- Speaker #0
Bienvenue dans la dernière partie du podcast Socrate dans ma boîte, spéciale rentrée. Alors on se retrouve cette fois avec Flora Bernard. Bonjour Flora.
- Speaker #1
Bonjour Elodie.
- Speaker #0
Sociologue de formation et aujourd'hui présidente de l'agence de philosophie TAE, tu accompagnes les entreprises et les managers à redonner du sens à leurs actions. Dans la continuité de tes 15 années d'expérience en développement durable et éthique, tu aides avec tes collaborateurs. Chaque membre de vos entreprises clientes a pensé les enjeux éthiques du travail. Et si j'ai pensé à toi pour cette seconde partie plus pratico-pratique sur le thème de la rentrée, c'est parce que tu es une fervente adepte de l'approche stoïcienne appliquée. Quelle place, aujourd'hui, le stoïcisme a dans ta vie d'entrepreneur, Flora ?
- Speaker #1
Je dirais que le stoïcisme a une place à la fois dans ma vie d'entrepreneur, mais dans ma vie tout court. Je l'ai découvert il y a un peu plus de dix ans, enfin découvert de manière un peu plus approfondie il y a dix ans, quand j'ai rencontré Massimo Piliucci, qui est un philosophe américain qui enseigne aux Etats-Unis et qui essaye de remettre au goût du jour la philosophie stoïcienne. Et moi ce qui m'intéresse dans cette approche-là, c'est précisément cette ambition d'aider chacun à mieux vivre sa vie. Donc depuis dix ans... J'écris des articles sur le sujet et comment cette philosophie m'aide à mieux vivre ma propre vie, m'aide à prendre des décisions. J'interviens dans des colloques et je participe à des podcasts comme celui de ce matin.
- Speaker #0
Merci d'être là avec nous. Est-ce que tu peux nous préciser pourquoi est-ce que tu as, alors je ne sais peut-être pas choisi, je ne sais pas, en tout cas pourquoi tu t'es tournée plus particulièrement vers cette approche philosophique-là ?
- Speaker #1
Quand j'ai découvert la philosophie stoïcienne, elle m'a semblé être à la fois théorique et pratique. Et c'est ça qui m'a intéressée. Théorène, en grec, ça veut dire voir. Et donc, la philosophie stoïcienne a de ça de particulier, qu'elle éclaire l'action et en même temps, il y a un certain nombre de pratiques très concrètes qui permettent de vivre. Ce qui m'intéresse tout particulièrement, c'est que c'est une philosophie qui permet de regagner du pouvoir d'agir et donc de ne pas subir, de redevenir. acteurs. Un des préceptes fondamentaux du stoïcisme, c'est d'arriver à distinguer ce qui dépend de nous et ce qui ne dépend pas de nous. Et ça, c'est un exercice qui est beaucoup plus compliqué que ça en a l'air. L'énoncé est très simple, mais de manière très spécifique, quand on vit des situations compliquées, c'est pas évident de le faire. Mais c'est précisément ça l'intérêt du stoïcisme, c'est d'exercer son discernement, sa capacité de jugement, de prendre de la distance par rapport à ses représentations. Pour justement se demander sur quoi je vais mettre de l'énergie et sur quoi je vais lâcher.
