- Laurène
La Sportive Outdoor, le podcast. Bonjour à toutes et bienvenue sur La Sportive Outdoor. Aujourd'hui, je reçois Anne-Lise Collet, une ultra-traileuse expérimentée qui a terminé cette année la Swiss Peaks 170, que je lui ai demandé de venir nous raconter. Bienvenue, Anne-Lise.
- Anne-Lise
Merci, bonjour Laurène et bonjour à toutes et à tous.
- Laurène
Est-ce que tu peux te présenter, s'il te plaît ?
- Anne-Lise
Oui, sans problème. Écoute, moi, c'est Anne-Lise. Donc, j'ai... 49 ans. Au niveau professionnel, je suis aujourd'hui micronutritionniste et naturopathe. Je suis même en formation en bêtise diététique. Je suis une éternelle insatisfaite et j'ai toujours besoin d'apprendre plein de choses. De base, je suis de formation ingénieure, donc pas grand-chose à avoir. En fait, c'est une reconversion professionnelle et puis on aura l'occasion d'en parler. La naturopathie et la nutrition, c'était principalement par rapport à ma pratique sportive. Donc au niveau sportif justement, en fait moi ce que j'aime c'est le sport d'endurance, j'ai jamais été trop une compétitrice à aller très vite, ce que j'aime c'est le long, l'itinérance et voilà je crois qu'on aura l'occasion de développer un petit peu plus dans ce podcast.
- Laurène
Oui tout à fait, alors comment est-ce qu'elle t'a aidé ? Elle est née, en fait, cette passion pour le trail, parce que tu cours énormément. Est-ce que tu as toujours fait ça depuis assez jeune, au moins de la course à pied et ensuite du trail, ou est-ce que tu as démarré avec d'autres sports ?
- Anne-Lise
Alors, disons que si tu as le temps, on peut parler de tout ce que j'ai fait comme sport, mais je crois que ça ne va pas être très intéressant. Donc, en fait, j'ai toujours un petit peu couru. Mon sport, c'était plutôt la course à pied, effectivement. Et en fait, le trail, je m'y suis vraiment mise il y a, je dirais, une dizaine d'années à peu près. Je faisais des courses sur route, sinon dans le coin, moi j'habite donc en Alsace, dans le coin à Rossa et Maubernais, il y a pas mal de petites courses sur route dans le coin, et au début je faisais des 5, des 10, mais voilà, avec très peu de dénivelé. Et puis en fait c'est venu par mon mari qui lui courait déjà du trail, puis un jour il me dit allez viens on va faire une course à Chamonix, et donc moi j'ai fait le cross du Mont Blanc, c'était une dizaine d'années, donc c'était 23 kilomètres. Et déjà là, je me disais, est-ce que je vais vraiment y arriver ? Il y avait quand même pas mal de dénivelés. Et en fait, j'ai adoré. J'ai vraiment trouvé ça vraiment génial. Et puis, c'est ce qui m'a donné envie de poursuivre.
- Laurène
Tu as démarré avec une belle course, dis donc, directement à Chamonix.
- Anne-Lise
Carrément, voilà. Oui, c'est sûr qu'à l'époque, c'était déjà populaire, mais c'était de loin pas aussi populaire qu'aujourd'hui.
- Laurène
C'est chouette, tu as eu des beaux paysages directement. Et est-ce que, en fait, à quel moment est-ce que tu as décidé de te lancer dans des courses plus longues ? Donc, tu disais, tu as démarré avec un 23. Comment tu as fait ensuite ? Est-ce que directement, tu avais envie de faire du trail long ou est-ce que tu y es allée progressivement ? Comment est-ce que tu as fait ?
- Anne-Lise
Alors, j'y suis allée très progressivement. Et ça, c'est vraiment ce que j'ai vu aussi en naturopathie qui m'a aidée à y aller vraiment très doucement. Puisqu'en fait, cette année, j'ai fait un 170 qui est un 100 miles. C'était mon premier. En fait, ça fait dix ans que je fais du trail. Et les bons points. Maintenant, c'est mon premier. Moi, je vois beaucoup de personnes en consultation. Au bout de 2-3 ans de trail, boum, elles se lancent sur un ultra trail. Et je pense que c'est trop tôt. Alors, petit à petit, je suis allée sur des 30, 40, voire 50 kilomètres. Et puis, ça se passait bien, en fait. Donc, c'est des courses pour se rendre compte. Moi, je suis quelqu'un du milieu de peloton, on va dire, on fait ça en tête. Ça dépend du dénudier, ça dépend du terrain, des conditions météo, évidemment. Mais on va dire, allez, on est parti pour cette huit heures à peu près. Et c'est déjà quand même pas mal, mine de rien. Et en fait, je me rendais compte que finalement, ça me convenait beaucoup mieux parce que c'était plus lent et puis ça me permettait de marcher pas mal. Finalement, je crois que je ne suis pas trop une coureuse, en vérité. J'aime beaucoup marcher, mais j'aime marcher longtemps. Et puis donc...... OK, une fois qu'on fait plusieurs années de suite, 50 kilomètres, on se dit c'est chouette quand même. Bon, OK, j'en ai fait plusieurs dans plusieurs paysages différents. Tiens, je ferais bien quand même un 70-80. Alors j'essaye 70-80. Ah bah ouais, ça se passe bien. Bon, OK, j'en ai fait plusieurs, etc. Et puis donc finalement, cette année, j'ai décidé vraiment de me lancer dans du vraiment plus long, puisque jusqu'à présent, je n'avais fait que du 80 ou du 100, qui est vraiment ma distance de prédilection, ou en tout cas qui l'a été jusqu'à présent. parce que c'est ni trop long ni trop court, j'ai envie de dire. Suffisamment long pour que je prenne vraiment du plaisir et que je n'ai pas à trop courir. Et puis suffisamment court pour que ça se passe quand même bien. Le long m'a fait très peur pendant très longtemps. Je dois préciser qu'en fait, j'ai eu une grosse blessure il y a trois ans. C'était une fracture de fatigue du col du fémur. Donc c'est le truc, ça ne s'invente pas trop. Ça n'arrive pas très souvent. Donc là, je me suis dit, il y a un gros, gros signal qui a été envoyé par mon corps. Ça m'a beaucoup, beaucoup remis en question. J'ai vraiment perdu confiance en moi. Et du coup, je me suis vraiment beaucoup questionnée. Et puis là, je me sentais vraiment prête. J'avais vraiment bien remonté la pente. Et voilà comment je me suis lancée sur ce 100 miles cette année.
