- Speaker #0
Bienvenue dans TCA, etc., le podcast qui décrypte les troubles des conduites alimentaires et tout ce qui gravite autour, parce que ça n'est jamais seulement qu'une histoire de bouffe. Je suis Flavie Mitsono, et j'accompagne les mangeuses compulsives à devenir des mangeuses libres bien dans leur basket. Alimentation, peur du manque, insatisfaction corporelle, peur du jugement, du rejet, empreinte familiale, grossophobie, les sujets abordés dans ce podcast sont très vastes, et pour ce faire, mes invités sont aussi très variés. Retrouvez-moi aussi sur Instagram où j'aborde tous ces sujets au quotidien sur flavie.mtca. Très belle écoute. Bonjour Jessica et bienvenue dans le podcast. Je suis très contente de t'accueillir.
- Speaker #1
Merci, moi aussi, je suis contente d'être là. Un peu peur, mais contente.
- Speaker #0
Ouais, on en parlait en off juste avant, où tu me disais que c'est un sujet dont tu parles très peu et que la première fois où tu as parlé de tes troubles alimentaires, c'était il y a trois semaines.
- Speaker #1
C'est ça.
- Speaker #0
Donc, effectivement, c'est quelque chose de... Tu parlais du côté honteux pour toi d'aborder ce sujet-là. Oui. Donc, vraiment, je salue ton courage d'être là aujourd'hui. Merci de venir en discuter avec moi et de faire quelque part ce cadeau aussi aux personnes qui nous écouteront. En préambule de tout notre échange, ce que je te propose, c'est de commencer par une présentation où tu es libre de dire exactement ce que tu veux.
- Speaker #1
Ok, moi c'est Jessica, 40 ans dans l'année. Annie, un peu. un peu j'ai envie de dire symbolique c'est enfin les 40 voilà j'ai envie que ça marque une coupure je suis maman de trois enfants et marié à un homme qui me comble je me bats contre moi même depuis alors j'ai envie de dire peut-être depuis toujours parce que j'ai toujours eu une relation à mon corps très compliqué par contre j'ai réellement commencé tout ce qui est régime alimentaire j'avais 18 ans je dirais, le premier gros régime où j'ai perdu plus de 20 kilos. Donc, ça a quand même été suivi avec un nutritionniste. Les choses étaient faites dans les normes, entre guillemets, si je peux dire, avec un professionnel du moins. Et je crois que... Alors, je n'ai pas forcément tout de suite eu des troubles alimentaires, mais je pense que ça a été le début de quelque chose.
- Speaker #0
OK. Ok, ça marche. Merci. On y reviendra sur le début ou non. Et d'ailleurs, c'est vrai que c'est souvent compliqué de dire à quel moment je considère que j'étais dans des troubles alimentaires. C'est parfois complexe. Il y a une question que j'aime beaucoup poser aux personnes que je reçois ici, tu le sais, c'est le fait de savoir quel est le premier souvenir, ou en tout cas le souvenir le plus marquant, à la fois dans la relation au corps et dans la relation à l'alimentation. En sachant que ce n'est pas nécessairement, encore une fois, le... en lien avec le TCA, ça peut être des souvenirs aussi très positifs.
- Speaker #1
Le premier, c'est vraiment la relation au corps. C'est vraiment ce qui m'a perturbée. Je me souviens vouloir, enfant, couper mes cuisses parce qu'elles étaient trop... parce qu'elles se touchaient, parce que ça n'allait pas. J'ai vraiment toujours eu cette comparaison aux autres petites filles. qui était toute menue, toute fine. Moi, j'étais... Alors, sans être grosse, parce que quand je regarde les photos, je ne l'étais pas. Mais voilà, c'était le côté... Elle est charpentée, elle a des grosses os. C'est des phrases que j'ai entendues. Et le mot du médecin dans le carnet de santé aussi, surveiller le poids. Enfin voilà, c'est des choses qui me ramènent toujours à mon corps. C'est vraiment ce qui me marque. Plus que l'aspect nourriture, parce que je ne me souviens pas avoir manqué de quoi que ce soit ou m'être privée sur quoi que ce soit. À la maison, on mangeait de tout. On a toujours bien mangé, d'ailleurs. Je n'avais pas l'impression de manquer.
- Speaker #0
Et tu n'as pas un souvenir particulier par rapport à la nourriture ? Un souvenir d'enfance ?
- Speaker #1
Les yabons chez ma grand-mère. C'est des petits riolets. J'en ai racheté. D'ailleurs, je n'ai pas trouvé. Ça existe toujours ? Ouais, ça existe toujours. Et je m'attendais à, je sais pas, à retrouver plein de trucs. En fait, rien s'est passé, donc j'ai limite été déçue.
- Speaker #0
Ah ouais.
- Speaker #1
Ouais. Mais c'était les goûters chez ma grand-mère. Le yabon, les gâteaux qu'on trompait dans le jus d'orange. Enfin, voilà, des sucrés.
- Speaker #0
OK, et bons souvenirs, j'ai l'impression, quand je vois ton visage.
- Speaker #1
Ouais, oui, oui, oui. Chez ma grand-mère, ouais, c'était des très bons souvenirs.
- Speaker #0
Ok, et t'avais quel âge dans ces différents souvenirs, que ce soit les yabons ou les goûters chez mamie, ou l'envie de couper tes cuisses ?
- Speaker #1
Je dirais que possiblement c'était dans la même période. J'étais enfant, c'était souvent les goûters, je suivais mes parents, donc ma grand-mère habitait juste à côté, mais les dimanches après-midi on y allait souvent. Donc c'était à ce moment-là qu'on prenait ses petits goûters, et c'est aussi dans ces moments-là que j'étais en primaire. Je dirais la période 7-10 ans.
- Speaker #0
Et tu as des frères et sœurs ?
- Speaker #1
J'ai un grand frère. J'ai un grand frère qui avait aussi possiblement des soucis de poids, puisque je me rappelle ma maman avoir été voir des spécialistes et il avait des espèces de granules à prendre pour lui couper l'appétit. Ça, c'est un truc que je me rappelle. à vouloir les goûter aussi pour moins manger. Je me rappelle en avoir piqué dans la poche. Alors, je ne sais pas quel âge il avait. C'est présent et en même temps, comme si j'avais voulu l'oublier quelque part.
- Speaker #0
OK. Vous avez combien d'écarts, tous les deux ?
- Speaker #1
On a 27 mois d'écart.
- Speaker #0
Ah oui, vous êtes très proche en âge. OK. Quelle place ça prenait ces sujets-là globalement dans ta famille ? Alors la famille nucléaire avec vraiment tes parents, mais aussi la famille un peu élargie, c'est-à-dire, est-ce qu'il y avait des gens avec des troubles alimentaires ? Est-ce qu'il y avait des gens considérés en surpoids ou en obésité ? C'est quoi l'histoire de la famille par rapport à tout ça ?
- Speaker #1
Je ne sais pas. Alors j'ai mon papa qui est un bon vivant, qui a toujours été charpenté aussi, comme on peut dire. Je n'ai pas souvenir de « il faut être au régime » ou « il faut être mince » de la part de mes parents. Ce n'est pas quelque chose qui me vient en tête. C'était même plus l'inverse, vouloir faire plaisir et vouloir donner à manger. J'ai même eu le même rapport d'ailleurs avec ma maman et mes enfants. Du coup, ils sont là, on leur donne un bout de chocolat, on leur donne un gâteau. À lui dire « stop, je ne veux pas qu'ils mangent du chocolat parce que tu leur donnes du chocolat. J'avais envie qu'ils mangent parce qu'ils en avaient envie. » Ça, c'était le côté un peu conflictuel. avec mes parents. Je pense que quelque part, j'en aurais peut-être voulu de toujours vouloir dire « tiens, mange » . C'est à leur déplaisir de me voir manger. Je pense qu'en soi, il n'y avait vraiment pas de mauvaise chose là-dedans. Mais je ne sais pas, est-ce qu'ils ont manqué, eux étant plus jeunes, très certainement, parce que mon papa est de 54, ma maman de 63, c'était des périodes un peu plus compliquées. Mais voilà, nous, on avait accès et limite aux... Fallait manger. C'était bénéfique.
- Speaker #0
Ok. Tu avais l'impression qu'il y avait une proposition constante de nourriture que finalement, vous n'aviez pas le temps d'avoir faim ou de vous demander ce que vous aviez envie de manger ?
- Speaker #1
Disons qu'en fait, on en avait apporté. Ma maman était éprimeur. Enfin, moi, j'étais éprimeur. Donc, on avait toujours des fruits par profusion, puis des bons fruits, des bons légumes. Ils faisaient les marchés, donc quand on mangeait, en fait, c'était des plats qu'ils allaient chercher au boucher traiteur. Donc, c'était des choses très bien préparées, très grasses, entre guillemets. J'ai toujours eu accès à des plats enrichis, entre guillemets.
- Speaker #0
Ok. Je t'avoue qu'en écoutant, ce qui me surprend, du coup, c'est ce positionnement très, effectivement, bon vivant, produit de qualité, puis il faut manger, il faut manger. et à la fois ton frère qui prendrait des granules pour voir son appétit coupé, toi qui es à compte.