- Speaker #0
Alors justement, on en a beaucoup parlé avec Olivier de cette fameuse distinction entre ce qui dépend de nous, ce qui ne dépend pas de nous. Et quand on a préparé ce podcast toutes les deux, Flora, tu as évoqué le fait que ça permet de replacer notre responsabilité au bon endroit. Oui,
- Speaker #1
en fait, cette distinction, elle n'est pas simple à faire. Et ce qu'on a tendance à faire dans la vie quotidienne, c'est se sur-responsabiliser sur des choses qui ne dépendent pas de nous, et donc mettre énormément d'énergie et de temps et d'émotions et d'agacement sur des choses sur lesquelles on n'a absolument pas la main. Et à contrario, on a tendance à se sous-responsabiliser sur ce qui dépend vraiment de nous. Et qu'est-ce qui dépend vraiment de nous ? C'est notre capacité. à émettre des jugements éclairés et à faire fonctionner notre raison, nos représentations, enfin accepter ou pas nos représentations spontanées. Et donc c'est ça, cette ligne de crête sur laquelle il s'agit d'être, c'est de remettre sa responsabilité au bon endroit pour précisément accorder son temps et son énergie aux bonnes choses. Il me semble que la philosophie stoïcienne, c'est une philosophie qui est particulièrement pertinente par temps de crise. Au moment où où on est confronté à des situations compliquées, tant sur le plan personnel que professionnel. Le monde est devenu extrêmement complexe. On subit parfois les effets de choses qui se sont passées à l'autre bout du monde. Et donc, je pense que c'est une philosophie qui permet de gagner en discernement dans ces situations complexes. Par exemple, pendant le Covid.
- Speaker #0
Oui, alors justement, bon exemple, pendant le Covid, qu'est-ce que vous avez fait à l'agence ? Comment toi, tu as vécu cette situation ? Est-ce que... Tu as fait appel au stoïcisme pour la dépasser ?
- Speaker #1
Oui, ça c'est sûr que le stoïcisme m'a énormément aidée. Si je me souviens bien, 2020, c'était un peu plus de 4 ans maintenant. Je me souviens très bien du jour où on a commencé à être confinés. Et comme nous, notre métier, c'est d'animer des ateliers philosophiques. Dans les entreprises en présence, tu te doutes bien que toutes nos interventions ont été annulées. Et donc on a à peu près... On offre ! C'est ça. Oui, c'est ça. Du jour au lendemain, en fait. Donc on a à peu près un tiers de notre chiffre d'affaires annuel qui s'est envolé en fumée. Alors au début, avec mon associé Marion, on s'est dit Chouette, on va avoir du temps pour écrire On a toujours plusieurs projets d'écriture en cours. Et puis au bout d'une semaine, j'ai une cliente qui m'a appelée en me disant bon, est-ce que vous allez faire des ateliers en visio ? Alors nous, à l'époque, on était très méfiante vis-à-vis des ateliers philosophiques en visio, donc on a commencé par répondre non. Et puis en fait, là où le stoïcisme m'a aidée, c'est que ce qui ne dépendait pas de moi, c'était le fait d'être confinée, le fait que tous nos clients aient décidé d'annuler nos interventions. Mais ce qui dépendait de moi... C'est de décider ce qu'on allait faire de ce temps. Est-ce qu'on allait juste rester là à attendre et se plaindre ? Ou est-ce qu'on allait essayer d'en faire quelque chose ? Et donc, ce qu'on s'est dit, c'est, voyons s'il y a quelque chose d'intelligent à faire en atelier philosophique, en visio. Et sous quelles conditions est-ce qu'on peut produire quelque chose de qualité ? Donc, voilà, on est entrepreneur. Donc, en fait, on a essayé de... structuré et de proposer des ateliers philosophiques en visio mais qui avaient du sens pour nous et qui permettaient à chacun de pouvoir avoir un espace de réflexion sur ce qui était en train de se passer à ce moment là. Ce qui dépend pas de nous, c'est un certain nombre de facteurs extérieurs, mais ce qui dépend de nous par dessus tout, c'est d'essayer.
- Speaker #0
Alors ça vient aussi faire écho à quelque chose que tu disais dans une de tes interventions que j'ai écouté avec attention sur s'interroger régulièrement sur quelle personne j'ai envie d'être dans la vie et quel professionnel J'ai envie d'être. Alors là, on parle beaucoup de la rentrée, c'est le sujet et c'est le thème un peu prétexte de ce podcast. Mais en réalité, on devrait s'interroger un peu tout au long de l'année. Comment j'ai envie de prendre les choses et qui j'ai envie d'être ?
