- Speaker #0
La Sportive Outdoor, le podcast. Bonjour à toutes, aujourd'hui je reçois Emma Rota, traileuse passionnée et membre de la team normale. On va parler aujourd'hui de son parcours, de sa passion pour le trail, mais aussi de son histoire très personnelle avec le Lavaredo Ultra Trail, une course qu'elle a longtemps poursuivie. Elle a eu trois abandons successifs, mais cette année, elle a réussi enfin à la terminer et elle va nous raconter tout ça. Bienvenue Emma !
- Speaker #1
Merci Lauren de m'accueillir, je suis super contente.
- Speaker #0
Trop contente aussi. Est-ce que tu veux bien te présenter pour celles qui ne te connaîtraient pas ?
- Speaker #1
Alors, je m'appelle Emma Rota, je suis journaliste réalisatrice, je réalise des documentaires et des reportages pour la chaîne M6. Je raconte pas mal d'histoires autour des femmes dans le sport. J'ai réalisé notamment un documentaire qui s'appelle Badass il y a deux ans maintenant, je parlais d'Ultra Trail. et de femmes. Je vis entre Paris et Chamonix. Paris, quand j'ai mes enfants, une semaine sur deux. Et le plus possible à Chamonix, où j'ai acheté un appart cet hiver et je suis tombée amoureuse de cet endroit il y a quelques années. Je suis heureuse.
- Speaker #0
Ça fait une bonne base pour du trail. Est-ce que tu peux nous raconter comment c'est venu ta passion pour la course à pied, peut-être d'abord, ou directement le trail ?
- Speaker #1
Alors, je pense que déjà dans la famille, on a toujours randonné. Mon père est italien, il est né au pied des Dolomites. Ma mère est alsacienne, j'ai grandi entre les deux endroits et on allait beaucoup, beaucoup en montagne. C'est avec mes parents que j'ai appris à randonner. Mon père m'a appris à grimper, faire du ski de fond. La course à pied est venue bien après. Je pense que j'ai commencé vraiment à courir sérieusement à 27 ans. Donc, ça fait maintenant 20 ans, une vingtaine d'années. Et j'ai commencé sur route. J'ai fait beaucoup de courses sur route, d'atteler sur piste d'abord et après des marathons. Et j'ai découvert le trail en 2018.
- Speaker #0
Oui, c'est encore assez récent finalement. Et comment tu y es venue ? Par curiosité d'abord ?
- Speaker #1
Par hasard et par une chance incroyable en fait. Pour un documentaire, je suis partie au Mexique. dans les canyons du Mexique, là où il y a un peuple qui s'appelle les Raramuri, qui est décrit dans le livre Born to Run, qui est assez célèbre. Et en fait, je suivais un ultra qui était organisé par un Français et il emmenait des Français là-bas se mesurer aux Raramuri dans les canyons. Et donc, on les filmait et je suis arrivée là-bas avec mes baskets de route, avec ma caméraman. Et l'organisateur de la course m'a vu arriver et me dit « Mais tu ne vas pas avec ça dans les canyons, en fait, je ne te laisse pas y aller. » Et c'est une autre coureuse qui m'a prêté ces baskets qui étaient trois fois trop grandes. Et c'est la première fois que je faisais de la course sur le sentier, en fait, en dehors de la route. Il faisait 40 degrés, je ne savais pas comment ça marchait une poche à eau, on était aux fraises totales. On a pu mourir 40 000 fois déshydratés. On ne savait pas ce que c'était filtrer de l'eau dans une rivière. C'était une grande aventure. Mais quand je suis revenue en vie, déjà, je m'étais fait des amis. Et ils m'avaient donné le virus du trail. Je me suis dit, non, mais en fait, au lieu de courir à Paris, ça a l'air vachement plus sympa.
- Speaker #0
Tu as été dans le bain avec quelque chose de costaud directement.
- Speaker #1
Oui, c'était vraiment tout de suite la chaleur et des conditions. difficile, mais c'était super. Et c'est comme ça que j'ai renoué avec la montagne aussi de mon enfance, du coup, ça avait du sens.
- Speaker #0
Oui, forcément. Et quel est le premier trail auquel tu as participé en tant que course ?
- Speaker #1
L'UT4M Chartreuse. J'en ai fait juste un sur les quatre de l'UT4M et c'était Chartreuse et c'était incroyable. Et après, j'ai enchaîné, et bien j'ai fait la chasse au point pour pouvoir... Avoir le tirage au sort de l'OCC. Donc, j'ai fait pas mal de trails cette année-là. Et j'ai couru en 2019 l'OCC. Et ça a été le coup de foudre avec Chamonix, le coup de foudre avec la montagne là-bas, avec le trail. Ça a été une bascule totale dans ma vie, en fait.
- Speaker #0
C'est incroyable. Et du coup, ça ne t'a plus quittée, en fait ?
