- Speaker #0
Je crois que toutes ces inégalités, inégalité de partage des tâches, inégalité de revenus, le fait d'être fatigué parce que les enfants c'est fatigant, il faut être réaliste, ça va faire qu'il y a assez rapidement une désillusion par rapport au couple, mais aussi par rapport à l'autre.
- Speaker #1
Comment dire à ces enfants qu'on se sépare ? Et après, comment on s'en sort financièrement ? Et pour les vacances, on fait quoi ? La décision de se séparer et ses conséquences sur notre vie familiale et personnelle chamboulent inévitablement notre quotidien. Mais on s'en sort. Je suis Pamela Morinière et vous écoutez la saison 2 de Quelque chose à vous dire, le podcast des parents séparés, qui s'en sort. Tous les 15 jours, j'interview des parents séparés, mais aussi des professionnels qui œuvrent autour du divorce et de la séparation, pour apporter un point de vue d'expert sur une situation compliquée qui touche presque un couple sur deux et que l'on a tendance à banaliser alors que ses conséquences sur notre vie familiale et personnelle sont titanesques. J'espère que ce podcast vous aidera à mieux vivre votre séparation en préservant vos enfants. Bonne écoute ! Salut les parents, j'espère que vous allez bien. La semaine dernière, dans un entretien au magazine Elle, le président français Emmanuel Macron a avancé l'idée d'un devoir plutôt qu'un droit de visite pour les pères dans les cas de séparation. Cette idée m'a interpellé, à l'instar de beaucoup de professionnels qui œuvrent autour du divorce. Dans le podcast, j'ai pour objectif de vous accompagner grâce à des entretiens de parents, mais aussi de professionnels pour mieux vivre votre séparation en préservant vos enfants. Pour moi, et c'est mon avis personnel, il n'y a pas de séparation réussie quand les enfants sont placés au centre des conflits et disputes qui entourent et suivent une séparation. Instaurer un droit de visite obligatoire, c'est méconnaître une partie du problème. Certains pères n'ont tout simplement pas envie de voir leurs enfants. Ils n'ont pas envie d'effectuer leur devoir de père, avec les conséquences que l'on imagine pour un enfant et un adulte en construction qui ne se sentent pas aimés. Certains pères ne peuvent pas exercer ce droit de visite. Ce serait trop dangereux pour l'enfant. Forcer ce lien peut être totalement contre-productif, voire même dangereux pour l'enfant. et son bien-être. Et dans certains cas, effectivement, les pères se voient privés de leur droit de voir leur enfant sans justification suffisante et une solution devrait être apportée. C'est un sujet qui mérite, à mon avis, beaucoup, beaucoup de nuances et beaucoup d'écoute de réalité de parents aussi. Et au-delà de ce sujet, je pense qu'une réelle réflexion sur le couple, le partage des tâches, sur les schémas traditionnels de faire famille est incontournable. L'accès au congé parental de manière équitable pour les deux membres du couple, notamment, est essentiel si l'on veut prendre un peu de hauteur sur la question de la séparation, de la garde alternée et de la place des pères. L'épisode du jour, qui est en deux parties, explore justement la thématique de la résidence alternée en France, mais aussi la violence et le conflit dans la séparation et le manque de formation de certains professionnels de la justice sur les situations de violence intrafamiliale. J'espère qu'il vous apportera les clés pour mieux comprendre ce qui se joue pour les enfants au moment de la séparation et au-delà, et qu'il vous aidera à prendre les bonnes décisions. Bonne écoute. Épisode 35 Marie-France Irigoyenne C'était le 1er mai 2024. On se serait cru en plein été et j'avais rendez-vous avec Marie-France Irigoyenne pour un petit Bruxelles-Paris virtuel. Derrière mon écran, Marie-Francie Rigoyenne, psychiatre, thérapeute