- Speaker #1
Oui, les stoïciens ont eu toute une réflexion sur les rôles qu'on tient dans la vie. Et pour pouvoir bien vivre, essayer d'être autant que faire se peut, en cohérence entre la manière dont on souhaite incarner ce rôle. et concrètement comment on l'incarne. Et donc ces rôles, et je pense qu'à la rentrée, il y a tous nos rôles qui arrivent ensemble. Il y a le rôle du professionnel, il y a le rôle du parent qui a envie d'accompagner de manière correcte la rentrée de ses enfants. Il y a le rôle de conjoint, il y a le rôle d'associé, il y a le rôle de salarié, il y a le rôle d'ami. En fait, on tient plein de rôles dans la vie et pour... pouvoir bien vivre, puisque c'est quand même ça l'objectif, c'est de pouvoir vivre de manière vertueuse, c'est-à-dire en accord avec une certaine idée qu'on se fait de ce rôle-là. Et je pense que cette réflexion-là, en tout cas moi, elle m'a beaucoup aidée dans un certain nombre de mes rôles, notamment mon rôle de mère, par exemple, vis-à-vis de ma fille. Je trouve qu'en situation, quand il se passe des choses, de pouvoir se retenir, par exemple, d'être en colère, ou même, en tant que professionnel, de se retenir, de réagir trop vite. c'est intéressant d'avoir en tête le rôle que j'ai, enfin, cette professionnelle que j'ai envie d'être. En termes de quel professionnel j'ai envie d'être, je trouve que c'est intéressant de s'interroger sur les relations qu'on a envie d'avoir, les relations professionnelles qu'on a envie d'avoir, le type de service qu'on a envie de rendre. Et si on dit qu'on ne maîtrise pas le résultat, dans ce cas-là, ce qu'on maîtrise, c'est les moyens mis en œuvre, et les moyens mis en œuvre, c'est l'énergie que je vais mettre dans la relation. Qu'est-ce que je donne ? Est-ce que j'ai envie d'être dans une relation généreuse ? Est-ce que j'ai envie d'être dans une relation… Voilà, à chacun d'entre nous de qualifier le type de relation dans lesquelles on a envie d'être et de prendre soin de ça. Ne vis pas comme si tu allais vivre des milliers d'années. Ton destin est suspendu au-dessus de toi. Tant que tu es en vie, tant que c'est possible, deviens bon. Marc Aurel Pensez pour moi-même.
- Speaker #0
Alors revenons à toi, Flora. Comment est-ce que tu attaques, comment est-ce que tu appréhendes ce moment de la rentrée ? Comment tu t'y prends ?
- Speaker #1
Alors moi, Elodie, j'adore la rentrée. J'adore la rentrée parce que c'est vrai que c'est ce qui signe le début de quelque chose. Pour moi, le début de l'année, ce n'est pas en janvier, c'est vraiment en septembre, après une longue pause. Et puis, c'est signe de renouveau. Par contre, pour bien l'aborder... Je ne dirais pas l'attaquer parce qu'il y a déjà quelque chose du rapport de force. Mais pour bien l'aborder, déjà, je rentre de vacances quelques jours avant la rentrée officielle, en tout cas la rentrée des enfants, pour pouvoir avoir un sas à la maison, chez moi, reprendre les repères, reprendre un temps lent avant le temps qui s'accélère un petit peu quand tout le monde rentre de congé.
- Speaker #0
Tu te fais une pré-rentrée.
- Speaker #1
Je me fais une pré-rentrée. Tu soulignes un point important, c'est que tous les ans, je sanctuarise quelques jours, ou peut-être parfois une semaine, soit seule, soit avec une amie, en tout cas très petit groupe. Quelque chose où je suis en dehors de la famille ou en dehors des vacances un peu plus classiques.
