- Speaker #0
Ce qui nous coûte le plus cher, c'est l'inflation normative. Moi, je viens du milieu du privé, donc j'ai fait ce qui était naturel pour moi, une boîte. Ce que je cherche, c'est un équilibre. Donc en fait, ce sujet-là, de gagner de l'argent, on va se le dire, tu perds de l'argent, t'es mort, point.
- Speaker #1
À quoi ressemblerait ta crèche si tu pouvais t'entourer des meilleurs ? Moi, c'est ce que j'ai fait. Pendant les 15 dernières années, de la crèche collective associative à la micro-crèche privée, j'ai tout expérimenté. La petite enfance est un métier à forte contrainte, mais aussi à forte valeur ajoutée. Avec les meilleurs psys, pédiatres, directeurs pédagogiques et les meilleures formations, j'ai pu développer la qualité d'accueil et la qualité de vie au travail. Alors si toi aussi tu es motivé par la qualité, bienvenue dans Références Petite Enfance, bienvenue dans ton podcast. Bonjour à tous et bienvenue dans Références Petite Enfance. Dans ce podcast, on a décidé d'explorer sans détour les enjeux du secteur de la petite enfance. Et c'est pour ça... que j'ai le plaisir d'accueillir à nouveau Tanguy Desandres, cofondateur des parents zen. Tanguy, il est justement sans détour, il dit tout et ça fait du bien, ça rafraîchit. Vous avez été nombreux, très nombreux à écouter le premier épisode et à réagir, cet épisode qu'on a sorti en mai 2025. Et c'est justement pour ça que ce deuxième épisode avec Tanguy m'a semblé indispensable. Parce qu'à côté des bravos très enthousiastes, on a eu aussi quelques critiques acerbes. Il y a des gens qui nous ont accusés d'être des vilains commerçants, de parler d'argent dans un secteur qui, selon eux, devrait rester à l'abri de toute logique économique. Comme si défendre une crèche de qualité et assurer sa viabilité financière, c'était incompatible. Pourtant, Tanguy n'est pas juste un entrepreneur, c'est un homme engagé dans la démocratisation de l'accès à la crèche et aussi dans la réduction des inégalités hommes-femmes. Et c'est aussi un employeur dans le secteur puisqu'il a lui-même 14 crèches. de creuser cette zone de tension entre valeurs éducatives et contraintes financières. Alors aujourd'hui avec Tanguy, on va se demander si on peut vraiment gérer une crèche sans trahir ses valeurs. Comment être un bon employeur dans un secteur en tension ? Pourquoi certains gestionnaires choisissent-ils de vendre leurs structures ? Et comment le faire sans renier leur mission ? Et surtout comment concilier les valeurs humaines et la viabilité financière ? Voici les questions auxquelles nous allons tenter de répondre aujourd'hui avec mon invité. Bonjour Tanguy.
- Speaker #0
Bonjour Amale, comment vas-tu ?
- Speaker #1
Je suis ravie de te voir. Je sais qu'on va pouvoir creuser les sujets sans tabou avec toi. Et c'est ça qui est bon. Comme je disais en intro, on a sorti un premier épisode qui a fait beaucoup réagir parce que quand j'ai publié l'épisode, j'ai dit assez factuellement que grâce à toi, il y avait 10 millions d'euros qui arrivaient tous les ans dans les structures de crèches privées. Donc, tu lèves des fonds pour les crèches par ton action, puisqu'à chaque fois que tu réserves une place. C'est tout simplement en moyenne 10 000 euros qui vont venir alimenter le budget de la crèche. Et c'est comme ça qu'on finance l'accueil et qu'on finance la qualité d'accueil. Malgré tout, malgré mes efforts pour montrer à quel point c'est vertueux, certaines personnes nous ont critiqué avec virulence parce que le sujet de l'argent dans les crèches et dans la petite enfance est encore tabou. Comment tu as vécu ces critiques, toi Tanguy ? Est-ce que ça t'a fait réagir ? Est-ce que ça t'a blessé ? Est-ce que tu t'y attendais ?
- Speaker #0
Je trouve qu'aujourd'hui, il y a des gens qui sortent un peu du bois. dans une forme de violence, leur pensée qui est anti, souvent anti-privé par exemple, mais sans réfléchir une seule seconde. Je trouve ça un peu triste parce que ce n'est pas du tout l'esprit du doute à la française, l'esprit cartésien où justement on aime le débat pour construire son idée.
- Speaker #1
C'est vrai qu'avec ces personnes-là, moi j'ai senti qu'il n'y avait pas trop de débats. À la fois, il y en a qui sont plutôt admiratifs de ce que tu as fait. J'en fais partie puisque j'en ai bénéficié moi en tant que gestionnaire de crèche. Et puis, les autres, c'est une fin de non-recevoir. Il n'y a pas de discussion sur le sens de tout ça. Or, je pense que toi comme moi, on est des personnes pragmatiques. On fait partie d'un système et on travaille dans ce système. Ce n'est pas forcément nous qui faisons le système, on s'adapte. Nous traiter, nous, de capitalistes, c'est un faux débat, c'est un faux procès. Les crèches ont besoin d'argent. Il faut des gens comme toi pour donner cet appel d'air aux crèches, pour apporter ces fonds qui sont nécessaires à une bonne gestion de crèches. Moi, je trouvais que c'était important. de parler de notre réalité de terrain, la réalité des crèches aujourd'hui. C'est la crise en ce moment et les crèches ont besoin d'argent. Et ton entreprise et ta mission, elles répondent vraiment à ce besoin. Donc ça m'a vraiment perturbée de me rendre compte que c'était aussi mal pris, mal vécu. Est-ce que d'après toi, le système, il est à changer ? Ou est-ce que c'est un système dans lequel on travaille et puis c'est tout, c'est comme ça ?
