Speaker #0Bonjour à tous, on se retrouve dans ce quatrième épisode pour déconstruire les mythes autour du HPI. Le haut potentiel est aujourd'hui mis en avant et fortement médiatisé. Alors bien sûr, c'est quelque chose de bénéfique, car il y a quelques années, disons dans les années 90, le HPI était peu évoqué et en termes de scolarité, c'était catastrophique, pour ne pas dire un carnage. J'en viens donc au premier mythe, un élève à haut potentiel réussit forcément à l'école. Alors non, tout n'est pas si limpide. Un élève à haut potentiel peut parfaitement s'en sortir dans sa scolarité, s'il a un profil académique et qu'il parvient à s'épanouir dans la réalisation de ses objectifs. Mais s'il a un profil non scolaire et qu'il rejette le système académique, les conséquences peuvent être dramatiques car elles mèneront parfois jusqu'au décrochage scolaire. Ce n'est pas parce qu'une personne à haut potentiel a des capacités cognitives supérieures à la moyenne qu'elle a forcément envie de les utiliser dans un domaine qu'elle jugera trop restrictif. J'entends par là le fait que les apprentissages scolaires sont formatés selon un programme préétabli qui peut frustrer un HPI. Il est nécessaire d'adapter sa pédagogie afin de prendre en compte ses spécificités et ne pas l'enfermer dans un climat délétère. Je consacrerai un prochain épisode à la psychopédagogie adaptée au HPI pour m'y attarder plus longuement. Mais déjà, je peux confronter les choses à faire et à ne pas faire lorsqu'un élève à haut potentiel est en souffrance à l'école. Premièrement,il faut valoriser ses apports en classe, même et surtout s'ils sont en dehors du programme. Il ne faut pas dénigrer ses réflexions sous prétexte que "ce n'est pas au programme". Il n'y a rien de plus frustrant que d'être stoppé dans l'effervescence de sa pensée. Deuxièmement, il faut le laisser travailler en autonomie et ne pas le contraindre à un travail de groupe dans lequel il pourrait se sentir cloisonné. Cet exemple est particulièrement parlant pour moi, car j'ai toujours refusé catégoriquement de travailler en groupe principalement en littérature et en philosophie, car je me sentais brimée dans mon cheminement de pensée et incomprise dans mon approche qui était très personnelle, et ma requête était constamment refusée sous prétexte qu'il fallait "apprendre à travailler en groupe". Pour moi, cette excuse n'a jamais voulu rien dire, et la réalité, c'est que je rédigeais finalement l'exposé dans son entièreté pour être certaine qu'il soit comme je l'entendais. Je remarquais bien sûr que les autres étudiants n'y voyaient pas d'objection. finalement ça devait les arranger, alors que de mon côté, cette option aurait été inconcevable. Donc, je reprends le fil de mon explication, dans les choses à faire, on va avoir nourrir sa soif de connaissances et respecter son rythme, au lieu de le contraindre à suivre le rythme d'une majorité et de l'immobiliser dans un format répétitif peu épanouissant. Par exemple, lorsque ma fille était en moyenne section, elle entrait déjà dans la lecture mais ce n'était pas encore le moment selon son institutrice, car ses camarades n'en étaient pas encore là, et je cite ces termes, "elle a le temps". Alors, "elle a le temps", qu'est-ce que ça signifie ? Cela n'a aucun sens puisque l'accès à la lecture ouvre une perspective plus large au niveau culturel. Plus on lit tôt, plus on a accès à un monde diversifié, et plus on cultive sa liberté de penser. Alors pourquoi empêcher une enfant de lire à son rythme, sous prétexte que la majorité n'est pas encore entrée dans la lecture ? Pourquoi ne pas justement voir la précocité d'une élève comme un tremplin pour changer la perspective du reste de la classe ? À cet âge, le mimétisme est important et finalement, les autres élèves pourraient être inspirés par leurs camarades. Au lieu de ça, on va stigmatiser l'élève précoce en sous-entendant qu'il n'est pas normal d'entrer dans la lecture si tôt. Et c'est justement en agissant de la sorte que les autres élèves ressentent cette distance et à terme rejettent l'enfant jugé hors norme. Après avoir connu des problématiques similaires dès le plus jeune âge et avoir ressenti cette propension à stigmatiser le décalage cognitif, cela a induit une profonde rébellion contre le système scolaire qui a atteint son apogée au lycée. J'ai très mal vécu cette période et je n'acceptais pas de travailler, ou alors uniquement dans les matières qui me nourrissaient intellectuellement et personnellement. Une fois arrivé à l'université, le carcan était moindre, on va dire, mais il persiste toujours un versant académique prononcé qui contribue à frustrer cette appétence pour le savoir, et surtout à instaurer une forme d'uniformité. Pour contrer cette uniformité, il faut accepter la différence d'une personne à haut potentiel, et ne pas tenter de la formater, c'est la meilleure façon de la braquer et de la pousser à l'autosabotage. Un