familiale systémique parisienne, victimologue et autrice de plusieurs ouvrages prétendant des mots de notre temps. Le harcèlement moral, le narcissisme, et le petit dernier, celui qui nous intéresse aujourd'hui, la séparation. Chez elle, des murs blancs, une bibliothèque chargée de livres qu'on imagine traiter de tous ces mots qui poussent ses passions à franchir les portes de son cabinet. Ce cabinet qu'elle écrit d'ailleurs comme un véritable poste d'observation sociétale, puisque c'est en observant des situations répétitives chez ses passions qu'elle trouve ses sujets de livres. Elle m'a confié avoir mis deux ans à écrire le dernier, Séparation avec enfant, conflit, violence, manipulation Un livre tout fut qui nous plonge dans une véritable introspection des tensions qui se manifestent lors d'une séparation de parents, du simple conflit à la violence de longue durée, mais qui se veut aussi outil pour aiguiller les professionnels du monde judiciaire. Mon échange avec Marie-France Irigoyenne a duré longtemps et c'était passionnant. C'est pourquoi je l'ai divisée en deux parties. Dans cette première partie de l'épisode, Marie-France nous partage une riche réflexion sur la séparation des parents et l'enjeu majeur qu'elle observe chez ses patients et patientes, les enfants. De manière posée et didactique, la psychiatre revient notamment sur l'évolution de notre société et la place des femmes venues progressivement bousculer les schémas traditionnels du couple. On va revenir sur les raisons de l'augmentation des séparations, sur la notion d'attachement à la fois envers l'enfant, mais aussi dans le couple. On va parler de la résidence partagée, lorsqu'une séparation se fait à l'amiable, sans conflit majeur, et le chemin qui reste à parcourir pour atteindre un hébergement égalitaire. Dans la seconde partie de l'interview, qui sera diffusée dans 15 jours, nous reviendrons plus largement sur la violence et la place des enfants dans les violences intrafamiliales. Ce fut un réel plaisir de m'entretenir avec Marie-Francie Rigoyenne. J'espère que cet épisode vous sera utile. Bonne écoute.
- Speaker #0
Je suis Marie-Francie Rigoyenne, je suis psychiatre, victimologue, et je travaille sur la violence psychologique depuis très longtemps, au départ sur les violences faites aux femmes, puis j'ai élargi au harcèlement moral. Et maintenant, je m'intéresse aux enfants dans les séparations.
- Speaker #1
Pourquoi ce livre Séparation avec enfant Qu'est-ce qui vous a motivée ?
- Speaker #0
Pour tous mes livres, je suis partie de ce que j'entends dans mon cabinet de consultation. Et ça m'avait frappé de voir que de plus en plus les parents viennent parler de leurs difficultés lorsqu'ils envisagent de se séparer, avant même de se séparer. Ils anticipent sur l'impact que ça pourrait avoir sur les enfants. Dans le cours de la séparation, plus que de parler d'eux-mêmes, ils viennent parler de leurs enfants. Et l'enfant est devenu central dans les consultations que j'ai à mon cabinet.
- Speaker #1
Si la séparation se passe bien pour les enfants, les parents considèrent que c'est une séparation réussie ?
- Speaker #0
Oui. Je crois que c'est un peu ça. C'est-à-dire qu'au fond, quand on n'a pas d'enfant, on se sépare, on n'en parle pas, ou on peut avoir un chagrin d'amour, mais on fait avec, ou on va parler, on va voir un psy pour parler de soi. Mais à partir du moment où il y a des enfants, c'est un peu comme si le projecteur n'était pas sur leur histoire à eux, mais sur qu'est-ce que ça va faire aux enfants. Alors ils observent comment l'enfant va réagir et c'est même devenu la transaction, c'est quand même, c'est plus comme autrefois l'argent, les biens matériels ou des règlements de comptes de rivalité, c'est l'enjeu maintenant, ce sont les enfants.
