- Speaker #0
Bonjour à toutes et à tous et bienvenue sur Retro Ciné, votre rendez-vous podcast cinéma qui vous transporte dans les films de patrimoine du cinéma mondial avec des oeuvres disponibles simplement sur internet, dans vos médiathèques et cinémathèques ou encore dans les festivals près de chez vous. Aujourd'hui... Nous nous retrouvons pour un nouvel épisode hors séance, où j'ai le plaisir de retrouver mon frère Maxime, avec qui nous avons co-construit déjà deux épisodes. L'épisode 4, celui dédié au diabolique de Henri-Georges Clouseau, et plus récemment notre épisode sur le personnage de Superman et ses différentes itérations au cinéma. Salut Max, content de te retrouver pour ce nouvel épisode.
- Speaker #1
Bonjour à tous.
- Speaker #0
Petit disclaimer également, il y aura des spoils dans cet épisode, donc si vous n'avez pas encore vu ces films, je vous invite à les regarder en amont. Ou si ce n'est pas le cas, si vous n'avez pas peur de vous faire spoiler, continuez cet épisode et ce sera toujours l'occasion de découvrir ces films après. Ensemble, nous souhaitions aborder tout un pan du cinéma de Polar pour cet épisode, et cela au travers d'un voyage cinématographique via les grands réalisateurs du genre. Et pour démarrer ce jeu de piste, nous allons commencer par tenter de comprendre ce qu'il se passe dans le cerveau cinéphile de Cédric Jimenez et pourquoi il est souvent qualifié de « Michael Mann français » . Cet épisode est donc la première branche basse de notre enquête qui nous fera remonter l'arbre généalogique du cinéma de polar. Nous allons principalement nous intéresser à cinq films. Hit et collatéral chez Michael Mann, et La French, Bac Nord, et le tout dernier film de Cédric Giménez, Chien 51. Avant d'attaquer dans le vif du sujet, tu as eu l'opportunité de te rendre au Festival Lumière Max, dont l'édition cette année récompensait justement Michael Mann pour l'ensemble de son oeuvre. Celui-ci est souvent pris comme la source d'inspiration pour les films de Cédric Giménez, même par les spectateurs français. En effet, on voit beaucoup de liens dans leur cinématographie, de la cartographie qui montre un attrait pour le cinéma de polar, avec notamment des confrontations un peu au sommet, on va dire, entre les très grands acteurs du genre ou alors les têtes d'affiches du box-office, comme le fait Jiménez. Mais de quel film parle-t-on ? Ou qu'est-ce que le polar ? Et quels sont les sous-genres du polar ? Qu'est-ce qu'on entend parfois avec le terme de western urbain ? Et comment ces deux réalisateurs s'inscrivent-ils dans ce genre précisément ? Voici un petit peu les questions avec lesquelles je te propose de démarrer en douceur l'épisode, avant de rentrer dans le vif du sujet et une analyse comparative entre le cinéma de Mann et de Jiménez.
- Speaker #1
Oui, très bien. Tu l'as justement dit, le cinéma de Michael Mann et celui de Cédric Jiménez, ça rentre tous les deux dans le cadre du western urbain. Un western urbain, c'est un sous-genre du polar. Ça veut simplement dire prendre les codes du western et les appliquer à notre société contemporaine. Donc à la place d'avoir des chevaux, on a des voitures. À la place d'avoir de la terre, de la poussière, on a du bitume. À la place d'avoir des petits virevoltants, ces petites boules qu'on voit dans les westerns, on a des journaux qui s'envolent dans les rues de New York. C'est ça.
- Speaker #0
Les chapeaux qui s'envolent, un petit peu de vent.
- Speaker #1
Voilà, exactement. Il y a un très bon exemple de ça dans Matrix. Il y a la scène du combat dans le métro. À un moment, tu vois, tout d'un coup, une feuille de journal qui s'envole, comme un vire-volteant dans les westerns.
- Speaker #0
C'est très juste. Et je fais une petite digression, j'en profite, parce que tu parles déjà du mode de transport en commun par excellence dans les grandes villes américaines au cinéma, le métro. Et on a constaté, parce qu'évidemment on va se focus sur cinq films, mais on a dû s'enrichir en allant un petit peu plus loin. Je pourrais parler également du film French Connection de Friedkin. Toi, de ton côté, tu as vu aussi d'autres films un petit peu qui rentrent dans cette catégorie de polar urbain. Et je trouve, il y a... A chaque fois, des références sur ces moyens de transport. Donc, soit le transport public, le métro, qui joue des rôles essentiels dans certains films, ou alors la voiture. Ça va être justement un élément du cinéma de Gineménez, si je ne me trompe pas.
- Speaker #1
Absolument, oui. On voit beaucoup... Il y a une grande utilisation de la voiture comme moyen... pour filmer l'action. C'est-à-dire qu'on voit beaucoup de grosses courses-poursuites, notamment dans Bac Nord, qui sont très bien faites, moi que j'aime beaucoup en tout cas.
- Speaker #0
Du coup, on va repartir de ce postulat. Je crois que c'était l'actrice Adèle... Je ne sais pas prononcer le nom.
- Speaker #1
Exarchopoulos.
- Speaker #0
Exarchopoulos. Qui a dit, si je la cite correctement, dans une interview pour TF1, c'est un peu Michael Mann français, Cédric, c'est immersif. Grâce à sa caméra et son récit, tu le ressens, tu as des sensations. Qu'est-ce que toi tu as envie d'ajouter après son propos ?
- Speaker #1
Je pense que c'est un bon point de départ pour réfléchir en fait. C'est surtout ça, est-ce que je suis d'accord ou pas avec elle ? Je pense qu'on va le...
- Speaker #0
Décortiquer au fur et à mesure de l'épisode ?
- Speaker #1
Ouais, voilà, absolument. Mais sinon oui, il y a une actrice qui a fait beaucoup de films avec lui maintenant. Il a fait Bac Nord, elle a fait Chien 51, est-ce qu'elle en a fait d'autres ? Non, elle n'est pas dans La French, elle n'est pas dans Novembre. Non, c'est ça ? Elle en a déjà fait deux.
- Speaker #0
Mais dans La French et Chien 51, on retrouve aussi Gilles Lelouch, un peu l'acteur phare de Jiménez quand on y pense.
- Speaker #1
Oui absolument, je crois que c'est le troisième film qu'ils font ensemble parce qu'ils ont fait quoi ? Ils ont fait La French, ils ont fait Bac Nord et puis ils ont fait Chien 51.
- Speaker #0
Ce que je te propose c'est de prendre comme point de départ aussi une interview que Cédric Jiménez a donnée pour le journal 24 images. Oui, il parle un petit peu de ses références cinématographiques. Et il mentionne notamment les années 70 pour le polar au cinéma. Ce qui me fait penser que c'est un petit peu les années French Connection, justement, avec Fred Kinn, mais pas que.
- Speaker #1
Oui, alors ça, c'est une interview qui a été faite en janvier 2015. C'était juste après les attentats de Charlie Hebdo. Mais c'était après qu'il ait réalisé la French. Donc, c'est intéressant de voir, effectivement. Il nous dit « C'est une famille de cinéma qu'on connaît tous très bien, le polar des années 70. Il y a beaucoup de très beaux et grands films, mais il n'y a pas de référence particulière, plus une référence au genre en général, Scorsese, De Palma, Coppola, Verneuil, Clouseau, Sautet et le cinéma italien. C'est un mélange d'influence de cette famille que j'adore, qui fait partie de mon cinéma préféré, qui ressurgit par-ci, par-là dans le film. » Alors voilà, on est juste après les attentats de Charlie Hebdo, donc on voit de quelle lignée il se propose, de quelle lignée il imagine qu'il appartient.
- Speaker #0
Et on va relever le point qu'il ne cite pas Michael Mann.
- Speaker #1
Il ne cite pas Michael Mann, c'est très vrai. Il cite certainement les influences de Michael Mann, mais il ne cite pas Michael Mann.
- Speaker #0
Alors comment on passe de l'un à l'autre ? C'est-à-dire qu'il cite ceux qui auraient influencé Michael Mann, mais lui, il le chouinte.
- Speaker #1
Je pense que c'est toi qui as la réponse pour ça, parce qu'en réalité, il y a une référence commune. Je pense que tu vas mieux en parler que moi, c'est William Friedkin.
- Speaker #0
Alors, je trouve que ça fait un... peut-être un bon pont, une bonne connexion entre les deux, effectivement. J'ai pas tout vu de Friedkin. Je me suis remis dedans, comme tout le monde, je pense, avoir vu L'Exorciste, Sorcereur, parce que on aime tous les deux le cinéma de Clouseau, avec, en fait, sa réadaptation du Convoi de la Peur. Et, pour préparer l'épisode, j'ai vu French Connection, et surtout j'ai lu ... un petit peu son livre autobiographique qui s'intitule Fredkin Connection comme ça la boucle est bouclée je pense que pourquoi French Connection est devenu si célèbre il y a plusieurs éléments, il y a un élément évidemment sur la manière de filmer il y a du caméra à l'épaule il y a cette sensation de réalisme certains parlent de naturalisme dans cette espèce de polar urbain, de western urbain urbain. Il est très connu pour des scènes de poursuite, notamment la scène de voiture. Une scène de voiture où il suit en parallèle le métro, le personnage de Jean Ackman, qui est un flic, pas ripoux, mais un flic bourrin qui n'a pas peur de flirter. flinguée, qui n'a pas peur d'aller contre sa hiérarchie, dans ce New York vraiment pourri, on va le dire, lugubre, avec l'arrivée, justement, de cette drogue en provenance de France, en provenance de Marseille, une ville importante aussi pour Jiménez, quand on y pense. Donc voilà, je vois les points communs entre French Connection et le cinéma de Jiménez sur certains thèmes, et peut-être cette volonté de donner à la violence ... Et à la police, une caractérisation beaucoup moins feel-good movie, buddy movie, enquête, et beaucoup plus in medias res, beaucoup plus basée sur les armes, basée sur les voitures, sur les sons, les sons de la ville aussi, très important, comment filmer la ville. On a des personnages qui se baladent en rentrant dans le métro, rentrant dans le wagon, en ressortant, ils prennent une voiture, ils accélèrent, ils rentrent dans le mur avec la voiture. On a tout ce travail sonore, peut-être pendant une bonne demi-heure de French Connection, où il n'y a pas de dialogue. Et je trouve que ça, ça fait appel au cinéma de Michael Mann. Parfois, tout se passe par les sons, qu'ils soient de la musique, intradiegétique ou extra-diégétique, ou les sons des armes à feu.
