas nos prénoms on se dit les ch... de temps en temps on hausse le ton dans un sens ou dans l'autre mais on garde un profond respect les uns pour les autres.

  • Speaker #1

    Aujourd'hui, Tissus d'Avenir, mais quelle est cette entreprise ? Que proposez-vous aujourd'hui puisque vous avez traversé le temps, vous avez évolué, vous avez saisi de nouvelles opportunités ? avec des chaussons d'abord, et aujourd'hui d'autres produits. Donc peut-être que vous pouvez nous raconter aujourd'hui où en est l'entreprise et peut-être quels sont aussi ses projets pour demain.

  • Speaker #0

    Dans les années 2000, pour ne pas être à la traîne, on a décidé d'investir dans le développement d'impression numérique qui commençait à avoir le jour. Alors on a beaucoup cherché. Ça a été une période où on s'est un peu arraché les cheveux, mais on ne voulait pas rater cette marche qui nous paraissait à l'époque essentielle et qui est en effet devenue, on a bien fait de persister et d'y croire parce que c'est vraiment devenu un développement. très important. 2010, acquisition de la première grosse machine numérique, suivie d'une deuxième en 2019. Et puis voilà, et là on continue sur notre lancée, on travaille avec des nouvelles familles de colorants, on cherche de nouveaux supports d'impression, enfin voilà. On est toujours en quête de nouveaux parce que la concurrence est rude, que les pays comme l'Inde, de La Chine, la Turquie cherchent même beaucoup à se diversifier. Donc, il faut qu'on garde cette belle image de la primeur haut de gamme, mais avec plein de nouveaux projets. Tissus d'Avenir aujourd'hui, en fait, c'est une société qui crée tissus vraiment haut de gamme. C'est-à-dire qu'un produit qui va sortir de notre société. un prix de 30 euros, va être vendu entre 7 et 8 fois plus cher aux Etats-Unis. Voilà, on a des produits qui arrivent, qui sont vendus au public aux environs de 200 dollars. Donc, voilà, on a vraiment une image, on est un peu, ça va paraître un peu prétentieux, mais on est un peu la haute couture de l'ameublement. On travaille sur des produits exclusifs, donc on travaille un dessin, pour un seul client. Quand je dis on travaille un dessin, soit le client va venir nous voir avec une archive ou un dessin qu'il aura fait travailler par un artiste. Nous, on va faire tout le travail d'étude du dessin avec des devis pour le coût de séparation des couleurs, le prix des cadres, les études coloristiques, le choix des supports, les dimensions du dessin, etc. Soit le client va nous dire les impératifs. elle va nous dire, vous me faites ça comme ça. Et là, on n'est vraiment qu'exécutant. Dans 98% ou 99% des cas, en fait, c'est nous qui proposons des archives qui travaillent en fait avec notre studio sur les modifications apportées au dessin, sur les agrandissements, sur le nombre de couleurs, etc. C'est une très chouette collaboration parce qu'en fait, moi je ne travaille que comme jusqu'à l'année dernière, je m'occupais de tout le commercial étranger et français. Je ne travaillais qu'avec des artistes. Donc là, j'étais vraiment dans mon élément. C'est vraiment ma passion, les couleurs, le dessin, la création. Donc vraiment ça a été 36 ans de grand grand bonheur. Maintenant voilà nos tissus, on est peu d'imprimeurs en Europe à faire cette qualité de tissu puisqu'il ne reste que deux entreprises en France, hors Hermès en fait, mais qui s'est beaucoup spécialisé dans les foulards, l'entreprise Hermès. Il nous reste un imprimeur dans l'Est qui fait des très très jolies choses, on est vraiment sur les mêmes marchés. On a, je dirais, trois gros concurrents en Angleterre et deux gros concurrents en Italie. Les Allemands ont disparu, les Américains ont disparu. En fait, c'est un monde qui rétrécit le monde des imprimeurs. Mais par contre, énormément de développement en Inde, en Turquie, en Chine, etc. Avec encore une qualité moyenne gamme. Attention, attention, ils apprennent très très vite et ils sont très forts, donc il faut toujours être très vigilant.

  • Speaker #1

    Et nous sommes ici en Mayenne, donc on a compris que l'histoire de l'entreprise avait un lien très particulier avec la Mayenne, lié à des événements malheureux au départ, mais finalement heureux en tout cas pour notre territoire. Quel lien l'entreprise a-t-elle aujourd'hui avec la Mayenne, puisque vous avez fait le choix de rester en Mayenne ? En quoi la Mayenne vient-elle apporter peut-être une lumière ou une touche particulière à votre entreprise ?

  • Speaker #0

    D'abord, la Mayenne est un très très beau département. moi je mes parents sont ch'tis mais moi je me sens 100% Mayennaise, pas du tout du Nord, même si je ne renie absolument pas mes racines, mais je suis né dans Mayenne. C'est un département où on se sent bien, c'est un département, un petit département où, une fois de plus, au sein des entreprises, il y a un respect les uns pour les autres, où on se connaît, où on se côtoie. C'est beau la Mayenne en fait, nous on est dans un cadre assez exceptionnel, on a une vieille entreprise qui est classée au patrimoine face à une basilique qui est absolument somptueuse au bord de l'eau. Enfin c'est beau, c'est serein, c'est tout ce que j'aime en fait.

  • Speaker #1

    Il me reste à vous remercier pour ce très bel entretien. Merci pour votre confiance et tout ce que vous avez partagé sur les joies de l'entreprise familiale dans toutes ses dimensions. À très bientôt et merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup pour cet entretien. Et c'était un plaisir de partager cette belle maison, cette vieille dame, cette vieille dame qui est issue d'Avénière.

  • Speaker #1

    Posons la Mayenne, c'est fini pour aujourd'hui. Merci d'avoir écouté cet épisode jusqu'au bout. Vous êtes... Toujours plus nombreux à nous suivre, alors merci. N'hésitez pas à partager, noter, commenter. Ça nous aide beaucoup pour partager ces histoires incroyables. À très bientôt pour un nouvel épisode de Osons la Mayenne. Osons la Mayenne, parcours d'entreprise familiale, un podcast être communication en partenariat avec le MEDEF de la Mayenne, l'association du CEDEF.

Transcription

  • Speaker #0

    Moi je suis tombé dans la soupe, comme Obélix dans sa potion magique, moi je suis né dans le textile. L'histoire est complètement différente, je n'ai jamais envisagé de travailler chez Tissus d'Avenir. Il me semble un devoir moral de ne pas décevoir, même s'il a disparu aujourd'hui. A chaque fois que j'ai un doute, à chaque fois que je me pose une question, je regarde en l'air et je me dis « Papa, que l'auriez-vous fait ? » Mais comme disait papa, travailler en famille, on est condamné à s'entendre.

  • Speaker #1

    Première femme à piloter l'entreprise familiale. Une stature de dirigeante, un tempérament engagé, sous une douceur et une joie de vivre que l'on devine. Nathalie Feint-Cleguine est née avec ses six frères et soeurs dans les jardins de l'usine des tissus d'Avenir. L'odeur des solvants, des colorants, la chaleur des ateliers ont marqué son enfance. Terrain de jeu puis de fête, elle a vu grandir et évoluer l'entreprise. Nathalie rêvait de l'école du Louvre. Elle commence finalement par un BTS assistant de direction et après un appel du pied de son père, elle atterrit finalement il y a 35 ans qu'est Paul Boudet à Laval. Elle nous confie que ce travail non réellement choisi au commencement allie finalement sa passion des arts et celle de l'entreprise familiale. Cette entreprise qui n'aurait jamais dû arriver en Mayenne. En effet, à la fin du XIXe siècle, Constant Feinte, entrepreneur du nord de la France, lance son activité de blanchisserie du lin, puis de tissage. Arrive 1914, l'invasion allemande pousse les ch'tis sur les routes. La famille Feinte arrive en Anjou, puis en Mayenne en 1917. Elle y pose ses valises et son activité industrielle pour ne plus en partir. Excellence française, sens de l'élégance, transmission d'un patrimoine et d'un savoir-faire unique, les tissus d'Avénière, c'est le luxe dans le tissu d'ameublement depuis six générations. Nathalie nous reçoit ce matin au cœur des tissus d'Avénière, face à la basilique du même nom, au pied de la Mayenne. Dans ses murs chargés d'histoire, elle nous transporte dans son univers. où le beau règne en majesté. J'aimerais vous poser une première question. Si vous fermez les yeux et que vous essayez de vous souvenir de votre premier contact avec l'entreprise, quel serait-il ?

