- Antoine Lacouturière
Bonjour, soyez les bienvenus sur Toucher du doigt la santé, le podcast autour des soins, du bien-être et de la santé. Je m'appelle Antoine Lacouturière, j'exerce l'ostéopathie et la sophrologie depuis dix ans maintenant et je partage avec vous la voix d'experts dans leur domaine à travers nos échanges et ses rencontres inspirantes. L'épisode du jour a été enregistré début mai en Suisse au cœur d'une unité mobile de soins palliatifs. Après deux jours en immersion dans leur quotidien, C'est un des épisodes qui m'a le plus remué. Je vous propose de toucher du doigt avec nous ce monde si particulier à travers l'expérience de ces soignants qui célèbrent la vie. Si certains sujets abordés sont spécifiques à cette équipe et au monde des soins palliatifs, qu'il faudrait d'ailleurs renommer autrement selon les invités, vous allez découvrir qu'un grand nombre d'autres sujets sont tout à fait transposables dans beaucoup d'autres disciplines. Comment se déroule leur quotidien ? Qu'est-ce qu'un soignant ? Comment prendre soin de soi et des autres ? Quels outils utilisent-ils ? Entre les molécules chimiques et les techniques non médicamenteuses, la place des savoir-faire et savoir-être. Les différences entre la Suisse et la France à propos de la fin de vie, de l'aide médicale à mourir, de l'euthanasie, du suicide assisté. Je remercie ici toute l'équipe. qui m'a accueilli aussi chaleureusement qu'ils exercent leur métier, particulièrement Martine, Audrey, Vianney, Monica, Rémi et Nadege, secrétaires, médecins, infirmiers, accompagnants spirituels et psychologues, chacun avec leurs propres compétences et leurs limites. Ils sont pour moi une très belle manière d'illustrer la force d'une prise en soin pluridisciplinaire dans un moment où chacun, chacune d'entre nous souhaitera, probablement. être accompagné. Enfin, je profite de cette introduction pour vous remercier des notes et commentaires sur les plateformes d'écoute. Comme vous le savez peut-être, c'est une des manières de matérialiser la reconnaissance du travail derrière chaque épisode. Je vous souhaite une excellente écoute et je vous donne rendez-vous sur les différents réseaux pour réagir, poser les questions qui vous animent, partager un témoignage si le cœur vous en dit et faire vivre ensemble cette aventure de toucher du doigt la santé. Bonjour Nadege, bonjour Yanné, merci de me recevoir tous les deux aujourd'hui. On est en Suisse, on est dans votre service de base, vous allez nous raconter un petit peu toutes ces particularités-là. Mais pour commencer, ce que je vous propose de faire, c'est une petite introduction sur la présentation. Nadege, est-ce que tu veux bien commencer ?
- Nadège Deteix Baraque
Bonjour Antoine, je m'appelle Nadege, je suis infirmière en équipe mobile de soins palliatifs depuis bientôt 6 ans, donc sur Aubonne en Suisse. J'étais en France avant, j'ai fait mes études d'infirmière sur le tard, j'étais dans l'hôtellerie avant. Et puis sur les premiers stages que j'ai fait comme étudiante infirmière, je trouvais la prise en charge des patients psychiatriques et en fin de vie, les deux catégories vraiment injustes dans les services. J'étais assez bouleversée de voir la façon dont on pouvait s'occuper de ces patients. Et donc je me suis...
- Antoine Lacouturière
passionnée entre guillemets pour les soins palliatifs je me suis formée en france et je suis arrivé en suisse après super merci pour ça pour cette première présentation on aura le temps de développer les compétences et les spécificités de l'un et l'autre après bien et
- Vianney Perrin
Et bonjour également, donc Vianney Perrin, moi je suis médecin, je suis médecin généraliste, je viens également de France. J'ai exercé pendant 15 ans à peu près la médecine générale en cabinet de ville, enfin de campagne pour être plus précis. J'adorais faire plein de choses, c'est pour ça que j'ai fait de la médecine générale, j'ai travaillé beaucoup en maison de retraite, j'ai adoré la pédopsychiatrie, j'ai fait énormément de pédiatrie, j'ai travaillé pour les urgences, pour le SAMU, j'ai enseigné, enfin voilà, c'est un métier magnifique, on peut faire plein de choses. Et puis je suis venu au soin péiatrique parce que j'étais nul, et dans l'anthalgie, et dans la prise en charge des personnes en situation très complexe, pas forcément terminale, mais mes patients ont au long des années attrapé des maladies beaucoup plus graves, et puis je n'étais pas formé. Donc je suis retourné à l'école, j'ai donc utilisé avec les gens qui me faisaient confiance à mon cabinet. Puis on m'a demandé de monter une équipe mobile, puis une unité de soins palliatifs, évidemment pas seule, avec plein de monde, dans un hôpital à Bourg-Condresse, alors que je suis parisien à la base. Et ça a fonctionné pendant dix ans, équipe mobile, unité, unité de long séjour, magnifique. On a recruté beaucoup de soignants, beaucoup de médecins. Et puis je commençais à tourner en rond et à ce moment-là, et là je vais peut-être parler de Martin Winclair, l'auteur de Romand. qui a joué beaucoup dans ma décision d'accepter un poste en Suisse. Martin Winclair, avec qui je suis devenu copain, qui vit à Montréal et qui est assez pro aide médicale à mourir, m'a dit que si je ne venais pas en Suisse alors qu'on me le proposait, j'étais un con.
- Antoine Lacouturière
C'est clair. Voilà.
- Vianney Perrin
Et il avait assez raison. En fait, plutôt que d'être contre a priori, c'était intéressant d'aller dans un pays où ça existait, l'aide médicale à mourir, enfin, sous forme de suicide assisté. Et puis aussi l'envie de découvrir. un pays qui est très différent. En Romandie, on parle la même langue et ça s'arrête à peu près là, les comparaisons, même s'il y a plein de choses absolument magnifiques des deux côtés. Donc voilà, j'ai accepté ce poste, j'ai rencontré l'équipe mobile. Ça s'est passé de manière magnifique, petit à petit on a grandi. Et maintenant je suis aussi responsable de l'unité de soins palliatifs d'Aubonne, dans le bâtiment dans lequel on est. Et puis voilà, un peu mon chemin rapidement dit.
- Antoine Lacouturière
Merci pour le chemin, pour la référence à l'auteur du cœur des femmes, je crois, et puis des trois médecins. C'est deux des ouvrages que j'ai lus. Il me semble que c'est exactement ça.
- Vianney Perrin
Et puis c'est là qu'on a commencé à être un peu moins d'accord. C'est quand il a écrit En souvenir d'André, où un médecin passe à l'acte en aidant les gens à mourir sur leur demande, dans une relation de soins directes où il aidait les gens à mourir. Et là, c'est la première fois que moi qui... prescrivaient ces romans sur ordonnance à mes patients. Là, je lui ai dit, écoute gars, je suis un peu moins d'accord, il faut qu'on se voit. On a décidé de s'engueuler devant du public dans des petites conférences et puis on est toujours potes et on n'est pas tout à fait d'accord.
- Antoine Lacouturière
C'est un exemple inspirant de l'amitié qui peut aussi amener des choses avec des divergences et malgré tout une base commune. Ok, merci pour vos deux présentations. J'ai envie de mettre les pieds dans le plat Merci. Tout de suite, avec ce sujet qui fait peur, avec ce sujet qui alerte, avec ce sujet qui, je crois, est interprété plus que bien compris, pour les auditrices, pour les éditeurs, peut-être qu'on peut parler de ce que c'est pour vous les soins palliatifs, plutôt de ce qu'on pense que c'est. Est-ce que vous pouvez nous partager cette vision-là au quotidien, concrètement, pour vous, qui êtes acteur majeur de ça ? Qu'est-ce que ça veut dire ?
- Nadège Deteix Baraque
Pour moi, les soins palliatifs... se définissent peut-être bizarrement pour la majorité des gens comme étant la vie. En équipe, on travaille à aller chercher cette vie qu'il y a chez nos patients et à voir comment on peut faire en sorte qu'elle soit là, la vie, plutôt que la maladie, plutôt que la mort, et comment ils peuvent en profiter avec leurs proches. C'est vrai que l'idée première qu'on a des soins palliatifs, c'est la mort, la tristesse, la douleur, la... la peur, les larmes. C'est en général ce que nos proches, ce que les miens me disent quand je leur dis que je fais du soin palliatif. C'est toujours un moment un peu délicat en famille. Alors pas ma famille toute proche, mais... Et je leur réponds, non, non, chez nous c'est la vie en fait. C'est ce qu'on va chercher, c'est... Qu'est-ce qu'on peut faire avec toute cette vie qui reste ? Alors oui, bien sûr, il y a la maladie qui est là. Oui, bien sûr, il y a des symptômes. Mais pour moi, c'est le mot qui décrirait les soins palliatifs, c'est la vie.
- Antoine Lacouturière
Merci. Ça permet d'avoir une coloration, une introduction, et je pense que ça amène vraiment une image différente de ce qu'on se représente au quotidien. Vianney, tu veux rajouter quelque chose ?