- Speaker #1
Non, c'est devenu central dans mon existence. Pas... pas tant de mettre un dossard et de faire des courses, mais d'aller en montagne. Juste d'aller en montagne, en fait. D'être en montagne. Ça me suffit. En vrai, mettre des dossards, c'est chouette parce que tu te confrontes à... à toi-même et puis tu peux mesurer aussi si tu as fait un bon entraînement. Donc ça, c'est toujours chouette de voir si en fait tu as bien travaillé. Mais ce que j'aime avant tout en fait, c'est juste être sur un sentier, avoir un chemin devant moi et pas d'heure pour rentrer. Là, je suis la plus heureuse en fait. Donnez-moi un chemin, je pars tout droit et je n'ai rien besoin d'autre. En fait, quand je suis en montagne, Je n'ai rien besoin d'autre dans ma vie.
- Speaker #0
Tu as vraiment un aspect de liberté et de connexion avec la nature, peut-être ?
- Speaker #1
De connexion, des paysages qui sont sublimes en montagne, de quiétude aussi, de silence. J'aime partir seule, j'aime partir la nuit, toute seule. Et j'aime être, oui, vraiment dans la nature.
- Speaker #0
OK, effectivement. Et tu fais partie de la team normale depuis peu. Comment est-ce que cette collaboration est née ? Parce que du coup, on te disait, tu t'es présentée, tu n'es pas une athlète élite. Souvent dans les teams, on a l'habitude de voir ces athlètes-là. Comment est-ce que cette collaboration est née ? Qu'est-ce qui t'a plu aussi chez eux ? Comment est-ce qu'ils t'ont trouvée ?
- Speaker #1
C'est assez dingue. Je ne pensais pas que ça m'arriverait dans ma vie. En vrai, comme tu l'as dit, je suis une coureuse très moyenne. Je suis au milieu de peloton. Je n'ai jamais brillé, je n'ai jamais fait de podium.
- Speaker #0
Je n'ai pas dit que tu étais très moyenne. Non,
- Speaker #1
si, si, moi je le dis. Je suis très moyenne, mais c'est normal en même temps. Je veux dire, chacun son métier. Ce n'est pas mon métier. Je n'ai pas ces compétences-là. Et ce n'est pas grave, ça me permet quand même de profiter de la montagne. Mais il se trouve en fait que c'est une copine qui s'appelle Marine, qui est pyrénéenne, qui a été une des premières ambassadrices France de normal. On se suit sur les réseaux sociaux. Et en fait, quand ils cherchaient d'autres ambassadrices femmes, Elle leur a parlé de moi, ils sont allés voir mon Insta et ils m'ont contactée. Et au début, je me suis dit, c'est pas possible en fait, j'ai pas assez de followers, je suis pas une influenceuse. Mon niveau, comme on l'a dit, est très moyen, pourquoi ils me choisiraient moins ? Et en fait, on a beaucoup discuté et j'ai rencontré des gens hyper simples, des passionnés de montagne et de nature. et ils m'ont dit C'est ton rapport authentique à la nature et à la montagne qui nous plaît. C'est ce qu'on recherche. Nous, on ne veut pas des gens qui font du chiffre. On n'a pas de code de réduction à proposer. On s'en fiche de tout ça. Nous, tout ce qu'on veut, c'est des gens simples et qui kiffent la montagne et qui portent ces valeurs-là que j'ai pu voir chez eux parce qu'au fur et à mesure, on a discuté, on s'est rencontrés. Les valeurs comptent autant que le produit chez eux. Le produit compte beaucoup, parce qu'ils font des produits responsables et à une grande durabilité. Les chaussures, c'est 1200 kilomètres. Mais ce qui compte pour eux, c'est l'état d'esprit. C'est comment tu aimes être en montagne et comment la course, ce que ça représente pour toi, de courir et d'être dans la nature. C'est une toute petite équipe. Ils sont hyper gentils. Et tu sais, N normal, en fait, moi je ne savais pas, mais ça veut dire non normal. Ah ok,
- Speaker #0
je ne savais pas du tout.
- Speaker #1
Voilà, ça ne veut pas dire que... En fait, ça veut dire que c'est pour des gens normaux, mais qui font des choses extraordinaires. Bon, de honnête, on est d'accord, ce n'est pas normal. Oui,
- Speaker #0
c'est ça, là, c'est... Il y a un piège.
- Speaker #1
Mais en dehors de ça, eux, ce qu'ils visent... C'est vraiment de faire comprendre aux gens que tout le monde peut faire des choses extraordinaires en vivant une vie simple. Et voilà, c'est même leur engagement pour l'environnement, leur engagement pour les femmes aussi, ça m'a beaucoup, beaucoup touchée. Ils militent vraiment pour que des femmes comme toi et moi, qui avons une vie normale, avec une famille, des contraintes. beaucoup de charge mentale. On arrive aussi à kiffer la montagne et à prendre un dosa. C'est tout ça qui m'a vraiment plu chez eux. Je n'y attendais pas et je suis hyper fière.
- Speaker #0
Ça a l'air de parfaitement coller entre ce que tu nous disais juste avant sur pourquoi tu pratiques le trail et ces valeurs-là. C'est vrai que ça ne pouvait que bien matcher. On va parler maintenant du Lavaredo Ultra Trail, comme je le disais en introduction. Alors, tu as toute une histoire avec le Lavaredo. Tu as participé quatre fois, tu as abandonné trois fois, mais tu as réussi cette année. Est-ce que déjà, tu peux nous expliquer ce que cette course représentait pour toi ?