- Speaker #1
Je pense qu'on en reparlera aussi quand on parlera de la French, parce que moi je n'ai pas vu French Connection, mais évidemment il y a un lien tout trouvé, on a l'impression qu'ils ont raconté deux fois la même histoire, en tout cas d'un oeil extérieur ça fait un peu cet effet-là. Je pense que de ce que j'ai compris, French Connection c'est plutôt l'impact aux Etats-Unis, et la French ce serait plutôt l'impact en France, j'imagine. Non mais c'est peut-être ça, je ne sais pas, c'est entre La French et French Connection, est-ce que c'est un remake ? Est-ce que La French est un remake de French Connection ? Est-ce que c'est la même histoire mais vu sous deux angles différents ? Est-ce que c'est juste deux films historiques qui ensuite cherchent à proposer une vision du monde actuel ?
- Speaker #0
Il y a peut-être une différence majeure, c'est dans les personnages en fait qui sont représentés à l'écran parce que tu as quand même le côté historique du juge Michel. dans la French qui effectua certes un anti-héros mais héros quand même représentant de la justice
- Speaker #1
Tu vois ce que je veux dire ?
- Speaker #0
Et dans French Connection, oui, on a un policier, mais sa méthode est très problématique, il est très injurieux. C'est pas un chevalier blanc qui se bat pour un idéal de justice. C'est un peu quand même un cow-boy qui a des pulsions sexuelles, qui a des pulsions de violence, qui parfois, de ce qu'on comprend, n'a pas peur de sacrifier aussi ses autres collègues de la police, il y a moins ce sens de la valeur absolue. À l'inverse du personnage interprété par Dujardin, notamment dans leur confrontation, quand Gilles Lelouch et Dujardin se retrouvent après une course-poursuite en voiture et qu'ils se parlent, il y a clairement, moi je suis un gangster et j'assume totalement parce que c'est cette vie que je veux mener, Et en face, tu as Dujardin qui lui répond quelque chose du genre « Moi, je n'aime pas les types comme toi, tu es qu'un gangster. Moi, je vais t'empêcher de nuire. »
- Speaker #1
Oui. Alors peut-être qu'avant de rentrer trop trop dans le détail, peut-être qu'on ferait bien de faire une petite introduction sur la French et puis après, on continue notre histoire à partir de là.
- Speaker #0
Alors, on va faire un petit résumé du film.
- Speaker #1
Exactement.
- Speaker #0
La French, ça se passe à Marseille dans les années 70. Un juge d'instruction, interprété par Jean Dujardin, mène une guerre sans merci contre la French Connection. Un puissant réseau de trafic d'héroïne. Une fresque policière nerveuse sur la corruption et la justice. Qui date de 2014.
- Speaker #1
C'est aussi un duel entre le juge Michel et Tony Zampa, mais aussi entre Jean Dujardin et Gilles Lelouch, qui étaient vraiment des grosses stars du cinéma à ce moment-là. Il devait sortir du film choral, qui s'appelait Les Infidèles, je pense. Vous avez un film qui aujourd'hui est un peu... Il y a des blagues un peu bizarres. Bref. Et donc c'est vraiment un duel à plusieurs niveaux. Un duel d'acteurs, un duel de personnages. Et aussi un héros contre un antagoniste. Qu'est-ce que t'en penses ?
- Speaker #0
C'est juste ce que tu dis aussi sur le côté, c'est les deux grosses stars. Mais elles ne sont pas connues. pour, enfin je pense pas me tromper en disant qu'ils sont pas connus pour jouer dans ce registre. Et justement, ça a pris de court pas mal de gens, et beaucoup se sont réveillés en disant mais en fait Jean Dujardin c'est un très bon acteur, et Gilles Lelouch aussi, parce qu'on les voyait plutôt dans des rôles comiques, tu parles des infidèles, Dujardin on connaît tous, The Artist, et avant ça un gars une fille, et puis des petits rôles au cinéma mais toujours comiques. Et là on a des rôles sérieux, des rôles entre guillemets, qu'on va dire de bonhommes. qui me fait aussi penser un petit peu au cinéma de Nolan, des rôles très masculins, rencontres au sommet. Et là, évidemment, je pense que le parallèle de cette scène fait écho au film Hit de Michael Mann.
- Speaker #1
Effectivement, pendant ce film-là, tout l'enjeu de films où on a des grands acteurs comme ça sur le plateau de tournage, c'est de se poser la question comment est-ce qu'on va... Les mettre en parallèle, les montrer ensemble dans la même scène, comment va se passer la rencontre ? Alors là, une des réponses qui est faite par Jiménez, c'est je les fais rencontrer dans un plan magnifique, en haut de Marseille, sur les hauteurs. avec un magnifique coucher de soleil et donc oui on est vraiment dans le cadre d'un duel au sommet on verra je pense comment s'occupe Mann de cette rencontre qui est à contre-pied et qui est très intéressante aussi
- Speaker #0
Il y a quand même deux rôles Du coup, il y en a un qui est la proie et l'autre le chasseur.
- Speaker #1
Alors on a un anti-héros, si on veut aller par là, parce que le juge Michel, est-ce que c'est vraiment un héros ? Je ne suis pas sûr, dans le sens où il fait beaucoup de... C'est une thématique qui reviendra souvent. Il y a la question du légal et du légitime. Est-ce la question de... Est-ce que moi, en tant que juge, j'ai le droit de faire des choses illégales si je pense qu'il y a un bien commun derrière ? Et donc on verra souvent Dujardin faire des choses un peu touchy avec la loi. C'est pour ça que je pense que c'est plus un duel d'anti-héros face à antagonistes plutôt qu'un duel d'anti-héros tout simplement.
- Speaker #0
Est-ce qu'on parle de
- Speaker #1
Hit ? Oui, alors tout à fait, oui, on peut enchaîner avec Hit. Est-ce que tu as un petit résumé à nous proposer ?
- Speaker #0
Alors... Hit, datant de 1995, raconte l'histoire d'un braqueur professionnel joué par Robert De Niro et un flic obsessionnel Al Pacino, qui s'affronte donc dans un jeu du chat et de la souris à Los Angeles. Le film va explorer la fine frontière entre le bien et le mal dans un duel d'intelligence et aussi de solitude.
- Speaker #1
Alors là, de nouveau, on ne peut pas passer à côté de... de tout ce côté méta un peu, c'est vraiment le film qui réunit deux énormes stars du cinéma, surtout à l'époque. Et la question ça va être comment on va de nouveau les mettre en interaction. Et c'est ça qui était très marrant, c'est que moi j'ai été très frustré la première fois que j'ai vu ce film, puisque j'avais 16 ans. J'étais en mode, c'est un très grand film d'action, c'est reconnu, je veux voir comment se passe la confrontation. Et en fait, on se retrouve au milieu du film avec Al Pacino qui propose de prendre un café avec De Niro, suite à une course-poursuite, suite à une filature course-poursuite un peu, et finalement c'est deux mecs qui prennent un café. quoi ? C'est deux mecs qui prennent un café avec un champ contre champ qui est fait en longue focale, donc qui va écraser toutes les perspectives. Et on se dit, mais pourquoi est-ce que je ne les vois pas vraiment, rien que se toucher en fait ? Alors certes, on les voit sur le même plan, l'un ne dépasse pas l'autre, mais il n'y a pas de contact physique. Par exemple, dans la French, on est dans un mouvement déjà, on est caméra un peu portée et tout. On a un panorama magnifique. Là, on est dans un café avec un fond, avec des taches de couleurs, quelque chose d'imprécis puisqu'on est en longue focale.
- Speaker #0
Mais est-ce que ce n'est pas justement pour... Montrer une scène de la vie banale, deux hommes dans un petit café et qui vont en plus parler de leur vie qui semble banale en dehors de ce qu'ils font d'un point de vue professionnel. Il y en a un qui dit moi c'est la troisième fois que je suis divorcé, l'autre qui dit je peux quitter la femme que je vois à tout moment. Ces deux hommes, on peut se dire qu'ils auraient pu être amis. Sauf qu'ils ne sont pas du même côté de la balance.
- Speaker #1
C'est exactement ça, tu as raison. C'est vraiment pour... En fait, moi je vois plus ça comme ça. On a deux figures mythologiques. on a le cambrioleur et de l'autre côté on a le policier c'est des figures que j'estime être mythologiques qu'on jouait à la cour d'école exactement t'es le flic ou t'es le voleur et puis on les ramène à on les ramène sur la terre, on leur dit, ben voilà, vous êtes deux hommes en fait avec des problèmes chacun. Et puis on se dit, mais à quoi ressemble la discussion entre ces deux ancêtres, entre ces deux personnes ? Mais ce qui est marrant, c'est surtout, si on revient un peu à tout ce côté méta sur l'œuvre, on se rend compte qu'en fait, Michael Mann là, quand il écrit cette scène, il écrit une scène qui s'est vraiment déroulée dans la vraie vie. Sauf erreur, il était soit ami, soit il connaissait un ancien policier de Chicago qui a raconté cette anecdote dans laquelle finalement il boit un café avec un voleur dont il faisait la filature depuis plusieurs mois. Et en fait c'est ça, Michael Mann sait comment... représenter le réel à partir d'une histoire un peu fictive, en tout cas romancée. Alors évidemment, l'histoire qu'il raconte dans IT, elle a un ancrage dans le réel puisque ça découle de cette histoire que le policier a racontée à Michael Mann. Mais ça fait un cercle en fait. Je pars de cette histoire, j'en écris un scénario et je reviens dessus finalement parce que finalement Mann il décrit le réel. Et puis effectivement c'est vraiment une prise à contre-pied de montrer ces deux acteurs interagir autour d'un café. On va avoir aussi une parole de Al Pacino dans le film qui dira « Je suis ce que je poursuis » . Là, on voit vraiment qu'on est face à deux... Héros, enfin ouais le terme héros est un peu particulier, en tout cas deux figures mythologiques qui sont finalement très proches l'une de l'autre et donc il y a un respect, un respect énorme entre ces deux, entre ces deux personnages. Chose que selon moi il n'y a n'y a pas chez Jiménez, en tout cas il n'y a pas dans la French. Il me semble que le juge Michel va dire dans cette confrontation en haut de Marseille qu'il ne respecte pas Zampa. Et c'est là où on voit d'un côté... anti-héros antagonistes contre duels de anti-héros. Et par-dessus cela, il y a toujours un personnage supplémentaire dans les deux œuvres, La French tout comme Hit, il y a un personnage supplémentaire qui représente vraiment le mal. Alors chez La French c'est Benoît Magimel, et dans l'œuvre de Hit c'est un personnage qui s'appelle Wayne Groh, le nom de l'acteur il ne me revient pas là tout de suite. Kevin Gage,
- Speaker #0
je crois que c'est ça.