- Speaker #0
Il y a plusieurs questions. D'abord, comment j'ai pris ça ? Franchement, moi, ça ne m'a absolument pas empêché de dormir. Il y a des gens qui, naturellement... sont opposés à certaines idées. Par exemple, il y a beaucoup de gens qui sont opposés au privé, en particulier dans des métiers comme la petite enfance. J'ai eu l'impression surtout que les gens qui avaient critiqué n'avaient pas écouté le podcast. Ça prouve aussi que ces gens-là, c'est le principe qu'ils détestent et peut-être qu'ils détestent encore plus le fait qu'on essaye de mettre une âme sur notre métier. C'est ce qu'ils se disent. Mais non, ce gars-là est en train de nous convaincre que c'est bien d'être libéral dans un métier qui ne doit pas l'être. Donc forcément, il y a une réaction épidermique. J'ai eu 50 ans il y a quelques semaines, donc je suis vieux.
- Speaker #1
Félicitations, bon anniversaire.
- Speaker #0
Merci. Et du coup, je m'aperçois avec le temps qu'il y a quand même des mondes parallèles qui vivent dans notre pays et dont certains sont en totale opposition. J'ai rencontré plusieurs fois des gens qui étaient du monde public, mais qui ne connaissaient personne. qui venait du privé. Comment veux-tu qu'on s'entende bien dans ces cas-là si on vient d'horizons où on ne se connaît absolument pas ? Moi, j'ai créé les parents zen avec Marine il y a 15 ans en me disant que le privé pouvait apporter des choses géniales à ce secteur d'activité ou à cette mission qui est à la fois publique et associative. J'en suis toujours absolument convaincu et quelquefois il m'arrive de réaliser des missions avec des gens qui ne me ressemblent pas du tout et qui n'ont peut-être pas le même objectif que moi, mais nos objectifs vont dans le même sens, en parallèle. Et donc, on peut travailler ensemble. Je suis conseiller municipal d'un petit village. C'est évident qu'on ne vote pas du tout de la même façon, les uns les autres. Je ne sais pas ce qu'ils votent, mais c'est assez clair. Peut-être même qu'il y a tous les partis politiques qui sont représentés dans notre conseil municipal. On est 11. Mais on s'en fiche. On n'est pas là pour ça. Ce n'est pas l'objet. L'objet, c'est de faire vivre un village. faire en sorte que ça tourne bien et qu'on ait des projets ensemble et que ça dynamise notre village. Moi, j'arrive avec mes gros sabots d'entrepreneurs. J'ai fait une école de commerce, je passe ma vie à animer des projets. Puis il y en a d'autres qui arrivent avec leur touche très sociale. Il y en a qui arrivent avec l'histoire du village parce qu'ils sont beaucoup plus vieux que moi. Et donc, chacun arrive avec les raisons, ses objectifs, sa mission et avec son expertise. Et puis, on la met dans le pot commun et on avance. Pour la crèche... On devrait pouvoir se dire ça. Et moi, c'est vraiment mon idéal. C'est que chacun a ses objectifs de faire avancer les choses. Et puis, comment est-ce qu'on fait pour que nos expertises réciproques fassent avancer la petite enfance en France pour plein de raisons différentes et pour plein d'idéaux différents aussi ?
- Speaker #1
Oui, tu as exactement répondu à ma question. En fait, c'est vraiment un débat idéologique et on aurait intérêt à se rencontrer, à se parler. Donc, c'est ce que je trouve dommage dans les réactions dont je parlais. c'est que Il n'y a pas vraiment d'échange, c'est des fins de non-recevoir et c'est très péremptoire. En réalité, on n'est pas obligé d'être d'accord. Ce n'est pas grave si on ne vote pas pour la même personne pendant les élections. Et l'important, c'est en revanche, c'est qu'on arrive à se parler. Je pense qu'on a quand même à peu près tous le même objectif, c'est la qualité d'accueil pour les enfants, pour les parents et pour les professionnels.
- Speaker #0
Je vais même te dire plus, c'est bien qu'on ne soit pas d'accord. Parce que les gens avec qui je suis d'accord ne m'apprennent rien. Et même, il m'ennuie un peu parce que j'ai l'impression qu'on pense tous la même chose. Donc les gens avec qui je suis d'accord, j'ai plutôt tendance à les fuir sur ces débats et à aller chercher les autres débats avec lesquels on pourrait ne pas être d'accord. Mais discutons plutôt de nos prismes avec des villes, avec des associations, avec des administrations. Discutons de nos prismes et voyons comment s'entraider. Vous m'avez parlé la dernière fois de la CAF avec qui on travaille quelques fois. Bon, là, c'est sûr qu'on n'a pas les mêmes objectifs. Mais eux sont quand même venus me chercher pour que je leur passe mon expertise. Moi, j'étais ravi qu'ils le fassent parce que ça va complètement avec mes convictions.
- Speaker #1
Comment est-ce que ça s'est passé ? Je crois que tu as construit un outil avec la CNAF, c'est ça ? Pour expliquer aux gestionnaires de crèche comment ils peuvent vendre leur place pour avoir un meilleur budget ?
- Speaker #0
Oui, je crois que la démarche de la CNAF, c'est de faire en sorte que les gestionnaires de crèche qu'elles financent soient viables. Et pour qu'elles soient viables, le fait de réserver des berceaux... à des entreprises leur permettent d'avoir une source de revenus diversifiée. La mairie du coin qui aide une association ou un jeune gestionnaire, les familles, la CAF. Mais si en plus il y a les entreprises qui interviennent, ça rend solide le projet d'un gestionnaire, qu'il soit public, associatif ou privé. Du coup, ils sont venus nous voir en disant « Est-ce que vous pouvez nous aider à expliquer à un néo-gestionnaire comment attirer des réservations d'entreprise ? » On lui a dit « Oui, c'est complètement dans notre mission. » notre mission. Elle n'est pas juste de vendre des places. Elle est de faire en sorte que les milliers de gestionnaires français, quel que soit leur statut social, puissent avoir accès aux milliers d'entreprises françaises qui pourraient réserver des berceaux.
