- Speaker #0
Si Dionysos était une femme, vous écoutez un nouvel opus du premier podcast dédié aux femmes leaders dans l'univers du vin. Je m'appelle Aurélie Charongiguet, je vis dans cet univers depuis plus de 20 ans, je mets ma créativité féminine et relationnelle au service du vin. Mon plaisir, vous faire partager mes rencontres. Pour ce second opus, j'ai choisi de vous présenter Véronique Etienne, sixième génération à la tête du château Ladourny à Saint-Chignan en Languedoc. Pourtant destinée à une carrière dans le sponsoring sportif de haut niveau, vous découvrirez comment Véronique a fait sa place, dans le respect dicté par le poids d'une grande famille, avec sa marque de fabrique, la Résilience. Femme inspirante, Véronique Etienne dirige une équipe sous le label de l'altruisme et son vignoble avec bienveillance dans un souci de maintenir les équilibres que la nature lui horte. Et in fine, partager les plaisirs de la table. Ensemble. Écoutons cette nouvelle déesse. Belle écoute ! Véronique, est-ce que tu peux me présenter le château Ladournie ?
- Speaker #1
Alors, château Ladournie. Déjà, c'est un lieu dit, Ladournie. C'est vraiment l'emplacement. C'est un domaine qui est dans la famille depuis 1850. On est d'un seul tenant. C'est un très gros avantage sur essentiellement un terroir de schiste pour la partie en appellation. Et après... Nous avons aussi une autre grande chance, c'est d'être traversé par la rivière Levers-Nazobre, qui donne des sols un petit peu différents, qui vont être plutôt alluvionnaires. Donc, on a une partie en 20 pays près de la rivière, et toutes les zones en appellation sont sur un terroir de schiste. Donc, c'est 45 hectares d'un seul tenant. On a à peu près 18 cépages différents entre la partie en appellation et la partie en 20 pays. Et nous produisons aussi bien des vins blancs, des vins rosés et rouges.
- Speaker #0
Et tu es en bio ? Oui. Depuis quelle année ?
- Speaker #1
Depuis pas très longtemps, depuis 2017. D'accord.
- Speaker #0
Donc avant, c'était vignoble et conventionnel ?
- Speaker #1
On était en… oui. On avait une certification, mais parce qu'on avait tous besoin d'une certification, je disais que moi, non, ma théorie, c'était… Je voulais rester naturellement libre, c'est-à-dire qu'on ne désherbe plus depuis au moins 15 ans, mais on utilise beaucoup de prenie de contact. mais je voulais faire comme avec mes enfants, c'est réagir naturellement tant que ça va, mais s'il y a le feu, pouvoir utiliser une molécule de synthèse pour pouvoir sauver une récolte, pour pouvoir maintenir des salaires sur une exploitation. Et je ne trouvais pas ça totalement incohérent. Il faut aller au-delà du bio et travailler sur les défenses immunitaires de nos plantes et les adapter au mieux à leur environnement pour éviter de traiter un maximum. Ça, c'est une belle quête. Après, le label bio, c'est une nécessité que le marché nous impose.
- Speaker #0
Est-ce qu'au départ, c'est quand même une philosophie ?
- Speaker #1
Oui, mais c'est parce qu'à partir du moment où tu es dans tes vignes toi-même, tu vois des choses. Tu comprends un peu les équilibres, tu comprends comment tu vas régler tes acariens, si tu as des araignées dans tes vignes, si tu fais des observations, si il y a la faune auxiliaire prédateur qui va pouvoir compenser tout ça. Tu vois bien que naturellement ça s'équilibre les choses. Si tu ne demandes pas, on n'est pas dans un milieu super productiviste aujourd'hui, on peut arriver à faire de belles choses, malheureusement qui vont coûter plus cher à produire, si on va arriver à bien faire sans trop mécaniser, tout en respectant les équilibres et tout ça. Naturellement tu t'enverses ça obligatoirement.
- Speaker #0
Je te remercie pour cette présentation rapide du Château-Ladourny. Vous pouvez retrouver, chers auditeurs et followers, toutes les informations concernant le château Ladourny à travers les liens qui sont dans les commentaires du podcast. Pour le moment, je vais en revenir à mon invitée. Il faudrait bien que tu te présentes, s'il te plaît.
- Speaker #1
Alors, Véronique Etienne, je suis avant tout la fille d'Henri et Annick, un petit vigneron. Je suis donc la sixième génération qui s'occupe de Ladourny.
- Speaker #0
Et donc, quelle éducation tu as eue, toi, au château de la Dournie, ou en tant que fille, justement, de monsieur et madame Étienne ?
- Speaker #1
C'est important. Non, la famille Étienne est importante, puisque c'est donc la sixième génération d'Étienne sur le domaine. Moi, je ne suis pas issue d'une éducation paysanne. Mes parents étaient avant tout des citadins. On a vécu à Carcassonne. Même si papa s'occupait du domaine, et maman aussi, j'ai grandi en ville. Avec pour objectif de faire des études, mais pas de devenir un jour vigneron. Vigneron, je dirais plutôt, je préfère ce mot.
- Speaker #0
Alors, à quoi était-tu vouée justement à 20-25 ans ?
- Speaker #1
Tu te voyais ? Mes études diverses et variées après une licence de biologie. Je suis partie faire une école d'histoire de l'art et j'ai commencé à travailler dans la communication. Je vivais à Paris et j'avais une vie très active et très dynamique. Je suis revenue à un moment donné, pendant un certain temps, de travailler sur la Dournie pour me ressourcer un petit peu. Je venais aider les parents comme ça, j'avais 28 ans.