- Speaker #1
Les médecins ont parlé, en fait, tout simplement. Comme moi, il était marqué dans mon carnet de santé « Surveiller le poids » , je pense que techniquement, ma mère a suivi les recommandations des médecins.
- Speaker #0
Ok. Tu penses qu'en fait, il y a eu le milieu médical qui a créé une forme de peur chez ta maman ?
- Speaker #1
Je pense, oui, très certainement.
- Speaker #0
Est-ce que tu penses que... Avec le recul, ton frère et toi, vous étiez réellement en surpoids dans l'enfance. Et tu vois, quand je dis réellement surpoids, tout à l'heure, tu as dit plusieurs fois, tu sais, ce côté la carrure bien bâtie, bien charpentée. Est-ce qu'il y avait quelque chose qui relevait juste de votre morphologie et de traits génétiques ? Ou est-ce que vous étiez au-dessus de votre poids d'équilibre ? C'est ça que je veux dire.
- Speaker #1
Pour ma part, moi, personnellement, je ne pense pas que j'étais vraiment au-dessus de mon poids d'équilibre. Certainement, dans les courbes, j'étais haute, mais parce que j'ai toujours été grande aussi. déjà, donc je pense que techniquement ça allait avec. Après, j'ai le souvenir de mon frère un peu plus potelé, un peu plus… on le voit sur les photos de nous enfants, oui, on est potelé, entre guillemets, mais après, je revois des photos de mon frère à mon mariage, où du coup il était charpenté, mais pas gros, en fait. Après, maintenant… présentement, c'est différent. Je dirais peut-être un léger surpoids, mais sans forcément aller trop loin.
- Speaker #0
Aujourd'hui, c'est différent.
- Speaker #1
Par contre, il y a eu l'esprit... Moi, dans l'adolescence, je pense qu'il y a des choses qui se sont lâchées et j'ai vraiment pris beaucoup de poids, ce qui fait que de toute façon, déjà à 18 ans, j'ai voulu me prendre en main et que j'ai perdu 20 kilos. Je pense que mon frère, lui, était... plus linéaire, entre guillemets. Et c'est vrai que moi, quand je suis arrivée à ce stade où j'ai commencé à faire attention, ça a été vraiment la priorité. Et il était... Je ne devais pas passer au-dessus d'un certain poids. Donc, il y a eu des moments de restriction, il y a eu des moments de beaucoup de sport, il y a eu des moments où, je me rappelle, la grossesse de ma fille, il était hors de question que je prenne du poids. C'était... Ok. j'ai pris 9 kilos et accouché d'un bébé de 4 kilos donc je suis sortie de la maternité j'avais pas de poids de plus qu'avant de tomber enceinte dans ma tête c'était c'était pas possible et le
- Speaker #0
gynéco appuyait ça en plus c'était d'habitude le truc que j'entends systématiquement au secours bon là on a fait un bond en avant je veux bien qu'on rembobine un peu parce que t'as dit un truc qui m'intéresse, t'as dit dans l'adolescence il y a des choses qu'on lâchait et j'ai pris beaucoup de poids, qu'est-ce que tu veux dire quand tu dis qu'il y a des choses qu'on lâchait ?
- Speaker #1
Alors déjà j'ai très vite, moi je suis rentrée en apprentissage j'avais 16 ans et je me suis mis en ménage avec mon copain à ce moment-là donc en fait déjà encore enfant et jeune adulte en fait, à 16 ans Je vois ma minette aujourd'hui qui a 13 ans, dans 3 ans, je me dis mais j'ai jamais de la vie, de la neige, j'en ai pas besoin. Et en fait, je pense que là, plus de modèles à la maison, plus de malbouffe aussi. C'est la nourriture facile, pas de restrictions du tout. Je mange ce que je veux quand je le veux, je l'achète avec mon argent, donc je pense que j'ai envie. Il y a plein de choses qui se sont mises en place et peut-être pas forcément avec les bonnes constantes, entre guillemets. Peut-être justement à la maison, tellement beaucoup de légumes, beaucoup de fruits, c'est des choses qui sont passées un peu à la trappe une fois qu'on s'est mis ensemble, que je me suis mis...
- Speaker #0
Oui, c'est étonnant, tu ne dis pas de restrictions, comme s'il y avait des restrictions avant à la maison,
- Speaker #1
tu vois. C'est flou en fait dans ma tête. C'est vraiment... Je me revois... avant de... Parce que à 14 ans, j'ai été motorisée, comme beaucoup de nous à cette époque, et je me revois penser avant l'instant, me dire je vais pouvoir aller m'acheter des gâteaux. Alors qu'en soi, j'avais pas l'impression de manquer de...
- Speaker #0
Est-ce qu'il y avait des gâteaux chez vous, concrètement ? Est-ce qu'il y avait des gâteaux, des bonbons, du chocolat ?
- Speaker #1
Alors, des bonbons, très certainement que non. Des gâteaux, du chocolat... Je vois des fruits. Beaucoup de fruits parce que c'est vraiment des choses qu'on avait de part du métier de ma maman.
- Speaker #0
Parlez-moi de votre enfance, je vois des fruits. Et tes parents sont toujours en vie ? Oui. Tu n'as jamais eu cette discussion-là avec eux ? Tu sais, d'aller questionner, parce que j'ai l'impression qu'il y a pas mal de flou, et donc de dire... « Tiens, quand on était petits, est-ce qu'on avait des gâteaux ? Est-ce qu'on avait ceci ? Et tiens, j'ai le souvenir de mon frère qui a pris ces granules-là, mais à quel âge c'était ? Qu'est-ce que c'était ? Qu'est-ce que ça a impliqué ? »
- Speaker #1
Je pense que ma prise de conscience des TCA est tellement récente que je n'ai pas eu cette démarche déjà. Là, on a eu une autre étape récemment où j'ai mon papa qui a fait trois AVC. Du coup, ma maman est rentrée dans un monde où il faut faire très attention à lui. C'est l'homme de sa vie. Là, elle est rentrée dans une cuisine saine. Mon papa a perdu 10 kilos en un an. sans restriction, mais parce qu'elle a changé sa façon de cuisiner et parce qu'elle a eu peur pour lui. Et du coup, il y avait des petits pics, en fait. Pas méchant, mais quand on allait au restaurant, c'était « Oh, ben tu manges bien aujourd'hui ! » Et puis ma maman, qui derrière, me disait « Oui, mais tu ne vas pas manger pendant dix jours derrière. » C'est des petites phrases comme ça. Donc en fait, je n'ai jamais eu non plus envie d'en parler parce que c'est des trucs qui font mal, quoi.
- Speaker #0
même sans vouloir le faire à mettre le doigt sur le problème et pour moi c'était pas un problème à mettre le doigt sur le problème ou pas ça va peut-être être un peu dur ce que je vais dire mais le fait qu'elle parle de cette manière là fait peut-être partie du problème parce que finalement tu me disais que il n'y avait jamais eu d'obsession de la minceur et tout ça mais finalement il y a quand même une attention particulière sur ce qui est mangé ... Un lien qui est fait avec le poids où il ne faudrait pas grossir. Si tu manges comme ça, tu ne vas pas manger ensuite. En vrai, il y a quand même une culture du régime et de la minceur qui semble présente.
- Speaker #1
J'ai l'impression, en fait, par moments, quand j'essaie d'y penser, d'avoir fait un blackout de certaines périodes. J'essaie de me souvenir. Je crois que volontairement, la tête, il fasse des trucs qui ne sont pas assez.
- Speaker #0
Ok, donc t'as 16 ans et donc on peut imaginer que quand même il y avait peut-être quelques restrictions à la maison, quelques petites phrases, quelques trucs qui expliqueraient que tu l'as nommé tout à l'heure comme étant un peu un lâchage, quoi ça lâche, et donc tu manges des choses auxquelles peut-être t'avais pas accès avant, et ce qui se passe c'est que tu prends beaucoup de poids du coup entre 16 et 18 ans ?
- Speaker #1
Ouais, peut-être même un peu avant 16 ans, enfin sur la période adolescence, ouais, je prends beaucoup de poids. Je ne sais même pas si je me rends compte, en fait. Je n'ai pas la notion de je ne fais pas, je fais. Voilà, ça se fait. Et puis, je pense qu'il y a le côté aussi où je rentre en apprentissage de coiffure. Donc, la coiffure, c'est la beauté, c'est la représentation de la femme, c'est faire attention. Et du coup, pendant cette période d'apprentissage, je me dis qu'il faut que je voie un nutritionniste. Il faut que je fasse quelque chose. Je devais avoir possiblement 17 ans, parce que je me rappelle, mes têtes fixées comme objectif de perdre 10 kilos pour mes 18 ans. Et objectif que j'ai atteint, et ça, ça devait être... Je suis d'avril, j'avais dû commencer en décembre. Donc j'ai dû perdre 10 kilos en 4 mois, à peu près. Et après, du coup, ça a continué, et j'ai perdu plus de 20 kilos. au total.
- Speaker #0
Qu'est-ce qui se passe après cette perte de poids, du coup ?