- Laurène
C'est vraiment intéressant de voir ton approche. Ce que tu dis sur la progressivité, c'est vraiment quelque chose qui me parle. Parce que j'ai l'impression qu'en ce moment, c'est... tellement un peu la mode de l'ultra qu'il y a plein de gens qui s'y mettent et qui veulent directement guérir les étapes qui vont super vite et forcément ça entraîne des blessures et parfois en plus c'est des blessures qui sont, enfin c'est pas juste la blessure qui guérit en quelques mois c'est une réponse super importante et chouette aussi d'entendre que t'as su écouter ton corps, une fracture de fatigue effectivement ça va pas par hasard que tu as réussi à rebondir, tu vas nous raconter ta méthode. Est-ce que tu peux nous présenter la course ? On parlait de la Swiss Peaks, mais pour les personnes qui ne connaîtraient pas cette course, est-ce qu'il y a aussi plusieurs distances ou est-ce que c'est que le 170 que tu as fait et où ça se passe ? Même si j'ai une petite idée avec le nom.
- Anne-Lise
Voilà, donc c'est dans les pics suisses. Ça, ne vous aide pas beaucoup là. Non, c'est dans le Valais, en fait. Donc, la course en elle-même, c'est la traversée du Valais par les montagnes. Donc le Valais, pour préciser, c'est en Suisse. Si on situe à peu près le lac Léman, c'est à l'est du lac Léman. Il y a la vallée du Rhône qui fait un genre de virgule comme ça. Et en fait, le Valais, c'est tout ce qui est à droite, si tu regardes la carte, tout ce qui est à droite de la virgule. Donc la virgule étant la vallée du Rhône. Et donc en fait, on remonte tout ce massif pour arriver finalement au lac Léman. Donc c'est ça qui était génial aussi, c'est que l'arrivée se fait au bord du lac Léman. Et donc il y a plusieurs courses, la mienne peut déjà sembler un petit peu surréaliste à certaines, et en fait non, il y a carrément plus surréaliste, il y a un 380 km qui est la course qu'a fait mon mari justement, et il y a en plus un 680, donc 680 km, moi perso je n'imagine même pas ce que c'est.
- Laurène
Même à vélo, même en voiture c'est déjà assez long.
- Anne-Lise
C'est juste incroyable. En fait, le truc, les 300 premiers kilomètres sont faits sans chronométrage. Et donc, l'objectif est d'arriver avant un moment au départ du 380. Pour qu'en fait, les gens qui font le 680 partent en même temps que ceux qui font le 380. Sauf qu'ils ont juste 300 kilomètres dans les pattes quand ils partent. Donc, il y a ça. Et puis après, il y a des distances plus classiques. Il y a un 100 km, il y a un 70 et il y a, je crois, un marathon, il me semble. Donc, il y a vraiment tout pour tout le monde. Et enfin, c'est vraiment une course que je recommande plus, plus, plus. Ambiance incroyable, plutôt intimiste, pas trop gros. Moi, je n'aime pas quand il y a trop de monde. J'aime bien être seule en détail. Là, c'est super, ça correspond vraiment. Des bénévoles incroyables et on mange. je ne te dis même pas quoi. À chaque ravitaillement, il y a des plats maison. Il y a croutons champignons, de la raclette. On aura l'occasion de parler de ce qu'on mange. Tout ! Ouais, super.
- Laurène
En plus, c'est les plats maison traditionnels du Valais, en fait. C'est ça.
- Anne-Lise
Ça participe vraiment au plaisir. C'est super important de trouver des choses qui nous font envie à manger parce que sur la durée, on a envie de manger. On ne mange pas que des barres, évidemment.
- Laurène
J'imagine. Et comment tu l'avais connue, en fait, cette course ? Parce qu'elle a l'air top, mais est-ce que tu en avais entendu parler ? Parce que, aussi, comme tu as fait le choix de participer à un 170, j'imagine qu'on fait attention à la course qu'on choisit. Tu n'as pas choisi au hasard. Qu'est-ce qui t'a motivée ?
- Anne-Lise
En fait, j'en avais déjà entendu parler, justement, de cette ambiance du côté assez intimiste, du côté un peu gastronomique. Et voilà, et puis en fait, comme mon mari, on fait souvent les courses ensemble, alors pas forcément les mêmes distances, mais en tout cas, on essaye de faire les choses ensemble. Et donc lui, il voulait vraiment partir sur un ultra long. Donc en gros, il n'y a pas 50 000 solutions. C'est soit tu vas faire le tour des géants, pour ceux qui connaissent, sauf que nous, on ne voulait pas faire ça aussi tard dans l'année, et puis un tirage au sort. Un peu prise de tête, on va dire. Et en plus, beaucoup, beaucoup de monde, justement. Et donc, ça faisait longtemps qu'on y pensait, à cette course. Et voilà, on en avait déjà largement entendu parler.
- Laurène
Ouais, chouette aventure à deux. Et quels étaient tes objectifs pour la course ? Est-ce que tu t'étais mis un objectif de temps ou juste déjà finir, ce qui est déjà très très bien ?
- Anne-Lise
Alors là, c'était vraiment clairement juste finir et finir avec le sourire. C'était vraiment ça, puisque comme dit, c'était ma première sur une distance comme ça, je ne savais pas du tout passer deux nuits dehors, j'avais aucune idée de comment j'allais réagir. J'avais déjà fait une nuit dehors, parce que j'avais déjà fait des courses uniquement deux nuits. C'était pour moi quelque chose de vraiment nouveau. Donc, mon objectif, c'était vraiment juste de finir et puis de finir en forme. Parce que je ne suis pas à l'abri d'une blessure. Et puis, je ne voulais pas arriver vraiment au bout de ma vie, même si ça a été très, très dur. On va pouvoir en parler. Merci.
- Laurène
C'est tellement un bel objectif, ça déjà, juste de finir, mais de finir bien, en fait. Oui,
- Anne-Lise
c'est ça.
- Laurène
Dans tous ces états, même si c'est dur, tu finis avec le sourire pas blessé, c'est déjà génial.
- Anne-Lise
Oui.
- Laurène
On va passer à ta préparation. Forcément, ça m'intrigue. Comment est-ce qu'on se prépare à une distance aussi longue ? Comment est-ce que tu t'es préparée ? Qu'est-ce que tu as mis en place, aussi bien physiquement que mentalement ?