- Vianney Perrin
C'est extrêmement bien résumé. Tout ce qui reste à faire quand il n'y a plus rien à faire, c'est la définition classique. Elle oublie la notion de soins palliatifs qui peuvent commencer très précocement dans la maladie grave, évolutive qui aboutira au décès, puisque c'est la définition des soins palliatifs, et qui inclut la phase terminale sans se limiter à la phase terminale. Les soins palliatifs, c'est effectivement la vie, c'est notre travail à nous. C'est de se rappeler que le patient n'est pas sa maladie, que le patient, il a, il porte une maladie dont il se serait bien passé. Et cette maladie, elle est grave et évolutive, elle va aboutir au décès. C'est pour ça qu'on a le droit de les rencontrer, puisqu'on s'occupe de soins palliatifs. Simplement, elle ne doit à aucun moment nous faire oublier qu'ils sont d'abord des gens avec des personnalités, une histoire. des croyances, d'une culture, et c'est à la partie saine de ces gens à laquelle on s'adresse, leur partie saine. La partie malade, c'est ce dont on doit s'occuper en parallèle pour laisser la partie saine vivre. Et si on fait bien notre travail, les symptômes sont mis de côté. temporairement, de manière plus longue ou pas, en fonction du moment où on les rencontre et du symptôme dont ils souffrent. Simplement, notre travail, c'est aider à ce que le symptôme soit effacé le plus possible pour que la personnalité vive et nous, à ce moment-là, de pouvoir nous effacer en tant que soignants et laisser les gens vivre leur vie. Ce qui implique de leur laisser tous les choix, de leur donner des informations complètes et pas diriger selon ce que nous pensons être bon pour eux. Et éviter le gros syndrome médical du tableau qui n'est pas droit. Si le tableau n'est pas droit sur le mur et qu'ils trouvent ses bouts comme ça, d'ailleurs il y en a un en face de nous qui n'est pas droit, on va le laisser comme ça parce qu'ils ont décidé de le laisser comme ça. Et ça c'est tout un travail sur soi aussi quand on a un cursus de soignant. C'est d'être dans l'écoute, d'être dans l'observation et de se rappeler que nous-mêmes on va y aller et qu'un jour on en aura besoin et qu'un jour on pourra l'ouvrir pour nous-mêmes. Le reste, on doit juste rester dans notre mission avec beaucoup beaucoup de modestie.
- Antoine Lacouturière
Je trouve ça particulièrement inspirant d'entendre cette posture que vous décrivez tous les deux, cet appel à la vie et cette... cette capacité à s'adapter finalement à la personnalité en face avec ses particularités sans chercher à rendre tout parfait, tout beau et à standardiser. La première question qui me vient c'est comment est-ce que vous faites au quotidien, peut-être pour que les gens se rendent compte de ce que ça veut dire, est-ce que vous pouvez nous décrire une partie de vos interventions, un peu une forme de projection sur la semaine, qu'on puisse se rendre compte de vos actions ? On va disséquer ensemble petit à petit tout ça parce que la définition est tellement puissante, je trouve. Pour se rendre compte comment est-ce que vous faites dans le quotidien, vous allez rencontrer les gens. Alors moi, je triche un petit peu puisque je viens de passer 24 heures avec vous et puis d'avoir eu la chance de partager ces moments-là. Donc, je les ai vécus à vos côtés, mais je pense à nos auditeurs qui n'ont que le son, vos quotidiens. Comment est-ce que c'est pour vous le quotidien ? Vous voulez bien nous parler de ça ?
- Nadège Deteix Baraque
Oui. Oui, je vais déjà te dire une équipe mobile de soins palliatifs parce que c'est important. Et puis le fait que, soit depuis la France d'où on vient, soit depuis la Suisse où on est plusieurs équipes mobiles de soins palliatifs, nos fonctionnements sont tous un petit peu différents. Et puis donc ce qui sera de notre quotidien à nous ne sera pas forcément tout à fait la même chose sur une autre. On est donc une équipe avec des médecins, des infirmiers. des psychologues, un accompagnant spirituel et une secrétaire qui est le ciment de cette équipe chez nous. Et notre rôle, c'est de pouvoir aller soutenir, on a un rôle de seconde ligne au départ, c'est-à-dire qu'en première ligne face aux patients, il y a les proches, il y a les soignants du domicile, que ce soit les infirmiers, les auxiliaires, les médecins traitants. Et donc c'est toute cette première ligne-là qu'on doit aller soutenir. À domicile, dans les EMS ou maisons de retraite. À l'hôpital, dans les instituts socio-éducatifs où on a une population de résidents handicapés, polyhandicapés, on va aussi en clinique privée, en rééducation. Et donc l'idée c'est d'aller rencontrer les patients et la première ligne et de pouvoir répondre à leurs demandes sur une situation complexe. C'est-à-dire que du soin palliatif, il y en a énormément. Si on parle de gens qui vont bientôt terminer leur vie, on pourrait penser à tous les patients de gériatrie, les personnes âgées, qui sont du soin palliatif dit plutôt général, c'est-à-dire sans symptômes ou sans situation délicate ou très complexe. Nous, on est plutôt appelé dans les situations où un patient présente un symptôme réfractaire qu'on n'arrive pas à faire céder avec les traitements habituels de médecine classique. Ça peut être un symptôme physique, mais un symptôme psychique aussi, ou des questions d'orientation, de lieu de vie pour ces patients-là. Donc l'idée, c'est que nos médecins ne prescrivent en général pas de traitement. Les quatre infirmiers de l'équipe sur la zone où on est ne sont pas amenés à faire des soins réguliers. On peut aller faire ponctuellement des soins. Les médecins de l'équipe font ponctuellement des ordonnances en urgence. Mais ce n'est pas notre mission. Notre mission ressemble plus à de la consultance. On nous demande un avis sur une situation, on rencontre tout le monde, la première ligne, le patient, les proches, et puis on essaye d'amener une réponse à la question qui nous a été posée. Ça c'est le travail de notre équipe au quotidien. Donc c'est tous les jours, on se rend dans tous ces lieux et on essaie de répondre aux demandes des gens de la première ligne.
- Vianney Perrin
Oui, ce que je pourrais rajouter après ce qu'a expliqué Nadège, juste préciser qu'on s'occupe des gens qui ont plus de 18 ans.
- Antoine Lacouturière
Oui, c'est important.
- Vianney Perrin
Et il n'y a pas d'âge maximal, bien sûr. Et une autre équipe s'occupe de la pédiatrie. Donc avant 18 ans, c'est une équipe dans le canton de Vaud, il y en a une qui fait les quatre régions, alors qu'il y a quatre équipes pour les adultes. C'est le même fonctionnement qu'en France, où il y a une équipe régionale de pédiatrie. alors qu'il y a des équipes adultes dans chaque département en théorie. Même si c'est en discussion en ce moment, il y a certaines zones où c'est quand même beaucoup moins pourvu en soins pédiatifs pour la France.
- Antoine Lacouturière
Est-ce que tu peux nous donner des éléments de compréhension sur pourquoi ? Parce qu'il y a heureusement pour nous moins d'enfants malades ou parce que ça demande des compétences spécifiques ?
- Vianney Perrin
Les deux, en général. Là, vraiment, la pédiatrie demande des compétences spécifiques. elle comme dans toute la vie prise en charge pédiatrique, il y a beaucoup une prise en soin des proches. Les problématiques en pédiatrie sont encore plus puissantes parce qu'elles portent émotionnellement ça, qu'on perde quelqu'un qu'on adore et qui a 80 ans ou quelqu'un qu'on adore qui a 8 ans, la souffrance est... probablement la même. Par contre, ça peut toucher différemment l'entourage. Il y a aussi le problème souvent en pédiatrie où l'un des deux parents doit arrêter de travailler. Donc, des problèmes financiers s'ajoutent. Il y a toute une prise en soins qui est un peu différente. Il faut plus d'aide sociale. Il y a beaucoup de choses à mettre en place en pédiatrie. Donc, c'est effectivement spécifique. Et puis, heureusement, il y a quand même moins de pédiatrie, ne serait-ce que... la courbe des âges fait qu'il y a un peu plus besoin d'équipes adultes.
- Antoine Lacouturière
Merci pour la précision.
- Vianney Perrin
Dans les autres missions des équipes de soins palliatifs, il y a la formation ou l'information. C'est-à-dire que d'autres structures peuvent être spécialisées dans la formation. Et nous, on a un gros rôle de compagnonnage des autres soignants. Il faut savoir qu'un peu comme en France, les médecins sont extrêmement peu formés aux soins palliatifs. Alors que souvent les aides-soignants et les infirmiers ont au moins une base, pas tous, mais ils ont souvent une base meilleure que les médecins. Ça c'est assez intéressant à étudier. Ça veut dire beaucoup de choses. Mais voilà, les médecins sont peu formés. Donc, il y a tout un travail d'accompagnement, de formation qui est en cours de développement, avec des discussions aussi avec le canton pour ça. Et puis, ce qu'on peut rajouter aussi, c'est qu'en soins palliatifs, tout le monde fait du soin palliatif sans être spécialisé. Par exemple, les statistiques mondiales considèrent qu'à peu près sur 100 personnes en soins palliatifs, 10 vont avoir besoin d'une équipe. mobiles de soins palliatifs avec une expertise et une va avoir besoin d'aller dans un service spécifique dédié qui s'appelle l'unité de soins palliatifs. Et donc, en fait, la plupart des soignants, quelle que soit leur spécialité, font des soins palliatifs déjà, n'ont pas forcément besoin de notre aide et puis peuvent avoir recours à nous s'ils ont besoin d'aide complémentaire. Donc ça, c'est vraiment important comme notion. On est souvent en seconde ligne, on est parfois en première ligne, même si ce n'est pas dans notre mandat. Et puis, on va répondre aux besoins en fonction de ce que les gens ressentent. Ça veut dire que parfois, dans notre travail, on voit des choses qui ne nous seraient pas notre idéal. Et pour des raisons d'accompagnement... On essaye d'éviter d'être dans la confrontation. Parce qu'on sait aussi que les soignants qui font appel à nous se mettent en jeu, acceptent qu'on vienne dans leur précaré et que c'est déjà beau de leur part parce que ce n'est pas si courant. Donc en fait, on respecte aussi cette danse. On s'harmonise à leurs besoins tout en se rappelant qu'il y a quand même des patients au centre et qu'il faut que tout le monde soit à l'aise avec ça. Ce qu'on peut rajouter, c'est qu'on bénéficie d'une supervision psychiatrique en équipe de soins palliatifs, ce qui n'est pas le cas de tous les soignants et c'est la même chose en France. Les équipes mobiles de soins palliatifs et les unités sont accompagnées par des supervisions psychologiques ou psychiatriques, ce qui est quand même une aide majeure et un garde-fou par rapport à la souffrance. Donc c'est vrai qu'on est souvent vu comme des équipes très courageuses, affrontant des choses complexes.