- Speaker #1
Une rupture, déjà. Donc, c'était mon amour, mon premier amour. Ça faisait cinq ans qu'on était ensemble. Et parce que je deviens trop jolie, il s'éloigne, il rencontre quelqu'un, il me le dit, trop de trop, je veux, limite pour pas te perdre, je te quitte avant, quoi. C'était... Là, j'ai pris une claque assez forte. Et je ne sais pas, c'est... Comment dire ? La vie suit son cours, en fait. Je me relève de cette rupture. Je n'ai pas l'impression que, point de vue alimentaire, j'ai des choses... Je mange quand j'en ai envie et je ne reprends pas de poids. Après, j'ai ce mécanisme qui a été vu avec le nutritionniste. Je sais comment doivent être mes assiettes, mais en fait, je ne réfléchis pas. Ça se fait naturellement. Et je suis à un poids entre 67 et 68 kilos d'équilibre qui se fait naturellement, je dirais.
- Speaker #0
Tu penses que c'était ton poids d'équilibre, ça ?
- Speaker #1
Je ne sais pas si c'était mon poids d'équilibre, mais c'est quelque chose que je maintenais sans faire d'efforts, sans faire de sport, sans...
- Speaker #0
Et avec une alimentation qui te semblait relativement libre quand même ? Si on parle des gâteaux, par exemple, des choses comme ça.
- Speaker #1
Je n'avais pas l'impression de me priver. Oui, je faisais des restos régulièrement, je sortais avec mes amis. Alors j'avais certainement des pensées de comment faire attention, mais sans mal-être en fait. Enfin, je n'avais pas l'impression de...
- Speaker #0
Ok, et cette période, elle se maintient pendant combien de temps ?
- Speaker #1
Je dirais jusqu'à ce que... Alors j'ai eu une période pendant un an où j'ai eu une histoire d'amour très compliquée. où j'avais très peu d'appétit. Donc là, il était facile de ne pas manger, en fait, parce que cette histoire me prenait tellement trip que ça coupait tout. Et puis, après cette histoire, je rencontre mon mari. Et là, c'est une boule d'amour, en fait. Je suis bien, mais je fais quand même attention. À cette époque, je refais... le WW pour pas le citer. Donc, ce qui me permet quand même de contrôler encore les quantités, c'est toujours ce côté quantité, je pense, qui m'a suivie, en fait, tout au long de ma vie.
- Speaker #0
OK. Tu as l'impression de devoir contrôler tes quantités sans quoi ? Ce serait trop ? Tu ferais n'importe quoi ?
- Speaker #1
Oui, je pense, oui. OK. Ça déraille. Je passe un cap où... ou je ne peux pas, ce corps, je ne peux pas, en fait. C'est certaines formes qui se posent et je ne les aime pas.
- Speaker #0
De quel moment tu parles, là ?
- Speaker #1
Le moment où j'ai rencontré mon mari. Et pourtant, je suis bien dans ma vie de couple. Je suis bien dans mes...
- Speaker #0
Parce que tu as pris du poids à ce moment-là ?
- Speaker #1
J'ai pris un peu de poids, mais sans plus. Je pense que je tournais toujours sur la fourchette 67-70. On était vraiment sur un... Mais je préférais mon corps à 67 qu'à 70, en fait. C'était toujours... Dès que je me rapprochais du 7...
- Speaker #0
Il suffisait de 2-3 kilos pour que ça fasse complètement ton regard sur toi.
- Speaker #1
Tout à fait.
- Speaker #0
Alors que fondamentalement, quand on prend 2-3 kilos, par exemple, souvent les personnes à l'extérieur ne le perçoivent pas du tout, tu vois.
- Speaker #1
C'est plutôt impossible. Là, je viens de vous le dire, même là, avec la prise de conscience, du coup, je me suis dit, allez, j'essaie, je ne pèse pas, je ne fais rien. Et là, je me suis sentie gonflée et il a fallu que je reprenne.
- Speaker #0
Oui, c'est beaucoup dans la tête.
- Speaker #1
Je ne me suis pas pesée parce que si je me pèse, ça va être encore plus un mal-être et que je ne veux pas. Mais là, j'ai repris le contrôle parce que je ne peux pas. Je n'aime pas ce que je vois, je n'aime pas ce que je sens. Donc non, ce n'est pas possible.
- Speaker #0
Ok, donc tu rencontres ton mari, tu fais ce fameux régime. Ça te permet de te maintenir à un poids où ça va à peu près pour toi psychologiquement ? Tu acceptes à peu près. Et quoi ? Qu'est-ce qui se passe ensuite ? Il y a les grossesses ?
- Speaker #1
Je fais ce régime. Dans un premier temps, il y a la maison et le mariage sur la même année. Forcément, le mariage, il faut rentrer dans la robe. Je continue tout le temps cette façon de manger. Je suis toujours sur ce même poids. Et puis, il y a la première grossesse, donc ma fille, où là, clairement, je ne dois pas prendre de poids ou très peu. Et dans mon objectif, je lis les magazines. Une grossesse, on prend entre 9 et 12 kilos. OK, je ne prendrai pas plus de 9 kilos. J'ai mis une grossesse à terme, terme du terme, puisqu'elle devait arriver le jour, elle est pile poil. Et je suis à 9 kilos de prix.
- Speaker #0
Donc ça reste une obsession, grossesse ou pas grossesse, il y a quelque chose de très contrôlant finalement dans ton rapport à l'alimentation. J'ai envie de dire de très contrôlant et à la fois qui te permet d'avoir un semblant de vie normale quand même.
- Speaker #1
Oui, c'est ça. J'ai l'impression d'être une éclipse en fait. je suis dans un monde normal et puis il y a un petit côté noirceur qui vient de temps en temps, on se rappelle et un peu entre deux phases c'est je veux faire bien pour être bien mais je sais qu'il y a des choses qui sont pas si bien que ça
- Speaker #0
En fait, oui. Quand tu dis je fais bien pour être bien, je contrôle ce que je mange pour essayer d'aimer mon corps. Mais fondamentalement, si je fais tout ça, c'est parce que je n'aime pas mon corps. Et en continuant de faire ça, je reste dans l'optique que j'aime. En fait, tu nourris le problème sans t'en rendre compte. Le fait de ne pas aimer ton corps, c'est-à-dire qu'il y a zéro acceptation. Et finalement, rien que le fait de contrôler tout ce que tu manges vient renforcer le fait de ne pas aimer ton corps. de ne pas pouvoir lui faire conscience.
- Speaker #1
Le chat qui se mord la queue.
- Speaker #0
Est-ce que tu te souviens, j'ai deux questions, combien de temps a duré cette période ? Peut-être que finalement, ça ressemble à ce que tu vis encore aujourd'hui ou pas. Donc, combien de temps ça a duré cette période, tu sais, de contrôle de l'alimentation, mais qui te permet quand même d'avoir une vie plutôt normale à côté. Et est-ce que tu te souviens de ton... de la place que ça prenait à ce moment-là, dans ta tête et dans ton quotidien ?
- Speaker #1
Je n'ai pas du tout la notion de la place que ça prenait à ce moment-là. J'ai l'impression que ça fait 20 ans que je vis comme ça, en fait. Clairement, depuis que j'ai fait ce premier régime volontaire et guidé, C'est moi, en fait. C'est moi depuis... Donc, ça fait 22 ans que c'est moi comme ça. Avec des phases plus ou moins importantes, de restrictions plus ou moins fortes. Avec l'ajout de sport, l'arrêt de sport.
- Speaker #0
Et pourquoi l'ajout de sport ? Pourquoi l'ajout ? Pourquoi l'arrêt ?
- Speaker #1
L'ajout... Alors, en fonction du temps que j'avais, peut-être. J'allais courir, parce que pour moi, c'était le côté... Je prenais mes baskets et puis du coup, on court, on élimine.
- Speaker #0
Ah, voilà. J'allais te demander pourquoi, en fait, c'était quoi le but ? Donc, c'était pour éliminer.
- Speaker #1
Je cours, j'élimine et j'aime particulièrement la sensation d'après-course. Ce côté, j'ai tout donné, je suis vidée, j'ai comme un creux là, là. Et c'est quelque chose que je fais toujours, beaucoup de sport. Et c'est quelque chose que je retrouve qu'avec la course, cette sensation-là. Comme si on enlevait un truc, je ne sais pas. Alors que pourtant, ce n'est pas mon sport de prédilection qui me fait vibrer. Mais je ne sais pas, la sensation que ça apporte, c'est assez particulier.
- Speaker #0
Et donc, arrêt de sport parfois parce que tu manquais de temps ?
- Speaker #1
Parce que je manquais de temps, ouais, ou pas forcément l'envie. Peut-être dans les périodes où je me sentais peut-être mieux visuellement et physiquement, je me disais que j'en avais peut-être pas forcément besoin. Je pense qu'inconsciemment, ça devait se faire comme ça.
- Speaker #0
Donc, tout est relié à ça, en fait. Il n'y a pas de notion de... Finalement, quand tu me dis ce que t'apportes la course à pied avec la sensation d'être quelque chose en moins, là... En fait, même ça, finalement,
- Speaker #1
c'est relié au physique. Le moment où, dans le sport, je lâche le côté physique, je pratique la pole dance depuis presque sept ans maintenant, après la naissance de la deuxième grossesse. Et là, en fait, j'apprends à aimer mon corps. pour ce qui me permet de faire, pas pour ce qu'il est. Et là, c'est la notion sport-plaisir. Je le fais parce que j'en ai envie et pas pour contrôler quelque chose, au début. Après, ça brille.