- Anne-Lise
Alors, au niveau physique... Donc, ça fait quand même déjà pas mal d'années que je pratique des distances longues, assez longues. Donc, on va dire que déjà, mon corps est quand même relativement habitué et préparé à ce genre de course ou d'effort. Ensuite, je suis coachée depuis quelques années par quelqu'un qui s'appelle Jeff Bombanger, qui est un régional qui est dans le Haut-Rhin. Et donc, du coup, en fait, comme il connaît mes différents objectifs, il peut me faire un planning d'entraînement. Bon, ce planning est toujours adapté à mes contraintes professionnelles et puis aussi à la forme du moment. Il faut vraiment faire attention à ça. Et voilà, il vaut mieux ne pas faire un entraînement de trop que de s'en tenir exactement au planning. Donc ça, je suis toujours très, très à l'écoute, moi. Ensuite, mon entraînement ne se base pas que sur la course à pied. Je fais vraiment ce qu'on appelle un genre d'entraînement croisé. C'est-à-dire qu'en hiver, on n'a pas eu de bol l'hiver dernier, il n'y a pas du tout de neige, mais on pratique le ski de fond, le skating. Là, je n'ai pas pu, on a fait quand même pas mal de course à pied cet hiver. Après, je fais aussi du vélo quand c'est possible. Mais on va dire que c'est mon sport complémentaire, ce n'est vraiment pas mon sport principal. Je pratique également la randonnée, les sports d'hiver classiques, la randonnée d'hiver on va dire, du ski de randonnée d'ordique aussi. Et quand j'ai l'occasion de la natation, j'adore nager mais je ne me prends pas suffisamment de temps, c'est un super sport très complémentaire à la course à pied, la natation. Donc j'encourage vraiment les gens qui aiment courir aussi à aller nager. Et puis, pour terminer sur la préparation physique, je fais également beaucoup d'étirements. Alors, je sais qu'il y a vraiment différentes écoles en ce qui concerne les étirements. Il y a même des gens qui prônent aucun étirement. En l'occurrence, je pense que ce n'est pas une bonne idée. Toutes les personnes avec qui j'ai pu conseiller des étirements quand ils avaient des problèmes de blessures ou des problèmes de courbatures aussi, le fait de mettre en place des étirements, ça aide vraiment. Moi, perso, j'en fais vraiment beaucoup, mais parce que ça me fait du bien. Je fais du yoga, je fais du renfort musculaire aussi. En fait, je n'aimais pas du tout. Mon truc, c'était vraiment que la course à pied. Puis finalement, le renforcement musculaire, c'est là aussi, je pense, vraiment indispensable et un gage de réussite sur des distances aussi longues. C'est-à-dire que si les muscles, les tendons, les ligaments ne sont pas prêts à accepter un... des contraintes pendant une cinquantaine d'heures, puisque moi c'est le temps que j'ai mis, honnêtement, on va souffrir forcément, on va souffrir c'est sûr, mais on va vraiment se coudre, voire on va se blesser. Donc c'est vraiment super important d'avoir ce renforcement musculaire en complément et puis je dois avouer finalement que j'y ai pris goût, finalement ça me plaît mieux. Donc ça c'était la physique.
- Laurène
Non, j'allais dire, c'est intéressant de voir que tu, justement, tu ne fais pas que courir, en fait. Tu fais vraiment plein de choses qui complètent, soit aussi sur des activités cardio, comme le vélo, la natation, mais aussi avec du renfort, du yoga. J'ai l'impression que sur les étirements, c'est vrai qu'on entend toujours un peu plein de choses et son contraire, mais de plus en plus quand même, les pratiquants se font de la course à pied et se mettent aussi au yoga et se rendent compte qu'en complément, ça fait quand même beaucoup de bien. Les étirements juste après la séance, ce n'est pas l'idée du siècle.
- Anne-Lise
Pas juste après la séance, on est bien d'accord.
- Laurène
En décalé, c'est hyper intéressant. Ça assouplit un peu les corps des coureurs.
- Anne-Lise
Ça fait un peu autre chose. Alors, il ne faut pas être trop souple non plus, puisque finalement, il faut quand même aussi une certaine résistance et une certaine élasticité, on va dire, pour avoir une foulée efficace. Mais bon, on ne demande pas d'être hyper laxe, on est bien d'accord. C'est vraiment juste de faire quelques assouplissements.
- Laurène
C'est vraiment une question d'équilibre global du corps, mais c'est intéressant de voir que tu fais tout ça. Et comment tu arrives à t'organiser d'ailleurs avec ça ? Tu disais que tu as un coach qui te fait un planning. mais tu fais aussi un peu au feeling, tu fais un peu tous les sports toutes les semaines, enfin évidemment pas les sports d'hiver en été, mais sinon, comment est-ce que tu gères ça ?
- Anne-Lise
Ouais, c'est exactement ça. Alors déjà, le maître mot en hiver, c'est dès qu'il y a de la neige, tu vas skier, parce que tu ne sais pas combien de temps ça va durer. Donc ça, c'est la première chose. Je précise, j'ai une station de ski de fond à 25 minutes de chez moi, donc c'est plus pratique quand même, on peut être réactif. Puis comme je bosse depuis chez moi, je peux être très réactive aussi. l'organisation se fait quand même pas mal au feeling. Alors, j'essaye de suivre le mieux possible, mais va se faire quand même pas mal au feeling. C'est-à-dire que comme je l'ai dit un petit peu plus tôt, si je ne le sens pas, si je suis fatiguée, je n'y vais pas ou je fais un truc plus cool. Alors, il faut quand même de temps en temps se mettre des petits coups de pied au derrière. Quand on a une séance de fractionnés, moi perso, je déteste ça, mais je sais qu'il faut le faire. Donc, il faut vraiment que je sois très fatiguée pour ne pas le faire, mais la plupart du temps, je vais le faire. C'est plus une séance qui va sauter. Je n'ai pas envie d'aller courir. Je ne veux pas courir. Point barre. Ce n'est pas la séance.
- Laurène
C'est top de réussir à faire ça. J'imagine que ça s'est venu aussi beaucoup avec l'expérience.
- Anne-Lise
Avec l'expérience.
- Laurène
Quand on débute la course, souvent, c'est vrai que si on a un plan, on est limite stressé de ne pas le respecter. On se dit qu'il faut à tout prix le faire. Et du coup, on n'ose pas louper une séance. Toi, tu arrives à vraiment faire au feeling. Et j'ai l'impression que les gens, souvent, qui réussissent bien sans se blesser, font ça au final.
- Anne-Lise
Alors, je ne te cache pas que ma fracture de fatigue m'a beaucoup aidée à avancer dans le chemin vers la sagesse. Plus, j'ai bientôt 50 ans, donc forcément, avec un peu d'expérience, tu sais ce qu'il ne faut pas faire ou plus faire, plus accessoirement. Plus tu avances dans l'âge et moins bien ton corps récupère. Donc, vraiment être très attentif à ça. Mais je pense que c'est vraiment une des clés. Effectivement, et puis pour garder la niaque, pour garder du jus, il vaut mieux s'écouter. Alors, il faut juste trouver la bonne limite entre trop s'écouter où là, tu restes à regarder Netflix, et puis vraiment trop forcer, ça c'est sûr. Je pense que ça, c'est vraiment une question d'expérience et puis de chemin personnel, qui fait d'ailleurs une bonne transition avec la prépa un peu plus membre. donc là moi en fait j'avais entrepris l'année dernière j'ai fait le trail du haut gifre donc c'est un 100 km je ne sais plus très bien oui ça doit être un 100 km et en fait c'était mon premier ultra après ma fracture de fatigue et donc je manquais vraiment beaucoup de confiance en mon corps et en mes capacités et donc là j'ai fait une démarche avec une super sophrologue qui m'a beaucoup aidée. Et du coup, en fait, j'ai gardé en mémoire tous les conseils qu'elle m'avait donnés, toutes les séances qu'on avait faites, et puis je les ai un peu reproduites cette année. Je suis quelqu'un d'assez nerveux, d'assez angoissé, d'assez stressé. Je peux vite me faire des maux avec un tout petit truc. Et donc là aussi, avec maintenant les années, j'ai acquis un certain nombre de méthodes pour essayer de canaliser tout ça. et du coup en fait j'ai pas mal pratiqué et aussi pendant la course, la visualisation les méditations ça m'a beaucoup aidé dans les moments difficiles je suis en train peut-être d'anticiper sur de futures questions que tu pourrais avoir mais voilà ça a fait partie de ma préparation en tout cas ok super intéressant d'avoir mis ça en place c'est
- Laurène
chouette de voir que t'as aussi évolué vraiment au fur et à mesure de ta pratique ah oui vers plus de sagesse.
