- Speaker #0
Bonjour à toutes et à tous et bienvenue sur Retro Ciné, votre rendez-vous cinéma qui vous transporte dans les films de patrimoine du cinéma mondial avec des oeuvres disponibles simplement, parfois gratuitement, sur internet, dans les festivals de films ou dans vos médiathèques et cinémathèques près de chez vous. Aujourd'hui, un épisode hors séance au sein duquel j'ai le plaisir de recevoir Manon. du podcast Les Bobines Partagées, un podcast que j'apprécie particulièrement à titre personnel, des formats entre 10 et 15 minutes. À ce jour, elle en a environ une vingtaine d'épisodes qui ont chacun des thématiques propres liées au monde du cinéma ou alors qui vont se concentrer sur des films via un angle particulier. Ces podcasts m'ayant particulièrement plu, j'ai eu envie d'échanger justement avec elle, d'avoir son point de vue à la fois de podcasteuse et aussi tout simplement de cinéphile. Lors de nos échanges, Je ne savais pas encore quel thème je souhaitais aborder avec elle, jusqu'à tomber sur l'évidence, parler de notre passion de cinéphile, la cinéphilie. J'espère donc que notre échange va vous plaire, et notre réflexion était vraiment comprendre pourquoi nous aimons tant ce médium, et sur ce qu'est la cinéphilie de manière générale. Allez, assez parlé, je vous laisse découvrir notre échange, et je vous retrouve en fin d'épisode ! Eh bien bonjour Manon !
- Speaker #1
Salut !
- Speaker #0
Bienvenue dans Rétro Ciné, je suis très content de te recevoir.
- Speaker #1
Pareil.
- Speaker #0
On avait échangé une première fois sur Instagram par message et on trouvait qu'on avait des styles un petit peu de podcast et de cinéma qui se rapprochaient. Et je t'ai proposé du coup de faire cet épisode commun. Est-ce que tu peux nous parler un petit peu de toi, déjà te présenter et surtout nous expliquer ton podcast, donc les bobines partagées, pourquoi ce projet ?
- Speaker #1
Déjà, merci beaucoup pour l'invitation, c'est super cool. J'étais hyper contente que tu me proposes ce projet à deux. Donc moi je suis étudiante en cinéma et je commence à être critique de cinéma professionnel entre guillemets parce que je suis pigiste depuis cette année chez Zone Critique notamment. Et donc étudiante en cinéma donc en master de ciné ainsi qu'à l'ENS Dulm dans le département art. Et donc j'ai créé ce podcast il y a un an et demi vers janvier 2024 je crois. Parce que j'avais envie de partager un peu des coups de cœur cinéphiles et en même temps de m'adresser à la fois à ceux qui découvriraient le cinéma et à la fois aux cinéphiles. Ce qui est une tranche un peu compliquée en termes d'audience. Mais l'idée c'était un petit peu de vulgariser ce qui faisait la spécificité du cinéma, que ce soit le montage, la photographie, qu'est-ce que c'est que tous ces termes techniques. Et en même temps permettre à ceux qui découvrent le cinéma... ou qui se disent déjà connaisseurs de cinéma, en cinéma, de découvrir de nouvelles choses. Parce que moi-même, en tant que cinéphile, des fois, j'ai l'impression de tourner un peu en rond dans ce que je connais. Et j'aime bien essayer de voir un peu des trucs de niche tout en étant accompagnée dans cette découverte, entre guillemets. Et c'est ce que j'essaye de faire avec les bobines partagées. Donc, c'est des épisodes de moins d'un quart d'heure en général. L'idée, c'est un peu de présenter un réal, présenter une... technique entre guillemets propre au cinéma à travers un film en particulier et de se balader entre les époques pour essayer de brasser un petit peu une petite balade dans le cinéma.
- Speaker #0
Merci, c'est déjà très complet et j'aime beaucoup ta proposition justement de format court qu'on peut un peu picorer sur des thèmes et des réels très différents, ça j'apprécie beaucoup et c'est pour ça que ça m'avait donné envie de parler avec toi. On peut dire aussi aux auditeurs, la difficulté aussi, c'était de trouver un thème. Parce qu'on aurait pu partir sur des films, on aurait pu partir sur des réalisateurs, on avait pas mal d'idées. Mais tu l'as évoqué dans la présentation des bobines partagées, je pense que c'est vraiment cet amour du cinéma, la cinéphilie, dont on avait envie un petit peu d'explorer notre propre vision du cinéma, de pourquoi on aime ce médium. et d'échanger sur ce thème de manière plus générale. Donc, tu me disais quelque chose d'intéressant lorsqu'on préparait l'épisode. Voilà, on est encore des jeunes cinéphiles. On a plutôt l'image de la personne plus âgée, qui lit encore les cahiers du cinéma, qui a cette forme peut-être un petit peu d'élitisme de temps en temps, qui prend un café après avoir vu, je ne sais pas, le dernier Woody Allen, et qui en parle dans des termes très philosophiques. C'est quoi pour toi justement notre différence en tant que jeune cinéphile ? Qu'est-ce qu'on cherche à faire ? Alors, le thème partagé de ton podcast, j'aime beaucoup aussi. Mais c'est quoi ta vision pour toi ? C'est quoi un cinéphile ? C'est quoi la cinéphilie et c'est quoi être un jeune cinéphile parmi ça ?
- Speaker #1
Je pense que le cinéphile, c'est un peu toujours un cinéphile en devenir, je dirais. En fait, pour moi, c'est une sorte de démarche de toujours vouloir découvrir plus le cinéma, d'aller sans hiérarchie d'époque, de genre, de pays, d'aller s'intéresser autant au cinéma muet soviétique que d'aller... voir des films français des années 60 que de s'intéresser à un obscur réalisateur chilien. C'est un peu d'essayer de picorer un peu sans se cloisonner vraiment. Ça c'est plutôt je pense les spécialistes, les gens qui vont vraiment être experts dans un truc hyper précis. Le cinéphile je pense qu'il brasse un peu partout, il voit à boire et à manger dans toutes les périodes, dans toutes les époques. Et je pense que c'est une démarche de curiosité tout le temps. Mais ça peut être aussi d'aller voir des films obscurs d'un réalisateur plus connu. Il n'y a pas vraiment de règles, j'ai envie de dire. Et c'est ça qui est assez fascinant et effrayant, je pense, quand on se lance dans vraiment une passion à fond comme ça. Donc c'est un peu une obsession, je pense, quelque part, être cinéphile. Et je pense quand même qu'il y a eu une petite évolution, je pense, des cinéphiles entre ce qu'on pourrait dire les vieux cinéphiles, le cliché un peu du vieux cinéphile et les jeunes cinéphiles qu'on tente de représenter. qui est que la cinéphilie, elle est aussi associée à une forme d'élitisme, voire de classisme, parce que c'est quelque part une érudition. Et donc, voilà, je pense qu'il y a beaucoup de gens qui ont une image un peu figée du cinéphile, qui regardent des trucs obscurs en noir et blanc dans son coin et qui le partagent à personne. Et je pense qu'aujourd'hui, il y a beaucoup de jeunes cinéphiles qui veulent un peu contrer ça. Et coupe-moi si je me trompe, mais je pense que nos deux podcasts ont un peu envie de briser cette image-là aussi du cinéphile dans son coin. Qui va être en mode, t'as pas vu ça, la honte ? Non, je pense que c'est pas du tout notre idée. Et de faire un peu tomber ce malentendu sur les cinéphiles un peu élitistes, et au contraire de partager encore plus la vision du cinéma. Moi je l'associerais plutôt à une jeune génération, mais après je pense qu'il y a des contre-exemples partout, et à Paris les ciné-clubs ou les séances présentées par des critiques sont un bon contre-exemple de ça, donc c'était pas non plus... Je ne voulais pas incriminer tous les vieux cinéphiles dans le lot, mais je pense qu'il y a un peu de ça quand même.
- Speaker #0
Oui, mais ce que tu dis est très juste. Je pense qu'on a tous les deux envie de partager et de faire découvrir autre chose en complément des sorties cinéma. Moi, c'était vraiment ça le but de mon podcast au départ. C'était de partager des films, oui, moins connus, mais qu'on peut trouver facilement sur Internet, dans les festivals. qui aussi apportent quelque chose, qui ont fait parler d'eux d'un point de vue technique, ou qui sont reconnus dans l'histoire du cinéma. Vraiment des films qui ont un intérêt. Et c'est pas par opposition non plus à la salle, où on peut être cinéphage, tu me le disais pareil dans la préparation de ce podcast, on consomme beaucoup de films. On consomme beaucoup de films en salle, sur les plateformes, les collections de DVD, etc. Et l'idée c'est aussi un petit peu de de recentrer ou alors d'aller vers des cultures qu'on n'a pas forcément la possibilité d'aller voir en salle. En France, je trouve qu'on a quand même cette chance d'avoir des films de cultures diverses qui viennent de plusieurs pays différents. Ce n'est pas le cas dans tous les cinémas. Moi, je vis en Suède et du coup, c'est un peu des raretés des fois des films asiatiques, etc. Donc, c'est toujours un plaisir de découvrir ça. mais c'est vraiment cette opposition aussi entre les cinéphages qui vont consommer peut-être les dix films qui sont à l'affiche pendant le mois, mais sur ces dix films il y a peut-être beaucoup de cinéma américain ou au cinéma occidental, et la cinéphilie a peut-être cette curiosité en fait d'aller vers des films non pas obscurs mais issus de cultures ou d'interprétations d'imagerie qu'on n'est pas habitué à avoir.
- Speaker #1
moi c'est ça qui me plait et puis je rajouterais aussi que dans la démarche du cinéphile il y a quelque chose aussi presque de l'ordre du chercheur de l'historien dans le sens où souvent on va voir un film et après on va faire des recherches sur ce film, on va lire des livres en rapport avec ce film de toujours prolonger le visionnage par de la connaissance quelle qu'elle soit ce que je te propose du coup parce qu'on l'évoque c'est d'essayer de comprendre toi et moi pourquoi ...
- Speaker #0
Est-ce que la cinéphilie, en fait, nous est venue ? Est-ce que... Enfin, attends, je vais reformuler. Comprendre un petit peu la naissance de notre passion, qu'est-ce qui a fait qu'on est autant amoureux du cinéma, du 7e art ? Est-ce qu'il y a une raison personnelle ? C'est quoi un peu ton parcours qui a fait que tu es devenu une cinéphile ?
- Speaker #1
Je dirais qu'il y a eu deux, entre guillemets, chocs de cinéma qui m'ont amenée vers le 7e art. Il y a, quand j'avais une dizaine d'années, j'avais vu à la télévision, un peu par hasard, le film de science-fiction Bienvenue à Gataca. Et c'est la première fois que je m'étais dit, tiens, le cinéma, ça peut être un rythme différent, ça peut être une manière de raconter les histoires un peu différente que ce que je voyais en famille. Et c'était essentiellement des films très bien par ailleurs, mais des trucs avec... Belmondo, des comédies françaises, ont resté dans quelque chose qui se ressemblait souvent. Et là je me suis dit ah tiens il y a un truc un peu différent. Bon à l'époque je n'avais pas trop creusé et puis c'est à 16-17 ans quand je me baladais comme tous les week-ends à la médiathèque et que j'ai emprunté un peu par hasard Apocalypse Now de Coppola. Et là quand je l'ai vu, là c'était fini, là c'était c'est bon la cinéphilie m'a eu, là c'était c'était terminé on pouvait plus me récupérer. Donc je l'avais vu à l'époque sur un lecteur DVD de voiture, donc vraiment le pire visionnage possible. Et vraiment, je me souviens avoir eu des frissons comme je n'en avais jamais eu, d'être toujours choquée par ce que je voyais. Et là, je me suis dit, ah oui, je crois que je vais creuser ça. Et à partir de là, tous les week-ends, je trouvais des films à la médiathèque, je creusais sur YouTube les films en libre accès. Là, c'était terminé. Donc je dirais que c'était à partir de mes 17 ans, je pense. Et puis aussi, il y a eu, enfin on va en reparler je pense, mais l'importance d'Internet aussi personnellement dans mon apprentissage du cinéma. Quand tu ne connais pas le cinéma et que tu es née dans les années 2000, le premier truc que tu fais, c'est que tu tapes film culte sur Google et tu regardes les listes, les tops. Et là, je notais tout sur un petit carnet, toutes les listes que je voyais, je surlignais toutes les semaines religieusement ce que je voyais. Donc ça, ça m'a beaucoup... Ça m'a beaucoup amenée à voir des choses différentes. Et entre guillemets, pendant cette période-là, entre mes 17 et mes 20 ans, j'ai un peu vu tous les classiques ou tous les films un peu cultes que je pouvais voir sur Internet. Tout ce qui ressortait souvent, ça a été par là. Toi, ça a été différent, je crois ?