- Speaker #0
Comment ça ?
- Speaker #1
Et bien, après, je fais de la pole, je fais que ça. Et je commence le renfort. parce que le renfaux, ça aide forcément à porter son poids sur la peau, à ce que ce soit plus aérien, à ce que ce soit plus gracieux. Ça commence la souplesse, pareil que j'affectionne particulièrement. Et là, on rentre dans le côté où je m'aperçois que ça change mon corps de la façon dont j'aime. Et du coup, je ne le fais plus... Alors, je fais toujours la peau par plaisir, mais le renfaux, je le fais parce que ça change quelque chose et que ça me plaît physiquement. Là, c'est le côté... J'ai l'impression d'avoir brillé par le sport. C'est devenu un élément compensatoire à part entière. J'ai besoin de faire 4-5 séances minimum par semaine.
- Speaker #0
De pole dance ou de renfaux ?
- Speaker #1
De mélange de tout. de Paul, Laurent Faux, alors principalement Laurent Faux, je me lève.
- Speaker #0
à 6h du matin pour pouvoir faire ma séance renfaux sur le temps où les enfants dorment, où mon mari dort. Et du coup, je vois que mon corps évolue. Et voilà, le soir, je vérifie la séance, je sais ce que je vais faire. Il faut que ce soit fait. Et ça, c'est posé. Je n'arrive pas à faire autrement.
- Speaker #1
Qu'est-ce qui se passe si tu ne le fais pas ?
- Speaker #0
Je suis dans l'optique où pas dépenser assez d'énergie par rapport à ce que je vais possiblement manger dans la journée. C'est le côté quelle énergie rentre, quelle énergie sort.
- Speaker #1
Tout doit passer par un calcul de la tête. Tout est intellectualisé.
- Speaker #0
C'est ça.
- Speaker #1
Zéro autonomie de ton corps.
- Speaker #0
Zéro.
- Speaker #1
Alors qu'à côté de ça, tu ne sais pas quelle quantité de liquide rentre, quelle quantité de liquide sort. L'urine, la sueur. Quelle quantité de toxines sont éliminées ? Mais la nourriture, tout ce qui rentre et tout ce qui sort. C'est ça. Parce que tu me dis que ça fait 22 ans que tu as l'impression d'être un peu dans le même schéma alimentaire. Est-ce que le contrôle alimentaire ne s'est pas quand même un peu durci ? Parce que là, tout à l'heure, tu parlais de peser la nourriture. Est-ce que tu n'es pas dans quelque chose d'un peu plus rigide actuellement autour de l'alimentation ?
- Speaker #0
Alors totalement, dans le fait qu'il y a les aliments sains et les aliments plaisir, mais attention quoi. Alors j'essaye toujours d'en prendre un peu pour justement limiter entre guillemets les éléments de crise qui sont apparus il y a peu de temps en fait par rapport au recul que j'ai. Donc je me suis dit que j'étais certainement trop stricte dans... dans mon alimentation. Et puis, de toute façon, ça s'est vu sur mon corps et sur mon poids. Je suis descendue à 61 kilos. Donc, là, je mangeais clairement entre 1200 et 1300 calories par jour et en faisant excessivement de sport. Donc, on est rentré dans des réserves où l'alcool m'a dit « alerte ! » Je fais quoi ? Mais c'est con, mais je m'aimais quoi en fait ? J'aimais mon corps, là, avec la souffrance que ça implique derrière.
- Speaker #1
Qu'est-ce qui fait que ça a créé autant d'émotions de dire ça ? Je m'aimais, j'aimais mon corps. Quelle émotion te traverse, là ?
- Speaker #0
J'aimerais pouvoir être libre. J'aimais mon corps, mais je n'aimais pas la personne que j'étais parce que j'étais tout le temps énervée, parce que je criais sur mes enfants. Parce que je me disputais avec mon homme. Parce que je n'étais pas moi, en fait. J'aimais juste l'enveloppe que j'étais. Mais indirectement, c'est aussi ça que je recherche encore aujourd'hui. Pouvoir être comme ça, en étant plus sereine vis-à-vis de ma famille. J'ai mes loulous, ils me le disent. « Maman, tu cries moins. » Et ça, ça fait plaisir. Mais c'est difficile de... Je veux rester dans ce côté bienveillant pour mes enfants et pour ma famille et lutter contre le démon qui me dit qu'il faut changer. Cette société de minceur, parce que c'est ça clairement, on est poursuivi par tout ce qu'on voit partout et ça bousille tout.
- Speaker #1
Tu penses que ce serait possible de rester celle que tu es aujourd'hui, celle que tu as retrouvée en fait ? C'est-à-dire rester toi tout en retrouvant ce corps ? Tu crois que c'est compatible ?
- Speaker #0
Ce n'est pas compatible parce que cette partie de moi qui contrôle tout est omniprésente et clairement, il n'y a pas de plaisir à table. parce que je vois que les miens mangent d'une façon et que moi, j'ai besoin de quantifier l'assiette. Et puis, j'ai la question de mes enfants. Maman, pourquoi tu pèses ? Maman, pourquoi tu fais ça ? Aujourd'hui, j'arrive à leur dire. Maman, ce n'est pas normal ce qu'elle fait. Toi, il faut que tu t'écoutes. Quand tu n'as plus faim, il faut arrêter. Quand tu as faim, il faut manger. J'essaye d'avoir un dialogue. ouvert, mais ce dialogue est en contrainte avec ce que je reproduis et les enfants fonctionnent par mimétisme. Donc, c'est compliqué de faire bien. Oui, entre la tête et le corps, quoi. C'est ce combat perpétuel, moi avec moi, entre ce que je veux leur faire voir, leur montrer, leur enseigner, et ce que je fais.
- Speaker #1
Et donc, pour revenir à ma question, j'insiste, mais je crois que c'est important, que peut-être de toi, t'entendre le dire. Est-ce que tu penses que c'est possible d'avoir ce corps-là où tu dis j'aimais l'enveloppe ? Est-ce que c'est possible d'avoir ce corps dont tu aimais l'enveloppe tout en restant toi ?
- Speaker #0
Je ne sais pas. Honnêtement, je ne sais pas.
- Speaker #1
Qu'est-ce qui te met le doute ? En tout cas, qu'est-ce qui te fait penser que ce serait possible ?
- Speaker #0
Je ne sais pas. D'un côté, c'est peut-être certainement pas possible parce que c'est deux personnes complètement différentes, de toute façon, entre le moment où je suis à ce corps que j'aime et où je suis dans la souffrance. Parce que je passe beaucoup de temps à me faire souffrir pour avoir ce résultat. Et là, la personne où je suis aujourd'hui, où du coup, je passe moins de temps à me faire souffrir et je passe plus de temps à être avec ce que j'aime. Clairement, dans la logique, j'ai envie d'être avec ceux que j'aime. Mais il y a cette petite bête noire qui est là et cette petite voix qui parle tout le temps et qui est dure à faire taire.
- Speaker #1
Oui, j'entends. Mais j'insiste sur ce point. Oui, OK, il y a la petite voix qui raconte des choses. Mais tant que tu croiras que quelque part, c'est possible, que tu pourrais y arriver et que peut-être un jour, tu trouveras la solution qui te permettra d'y arriver. la petite voix, elle aura toutes les raisons d'exister. Moi, je vais te dire ce que j'en pense. Je pense que ce n'est pas possible. Et que ce n'est pas qu'une question, enfin, ce n'est clairement pas une question de volonté, etc. La volonté, tu l'as eue, tu as réussi à maigrir. Il y a plein de gens qui nous écoutent qui ont certainement un vécu similaire. La réalité, c'est que du coup, tu étais affamée. Je veux dire, empêche-toi de boire pendant toute une journée, tu vas avoir ton humeur. Empêche-toi d'aller faire pipi pendant... Tu te mets, je ne sais pas, tu te dis pendant les 9 heures à venir, je ne fais pas pipi. Alors déjà, juste l'idée de te dire pendant les 9 heures à venir, je ne fais pas pipi, tu vas dire, mais attends, je crois que j'ai envie de faire pipi. Tu vois, il y a des trucs qui vont se créer dans ta tête et tu vas voir dans quel état émotionnel tu vas te retrouver. Ce que je veux dire par là, c'est que manger aujourd'hui, c'est devenu un acte... Je pourrais mettre plein d'adjectifs. Mon Dieu, il y a quelque chose de... On met de la morale sur le fait de manger. On est censé prouver nos qualités, nos trucs par rapport à ce qu'on mange et tout ça. Manger, c'est comme respirer. Manger, c'est comme boire. Manger, c'est comme dormir. C'est juste tes besoins. Je te mets au défi. Pendant un mois, tu t'obliges à ne dormir que quatre heures par nuit. Quatre heures par nuit, tu dors quand même. Mais ne dors que quatre heures par nuit. Et essaie d'être... à l'écoute de tes gamins, de ne pas crier, de voilà. Et en fait, même si je te disais, c'est un peu comme si je te disais, en dormant quatre heures par nuit, tu vas perdre là les dix kilos que tu rêves d'avoir, de perdre par contre, toute ta vie tu devras dormir quatre heures par nuit. Qu'est-ce qui va se passer ? Tu vas être irritable, tu ne vas plus réfléchir correctement, tu vas avoir les idées qui tournent toujours autour de la même chose, tu ne seras plus disponible pour personne, tu vas même mettre en danger ta santé. Parce qu'on se met en danger en ne dormant pas suffisamment. Aujourd'hui, il y a des études qui le prouvent et qui montrent qu'on peut mourir plus vite, etc. C'est la même chose quand tu manges en dessous de tes besoins. Tu deviens obsédé par la bouffe, obsédé par ton poids. Et c'est un cercle vicieux parce que moins tu manges, plus tu penses à la bouffe, donc plus ça te donne l'impression qu'il faut te contrôler. Parce que sinon, tu feras n'importe quoi. Mais en vrai, quand tu manges selon tes besoins, tu n'y penses plus à la bouffe. Tes besoins et tes envies. Mais moi, les envies, je les mets dans les besoins parce qu'en fait, ça rentre dans les besoins en réalité. Bon, en fait, ça me semble important de rester là autour de ce point qui est hyper important. Je pense que tant que tu auras l'impression que oui, un jour, tu vas trouver la solution pour réussir à avoir cette enveloppe qui te plaisait tant, tout en étant la personne que tu es réellement et qui te plaît, en fait, de garder tous les bons côtés de toi, de ta personnalité. Tant que tu croiras que c'est possible, je pense que ce sera compliqué. Il y a une question de deuil autour du corps et du poids. Il y a beaucoup une question de deuil. Faire le deuil du corps qu'on ne peut pas avoir. Jean-Michel, coach sportif, il va te dire, bien sûr que tu peux l'avoir ce corps, tu vas suivre un programme pendant trois mois avec lui. De toute façon, tu le sais, tu as déjà suivi des trucs comme ça toute seule. Oui, tu peux l'avoir en sacrifiant tout le reste de ta vie et ta santé. De toute façon, ce n'est pas tenable. Au-delà de l'aspect sacrifice dont tu parlais, à un moment donné, tu es rattrapé. Tu es rattrapé par des compulsions, tu es rattrapé par une maladie, des problèmes de santé, des blessures.