- Anne-Lise
C'est complètement ça.
- Laurène
On va parler maintenant de la nutrition. Forcément, tu nous l'as dit, tu es micronutritionniste et en train de passer un BTS de diététique. C'est un sujet que tu maîtrises bien. Mais comment est-ce que tu as mis en place ton plan nutritionnel pour la course ? Est-ce que maintenant, tu as énormément d'expérience et que tu arrives à gérer ? Ou est-ce qu'il y a encore des choses que tu as testées sur cette course ? Comment est-ce que tu as fait ?
- Anne-Lise
Oui, alors maintenant, effectivement, j'ai vraiment de l'expérience. Je me connais très bien. Je sais, je suis très peu sujette aux hypoglycémies. Donc, j'arrive vraiment globalement bien à m'alimenter comme il faut. En revanche, je veux juste préciser mon passé. Ma formation de naturopathe, je l'ai entreprise parce qu'à l'époque, de l'extérieur, je pouvais très bien me nourrir. Mais pour ma pratique sportive, je faisais n'importe quoi. Complètement. C'est-à-dire qu'en gros, super, je mangeais des fruits, des légumes, parfait, mais je ne mangeais pas grand-chose d'autre, si, des pâtes. Je manquais cruellement de protéines, donc je me blessais tout le temps. Et du coup, j'ai beaucoup fait évoluer mon alimentation avec les connaissances que j'ai acquises au fil de mes différentes études. Et donc aujourd'hui, je pense que j'ai une alimentation à peu près équilibrée au quotidien. Donc, je n'ai vraiment plus besoin de faire attention à l'approche d'une course, d'une compétition. Elle est maintenant bien réglée. Pour la préparation, finalement, j'ai atteint quelque chose d'assez nominal. Pendant la course, je sais aussi ce qui me convient bien. Je ne suis pas du tout sucrée. Je vais devoir me faire vraiment violence s'il faut que je mange un petit peu sucré. Si, par exemple, je sens qu'il y a une petite hypo qui se pointe et qu'il faut que je mange une compote, même une compote, je vais avoir du mal. Oui, c'est ça. Voilà. Donc, je préfère 10 000 fois le salé, en fait. Mais bon, il y a des moments où il faut vraiment se resucrer rapidement. Et bon, là, il n'y a pas trop de choix. Et donc, dans ce contexte-là, je peux encore avoir quelques difficultés. Mais globalement, maintenant, je me connais bien. Je sais ce qui marche chez moi. Et puis, chez beaucoup d'autres gens, finalement, ce qui marche chez moi marche beaucoup par ailleurs. Donc, pas vraiment de préparation. Mais ça, c'est quelque chose que je conseille beaucoup. C'est quand on... teste des nouvelles choses ou quand on met en place un nouveau plan nutritionnel, il faut vraiment le tester à l'entraînement et surtout pas le mettre en place juste le jour J parce que là, on va droit dans le mur, c'est la catastrophe assurée. Je voudrais juste dire qu'en fait, on pense toujours à l'entraînement physique, c'est-à-dire, oui, je vais faire des fractionnés, des sorties longues et compagnie, mais en fait, le système digestif, il a aussi besoin d'entraînement. Donc, il faut aussi l'entraîner à manger, bah oui, de la raclette. N'exagérons rien, on ne va pas s'emmener sur la pareille raclette.
- Laurène
La recommandation d'Anne-Lise, manger de la raclette.
- Anne-Lise
Manger de la raclette, je peux me faire allier. Quoique ça peut plaire, ce genre de conseil. Moi, perso, je ne mange pas de raclette cuite sur les courses. Je mange de la raclette crue parce que la raclette cuite, je ne la digère pas. Mais avec la raclette crue, je me fais plaisir. Mais oui, s'emmener des sandwiches sur des sorties longues.
- Laurène
de plusieurs heures et puis s'entraîner à manger régulièrement des petits bouchers ça c'est super important pour arriver à bien digérer c'est vrai que c'est quelque chose qui est j'ai l'impression que c'est pas très connu moi j'en ai entendu parler il ya quelques mois années peut-être mais mais j'ai l'impression que c'est pas c'est pas si connu en tout cas des coureurs qui font pas forcément des distances extrêmes mais au final enfin même pour quelqu'un comme moi qui court pas du tout les mêmes distances que toi je me rends compte que c'est quand même super utile et qu'effectivement ça s'entraîne. Même si de base on digère quand même assez mal en courant, on arrive à bien gérer le truc avec de l'entraînement. Je trouve que c'est assez motivant de savoir que du coup ce n'est pas une fatalité et de s'encourager aussi à manger pendant les entraînements. C'est ça. Si ce sont des entraînements qui ne sont pas énormes, c'est vrai qu'on peut avoir tendance à se dire que ce n'est pas la peine. En fait,
- Anne-Lise
ce n'est peut-être pas la peine du sucre,
- Laurène
mais en fait si.
- Anne-Lise
C'est ça, c'est ça. Et je dirais dans l'absolu, même si on a des problèmes vraiment, on peut se dire OK, sur deux heures, une sortie de deux heures, dans ma sortie, je vais quand même manger. Au bout de la première demi-heure, boum, je mange. Alors moi, je le fais pas. C'est bon, mais voilà, pour quelqu'un qui a des problèmes, je le conseillerais vraiment.
- Laurène
C'est vraiment utile comme conseil. Et on reste encore sur ta préparation, juste avec cette question. Concernant ta récupération, est-ce que tu as des méthodes particulières pour arriver à bien récupérer entre chaque entraînement, pour arriver aussi à cumuler une certaine charge ?