- Antoine Lacouturière
Oui, un peu extraordinaire.
- Vianney Perrin
Extraordinaire, tout à fait. Alors que notre sensation, c'est qu'on a plutôt de la chance par rapport à beaucoup de collègues qui n'ont pas cette supervision. Et en plus, notre point fort, facilitant, c'est que les gens qui nous sont présentés sont par définition déjà étiquetés, si j'ose dire, comme étant en soins palliatifs. pour avoir vécu La médecine générale, ça a été beaucoup plus complexe pour moi de suivre quelqu'un pendant 15 ans et de le voir passer en soins palliatifs et donc de renoncer à une part des soins pour lesquels j'ai été formé que de recevoir pour la première fois un patient qui sait qu'il est en soins palliatifs. Cette gymnastique aussi du soignant en face, elle est très confrontante et nous on n'a pas besoin de la faire. Notre positionnement il est aussi... facilité par ça. Et on rigole énormément avec les patients. On a des moments très poignants, très tristes aussi à d'autres moments. Et c'est vraiment la vie. C'est vrai que quand on commence à arrêter de parler à un cancer, mais à une dame ou à un monsieur, et bien, assez curieusement, il est assez content de ne pas parler que du cancer et d'essayer de comprendre quels sont les projets qu'il pourrait remettre en route malgré cette maladie. et qui vont lui permettre de vivre sa propre vie. Et en fait, ça, quand on arrive, nous, à redonner cet espoir, ou à montrer que c'est faisable, et peut-être pas seulement grâce à nous, mais rarement grâce à nous. On a des sacrées victoires. Puis il y a des fois où on a des sacrées, pas victoires, pour ne pas dire des fêtes, parce que, ben oui, on n'y arrive pas toujours. Et ça aussi, il faut savoir en parler. Il faut savoir avoir une grande confiance dans l'équipe quand l'un d'entre nous commence à, pas vriller, mais en tout cas avoir une fragilité différente ou une vision particulière de savoir que les autres vont tout de suite dire hop, hop, hop, hop, reviens avec nous, qu'est-ce qui est en train de se passer. qui est-ce que tu es en train de soigner ?
- Antoine Lacouturière
J'entends plein de choses dans ce que tu viens de nous partager. J'entends aussi le prendre soin des siens, de prendre soin de l'équipe avec laquelle on travaille. Ce que tu viens d'évoquer en dernier lieu, c'est quelque chose que j'ai pu ressentir dans ce stage d'observation du quotidien avec vous. Et j'aimerais bien revenir sur la partie soutient avec la supervision. C'est aussi l'occasion de faire un petit clin d'oeil aux réseaux sociaux. On avait posé la question à la communauté de Toucher du Doigt la Santé et dans les questions, il y a une personne, Angélique, que je salue, qui nous a dit « Moi, je trouve ça admirable leur travail et ma question, c'est comment est-ce qu'ils font pour leur bien-être psychologique, physique, émotionnel ? » Elle a même rajouté « spirituel en tant que soignant, comment est-ce qu'ils gèrent ces situations-là ? » Ça me permet de rebondir sur une partie de ce que tu viens de dire.
- Nadège Deteix Baraque
Merci pour cette question. On a la chance de pouvoir nous la poser à l'interne très régulièrement. Donc il y a nos ressources personnelles, bien sûr, qui sont hyper importantes. En tout cas les miennes. Il y a ce qu'on fait aussi pour se ressourcer. Je fais de la course à pied, par exemple. Ça c'est hyper important pour pouvoir parfois vider le trou plein d'émotions qui peut s'accumuler. Donc la famille, les amis. Il y a ce que disait Vianney il y a très peu de temps, c'est la confiance de l'équipe. On est une toute petite équipe et on s'est construit tout doucement. On est parti de trois, de cette nouvelle mouture de notre équipe mobile. On est maintenant dix et cette confiance a réussi, ou cet esprit d'équipe que tu as pu apercevoir sur ces deux jours, c'est monté petit à petit. On s'est fait confiance à trois et on a intégré chaque nouvelle personne de l'équipe qui est arrivée en mettant ça au centre de l'équipe. C'est chaque personne unique et importante, a des besoins, des caractères, on est tous différents et on a un lien qui est très fort. Et on en a besoin parce que si on n'a pas ce lien pour travailler ensemble, sécurité. La sécurité est hyper importante dans l'équipe pour pouvoir aussi faire ce travail. On a la supervision, effectivement, après au niveau professionnel aussi, qui nous aide, moi qui m'aide beaucoup. C'est une supervision qui est plutôt axée sur la gestion des émotions, ce qui est hyper important. On ventile énormément en équipe, ça t'as pu t'en rendre compte aussi ?
- Antoine Lacouturière
On ventile, alors pour ceux qui n'étaient pas là pendant que ça se passe, tu peux dire deux mots, tu peux préciser ?
- Nadège Deteix Baraque
Dès qu'on est entre nous, en tout cas, on essaie de faire attention, mais on plaisante énormément. On a une autodérision, l'humour à peu près le même. En tout cas, on s'entend bien. Puis ça nous permet de vider nos émotions aussi. Puis je pense qu'on a chacun nos techniques, mais Vianney donnera probablement les siennes. Je pense que tu as vu les miennes ce matin. C'est-à-dire qu'on a eu deux consultations qui étaient hyper prenantes émotionnellement ce matin. Et du coup, entre les deux, j'ai fait une pause. On a fait autre chose, on a discuté d'autre chose et on est reparti après. Plein de petites techniques qu'on a tous, mais pour ma part, c'est comme ça que j'arrive à gérer les émotions. Et les émotions parce que je pense que je ne pourrais pas faire un autre métier actuellement.
- Antoine Lacouturière
Chouette, merci Nadege pour ça.
- Nadège Deteix Baraque
Alors je pourrais presque répéter la même chose avec le fait que je déteste la course à pied, mais il y a d'autres choses qui sont bien. On a dans l'équipe aussi des gens qui ont du caractère, et là on ne parle que de l'équipe mobile, parce qu'il y a l'autre équipe de l'unité, des gens qui sont capables de nous dire quand il faut faire attention et qui ne nous rateront jamais. Il y en a une que je ne citerai pas dans l'équipe qui a une cravache sur son bureau et qui n'a pas besoin de sa cravache pour quitter la table à midi si on dit un mot de travail. Elle quitte notre table et elle va manger toute seule à une autre table. Donc on comprend en général assez bien le message et on fait plus attention, voire on va la récupérer et on lui promet d'arrêter de parler boulot. Donc oui, il y a vraiment besoin de se mettre des petites protections. de savoir qu'on a des fragilités. Et puis, ce n'est pas pour rien si on est en soins palliatifs. On a choisi ça pour des raisons. Moi, je suis terrifié par ma mort. Je n'ai aucun empressement à la vivre. Je sais que je vais la vivre. Et donc, je me rassure énormément à être en soins palliatifs parce que je vois qu'on peut faire des accompagnements respectueux, y compris chez des gens... qu'on pourrait considérer comme bizarres ou particuliers et que comme je pense avoir la fierté d'être un peu spécial, j'aimerais être respecté dans mes choix quand ça m'arrivera. Donc en fait, on se fait aussi du bien en travaillant en soins palliatifs. On voit beaucoup de collègues dans d'autres équipes hyper compétents, hyper passionnés. On en voit avec qui on n'aurait pas forcément envie d'être accompagné, mais on en voit beaucoup qui sont absolument passionnés. qui sont capables de faire appel à nous, donc, d'avoir un œil extérieur, une collégialité, un travail réflexif. Tu parlais tout à l'heure de spiritualité. Voilà, il y a ceux qui sont croyants, qui ont des religions, d'autres qui adorent aller marcher en forêt. Quelle que soit notre spiritualité, quelle que soit notre manière de ventiler ou de respirer, on en a, on en a et on s'assure qu'on en a. Et ça peut être aussi dans la famille. Ma compagne est la première à tirer la sonnette d'alarme si elle me trouve fatiguée. L'équipe me fait la remarque à peu près dans les 10 minutes qui suivent. Ils n'attendent pas deux jours et ça, c'est essentiel. On voit aussi quand les réactions entre nous ne sont pas les mêmes, quand une situation nous a plus touché ou qu'on commence à vouloir privatiser un patient parce qu'on a un lien plus fort. Attention, oui, c'est bien et il vaut mieux y aller en binôme de temps en temps et peut-être pas. que ce ne soit pas toujours le même qui y aille. Voilà, ça passe énormément par ça. Et dans le service qui est donc stationnaire, qui se balade moins, avec donc moins de manière de ventiler, ça se passe également comme ça. Il faut avoir une capacité à dire, mais là, moi dans cette chambre, je ne peux plus y rentrer. Et ce n'est pas du tout un rejet de la personne, c'est parce que ça me touche trop fort ou qu'il se passe quelque chose que je ne maîtrise pas et j'ai besoin de... On n'a pas besoin de tout maîtriser, mais on a besoin de comprendre si on... Si on reste soignant, si on reste à notre place, voilà.