- Speaker #0
Pour revenir, petite parenthèse sur Paris, tu faisais quoi ? C'était quoi ta vie active et trépidante ?
- Speaker #1
C'est de l'événementiel et de la communication, du sponsoring sportif, créer des événements avec beaucoup d'argent, beaucoup de brillants. de choses un petit peu superficielles, mais c'était la grande époque.
- Speaker #0
Bien loin du terrien, bien loin d'une réalité.
- Speaker #1
Très très loin, oui.
- Speaker #0
Ok, agricole quoi.
- Speaker #1
Oui, tout à fait.
- Speaker #0
D'accord. Et donc tu revenais de temps en temps ?
- Speaker #1
Je revenais de temps en temps et j'ai eu une période où j'avais six mois de battement avant de reprendre un autre job. Et je suis restée ces six mois ici et je suis un petit peu comme la vigne, je marcote très rapidement, j'ai très vite. J'ai pris racine et j'ai senti que mes pieds étaient vraiment à leur place et ma tête aussi. Et aussi, comme je le dis souvent, c'est comme la mer et comme le ciel, la terre s'embrasse.
- Speaker #0
Donc c'est un choix réfléchi, tu n'as pas été obligée de reprendre la passion ?
- Speaker #1
Pas obligée, non. Je n'ai jamais eu des parents qui m'ont incité à reprendre le domaine. Au contraire, ça a toujours été leur peur et leur crainte de me dire « ça va être un enterrement, c'est pas possible, tu vas rester seule toute ta vie » . de ta vie, non, tu ne peux pas. Et à force de leur montrer mon engagement et mon envie de rester là, ils m'ont accompagnée.
- Speaker #0
Et donc, tu as repris des études, justement, vraiment pour te spécialiser.
- Speaker #1
Pour avoir une connaissance un peu générale, puisque comme je n'étais pas paysanne non plus, je ne connaissais absolument rien du végétal, ni de la vinif. Je comprenais, après une licence de biologie, comment ça fonctionnait. C'était plus facile pour moi d'accéder à ce niveau-là. Par contre, j'avais toute la partie végétale que je ne maîtrisais absolument pas. Et par contre, ça c'est ma tasse de thé. Le végétal, la vigne, la terre, c'est...
- Speaker #0
C'est ton élément.
- Speaker #1
C'est mon élément, complètement. C'est là où je me sens bien, c'est là où je me ressource, c'est là. D'accord. Mais je dirais que j'éprouve physiquement un besoin, une nécessité d'être au contact de l'extérieur. beaucoup plus.
- Speaker #0
Est-ce que pour toi, d'aller dans les vignes, est-ce que c'est un moment de s'énergiser ? Est-ce que c'est un moyen aussi d'avoir un peu plus de clairvoyance, de clarté sur des projets, d'être un petit peu plus vraiment sur que va devenir le raisin avec des idées plus tard de comment développer l'exploitation ?
- Speaker #1
Je pense que c'est un ressenti d'environnement que tu peux après arriver à exprimer dans le produit que tu vas faire au final. Je pense que tu as besoin de t'imprégner de toute cette atmosphère, ces odeurs, pour comprendre ce qui... Et puis de voir comment ta vigne réagit, où tes cépages réagissent, en fonction de là où ils sont plantés et de ce qui nous entoure.
- Speaker #0
D'accord. Alors, la femme active que tu es, donc tu t'es installée, tu avais 29 ans, jeune agricultrice, donc ça c'est un temps fort pour toi.
- Speaker #1
Et je prends un statut. Un statut qui est important, c'est important de se positionner. Alors que je dis que je suis la fille de... Effectivement, j'ai toujours été... Quand je me suis installée, chaque fois que j'arrivais quelque part, ce n'était pas « Bonjour Véronique, vous êtes la fille de Henri, Annick ? » Oui. Mais m'installer jeune agricultrice aussi, c'était important pour moi de prendre ce statut de vigneron. Après, ça n'a pas toujours été perçu dans mon environnement proche. Je reprenais un très beau domaine. J'étais la citadine qui arrivait, qui s'installait. Je faisais un peu rire tout le monde. On m'attendait bien au tournant.
- Speaker #0
Est-ce que pour toi, tu as ressenti ça comme des obstacles, des défis ? Ou plutôt un challenge ?
- Speaker #1
Comme je n'étais pas trop fanfaron, je me suis imposée lentement mais sûrement.
- Speaker #0
Est-ce que tu penses que c'est la force de la femme qui est en toi ?
- Speaker #1
Je pense que c'est ça, la résilience, oui.
- Speaker #0
La résilience.
- Speaker #1
Oui, je pense que c'est une période aussi qui nous apprend ce mot-là. Aussi. Mais oui, je pense que je n'ai pas eu besoin, je pense que c'est avec le temps que j'ai eu la reconnaissance ou que les gens ont compris que ce n'était pas que parce que c'était la dournie ou un gadget qui m'amusait de reprendre. J'étais prise au sérieux après, oui. Oui, après quelques années.
- Speaker #0
Et donc, dans cet accompagnement, tu t'es installée, tu avais un accompagnement, ton père présent ?
- Speaker #1
Mon père, ma mère étaient toujours là,
- Speaker #0
oui. Ta mère, dans la transmission, elle a participé aussi au niveau du vignoble, ou plus ton père ?