  • Speaker #0

    Je suis dernier à l'entreprise, donc en fait, puisque la maison de mes grands-parents était au fond de l'usine, j'ai mon souvenir le plus marquant, c'est celui de mon grand-père. qui était un monsieur que je trouvais très intimidant, qui était costaud, qui était mon grand-père derrière son énorme bureau, sa cigarette à la bouche. Ça, c'est un souvenir. Je ne suis pas tétanisé en en parlant, mais je le trouvais très, très impressionnant. Autre souvenir, les odeurs. Les odeurs, parce que comme nous nous habituons derrière l'entreprise, en fait, il y avait toutes ces odeurs de produits. de blanchiment de produits, quand on flambait les tissus. Donc les odeurs c'est quelque chose qui m'a beaucoup marqué enfant. Et aussi le vieux concierge, Monsieur Valentin, qui a vécu dans l'entreprise jusqu'à sa mort bien après 90 ans. Le telex aussi, le telex. Enfant, le telex c'est quelque chose qui me fascinait. De voir tous ces petits trous dans les bandes de papier, je ne comprenais pas comment on arrivait à dialoguer avec ça. Voilà. Ça, ce sont vraiment mes souvenirs d'enfance. Mais je suis tombé dans la soupe, comme Obélix dans sa concession magique. Moi, je suis né dans le textile, donc c'était quelque chose de très naturel. Le jour où je suis rentré chez Tiffy Lévenière, j'avais encore énormément de choses à découvrir, mais j'avais quand même l'impression d'y être né. Mais oui, des images, j'en ai plein, j'en ai plein, j'en ai plein, de toutes les bêtises qu'on a pu faire enfant. Quand on allait dans les ateliers les dimanches et que nos parents ne nous voyaient pas, et des fêtes qu'on a faites avec nos amis, où on leur faisait visiter l'usine à 3h du matin. Mais bon, voilà, ce sont des lieux du souvenir. C'est vraiment un peu ma Madeleine de Proust, tout ça, de repenser. Et quand je retravaille à certains ateliers, parce que les choses ont quand même terriblement évolué dans les ateliers, mais certains sont restés identiques il y a 50 ou 60 ans. J'ai toujours un petit coup au cœur de revivre ces souvenirs d'enfance.

  • Speaker #1

    Et alors, vous êtes tombé dans la marmite de l'entreprise familiale. Aujourd'hui, vous y travaillez. Est-ce que c'était une évidence dès votre plus jeune âge ou l'histoire est-elle un peu différente ?

  • Speaker #0

    L'histoire est complètement différente. Je n'ai jamais envisagé de travailler chez Tissus d'Avenir, en fait. J'étais passionné d'histoire de l'art et de dessin. Les circonstances ont fait que je suis parti à un moment... Aux États-Unis, où papa m'a envoyé travailler chez un de ses clients, qui était un éditeur, et j'ai travaillé d'abord dans le studio de création, et après j'ai fait tous les services de l'entreprise. Je me demandais pourquoi papa m'avait envoyé aussi précipitamment sans m'en parler, mais il avait tout organisé pour moi. En venant des États-Unis, où au début je souhaitais faire l'école du Louvre, En fait, après avoir travaillé pratiquement un an aux États-Unis, je me suis rendu compte que gagner de l'argent, c'était quand même très sympa et que je ferais mieux de travailler et que l'école du Louvre, je le ferais une fois retraité. Ce qui s'approche, ce qui s'approche. Donc, je finirai peut-être par prendre des cours de l'histoire du Louvre. J'ai donc commencé à travailler d'abord chez Dupont de Nemours. Pas beaucoup d'intérêt pour moi parce que c'était vraiment que de la chimie, de la technique, tout ce que j'ai un petit peu en horreur, je dois dire. ce qui n'était pas du tout dans mes intérêts à l'époque. Et puis un deuxième travail, j'ai été embauché par un cabinet américain de chasseurs de tête, un gros, gros cabinet qui avait besoin d'assistantes parlant bien anglais. Là, c'était une très, très belle expérience, très fatigante parce qu'on avait vraiment un rythme un peu épuisant. On était très gâtés, on était très bien payés, mais à 24 ans, papa estimait que je m'abîmais à la santé, que je ne voyais plus personne, que de travailler jusqu'à 10h ou 11h tous les soirs à 24 ans, c'était juste pas possible. Et du coup, il m'a proposé, comme ça, comme un cheveu sur la soupe, il m'a proposé de venir travailler avec lui, me donnant comme argument qu'il aimerait bien faire rentrer une femme dans l'entreprise, qu'il aimerait bien quelqu'un d'un peu créatif. Donc ça rejoignait ma passion de l'histoire de l'art et du dessin. Et que si j'étais d'accord, on ferait un test pendant un an. Donc pas de contrat ni rien. Je suis rentré dans la société. Un 1er avril 1988, donc ça remonte à quelques années et j'y suis toujours. Donc le contrat s'est prolongé sans contrat en fait.

  • Speaker #1

    Donc votre papa a très bien joué parce qu'il ne vous a rien annoncé et finalement vous êtes venu par vous-même.

  • Speaker #0

    Voilà. Voilà, mais on m'aurait dit il y a 35 ans que je serais toujours chez Tissier-Vénière, j'aurais, je pense, beaucoup rire.

  • Speaker #1

    Donc si je peux me permettre une petite synthèse de l'histoire familiale et de l'histoire de l'entreprise en lien avec la famille. Donc aujourd'hui... Vous êtes, vous, membre de la cinquième génération. L'entreprise est née à la fin du XIXe siècle, avec un premier tournant dans le nord de la France, parce que c'est quand même important, vous n'êtes pas originaire de la Mayenne. Vous êtes arrivé en Mayenne, et vous êtes arrivé en Mayenne à cause de la Première Guerre mondiale, qui vous a poussé à quitter le nord de la France et à venir vous implanter dans l'ouest.

  • Speaker #0

    Comme toutes les usines, d'ailleurs, toutes les entreprises textiles, les restantes TDV. et notre voisin est également originaire du Nord, c'est le groupe Poney Lambert. Beaucoup d'entreprises, comme l'entreprise Duchemin qui n'existe plus, ou était également une entreprise du Nord. En fait, les ch'tis ont débarqué dans l'Ouest avec les guerres mondiales.

  • Speaker #1

    Et après, vous avez eu cet incident majeur lié à une grande crue à Laval en 1966, qui... a détruit votre premier métier, puisque votre premier métier, c'était le tissage, et vous a orienté vers l'impression textile. Impulsé aussi par votre papa qui avait découvert ces techniques-là et qui, du coup, voulait l'implanter au niveau de l'entreprise.

  • Speaker #0

    Ça, c'était vraiment une très, très grosse crise, en fait. L'entreprise, s'il n'y avait pas eu ces développements, aurait vraiment fermé ses portes. Je pense qu'ils se sont... C'est les coudes, la ceinture, qui ont décidé qu'on ne pouvait pas lâcher Tissus de Vénère, qui à l'époque était de la troisième et quatrième génération, et qu'il fallait continuer l'histoire. Donc c'est là qu'on voit que... Le côté familial est très important, on ne baisse jamais les bras en fait, on se bat jusqu'au bout.

  • Speaker #1

    Et selon vous, qu'est-ce qui fait la spécificité de l'entreprise familiale ?

  • Speaker #0

    D'abord, elle requiert, je pense, le respect entre les membres de la famille, parce que pour bien travailler ensemble, il faut se respecter, il faut avoir confiance. les uns dans les autres. Mais comme disait papa, travailler en famille, on est condamné à s'entendre. Et la première fois qu'il m'a dit ça, je me suis dit, waouh, c'est rude. Il travaillait avec ses deux frères, mais c'est vrai qu'ils étaient condamnés à s'entendre. Mais ils ont toujours fait les choses très très bien. Et même si de temps en temps, il y avait des petits clashs, comme dans toutes les familles, je pense, en fait, ils ont réussi à mener leur carrière de A à Z en travaillant ensemble. les deux aînés, les deux fils aînés, avec le petit dernier qui a rejoint l'entreprise une dizaine d'années après les autres. Mais en fait, il y avait une belle cohésion. Chacun avait son domaine, il y avait la gestion qui était plus technique, etc. Et ça fonctionnait, ça fonctionnait très très bien. Maintenant, oui, ça demande une bonne dose quand même de confiance, de respect, de communication, d'entraide. Mais une entreprise familiale c'est avant tout un héritage, une transmission de quelque chose qui ne nous appartient pas. On est juste un chaînon de l'aventure. On fait tout ce qu'on peut pour se transmettre avec intelligence.

  • Speaker #1

    Et alors, puisque nous parlons de transmission, est-ce que déjà vous avez imaginé l'après, la génération suivante, sa place et son rôle futur dans l'entreprise ?