- Speaker #1
Mais ça veut dire que pour la CNAF, donc c'était la CNAF, ce n'était pas une CAF locale, tu as donné des outils, tu as fait un des fiches, je ne sais pas comment ça s'est présenté. qui donnaient un petit peu les clés, les coulisses de ton travail. Ce n'est pas très logique. Ça veut dire que tu donnes en fait les clés aux clients, enfin à tes clients au crèche pour faire le boulot eux-mêmes. Moi,
- Speaker #0
d'un point de vue entrepreneurial, évidemment, j'ai besoin de vendre des places en crèche pour exister. Mais d'un point de vue de mission, ce que je veux, c'est faire en sorte que les entreprises puissent financer plus de places en crèche. Et donc là, on rentre complètement dans notre mission d'essayer d'aider tout le monde. En 2010, on crée ma place en crèche et on transforme cette offre de crèche d'entreprise. Avant 2010, une crèche d'entreprise, c'est on construit 4 murs à proximité du siège d'une grosse boîte et on accueille les salariés de cette grosse boîte quotidiennement sur place. Mais ça veut dire que si tu es une petite boîte, tu n'as pas les moyens de te faire une crèche. Si tu es un salarié de grande boîte mais seul en France parce que par exemple tu es commercial pour Coca-Cola dans l'Inde, tu ne peux pas bénéficier de cette crèche parce que la crèche de Coca-Cola n'est pas forcément dans l'Inde. Donc nous on invente un système ... qui fait qu'on ne réserve plus une crèche, on réserve une place en crèche. Et ainsi, toutes les entreprises de France... peuvent réserver des berceaux pour tous les salariés de France. Et la beauté du système, c'est qu'en plus, ces berceaux, on va les réserver à tous les gestionnaires de crèche de France. Et donc, ma fierté, c'est pas d'avoir fait une entreprise qui vaut des milliards et je peux passer mon été en yacht. Ma fierté, c'est d'avoir mis ma petite pierre à l'édifice et fait en sorte que les gens peuvent avoir accès à une place de crèche d'entreprise. Il n'y a pas une entreprise qui ne peut pas être servie d'une place de crèche, que ça passe par nous ou pas. C'est un autre sujet. Voilà, ça c'est mon autre problème qui fait que ma boîte doit être rentable. Mais ce n'est pas la même chose.
- Speaker #1
Ce n'est pas ta mission. Après, c'est tes contraintes de gestion, mais ta mission, c'est vraiment que ce soit ouvert au plus grand nombre. Et comme tu dis, c'est accessible à n'importe quelle entreprise, même les plus petites. D'après toi, les gestionnaires, maintenant que tu as réfléchi à ça et que tu as formalisé cette façon de vendre des places, c'est quoi leurs erreurs ? Pourquoi elles n'arrivent pas à le faire ? Les erreurs classiques des gestionnaires qui n'arrivent pas à vendre leur place.
- Speaker #0
Non, mais la réalité, c'est qu'un gestionnaire, il est seul dans son coin. Il a énormément de travail à faire. Je ne vois pas pourquoi il serait commercial, déjà. C'est sans doute pas l'être. Et puis, il n'a pas accès à des énormes boîtes. Il n'a pas accès à plein de boîtes. Donc, il n'est pas à côté du DRH de telle ou telle entreprise. D'autre part... Il n'est pas commercial. Il ne sait pas aller voir une entreprise et le convaincre, être à la fois doué fiscalement, puisqu'on a une incitation fiscale qui est très importante. Il faut pouvoir l'expliquer. C'est quand même pas simple. Il n'a pas le temps et la disponibilité pour aller voir deux fois, trois fois, quatre fois une entreprise jusqu'à la convaincre de lui réserver un berceau. Il n'a pas le savoir-faire commercial. Il a toute une expertise pour que son futur client... comprennent qu'il a un besoin, acceptent ce besoin et ensuite trouvent une façon de résoudre ce besoin. Ça, mine de rien, c'est une expertise et nous, c'est notre métier de le faire. Et puis, nous, on a ce métier commercial et puis on a aussi constitué un énorme réseau qui fait qu'on a l'offre. Parce que ton petit gestionnaire de crèche de Londres, il n'a pas l'offre. Il a une crèche, il a cinq crèches dans Londres. Il n'a pas forcément la capacité de répondre aux besoins de l'entreprise qui va croiser demain.
- Speaker #1
Donc, ce n'est pas forcément des erreurs, en fait, si j'entends bien ce que tu dis. La plus grosse erreur, c'est un petit peu d'y aller sans discours, sans avoir préparé son discours commercial, de ne pas trop savoir comment on va négocier le contrat. Mais en même temps, tu dis toi-même, ce n'est pas vraiment une erreur parce que ce n'est pas des experts de la vente et qu'ils ont tellement d'autres Ausha à fouetter. Donc, on ne peut pas vraiment dire que c'est une erreur. Est-ce que tu pourrais me dire s'il y a des crèches qui sont plus vendables, entre guillemets, que d'autres ? S'il y a des critères qui font que quand tu rencontres une crèche... Tu sais que cette crèche-là, elle va avoir beaucoup plus de succès auprès des entreprises ?
- Speaker #0
L'immense critère, c'est la localisation de la crèche. On a énormément plus d'entreprises qui réservent des places en crèche en milieu urbain, en particulier en Ile-de-France. Et plus on s'éloigne de Paris, moins on a de densité de réservation. Avec un jardin, c'est un sujet très important. À Paris, il y a aussi beaucoup de gens qui vont au milieu urbain, il y a aussi beaucoup de gens qui voudraient des crèches bilingues, etc. Moi, je ne suis pas forcément pro ça, parce que je trouve qu'aujourd'hui, c'est tellement difficile de bien accueillir les enfants qu'ajouter des contraintes à ce métier qui n'est pas simple, ce n'est pas gagner d'avance.