- Speaker #0
Un petit peu différent. Je suis un petit peu plus âgé. Donc, j'ai connu les vidéoclubs, la location de VHS, etc. Mais juste pour revenir sur ce que tu as dit, j'ai beaucoup aimé. ton premier visionnage d'Apocalypse Now tu dis les conditions étaient pas réunies un lecteur DVD en voiture mais c'est ça que je trouve très fort c'est que malgré des fois on voit des films dans des conditions pas optimales mais quand t'es devant un grand film tout de suite t'es happé et peu importe et t'oublies tout et tu voyages, t'es ailleurs Carrément. Ça aussi, ça me parle, parce que souvent, les VHS que j'empruntais, elles n'étaient pas de super bonne qualité, parfois, elles étaient bien usées. Mais pareil, moi, ça va être sous le coup de mes 12-13 ans, où j'ai commencé avant le début du film, sur une VHS, tu avais des publicités. Le DVD, il y en avait aussi quelques-unes. Mais les VHS, tu avais au moins 15 minutes de pub. Et là, tu avais Je crois que c'était Warner qui présentait des courts extraits de 5 à 6 secondes, plein de films. Et donc à 10 ans, je mettais, je ne sais plus, une cassette lambda, mais tu avais un court extrait d'Alien, un court extrait d'Eyes Wide Shut, etc. À 12 ans, ça te marque, ce genre d'imagerie.
- Speaker #1
Peut-être pas voir Eyes Wide Shut à 12-13 ans.
- Speaker #0
Voilà, je ne recommande pas. Mais en tout cas, tu avais tous ces extraits et tu te dis, il y a tellement de choses à voir et il y a tellement de choses différentes aussi que ça avait suscité ma curiosité. Et par contre, oui, j'ai peut-être fait la bêtise de regarder Full Metal Jacket à 13 ans. Et ça, ça a été un choc.
- Speaker #1
Je pense qu'on a tous un visionnage beaucoup trop précoce dans...
- Speaker #0
C'est le caractère traumatique aussi qui fait que. Et j'ai mon petit frère Maxime avec qui j'ai enregistré un épisode, on en parlait il n'y a pas très longtemps, et il me disait, oui, moi... à 12 ans j'ai vu Kill Bill on a 10 ans d'écart il me dit moi à 12 ans j'ai vu Kill Bill donc mes copains d'école quand ils ont 15-16 ans et qu'ils me disent j'ai vu Django Unchained c'est incroyable, moi ça m'a rien fait parce qu'à 12 ans j'ai vu ça hyper drôle je l'avais emmené au festival d'Annecy pour voir Evangélion 2 sur grand écran du coup Je ne sais pas si tu connais.
- Speaker #1
Non, je ne connais pas.
- Speaker #0
E.E.E. Bangelion, en japonais. C'est un animé sur 4 épisodes tiré d'une série animée d'environ 16 épisodes. Ça parle de dépression, ça parle de relations père-fils, et ce sont des enfants de 13 ans qui se mettent dans des robots biomécaniques pour sauver le monde, mais le héros principal ne veut pas le faire. en gros, c'est très très japonais mais ça peut toucher à l'intime, donc oui, quand tu vois ça à 12-13 ans forcément ça te donne une ouverture aussi tu comprends pas forcément ce qui se passe c'est un peu brumeux mais tu te dis, il s'est passé quelque chose et t'as envie de plus je dirais ton œil commence à changer et tu n'as plus forcément envie de voir des choses plus standards dans leur écriture. Peut-être qu'on peut en parler dès maintenant, mais pourquoi est-ce qu'on préfère ce type d'art d'images animées plutôt que, je ne sais pas, la peinture ou même les séries télé ? C'est quoi pour toi la différence ?
- Speaker #1
Je pense qu'on l'évoquait un peu tout à l'heure, mais je pense que le côté immersif du cinéma est quelque chose d'hyper important. Enfin, il me semble que... Enfin, à titre personnel, je pense que j'aime autant la littérature que le cinéma et je hiérarchise pas les deux. Mais si vraiment j'ai envie de penser à rien, entre guillemets, je regarde un film et c'est pas... Enfin, faut pas l'entendre de façon négative, mais c'est vraiment que les bons films ont ce truc de te happer directement. Et puis après, il y a aussi, je pense, quelque chose... Enfin, moi, je trouve ça toujours assez touchant, les vieux films, parce que c'est les premières fois où on a enregistré des êtres humains en mouvement. Et donc, quand je regarde des vieux films, je ne peux pas m'empêcher de me dire que c'est la première fois qu'on a enregistré des gens qui sont morts. Enfin, c'est un petit peu étrange ce que je dis, mais je trouve ça toujours hyper beau, en fait, de se dire que c'est... En fait, on devient contemporain de... d'une génération passée, plus que toutes les autres générations avant. Il y a quelque chose qui nous relie et qui nous met sur la même temporalité que des gens qui sont nés dans les années 1890 pour les premiers films. Et ça, je ne sais pas, moi ça m'émeut toujours quand je vois des vieux films. Et puis après, de façon plus pratique, je pense que le cinéma, un film ça dure en moyenne une heure et demie, deux heures. C'est assez facile de devenir obsédé par le cinéma parce que quand tu regardes un film par jour, ça peut aller très vite de voir des filmographies entières. Et à titre personnel, quand je regarde des séries, je regarde assez peu. Mais quand je regarde, je me dis toujours, ah punaise, j'ai vu une saison 1 d'un truc, j'aurais pu voir 15 films à la place. Ça m'énerve un peu. Et je pense que le côté un peu pratique de voir beaucoup de choses rapidement, c'est assez satisfaisant comme passion aussi.
- Speaker #0
J'aime bien ce que tu dis, le côté témoignage du passé.
- Speaker #1
Ouais.
- Speaker #0
Le côté aussi, oui, hommage. On peut être ébahis devant des films dont... ne pourra jamais rencontrer l'acteur ou le réalisateur parce qu'ils sont décédés.
- Speaker #1
Et ça crée un lien, en fait, tout de suite avec des acteurs, avec des gens à l'écran. Il y a quelque chose où, par exemple, quand on est fan d'un acteur, il y a une relation un peu amicale, bizarre qui se crée, où on retrouve l'acteur ou l'actrice un peu tous les soirs. Et c'est une relation émotionnelle qu'on a moins avec les autres types d'art, je trouve.
- Speaker #0
J'ai une question pour toi, parce que moi, ça ne me fait pas forcément avec l'acteur. Ça me le fait le plus. avec le réalisateur, parce que j'ai l'impression que c'est plus lui qui va me conter l'histoire que l'acteur, qui est plus un personnage. Et du coup, je m'attache au personnage, mais pas forcément à l'acteur. Et tout le côté people, un petit peu, du cinéma, je ne m'intéresse pas forcément.
- Speaker #1
Je vois ce que tu veux dire. Moi, je suis quand même attachée à certains acteurs parce que... Enfin, par exemple, pour n'en citer qu'un, Jean-Louis Trintignant... L'obsession de ma vie. Je réalise un mémoire de cinéma sur le jeu de Jean-Yves Trintignant, donc matin, midi, soir, je vis avec lui. Il y a quelque chose où quand tu t'attaches à un acteur, déjà c'est un peu inexplicable, je trouve, le lien que d'un coup tu vas être fan d'un acteur, tu ne sais pas trop pourquoi, il y a quelque chose qui te hape et tout. Et en fait, de film en film, tu comprends qu'il construit une œuvre autant qu'un réalisateur, je trouve. Tu comprends que dans son jeu, dans sa manière de choisir les personnages aussi, dans ses choix de carrière, Et dans sa manière d'être à l'écran, il y a quelque chose qui peut être cohérent et qui est pour moi une œuvre autant que celle d'un réalisateur. Et donc c'est pour ça que parfois l'amour pour un acteur peut l'emporter sur les personnages qu'il incarne. Dans le cas de Jean-Yves Trintignant, il a souvent joué des gens horribles, pervers et traumatisants. Mais l'acteur reste toujours un peu premier dans l'imagerie que j'ai du film. Mais après, je pense que comme toi, je suis aussi très attachée à certains réalisateurs. Et de film en film, même s'ils n'apparaissent pas à l'écran, on a quand même ce petit lien avec eux parce qu'on les retrouve, on retrouve leurs pattes. Donc bon, petite parenthèse trintinière, ce qu'il fallait que je la fasse.
- Speaker #0
Je te pose la question tout de suite, pourquoi trintiner ?
- Speaker #1
Je pense que d'abord, c'était à cause du film Amour de Anne Que, qui est sorti il y a une quinzaine d'années maintenant, où il jouait un très vieil homme qui voyait sa femme mourir. Et ce film m'a complètement retournée. Je n'ai fait que pleurer devant. Et là, je ne sais pas, ça a commencé un peu une obsession pour Trintignant. Et en fait, en l'écoutant, je ne sais pas, il y a quelque chose, je me suis sentie un peu proche de lui. C'est quelqu'un qui parle beaucoup. qui parle beaucoup de la mort, qui parle beaucoup de l'art, de la littérature, et c'est des sujets auxquels je pense beaucoup. Et petit à petit, de film en film, il y a quelque chose où même dans les mauvais films, je le trouve toujours hyper touchant, et il a fait peu de mauvais films d'ailleurs, donc ça tombe bien. Et puis c'est aussi quelqu'un d'assez... En fait j'aime bien la personnalité de l'acteur qui a privilégié des fois des films plus audacieux, alors qu'il a refusé Apocalypse Now, il a refusé Rencontre du Troisième Type, pour des films qui ont beaucoup moins marqué l'histoire, mais... où il a pu s'exprimer plus librement. Et il y a aussi quelque chose, je trouve, d'hyper intéressant en termes d'analyse, où il crée des personnages à partir de sa voix. Il y a vraiment quelque chose où sa voix et sa façon de jouer... Par exemple, il y a des acteurs qui sont beaucoup plus dans des démonstrations physiques. Je pense à Robert De Niro, Al Pacino, qui sont dans quelque chose d'un peu Bigger Than Life tout le temps dans leurs films. Ou d'autres qui sont très dans des rôles de composition, ou dans des choses plus... spectaculaire. Trintignant, c'est spectaculaire, mais dans quelque chose de beaucoup plus minimaliste. Et de film en film, tu vois comment il perfectionne sa voix, tu vois comment il crée quelque chose d'esthétique, en fait, je trouve. Et ça, c'est quelque chose qui me passionne absolument, outre le fait que la personnalité de l'acteur, je trouve, est hyper attachante. Voilà.
- Speaker #0
Et si tu devais nous recommander un film avec Trintignant, du coup, ce serait lequel ? Tu peux en choisir qu'un. Pardon.
- Speaker #1
Alors, il a fait 125 films à peu près. J'en ai vu 70 et je pense qu'il y en a quand même 15-20 que j'aime énormément. Je pense quand même que pour commencer, on va dire, si on ne connaît pas du tout Trintignant, j'ai envie d'en dire deux.
- Speaker #0
Vas-y, deux.
- Speaker #1
Allez, deux. Merci. Il y a le Conformiste de Bertolucci où c'est peut-être une de ses compositions les plus impressionnantes. Il joue le rôle d'un homme qui va... passer du côté du fascisme italien. Et là, je trouve que c'est un film sublime, mais en même temps hyper dur. Et lui est magistral. Donc je dirais celui-là. Et si on m'autorise un deuxième, je dirais Un homme et une femme.
- Speaker #0
La photographie, je rajoute, la photographie du conformiste est incroyable.
- Speaker #1
Exactement. Et justement, j'avais fait un épisode des Bobines Partagées sur qu'est-ce qu'une belle photographie au cinéma en prenant le conformiste. Ça semblait couler de source. Et je dirais peut-être le deuxième, puisqu'on m'autorise, ce serait Un homme et une femme de Claude Lelouch, où là c'est vraiment un trintignant en homme amoureux, qui a un rôle qu'il a souvent tenu, et qui est hyper touchant, qui est vraiment... C'est un film très intimiste et hyper beau, tout simplement. Je trouve le film vraiment déchirant. Il y a beaucoup de gens qui critiquent Claude Lelouch, mais ce film-là, je trouve qu'il est intouchable. Et ça c'est plus, je pense, si on commence à être... fan de l'acteur en soi, c'est un bon film pour commencer vraiment la névrose trintigne.
- Speaker #0
Top, et bien merci pour ces deux recommandations. Puis là, je pense que les auditeurs, ils voient un petit peu ce qui se passe émotionnellement pour un cinéphile. Oui, ça y est,
- Speaker #1
ils voient qu'on est en compagnie de deux carré là.
- Speaker #0
Voilà. Mais ce qui est chouette aussi, c'est que voilà, tu es allé chercher aussi des films qui... Oui, il peut y avoir une forme d'exigence, mais aussi qu'un homme, une femme,
- Speaker #1
tout le monde peut le trouver facilement. Oui, les deux films-là,
- Speaker #0
c'est vraiment des films accessibles. Et puis, il me semble qu'il est souvent diffusé, un homme, une femme, sur
- Speaker #1
France Télévisions. Oui, et puis en plus, comme c'était l'affiche du Festival de Cannes, il y a beaucoup de chaînes télé qui l'ont reprogrammée, donc il se trouve très facilement.
- Speaker #0
On va revenir un petit peu, tu évoquais le fait de voir un film par jour. Est-ce que c'est ton... est-ce que c'est ton rythme du coup ? un film par jour ?
- Speaker #1
c'est mon rythme idéal mais non en vérité j'en vois moins que ça je pense je pense que j'en vois un tous les deux jours et hors période particulière style festival ou confinement qui a été quand même un bon moment pour voir beaucoup de films ah oui le moment rattrapage c'était une période bénie vraiment mais non je pense que je suis à un film par jour Quand tout va bien, mais c'est pas grave. Les jours où je vois pas de film, c'est pas un drame du tout. Et puis, je préfère voir un film par jour plutôt qu'être dans ce truc un peu, sinon, de rentabilité, qui peut être un peu... Il y a un truc où quand on est fan de quelque chose, forcément, on va creuser de plus en plus, on va voir de plus en plus. Et en fait, des fois, ça peut être un peu presque malsain de cette course à voir des choses.