  • Speaker #0

    Alors, il y a plein de petits feintes, ça pullule. Donc, je ne parle pas de mes enfants qui, a priori, pour l'instant, ont choisi une voie différente. Donc, c'est très, très bien. parce que je ne les pousserai jamais à venir par obligation chez Tissus La Vénière. Mais il y a plein de petits fins. Donc, je pense que certains sont en train de faire leurs études, d'autres travaillent déjà depuis 4-5 ans ailleurs. Et c'est très bien parce que de toute façon, rejoindre Tissus La Vénière, c'est rejoindre avec une expérience et non pas en sortant tout frais d'une école en disant « je vaux tant et je sais faire ça » parce que ce n'est pas comme ça que ça se passe. Mais oui, il y aura certainement, j'y crois très fermement, je me dis qu'il y aura forcément des jeunes de la sixième génération à rejoindre l'entreprise. Après, il ne faut pas qu'il y en ait cinq. Plus on multiplie le nombre de personnes, plus il y a de personnes et plus c'est compliqué. Mais s'il y a deux ou trois jeunes qui veulent rejoindre l'entreprise, ce serait génial.

  • Speaker #1

    Est-ce que vous diriez que naître au sein d'une famille où il y a une entreprise, Est-ce une chance ?

  • Speaker #0

    Ah ! Oui et non. Oui, parce que si on a cet amour justement de la famille, de la transmission, c'est quand même une très belle aventure. À côté de ça, dans les moments plus difficiles, ça nous pèse très très lourd sur les épaules. On ne pose pas son cartable le soir en rentrant à la maison en disant « j'y repense que demain matin » . Diriger une entreprise familiale, c'est vivre avec 24 heures sur 24. C'est savoir faire des pauses pour ses enfants, pour sa famille. Mais je dirais que c'est un sujet permanent en tête, tant sur le plan RH que sur le plan technique. Financiers, gestion, etc. On peut tomber dedans comme Obélix dans sa potion magique, mais la contrepartie c'est qu'on n'a pas la liberté qu'on pourrait avoir dans un job où on est juste cadre et où au bout de 5 ans on en a assez et on dit « Bon allez, je vais voir ailleurs » . Moi je ne sais pas pourquoi papa m'a choisi moi. J'ai été extrêmement touché et je me sens à devoir moral de ne pas décevoir, même s'il a disparu aujourd'hui. À chaque fois que j'ai un doute, à chaque fois que je me pose une question, je regarde en l'air et je me dis « Papa, qu'auriez-vous fait ? » Voilà, il y a beaucoup de très positifs et quelquefois, c'est un poids. C'est un poids qu'on décide ou non d'assumer. Donc, il faut la négation, la résilience. Et puis, pousser un petit peu le matin en disant, allez ma fille, tu peux y arriver, tu vas y arriver.

  • Speaker #1

    Et si vous deviez définir l'entreprise familiale en un mot ou une expression ?

  • Speaker #0

    Pérennité, je dirais. Respect aussi, c'est quelque chose qui est essentiel, aussi bien vis-à-vis du personnel. On travaille avec une équipe, en fait, où on a eu les mères et les filles, les frères et sœurs, etc., pendant très longtemps. on a eu des équipes, à chaque fois où il y avait deux ou trois membres de la même famille. J'ai connu les mères alors que moi j'étais enfant, quand je sortais de la maison et que je traversais les ateliers pour aller à l'école. Je connais des enfants qui, certains ont mon âge, je connais certains petits-enfants. C'est une histoire de famille, aussi au niveau du personnel en fait. Donc ça c'est assez chouette. Et comme nous sommes une petite entreprise, puisqu'on est 40 maxi, en fait tout le monde se connaît. Et on a vraiment une relation qui n'est pas la relation de bonjour madame la directrice. on ne s'appelle pas nos prénoms on se dit les ch... de temps en temps on hausse le ton dans un sens ou dans l'autre mais on garde un profond respect les uns pour les autres.

  • Speaker #1

    Aujourd'hui, Tissus d'Avenir, mais quelle est cette entreprise ? Que proposez-vous aujourd'hui puisque vous avez traversé le temps, vous avez évolué, vous avez saisi de nouvelles opportunités ? avec des chaussons d'abord, et aujourd'hui d'autres produits. Donc peut-être que vous pouvez nous raconter aujourd'hui où en est l'entreprise et peut-être quels sont aussi ses projets pour demain.

  • Speaker #0

    Dans les années 2000, pour ne pas être à la traîne, on a décidé d'investir dans le développement d'impression numérique qui commençait à avoir le jour. Alors on a beaucoup cherché. Ça a été une période où on s'est un peu arraché les cheveux, mais on ne voulait pas rater cette marche qui nous paraissait à l'époque essentielle et qui est en effet devenue, on a bien fait de persister et d'y croire parce que c'est vraiment devenu un développement. très important. 2010, acquisition de la première grosse machine numérique, suivie d'une deuxième en 2019. Et puis voilà, et là on continue sur notre lancée, on travaille avec des nouvelles familles de colorants, on cherche de nouveaux supports d'impression, enfin voilà. On est toujours en quête de nouveaux parce que la concurrence est rude, que les pays comme l'Inde, de La Chine, la Turquie cherchent même beaucoup à se diversifier. Donc, il faut qu'on garde cette belle image de la primeur haut de gamme, mais avec plein de nouveaux projets. Tissus d'Avenir aujourd'hui, en fait, c'est une société qui crée tissus vraiment haut de gamme. C'est-à-dire qu'un produit qui va sortir de notre société. un prix de 30 euros, va être vendu entre 7 et 8 fois plus cher aux Etats-Unis. Voilà, on a des produits qui arrivent, qui sont vendus au public aux environs de 200 dollars. Donc, voilà, on a vraiment une image, on est un peu, ça va paraître un peu prétentieux, mais on est un peu la haute couture de l'ameublement. On travaille sur des produits exclusifs, donc on travaille un dessin, pour un seul client. Quand je dis on travaille un dessin, soit le client va venir nous voir avec une archive ou un dessin qu'il aura fait travailler par un artiste. Nous, on va faire tout le travail d'étude du dessin avec des devis pour le coût de séparation des couleurs, le prix des cadres, les études coloristiques, le choix des supports, les dimensions du dessin, etc. Soit le client va nous dire les impératifs. elle va nous dire, vous me faites ça comme ça. Et là, on n'est vraiment qu'exécutant. Dans 98% ou 99% des cas, en fait, c'est nous qui proposons des archives qui travaillent en fait avec notre studio sur les modifications apportées au dessin, sur les agrandissements, sur le nombre de couleurs, etc. C'est une très chouette collaboration parce qu'en fait, moi je ne travaille que comme jusqu'à l'année dernière, je m'occupais de tout le commercial étranger et français. Je ne travaillais qu'avec des artistes. Donc là, j'étais vraiment dans mon élément. C'est vraiment ma passion, les couleurs, le dessin, la création. Donc vraiment ça a été 36 ans de grand grand bonheur. Maintenant voilà nos tissus, on est peu d'imprimeurs en Europe à faire cette qualité de tissu puisqu'il ne reste que deux entreprises en France, hors Hermès en fait, mais qui s'est beaucoup spécialisé dans les foulards, l'entreprise Hermès. Il nous reste un imprimeur dans l'Est qui fait des très très jolies choses, on est vraiment sur les mêmes marchés. On a, je dirais, trois gros concurrents en Angleterre et deux gros concurrents en Italie. Les Allemands ont disparu, les Américains ont disparu. En fait, c'est un monde qui rétrécit le monde des imprimeurs. Mais par contre, énormément de développement en Inde, en Turquie, en Chine, etc. Avec encore une qualité moyenne gamme. Attention, attention, ils apprennent très très vite et ils sont très forts, donc il faut toujours être très vigilant.

  • Speaker #1

    Et nous sommes ici en Mayenne, donc on a compris que l'histoire de l'entreprise avait un lien très particulier avec la Mayenne, lié à des événements malheureux au départ, mais finalement heureux en tout cas pour notre territoire. Quel lien l'entreprise a-t-elle aujourd'hui avec la Mayenne, puisque vous avez fait le choix de rester en Mayenne ? En quoi la Mayenne vient-elle apporter peut-être une lumière ou une touche particulière à votre entreprise ?

  • Speaker #0

    D'abord, la Mayenne est un très très beau département. moi je mes parents sont ch'tis mais moi je me sens 100% Mayennaise, pas du tout du Nord, même si je ne renie absolument pas mes racines, mais je suis né dans Mayenne. C'est un département où on se sent bien, c'est un département, un petit département où, une fois de plus, au sein des entreprises, il y a un respect les uns pour les autres, où on se connaît, où on se côtoie. C'est beau la Mayenne en fait, nous on est dans un cadre assez exceptionnel, on a une vieille entreprise qui est classée au patrimoine face à une basilique qui est absolument somptueuse au bord de l'eau. Enfin c'est beau, c'est serein, c'est tout ce que j'aime en fait.