- Speaker #1
J'ai un peu le sentiment que vous parlez aussi d'une expérience où vous recevez des parents ensemble. Je ne sais pas si vous recevez aussi des parents de manière individuelle et est-ce que les problématiques sont les mêmes dans ces cas-là ? Est-ce qu'il n'y a pas plutôt dans ces cas-là des sujets un petit peu plus personnels qui font surface au moment de prendre la décision de se séparer ?
- Speaker #0
Non, alors c'est juste le contraire. Même si je suis thérapeute systémicienne et que je reçois des couples, des familles, je reçois surtout des patients en individuel. Mais ils viennent me parler de la séparation, ils viennent me parler de l'autre, mais surtout de l'enfant par rapport à l'autre. Et ça, c'est quelque chose qui est vraiment nouveau.
- Speaker #1
Vous voulez dire par rapport à votre expérience antérieure ?
- Speaker #0
Oui, moi j'ai toujours travaillé à partir de ce que me disaient mes patients, parce que je considère... que ce qui se dit dans le cabinet d'un psy, quand ça se répète, c'est que ça devient, au-delà de ce que dit le patient, ça devient une affaire sociétale. C'est comme ça que je me suis retrouvée à écrire sur le harcèlement moral, harcèlement moral au travail, mais harcèlement moral aussi dans le couple. C'est comme ça que j'ai aussi écrit sur l'emprise. C'est simplement, on pourrait dire, une sorte de généralisation à partir d'ouvertures plus grandes, à partir de ce que disent mes patients sur leur propre histoire.
- Speaker #1
Alors, vous venez de publier un livre qui s'appelle Séparation avec enfant, conflit, violence, manipulation C'est un livre qui a été publié aux éditions La Découverte. C'est un livre qui est extrêmement intéressant, mais qui porte beaucoup de choses, qui porte un sujet difficile. On parle beaucoup de conflits, on parle beaucoup de traumatismes des enfants. Qu'est-ce que vous entendez par ce mot conflit
- Speaker #0
Ce livre vient essentiellement pour montrer qu'il y a une confusion trop grande qui est faite entre les conflits et les violences, au moins en France. Donc j'ai beaucoup travaillé sur la violence conjugale et je trouve qu'on généralise un peu vite les situations. C'est-à-dire que quand dans une famille on hausse un peu le ton, on a tendance à parler de conflit. Et quand la police intervient, parce que ça fait beaucoup de bruit, on utilise le terme conflit d'une façon un peu trop généraliste. Or, justement, dans ce livre, j'essaie de faire la distinction entre un conflit, qui est quelque chose pour moi qui est normal. Je ne connais pas de personne qui se sépare du père ou de la mère de son enfant sans qu'il y ait des conflits. Si on se sépare, c'est que ça ne va pas. Donc c'est normal qu'il y ait un conflit, mais ça ne doit pas être catalogué systématiquement de violence. Donc ça me paraît important aussi de faire la distinction entre des violences réactionnelles, ponctuelles. On n'est pas d'accord sur quelque chose, il y a une confusion. Mettons l'un des parents vient chercher l'enfant chez l'autre et l'enfant n'est pas prêt. où il y a des problèmes d'organisation autour des vacances scolaires, etc. Et on peut, parce que quand on se sépare, on est dans l'émotion, on est dans la fragilité, et donc il peut se faire qu'on dérape ponctuellement. Donc ça pour moi, c'est de la violence réactionnelle. Ensuite, il y a des vrais états de violences conjugales avec du contrôle coercitif, ou en tous les cas une violence installée qui est plus souvent d'un homme sur une femme. Et ça, on sait qu'au moment de la séparation, ça vient s'aggraver. Et ça peut même être terrible dans le post-séparation. Et puis il y a aussi d'autres situations, qui sont des situations, ce que les Québécois appellent les conflits sévères de séparation, où de toute façon, souvent parce que l'un a un trouble