- Speaker #0
Forme de ludie.
- Speaker #1
Ouais, c'est ça. Aujourd'hui, il faut que je vois un film. Je préfère vraiment me dire que je vois un film parce que j'ai envie de le voir et pas parce que je dois le voir, entre guillemets. Donc, je dirais un film par jour quand tout va bien. Toi, tu es à quel rythme à peu près ?
- Speaker #0
Alors, quand je suis en vacances, deux. Deux par jour. Mais effectivement, j'ai alterné un petit peu avec les séries télé. Et puis, tout comme toi, j'aime aussi beaucoup lire. Mais il y a eu un moment où j'essayais de faire un film tous les soirs. C'est le moment, le soir, je commence mon dessert devant un film. Mais ça aussi, ce n'est pas forcément que je me l'imposais. J'ai eu deux moments. J'ai eu le moment où c'était le plaisir et j'ai eu un moment où je voulais m'imposer des choses. des films qui me... me faisaient pas envie. Et tu sais, t'es un petit peu récalcitrant, tu dis, oula, le thème me parle pas, ou peut-être même, tu vois, cet acteur me parle pas, etc. Mais quand il y a eu le développement d'Internet, c'était facile de trouver des tops, des recommandations dans les forums, etc. Et souvent, tu voyais les mêmes titres qui ressortaient. Et à 17 ans, j'avais pas forcément envie de voir Orson Welles, tu vois, par exemple. Ok, grand cinéaste, etc. J'entends tout le temps Rosebud. meilleur film du monde, il est en top de tous les classements, etc. Mais ça ne m'attirait pas. Et quand je me le suis imposé, finalement, je n'ai pas du tout regretté. Alors, grand film, etc., ce n'est pas mon film de cœur. Mais oui, il se passe quelque chose. Et je ne regrette pas de m'être fait un petit peu violence pour le voir à ce moment-là.
- Speaker #1
Mais je rebondis sur ce que tu dis. Il y a un truc aussi, un peu, je pense, parfois de culpabilisant entre gens qui aiment le cinéma. Où il faut quand même avoir vu un peu les classiques ou certains réalisateurs. Mais après, on a tous nos goûts, nos façons de voir, nos trucs et tout, nos lubies. Et il y a des cinéastes avec qui ça ne marche pas. Et des fois, moi, je m'impose de voir trois films d'un cinéaste avant de déclarer que ce n'est pas pour moi. Et c'est vrai que des fois, je me dis, mais oh là là, mon Dieu, je me suis tapé ça. Alors que ce n'est vraiment pas ma cam, mais il faut un peu le voir. Et après, des fois, c'est un peu comme toi. Il y a des films... Sur le papier, ce n'était pas pour moi. Et finalement, c'était des super films et j'en garde un super souvenir. Mais c'est vrai qu'il y a un peu ce truc où on se force un peu aussi à voir certains incontournables pour ne pas avoir de creux un peu dans la culture et dans l'histoire du cinéma. Mais maintenant, je pense que j'ai un rapport un peu plus décomplexé à ça. Je sais que ça ne sert à rien que je me force à regarder des films d'Antonioni pour ne citer que lui. Ça ne fait vraiment pas pour moi. Mais oui, je rejoins ce que tu dis totalement.
- Speaker #0
Je pense que c'est là où il y a un petit quelque chose de différent entre le fan de film et vraiment le fan de cinéma. C'est que le fan de film, il ne va pas forcément aller vers des choses qui ne lui font pas du tout envie. Et c'est peut-être ça la différence aussi. C'est que peu importe notre goût personnel, si on aime ou on n'aime pas le film. D'ailleurs, je trouve que ce n'est pas forcément intéressant de partager ça. Je ne suis pas un critique où je vais dire, regarde ça parce que j'ai aimé, ne le regarde pas parce que j'ai détesté, ce n'est pas ça. C'est quel est l'intérêt de voir ce film.
- Speaker #1
Exactement.
- Speaker #0
Puis là, c'est la photographie, comme tu disais, le conformiste. Celui-là, ça va être l'acteur, celui-là, etc. Mais pour faire ça, il faut ouvrir un autre catalogue qui, moi, ne m'était pas accessible un peu quand j'étais jeune. C'est petit à petit que je l'ai construit et aussi en me forçant un petit peu à picorer à Ausha droite. On va revenir un petit peu sur les habitudes. Du coup, un jour sur deux, un film. Est-ce que tu as des moments où justement tu préfères regarder le soir ? Est-ce que tu revisionnes des films ? Est-ce que tu retournes en salle ? Tu parlais de festivals aussi. Est-ce que tu as des festivals fétiches ? Moi je pense que le moment un peu idéal c'est le soir. J'aime bien finir la journée avec un petit film et tout. Je trouve ça hyper... Enfin puis je l'associe vraiment au moment un peu plaisir de la journée. Quand je regarde un film l'après-midi, j'ai l'impression que c'est un peu pour le travail entre guillemets. Parce que du coup pour mes études, des fois je dois voir certains films un peu dans l'urgence et tout. Et je les vois à des horaires... Enfin je sais pas, le matin à 10h c'est pas idéal de regarder un film je trouve.
- Speaker #1
Pas très réveillé.
- Speaker #0
Donc je dirais le soir plutôt, je préfère. Et après hors... Film que je vais voir au cinéma, et ça c'est un peu à n'importe quelle heure, parce que je suis attachée à la salle de cinéma, mais j'en fais pas du tout la seule façon et la seule bonne façon de voir un film. Il y a des films que j'ai envie de voir et je me les réserve entre guillemets pour la salle, parce que je sais que c'est des films longs, que c'est des films parfois exigeants, et chez moi je pense que je serais un peu tentée de faire autre chose parfois. Et ceux-là je me dis, bon, ça là je vais les voir en salle parce que je me connais un peu, mais après j'ai pas du tout de hiérarchie en fait entre les façons de voir des films, surtout que moi la La principale façon dont je vois des films, c'est en louant des films à la médiathèque. Je n'ai pas de plateforme, parce que je n'ai pas de wifi chez moi pour l'instant. Mais vraiment, le support DVD, je loue tout le temps plein de DVD à la médiathèque. Donc c'est vraiment ma façon de voir des films. Et après, j'ai la chance d'habiter pas super loin de Paris. Donc les salles du quartier latin, la cinémathèque, c'est un petit peu mes QG. et puis après pour le revisionnage J'avoue que je n'aime pas trop regarder deux fois des films. Beaucoup au collège, je regardais énormément de fois les mêmes films. Les Harry Potter, je les ai vus 200 000 fois, les Amélie Poulain, tout ça, et je les revois avec plaisir encore aujourd'hui. Mais aujourd'hui, je suis un peu dans ce truc de... Il y a tellement de films que j'ai envie de voir que je n'ai pas envie d'en revoir en fait. Ça va un peu gâcher ma journée de visionnage si j'en revois un alors que j'aurais pu en voir un autre. Donc je ne revois pas... pas beaucoup les films. Et puis après pour la question des festivals, moi je les ai découverts assez récemment en fait parce que quand j'étais au lycée, j'étais pas dans un coin où il y avait des festivals sur le territoire, on va dire. Et puis après j'ai fait trois ans de prépa, donc trois ans où je suis pas vraiment sortie de la bibliothèque ni de ma chambre, donc pas de festival non plus. Et du coup c'est que en arrivant à Paris que là j'ai eu un peu plus de temps libre. Et en fait, j'ai fait des festivals qui avaient des possibilités pour les jeunes critiques de cinéma. C'est-à-dire que le festival de La Rochelle, par exemple, organise un concours de jeunes critiques. Et j'y suis allée par ce biais. Le festival de Cabourg aussi. Et c'est comme ça que j'ai découvert ces cinémas. Et puis le festival Court Echelle aussi, qui est un festival plus local de court-métrages étudiants, qui est super. Et j'avais pu être jurée une année et je l'avais découvert comme ça. Mais après, l'année prochaine, par contre, je vais aller à Cannes. Ça me semble obligatoire. Là, j'en peux plus de voir qu'il se passe plein de choses à Cannes et que je suis loin de ça.
- Speaker #1
La next step.
- Speaker #0
Ah ouais, non, mais Cannes, il faut que j'y aille. Et puis Annecy, j'aimerais beaucoup. Gérard May aussi. Donc ouais, il y a pas mal de choses que je vais faire. Puis en fait, j'étais un petit peu bloquée aussi par le fait que je n'étais pas professionnelle et que ce n'était pas si simple d'avoir des accréditations. Cannes, j'avais essayé d'y aller il y a deux ans avec l'accréditation cinéphile. on me l'avait refusé, ça avait été la douleur de ma vie mais l'année prochaine c'est bon j'y serai peu importe par quel moyen mais voilà donc je suis pas trop experte festival toi tu t'y connais un peu plus à ce rayon là ?
- Speaker #1
alors moi j'ai été simple spectateur notamment à Annecy que j'ai fait plusieurs fois et je te recommande d'y aller pas forcément pour les grandes séances événements de films que tu peux retrouver en salle plus tard mais plutôt pour les séances de court métrage Les courts-métrages d'animation, je pense que je n'ai jamais vu autant de créativité humaine. Concentré sur une demi-heure, tu en as qui vont de 15 à 3 minutes, de l'abstrait, du très concret, du traumatisant, ça vient de tous les pays. Vraiment, ça a été une vraie formation de l'œil aussi. Et vraiment, à chaque fois que je ressors de ça, tu bouillonnes d'idées. Tu en retiens peut-être un sur les cinq ou six de la sélection, mais ça t'impacte. Je voulais revenir, tu as dit quelque chose concernant la salle de cinéma aussi. Ce côté puriste de ceux qui disent, ah non, non, un film ça se voit qu'au cinéma. C'est quoi un petit peu ta vision là-dessus ? Et est-ce qu'on peut aussi être décomplexé à l'idée, moi j'ai Netflix, moi j'ai HBO, et je regarde même des grands films de cinéma via ces plateformes ?
- Speaker #0
Moi je ne fais pas du tout de hiérarchie dans la façon dont on voit un film, tant qu'on voit le film. Je trouve qu'on est dans une démarche qui est chouette et curieuse et il n'y a pas de drame à avoir vu des films par un média ou par un autre. Netflix avait fait il y a quelques années... J'ai fait des collabs avec MK2 pour diffuser des films de Varda, de Truffaut. C'était une super idée, car ça a fait découvrir ces cinéastes à des gens qui ne seraient pas forcément allés vers eux à la base. Et il n'est pas du tout impossible que je prenne un abonnement un jour à ces plateformes. Là, pour l'instant, je n'y trouve pas forcément mon compte, donc je ne m'y intéresse pas trop. mais enfin puis les médiathèques me suffisent mais le jour où j'ai épuisé le fonds médiathèque peut-être que j'aurai des plateformes et il n'y a pas de souci là dessus et tout et après pour la salle je comprends l'attachement qu'on peut avoir à la salle qui est vraiment sincère parce que enfin moi je vais au cinéma trois fois par semaine j'aime vraiment la salle de cinéma il y a des petits cinémas que j'aime beaucoup et enfin c'est toujours un moment un peu privilégié qui est super cool, on a nos habitudes et tout. Mais après... je trouve ça un peu dommage des fois cette forme de... Ouais, de... Comment dire ? Enfin ouais, il y a des gens qui ne vont voir des films qu'au cinéma et qui en fait hiérarchisent un petit peu ton visionnage par rapport au leur, en disant, ah mais si ça t'as pas vu sur grand écran, t'as tout raté. Ouais, je trouve ça un petit peu superflu. Je suis d'accord que le cinéma est la meilleure expérience pour voir un film, mais comme j'ai dit tout à l'heure... Quand j'ai découvert Apple Caves Now sur le petit DVD pourri de voiture, j'ai eu des frissons comme je n'en ai jamais eu. Et je l'ai revu après en salle quelques années après. Et j'ai eu la même émotion hyper forte. Et donc bon, la salle, je trouve que c'est vraiment un plus en termes de son, en termes d'image, mais je n'en fais pas une religion particulière. Si on a la chance d'être toute sa vie au cinéma, c'est trop cool. Mais ça m'agace un peu des fois ceux qui sont vraiment... Ouais, qui vont rejeter vraiment les autres pratiques. Et je pense qu'il y a quand même un peu dans la communauté cinéphile quand même un mépris des plateformes, je trouve. Notamment Netflix. Je pense que c'est vraiment celui qui est un peu visé par beaucoup de gens et ce qui est un peu dommage. Je pense qu'il n'y a pas à hiérarchiser les goûts des gens comme ça. Je trouve ça un peu idiot à titre personnel.
- Speaker #1
Tu parlais des DVD. Est-ce que tu as un DVD fétiche, collector ou alors... D'autres objets, comme une affiche ou un ticket de cinéma, je sais pas, ta première séance, etc., que tu gardes précieusement ?
- Speaker #0
Moi, je suis plus affiche, j'avoue. L'affiche d'Apocalypse Now, évidemment. J'ai quelques affiches. Je garde les tickets de cinéma aussi, parce que j'ai un espèce de petit carnet de cinéma où je note tous les visionnages que je fais. Je fais des petits graphiques en fonction des périodes des films que j'ai vus dans l'année, des trucs comme ça, vraiment un peu... Je pense que le cinéphile, c'est un peu un geek du cinéma, si on veut le dire autrement, et je me reconnais un peu là-dedans. Mais après, je n'ai pas tant de DVD, je dois avouer. J'ai quelques coffrets, mais qui ne sont pas collecteurs ou quoi. Toi, tu es plus DVD, je crois, et coffret.
