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Sortir le droit de sa caverne technologique

2 - Toute oeuvre est originale et toute Création, stricto-sensu, autonome (Raphaël)

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10min |28/12/2024
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Description

L'exploration des deux questions suivantes nous permet de lever certains lièvres épistémologiques susceptibles de plomber toute approche multidisciplinaire du sujet :

1. Quelle fonction la notion d'originalité joue dans le corpus des disciplines non juridique, sans axiologie esthétique, qui s'intéressent aux recherches et créations artistiques ?

2. Que peut bien signifier, vis-à-vis des notions d'inventivité ou de créativité, les notions "d'autonomie" de l'IA et d'autonomie tout court ?

Principal interlocuteur : Raphaël


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Raphaël, je vais vous poser la toute première question. Elle concerne l'originalité. Qu'est-ce qui constitue selon vous l'originalité d'une œuvre, œuvre d'art ou non ? Qu'est-ce qui peut la rendre originale ? en dehors de considérations légales en général ou de visées quant au droit positif ?

  • Speaker #1

    Alors en effet Antoine, en dehors du droit positif, ou du droit et sa vocation légalement normative, on peut dire que toute œuvre est nécessairement originale. L'originalité finalement, ce n'est pas vraiment une notion opérante, en tout cas pas dans les sciences humaines, ou les sciences tout court d'ailleurs qui s'intéressent à l'art, que ce soit la recherche artistique elle-même ou la philologie ou la musicologie etc. Parce que toute œuvre est originale en ce que, d'une façon ou d'une autre, elle s'inscrit dans sa contemporanéité, c'est-à-dire qu'elle est produite, a été produite par un auteur ou des auteurs dans leur présent, à leur époque. Même si ces auteurs imitent ou imitaient un style ancien, même si ces auteurs... invoque ou avoquait, parfois de façon anonyme, l'identité voire l'autorité d'un autre auteur. Son œuvre donc, ce fameux auteurs pourra reprendre un certain passé en fouille, qu'ils s'imaginent. Mais étudier ce lien entre l'œuvre et le passé consistera précisément à la création d'un nouveau à déterminer ce que cet auteur a fait de ce passé dans son présent. Ce que lui ou son œuvre ont à dire à l'heure contemporaine, et éventuellement ce que l'auteur ou son œuvre auraient à nous dire jusqu'à aujourd'hui. Pour autant, cela n'empêche pas, bien sûr, d'étudier la subjectivité de ces auteurs. Pas la subjectivité au sens purement abstrait, philosophique, au sens de la philosophie du 18, 19, 20e, mais disons la manière dont l'auteur, en parlant, en écrivant, s'est attribué une certaine... autorité sur l'œuvre. Pourquoi ? Parce que ce dispositif d'attribution de l'autorité, via la façon de parler ou d'écrire, témoigne finalement de la façon dont il épouse l'auteur, qu'il soit individuel ou collectif, dont il souhaite épouser son époque ou non. Mais dans tous les cas, si l'on souhaite rester individuel, on peut aussi écrire. objectif, on prendra soin d'éviter tout anachronisme et tout jugement axiologique, c'est-à-dire tout jugement de goût. Par exemple, plutôt que suranné, démodé, et bien on utilisera les termes des praticiens eux-mêmes, à savoir pour la musique, on dira musique ancienne ou bien baroqueuse. ou si tant est que ces qualificatifs sont argumentés et non péjoratifs. Et puis dans d'autres domaines... on pourrait dire rétro ou rococo. Encore une fois, à partir du moment où c'est argumenté. Et puis, en sens inverse, on évitera précisément les termes de type... original. Et encore plus, des termes tels que visionnaire, si l'on souhaite rester objectif, scientifique, on dirait tout simplement contemporain, pour rester traîneux. de son temps, un petit peu moins neutre, et puis éventuellement, si l'on souhaite individualiser la chose, l'historiciser, examiner l'œuvre de façon sociologique, on pourrait dire marginale par exemple. Et donc finalement, on en viendrait presque à se demander, quel problème pose l'intervention de ce qu'on appelle