- Speaker #1
Et donc, Kevin Gage, qui est ce personnage qu'il interprète Wayne Groh, qui est un néo-nazi. Qui est un suprémaciste blanc. Et qui est... Alors voilà, la figure du suprémaciste blanc, elle reviendra aussi beaucoup chez Michael Mann. Elle revient dans Miami Vice. Elle revient dans Collateral. Mais toujours par touche. Elle n'est jamais au centre réellement de l'histoire, mais elle est là pour rehausser les personnages, soit dans leurs valeurs, soit dans leur monstruosité, mais en tout cas elle est là pour mettre un miroir, ou mettre une séparation entre le mal et ses antagonistes, et c'est quoi être un homme et savoir faire un truc en fait. Parce que Man c'est ça, c'est des personnages qui sont hyper forts dans leur domaine, mais qui sont hyper seuls.
- Speaker #0
Mais donc, Man a besoin d'un autre personnage, en fait, pour créer la limite, créer un cadre qui permet aussi aux spectateurs de juger et de voir peut-être plus de nuances de gris chez le personnage de Nero, de voleur, quoi.
- Speaker #1
Même plus que ça, en fait, ça va. Ça va être parce qu'on veut qu'en fait, le spectateur, il soit attaché autant à Al Pacino qu'à De Niro. C'est ça, la volonté. Donc, l'idée, ça va être de dire, OK, il faut qu'il y ait quelque chose de bon aussi chez De Niro, parce qu'on le voit faire des... des trucs horribles. On le voit tuer des gens, on le voit... Voilà. Et donc, il faut quand même rendre ce personnage attachant. Donc, on va mettre à côté une figure horrible qui va, par contraste, le rendre avec une certaine valeur. La valeur déjà professionnelle, la valeur lui aussi, il aimerait fonder une famille. Voilà. De Niro est... Voilà. En fait, on aime les deux personnages et on sait que l'un des deux va mourir. la question c'est comment et c'est ça et à propos du du comment du coup qu'est ce que tu peux nous dire d'autre sur le film hit de michael man eh bien ça va être toute la question de je pense la fatalité en tout cas chez michael man de ce que j'ai cru comprendre en voyant hit et ensuite collatéral on tourne beaucoup avec la question du destin de la fatalité de comment est-ce que chaque petit choix mène ensuite. un duel final entre les deux héros, les deux anti-héros. Et pour IT, ça va se terminer avec la scène de l'aéroport. L'aéroport, c'est un décor qui est très classique dans le polar. On a vu ça dans Bullit, on a vu ça dans North by Northwest, on a vu ça souvent. Et cette scène-là, c'est un un tour de force. on va mettre tout ce qui est du cinéma à balle, c'est-à-dire qu'on va saturer le son, on va cramer l'image avec les spots de l'aéroport, on va mettre une musique, on va en même temps, quelque part, mettre au ralenti l'action. C'est une scène incroyable. Même si... Quand je l'ai vu la première fois, je me suis dit, mais c'est pas un peu long quand même ce que je vois. Mais en fait, avec le temps, je trouve qu'on finit par apprécier un rythme dissonant. Parce que c'est ça aussi. On est nourri tellement avec des rythmes qui doivent être effrénés et tellement sonnés comme de la pop-musique, alors que Man, ce n'est pas ça, ce n'est pas de la pop-musique.
- Speaker #0
J'aime bien aussi ce que tu dis sur le décor de l'aéroport. Je ne sais pas si ça peut être pris aussi d'un point de vue symbolique, parce qu'un aéroport, du coup, ça se passe plutôt sur le tarmac. la zone d'arrivée, la zone de départ, une zone qui n'est ni tout à fait le pays où tu es et tu n'es pas encore arrivé à destination. Donc, c'est cette espèce d'entre-deux universel en fait. Je sais sais pas du tout si c'est la raison, mais en tout cas j'aime bien le fait qu'on se concentre plus que sur l'humain, en dehors du contexte, quelque part.
- Speaker #1
Ah, c'est juste, c'est bien. Effectivement, un humain dans un aéroport, déjà, il y a une histoire d'échelle. C'est tout petit, le truc il est énorme. Ensuite, c'est un entre-deux entre, oui, effectivement, le départ et l'arrivée. Mais oui, l'aéroport, ben, c'est une saturation du son, c'est une saturation... Ouais, voilà. Non, mais j'ai rien à dire. Attends, ouais.
- Speaker #0
D'accord, donc ça on a vu pour ce qu'était la manière de raconter l'histoire de Mann. Du coup, qu'est-ce qu'on peut dire en miroir quand on reprend la French de Jiménez ? Est-ce qu'on retrouve du coup ce côté mythologique, fataliste ? sensorielle aussi du côté de Jiménez, dans la French notamment.
- Speaker #1
Oui, alors dans la French, c'est un peu différent quand même, parce que vu qu'on n'est pas, enfin moi je n'ai jamais ressenti qu'on était face à deux anti-héros. On est vraiment avec un personnage qui représente, enfin, qui est le méchant, et un personnage qui est le juste. Donc on va être plutôt dans comment, en fait, comment faire le bien dans un monde pourri. Pour moi, c'est ça que je ressens quand je regarde la French. Je suis face à Jean Dujardin, qui essaie d'arrêter ses trafiquants de drogue et donc il n'y arrive pas parce qu'il y a la corruption, parce qu'il y a des règlements de comptes entre eux, parce qu'il y a... voilà. Donc il va être obligé de passer un peu la ligne rouge et d'utiliser des méthodes un peu de voyou. donc c'est ça en fait pour moi Jiménez C'est un système corrompu. Et comment je peux, en tant que moi, chevalier du bien, comment est-ce que je peux rendre la justice ? Comment est-ce que je peux protéger les gens ?
- Speaker #0
On a déjà parlé de ces scènes de confrontation, que ce soit chez Hit entre De Niro et Pacino, et à nouveau, comme tu viens de le redire, entre Lelouch et Dujardin au sommet de Marseille. Il y a quelque chose qui m'a amusé, j'ai noté une expression, un mot, on va dire, qui est repris par l'antagoniste négatif, on va dire. La manière dont il veut se présenter au monde, il dit « je suis commerçant » . De Niro, il dit à sa femme « je suis dans le commerce, je suis commerçant de quelque chose » . Et même chose, Lelouch dit à deux mots près exactement la même chose. Ce que je te propose, c'est de réécouter les extraits.
- Speaker #1
Ok.
- Speaker #2
Si ça te dit, je veux bien t'offrir un petit café.
- Speaker #3
D'accord,
- Speaker #2
je suis pour. Eh bien, suis-moi ! T'as fait 7 ans à Folsom, dont 3 de haute surveillance. Avant ça, t'étais à McNeil. Matt Neal, c'est aussi dur que ce qu'on raconte.
- Speaker #3
T'as l'intention de devenir criminaliste ?
- Speaker #2
T'as l'intention de replonger ? Tu sais que j'en ai cravaté des mecs comme toi qui les f*** volontairement pour retourner au mutard ? C'est pareil ?
- Speaker #3
T'as pas dû avoir beaucoup d'épaumés de ce genre.
- Speaker #2
J'en vois toutes les couleurs.
- Speaker #3
Tu me vois prendre mon pied et attaquer des vieilles dames avec nos futurs tatoués sur la poitrine ? Non, sûrement pas. Alors ? Là tôt, moi j'y replongerai pas. Alors raccroche une fois pour toutes.
- Speaker #2
Je fais ce que je sais faire.
- Speaker #3
Je monte des coups, tu fais ce que tu sais faire, t'essaies d'arrêter les mecs comme moi.
- Speaker #2
Ouais, t'as toujours tout fait pour pas mener une vie normale.
- Speaker #3
C'est quoi ça ? C'est un barbecue ? Une partie de football ?
- Speaker #2
Ouais.
- Speaker #3
Ouais c'est ça, une vie normale comme la tienne.
- Speaker #2
Ça ma vie ? Non, ma vie... Non, ma vie c'est vraiment la zone. J'ai une belle fille qui est à côté de ses pompes parce que son cher géniteur est l'archétype du s*** et j'ai une femme et en se rendant coup de vent notre mariage a du plan dans l'aile, mon troisième parce que je dois passer tout mon temps à poursuivre des types comme toi dans tout le pays là voilà ma vie
- Speaker #3
Moi un de mes potes m'a dit Tu dois surtout pas t'attacher à des choses dont tu pourrais pas te débarrasser en 30 secondes, montre en main si tu voyais les flics se ramener dans le coin. Et si tu dois me filer constamment, s'il faut que tu bouges et que je bouge le petit doigt, comment t'espères sauver ton... ton mariage ?
- Speaker #2
Ouais, là tu marques un point. T'es quoi toi, un moine ?
- Speaker #3
J'ai une femme.
- Speaker #2
Et qu'est-ce que tu lui dis ?
- Speaker #3
Je suis représentant de commerce.
- Speaker #2
Bon alors si c'est moi que tu vois rappliquer dans le coin, tu t'en débarrasseras de cette femme. Sans lui dire adieu. C'est la règle du jeu, c'est comme ça. Oui mais ça tourne en rond ton truc.
- Speaker #3
Oui mais y'a pas le choix. C'est ça ou bien il vaut mieux changer de métier, mon pote.
- Speaker #2
Je sais rien faire d'autre.
- Speaker #3
Pareil pour moi.
- Speaker #2
Mais je crois pas en avoir envie.
- Speaker #3
Pareil pour moi.
- Speaker #0
Et maintenant, à titre de comparaison, je te propose d'écouter l'extrait de La French avec cette rencontre au sommet.
- Speaker #4
J'ai perdu ! Vous vous promenez ? Vous êtes loin du palais là ? Qu'est-ce que vous voulez ? Je mets un pied dehors, on parle de vous. Je me retourne, vous êtes sur mon cul. Vous n'êtes pas une femme qui m'ait fait ça, alors c'est quoi ? Vous vous plaignez ? Non, vous n'êtes pas mon genre. et de par les voyous. Oui, partout, c'est leur formation professionnelle. C'est pas comme ça que je me vois, moi. Tu sais, je fais vivre beaucoup de gens, beaucoup. Je me considère plus comme un commerçant, je fais du commerce.
- Speaker #3
Oui,
- Speaker #4
oui, vous allez pas me faire le coup d'homme d'affaires non plus, ça va. Je vous énerve, hein. C'est normal, j'ai l'habitude avec des gens comme vous. Je comprends, mais ça gagne, un petit juge. 9000 ? 10 000 par mois ? Faut se réveiller ! Vous croyez quoi ? Si vous me coffrez Marseille ça va devenir la Suisse ? Je pense qu'il y a de moins à prendre, je profite du peu de temps qu'on a ici. Ouais. Vous devriez en profiter un peu plus aussi. Profitez comme vous. Une grosse voiture blindée, un chien de garde pour me protéger jour et nuit. Et tout le monde votre peau. Moi, les flics et tous les petits copains qui attendent le faux pas pour vous manger. Ça fait 20 ans que je suis ici, vous savez. Vous allez savoir pourquoi j'ai pas peur. Si, vous avez peur. D'ailleurs, ce gros gilet sous votre chemise, c'est pas pour faire joli. Je suis sûr que la nuit, vous dormez avec un oeil ouvert. Vous me demandez à quel moment vous allez y passer. Vous ou votre femme, d'ailleurs. Je sais pas ce que tu dis, toi. Ne me manque pas de respect. Je ne respecte pas les tics comme vous. Mais quand ? Il vaut mieux qu'on se croise pas tous les deux.
