- Speaker #0
Bienvenue sur Préambule, le podcast des ambulanciers et de la santé. Je m'appelle Charlotte et aujourd'hui c'est moi qui vous accompagne dans ce nouvel épisode des histoires de soignants. Imaginez que vous soyez en présence d'un patient dont les symptômes ne ressemblent en rien aux différentes pathologies que vous avez l'habitude de prendre en charge. Des symptômes si étranges que seule la violence d'un médecin pourrait en partie solutionner. Bienvenue dans cette histoire de soignants numéro 3.
- Speaker #1
Préambule, les podcasts des ambulanciers et de la santé. Je suis Mathieu Lefort-Billardon, infirmier en cardiologie et j'étais ambulancier avant. Pour situer, j'ai eu le diplôme d'ambulancier en alternance, je l'ai passé à Perpignan avec un employeur sur Narbonne. J'ai eu le diplôme en décembre 2014. Cette situation se passe, ça faisait 2-3 mois que j'étais ambulancier. Donc voilà, je prenais un petit peu mes marques, j'étais avec un binôme fixe et je travaillais exclusivement de nuit. J'attaquais juste à bosser un petit peu de nuit. On avait des équipes, nous, qui étaient destinées à la garde départementale la nuit. Donc je faisais que ça. Donc voilà, la situation se passe en fin de garde. Il doit être 7h du matin, le jour se lève à peine. Un temps clair, il faisait beau, comme souvent sur Narbonne. Et donc un appel du 15 avec comme motif un malaise sans perte de connaissance. Donc c'est un lieu dit qui est à environ 20-25 minutes de route de Narbonne, ça s'appelle Myrpécé, un petit village. Donc on arrive du coup sur les lieux, autour de 6h30-7h, une maison des années 70 individuelle dans un quartier résidentiel. C'est donc un couple et donc c'est la dame pour la victime. Donc, qui a environ 75 ans, donc elle vit avec son mari. Elle assise sur le canapé. On arrive avec mon collègue, avec nos sacs. Voilà, on s'installe tranquillement. Et donc, déjà, en fait, elle nous dit qu'elle ne se rappelle plus du malaise. Donc là, déjà, moi, je commence à me dire qu'il y a eu une perte de connaissance. Donc déjà, des fois, ça arrive, les gens appellent dans le stress que le motif initial change un petit peu. Et donc, il y a bien une perte de connaissance. Le mari, on essaie de le questionner vu que si elle n'a pas du connaissance-savoir, il est un petit peu vague, il ne sait pas trop nous dire si réellement elle est tombée dans les pommes vu qu'elle était sur le canapé, qu'elle est tombée dans le canapé. Il ne sait pas trop si c'était plus des vertiges ou un malaise vraiment. On prend donc les constantes. Tout est plutôt dans les normes. La tension est bonne, la fréquence cardiaque, la saturation, tout va bien. Elle a un peu le teint pâle, mais bon, si elle a fait un petit malaise, ce n'est pas non plus incohérent. Pas beaucoup d'antécédents. Elle n'avait jamais fait de malaise de la sorte. Donc, dans les suites, on fait la procédure normale. On rappelle le 15, on explique un peu tout ce qui se passe. Et donc, ils nous disent qu'on doit emmener la dame à Narbonne. En fait, il y a deux hôpitaux. Il y a le centre hospitalier, où il y a un service d'urgence. Et il y a aussi la polyclinique, qui est privée. Et il y a aussi un service d'urgence. Donc, c'est le 15 qui régule, de toute façon. Et donc il nous dit d'emmener cette dame à la polyclinique de Narbonne.
- Speaker #0
Prise en charge intrigante pour Mathieu et son binôme qui sont missionnés par le SAMU pour un malaise sans perte de connaissance. Mais qui, une fois arrivés sur les lieux, font face à une patiente confuse et à son mari qui n'arrive pas à affirmer ou non cette perte de connaissance. Une perte de connaissance peut faire soupçonner de multiples pathologies, comme des troubles neurologiques ou des troubles cardiaques. des pathologies potentiellement graves et qui nécessitent une prise en charge médicale et rapide aux urgences les plus proches.