- Speaker #0
Oui, clairement. Et de toute façon, c'est aussi pour ça que j'ai commencé à écouter tes podcasts. C'est parce que, clairement, en peu de temps, il y a la prise de conscience. Ce n'est pas normal.
- Speaker #1
Ça m'intéresse ça, du coup, parce que tu dis que cette prise de conscience, elle est assez récente. Est-ce que tu peux en parler de quand ça date et de comment c'est venu ? Qu'est-ce qui s'est passé ?
- Speaker #0
Je suis tombée sur un de tes podcasts. en fait tout simplement et puis donc tch connaissait pas je donc j'en ai écouté un j'en ai écouté deux j'en ai écouté et puis bah ça a fait écho en moi je me suis dit mais en fait tout ce que tout ce qui ressort c'est ce que je vis continuellement et puis j'ai commencé à ce que j'étais re rentrer dans une phase de restriction enfin j'avais vraiment tout ce que je mange fallait que ce soit sain, fallait que ce soit bon pour le corps, peu calorique, enfin voilà, j'étais vraiment dans cette phase-là, et j'ai commencé aussi à avoir pour le coup les premières concussions, ou à ne pas savoir pourquoi j'avalais des quantités de nourriture, et ce n'était pas moi, et ce n'était pas... Et du coup, ce comportement-là m'a dit, il se passe un truc et il faut que tu trouves quoi. Et du coup, en tombant sur tes podcasts, j'ai compris, c'était ce qu'il en était en fait. Donc déjà, premier pas en avant, je sais ce que c'est. Maintenant, il faut y aller. Il ne faut pas garder ça. Ce mal-être, ce n'est pas possible. Et du coup... J'ai repris à manger un peu plus. Alors, toujours en contrôlant, parce que la balance est ma meilleure ennemi, même si c'est ma meilleure ennemi, j'ai envie de dire. Mais j'ai augmenté mon apport calorique et j'ai quand même commencé à me sentir mieux. Déjà, voilà, plus calme par rapport à mes loulous, moins énervée avec mon mari, à accepter un homme qui est très, très câlin. Et limite, j'avais... Alors que c'est la personne que j'aime le plus au monde avec mes enfants, je ne voulais pas qu'ils me touchent en fait. Et là du coup, je réapprends à aimer ses câlins. Je me dis, c'est cool, ça fait du bien. J'aime ça en fait. Donc voilà, plein de petits détails qui reviennent et qui me disent que quand je donne à mon corps ce qu'il lui faut, ils ont un peu plus que ce que je lui donnais parce que je ne suis pas encore à ce qu'il lui faut certainement. Mais je m'aperçois qu'il y a du mieux. Donc j'avance.
- Speaker #1
doucement déjà c'est un joli signe de confiance de dire ah en fait ça se passe plutôt bien ce que tu viens de dire sur les câlins ça m'a amené une question comment c'était à la période justement où tu parles de cette grosse perte de poids où tu mangeais très peu où tu dis j'ai même l'enveloppe t'aimais ton enveloppe corporelle est-ce qu'à ce moment là tu refusais aussi le contact les câlins ?
- Speaker #0
j'avais plus aucun désir déjà charmel c'est les seuls plaisirs charmel que j'avais c'était moi avec mon corps en fait le contempler le scruter me toucher le ventre voir si c'était pas trop gros si les abdos étaient là si c'était ça c'était quand mon homme venait non j'avais pas envie et J'avais toujours la bonne excuse.
- Speaker #1
Tu deviens une espèce d'œuvre d'art, quelque chose de bon à exposer, mais on ne touche pas. Quelque chose de pas vivant, une œuvre d'art. En fait, quand tu dis j'aimais mon enveloppe, là, ce qui me vient en t'écoutant, c'est que tu ne devenais plus qu'une enveloppe corporelle.
- Speaker #0
Oui, typiquement, oui. Et je me dis que je l'aimais là, avec le recul, mais que finalement, sur le moment, je pense que même c'était encore pas assez.
- Speaker #1
Oui. C'est ce que je voulais te demander aussi.
- Speaker #0
Parce qu'il y avait toujours cette côté, cette recherche de modifier encore un peu, de sculpter.
- Speaker #1
Quand tu dis, je me contemplais, je touchais mon ventre, c'est exactement ce qui m'est venu. J'ai envie de te dire, ah bon, mais réellement, ça te convenait ? Tu te disais juste tous les jours, ouais, je suis trop bien. Ou est-ce que tu te disais, non, là, j'ai trop de ventre, là, il faut que je fasse ça.
- Speaker #0
J'avais toujours quelque chose à modifier.
- Speaker #1
Donc, on en revient à cette triste réalité que détester son corps et vouloir le changer dans le but de pouvoir l'aimer, c'est une quête sans fin, en fait. Ça ne marche pas. Ça ne marche pas, parce que le vrai problème, il n'est peut-être pas là.
- Speaker #0
C'est régler le vrai problème qui est compliqué.
- Speaker #1
En fait, quand je dis le vrai problème, ça ne veut pas dire que je suis en train de te dire « voilà, il y a un truc un peu caché, souterrain, et il va te falloir 15 ans d'analyse pour comprendre ça » . Je ne suis pas trop une fan de psychanalyse, d'ailleurs. J'ai plutôt grande confiance dans les thérapies de troisième vague, type thérapie cognitivo-comportementale. Quand je dis le vrai problème, il n'est pas là, c'est que... En fait, je ne suis pas du tout en train de dire qu'il ne faut pas se pencher sur ton rapport à ton corps. Je pense que si, tout à fait. Je pense que déjà, ce que tu as expérimenté, déjà, un grand bravo pour ça. En vrai, je ne te l'ai même pas dit, mais tu vois, de dire, ah, OK, j'ai compris que tu es en lien avec ça, je vais essayer d'augmenter un peu mes apports. Parce que là, on dit ça comme ça, genre c'est facile. En vrai, les personnes qui écoutent le podcast savent que ce n'est pas facile.
- Speaker #0
C'est la croix et la bannière de se dire... regarder le total calorique et se dire, il faut que j'en ajoute. C'est, qu'est-ce que je vais pouvoir manger pour en ajouter sans que ça me fasse de mal ?