- Speaker #3
Vraiment pour qui ?
- Speaker #4
Pour moi ou pour vous ? Pour vous.
- Speaker #0
Après avoir revu les extraits, on se rend vraiment compte que le dispositif est vraiment différent. Mais on y retrouve le code, peut-être davantage du western, chez Jiménez finalement, parce que tu as ce plan avec le soleil qui conclut un petit peu cette rencontre.
- Speaker #1
que l'autre c'est vraiment ambiance ambiance de café mais ils me sont que c'est dans c'est dans une conférence de jean baptiste torré qui est un spécialiste de michael mann que j'ai justement entendu ça quelqu'un qui disait ah c'est nul en fait it c'est juste deux mecs qui boivent un café et après de répéter mais en fait c'est génial c'est juste deux mecs qui boivent un café
- Speaker #0
Mais c'est intéressant comme réaction du public parce que... Est-ce que c'est pas ça que, justement, les spectateurs attendent ? Quant à deux monstres sacrés du cinéma, Pacino, De Niro, ils ont joué dans Le Parrain 2, mais ils n'ont eu aucune scène ensemble, puisque l'un joue le père de l'autre, donc... Tout le monde avait cette hype peut-être à l'époque de les voir vraiment s'écharper tout du long, d'être mis sur des piédestals. Et du coup, on leur sort la scène du café.
- Speaker #1
C'est une prise à contre-pied énorme. On ne surmontre pas les acteurs interagir. On les met dans un champ contre champ basique avec longue focale pour vraiment les détecter. du fond et les mettre dans leur bulle donc un peu un peu seul avec du monde autour en fait et c'est marrant mais vraiment les champs et contre champs de michael mann c'est c'est pas des champs contre champs de n'importe qui en fait parce que pour avoir revu révélation qui est le film qui fera après it ou pour avoir vu man hunter déjà dans ces deux films On n'est pas sur du long focal quand il fait un champ contre champ, on est sur de la courte focale, donc grand angle du coup. On est sur des déformations, on filme très près de l'oreille pour voir la déformation de l'oreille de l'acteur et en même temps voir celui avec qui il parle dans le fond. C'est très intéressant de voir comment Michael Mann utilise tel ou tel dispositif pour filmer une simple scène de dialogue. On voit qu'il sait faire de la mise en scène. On n'est vraiment pas dans du factuel, on est toujours dans du ressenti, on est toujours dans du sensoriel, on cherche à exprimer une idée rien qu'avec la façon dont on filme. Ça devrait être ça le cinéma d'ailleurs.
- Speaker #0
Mais qu'est-ce que ça veut dire du coup cette courte focale ? Qu'est-ce que le spectateur doit voir en fait ?
- Speaker #1
Tu veux dire quoi ? Dans quel film ? La courte focale ça va être plutôt dans Révélation, dans Manhunter. C'est plus pour montrer une sensation d'étrange ou un état psychologique particulier.
- Speaker #0
Est-ce que ça peut être proche du rêve ?
- Speaker #1
Je ne sais pas si... Peut-être dans Manhunter oui un peu parce qu'on a vraiment des... des scènes un peu vraiment très... je vais dire le mot sensorielle, j'arrête pas de le dire, mais c'est un peu ça quand même. Mais en tout cas, dans Révélation, c'est la menace. Il y a une scène qui est incroyable avec Russell Crowe qui discute avec son ancien patron où c'est vraiment, on sent la pression, parce que dans Révélation, en fait, on parle des entreprises du tabac qui cherchent à cacher des informations sur la dangerosité de la cigarette. Et Russell Crowe travaillait pour eux, et du coup, il y a cette pression qui est exercée par les patrons sur Russell Crowe pour qu'il se la ferme, qu'il ne dise rien. Et donc, c'est ça qui se passe à ce moment-là. Mais il y a une autre scène de dialogue extrêmement intéressante, je trouve, dans It. C'est la scène entre Edie et De Niro. Edie qui est en fait le personnage féminin, le love interest de De Niro, où on va opérer au milieu de la scène un changement d'axe. on passe de on est derrière les acteurs on filme les acteurs de dos s'échanger s'échanger la réplique à tout d'un coup au sein de la scène on tourne autour de cet axe pour les montrer de face on passe d'un de Niro qui est méfiant et qui cherche à comprendre les intentions de Hidi à tiens on rentre dans son intimité et je crois que c'est aussi tourné en longue focale en tout cas à l'oeil ça donne un aspect Merci. longue focale, donc faible profondeur de champ.
- Speaker #0
On voit bien qu'il y a beaucoup de signifiants, même dans une selle qui peut sembler banale et où le climax est complètement atténué chez Mann. Et du coup, qu'est-ce qu'il fait par comparaison, Jiménez, à l'inverse ?
- Speaker #1
Ça, c'est une bonne question, parce que moi, je ne sais pas trop ce qu'il fait. Je pense que c'est de l'efficacité. Il cherche à filmer de manière efficace. En fait, c'est pas ça. J'ai le sentiment que ça l'intéresse moins. J'ai le sentiment que Jiménez, il est très fort pour filmer du rythme. Et que quand il s'agit d'autre chose que du rythme, c'est un peu plus difficile. Mais c'est ma sensation et j'aime beaucoup ses films aussi, mais c'est... voilà.
- Speaker #0
Mais lui, il veut... je crois que tu l'as un petit peu formulé, on le sent, c'est une volonté de grandiose en fait.
- Speaker #1
Ouais, mais est-ce qu'il y arrive vraiment ? Je ne sais pas.
- Speaker #0
Il arrive peut-être dans l'image que les spectateurs veulent voir, à l'inverse.
- Speaker #1
Oui, c'est vrai.
- Speaker #0
Et il va peut-être plus dans le sens du spectateur. Tu viens chercher... Cette confrontation du jardin, le louche, et il veut te la donner, et te la donner avec un sens plastique et un sérieux, peut-être moi je trouve, je le répète, un peu emprunté à Nolan, avec ses musiques vombrissantes, une image quand même léchée, qu'on ne retrouve pas partout dans le cinéma français, mine de l'or.
- Speaker #1
En fait, moi, après avoir vu la French, ou pendant que je voyais la French, j'ai aussi beaucoup pensé à Scorsese. Alors là, on n'en a pas beaucoup parlé, mais j'ai pensé beaucoup aux Affranchis, parce que toutes les scènes qui se retrouvent dans la boîte de nuit de Zampa, on est vraiment éclairé en rouge. On est boîte de nuit éclairé en rouge. Et ça, c'est les Affranchis, mais à fond. Et pour moi, plus j'y pense, plus je trouve que Jiménez, il s'inspire beaucoup des autres. Et parce qu'il est peut-être encore en train d'apprendre. En tout cas, Mann fait un tour de force. en proposant un truc à contre-pied que tout le monde attendait, et Jiménez, il fait de la citation en s'inspirant de ses pairs. Voilà, c'est ça que je vois.
- Speaker #0
On revient du coup un petit peu à ce qu'on se disait au début, de ses inspirations à lui, quand il évoquait le cinéma des années 70, etc. Mais du coup, qu'est-ce qu'il aurait pris chez Mann, qu'il ne citait pas, comme on disait au début, mais peut-être de manière inconsciente, qu'est-ce qu'il lui aurait pris ?
- Speaker #1
Alors... De manière inconsciente, je ne sais pas. Mais il y a un truc qui sonne terriblement miroir. C'est la structure narrative, en fait. On est vraiment dans les deux films, dans La French et dans It. On est dans les deux films. C'est un duel d'acteurs. C'est un duel d'acteurs. On filme, chacun filme sa ville. C'est Los Angeles, bon à l'époque, il venait d'arriver à Los Angeles je crois. Man, il était plutôt de Chicago. Bref, c'est on filme sa ville, on filme sa culture, et d'un côté pour Man ça va être on filme la nuit, et pour Jiménez on va filmer le jour. C'est tous ces points-là qui font qu'il y a une filiation malgré tout. Il y a un lien malgré tout. On a un personnage mauvais qui représente le mal dans les deux œuvres, qui permet de mettre de la nuance. C'est tout ça pour moi. Ce qui fait qu'effectivement, si on y regarde un peu vite, on peut se dire que Cédric Jiménez, c'est le Michael Mann français.
- Speaker #0
Et je pense que ça va être encore plus... Vrai dans les autres films qu'on va aborder, notamment la mise en miroir de Collateral et Bac Nord. Tu parles de la ville, la ville est omniprésente dans Bac Nord. Collateral, même chose, Los Angeles. On pousse les curseurs peut-être à un autre niveau avec l'arrivée du numérique également.
- Speaker #1
Oui, c'est ça. On ne l'a même pas dit. La French s'est tournée en pellicule. Hit s'est tournée en pellicule. Et tout d'un coup, les deux réalisateurs décident de faire la transition au numérique. Bon, ce n'est pas la même époque. Le numérique de Mann, ce n'est pas la même chose que le numérique de Jiménez.
- Speaker #0
Et pourquoi ce changement, du coup ?
- Speaker #1
Ça, c'est une très bonne question. Mais je pense que tu vas m'apprendre des choses là-dessus aussi. Mais moi, de ce que j'ai compris, c'est que le numérique, c'est une toute autre façon de filmer. Il y en a qui disent que c'est une révolution, d'autres qui disent que ce n'est pas une révolution dans le cinéma. De ce que j'ai cru comprendre, c'est quand même qu'on est dans une logique de production qui est différente. Là où la pellicule coûte très cher, filmer ne coûte plus rien. La pellicule numérique ne coûte plus rien, c'est une carte SD. Donc on tourne, on peut produire beaucoup plus d'images. Peut-être qu'au niveau de la maniabilité des caméras, c'est peut-être différent aussi. J'avoue que je ne saurais pas quelle est la taille d'une caméra analogique, une pellicule.
- Speaker #0
Plus compactes normalement les caméras numériques. Peut-être pas les premières, je ne sais pas. Mais il y avait peut-être cette possibilité de la faire rentrer dans plus d'endroits serrés.
- Speaker #1
Oui, c'est ce que j'ai pensé. Après, peut-être aussi qu'au niveau de la luminosité, luminosité, lors des scènes de basse luminosité ? Est-ce qu'en pleine nuit, la caméra numérique prend plus d'informations ? En tout cas, il y a une évolution du piqué de l'image en passant du analogique, de la pellicule, au numérique, c'est certain.
