Speaker #0Je m'appelle Alexandre, j'ai 22 ans et je suis étudiant en master de traduction. J'ai eu mon diagnostic de psoriasis en 2020. J'avais à l'époque du coup 20 ans. Les premiers symptômes du psoriasis sont arrivés en septembre 2020. Au début, c'était quelques plaques disséminées sur le corps. Bon, j'y prêtais pas forcément trop attention. Ça me paraissait assez bénin, donc je me suis dit que ça allait simplement partir dans les jours prochains. Mais bon... La suite a confirmé que ça n'allait pas se passer comme ça. Étant donné que les plaques ne partent pas, je décide d'aller voir un médecin généraliste pour essayer de voir un petit peu ce que j'ai. Mon médecin regarde mon corps, regarde mes plaques, et il en conclut que ce serait un champignon qui ferait des symptômes de plaques sur le corps. Pour contrer ça, il me prescrit un antifongique que je dois mettre sur mon corps avant d'aller à la douche et bien faire mousser sur les plaques. J'ai essayé ce traitement pendant deux semaines. Malheureusement, ça n'a pas trop fonctionné sur mes plaques, donc j'ai décidé après d'aller voir un dermatologue. Je discute un petit peu avec lui, effectivement ça fait du bien de voir quelqu'un qui est vraiment spécialisé dans le domaine des maladies de la peau. Et il m'explique en fait que mes plaques sur le corps, ce serait ce qu'on appelle du psoriasis. Ma première réaction à l'écoute de ce diagnostic-là, j'avoue que je ne connais pas du tout cette maladie. Le psoriasis, on ne m'en a jamais parlé, donc je ne sais pas trop à quoi m'attendre. Je suis quelqu'un d'assez curieux, donc de nature, je vais poser des questions. J'apprends que c'est une maladie inflammatoire et surtout, c'est une maladie chronique. Pareil, un terme que je ne connaissais pas forcément trop à l'époque, mais que le dermatologue m'a expliqué. Ce que je ressens quand le dermatologue pose son diagnostic, c'est... Je dirais un petit peu de la peur et de l'inquiétude face à cette maladie dont je ne connais rien, qui est sur mon corps et qui prend de plus en plus de place et dont je ne comprends pas le mécanisme. Le premier facteur qui m'inquiète encore plus, c'est le fait que cette maladie soit une maladie chronique, donc incurable. Tout de suite, on fait face un petit peu à la réalité, dans le sens où il faut que j'accepte dès à présent que maintenant je ne suis plus Alexandre, je suis Alexandre avec le psoriasis. et ça va me suivre toute ma vie, il faut que je vive avec. Donc c'est assez compliqué au début. C'est après ce diagnostic-là que j'en ai discuté avec ma famille et du coup mon père m'a dit qu'effectivement, lui aussi il avait du psoriasis, mais pas à ce stade-là, en quelque sorte. Vraiment la gravité n'était pas du tout la même comparée à ce que j'ai moi là actuellement. Malheureusement, à cette époque-là, je n'ai pas vraiment eu le réflexe d'aller voir sur Internet pour trouver des associations de patients sur le psoriasis. Je ne pensais pas que la maladie était aussi répandue et qu'il existait des associations de patients à ce sujet-là. Je me suis rendu compte qu'il y avait quand même une très grande communauté aux diurnes du psoriasis, dont beaucoup d'associations, pour nous aider. En fait, plus on apprend sur cette maladie, et plus c'est facile de vivre avec, en quelque sorte. Plops en riasis, c'est vrai qu'au début, on se dit que c'est des petites plaques qui vont partir avec le temps, comme des boutons de moustique, ça gratte, ça part la semaine qui suit. Mais le psoriasis, c'est plus une maladie qui va nous consumer petit à petit. On va se lever tous les matins, voir dans le miroir, les plaques sont toujours là, comment ça se fait, pourquoi ? Je ne comprends pas, ça fait deux semaines que j'en ai, mais elles sont toujours là. Donc c'est un poids psychologique assez conséquent. C'est assez étrange en fait au début. Quand on sort de la douche et on regarde son reflet dans le miroir, On voit en fait un corps avec des plaques rouges, on ne se reconnaît même plus tellement dans notre corps. C'est comme si je voyais quelqu'un d'autre dans le miroir, ou je voyais quelqu'un que je ne voulais pas vraiment voir. Pour faire face au psoriasis, il a fallu que j'adapte certaines choses dans ma vie. Je pense notamment au shampoing, les savons liquides, c'est plus possible. Moi je suis passé au savon solide du coup, c'est quelque chose que m'a conseillé mon dermatologue. c'est plus sain pour la peau. Ensuite, j'ai dû également adapter mon alimentation. Manger gras, etc., ça favorise grandement les poussées, donc il faut que je fasse attention à tout ça. Et surtout, une chose qui m'a un petit peu née plus, en quelque sorte, c'est les expositions soleil, parce que c'est quelque chose que je n'aime pas du tout. Je ne suis pas très friand du soleil. Et