- Speaker #1
C'est un lieu où j'allais quand j'étais petite. Quand j'étais enfant, avec ma famille, j'ai compris plus tard, pas la première année, pas après mon premier abandon, mais bien après. J'y mettais une charge émotionnelle beaucoup trop importante. Parce qu'en fait, quand j'étais petite, tous les ans, je partais en montagne avec mes parents et avec mon oncle et ma tante. Mon oncle qui était mon parrain, qui était très important pour moi, est mort il y a deux ans maintenant. Ma tante était déjà morte de façon assez... peint dur et jeune il y a quelques temps et je pense que je liais cet endroit à mon oncle. Et donc il y avait trop d'attentes, trop de charges émotionnelles. Je mettais trop de choses au départ. Chaque fois qu'il y avait la musique qui retentissait, j'étais déjà en larmes. Donc j'avais déjà en fait donné trop d'énergie avant même de partir. Donc il fallait déjà que je comprenne ça, ça a été long. que je guérisse de ça même si je pense que je n'ai pas guéri mais en tout cas j'ai compris et voilà il fallait que je fasse cette course là-bas parce que pour moi c'était continuer à courir dans
- Speaker #0
les moments de mon enfance en fait en fait c'est une course je crois que j'ai oublié de le dire en fait en intro mais c'est une course quand même qui est très exigeante c'est 80 kilomètres c'est donc dans les Dolomites En Italie, c'est des terrains qui sont quand même bien techniques.
- Speaker #1
Oui, c'est ça. Les élites disent que c'est roulant, mais parce que c'est des élites. En fait, c'est roulant parce qu'il y a des chemins, mais c'est des chemins remplis de caillasses qui sont hyper coupantes, roulantes. Tu as beaucoup de pierriers. Il fait une chaleur de dingue. On est dans des canyons où, en fait, tu es surexposé. Il n'y a absolument aucune ombre. C'est fin juin, donc à chaque fois, il fait 35 degrés. Il y a une grosse partie de la course, en deuxième partie en plus, qui se passe en altitude. Donc, il y a plein de facteurs corrélés qui font que c'est très exigeant pour les corps. Et d'ailleurs, tu regardes les chiffres, on ne peut pas s'y tromper, il y a énormément d'abandon. On voit les gens vomir sur la course. Tous les ans, j'ai vu massivement des coureurs vomir, comme moi. et jamais ailleurs. Moi, c'est le seul endroit où j'ai abandonné. De toutes les courses que j'ai faites, et j'en ai faites pas mal, j'abandonnais uniquement au Dolomite.
- Speaker #0
C'est ça qui est fascinant, en fait, avec ton histoire, avec ce trail, parce que c'est à chaque fois celui-ci qui vraiment se dérobait. Et qu'est-ce qui t'a vraiment donné envie de continuer à insister comme ça ? Est-ce qu'il y a un moment, tu ne disais pas qu'on en laisse tomber ?
- Speaker #1
Si, franchement, parfois j'aurais dû. Chaque fois que j'y retournais, je me disais « Mais pourquoi en fait tu t'infliges ça ? » Je pense que maintenant je sais que c'était une quête, c'était plus qu'une course, c'était une histoire en fait que je devais boucler, c'était une énigme que je devais résoudre et c'était une histoire personnelle très importante que je devais éclore. C'était plus grand que la course en fait.
- Speaker #0
Ça explique effectivement. Est-ce que tu peux nous raconter alors maintenant déjà ta première participation et qu'est-ce qui s'est passé ?
- Speaker #1
Alors premier DNS, c'était sur le 80K, 80 kilomètres. Donc 80 kilomètres, c'est 4008 de dénivelé. Et j'ai vomi pendant plusieurs heures avant d'être arrêtée par les bénévoles qui trouvaient que je n'arrivais pas à traverser un torrent. Ils étaient là pour nous aider en fait et ils m'ont dit écoute. Ah, cause-toi, arrête-toi, parce qu'en fait, et je me suis rendue compte après que je n'étais plus du tout lucide, parce que ma mère m'a dit que je lui avais envoyé des SMS qui n'avaient ni queue ni tête. Donc ça, c'est la déshydratation, donc il valait mieux que j'arrête. Si j'ai arrêté au 49e kilomètre du 80. Deuxième année, orgueil. Je me dis, j'ai loupé le 80, je vais essayer le 120. La bonne idée... Logique. on connaît nous les trailers ce genre de décision qu'on prend avec les amis autour d'une bière un soir en se disant je peux le faire et on sait combien après on le regrette mais c'est pas grave donc là sur le 120 j'ai abandonné au bout du 76ème kilomètre et là je me suis flingué un genou dans la descente des trichimées sur la caillasse c'était vraiment j'avais pas de problème de vomissement et le 3ème l'année dernière là c'était le pire c'était la pire de De mes expériences, j'ai vomi du... 49e kilomètre au 62e kilomètre quasi en continu, sans pouvoir boire de l'eau, sans rien. Donc, je me suis vraiment traînée. C'était super dur. J'ai juré l'année dernière à voix haute dans la montagne au moment où je rendais Mando Sardes, de ne plus jamais revenir tellement j'avais souffert. Évidemment, je suis revenue. Voilà. Mais j'ai bien fait. J'ai bien fait.