- Speaker #1
Alors mon père avait une autre activité, était très pris dans la semaine. Je pense que je l'ai appris beaucoup plus moi toute seule par mes formations. Je n'ai pas un père qui m'a transmis beaucoup, si ce n'est que je savais qu'il avait une grande passion pour la dournie. Après on s'est entendu et beaucoup disputé aussi parce que j'avais une autre vision que lui de la viticulture.
- Speaker #0
D'accord, et c'était des moments... Comment est-ce que vous arriviez à discuter de ces visions, justement, où tu arrivais à faire passer les messages ? Ou c'était toujours un... Non,
- Speaker #1
j'ai toujours dit que j'avais l'impression, en reprenant la journée, d'avoir deux freins à main avec moi. C'était mes parents, qui travaillaient plus dans la sécurité.
- Speaker #0
Toi, tu avais plus envie de prendre des risques ?
- Speaker #1
De prendre des risques, d'avancer, mais eux, c'était... plutôt une fin de carrière qui voulait tranquille sans prendre de risques ou des choses comme ça.
- Speaker #0
Et à quel moment dans ton expérience, ça fait maintenant 28 ans que tu es chef d'orchestre, comme tu aimes le dire. À quel moment tu as senti que ça y est, hop, c'était sur les rails ? Que l'épreuve était faite ? Qu'effectivement, il y avait une reconnaissance des vins à travers la commercialisation ? Que tu commençais vraiment à...
- Speaker #1
C'est à force de travailler avec mon équipe aussi, c'est quand les messages que tu passes aussi reçoivent l'adhésion des gens avec lesquels tu travailles. Il fallait qu'ils me suivent sans doute. C'est là où ça a commencé à être bien. Mon père a commencé à se dire qu'effectivement, je n'avais pas que des visions d'écolos, socialos, comme il aimait à le dire.
- Speaker #0
C'est joli.
- Speaker #1
C'était une autre... Ils avaient une autre façon de voir et ils ont vécu une autre vie que la nôtre. Je ne suis pas née chef d'entreprise, je le suis devenue. Mais pour eux, tu étais peut-être issue d'une caste de chef d'entreprise, par exemple, dans leur vision.
- Speaker #0
Alors justement, tu es devenue chef d'entreprise.
- Speaker #1
Je n'aime pas trop dire chef d'entreprise, je dirais peut-être plus meneur d'hommes. ou de femme, je veux dire. J'ai besoin d'avoir une équipe. Pour moi, être un chef d'entreprise, c'est avant tout avoir aussi à ses côtés. Tu deviens chef d'entreprise quand tu as une bonne équipe avec toi.
- Speaker #0
Tout à fait. Et là, justement, quelle est la part de la femme avec un grand F dans cette réussite, finalement ? de fédérer cette équipe ?
- Speaker #1
Alors pour moi, je pense qu'il y a eu des inconvénients d'être une femme par moment, mais il y a eu aussi des avantages, c'est que je ne suis pas heurtée à de la jalousie de la part de gens qui étaient en place, comme peut avoir rencontré par exemple mon fils Thomas avec certains des salariés. C'est des gens qui ont, comme j'étais une femme justement, et que je jouais peut-être un peu dessus en disant que je manquais de force pour ouvrir un très gros robinet. ou que je n'étais pas capable de changer un pneu de tracteur, alors que j'aurais pu le faire. Mais un homme a quand même deux fois plus de force, donc j'ai joué aussi là-dessus. Et ils ont toujours été bienveillants et ils m'ont toujours appris beaucoup de choses. Et c'est grâce à eux que je suis devenue paysanne, que j'ai aimé la terre.
- Speaker #0
En fait, tu as fait ta place en te fondant déjà dans l'équipe existante. Et petit à petit, justement, tu as apporté...
- Speaker #1
Oui, c'est-à-dire que j'ai travaillé à leur côté. Ils m'ont appris des choses et je leur ai appris des choses et ça s'est tout doucement mis en place.
- Speaker #0
Est-ce que tu penses que justement tout ça s'est bien harmonisé parce que aussi tu es une femme ?
- Speaker #1
Je pense.
- Speaker #0
Ça aurait été un homme, peut-être que ça aurait été différent ?
- Speaker #1
Il y a une part de... quand un jeune arrive sur une exploitation, que ce soit une femme ou un homme, il fallait que tu sois le fils du patron. Et ça fait rigoler un petit peu le fils du patron. Mais quand le fils du patron, la fille du patron, travaille avec toi, te considère, te valorise, parce que ce sont des gens qui sont vraiment importants, et ils étaient très importants pour moi, c'est eux qui m'ont donné l'enseignement de savoir me servir de mes mains. Je ne savais pas me servir de mes mains. Donc je leur dois beaucoup. Et ça les a beaucoup valorisées, je les ai toujours beaucoup considérées, et ça a été réciproque, c'était un respect réciproque. Et je pense que c'est passé plus facilement en étant une femme.
- Speaker #0
Et dans ces périodes-là, dans toute la période de cette carrière, durant ces 28 dernières années, contre quoi as-tu dû résister ? Quels ont été les obstacles rencontrés ? Et surtout, comment les as-tu surmontés ?
