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Musée de Grenoble - rencontre avec Eric Chaloupy, médiateur culturel

Musée de Grenoble - rencontre avec Eric Chaloupy, médiateur culturel

17min |01/12/2025
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Description

Au bord de l’Isère, le musée de Grenoble se dévoile dans un élégant bâtiment blanc et lumineux. Derrière ses lignes modernes, l’ancien et le nouveau se rassemblent avec plus de 900 œuvres qui racontent l’histoire de l’Antiquité à l’art contemporain.

Cette série de podcasts vous fait découvrir 5 œuvres majeures du musée. Mystérieuses, puissantes, surprenantes, elles ont chacune à leur manière traversé le temps pour faire écho à nos préoccupations contemporaines.

Eric Chaloupy, médiateur culturel en charge de l’accueil des publics, par le biais du tableau de Yves Tanguy « Nid d’Amphioxus » raconte deux personnes qui ont marqué l’histoire de l’art à Grenoble : Peggy Guggenheim et Andry Farcy.

Un podcasts réalisé par Célia Bugni-Romand


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Il y a vraiment eu les JO à Grenoble ?

  • Speaker #1

    On se donne rendez-vous à VH ou au PPN ?

  • Speaker #0

    Avant Grenoble,

  • Speaker #2

    ça s'appelait cul-à-roue.

  • Speaker #0

    Un arvalo, c'est un bébé phoque.

  • Speaker #1

    On peut voir le Mont-Blanc depuis la Bastille ?

  • Speaker #0

    On prend les bulles ou on monte à pied ?

  • Speaker #1

    Allez, je prends mon vélo et j'arrive.

  • Speaker #2

    Relief.

  • Speaker #0

    Relief.

  • Speaker #1

    Relief.

  • Speaker #2

    Le podcast du magazine Gremag. Au bord de l'Isère, le musée de Grenoble se dévoile dans un élégant bâtiment blanc et lumineux. Derrière ces lignes modernes, l'ancien et le nouveau se rassemblent avec plus de 900 œuvres qui racontent l'histoire de l'Antiquité à l'art contemporain. Dans cette série de podcasts, nous avons choisi de vous faire découvrir 5 œuvres majeures du musée. Mystérieuses, puissantes, surprenantes, elles ont chacune à leur manière traversé le temps pour faire écho. à nos préoccupations contemporaines.

  • Speaker #1

    Et c'est justement en souhaitant mettre sa collection un petit peu, comment dirais-je, en dépôt et dans une zone sécurisée, elle va pouvoir venir à Grenoble et déposer sa collection dans l'ancien musée.

  • Speaker #2

    Derrière certaines collections majeures se cachent des mécènes visionnaires, à l'image de Peggy Guggenheim, libre... audacieuse, ardente, elle assumait les mécénats et influences avant même que ces mots ne se croisent, révélant au grand public les artistes de l'avant-garde. C'est à elle que l'on doit la présence à Grenoble du tableau de Yves Tanguy, ni d'Amphioxus. Yves Tanguy, d'ailleurs, fut son amant. André Farsi fut son allié, et sur fond de Seconde Guerre mondiale, voici comment une histoire d'art et de passion a conduit cette œuvre jusqu'au musée de Grenoble.

  • Speaker #1

    Voulez-vous parler de... Plusieurs personnes. Des personnes qui ont marqué l'histoire de l'art et l'histoire du musée de Grenoble. Ce qui est assez étonnant, c'est que ce sont deux personnes qui n'ont pas de lien au départ. L'une est américaine, elle s'appelle Peggy Guggenheim, et l'autre est français, il s'appelle André Farsi, plus connu sous son pseudonyme d'artiste André Farsi. Et j'ajouterai un troisième personnage qui est Yves Tanguy.

  • Speaker #2

    Relief au musée de Grenoble, Éric Chaloupi, médiateur culturel en charge de l'accueil des publics.