- Speaker #1
donc forcément on la met sur le brancard aucun effort, quoi que ce soit et puis on transporte 5-10 minutes après, donc pendant le transport comme je disais tout à l'heure il y a à peu près 20-25 minutes de route au bout de 5-10 minutes on traverse un petit village et là il y a une perte de connaissance effectivement, moi je suis disputé avec elle et d'un coup, extinction des feux il n'y a plus personne, elle est inconsciente j'essaie du coup de la réveiller, de l'appeler euh... Rien du tout. Donc là je dis à mon collègue déjà de s'arrêter sur le bord de la route. J'appelle en même temps le 15 et dans le même temps que j'appelle, de toute façon j'essaie un petit peu de la secouer, de voir si elle respire. Du coup, difficile à voir pour l'instant dans le stress, dans tout ça, s'il y a une respiration. Le pouls c'est pareil, je n'arrive pas à sentir vraiment au niveau du radial la présence d'un pouls ou non. Donc j'ai le 15 au téléphone, je leur explique. Pendant ce temps, mon collègue pareil, il m'aide, on essaie de secouer. Puis on commence à se dire qu'on va attaquer du coup un massage cardiaque.
- Speaker #0
La prise en charge se complique pour Mathieu, qui fait face à une patiente qui vient de perdre connaissance et dont il a du mal à évaluer dans les premières secondes la présence ou non d'un pouls et donc potentiellement d'un arrêt cardiaque. Si c'est un arrêt cardiaque, Mathieu doit vite réagir. afin de débuter une réanimation cardio-pulmonaire et ainsi suppléer l'action du cœur. En effet, chaque minute sans massage, c'est 10% de survie en moins.
- Speaker #1
Et donc à ce moment-là, elle se réveille, à force de la secouer un petit peu. Donc là, on est surpris. J'en fais part de tout ça aux 15. Et donc le médecin régulateur que j'ai au téléphone... me dit bah écoutez si elle s'est réveillée c'était peut-être qu'un malaise mais de toute façon les deux véhicules du SMUR sont déjà de sortie donc vous êtes un peu tout seul quoi il nous restait une dizaine de minutes de route il m'a dit bah essayer de rouler de faire au plus vite et voilà quoi donc là cette sorte de malaise il se réitère deux fois pendant le trajet pareil quelques secondes à chaque fois au final la première fois c'est un peu plus long où ça paraissait au moins peut-être dans le véhicule les deux autres fois c'est d'une dix secondes à peu près mais vraiment inconsciente totale pendant quelques secondes, puis retour à la réalité.
- Speaker #0
Ce n'est pas un arrêt cardiaque, c'est déjà plutôt rassurant dans un premier temps. Le pronostic vital ne semble plus engagé pour cette patiente, qui fait malgré tout des malaises à répétition sans raison apparente. Il faut de toute urgence que cette patiente arrive aux urgences et soit bilantée par un médecin urgentiste, afin de trouver l'origine de ces malaises à répétition.
- Speaker #1
Et donc, on arrive à cet hôpital, à la polyclinique de Narbonne. C'est fait un peu bizarrement, en fait, parce que quand on arrive en ambulance, il faut prendre un ascenseur pour monter aux urgences. Le temps d'attente de l'ascenseur, vu que c'est l'ascenseur principal pour tous les brancards de l'hôpital et les lits, c'est très long. Et surtout dans cette situation, très long. Et donc là, quand ça s'ouvre, l'ascenseur... Il y a un médecin qui arrive et qui rentre avec nous dans l'ascenseur pour monter aux urgences. C'est un médecin urgentiste qu'on connaît parce qu'on fait beaucoup d'interventions. Donc voilà, un petit peu au moins de vue, on sait qu'il est médecin urgentiste. Donc on commence à lui parler, lui faire un petit bilan du cas, on va dire. Et il nous croit sans nous croire, il est malaises ou quoi que ce soit. L'ascenseur se ferme, on commence à monter et là, ça se réitère, encore un malaise. Et donc là, il prend la situation déjà directement au sérieux et il donne un grand coup de... de point dans le thorax de la patiente ?
- Speaker #0
Oui, vous avez bien entendu. Ce médecin urgentiste a mis un grand coup de point sur le sternum de la patiente. Le sternum, c'est cet os plat situé au milieu de la cage thoracique et qui relie les côtes. Ce médecin, sans connaître la patiente et quelques secondes après avoir pris le bilan des ambulanciers, décide de mettre un coup de point sternal à cette patiente inconsciente.