les UV ont un effet bénéfique sur les plaques, et donc j'ai dû me forcer à m'exposer au soleil. La première année... Le psoriasis a aussi une influence sur ma façon de m'habiller. Étant donné que les plaques étaient vraiment sur tout mon corps, j'ai essayé au maximum de cacher ces plaques-là. Donc j'étais toujours avec un pantalon et un t-shirt manche longue ou au moins un manteau pour cacher si j'avais un t-shirt manche courte. Tant que je pouvais cacher mes plaques, j'étais content. Il a fallu que j'adapte aussi mon rythme de vie. Il a fallu que je trouve du temps pour aller faire mes multiples rendez-vous chez Endermato. A chaque fois, il faut expliquer pourquoi on est absent, donc à mes stages ou pendant mes études, c'était toujours des choses que je devais justifier. Le psoriasis apporte également beaucoup de stress, en tout cas, moi, il m'a beaucoup stressé. Et c'est un cercle vicieux dans le sens où plus on stresse, plus on a du psoriasis, plus on a du psoriasis, plus on stresse. Et ensuite, on arrive à une période d'examen, alors là, le stress explose, les plaques explosent, et le stress explose encore plus. C'est un cercle vicieux. Le psoriasis a beaucoup impacté ma vie sentimentale. C'est une maladie très visible sur le corps. On ne peut pas la rater. Donc les personnes vont forcément finir par le voir ou le remarquer. Je me sentais toujours assez obligé dans un sens de l'annoncer à mes conjoints. Un petit peu penser à un coming out. Il faut, voilà... Dire à la personne, je t'annonce que j'ai du psoriasis, j'ai des plaques sur le corps, ne t'en fais pas, ce n'est pas contagieux. Donc c'était toujours un petit peu une sorte de coming out où il a fallu que j'explique tout à mes conjoints, leur expliquer que ce n'était pas contagieux, que ce n'était pas dangereux, que c'était simplement une maladie qui était visible sur ma peau, mais en aucun cas dangereux pour nous deux. Malgré tout, ça m'a toujours tenu à cœur de bien expliquer aux personnes qui m'entourent cette maladie et le fait que je l'ai. Tout simplement parce que ça permet aussi de faire connaître la maladie et de respecter la personne qui est en face de moi. Je n'ai pas envie que l'autre personne pense que je la mets en danger, non pas du tout. Je préfère mettre les choses au clair pour que l'autre personne n'ait pas peur de moi et pour ne pas que ça devienne un sujet tabou. Les premiers traitements que je vais recevoir pour traiter mon psoriasis, c'est d'abord des crèmes à base de cortisone. C'est assez embêtant, on va dire, à appliquer, dans le sens où moi j'ai des plaques sur tout le corps. Donc c'est vrai que pour aller chercher les plaques qui sont dans mon dos, vraiment sur l'homoplate, on la voit dans le miroir quand je me tourne et j'essaie de me contentionner dans tous les sens, mais il n'y a pas moyen, je n'arrive pas à l'attraper. Sachant qu'après, la crème, il ne faut pas l'étaler tout de suite. Moi, j'ai vite remarqué qu'en laissant ma crème sur les plaques, ça fonctionnait mieux. Donc c'est vrai que parfois, ça m'arrivait de rester debout pendant trois heures avec la crème sur le corps. Au quotidien, c'est quand même assez contraignant. Le deuxième traitement que j'ai reçu, c'est la puvatherapie. En fait, c'est des cabines à UV qui sont projetées sur le corps. Et ça apaise les plaques, mais c'est vrai que ça reste un soulagement à court terme. Dans le traitement du psoriasis, ce qui est assez compliqué à vivre, c'est un petit peu les hauts et les bas de la maladie. Parfois, on va avoir des tonnes de plaques sur le corps et d'autres moments où on va en avoir très peu, ou même plus du tout, donc on va être vraiment très heureux. Et puis d'un coup, on voit une plaque qui apparaît, deux, et on se dit Ah mince, ça recommence, c'est pas vrai donc c'est très éprouvant. Il y a des moments assez désespérants dans cette maladie. Quand les plaques reviennent, c'est toujours un mauvais moment à passer. Personnellement, j'ai vraiment décidé de me battre contre cette maladie. Il fallait que je me batte, il fallait que je sois plus fort mentalement. En aucun cas, je laisserai cette maladie dicter ma vie. Avec ces traitements-là, mon psoriasis s'est stabilisé. Jusqu'à 2022, où j'ai eu vraiment le pire épisode de ma vie à cause du psoriasis. Ça s'est passé en mars 2022. Je suis allé faire une soirée avec des amis dans un bar. Il y avait pas mal de fumée et on a pas mal bu, pas mal chanté aussi, donc on a pas mal forcé sur la voix. Le lendemain matin, je me réveille avec un mal de gorge à cause de la soirée d'hier et j'ai découvert en soulevant la couette un stade de la maladie que j'avais jamais atteint jusqu'à maintenant. J'ai découvert vraiment mon corps recouvert de plaques rouges vives et surtout une nouvelle sensation qui ne m'était jamais