- Speaker #1
Est-ce que tu penses que justement les crèches, mis à part la localisation et le jardin, peuvent se différencier en, par exemple, ayant un très beau... site internet en expliquant vraiment très bien leurs valeurs éducatives, en mettant des belles photos qui montrent le lieu pour que les parents puissent vraiment se projeter. Est-ce que tu penses que ça a un impact ?
- Speaker #0
Oui, c'est évident. En tant que personne habituée à internet, on a un prérequis minimal, comme tout le monde, qui est assez important. Je pense qu'il faut d'abord être très sincère. C'est-à-dire, on parlait de l'anglais tout à l'heure. Si tu dis que tu as une crèche bilingue, tu le fais, tu le fais bien. Il ne faut pas jeter de la poudre aux yeux.
- Speaker #1
Oui, j'allais te demander comment tu peux préparer une crèche qui vient te voir et qui a peur de trahir sa mission, qui se dit « oh là là, je vais voir une plateforme » . Comment on fait pour ne pas trahir sa mission en décidant de vendre ? Et c'est un peu ce que tu dis là, c'est la sincérité, le message.
- Speaker #0
Effectivement, par exemple, un gestionnaire de crèche associatif, c'est constitué vraiment dans un but uniquement altruiste. Le fait de travailler avec nous, il va se dire « je travaille avec une grosse boîte » . de parisienne, capitaliste.
- Speaker #1
C'est du vécu, tu as rencontré ce genre de cas, tu as des exemples concrets en tête ?
- Speaker #0
Alors déjà, ce qu'on doit déconstruire, c'est que moi je suis un patron de PME, on est 45 sur cette activité d'intermédiaire. C'est pour ça d'ailleurs, presque tous les ans, on a fait une petite soirée avec un gestionnaire. C'est pour discuter entre nous, créer de la proximité. Moi ce que j'aime énormément, c'est les relations humaines, c'est construire ensemble, c'est avoir des idées, c'est mieux se connaître, découvrir des gens. C'est pour ça. absolument passionnante.
- Speaker #1
Dans tes soirées, c'est beaucoup rencontrer nous les gestionnaires.
- Speaker #0
Tu étais venue plusieurs fois.
- Speaker #1
Je suis venue beaucoup de fois. Et ça nous a permis vraiment de créer du lien. Et c'est vrai que c'est un plus énorme. On peut échanger sur nos pratiques, se faire des copains. Ça nous permet d'étendre notre réseau, un peu comme un club ou une fédération. Et c'est vrai que quand on est tout seul dans son bureau à la crèche, c'est sympa d'avoir rencontré d'autres gestionnaires à une soirée et de pouvoir les appeler au secours, commisérer ou juste demander un conseil.
- Speaker #0
Exactement. Donc oui, il y a des gens qui nous voient un peu comme la grosse boîte parisienne. Nous, on n'est que 45. On est là, entre égaux, pour apporter ce maillon entre les entreprises et les crèches. On travaille très bien avec quelques villes. Ils sont heureux qu'on puisse leur réserver des places en crèche parce que ces places... sont financées par des entreprises au lieu d'être financées par la ville elle-même. Donc si par exemple je lui réserve 12 places à cette ville dans l'année, et bien ça lui débloque un budget additionnel pour ouvrir une micro-crèche de 12 berceaux. Ça c'est génial ! Alors on peut lui reprocher, on peut reprocher au conseil municipal de marchandiser son service. Ben oui c'est le cas ! Sauf qu'en le marchandisant, elle va ouvrir 12 places supplémentaires. Il n'y a que des gagnants. Et une association qui vient nous voir, qui nous dit... que la ville qui la finance a ces fonds, ces budgets qui sont resserrés comme des boulons chaque année et qui nous dit comment vous fonctionnez. On sent bien que ce n'est pas sa nature de traiter avec des gens comme nous. Comment vous fonctionnez ? Et que nous, on lui dit, effectivement, nous, on pourrait avoir des besoins dans votre crèche. On serait ravis de pouvoir vous faire une réservation. Et en plus, vous faites un métier formidable. Bravo. Si nous, on peut vous donner un petit coup de main, on sera hyper fiers de le faire. Et franchement, tout le monde est content. Et si ça permet à cette association d'avoir des interventions de psychomotriciens, donner un coup de blanc à ses murs, de faire vivre la société, on en a qui coulent.
- Speaker #1
C'est ce que je disais quand je parlais des fonds que tu injectais avec ta boîte dans l'accueil. C'est vraiment ce financement que tu permets d'ouvrir. Moi, je trouve ça assez génial. J'étais quand même étonnée de voir la critique encore aujourd'hui en 2025. Notamment, je me souviens très bien d'un commentaire qui disait... C'est complètement capitaliste. Ils vendent des places à 14 000 euros et en fait, ils ne reversent que 10 000 ou 11 000 euros à la crèche. Tout ça pour financer une plateforme. En fait, ce n'est pas tout ça pour financer une plateforme. On est en train de payer des gens, des personnes qui répondent à des parents, qui appellent des entreprises et qui font tout ce travail de réservation de places à la place des directrices de crèche ou des employeurs. Ça permet à ce gestionnaire et à cette directrice de faire son boulot sur le terrain. prix qu'on paye pour avoir ce service de réservation de place via une entreprise comme la tienne. Je te propose de parler du deuxième sujet que je voulais aborder aujourd'hui, c'est ton rôle d'employeur, puisque tu as décidé d'ouvrir des crèches, de pas t'en tenir à simplement avoir cette activité de réservation et tu t'es confrontée au terrain, alors que franchement, c'est pas facile tous les jours. En tant qu'employeur, déjà ce que tu peux me dire, c'est quoi tes valeurs ? Puisque déjà on a vu que la première mission, c'était de démocratiser l'accès. au crèche au plus grand nombre et d'aider les parents et notamment de participer à l'égalité hommes-femmes. Mais en tant qu'empereur de crèche, c'était quoi tes valeurs et ta mission ?