- Speaker #1
Qui instantanément se réveille et se met même quasiment à 6 quoi. Le choc, on va dire, moi je ne m'attendais pas du tout à ça. Il nous dit, effectivement, oui, elle faisait bien des malaises, il n'y avait pas de soucis. Ils la prennent en charge, en gros, nous, on s'arrêta sur la prise en charge. Et ce que je trouvais intéressant de raconter cette histoire-là, c'est que maintenant, que je suis infirmier, que je travaille en cardiologie, que j'ai acquis des connaissances, on va dire, je pense savoir en fait, on a un trouble du rythme. en cardiologie qui se réduit ce qu'on appelle en fait qui revient à la normalité en donnant un coup de poing sternal donc je sais pas si c'est la recommandation n'allez pas frapper tous ceux qui sont en arrêt cardiaque mais s'appelle la torsade de pointe ou syndrome du qt long
- Speaker #0
Le coup de poing sternal est une technique de secourisme qui permettrait, dans certains cas, de relancer l'activité cardiaque en cas d'arrêt cardio-respiratoire. Il consiste à donner un coup de poing sur le sternum de la victime et est estimé à l'équivalent d'un choc électrique de faible énergie, 30 joules. A titre de comparaison, un défibrillateur électrique externe délivre une puissance de 150 à 200 joules.
- Speaker #1
Qui en fait fait... Fait ce... Pas une fibrillation, mais le cœur et les ventricules vont s'exciter un petit peu. Et ça peut se réduire avec un coup de poing sternal. Donc je pense que c'est ça qu'elle faisait. En plus, ça peut être induit. Je ne me rappelle plus par contre des médicaments qu'elle avait, mais il y a certains médicaments antidépresseurs qui allongent le QT. Le QT, en fait, c'est les ondes d'électrocardiogramme, un tracé normal. C'est une onde P suivie d'un QRS, ce qu'on appelle, puis d'une onde T. Et donc, c'est à la fin de cette onde T qui s'allonge en fait. Et si une extra-systole ventriculaire, on appelle ça, donc un mouvement ventriculaire qui est là en plus, on en fait tous, quelques-uns par jour, mais ce n'est pas très grave. Mais si cette petite anomalie tombe dans l'onde T, ça crée ce trouble ventriculaire qui s'appelle la torsade de pointe.
- Speaker #2
Mais du coup, lui, il a fait ce coup de poing sternal sans vraiment savoir ce que c'était ?
- Speaker #1
Exactement, mais en même temps, il était dans un ascenseur fermé. Je pense, il a dû se dire, on va essayer ça. Je le tente, ouais. Ouais, on va essayer ça et ça a marché du coup. Mais oui, c'est vrai qu'il n'est pas à nous. Maintenant, des fois en service, je l'ai vu faire, moi, au soin intensif de cardiologie, mais on a le tracé sous les yeux. Donc là, on le sait. Après, c'est même, c'est pas parce qu'on fait ce trouble du rythme qu'on va forcément en plus tomber en syncope. J'ai vu une dame, une fois, nous, qui était assise au téléphone avec sa fille, on lui a dit, lâchez le téléphone, allongez-vous. Et elle ne voulait pas au début. Et pourtant, son cœur, il partait bien un peu comme ça.
- Speaker #2
C'est un peu le truc qu'on voit dans les émissions urgences ou je ne sais pas quoi, c'est le truc à l'américaine où Edson a eu un gros coup de poing. Donc il y a un vrai bénéfice dans certaines pathologies.
- Speaker #1
Il y a du vrai. Est-ce que ça crée une onde, un choc ? Je ne sais pas. Est-ce que ça réinitialise un peu le cœur automatiquement ? Parce que c'est un trouble du rythme qui peut aussi se réduire par un choc électrique forcément. Mais c'est vrai que là, lui, je pense, dans ces conditions-là, dans un ascenseur où on n'a aucun matériel, aucune raison de le savoir, il a dû tenter la chose. on va dire,
- Speaker #2
vraiment de la médecine d'urgence Mais chapeau bas à lui parce qu'en l'espace de quelques secondes il a réussi à entre guillemets cerner la pathologie de la patiente et proposer quelque chose avec les moyens du bord C'est un peu ça, c'est ça C'était un jeune médecin ou un...
- Speaker #1
Non, c'était un ancien C'est l'expérience qui a parlé Merci Mathieu
- Speaker #0
Alors qu'il a été enseignant en secourisme et en médecine, ce geste est de moins en moins utilisé, du fait de sa très faible efficacité Il n'a de résultat que sur un arrêt cardiaque survenu devant le secouriste et ne semble permettre que dans un nombre très limité de cas, le retour à une circulation spontanée, entre 1 et 2% selon les études. Merci d'avoir écouté cette histoire de soignants et nous vous donnons rendez-vous pour un prochain épisode dès lundi prochain. Merci de liker, commenter et noter ce podcast sur vos plateformes afin de récompenser notre travail. A bientôt !