- Speaker #0
Et des sollicitations extérieures.
- Speaker #1
Et des sollicitations extérieures, exactement. C'est un temps, souvent j'aime aller marcher en montagne. Ça m'arrive aussi de jeûner. Et ça, ce sont vraiment des moments de déconnexion à la fois sociaux, professionnels. C'est une déconnexion de tout, en fait. Déconnexion de la nourriture, déconnexion des activités de consommation.
- Speaker #0
Et de réflexion aussi ?
- Speaker #1
Oui, en fait, pour moi, j'essaye de revenir à quelque chose de très, très simple qui me convient très bien. C'est réflexion, lecture, écriture, sport.
- Speaker #0
Très sain.
- Speaker #1
Oui, ça c'est son... Je parle des moments de jeûne. Je ne les fais pas du tout en groupe. Je déteste, je n'aurais pas envie de faire ça en groupe, précisément parce que c'est un jeûne des relations sociales aussi, pour moi.
- Speaker #0
C'est un moment d'intériorisation.
- Speaker #1
Exactement. J'adore les gens, j'ai beaucoup d'amis, et j'adore être avec les gens.
- Speaker #0
Mais pour tout cacher, ça suffit.
- Speaker #1
En fait, j'ai besoin, tu parlais de comment on fait pour se ressourcer. Et pour moi, ce sont ces moments-là dans lesquels je peux me ressourcer. Et justement, elle est... relire des préceptes stoïciens parce que je trouve ça très compliqué d'avoir des routines quotidiennes mais par contre des routines régulières ça c'est possible et donc il y a des moments qui sont plus propices à justement relire des textes se demander si notre vie est en accord avec la vie à laquelle on aspire voilà ce sont des moments pour réfléchir à toutes ces choses là mais une rentrée qui va être très très très dense moi je le vis un peu comme un tsunami
- Speaker #0
Mais pour éviter que cette vague nous engloutisse, avoir pris le temps en amont de se rappeler un petit peu des guidelines clés, ce n'est pas au moment où on est sous la vague qu'on va se mettre à sortir son manuel d'Epic Tête. En tout cas, c'est plus compliqué.
- Speaker #1
Pourquoi pas en même temps ? On prend une douche tous les matins. Et pourquoi est-ce qu'on ne passerait pas cinq minutes à lire Epic Tête tous les matins ? En fait, c'est une question d'habitude. Et quand bien même la rentrée est un symbole de sollicitation intense, voire même de sur-sollicitation, Pourquoi est-ce que justement dans ces moments-là, on ne ferait pas de la place pour ce qui nous fait du bien ? Et je pense que ça n'a pas besoin de prendre une heure par jour. En tout cas, la rentrée nous fait réfléchir à un élément qui me semble essentiel, c'est notre rapport au temps. Comme tu le disais, on a l'impression qu'une vague vient nous recouvrir, ou on a l'impression que tout d'un coup nos enfants nous sollicitent, les clients reviennent. Et donc, comment faire ? pour avoir un rapport au temps plus apaisé. Et donc, être moins affairée. C'est une question qui me taraude parce que je suis curieuse d'énormément de choses. J'ai plutôt tendance et plutôt envie de dire oui aux sollicitations qu'on me fait. Et puis, il m'arrive de me sentir débordée. Or, quand j'ai quitté le monde des grandes entreprises, je me suis promise de plus jamais dire je suis débordée, je suis sous l'eau, j'ai la tête dans le guidon. Parce que finalement, notre temps, s'il y a une chose qui nous appartient dans la vie, c'est notre temps. Rien d'autre ne nous appartient vraiment. Et donc, je me suis fixée comme règle, mais ça, on le retrouve chez Sénèque, qui a écrit un très bel ouvrage sur le rapport au temps, de la brièveté de la vie, et qui nous dit qu'en fait, notre temps nous appartient et donc c'est à nous d'en faire bon usage. Il dit la vie n'est pas courte, c'est nous qui la rendons courte, parce qu'on s'affaire dans tous les sens sur des choses plus ou moins utiles, plus ou moins futiles.