- Anne-Lise
Oui, il y a une chose qui est vraiment importante, c'est le sommeil. Arriver à avoir suffisamment de sommeil pour soi-même. Je dis ça parce qu'on est tous différents. Moi, j'ai un rythme de sommeil qui est assez atypique. Je me lève très tôt, je me couche relativement tôt. j'ai besoin on va dire d'une moyenne de 7 heures par nuit pour être bien donc il faut en fait bien se connaître et surtout pas se mentir c'est à dire que le soir si on s'endort sur le canapé c'est que clairement on a besoin d'aller se coucher et pas qu'on regarde la fin de l'émission, du film ou de la série donc il faut vraiment faire attention à ça parce qu'en fait quand on dort il y a beaucoup de mécanismes de récupération qui se produisent dans le corps et donc avoir hâte bon sommeil suffisant en qualité et en quantité sont vraiment des clés d'une récupération optimale. La deuxième chose, c'est l'écoute. C'est-à-dire qu'il faut vraiment être à l'écoute de son corps. Et quand on sent que ça ne va pas, qu'on a des petites douleurs à droite, à gauche, il ne faut pas forcer. Changer de sport ou lever le pied un petit peu. Et puis, pour la récupération, c'est quand même essayer d'optimiser un petit peu son alimentation, mine de rien. Alors là aussi, ça va être très personnel. J'ai des gens, ils mangent vraiment n'importe quoi. Ils ne sont jamais blessés et ils performent. Je me dis, bon, bah... Ok, c'est contre-exemple, mais globalement, il faut quand même faire un petit peu gaffe à ce qu'on mange, surtout si on a un petit terrain inflammatoire, on développe des petits trucs à hit à droite à gauche, des tendinites, des bursites, des choses comme ça, c'est peut-être qu'il y a aussi des choses à voir du côté de l'alimentation.
- Laurène
Ok, intéressant, on revient aux fondamentaux finalement, l'alimentation, le soin.
- Anne-Lise
Ouais, c'est ça.
- Laurène
On va passer à la course. Est-ce que tu peux nous raconter comment ça s'est passé ?
- Anne-Lise
Je peux. Donc, en fait, déjà, on a eu un changement de parcours parce que la météo était tout simplement exécrable, tout à fait à l'image de la météo de cette année. C'est-à-dire qu'il n'a plus des cordes. Je crois que vraiment, je ne peux pas dire autre chose. C'était vraiment des cordes pendant… Coupe. Je dirais les 20 premières heures. Et donc, en fait, comme le départ se faisait à 2000 mètres et puis tout de suite montait à pratiquement 3000, et puis on devait rester pendant un moment sur un plateau à 3000 mètres, en fait, l'organisation a dit, on ne sait pas quelles vont être les conditions de visibilité à ce niveau-là. Et donc, on a été détournés. Et le départ, alors pourquoi je passe du temps là-dessus, c'est que ça va être important pour la suite. On est partis. à une altitude de 2000 mètres, mais on a commencé avec un chemin vraiment large, super roulant, plutôt en faux palais descendant, bien traître. C'est-à-dire qu'en fait, sur une course comme ça, il ne faut surtout pas partir trop vite. Et je pense qu'en fait, beaucoup, beaucoup de gens, y compris moi, se sont fait prendre au jeu. Ah, j'y vais cool, mais en fait, finalement, ben non, j'avance quand même, quoi, même en y allant, en pensant y aller cool. Et donc, en fait, moi, très rapidement, j'ai senti pas mal de douleurs dans les quadriceps. en lien avec la descente. Et je n'étais pas trop inquiétée, mais je me suis dit, il faut vraiment qu'il y ait Molo, plus le terrain qui était vraiment super glissant à cause de la pluie. Je précise que j'ai eu la chance d'être... J'ai eu l'assistance de ma fille, donc qui venait pratiquement... Elle est venue à pratiquement tous les ravitaillements. Et donc, au début, ça a été très précieux parce que comme il pleuvait, il pleuvait vraiment beaucoup, beaucoup. Elle m'a aidée à changer mes chaussettes. Alors, j'ai gardé les mêmes chaussures, mais je changeais les chaussettes et je remettais de la crème pour ne pas avoir d'ampoule. Je pense que ça a pas mal préservé mes pieds et je la remercie encore une fois.
- Laurène
Précieux.
- Anne-Lise
Oui, carrément. Donc, voilà. Le début de la course a été vraiment compliqué. En plus, on ne voyait rien, donc pas beaucoup de plaisir. Mais bon, pour moi, je me suis mise assez vite dans ma bulle. C'est quelque chose que j'arrive assez facilement à faire. qui a été facilité par le fait que j'avais toutes les écoutilles fermées. Donc, de toute façon, j'étais dans ma bulle. Et puis, j'ai cheminé petit à petit. La première nuit a été assez compliquée parce qu'on a passé un col qui est la fenêtre d'Arpette, qui est un col qui est assez technique. C'est des gros rochers à la montée. Et puis, c'est un terrain à peu près pareil à la descente, avec des ébouillis à droite à gauche. Enfin bon, on y va pour ça aussi, tu me diras. Mais là, on va dire qu'avec les conditions glissantes de nuit, et puis on était dans un genre de brouillard, donc avec la frontale, tu sais, on ne voit rien quand il y a du brouillard. Plus on ne voyait vraiment pas bien les fagnons. Plusieurs fois, je me suis fait peur. Je me suis dit, mais qu'est-ce que je fais là ? Heureusement, on était quand même plusieurs, donc on a essayé de se soutenir. Donc cette première nuit a été assez difficile. Et donc je suis arrivée à la première base vie. Donc la base vie, en fait, c'est là que tu retrouves un sac où tu as toutes tes affaires. qui est véhiculé par l'organisation. Tu vas pouvoir éventuellement dormir si tu veux, il y a des lits, il y a un plat chaud qui t'attend.
- Laurène
et puis voilà c'est souvent là que tu peux éventuellement prendre une douche, te faire masser ou te faire soigner les pieds si nécessaire et donc à cet endroit là justement je me suis fait soigner les pieds parce que pour le coup j'avais changé mes chaussettes mais malgré tout c'était quand même trempé donc j'avais des ampoules en plus je me suis changé intégralement, je me suis bien posée et en fait comme ma fille était là avec la voiture du coup j'ai pu dormir une demi-heure dans la voiture donc là c'était au petit matin de la deuxième journée et ça m'a fait beaucoup bien dormir une demi-heure, juste une demi-heure c'est incroyable comme ça fait du bien, tu repars mais t'es en pleine forme t'as l'impression d'avoir fait une nuit entière c'est vraiment bluffant c'est magique franchement c'est incroyable ce que le cerveau est capable de faire et puis donc cette deuxième journée a plutôt bien commencé du coup j'étais en forme avec ma super nuit de 30 minutes et puis voilà en plus le temps commençait à se lever tout doucement on commençait à voir quelque chose, c'est quand même pour ça aussi que tu viens, c'est pour avoir un peu de paysage et donc tout de suite ça aide donc il faisait froid mais au moins on voyait quelque chose et en fait c'est au cours de cette deuxième journée que j'ai commencé à avoir une douleur assez vive dans le genou gauche qui après coup un kiné m'a raconté qu'en fait c'était en lien justement avec les douleurs dans les quadriceps en gros les muscles tiraient beaucoup sur la rotule et du coup c'est ça qui me faisait mal Et je ne te cache pas que ça a été vraiment très, très dur. J'ai dû m'accrocher, je dirais, pendant 70 kilomètres quand même. Donc, les 100 premiers, ça allait. Et les 70 derniers, beaucoup moins.