- Speaker #0
Et ça va jouer justement sur le cinéma de Mann, cette utilisation du numérique dans Collateral, puis dans Miami Vice. Moi je me souviens de l'arrivée du numérique, certains disaient que c'était la mort du cinéma, certains ont dit que ça ouvrait un champ des possibles avec Star Wars, la menace fantôme épisode 1 de Lucas, mais on va dire un petit peu cocorico parce que le premier film tourné 100% en numérique, il est français, il s'agit de Vidocq. Pitof, un réalisateur qui est aussi connu pour avoir fait beaucoup de clips. Et prendre à bras le corps cette technologie. Alors le film va être décrié autant pour son scénario que pour son image. Certains vont se dire mais c'est un monde rempli de possibles. Certains vont trouver ça hideux de se dire que ce ne sont pas des couleurs naturelles, des images naturelles. en plus c'est filmé d'une certaine manière avec des gros plans sur les visages. Mais en tout cas, c'est une révolution. Et peut-être que Mann y voit une possibilité supplémentaire pour lui pour justement tourner ses scènes nocturnes. C'est marrant parce qu'il n'y a pas longtemps, j'ai vu le film Le 13e guerrier de John McTiernan. Et il y a une scène de nuit. où l'image est complètement noire et d'un coup on voit arriver des chevaliers, je ne vais pas faire le résumé, et on voit arriver des chevaliers avec des torches et ça allume justement l'écran. avec cette couleur très rouge, mais du coup très nature, où on n'a pas tout ce grain numérique. Donc l'image est très très propre, et techniquement, j'ai compris après, ils ont utilisé un négatif qu'ils ont superposé à l'image tournée pour renforcer cet effet. Du coup, on a un vrai noir qu'on n'a pas au début du numérique. Chez Mann, on a ce bruit, en fait, que certains vont dire « mais c'est insupportable, c'est ignoble, c'est moche, qu'on va retrouver encore chez Miami » . Moi, je me souviens, les premières critiques contre l'adaptation de Miami Vice par Mann, les gens étaient durs en disant « c'est ennuyant et surtout, c'est pas beau » .
- Speaker #1
C'est encore difficile pour certains aujourd'hui. Miami Vice, il y a vraiment des... Enfin, ouais, c'est particulier, quand même.
- Speaker #0
Mais j'ai l'impression qu'on y revient, justement. Et le prix Lumière, je trouve, va dans ce sens-là. On se réapproprie peut-être aujourd'hui les films que Mann a faits il y a 10, 15 ans, qui, finalement, ont été un petit peu en dehors de leur époque. Un temps d'avance, comme Friedkin avait un temps d'avance dans les polars dans les années 70. Man, il a eu un temps d'avance qu'on a eu besoin un petit peu de digérer, peut-être, pour se rendre compte qu'il y a plus de signifiants et il y a plus de prises de risques dans ce cinéma-là que le cinéma d'aujourd'hui, où on a une technologie plus avancée, mais où on fait des choses plus standards, peut-être.
- Speaker #1
Ceux qui prennent les risques aujourd'hui, si on veut y aller par là, je pense que James Cameron en fait partie. Il pousse à bout la technologie aujourd'hui. Peut-être un peu comme Mann l'a fait avec le numérique. Ce n'est pas le seul à avoir testé. Il y avait David Fincher aussi. Et puis, il y a eu aussi Star Wars, mine de rien, qui a bossé sur le numérique.
- Speaker #0
Qu'est-ce qu'on retrouve dans les thèmes entre hit et collatéral, d'un côté, et dans la French et Bac Nord de l'autre ?
- Speaker #1
Est-ce qu'on ne ferait pas peut-être une introduction de collatéral d'abord ?
- Speaker #0
Très juste. Je ne sais pas comment je vais les amener les extraits. On va repartir du coup sur les évolutions thématiques entre les films collatérales. Et entre Hit et Collateral, et de l'autre côté entre La French et Bac Nord. Donc on va faire un petit résumé. Collateral date donc de 2004 et raconte l'histoire d'un chauffeur de taxi joué par Jamie Foxx qui voit sa nuit basculer quand il réalise que son client, interprété par Tom Cruise, élégant mais glacial, il est tout en gris jusqu'à ses cheveux, est un tueur à gage chargé d'éliminer plusieurs cibles avant l'aube. Donc c'est un thriller nocturne, intense, et dans un Los Angeles un peu hypnotique, quasi rêvé. Et de l'autre côté, on a Back Nord, tourné en 2021 par Jiménez, et dont l'action se tourne à Marseille, avec les policiers de la brigade anticriminalité qui se battent contre la montée de la violence dans les quartiers sensibles. Le film, il a été décrié, parce qu'on le sait, il est inspiré de faits réels, et il nous plonge dans le quotidien brutal et l'épruisement ainsi que les dilemmes moraux des forces de l'ordre.
- Speaker #1
Alors oui, dit comme ça, on peut se dire, mais ça n'a rien à voir en fait, collatéral et Bac Nord. En tout cas, dans le scénario, on ne voit pas le lien. Rien à voir. Pourtant, selon moi, il y a un lien. Alors déjà... On parle de la première fois, enfin non, pas la première fois exactement pour Mann, puisqu'il utilisera le numérique en partie seulement dans Ali. C'est un film que je n'ai pas encore eu la chance de voir pour le moment. Mais Collatéral, c'est son... entre guillemets retour aux sources on est de nouveau dans un film où il est à l'aise en tout cas, il reparle de Los Angeles il utilise la caméra numérique pour la première fois on est dans du polar et là pour Cédric Jiménez c'est ok, je vais utiliser pour la première fois du numérique au cinéma et moi ce que je vois, le grand lien que je vois entre ces deux films c'est comment filmer la voiture Comment filmer la voiture ? D'un côté, avec Michael Mann, avec des plans fixes, en basse lumière, des choses assez expérimentales. Un film expérimental, en fait. Puisque c'est la première fois qu'on met aussi peu de lumière à l'écran pour éclairer les acteurs. C'est quasiment éclairé à la bougie, d'une certaine façon, sauf que c'est éclairé avec des lampes LED.
- Speaker #0
aux néons et aux lampadaires Los Angeles, qui, je crois, sont de plus en plus rares.
- Speaker #1
Oui, c'est vrai. Oui, c'est juste. Les lampes, elles ont changé de couleur. On est passé des couleurs magnifiques, des couleurs jaunes à des couleurs... plus bleu, plus blanche, il me semble. Et du coup, on est vraiment sur des caméras assez stables, des plans qui sont vraiment au niveau du visage, chez Michael Mann, dans Collateral. Tandis que chez Jiménez, on est là dans un film où c'est de la caméra portée à l'intérieur d'un habitacle de voiture. Et je trouve ça haletant. C'est trop bien. Non, c'est vrai, c'est très très nerveux. On est sur un tunnel au niveau du rythme. C'est impeccable, en fait, au niveau du rythme.
- Speaker #0
Mais je pense que c'est ce que tu as dit. Les deux, chacun de leur côté, se retrouvent finalement dans leur élément, avec leur thème, avec ce dont ils aiment parler. Il y en a un qui transpire Los Angeles, l'autre qui transpire Marseille. Et ce que je te propose, puisque tu parles de scène de voiture, c'est de mettre de courts extraits de la scène de Bac Nord lorsque le personnage de François Civil va récupérer avec Gilles Lelouch un gamin des quartiers sensibles de Marseille. Et de l'autre, ils avancent dans la voiture avec une confrontation avec ce personnage de jeune homme très agressif. qui va se terminer sur de la musique de Jul, qui d'autre évidemment, et de l'autre côté, on a ce calme, cette tension, et quand même cet échange un petit peu spirituel entre Jimmy Foxx, le chauffeur de taxi, et Tom Cruise, le tueur à gage à l'arrière du taxi, qui avance de nuit. dans leur itinéraire de mort, mine de rien, sous tension, dans le Los Angeles endormi quelque part. Je mets les deux extraits.
- Speaker #2
Parfait un flag Tu veux pas l'aider il va se faire du français Oh putain Il est chaud aujourd'hui
- Speaker #3
Vas-y go frère Tu lui fais la fessée Nique ta mère la pub M'en reviens pas Ferme ta gueule toi,
- Speaker #2
t'es un chignon ! Oh là là, va tranquille,
- Speaker #3
d'accord ? Oh, qui est tranquille ? Ferme ta gueule ! Oh là là !
- Speaker #2
Ferme ta gueule,
- Speaker #3
je te dis ! Vas-y toi, vas-y toi, espèce de pute de vent ! Ferme ta gueule ! ta gueule quoi ! t'en faire quoi ? comment tu parles toi ? dépêche toi quand je jette ta gueule je m'en bat les couilles j'suis mineur on a compris ferme ta gueule un peu nique ta mère ou la bande de pute je m'en bat les couilles j'vous nique vos mères vos soeurs qui vous laire il a un problème avec sa bite loup vas-y met moi un truc j'en peux plus dépêche toi quand je jette ta gueule ferme ta gueule ferme ta gueule c'est bon c'est bon C'est ça ! C'est ça !
- Speaker #4
C'est la même chose que de pousser dans la mémoire qui est zonée dans ton lounger barco et qui est hypnotisé par la télévision du jour pour la restée de ta vie. Et qu'est-ce que tu m'as parlé de la murder ? Tout ce qui a pris, c'était un payement de frais et une voiture de Lincoln Town. Et cette fille, tu ne peux même pas la appeler. Qu'est-ce que tu fais ? Tu ne conduis pas encore.
- Speaker #0
Voilà, après les deux extraits, il y a un point sur lequel j'aimerais... Après les deux extraits, il y a un point sur lequel j'aimerais revenir parce que dans l'extrait, je ne peux pas diffuser, mais du coup, ça se termine avec une accélération de la voiture de police, il met le gyrophare et le jeune demande à ce qu'on mette plus fort le son de la station de radio que Karim Leclou trouve, qui joue du djoul. Oui,
- Speaker #1
tu me suis ? Oui, oui,
- Speaker #0
je t'écoute. Et ça me fait penser à nouveau à Miami Vice, avec cette introduction qui n'en est pas une, puisqu'on arrive immédiatement avec la musique Numb de Linkin Park, Fit Jay-Z, du côté de Man. Et dans les deux cas, ces musiques sont intradiegetiques et le deviennent. Ils deviennent extra-diégétiques à un moment. C'est quoi l'importance et le rapport justement de ces musiques ?