HPI à profil complexe préférera toujours se saboter plutôt que réussir en se formatant, car ce serait nier sa différence et son essence même. Enfin, il est très important de s'ouvrir à l'échange constructif, prendre en considération son avis et se positionner sur un pied d'égalité, plutôt que d'établir un rapport de force hiérarchique et confondre la quête de justesse et de véracité avec de l'insolence. Voilà pour ce premier mythe consacré à la scolarité du HPI. Alors fort heureusement le sujet a beaucoup évolué depuis les années 90 et de nos jours il existe de nombreuses structures qui prennent en charge les élèves à haut potentiel, de même qu'il existe des classes spécialisées au sein des collèges et lycées classiques. Pour autant, il n'est pas toujours simple pour un élève à haut potentiel de s'intégrer dans un établissement classique. Le harcèlement scolaire est une réalité dramatique et un élève neuroatypique est une cible parfois toute désignée. C'est pour cette raison que j'ai personnellement fait le choix de l'IEF pour ma fille depuis presque 10 ans. L'IEF, c'est l'instruction en famille, c'est une solution parfaite pour un élève HPI qui pourra évoluer à son rythme tout en conservant un temps de culture personnelle pour explorer ses différents intérêts spécifiques. Alors attention, l'IEF est soumise à autorisation et demande un engagement maximal du parent-instructeur. Un projet pédagogique doit être présenté chaque année et doit être validé par une commission. Une inspection pédagogique a également lieu chaque année afin de vérifier les acquis de l'élève. Concernant la scolarité, je dirais en définitive que l'égalité des chances, c'est aussi reconnaître les différences de chacun. S econd mythe, il concerne le calcul même du score de QI. Alors, on entend souvent les personnes dire que leur psychologue n'a pas pu leur donner un score de QI total du fait de la trop grande hétérogénéité des indices. C'est faux, le score de QI est toujours calculable. Seulement, on estime que si le bilan psychométrique laisse apparaître plus de 12 points d'écart entre chaque indice, le profil est dit hétérogène, et c'est parmi ces profils hétérogènes que se trouve parfois un calcul total du QI qui peut poser problème. Tout simplement car la personne peut avoir plafonné sur un indice, ce sera souvent la compréhension verbale, et avoir chuté sur l'un des indices de la vitesse de traitement. Cette situation se retrouve principalement chez les personnes HPI qui cumulent en plus un TDA/H, un TSA ou une dysgraphie. Concernant ce sujet, vous pouvez écouter l'épisode 3 de ce podcast qui s'intitule "Le HPI et les troubles associés". Dans ce cas-là, comme le score total de QI est biaisé par la trop grande disparité entre deux indices, il peut être utile de calculer l'indice d'aptitude générale, l'IAG, via l'indice de compréhension verbale et l'indice de raisonnement fluide, qui lui sera plus représentatif des capacités réelles. Donc en conclusion, le QI total est toujours calculable, il peut seulement démontrer une hétérogénéité qui nécessite de calculer l'IAG en plus afin d'avoir une lecture plus lisible des capacités cognitives générales. Le troisième mythe est de considérer qu'il y a plus de HPI dans nos sociétés modernes. Là aussi c'est faux, il y a seulement plus d'identifications aujourd'hui qu'auparavant. Plus de HPI testés et identifiés, donc mathématiquement, le nombre est plus élevé, mais en proportion on est toujours sur 2,3% de la population. La médiatisation du HPI et la prise de conscience des neuroatypies au sens large a ouvert la voie vers des identifications et des dépistages plus nombreux, sans pour autant voir augmenter les validations de bilan. Le quatrième mythe va dans le même sens puisqu'il s'agit d'un biais de représentativité. On entend régulièrement qu'avoir un HPI est une chance, un facteur protecteur. Alors bien sûr c'est une chance, encore faut-il qu'elle soit reconnue pour être exploitée à bon escient. Un haut potentiel peut être une chance lorsqu'il a été valorisé et compris, mais il peut être source de souffrance s'il a été annihilé et dévalorisé. Les personnes qui subissent leur haut potentiel sont celles que l'on retrouve en thérapie, ce qui donne naissance au cinquième mythe, les HPI vont mal. Or, certains HPI vont mal car des facteurs exogènes ont contribué à leur malaise. L'impact négatif de l'environnement par exemple. Des facteurs endogènes peuvent aussi induire un mal-être, il s'agira là d'un trouble associé qui viendra déséquilibrer le potentiel. Il n'y a donc pas lieu d'affirmer qu'un HPI va forcément bien ou mal. Il est nécessaire de prendre en compte la globalité de la personne, son histoire, son passif, ses éventuels troubles associés. Évidemment, ma propre expérience fait que je suis particulièrement sensible aux profils HPI qui vont mal, car j'ai vécu ce tsunami de l'intérieur. C'est aussi pour ça que j'ai créé