- Speaker #1
Alors les obstacles, il y a toujours ce côté difficile de travailler en famille. Ça, je n'ai peut-être pas toujours réussi à surmonter cet obstacle-là. C'est difficile de travailler en famille parce qu'un problème au travail devient vite un problème familial. Donc ça, c'est une part d'énergie qui peut être assez négative. Ça c'est... Uniquement ça, c'était le problème du travail en famille. Après, les moments où je... Ce que je trouve difficile, c'est... Je peux douter quand j'ai des pertes d'énergie. Parce qu'il faut d'énergie sans cesse, avoir une énergie au maximum, quoi. Ne pas avoir peur de tout recommencer tout le temps.
- Speaker #0
C'est vrai que c'est la difficulté d'un chef d'entreprise quand tu as la... Capitaine à la barre du bateau, maintenir le cap et effectivement cette énergie-là. Et comment toi tu fais justement ? Comment tu fais pour trouver l'énergie au quotidien ou sur quoi tu te reposes pour aller te ressourcer ?
- Speaker #1
Il y a l'énergie d'une équipe et puis à l'aboutissement de ce métier, créer du partage, du plaisir, créer du plaisir à part. c'est quand même quelque chose qui, à chaque fois que tu vas te retrouver autour d'une bouteille de vin et de la partager, c'est quand même quelque chose qui te donne une énergie folle pour recommencer. Quand même, ça c'est sûr. Et moi, dans ma position et dans mon métier aujourd'hui, comme je te dis, être chef d'orchestre, c'est la difficulté ou les doutes, c'est d'être un petit peu seule à gérer tous les aspects. de ce métier sur une exploitation qui est grande et qui faut un niveau de compétence énorme pour être bon à la vigne, bon à la cave, bon en marketing, bon au commercial et bon à la maison aussi.
- Speaker #0
Parce qu'aujourd'hui voilà tu pilotes tout, tu es chef d'orchestre comme tu le dis si bien. En plus tu sens que tu es plus à l'aise dans le vignoble. Est-ce que justement toute cette partie serait cela, la commercialisation, le marketing, est-ce que c'est quelque chose que tu vas transmettre ou tout au moins déléguer je veux dire ? C'est une volonté ou une intention ou tu vas continuer à garder tout ça ?
- Speaker #1
Non, j'aimerais bien pouvoir, je pense qu'il faut que je le délègue parce que tu ne peux pas tout faire continuer comme ça.
- Speaker #0
Donc ça fait partie des projets à venir délégués ? Oui, oui. Et toi, te repositionner plus dans le vignoble ?
- Speaker #1
Oui. J'aimerais bien finir ma carrière que dans cette partie-là. Oui, ça m'apaiserait.
- Speaker #0
Entre ciel et terre.
- Speaker #1
Entre ciel et terre.
- Speaker #0
Dans les temps forts, tu parlais aussi de la naissance de tes enfants, évidemment. C'est toujours très beau. Donc tu as deux enfants ?
- Speaker #1
Oui, Thomas et Marie. C'est des enfants qui aiment revenir ici, qui ont bien le sens de l'apaisement que ça peut apporter, et qui aiment le vin, qui aiment manger, et ça c'est déjà très bien. Et puis ma grande réussite, c'est surtout que Thomas a eu envie de faire le même métier que moi, ça c'est vrai.
- Speaker #0
Alors Thomas, il te l'a annoncé quand qu'il souhaitait revenir s'installer ?
- Speaker #1
Thomas, donc à 25 ans, ça fait 5 ans. Donc au début, j'ai un petit peu la même réaction que mes parents, je dirais. À son égard, je lui ai dit « tu es sûre que tu veux faire ce métier-là ? »
- Speaker #0
C'est de la prudence.
- Speaker #1
Oui. Après, c'est quelqu'un qui aime beaucoup déguster, qui a beaucoup de goût, qui aime toutes les bonnes choses, donc ça l'attire aussi beaucoup.
- Speaker #0
Et votre relation, mère-fils et chef d'orchestre ?
- Speaker #1
Alors, justement, quand… Quand tu mères-fils ou mères-seules avec son fils, c'est un peu plus compliqué. Parce que le fils seul à la maison a tendance à se prendre pour le chef de la maison. Donc quand on passe le pas de la porte, il faut lui expliquer que le chef à l'extérieur, c'est maman. Après, non, non, ça se passe bien et puis il est assez à l'écoute. Il a des idées, donc ça, ça apporte beaucoup d'énergie d'avoir des idées. Simplifier les façons de travailler aussi, de changer des gestes. Moi j'aime bien la jeunesse parce que ça m'apporte... Je ne suis pas conservateur. sur les gestes ou sur les habitudes. C'est bien d'avoir des traditions aussi, mais c'est bien aussi de faire évoluer les choses.
- Speaker #0
Et Thomas, il va insuffler justement cette jeunesse dans le lignoble essentiellement ? Ou est-ce qu'il va...
- Speaker #1
D'abord, il a une notion... Moi, je n'aime pas la mécanique. Je n'aime pas ça, ça ne m'intéresse pas. Donc lui, par contre, il va être beaucoup plus intuitif à ce niveau-là, mais je pense que c'est aussi un peu... Alors, je fais des généralités, il y a des tas de femmes qui sont très douées en mécanique. Mais il est beaucoup plus intuitif que moi en termes de matériel, pour optimiser les choses, pour essayer de simplifier certains travaux. Il a une logique différente de la mienne. Donc, je trouve que c'est pas mal homme-femme aussi, parce que c'est une belle complémentarité. Je suis contente de l'avoir aujourd'hui à mes côtés.