- Speaker #0
Ma mission, c'est toujours de démocratiser la crèche et d'apporter un service aux parents. On s'appelle les parents zen et d'apporter un service aux parents qui leur permettent d'aller travailler sereinement. La crèche a été inventée il y a quelques décennies au moment où les femmes sont allées au travail. et donc où il n'y avait plus personne au foyer pour s'occuper des enfants. Moi j'en reviens beaucoup à cette mission de faire en sorte que les parents puissent aller travailler mais en essayant de leur ôter. Tant que faire se peut, la mauvaise conscience que vous, mesdames en particulier, vous portez très fort.
- Speaker #1
Tu sais qu'il y a eu un rapport qui vient de sortir, un rapport parlementaire qui est sorti le 24 juin et qui rappelle qu'en fait, encore en 2025, c'est toujours la même chose. Il y a une pénalité qui est subie par les femmes, qui fait justement de leur rôle sociétal. Bon, alors que moi, je pensais que les choses avaient beaucoup évolué. Apparemment, pas du tout. Et il met en avant justement ce rapport, le besoin de place en crèche. Moi, je l'ai vécu en tant que maman. Quand j'ai eu ma petite fille en 2007, c'était il y a longtemps. Je pensais vraiment, je te dis que ça avait beaucoup évolué, mais peut-être pas tant que ça. Mais c'est vrai que quand j'ai eu ma fille en 2007, j'ai vécu vraiment cette pénalité. Je l'ai reçue dans la figure, puisque j'ai été sanctionnée dans les augmentations de salaire, les évolutions salariales, etc. Et puis après, le fait de pouvoir avoir accès en crèche, une place, ça m'a libérée aussi du poids de la solitude que j'avais quand j'étais toute seule chez moi avec mon bébé. Donc, plein d'éléments que j'ai vécu dans ce que tu dis. Je trouve qu'en effet, avoir des places en crèche pour les familles, c'est un vrai soutien. Je pense que le vrai soutien à la parentalité, il est peut-être là. Donc, employeur, comment tu vis ton rôle auprès des pros de la petite enfance ?
- Speaker #0
Écoute, il faut croire que j'ai un immense sens du timing, parce qu'ouvrir des crèches à partir de 2021-2022, c'était vraiment très, très bien vu de ma part. Je n'ai visiblement pas cette qualité. En revanche, on est au pignâtre, on a plutôt un goût du travail, je ne vais pas en zen. Et donc, on va laisser passer les orages, les choses comme ça, pour une période meilleure. Et pour l'instant... On construit nos crèches relativement doucement parce qu'on est déjà une entreprise constituée, donc on aurait pu aller plus vite. Mais on garde ce prisme de parentalité, on garde cette marque Les Parents Zen et on essaye de faire des crèches dans lesquelles on déposerait nos enfants. Ça fait vraiment partie de notre prisme. Le nom Les Parents Zen, c'est bien parce que ça nous oblige. Donc quand on prend une décision, c'est est-ce que ça permet de donner une meilleure conscience aux parents ? Est-ce que ça leur permet d'être plus sereins ? Et c'est comme ça qu'on avance. Après, sur la partie RH, c'est compliqué. C'est extrêmement compliqué.
- Speaker #1
Est-ce que tu as des astuces ? Est-ce que tu as mis des choses en place en termes de qualité de vie au travail, de rétention, de fidélisation ? Est-ce que tu as des salariés qui sont restés plus d'un an dans tes crèches ?
- Speaker #0
Oui, oui, oui, bien sûr. Et de plus en plus. D'abord, on s'est dit, le truc facile à faire, c'est d'augmenter le nombre de journées pédagogiques. Les familles sont OK. Donc, on a mis quatre jours pédagogiques dès la première année. Ils comprennent, ça leur va même bien. Parce que le fait de former les pros, c'est pour eux.
- Speaker #1
Donc là, tu as quatre journées pédagogiques par crèche.
- Speaker #0
On a quatre journées pédagogiques. Ensuite, il y a quelques mois, on vient de mettre en place une prime d'assiduité de 100 euros supplémentaires. Il y a des pros qui regrettaient de ne pas avoir de prime. Je me suis dit que c'est peut-être un levier pour souligner encore plus qu'arriver à l'heure. et venir au travail le lendemain, c'est indispensable au bon fonctionnement de l'équipe. Et le fait qu'il y ait une prime, ça permet aux directrices de dire deux choses à leur équipe. Ça leur permet d'adresser le sujet en disant c'est très très important que tu arrives à l'heure parce que quand toi tu es en retard, c'est le reste de l'équipe qui se fatigue et plus elle est fatiguée, plus elle démissionnera, plus elle-même posera des arrêts maladie, etc. Donc viens à l'heure et viens le matin.
- Speaker #1
Moi, je trouve que c'est hyper important, les primes d'assiduité. Moi aussi, j'en avais une, mais moi, je ne la versais pas tous les mois. Toi, tu la verses vraiment tous les mois. Moi, c'était tous les six mois.
- Speaker #0
Nos professionnels sont excessivement mal payés. Il faudrait qu'elles soient payées infiniment plus. Donc moi, tout ce que j'ai trouvé comme levier pour mieux les payer, je vais le mettre en place.
- Speaker #1
Et là, c'est gagnant-gagnant.
- Speaker #0
Voilà. Des primes qui sont défiscalisées pour nous permettre que l'euro qui nous coûte atteigne le salarié en intégralité, ça, c'est génial. Donc si je peux avoir des primes comme ça, je vais essayer de les leur donner. des primes qui... permettre de faire évoluer le comportement et de faire en sorte que j'ai mes équipes qui se représentent tous les jours à l'heure.