- Antoine Lacouturière
Merci, Vianney. Alors là, ça fait écho chez moi à différentes choses. Au quotidien, je suis ostéopathe et sophrologue, et donc j'exerce la majorité de mon temps de pratique seul dans un cabinet. Et il y a un grand nombre d'auditeurs, d'auditrices qui font des retours régulièrement sur le podcast qui sont aussi des soignants, je vais dire, profs libres. malgré tout avec cette coloration de pluridisciplinaire parce que on bat sont les recommandations de la haas de l'om est c'est plus parce que c'est quand même pour une grande partie d'entre nous beaucoup plus est agréable et efficace de travailler en équipe donc j'entends plein de choses dans ce que tu as dit dans ce que vous avez dit tous les deux qui vont sûrement pouvoir servir à d'autres soignants en dehors en extrapolant un peu même pour ceux qui sont pas en équipe alors pour ceux qui sont en équipe là J'ai envie de dire que vous avez la chance, mais je ne crois pas à la chance. Vous avez construit ces liens-là qui font que vous pouvez compter les uns sur les autres et on entend que c'est une véritable force et que c'est le fruit d'un travail. Moi, c'est comme ça que je le perçois en tout cas, d'un travail de conscience, j'entends. Au quotidien, en individuel, il y a plein de petites choses dans ce que vous avez dit. Le niveau de fatigue est l'un et l'autre. Le niveau de fatigue, le fait de faire du sport, qu'on aime la course à pied et les marathons ou pas. Le fait d'avoir de l'humour quelque part, de pouvoir lâcher prise, d'avoir l'accompagnement, les proches, les siens. Et puis aussi d'aller voir ses peurs. Là, je fais écho à ce que tu viens de dire. Je pense qu'on est un certain nombre à avoir peur de notre propre mort. ou à le gérer de façon plus ou moins confortable. Et je trouve ça très finalement inspirant d'entendre ça sur cette question d'Angélique, comment vous faites-vous, parce que ça va probablement amener des petits éléments de réponse à d'autres. Donc merci pour ces partages très spontanés de vos quotidiens, la vie, la mort en même temps, l'équilibre, le soutien, l'équipe, les rires. C'est fort de passer quelques heures avec vous, c'est un condensé de vie très fort quand même. Je laisse des points de suspension pour ceux qui ont envie d'aller chercher des outils là-dedans. Ça me donne envie d'aborder un sujet à demi-mot sur le fait d'être bien traité, d'apporter des bons soins. Et Vianney, tu le disais avec beaucoup de délicatesse en disant voilà, il y a des fois où... les soignants ouvrent leurs portes, leur manière de faire et on sait qu'on va amener quelque chose de nouveau. Il faut les encourager en disant, nous on amène quelque chose de nouveau, une compétence différente pour améliorer. Il y a parfois aussi de la maltraitance chez les soignants et particulièrement dans les fins de vie. Je pense qu'on est tous concernés par un proche ou des proches qui sont dans des EHPAD ou qui sont dans des... dans des situations de fin de vie et là, plutôt que de critiquer, j'ai envie de saluer le travail remarquable de la majorité des soignants qui sont des gens passionnés, souvent trop peu payés pour ce qu'ils font. Mais je crois qu'il y a aussi une réalité de parler de cette bienveillance qui est difficile à trouver dans certains services et où le geste et où les mots vont avoir un impact énorme sur l'état de bien-être de la personne et de la famille. Je ne sais pas si c'est ok pour vous de dire quelques mots là-dessus.
- Nadège Deteix Baraque
Oui, tout à fait. Si ce n'est que je reprendrai un tout petit peu ton propos, je pense qu'ils sont, à part peut-être quelques cyniques, tous bienveillants et souvent maltraitants. Je n'opposerai pas le fait que dans certains services, il y ait de la maltraitance, ça c'est certain. Par contre, le pire, c'est qu'ils sont bienveillants.
- Antoine Lacouturière
Alors ça m'intéresse parce que j'adore le poids des mots et j'adore... Donc est-ce que tu peux prolonger ça ? Est-ce que tu peux nous en dire quelques mots ?
- Nadège Deteix Baraque
On va donner l'exemple. J'ai une amie actuellement qui accompagne sa maman vers un décès probable dans les semaines qui viennent et dont la sœur s'occupe énormément également de cette maman. Et cette sœur est pour moi la définition de la bienveillante maltraitance. C'est-à-dire ? Elle veut continuer à nourrir sa maman, elle prend énormément d'heures, elle pleure beaucoup. Quand elle va voir sa maman en maison de retraite, côté France, elle ne s'en remet pratiquement pas entre deux passages à l'EHPAD et elle continue à donner quand même à manger à sa maman qui n'arrive plus à avaler correctement, qui tousse, qui en souffre, qui va peut-être en mourir, qui fera probablement une inhalation, une fausse route. Et elle est parfaitement bienveillante. Il est hors de question qu'elle continue sa maman maigrir sans l'aider à reprendre du poids, sans se rendre compte que jamais elle n'atteindra les calories nécessaires et que sa maman est en train d'aller vers une fin de vie. très rapidement et que peut-être elle va même accélérer le processus. Et comment accompagner cette dame parfaitement bienveillante dans des gestes complètement maltraitants, où en plus elle implique les sept soignantes de la maison en leur mettant une pression majeure, et où mon ami qui est sa sœur n'arrive plus à la freiner, tout en lui expliquant. Et alors on leur a fait rencontrer une équipe mobile, on les a aidés à essayer, cette sœur n'y arrive pas. Et on est dans une situation où on pourrait presque signaler. D'ailleurs, ce qui est presque choquant, c'est que je dise presque, parce qu'il faudrait peut-être le faire, et pourtant on se rend compte qu'elle est parfaitement bienveillante. On a pareil chez les soignants. On peut avoir certaines spécialités médicales qui vont considérer que tel traitement supplémentaire pourrait peut-être faire gagner 3 mois, 6 mois de vie supplémentaire. et qui pour autant vont coller des vomissements quotidiens, une fatigue majeure, une incapacité à accomplir le moindre projet, sous prétexte de peut-être, hypothétiquement, alors qu'on est au cinquième traitement dont les quatre premiers ont été des échecs absolus, celui-là, comme par magie, alors qu'il n'était conseillé nulle part, ou alors en cinquième ligne, celui-là va marcher. Et sous prétexte, il n'arrive pas. à soulager avec les quatre premiers, ils sont dans l'escalade de l'engagement et ils poursuivent. Ils sont parfaitement bienveillants. Aucun de nos collègues que je connaisse ne fait du mal volontairement au patient. Maintenant, comment je m'arrête ? Comment j'accepte de... Et là, on peut rentrer dans une maltraitance parfaitement bienveillante. Là où on peut être plus choqué, et on peut le dire clairement, c'est quand on rencontre une collègue qui a l'air de s'en foutre. qui a l'air d'être passée à autre chose. Et pourtant, si on évite d'être trop jugeant, c'est peut-être juste une personne qui est épuisée, qui bosse en maison de retraite, qui a fait plus d'heures parce qu'ils ne sont plus assez nombreux, qui est complètement lessivée, qui voit qu'elle n'a pas les moyens de faire les soins pour lesquels elle a été formée, pour lesquels elle a signé pour la profession, et elle s'est détachée. Et elle n'est pas pour autant malveillante.
- Antoine Lacouturière
Je te remercie beaucoup pour la précision. Nadège, tu sais à quel point j'aime le sens des mots et derrière ces images que tu utilises. Je pense à un des invités précédents du podcast que je salue au passage, qui est le docteur Guimberto. c'est un chirurgien bordelais qui a beaucoup travaillé notamment à travers un film qui est connu qui s'appelle Promenade sous la peau, c'est l'importance du réseau multifibrillaire et des fascias dans cette... redonner ses lettres de noblesse au tissu conjonctif et au fait que tout est relié dans le corps humain notamment dans ses travaux et un des moments très fort pour moi cette année ça a été il donnait l'exemple de alors je lui partageais l'exemple d'un chirurgien qui avait dit à ses patients la kiné l'ostéopathie c'est de la ça sert à rien c'est vraiment nul c'est des charlatans et je m'attendais à une réaction un peu extraordinaire un peu comme là j'aurais pu m'attendre à une réaction en disant Je pensais qu'il allait dire « mais non, mais vous ne vous rendez pas compte, une main qui ne bouge pas, c'est dramatique pour la fonction » . Et donc il a dit « oui, d'un point de vue fonctionnel » . Et je le revois en train de dire « je crois que c'est une erreur, mais il faut la comprendre » . Et là, c'est un peu le sentiment que j'ai en t'écoutant de dire « cette maltraitance-là, on ne peut pas l'accepter au sens où il ne faut pas la banaliser, mais il faut aussi comprendre » . Et ça répond à une partie des questions que j'avais par rapport aux soignants qui, effectivement, n'ont pas signé pour avoir aussi peu de temps. de temps avec les patients, on n'a pas signé pour avoir cette pression du rendement, on n'a pas signé pour avoir aussi peu d'outils, etc. Et les deux notions que tu nous as proposées, vraiment, elles viennent éclairer pour moi une partie des questionnements. Je te remercie à nouveau pour ces nuances-là.
- Vianney Perrin
Avec l'humain, finalement, et tout ce que ça nous renvoie, et donc tout ce qu'on disait là, c'est effectivement que ça renvoie énormément de choses, et toute cette pression, tout... toutes ces soins qu'on doit faire et qu'on n'a pas le temps, ces accompagnements qu'on aimerait faire, je pense que ça tue la profession de soignant.
- Antoine Lacouturière
Tu peux préciser, Nadege ?
- Vianney Perrin
Je pense que ça épuise les soignants. Il y a énormément de soignants qu'on rencontre qui sont épuisés de ce qu'ils font et qui n'en peuvent plus. Et donc comment on peut bien travailler quand on est épuisé ? Comment on peut prendre soin de l'autre quand soi-même on ne va pas bien ? C'est difficile.
- Antoine Lacouturière
C'est un constat qui s'étend un petit peu, je trouve. à travers toutes les professions, médecin général, médecin généraliste, rééducateur, que ce soit masseur, kinésithérapeute, sage-femme, orthophoniste, ostéopathe, même si on a un statut un peu entre les deux. Malgré tout, c'est vrai que ce constat-là, il est là. Comment est-ce que ça, ça impacte ? Votre mission à vous, vous disiez tout à l'heure que dans l'information-formation, il y avait aussi un rôle. Est-ce que ça fait partie des missions que vous prenez aujourd'hui d'alerter les soignants sur leur propre état ? Est-ce que ça fait partie du cadre sur lequel vous allez ?