- Speaker #1
Alors, moi, j'ai été DVD parce que je pense que ça venait de la VHS, en fait. À 12-13 ans, j'avais ce rapport à l'objet que j'ai retrouvé quand j'étais étudiant. Du coup, 17, 18, 19 ans, il y avait, je crois que ça existe encore dans certaines villes, mais ça s'appelait OCD. Et en fait, c'est des magasins de seconde main. Donc, tu vendais un DVD, tu pouvais peut-être t'en repayer un nouveau. Et c'est comme ça, au lieu d'aller à la médiathèque, moi, je les achetais et je les revendais comme ça. Je me gardais ceux qui me plaisaient vraiment et je revendais ceux qui m'avaient laissé un peu de marbre ou qui, je me dis, un visionnage me suffit. Donc, j'en ai consommé pas mal. Comme ça. Et là, depuis, oui, on va dire six mois, j'ai ce besoin du retour à l'objet et du bel objet. C'est-à-dire, moi, j'ai des plateformes, Netflix, etc. Et je me sens quand même dépossédé de la possibilité de revoir un film s'il sort de la plateforme. De me dire, il va rester ici peut-être que six mois, je ne sais pas pour combien de temps exactement ils achètent les licences. mais de me dire mince je pourrais pas le retrouver le fait d'avoir l'objet je peux regarder quand je veux et c'est plus avoir le film uniquement à l'époque je pouvais pas me permettre d'acheter des beaux collectors donc j'achetais que le CD du film mais là c'est de retrouver dans des jolies boîtes des explications, des entretiens avec le cinéaste ou l'acteur et puis même quelques goodies j'aime bien du coup d'avoir Ce petit univers, en fait, dans une boîte de DVD.
- Speaker #0
Mais parce que toi, tu revois beaucoup les films, alors.
- Speaker #1
Alors, je vais acheter vraiment ceux que j'ai jamais vus, et je sais que je vais avoir du plaisir en les découvrant, ou alors ceux que j'ai beaucoup aimés, et vraiment, là, je les garde, et ça me fait comme... DVD tech quoi comme des bons vins je les stocke carrément ouais je vois l'idée donc voilà j'ai jamais vu par exemple Adieu ma concubine et je suis tombé sur une édition collector et il proposait une édition en 4k etc et je me dis bah tiens je vais peut-être avoir une image aussi belle de retrouver cet aspect et à l'inverse par contre j'ai re-regardé Blade Runner avec mon petit frère Et on se disait, c'est beau en Blu-ray, évidemment, mais le vieux DVD de la version Directors Cut, qui est tout granulé où t'as le grain, il y a ce côté un peu mystique du film qui ressort. Donc voilà, j'ai cette ambivalence de, des fois je veux le truc un petit peu vieux, pas moisi, mais un petit peu dans son jus, et des fois au contraire, ce film j'ai envie de le découvrir avec des couleurs éclatantes. Et ça, je l'ai via... les supports physiques. Parce que les plateformes, selon ton ordinateur, ils vont réguler un petit peu la qualité d'image. Donc, je trouve qu'il y a un peu des perditions là-dessus. Tu disais du coup que tu étais un petit peu geek. Est-ce que tu es connecté par contre ? Je pense à tous les réseaux sociaux, les third box. Est-ce que tu consommes aussi du TikTok cinéma, des influenceurs cinéma sur YouTube ?
- Speaker #0
J'avoue que pas tellement. Parce que... J'ai créé un compte Instagram pour le podcast, mais je ne suis pas une immense professionnelle de la communication, donc c'est un petit peu au point mort. Mais TikTok, je n'ai pas non plus. Et sur YouTube, j'ai eu une phase il y a quelques années où je regardais un petit peu des chaînes comme Le Fossoyeur de Films. J'aime bien cette année, j'ai découvert D'Explorer aussi, je crois que ça s'appelle.
- Speaker #1
Je ne connais pas, D'Explorer.
- Speaker #0
Oui, je crois que ça s'appelle comme ça. Donc il y a deux trois petits trucs comme ça. Et puis les vidéoclubs combinés aussi, vraiment j'avoue, ça c'est... Quand je parlais, quand j'étais plus jeune et que j'ai découvert le cinéma, ça a vraiment été un des trucs les plus simples pour découvrir plein de films super originaux. Enfin, c'est un super format, j'adore ce qu'ils font. Et puis, alors Letterboxd, j'aimerais me lancer sur ce sujet. Moi je n'ai toujours pas réussi à accrocher à Letterboxd. tous mes amis y sont, tout le monde me dit vas-y, vas-y, j'ai créé un compte et j'ai tenu une semaine, je l'ai supprimé direct parce qu'en fait ce que j'aime pas trop, il y a plusieurs choses que j'aime pas trop là-dedans, c'est que en fait de toute façon moi j'ai sur un petit livret tous les films que j'ai, j'ai les notes j'ai la période, je dessine même les petits drapeaux du réalisateur, enfin bref donc j'ai déjà un peu ce truc de base de données en fait donc faudrait que je le refasse sur un site et j'aime pas trop que les gens sachent ce que je regarde enfin, donc pas que je regarde des trucs honteux pas du tout mais Je sais pas, c'est un petit peu ma bulle, je trouve. C'est personnel ? Ouais, ouais, je sais pas, je veux pas que tout le monde sache ce que j'ai vu, même si c'est des bons films, c'est mon petit truc à moi. Et puis, je trouve que sur Letterboxd, mais c'est un petit peu le côté réseau social, je pense, il y a pas mal de gens qui laissent des critiques qui sont en fait des clashs de films, et c'est un petit peu qui va lancer la meilleure phrase qui va dégommer ce film. Et c'est pas du tout ma vision de la critique, ni ma vision de l'appréciation des films en général. J'aime pas trop cet esprit. Mais voilà, il est possible qu'un jour je retente l'expérience d'Hotbox, ne serait-ce que pour faire connaître le podcast, mais c'est difficile pour moi. Je ne sais pas si tu as un compte, toi, ou pas ?
- Speaker #1
J'ai un compte, je m'y suis mis récemment, mais c'est plus pour avoir une bibliothèque numérique de voir à peu près où j'en suis, voilà ce que j'ai vu cette année. C'est plus pour me souvenir. J'ai le même principe avec Goodreads pour les livres, je ne sais pas si tu connais. C'est simplement pour moi avoir un suivi de tout ce que j'ai retenu. Et tout ce que j'ai vu dans l'année. Alors que comme toi, il y a peut-être 5-6 ans, j'avais encore le carnet. Pareil, je pense qu'on l'a tous fait.
- Speaker #0
Peut-être que je vais abandonner le carnet un jour.
- Speaker #1
Moi, c'est une question de praticité. Mais non, il y avait le plaisir de noter, même prendre des notes. Si tu faisais un deuxième visionnage, moi, je prenais des notes. Et après, tu le stockes parmi tes autres carnets. Des fois, tu retombes dessus, tu les redis. des fois tu... Moi, en tout cas, j'écrivais de belles bêtises. Mais c'est marrant, justement, de voir qu'est-ce que j'ai pensé de ce film il y a 10 ans et de le revoir aujourd'hui. Quel point tes goûts changent, ton analyse change. Ça, ça me plaît. Tu commençais à amorcer l'aspect critique. De plus en plus de personnes de notre âge, un peu de notre génération, vont chercher des critiques en ligne, notamment sur YouTube. Est-ce que tu penses que la critique traditionnelle est toujours pertinente aujourd'hui ? Est-ce que les gens écoutent encore ? Je ne sais pas, le masquer la plume à la radio ou lise les cahiers du cinéma. Est-ce qu'on devrait s'y remettre ? Où est-ce qu'on en est là-dessus ?
- Speaker #0
Oui, je pense qu'il y a deux choses. Il y a d'une part le fait que beaucoup plus de gens se soucient. mis à la critique eux-mêmes, écrites via Letterboxd, à le ciné. Et donc beaucoup plus de gens se disent critiques, ou en tout cas ont une activité critique. Mais je pense pas du tout que ce soit... Enfin, je pense que ça peut être complémentaire avec la critique traditionnelle, radio et presse écrite. Parce que dans la presse écrite et la radio, je pense à des super émissions comme les Midi de Culture, par exemple, sur France Culture. Je suis une grande fan. C'est des débats critiques avec deux critiques sur des films contemporains, et c'est toujours super intéressant. où le masque et la plume met... dans une moindre mesure, même si j'aime bien, c'est un peu plus clash qu'analyse, dans la critique traditionnelle, il y a quand même une valorisation du texte long, ou en tout cas de la réflexion longue, et donc de creuser un peu plus dans le film, d'apporter d'autres choses, d'aller parfois un peu plus dans l'érudition. Et je pense que ça, c'est quelque chose qu'on a moins dans les formes courtes qu'écrivent, on va dire, tout à chacun dans son coin, où c'est plus des affects, des réactions un peu immédiates. Mais il y a aussi des gens qui sont amateurs et qui écrivent des choses passionnantes. C'était pas du tout... Enfin, je veux pas diviser ça de façon binaire. Mais la critique traditionnelle, c'est aussi des gens qui connaissent beaucoup, qui sont cinéphiles, qui ont beaucoup vu et qui peuvent apporter d'autres éclairages. Je pense par exemple parfois à des films... Chaque année, il y a des films qui sortent et il y a plutôt des jeunes qui vont dire « Oh, ce film est révolutionnaire, j'ai jamais vu ça » . Mais en fait, quand on est cinéphile, parfois... on se dit ben si en fait moi j'ai déjà vu ça parce que ce film me fait penser à un tel, je vois les références là et du coup la critique traditionnelle elle peut aussi dire attention ce film peut être super mais il n'est pas révolutionnaire et regardez par exemple ça s'est emprunté à un tel, ça aussi. La critique, c'est le moment où on va pouvoir s'interroger vraiment sur ce qui nous plaît ou pas et ça je pense que c'est intemporel et c'est bien qu'il y ait plein de formes différentes pour le faire à la fois des grands pontes de la critique. comme les réseaux sociaux. Et je pense que ça se complète plutôt bien, en fait. Je ne sais pas quel regard, toi, tu portes sur ces formes-là de critique.
- Speaker #1
Moi, j'ai envie de t'interroger parce que là, tu parles un petit peu de la définition de la critique. Mais selon toi, comment est-ce qu'on peut devenir critique ? Est-ce qu'il y a une manière d'apprendre à voir ? Est-ce que moi, je me dis, ça fait 10-15 ans que je regarde des films, est-ce que je peux me dire critique ? Ça va être quoi la différence pour toi ?
- Speaker #0
Alors, il y a... Les critiques amateurs, on va dire, entre... Quand on aime le cinéma, on est toujours un peu critique, entre amis, il y a les débats et tout. La critique professionnelle, ça va aussi être des gens quand même qui écrivent, qui se confrontent à la forme écrite longue, qui ont d'abord peut-être même un amour du texte plus que l'amour des films, en fait. Et donc, il y a quelque chose de... Enfin, à mon avis, peut-être que je dis n'importe quoi, mais je pense quand même qu'il y a une volonté d'être dans une forme de dissertation, de dialectique. Et puis après, je pense qu'il faut aussi quand même une espèce de, je dirais pas de formation, mais en tout cas une cinéphilie. Parce qu'on peut pas, ce que je disais tout à l'heure, si on tombe dans le truc de tous les films aujourd'hui sont révolutionnaires alors que c'est faux historiquement, ça marche pas. Je pense qu'on peut aimer les films sans connaître toute l'histoire du cinéma, mais si vraiment on veut en faire son métier d'être critique, je pense que ce serait presque une faute professionnelle de pas être assez renseignée sur l'histoire du cinéma.
- Speaker #1
Ça me fait penser. Voilà, moi, je suis entouré par des personnes aussi qui sont devant le film et se font absorber par le film sans forcément avoir le temps d'analyser. Alors, j'ai une première question. Est-ce que tu aurais, je ne sais pas, des outils que tu pourrais partager sur comment analyser, comprendre un film, qu'est-ce qu'il nous dit, qu'est-ce que nous dit l'image, qu'est-ce qu'elle veut raconter ? Et aussi, est-ce que c'est possible, à l'inverse, pour des gens cinéphiles, passionnés par les films, de se... détacher, d'arrêter d'analyser et de se laisser uniquement porter par le film ?