  • Speaker #1

    Et ces trois personnages, en tout cas les deux premiers, ont une histoire commune avec la ville de Grenoble. Cette trilogie nous ramène un petit peu à l'histoire de l'art au XXe siècle et à celle du musée. Et que ce soit Peggy Guggenheim ou André Farsi, je les vois un petit peu comme des personnes, des influenceurs et des influenceuses. C'est pour ça que je voulais faire ce lien entre ces personnes, dans le cadre de ce podcast, entre ces personnes, ce qu'elles ont pu véhiculer dans la première moitié du XXe siècle. et comment aujourd'hui d'autres personnes peuvent aussi véhiculer des messages, en tout cas faire apparaître des éléments historiques. Le nom de Guggenheim est très connu. Il y a plusieurs fondations dans le monde entier, notamment une qui est à New York, qui donne sur Central Park, qui est une fondation qui a été créée, il y a une confusion parfois, par son oncle, Salomon Guggenheim. Peggy, elle, est née du frère de Salomon, qui est tragiquement décédé lors du naufrage du Titanic. Et c'est vrai qu'elle avait 14 ans à ce moment-là. Pour le commun des mortels, ça serait une situation terrible. Pour elle, ça l'a été forcément. Mais ce qu'il faut savoir, c'est que la famille Guggenheim est une famille immensément riche. Ses grands-parents, qu'ils soient du côté paternel ou du côté maternel, ont tous les deux immigré aux Etats-Unis au 19e siècle. et tous les deux ont fait fortune dans... un dans la banque et un dans les minerais. Et elle se retrouve, si vous voulez, à la croisée de deux chemins entre la famille Guggenheim et la famille Seligman. Et elle va en effet vivre une vie assez particulière. Il y a eu plusieurs ouvrages qui ont été écrits sur son existence, sur sa vie. Et surtout, elle a écrit elle-même ses mémoires, qui sont aussi un moment important pour sceller une part de vérité sur son existence et sur sa longue trajectoire qui va l'amener de New York. jusqu'à de nombreux pays tout au long de sa vie, mais surtout à Venise. Et donc l'autre figure, ou en tout cas l'autre grande personnalité que je voulais aborder, c'était celle d'André Farsi. Donc André Farsi a été directeur du musée de Grenoble entre 1919 et 1949. Donc c'est un long, long parcours à la tête du musée de Grenoble. C'est un personnage dont on a fait des rendus hommages au musée plusieurs fois. c'est un personnage qui a créé créer quand même, il faut le dire, le premier musée d'art moderne de France, non pas, enfin, dans le temps, puisque Quand il est arrivé en 1919, ce qu'il souhaitait c'était s'orienter vers la création contemporaine de son époque naturellement. Et c'est vrai que c'est quelqu'un qui a énormément œuvré pour faire entrer dans les collections du musée ce qui était considéré à l'époque comme de l'art contemporain. Aujourd'hui si je cite les noms ça va surprendre personne et en même temps tout le monde connaît le musée de Grenoble par rapport à ses noms. C'est Henri Matisse, ça va être Pablo Picasso, Claude Monet. donc Des artistes qui, déjà dans les années 1920, étaient pour Picasso déjà reconnus, mais pas dans les institutions françaises. Et c'est vrai que ce personnage, sur 30 années de direction au sein du musée, il a enrichi considérablement les collections. Et c'est quelqu'un qui était un peu par mons et par veau. C'est quand même quelqu'un qui a créé beaucoup d'expositions itinérantes. ou Paris ou d'autres lieux. Mais c'est vrai qu'aujourd'hui, quand on regarde la collection du XXe siècle historique du musée de Grenoble, on peut être admiratif du travail qu'il a pu mener et surtout de l'expression qu'on utilise assez familièrement qui est celle du nez creux. C'est-à-dire que c'est quelqu'un qui a quand même su acquérir des œuvres qui étaient parfois décriées à son époque, de son vivant, mais qui aujourd'hui font la totale notoriété du musée et de ses collections.

  • Speaker #2

    Et justement, la première question qui nous vient, c'est quel est le lien entre Peggy Guggenheim et André Farsi ?

  • Speaker #1

    Alors, l'histoire est un petit peu longue. Il faudrait revenir sur les différents moments de la vie de Peggy. Allons-y,

  • Speaker #2

    passe Peggy pour commencer.

  • Speaker #1

    C'est quelqu'un qui est venu d'une... qui est héritière d'une immense fortune. C'est quelqu'un qui a eu un parcours très, très riche tout au long de sa vie. Et en même temps, qui a eu une vie assez truculente. Il faut le dire quand même. C'est quelqu'un qui a eu des passions.

  • Speaker #2

    Beaucoup d'amis, beaucoup d'amants.

  • Speaker #1

    Beaucoup d'amis, beaucoup d'amants.

  • Speaker #2

    Quelques amantes.