- Speaker #0
Oui, très passionnant, un gros point de vigilance. Alors comment on fait justement pour faire bon usage de ce temps ?
- Speaker #1
Tu sais que Sénèque nous conseille de faire un exercice d'écriture à la fin de la journée, pour faire le point sur la journée. Je trouve que c'est assez intéressant, quand bien même on n'écrit pas. Mais de se dire à la fin de la journée, à quoi est-ce que j'ai vraiment dit oui ? À quoi est-ce que j'ai dit non ? Est-ce que les choix que j'ai faits en disant oui sont des choix conscients ? Ou est-ce que je me suis laissée entraîner par le désir de l'autre ? Par la reconnaissance que ça allait m'apporter ? Tu vois, enfin, on peut dire oui à des sollicitations pour tout un tas de raisons. Et donc, le conseil de Sénèque, c'est à la fin de chaque journée de se dire... Est-ce que j'ai eu le sentiment dans les choses que j'ai faites aujourd'hui que c'était vraiment mon temps et que ce n'était pas quelqu'un d'autre qui me prenait mon temps ? Est-ce que je n'ai pas gâché mon temps ou est-ce que je n'ai pas perdu mon temps aujourd'hui ?
- Speaker #0
C'est passionnant ce point et on va revenir plus précisément après sur des outils et des pratiques stoïciennes qu'on peut à la rentrée mettre en place. Moi, je parlais d'une expérience personnelle de journaling, parce que c'est un petit peu aussi ça qu'aujourd'hui on appelle ça journaling, mais que les stoïciens évoquaient. C'est le fait de prendre comme ça parfois quelques secondes, minutes pour s'arrêter dans sa vie, dans son flot. et de regarder en arrière, se questionner exactement ce que tu disais. J'ai fait une formation de quatre mois avec Milena, qui est une experte de Notion. Alors, pour ceux à qui ça parle, c'est un outil de gestion de projet qui est très puissant, qui permet plein de choses, qui s'appelait Entrepreneur Productif. Et tout au long de cette super formation, je vous mettrai un petit lien dans la description si ça vous intéresse, elle partage... Un dispositif qu'elle a entièrement développé. Et au sein de ce dispositif, il y a quelque chose d'intéressant pour vraiment gérer l'intégralité de sa vie d'entrepreneur. Et on peut même le développer aussi pour sa vie perso. Mais il y a ce petit rendez-vous à soi-même quotidien qui permet de faire un petit point sur sa journée, les enseignements. Alors après, on se met les questions qu'on veut. Donc ça peut être, est-ce que j'ai eu bien alloué mon temps à ce qui était important pour moi ou pas ? ça peut être est-ce que j'ai bien su distinguer ce qui dépend de moi, pas de moi, soit de se faire ces petits points sur ce qui compte. Et puis en fin de semaine, un temps un petit peu plus long pour regarder en arrière sa semaine. Et puis à la fin du mois, un temps encore un petit peu plus long où on reprend ces petites notes hebdo, etc. Et on prend toujours un petit peu plus de recul. Alors, comme tu disais, ce n'est pas forcément à faire tout au long de la vie, tout au long de l'année, mais sur des périodes. Je sais que moi ça m'a aidé à un moment, je l'ai fait pendant plusieurs mois et j'ai vraiment eu l'impression d'avancer sur ce qui comptait pour moi.