  • Speaker #1

    Il me reste à vous remercier pour ce très bel entretien. Merci pour votre confiance et tout ce que vous avez partagé sur les joies de l'entreprise familiale dans toutes ses dimensions. À très bientôt et merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup pour cet entretien. Et c'était un plaisir de partager cette belle maison, cette vieille dame, cette vieille dame qui est issue d'Avénière.

  • Speaker #1

    Posons la Mayenne, c'est fini pour aujourd'hui. Merci d'avoir écouté cet épisode jusqu'au bout. Vous êtes... Toujours plus nombreux à nous suivre, alors merci. N'hésitez pas à partager, noter, commenter. Ça nous aide beaucoup pour partager ces histoires incroyables. À très bientôt pour un nouvel épisode de Osons la Mayenne. Osons la Mayenne, parcours d'entreprise familiale, un podcast être communication en partenariat avec le MEDEF de la Mayenne, l'association du CEDEF.

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Transcription

  • Speaker #0

    Moi je suis tombé dans la soupe, comme Obélix dans sa potion magique, moi je suis né dans le textile. L'histoire est complètement différente, je n'ai jamais envisagé de travailler chez Tissus d'Avenir. Il me semble un devoir moral de ne pas décevoir, même s'il a disparu aujourd'hui. A chaque fois que j'ai un doute, à chaque fois que je me pose une question, je regarde en l'air et je me dis « Papa, que l'auriez-vous fait ? » Mais comme disait papa, travailler en famille, on est condamné à s'entendre.

  • Speaker #1

    Première femme à piloter l'entreprise familiale. Une stature de dirigeante, un tempérament engagé, sous une douceur et une joie de vivre que l'on devine. Nathalie Feint-Cleguine est née avec ses six frères et soeurs dans les jardins de l'usine des tissus d'Avenir. L'odeur des solvants, des colorants, la chaleur des ateliers ont marqué son enfance. Terrain de jeu puis de fête, elle a vu grandir et évoluer l'entreprise. Nathalie rêvait de l'école du Louvre. Elle commence finalement par un BTS assistant de direction et après un appel du pied de son père, elle atterrit finalement il y a 35 ans qu'est Paul Boudet à Laval. Elle nous confie que ce travail non réellement choisi au commencement allie finalement sa passion des arts et celle de l'entreprise familiale. Cette entreprise qui n'aurait jamais dû arriver en Mayenne. En effet, à la fin du XIXe siècle, Constant Feinte, entrepreneur du nord de la France, lance son activité de blanchisserie du lin, puis de tissage. Arrive 1914, l'invasion allemande pousse les ch'tis sur les routes. La famille Feinte arrive en Anjou, puis en Mayenne en 1917. Elle y pose ses valises et son activité industrielle pour ne plus en partir. Excellence française, sens de l'élégance, transmission d'un patrimoine et d'un savoir-faire unique, les tissus d'Avénière, c'est le luxe dans le tissu d'ameublement depuis six générations. Nathalie nous reçoit ce matin au cœur des tissus d'Avénière, face à la basilique du même nom, au pied de la Mayenne. Dans ses murs chargés d'histoire, elle nous transporte dans son univers. où le beau règne en majesté. J'aimerais vous poser une première question. Si vous fermez les yeux et que vous essayez de vous souvenir de votre premier contact avec l'entreprise, quel serait-il ?

  • Speaker #0

    Je suis dernier à l'entreprise, donc en fait, puisque la maison de mes grands-parents était au fond de l'usine, j'ai mon souvenir le plus marquant, c'est celui de mon grand-père. qui était un monsieur que je trouvais très intimidant, qui était costaud, qui était mon grand-père derrière son énorme bureau, sa cigarette à la bouche. Ça, c'est un souvenir. Je ne suis pas tétanisé en en parlant, mais je le trouvais très, très impressionnant. Autre souvenir, les odeurs. Les odeurs, parce que comme nous nous habituons derrière l'entreprise, en fait, il y avait toutes ces odeurs de produits. de blanchiment de produits, quand on flambait les tissus. Donc les odeurs c'est quelque chose qui m'a beaucoup marqué enfant. Et aussi le vieux concierge, Monsieur Valentin, qui a vécu dans l'entreprise jusqu'à sa mort bien après 90 ans. Le telex aussi, le telex. Enfant, le telex c'est quelque chose qui me fascinait. De voir tous ces petits trous dans les bandes de papier, je ne comprenais pas comment on arrivait à dialoguer avec ça. Voilà. Ça, ce sont vraiment mes souvenirs d'enfance. Mais je suis tombé dans la soupe, comme Obélix dans sa concession magique. Moi, je suis né dans le textile, donc c'était quelque chose de très naturel. Le jour où je suis rentré chez Tiffy Lévenière, j'avais encore énormément de choses à découvrir, mais j'avais quand même l'impression d'y être né. Mais oui, des images, j'en ai plein, j'en ai plein, j'en ai plein, de toutes les bêtises qu'on a pu faire enfant. Quand on allait dans les ateliers les dimanches et que nos parents ne nous voyaient pas, et des fêtes qu'on a faites avec nos amis, où on leur faisait visiter l'usine à 3h du matin. Mais bon, voilà, ce sont des lieux du souvenir. C'est vraiment un peu ma Madeleine de Proust, tout ça, de repenser. Et quand je retravaille à certains ateliers, parce que les choses ont quand même terriblement évolué dans les ateliers, mais certains sont restés identiques il y a 50 ou 60 ans. J'ai toujours un petit coup au cœur de revivre ces souvenirs d'enfance.

  • Speaker #1

    Et alors, vous êtes tombé dans la marmite de l'entreprise familiale. Aujourd'hui, vous y travaillez. Est-ce que c'était une évidence dès votre plus jeune âge ou l'histoire est-elle un peu différente ?

  • Speaker #0

    L'histoire est complètement différente. Je n'ai jamais envisagé de travailler chez Tissus d'Avenir, en fait. J'étais passionné d'histoire de l'art et de dessin. Les circonstances ont fait que je suis parti à un moment... Aux États-Unis, où papa m'a envoyé travailler chez un de ses clients, qui était un éditeur, et j'ai travaillé d'abord dans le studio de création, et après j'ai fait tous les services de l'entreprise. Je me demandais pourquoi papa m'avait envoyé aussi précipitamment sans m'en parler, mais il avait tout organisé pour moi. En venant des États-Unis, où au début je souhaitais faire l'école du Louvre, En fait, après avoir travaillé pratiquement un an aux États-Unis, je me suis rendu compte que gagner de l'argent, c'était quand même très sympa et que je ferais mieux de travailler et que l'école du Louvre, je le ferais une fois retraité. Ce qui s'approche, ce qui s'approche. Donc, je finirai peut-être par prendre des cours de l'histoire du Louvre. J'ai donc commencé à travailler d'abord chez Dupont de Nemours. Pas beaucoup d'intérêt pour moi parce que c'était vraiment que de la chimie, de la technique, tout ce que j'ai un petit peu en horreur, je dois dire. ce qui n'était pas du tout dans mes intérêts à l'époque. Et puis un deuxième travail, j'ai été embauché par un cabinet américain de chasseurs de tête, un gros, gros cabinet qui avait besoin d'assistantes parlant bien anglais. Là, c'était une très, très belle expérience, très fatigante parce qu'on avait vraiment un rythme un peu épuisant. On était très gâtés, on était très bien payés, mais à 24 ans, papa estimait que je m'abîmais à la santé, que je ne voyais plus personne, que de travailler jusqu'à 10h ou 11h tous les soirs à 24 ans, c'était juste pas possible. Et du coup, il m'a proposé, comme ça, comme un cheveu sur la soupe, il m'a proposé de venir travailler avec lui, me donnant comme argument qu'il aimerait bien faire rentrer une femme dans l'entreprise, qu'il aimerait bien quelqu'un d'un peu créatif. Donc ça rejoignait ma passion de l'histoire de l'art et du dessin. Et que si j'étais d'accord, on ferait un test pendant un an. Donc pas de contrat ni rien. Je suis rentré dans la société. Un 1er avril 1988, donc ça remonte à quelques années et j'y suis toujours. Donc le contrat s'est prolongé sans contrat en fait.

  • Speaker #1

    Donc votre papa a très bien joué parce qu'il ne vous a rien annoncé et finalement vous êtes venu par vous-même.