l'intelligence artificielle ? Alors ici, on l'a compris, il faut mettre les pieds dans le plat, c'est-à-dire poser ce thème de la subjectivité de l'auteur, et plus encore de cette mise en travail, de cette extériorisation de sa subjectivité, qui est une façon assez banale. classique de concevoir le processus créatif et artistique aussi bien de façon juridique que de façon générale. Et de là, précisément, on voit bien le problème avec l'intelligence artificielle, à savoir, est-ce que artificielle veut dire que cette intelligence est trompeuse, ou est-ce que c'est le produit d'un... Un artisanat humain. C'est-à-dire qu'au fond, le problème, c'est cette indépendance de cette intelligence artificielle vis-à-vis de l'auteur, du créateur ou de l'artiste. En fait, plus concrètement, c'est l'absence de connaissance et de contrôle par l'être humain sur le processus qui a conduit le logiciel à produire tel ou tel résultat sur lequel il revendique des droits, par exemple. Et je n'ai pas dit autonomie, j'ai dit, à dessein, indépendance. Parce qu'Arnaud pourrait nous en dire beaucoup plus sur cette illusion, cette terrible erreur qui consiste à parler d'autonomie de l'intelligence artificielle, comme on parle des véhicules autonomes, etc. Alors ce que moi je peux déjà en dire, c'est que si on cherche une définition, en se penchant... notamment sur l'étymologie du terme autonomie. On voit qu'il est doublement absurde de l'utiliser pour caractériser l'intelligence artificielle. Alors, déjà étymologiquement... Touloubi, donc, nous, c'est précisément la règle humaine, c'est la règle de distribution des biens et des mérites, et c'est surtout cette règle qui ne s'impose pas... de façon implacable, comme celle de Thémis, comme la justice divine qui tomberait de l'extérieur. Il y avait déjà quelque chose dans le Neomos qui n'était pas la Niké ou qui n'était pas Thémis et qui insiste sur cette... nécessité de délibérer, nécessité proprement humaine. Et si on ajoute anomos le préfixe autos, c'est bien pour insister sur cette faculté du sujet à interdire, la règle. On peut parler d'autogouvernance. Ou plus simplement sur la capacité empirique de l'être humain à désobéir, à désobéir à des règles de... ses pulsions ou les règles que d'autres veulent lui imposer. Or, on ne voit pas très bien comment un logiciel pourrait désobéir à ses pulsions, ni désobéir, s'émanciper aux désinstructions algorithmiques que ses concepteurs, notamment, il n'y a pas que ses concepteurs, mais notamment ses concepteurs lui ont implanté pour qu'elle fonctionne. ni s'émanciper de ses utilisateurs. Voilà pour la première absurdité, l'usage de l'autonomie comme qualificatif à l'intelligence artificielle. Deuxième absurdité, parce que même à dire que finalement l'homme ce n'est qu'une machine, Eh bien cela montre d'autant plus que l'autonomie, parler d'intelligence artificielle autonome, est une fiction. D'ailleurs, c'est sur ce principe, sur ce principe fictionnel, assumé comme fictionnel, sur lequel se fondent de grandes institutions du droit, notamment la liberté contractuelle. Mais on voit bien que dans ce cas, l'autonomie, c'est une fiction qu'on applique à l'être humain. Et du coup, encore plus qu'on l'applique à la machine.

Description

L'exploration des deux questions suivantes nous permet de lever certains lièvres épistémologiques susceptibles de plomber toute approche multidisciplinaire du sujet :

1. Quelle fonction la notion d'originalité joue dans le corpus des disciplines non juridique, sans axiologie esthétique, qui s'intéressent aux recherches et créations artistiques ?

2. Que peut bien signifier, vis-à-vis des notions d'inventivité ou de créativité, les notions "d'autonomie" de l'IA et d'autonomie tout court ?

Principal interlocuteur : Raphaël


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Raphaël, je vais vous poser la toute première question. Elle concerne l'originalité. Qu'est-ce qui constitue selon vous l'originalité d'une œuvre, œuvre d'art ou non ? Qu'est-ce qui peut la rendre originale ? en dehors de considérations légales en général ou de visées quant au droit positif ?