- Speaker #1
C'est encore une autre étape. C'est intéressant, ça, sans que ça me fasse de mal. Tu pars du principe que ça te fait du mal. Et en fait, déjà, ça, c'est un grand pas en avant. Et tu vois, tu as pu constater que de faire ce pas-là en avant, ça avait amélioré un certain nombre de choses dans ton rapport aux autres. Mais aussi en lien avec ton corps. Quand tu parles des câlins, ce n'est pas rien, en fait, tu vois, d'accepter le toucher. Et donc là où on pourrait s'imaginer que, ben non, si je contrôle moins ce que je mange, forcément j'aurais encore moins envie qu'on me touche. Tu vois, l'effet, il est un peu différent. Et du coup, c'est intéressant de constater ça et de se dire, OK, déjà, si je bosse sur mon rapport à la nourriture et sur mes apports en nourriture, il y a peut-être des choses qui seront plus simples dans le rapport à mon corps. Là où... C'est ce que je voulais dire tout à l'heure dans le cercle vicieux, le contrôle de l'alimentation pour contrôler son corps, on a l'impression que ça va marcher, en fait c'est juste un échec perpétuel. Et que finalement, contre toute attente, quand on contrôle un peu moins tout ça, on peut se rendre compte qu'on peut construire une relation un peu plus douce avec son corps. Et que du coup je pense que c'est hyper important de travailler sur ton rapport à la nourriture. en parallèle du rapport à ton corps. Parce que de toute façon, c'est le rapport à ton corps qui a créé ça. Je veux dire, tu vois. Et du coup, bien sûr que quand je dis que ce n'est pas vraiment ça le problème, c'est que l'amour de toi ne se situe pas là où tu penses qu'il se situe. Et l'amour de toi, ce n'est peut-être pas la quête absolue à avoir. Notamment l'amour de ton corps. T'as tout essayé pour aimer ton corps, t'as fait tous les poids possibles, t'as eu toutes formes de corps différentes, enfin tous les poids possibles, j'exagère un peu, mais tu vois bien, t'as vécu de grandes variations corporelles. Étrangement, tu n'as jamais vraiment aimé ton corps, en tout cas c'était pas assez, jamais assez. Je pense que là, la solution elle se situe pas là. Peut-être qu'il y a quelque chose qui se situerait davantage du côté de l'acceptation, et quand je dis acceptation, c'est pas se résigner. C'est accepter ce qui est là, aujourd'hui, d'être moins dans de l'autocritique, d'être beaucoup plus dans la bienveillance, et à tout niveau, pas que sur le regard que tu portes sur ton corps, mais sur qui tu es globalement, parce que j'imagine que les critiques, il y en a pas mal qui fusent dans ta tête, ou même peut-être à voix haute, et pas que sur ton corps, tu vois. Donc, c'est un travail global. Et puis, un travail de déconstruction aussi par rapport à l'alimentation, de déconstruction de ce que tu as construit autour de l'alimentation. Tu le disais très bien. Depuis 22 ans, en fait, depuis ce premier régime, tu n'as fait que cumuler des croyances, des règles alimentaires, des trucs qui viennent dire, bon, ben voilà, ça, c'est pas bien, ça, c'est bien. Tout à l'heure, tu parlais des aliments plaisir. Oui. En fait, ce que je te souhaite, c'est juste dans quelques temps d'être une mangeuse régulée, libérée. Et du coup, dans ce cadre-là, tu pourras redécouvrir que le plaisir, il peut se trouver autant dans un aliment que tu catégorises aujourd'hui comme sain. que dans des aliments aujourd'hui catégorisés plaisir qui sont plutôt du côté, oulala, diabolisé, pas sain. Et ça, je le dis souvent, ça va passer par une sorte de dyade, pour moi qui est vraiment importante, c'est le côté très intellectuel. Il y a un travail à faire sur la compréhension de ça, des mécanismes, de c'est quoi la régulation alimentaire, par quoi ça passe, et puis d'aller dégommer ces croyances-là. Ça se travaille très bien avec des professionnels, tu vois. Ok, j'ai la croyance que ça, c'est pas bon pour la santé, ça fait grossir. Il y a moyen d'aller bosser là-dessus. Et en parallèle, le côté expérientiel. Le vivre pour le croire. Parce que tant que ça reste dans la tête, on n'y croit pas vraiment. Ou ça marche pour les autres, mais pas pour soi. Et d'aller manger certains aliments et de constater que t'as pas besoin de maîtriser ta quantité. Parce qu'en fait, tu vas pas partir en live. Parce que tu sais te réguler. Constater que de manger ces aliments-là, ça te fait pas nécessairement grossir, tu vois.
- Speaker #0
Cette peur de grossir, elle est dure.
- Speaker #1
Tu dirais qu'elle est arrivée quand dans ta vie, la peur de grossir, d'ailleurs ? C'est intéressant, ça.
- Speaker #0
J'ai l'impression qu'elle a toujours été là. Je me vois tellement me comparer déjà. J'ai des souvenirs de maternelle, de me comparer avec les camarades, avec qui j'étais. Donc, en fait... Si je me compare, c'est que quelque part, je vois que je suis plus grosse qu'elle et forcément, je veux être comme elle. Donc, la peur, elle était déjà là.
- Speaker #1
Maternelle. Oh, pauvre petite mère. Tu te rends compte ? Oui, mais tu vois, tu es maman, donc tu vois bien un enfant de maternelle. C'est facile pour toi de visualiser ça ? Oui,
- Speaker #0
et puis, je travaille en école, donc je suis entourée de petits loups.
- Speaker #1
Il y a quelque chose qui s'est joué pour toi, très petite. Je ne sais pas ce qui s'est passé, mais ce n'est pas un comportement ordinaire d'une petite fille. Alors même si, malheureusement, c'est des études américaines, mais je pense que ça reste quand même valable aussi en France, il y a des études américaines qui ont montré que, dès trois ans, on voit une différence flagrante entre les petits garçons et les petites filles sur l'importance d'accorder à l'apparence. Et notamment, tu vois, on observe que quand on demande à ces enfants-là pourquoi ils aiment leur héros préféré, les petits garçons, ça va toujours être sur des compétences. Il court vite, il est super fort, il fait ça. Les petites filles, ça va toujours être sur le physique. Elle a des trop beaux cheveux, elle a des belles robes, elle est belle. Et ça, ça ne sort pas de nulle part, ça sort de nous, au sens global, notre société. Comment est-ce qu'on valorise les garçons, comment on valorise les filles ? Il y a des choses qui s'inscrivent dès petite. Mais ce côté un peu obsessionnel qui semble avoir été là très tôt pour toi, il y a une racine quelque part, tu vois.
- Speaker #0
Mais là, c'est passé aux oubliettes.
- Speaker #1
Mais il y a plein de gens encore vivants qui t'ont connue, petite fille. Il y a tes parents, il y a peut-être des oncles et tantes, il y a ton frère, il y a peut-être des gens avec qui tu pourrais ouvrir le dialogue sur ce sujet, tu vois. Poser des questions.
- Speaker #0
Là, c'est pour affronter ce qui s'est passé et risquer de prendre une claque et le mal-être que ça peut apporter. Ça peut faire peur aussi.
- Speaker #1
Oui, je comprends.
- Speaker #0
Faire dans ça me fait peur.
- Speaker #1
Ok. Donc, c'est que du coup, tu imagines qu'il a pu se passer quelque chose.
- Speaker #0
J'ai des... Il y a des flashs qui se... que j'aimerais ne pas avoir.
- Speaker #1
Ok, on parle d'amnésie traumatique et de mémoire traumatique qui reviendrait un peu, c'est ça ? Ok, tu ne vas pas pouvoir lutter contre tes flashs, je sais que c'est terrible.
- Speaker #0
C'était plus simple d'avoir une baguette magique pour effacer certains trucs.
- Speaker #1
C'est ce qui s'est passé, j'ai l'impression que ton... Ta mémoire, ton cerveau a fait en sorte de te protéger et il y a un certain nombre de choses qui ont été effacées. Tu le dis, de toute façon, tu as quand même très peu de souvenirs de ton enfance. Donc oui, c'est une forme de protection. On ne sait pas trop pourquoi, à certains moments, il peut y avoir des levées d'amnésie traumatique avec des choses qui reviennent. En tout cas, c'est quelque chose qui s'observe assez fréquemment. Moi, je suis bénévole en parallèle de mon travail dans une association. où on accompagne les victimes de violences sexuelles. Et en fait, c'est quelque chose qu'on observe. Moi, je l'ai déjà vu, ça fait que quatre ans que je suis bénévole là-bas, je l'ai déjà vu quand même un certain nombre de fois. Des personnes qui... à 30, 40 ans, ont des flashs qui reviennent et voilà la mémoire qui s'impose en fait à nouveau.
- Speaker #0
Ces flashs, ils sont revenus quand je commençais à me poser des questions justement sur mon comportement alimentaire, sur ma façon de gérer les choses.
- Speaker #1
Ça veut dire que tu as fissuré un peu ça quoi en fait, tu t'as dit mais attends. Ce qui prouve à quel point les deux sont en lien en fait, ton contrôle. le contrôle absolu de ce que tu manges et le contrôle de ton corps sont très certainement en lien avec ça et c'est quelque chose qui s'observe ultra fréquemment et en fait tu vois si par exemple tu venais pour travailler avec moi sur ton rapport à l'alimentation et tout ça en fait je me dis en t'écoutant il y a moyen que systématiquement on se heurterait tu sais à ce rapport profondément ancrée que tu as avec ton corps, dont tu es capable de te souvenir depuis la maternelle, t'imagines, une espèce de rejet de ton corps. Et je ne dis pas qu'on n'avancerait pas du tout, parce que la preuve, toute seule déjà, dans ton coin, malgré tout ça, tu as fissuré ce contrôle, tu as été capable de mettre des choses en place, donc il y a des choses de possibles. Mais je pense que travailler... là-dessus, sur le trauma, sur ce qui a pu se passer, c'est quand même un élément fondamental de ta guérison. Il y a des super professionnels. Vraiment.