  • Speaker #0

    Voilà. Voilà, mais on m'aurait dit il y a 35 ans que je serais toujours chez Tissier-Vénière, j'aurais, je pense, beaucoup rire.

  • Speaker #1

    Donc si je peux me permettre une petite synthèse de l'histoire familiale et de l'histoire de l'entreprise en lien avec la famille. Donc aujourd'hui... Vous êtes, vous, membre de la cinquième génération. L'entreprise est née à la fin du XIXe siècle, avec un premier tournant dans le nord de la France, parce que c'est quand même important, vous n'êtes pas originaire de la Mayenne. Vous êtes arrivé en Mayenne, et vous êtes arrivé en Mayenne à cause de la Première Guerre mondiale, qui vous a poussé à quitter le nord de la France et à venir vous implanter dans l'ouest.

  • Speaker #0

    Comme toutes les usines, d'ailleurs, toutes les entreprises textiles, les restantes TDV. et notre voisin est également originaire du Nord, c'est le groupe Poney Lambert. Beaucoup d'entreprises, comme l'entreprise Duchemin qui n'existe plus, ou était également une entreprise du Nord. En fait, les ch'tis ont débarqué dans l'Ouest avec les guerres mondiales.

  • Speaker #1

    Et après, vous avez eu cet incident majeur lié à une grande crue à Laval en 1966, qui... a détruit votre premier métier, puisque votre premier métier, c'était le tissage, et vous a orienté vers l'impression textile. Impulsé aussi par votre papa qui avait découvert ces techniques-là et qui, du coup, voulait l'implanter au niveau de l'entreprise.

  • Speaker #0

    Ça, c'était vraiment une très, très grosse crise, en fait. L'entreprise, s'il n'y avait pas eu ces développements, aurait vraiment fermé ses portes. Je pense qu'ils se sont... C'est les coudes, la ceinture, qui ont décidé qu'on ne pouvait pas lâcher Tissus de Vénère, qui à l'époque était de la troisième et quatrième génération, et qu'il fallait continuer l'histoire. Donc c'est là qu'on voit que... Le côté familial est très important, on ne baisse jamais les bras en fait, on se bat jusqu'au bout.

  • Speaker #1

    Et selon vous, qu'est-ce qui fait la spécificité de l'entreprise familiale ?

  • Speaker #0

    D'abord, elle requiert, je pense, le respect entre les membres de la famille, parce que pour bien travailler ensemble, il faut se respecter, il faut avoir confiance. les uns dans les autres. Mais comme disait papa, travailler en famille, on est condamné à s'entendre. Et la première fois qu'il m'a dit ça, je me suis dit, waouh, c'est rude. Il travaillait avec ses deux frères, mais c'est vrai qu'ils étaient condamnés à s'entendre. Mais ils ont toujours fait les choses très très bien. Et même si de temps en temps, il y avait des petits clashs, comme dans toutes les familles, je pense, en fait, ils ont réussi à mener leur carrière de A à Z en travaillant ensemble. les deux aînés, les deux fils aînés, avec le petit dernier qui a rejoint l'entreprise une dizaine d'années après les autres. Mais en fait, il y avait une belle cohésion. Chacun avait son domaine, il y avait la gestion qui était plus technique, etc. Et ça fonctionnait, ça fonctionnait très très bien. Maintenant, oui, ça demande une bonne dose quand même de confiance, de respect, de communication, d'entraide. Mais une entreprise familiale c'est avant tout un héritage, une transmission de quelque chose qui ne nous appartient pas. On est juste un chaînon de l'aventure. On fait tout ce qu'on peut pour se transmettre avec intelligence.

  • Speaker #1

    Et alors, puisque nous parlons de transmission, est-ce que déjà vous avez imaginé l'après, la génération suivante, sa place et son rôle futur dans l'entreprise ?

  • Speaker #0

    Alors, il y a plein de petits feintes, ça pullule. Donc, je ne parle pas de mes enfants qui, a priori, pour l'instant, ont choisi une voie différente. Donc, c'est très, très bien. parce que je ne les pousserai jamais à venir par obligation chez Tissus La Vénière. Mais il y a plein de petits fins. Donc, je pense que certains sont en train de faire leurs études, d'autres travaillent déjà depuis 4-5 ans ailleurs. Et c'est très bien parce que de toute façon, rejoindre Tissus La Vénière, c'est rejoindre avec une expérience et non pas en sortant tout frais d'une école en disant « je vaux tant et je sais faire ça » parce que ce n'est pas comme ça que ça se passe. Mais oui, il y aura certainement, j'y crois très fermement, je me dis qu'il y aura forcément des jeunes de la sixième génération à rejoindre l'entreprise. Après, il ne faut pas qu'il y en ait cinq. Plus on multiplie le nombre de personnes, plus il y a de personnes et plus c'est compliqué. Mais s'il y a deux ou trois jeunes qui veulent rejoindre l'entreprise, ce serait génial.

  • Speaker #1

    Est-ce que vous diriez que naître au sein d'une famille où il y a une entreprise, Est-ce une chance ?

  • Speaker #0

    Ah ! Oui et non. Oui, parce que si on a cet amour justement de la famille, de la transmission, c'est quand même une très belle aventure. À côté de ça, dans les moments plus difficiles, ça nous pèse très très lourd sur les épaules. On ne pose pas son cartable le soir en rentrant à la maison en disant « j'y repense que demain matin » . Diriger une entreprise familiale, c'est vivre avec 24 heures sur 24. C'est savoir faire des pauses pour ses enfants, pour sa famille. Mais je dirais que c'est un sujet permanent en tête, tant sur le plan RH que sur le plan technique. Financiers, gestion, etc. On peut tomber dedans comme Obélix dans sa potion magique, mais la contrepartie c'est qu'on n'a pas la liberté qu'on pourrait avoir dans un job où on est juste cadre et où au bout de 5 ans on en a assez et on dit « Bon allez, je vais voir ailleurs » . Moi je ne sais pas pourquoi papa m'a choisi moi. J'ai été extrêmement touché et je me sens à devoir moral de ne pas décevoir, même s'il a disparu aujourd'hui. À chaque fois que j'ai un doute, à chaque fois que je me pose une question, je regarde en l'air et je me dis « Papa, qu'auriez-vous fait ? » Voilà, il y a beaucoup de très positifs et quelquefois, c'est un poids. C'est un poids qu'on décide ou non d'assumer. Donc, il faut la négation, la résilience. Et puis, pousser un petit peu le matin en disant, allez ma fille, tu peux y arriver, tu vas y arriver.

  • Speaker #1

    Et si vous deviez définir l'entreprise familiale en un mot ou une expression ?

  • Speaker #0

    Pérennité, je dirais. Respect aussi, c'est quelque chose qui est essentiel, aussi bien vis-à-vis du personnel. On travaille avec une équipe, en fait, où on a eu les mères et les filles, les frères et sœurs, etc., pendant très longtemps. on a eu des équipes, à chaque fois où il y avait deux ou trois membres de la même famille. J'ai connu les mères alors que moi j'étais enfant, quand je sortais de la maison et que je traversais les ateliers pour aller à l'école. Je connais des enfants qui, certains ont mon âge, je connais certains petits-enfants. C'est une histoire de famille, aussi au niveau du personnel en fait. Donc ça c'est assez chouette. Et comme nous sommes une petite entreprise, puisqu'on est 40 maxi, en fait tout le monde se connaît. Et on a vraiment une relation qui n'est pas la relation de bonjour madame la directrice. on ne s'appelle pas nos prénoms on se dit les ch... de temps en temps on hausse le ton dans un sens ou dans l'autre mais on garde un profond respect les uns pour les autres.

  • Speaker #1

    Aujourd'hui, Tissus d'Avenir, mais quelle est cette entreprise ? Que proposez-vous aujourd'hui puisque vous avez traversé le temps, vous avez évolué, vous avez saisi de nouvelles opportunités ? avec des chaussons d'abord, et aujourd'hui d'autres produits. Donc peut-être que vous pouvez nous raconter aujourd'hui où en est l'entreprise et peut-être quels sont aussi ses projets pour demain.