- Vianney Perrin
Oui, puisque notre réponse va souvent à la première ligne, vu qu'on est de seconde ligne et que nos clients, si je peux les appeler comme ça, les personnes avec qui on travaille le plus, c'est la première ligne, c'est soignants. Et par soignant, je vais repréciser parce que c'est très important pour l'équipe et le docteur Perrin nous le rappelle très souvent. Un médecin est un soignant aussi. Quand on parle de soignant, on englobe toutes les professions soignantes qu'on rencontre parce qu'on trouve qu'on fait encore souvent une différence entre les médecins d'un côté et les autres professions soignantes, alors qu'on est tous dans le même...
- Antoine Lacouturière
Ça, je pense que c'est important ce que tu viens de dire. Alors, les auditeurs, ils n'ont pas le geste que tu viens de faire de rassembler tous ensemble. Mais au quotidien, tout à l'heure, il y a eu une petite scène dans le service où j'ai proposé des questions ouvertes et où votre liant de base, votre secrétaire, Martine, disait, où vous lui avez donné la parole, en fait, au sens strict, c'est une personne, c'est la grande équipe de soins. Nadège, je te remercie pour ce geste incluant que je me permets de verbaliser pour que les audites. et auditrice puisse se rendre compte, c'est probablement le moment pour moi de poser une question assez transversale. La question typique, la question un peu signature du podcast, c'est qu'est-ce que c'est la santé pour chaque invité ? Et là, ça me donne envie de vous poser la question, notamment avec soins palliatifs, c'est qu'est-ce que c'est pour vous le soin ? Qu'est-ce que c'est pour vous soigner ? Qu'est-ce que c'est pour vous un soignant ?
- Nadège Deteix Baraque
Et effectivement, on peut avoir besoin de réfléchir. Sans réfléchir, ce que ça m'évoque, ce serait, si on parle d'un soignant, donc le professionnel, celui qui apporte des soins, c'est quelqu'un qui doit aller le mieux possible lui-même. Pour pouvoir ne pas transpirer ses propres problèmes et les ajouter à la personne qu'elle va soigner. Le soignant, c'est quelqu'un qui a eu la chance d'apprendre un magnifique métier avec toute une partie technique. Et s'il en reste là, il va perdre énormément de son métier. Et il peut devenir un excellent technicien à condition d'y rajouter au cure le care. Donc, c'est bien de savoir faire des soins et après, c'est comment on les fait, comment on communique, comment on écoute, comment on ressent, comment on accepte de se tromper, comment quand on se trompe, on est capable de le dire et de trouver un autre chemin en se basant sur les soins attendus par le soigné. Et non pas parce que notre école nous a appris à prodiguer. Donc je dirais que le soignant, il est celui qui, dans une danse, accepte d'être mené selon le besoin. Ma compagne m'a offert il y a longtemps, longtemps, longtemps, bien avant qu'on soit ensemble, un cadeau magnifique. Elle m'a offert une balançoire sur laquelle il y avait deux chouettes regardant dans le même sens. Et elle m'a dit, pour moi, un soignant... C'est celui qui arrive à monter sur la balançoire du soigné, en se rappelant que c'est sa balançoire à lui, qu'il est dans un équilibre précaire peut-être et que c'est le sien, et qu'on ne va pas y rester. On est là pour un temps, on est là pour quelque chose de temporaire, on est là pour répondre à un besoin qui n'est pas le nôtre. tout en respectant par contre notre éthique, notre vision du soin, pour ne pas faire des choses avec lesquelles on ne serait pas d'accord, en se rappelant qu'on est sur la balançoire de l'autre.
- Antoine Lacouturière
Magnifique image. Merci Vianney et merci à ta compagne en directement. Transition délicate.
- Vianney Perrin
Merci Vianney pour cette définition très très belle. Qu'est-ce que c'est le soin, les soignants ?
- Antoine Lacouturière
Si je peux me permettre, ça peut aussi peut-être être comment toi tu vois les soins. Qu'est-ce que c'est pour toi ? On a eu une définition du soignant qui me paraît très illustrée, très complète, à la fois fine, détaillée. Peut-être que toi avec ta capacité, ton vécu, tes outils. Qu'est-ce que c'est le fait de soigner, les soins que tu utilises, comment tu les vois ?
- Vianney Perrin
Alors je vais rebondir sur ce que disait Vianney par rapport à la technique et au reste. La technique c'est pour tous les corps de métier pareil je pense, la mécanique, l'informatique. Une technique ça s'apprend, il y a une école pour ça. Faire une prise de sang, faire un pansement, il y a des protocoles, ça s'apprend. Tout ce qui est des compétences relationnelles, de l'intention qu'on met dans ce qu'on va faire, de pourquoi on fait les choses, et puis de l'intention. Quelle est notre intention quand on va faire un soin à quelqu'un ? Et du coup, je pense que ça, ça relie avec tout ce que Vianney vient de dire. C'est-à-dire que si on n'est pas bien soi-même, l'intention qu'on met dans le soin ne va pas être la même. Si on a la technique mais pas le relationnel et qu'on n'arrive pas à faire le lien avec le patient, le soin n'est pas le même. Et je ne dis pas qu'on n'arrive pas, même avec les meilleures compétences relationnelles, à rentrer en relation avec n'importe quel patient. Et là aussi, il faut savoir reconnaître sa limite et passer la main quand on n'y arrive pas. Mais oui, le soin pour moi, ce n'est pas que de la technique, puisque ça, ça s'apprend avec n'importe qui, peut-être pas, mais beaucoup de gens peuvent apprendre un soin technique. Le relationnel, c'est différent et l'intention qu'on y met, c'est différent.
- Antoine Lacouturière
Merci Nadege.
- Nadège Deteix Baraque
Oui, c'est hyper important et en fait, c'est en écho avec ce qu'on disait tout à l'heure sur... Ça veut dire aussi accepter de prendre soin de nous-mêmes et que notre institution prenne soin de nous. C'est-à-dire qu'il y a nos limites propres, il y a notre équipe qui nous protège et il y a l'endroit où on travaille. Il se trouve qu'on est dans un endroit où bien sûr qu'on pourrait peut-être dire des choses. Là, je me suis trompé de salle tout à l'heure, je suis arrivé dans la salle du massage assis que notre institution nous propose à tout. Le personnel, et pas seulement soignants, parce qu'on peut inclure tous les gens qui travaillent dans un hôpital depuis le Covid, et ça ne s'est jamais arrêté. On fait du sport ensemble, vous avez organisé les 20 km de Telozen avec notre institution. Il y a ça aussi. Toutes les institutions ont du mal à garder les soignants, et puis il y en a certaines qui trouvent des solutions. Plutôt que de se dire pourquoi les gens partent, C'est comment je leur donne envie de rester. Et pareil dans notre équipe. Donc si on a cette pensée-là à tous les niveaux, et qu'on accepte qu'on prenne soin de nous, et qu'on accepte de ne pas être seulement les oraux des autres, alors je pense qu'on est plutôt en sécurité. Donc le soin, c'est pour ça que je commençais tout à l'heure, c'est d'abord aller bien. Comment je me présente à l'autre si je suis en pleine souffrance ? Pour lui apporter des soins.
- Antoine Lacouturière
C'est hyper profond. Merci. Je m'attendais à... Je savais qu'il fallait que je vienne ici. J'avais cette intuition-là. Je ne savais pas vraiment pourquoi. Il y a le côté amical qui nous liait. J'ai pris quelques instants pour formuler une transition parce que je trouve que vos deux définitions, la suite de définition et de partage est assez inspirante. Ça me donne plein de réponses. à des questions que je me posais et même à des questions que je ne me posais pas. Donc merci à tous les deux pour ça. Ça me donne envie de creuser un cran plus loin un sujet. Par rapport à ce que tu viens de dire, Nadege, notamment, le soin c'est bien, la technique c'est bien, ça fait aussi écho avec ce que Vianney disait sur l'apprentissage à l'école. Ce matin, j'ai assisté à un soin de bouche, donc pour remettre dans le contexte une patiente. dans un état de conscience, alors là je vais te laisser faire le tableau parce que tu vas mieux le décrire que moi, mais qui ne peut plus communiquer verbalement, en tout cas dans le moment où on voit, qui est avec un certain nombre de médicaments, qui est pris en charge dans un service. Et le soin technique du soin de bouche, littéralement parlant, c'est introduire avec un coton adapté de l'humidité pour remettre de l'humidité dans la bouche qui est sèche, ce qui est un soin relativement simple. Mais je t'ai vu le faire avec un niveau de conscience où j'ai presque capté vu de l'extérieur le consentement que tu as demandé à la personne alors qu'elle ne pouvait pas parler mais dans la délicatesse d'approche de la bouche avec l'instrument d'attendre l'ouverture des lèvres, les mots associés, ta main posée délicatement sur le corps. Et puis finalement j'ai vu cette patiente qui ne communiquait pas ou qui était avec peu de signes visibles. Se mettre à venir chercher volontairement et à manifester une intention visible, de dire « oui, ça, ça me fait du bien et aide-moi à faire ça » . Dit comme ça, c'est simple à vivre, c'était vraiment particulier. La transition est un peu longue, mais je voulais rajouter ce niveau de conscience, de délicatesse et peut-être d'autres choses que ça va vous permettre de poser sur ce geste simple.
- Vianney Perrin
On parle de laquelle des deux de ce matin ? puisqu'on a eu la chance de pouvoir vie dans les soins palliatifs, de toute cette vie magnifique. Juste avant d'aller faire ces deux consultations, on a eu la chance ce matin d'aller à l'hôpital pour nos consultations dans les lits identifiés soins palliatifs, où on se rend tous les mardis pour soutenir les équipes qui sont formées pour prendre en charge des patients en soins palliatifs complexes. On a eu la chance de rencontrer deux patientes sur leur dernière phase de vie, toute proche de la fin. Les deux non-communicantes, et en fait quand on dit non-communicante, c'est faux. Elles étaient complètement communicantes, toutes les deux.