- Speaker #0
C'est trouver un qui, avoir confiance et lâcher les rênes.
- Speaker #1
Lâcher les rênes. T'as l'impression que du coup, en allant déposer ça... T'aurais l'impression de tout lâcher.
- Speaker #0
Ouais. Comme une bombe. Des choses qu'on n'a pas envie qu'ils sachent, que ça peut faire du mal.
- Speaker #1
Du mal aux autres. Ouais. J'entends. Mais en fait, là, il est peut-être plus... l'heure, bizarre de dire comme ça, de protéger les autres. Mais d'aller prendre soin de toi, de te protéger, protéger cette petite fille qui existe encore en toi, et tu vois, réparer tout ce qui sera possible de réparer. En fait, je trouve qu'il y a quelque chose d'assez révoltant dans la place des victimes où il y a un peu cette double peine. Je veux dire, c'est toi qui es victime. Mais derrière, c'est comme si tu devais assumer les conséquences du fait d'en parler. Non, ce n'est pas le fait que tu en parles qui va faire du mal aux gens, c'est ce qui s'est passé. Et ça, tu n'y es pour rien. C'est ça qui va faire du mal aux gens.
- Speaker #0
Un autre chapitre.
- Speaker #1
Oui. Est-ce que tu penses qu'il serait possible que tu ailles en parler à un, une professionnelle, sans avoir l'impression de tout lâcher, mais en gardant... un peu les rênes, au moins une main qui tient. Est-ce que tu crois que ça se serait possible ? Et comment ça pourrait être ?
- Speaker #0
Je ne sais pas, j'ai peur qu'il y ait des choses qui se brisent autour de moi, s'il y a des choses qui sont sues. Donc, c'est bête, mais en fait, là, il n'y a que moi qui souffre. Et protéger les autres, c'est... J'ai l'impression que c'est moi aussi en fait. C'est mon rôle. J'ai toujours envie que ce soit parfait. Et que de toute façon, moi c'est fait. Donc c'est fait, c'est loin. Et que ça ne changera pas grand-chose en fait.
- Speaker #1
Tu crois que ça ne changerait pas grand-chose ?
- Speaker #0
Ouais, franchement ouais.
- Speaker #1
Pour toi aussi ?
- Speaker #0
Je ne sais pas. Je vais plus laisser le passé dans le passé. Je ne sais plus ça.
- Speaker #1
Ok. Si ça concernait, ça ne va pas être facile ce que je vais te demander, mais imagine si ça concernait l'un de tes enfants et tu te projettes dans 20 ans, 30 ans, qu'est-ce que tu en dirais en tant que maman ?
- Speaker #0
Colère.
- Speaker #1
Mais tu n'aurais pas envie de savoir ? Tu conseillerais à ton enfant de ne pas en parler, que le passé c'est le passé, que désormais ça ne changera rien ? Ou est-ce que tu lui conseillerais d'en parler, de se libérer de ça ?
- Speaker #0
Non, je vous dirais de se libérer. qui soit le silence et le secret dans les agressions ça ne sert qu'aux agresseurs à personne d'autre le secret ne protège personne sauf les agresseurs c'est vraiment important de l'avoir en tête Et puis je crois que passer par des... En fait, je comprends, tu as envie d'épargner plein de choses à plusieurs personnes. Tu as envie de leur épargner des émotions douloureuses, des moments douloureux. Et en même temps, c'est peut-être aussi important pour ces personnes-là de savoir, c'est peut-être important pour votre relation, la relation que tu as avec ces personnes-là, de passer par ces moments d'émotion. Enfin, tu vois, c'est... Mais effectivement, je comprends mieux ce que tu veux dire sur le fait de lâcher les rênes, parce qu'effectivement, ça veut dire ouvrir tout un pan qui ne t'appartient plus, les émotions des autres.
- Speaker #1
Je crois que je ne suis pas prête à ça encore.
- Speaker #0
Oui, mais c'est important aussi de t'accorder de la douceur et de la bienveillance et d'être à l'écoute de ton rythme, parce que ce n'est pas facile. Wow, est-ce que tu te doutais qu'on allait arriver jusqu'ici dans notre échange ?
- Speaker #1
Non, parce que j'en ai jamais parlé et que là, du coup, là je m'en parle à quelqu'un et qu'il s'est enregistré. Le paradoxe.
- Speaker #0
Qu'est-ce que tu aurais envie de te souhaiter pour les mois à venir ?
- Speaker #1
De vivre, simplement. Sans réfléchir, sans lutter.
- Speaker #0
Ok.
- Speaker #1
Et pouvoir montrer le bon exemple à mes loulous.
- Speaker #0
J'entends que c'est important ça.
- Speaker #1
Ouais. Ils sont toute ma vie, autant qu'ils peuvent m'épuiser.
- Speaker #0
Ça me donne envie de rebondir sur ce que tu disais tout à l'heure, sur le fait que tu dialoguais beaucoup. avec eux, mais que tu disais « Ouais, mais les enfants agissent par mimétisme. » C'est vrai, je suis la première à le dire. Pour autant, attention à l'autoflagellation. C'est-à-dire que ça peut être un bel élan de motivation pour se lancer dans un parcours de guérison quand on a très peur, de se dire « Ouais, j'ai envie d'agir différemment pour moi, mais aussi pour mes enfants. » Mais attention à ne pas te charger les épaules de quelque chose de négatif avec ça. Non, mais voilà. Oui, OK, je leur dis ça, mais je ne suis pas capable de faire ça. Tu vois ?
- Speaker #1
Oui.
- Speaker #0
Là, il y a beaucoup de choses qui sont chamboulées dans ton existence. Tu as eu une prise de conscience qui est récente. En peu de temps, tu as été en mesure de prendre des infos, de mettre en place certaines choses. De dire certaines choses à tes enfants, ouais, mais en fait, c'est pas normal d'agir comme ça.
- Speaker #1
Après, c'est un peu moi, ça, c'est tout l'un ou tout l'autre. Soit je suis... Quand je me lance dans un truc, je me lance à corps perdu, c'est... Voilà.
- Speaker #0
Eh oui.
- Speaker #1
Il y a un côté...
- Speaker #0
Je ne connais pas de personnes ayant eu ou ayant des troubles alimentaires qui ne soient pas perfectionnistes. Déjà. Et le fonctionnement binaire, je trouve qu'il va quand même beaucoup avec le TCA et que ça s'apaise quand même derrière. Quand je dis fonctionnement binaire, je dirais fonctionnement très rigide aussi, tu vois. Voilà, c'est noir ou c'est blanc et puis il ne peut pas y avoir une petite nuance de gris. Et en fait, c'est quand même généralement les personnes qui vont mieux témoignent toutes de quelque chose de beaucoup moins binaire par la suite. Le côté perfectionniste, bien sûr, il peut subsister. Mais c'est quelque chose qui peut aussi s'appréhender et se vivre différemment. Est-ce que tu aimerais... Enfin, je vais poser la question différemment. Est-ce qu'il y a un sujet ou quelque chose qu'on n'a pas abordé, que tu avais envie qu'on aborde ce matin ?
- Speaker #1
J'ai l'impression que... Tout a basculé. En fait, ça a pris une très grosse part après la naissance des jumeaux. J'ai eu le même processus, de ne pas prendre trop de poids. Ils étaient deux, ce n'était pas plus de 18 kilos. Et puis ça s'est fait, parce que je n'ai pas pris plus de 18 kilos. Après la naissance des garçons, je me suis oubliée, parce que je les ai quand même allaités pendant un an. Pour le coup, tout en mangeant le strict minimum, j'ai perdu beaucoup de poids, et c'est là où je suis rentrée dans la pôle. Et en fait, j'ai ce côté où je découvre la pôle et ce que ça m'apporte. Et le fait d'aimer mon corps pour ce qu'il me permet de faire. Et ce moment où ça rebascule, où du coup, je l'aime toujours pour ce qu'il me permet de faire, mais je ne l'aime pas pour ce qu'il paraît être. Et alors ça, cette étape, c'est... J'étais tellement bien quand je l'aimais pour ce qu'il me permettait de faire.
- Speaker #0
C'était simple. Qu'est-ce qui a créé la bascule entre les deux ?
- Speaker #1
Le perfectionnisme. De toujours vouloir aller plus loin. de toujours vouloir être plus souple, de toujours vouloir être plus forte, de faire les meilleures poses, de faire les meilleures photos, de faire le meilleur combo. Voilà, indirectement, ce qui me faisait du bien est venu me faire du mal. Et depuis que là, j'ai pris conscience qu'il y avait des choses qui ne se passaient pas bien, Alors, c'est marrant parce que du coup, la première personne à qui j'ai parlé des TCA, c'est mes deux collègues avec qui je mange tous les midis. Et des repas en plus qui me sont imposés, puisqu'en fait, je travaille beaucoup sur la cantine scolaire. Donc, les repas nous sont livrés. Il faut que je fonctionne avec ça. Et donc, les deux premières personnes à qui j'ai parlé, c'est mes collègues. Alors que jamais j'aurais pensé, alors je les adore, mais jamais j'aurais pensé parler en premier lieu. Et le même soir, du coup, j'allais à la pôle et j'en ai parlé aux filles avec qui je fais de la pôle. Ça a été, je ne sais pas, c'était la journée libération. Il faut que j'en parle. Et de ce jour-là, je refais de la pôle comme au début. Pour le plaisir de le faire et pas dans le côté... Les sessions en renfort à fond, j'ai stoppé. Alors, je vais courir. D'un côté, je rebalance dans mon ancien truc, mais du coup... Du coup, je retrouve cette satisfaction d'après-course. Je ne cours plus 10 kilomètres comme je le fais quand je vois qu'à 5, j'en ai marre. En fait, quand j'en ai marre, je m'arrête. Hier, je me suis arrêtée, je n'avais pas fait 5 et je me suis arrêtée et c'était OK. Voilà, c'est des avancées où je me dis, ça marche ce que je fais en fait. J'avance doucement, mais j'avance.