- Speaker #0
Et ensemble, justement, de beaux projets s'annoncent et se dessinent au Château-la-Dournie pour la prochaine décennie, au moins.
- Speaker #1
Déjà, sa formation, son implication. et qu'il ait trouvé sa voie à la Dournie ou ailleurs, mais sa voie dans ce métier-là. Et surtout, je pense qu'il a la même philosophie que moi, cette notion que partout où tu vas dans le monde ou dans les gens que tu rencontres, même toi Aurélie, dans ton métier, tu vois qu'à chaque fois, quand tu parles de vin, tu fais d'air du bonheur, tu fais d'air de l'amour, tu fais d'air de l'amitié et du plaisir à partager. C'est en ça qu'il est magique ce métier.
- Speaker #0
Je suis d'accord, c'est vrai. Tiens, on va rebondir sur cette question. Quelle est la définition d'un bon vin pour Véronique Etienne ?
- Speaker #1
Alors, un bon vin pour moi, ça va être de l'élégance et de la finesse, de la buvabilité aussi.
- Speaker #0
Un vin qu'on partage ?
- Speaker #1
Oui, qu'on partage, mais le fait de partager... Bien sûr qu'il faut le partager, mais il faut savoir aussi, tu peux avoir de superbes pépites, mais que tu ne peux pas partager avec tout le monde parce qu'elles ont une forte typicité ou un fort caractère. Il faut savoir avec qui tu la partages.
- Speaker #0
Est-ce que tu as un coup de cœur de l'instant ? Un vin que tu as dégusté ces dernières semaines, que ce soit le tien ou un autre ?
- Speaker #1
Alors, il y a un Saint-Joseph que j'aime bien, c'est le Domaine des Sept Lunes. que j'ai bu il n'y a pas longtemps et que j'ai beaucoup aimé par sa fraîcheur. Donc c'est une Syrah, mais rhodanienne, nord. Et j'aime bien justement toutes ces régions-là parce qu'il y a beaucoup de puissance, d'épices, mais un équilibre toujours sur la tension et la fraîcheur. Des choses que dans nos régions à nous, on a, mais un petit peu moins. Donc j'aime bien quand on sait jouer sur ces équilibres-là.
- Speaker #0
Donc ça, c'était ton coup de cœur, les dernières semaines. Philosophie de la vie, quel est ton pourquoi le matin ?
- Speaker #1
Mon pourquoi le matin ? Je dirais que ma philosophie de vie, c'est le partage, la solidarité et le plaisir.
- Speaker #0
Est-ce que tu as des rituels en tant que femme ? Qui te permettent à la fois de conserver ton énergie, de...
- Speaker #1
De faire de la gym le matin, c'est ça ? Par exemple ?
- Speaker #0
Oui, si tu veux. Oui, je ne sais pas.
- Speaker #1
Oui, c'est ce moment où je vais pouvoir m'occuper de moi et justement démarrer en pensant à moi un peu. Très bien. Et garder de la tonicité. Comme je te disais, ma grande angoisse toujours, c'est la perte d'énergie. J'ai toujours peur que la cagne me gagne. Est-ce que tu connais cette expression ? Oui. Donc, il faut que je reste en action tout le temps. Ça, c'est pas ma philosophie, mais c'est mon tempérament.
- Speaker #0
Donc, tu déconnectes rarement ?
- Speaker #1
On déconnecte rarement en étant sur place, à part quand tu as le grand plaisir de partager le parc avec des amis ou de faire des choses où tu te poses. Mais je pense que tu déconnectes vraiment en te sortant de... de cet environnement-là. Même si tu l'aimes énormément, mais tu es tout le temps... Tu es gardien de cet environnement, donc tu restes toujours un peu en mode veille. Et je me détends vraiment que quand j'en sors.
- Speaker #0
Donc en fait, c'est ton devoir.
- Speaker #1
C'est aussi un devoir. C'est aussi un devoir, oui, oui. Mais un bienveillant devoir. C'est de la bienveillance, c'est de la...
- Speaker #0
Et comment, dans les moments de doute, ou des moments qu'on pourrait qualifier de difficiles, sur le vignoble, des décisions à prendre, le climat qui modifie un peu ce que tu avais envisagé, qui tu peux compter finalement ? Tu es seule chef d'orchestre, comment fais-tu ?
- Speaker #1
Déjà, j'ai eu la grande chance de ne pas avoir connu de gros gros aléas. Ni d'avoir perdu une production à cause de la grêle, ni avoir perdu totalement une production à cause de la grêle, ni avoir été gelée. Donc déjà, j'ai été assez préservée. Après, je travaille beaucoup. Les Vinifi m'apportent énormément dans leur énergie, dans tout, même si je suis moins communicante qu'elles. Mais recevoir leur message, comme toute cette période-là, ça a été très enrichissant. Moi, je travaille toujours. Je te dis, le partage est quelque chose d'important. Donc, je travaille toujours en réseau. Que ce soit avec les vignerons du coin, où il y a toujours des groupes de lutte raisonnée, des choses comme ça, ou d'observation sur le vignoble, j'aime beaucoup échanger et je suis beaucoup en réseau avec les autres. Donc je ne suis pas la seule à avoir des problématiques et ça m'aide d'échanger énormément. Là, j'ai vu que j'avais quelques tâches de milieu, je vais appeler deux, trois copains en leur disant « allez, moi j'ai vu ça » . Alors les hommes ne réagissent pas pareil. Dès que tu as un problème, ils n'échangent pas trop. Mais moi, j'ai toujours besoin d'échanger. parler de Vider mon sac. Ça m'aide énormément. Le réseau m'aide énormément. Je travaille en équipe. J'ai besoin d'échanger beaucoup.