- Antoine Lacouturière
Clairement, physiquement on a vu beaucoup de réactions.
- Vianney Perrin
Exactement.
- Antoine Lacouturière
Verbalement, il n'y a pas eu de mot.
- Vianney Perrin
Exactement. Et ça c'est un côté extraordinaire de notre métier. Et donc ce soin de bouche, donc effectivement une personne qui est en fin de vie et qui respire la bouche ouverte tout le temps. Un des symptômes les plus pénibles qu'on rencontre, c'est la bouche sèche. Puis ça s'identifie très vite, je pense que tu as pu le voir ce matin, avec une langue toute rouge et toute sèche. Y compris avant cette phase de fin de vie, ça peut être quand ils sont encore communiquants. Et puis pour une des patientes qu'on a vu ce matin, que j'ai vue la semaine dernière, Avant de commencer l'entretien avec elle la semaine dernière, quand elle était encore communicante verbalement, je lui ai proposé aussi un soin de bouche parce que je voyais qu'elle avait la bouche pâteuse et je ne sais pas si ça rend bien, mais elle faisait comme ça avant de discuter. Et donc je sais que la semaine dernière, donc on va parler de cette patiente-là si tu veux bien. Bien sûr. Je sais que la semaine dernière, elle a accepté bien volontiers ce soin de bouche avant de pouvoir commencer à discuter. Et puis c'est vraiment un soin pour lequel on se bat à l'équipe qui est un soin simple. de base et qui permet une communication beaucoup plus simple pour les patients qui peuvent encore parler. Plus parler, comme Thaïa a pu le voir ce matin, c'est un soin qui nous permet un lien, une communication non-verbale qui est extraordinaire. Quand ils aiment le soin, parce que ça m'est arrivé d'avoir des patients qui fermaient la bouche et qui n'en voulaient pas. Effectivement, le consentement, comme pour tout acte, qu'il soit médical ou non, quel qu'il soit, qu'on va faire sur autrui, le consentement est une chose essentielle.
- Antoine Lacouturière
J'ai posé ce mot bien volontairement.
- Vianney Perrin
Et j'ai sauté dessus. Il y a le consentement et il y a l'explication. Ce n'est pas parce que quelqu'un a les yeux fermés et ne communique plus qu'on ne doit pas lui expliquer tout ce qu'on va lui faire. Ce que j'ai fait. Donc on a fait le soin de bouche et effectivement, la patiente, avec sa langue, est allée chercher la mousse imbibée d'eau. Puisque là, j'avais que de l'eau sous la main pour pouvoir la presser contre son palais et pouvoir humidifier la langue. Et comme elle a apprécié, on a recommencé au moins 3, 4, 5 fois le geste jusqu'à ce que j'ai vu qu'elle avait moins d'interactions et puis que c'était OK. Ça permet aussi de voir le niveau de confort d'un patient parce que quand il accepte ce soin de bouche, c'est qu'en général, le confort est plutôt bon sur le reste des symptômes. La concentration est juste sur ce soin-là. C'est un soin qui est essentiel et que j'adore parce qu'il met en communication le soignant et le patient.
- Antoine Lacouturière
J'ai parfois amené à proposer des formations dans les écoles, et je le faisais également en France, pour des infirmiers, les aides-soignants, les médecins. Et on nous attend toujours, nous les médecins, sur la prise en charge de l'angoisse, de la douleur, de la sédation, etc. Et je me faisais un malin plaisir grâce à un infirmier que je vais nommer, qui s'appelle Arnaud Perez, à Bourg-en-Bresse, et qui m'a appris à commencer ces cours-là par le soin de bouche. Et ça peut étonner. Et en fait, ça paraît une évidence à tout le monde, une fois qu'on a fini d'expliquer que quand on a la bouche sèche, la langue collée au palais, la langue avec des ulcérations, avec des blessures, avec des squames, des petits morceaux de peau un peu partout, on ne risque pas d'avoir un consentement autre que par les yeux. Mais en tout cas, on la laisse dans une incapacité à nous répondre. ce qui pour le bavard que je suis est une bonne chose, ça me permet de parler tout seul, mais ce qui dans un acte de soin n'a plus aucun sens. Et en fait se rappeler que si on s'assoit, on montre qu'on donne du temps, et que si on fait un soin de bouche, on montre qu'on est vraiment venu écouter. Et sans parler de la sensation que la personne peut avoir quand elle a un cancer ORL, avec des odeurs très fortes. où elle a l'impression, même si elle est la seule à les sentir, ces odeurs, elle pense qu'elle est en train de pourrir de l'intérieur. Et de lui montrer qu'on peut lui donner une bouche agréable, de lui préciser, parce qu'en général, pendant le soin, elle ose dire « ça sent mauvais et je ne parle plus à mes proches parce que ça sent trop mauvais et j'ai peur de les dégoûter » , que non, en fait, parfois ça ne sent pas mauvais et que c'est leur sensation. Comme nous, le matin, quand on se réveille avec une bouche plus ou moins fraîche. et bien eux ils peuvent avoir cette sensation alors qu'ils ont des soins et que malheureusement la maladie leur donne cette odeur là qui reste coincée dans leur sinus et voilà et donc ça on parle de choses immédiatement factuelles c'est une très bonne comme disait Nadege entrée en matière avant d'aller discuter de d'autres informations leur donner vraiment la parole par ce soin c'est probablement le plus important même si tous les autres sont importants
- Nadège Deteix Baraque
C'est un soin qu'on peut partager avec les proches aussi, qu'on montre très souvent à domicile et à l'hôpital, peu importe où on est, aux proches qui se sentent complètement impuissants ou qui aimeraient faire quelque chose pour le patient, mais qui ne savent pas quoi faire. Le nourrir par exemple, alors qu'il ne peut plus manger, toutes ces choses qu'on faisait avant, et on leur montre, on leur explique. C'est un soin qu'on peut faire, alors ce matin c'était avec de l'eau pour la première et avec du jus d'ananas pour la deuxième, mais c'est des soins qu'on fait. Avec du potage, c'est des soins qu'on fait avec de la glace, avec un chocolat chaud, avec du café, avec du champagne, avec du porto. On en a fait des millions de choses. Et donc c'est aussi un moment que le proche et le patient peuvent partager ensemble cette relation, ce lien qu'on a vu ce matin qui s'est tissé pendant que je faisais le soin de bouche. Le proche peut avoir ce partage-là avec le patient. Ils peuvent avoir ce lien-là ensemble. Et ça, c'est hyper important. Ça leur donne quelque chose à faire. encore pour la personne qui est dans le lit. Je pense que Vianna a quelque chose à rajouter.
- Antoine Lacouturière
Et puis, on en parlera peut-être après, mais dans toutes les approches complémentaires, si ce soit une bouche au champagne ou au chocolat, on le fait... En proposant à la personne de fermer les yeux pour allumer toutes les lumières de son connectome et de ses perceptions, pour pouvoir peut-être laisser revenir un souvenir où il a bu ce liquide dans une autre occasion, percevoir l'équilibre de son corps et percevoir les personnes avec qui il était. Alors, tout à coup, on déclenche une madeleine de Proust. Certains considéreront qu'on est très proche de la sophrologie. de l'hypnose et des techniques d'activation de conscience que j'utilise. Voilà, on va utiliser un soin de base qui va devenir un moment incroyable que la personne pourra reproduire elle-même, parce qu'elle peut même se faire le soin elle-même, ou un de ses proches va lui proposer. Et donc on transforme quelque chose d'apparemment très trivial en quelque chose qui permet d'être dans la conscience du geste. Et puis évidemment dans l'intention, on parle de ça depuis tout à l'heure.
- Vianney Perrin
Merci pour cette alternance d'images et de contributions, j'ai envie de dire, l'un et l'autre, sur un geste très simple que j'ai pu vivre ce matin, dans toute sa simplicité et aussi dans toute sa magie, de voir le visage se réveiller et cette perspective de revivre un bon moment, peut-être même un moment extraordinaire. Vianney, est-ce que tu peux nous parler de... des autres disciplines, des autres outils, des autres... Ouais, peut-être des autres outils. Dans ce que tu viens de dire, il y a plusieurs choses qui font écho à ma casquette de sophrologue que je suis, aussi d'ancien sportif de haut niveau, mais beaucoup moins sur le côté élément d'interaction. Là, c'est vraiment le côté soignant, dans l'activation de conscience. Autre discipline, je crois même qu'il y a de l'acupuncture, je crois qu'il y a plusieurs choses. Alors avant ça, moi je trouve ça passionnant les gens qui sont ouverts et je trouve ça passionnant les gens qui sont capables d'utiliser des médicaments avec des molécules qui ont une puissance extraordinaire et du jus d'ananas ou des paroles. Est-ce que tu veux bien nous dire quelques mots de ça ? Ça fait partie de votre quotidien, moi je le vois, mais je pense que c'est important à partager.