  • Speaker #1

    Quelques amantes, exactement. Elle ne s'en cache pas. D'ailleurs, il y a une petite anecdote assez sympathique. C'est qu'en 1944, quand elle a publié ses mémoires, son oncle est tellement offusqué par ce qu'elle a écrit dans ses mémoires qu'il refuse tout lien avec sa nièce à ce moment-là. D'accord. Par la suite, on va voir que les choses vont se renouer entre les deux fondations. À partir des années 30, elle va vivre à Londres et elle va avoir comme projet de créer une galerie d'art. C'est assez récent dans son parcours, c'est vraiment marqué par les années 30, parce qu'avant elle fréquentait déjà des artistes sans avoir cette velléité de créer une galerie. Mais le premier artiste qu'elle va solliciter pour créer cette galerie, c'est Yves Tanguy. Et c'est vrai que c'est intéressant puisque nous sommes devant un tableau de ce même artiste qui a aussi un lien très important avec Peggy Gennheim et le musée. Et donc, au tout début de l'année 1938, elle va ouvrir cette galerie et qui aura un certain succès. Mais ce succès, si vous voulez, comme c'est une galerie d'avant-garde où elle présente beaucoup de mouvements qui sont découverts par le grand public, il y a forcément des forces un peu opposées à cette forme d'art. c'est à dire qu'elle joue quand même à ce moment-là un rôle, je dirais, d'influenceuse et elle est armée pour ça, pour présenter des artistes qui sont méconnus. Yves Tanguy et d'autres surréalistes, elle jouera un rôle important dans la période de la Seconde Guerre mondiale aux Etats-Unis. C'est vrai que les Américains, par exemple, connaissent un seul artiste, c'est Salvador Dali. Dans le surréalisme. Et de faire connaître les autres, c'est quand même quelque chose d'important. Ce qui explique qu'aujourd'hui, Yves Tanguy est peut-être un peu plus connu aux Etats-Unis qu'en France.

  • Speaker #2

    Alors qu'il est français.

  • Speaker #1

    Alors qu'il est français,

  • Speaker #2

    il a des origines bretonnes.

  • Speaker #1

    D'ailleurs, je ne dis pas que ça se voit immédiatement dans le tableau qu'on a sous les yeux et qui nous concerne, puisque c'est un tableau vraiment dans la fibre surréaliste. C'est un paysage très étrange dans lequel on voit apparaître des formes qui évoquent beaucoup de choses et en même temps des formes embryonnaires. On est vraiment en interrogation, il y a une forme de biomorphisme dans ces formes et c'est quelque chose d'assez troublant. C'est quelqu'un qui travaillait de manière, il le dit lui-même, parfois compulsive, une sorte de fièvre créatrice, ou parfois prenait du temps. Mais en tout cas, ce n'était pas quelqu'un qui était attaché à un travail régulier, pas quelqu'un qui se mettait à son bureau, vous voyez, c'était quelqu'un d'un peu extrême aussi dans sa façon d'être et de vivre. Il y a une phrase de Breton que je trouve qui est assez belle. Les peintures de Tanguy ne sont pas des paysages où l'on pourrait distinguer la terre, la mer et le ciel, car il peint ce qui existe. avant la séance. « La préparation des éléments » . C'est une phrase très poétique et qui ne nous donne pas de clé de lecture, mais qui décrit, je trouve, assez bien l'atmosphère que l'on a dans ce tableau.

  • Speaker #2

    Oui, tout à fait. Je suis assez d'accord avec ça.

  • Speaker #1

    Et alors, pourquoi ce tableau se retrouve dans nos collections ? Parce que justement, Peggy Guggenheim, à partir de son expérience de la galerie à Londres, elle a souhaité fermer sa galerie en 1939 et voulu partir sur un autre projet qui était de créer un musée. Elle va se rendre à Paris. Du coup, son projet de musée va naturellement tomber à l'eau à cause de l'invasion, bien sûr. Et elle est juive.

  • Speaker #2

    Et elle est juive.