  • Speaker #0

    Dans les années 2000, pour ne pas être à la traîne, on a décidé d'investir dans le développement d'impression numérique qui commençait à avoir le jour. Alors on a beaucoup cherché. Ça a été une période où on s'est un peu arraché les cheveux, mais on ne voulait pas rater cette marche qui nous paraissait à l'époque essentielle et qui est en effet devenue, on a bien fait de persister et d'y croire parce que c'est vraiment devenu un développement. très important. 2010, acquisition de la première grosse machine numérique, suivie d'une deuxième en 2019. Et puis voilà, et là on continue sur notre lancée, on travaille avec des nouvelles familles de colorants, on cherche de nouveaux supports d'impression, enfin voilà. On est toujours en quête de nouveaux parce que la concurrence est rude, que les pays comme l'Inde, de La Chine, la Turquie cherchent même beaucoup à se diversifier. Donc, il faut qu'on garde cette belle image de la primeur haut de gamme, mais avec plein de nouveaux projets. Tissus d'Avenir aujourd'hui, en fait, c'est une société qui crée tissus vraiment haut de gamme. C'est-à-dire qu'un produit qui va sortir de notre société. un prix de 30 euros, va être vendu entre 7 et 8 fois plus cher aux Etats-Unis. Voilà, on a des produits qui arrivent, qui sont vendus au public aux environs de 200 dollars. Donc, voilà, on a vraiment une image, on est un peu, ça va paraître un peu prétentieux, mais on est un peu la haute couture de l'ameublement. On travaille sur des produits exclusifs, donc on travaille un dessin, pour un seul client. Quand je dis on travaille un dessin, soit le client va venir nous voir avec une archive ou un dessin qu'il aura fait travailler par un artiste. Nous, on va faire tout le travail d'étude du dessin avec des devis pour le coût de séparation des couleurs, le prix des cadres, les études coloristiques, le choix des supports, les dimensions du dessin, etc. Soit le client va nous dire les impératifs. elle va nous dire, vous me faites ça comme ça. Et là, on n'est vraiment qu'exécutant. Dans 98% ou 99% des cas, en fait, c'est nous qui proposons des archives qui travaillent en fait avec notre studio sur les modifications apportées au dessin, sur les agrandissements, sur le nombre de couleurs, etc. C'est une très chouette collaboration parce qu'en fait, moi je ne travaille que comme jusqu'à l'année dernière, je m'occupais de tout le commercial étranger et français. Je ne travaillais qu'avec des artistes. Donc là, j'étais vraiment dans mon élément. C'est vraiment ma passion, les couleurs, le dessin, la création. Donc vraiment ça a été 36 ans de grand grand bonheur. Maintenant voilà nos tissus, on est peu d'imprimeurs en Europe à faire cette qualité de tissu puisqu'il ne reste que deux entreprises en France, hors Hermès en fait, mais qui s'est beaucoup spécialisé dans les foulards, l'entreprise Hermès. Il nous reste un imprimeur dans l'Est qui fait des très très jolies choses, on est vraiment sur les mêmes marchés. On a, je dirais, trois gros concurrents en Angleterre et deux gros concurrents en Italie. Les Allemands ont disparu, les Américains ont disparu. En fait, c'est un monde qui rétrécit le monde des imprimeurs. Mais par contre, énormément de développement en Inde, en Turquie, en Chine, etc. Avec encore une qualité moyenne gamme. Attention, attention, ils apprennent très très vite et ils sont très forts, donc il faut toujours être très vigilant.

  • Speaker #1

    Et nous sommes ici en Mayenne, donc on a compris que l'histoire de l'entreprise avait un lien très particulier avec la Mayenne, lié à des événements malheureux au départ, mais finalement heureux en tout cas pour notre territoire. Quel lien l'entreprise a-t-elle aujourd'hui avec la Mayenne, puisque vous avez fait le choix de rester en Mayenne ? En quoi la Mayenne vient-elle apporter peut-être une lumière ou une touche particulière à votre entreprise ?

  • Speaker #0

    D'abord, la Mayenne est un très très beau département. moi je mes parents sont ch'tis mais moi je me sens 100% Mayennaise, pas du tout du Nord, même si je ne renie absolument pas mes racines, mais je suis né dans Mayenne. C'est un département où on se sent bien, c'est un département, un petit département où, une fois de plus, au sein des entreprises, il y a un respect les uns pour les autres, où on se connaît, où on se côtoie. C'est beau la Mayenne en fait, nous on est dans un cadre assez exceptionnel, on a une vieille entreprise qui est classée au patrimoine face à une basilique qui est absolument somptueuse au bord de l'eau. Enfin c'est beau, c'est serein, c'est tout ce que j'aime en fait.

  • Speaker #1

    Il me reste à vous remercier pour ce très bel entretien. Merci pour votre confiance et tout ce que vous avez partagé sur les joies de l'entreprise familiale dans toutes ses dimensions. À très bientôt et merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup pour cet entretien. Et c'était un plaisir de partager cette belle maison, cette vieille dame, cette vieille dame qui est issue d'Avénière.

  • Speaker #1

    Posons la Mayenne, c'est fini pour aujourd'hui. Merci d'avoir écouté cet épisode jusqu'au bout. Vous êtes... Toujours plus nombreux à nous suivre, alors merci. N'hésitez pas à partager, noter, commenter. Ça nous aide beaucoup pour partager ces histoires incroyables. À très bientôt pour un nouvel épisode de Osons la Mayenne. Osons la Mayenne, parcours d'entreprise familiale, un podcast être communication en partenariat avec le MEDEF de la Mayenne, l'association du CEDEF.

Transcription

  • Speaker #0

    Moi je suis tombé dans la soupe, comme Obélix dans sa potion magique, moi je suis né dans le textile. L'histoire est complètement différente, je n'ai jamais envisagé de travailler chez Tissus d'Avenir. Il me semble un devoir moral de ne pas décevoir, même s'il a disparu aujourd'hui. A chaque fois que j'ai un doute, à chaque fois que je me pose une question, je regarde en l'air et je me dis « Papa, que l'auriez-vous fait ? » Mais comme disait papa, travailler en famille, on est condamné à s'entendre.

  • Speaker #1

    Première femme à piloter l'entreprise familiale. Une stature de dirigeante, un tempérament engagé, sous une douceur et une joie de vivre que l'on devine. Nathalie Feint-Cleguine est née avec ses six frères et soeurs dans les jardins de l'usine des tissus d'Avenir. L'odeur des solvants, des colorants, la chaleur des ateliers ont marqué son enfance. Terrain de jeu puis de fête, elle a vu grandir et évoluer l'entreprise. Nathalie rêvait de l'école du Louvre. Elle commence finalement par un BTS assistant de direction et après un appel du pied de son père, elle atterrit finalement il y a 35 ans qu'est Paul Boudet à Laval. Elle nous confie que ce travail non réellement choisi au commencement allie finalement sa passion des arts et celle de l'entreprise familiale. Cette entreprise qui n'aurait jamais dû arriver en Mayenne. En effet, à la fin du XIXe siècle, Constant Feinte, entrepreneur du nord de la France, lance son activité de blanchisserie du lin, puis de tissage. Arrive 1914, l'invasion allemande pousse les ch'tis sur les routes. La famille Feinte arrive en Anjou, puis en Mayenne en 1917. Elle y pose ses valises et son activité industrielle pour ne plus en partir. Excellence française, sens de l'élégance, transmission d'un patrimoine et d'un savoir-faire unique, les tissus d'Avénière, c'est le luxe dans le tissu d'ameublement depuis six générations. Nathalie nous reçoit ce matin au cœur des tissus d'Avénière, face à la basilique du même nom, au pied de la Mayenne. Dans ses murs chargés d'histoire, elle nous transporte dans son univers. où le beau règne en majesté. J'aimerais vous poser une première question. Si vous fermez les yeux et que vous essayez de vous souvenir de votre premier contact avec l'entreprise, quel serait-il ?

  • Speaker #0

    Je suis dernier à l'entreprise, donc en fait, puisque la maison de mes grands-parents était au fond de l'usine, j'ai mon souvenir le plus marquant, c'est celui de mon grand-père. qui était un monsieur que je trouvais très intimidant, qui était costaud, qui était mon grand-père derrière son énorme bureau, sa cigarette à la bouche. Ça, c'est un souvenir. Je ne suis pas tétanisé en en parlant, mais je le trouvais très, très impressionnant. Autre souvenir, les odeurs. Les odeurs, parce que comme nous nous habituons derrière l'entreprise, en fait, il y avait toutes ces odeurs de produits. de blanchiment de produits, quand on flambait les tissus. Donc les odeurs c'est quelque chose qui m'a beaucoup marqué enfant. Et aussi le vieux concierge, Monsieur Valentin, qui a vécu dans l'entreprise jusqu'à sa mort bien après 90 ans. Le telex aussi, le telex. Enfant, le telex c'est quelque chose qui me fascinait. De voir tous ces petits trous dans les bandes de papier, je ne comprenais pas comment on arrivait à dialoguer avec ça. Voilà. Ça, ce sont vraiment mes souvenirs d'enfance. Mais je suis tombé dans la soupe, comme Obélix dans sa concession magique. Moi, je suis né dans le textile, donc c'était quelque chose de très naturel. Le jour où je suis rentré chez Tiffy Lévenière, j'avais encore énormément de choses à découvrir, mais j'avais quand même l'impression d'y être né. Mais oui, des images, j'en ai plein, j'en ai plein, j'en ai plein, de toutes les bêtises qu'on a pu faire enfant. Quand on allait dans les ateliers les dimanches et que nos parents ne nous voyaient pas, et des fêtes qu'on a faites avec nos amis, où on leur faisait visiter l'usine à 3h du matin. Mais bon, voilà, ce sont des lieux du souvenir. C'est vraiment un peu ma Madeleine de Proust, tout ça, de repenser. Et quand je retravaille à certains ateliers, parce que les choses ont quand même terriblement évolué dans les ateliers, mais certains sont restés identiques il y a 50 ou 60 ans. J'ai toujours un petit coup au cœur de revivre ces souvenirs d'enfance.