- Anne-Lise
En plus, quand même, du coup, il faut s'accrocher pendant 70 kilomètres.
- Laurène
Écoute, en fait, donc moi, mon parti pris, c'était terminé. À partir du moment où j'avais eu un check par le kiné qui me disait, écoute, non, c'est bon, tu peux y aller. Il n'y a pas de... C'est juste musculaire, donc arrête-toi, masse-toi. Donc il m'avait massé, bien sûr, quand je suis repartie, j'avais plus mal. Et puis c'est très vite revenu, normal. Il me dit, tu peux gérer, mais tu ne vas pas te faire mal. Et du coup, moi, c'est en fait ça qui m'a décidé. Je me suis dit, bon, ok, j'ai encore largement le temps, j'ai vraiment de l'avance sur la barrière horaire, je marche, et puis je vais bien finir par y arriver, quoi. Et alors bon, quand je suis partie de la dernière base vie, c'était ça que j'avais en tête. Mais bon, je ne te cache pas que ça a été difficile quand même, même en marchant. C'était difficile. La deuxième nuit, j'étais vraiment au bout du bout. Plusieurs fois, je me suis dit bon, maintenant, j'arrête, j'arrête. Qu'est-ce que je fous là ? Est-ce que vraiment, c'est pour ça que je suis là ? Et puis en fait, j'arrivais à chaque fois à me raisonner, à repenser aux séances de préparation que j'avais faites. Je respirais, je faisais des micro-méditations. Et à chaque fois, je me disais, bon, chaque pas que tu fais, ça t'amène vers la ligne d'arrivée. Et donc, le deuxième petit matin, le lever de soleil sur le lac Léman, le truc de fou, je pourrais même encore pleurer, tellement j'ai vécu des émotions incroyables. Et en fait, au dernier ravitaillement, j'avais donc mon mari Benoît, ainsi que ma fille, qui m'attendaient. Donc, mon mari était arrivé pendant la nuit. Et ils sont quand même venus. pour me voir au dernier ravitaillement. Il m'a fait un massage des cuisses. Et puis, en fait, j'ai pu courir toute la dernière portion. Incroyable, je n'avais plus mal. C'est incroyable. Tu te dis, mais le cerveau, ce qu'il est capable de faire, de te faire ressentir ou ne pas ressentir des douleurs. En fait, là, j'étais nouveau regonflé à bloc. Et courir, j'ai pu courir pendant les 12 derniers kilomètres. C'est fou.
- Anne-Lise
C'est incroyable l'effet que ça peut avoir.
- Laurène
Et donc, la fin, juste magique. C'est quoi ? matin au bord du lac léman tu as l'impression d'être une star internationale bon voilà moi j'étais là je sais pas 60 ou
- Anne-Lise
70e sur quatre un peu plus de 80 arrivés donc mais bon il ya eu plus de 60% d'abandon justement je pense en lien avec ces conditions météorologiques particulièrement difficile quoi et est ce que sur tes donc ton problème de quadri est ce que tu as une explication peut-être du kiné ou à posteriori que tu as compris pourquoi ça t'était arrivé Est-ce que c'est justement parce que tu es partie trop vite, sans doute ?
- Laurène
Probablement. Est-ce que j'avais eu assez de préparation physique ? Je pense que oui, honnêtement. Je pense que c'était en fait en lien... Partie trop vite, en tout cas, ce qui est sûr, c'est qu'avec les conditions qu'on a eues, forcément, tu es un petit peu tout le temps aux aguets. Donc, tu es tout le temps contractée parce que finalement, le terrain est quand même assez glissant. Et je pense que c'est ça. C'est ça qui a vraiment tiré sur ma rotule. Parce qu'en fait, j'ai très vite récupéré. J'avais très vite presque plus mal. Donc, c'était clairement vraiment musculaire.
- Anne-Lise
Oui, d'accord. Et comment est-ce que tu as fait ? Alors, tu disais que tu as dormi la première nuit une demi-heure. La deuxième nuit, tu as redormi du coup ? Comment est-ce que tu as géré cette partie-là ?
- Laurène
Alors, la deuxième nuit, je me suis arrêtée à un premier ravitaillement. Il devait être... Une heure du matin, j'ai voulu dormir. Et là, en fait, ils n'avaient pas encore monté les lits de camp. Donc d'abord, ils m'ont dit Attends, on met les lits de camp. Ok, donc là, j'ai déjà attendu demi-heure qu'ils mettent les lits de camp. Et en fait, c'était super sympa, mais ils avaient une playlist de hard rock qu'ils mettaient à fond. Donc c'était super, vraiment très sympa. Mais en l'occurrence, en fait, ils n'étaient pas du tout regardants vis-à-vis des coureurs qui voulaient dormir. Donc du coup, je me suis allongée, je me suis un petit peu reposée. Et là, je n'ai pas pu dormir. Donc, tant bien que mal, j'étais vraiment fatiguée. J'avais vraiment envie de dormir. J'ai tenu jusqu'au ravitaillement suivant. Et là, c'était un petit endroit. Il n'y avait pas de lit à part à l'extérieur. Il faisait tellement froid. J'ai dit non, c'est hors de... Et en fait, je me suis posée dans un coin. Il y avait un genre de petit fauteuil comme ça. On m'a passé une couverture. Je l'ai mise par-dessus la tête pour m'isoler. Et en fait, j'ai dormi comme ça un quart d'heure. Et pareil, en fait, ça m'a complètement ressourcée. Et là, c'était bon. Donc, j'ai dormi une demi-heure plus un quart d'heure sur les deux nuits.
- Anne-Lise
Incroyable. Le coup du hard rock, c'est un peu étonnant.
- Laurène
Oui, alors c'est pour un peu te redonner la pêche, mais c'est vrai qu'il faut quand même faire attention aux gens qui ont envie de dormir.
- Anne-Lise
Oui, en plus, avoir envie de dormir, c'est essentiel. Du coup, si tu as envie de dormir et que tu peux justement gagner ce petit quart d'heure.
- Laurène
C'est ça. Et puis, en fait, c'est vraiment une question de sécurité aussi, parce que quand tu manques de vigilance, tu peux faire un peu n'importe quoi. Donc, il y a un moment où il faut vraiment s'arrêter et dormir, clairement.