- Speaker #0
Et qu'est-ce qui, enfin, j'ai jamais vu que la situation, j'en sais rien, mais qu'est-ce qui fait qu'on continue, tu vois, quand on est à ce stade, genre on est en train de vomir depuis 20 kilomètres, c'est l'horreur en fait. Qu'est-ce qui, dans ta tête, vraiment à cet instant-là, fait que tu, bah en fait, tu dis pas raisonnablement, parce qu'en fait, raisonnablement, on abandonne. Mais là, je sais pas, t'es quand même portée justement par cette quête et par cette histoire et tu dis que vraiment c'est impossible que t'abandonnes. Enfin, qu'est-ce qui se passe en fait ?
- Speaker #1
en fait tu t'es préparée mentalement c'est la préparation mentale de la course physiquement moi j'avais les jambes à chaque fois sauf quand je m'étais fait le genou dans la descente mais sinon j'ai toujours eu la force physique en fait et j'avais aucun problème physique à part ces vomissements donc non c'est que en fait quand tu te mets sur une moi en tout cas c'est ma façon de faire je suis hyper déterminée quand je décide de faire un truc pour aller au bout Merci. Et j'ai vécu ces trois premiers abandons comme des énormes échecs parce que ça contrecarrait ma détermination. Et que jusqu'à présent dans ma vie, je pensais que si tu mettais un effort et si tu mettais tout ce qu'il fallait dans la balance pour réussir, forcément, il y allait avoir des résultats. Et je me suis rendue compte que ça, ça s'appelait l'ego. que le monde n'est pas à notre service, qu'il n'est pas là pour te récompenser quand t'estimes que tu dois être récompensé, quand t'estimes que tu as mis ce qu'il fallait pour avoir des résultats. Ça ne fonctionne pas comme ça, la vie. La vie a son propre timing. Et si tu ne comprends pas ça, en fait, tu vis l'échec comme un échec. Et surtout comme une injustice. Tu te dis, mais on me doit ça. en fait. J'ai fait ça, on me doit ça. En fait, on ne te doit rien. La vie, ce n'est pas ça. Et quand j'ai compris que l'échec, ce n'était pas une fin, mais que c'était le début d'une question et que c'était à moi de travailler sur cette question, j'ai complètement switché. Je pense que c'est pour ça, peut-être, que je suis allée au bout cette année. C'est qu'en fait, je ne suis plus du tout venue dans le même état d'esprit. Ce n'était pas j'ai bossé, c'est un dû, il faut que j'aille au bout et je vais m'obstiner jusqu'à ce que j'aille au bout. C'était, je pense que c'est mon année, si la montagne l'accepte, j'irai au bout.
- Speaker #0
C'est intéressant d'avoir compris ça. Donc ça, en fait, tu l'as compris au bout de la troisième année ? Après, du coup, le...
- Speaker #1
Non, de l'année de prépa entre le troisième échec et la quatrième tentative. Parce que je pense aussi que je me suis laissée un peu plus tranquille. J'étais moins... Tu sais, quand on dit toujours, si on veut, on peut, no pain, no gain. Toutes ces conneries-là qui te culpabilisent parce que tu te dis, si je n'ai pas de résultat, c'est qu'en fait, je n'ai pas fait assez, je ne suis pas assez bonne, je suis nulle, je ne devrais pas être là. Et en fait, ce n'est pas comme ça. en fait les choses parfois mettre du temps. Les courbes de progression se cassent parfois. On a l'impression de reculer. Mais c'est après pour mieux progresser. Et il faut accepter ce temps-là. Et comme je te disais, je pense que quand tu ne l'acceptes pas, c'est de l'ego. Et l'ego, pour moi, c'est l'ennemi de la progression et de la compréhension de soi.
- Speaker #0
C'est vraiment une belle leçon de vie. On parle de sport, mais ça s'applique vraiment à tout, en fait. Donc d'avoir compris ça, au final, c'est génial. Tu te dis, bon, c'est trois échecs, entre guillemets, mais en fait, juste tout ce que tu as appris, c'est magnifique.
- Speaker #1
En fait, tu vois, de façon... Si tu mets une loupe, tu vois trois échecs. Et moi, maintenant, sur quatre ans, je vois, en fait, ma que j'ai changée, que j'ai appris sur moi et que ces quatre ans m'ont permis de passer à un nouveau palier et que... Je n'aurais sans doute pas du tout compris si je ne m'étais pas cassé les dents trois fois.
- Speaker #0
Ouais, c'est sûr. Et ça donne une toute autre perspective aussi au fait de faire de l'ultra. C'est pas juste, bon, je crois pas à l'entraide. C'est plus que ça, quoi. Et est-ce que tu peux nous parler, ça je me souviens qu'on avait déjà un petit peu discuté, mais je sais que tu as eu des expériences à chaque fois quand même un peu surréalistes. Est-ce que tu peux nous raconter ce qui s'est passé, en fait, quasiment à chacune de tes participations, il me semble ?