- Speaker #1
Ah oui, je pense que l'écriture est fondamentale pour permettre de faire retour sur soi. C'est un exercice thérapeutique qui a été pratiqué depuis l'Antiquité et qui porte ses fruits encore aujourd'hui. La difficulté c'est de l'intégrer dans son quotidien. Et moi, je l'utilise dans des moments un peu spécifiques. Je ne le fais pas au quotidien, mais de manière ponctuelle, par rapport à certaines situations que je trouve difficiles. Il y a une autre pratique que je trouve intéressante, c'est celle du début de la journée. Alors, soit c'est à travers un exercice d'écriture, soit juste un temps à soi, en fait. Moi, mon fils part à l'école à 8h20. Et donc, entre 8h20 et 9h, il y a cet espace où la journée n'a pas vraiment encore commencé. Enfin, on peut la faire commencer à 8h30 si on veut. Mais en tout cas, moi, je prends cette demi-heure d'espace justement pour lire quelque chose qui n'a rien à voir avec mon travail ou peut-être écrire ou tout simplement m'allonger sur le canapé, regarder le ciel à travers ma fenêtre et rêvasser.
- Speaker #0
C'est tellement rare et précieux ça.
- Speaker #1
Voilà, de réintégrer des petits moments comme ça dans la journée. Je trouve que le début de la journée, il est intéressant pour ça. Et c'est aussi une manière de visualiser. Ça, c'est aussi encore un exercice stoïcien, la visualisation. de la journée à venir. Et c'est, voilà, on ne sait jamais exactement dans le détail ce qui va se passer dans sa journée, mais on a quand même des agendas. Et donc, on sait qu'on a un certain nombre de rendez-vous. On sait qu'on va devoir faire un certain nombre de choses. Et donc, quelle énergie et quelle couleur on a envie de donner à ce moment ?
- Speaker #0
Et ça, ça se décide. Tu vois, je vois depuis quelques années, moi j'ai la chance d'habiter à la mer maintenant. Et il y a quelques mois, j'ai pris cette décision difficile d'emmener ma grande au collège. Et puis, depuis... plus rentrer à la maison parce que les petits, eux, vont à l'école un petit peu plus tard. Je rentrais pour 20 minutes. Mon mari les emmenait à l'école. Mais ces 20 minutes, ils me sautaient dessus, ils me submergeaient. Ensuite, j'attaquais avec la journée de boulot et j'étais... Voilà, j'avais l'impression de faire mon devoir de maman que d'être là auprès d'eux pendant les 20 minutes du matin, alors que ça ne me faisait pas du bien à moi ni à eux, puisque c'est un cercle vicieux. Et finalement, depuis quelques mois, je dépose ma grande au collège et je vais marcher au bord de la mer pendant ces 20 minutes-là. Et c'est quelque chose où... C'est toujours un vrai exercice de soi à soi. Parce que je me dis, en septembre, il y aura plein de trucs. Je vais peut-être le faire sauter, ce truc. Non, justement. Peut-être qu'il faut absolument s'accrocher à le garder. Parce que moi, je sais que ça me fait un bien fou. C'est entre guillemets que 20 minutes. Mais alors après, à la journée, elle est...
- Speaker #1
Mais tu vois, ça revient à ce qu'on disait tout à l'heure. On est quand même aussi un peu responsable de cette surcharge. Bien sûr. Cette surcharge,
- Speaker #0
elle ne nous tombe pas dessus. On a du la subir. Mais c'est toi qui me l'as redit quand on préparait. À un moment donné, on le décide. Personne d'autre. On est là pour dire, voilà, tu vas faire ça, tu vas faire ça, tu vas faire ça.
- Speaker #1
En fait, l'affairement, le fait d'être affairé, le fait d'être occupé, est aussi une décision qu'on prend. Alors, on a l'impression de subir, mais en réalité, si on y réfléchit bien, ce sont des choix qu'on fait, des choix de vouloir contrôler et de ne pas vouloir déléguer, par exemple, ou responsabiliser d'autres personnes pour faire ce qui nous pèse. Je pense que c'est aussi important de savoir prendre ce temps à soi, et en particulier au moment de la rentrée, parce qu'en tant qu'entrepreneur, on prend des décisions. On prend des décisions...