- Speaker #0
Donc, les Vignes et Filles, c'est l'association de plusieurs vigneronnes en langue d'oc, Roussillon. C'est une superbe association. On en reparlera dans un autre podcast avec grand plaisir, parce que c'est des femmes toutes inspirantes. Ça, j'adore. Je voudrais revenir justement sur la femme et la relation mère-fille que tu as pu entretenir. Parce qu'en fait, il y a trois générations de femmes. Donc il y a un moment quand même où la femme n'est pas forcément émancipée à l'époque. C'est plutôt l'homme qui prend le dessus et qui dirige. Et j'aimerais bien voir cette histoire. De ces deux générations, puis toi la troisième ?
- Speaker #1
Alors les femmes, on va dire qu'il y a une conjoncture qui fait qu'à un moment donné, il y a une première génération de femmes qui s'installent, qui reprennent dans les héritages successifs. Il s'avère que dans la famille de mon père, souvent les femmes sont restées vieilles filles. Les hommes se sont mariés, ont fait des enfants. Mais il y a eu deux générations sur lesquelles les femmes de la famille Etienne sont restées des demoiselles Etienne. Donc, elles se sont retrouvées dans une famille où il y avait trois enfants. Elles ont hérité d'un des domaines, donc les deux sœurs. C'est plutôt subi, là. Elles n'ont pas la connaissance, elles n'ont pas la passion et elles le reprennent. Donc, après, c'est la génération.
- Speaker #0
Il y a des employés, quand même.
- Speaker #1
Il y a un régisseur.
- Speaker #0
Il y a un régisseur. OK. Donc, production de vin, etc.
- Speaker #1
Production de vin, mais comme tu l'as vu, dans une période, à ce moment-là, une période où la viticulture a besoin de se poser des questions et d'essayer de réfléchir à l'avenir et de voir comment on fait évoluer le produit, qu'elles n'ont pas su se poser et prendre le virage. Donc, à un moment donné, elles se sont trouvées dans une situation économique très embarrassante et c'est à ce moment-là où elles ont proposé à mon père de reprendre le domaine.
- Speaker #0
Donc il a repris. Et comme il avait une autre activité, maman, elle, a trouvé sa place en reprenant des études et s'est occupée de tout ce qui était vinification, mise en bouteille.
- Speaker #1
Donc ta maman reprend les études.
- Speaker #0
Oui, tout à fait. Et sort de son rôle de femme au foyer ou prend un autre statut. Et ça l'a beaucoup valorisé, bien sûr. Mais elle l'a fait avec... Elle a rencontré plus de difficultés à être une femme. elle dans son rôle de vinificatrice et vigneronne que moi, parce que je passais sûrement après elle. Mais mes grands-tantes ne mettaient pas les pieds à la cave. C'est ce que maman, elle a mis les pieds à la cave et bien sûr, elle allait faire tourner le vin.
- Speaker #1
C'était ça,
- Speaker #0
effectivement.
- Speaker #1
Le dicton.
- Speaker #0
C'était le chat noir. Mais voilà, après maman, c'est le début de l'onologie qui arrive en cave, c'est le début des mises en bouteille, c'est le début des levures, c'est le début de l'onologie.
- Speaker #1
Et elle expérimente ?
- Speaker #0
Elle n'expérimente pas, elle commence à travailler. Du reste, les premières années où Jean-Anatoly a travaillé, que tu connais, il a fait ses premières armes avec maman, qui commençait à faire ses vinifs aussi, de son côté, donc ils se sont mutuellement... accompagnée, je pense qu'elle a connu de très beaux moments maman. Oui. Elle dormait dans la cave de toute façon pour se réveiller ses cuves. Oui.
- Speaker #1
Elle était complètement investie.
- Speaker #0
Complètement. Et puis elle avait un rôle à tenir. Il fallait qu'elle soit... Surtout qu'elle fasse bien parce que mon père... Il fallait qu'elle réussisse.
- Speaker #1
Donc il y avait une sacrée pression là aussi.
- Speaker #0
Oui, oui, oui, sacrée pression. Puis elle était surtout avec les deux majordomes, les deux grands-tantes qui contrôlaient bien que... Si elle s'était trompée, je pense que ça aurait été cuisant pour elle.
- Speaker #1
Comment tu voyais ta maman à cette époque ? Est-ce que tu la voyais vraiment une femme investie, leader, avec envie de développer, visionnaire aussi ? Oui,
- Speaker #0
c'est quelqu'un de super dynamique. Même si ça a été compliqué pour moi au début de travailler avec elle, après c'est quelqu'un qui m'a toujours, même aujourd'hui quand elle a 85 ans, qui est à mes côtés et c'est quelqu'un, comme elle a fait avec mon père, qui sait te donner l'envie d'avancer. On ne baisse pas les bras, on y va, on est là. Et puis tu n'es pas seule, je suis là et tu avances.
- Speaker #1
Never give up.
- Speaker #0
On n'abandonne pas. Oui, mais dans le côté dynamisant, énergisant, réconfortant. Même si on a eu beaucoup de maux. et de clash au démarrage parce que je lui prenais un petit peu sa place en installant. Je prenais un peu un statut qu'elle aurait aimé avoir. Donc, ça a créé un petit peu de friction. Mais très vite après, on a su s'accommoder de travailler ensemble.