de la personnalité ou une personnalité difficile, les dysfonctionnements se poursuivent pendant des années et des années après la séparation. Et puis il y a des manipulations en forme, qui est un sujet extrêmement polémique, tout du moins en France. Et il me paraissait important de bien montrer ces distinctions. Ce que je reproche au système juridique français, c'est justement de tout mettre dans le même package. Dès que dans une famille on élève un peu le ton ou dès qu'on fait appel à la justice, on parle de conflit parental. Mais conflit parental au sens tellement vague qu'on le traite mal forcément. Donc, Le but de ce livre, c'est pour les parents qui ne le savent pas, mais aussi pour les magistrats. J'enseigne à l'école de la magistrature, j'enseigne pour des magistrats, et ils le disent eux-mêmes qu'ils ne sont pas suffisamment formés. Et d'ailleurs, il y a eu un rapport qui a été rendu au gouvernement pour pointer qu'il y avait un manque de connaissances de la part des différents intervenants. J'espère que ce livre est un ouvrage grand public, mais c'est aussi, me semble-t-il, un outil pour mettre de la nuance, c'est-à-dire ne pas tout mettre dans le même paquet, mettre de la nuance et apprendre que... Justement les choses peuvent évoluer. Il y a des situations fluctuantes où au début on a l'impression qu'on est dans la violence très grave et puis ça évolue. Et puis on se rend compte que les parents quand ils sont un peu moins dans l'émotion immédiate, arrivent à dialoguer et que quelque chose peut, en tous les cas dans l'intérêt des enfants, se passer très bien.
- Speaker #1
C'est intéressant ce que vous dites. On va revenir aussi sur les propositions que vous faites justement pour réformer le système de justice. Mais on va revenir au tout début. Dans l'introduction de votre livre, vous posez des chiffres importants, je trouve, et notamment celui qu'on connaît bien, nous, dans le podcast, qui est qu'un couple sur deux quasiment divorce actuellement. Et vous dites même, en fait, les chiffres sont sans doute plus élevés parce qu'on ne tient compte que des personnes... qui étaient mariés ou paxés, on ne tient pas compte des personnes qui vivent en union libre. Comment est-ce que vous expliquez cette augmentation des séparations ?
- Speaker #0
Je crois qu'on se sépare de plus en plus tôt avec des enfants de plus en plus jeunes parce qu'en fait on idéalise énormément le couple et l'amour surtout. C'est-à-dire qu'on a un désir de passion, de relation amoureuse intense. Et c'est merveilleux au début, mais le quotidien, surtout quand on a des enfants, c'est beaucoup moins glamour. Lorsqu'on a des enfants, on est très pris par les problèmes organisationnels et s'occuper de l'enfant. Comme il y a toujours une inégalité qui persiste entre les hommes et les femmes sur le plan des tâches ménagères et des tâches familiales, il y a forcément des conflits dans le couple. Je crois que toutes ces inégalités, inégalités de partage des tâches, inégalités de revenus, le fait d'être fatigué parce que les enfants c'est fatigant, il faut être réaliste, ça va faire qu'il y a assez rapidement une désillusion par rapport au couple, mais aussi par rapport à l'autre. Beaucoup de femmes ont pris beaucoup d'autonomie. Maintenant, les femmes travaillent. Elles sont capables d'avoir des revenus, même si c'est souvent inférieur à ceux des hommes. et elles savent se débrouiller toutes seules. Et au fond, la question, c'est à un moment, c'est quel besoin j'ai d'être avec un homme, d'être avec le père de mes enfants. Donc, il faudrait qu'il y ait beaucoup d'amour pour que ça se perpétue. Et le côté glamour du couple, où on se regarde dans les yeux et on va dîner aux chandelles, ça disparaît assez rapidement. C'est vraiment ce qui explique qu'on se sépare assez vite.
