Speaker #0On peut se dire, mais qu'est-ce qui se serait passé si Variane Frey n'avait rien fait ? S'il ne s'était pas occupé de réfugiés, peut-être que la culture européenne aurait disparu. Bienvenue dans Passard d'Histoire, le podcast de la mémoire. Variane par Jean-Michel, s'engager pour sauver. Je m'appelle Jean-Michel Guiraud. Je suis né en Algérie en fait en 1942. C'était le 24 novembre. J'ai aucun souvenir parce que j'ai quitté l'Algérie, j'avais 3 ans. Je vais vous parler de Varian Fry, un personnage qui a occupé une partie de ma vie. Quand j'étais étudiant, je ne savais pas trop ce que je voulais faire, comme beaucoup d'aujourd'hui d'ailleurs. J'aimais beaucoup la philosophie, donc je suis venu à Paris comme étudiant. Et puis la philo, c'était un peu pénible pour moi parce que ce que je n'aimais pas trop en philo, c'était la psychiatrie et tout ça. J'avais 20 ans, j'ai laissé tomber la philo, je suis rentré à Marseille et j'avais mes copains là-bas. Donc j'ai dit, je vais faire de l'histoire. et alors là j'ai eu de la chance parce que j'ai eu je crois une équipe de profs incroyables. J'ai eu Émile Témime, qui était alors un Méditerranéen convaincu, qui a laissé sa trace à Marseille. Il a relayé le professeur Pierre Guiral, qui a été celui qui a dirigé ma maîtrise. Alors au début, Guiral me dit, il faudrait faire un truc sur le XIXe siècle à Marseille, les débuts du petit Provençal. Monsieur Guiral, je vous aime bien, mais vous ne pourriez pas me donner un autre sujet ? Elle me dit « Ah ben, c'est vrai que quand j'étais à Marseille pendant la guerre, je me rappelle qu'il y avait beaucoup d'écrivains, d'artistes qui passaient à Marseille. Vous ne pourriez pas faire une maîtrise là-dessus ? » Je lui dis « Oui, alors j'ai fait ma maîtrise. J'ai retrouvé la trace de tous ces gens, sauf celle de Marianne Frey. » Et il y avait tous les fils qui étaient tissés. J'avais rencontré Ballard, qui dirigeait les cahiers du Sud, qui avait reçu des surréalistes. J'avais rencontré un tas de gens. J'ai voulu continuer. Moi, ce qui m'intéressait, c'était de rencontrer les survivants et tout ça. Alors au départ, j'en avais rencontré à Marseille, mais je croyais que ça allait s'arrêter là, mais pas du tout. Là, j'ai retrouvé la trace de Varianne Fry, qui n'est pas du tout connue en France. Ma thèse est publiée pour la première fois dans les années 80 par le Centre de Documentation Pédagogique. Un exemplaire est parti aux États-Unis, est arrivé sur le bureau d'Anette Fry, la deuxième femme de Varianne Fry. Elle m'écrit en disant, il faut que vous veniez à Washington, il faut que vous soyez conseiller historique de la première exposition de Varian Fry. Je suis allé à Washington. Et là, j'ai rencontré tous les survivants du comité de Varian Fry. J'ai rencontré Hélène Bénédicte. Elle avait été internée dans un camp allemand, parce qu'elle était juive. Elle m'a impressionné beaucoup. Et un jour, elle me dit, Jean-Michel, vous ne voulez pas filmer mon interview sur les camps de concentration ? je dis... Si vous voulez, alors je l'ai filmé. Elle a raconté son histoire et c'est incroyable parce que tout ça, ça a créé un contexte qui fait que je me suis vraiment intéressé à l'histoire de Varian Fry parce que j'ai pensé que si on oubliait de parler des camps de concentration, de tous les dangers qu'ils ont courus, on pourrait penser que l'histoire de Varian Fry c'est un roman sur lequel on peut s'amuser, on peut rire, etc. Quelques temps plus tard, on me demande d'être le concepteur de l'exposition Varian Fry, la première exposition en France qui s'est faite au conseil départemental des Bouches-du-Rhône. Après, j'ai rencontré d'autres