- Antoine Lacouturière
Alors oui, en précisant l'aspect complémentaire. C'est vrai que comme nous, en théorie, on agit essentiellement dans des situations complexes. Pouvoir faire une séance d'hypnose, d'activation de conscience, de sofro ou d'autres techniques en urgence, en attendant qu'un produit qu'on a pris en interdose, en réserve, fasse effet, c'est absolument génial. C'est d'une simplicité absolue, sans aucun effet secondaire négatif. Et en plus, on peut l'apprendre à la personne dans la plupart des cas pour qu'elle puisse le refaire elle-même quand on est absent. Donc, on donne un outil d'autonomie qui nous rappelle qu'on a beau nous placer sur notre piédestal de soignant, encore plus quand on est médecin, on est simplement et très fier de l'être des incitateurs capables de transmettre quelque chose au même titre que les patients peuvent nous apprendre des choses. et je suis venu à la souffrance pas à la sophologie, à l'hypnose, grâce à une de mes patients de prof d'anglais, qui m'en a parlé et qui trouvait que ça m'irait bien. Et voilà, on a tous nos parcours et ces approches-là complémentaires, elles sont extrêmement appréciées, elles sont extrêmement naturelles. Effectivement, les produits qu'on utilise pour le coup, ils sont beaucoup moins naturels, ils sont extrêmement puissants, ils ont tous des effets secondaires majeurs et le poison est dans la dose. Tout dépend comment on les manie, donc il s'agit d'être pointilleux et efficace, parce que par contre la morphine est une des plus belles molécules qu'on connaisse alors qu'elle a une mauvaise réputation quand elle est mal utilisée. Voilà, l'acupuncture bien sûr, ça c'est mon nouveau petit plaisir. Et puis parfois on a dans l'équipe aussi, Nadège pourra nous parler de la technique qu'elle utilise, on n'a pas l'outil. pense que la réflexologie plantaire et là on a quelqu'un qu'on peut conseiller mais on peut aussi laisser bien sûr les gens libres de trouver quelqu'un. Il y a plein d'approches. La Suisse comme la France sont ouvertes à ça, la Suisse peut-être encore plus. Même si en France on avait aussi l'autonomie. la kinésionomie clinique, la fasciathérapie, qu'une de mes amies à la base orthoptiste, Gaëdic Olivier à Brest. Il y a plein d'outils. Sans priver serait une faute.
- Vianney Perrin
Je trouve ça important. Et puis, je peux peut-être rajouter, avant que Nadège, tu complètes avec ta spécificité, simplement de dire, à nouveau, de le répéter dans le podcast, quasiment sur chaque... Sur chaque épisode, je dis, la médecine, ces outils, on en a besoin. On a besoin des molécules et je le sais fort bien, de ces molécules-là, on en a besoin. Et l'idée, ce n'est pas de priver ou de prioriser ou de dire c'est mieux que. Je crois que tu l'as présenté comme ça en disant c'est complémentaire, c'est naturel et ça vient comme un... Oui, un complément. Il n'y a aucunement l'idée de dire c'est mieux qu'eux, il ne faut pas qu'eux. Je ferme la parenthèse pour mettre tout le monde très à l'aise.
- Nadège Deteix Baraque
Je crois qu'on ne t'a pas écouté dire et parfois c'est mieux. Oui, on essaye tous d'utiliser des techniques complémentaires. Et pour revenir sur c'est mieux, c'est moins bien, c'est complémentaire. encore une fois, humilité. On propose, on essaye, on voit ce que les gens en fassent, si ça fait, si ça résonne et puis s'ils en ont besoin ou pas. Je me suis formée l'année dernière aux huiles essentielles en soins palliatifs, une formation qui a été proposée par Palliative Vaux qui chapote un petit peu les soins palliatifs sur la zone et donc avec un aromathérapeute qui nous a fait une formation spécialisée pour les soins palliatifs. Et ça m'a permis d'aller encore plus au-delà et donc de l'utiliser même dans mon quotidien puis en avoir un aperçu post-marathon. Et oui, on le propose aux patients. Et s'ils n'en voient aucun intérêt, on ne force pas le passage. Il y a les médicaments, il y a les techniques complémentaires.
- Vianney Perrin
De laisser la place à ça parce que ben... malgré tout c'est pas dans tous les services pareil je pense qu'il faut le dire ça dépend aussi il ya les recommandations de la haute autorité de santé de l'om s et puis à ce que les êtres humains derrière interprète de ces recommandations là il ya un certain nombre de disciplines qui sont connues reconnues le fait de le voir en pratique jusqu'au lit du malade et ben c'est aussi une manière peut-être d'inspirer d'autres soignants ou de donner envie à certains patients de dire peut-être que ça on pourrait l'implémenter à ce qui existe déjà ça me paraissait important d'ouvrir cet espace là que tu évoquais, Vianney, tout à l'heure sur la localisation, les pays, la France, la Suisse, ça me donne envie de vous questionner, de vous interroger tous les deux sur deux éléments. Le premier, c'est dans votre quotidien 100%, est-ce qu'il y a des différences notables entre la France, la Suisse ? Première question. Et deuxième question, plus délicate, mais qui fait aussi partie du quotidien, c'est sur les mots sensibles de « suicide assisté » . Aide médicale à mourir, fin de vie plus ou moins conscientisée, plus ou moins aidée. Et là, je crois qu'il y a des différences assez importantes entre la France, la Suisse et peut-être même nos voisins belges. Est-ce que c'est OK pour vous de nous dire quelques mots sur ces deux versants-là ?
- Antoine Lacouturière
Oui, bien sûr. D'autant que, comme je le disais tout à l'heure, une des raisons qui fait que je suis en Suisse, c'était la question de l'aide médicale à mourir par le suicide assisté, de voir comment ça se passe. puisqu'on sait qu'en France, on est en train de se diriger vers une solution qui n'est pas encore précise. Mais en tout cas, j'avais besoin de me confronter et ne pas rester dans mon idéologie bloquée. Voilà, donc c'est une des raisons. Alors d'abord, pour les soins palliatifs, je ne peux pas tellement parler de la Belgique, si ce n'est qu'en Belgique, j'ai fait de temps en temps venir Jean-Michel Longnot, qui est le responsable de la revue Clinica Etica de Liège. qui est un philosophe et qui travaille en unité de soins palliatifs. Je trouve ça magnifique d'avoir un philosophe dans un service comme ça. En plus, le type est hallucinant de passion et il est passionnant. En Suisse, qu'est-ce qu'on pourrait rajouter par rapport à la France ? On a en plus dans les équipes mobiles de soins palliatifs un accompagnant spirituel, donc quelqu'un qui est d'une église et qui va bien au-delà de la religion dans toute la spiritualité. de la personne et qui peut... Chez nous, c'est absolument... Alexandre est incroyable. Je ne sais pas si tu l'as rencontré, mais c'est un type hallucinant. Vraiment, il enrichit énormément l'équipe. Donc ça, c'est une grosse différence avec ce que j'avais connu en France. Comme en France, on n'a toujours pas d'aide-soignant, ce qui est probablement un dommage. Je pense que ce serait très intéressant également. Mais en fait, on pourrait avoir un psychomotricien, un ostéopathe, un physiothérapeute qui, ici, s'appelle physiothérapeute et en France, les kinés. Voilà, bref, toutes les Merci. La profession pourrait être dans nos équipes. Mais nous, la grosse différence, c'est ça. On peut aussi donner comme différence, parce qu'au niveau médical pur, infirmier pur, les soins palliatifs, je connais mal la Belgique, mais en tout cas la France et la Suisse, c'est à peu près identiques. Aujourd'hui, il y a des congrès internationaux avec des recommandations internationales. Et on doit les respecter. On les suit, on ne fait pas n'importe quoi. Une sédation, si elle est mal conduite, on appelle ça un meurtre. avec pré-mutation sur personnes fragiles. Donc voilà, on ne fait pas n'importe quoi. On a des produits qu'on doit apprendre à manier. Et si on ne sait pas le faire, on doit apprendre à le faire, mais on ne doit pas les utiliser. Voilà, donc ça, c'est comme partout. La grosse différence pourrait être légale. Au niveau de la législation, il y a une différence entre, encore une fois, je ne vais pas parler de la Belgique, mais de la France et la Suisse. En Suisse, contrairement à la France, si une personne n'est plus apte au discernement, l'un de ses proches devient le représentant thérapeutique qui a un pouvoir décisionnel majeur. Là où en France, la loi Claes-Leonetti a permis que les directives anticipées deviennent opposables aux médecins, c'est-à-dire que si la personne a écrit ses directives, les médecins doivent suivre les directives anticipées, si elles sont réalisables. Mais le représentant thérapeutique, la personne de confiance en France, Elle n'a pas un pouvoir décisionnel. Elle doit rapporter les propos que la personne malade lui a demandé de défendre dans le cas où elle deviendrait inapte au discernement. En Suisse, c'est différent. La personne ne peut plus dire ce qu'elle veut. Son représentant thérapeutique, nommé par écrit, a un pouvoir décisionnel qu'il peut opposer au médecin. Ça fait beaucoup de différence. Il peut y avoir des points très positifs. C'est que ça évite le paternalisme excessif qu'on peut rencontrer ailleurs, de la part des médecins. D'un autre côté, ça peut aussi être un piège parfois si le médecin se sentant poussé par le représentant thérapeutique à faire quelque chose qu'il n'aurait pas proposé à son patient. De peur de risques médico-légaux ou de poursuites légales, ça peut poser des problèmes de retard de prise en soins, de soins excessifs qui pourraient aller vers l'acharnement là où l'indication n'était plus posée. Donc dans les deux systèmes, il y a des avantages et des inconvénients. Celui que moi je trouve en Suisse, donc il y a ce risque-là. Mais si on se rappelle qu'en fait c'est le médecin qui pose les indications et le représentant thérapeutique qui choisit au sein des indications, alors il n'y a aucun problème. Les choses sont très claires et puis discuter en amont. Là où ça pose plus de problèmes, c'est si le médecin n'ose pas poser des indications précises par rapport à ce qui reste encore raisonnable et qu'on déborde de ça. Donc c'est plutôt une lecture de la loi. La loi est précise et elle protège bien les patients, je trouve, en Suisse. Vraiment bien.
- Vianney Perrin
Merci pour cette partie de l'éclairage.