- Speaker #1
Vous dites que maintenant on se met ensemble parce qu'on se marie, on se paxe, on vit avec quelqu'un parce qu'on est amoureux et que l'amour ne dure pas undefined. Ça ne se travaille pas un petit peu quand même l'amour, la relation amoureuse ?
- Speaker #0
Oui, c'est même ce que j'essaie de faire avec mes patients, de les aider à… pour préserver leur couple, le couple conjugal au-delà du couple parental. Mais on voit assez vite qu'entre le travail, qui est parfois investi et même surinvesti, et les enfants qui occupent de plus en plus de temps, puisqu'ils sont vraiment devenus centrales dans le couple, on se rend compte assez vite qu'un certain nombre de... personne, homme ou femme, désinvestisse la relation amoureuse.
- Speaker #1
Est-ce qu'il n'y a pas un moment où on peut justement essayer de sauver le couple ? Quand est-ce qu'on peut dire que c'est trop tard, en fait ?
- Speaker #0
Moi, je considère que c'est jamais trop tard. Il faut absolument toujours essayer de sauver le couple. Sauf que notre monde est un monde très narcissique, où chacun est centré sur lui-même et n'est pas prêt à se sacrifier pour l'autre. Très souvent, l'amour que l'on a dans un premier temps d'une relation est un amour assez narcissique. Je l'aime parce qu'il me valorise. où elle me valorise. J'ai besoin d'être au centre de la relation. Je précise que j'ai écrit précédemment un livre qui s'appelle Les Narcisses sur la société narcissique parce que je crois, j'ai vu, puisque je travaille depuis très longtemps, j'ai vu cette évolution du fait qu'on est de plus en plus centré sur soi. Et ça a été aggravé après la période de Covid, où les gens se sont retrouvés seuls et ont eu l'impression qu'ils n'étaient pas suffisamment accompagnés.
- Speaker #1
Ce n'est pas un peu lié à un manque d'estime de soi aussi, d'avoir besoin d'être valorisé comme ça par l'autre ?
- Speaker #0
Oui, alors c'est tout le paradoxe du narcissisme. C'est que quand on est trop narcissique, singulièrement on manque de confiance en soi et on n'a pas une bonne image de soi. c'est parce qu'on n'a pas une bonne image de soi que l'on se met dans ce genre de situation. Et donc, on essaie de se rehausser à travers l'autre et du coup, ça tourne rond.
- Speaker #1
Alors, la solution, ce ne serait pas de se faire une bonne petite thérapie avant de commencer à se lancer dans une relation ?
- Speaker #0
ben oui absolument voilà on a réglé le problème je crois réellement qu'il ne faut pas attendre du couple qui vienne régler tous nos problèmes je crois que très clairement il est important d'avoir suffisamment travaillé sur soi pour être réellement dans une relation de couple et se regarder ensemble et être bien ensemble oui
- Speaker #1
Marie-France, vous dites aussi dans votre introduction que les séparations sont majoritairement le fait des femmes. Trois quarts des décisions de séparation viennent des femmes. Comment est-ce qu'on explique ça ?
- Speaker #0
On explique ça par l'évolution de la société. Très clairement, jusqu'à présent, le couple et les familles, il y avait un homme qui était chef de famille, qui décidait tout, l'essentiel, et les femmes ne travaillaient pas et elles n'avaient pas accès. au compte, à l'argent. Maintenant, les femmes, la grande majorité des femmes travaillent, même si elles gagnent moins d'argent que leurs partenaires. Elles ont pris confiance en elles. Il ne faut pas oublier que, grâce à d'abord la pilule, puis la possibilité d'avortement, ce sont maintenant les femmes qui décident d'avoir ou pas un enfant. Donc, c'est un pouvoir très grand qu'elles ont pris là, Et en même temps, parallèlement, les hommes ont été fragilisés. J'ai pas mal travaillé sur le harcèlement moral au travail. Très clairement, dans le monde du travail, plus personne n'est sûr de garder son emploi. On est en insécurité, hommes et femmes. Et donc les hommes ont été fragilisés comme ça, sans compter aussi qu'autrefois, c'était les pères chefs de famille qui disaient ce qu'il y avait à savoir, qui disaient aux enfants, qui apprenaient les choses aux enfants. Maintenant, les enfants apprennent par leurs copains, par les réseaux sociaux, et les femmes peuvent idéalement accéder à tout tout à fait également.