personnes, dont des réfugiés, notamment Walter Meyerhoff, qui était le fils d'un prix Nobel. On a une association américaine qui s'appelle Varian Fry Institute Project. Cette association faisait un travail pédagogique intéressant aux États-Unis. En 1999, début 2000, je crée l'association Freyme et Rove vient à Marseille. On essaie de rencontrer des gens un peu motivés pour nous aider, pour relancer l'association. C'était assez rigolo parce qu'on se demandait où on allait avec notre histoire. En 2000, on a sollicité les collectivités territoriales pour qu'il y ait une plaque qui soit placée devant le consulat des États-Unis. En fait, ce n'est pas moi qui ai voulu m'occuper de Warren Fry. J'ai été inspiré par cette histoire et j'y suis toujours encore. Varian Fry est né en 1907. Quand on cherche un peu ses origines, on s'aperçoit que c'est un enfant d'une classe moyenne. Il est né à New York, Varian Fry. Son père était courtier à Wall Street. Sa mère, on en parle très peu. Et lui, il aimait beaucoup aller dans la nature. Il s'est passionné pour l'ornithologie. Il a gardé ça, d'ailleurs, dans sa tête toute sa vie. Au niveau de ses études, Varian Fry était un élève peu discipliné, intelligent mais peu discipliné. Il aimait bien s'amuser, chahuter un peu même. Il s'est intéressé d'abord à la littérature. C'est intéressant aussi pour comprendre l'histoire de Varian Fry, qu'il ait voulu sauver des intellectuels, des artistes. Il était passionné de littérature et donc il a fait ses études à l'université de Harvard. Et ensuite, il a voulu faire... des études plus approfondies, une thèse, etc., en sciences politiques. Et là, il a travaillé à la Columbia University. Il est entré dans la vie active en tant que journaliste. Très rapidement, il a dirigé des journaux, dont The Living Age, un journal politique. Et surtout, il a dirigé une collection d'ouvrages de politique étrangère. Il a publié lui-même ses propres études politiques. Il a publié un livre avant les accords de Munich où il est férocement anti-municois, où il essaie d'expliquer que si on a perdu la guerre, c'est parce qu'on avait été trop tendres avec les nazis. Et il a publié un deuxième ouvrage qui est intéressant aussi, parce que c'est un ouvrage sur la guerre civile en Chine au moment de la montée du communisme, avec Mao Tse-tung et Chiang Kai-shek aussi. Ça montre que déjà, il avait une orientation politique... bien déterminé, il était libéral au sens américain du terme, parce qu'on comprend pas toujours, c'est déjà une certaine position un peu à gauche quand même, ce qui permet de mieux comprendre et d'expliquer son comportement par la suite. Marseille en 1940, c'est l'illusion d'une liberté si on peut dire, parce qu'en fait La mer est là, on voit la mer, donc on a l'impression qu'on va pouvoir partir. Il y a des bateaux, on entend les sirènes des navires. Donc, pour beaucoup de réfugiés, Marseille, c'était l'illusion de la possibilité d'un départ vers l'étranger. Alors, par la suite, c'est sûr que prendre la fuite, surtout après la guerre, ça a été beaucoup critiqué. Et ça, c'est essentiel pour comprendre la mentalité des réfugiés. Il y a tellement de clandestins qu'on ne sait plus combien il y en a de réfugiés à Marseille. L'attraction de la Côte d'Azur a joué énormément, puisque beaucoup d'Allemands se sont réfugiés à Sanary. L'écrivain allemand Marcud disait que Sanary était la première capitale culturelle allemande, c'est-à-dire où il n'y avait que des réfugiés allemands. Et énormément de réfugiés se sont retrouvés à Sanary. Et on les retrouve après aussi à Marseille en 1940. Voilà le contexte qui prépare un peu l'arrivée de Varian Fry. À