  • Speaker #1

    Et alors, vous êtes tombé dans la marmite de l'entreprise familiale. Aujourd'hui, vous y travaillez. Est-ce que c'était une évidence dès votre plus jeune âge ou l'histoire est-elle un peu différente ?

  • Speaker #0

    L'histoire est complètement différente. Je n'ai jamais envisagé de travailler chez Tissus d'Avenir, en fait. J'étais passionné d'histoire de l'art et de dessin. Les circonstances ont fait que je suis parti à un moment... Aux États-Unis, où papa m'a envoyé travailler chez un de ses clients, qui était un éditeur, et j'ai travaillé d'abord dans le studio de création, et après j'ai fait tous les services de l'entreprise. Je me demandais pourquoi papa m'avait envoyé aussi précipitamment sans m'en parler, mais il avait tout organisé pour moi. En venant des États-Unis, où au début je souhaitais faire l'école du Louvre, En fait, après avoir travaillé pratiquement un an aux États-Unis, je me suis rendu compte que gagner de l'argent, c'était quand même très sympa et que je ferais mieux de travailler et que l'école du Louvre, je le ferais une fois retraité. Ce qui s'approche, ce qui s'approche. Donc, je finirai peut-être par prendre des cours de l'histoire du Louvre. J'ai donc commencé à travailler d'abord chez Dupont de Nemours. Pas beaucoup d'intérêt pour moi parce que c'était vraiment que de la chimie, de la technique, tout ce que j'ai un petit peu en horreur, je dois dire. ce qui n'était pas du tout dans mes intérêts à l'époque. Et puis un deuxième travail, j'ai été embauché par un cabinet américain de chasseurs de tête, un gros, gros cabinet qui avait besoin d'assistantes parlant bien anglais. Là, c'était une très, très belle expérience, très fatigante parce qu'on avait vraiment un rythme un peu épuisant. On était très gâtés, on était très bien payés, mais à 24 ans, papa estimait que je m'abîmais à la santé, que je ne voyais plus personne, que de travailler jusqu'à 10h ou 11h tous les soirs à 24 ans, c'était juste pas possible. Et du coup, il m'a proposé, comme ça, comme un cheveu sur la soupe, il m'a proposé de venir travailler avec lui, me donnant comme argument qu'il aimerait bien faire rentrer une femme dans l'entreprise, qu'il aimerait bien quelqu'un d'un peu créatif. Donc ça rejoignait ma passion de l'histoire de l'art et du dessin. Et que si j'étais d'accord, on ferait un test pendant un an. Donc pas de contrat ni rien. Je suis rentré dans la société. Un 1er avril 1988, donc ça remonte à quelques années et j'y suis toujours. Donc le contrat s'est prolongé sans contrat en fait.

  • Speaker #1

    Donc votre papa a très bien joué parce qu'il ne vous a rien annoncé et finalement vous êtes venu par vous-même.

  • Speaker #0

    Voilà. Voilà, mais on m'aurait dit il y a 35 ans que je serais toujours chez Tissier-Vénière, j'aurais, je pense, beaucoup rire.

  • Speaker #1

    Donc si je peux me permettre une petite synthèse de l'histoire familiale et de l'histoire de l'entreprise en lien avec la famille. Donc aujourd'hui... Vous êtes, vous, membre de la cinquième génération. L'entreprise est née à la fin du XIXe siècle, avec un premier tournant dans le nord de la France, parce que c'est quand même important, vous n'êtes pas originaire de la Mayenne. Vous êtes arrivé en Mayenne, et vous êtes arrivé en Mayenne à cause de la Première Guerre mondiale, qui vous a poussé à quitter le nord de la France et à venir vous implanter dans l'ouest.

  • Speaker #0

    Comme toutes les usines, d'ailleurs, toutes les entreprises textiles, les restantes TDV. et notre voisin est également originaire du Nord, c'est le groupe Poney Lambert. Beaucoup d'entreprises, comme l'entreprise Duchemin qui n'existe plus, ou était également une entreprise du Nord. En fait, les ch'tis ont débarqué dans l'Ouest avec les guerres mondiales.

  • Speaker #1

    Et après, vous avez eu cet incident majeur lié à une grande crue à Laval en 1966, qui... a détruit votre premier métier, puisque votre premier métier, c'était le tissage, et vous a orienté vers l'impression textile. Impulsé aussi par votre papa qui avait découvert ces techniques-là et qui, du coup, voulait l'implanter au niveau de l'entreprise.

  • Speaker #0

    Ça, c'était vraiment une très, très grosse crise, en fait. L'entreprise, s'il n'y avait pas eu ces développements, aurait vraiment fermé ses portes. Je pense qu'ils se sont... C'est les coudes, la ceinture, qui ont décidé qu'on ne pouvait pas lâcher Tissus de Vénère, qui à l'époque était de la troisième et quatrième génération, et qu'il fallait continuer l'histoire. Donc c'est là qu'on voit que... Le côté familial est très important, on ne baisse jamais les bras en fait, on se bat jusqu'au bout.

  • Speaker #1

    Et selon vous, qu'est-ce qui fait la spécificité de l'entreprise familiale ?

  • Speaker #0

    D'abord, elle requiert, je pense, le respect entre les membres de la famille, parce que pour bien travailler ensemble, il faut se respecter, il faut avoir confiance. les uns dans les autres. Mais comme disait papa, travailler en famille, on est condamné à s'entendre. Et la première fois qu'il m'a dit ça, je me suis dit, waouh, c'est rude. Il travaillait avec ses deux frères, mais c'est vrai qu'ils étaient condamnés à s'entendre. Mais ils ont toujours fait les choses très très bien. Et même si de temps en temps, il y avait des petits clashs, comme dans toutes les familles, je pense, en fait, ils ont réussi à mener leur carrière de A à Z en travaillant ensemble. les deux aînés, les deux fils aînés, avec le petit dernier qui a rejoint l'entreprise une dizaine d'années après les autres. Mais en fait, il y avait une belle cohésion. Chacun avait son domaine, il y avait la gestion qui était plus technique, etc. Et ça fonctionnait, ça fonctionnait très très bien. Maintenant, oui, ça demande une bonne dose quand même de confiance, de respect, de communication, d'entraide. Mais une entreprise familiale c'est avant tout un héritage, une transmission de quelque chose qui ne nous appartient pas. On est juste un chaînon de l'aventure. On fait tout ce qu'on peut pour se transmettre avec intelligence.

  • Speaker #1

    Et alors, puisque nous parlons de transmission, est-ce que déjà vous avez imaginé l'après, la génération suivante, sa place et son rôle futur dans l'entreprise ?

  • Speaker #0

    Alors, il y a plein de petits feintes, ça pullule. Donc, je ne parle pas de mes enfants qui, a priori, pour l'instant, ont choisi une voie différente. Donc, c'est très, très bien. parce que je ne les pousserai jamais à venir par obligation chez Tissus La Vénière. Mais il y a plein de petits fins. Donc, je pense que certains sont en train de faire leurs études, d'autres travaillent déjà depuis 4-5 ans ailleurs. Et c'est très bien parce que de toute façon, rejoindre Tissus La Vénière, c'est rejoindre avec une expérience et non pas en sortant tout frais d'une école en disant « je vaux tant et je sais faire ça » parce que ce n'est pas comme ça que ça se passe. Mais oui, il y aura certainement, j'y crois très fermement, je me dis qu'il y aura forcément des jeunes de la sixième génération à rejoindre l'entreprise. Après, il ne faut pas qu'il y en ait cinq. Plus on multiplie le nombre de personnes, plus il y a de personnes et plus c'est compliqué. Mais s'il y a deux ou trois jeunes qui veulent rejoindre l'entreprise, ce serait génial.

  • Speaker #1

    Est-ce que vous diriez que naître au sein d'une famille où il y a une entreprise, Est-ce une chance ?