- Speaker #1
Et elles peuvent leur apprendre des choses aussi.
- Speaker #0
Elles peuvent aussi leur apprendre des choses.
- Speaker #1
J'espère,
- Speaker #0
j'espère. Le problème, c'est que ce chemin que les femmes ont fait, ont accompli, les hommes n'ont pas fait autant de chemin. Très clairement, beaucoup d'hommes sont encore dans un schéma plus traditionnel. Leur modèle de virilité est encore un modèle basé sur la force, la compétence, les belles voitures, etc. Pas tous, bien sûr, mais en tous les cas un certain nombre. Alors que les femmes, maintenant, sont dans l'égalité financière, ou presque. sexuel, l'autonomie. J'entends par exemple très souvent des femmes qui me disent il est pénible, j'ai pas deux enfants, j'ai trois enfants parce que je dois m'occuper de lui en plus. Il faut que je lui fasse à manger, mais il est difficile. Quand il est malade, c'est une catastrophe, il faut que j'aille le dorloter. Et moi, il ne se pose pas la question de ma fatigue. Et j'entends des femmes qui me disent je ne serai pas plus mal toute seule, surtout si on est en résidence partagée, j'aurai au moins une semaine pour être tranquille
- Speaker #1
Alors on va revenir là-dessus, parce que la résidence partagée, ce n'est pas gagné non plus en France. Non,
- Speaker #0
ce n'est pas gagné non plus.
- Speaker #1
Et je vous parle depuis la Belgique, on est un petit peu plus en avance.
- Speaker #0
Vous êtes plus en avance que nous, oui.
- Speaker #1
Je me demandais si ce n'était pas aussi peut-être que les hommes avaient peut-être plus de résilience pour se complaire dans une relation qui ne fonctionne pas, peut-être par flemme. C'est difficile de généraliser aussi sur les genres comme ça.
- Speaker #0
Je pense que vous avez raison, mais... Je crois que c'est pas tellement la résilience. Je pense que des femmes supportent beaucoup, même quand il y a de la violence, supportent longtemps. Mais le jour où elles décident de partir, elles partent vraiment, même si matériellement c'est difficile. Tandis que les hommes effectivement s'accommodent d'une situation insatisfaisante parce qu'ils vont chercher ailleurs une compensation, on va dire. C'est-à-dire, ils vont chercher ailleurs soit dans leur réussite professionnelle, ils surinvestissent leur travail et ne sont jamais là. très absent, ou bien ils peuvent avoir des aventures amoureuses dont ils se protègent en disant je ne peux pas, je ne peux pas plus parce que je suis mariée Donc ça, c'est encore quelque chose que l'on voit, oui, effectivement. Et donc, ils tombent des nues quand leur femme leur dit mais écoute, c'est fini, j'ai décidé de me séparer Dans le livre, j'insiste beaucoup sur la notion d'attachement. C'est quelque chose que l'on connaît, la théorie de l'attachement, mais ce qu'on avait laissé de côté, c'est que le fait que cet attachement essentiel pour le développement d'un bébé, ce n'est pas simplement la mère qui peut permettre ça, c'est également le père, et que idéalement, si les deux s'occupent ensemble de l'enfant, sont concernés très intimement par ce bébé, c'est un plus pour le développement de l'enfant. Je crois que c'est tout un bouleversement, encore une fois, qui peut être merveilleux et positif, mais ça peut aussi fragiliser et faire déraper un couple.