Marseille. En 1940, il a écrit un livre qui s'appelle « Surrender aux demandes » , c'est-à-dire « Livrer sur demande mot à mot » , qui a paru d'ailleurs aux éditions Plon sous un autre titre, « La liste noire » d'abord, en traduction française. Il a paru en 1945 aux États-Unis et à New York. C'est intéressant de lire ce livre parce que d'abord, c'est vrai, il raconte la véritable histoire de Varian Frye. Il se raconte lui-même. Mais le problème, c'est que Varian Frye se met en scène comme s'il écrivait un roman policier. Alors là où on peut vraiment le comprendre, c'est quand on compare les documents et aussi les récits. Varian Fry est envoyé à Marseille par l'Emergency Rescue Committee avec une liste de 200 noms qui ont été établis par des organismes américains. Et c'est le comité de secours d'urgence qui a... désigner Varian Fry comme envoyé spécial en France pour étudier simplement la situation des réfugiés. Alors, qu'est-ce qu'il a fait ? Il prend un hydravion qui a décollé de New York pour Lisbonne. Il prend le train, il traverse Portugal, il s'arrête à Madrid. Et à Madrid, il rencontre le consul anglais qui lui dit « Puisque vous allez aider des réfugiés, vous ne pourriez pas aider tous ces soldats anglais qui sont restés bloqués en France, surtout après Dunkerque ? » Varian Fry accepte la mission. d'aider des soldats britanniques qui sont réfugiés sur le sol français, et beaucoup sont à Marseille d'ailleurs. Il va les aider, et d'après ce qu'il a écrit, il en a aidé 300, à quitter la France et à retourner en Angleterre. C'est en plus de sa mission. Et c'est intéressant de voir que ça ne s'est pas limité aussi aux réfugiés allemands. Quand il arrive à Marseille, il s'installe finalement à l'hôtel Splendide. Il a sa chambre au quatrième étage et là, il installe ses bureaux. C'est là que ça devient tragique, comique, parce qu'on est à la fois dans un contexte extrêmement tragique et en même temps qui est amusant parce qu'on voit ce personnage qui arrive à Marseille et se dit « qu'est-ce que je vais faire ? » et il a écrit lui-même « est-ce qu'il faut que j'aille chercher les réfugiés en bicyclette ? » Il n'y avait plus d'essence. Finalement, il n'y a pas besoin d'aller chercher les réfugiés, ils viennent tout seuls. Il y a le bouche-à-oreille qui se fait, un Américain est arrivé à Marseille, etc. Et Hans Sahl, qui est un poète allemand, qui a été aidé par Freyja, il dit « comme un ange tombé du ciel » . Alors, on sait qu'il y a un ange tombé du ciel qui est à l'hôtesse plan-d'Ide et qui va aider les réfugiés. Alors très rapidement, le hall d'entrée de l'hôtesse plan-d'Ide. d'encombrés de réfugiés, le patron devient fou, la police se tourne autour. Ça l'inquiète beaucoup. Marseille, c'est une ville qui applique les lois du régime de Vichy, qui sont des lois raciales, antisémites, qui condamnent aussi, disons, beaucoup de gens d'opposants politiques à être dénoncés aux Allemands. Ce qu'on ne voyait pas trop à Marseille aussi, c'est que la Gestapo avait infiltré des gens anonymes. Hitler avait envoyé, après la défaite de la France, une commission, après l'armistice, qui est la commission Kunt. Cette commission Kunt, elle tenait son nom de celui qui dirigeait la commission. Et Kunt, il allait dans les camps voir quels étaient les gens qu'il fallait sortir pour les déporter en Allemagne. Certains ont compris ce que ça voulait dire. Et donc ils allaient dans les camps et regardaient la liste des internés et ils comparaient avec la liste de la Gestapo pour voir quels étaient ceux qu'il fallait envoyer en Allemagne. Le comité de Varian Fry avait dû vraiment s'organiser pour permettre des départs qui sont devenus