- Speaker #0
Alors, en fait, moi, je pense que l'analyse de film, en fait, c'est un autre nom pour dire comprendre pourquoi on ressent certaines choses. En fait, l'analyse de film, elle ne va pas juste dire le montage est intéressant, mais elle va essayer de comprendre pourquoi est-ce que le montage me fait quelque chose, pourquoi est-ce que je ressens ça devant un film. Enfin, moi, en tout cas, je le vois comme ça. Et c'est pas de l'analyse purement esthétique de tiens il y a un plan séquence, tiens il y a un cut, tiens... Non, c'est pourquoi est-ce que je ressens quelque chose devant les films ? Et bien par les outils du cinéma, parce qu'en fait ce montage-là il crée un effet de rupture, parce qu'en fait cette musique-là elle est utilisée au début lors de cette scène, et donc quand elle revient... Enfin voilà, c'est plutôt s'interroger sur nos émotions, et donc c'est pas du tout contradictoire avec le plaisir, au contraire. Justement je trouve que plus on a un regard un peu expert entre guillemets sur les films, plus on comprend pourquoi on les apprécie. Et ça c'est... hyper, enfin je trouve ça génial comme sensation ce truc de j'aime des films mais je sais pas pourquoi et à un moment on passe de je sais pourquoi ce film m'a plu en fait et ça c'est je trouve que c'est une sensation hyper stimulante et je pense que aussi on peut voir des films pour le pur plaisir entre guillemets sans ça Attachée trop à des questions esthétiques. Moi, il y a des films, je les regarde comme ça pour m'évader. Je mets de côté, entre guillemets, ce côté-là, analyse. Et moi, je ne pense pas que quand je regarde un film, je suis en train d'analyser. Je pense que c'est plutôt quand je re-réfléchis au film. Là, j'ai les outils pour dire pourquoi ça m'a plu, qu'est-ce qui était intéressant, enfin, qu'est-ce que j'ai trouvé intéressant. Mais quand je regarde un film, je pense que je suis encore relativement absorbée par le film. Donc... Voilà. Et après pour les outils, alors moi il y avait un petit livre que j'avais découvert en prépa qui s'appelle le précis d'analyse du filmique. C'est un tout petit livre, je ne sais plus l'auteur mais peut-être que je pourrais te le dire après l'enregistrement et peut-être que tu pourras le mettre en commentaire ou autre. C'est un tout petit livre super simple, super accessible qui explique qu'est-ce que c'est qu'un montage, qu'est-ce que c'est que le son. Et en fait il revient vraiment sur des exemples et ce livre-là il m'avait éclairé parce que quand je suis arrivée en prépa option cinéma je ne connaissais rien de façon technique au cinéma. Et ce livre-là, en fait, en le lisant, d'un coup, t'as une masse d'informations sur qu'est-ce que c'est qu'un film, en fait. Donc ça m'avait pas mal aidée, puis après, évidemment, j'ai suivi aussi une formation théorique sur les films, donc c'est sûr que ça a complété aussi ça. Donc je dirais que c'est pas incompatible du tout avec le plaisir de voir un film, au contraire. Parce que toi, des fois, est-ce que t'as l'impression que t'es pris dans l'analyse et que tu profites pas du film, ou tu peux t'extraire de ça ?
- Speaker #1
Je pense que tout dépend le film. Et je pense que j'ai eu un effet aussi un peu particulier. Par exemple, je repense à Gus Van Sant. J'avais regardé Elephant. Et à ce moment-là, disons, c'est une période où juste je regarde le film sans trop réfléchir. Et ce film ne me fait pas grand-chose. J'y comprends pas grand-chose, déjà, pour commencer. Je ne me renseigne pas trop. On suit ce personnage, on voit très peu son visage. Et puis à la fin, il y a une... Une scène d'action, entre guillemets. J'exagère volontairement, grossièrement. Mais voilà, bon, bref. Et à la suite de ça, je tombe sur un livre de Guzvan Sant, où il va parler justement de ce film. Et c'est en le lisant, en fait, que je comprends... Ah mais attends, il utilise la caméra subjective pour cette raison. À ce moment-là, dans le film, il n'y a pas de musique à ce moment-là. Et en fait, j'ai apprécié le film a posteriori parce que... Le cinéaste lui-même m'explique ce qu'il a voulu faire. Et du coup, via l'explication, je comprends pourquoi il a été fait. Et paradoxalement, c'est là où je me suis surpris à apprécier le film. Ça peut être bizarre, mais...
- Speaker #0
Ah non, mais je comprends totalement. Parce qu'en fait, il y a ça aussi. L'analyse, elle te permet d'approcher ce que veut dire l'auteur. Enfin, ce que veut dire le cinéaste. Qu'est-ce qu'il a voulu vraiment exprimer ? Quel était son projet ? Et quand tu commences à comprendre ça, je suis d'accord, tu commences à beaucoup plus apprécier des films, y compris des films entre guillemets exigeants, parce que tu comprends la démarche aussi. Alors que quand t'es lâchée devant un film et que t'as aucune clé, bah, il y a des films, voilà, tu passes à côté et vraiment... Et je suis totalement d'accord avec toi, il y a des films aussi que j'ai appris à posteriori, en analysant ou en lisant des choses dessus, et ça je trouve ça tellement génial de revoir après le film, en comprenant mieux et tout, j'adore cette sensation.
- Speaker #1
Je pense que ça va être là, justement, peut-être, notre curiosité à tous les deux, c'est, même si j'ai pas aimé, même si j'ai pas compris, j'ai besoin de me renseigner, j'ai besoin de comprendre pour pas en rester à cet état des choses, et de me dire, attends, il y a quelqu'un qui a passé je sais pas combien de semaines à filmer ce truc, c'est pas un hasard ce qu'il a essayé de faire. J'arrive pas à le décoder, mais en tout cas c'est pas un hasard. Et c'est comme ça aussi que j'ai construit petit à petit. et c'est à partir de ce moment là où Je me suis mis vraiment à peut-être avoir plus le regard de « Attends, il met cette couleur-là à ce moment-là avec ce personnage-là, pourquoi ? » Et là, mon regard sur les films a un peu changé. Et je sais que parfois, j'ai tendance à faire que « Ah, là, je suis en mode analyse. » Mais ça ne m'arrive pas sur tous les films. Je pense que des fois, l'histoire l'emporte sur l'analyse. Je pense qu'on est tous comme ça, à un moment d'oublier et de laisser suivre l'histoire. Quand je découvre un film, je sais que j'ai ces deux côtés de cerveau. Il y en a un qui me dit, allez, pense à rien, laisse-toi porter. Et l'autre dit, attends, il va vouloir te montrer des choses, il doit y avoir des petits détails, cherche les petits détails. Et c'est toujours ça aussi. Je ne sais pas si ça te le fait aussi, mais entre ces deux parties.
- Speaker #0
Ouais, je vois ce que tu veux dire. Mais en fait, ce que tu dis me fait penser qu'en fait, les cinéphiles vont toujours postuler qu'un film est intéressant. C'est-à-dire que même s'ils ne l'ont pas aimé, Ils vont partir du principe que, ok, j'ai peut-être pas apprécié, mais il y a des choses à creuser dedans, mais il y a des détails intéressants, mais il y a une vision particulière. Et c'est ça aussi que même des films que j'ai pas trop aimés, des fois je regrette pas de les avoir vus parce que c'était intéressant en fait. Pour le pur plaisir de comprendre des choses, quoi.
- Speaker #1
Et du coup, est-ce que t'es plus cinéma classique ou cinéma contemporain ?
- Speaker #0
Réponse... Je dirais un peu les deux en fait, parce que ce qui est cool, entre guillemets, c'est que... Comme je pense être un peu cinéphile, du coup je vais voir un peu partout dans le cinéma plus ancien. Mais comme je suis aussi critique, je suis aussi très attachée à la création contemporaine et ce qui se fait aujourd'hui. Et donc les deux activités se répondent assez bien. Donc j'aurais du mal à choisir, je pense, vraiment les deux. Après, j'ai des périodes aussi favorites, mais bon, je ne fais pas trop distinction, j'avoue. Les deux me plaisent.
- Speaker #1
Et même chose pour cinéma d'auteur versus blockbuster américain ?
- Speaker #0
Je mentirais si je dirais que ce seraient les deux. Je pense que je suis quand même plus orientée cinéma d'auteur. Mais en fait, cinéma d'auteur, ça veut un peu tout et rien dire. Parce que Christopher Nolan, pour certains, c'est un auteur. Et en fait, ça en est un petit peu un. Mais pourtant, il fait des blockbusters. Donc c'est... Et puis, il y a aussi des films, des fois, il y a des gens qui pensent que parce que les films sont vieux, c'est forcément des films d'auteurs. Mais il y a des films que des cinéphiles adorent. Je pense au film de Billy Wilder, par exemple. Mais en fait, à l'époque, c'était des grosses comédies, c'était des énormes films populaires. Et donc, je ne sais pas si les deux sont aussi opposables que ça. Et puis après, je pense que même si j'ai... Enfin, il y a un moment donné où j'ai switché, j'ai quand même regardé beaucoup plus de cinéma d'auteurs ou cinéma, entre guillemets, exigeant. plus exigeants que les blockbusters. Mais il y a des blockbusters que j'ai revus après avoir pas mal vu de ce genre de films, et que j'ai toujours apprécié, je pense à la saga Pirates des Caraïbes, moi je suis une immense fan, et en fait en les revoyant, j'ai compris qu'il y avait plein de choses qui étaient empruntées au cinéma classique, à tout un point du cinéma américain, et j'ai encore plus aimé le film en fait. Donc, puis il y a aussi... Le côté un peu plaisir coupable, une fois que tu t'es fait toute la filmo de Fassbinder, tu craches pas sur un petit Harry Potter. Donc je suis aussi attachée aux deux, mais je pense que par honnêteté intellectuelle, je vais quand même dire plus cinéma d'auteur.
- Speaker #1
C'est marrant, t'as pris l'exemple de Nolan, mais moi c'était après avoir regardé Transformers, je crois. Je me suis dit, mais en fait Michael Bay, c'est un auteur. avec son langage cinématographique ses plans 360 et tu te dis mais attends on grandit à un moment avec une certaine critique quand même qui dit les blockbusters américains ce n'est pas du cinéma etc et après tu te mets à regarder vraiment dans le détail et tu te dis mais attends ça c'est le plan signature de Michael Bay dans ce film il le met aussi dans celui-là et le gars tu comprends qu'en fait il est complètement indépendant il a toujours son équipe à lui oui Merci.
- Speaker #0
Et puis, il y a très longtemps avant, Hitchcock n'était pas considéré comme un auteur parce qu'il faisait des films populaires. Donc en fait, il y a un peu ce truc de cinéma populaire versus cinéma d'auteur. Mais en fait, évidemment, il y a des zones poreuses et c'est ça qui est intéressant.
- Speaker #1
Quand un film devient trop public ou trop apprécié par le grand public, on a aussi un petit peu ce regard de certains qui disent du coup, ce n'est pas niche. Ça vaut pas le coup de s'y intéresser, etc. J'aime pas non plus ça, pour rejoindre ce que tu dis, parce que ça devient populaire, forcément, c'est pour les masses, entre guillemets, et ça doit désintéresser l'analyse ou les critiques.
- Speaker #0
Ouais, ouais, je te rejoins. Après, voilà, je vais être honnête quand même, je suis pas une immense fan des Marvel, enfin, il y a des trucs quand même dans le cinéma populaire qui, moi, me plaisent pas trop, mais après, en fait, je pense que... Quand t'es cinéphile et que tu t'intéresses à plein de films de l'histoire du cinéma, en fait tu croises plein de succès populaires qui aujourd'hui parlent pas du tout aux gens. Mais en fait à l'époque c'était des films que les masses entre guillemets allaient voir, mais par millions quoi. Et donc il y a un peu ce truc où des fois tu déterres des films et les gens vont être en mode « oh le vieux truc de niche » mais tu te dis « mais non en fait 5 millions de gens l'avaient vu à sa sortie » . Et c'est assez marrant je trouve ces moments-là où il y a une espèce de malentendu historique sur certains films.
- Speaker #1
Pour rebondir sur ce que tu disais vis-à-vis de Marvel, c'est un cinéma qui ne te parle pas trop, est-ce que tu as d'autres zones d'ombre ou des blocages ou par exemple un film culte que tu n'as pas du tout apprécié ?
- Speaker #0
Au fil du temps, j'ai compris ce qui me plaisait et ce qui ne me plaisait pas trop. Et en général, quand même, le cinéma qui va être contemplatif, ça ne va pas être trop trop macabre. Et aussi les films qui sont très réalistes. qui sont proches du documentaire, tout ça, ça va pas être forcément trop mon truc. Moi j'aime bien les films qui embarquent vraiment dans des fictions, qui poussent hyper loin la fiction, jusqu'à où on peut croire en un film. Ça je trouve, c'est vraiment les choses qui m'intéressent le plus, et en littérature aussi d'ailleurs. Et donc je dirais, ouais, tout ce qui est un petit peu rythme un peu lent, tout ça, ça je sais que ça va pas trop être pour moi, il y a des contre-exemples, mais... et c'est pour ça d'ailleurs que j'avais pas été une immense fan quand je l'avais vu. Vu de 2001, l'Odyssée de l'espace, je sais que c'est vraiment un classique pour vraiment la majorité des gens, mais les 45 premières minutes de la préhistoire, c'était dur. La deuxième partie était mieux, mais on oublie ça en fait. Quand les gens parlent de 2001, je fais « Attends, mais pendant une heure, tu vois quand même... »
- Speaker #1
C'est bien, c'est intéressant parce que moi, je suis plutôt fan du cinéma de Kubrick. Mais j'entends de plus en plus de gens se libérer de 2001 en disant « Mais attendez, on a le droit de ne pas du tout l'aimer, on a le droit de ne pas être réceptif, on a le droit de se dire que c'est chiant par moment. » Mais est-ce qu'il n'y a pas quelque chose de transcendant sur la longueur du film, justement ?