- Speaker #1
Oui, alors là, j'ai envie de dire, c'est super. Peut-être que la pro qui va hésiter sur une absence, elle sera plus motivée pour venir. Mais ce n'est pas très politiquement correct de dire ça. On pourrait nous dire, voilà, mais si on est malade, il ne faut pas aller travailler. Vous voulez payer les gens pour qu'ils ne mettent pas d'arrêt maladie. Donc là, j'ai envie de te reposer ma question initiale sur la tension entre les valeurs. et la viabilité économique. Est-ce que tu as été confronté, dans ton travail d'employeur de crèche, à une sorte de contradiction entre les intérêts que tu voudrais soutenir, c'est-à-dire une qualité d'accueil, peut-être plus de monde sur le terrain, peut-être des actions particulières, et le problème des finances ? On n'est pas assez financés aujourd'hui dans les crèches. Qu'est-ce qu'on fait ? Comment on peut avoir à la fois une très bonne qualité d'accueil et en même temps respecter un budget qui est ce qu'il est ? Est-ce que tu as eu à arbitrer ça ?
- Speaker #0
On est en constante contradiction. Ce que je cherche, c'est un équilibre. C'est un équilibre entre essayer de mettre un maximum de moyens dans mes crèches pour avoir suffisamment de personnel, de bonne qualité, le payer le mieux possible. Et puis quand même gagner de l'argent à la fin de l'année, parce que moi, si je ne gagne pas d'argent, je ne peux pas payer mon personnel de crèche. Donc en fait, ce sujet-là, de gagner de l'argent, on va se le dire, si tu perds de l'argent, tu es mort. Point. Donc il faut arrêter de se poser la question. Je n'ai pas le choix.
- Speaker #1
Ben oui.
- Speaker #0
quand bien même, disons, je ne serai pas en banqueroute. Si je ne gagne pas d'argent à la fin d'année, je fais autre chose. Parce que moi, je n'ai pas envie de me faire suer à longueur d'année. Ce n'est pas pour gagner de l'argent. J'en ai besoin. J'en ai besoin pour ouvrir d'autres crèches. J'en ai besoin pour gagner ma vie. C'est légitime. Il n'y a personne dans ma boîte qui roule en Ferrari, qui va en vacances sur des yachts.
- Speaker #1
Oui, je sais que ton but dans la vie, ce n'est pas d'être en Ferrari et d'aller sur un yacht Tanguy. Je pense que tu es très, très motivé par justement la rétention des salariés. J'ai l'impression dans nos discussions que c'est un truc qui te tient. Tu veux trouver comment faire pour que les gens soient bien dans ta boîte et qu'ils restent ?
- Speaker #0
Moi, je suis entrepreneur comme d'autres pourraient créer un club sportif ou une association. D'ailleurs, on est hyper impliqué dans une association qui nous tient à cœur. Et en fait, on a exactement le même but, c'est entreprendre. Entreprendre, ça veut dire prendre ensemble. construire ensemble. Moi, ma motivation, c'est ça. C'est de créer, de co-créer avec plein de gens, un organisme entrepreneurial avec une mission, avec un impact. Et dans l'association pour laquelle on travaille avec Marine et avec plein de collaborateurs de la boîte, pourquoi on s'est mariés avec eux ? Parce que c'est une association qui grandit, qui a des vertus incroyables, qui sauve des enfants au Cambodge en le cas où je vais faire un peu de pub, elle s'appelle Pour un sourire d'enfant, c'est la plus belle association au monde. Ils sauvent des enfants dans un des pays les plus défavorisés au monde. Qu'est-ce qui nous a plu dans cet assaut ? C'est que c'est une entreprise. Elle construit, elle sauve de plus en plus d'enfants, elle a un projet, elle a une vertu. Et ça, c'est des gens qui s'associent pour produire ça. Et donc, après, lucratif, pas lucratif, public, ça n'a rien à voir. Moi, je viens du milieu du privé, donc j'ai fait ce qui était naturel pour moi, une boîte. Toi, tu as été dans le milieu associatif, si je me souviens bien mal. Tout à fait. Et là, tu es arrivé là où était ta place à ce moment-là.
- Speaker #1
J'étais à ma place à ce moment-là. Après, j'ai préféré avoir ma boîte parce que les associations, c'est vraiment hyper lourd à gérer. Et donc, aujourd'hui, je ne me verrais pas du tout retourner dans le système associatif. Est-ce que tu as un autre exemple peut-être à donner, une action de QVT ?
- Speaker #0
On a beaucoup de référents techniques et de directrices qui sont arrivées il y a quelques mois, qui étaient très juniors en arrivant et que notre équipe les fait se réunir une fois par mois et constituer un groupe. Du coup, les directrices se sentent bien, elles restent dans les crèches, elles se fatiguent beaucoup moins. Le fait de travailler en réseau aide à beaucoup moins se fatiguer, aide à avancer, parce que quand on est seul, on perd énormément d'énergie. Cette énergie, beaucoup cérébrale, de doute, fatigue énormément et à un moment, on peut lâcher. Et j'ai le doux espoir qu'autour de chaque référence technique, les équipes vont se souder. Et que ça, plus la prime, plus plein de petites choses qu'on va essayer de faire, ces équipes vont se fixer un peu autour de la directrice et vont tenir par elles-mêmes. Moi,
- Speaker #1
tu sais, dans nos crèches, on faisait une réunion tous les jeudis de 45 minutes en visio avec les directrices. Celles qui pouvaient, elles venaient au siège, mais l'idée, ce n'était pas non plus de les faire bouger tout le temps. Mais toutes les semaines, on faisait cette réunion toutes ensemble. Et c'est vrai que ça crée vraiment une séance de travail tous ensemble. Ça crée un réseau, comme tu dis. Ça crée une dynamique collective. Ça permet de se connaître. Ça permet d'avoir des sujets en commun. Et ça permet aussi de se sentir moins seule, plus soutenue. se rendre compte que les choses, on les vit comme les autres. Je pense que c'est un très bon axe de travail.