souvent clandestins. Dès le début, l'arrivée de Fry à Marseille, ça paraît une forme de clandestinité. Mais ça le devient assez rapidement parce que Fry va avoir l'appui de Bill Fryer. Et Bill Fryer était un caricaturiste viennois qui s'était réfugié à Marseille. Et lui, il avait un doigt extraordinaire. Il refaisait les tampons et les vieillissait en collant des pattes, enfin ce qu'il y avait sous la main, un patin modelé, etc. pour vieillir le tampon. Et il refaisait des documents qui avaient vraiment l'air des documents d'origine. Fryer devait s'organiser parce que entre... Octobre 40, janvier 41, il n'y avait pas de visa de sortie provisoire pour tous les étrangers. C'est-à-dire que pour sortir du territoire français, les étrangers devaient avoir un sauf-conduit. Et ce sauf-conduit, on ne l'ordonnait pas puisqu'on ne donnait pas aux étrangers. Varianne Frey aurait dû se limiter à une prospection, si on peut dire, c'est-à-dire l'étude de la situation des réfugiés à Marseille. Merci. Et il devait rentrer aux États-Unis fin août. C'est à ce moment-là qu'il y a un décrochage, disons à la fois dans la pensée de Frye et en même temps dans sa volonté. C'était d'abord de réunir un petit comité de jeunes gens et ensuite de poursuivre sa mission en aidant réellement les réfugiés soit à être abrités, soit à avoir des donations financières, soit à avoir ce qu'il appelait « hiding » , les cachets. soit les aider à partir vers les Etats-Unis. D'abord, Varian Fras s'installe à la Villa Herbel, puis ensuite il a installé ses bureaux 60 rue Grignan, pour démarrer, où il y a eu une vingtaine de personnes. Et après, il a installé ses bureaux au boulevard Garibaldi, où il a trouvé alors un espace beaucoup plus grand. Il s'installe à la ville à Herbel et il est content parce qu'il n'y avait pas de téléphone, il était tranquille, il pouvait un peu se reposer de la tension. Il y avait une tension, il l'écrit ça, qu'il y avait une tension très forte parce que l'aide aux réfugiés, ce n'était pas simple. Il fallait trouver des solutions. Il y avait la pression de la police, etc. C'est Myriam Davenport, Marie-Jeanne Gold, qui faisait partie des bureaux de Frey, qui ont, avec Jean Gemmeling, ils ont fait une virée pour trouver un endroit pour loger des réfugiés. Ils ne trouvaient pas parce qu'à Marseille c'était impossible, il y avait tellement de monde. Certains réfugiés étaient logés dans des hôtels de passe, etc. La ville à Herbel, ça a été une solution. Il y avait une vingtaine de chambres et c'était la providence pour les réfugiés parce que d'abord, le premier qui a habité à la ville à Herbel, c'est André Breton. avec sa femme Jacqueline Lambin, sa fille Aube Breton. Alors la Villa Herbel est devenue un lieu de rencontre des surréalistes. Dans les années 1980, Varianne Frey était tellement oubliée que la Villa Herbel avait été tellement oubliée aussi que Gaston Deferre, qui était maire de Marseille et qui a été l'avocat du comité de Varianne Frey, qui a aidé Daniel Bénédicte, le bras droit de Frey, à se démêler de la justice, etc. eh bien, il a laissé déboulir la Villa Herbel. Et aujourd'hui, ça aurait été un centre important, même culturel, où on aurait pu retrouver toute cette histoire. L'arrestation de Frey, c'est une arrestation préventive qui a été faite à la Villa Herbel, à la veille de l'arrivée du maréchal Pétain. C'est en décembre 1940. Le 2 décembre, un fourgon de police arrive à la Villa Herbelle, ramasse tous les gens qui passent. Et il y avait Jean Gemmelling et Daniel Bénédicte qui arrivaient tranquillement. Les premiers Bretons avaient déjà été arrêtés, et beaucoup de gens qui vivaient à la Villa, dont Marie-Jeanne