- Speaker #0
Mais c'est génial. C'est génial, c'est top. C'est exactement ce que j'allais te dire. J'allais te questionner sur comment c'était possible de renouer. vraiment plus avec le plaisir. Encore une fois, ce ne sera pas parfait. Et ce n'est pas grave si, en sortant d'une séance purement plaisir, tu as quand même la satisfaction dans ta tête qui te dit « oui, mais quand même, c'est bien, tu as brûlé un peu » . Enfin, tu vois, on ne va pas se débarrasser de tout ça comme ça du jour au lendemain, c'est normal. Mais c'est top de pouvoir renouer avec vraiment le plaisir.
- Speaker #1
Oui.
- Speaker #0
Et ton corps dans quelque chose aussi de très fonctionnel, quoi. Waouh, la machine de dingue, quoi.
- Speaker #1
Oui, c'est ça. Vraiment, oui, quand je vois ce que je peux faire, ou même une figure où je bute et que, je ne sais pas, je m'automotive, je dis, allez, on y va, elle passe et c'est maintenant et qu'elle passe. Et je me dis, mais oui, mais oui, mais il peut le faire. C'est une merveilleuse machine.
- Speaker #0
Pas rancunière en plus. Non.
- Speaker #1
Parce que pourtant, je l'avais souffrir autant dans les étirements, dans la souplesse, dans des pauses de contorsion pour arriver à faire des figures. Mais je ne sais même pas pourquoi je vais faire ça. Quand on en sort, qu'on a mal partout. Mais pourquoi ? Parce que ça fait du bien, quoi, en fait, derrière. Autre part, un autre moi, la satisfaction de faire quelque chose qu'on aime. Et d'être ce que l'on aime, parce que quand je suis sur la peau, j'aime ce que je suis, en fait.
- Speaker #0
Ça tourne beaucoup autour de ça, en fait. On en revient à ça, c'est super intéressant, parce qu'il y a la notion d'amour de soi qui est revenue plusieurs fois, tu vois, mais en positif, je veux dire. Quand tu disais, bah ouais, à ce moment-là, j'aimais l'enveloppe, mais en fait, je n'étais plus moi. Et moi, je l'ai entendu, ça a sonné à mon oreille comme, ouais, bah moi, j'aime celle que je suis. habituellement tu vois et là je l'aimais pas celle que j'étais alors ouais son corps ok mais c'était plus qu'une enveloppe donc c'est chouette de la notion d'amour et de plaisir là qui se rejoint en fait c'est vraiment chouette ouais c'est trop bien ça va être une sacrée année j'ai l'impression là l'année des 40 ans l'année des 40 ans c'est 85 représente moi aussi je vais avoir 40 ans cette année Oui, tu as l'air partie pour... Ah oui, ça te fait peur.
- Speaker #1
Oui. Alors, c'est marrant, c'est des capes comme ça qui... Mais peut-être parce que du coup, on a dépassé, je me dis 40 ans, finalement 22 ans à me battre contre moi-même. Je me suis plus longtemps battue contre moi-même que ce que j'ai été moi-même réellement. Et même si dans ces autres 18 ans, il y avait toujours ce mal-être et ce petit côté qui était là, mais je me dis que ce n'est pas possible. La vie est trop courte et je ne veux pas passer à côté de... de bons moments, de voir mes enfants rire, de manger du pot de corne devant un film. C'était le truc. Non, on ne grignote pas devant un film parce qu'on ne grignote pas. Alors qu'en fait, c'est juste des moments conviviales. Aller au cinéma, ne rien acheter parce qu'il ne faut pas. Alors qu'en soi, on achète un petit truc pour tout le monde et tout le monde grignote et tout le monde est content. Et puis, ça n'avait pas plus de mal que ça.
- Speaker #0
Ça ne fait pas de mal du tout. personne grossira pourquoi parce que le corps cesse réguler c'est une merveilleuse machine à plein de niveaux et que et que ton corps de petits pas en petits pas tu vas voir à quel point tu peux lui faire confiance ça mais même des trucs je vois quand je vois mes enfants manger et qu'ils ont l'assiette encore
- Speaker #1
plaît normalement j'en veux plus j'ai plus faim et là dans ma tête alors c'est vrai qu'on aussi dans ce côté où font finir son assiette Et là, c'est un peu le côté conflictuel avec mon mari où du coup, non, t'as mangé, t'as appris, tu manges. Et je lui dis, OK. Et moi, je suis plus dans le côté, OK, t'as plus faim, c'est OK.
- Speaker #0
Ouais.
- Speaker #1
Enfin, moi, là, l'astuce, j'essaie de travailler là-dessus et de le montrer à mon homme aussi. Et que c'est pas parce qu'il a plus faim de sa viande et de ses légumes ou de ses féculents qu'il peut pas manger un yaourt derrière. Et voilà. Et je m'aperçois que, bah, eux, ils savent faire.
- Speaker #0
Eh oui. et toi aussi toi aussi tu sais faire c'est juste qu'il faut renouer avec ça en fait t'as été formatée à faire différemment des fragmentations en cours et bien quelle richesse dans cet échange moi non plus je m'attendais pas à ça je me suis laissée emmenée par tout ce que tu as dit Est-ce que t'aimerais dire quelque chose pour conclure cet échange ?
- Speaker #1
Ne pas avoir peur. Lutter, en fait. Faut y aller. Faut... Quoi qu'on fasse, de toute façon, il y a des hauts, il y a des bas. Et il faut y aller. Parce que demain, il fera beau. C'est ce qui...
- Speaker #0
Alors allons-y.
- Speaker #1
Ouais. C'est ça.
- Speaker #0
Un énorme merci pour... cet échange pour ton authenticité, pour... En fait, le mot qui me vient, j'espère que tu l'entendras dans le vrai sens, parce que pour certaines personnes, des fois, c'est difficile à entendre et ça peut être péjoratif. Je voulais te remercier pour ta vulnérabilité. C'est pas facile de savoir se montrer vulnérable, encore moins quand on veut tout contrôler. Et pourtant, je crois que c'est quelque chose d'hyper important, et parce qu'on l'est tous.
- Speaker #1
Là, clairement, il y a quelque chose qui est tombé. J'avais pensé aller aussi loin dans cet échange.
- Speaker #0
Les personnes ne te voient pas là. Moi, je te vois et je ressens la fatigue en fait. Oui. Je me dis mais waouh, potentiellement, tu vas être hyper fatiguée après notre échange.
- Speaker #1
Mais potentiellement, oui. Et pourtant, j'ai un training de peau, j'ai une copine qui vient. Mais je sais aussi que ça va être... super moment parce que il y a des choses qui sont tombées et que ça va faire du bien ça va prendre le plaisir pour ce que je vais faire et pour ce que je vais être en tout cas merci beaucoup merci d'être venue partager plein de morceaux de toi et de ton histoire sur ce podcast merci à toi de m'avoir permis de le faire parce que je pense que ça va me permettre d'avancer aussi dans ce que j'ai enclenché toute seule et grâce à toi parce que tes podcasts sont vraiment une source très bénéfique pour moi je t'écoute très régulièrement et ça me fait du bien quand j'ai des doutes je cherche les questions et tu réponds et c'est cool ça fait vraiment chouette bah écoute,
- Speaker #0
trop bien je suis super contente de savoir que ça t'aide on se dit à très vite du coup
- Speaker #1
Ça marche, merci beaucoup.
- Speaker #0
Un grand merci à toi qui est encore là à la fin de cet épisode. Comme je te le dis souvent, ton soutien est super important. C'est même ça qui permet au podcast d'exister encore aujourd'hui. Alors, si mon contenu t'apporte de l'aide d'une quelconque manière que ce soit, sache que tu peux m'en redonner à ton tour. Pour ça, il y a plusieurs façons de faire. Tu peux tout d'abord partager le podcast, en parler autour de toi, à tes proches mais aussi à des professionnels. Tu peux laisser 5 étoiles, notamment sur Spotify ou Apple Podcast, ou laisser ton meilleur commentaire. Mais depuis peu, j'ai aussi apporté une nouveauté qui te permet de me soutenir encore plus concrètement avec de l'argent. Effectivement, tu trouveras en description de cet épisode un lien qui te permettra de faire un don à la hauteur de ce que tu trouves que ce podcast t'a apporté. Merci, merci beaucoup. C'est grâce à ton soutien que ce travail va pouvoir continuer. Je te souhaite de prendre soin de toi autant que ce sera possible. Et je te dis à très bientôt sur un nouvel épisode. Ciao !