- Antoine Lacouturière
Sur la partie aide médicale à mourir... que ce soit l'euthanasie comme en Belgique, que ce soit le suicide assisté comme en Suisse, on pourrait parler du Canada, de l'Oregon, de plein d'endroits. Mais si on prend nos pays voisins, donc ici il y a le suicide assisté, ce qui veut dire qu'une personne, du moment qu'elle adhère à une association de bénévoles, elle peut voir, étudier son dossier médical. et si son dossier médical comporte des... pathologie grave, évolutive, ou elle est au décès, elle peut demander à bénéficier d'un suicide assisté. Donc à ce moment-là, un bénévole va rencontrer la personne, vérifier sa demande, qu'elle demande bien ça pour elle-même, etc. La commission aura validé le dossier en amont. Et puis ensuite, si c'est confirmé, cette personne va pouvoir, avec une ordonnance médicale, se fournir en un produit. qu'elle va pouvoir boire, si elle peut encore boire, ou se voir injectée par un bénévole, un soignant bénévole. Donc voilà, ça c'est la partie, pour la partie suisse romande, c'est Exit, il existe une autre structure d'aide de suicide assistée en Suisse. C'est comme ça que ça fonctionne, la personne en théorie doit faire ça dans son propre domicile, si elle est amenée à le faire à l'hôpital. C'est possible aussi en EMS, parce qu'en EMS c'est l'équivalent des EHPAD en France, c'est leur domicile. Elles ont le droit de le faire dans les institutions, mais en général il y a des petites règles à respecter localement. Et là je ne veux pas rentrer dans les thèmes parce que ça dépend des institutions, mais globalement c'est ça. La personne peut avoir accès, elle doit être apte au discernement. Bien sûr, personne ne peut décider pour elle d'un suicide. Si elle perd son discernement, elle n'a plus le droit à ça.
- Vianney Perrin
Ça veut dire qu'on exclut par définition toutes les démences assez avancées par exemple, ou les personnes qui ne sont pas en capacité de verbaliser leur choix ?
- Antoine Lacouturière
Alors la démence, si la personne a des trucs cognitifs qui l'empêchent d'être apte au discernement de manière régulière, etc. Oui, ça va exclure. Maintenant, elle peut le faire un petit peu avant, potentiellement. Après, pour la personne qui a des soucis purement verbaux, non, ça, il y a d'autres moyens de le faire, probablement. par l'écriture, il y a d'autres moyens de pouvoir demander à le faire. Après, s'il y a une difficulté pour une personne qui, par exemple, physiquement ne pourrait pas porter le verre à sa bouche ou ouvrir la perfusion qui lui déclenche le produit, là oui, c'est une limite, puisqu'il n'y a pas d'euthanasie, donc ça ne peut pas être quelqu'un d'autre qui donne à boire ou qui fait l'injection. Là, on est dans un système différent de l'euthanasie belge.
- Vianney Perrin
Où c'est le cas ?
- Antoine Lacouturière
Où c'est un soignant qui doit délivrer le produit.
- Vianney Perrin
D'accord.
- Nadège Deteix Baraque
Je vais parler purement de l'expérience personnelle. Moi aussi, je suis française. On en parlait au début. Et puis, je suis arrivée en Suisse à l'équipe mobile en ayant cette même idéologie de soins pâles français. un petit peu réfractaire à tout ce qui est l'aide médicale à mourir, le suicide assisté, l'euthanasie. Et puis j'étais très curieuse de voir comment ça se passait, quels étaient les patients qui en faisaient la demande, pour quelles raisons. Tout ça m'intéressait et m'interpellait. J'en ai même été faire un stage en Belgique pour voir comment se passait l'euthanasie là-bas. Probablement qu'avec la connaissance, on devient plus... tolérants, c'est-à-dire que comme pour les soignants tout à l'heure, on expliquait que il y avait la bienveillance maltraitante, je pense que les gens qui décident de le faire, c'est aussi leur choix, leur chemin. Et encore une fois, c'est quelles intentions ils mettent derrière le geste et derrière ce qu'ils font. Et nous, en tant que soignants et soignants de l'équipe mobile de soins palliatifs, on a décidé en tout cas de ne jamais les abandonner jusque-là. C'est leur choix, c'est eux qui décident. et ce n'est pas pour ça qu'on ne va pas les suivre et les accompagner au niveau des symptômes jusqu'au moment où ils décident de mourir. Par contre, on n'ira jamais proposer ou discuter de ces solutions avant que ce soit eux qui nous en parlent.
- Vianney Perrin
On se rapproche de la fin de l'épisode et il me reste deux choses à faire. C'est la petite signature numéro 2 du podcast, la question qu'on a transformée en qu'est-ce que c'est la santé pour vous sur qu'est-ce que c'est le soin, le soignant, les soins, qui est fort intéressant. Alors je garde la deuxième chose habituelle et puis avant ça, on a évoqué beaucoup de sujets aujourd'hui sur un thème qui fait peur à beaucoup. Quand j'en ai parlé dans le podcast, j'ai eu peu de réponses, c'est-à-dire qu'il y a eu beaucoup de... de personnes qui sont venues voir ce qui se passait, mais peu qui ont osé verbaliser. C'est du quotidien pour vous, j'imagine, autour de vous, pas dans l'équipe, ça j'ai bien compris, mais quand on rencontre d'autres personnes et qu'on parle de la fin de vie, de la mort, qui est tout sauf les soins palliatifs, on a bien compris qu'il y avait cette notion d'améliorer la vie, de remettre de la vie dans la vie qui reste, avec toute la conscience que vous avez développée. Toutes ces compétences qui vous paraissent évidentes et qui, vu de l'extérieur, ne sont pas si évidentes et communes que ça, de compétences relationnelles, de compétences dans l'art de l'écoute, de laisser à l'autre la place d'être tel qu'il est avec cette métaphore splendide de la balançoire, de la précision des soins, de l'humour au sein de l'équipe, des soupapes. On a balayé un certain nombre de sujets, je suis sûr qu'au-delà de ce côté vie, fin de vie, Il y a d'autres choses qui vont ressentir, et donc la dernière chose qui me reste à faire, après avoir évoqué tous ces sujets avec vous, c'est vous remercier chaleureusement pour votre accueil extraordinaire, pour le temps passé avec moi à répondre ouvertement, pour les limites que vous avez osé partager. J'avoue que ce n'est pas si commun que des soignants puissent dire « ça je suis bon et compétent, et ça je ne sais pas » . Et ça, j'ai peur de ça moi aussi. C'était touchant. Et puis merci de nous donner un exemple de ce qui peut être fait dans la dignité, dans la responsabilité d'inclure les familles, d'encourager les soignants. J'ai trouvé ça réconfortant quelque part et inspirant aussi. Donc merci beaucoup à tous les deux et puis à toute l'équipe pour tout ça. Je vous laisse le petit mot de la fin chacun à votre tour.
- Nadège Deteix Baraque
Alors je commence. Merci Antoine pour ces deux jours. C'est chouette. d'avoir quelqu'un d'extérieur qui nous permet de nous étonner encore sur notre pratique et de prendre du recul. Moi, j'aurais juste envie de dire que les soins palliatifs, on peut nous appeler. On est accessible. On est très accessible. C'est-à-dire que oui, ça peut faire peur de loin et on est hyper ouvert et on discute facilement. Donc, ce que j'aurais envie de dire pour le mot de la fin, c'est oser. Contacter une équipe mobile de soins palliatifs, oser en parler, on ne mange personne.
- Antoine Lacouturière
Je dirais déjà qu'on a énormément de chance de faire ce métier-là. Merci beaucoup de nous donner l'occasion de partager. Je pense qu'on a conscience de notre chance. On est dans un pays qui propose des soins palliatifs. tous les pays du monde qui ont cette chance-là. On est un pays qui a les molécules, qui est ouvert aux approches complémentaires. On a une chance énorme par rapport à beaucoup de nos collègues, c'est qu'on a du temps. Ce que nos responsables nous offrent en tant que soignants, c'est du temps. Et ça, pour avoir été médecin généraliste, pour avoir bossé comme médecin coordonnateur de maison de retraite, pour avoir fait un certain nombre de boulots, le temps, on l'a. pas tant que ça. Ou quand on se l'offre, on le paye. On le paye sur l'équilibre avec la vie familiale, on le paye sur d'autres activités. Et ça, c'est une chance folle. Et souvent, pour rebondir sur ce que disait Nadege, on est utile à nos collègues, au-delà des patients, bien sûr, et de leurs proches, par le temps qu'on peut leur offrir, qu'on peut leur donner. On a conscience que on n'est pas forcément meilleur Merci. Simplement, on a le temps d'aller chercher des choses, des informations qu'ils n'ont pas pu recueillir. D'abord parce que ce n'est pas classique, notre approche, et aussi parce que, justement, on ne va pas faire leur boulot, ils le savent mieux que nous. Ils connaissent mieux leurs patients que nous, ils connaissent mieux leurs spécialités. Et donc, nous, on doit apporter une photo qui, si possible, offre un angle un peu différent. Ça, c'est pour les soignants. Et pour les patients, osons avoir accès à des équipes comme ça, on pourrait décider d'arrêter de parler de palliatif qui est un mot qui fait peur et bravo de faire une émission là dessus parce que c'est extrêmement riche et en fait on changerait le mot et on reviendrait au même problème c'est la confrontation à ce qui nous fait peur à tous, la maladie, la mort, etc. Alors que, en fait, la bonne nouvelle, c'est que même quand c'est complexe, la personne, elle reste elle-même. Elle a autant de respect, peut-être même encore plus, dans nos yeux. On la respecte énormément. On est très admiratifs des gens qu'on rencontre. Alors qu'eux ont tendance souvent à s'être fait écraser par leur pathologie. Parfois par les protocoles, procédures qui ont fini le travail et ils s'oublient. Et si nous, on arrive un peu à leur montrer qu'on s'adresse vraiment à eux, alors on a fait notre boulot. Et puis quand ça marche moins bien, il faut qu'on s'améliore et évolue.
- Vianney Perrin
L'épisode touche sa fin avec ces mots. J'espère que vous en retiendrez quelque chose de positif. Une image, une question, une idée, des graines à semer ou de nouvelles perspectives autour des soins, du bien-être et de la santé. Si la démarche vous plaît, je vous invite à prendre quelques instants pour participer à la croissance du podcast. Un partage sur les réseaux sociaux, une note sur les applications Apple Podcast ou Spotify, et aussi la possibilité d'échanger directement si le cœur vous en dit. Cela contribue à l'aventure, alors merci d'avance pour ces quelques instants. Je vous souhaite une très belle fin de journée, soirée, nuit, et je vous dis à bientôt.