- Speaker #1
Il y avait un bel échange entre vous. Vous arriviez à une belle communication.
- Speaker #0
Avec des oui, avec des non.
- Speaker #1
Parce que tu arrives à un moment aussi où quand même, pareil, l'onologie évolue vachement, tout évolue.
- Speaker #0
Mais bon, j'avais la grande chance d'avoir ma partie, c'était la partie véticole, où là, je ne marchais pas trop sur ces plates-bandes et je pouvais m'exprimer. Et donc, petit à petit, elle a cédé le pas.
- Speaker #1
Combien d'années ensemble vous avez travaillé ?
- Speaker #0
Je pense qu'on a dû faire une bonne quinzaine d'années, oui. Puis c'est un beau partage aussi, c'est un beau partage.
- Speaker #1
C'est un héritage en toute réalité. Oui, oui, oui. C'est un rétérité.
- Speaker #0
Oui, oui, mais même aujourd'hui, je veux dire, on continue à avoir ces relations. Elle est toujours investie sur la Dourny, à fond.
- Speaker #1
La famille. Tu es vigneronne, tu t'installes jeune agricultrice, donc tu as tes enfants. Tu gères une exploitation, tu es chef d'orchestre d'équipe. Comment, Véronique Etienne, comment toi tu fais en tant que femme ?
- Speaker #0
Je pense que c'est là où on va mettre un bémol, c'est sur la famille. Comme je t'ai dit, j'ai embrassé la terre, mais je pense que je me suis un petit peu mariée avec Adourni. Plus que... Un peu... Je n'ai pas su peut-être préserver une part plus personnelle. Ça a toujours été ma priorité. Et donc, là-dessus, je peux mettre un petit bémol sur ma réussite familiale, même si je garde de très bons termes avec l'ensemble de ma famille, mon mari, mon ex-mari, et avec mes enfants, ça va bien. Mais je pense que je n'ai pas su garder cette cohésion parce que j'étais trop... On m'a toujours dit, toi, c'est que la journée qui compte. C'est un petit peu ça que j'ai un peu, peut-être, pas su laisser assez de côté.
- Speaker #1
Aujourd'hui, donc, 28 ans après, est-ce que, quand tu regardes en arrière, justement, au moment où la jeune agricultrice a signé et s'installe, ton aboutissement ?
- Speaker #0
C'est quand que ça s'est abouti vraiment ? C'est quand que tu peux dire, oui, j'ai... C'est fini ou je peux dire stop. Après, ce que je veux dire, c'est que ça m'a permis de me réaliser moi aussi au travers de tout ça. Et ça, c'est quand même déjà pas mal d'avoir trouvé sa voie, sa passion. Toujours, tu es toujours dans la quête de changer quelque chose. C'est un perpétuel recommencement. C'est une perpétuelle avancée, je veux dire. Tu es toujours à essayer de mieux faire, à essayer de mieux comprendre. Et une vie ne suffit pas pour maîtriser à fond ce métier-là. Je veux dire, tout est passionnant, tout est intéressant. Tu as envie de tout essayer, tu as envie de tout recommencer. Bon, même si au niveau des vignes, tu les plantes pour quelque temps. Mais il n'y a aucune année où tu peux te dire, « Bon, cette année, j'en ai marre de refaire encore ce truc-là. » Tu n'en as jamais assez. Tu n'en as jamais marre. Bien qu'à chaque fois, il faut que tu aies la même énergie pour dire « Bon, la page est bonne, je recommence. » Mais c'est pour tout le monde pareil.
- Speaker #1
Mais aujourd'hui, tu es satisfaite de ce que tu as mis en place ?
- Speaker #0
Oui, oui, tout à fait. Tout à fait. D'avoir pu convertir le domaine en bio, même de continuer à avancer sur d'autres choses, bien sûr. Bien sûr. D'avoir fait évoluer les choses, oui. Mais même d'avoir… Et puis aujourd'hui, d'avoir une certaine reconnaissance de tes pairs. C'est-à-dire que… Comme au démarrage, je te disais, c'était compliqué d'être la fille d'eux ou de reprendre un joli domaine. Tout le monde t'attend en tournant, mais après, aujourd'hui, être reconnue comme la Dornier, c'est toujours un joli domaine bien entretenu, c'est une belle propriété, c'est bien mené. C'est des choses qui me satisfont, oui. Ça, ça me satisfait. Et puis, ça me satisfait que les enfants aient toujours envie d'y venir. Ça me satisfait de voir qu'ils... qui s'intéresse à ça. Même Marie, si elle est très distante, elle a quand même fait deux étés à la Maison des Vins, a travaillé, donc elle connaît un peu les vins de Saint-Chignan, où elle se sensibilise aussi. C'est jamais perdu, cette sensibilité à ce métier-là.
- Speaker #1
Quel mot de l'univers du vin définit le mieux un homme ?
- Speaker #0
Ça, c'est la question du jour. Quel mot dans l'univers du vin définit le mieux un homme ? La puissance. La force. La force. La force.
- Speaker #1
Et la femme ?
- Speaker #0
L'élégance.
- Speaker #1
Jolie. J'aime croire à cette évidence que les femmes marquent notre époque. Avec ton expérience, qu'ont-elles apporté à l'univers du vin ?