  • Speaker #1

    Alors en effet Antoine, en dehors du droit positif, ou du droit et sa vocation légalement normative, on peut dire que toute œuvre est nécessairement originale. L'originalité finalement, ce n'est pas vraiment une notion opérante, en tout cas pas dans les sciences humaines, ou les sciences tout court d'ailleurs qui s'intéressent à l'art, que ce soit la recherche artistique elle-même ou la philologie ou la musicologie etc. Parce que toute œuvre est originale en ce que, d'une façon ou d'une autre, elle s'inscrit dans sa contemporanéité, c'est-à-dire qu'elle est produite, a été produite par un auteur ou des auteurs dans leur présent, à leur époque. Même si ces auteurs imitent ou imitaient un style ancien, même si ces auteurs... invoque ou avoquait, parfois de façon anonyme, l'identité voire l'autorité d'un autre auteur. Son œuvre donc, ce fameux auteurs pourra reprendre un certain passé en fouille, qu'ils s'imaginent. Mais étudier ce lien entre l'œuvre et le passé consistera précisément à la création d'un nouveau à déterminer ce que cet auteur a fait de ce passé dans son présent. Ce que lui ou son œuvre ont à dire à l'heure contemporaine, et éventuellement ce que l'auteur ou son œuvre auraient à nous dire jusqu'à aujourd'hui. Pour autant, cela n'empêche pas, bien sûr, d'étudier la subjectivité de ces auteurs. Pas la subjectivité au sens purement abstrait, philosophique, au sens de la philosophie du 18, 19, 20e, mais disons la manière dont l'auteur, en parlant, en écrivant, s'est attribué une certaine... autorité sur l'œuvre. Pourquoi ? Parce que ce dispositif d'attribution de l'autorité, via la façon de parler ou d'écrire, témoigne finalement de la façon dont il épouse l'auteur, qu'il soit individuel ou collectif, dont il souhaite épouser son époque ou non. Mais dans tous les cas, si l'on souhaite rester individuel, on peut aussi écrire. objectif, on prendra soin d'éviter tout anachronisme et tout jugement axiologique, c'est-à-dire tout jugement de goût. Par exemple, plutôt que suranné, démodé, et bien on utilisera les termes des praticiens eux-mêmes, à savoir pour la musique, on dira musique ancienne ou bien baroqueuse. ou si tant est que ces qualificatifs sont argumentés et non péjoratifs. Et puis dans d'autres domaines... on pourrait dire rétro ou rococo. Encore une fois, à partir du moment où c'est argumenté. Et puis, en sens inverse, on évitera précisément les termes de type... original. Et encore plus, des termes tels que visionnaire, si l'on souhaite rester objectif, scientifique, on dirait tout simplement contemporain, pour rester traîneux. de son temps, un petit peu moins neutre, et puis éventuellement, si l'on souhaite individualiser la chose, l'historiciser, examiner l'œuvre de façon sociologique, on pourrait dire marginale par exemple. Et donc finalement, on en viendrait presque à se demander, quel problème pose l'intervention de ce qu'on appelle l'intelligence artificielle ? Alors ici, on l'a compris, il faut mettre les pieds dans le plat, c'est-à-dire poser ce thème de la subjectivité de l'auteur, et plus encore de cette mise en travail, de cette extériorisation de sa subjectivité, qui est une façon assez banale. classique de concevoir le processus créatif et artistique aussi bien de façon juridique que de façon générale. Et de là, précisément, on voit bien le problème avec l'intelligence artificielle, à savoir, est-ce que artificielle veut dire que cette intelligence est trompeuse, ou est-ce que c'est le produit d'un... Un artisanat humain. C'est-à-dire qu'au fond, le problème, c'est cette indépendance de cette intelligence artificielle vis-à-vis de l'auteur, du créateur ou de l'artiste. En fait, plus concrètement, c'est l'absence de connaissance et de contrôle par l'être humain sur le processus qui a conduit le logiciel à produire tel ou tel résultat sur lequel il revendique des droits, par exemple. Et je n'ai pas dit autonomie, j'ai dit, à dessein, indépendance. Parce qu'Arnaud pourrait nous en dire beaucoup plus sur cette illusion, cette terrible erreur qui consiste à parler d'autonomie de l'intelligence artificielle, comme on parle des véhicules autonomes, etc. Alors ce que moi je peux déjà en dire, c'est que si on cherche une définition, en se penchant... notamment sur l'étymologie du terme autonomie. On voit qu'il est doublement absurde de l'utiliser pour caractériser l'intelligence artificielle. Alors, déjà étymologiquement... Touloubi, donc, nous, c'est précisément la règle humaine, c'est la règle de distribution des biens et des mérites, et c'est surtout cette règle qui ne s'impose pas... de façon implacable, comme celle de Thémis, comme la justice divine qui tomberait de l'extérieur. Il y avait déjà quelque chose dans le Neomos qui n'était pas la Niké ou qui n'était pas Thémis et qui insiste sur cette... nécessité de délibérer, nécessité proprement humaine. Et si on ajoute anomos le préfixe autos, c'est bien pour insister sur cette faculté du sujet à interdire, la règle. On peut parler d'autogouvernance. Ou plus simplement sur la capacité empirique de l'être humain à désobéir, à désobéir à des règles de... ses pulsions ou les règles que d'autres veulent lui imposer. Or, on ne voit pas très bien comment un logiciel pourrait désobéir à ses pulsions, ni désobéir, s'émanciper aux désinstructions algorithmiques que ses concepteurs, notamment, il n'y a pas que ses concepteurs, mais notamment ses concepteurs lui ont implanté pour qu'elle fonctionne. ni s'émanciper de ses utilisateurs. Voilà pour la première absurdité, l'usage de l'autonomie comme qualificatif à l'intelligence artificielle. Deuxième absurdité, parce que même à dire que finalement l'homme ce n'est qu'une machine, Eh bien cela montre d'autant plus que l'autonomie, parler d'intelligence artificielle autonome, est une fiction. D'ailleurs, c'est sur ce principe, sur ce principe fictionnel, assumé comme fictionnel, sur lequel se fondent de grandes institutions du droit, notamment la liberté contractuelle. Mais on voit bien que dans ce cas, l'autonomie, c'est une fiction qu'on applique à l'être humain. Et du coup, encore plus qu'on l'applique à la machine.