- Speaker #0
Oui, oui, oui. Non, mais après, il y a plein de trucs hyper intéressants. La fin est géniale. La mort de l'ordinateur. Il y a plein de trucs que j'ai trouvés super. Après, sur la durée, le film, il était un peu éprouvant quand même. Mais... mais je rebondis sur ce que tu dis, où des fois tu as l'impression quand même qu'il y a certains films qui sont intouchables, où il y a certains films où quand tu commences à émettre un jugement, il y a des gens qui vont te dire « Non mais je crois que tu n'as rien compris au film » . Si si, j'ai très bien compris le film, c'est juste que je n'aime pas. Mais je me souviens quand j'étais au lycée et que je commençais à découvrir les films, inévitablement je regardais des Tarantino parce que c'est un des premiers réalisateurs qui sort quand tu es après réalisateur connu sur internet. Et il y a des trucs que j'avais adoré, il y a des trucs que j'avais moins aimé. Et je me souviens avoir discuté avec un gars de Tarantino, il m'avait dit, non mais si t'as pas aimé ça, c'est que tu n'as pas compris le personnage, tu n'as pas compris le film. Je me disais, mais en fait, il y a un peu un truc où t'as l'impression que les cinéphiles parfois sont réfractaires à la critique, en fait. Alors qu'on pourrait croire que, justement, ils sont plus en train de chercher des critiques, de lire de la critique, mais des fois t'as l'impression qu'il y a des objets sacrés du cinéma sur lesquels tu peux pas revenir, alors que je pense qu'il n'y a pas de honte à... pas avoir apprécié certains films. Chacun ses goûts, j'ai envie de dire. Et puis après, je pense que il y a des films que je n'ai pas aimés mais que j'ai trouvé intéressants et ça, je le reconnais totalement. Mais voilà, on a le droit d'être sensible à des choses différentes. C'est quoi un petit peu le film culte sur lequel tu n'as pas réussi à accrocher ?
- Speaker #1
On va peut-être dire Lynch, Eraserhead. À une imagerie qui... Alors... Autant Mulholland Drive m'a fasciné, m'a embarqué, tout comme Twin Peaks, etc. Autant Inland Empire, Eraserhead. Vraiment, ça touchait à quelque chose de viscéral chez moi. Je ne dirais pas que je n'ai pas aimé non plus. Mais c'est juste que c'est tellement dérangeant que ça me faisait du mal. Et j'en parlais aussi avec mon frère. Tu parles d'un noqueur. Comment il s'appelle ce film ? Ce film cauchemardesque avec Funny Games US. Voilà, ça tu vois, c'est typiquement le genre de film, je ne le déteste pas, c'est pas une question d'aimer ou de ne pas aimer, il te met un miroir et t'es là et tu prends un coup quoi.
- Speaker #0
Ah ouais, Anneke tu te prends des gifles à chaque film, c'est impressionnant.
- Speaker #1
Voilà, c'est aussi le regard que le cinéaste pose au spectateur, ça me dérange profondément. C'est ce rapport-là plutôt avec lequel j'ai du mal avec certains films que des ciné-films vont considérer comme cultes et peut-être même intouchables. Donc c'est plutôt ça.
- Speaker #0
Mais il y a des films qui sont cultes parce qu'ils sont dérangeants. Et tu te dis, j'aime bien voir des films qui me remuent, qui me dérangent profondément, mais c'est vrai que le moment où tu te dis, bon, à un moment donné, il faudrait que je regarde Salo ou Les 120 jours de Sodom, je ne suis pas sûre que je passe un bon moment. C'est ce truc de se faire violence pour voir certains films. Mais ça, c'est aussi l'art de façon générale. Il y a des trucs qui ne sont pas là pour te plaire. Il faut encaisser certaines choses.
- Speaker #1
Justement, tes vogue salauds, ça tombe très bien. Quand j'étais étudiant, chaque vendredi, avec d'autres copains, on se faisait un petit club ciné. On mettait un premier film un peu plus grand public et un deuxième où on se forçait. On en a vu deux comme ça. On a vu Visitor Q de Takashi Miike. Je ne sais pas si ça te parle.
- Speaker #0
Non, pas du tout.
- Speaker #1
Takashi Miike, un grand réalisateur japonais, très prolifique, je crois qu'il a dû faire 200 ou 300 films, je ne sais pas. Et Salou ou les 120 jours de Sodome, et ce sont deux films vraiment radicaux. Et je me posais la question à ce moment-là, mais est-ce que ça me fait du bien aussi à mon âme ? Oui, quand je lis l'analyse de Salou, je peux comprendre, ok, dénonciation du fascisme, etc. Mais l'image, c'est quand même un choc. Et ça imprime ta rétine, ça vient dans ton subconscient. Est-ce que des fois, je ne regrette pas de m'être infligé aussi l'imagerie qu'un cinéaste a voulu me balancer, si tu veux ?
- Speaker #0
Ouais, ouais, ouais.
- Speaker #1
M'imposer.
- Speaker #0
Je vois ce que tu veux dire. Puis en plus, il y a aussi certaines choses filmées, certains actes horribles filmés, où des fois tu dis...
- Speaker #1
Cronenberg aussi me pose cette question, tu vois, de jusqu'à quel point j'accepte de rentrer... dans son film, dans son jeu, dans ce qu'il veut me dire ? Et à quel point est-ce qu'il faut que je réussisse aussi à me détacher ?
- Speaker #0
Ouais. Tu vois ? Ouais,
- Speaker #1
ouais. Cette zone ambiguë, des fois, j'ai peut-être un petit peu de mal aussi à savoir est-ce que je dois continuer de m'enfoncer parce qu'il y a quelque chose ou est-ce que, attention, protège-toi, protège tes yeux parce que tu as une imagerie qui va vraiment peut-être te perturber. Ouais. Et autant j'aime être choqué, mais d'un point de vue intellectuel, autant j'aime pas être perturbé d'un point de vue œil. Je sais pas si ça fait sens ce que je te dis.
- Speaker #0
Non, non, mais je vois ce que tu veux dire. C'est comme il y a certaines personnes qui ne regardent pas. pas de cinéma d'horreur ou de cinéma gore par exemple. Enfin, il y a un peu de ça, de ce truc de c'est pas des émotions positives que je vais ressentir et en plus je vais me faire violence en voyant un truc. Non, en fait. Après, je pense qu'il y a aussi parfois les trucs les plus dérangeants, c'est ceux où tu sais que les réels ont une vision quand même assez sombre de l'humanité et où ils te montrent des trucs et tu te dis, waouh, je sais qu'ils pensent qu'on est tous des merdes. Ça, j'avoue que j'ai plus de mal avec ça qu'avec qu'avec les films gore par exemple que j'apprécie plutôt bien mais mais je trouve qu'un bon compromis c'est de savoir que les réals sont des gens bien par exemple les films de Cronenberg j'adore les films de Cronenberg et le gars pour l'instant en tout cas je parle en juillet 2025 a l'air d'être quelqu'un de très sympa donc il y a un peu ce truc où tu te dis bon la personne est quelqu'un de bien qui a l'air d'apprécier l'humanité donc Tout va bien quand je regarde ces films. Mais je comprends et je pense que ce n'est pas grave. S'il y a des films qui ne sont pas pour nous, ils ne sont pas pour nous. Il y en a tellement d'autres.
- Speaker #1
Comment est-ce que, selon toi, on devrait exprimer le regard critique entre j'aime, j'aime pas, mon goût personnel et la manière de le dire ? Parce que souvent, quand tu demandes aux gens c'est quoi le dernier film que tu as vu ? C'est celui-ci, mais je n'ai pas aimé. Et ça s'arrête là, souvent, la conversation. Comment est-ce qu'on pourrait faire différemment, justement, sans être une critique professionnelle ?
- Speaker #0
Bah moi je pense qu'à partir du moment où on comprend que le cinéma est un art collectif, qui a engagé beaucoup de gens, qui a pris du temps, qui est dans un processus long, tu peux pas dire j'aime pas de façon radicale, ou c'est de la merde, c'est une catastrophe ce film. Je pense qu'il y a un espèce de respect à avoir pour la forme même du film, qui fait qu'on peut pas être si radical et que ça nous oblige en quelque sorte à être constructif. Les films qu'on aime pas, si on détaille pas pourquoi on aime pas, je trouve que ça a aucun intérêt quoi. mais moi j'adore ce moment où tu conseilles un film à quelqu'un qui revient vers toi et qui te dit j'aime pas là on se fight quoi, il y a un débat et c'est ça aussi je trouve une des meilleures façons de faire de la critique je pense que c'est le débat oral quoi. J'aime énormément la forme écrite mais je trouve que la radio il y a un truc de beaucoup plus juste dans ce que c'est que les cinéphiles aujourd'hui c'est des gens qui vont prendre un café et qui vont discuter 35 minutes d'un film parce qu'ils sont pas d'accord et ça c'est vraiment je trouve ce qui... qui fait le sel un peu de cette passion-là, particulièrement, quoi. Ce truc de on va s'écharper sur un film pendant longtemps, et c'est rendre hommage au film, en fait. Même si on ne l'a pas aimé, passer autant de temps et avoir autant d'exigences critiques, je trouve que c'est une façon de rendre hommage au travail collectif qui a été fait.
- Speaker #1
Je pense aussi qu'on est dans une époque peut-être qui manque un petit peu de nuance.
- Speaker #0
Carrément.
- Speaker #1
Et que le débat, le débat doit être retrouvé. Que c'est sain. C'est sain de ne pas être d'accord. Et de l'exprimer aussi dans le temps long, pas simplement, comme tu disais sur les third box, une phrase cash un petit peu pour faire un effet, mais se donner le temps d'échanger et de comprendre ce que l'autre n'a pas aimé ou a aimé et vice versa.
- Speaker #0
Ouais, je suis totalement d'accord. Et puis aussi, les critiques un petit peu longues, écrites, c'est une manière de rentrer dans le film, de comprendre, d'analyser. Par exemple, sur Zone Critique, le site sur lequel j'écris. Les critiques font au minimum 6000 signes, donc c'est une page et demi word à peu près. Donc c'est quand même, enfin c'est pas non plus un livre entier, mais c'est déjà, je trouve, par la forme longue, ben voilà, rendre hommage au film et sortir de ce truc de j'aime, j'aime pas, binaire, le truc de mettre une case, ça c'est ça, ça c'est ça, ça c'est pas bien, ça c'est cinéphile, ça c'est pas cinéphile, ça c'est du cinéma, ça ça en est pas, non, c'est pas, enfin, moi c'est pas ma vision de voir, mais je sais que les réseaux sociaux peuvent encourager ça. Les stories insta qui sont des quiz ou des trucs comme ça, enfin des oui-non, des trucs comme ça, il y a vraiment je pense une forme de binarité mais qui malheureusement est propre aussi à notre époque, à cette rapidité de l'information. La critique c'est un peu comme la lecture, il y a un truc où ça va un peu contre la temporalité actuelle, où c'est là on va se poser pour apprendre, pour discuter, pour débattre. C'est contraire à la temporalité de notre monde qui va très vite, qui passe très vite d'un sujet à l'autre. Et justement, la critique est ce lieu où s'épanouit enfin une vraie analyse, une vraie compréhension de quelque chose. Et la critique, mais quand je dis la critique, j'englobe aussi les podcasts, tous les formats un peu longs.
- Speaker #1
Ce que je te propose, c'est de me... Si t'es deux ou trois films qui, selon toi, soit tu les apprécies, soit tu penses qu'ils sont méconnus et t'as envie de rendre un petit peu justice à certains films, ce seraient lesquels ?
- Speaker #0
Alors, quand tu m'avais posé la question pour préparer l'épisode, cette question m'a arraché les cheveux, vraiment. J'ai passé une après-midi à me dire...
- Speaker #1
Voilà, c'est dur, deux choses. Voilà,
- Speaker #0
mais si je parle pas de ce film, qu'est-ce qui va se passer ? Le monde s'effondre. Non, mais ça, c'est vraiment un truc, je pense, qui va avec l'obsession cinéphile, quoi, de... Oh mon Dieu, il faut que je rende justice à certains films. Il y a un film dont j'aimerais parler qui n'est pas non plus un film de niche, mais qui en fait est un film, je pense, qui rebute toute personne normale, mais il est bien. C'est 4 mois 3 semaines 2 jours. C'est le film, il a eu la Palme d'Or en 2007. C'est un film roumain réalisé par Christian Mangiou. Et rien que cette présentation-là, il y a des gens qui vont dire « Oh là, je ne regarde jamais un film roumain, hors de question » . Et en plus, c'est un film sur l'avortement. Donc là, il y a beaucoup de gens qui vont être bloqués par ça. mais en fait le réalisateur film de filles qui s'entraident dans l'avortement d'une d'entre elles et ils filment ça comme une course contre la montre. Donc en même temps c'est hyper enfin il y a un vrai suspense et en même temps on comprend ce que c'est que la Roumanie dans les années 80 90, ce que c'est qu'être une femme à cette époque là. Et en fait pour moi c'est ça le cinéma un peu complet c'est celui qui nous apporte vraiment une connaissance sur ce qu'est le monde et en même temps qui nous divertit, qui nous évade. Et c'est un film qui est hyper dur, qui nous divertit, le mot est peut-être pas juste, mais c'est un film qui nous pend aux tripes vraiment. J'avais envie d'en parler parce que je trouve que c'est un peu l'archétype du genre de film qui va rebuter tout le monde si t'as pas les clés pour le voir. Et je pense que j'en ferai un épisode parce que c'est vraiment un film que j'adore. Et voilà, quand on dit film roumain sur l'avortement, personne ne va le voir. Mais c'est vraiment un très beau film et qui se regarde très bien. Donc voilà, j'avais envie de... de parler un peu de ce film et du syndrome des films malheureusement rejetés alors que c'est des préjugés.
- Speaker #1
Il n'est pas en noir et blanc.
- Speaker #0
Il n'est pas en noir et blanc en plus, il est en couleur.