- Speaker #0
Des gestionnaires qui se lancent peuvent se dire « Oui, c'est facile pour lui, il a déjà une équipe, il y a un siège qui travaille et tout. » Moi, je pense que c'est exactement le contraire. Ce que nous, nous vivons est presque plus dur que si je me lançais à monter ma première crèche. Parce que le fait d'avoir déjà une structure, c'est très coûteux. On est moins agile et ça coûte cher. Ça coûte extrêmement cher. Ce qui nous coûte le plus cher. Ce n'est pas seulement l'augmentation des fluides, l'augmentation des matières premières ou même de l'inflation des salaires. C'est l'inflation normative. On nous demande de plus en plus de normes. Il y a de plus en plus de contraintes. Pour moi, il y a un changement de paradigme à mettre en place. Et c'est un peu contre-intuitif. C'est dire faites confiance aux gestionnaires de crèche, publics, associatifs et privés. Et contrôlez-les et punissez-les s'ils font mal leur travail. Alors donner des contraintes dans tous les sens sur les diplômes, sur les taux de présence de professionnels, sur les milliers de contraintes auxquelles on doit répondre aujourd'hui, ça ne nous aide pas à bien faire notre travail. Ce qui nous aiderait à faire notre travail, c'est de travailler ensemble avec les PMI, avec les CAF pour construire ensemble un meilleur accueil. Mais les contraintes, ça nous coûte excessivement cher parce qu'on passe notre vie à remplir des papiers. Là, par exemple, le fait de demander une autorisation aux mairies pour pouvoir ouvrir nos crèches, les mairies ont droit à trois mois d'instruction supplémentaire. Donc moi, je vais voir un bailleur et je vais lui dire, en fait, je ne sais pas si je pourrais ouvrir ma crèche avant six mois minimum. Donc je vais dire au bailleur, je ne signe pas le bail avant six mois. Je vais mettre une clause de sortie pendant six mois. Et pendant ce temps-là, je ne vais pas vous payer votre loyer. Mais quel bailleur va accepter ça ? Donc en fait, c'est la fin. des ouvertures de crèches en location.
- Speaker #1
Moi, j'ai vu aussi d'autres cas. Je sais qu'on a un certain porteur de projet. On voit que cette nouvelle obligation, elle génère aussi des débats politiques, des prises de position qui sont uniquement politiques, puisque maintenant, c'est le politique qui doit trancher. Et donc, il est pris à partie. J'ai par exemple un exemple concret d'une porteuse de projet. Il y a eu l'opposition qui s'est manifestée et qui a mis en œuvre tout un discours sur le projet qu'elle avait de crèche. Ce que je veux dire, c'est que maintenant, c'est plus. tellement objectif. Il y a tout ce débat politique et c'est beaucoup moins objectif que par le passé quand on doit examiner un dossier d'ouverture de crèche. Tanguy, je sais que tu es un homme très occupé et tu as bientôt une autre réunion. Donc, je voudrais quand même avoir le temps de te poser mes dernières questions de fin d'interview. Aujourd'hui, comme je t'ai dit, je voulais vraiment explorer cette tension entre les valeurs humaines que tu portes qui sont très fortes. et les contraintes économiques qu'on a dans le secteur et comment porter les deux. Ça va vraiment soutenir nos auditeurs qui sont gestionnaires de crèches ou porteurs de projets. C'est important pour eux de l'entendre, c'est qu'il n'y a pas de contradiction. On est dans un système qui est financé d'une certaine manière et on doit faire notre travail dans ce système-là. Et vendre ses places en crèche, c'est tout à fait compatible avec le fait de défendre la qualité d'accueil. Je pense que c'est assez soutenant aussi de voir que toi-même, qui es dans le secteur depuis 2006, tu vis aussi les mêmes difficultés que les autres. personne ne les vit tout seul, on est tous un petit peu dans le même bateau et que tu tiens le coup. Donc, comme tu disais tout à l'heure, la lumière est au bout du tunnel. Il ne faut pas lâcher. À ton sens, qu'est-ce qui devrait évoluer aujourd'hui dans notre secteur, dans le secteur de la petite enfance en France ?
- Speaker #0
Je comprends qu'une partie des acteurs privés ait mérité pas mal de défiance parce que ces acteurs étaient soumis à des règles qui ne sont pas le lot commun des acteurs privés. Quand tu montes ta crèche de quartier, Tu la montes avec la volonté d'accueillir les enfants, de faire un beau métier. Tu connais tes professionnels, tu connais les enfants et tu fais bien ton métier. Quand derrière, tu lèves des fonds et que du coup, tu te mets une pression immense pour faire énormément de croissance et peut-être que tes contraintes te permettent moins de bien faire ton métier. L'immense majorité des gestionnaires de crèche privés en France sont dans la première catégorie. Donc, qu'est-ce que j'aimerais qu'ils changent ? Déjà, première chose, quand on dit privé, qu'on considère que l'immense majorité de ces privés, c'est des gens exactement comme les crèches que tu gérais il y a quelques années, qui aiment leur métier, qui le font en connaissance de cause. C'est plein de professionnels de petite enfance, par exemple, qui ont monté leur propre crèche pour animer leur propre accueil, leur propre pédagogie, leur propre management. Et ces gens-là sont immensément respectables, autant qu'un dirigeant de crèche publique ou associatif.
- Speaker #1
Bien sûr.
- Speaker #0
Et puis, redonnons-nous confiance aussi. Il y a une énorme défiance qui s'est créée. Maintenant, mettons de la confiance. Et puis ceux qui ne méritent pas notre confiance, allons leur taper sur les doigts de façon très sévère. Mais ne mettons pas de la défiance en partant, parce qu'on ne construira absolument rien comme ça.
- Speaker #1
Donc ce serait faire évoluer le secteur, pour toi ce serait dans le regard, dans la façon dont on est traité, dans le regard qu'on porte sur la petite enfance et sur les crèches, qu'il faudrait que ça évolue ?