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L'exploration des deux questions suivantes nous permet de lever certains lièvres épistémologiques susceptibles de plomber toute approche multidisciplinaire du sujet :

1. Quelle fonction la notion d'originalité joue dans le corpus des disciplines non juridique, sans axiologie esthétique, qui s'intéressent aux recherches et créations artistiques ?

2. Que peut bien signifier, vis-à-vis des notions d'inventivité ou de créativité, les notions "d'autonomie" de l'IA et d'autonomie tout court ?

Principal interlocuteur : Raphaël


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  • Speaker #0

    Raphaël, je vais vous poser la toute première question. Elle concerne l'originalité. Qu'est-ce qui constitue selon vous l'originalité d'une œuvre, œuvre d'art ou non ? Qu'est-ce qui peut la rendre originale ? en dehors de considérations légales en général ou de visées quant au droit positif ?

  • Speaker #1

    Alors en effet Antoine, en dehors du droit positif, ou du droit et sa vocation légalement normative, on peut dire que toute œuvre est nécessairement originale. L'originalité finalement, ce n'est pas vraiment une notion opérante, en tout cas pas dans les sciences humaines, ou les sciences tout court d'ailleurs qui s'intéressent à l'art, que ce soit la recherche artistique elle-même ou la philologie ou la musicologie etc. Parce que toute œuvre est originale en ce que, d'une façon ou d'une autre, elle s'inscrit dans sa contemporanéité, c'est-à-dire qu'elle est produite, a été produite par un auteur ou des auteurs dans leur présent, à leur époque. Même si ces auteurs imitent ou imitaient un style ancien, même si ces auteurs... invoque ou avoquait, parfois de façon anonyme, l'identité voire l'autorité d'un autre auteur. Son œuvre donc, ce fameux auteurs pourra reprendre un certain passé en fouille, qu'ils s'imaginent. Mais étudier ce lien entre l'œuvre et le passé consistera précisément à la création d'un nouveau à déterminer ce que cet auteur a fait de ce passé dans son présent. Ce que lui ou son œuvre ont à dire à l'heure contemporaine, et éventuellement ce que l'auteur ou son œuvre auraient à nous dire jusqu'à aujourd'hui. Pour autant, cela n'empêche pas, bien sûr, d'étudier la subjectivité de ces auteurs. Pas la subjectivité au sens purement abstrait, philosophique, au sens de la philosophie du 18, 19, 20e, mais disons la manière dont l'auteur, en parlant, en écrivant, s'est attribué une certaine... autorité sur l'œuvre. Pourquoi ? Parce que ce dispositif d'attribution de l'autorité, via la façon de parler ou d'écrire, témoigne finalement de la façon dont il épouse l'auteur, qu'il soit individuel ou collectif, dont il souhaite épouser son époque ou non. Mais dans tous les cas, si l'on souhaite rester individuel, on peut aussi écrire. objectif, on prendra soin d'éviter tout anachronisme et tout jugement axiologique, c'est-à-dire tout jugement de goût. Par exemple, plutôt que suranné, démodé, et bien on utilisera les termes des praticiens eux-mêmes, à savoir pour la musique, on dira musique ancienne ou bien baroqueuse. ou si tant est que ces qualificatifs sont argumentés et non péjoratifs. Et puis dans d'autres domaines... on pourrait dire rétro ou rococo. Encore une fois, à partir du moment où c'est argumenté. Et puis, en sens inverse, on évitera précisément les termes de type... original. Et encore plus, des termes tels que visionnaire, si l'on souhaite rester objectif, scientifique, on dirait tout simplement contemporain, pour rester