- Speaker #1
C'est vraiment, je pense que ça pouvait m'arriver que dans cette course-là. En fait, sur la troisième participation, l'année dernière, quand je suis arrivée au refuge à Vérault, c'est à peu près le 60e kilomètre de la course. Je vomissais déjà depuis plusieurs heures. J'avais perdu beaucoup, beaucoup de lucidité. Je m'étais traînée là-haut. C'est une montée qui dure 450 mètres, qui est quand même déjà beaucoup dénivelé derrière toi. Il fait nuit. C'est le plus haut point de la course. Je suis arrivée là-haut, en fait, vraiment dans un sale état. Et je me suis posée sur les bancs extérieurs, dans la nuit noire. Et en fait, j'ai mis la tête entre les mains et je me suis dit, je reste là. Je ne savais pas pour combien de temps, mais je ne sais pas bien. Et une femme est venue me chercher et m'a dit, mais qu'est-ce qui se passe ? Qu'est-ce que vous avez rentré et tout ? Et je lui explique que ça fait des heures que je vomis. Je lui dis, il faut absolument que je finisse cette course. S'il vous plaît, il faut que je finisse cette course. Elle me dit, je peux vous faire des piqûres d'antibomitif. Et donc, je me dessape devant tout le bar. Elle me fait une piqûre dans les fesses en me disant, dans une demi-heure, ça fait effet. Jusque-là, attendez un peu ici et tout. Donc, j'ai attendu un quart d'heure. Et puis après, il fallait que j'y aille. Et je suis repartie. Et 20 minutes plus tard, je revomissais toutes mes tripes. Enfin, voilà, je vomissais de la bile depuis longtemps, mais je veux dire, je ne pouvais plus avancer. Et j'ai abandonné au ravéto suivant et au ravéto suivant. J'y vais à l'infirmerie, je leur dis, vous n'avez rien à me filer, je vais être obligée d'abandonner. Pourtant, je viens de prendre une piqûre d'antivomitif, je ne comprends pas. Et là, ils me disent, mais comment ça ? Qui ? Je dis, la dame là-haut au refuge Aveyreau. ils me disent, il n'y a pas de dame. il n'y a pas de piqûres anti-vomitifs sur la course, c'est interdit de toute façon. Et là, c'était vertigineux. Parce que tout à coup, je me suis dit, mais qu'est-ce qui s'est passé dans ma tête ? Est-ce que j'ai vécu ce que j'ai vécu ? Et de retour à Paris, j'en parle à mes amis, ils me disent, en fait, tu as halluciné. Et donc, cette année, outre le fait de vouloir refaire le Lavaredo, une des quêtes dans la quête, c'était de retrouver cette femme là-haut. pour savoir si elle existait réellement et si elle m'avait réellement fait une piqûre dans les fesses.
- Speaker #0
Et alors ?
- Speaker #1
Suspense ! Eh bien, je n'ai pas halluciné. Et heureusement, parce que sinon, je me serais dit quand même que mon cerveau avait beaucoup, beaucoup d'imagination. Je suis arrivée au refuge Avero. J'avais vomi deux fois, mais pas autant que l'année dernière. Donc, j'étais encore quand même lucide. J'ai franchi la porte. avec la nette intention de retrouver cette femme. J'avais un peu de temps devant moi, donc voilà. Et je l'ai vue arriver, je l'ai reconnue direct. Et je lui ai dit, c'est vous qui m'avez fait une piqûre dans les fesses l'année dernière. Elle m'a regardée, elle a rigolé, elle m'a dit peut-être. Je lui ai dit, s'il vous plaît, je sors mon téléphone, je lui ai dit, je vais absolument que je prenne une photo de vous, parce que mes amis pensent que vous n'existez pas. Et il faut que je leur prouve. Et là, en fait, elle s'est cassée. J'ai compris qu'elle avait été certainement réprimandée par l'organisation de la course, parce qu'elle n'avait pas le droit de faire ça. Et sa collègue est arrivée, et elle m'a fait un clin d'œil, et elle m'a dit, je me souviens très bien de vous, les fesses nues, là, au milieu de la pièce, l'année dernière.
- Speaker #0
C'est incroyable, cette histoire. Mais cette dame, c'est une bénévole ? C'est un médecin ?
- Speaker #1
Non, c'est la gardienne du refuge. Donc, ce refuge est un ravito, mais... elle, elle ne dépend pas du ravito. Elle fait refuge, en fait. Elle accueille des gens. Donc, elle ne dépend pas de la course. Mais elle a des piqûres antivomitives pour les gens qui ont le mal de l'altitude, j'imagine, dans son refuge, des gens qu'elle accueille. Elle ne fait pas partie de l'organisation de la course, mais elle est là, dans les locaux.
- Speaker #0
Oui, forcément. Puis là, elle s'est dit, bon, je vais essayer de l'aider.
- Speaker #1
Oui, ça partait d'un bon sentiment. Et ce qu'il faut savoir sur cette course, qui est absolument géniale, je milite pour que tous les ultras soient comme ça. C'est qu'en fait, dans le règlement, on te dit que tu peux emmener de l'argent et que tu as le droit de te ravitailler dans les refuges que tu croises. Il y a énormément de refuges dans les deux limites. C'est une route hyper touristique qu'on emprunte. Et du coup, tu as le droit d'aller prendre un jus de fruits, une bière, un coca dans les refuges que tu croises en dehors des ravitaux. Et donc, dans ce refuge-là, j'ai pris une bière sans alcool avant de repartir.