- Speaker #1
Je ne me rappelais pas de ça dans le cas de Backnor, mais c'est vrai que j'ai remarqué pour Michael Mann une sorte de différence dans le traitement de la musique quand il est passé au numérique. Peut-être que c'est moi qui affabule, mais dans Miami Vice et dans Collateral. on commence avec une musique très connue, une musique de titres. Ce n'est pas de la musique originale faite pour le film. Et on commence direct avec Numb de Linkin Park dans Miami Vice. Et dans Collateral, c'est plein de titres différents parce que c'est un taxi. donc il écoute sa musique tranquille dans le taxi donc elle est à la fois intra et extra digétique dans le sens où on entend c'est tout à fait logique d'entendre plusieurs thèmes différents de musique dans un taxi donc c'est en ça qu'elle est intra digétique et extra digétique parce qu'elle représente aussi peut-être l'état d'humeur de Jamie Foxx l'état d'humeur de Max ... qui fait sa petite journée, va chercher l'avocate, la ramène au tribunal.
- Speaker #0
Et tu parles justement, il y a un côté fataliste, on disait, un côté tragique.
- Speaker #1
Dans la musique ?
- Speaker #0
Pas nécessairement dans la musique, mais dans cette fatalité grecque chez Michael Mann. Il vit sa petite vie, et là, il y a un événement qui en plus, il aurait très bien pu l'éviter, cet événement. Quand Tom Cruise vient chercher un taxi.
- Speaker #1
Il y a un truc qu'on n'a pas dit aussi, c'est que le film commence dans un aéroport en fait. Collatéral. Première scène, c'est Tom Cruise qui est dans un aéroport. Encore une fois, c'est un grand classique l'aéroport. On croise des gens. D'ailleurs, il va croiser Joseph Statham ? Non. james jason jason jason stade et ils vont s'échanger un briefcase pardon une mallette m et ils vont s'échanger ça et
- Speaker #0
et donc ça fait aussi un clin d'œil à Transporter bref mais c'est peut-être parce que ça veut peut-être dire quelque chose ça veut peut-être dire que il n'est pas d'ici, il n'est pas de Los Angeles peut-être ce personnage ah non,
- Speaker #1
il est de partout, il est de nulle part Tom Cruise mais tu as raison pour revenir un petit peu sur le côté très fataliste du cinéma de Michael Mann ... J'en ai parlé tout à l'heure avec Hit, de cette fatalité qui conduit les personnages à s'assassiner l'un l'autre, bien qu'ils auraient pu être amis, et de cette scène de café où ils parlent de tout, de rien, et de l'impossibilité pour eux de devenir amis parce que l'un doit empêcher ce que l'autre veut. Là, on est de nouveau là-dedans, mais très littéralement parce qu'il y a une scène qui le montre. C'est Tom Cruise qui sort d'un bâtiment et qui va pour prendre un taxi. Il toque à la fenêtre. Le taxi, donc Max, ne répond pas. Il va pour partir vers un autre taxi. Et là, Jamie Foxx le rattrape. Et il lui dit « C'est bon, je suis libre, viens, viens. » Et donc c'est parti, c'est parti pour le cauchemar de Jamie Foxx. Donc il était à deux doigts de ne pas vivre cette soirée.
- Speaker #0
Et qu'est-ce que ça va... Quels vont être justement les enchaînements ? C'est un point de départ et après c'est la descente. Je crois que tu prenais l'exemple d'un arbre avec des embranchements qui s'enfoncent de plus en plus vers le... La fin inexorable, j'ai envie de dire.
- Speaker #1
On peut parler de la fatalité en général, si tu veux. Je pense que c'est du tragique, en fait. On peut parler du tragique dans Michael Mann et dans Collateral. Effectivement, j'ai une sensation pour Hit, tout comme pour Collateral, une sensation de... Que le spectateur est en fait témoin d'un accident qui est inévitable. Pour Collatéral, c'est Max qui interpelle Vincent pour reprendre la course. À un moment du film, on va avoir un contrôle fait par des policiers où les policiers sont à deux doigts de se faire tuer, sauf qu'ils ont la chance de se faire appeler en urgence. et donc leur vie va être sauvée en fait. Mais en même temps, ça aurait pu stopper complètement le calvaire de Jamie Foxx. Peut-être que si la police avait... On aurait été dans un gunfight et puis Jamie Foxx aurait été libre. Il y a aussi un chassé-croisé permanent des personnages. Alors à un moment, au début du film, on a l'avocate, le taxi et le tueur qui se retrouvent dans la même zone géographique, dans le building. L'avocate, elle rentre. Tom Cruise, Vincent, il sort. Et à un moment au milieu du film, dans l'hôpital, on a exactement la même chose, on a le chauffeur de taxi. Jamie Foxx avec le tueur et un personnage dont on n'a pas encore parlé, le flic, qui est joué par Mark Ruffalo. On a le flic qui est joué par Mark Ruffalo et il y a une scène dans un ascenseur où ces trois personnages sont l'un à côté de l'autre. Petite discussion sympathique avec Tom Cruise qui est un assassin. Oui, dure soirée, le flic répond « Ah ouais, vraiment très dur » . Et le policier qui se retrouve à aller en morgue, à la morgue de l'hôpital. Et le taxi et le tueur à gages qui vont aller voir la mère de Jamie Foxx. Après, évidemment, il y a bien sûr la scène du coyote, qui là encore, elle donne un ensemble métaphorique. un ensemble qui donne une touche métaphorique à ce qu'on voit à l'image. Le coyote, c'est Vincent qui est là, mais qui est là en fantôme, qui traverse cette ville, qui survit. Je ne sais pas, un fantôme, c'est un ange, c'est une apparition. C'est fantastique en tout cas cette scène.
- Speaker #0
C'est quelque chose de sauvage aussi. C'est un animal sauvage. qui a du mal à... Enfin, qui ne peut pas s'adapter à la société, qui est un danger, qui se balade normalement en meute, mais là, en tout cas, de ce qu'on voit dans le film, il est seul. Et il reprend le code couleur aussi. Il est gris.
- Speaker #1
Oui, il se ressemble beaucoup, c'est vrai. C'est de pas de fait... Ouais, c'est de fait pour de... Ouais.
- Speaker #0
J'avais entendu dire que c'était... que c'était pas calculé. Apparemment, à Los Angeles, ça arrive souvent qu'il y ait des coyotes errants à la recherche de nourriture, mais que dans ce cas-là, c'était pas prévu et il est passé. Au moment où ils tournaient une scène en extérieur, Tom Cruise et Jimmy Fox, et ils ont joué le jeu. Au moment où il est passé, le coyote se serait arrêté, il y a eu des jeux de regard, ils ont tourné ça et que c'était pas prévu, et ils l'ont gardé quand même dans le final cut.
- Speaker #1
Et puis pour continuer sur le tragique, le film se termine quand même sur une traque, une traque quasiment surréaliste de Vincent qui a toujours les bonnes intuitions sur quel chemin a pris Max, quel chemin a pris Jamie Foxx pour s'échapper. Alors est-ce que ça veut dire que c'est le hasard qui guide l'EPA, est-ce que c'est la fatalité qui guide l'EPA ? de Vincent ou est-ce que c'est juste une maîtrise incroyable du chasseur, c'est un chasseur contre une proie. Voilà, c'est comme ça. Mais pareil pour Hit, en fait. Pour Hit, il y a beaucoup d'éléments qui... C'est un embranchement qui... En fait, on peut imaginer les scénarios de Collateral et de Hit comme un arbre avec plein de possibilités, mais pourtant, on prendra toujours le chemin qui mènera à un duel final anthologique quelque part. Le duel de l'aéroport entre Al Pacino et De Niro qui décidera un peu arbitrairement en fait. Il y en a un des deux qui va vivre, un des deux qui va mourir. Et dans le cas de Collateral, c'est le duel qui va finir encore en mouvement. Dans un métro, et voilà, c'est encore là une fois, tout d'un coup c'est Jamie Foxx qui se met en face d'une porte, qui tire à l'aveugle, et qui, malgré tout ça, il est sauvé, malgré le fait qu'en face de lui c'est un tueur professionnel, il est sauvé par Dieu, par quelque chose, par le hasard, par la fatalité.
- Speaker #0
Et justement, cet aspect fataliste, je crois, ça te faisait penser à une saga ?
- Speaker #1
Ah oui, exactement, oui. Ça me fait penser beaucoup à... Quelque part, ça ressemble à Destination Finale, où le spectateur est témoin de cette catastrophe annoncée. C'est exactement les mêmes mécaniques. C'est-à-dire, voyez cette scène où un personnage va mourir. Vous savez qu'il va mourir, mais vous ne savez pas comment. C'est pareil, là. on sait que De Niro ou Al Pacino va mourir, un des deux va mourir, mais on ne sait pas comment. Et c'est voir un accident se dérouler sur la pellicule. C'est ça.
- Speaker #0
Et chez Jiménez, il y a aussi cette tragédie, mais plutôt de l'épuisement, parce que ce sont des hommes un peu perdus dans les systèmes, des systèmes souvent corrompus.
- Speaker #1
Alors, chez Jiménez, on est vraiment dans... la tragédie du petit face au grand, en fait. C'est un peu David contre Goliath. Ça va toujours être... Je suis un personnage policier qui cherche à combattre le mal, mais c'est terriblement dur parce que le système est corrompu, parce que... Et puis, tristement, en fait, les histoires chez Jiménez, elles se terminent toujours par le héros qui est sacrifié. Le héros finit toujours par se sacrifier pour la lutte contre le mal. Et donc, c'est un peu un combat perdu d'avance. Donc, c'est cette forme-là de tragique chez Jiménez. Et puis, si on veut citer un autre réalisateur, si on veut citer Olivier Marchal, qui est un très grand réalisateur de polar français, on peut apprécier, on peut moins apprécier.
- Speaker #0
Ancien policier, quand même, il faut préciser.
- Speaker #1
C'est vrai, ancien policier. Il a fait des films beaucoup plus, on va dire, gothiques. beaucoup plus... Voilà, on est sur des impaires noires, de la pluie, on est sur des phrases assassines, on est sur quelque chose de beaucoup plus gothique. Et là, cette fois-ci, si on veut prendre l'exemple de 36 cas des Orfèvres, on va avoir le tragique, mais qui va s'inviter un peu à rebours. On n'est pas comme Michael Mann, où on voit le tragique se dérouler. se dérouler à chaque instant et emprunter le chemin du duel, on est là sur le passé qui revient, le retour du passé avec un item qui va être un couteau. qui va revenir et hanter nos personnages de par Dieu. Un personnage va mourir.
- Speaker #0
Il amène un peu le jugement final, ce couteau. Il scelle le sort de beaucoup de personnages.
- Speaker #1
Oui, c'est vrai. Il scelle le sort. Oui, c'est ça, c'est un peu un item maudit. On peut dire ça, oui, exact.