- Anne-Lise
On est quand même la nuit dans une montagne, quoi.
- Laurène
C'est ça, c'est ça.
- Anne-Lise
Et au niveau de l'alimentation, tu nous l'as un petit peu évoqué avant, donc tu manges plutôt salé, mais quelle est ta stratégie pendant la course ? Est-ce que tu te dis que tu manges, je ne sais pas, toutes les demi-heures, toutes les heures, quelque chose que tu as avec toi ? Est-ce que tu manges des plats chauds au ravito, de la raclette ? Comment est-ce que tu fais concrètement ?
- Laurène
Alors,
- Anne-Lise
bon,
- Laurène
je ne fais plus trop de stratégie avant parce que maintenant, je me connais et que je n'ai pas trop de problèmes d'alimentation. En fait, j'emporte avec moi, mais souvent, je ne mange pas ce que j'ai avec moi ou en tout cas, ce que j'ai emporté moi. Mais souvent, je prends plutôt des choses qui sont sur les ravitaux. Alors, c'est à prendre avec des pincettes parce qu'il y a des cours sur lesquels les ravitaux, c'est vraiment n'importe quoi. Et donc, du coup, je suis quand même content d'avoir des choses à moi. Mais sinon, là, je me suis pas mal écoutée, en fait. Je n'ai pas vraiment mis en place de stratégie. J'ai toujours fait attention à chaque ravitaillement, à prendre de la soupe, du bouillon, des choses comme ça. Parce que ça, tu ne peux pas l'emporter avec toi. Et puis après, je mangeais quand même. Dès qu'il y avait un plat chaud proposé, je le prenais. Là, c'était en plus parce qu'il y avait des conditions météo particulières, évidemment. Il aurait fait super chaud. J'aurais peut-être eu une stratégie différente. Mais en l'occurrence, j'avais besoin de… Je pourrais y aller à beaucoup de calories de par les formes, mais aussi de par les conditions météo. Donc, voilà. Donc, ça, c'était pour les ravitaillements. Et puis, souvent, j'emportais avec moi. J'ai toujours des petits sachets et je fais un petit peu mes courses sur les ravitaillements. Et je vais emporter. Moi, pour ce qui me concerne, c'est vraiment ce qui me convient bien. Du coup… du pain, du fromage, un peu de viande séchée. S'ils ont un peu de riz, j'en emporte aussi. Enfin, voilà, des choses comme ça.
- Anne-Lise
Des choses finalement très solides. Oui.
- Laurène
Qui nourrissent. Il faut quand même se nourrir, en fait.
- Anne-Lise
C'est ça. Et tu n'as pas de problème pour arriver à manger ça. Tu n'es pas trop écoeuré. Ça passe bien.
- Laurène
Alors ça, ça passe bien. Ce qui est plus compliqué, c'est de manger du sucré. Alors moi, particulièrement parce que je n'aime pas le sucré, mais même pour quelqu'un qui aime le sucré, c'est impossible de manger du sucré tout du long. Alors, il y a toujours des exceptions qui confirment la règle.
- Anne-Lise
J'imagine. J'en suis 30 kilomètres au bout d'un moment, j'en ai marre.
- Laurène
Ben voilà, voilà. Donc de temps en temps, oui, tu insères un petit peu. J'ai des barres que j'arrive à peu près à manger, mais moi, je fais très attention à mon apport hydrique. Donc je vais beaucoup... beaucoup boire. Alors là, il y a un truc génial sur les courses en Suisse, c'est l'arrivé là, je ne sais pas si tu connais.
- Anne-Lise
Si je connais, non, je l'ai vécu en Suisse. Ah ben voilà,
- Laurène
alors bon. Donc tu ne connaîtras rien. En fait, l'arrivé là, c'est un super moyen de se sucrer sans s'en rendre compte. Et ça convient beaucoup mieux que... Enfin, moi, perso, ça me convient beaucoup mieux que le coca. Le coca, s'il faut, je vais en boire, si je suis vraiment au fond du trou, mais j'ai beaucoup de mal à en boire, je n'aime pas du tout le goût. Je prends beaucoup plus de plaisir à boire de l'arrivé là. Et donc, du coup, pour me resucrer, en fait, c'était souvent là-dessus que je comptais. Et ça me permettait de manger vraiment salé à côté avec des vrais aliments, quoi. Pas des trucs sous sachet ou artificiels.
- Anne-Lise
C'est intéressant d'arriver là. Je n'aurais jamais pensé, jamais fait de course en Suisse. Mais effectivement, au niveau du goût, ce n'est pas du tout comme du coquin,
- Laurène
en fait. Ce n'est pas trop fort. Écoute, j'ai regardé les étiquettes. En fait, c'est sucré comme du coquin. Il y a autant de sucre d'arriver là que dans du coca, mais moi, je trouve que ça se boit beaucoup plus facilement. Tu sens beaucoup moins le goût du sucre.
- Anne-Lise
Oui,
- Laurène
c'est vrai. Oui.
- Anne-Lise
Et concernant l'hydratation, est-ce que dans tes flasques, est-ce que tu emmènes juste de l'eau ou est-ce que tu as de la boisson d'effort ? Comment est-ce que tu fais ça ?
- Laurène
J'ai rarement de la boisson d'effort, en fait, parce que j'arrive à m'alimenter suffisamment à côté. Donc, je... Je crois que je suis partie avec la boisson de l'effort. J'en avais dans mes sacs d'allègements, mais je crois que je ne m'en suis pas servie en fait. Honnêtement, sur le papier, c'est vrai que c'est important, ces boissons de l'effort, ça tient vraiment la route. Mais je pense que quand tu es sur des durées aussi longues, il vaut mieux se baser sur vraiment une alimentation très équilibrée et de la boisson, bien sûr. plutôt que sur des boissons de lait fort qui, à moins qu'on trouve une boisson de lait fort qui nous convienne vraiment, vont être aussi écœurantes parce qu'elles sont sucrées. Et si tu veux apporter suffisamment de minéraux selon les préconisations qui sont sur l'emballage par rapport à la quantité que tu dois mettre, c'est vraiment hyper sucré. Moi, je suis incapable de boire ça. Donc, les boissons de lait fort, pour les personnes qui y arrivent, oui, c'est une bonne idée, mais moi, perso, ça ne me convient pas.
- Anne-Lise
C'est intéressant de voir qu'aussi, on peut gérer autrement, justement. Je crois qu'il y a plein de gens qui sont écoeurés par ça. Et en fait, tu peux gérer autrement. Et même, du coup, ça peut être plus facile dans certains cas. Donc, il n'y a pas une stratégie. C'est toujours bien de voir ça aussi. Oui. Et après, au moment où tu es arrivée, sur la ligne d'arrivée, tu as eu quoi comme émotion ?