- Speaker #0
Trop drôle.
- Speaker #1
Meilleur ravitaux. Meilleur ravitaux. J'ai découvert... Je pense que je vais inventer un nouveau protocole de diététique d'ultra à base de bière.
- Speaker #0
Sans alcool, quand même.
- Speaker #1
Sans alcool. Alors, si, parce qu'en fait, j'ai goûté une demi-bière. alcoolisée au 45e kilomètre et ça m'a fait le plus grand bien.
- Speaker #0
Bon, on ne va pas commencer à conseiller ça. Non. Mais si ça t'a fait du bien sur le coup, tant mieux. Est-ce que tu peux nous raconter ta course 2025, un peu du début à la fin ?
- Speaker #1
On a eu la chance cette année que le tracé passe par les traits de Chimay, qui est l'endroit emblématique des Dolomites. C'est les trois gros monolithes. qui perce le ciel, qui sont... C'est un endroit incroyable, un patrimoine de l'UNESCO et tout, des Dolomites. Normalement, le 80K n'a pas le droit de passer par là, c'est que le 120. Et là, cette année, en fait, on a eu le droit. Donc, t'as une première montée qui est vraiment hyper sèche. T'as 1 500 de D+, direct, qui t'emmènent là-haut. Et après, en fait, tu rejoins le tracé du 120K. Il a fait chaud. comme chaque année et comme partout sur les courses Weekend Labs que le Marathon du Mont-Blanc, ils ont vachement souffert aussi. Même à l'international, la Western States, ils ont souffert aussi. Bref, on a eu, on était en kit canicule, donc il a fait, je ne sais pas, je pense, une trentaine de degrés et la course, moi, sur les 40 premiers kilomètres, en fait, je reste toujours très... très en deçà de mes capacités prudentes. Le but, c'était d'arriver. Donc, j'étais curieuse de savoir quand est-ce que j'allais commencer à vomir, car je m'étais préparée. Je savais que j'allais vomir. Mais cette fois, vu que j'en avais la connaissance, je savais que je n'allais pas paniquer et j'avais mis au point un protocole personnel anti-vomissement, que j'avais... En fait, un peu élaboré tout au long de cette année, on a eu la chance d'avoir la chance. C'est catastrophique pour la planète et l'environnement. Mais pour une fois, on s'est entraîné dans les chaleurs au printemps. Il a fait très chaud un mois avant l'ultra du Labaredo. Je suis allée à Chamonix, je me suis entraînée en plein cagnard dans la chaleur. Et donc, j'ai vu au niveau hydratation ce qu'il me fallait. ce que je faisais quand j'avais plus faim. Et quand les vomissements ont commencé, car ils sont venus au, je ne sais plus, cinquantième kilomètre, j'ai vomi. Et là, j'étais prête. Et du coup, je me suis arrêtée au ravito suivant et j'ai respecté un protocole très strict. Je me suis allongée 20 minutes, 15 minutes, avec un chrono, sans rien faire, couché. Ensuite, j'ai bu une soupe. à un bouillon, cuillère après cuillère, ultra doucement. Je suis restée assise dix minutes sans rien faire. Et je suis repartie en marchant. Et je pense que c'est le meilleur protocole que j'ai trouvé en cas de vomissement. Voilà.
- Speaker #0
C'est pas intéressant.
- Speaker #1
Ouais. Le repos allongé, rien prendre, puis le bouillon à la cuillère, mais... hyper doucement. Et en fait, j'ai chopé ce protocole parce que l'année dernière, mon fils a eu une gastro avec des complications assez graves et on a fini à l'hôpital. J'ai vu ce qu'il faisait pour qu'il arrête de vomir et qu'il arrive à se réhydrater et à réingérer un peu de calories. Et donc, il m'expliquait en fait que si tu n'y vas pas cuillère par cuillère ultra doucement, c'est foutu.
- Speaker #0
Et c'est la chaleur en fait qui te provoque ces vomissements ou est-ce que tu es sujette à ça en dehors de période de grossesse ?
- Speaker #1
Alors, pareil, j'ai essayé de trouver cette année. Mais pourquoi ça m'arrivait ? Je ne suis largement pas la seule à qui ça arrive. Non. C'est ce qu'on appelle l'acidose lactique. C'est en fait quand tu... ta fréquence cardiaque est trop élevée, tu produis des déchets et quand le corps n'arrive plus à... Faire quelque chose avec ces déchets, ça provoque des nausées qui sont aggravées énormément par la déshydratation.
- Speaker #0
Et facteur supplémentaire, l'altitude.
- Speaker #1
Donc là,
- Speaker #0
tu as trois trucs dans le panier et tu as une catastrophe potentielle. Et le problème sur des courses comme ça, sur des ultras comme ça, quand il fait ultra ultra chaud, tu as beau boire, en fait, tu te déshydrates. Tu pourrais boire tout ce que tu voudrais, tu es quand même en situation de déshydratation. Donc fréquence cardiaque élevée plus déshydratation égale vomito.
- Speaker #1
En tout cas, c'est top si tu as trouvé déjà un protocole qui te convient. Et quand tu es repartie, là après, ça s'est arrêté ou est-ce que...