- Speaker #1
Voilà, il faut le préciser.
- Speaker #0
Les gens parlent, il n'y a pas de silence, ça va. Non mais oui, il y a des gens... Moi je sais que ma petite sœur, des fois je lui recommande des films, elle me dit « Oh non, c'est en noir et blanc » . Je lui dis « Mais si, mais c'est bien en fait ! » C'est un peu le syndrome 4 mois, 3 semaines, 2 jours. Donc voilà, il y a celui-là. Et si je pouvais en glisser un petit deuxième, ce serait un film de Trintignant. évidemment, qui s'appelle Les violons du bal, c'est un film sorti en 74 qui est réalisé par Michel Drac qui aujourd'hui je pense ne parle plus à grand monde il avait eu quand même un beau succès en salle à l'époque en fait c'est un réalisateur qui veut faire un film sur son enfance lors de l'occupation mais qui en fait n'arrive pas à convaincre de producteurs à faire le film alors en fait c'est un film dans un film c'est à dire qu'il nous montre quand même la reconstitution de son enfance et en même temps on voit ... Un réalisateur qui galère à trouver des producteurs, et les producteurs qui critiquent son projet, projet qui est en train de se faire en même temps. Donc il y a un truc hyper sympa. Et Jean-Hubert Trintignant joue le réalisateur en question. Et c'est... Moi j'aime beaucoup les films avec des mises en abîme, qui réfléchissent sur le cinéma eux-mêmes. Le plus connu c'est peut-être 8,5 de Fellini, mais en fait il y a 250 films comme ça. Et c'est un film qui est hyper touchant. Parce que... Enfin, qui arrive à être hyper touchant, alors qu'on sait que tout est factice. Et je trouve que c'est un bon... C'est une sorte de définition un peu du cinéma. On sait que tout est faux et pourtant c'est hyper émouvant. Et on tombe dedans quand même. Alors que le film n'arrête pas de dire tout est faux, tout ceci est filmé. Donc voilà, Les violons du bal de Michel Drac. Il est ressorti en version restaurée à l'hiver dernier je crois. Donc il doit se trouver en VOD je pense. Pas trop trop... Enfin plutôt facilement. Mais voilà, c'est un film auquel j'avais envie de rendre un petit hommage.
- Speaker #1
Merci pour ces recos. Est-ce que aussi t'as... Peut-être un genre de cinéma ou un cinéma de culture étrangère vers lequel tu as envie un petit peu d'aller, que tu t'interroges, cinéma asiatique, africain ?
- Speaker #0
J'essaye de regarder un peu de tout, même si ça veut tout et rien dire, cette expression. J'avoue qu'en ce moment, un des cinémas qui m'intéresse beaucoup, c'est le cinéma tchécoslovaque, plutôt des années 60-70, je dirais. Il y a une créativité un peu folle, c'est des films qui sont souvent réalistes et en même temps complètement fous. Il y a des trucs hyper oniriques ou d'un humour hyper grinçant, genre Train étroitement surveillé par exemple. C'est un film qui est à la fois dur et en même temps hyper drôle mais sombre. Et c'est vraiment un cinéma qui m'intéresse de plus en plus, que je connais encore très mal. Mais le cinéma tchécoslovaque, je pense que ça peut être un cinéma qui intéresse pas mal de gens parce que les films sont relativement accessibles. relativement quand même, je souligne le mot, mais voilà, ce sera un cinéma qui en ce moment, je pense, va pas mal me passionner dans les prochains mois.
- Speaker #1
C'est marrant parce que plutôt que la présentation de 4 mois, etc., où les gens disent, ah, film romain, moi c'est plutôt quand je dis, non, ce n'est pas un film tchécoslovaque, justement, pour que les gens se détendent. J'avoue,
- Speaker #0
c'est un peu un cliché.
- Speaker #1
Il y a des nationalités, tu vois, en plus, sur lesquelles on a des préjugés comme ça. Ça doit être compliqué.
- Speaker #0
Quand tu dis, c'est un super film, il est taïwanais, les gens font, oh non, au secours. Mais en fait, non. Le cinéma, c'est l'art mondialisé par expérience. On filme avec les mêmes outils, on monte avec les mêmes outils. Donc, il ne faut pas être buté par des trucs lointains alors qu'on parle la même langue.
- Speaker #1
Ce que je te propose, là, c'est de passer un petit peu en mode question flash de fin. Donc sans trop réfléchir, quel est ton réalisateur ou ta réalisatrice préférée ?
- Speaker #0
Oh, c'est impossible.
- Speaker #1
C'est ça le jeu.
- Speaker #0
J'ai envie d'en citer dix, mais comme tu l'as cité tout à l'heure pour le critiquer, entre guillemets, je vais dire David Lynch pour lui. Lui redonner justice parce qu'en fait, quand il est mort en janvier, c'est la première fois où j'ai pleuré pour quelqu'un que je ne connaissais pas. Et je me suis dit, c'est peut-être le signe qu'en fait, j'ai beaucoup plus aimé son cinéma que je ne le pense. Je vais dire David Lynch, mais les vrais savent qu'il y en a 15 encore dans ma tête.
- Speaker #1
Alors, pour dire la vérité, je suis un grand fan de Lynch. Non,
- Speaker #0
mais oui, je te taquine.
- Speaker #1
Là, en plus, justement, à sa mort, j'ai voulu faire quelque chose. Je me suis trouvé, j'ai commandé le livre L'espace du rêve. Voilà, pour pouvoir le lire. Parce que je connais Twin Peaks, je m'y étais intéressé pendant longtemps. Et quelques films, et il y en a d'autres où ça ne matchait pas. Je ne sais pas pourquoi. Son univers est à nos parlements. Mais oui, David Lynch, ok.
- Speaker #0
Et toi, là, comme ça, de but en blanc, ton cinéaste de cœur ?
- Speaker #1
Alors, ça va être bateau, mais c'est bon, Jeannot. Mais pour une raison très simple, c'est plutôt ses premiers films, moi, qui m'ont parlé. Parce que, pareil, 17-18 ans, je découvre The Host, au CD, justement, où j'achète en DVD. Je trouve ça fou. Je trouve ça fou, c'est une période où je m'intéresse beaucoup à l'Asie, je fais des études un peu japonais, coréens, donc je m'intéresse aussi à ces cultures-là. Mais je n'avais jamais vu de films d'auteurs qui vont me parler de la Corée sur plusieurs niveaux, une histoire de famille, une histoire de monstre, et puis on sent qu'il y a un agent étranger au début du film qui fait quelque chose, et c'est ce mélange hybride qui m'a fasciné. Ouais. Du coup, je me lance avec ce film-là. Après, j'enchaîne avec Memories of Murder, mais qui est sorti trois ans plus tôt, je crois. The Oath, je crois, c'est 2006. Memories of Murder, c'est 2003. Je me dis, tiens, c'est marrant. À l'époque, au festival Gérard Hermé, je crois, si je ne dis pas de bêtises, ou Cognac, ils en avaient parlé. Je ne savais pas que c'était ce même réel. Pour moi, c'est l'un de mes films préférés, vraiment, de loin. C'est entre place 1 et place 2, Memories of Murder. Parce que j'y retrouve la Corée. La Corée a une période compliquée de son histoire. Parce qu'on a l'un des plus grands acteurs coréens qui est déjà là. Parce qu'on a cette histoire vraie qui va certes réadapter mais une histoire vraie. Sans spoil, le meurtrier on l'a retrouvé beaucoup plus tard enfermé en prison. Parce qu'il y a un esthétisme dingue, son étalonnage, les couleurs délavées, volontaires pour faire penser... à la Corée sous la dictature, parce qu'il y a une séquence qui résume tout le film. Je ne sais pas si tu vois de cette dont je parle. Ils sont à un moment dans un karaoké. À l'avant, tu as les deux policiers qui ne sont pas d'accord, donc ils s'écharpent. Derrière, tu as le commissaire qui est en train de vomir, qui représente du coup le système coréen qui est malade, littéralement. Et à l'arrière, derrière le canapé... T'as un autre policier, celui qui est plus brut, qui est en train d'essayer de violer une femme, en fait. Et donc, dans cette scène, t'as tout le film qui est résumé. Et j'ai trouvé ça dingue, tu vois, de me dire, putain, on est capable de faire simplement, en plan fixe, de tout expliquer, tout ce qui se passe, de tout ce dont va traiter le film. Donc c'est vraiment Bong Joon-ho, mais peut-être plus au début de sa carrière, qui m'a vraiment impacté. Et après, je revoyais un petit peu les mêmes thèmes, justement, de... Dénonciation des classes riches, lutte sociale, etc. Parasite, magnifique esthétiquement, je ne dis pas le contraire, mais peut-être plus grossier. Et je pense qu'il s'est même avoué lui-même. Je ne sais pas si tu as vu Mickey 17 ? Oui. Je ne sais pas ce que tu en as pensé, mais justement, je me suis dit, ah tiens, il se réveille en mode, je sais que je vais y aller avec des gros sabots, mais j'assume.
- Speaker #0
Oui, oui, oui. J'ai plutôt bien aimé, je dois avouer, Mickey 17.
- Speaker #1
Ça me parle moins, justement.
- Speaker #0
Il est moins subtil, c'est sûr.
- Speaker #1
Voilà, en fait, j'ai apprécié la subtilité, je trouve, quand même, de Memories of Murder versus le fait qu'il assume d'être un peu lourdingue, on va dire, dans ses films plus récents.
- Speaker #0
Ouais, je vois ce que tu veux dire.
- Speaker #1
Voilà celui que je garde. Et à l'inverse, du coup, un cinéaste peut-être très connu, ou toi, c'est pas ton affaire.
- Speaker #0
Je dirais Chantal Ackerman, avec une exception qui est Jeanne Dillemann, qui est un des films qui m'a le plus retourné le cerveau. Un des films que je préfère au monde, mais tout le reste que j'ai vu, j'y arrive pas du tout. Voilà, c'est là.
- Speaker #1
D'accord, intéressant.
- Speaker #0
Et toi ?
- Speaker #1
C'est dur de dire ça comme ça, parce qu'à chaque fois, t'as quand même beaucoup de propositions, même émanant d'une seule et même personne, où ils essayent des choses.
- Speaker #0
Oui, bien sûr.
- Speaker #1
Mais un avec qui j'ai vraiment du mal... Je ne m'étais pas préparé à mes propres questions, pour tout avouer.
- Speaker #0
Justement, là, je te prends vraiment au dépourvu.
- Speaker #1
Alors, on va dire, un cinéaste qui me met en colère, je vais le répéter, du coup, c'est Takashi Miike. Parce que, je t'encourage à regarder un petit peu ce qu'il a fait. Encore une fois, c'est quelqu'un qui va aller chercher des choses très viscérales, des choses organiques, qui sont là pour te mettre extrêmement mal à l'aise. Il parle souvent de violence, de viol, d'inceste. Il a des scènes d'horreur assez dérangeantes pour moi. Je repense à Vitor Kuhn, il en a fait plein de ce style. Je me demande s'il n'a pas fait It is the Killer. Je me demande si ce n'est pas lui aussi. Et parfois, il a fait des films plus traditionnels, des films de gangsters de lycéens. Crow Zero, je ne sais pas si ça te parle aussi, cinéma japonais. Ou même, je crois qu'il a fait Harakiri, la version moderne. Je crois même en 3D, qui avait été diffusé à Cannes il y a peut-être 7, 8, 10 ans. Mais lui, je respecte ce qu'il fait, mais ce n'est pas un cinéaste vers lequel j'ai envie de plus aller parce qu'il est là pour te faire du mal, un petit peu. Qu'on veuille réveiller ta conscience et t'ouvrir les yeux, c'est une chose qu'on t'enveuille viscéralement. tu vois physiquement à toi c'en est une autre et du coup c'est avec lui je crois que le plus célèbre ceux qui connaîtront c'est Audition regarde, jette un oeil tu verras je pense qu'il y a des gens justement cinéphiles qui vont dire mais non il y a des choses incroyables et encore une fois je respecte c'est juste moi ça me fait du mal donc j'essaie de me tenir éloigné de ce type de film en tout cas et de ce réalisateur Et pour des choses plus positives, c'est quoi le film que tu regardes en boucle ou les films que tu peux regarder jusqu'à la fin des temps ?
- Speaker #0
Apocalypse Now, je pense quand même que peu importe les versions, c'est vraiment un film qui me bouleverse à chaque fois. Et j'ai envie de dire aussi, même si je ne les ai pas encore revus, les films que j'ai le plus envie de revoir quand j'y pense, c'est les films des As, des frères Zucker et Abraham, des trucs comme... Top secret, hot shot, y a-t-il un pilote dans l'avion ? Ça, c'est des mines d'or. Déjà, je hurle de rire quand je les vois, mais en plus, c'est des mecs qui ont tout compris au moyen du cinéma, qui savent exactement ce que c'est que le montage, la voix off, tout ça, et qui s'en servent à des buts comiques, et ça fait mouche tout le temps. C'est vraiment... Je pense que si on veut être réalisateur, il faut regarder ces films, parce qu'en fait, les gars, ils ont pris toutes les possibilités du cinéma esthétique pour en faire des trucs drôles. Et c'est vraiment... C'est des bonbons, ces films. C'est géniaux. C'est des films géniaux, vraiment.
- Speaker #1
Tiens, je te rajoute une série de questions qui n'étaient pas prévues. Mais OK, si on veut devenir réalisateur, les films des frères Zaz, si on veut devenir acteur, si on veut devenir chef hop, si on veut devenir ingénieur du son, en fonction des corps de métier, quels films tu recommanderais ? Voilà, si on prend les principaux corps de métier.