- Laurène
Écoute, incroyable. Vraiment. Alors déjà, comme j'avais serré les dents. pendant pas mal de temps, du coup, j'ai eu une décharge émotionnelle de fou. Mais en fait, ce que j'ai adoré, c'est que j'ai vraiment été consciente, j'ai vraiment vécu mon arrivée en me disant je suis en train d'arriver Et du coup, ça a été d'autant plus fort. Alors, j'avais fait la reconnaissance du parcours les mois, les semaines qui ont précédé. Donc du coup, je savais à quoi m'attendre. Et du coup, j'ai pu vraiment le revivre pleinement pendant mon arrivée. Et puis, sur les deux derniers kilomètres, j'ai été accompagnée par ma fille qui est venue me retrouver le long du lac Léman. Et du coup, ça m'a permis vraiment d'apprécier. Plus, je l'avais mentalisé avant. Donc, puissance 1000 en termes d'émotion. Et après, tu as le contre-coup. C'est-à-dire, en fait... tu as toute l'adrénaline qui redescend. Et plus la fatigue qui ressort, ça fait un mélange assez bizarre. Et puis, en fait, tu es fatigué, tu fais de la rétention d'eau. Du coup, tu as beaucoup de mal à dormir. Donc, tout ça, on va dire les quelques heures qui suivent la ligne d'arrivée sont compliquées. En revanche, le passage de la ligne d'arrivée, c'est juste incroyable.
- Anne-Lise
Et les quelques jours qui suivent, est-ce que tu ne peux pas marcher du tout ? Comment tu te sens ?
- Laurène
Ah non, non, alors pas du tout. En fait, ce n'est pas du tout comme un marathon. bien sûr tu as des tensions musculaires mais ça reste tout à fait modéré pour moi la principale difficulté c'était plus les douleurs au pied parce que j'avais des ampoules mais au niveau musculaire franchement ça allait vraiment moi ma difficulté je suis assez sensible du système digestif c'était que j'avais du mal à m'alimenter j'étais écoeurée j'avais pas faim Et c'est en fait le temps que mon corps aussi évacue toutes les toxines. Je me connais, je sais que ça arrive pratiquement à chaque fois. Donc je fais des petites détox pour accélérer le tout avec des plantes. Mais au début, j'ai tendance à avoir du mal à m'alimenter. Donc pour la récupération, ce n'est pas terrible, terrible. Je me force un petit peu.
- Anne-Lise
Bon, tu as quand même plutôt bien récupéré.
- Laurène
C'est vrai.
- Anne-Lise
Est-ce que tu as des idées de tes prochaines aventures sportives ? Est-ce que tu as envie de repartir sur un trail, soit de cette longueur-là, soit plus long, même si là, tu es déjà sur du très long, ou plus court ? Est-ce que c'est une distance que tu as beaucoup aimée ou est-ce que tu préfères quand c'est un peu plus court ?
- Laurène
J'ai beaucoup aimé, je dois dire. Je suis ravie d'avoir réussi à boucler cette distance. Je ne te cache pas que je me pose la question effectivement je sais que je suis à l'aise sur 80-100 km ça me convient bien alors moi ce que j'adore c'est passer la nuit en montagne donc du coup là les deux nuits dehors j'étais vraiment servie j'ai adoré donc du coup mon coeur balance j'ai une course qui me fait rêver c'est l'échappée belle je sais pas si tu connais donc c'est la traversée du Massif donc c'est au sud de Grenoble je l'ai déjà faite en long en large et en travers j'ai fait déjà la première partie parce qu'on l'avait fait en relais... J'ai fait la deuxième partie puisque j'ai fait la traversée nord, donc c'est pas loin de 90 km. Et j'ai fait pesseur, donc accompagnant, on va dire, pour mon mari quand il a fait l'intégrale. Et j'aimerais bien maintenant faire l'intégrale moi-même. C'est une course qui me fait rêver. Donc, ce n'est pas 100 miles, elle fait 154 km, je crois. En revanche, le terrain est vraiment très, très, très technique. Donc, tu ne cours presque pas. Et je me dis, bon, ben, OK, moi, ça devrait me convenir. Pourquoi pas, pourquoi pas. Mais pour l'instant, je n'ai pas encore décidé, je t'avoue. Là, on est dans une période où j'attends la neige. Et puis, on verra pour la prochaine un petit peu plus tard.
- Anne-Lise
Il faudra que tu viennes nous raconter si tu l'as fait. C'est vrai que l'échapper belle, ça a l'air incroyable. Personnellement, ça ne me donne pas du tout envie. Je trouve ça magnifique, mais j'imagine que ça doit être tellement dur. Juste en randonnée déjà. En fait, en randonnée, j'aime bien. Je trouve ça joli, mais je me dis, à l'air entraîné, ça doit être tellement compliqué. C'est vrai que c'est superbe.
- Laurène
Et puis, ce n'est pas très différent, finalement, parce qu'il y a beaucoup d'endroits où on ne peut pas courir. Le commun des mortels ne court pas. Les élites, oui, mais... C'est une autre expérience.
- Anne-Lise
C'est un terrain particulier, effectivement. En tout cas, c'est magnifique. Par courir ça, c'est vrai que ça doit être bien dingue. Et pour terminer, quel conseil est-ce que tu donnerais à une femme qui aimerait bien se lancer dans ce type de course ?
- Laurène
Alors... Je pense qu'en fait, mes conseils sont valables pour une femme ou un homme. Je dirais que vraiment, et on en a parlé, c'est de respecter la progressivité. Surtout, ne pas vouloir brûler les étapes et y aller progressivement. Pensez que le corps a besoin de s'habituer à des distances plus longues. Et donc, vraiment respecter ça, ne pas passer d'un 50 à tout de suite un 100 miles. Et y aller petit à petit, ça prend des années. Donc vraiment, je dirais que c'est le premier conseil que je donnerais.
- Anne-Lise
Je trouve qu'en plus, ça fait partie de la beauté finalement de l'exercice aussi, d'y aller progressivement et de voir qu'on évolue et de ne pas directement brûler les étapes. Et après, quand on est blessé, finalement, peut-être au mieux, on a réussi à atteindre l'objectif, mais dans des conditions pas terribles. Enfin, ce n'est pas hyper satisfaisant. Donc, au moins, en y allant progressivement, ça prend plus de plaisir. Merci beaucoup, Annelise, pour ce partage. C'était super intéressant d'avoir ton retour sur cette Swiss Peaks. plein plein de conseils intéressants, un beau retour d'expérience, et j'espère que tu viendras nous raconter ton prochain trade. On verra vers quelle aventure tu te lances.
- Laurène
Avec grand plaisir, merci à toi Laurène, et puis à très bientôt du coup.
- Anne-Lise
A bientôt. Merci d'avoir écouté cet épisode. Si cela vous a plu, n'hésitez pas à vous abonner au podcast, et à mettre une bonne note sur les plateformes, cela nous aide. A bientôt.