- Speaker #1
Vous parliez tout à l'heure justement de cette société narcissique, de notre rapport narcissique qu'on avait à l'autre. Est-ce que justement l'arrivée d'un enfant, ça ne peut pas venir complètement bouleverser cette relation narcissique qu'on a essayé d'entretenir avec l'autre, tant bien que mal ?
- Speaker #0
Beaucoup d'hommes, par exemple, ont l'impression, depuis qu'elle est mère, elle n'a Dieu que pour ce bébé et moi je n'existe plus. Et je crois qu'effectivement, il y a un risque d'être englouti en quelque sorte par l'enfant et d'être tellement centré sur ce bébé qu'au fond, on est dans une relation fusionnelle qui se perpétue. Dans un couple, il y a, au-delà de l'amour, il y a un attachement. On parlait d'attachement à propos de l'enfant, mais il y a aussi un attachement dans le couple, c'est-à-dire une confiance. L'autre est la personne à qui on va confier des choses intimes. Et en cas d'annonce de séparation, c'est un monde qui s'écroule. Si on est... encore attaché, c'est toute la difficulté, c'est qu'on peut être à la fois, avoir envie de se séparer et être encore attaché. Donc on a des personnes qui font des allers-retours. avec un peu plus d'accrochage, je dirais, et puis qui, en même moment, vont faire des reproches à l'autre. Tous ces mouvements-là, je dirais, c'est normal. Je ne connais pas des gens qui se sont aimés et qui se séparent sans conflit et sans turbulence, forcément.
- Speaker #1
On a parlé un petit peu déjà de la résidence alternée. Vous expliquez dans votre livre, vous reprenez des chiffres qui sont des chiffres officiels. En France notamment, c'est 12% simplement des enfants de parents séparés qui vivent en résidence alternée. Dans 63% des cas, ils sont chez leur maman. Et là on parle de couples hétéros, mais je ne sais pas d'ailleurs quelle nuance on peut apporter pour les couples homos par rapport à ça.
- Speaker #0
C'est à peu près pareil.
- Speaker #1
Dans 12% des cas seulement, en fait, les enfants voient très peu. L'un des autres parents, leur père en général, il le voit un week-end sur deux, par exemple, et pendant les vacances scolaires. Je crois que c'est un petit peu le schéma traditionnel en France. Qu'est-ce qui pose problème ici ? Qu'est-ce qui pose problème pour l'enfant ?
- Speaker #0
D'abord, les chiffres sont comme ça en France, parce que la justice fonctionne à l'ancienne encore, avec les schémas traditionnels. Et même si les juges essaient de privilégier le lien entre les deux, la persistance du lien avec les deux parents, ce n'est pas aussi facile. Mais même quand la séparation ne se passe pas devant la justice, les chiffres ne sont pas mieux. Dans les séparations amiables où on ne passe pas devant la justice, je crois, alors il faudrait que je retrouve les chiffres, dans 70% des cas, si le lieu de résidence est le plus souvent confié à la mère, Ça ne vient pas uniquement du système judiciaire français qui essaie de privilégier tant bien que mal une résidence partagée, mais ça vient plutôt du fait que les mentalités n'ont pas complètement changé. Lorsque la séparation se fait à la miarbe, ce qui est le cas dans 80% des séparations, la résidence principale est confiée à la mère dans 70% des cas.
- Speaker #1
Mais comment ça se fait ?
- Speaker #0
Quand ça dépend de la justice, les pères ne demandent pas la résidence. Parce que pour beaucoup d'hommes, il y a peu de résidences alternées en France. Je précise que les chiffres sont en train d'évoluer, ça s'améliore. Parce que la plupart du temps, même dans les séparations à l'amiable, les parents le décident comme ça. Beaucoup de mères considèrent que comme elles se sont plus occupées de l'enfant, il est normal qu'elles aient plus de temps par la suite avec l'enfant. Et beaucoup de pères ne sont pas prêts à déranger leur... situation professionnelle pour les enfants. Il est vrai qu'en France, le congé parental est pris pratiquement uniquement par les mères et pratiquement pas par les pères. Alors, il faudrait qu'au niveau des entreprises, ça change pour encourager les pères à s'occuper un peu plus de leurs enfants.