traîneux. de son temps, un petit peu moins neutre, et puis éventuellement, si l'on souhaite individualiser la chose, l'historiciser, examiner l'œuvre de façon sociologique, on pourrait dire marginale par exemple. Et donc finalement, on en viendrait presque à se demander, quel problème pose l'intervention de ce qu'on appelle l'intelligence artificielle ? Alors ici, on l'a compris, il faut mettre les pieds dans le plat, c'est-à-dire poser ce thème de la subjectivité de l'auteur, et plus encore de cette mise en travail, de cette extériorisation de sa subjectivité, qui est une façon assez banale. classique de concevoir le processus créatif et artistique aussi bien de façon juridique que de façon générale. Et de là, précisément, on voit bien le problème avec l'intelligence artificielle, à savoir, est-ce que artificielle veut dire que cette intelligence est trompeuse, ou est-ce que c'est le produit d'un... Un artisanat humain. C'est-à-dire qu'au fond, le problème, c'est cette indépendance de cette intelligence artificielle vis-à-vis de l'auteur, du créateur ou de l'artiste. En fait, plus concrètement, c'est l'absence de connaissance et de contrôle par l'être humain sur le processus qui a conduit le logiciel à produire tel ou tel résultat sur lequel il revendique des droits, par exemple. Et je n'ai pas dit autonomie, j'ai dit, à dessein, indépendance. Parce qu'Arnaud pourrait nous en dire beaucoup plus sur cette illusion, cette terrible erreur qui consiste à parler d'autonomie de l'intelligence artificielle, comme on parle des véhicules autonomes, etc. Alors ce que moi je peux déjà en dire, c'est que si on cherche une définition, en se penchant... notamment sur l'étymologie du terme autonomie. On voit qu'il est doublement absurde de l'utiliser pour caractériser l'intelligence artificielle. Alors, déjà étymologiquement... Touloubi, donc, nous, c'est précisément la règle humaine, c'est la règle de distribution des biens et des mérites, et c'est surtout cette règle qui ne s'impose pas... de façon implacable, comme celle de Thémis, comme la justice divine qui tomberait de l'extérieur. Il y avait déjà quelque chose dans le Neomos qui n'était pas la Niké ou qui n'était pas Thémis et qui insiste sur cette... nécessité de délibérer, nécessité proprement humaine. Et si on ajoute anomos le préfixe autos, c'est bien pour insister sur cette faculté du sujet à interdire, la règle. On peut parler d'autogouvernance. Ou plus simplement sur la capacité empirique de l'être humain à désobéir, à désobéir à des règles de... ses pulsions ou les règles que d'autres veulent lui imposer. Or, on ne voit pas très bien comment un logiciel pourrait désobéir à ses pulsions, ni désobéir, s'émanciper aux désinstructions algorithmiques que ses concepteurs, notamment, il n'y a pas que ses concepteurs, mais notamment ses concepteurs lui ont implanté pour qu'elle fonctionne. ni s'émanciper de ses utilisateurs. Voilà pour la première absurdité, l'usage de l'autonomie comme qualificatif à l'intelligence artificielle. Deuxième absurdité, parce que même à dire que finalement l'homme ce n'est qu'une machine, Eh bien cela montre d'autant plus que l'autonomie, parler d'intelligence artificielle autonome, est une fiction. D'ailleurs, c'est sur ce principe, sur ce principe fictionnel, assumé comme fictionnel, sur lequel se fondent de grandes institutions du droit, notamment la liberté contractuelle. Mais on voit bien que dans ce cas, l'autonomie, c'est une fiction qu'on applique à l'être humain. Et du coup, encore plus qu'on l'applique à la machine.