Potentiali-T, pour venir en aide aux personnes qui souffrent et qui s'interrogent. Un sixième mythe consiste à penser qu'un élève HPI développera forcément un intérêt pour les sciences. Il n'en est rien, car il faut prendre en compte les intérêts spécifiques de la personne et le positionnement des forces en présence. Un élève HPI est en capacité de réussir dans tous les domaines, d'un point de vue purement cognitif. Sa capacité de rétention de l'information le positionne sur une facilité de restitution si et seulement si il y trouve de l'intérêt personnel. Un élève HPI pourra développer une intelligence linguistique supérieure à celle logico-mathématique si son profil est plus enclin à s'orienter vers les domaines littéraires et humanistes. D'ailleurs, cette différence sera perceptible lors du bilan psychométrique, où les résultats orienteront clairement sur une ou plusieurs catégories d'intelligence. On parlera d'intelligences multiples, qui est un des outils utilisés en psychopédagogie. Ancrer sa pédagogie sur le positionnement des forces en présence permettra de bien orienter l'élève vers le cheminement de vie qui lui correspond. Une personne HPI s'épanouit dans la complexité, peu importe qu'elle soit issue du domaine scientifique ou littéraire. Un autre mythe qui est en réalité une incompréhension et une différence de point de vue, c'est de dire qu'une personne HPI est asociale. Alors de mon point de vue, il est certain que l'on va adopter un comportement qui pourrait être qualifié d'asocial, mais il est seulement le reflet de l'image que les autres nous renvoient. C'est principalement le regard et le jugement que porte l'extérieur sur la personne HPI qui va la pousser à s'exclure et à limiter, voire éviter les interactions sociales, car cette pression permanente de toujours devoir justifier ses idées, sa façon de s'exprimer ou même d'agir est anxiogène au quotidien. Dans un contexte bienveillant avec d'autres personnes HPI ou avec des personnes au fait du sujet, les interactions sociales ne causeront aucun souci. Lorsqu'on vous fait remarquer que vous êtes hors normes ou que vous ne cochez pas les cases du parfait individu socialement adéquat, vous préférez rester seul. C'est une forme de protection et c'est même salvateur car reçevoir en permanence une forme de dénigration extérieure contribue à fortement déprécier l'estime de soi. De plus, il faut aussi avoir conscience qu'une personne à haut potentiel possède une richesse intérieure, finalement assez grande, pour se suffire à elle-même et n'a pas peur de se retrouver seule face à ses propres réflexions. Là où la normalité veut que les personnes s'épanouissent en groupe par une sorte de mimétisme social, la réalité des profils neuroatypiques veut que ce soit justement une certaine intériorité et une forme de solitude apaisante qui prédomine. Le souci réside justement dans l'incompréhension de l'entourage qui part du postulat de départ d'une impossibilité à rester isolé, mais qui ne prend pas en compte le fait que ce postulat est le leur et qu'il ne s'applique pas à tous. Pour une personne HPI, la solitude peut être un refuge, et dans ce cas-là, elle ne la subit pas. En réalité, le seul moment où une personne HPI subira cette solitude, c'est lorsqu'elle sera victime d'harcèlement scolaire, car elle impliquera également une forme d'abandon d'un système qui en quelque sorte lui laisse sous-entendre qu'elle n'y a pas sa place. On peut aussi parler du décalage que sous-tend la condition même du HPI. Il est évident qu'une personne à haut potentiel sera en décalage avec les autres, c'est inévitable puisque d'un côté ses capacités de raisonnement sont plus rapides et de l'autre sa conscience est plus exacerbée. Un enfant à haut potentiel s'inquiètera très tôt de la mort et pourra même développer un trouble anxieux généralisé. Un adolescent à haut potentiel se passionnera pour des sujets pointus et spécifiques qui n'intéresseront pas du tout les autres personnes de son âge et qui contribueront à le mettre en marge. Le problème réside dans le fait de faire ressentir aux personnes HPI que ce décalage est en leur défaveur. Or ce n'est pas parce qu'une majorité de personnes n'adoptent pas un certain comportement qu'elles sont dans le vrai. Il n'y a aucune vérité à extraire d'ailleurs, ce qui compte, c'est d'être aligné avec ses propres valeurs et son identité. Voilà, j'espère que cette déconstruction de certains mythes concernant le HPI vous aura apporté quelques éclaircissements. Je reste à votre disposition si vous avez d'autres questions qui n'auraient pas été abordées, ou si vous avez envie d'écouter un épisode sur un thème précis. N'hésitez pas à me faire part de vos interrogations et j'y répondrai comme toujours avec grand plaisir. Vous pouvez me contacter sur mon site potentialité.fr ou sur les réseaux, ainsi que par le biais du podcast. Je vous dis à bientôt. Et n'oubliez pas de sortir du cadre !