- Speaker #0
J'étais nausée. J'ai juste un peu revomi, mais pas grand-chose. Et j'étais un peu nauséeuse, mais pas suffisamment cette fois-ci pour m'ôter mes moyens. J'avais gardé des compotes. J'ai juste pu prendre une demi-compote sur la dernière montée. Sinon, je n'ai rien pu manger sur le reste de la course. Mais je savais qu'il fallait mieux, surtout que je m'hydrate, et que si je restais à jeun, de toute façon, à mon allure, je n'allais pas très vite. Ce n'était pas si grave que ça. Il ne fallait surtout pas que je redéclenche des vomissements.
- Speaker #1
Il fallait un peu choisir.
- Speaker #0
Oui, c'est ça.
- Speaker #1
Et après, la suite ?
- Speaker #0
Et après... Après, j'ai passé le dernier checkpoint là où je m'étais arrêtée l'année dernière. J'avais abandonné à 17 ou 18 kilomètres de l'arrivée. Donc, c'est le truc que tu regrettes pendant très, très longtemps après. Quand tu sais que tu avais juste 17 kilomètres, c'est très, très dur à encaisser. Mais là, j'ai passé ce dernier checkpoint. J'ai appelé ma mère. Je lui ai dit que je passais, que fallait qu'elle aille se coucher parce qu'en fait, depuis le matin, 7 heures, elle était sur le live trail. Elle avait fait ses courses la veille, elle ne bougeait pas de sa chaise, elle était super angoissée. Donc je lui ai dit, va te coucher, c'est bon, je n'ai plus qu'à faire 20 bornes et j'y suis. Elle n'est pas partie se coucher.
- Speaker #1
Évidemment pas, c'est ta mère.
- Speaker #0
J'ai pleuré parce que j'étais soulagée. C'était une grosse tension, je pense, de 4 ans qu'ils évacuaient. Et puis, j'ai juré à ma mère que j'arrêtais le trail.
- Speaker #1
Tu as vraiment fait ça ?
- Speaker #0
Je te jure. Et puis, j'ai appelé une amie derrière et je lui ai rejuré. Au cas où, je lui ai dit, je t'appelle. Au cas où, ma mère ne retiendrait pas que tu l'entendes. Je lui ai dit, j'annule toutes les courses où je me suis inscrite pour le reste de l'année. J'arrête le trail. Et même dans ma tête, j'arrêtais le sport, en fait. J'étais tellement, en fait, au bout du bout. Tu n'en peux plus. Tu perds de la lucidité. Ton cerveau est en pleine souffrance. Ce qui te dicte, c'est que ça suffit des conneries. Ça suffit.
- Speaker #1
Il faut s'arrêter maintenant.
- Speaker #0
Je te rassure. Deux heures après l'arrivée, je conservais les courses sur lesquelles j'étais inscrite. J'ai dû rappeler ma mère pour lui expliquer que j'allais continuer le trail. Elle s'en doutait, elle n'était pas ravie, elle n'est pas ravie, ravie, mais voilà, je n'arrête pas en fait.
- Speaker #1
Oui, je pense qu'elle a dû quand même se te connaissant, se dire bon, il y a peut-être 1% de chance que ce soit vrai.
- Speaker #0
C'est ça.
- Speaker #1
Et qu'est-ce que ça a représenté, tu vois, au moment de passer, peut-être dernière descente, au moment où tu passes la ligne d'arrivée, les émotions devaient être dingues. Est-ce que tu réalises à ce moment-là que tu as achevé cette quête ? Ou est-ce que même tu réalises pas un court ?
- Speaker #0
Non, c'est pas sur le moment, en fait. C'était un trop plein, c'était trop. Je sais que je suis arrivée pleine balle sur la rue Piétonne, qui aboutit en fait à cette finish line. L'arche d'arrivée est près de l'église de Cortina d'Ampezzo. C'est une super jolie place où je suis passée plein de fois. Et chaque fois que j'y repassais, maintenant depuis trois ans, parce que j'y vais aussi en vacances assez souvent. J'avais le cœur serré, le cœur brisé parce que je revoyais cette fine d'arrivée que je ne passais jamais. En fait, cette fois, c'est marrant, je te jure que c'est vrai, ça m'est vraiment arrivé. Mais en même temps, mon cerveau était très fatigué. Depuis trois ans, chaque fois que j'échouais, je me mettais sur les marches près de l'arche d'arrivée pour regarder les copains franchir la ligne parce que chaque année, j'allais avec… des copains et chaque année en fait ils y arrivaient et moi pas. Et en passant en fait devant ces marches, je me suis revue. Je me suis revue l'année d'avant, l'année d'avant et encore l'année d'avant, regardant en fait les gens passer. Et je me suis dit, en fait, c'est comme si je me voyais moi, la fille de l'année dernière et la fille de maintenant. Et je lui ai dit, ça va venir. Fais-toi confiance. Fais confiance au temps qui passe, au temps long. Parce qu'en fait... Il n'y a que le temps long qui est vraiment la seule vérité sur ce genre de choses. Il faut juste attendre et se faire confiance. Et ne jamais lâcher ses rêves, surtout s'ils sont importants pour toi. Et j'ai en quelque sorte réparé tout ce qui s'était passé les trois années précédentes.