- Speaker #0
Est-ce que je te propose, on a fait notre échange sur les quatre films qu'on voulait le plus évoquer, du coup, Collatéral... Hit chez Mann et La French et Bac Nord chez Jiménez. Mais l'actualité ciné veut que Cédric Jiménez a récemment sorti son Chien 51. Tu as pu le voir. Qu'est-ce que ça va raconter justement Chien 51 ? Et comment est-ce qu'on peut le relier à notre échange justement qu'on vient d'avoir ?
- Speaker #1
Oui, je pense que ça serait pas mal de commencer par un petit résumé du film. Si t'es d'accord Nico ?
- Speaker #0
J'ai oublié à chaque fois de mettre le résumé. Celle-là, je vais la garder. En plus, tu me l'amènes en douceur, donc ça va. En effet, pour le résumé Chien 51, nous sommes donc dans un futur proche où Paris a été divisé en trois zones qui séparent les classes sociales et où l'intelligence artificielle, nommée ALMA, a révolutionné le travail de la police. Et jusqu'à ce que son inventeur soit assassiné et que Salia et Zem, deux policiers que tout oppose, soient forcés à collaborer pour mener l'enquête.
- Speaker #1
Oui, exactement. On est sur un film qui ne fait pas bonne presse en ce moment. C'est pas facile pour lui. Déjà les problèmes. On peut se dire que le scénario n'est pas très original. Mais est-ce que c'est vraiment ça qui est intéressant dans le cinéma de Jiménez ?
- Speaker #0
Après, il est basé aussi sur un livre. On ne l'a pas lu. On ne sait pas ce qui est propre au livre, comment ça a été adapté.
- Speaker #1
Il n'empêche qu'on retrouve encore du métropolis. C'est un grand classique de diviser en zones les propres livres. Bon après c'est évidemment le futur qui nous permet de nous parler de notre présent donc est-ce que c'est pas déjà le cas ces zones ? Mais bien sûr que si. On est bien sûr déjà dans le cas de la couronne périurbaine, de l'autre côté du périph', voilà évidemment. Et ensuite, formellement, Chien 51, on retrouve... Tous les thèmes de Cédric Jiménez, à savoir un complot, un personnage face à un complot qui est plus grand que lui, la lutte contre le mal, un héros qui va être brisé. On retrouve toutes ces thématiques. Mais en plus, là, on est face à... On rajoute la thématique de l'intelligence artificielle. On rajoute la thématique des images. Est-ce que je crois ce que je vois ? Est-ce qu'il y a une thématique qui est maintenant très actuelle ? On va aussi retrouver des thématiques un peu plus sombres, un peu plus obscures. de Jiménez, à savoir qu'il adore filmer Gilles Lelouch nager. Dans tous les films où Gilles Lelouch est paré, il nage. Il adore le voir.
- Speaker #0
Il veut un côté performance d'acteur un peu DiCaprio dans The Revenant.
- Speaker #1
On n'en est pas à ce point-là. Mais oui, je ne sais pas pourquoi. Il est toujours là, en train de nager. Et on retrouve aussi, d'un point de vue plus formel encore, une caméra qui est très secouée. Ça, c'était quelque chose qui m'avait gêné dans la French. Il y a une scène de course-poursuite où Jean Dujardin attrape un trafiquant de drogue et vraiment ça secoue la cam. Là, on retrouve aussi un petit peu de ça.
- Speaker #0
Est-ce que ce n'est pas simplement pour essayer de faire en sorte que le spectateur se sente vraiment immergé dans l'action ?
- Speaker #1
Bien sûr, mais est-ce qu'on est obligé de filmer à la GoPro ? Moi, j'ai cette sensation-là. Maintenant, j'aime beaucoup ce que fait Cédric Gimenez parce que je trouve que les scènes de course-poursuite qu'il fait en voiture sont incroyables. On a encore de très belles scènes, peut-être les plus belles scènes de course-poursuite dans ce film-là.
- Speaker #0
mais oui du coup il transpose ça après à la course poursuite à pied mais je sais pas mais est-ce que c'est pas aussi un travail d'opposition de ce que tu m'as raconté avec peut-être les images de vidéosurveillance qui sont du coup statiques on
- Speaker #1
peut voir ça comme ça après c'est quelque chose qui a toujours été dans le cinéma de Jiménez, il aime filmer l'action de cette manière là bon moi je suis pas fan de Paul Greengrass en tout cas j'aimais bien J'aimais bien les Jason Bourne, mais après je trouve que le pire de ce qui s'est passé avec ce genre de film, cette façon de filmer, c'est Taken 2, où ça secoue, ça coupe l'action pour la dynamiser artificiellement au niveau du montage. Mais voilà, donc j'ai entendu beaucoup de mal. J'ai entendu beaucoup de mal de Chien 51, notamment pour dire que ce n'est pas original, que les images qu'on a vues, ça rappelle Blade Runner, que ça rappelle Matrix. Bon, est-ce que c'est vraiment très honnête ? Parce que Blade Runner a tellement infusé ce que c'est que le futur dystopique dans notre pop culture, que oui, toutes les images qu'on verra aujourd'hui ressembleront à Blade Runner.
- Speaker #0
Tout le cyberpunk même. Bien sûr. On le rappelle, c'est un livre à la base. Et c'était pas le seul, en plus, à faire du cyberpunk à cette époque-là. Mais oui, c'est retrouvé partout, constamment. Est-ce qu'il y a des inspirations asiatiques, en plus, dans Chien 51 ?
- Speaker #1
On pourrait, j'imagine. Mais si tu penses à Ghost in the Shell, d'une certaine façon...
- Speaker #0
Non, mais je veux dire, dans Blade Runner, clairement la pub pour Atari jeux vidéo, il vit dans le quartier plutôt asiatique. Est-ce que vraiment on en est à ce point-là ?
- Speaker #1
En tout cas, ce qui est vrai, c'est que Cédric Jiménez reste un cinéaste de la citation. Il a toujours utilisé d'autres œuvres pour faire son cinéma. Moi, j'ai ressenti beaucoup un côté jeux vidéo, mais pas asiatique. J'ai pensé beaucoup à Détroit Become Human. avec des images effectivement de hologrammes, de vidéosurveillance très détaillées qui sont produites par l'intelligence artificielle ALMA et un futur un peu technologique, un peu comme Detroit Become Human avec des écrans qui sont transparents, avec des choses un peu artificielles je trouve mais c'est intéressant à voir, c'est pas original mais ça rend bien. Maintenant, si on veut aller encore plus dans le détail, Je trouve que dans ce dernier film de... de... dans ce dernier film, Chien 51, je trouve qu'il y a beaucoup de Steven Spielberg. C'est étonnant de dire ça comme ça parce que c'est pas formel, enfin, un petit peu, mais c'est aussi dans la structure narrative. Je trouve que ce film-là, c'est un mélange entre Jurassic Park et Minority Report. Est-ce que ce n'est pas très intéressant comme point de vue ?
- Speaker #0
Un grand écart.
- Speaker #1
Ce que je me disais, c'est qu'en regardant ce film, j'ai beaucoup pensé à Minority Report, parce que pour moi, on est face à deux films qui se répondent. Minority Report, si vous vous en souvenez bien, c'est euh hum une analyse des visions du futur. Enfin voilà, il y a des précoques, des personnages... qui ont des super pouvoirs, c'est ça, qui peuvent être capables de voir l'avenir quand il s'agit de crimes, quand il s'agit de meurtres. Et donc, à partir de ces visions qu'ont ces personnages, on va bâtir toute une nouvelle unité policière qui va s'appeler le programme pré-crime et qui va être chargée de stopper les crimes avant qu'ils ne se produisent. Dans ce film-là, on est face à une intelligence artificielle toute puissante qui, elle, va regarder les scènes de crime qui se sont produites et donner des scénarios possibles de ce qu'il s'est passé. Et ce qui est très intéressant, si on les met face à face, c'est que d'un côté on a les effets et on remonte jusqu'au... cause et de l'autre on a ça ne s'est pas encore produit mais il faut stopper avant que ça se produise donc on est vraiment dans deux miroirs ce que cela va induire c'est que pour dans le cas de Minority Report on va on va dire que les précoog dans cette société là on va en abuser on va on va les utiliser, on voit même peut-être les violer. En tout cas, il y a un scientifique qui s'occupe de ces précoques et qui est très étrange, si tu te souviens, Nicolas. C'est vraiment un peu bizarre. Et toute la société doit vivre avec ce péché un peu de... On séquestre des humains quand même pour pouvoir arrêter les crimes. Donc on est un peu sur une humanité déshumanisée. Et ça va conduire ça après... Si on revient un peu à l'histoire du film, il y a quand même aussi dans Minority Report un péché originel qui va être commis, qui va être un assassinat, l'assassinat de... de la mère des précoques, qui va permettre de mettre en place le programme précrime. Et ce péché originel va ensuite finir par éclater au grand jour et détruire le programme précrime. Et pour ce qui est ensuite des images qui sont proposées par les précoques pour avertir des précrimes, On est vraiment dans des images de rêve, des images brouillées, des images qui sont à déchiffrer, des images qui sont à interpréter. Et maintenant, une fois qu'on a dit tous ces éléments-là, on peut se poser la question, mais comment Chien 51 propose en fait une réponse ? Alors de nouveau, là, on va être non pas sur des rêves, mais on va être sur des images extrêmement détaillées pour les scénarios. On va être sur des images vectorisées, des images d'hologrammes, des images de jeux vidéo en fait, qui ne laissent aucun doute à l'interprétation. Là où les visions du futur des pré-cog, elles sont certaines, elles sont certaines dans le sens où... Si tu n'es pas au courant de ton futur, alors tu ne peux pas t'en échapper. C'est un peu ça quand même ce que raconte le film. C'est Tom Cruise, tout d'un coup, il y a une alarme. Il se trouve qu'il est le meurtrier, il est le futur meurtrier de quelqu'un. Et la question c'est, est-ce qu'il va le tuer ou est-ce qu'il va réussir à ne pas le tuer ? Il réussit à ne pas le tuer, mais uniquement parce qu'il était au courant de son futur. n'avait pas été au courant, alors il l'aurait assassiné. Tandis que là, on est face à une intelligence artificielle, dans le cas de Chien Saint-Cyril, On est dans le cadre d'une intelligence artificielle qui manipule les indices pour pouvoir donner des scénarios faussés. Donc là où quelque chose est certain, dans le cadre de Minority Report, on va manipuler les images, on va manipuler la vérité dans le cadre de Chien 51.
- Speaker #0
Mais la résolution de Minority Report, c'est aussi parce qu'on se rend compte que l'image a été manipulée, avec le sens de l'eau.
- Speaker #1
C'est très juste. L'image a été manipulée, mais en fait, ce n'est pas l'image qui est manipulée, c'est l'interprétation qu'on en fait, parce que les images, elles sont vraies.