- Speaker #0
Beaucoup, des petites, des moyennes, des grosses.
- Speaker #1
Exactement, et des décisions qui engagent notre entreprise. Et donc, il est important de se demander d'où on prend ces décisions. Et quand je dis d'où...
- Speaker #0
Le où,
- Speaker #1
ce n'est pas est-ce que je les prends à la maison ou au bureau. Ce n'est pas une question de lieu, c'est une question d'espace intérieur. De quel espace intérieur est-ce que je décide ? Est-ce que je décide à partir d'un espace intérieur encombré, pris, surchargé ? Ou est-ce que je décide à partir d'un espace intérieur où on peut trouver de l'espace, où il y a eu de la place pour la réflexion, de la place et du temps pour la réflexion ? Et ça... En tant que décideur, je trouve que tous les décideurs devraient se poser cette question. Quand j'ai des grandes décisions à prendre, des décisions qui impactent mon entreprise, qui impactent d'autres que moi, est-ce que je les prends d'un espace où j'ai pu bien peser le pour, le contre, un espace éthique, on pourrait l'appeler comme ça.
- Speaker #0
Ok, très intéressant Flora, merci. Et dernier petit focus qu'on peut faire ensemble, c'est la gestion de la colère. Alors la colère, on peut parler d'agacement. Mais en tout cas, on le sait, à la rentrée, il y a un petit peu de pression. Et ça, c'est notamment Sénèque qui a dédié un ouvrage de la colère sur cet aspect-là, qui peut nous pourrir la rentrée, parce qu'on aura beaucoup d'échanges avec des collègues, des amis, du perso, du pro, des clients, des potentiels clients, etc. Comment est-ce que je fais pour gérer ma potentielle colère ? colère ou mon potentiel agacement qui risque de grimper, grimper. Ça, c'est un deuxième outil. Je veux bien t'écouter sur cet outil pour gérer cette émotion.
- Speaker #1
Plus globalement, ce qu'écrivent les stoïciens à propos des émotions est très intéressant et peut-être juste partager avec nos auditeurs quelle est leur philosophie par rapport aux émotions, puis après revenir à la colère. L'émotion première qu'on ressent... ne dépend pas de nous. On revient à cette distinction de ce qui dépend de nous et ce qui ne dépend pas de nous.
- Speaker #0
Les premières secondes un peu reptiliennes, c'est ça ?
- Speaker #1
Exactement. Parce que ça,
- Speaker #0
c'est le corps.
- Speaker #1
Et comme on le lit dans le manuel d'Épictète, tout ce qui se passe avec le corps, au final, ne dépend pas de nous. En revanche, ce qui dépend de nous, c'est de pouvoir en faire quelque chose. Donc le sentiment qui est à distinguer de l'émotion, dépend en partie de nous. Ce que dit Sénèque à propos de la colère, c'est qu'il faut que notre intellect, notre raison, notre jugement dise oui. En fait, pour qu'il y ait colère, il faut que notre jugement dise oui à cette première émotion spontanée qu'on a reçue. Et donc toute la difficulté, bien évidemment, c'est de distinguer la première émotion spontanée du sentiment un tout petit peu plus réfléchi. Et dans le cas de la colère, Le laps de temps entre la première émotion et l'envie de réagir est très très court. C'est ça qui rend difficile le fait de se distancer par rapport à ça au moment où ça se passe. Évidemment, après coup, on se dit j'aurais pas dû etc. Et donc, le conseil de Sénèque, c'est vraiment d'être attentif. C'est aussi une philosophie de l'attention, le stoïcisme. C'est d'être attentif à ce qui vient nous émouvoir et donc nous mettre en mouvement. pour savoir si on a envie d'acquiescer ou pas à cette émotion première. Ressentir l'émotion qui vient, et donc comprendre que cette émotion qui nous arrive est le signe du fait qu'on n'a pas été respecté. C'est ça qui est intéressant dans l'analyse de la colère de Sénèque, c'est que l'émotion spécifique de la colère, c'est le signe qu'on n'a pas été respecté.