- Speaker #0
Oui, et puis sortons nos idées politiques d'un métier. Moi, je ne demande pas à un boulanger s'il est de gauche ou de droite. On doit pouvoir faire hyper bien notre métier, qu'on soit municipal, associatif ou acteur privé. On fait tous le même métier. Moi, j'adore quand j'arrive dans une ville. Là, en ce moment, on est en train d'inaugurer des crèches qu'on a ouvertes il y a quelques semaines. Quand j'arrive dans une ville, on travaille avec les maires. J'ai pas mal de directrices petite enfance ou d'élus petite enfance qui me disent « Ah, bienvenue, nous on est sur tel thème, est-ce que ça vous intéresse ? » Ça c'est chouette.
- Speaker #1
Je suis complètement comme toi et j'adore ce petit côté partenaire. Donc là-dessus, je te rejoins complètement. On s'envoie les voeux. Parfois, on prend le temps de boire un café ensemble, de parler des projets. Et on partage les sujets, les problématiques. On se renvoie aussi les familles quand on a besoin. Ça va dans les deux sens. Donc, c'est hyper vertueux. Je voulais aussi te demander pour les auditeurs qui nous écoutent et qui ne savent pas forcément comment faire. Est-ce que tu aurais un conseil, peut-être, si tu devais donner un seul conseil pour avoir une place entreprise, en plus de celle qu'on a via les intermédiaires comme toi qui sont des spécialistes ? Mais si moi, gestionnaire, je me dis quand même, j'aimerais bien y arriver, en vendre une.
- Speaker #0
C'est de demander aux parents pour qui ils travaillaient, et puis ensuite de leur proposer une mise en relation avec l'employeur du papa, ou le gestionnaire en question, il aura toutes les clés, il regardera sur Internet, sur les sites Internet des uns des autres, comment ça fonctionne, les places entreprises. Un autre conseil, ou à la fois un conseil et un idéal que j'aimerais qu'il se crée, c'est de travailler plus en réseau. Alors évidemment, nous, c'est notre nature d'être en réseau. Mais je trouve que c'est drôlement plus épanouissant et drôlement plus constructif d'appeler les autres gestionnaires du quartier, là, puisqu'on est le dernier à arriver dans le quartier, de dire « Tiens, salut, je m'appelle Tanguy, est-ce que t'as cinq minutes pour qu'on aille se prendre un café ? » Et c'est aussi comme ça qu'on apprend. Il suffit de faire ça. et d'oser demander aux parents Pour qui ils travaillent ? Et puis là, c'est bon, on peut rentrer. Alors, ce n'est pas facile de vendre une place d'entreprise. Sinon, nous, on n'aurait pas besoin d'exister. Mais déjà, ça arrive.
- Speaker #1
Déjà, tu penses que le fait de rencontrer nos confrères, nos concurrents confrères, ça peut aider, vraiment ?
- Speaker #0
Il n'y a pas de concurrence dans la crèche. Il n'y a pas de concurrence entre les leaders français. Il n'y a pas de concurrence entre des acteurs de quartier.
- Speaker #1
Donc, si je rencontre les deux, trois crèches de mon quartier, ça va m'aider ?
- Speaker #0
Oui, de toute façon, ça ne peut pas être mieux. Ça va t'aider forcément à savoir justement comment est le quartier, comment sont les familles ici, qu'est-ce que tu as mis en place pour recruter. Est-ce qu'il y a des choses qu'on peut faire ensemble pour soutenir notre activité ? On pourrait même partager une volante entre plusieurs gestionnaires du quartier au cas où il y a des offenses.
- Speaker #1
Écoute, je trouve que tu es très créatif et tu as plein de bonnes idées. Donc là, je pourrais encore parler avec toi pendant une heure, mais je sais que ton temps est précieux. Tant qu'ici, les auditeurs ont envie de travailler chez les parents zen. Ils t'écrivent sur le site. Vous avez un, j'imagine... Oui, oui,
- Speaker #0
bien sûr. On a une super Sophie qui s'occupe justement des relations avec les gestionnaires partenaires. Après, ceci n'est pas une page de queue. Donc, je te remercie de me poser la question.
- Speaker #1
Non, mais je pense qu'il y a peut-être des pros qui se sont dit « Tiens, mais moi, j'aimerais bien postuler pour travailler dans leur crèche. » Ou bien des gestionnaires qui veulent adhérer sur la plateforme. Donc, je vais tout mettre dans les notes de l'épisode pour qu'ils puissent te retrouver. Et puis, écoute, merci beaucoup. Une fois de plus, on n'a pas eu de tabou, on a parlé franchement. Tu réponds toujours à mes questions sans douter. Donc, je te remercie pour ça, Tanguy. Et puis, je te dis à très bientôt.
- Speaker #0
Toujours un plaisir de passer un temps avec toi. Effectivement, le côté sincère, franc, c'est très, très agréable. Merci beaucoup.
- Speaker #1
Merci, Tanguy.
- Speaker #0
Salut, Amal.
- Speaker #1
Bravo, tu as écouté jusqu'au bout. C'est que la gestion de crèche, ça t'intéresse. Tu as envie de monter ta crèche, mais tu ne sais pas par où commencer. Ou tu as déjà tes crèches, mais tu te sens seul. T'as peur des projets de réforme ? Tu sens que les inscriptions ne sont plus aussi automatiques ? Mais tu n'es pas seul. Aurélie et moi, on a vu beaucoup de gestionnaires qui traversent les mêmes doutes que toi. C'est pour ça qu'on a créé Références Petite Enfance. Ce n'est pas qu'un podcast, c'est aussi une agence de conseil. On te partage nos 17 années d'expertise, nos techniques de travail, et on t'aide à apprendre de la hauteur pour faire décoller tes crèches. On est là pour en parler avec toi, alors prends rendez-vous, le lien est en description de l'épisode. A bientôt !