- Speaker #0
Tu as raison. Non, tu as raison. C'est notre interprétation ou il l'a mis en sens inverse ?
- Speaker #1
Ce qui se passe, c'est que ce n'est pas une question de sens inverse. C'est les pré-cogs. En fait, il va reproduire. Donc le personnage qui décide de créer le système, l'unité pré-crime, va commettre le meurtre de la mère des pré-cogs en reproduisant un meurtre. Il va le faire en reproduisant un meurtre. Donc il va d'abord payer un tueur à gage pour commettre un crime. Ce crime va être stoppé par les précoques parce qu'ils auront vu le futur. Puis, en ayant vu les images qui ont été faites, ont été fournis, les rêves qui ont été fournis par les précoques, il va reproduire le meurtre mais effectivement il y aura un détail physique en fait, dans la scène qui montre que ce n'est pas une image reflet, mais c'est bien un autre crime, et c'est ça ce qui se passe
- Speaker #0
Voilà, et que si on n'avait pas vu ce détail, on pensait que c'était... un dysfonctionnement du système, que c'était une image double, et c'était l'alibi idéal pour dire qu'on a déjà résolu cette enquête, donc hop, poubelle, pas besoin.
- Speaker #1
Absolument, sauf que ce qui est intéressant c'est ça, c'est que dans Minority Report, si on regarde bien, les précoques n'ont jamais tort. Ils n'ont jamais tort dans le sens où la seule fois où ils ont tort, c'est parce que le futur assassin est témoin de ce qui va se passer. Donc on est un peu enfermé dans la fatalité. Et finalement, on interroge un peu le libre arbitre et on montre qu'on a toujours le choix, mais un peu à rebours dans Minority Report. Tandis que là... Dans Chien 51, c'est on interroge les images, on est vraiment dans l'ère de la post-vérité. On est dans comment utiliser les images que j'ai en face de moi pour les manipuler. dire ce que je veux dire du monde. Et mine de rien, c'est un peu une thématique qui irrigue aussi le cinéma de Cédric Jiménez. Parce qu'on le sait tous, le cinéma de Cédric Jiménez, c'est quand même un cinéma qui fait débat. Parce que certains vont dire qu'il y a de la manipulation quand même des faits. derrière le cinéma qu'il propose, notamment... vis-à-vis de Bac Nord, où il y a une sorte de minimisation de l'impact du trafic policier autour de la drogue. Dans le cas de Novembre, il y a eu toute cette histoire autour du voile d'un des personnages qui est censé représenter une personne réelle mais qui n'a pas de voile et qui d'ailleurs n'était pas contente. et donc le film novembre a dû rajouter un quartier carton explicatif à la fin pour dire que le personnage avait été modifié. Dans le cadre de la French, il y a certainement aussi de la manipulation pour pouvoir rendre le scénario, l'histoire plus épique. Je ne sais pas si vraiment un juge d'instruction peut se retrouver comme ça dans une cour de poursuite à stopper quelqu'un. Ça me semble vraiment étonnamment courageux ou en tout cas étonnamment euh Pas tout à fait légal. Et finalement, avec ce film-là, on en arrive à un moment où Cédric Jiménez nous montre des images dont on va modifier le sens, ce qui est un peu ce qu'il fait en fait. Ça ne change pas pour moi la qualité formelle des films que l'on voit. Ça veut juste dire qu'il a une... Il a quelque chose à dire sur le monde, il parle de systèmes corrompus, il parle de ce genre de thèmes. Maintenant, pour ce qui est de Jurassic Park. pour Chien 51 j'ai retrouvé du Jurassic Park dans la façon de filmer les drones ça m'a fait beaucoup penser à ça notamment à la fameuse scène de la cuisine avec les vélos Siraptor qui regardent par la fenêtre puis qui rentrent et qui font les rayons de la cuisine et qui cherchent on a vraiment un drone qui est Merci. Est-ce que c'est vraiment manipulé par une intelligence artificielle ? Ça n'a pas l'air. C'est un peu... ça s'est sournois, ça regarde à gauche, à droite. Le drone, il ne vise pas très bien. On est sur quelque chose qu'on pourrait dire aussi un vide un peu scénaristique peut-être. Parce que, est-ce qu'un drone manipulé par une intelligence artificielle serait aussi mauvais pour viser ? Je ne sais pas. Et voilà pourquoi j'ai pensé à ces deux films. Donc d'un côté Minority Report qui est formellement un miroir de ce chien 51 et ces petites scènes aussi d'horreur que l'on a pu voir dans le Jurassic Park de Steven Spielberg et qu'on retrouve aussi dans la manière de filmer les drones. pour Cédric Jiménez. Et c'est des avis que je n'ai pas entendus, donc je pense que c'était assez intéressant d'en parler.
- Speaker #0
Et je crois qu'il y avait un point aussi que tu voulais soulever sur peut-être les images du peuple.
- Speaker #1
Ah, c'est très juste, oui. Le film se termine par une sorte de révolte, la révolution... Comment lutter face à une intelligence artificielle toute puissante ? Alors, on a les Anonymous dans le film qui nous disent « brûlez vos téléphones » , quelque chose comme ça. Et ça se termine par un soulèvement du peuple. Mais qui est un peu... Un soulèvement du peuple en théorie, maintenant, est-ce que le montage nous montre vraiment un soulèvement du peuple ? C'était la question que je me posais. Ce que je vois, c'est... une masse de personnes qui tout d'un coup s'attaquent à une frontière, à la frontière entre la zone 3 et la zone 2 dans le Paris futuriste. Et le problème, c'est qu'on va revenir à un concept que j'ai entendu dans une vidéo de Karim Debaache, qui est le concept du montage dialectique, qui a été théorisé par Sergei Eisenstein. Alors attention, n'ayez pas peur, tout va bien. C'est que la théorie c'est de dire que filmer des gros plans va donner une image à un peuple opprimé. C'est aussi de mettre en relation des images de peuples massacrés en même temps avec des scènes d'abattoirs de vaches. C'est ça que Sergei Eisenstein a pu faire pour faire un peu de la propagande ou pour faire en tout cas réfléchir le peuple. Et là, puisqu'on est dans le cas d'un soulèvement, d'une révolte, d'une révolution, malheureusement, je n'ai pas l'impression de retrouver ces gros plans qui permettent de donner un visage aux opprimés. J'ai plus l'impression d'être face à une masse qui décide de détruire une frontière. On est plus, pour moi, dans une masse qui... Enfin, voilà, une sorte de manifestation qui dégénère, en fait. Comme s'il y avait les Black Blocs qui s'attaquaient aux vitrines de Paris. Enfin, je sais pas. Voilà, en tout cas, tout cet imaginaire que ça a provoqué chez moi, plutôt que... plutôt qu'une réelle révolution.
- Speaker #0
Et du coup, comment est-ce qu'on peut conclure notre épisode sur le cinéma de Mann versus le cinéma de Jiménez ? Est-ce qu'on peut affirmer les différences aussi ?
- Speaker #1
Alors pour moi, du coup, le cinéma de Jiménez et le cinéma de Mann, ils ont évidemment quelque chose en commun dans leur façon de filmer la ville, de filmer leur culture. C'est quand même des films d'action qui sont très efficaces. Ils ont une esthétique qui est proche entre les voitures, toute la thématique de la surveillance aussi, dont on n'a pas beaucoup parlé finalement. Mais dans IT, il y a tout un jeu entre qui surveille qui. Et c'est un jeu qu'on va retrouver aussi dans la French. Qui surveille qui. Et encore plus dans Chien 51, où là... On est sur de la surveillance permanente avec les drones. Donc des thématiques proches, oui, dans un premier temps seulement, puisque après on a pu montrer que c'est quoi qui intéresse Man au final. C'est vraiment de faire une opposition de point de vue. C'est comment est-ce que chacun voit la vie à sa façon. Le cambrioleur et le policier, ils sont semblables et pourtant l'un veut faire ce que l'autre doit empêcher l'autre. Enfin, pas très français cette phrase. Mais voilà, l'un doit empêcher ce que l'autre veut faire. Et ça reste des films... Pour Cédric Giménez, on a des films qui sont très rythmés, avec... une sensation de tunnel, d'être pris, d'être pris, d'être dans un rythme accablant. Et dans le cas de Mann, on est là dans quelque chose de beaucoup plus introspectif, dans quelque chose de beaucoup plus sensoriel. Donc voilà quels sont les points communs, les différences, selon moi, entre les deux réalisateurs. C'est pour ça que quand Adèle Exarchopoulos dit que c'est un peu... le
- Speaker #0
Michael Mann français je suis à la fois d'accord et à la fois pas d'accord et la bonne nouvelle c'est qu'on pourra continuer d'en parler puisque Michael Mann a annoncé un Hit 2 et de son côté Jiménez on va le revoir oui absolument
- Speaker #1
Hit 2 d'ailleurs il a dit qu'il allait le tourner en pellicule un retour aux sources oui oui ça va en fait avec le... l'époque dans laquelle se déroule Hit 2 parce que ça va se dérouler de 1988 à 2000 de ce que j'ai compris on ira voir et on vous invite aussi à retrouver les
- Speaker #0
films qu'on a cités ils valent le coup pour ce qu'ils racontent et pour la manière dont ils le racontent que ce soit chez Jiménez chez Marx on a aussi abordé Friedkin on a abordé Eisenstein on a abordé Paul Greengrass on a abordé Marshall il y en avait une foule et ce que je propose c'est de continuer si ce thème vous parle aussi, avec nous, cette exploration du genre du polar au fur et à mesure, en passant de réalisateur à réalisateur, davantage qu'époque à époque, au fur et à mesure des épisodes. Ça va être un petit peu une trame de fond, un fil rouge, que je vais déployer sur les épisodes à venir pour le podcast. Comment tu t'es senti dans cet exercice, Max, du coup ?
- Speaker #1
C'était un thème dont on savait qu'on avait beaucoup d'informations. J'espère qu'on a été suffisamment précis pour en parler et que ça a été intéressant pour tout le monde.
- Speaker #0
Et bien sur ce mot, je te remercie à nouveau pour notre troisième épisode. épisodes communs. On a commencé par un film, puis un personnage, puis maintenant on s'attaque à un genre, si on peut dire. Donc hâte de voir la suite avec toi aussi, parce qu'on le sait, les films à genre unique, on va dire, ça n'existe pas. C'est toujours des mélanges de différents genres. Et j'ai hâte qu'on explore justement, en remontant cet arbre généalogique du cinéma, vers des superpositions entre le suspense et jusqu'à Roger Rabbit, c'est le but ultime car tout le cinéma vient de Roger Rabbit, tout le monde le sait et bien encore un grand merci à toi Maxime merci beaucoup et puis on vous retrouve très bientôt pour un nouvel épisode de Retro Ciné