Gold aussi. Varianne Fry est libérée grâce à l'intervention de Hiram Bingham, vice-conçu des États-Unis à l'époque. Il ne voulait pas rentrer. On a retrouvé toute la correspondance avec sa femme, où il décrit ses états d'âme. Personne n'a vraiment étudié, mais elle existe. Elle est dans les archives de la Columbia University à New York. En 1941, comme il ne voulait pas partir, finalement, il est convoqué par l'intendant de police de la ville de Marseille. On lui dit, voilà, il faut que vous partiez, vous êtes expulsé de France. Parce que vous avez sauvé trop de juifs et trop d'anti-nazis. On a tellement peur qu'ils ne partent pas, que d'abord lui, il se cache, alors il part, il va dans les Alpes-Maritimes, il va rencontrer Matisse, le peintre, il ne veut pas partir, etc. Il rencontre André Gide, il rencontre un tas d'intellectuels, d'artistes, en essayant de les inciter à partir. Même André Malraux lui confie un film en disant « La censure de Vichy » . va détruire ce film sur la guerre civile espagnole. Et donc, je vous confie mon film et vous l'amenez à la bibliothèque du Congrès à Washington, puisque vous êtes expulsé. Il a sauvé ce film et ainsi de suite. Bon, un tas d'histoires. Et finalement, il ne peut pas passer son temps à se cacher. Et il poursuit, il s'acharne, il s'acharne. Et finalement, il est expulsé. En charge, un policier... de le surveiller et de rester assis à côté de lui jusqu'à ce qu'il soit à la frontière espagnole. Alors, il prend le train avec le policier. Et puis, il arrive à Perpignan. Et là, on s'aperçoit, il n'a pas de passeport. Il ne peut pas aller en Espagne et partir vers les États-Unis. Bon, alors, il est coincé à la frontière. Le passeport arrive, il passe, il prend le train. Il arrive à Lisbonne. Donc, il est parti en septembre 1941. Puis, après la guerre, il est oublié. Après la guerre, il y a eu, dans un premier temps, disons, une certaine conception de la résistance qui était limitée à la résistance armée. Et c'est sûr que l'action de Warien Frey n'était pas considérée comme une action de résistance. Mais les mentalités ont évolué. Et à ce moment-là, c'est cette réminiscence, cette montée de la prise de conscience juive qui a fait que le regard qui a été porté sur les actions de ceux qui ont aidé des réfugiés, etc. ceux qui ont poursuivi, qui ont pris de l'importance dans la culture, des poètes comme André Breton, des peintres comme André Masson ou autres, Jacqueline Lamba, et puis d'autres, Max Ernst, qui sont passés dans les mains de Varian Fry pour s'enfuir, la fuite a peu été considérée comme une action détestable. « Ouais, vous êtes partis, nous on est restés, on a subi » . C'était ça la mentalité. Et à partir des années 1990, Il y a ce nouveau regard qui est jeté sur les intellectuels qui sont partis, qui ont poursuivi leur œuvre. Fry, d'ailleurs, dans la mémoire collective, est devenu le héros oublié aux États-Unis. Est-ce qu'il lui donne une dimension supplémentaire ? Parce que s'il a été oublié, en plus, il y a une injustice. Et c'est un héros quand même. Frye a été d��coré de la Légion d'honneur. Mais c'est la seule chose, la seule reconnaissance. Mais c'est après sa mort, surtout, qu'il a été reconnu comme juste parmi les nations. Ça, c'était important. C'était en 1996. En reprenant les listes, on s'aperçoit... qu'il y a plus de 2500 personnes qui ont été aidées par Varian Fry. C'est sur 2500 personnes, ça ne veut pas dire que 2500 personnes sont parties, mais elles ont été abritées, elles ont des fois reçu des indemnités avec leur famille. Ce qu'on peut retenir de Varian Fry, je crois, c'est d'abord le fait qu'il ait pris sur lui-même la volonté de poursuivre