- Speaker #1
C'est génial d'avoir réussi à faire ça. Et cette visualisation, je trouve que c'est un côté. Enfin limite magique, mais qui est très symbolique et qui est superbe. Et qu'est-ce que tu penses alors que ça t'a appris sur toi-même toute cette expérience ?
- Speaker #0
Comme je te disais, je pense que je fonctionnais beaucoup trop à l'ego avant. Et j'ai lâché prise totalement là-dessus. En fait, je veux pouvoir me dire que tout n'est pas possible. Ce n'est pas parce que je veux quelque chose à un instant T que je l'obtiendrai et que ce n'est pas grave, que ce n'est pas un dû et que les choses vont se déplier. En fait, il y a une phrase que j'aime beaucoup de Paul Éluard qui dit que les métamorphoses se font de façon invisible dans la nuit et l'obscurité. Et je pense en fait que nos métamorphoses à nous, la façon dont on grandit, se font dans le silence et la longueur. Et qu'il faut faire confiance à ce processus. Donc je pense que je suis moins butée avec ce que je veux. J'ai plus de lâcher prise. Et voilà, j'ai juste envie de profiter de la montagne et de ce que... Les autres expériences pourront m'apporter et je ne vois plus du tout l'échec de la même façon.
- Speaker #1
Est-ce que ça va changer ta manière d'aborder soit d'autres courses, soit ta pratique en tant que telle ?
- Speaker #0
Après, j'ai quand même toujours envie quand je prends le départ de finir une course, c'est quand même le but. Mais peut-être que j'y mettrais moins d'attente et d'inquiétude. Je pense que j'étais très crispée. et que cette crispation intérieure me bouffait beaucoup d'énergie et que si, comme je te disais, tu lâches prise, les choses se font beaucoup plus naturellement, en fait.
- Speaker #1
C'est un beau message. Ça vaut pour pas mal de choses à nouveau. Merci pour le tout ce partage. Et petite question encore pour finir, si tu devais donner un conseil à quelqu'un qui est un peu dans la même situation que celle dans laquelle tu étais, qui a l'impression de vivre des échecs et ne comprend pas trop. Qu'est-ce que tu lui dirais de faire maintenant que toi, tu as le recul nécessaire et que tu as réussi à passer cette phase ?
- Speaker #0
De se faire confiance, de ne pas se réduire à l'échec ou à une course. En fait, on est plein de choses. On est plein de choses, on est plein de rêves et de possibilités, de compétences et souvent, en fait, on a une mauvaise image de soi. C'est vrai que je trouve que les femmes en particulier...
- Speaker #1
J'allais te dire ça, c'est qu'en plus, c'est particulièrement féminin.
- Speaker #0
C'est vrai.
- Speaker #1
Pas que, mais...
- Speaker #0
On est vraiment nos pires ennemis, nos pires ennemis. On se regarde mal, on se traite mal, on se parle mal. Et si on se parle avec un peu plus de douceur, je pense qu'aussi, ça rend les choses beaucoup plus faciles. Et je pense que le corps et la tête, s'ils entendent cette douceur-là, ils ont plus envie de t'accompagner. Si tu les traites toujours comme des ennemis, comme des esclaves, qui doivent faire parce que tu as décidé qu'ils devaient faire, et si tu les maltraites, je pense en fait qu'ils se vengeront. Et depuis que je parle à mon corps différemment, et à mes jambes, et que je les remercie, et que je suis fière que mon corps me porte sur ces distances-là, et bien j'ai l'impression de... d'en avoir fait un allié. Et je pense qu'on n'est pas assez douce avec nous-mêmes. Voilà. Donc je dirais aux personnes qui poursuivent... Des rêves qui semblent trop gros pour eux-mêmes, qui sont difficiles à atteindre, qu'il faut se laisser le temps et être plus indulgent.
- Speaker #1
Super, merci beaucoup. En plus, c'est chouette, ce n'est pas un conseil qu'on entend souvent. Ça fait d'autant plus plaisir.
- Speaker #0
Merci beaucoup, Lorraine,
- Speaker #1
pour avoir changé ce temps. Je suis vraiment ravie pour tout vous expliquer. Ça faisait un moment qu'on préparait cet épisode avec Emma, ce qui lui mettait à limite une petite... de pression en plus de réussir. Mais bon, j'avoue que je me doutais que l'histoire allait être belle d'une manière ou d'une autre. Je n'aurais pas su dire comment, mais en tout cas, l'histoire était quand même vraiment belle et pleine de sens. Ce n'est pas juste l'histoire de quelqu'un qui finit un ultra. C'est ça que j'avais aussi envie que tu puisses partager. Donc un grand merci. Je vous invite toutes aussi à suivre Emma sur son compte Instagram. Tu écris toujours très très bien. C'est un plaisir de lire, de voir des belles photos avec de beaux textes. Merci, je vous invite toutes à suivre ça.
- Speaker #0
Trop contente d'avoir partagé ce temps avec toi, Lorraine.
- Speaker #1
Merci et à bientôt sur Esport pour l'Auto. Merci d'avoir écouté cet épisode. Si cela vous a plu, n'hésitez pas à vous abonner au podcast et à mettre une bonne note sur les plateformes. Cela nous aide. À bientôt.