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L'exploration des deux questions suivantes nous permet de lever certains lièvres épistémologiques susceptibles de plomber toute approche multidisciplinaire du sujet :

1. Quelle fonction la notion d'originalité joue dans le corpus des disciplines non juridique, sans axiologie esthétique, qui s'intéressent aux recherches et créations artistiques ?

2. Que peut bien signifier, vis-à-vis des notions d'inventivité ou de créativité, les notions "d'autonomie" de l'IA et d'autonomie tout court ?

Principal interlocuteur : Raphaël


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

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  • Speaker #0

    Raphaël, je vais vous poser la toute première question. Elle concerne l'originalité. Qu'est-ce qui constitue selon vous l'originalité d'une œuvre, œuvre d'art ou non ? Qu'est-ce qui peut la rendre originale ? en dehors de considérations légales en général ou de visées quant au droit positif ?

  • Speaker #1

    Alors en effet Antoine, en dehors du droit positif, ou du droit et sa vocation légalement normative, on peut dire que toute œuvre est nécessairement originale. L'originalité finalement, ce n'est pas vraiment une notion opérante, en tout cas pas dans les sciences humaines, ou les sciences tout court d'ailleurs qui s'intéressent à l'art, que ce soit la recherche artistique elle-même ou la philologie ou la musicologie etc. Parce que toute œuvre est originale en ce que, d'une façon ou d'une autre, elle s'inscrit dans sa contemporanéité, c'est-à-dire qu'elle est produite, a été produite par un auteur ou des auteurs dans leur présent, à leur époque. Même si ces auteurs imitent ou imitaient un style ancien, même si ces auteurs... invoque ou avoquait, parfois de façon anonyme, l'identité voire l'autorité d'un autre auteur. Son œuvre donc, ce fameux auteurs pourra reprendre un certain passé en fouille, qu'ils s'imaginent. Mais étudier ce lien entre l'œuvre et le passé consistera précisément à la création d'un nouveau à déterminer ce que cet auteur a fait de ce passé dans son présent. Ce que lui ou son œuvre ont à dire à l'heure contemporaine, et éventuellement ce que l'auteur ou son œuvre auraient à nous dire jusqu'à aujourd'hui. Pour autant, cela n'empêche pas, bien sûr, d'étudier la subjectivité de ces auteurs. Pas la subjectivité au sens purement abstrait, philosophique, au sens de la philosophie du 18, 19, 20e, mais disons la manière dont l'auteur, en parlant, en écrivant, s'est attribué une certaine... autorité sur l'œuvre. Pourquoi ? Parce que ce dispositif d'attribution de l'autorité, via la façon de parler ou d'écrire, témoigne finalement de la façon dont il épouse l'auteur, qu'il soit individuel ou collectif, dont il souhaite épouser son époque ou non. Mais dans tous les cas, si l'on souhaite rester individuel, on peut aussi écrire. objectif, on prendra soin d'éviter tout anachronisme et tout jugement axiologique, c'est-à-dire tout jugement de goût. Par exemple, plutôt que suranné, démodé, et bien on utilisera les termes des praticiens eux-mêmes, à savoir pour la musique, on dira musique ancienne ou bien baroqueuse. ou si tant est que ces qualificatifs sont argumentés et non péjoratifs. Et puis dans d'autres domaines... on pourrait dire rétro ou rococo. Encore une fois, à partir du moment où c'est argumenté. Et puis, en sens inverse, on évitera précisément les termes de type... original. Et encore plus, des termes tels que visionnaire, si l'on souhaite rester objectif, scientifique, on dirait tout simplement contemporain, pour rester