- Speaker #0
Hyper intéressant. Je pense à un truc que tu n'as pas cité, mais parce que c'est le plus simple pour moi, c'est si on veut devenir scénariste. C'est un peu cliché, mais les films de Charlie Kaufman, Eternity Sunshine, Spotless Mind, Dans la peau de John Malkovich, son film d'animation Anomalissa, qui est une merveille. Je pense que c'est vraiment hyper stimulant si on veut écrire des histoires de façon générale, même pas juste au cinéma. Si on veut devenir... Je ne sais plus si tu as dit monteur.
- Speaker #1
Oui, on va dire les corps de métier qui te parlent.
- Speaker #0
Ceux auxquels je pense là.
- Speaker #1
Ceux qui te viennent et tu dis, ça je le recommande à un monteur, ça je le recommande à un chef-op.
- Speaker #0
Je pense que si on veut devenir monteur, il y a peut-être quand même les films de Godard, ça me semble un peu incontournable. J'aime pas du tout tout ce qu'il a fait, mais il y a quand même tout le temps des trucs intéressants en termes de montage. C'est assez fou, il y a des trucs dans ces films Nouvelle Vague, ça peut être des trucs un peu plus légers, un peu plus drôles, après des trucs beaucoup. plus lourd et compliqué à voir mais c'est quand même quelqu'un qui a vraiment utilisé ce médium jusqu'au bout je pense si on veut être acteur tous les films avec Trintignant bien sûr c'était sûr évidemment pour n'en citer qu'un seul je dirais L'homme qui ment de Rob Grillet c'est un film des années 60 avec Trintignant c'est le seul film de Rob Grillet qui est à peu près regardable, ah non il y a Trans Europe Express aussi qui est très bien mais bref parenthèse Merci. C'est un film dans lequel il joue un menteur et en fait à chaque fois il est empêtré dans ses mensonges mais il essaye de jouer un peu d'autres personnages. Mais c'est toujours assez subtil, mais tu vois quand même des petites variations tout le temps et en même temps le montage est avec le personnage, donc en fait toi-même t'es perdu. Et c'est assez magistral sur ce que peut faire un jeu qui n'est pas ultra spectaculaire parce que quand on pense grand acteur, on pense vraiment à des morceaux de bravoure, à des mecs qui ont perdu 20 kilos. Mais être acteur, c'est aussi cerner des choses beaucoup plus infimes, je pense. Et c'est ça qui est assez chouette. Après, pour les autres, c'est tellement dur. Il y a tellement de choses qui me viennent en tête. Je pense que pour, je dirais aussi, pour être réel et chef-op, les films de Max O'Fulls, je trouve que c'est quand même des mines d'or à chaque fois. Et les films de Clouseau aussi, j'adore Clouseau. J'aurais pu le citer dans le cinéaste de cœur préféré. C'est vraiment des films qui font... Des usages hyper intéressants de la lumière, de la photo, du cadre, des mouvements de caméra. Au fil, ça va plus être pour ceux qui sont plus intéressés par les mouvements de caméra, les choses comme ça. Et Clouseau, je pense que c'est plus pour des travails sur le cadre. Mais c'est sublime. Les histoires sont hyper prenantes. Et en plus, à l'image, c'est juste magnifique. Donc voilà, je citerai un peu cette ribambelle de Jean. J'espère que je n'ai oublié personne dans les questions.
- Speaker #1
Non, mais c'est intéressant justement pour les personnes qui se destinent peut-être à faire des études de cinéma ou une carrière dans le cinéma, d'avoir quelques éléments bonbons, comme tu dis, pour s'aiguiser l'œil, j'ai envie de dire. Et maintenant, le moment confession. Est-ce qu'il y a un grand film que tu n'oses pas avouer, que tu n'as jamais vu encore ?
- Speaker #0
Alors, il y en a beaucoup, malheureusement. Je pense que vraiment, le plus honteux, je dirais, c'est Les 7 samouraïs de Kurosawa. J'avoue, c'est vraiment un énorme classique. Mais en fait, j'aime bien le cinéma de Kurosawa. Il y a des choses que j'adore. Il y a des choses où j'ai un peu plus de mal. Et je sens que les 7 samouraïs, je vais avoir un peu de mal. Donc je me dis, il faudrait que je le voie en salle. Parce que sinon, je ne vais pas y arriver chez moi. Mais en même temps, dès qu'il sort en salle, je trouve une excuse pour voir un autre film. Donc voilà, c'est un petit peu le classique de la honte, les 7 samouraïs. Et toi ? Je ne suis pas la seule à avouer mes péchés aujourd'hui.
- Speaker #1
Alors, on va faire un autre jeu. C'est quoi pour toi les grands classiques que tout le monde cite ? Bon, il y a 2001, etc. Et du coup, je vais pouvoir te dire lequel je n'ai pas vu là-dedans, dans les grands grands.
- Speaker #0
Moi, j'ai l'impression que ceux qui ressortent tout le temps, c'est Citizen Kane, tous les films de Kubrick, tous les Hitchcock aussi.
- Speaker #1
Je n'ai pas vu tous les Hitchcock. Ça, c'est sûr, je n'ai pas vu tous les Hitchcock. Il y en a trop, encore.
- Speaker #0
Oui, mais tu vois, quand je dis tous les Hitchcock qu'on cite, c'est genre les dix plus connus, la fenêtre sur cour, la mort aux trousses, Ah, vraiment les grands classiques qu'on cite tout le temps. Il y a aussi La règle du jeu de Renoir. J'ai l'impression qu'il est dans tous les tops.
- Speaker #1
Eh ben voilà,
- Speaker #0
pas vu. Ça peut être celui-là. Ça sera si bien. Il est tout le temps dans les tops. Ah oui, dans les grands classiques aussi, j'avoue, La maman et la putain de Jean Eustache, j'ai pas vu. J'avoue, je suis un peu immature, mais les films depuis deux heures et demie... Je dis ça mais mon film culte Apocalypse Now dans certaines versions dure largement 3 heures. Vraiment. Mais non, non, non, mais ça au pire tu coupes pas en montage. Mais ouais, bon, des fois les films courts c'est aussi hyper... Enfin les films de 1h30 c'est des fois un peu plus impressionnant parce que justement c'est dans une forme hyper condensée qu'on a réussi à faire des choses merveilleuses. Donc bon, des fois, en ce moment, il y a vraiment une vibe de grands réals qui font ce qu'ils veulent et qui font que des films de 3 heures. Bon, des fois, 2 heures, c'est bien aussi. Voilà, petit message à Scorsese s'il m'entend.
- Speaker #1
Il faut savoir apprendre à resserrer son temps aussi.
- Speaker #0
C'est clair.
- Speaker #1
Je pense que c'est important aussi pour le spectateur. Et puis, même pour eux, c'est réel. Parce qu'à un moment, tu peux te perdre. Tu peux te perdre, tu peux perdre ton spectateur. Je trouve que c'est un vrai talent. C'est un vrai talent de savoir maîtriser la durée de son film.
- Speaker #0
Oui, et c'est faire confiance en les possibilités du cinéma. Hitchcock, il ne faisait que des films qui duraient une heure et demie. Enfin, Hitchcock, il y a d'autres réalisateurs très bons, je cite celui-là, un peu comme ça, parce que c'est le cas emblématique, mais en une heure et demie, il a un peu tout dit, donc pas la peine des fois de faire quatre heures, justement, on a plus confiance dans le cinéma quand on fait une heure et demie et qu'on se sert de toutes les possibilités du cinéma.
- Speaker #1
Maintenant, on va arriver à la conclusion. J'ai une question, tout simplement. Oui, on est déçus, on est tous déçus. Je voulais savoir, du coup, maintenant avec le recul, et puis après avoir fait cet échange d'une heure trente même, qu'est-ce que la cinéphilie a changé dans ta vie, professionnelle ou personnelle ? Tu dis, tu partages ce que tu souhaites. Ou alors, comment est-ce que tu la vois accompagner le reste de ta vie ?
- Speaker #0
Moi, ça a changé ma vie professionnelle, parce qu'au moment où j'ai découvert Aplica Epistna, où je ne me destinais pas du tout à des études de cinéma et de lettres, Et finalement, j'en fais un peu ma vie progressivement. Enfin, je dis de l'être parce que c'est aussi le moment où j'ai été fan de littérature, donc tout vient un peu se mettre ensemble. Et puis après, un peu trivialement, mais la cinéphilie, c'est une source de joie, en fait. Et je me dis que toute ma vie, j'aurai d'autres films à découvrir, d'autres réalisateurs à découvrir, j'aurai des zones d'ombre, je verrai les sept samouraïs. Donc, il y aura toujours des... Enfin, je me dis, c'est infini. ça peut être effrayant mais en même temps moi je trouve ça trop bien de se dire que c'est jamais fini et qu'il y aura toujours des choses à voir, toujours des choses à découvrir ça me rend trop heureuse d'aller à la médiathèque emprunter des films que j'ai pas vu et je me dis toute ma vie même quand ça ira pas il y aura toujours le cinéma qui sera là il y aura toujours je serai toujours curieuse de ça et j'espère ne jamais perdre cette envie de découvrir et ça peu importe ce qui se passera je sais que je le garderai c'est un peu trivial mais en vrai enfin C'est le principe des passions aussi. Donc voilà, je dirais ça.
- Speaker #1
Je te rajoute une petite question. C'est la première fois que tu es de l'autre côté du micro, entre guillemets, dans un podcast ?
- Speaker #0
Oui, je crois bien. J'avais fait un podcast avec une amie, mais c'est vrai que j'étais plus dans ton rôle, entre guillemets. Mais tout à fait.
- Speaker #1
Et du coup, quel effet ça fait de passer de c'est moi qui maîtrise mon podcast, qui parle de mon sujet, à finalement se retrouver et se livrer dans le podcast d'un autre ?
- Speaker #0
Eh bien écoute, c'était une très chouette expérience. C'est un sujet que je maîtrise à peu près, ce que j'aime dans le cinéma. Donc tout va bien. Mais de toute façon, j'aime le média radio. Et je trouve que des fois, c'est bien aussi de sortir de ses notes, de sortir un peu de... Enfin, de se laisser un peu porter par ce qu'on a envie de dire et tout. Et je sais que quand je vais réécouter ce podcast, je vais hurler et je vais me dire, mon Dieu, j'ai jamais cité Sonny Berg et tous les autres. Mais... Rires Écoute, expérience plutôt agréable et merci d'être aussi bienveillant et à l'écoute. C'était super.
- Speaker #1
Écoute, c'est moi qui te remercie d'avoir répondu positivement à mon invitation. Comme on s'était dit dès le début, on trouvait des ressemblances et je me disais que ça pouvait être très intéressant d'échanger avec toi et de prendre ce sujet de la cinéphilie et essayer de prendre du recul sur nous-mêmes, sur les films de manière générale également. Et je recommande vraiment chaudement ton podcast, Les Bobines Partagées. Je crois qu'il doit me manquer un ou deux épisodes que je n'ai pas encore écouté, mais je le fais volontairement.
- Speaker #0
C'est trop gentil.
- Speaker #1
Je consomme doucement. Moi, mon préféré, comme je te l'ai déjà dit, c'est Exxon, parce que je vis en Suède et du coup, c'est un univers qui m'intéresse aujourd'hui. Je recommande. Et puis, écoute, si c'est un exercice qui t'a plu, J'espère qu'on aura l'occasion peut-être d'ici quelques temps de refaire un épisode, soit pour approfondir, soit parler d'autres sujets. C'était vraiment un plaisir de t'avoir avec moi et je vais te laisser le dernier mot, le mot de la fin.
- Speaker #0
Vraiment, mille merci, c'était super chouette et puis je trouve que cette idée de projet en commun, ça correspond bien aussi à notre image de la cinéphilie dans le sens où... Voilà ce qu'on disait, c'est qu'il y a parfois certains cinéphiles qui sont un peu élitistes, un peu classistes eux-mêmes. Et je pense que nous, notre envie, c'est de faire comprendre à tout le monde que c'est accessible, que c'est possible d'aimer le cinéma, qu'il ne faut pas en avoir peur, qu'il faut se lancer quand on a les clés et tout. Et je pense que cet épisode, il résume bien notre vision et notre envie un peu de décloisonner ce monde-là. Donc j'espère que ça donnera envie à plein de gens de se lancer dans des classiques du 7e art parce que c'est possible pour tout le monde et c'est pour tout le monde. Voilà.
- Speaker #1
Merci Manon et à bientôt
- Speaker #0
Merci à toi, à très bientôt et puis écoute, si ça te dit d'intervenir un moment dans les bobines pour un sujet qui peut t'intéresser on se refait ça c'était super
- Speaker #1
Et voilà, c'en est terminé pour cette nouvelle hors séance, j'ai eu le plaisir d'échanger avec Manon que je remercie vraiment pour son temps, pour ses réponses et vraiment ce super échange, j'ai vraiment apprécié cette bulle et j'espère que qu'on aura l'occasion de se retrouver vite pour un nouvel échange. Si vous aussi, vous souhaitez réagir à cet épisode en tant que cinéphile, n'hésitez pas, j'ai hâte de vous lire en commentaire sur Instagram. Et puis, allez écouter les bobines partagées, le podcast de Manon. Moi, je vous dis à très bientôt pour une prochaine séance de rétro-ciné. Musique de générique