- Speaker #0
C'est ça l'information que ça passe.
- Speaker #1
C'est exactement ça l'information que ça passe. Et donc notre... capacité à juger doit pouvoir voir ça et donc après se demander dans quelle mesure est-ce que j'ai pas été respectée et bien évidemment on s'est pas senti respecté exactement et bien évidemment d'aller traiter le problème, il s'agit pas du tout d'une philosophie sans émotions d'une philosophie stoïque c'est à dire comme si tout nous passait au dessus de la tête le stoïcien n'est pas stoïque, le stoïcien il ressent les émotions mais il sait prendre de la distance par rapport à elle. Même la surexcitation, tu vois, à l'annonce, à une bonne annonce ou quelque chose qu'on attend, elle peut aussi nous entraîner. Donc, c'est une émotion plutôt positive. On a plutôt tendance à la rechercher, mais je trouve qu'il est aussi intéressant de se dire, Attends, je me réjouis, mais sans investir trop. dans cette émotion-là. Et donc, en ce qui concerne en tout cas l'émotion plus problématique, selon Sénèque, de la colère, de manière très concrète, parce que c'est difficile de le faire en situation, c'est de se retenir de réagir sur le coup.
- Speaker #0
Donc c'est l'entraînement, l'entraînement, l'entraînement quand même.
- Speaker #1
Eh oui. Et donc c'est au moment où ça se passe, il faudrait, je ne sais pas, écrire un signe au-dessus de son bureau pour dire ne réagis pas.
- Speaker #0
J'avais entendu que si on a le réflexe de boire un verre d'eau, Il faut avoir une bourde à disposition, ça permet de désamorcer peut-être.
- Speaker #1
Oui, alors chacun va trouver aussi son petit rituel qui va lui permettre de mettre cet espace entre ce qu'il ressent et puis sa réaction. Mais c'est vrai que tout ce qu'on a dit tout à l'heure sur les rôles, moi je trouve que c'est intéressant. C'est au moment où ça se passe, se dire quel professionnel j'ai envie d'être, quelle mère j'ai envie d'être, quel associé j'ai envie d'être, etc. Tu vois ? Et donc ça, je trouve que ça nous permet de dire Ah, attends, bon, je vais mettre pause. Et je vais voir comment je réagis par rapport à cette situation qui ne m'a pas convenu. Donc, encore une fois, il ne s'agit pas de la mettre sous le tapis. Je suis pour le conflit, mais pas la violence.
- Speaker #0
Eh bien, ce seront les mots, les beaux mots de la fin. Merci Flora, ton partage d'expérience est vraiment riche et précieux pour les bébés stoïciens que nous sommes. Et merci à vous qui avez décidé de me mettre dans vos oreilles. Je vous retrouve en octobre. Et d'ici là, si vous voulez soutenir Socrate dans ma boîte, c'est très simple, beaucoup plus que de devenir stoïcien. Et ça nous ferait très plaisir, il vous suffit 1. de vous abonner via votre plateforme de podcast préférée, 2. d'évaluer l'émission 5 étoiles, ni plus ni moins, et 3. de la partager avec les gens que vous connaissez et qui semblent à première vue bien constipés par cette rentrée. Allez, merci beaucoup et bonne digestion à vous !
- Speaker #1
Merci Elodie, merci à tous ! A la prise de son, au montage et au mixage,
- Speaker #0
Alexandre Babéano et le studio Invisible. Au conseil éditorial, Emma Scali.
- Speaker #1
A la lecture des extraits d'œuvres inspirantes, Emma Scali aussi avec sa casquette de comédienne.
- Speaker #0
Et à la production, Green Story, l'Impact Agency.