traîneux. de son temps, un petit peu moins neutre, et puis éventuellement, si l'on souhaite individualiser la chose, l'historiciser, examiner l'œuvre de façon sociologique, on pourrait dire marginale par exemple. Et donc finalement, on en viendrait presque à se demander, quel problème pose l'intervention de ce qu'on appelle l'intelligence artificielle ? Alors ici, on l'a compris, il faut mettre les pieds dans le plat, c'est-à-dire poser ce thème de la subjectivité de l'auteur, et plus encore de cette mise en travail, de cette extériorisation de sa subjectivité, qui est une façon assez banale. classique de concevoir le processus créatif et artistique aussi bien de façon juridique que de façon générale. Et de là, précisément, on voit bien le problème avec l'intelligence artificielle, à savoir, est-ce que artificielle veut dire que cette intelligence est trompeuse, ou est-ce que c'est le produit d'un... Un artisanat humain. C'est-à-dire qu'au fond, le problème, c'est cette indépendance de cette intelligence artificielle vis-à-vis de l'auteur, du créateur ou de l'artiste. En fait, plus concrètement, c'est l'absence de connaissance et de contrôle par l'être humain sur le processus qui a conduit le logiciel à produire tel ou tel résultat sur lequel il revendique des droits, par exemple. Et je n'ai pas dit autonomie, j'ai dit, à dessein, indépendance. Parce qu'Arnaud pourrait nous en dire beaucoup plus sur cette illusion, cette terrible erreur qui consiste à parler d'autonomie de l'intelligence artificielle, comme on parle des véhicules autonomes, etc. Alors ce que moi je peux déjà en dire, c'est que si on cherche une définition, en se penchant... notamment sur l'étymologie du terme autonomie. On voit qu'il est doublement absurde de l'utiliser pour caractériser l'intelligence artificielle. Alors, déjà étymologiquement... Touloubi, donc, nous, c'est précisément la règle humaine, c'est la règle de distribution des biens et des mérites, et c'est surtout cette règle qui ne s'impose pas... de façon implacable, comme celle de Thémis, comme la justice divine qui tomberait de l'extérieur. Il y avait déjà quelque chose dans le Neomos qui n'était pas la Niké ou qui n'était pas Thémis et qui insiste sur cette... nécessité de délibérer, nécessité proprement humaine. Et si on ajoute anomos le préfixe autos, c'est bien pour insister sur cette faculté du sujet à interdire, la règle. On peut parler d'autogouvernance. Ou plus simplement sur la capacité empirique de l'être humain à désobéir, à désobéir à des règles de... ses pulsions ou les règles que d'autres veulent lui imposer. Or, on ne voit pas très bien comment un logiciel pourrait désobéir à ses pulsions, ni désobéir, s'émanciper aux désinstructions algorithmiques que ses concepteurs, notamment, il n'y a pas que ses concepteurs, mais notamment ses concepteurs lui ont implanté pour qu'elle fonctionne. ni s'émanciper de ses utilisateurs. Voilà pour la première absurdité, l'usage de l'autonomie comme qualificatif à l'intelligence artificielle. Deuxième absurdité, parce que même à dire que finalement l'homme ce n'est qu'une machine, Eh bien cela montre d'autant plus que l'autonomie, parler d'intelligence artificielle autonome, est une fiction. D'ailleurs, c'est sur ce principe, sur ce principe fictionnel, assumé comme fictionnel, sur lequel se fondent de grandes institutions du droit, notamment la liberté contractuelle. Mais on voit bien que dans ce cas, l'autonomie, c'est une fiction qu'on applique à l'être humain. Et du coup, encore plus qu'on l'applique à la machine.

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