une mission qui est devenue une mission internationale quand même. Varian Fry a aidé des réfugiés de tous les pays, des Espagnols réfugiés qui se trouvaient. Merci. dans des camps d'internement des Allemands qui se retrouvaient internés aux milles. On peut se dire, mais qu'est-ce qui se serait passé si Varian Frey n'avait rien fait ? Si il ne s'était pas occupé de réfugiés, qu'est-ce qui serait passé ? Peut-être que la culture européenne aurait disparu. Et je crois que c'est important, ça. Quel aurait été le destin de la culture européenne, qui était brimée par tous les régimes totalitaires qui se trouvaient en Europe ? Il y avait quand même Hitler en Allemagne, les nazis. Il y avait quand même Mussolini en Italie, qui n'a pas été tendre avec les réfugiés, avec les Juifs non plus. Et aussi, en Espagne, il y avait quand même Franco. Et même ceux que j'ai rencontrés, Jean Gemmeling, Charlie Fausse, tous ceux qui faisaient partie du comité, comme ils ont échappé pour la plupart à beaucoup de choses, on peut se demander si vraiment ils étaient conscients. À l'époque, c'était des jeunes gens. Ils faisaient ça d'une manière presque inconsciente. Et on se dit quand même que Varianne Frey a joué un rôle important. Il avait cette volonté d'aider les autres, en fait. C'était un humaniste. C'est sûr que s'engager, c'est le contraire de rester assis. Et donc s'engager... Non, je veux dire, je définis à l'envers, mais en fait, l'engagement, je pense, c'est une prise de position qui est très importante, qui suppose qu'on croit en ce qu'on va faire. Il faut quand même avoir un idéal pour s'engager. Et pour que son engagement soit positif, je pense qu'il faut que ce soit un engagement humanitaire, qui suppose qu'on respecte l'autre. On considère que chacun a sa valeur, quelle qu'il soit, quelle que soit son origine, quelle que soit la personne qu'on a en face de soi, on la respecte. Ça passe par le respect de l'autre. Et à la fois le respect, une certaine générosité qui veut que... On veut bien l'aider, quelle que soit sa motivation. C'est pas forcément financier, ça peut être une aide morale, un soutien, une considération, et aussi une volonté d'avoir une générosité qui est un peu... qui rejoint le bénévolat dans les associations. Ce que je fais moi-même d'ailleurs, puisque j'ai créé cette association 2000, l'association Variant de Fraille France. Et cette association, finalement, elle a réuni des personnes qui avaient cette générosité, qui voulaient mener un combat pour rappeler la mémoire. Et ce travail de mémoire, pour nous tous, c'est un travail important parce qu'il permet aussi d'éviter que dans le futur, les choses se reproduisent. Je travaille beaucoup auprès des jeunes et je continue d'ailleurs, je vais dans les collèges, je vais dans les lycées, je parle dans les classes, je leur explique qui était Varian Frye. Pas pour l'histoire de Varian Frye, mais parce que ça leur permet de comprendre que même aujourd'hui il faut s'engager. Il faut savoir qu'il ne suffit pas d'accepter ce qui se passe. Des fois il faut savoir dire non, des fois il faut savoir aider l'autre parce qu'il ne comprend pas. Et tout ça pour moi c'est l'engagement. J'ai un engagement de prof à la retraite maintenant. C'est le mien. Vous venez d'écouter Passeurs d'Histoire, un podcast du Souvenir français. Retrouvez l'ensemble des épisodes sur toutes les plateformes d'écoute. Si cet épisode vous a plu, n'hésitez pas à nous le dire avec 5 étoiles et en vous abonnant. Pour en savoir plus, rejoignez-nous sur les réseaux sociaux ou sur notre site internet, dont vous trouverez les liens en description. 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