- Speaker #2
Est-ce que vous voulez dire que ça serait un impact au moment de la séparation ?
- Speaker #0
Ça a un impact considérable.
- Speaker #2
Parce qu'ils seraient davantage habitués à s'occuper des enfants quand ils…
- Speaker #0
Ils s'occupent peu des enfants, ils ne prennent pas les congés parentaux. Et donc, ils n'ont pas cette proximité avec l'enfant et ils n'ont pas le quotidien avec l'enfant. Donc, au moment de la séparation, ça continue à fonctionner. De cette façon, je pense à un de mes patients qui était idéologiquement pour la résidence partagée, mais qui… Sur un plan pratique, il m'a dit écoutez, j'ai demandé simplement une garde élargie parce que la mère de mon enfant est enseignante, donc elle a plus de temps libre que moi, et que moi, sur le plan professionnel, je joue ma carrière en ce moment, je ne peux pas me libérer le soir pour aller chercher mon enfant à la crèche, etc. Donc ça, c'est un des éléments. Un autre élément important, c'est que… Pour avoir une résidence partagée, ça coûte de l'argent. Il faut deux logements. il faut habiter pas très loin de l'école, ou du même endroit, et que dans beaucoup de familles, ce n'est financièrement pas possible.
- Speaker #2
Mais comment on fait alors ? Parce que la maman, si c'est la maman qui a la garde, elle devra aussi faire face à ces charges financières comme… Oui,
- Speaker #0
alors généralement, ce que l'on voit devant la justice, c'est que les juges attribuent le logement. familial à la mère. Et le père va habiter dans un studio parce qu'il doit payer aussi plein de choses et qu'il n'a pas beaucoup d'argent. Et donc ça c'est des situations que l'on rencontre très très fréquemment. Et puis il y a aussi des familles où on est encore dans le modèle de couple à l'ancienne, où la mère doit s'occuper des enfants et le père doit aller à l'extérieur gagner de l'argent.
- Speaker #2
Mais aussi je dois dire, je dois un peu tempérer ça, parce qu'on voit de plus en plus aussi de papas qui revendiquent. ce droit à une garde alternée. Et ce n'est pas forcément si simple à obtenir.
- Speaker #0
Oui, absolument. D'abord, ce n'est pas toutes les catégories de population. Il y a des pères qui réclament un droit à l'enfant alors qu'ils ne se donnent pas les moyens de ce droit à l'enfant, c'est-à-dire avoir un logement et avoir ce qu'il faut pour s'occuper de l'enfant. Et socialement, les pères qui demandent et qui finissent par obtenir la résidence de l'enfant sont souvent dans des milieux socio-culturels plus favorisés.
- Speaker #1
Merci pour votre écoute. Je suis Pamela Morinière et vous écoutez Quelque chose à vous dire, le podcast des parents séparés. Si le podcast vous plaît, n'hésitez pas à le partager, à en parler autour de vous et à lui mettre 5 étoiles sur vos plateformes d'écoute Spotify et Apple Podcast, ainsi que des commentaires positifs pour aider le podcast à remonter dans les classements et devenir plus visible. Si vous souhaitez me contacter ou me suggérer des invités ou de nouveaux thèmes à explorer dans le podcast, Laissez-moi un message sur les réseaux sociaux Instagram et Facebook Quelque chose à vous dire podcast ou envoyez-moi un email quelquechose à vous dire podcast arrobas gmail.com Quelque chose à vous dire podcast arrobas gmail.com Je vous lis et je vous réponds. Rendez-vous dans 15 jours pour un prochain épisode et d'ici là, portez-vous bien. Ciao !