  • Speaker #0

    Ah ! Oui et non. Oui, parce que si on a cet amour justement de la famille, de la transmission, c'est quand même une très belle aventure. À côté de ça, dans les moments plus difficiles, ça nous pèse très très lourd sur les épaules. On ne pose pas son cartable le soir en rentrant à la maison en disant « j'y repense que demain matin » . Diriger une entreprise familiale, c'est vivre avec 24 heures sur 24. C'est savoir faire des pauses pour ses enfants, pour sa famille. Mais je dirais que c'est un sujet permanent en tête, tant sur le plan RH que sur le plan technique. Financiers, gestion, etc. On peut tomber dedans comme Obélix dans sa potion magique, mais la contrepartie c'est qu'on n'a pas la liberté qu'on pourrait avoir dans un job où on est juste cadre et où au bout de 5 ans on en a assez et on dit « Bon allez, je vais voir ailleurs » . Moi je ne sais pas pourquoi papa m'a choisi moi. J'ai été extrêmement touché et je me sens à devoir moral de ne pas décevoir, même s'il a disparu aujourd'hui. À chaque fois que j'ai un doute, à chaque fois que je me pose une question, je regarde en l'air et je me dis « Papa, qu'auriez-vous fait ? » Voilà, il y a beaucoup de très positifs et quelquefois, c'est un poids. C'est un poids qu'on décide ou non d'assumer. Donc, il faut la négation, la résilience. Et puis, pousser un petit peu le matin en disant, allez ma fille, tu peux y arriver, tu vas y arriver.

  • Speaker #1

    Et si vous deviez définir l'entreprise familiale en un mot ou une expression ?

  • Speaker #0

    Pérennité, je dirais. Respect aussi, c'est quelque chose qui est essentiel, aussi bien vis-à-vis du personnel. On travaille avec une équipe, en fait, où on a eu les mères et les filles, les frères et sœurs, etc., pendant très longtemps. on a eu des équipes, à chaque fois où il y avait deux ou trois membres de la même famille. J'ai connu les mères alors que moi j'étais enfant, quand je sortais de la maison et que je traversais les ateliers pour aller à l'école. Je connais des enfants qui, certains ont mon âge, je connais certains petits-enfants. C'est une histoire de famille, aussi au niveau du personnel en fait. Donc ça c'est assez chouette. Et comme nous sommes une petite entreprise, puisqu'on est 40 maxi, en fait tout le monde se connaît. Et on a vraiment une relation qui n'est pas la relation de bonjour madame la directrice. on ne s'appelle pas nos prénoms on se dit les ch... de temps en temps on hausse le ton dans un sens ou dans l'autre mais on garde un profond respect les uns pour les autres.

  • Speaker #1

    Aujourd'hui, Tissus d'Avenir, mais quelle est cette entreprise ? Que proposez-vous aujourd'hui puisque vous avez traversé le temps, vous avez évolué, vous avez saisi de nouvelles opportunités ? avec des chaussons d'abord, et aujourd'hui d'autres produits. Donc peut-être que vous pouvez nous raconter aujourd'hui où en est l'entreprise et peut-être quels sont aussi ses projets pour demain.

  • Speaker #0

    Dans les années 2000, pour ne pas être à la traîne, on a décidé d'investir dans le développement d'impression numérique qui commençait à avoir le jour. Alors on a beaucoup cherché. Ça a été une période où on s'est un peu arraché les cheveux, mais on ne voulait pas rater cette marche qui nous paraissait à l'époque essentielle et qui est en effet devenue, on a bien fait de persister et d'y croire parce que c'est vraiment devenu un développement. très important. 2010, acquisition de la première grosse machine numérique, suivie d'une deuxième en 2019. Et puis voilà, et là on continue sur notre lancée, on travaille avec des nouvelles familles de colorants, on cherche de nouveaux supports d'impression, enfin voilà. On est toujours en quête de nouveaux parce que la concurrence est rude, que les pays comme l'Inde, de La Chine, la Turquie cherchent même beaucoup à se diversifier. Donc, il faut qu'on garde cette belle image de la primeur haut de gamme, mais avec plein de nouveaux projets. Tissus d'Avenir aujourd'hui, en fait, c'est une société qui crée tissus vraiment haut de gamme. C'est-à-dire qu'un produit qui va sortir de notre société. un prix de 30 euros, va être vendu entre 7 et 8 fois plus cher aux Etats-Unis. Voilà, on a des produits qui arrivent, qui sont vendus au public aux environs de 200 dollars. Donc, voilà, on a vraiment une image, on est un peu, ça va paraître un peu prétentieux, mais on est un peu la haute couture de l'ameublement. On travaille sur des produits exclusifs, donc on travaille un dessin, pour un seul client. Quand je dis on travaille un dessin, soit le client va venir nous voir avec une archive ou un dessin qu'il aura fait travailler par un artiste. Nous, on va faire tout le travail d'étude du dessin avec des devis pour le coût de séparation des couleurs, le prix des cadres, les études coloristiques, le choix des supports, les dimensions du dessin, etc. Soit le client va nous dire les impératifs. elle va nous dire, vous me faites ça comme ça. Et là, on n'est vraiment qu'exécutant. Dans 98% ou 99% des cas, en fait, c'est nous qui proposons des archives qui travaillent en fait avec notre studio sur les modifications apportées au dessin, sur les agrandissements, sur le nombre de couleurs, etc. C'est une très chouette collaboration parce qu'en fait, moi je ne travaille que comme jusqu'à l'année dernière, je m'occupais de tout le commercial étranger et français. Je ne travaillais qu'avec des artistes. Donc là, j'étais vraiment dans mon élément. C'est vraiment ma passion, les couleurs, le dessin, la création. Donc vraiment ça a été 36 ans de grand grand bonheur. Maintenant voilà nos tissus, on est peu d'imprimeurs en Europe à faire cette qualité de tissu puisqu'il ne reste que deux entreprises en France, hors Hermès en fait, mais qui s'est beaucoup spécialisé dans les foulards, l'entreprise Hermès. Il nous reste un imprimeur dans l'Est qui fait des très très jolies choses, on est vraiment sur les mêmes marchés. On a, je dirais, trois gros concurrents en Angleterre et deux gros concurrents en Italie. Les Allemands ont disparu, les Américains ont disparu. En fait, c'est un monde qui rétrécit le monde des imprimeurs. Mais par contre, énormément de développement en Inde, en Turquie, en Chine, etc. Avec encore une qualité moyenne gamme. Attention, attention, ils apprennent très très vite et ils sont très forts, donc il faut toujours être très vigilant.

  • Speaker #1

    Et nous sommes ici en Mayenne, donc on a compris que l'histoire de l'entreprise avait un lien très particulier avec la Mayenne, lié à des événements malheureux au départ, mais finalement heureux en tout cas pour notre territoire. Quel lien l'entreprise a-t-elle aujourd'hui avec la Mayenne, puisque vous avez fait le choix de rester en Mayenne ? En quoi la Mayenne vient-elle apporter peut-être une lumière ou une touche particulière à votre entreprise ?

  • Speaker #0

    D'abord, la Mayenne est un très très beau département. moi je mes parents sont ch'tis mais moi je me sens 100% Mayennaise, pas du tout du Nord, même si je ne renie absolument pas mes racines, mais je suis né dans Mayenne. C'est un département où on se sent bien, c'est un département, un petit département où, une fois de plus, au sein des entreprises, il y a un respect les uns pour les autres, où on se connaît, où on se côtoie. C'est beau la Mayenne en fait, nous on est dans un cadre assez exceptionnel, on a une vieille entreprise qui est classée au patrimoine face à une basilique qui est absolument somptueuse au bord de l'eau. Enfin c'est beau, c'est serein, c'est tout ce que j'aime en fait.

  • Speaker #1

    Il me reste à vous remercier pour ce très bel entretien. Merci pour votre confiance et tout ce que vous avez partagé sur les joies de l'entreprise familiale dans toutes ses dimensions. À très bientôt et merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup pour cet entretien. Et c'était un plaisir de partager cette belle maison, cette vieille dame, cette vieille dame qui est issue d'Avénière.

  • Speaker #1

    Posons la Mayenne, c'est fini pour aujourd'hui. Merci d'avoir écouté cet épisode jusqu'au bout. Vous êtes... Toujours plus nombreux à nous suivre, alors merci. N'hésitez pas à partager, noter, commenter. Ça nous aide beaucoup pour partager ces histoires incroyables. À très bientôt pour un nouvel épisode de Osons la Mayenne. Osons la Mayenne, parcours d'entreprise familiale, un podcast être communication en partenariat avec le MEDEF de la Mayenne, l'association du CEDEF.

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