arrivée jusqu'à maintenant, c'était une sensation de démangeaison. Je cherche des rendez-vous chez les dermatos, lorsque les plaques me démangent, je vois qu'elles commencent à se multiplier, à un stade où vraiment je n'avais jamais vu ça. Malheureusement, je n'arrive pas à trouver de rendez-vous chez les dermatos, donc les démangeaisons empirent. Je n'arrive pas à satisfaire la sensation de démangeaison, je me gratte et ça continue à me gratter pendant que je me gratte. J'ai beau faire tout ce que je peux, Je peux mettre du froid dessus, des crèmes hydratantes, rien n'y fait. Je perds complètement la tête à force de me gratter. J'en arrive à bout de force. J'étais tellement désespéré que j'ai décidé d'essayer d'autres traitements. Des traitements qu'on m'avait donnés pour d'autres stades du psoriasis que j'avais avant. Ce n'était vraiment pas une bonne idée. Ça a vraiment aggravé les démangeaisons. Pour essayer de calmer les démangeaisons, je pars prendre une douche. J'essaye l'eau froide, l'eau chaude, mais ça ne fonctionne pas. Je continue à me gratter et là, je commence à me sentir partir. Elle est tombée dans les pommes, donc je prends mon téléphone et j'appelle une amie pour qu'elle m'emmène à l'hôpital de taux d'urgence. À l'examen de mon corps, donc des plaques, le médecin m'a demandé en fait directement si j'avais une angine ou mal à la gorge. Et effectivement, c'était le cas. Il a tout de suite fait le lien entre ces deux maladies-là, étant donné que l'angine empire drastiquement les plaques de psoriasis. Après cette crise, c'est grâce à un nouveau type de traitement, la balnéothérapie, que j'ai réussi à retrouver un équilibre. Mais malheureusement, ce n'était que temporaire. J'ai passé un test pour évaluer le degré de sévérité de ma maladie avec mon dermatologue. Ce test a permis de montrer à quel point cette maladie impactait mon quotidien et mon rythme de vie. J'étais en train de développer une dépression grave et c'est grâce à ça que j'ai pu avoir accès au traitement systémique. J'ai commencé à prendre des immunosuppresseurs, un traitement qui fonctionne pour beaucoup de personnes souffrant de cette maladie, du psoriasis. Malheureusement pour moi ça n'a pas fonctionné, mon stade est beaucoup trop avancé. Aujourd'hui, je suis un nouveau type de traitement. Ce sont les biothérapies. Ça peut faire un petit peu peur parce que c'est par injection. C'est vrai qu'au début, j'étais assez effrayé par la méthode. Mais au final, c'est assez simple. C'est simplement un stylo injecteur avec un bouton. On a simplement à le positionner sur la peau et après, on appuie sur le bouton. Et l'injection se fait toute seule et c'est sans douleur. C'est assez simple à faire. Les biothérapies, ça a été pour moi un nouveau départ. Maintenant, c'est vrai que je ne suis plus du tout au même stade de la maladie. Mes plaques ont drastiquement diminué. J'ai encore quelques tâches, mais ce n'est pas si dérangeant que ça. On peut dire que j'ai vraiment commencé une deuxième vie. Cette fois-ci, ce n'est plus Alexandre avec du psoriasis, mais Alexandre avec un petit peu de psoriasis. J'ai toujours quelques petites plaques, enfin quelques petites marques, on va dire, sur le corps. Mais elles sont plus si gênantes que ça, surtout que maintenant, je me suis forgé un mental par rapport à cette maladie-là. Et je sais comment ne pas rentrer en dépression à cause de ça. Donc je suis devenu beaucoup plus fort. Malgré le fait que mon psoriasis soit un psoriasis sévère, c'est vrai que maintenant, je le vis beaucoup mieux grâce à ce traitement-là. Je ne pensais pas forcément que c'était possible, mais c'est vrai qu'aujourd'hui, je me sens beaucoup plus libre vis-à-vis de mon corps. Je me sens beaucoup plus sûr de moi. Maintenant, je peux enfin vivre ma vie, enlever mon t-shirt si j'en ai envie, porter des shorts. Voilà, c'est quelque chose que j'ai retrouvé et qui m'a pas mal manqué. Ce que j'aimerais dire aux autres personnes atteintes de psoriasis, c'est vraiment qu'ils ne sont pas seuls. On n'est pas seul face à cette maladie. Il y a toute une communauté qui s'est formée autour du psoriasis, notamment à cause de ses effets néfastes sur le mental. C'est vrai que le psoriasis m'en a fait pas mal baver. J'ai beaucoup pleuré, j'ai fait pas mal de dépressions par rapport à ça. Je me dégoûtais forcément en me regardant dans le miroir. Malgré tout, le psoriasis Il m'a permis de devenir la personne que je suis aujourd'hui. Je suis devenu quelqu'un de plus fort, de plus mature. C'est une maladie qui a tendance à nous isoler, mais il ne faut surtout pas s'enfermer là-dedans, il faut lui tenir tête et en parler le plus possible autour de nous, aller voir d'autres personnes qui sont dans la même situation. Il faut surtout ne pas perdre confiance en soi.