- Speaker #0
Je pense qu'elles le désacralisent un petit peu. Je pense qu'elles apportent aussi... Le vin, comme les cigares, n'auraient été réservés qu'à la partie à la jante masculine. Du reste, la femme faisait la cuisine et c'était toujours monsieur qui descendait au cellier chercher une bouteille de vin. Aujourd'hui, les femmes, déjà dans la part de l'éducation, dans la dégustation, la femme dans le vin montre aux femmes qu'on peut associer les accords méhé-vin, les choses comme ça. Par notre façon de parler et notre façon de communiquer, je pense qu'on désacralise le côté très technique et technologique. On dirait qu'on fait des choses absolument mystérieuses. Et je trouve qu'on est beaucoup plus simple. Donc, on a apporté de l'accessibilité, je pense, au vin. Je ne sais pas si tu as remarqué, quand tu discutes, j'ai fait une dégustation avec, on était trois ou quatre. en Zoom il y a trois jours, c'est flagrant que les hommes parlent beaucoup plus de technique quand ils présentent un vin. Et nous, on va être beaucoup plus dans une notion d'expliquer un environnement, un plaisir, un partage. Et je compare toujours ça à un homme qui fait, une femme qui fait la cuisine, a souvent tendance à dire à ceux qui sont autour de toi, tu veux bien goûter pour voir si ce n'est pas trop salé ou assez épicé. Est-ce qu'il ne manquerait pas un peu quelque chose ? Et l'homme par contre, s'il aime épicer, il va mettre la dose d'épices. Alors je fais une généralité, tous les hommes ne sont pas comme ça. Mais il va plutôt avoir tendance à épicer son plat à sa façon. Et tu aimes ou tu n'aimes pas. C'est un petit peu la différence que je ressens.
- Speaker #1
C'est intéressant, oui. C'est sa marque de fabrique, sa signature.
- Speaker #0
Oui, alors que nous, on va peut-être être un peu plus dans le...
- Speaker #1
Dans le plaisir partagé, est-ce que ça va plaire ?
- Speaker #0
Oui.
- Speaker #1
Le retour ? Oui. C'est très bien.
- Speaker #0
C'est souvent ce qu'on te dit, alors un vin fait par une fin. C'est un peu ça la différence.
- Speaker #1
Est-ce que toi tu aimes qu'on te dise le Château-la-Dournie c'est un vin de femmes ? Est-ce que cette expression te gêne ?
- Speaker #0
Un homme fera des vins à la Dournie, on aura peut-être une pâte différente, mais j'ai un terroir qui s'y apporte beaucoup de finesse, d'élégance naturellement et de fraîcheur. Et on n'est pas sur l'opulence, on pourrait mettre plus d'opulence, mais naturellement on a des choses assez fraîches, assez légères. pas légère, mais oui, dans cet équilibre un peu aérien.
- Speaker #1
Léger est toujours une belle connotation aussi.
- Speaker #0
Oui, mais c'est souvent, on va dire, élégance, parce qu'on a des structures de tannin sur les schistes qui sont toujours assez souples. Et donc, c'est en ça qu'on va dire plus féminin. Mais je pense que ce serait un homme qui le ferait, il y aurait la même élégance, et on pourrait dire que c'est féminin aussi.
- Speaker #1
On va terminer ce podcast avec des notes légères. Alors, est-ce que tu as une playlist musique ?
- Speaker #0
Moi, j'écoute que de la musique de Jones.
- Speaker #1
Il fait top, ça.
- Speaker #0
Pharrell Williams, « Bi à pied » .
- Speaker #1
Oui, top.
- Speaker #0
Et après, comme celle auquel je pense beaucoup en ce moment et que j'écoute pas mal, c'est « Small Town Boy » qui a été repris par Arnaud. Rebotini pour 150 battements par minute, qui correspond à une musique qui était des années 80, dans ces années sida justement, mais qui a été super bien reprise. Et ce qui est bien, c'est quand tu as ces morceaux que tu écoutais toi quand tu étais jeune, remixés aujourd'hui, et que tu as tes gamins qui arrivent et qui disent « j'ai écouté un truc » . Je suis genre « bah,
- Speaker #1
tu connais ? » . Oui, un peu. Est-ce que tu as un livre du moment ?
- Speaker #0
Alors, le livre qui m'a vraiment impressionnée cette année, c'était L'art de perdre, de Alice Zeniter. Est-ce que tu as lu ce livre ?
- Speaker #1
Je n'ai pas lu ce livre. Les jeunes murs, c'est thématique, L'art de perdre.
- Speaker #0
L'art qui rentre en France, et c'est cette génération... qui est déraciné de son propre pays pour venir habiter en France. C'est les générations 1 et c'est au travers de la génération 3. C'est la génération 3 qui dit l'art de perdre, de perdre ses valeurs, de se fondre dans un nouveau code social. C'est un très très beau livre, sur la résilience aussi. On tourne toujours autour de ça, mais c'est vraiment un magnifique livre.
- Speaker #1
Très bien. Écoute, Véronique, je te remercie pour cet entretien, cet après-midi très enrichissant. Je me suis régalée. Merci. Voilà, c'est la fin. Toute ma gratitude à mon invité et à vous, chers auditeurs. Pour faire vivre ce podcast, pensez à partager, liker, commenter. Ceci est un podcast natif, indépendant et libre. Je compte bien l'étoffer par de nouvelles rencontres et aussi et surtout grâce à vous, chers auditeurs, chers followers. Et si Dionysos était une femme ? A très vite pour de nouvelles écoutes.