  • Speaker #1

    Et elle vit en France, alors de manière très libre. Elle a des attaches en France. Elle avait acheté une maison à un moment donné dans le sud de la France. Elle a beaucoup vécu à Paris. Donc, elle parle le français, enfin l'écrit, puisqu'on a une lettre d'elle dans nos collections. Voilà. Et c'est vrai que ce qui va se passer, c'est qu'elle va venir en 1939 en France et elle va sillonner la France accompagnée d'une femme d'artiste qui s'appelle Nelly von de Heysburg. Et elle va constituer une collection dans le but, justement, de créer son musée. Le grand mythe, c'était qu'elle se disait « je me lève tous les jours et tous les jours je vais acheter une œuvre d'art » . C'est beau comme projet quand même. C'est ambitieux. Oui, c'est ambitieux. Elle en avait les moyens. Et c'est vrai que grâce à son réseau, elle a pu acheter un nombre d'œuvres assez important, mais avec des œuvres de Francis Picabia ou d'Alberto Giacometti, par exemple. C'est quand même de Max Ernst aussi, qui est un artiste surréaliste également. Et elle va constituer cette collection. Mais ce qui va se passer, si vous voulez, c'est que la guerre en 1940, naturellement, se précise notamment pour la France. Et donc, Fernand Léger, qui est un artiste aussi du XXe siècle, qui est très connu, lui suggère donc de mettre sa collection en sécurité et de proposer, par exemple, au Louvre, d'abriter sa collection.

  • Speaker #2

    D'accord.

  • Speaker #1

    Parce que le Louvre, pour des questions administratives, mais aussi... d'œuvres trop modernes va décliner. C'est assez intéressant parce que dans les années 70, le Louvre va organiser une exposition de la collection de Piguenay. Donc il y a un retour sur l'histoire assez intéressant.

  • Speaker #2

    Mais à l'époque, c'était trop moderne.

  • Speaker #1

    Oui, on peut se dire ça. Donc si vous voulez, c'est vrai qu'il y avait des Kandinsky, des Klee. Il y avait des œuvres d'Edali. J'en ai parlé tout à l'heure pour d'autres raisons. Des sculptures de Constantin de Brancusi. Des œuvres incroyables qu'elle avait, pour Brancusi, mis beaucoup de temps à acquérir. Parce que c'était un personnage aussi qui ne lâchait pas ses sculptures aussi facilement. Il a fallu faire un travail presque au corps de l'artiste pour obtenir ses œuvres.

  • Speaker #2

    Et finalement, le Louvre refuse ?

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #2

    Et ?

  • Speaker #1

    Ces œuvres vont passer dans la région de Vichy, c'est un comble de l'histoire, avant d'arriver à Annecy et d'être entreposées dans un entrepôt à la gare d'Annecy. Elle a des liens avec la Suisse puisque son ex-mari avec qui elle a eu deux enfants vit en Suisse. Et de là, elle va avoir un contact avec le directeur du musée de Grenoble parce que Nelly von Doisburg avait eu connu André Farsi. Et c'est justement en souhaitant mettre sa collection un petit peu en dépôt et dans une zone sécurisée. Sécurité. Le Grenoble n'étant pas occupé à ce moment-là, même si on est sous le gouvernement de Vichy, et que pour elle c'est compliqué parce qu'elle n'a pas de papier, elle est en situation on va dire irrégulière. Et donc elle va pouvoir venir à Grenoble et déposer sa collection dans l'ancien musée. Nous nous trouvons dans le nouveau qui est éduqué en 1994.

  • Speaker #2

    Dans une usine de peinture qui se trouve sur la place Verdun.

  • Speaker #1

    Exactement, la place Verdun. Je tiens à préciser quand même que malheureusement, ces œuvres n'ont pas pu être visibles pour le public. Puisqu'elles étaient, si vous voulez, déclarées pour la plupart. Vous savez, la politique nazie était de déclarer certains artistes interdits, dégénérés, c'était le terme approprié. Et toutes ces œuvres faisaient partie de ces artistes que les nazis... avaient complètement exclu de leur politique. Et donc du coup, André Farsi a gardé cela. Alors, ça n'a pas duré énormément de temps non plus. Ça a duré quelques mois. Parce qu'à partir de Grenoble, Peggy Gellem s'est rendue plusieurs fois à Marseille. Parce que Marseille, à ce moment-là, c'était la porte de sortie, si vous voulez, pour fuir l'Europe et rejoindre les États-Unis ou d'autres, Cuba ou par exemple. voilà Donc il y avait Ryan Fry qui était un journaliste américain qui avait mis en place un pont entre Marseille et les Etats-Unis pour aider notamment. des allemands qui étaient contre le pouvoir nazi, mais aussi des grandes personnalités de l'art, de l'art en général, à fuir la France. Et puis Guggenheim, d'ailleurs, a financé elle-même quelques départs, parce qu'il y avait quand même toujours cette part, il fallait partir sur un bateau. Et alors qu'elle est revenue sur Grenoble, elle a repris contact avec un de ses transporteurs qui avait l'habitude de transporter ses tableaux, qui lui avait conseillé de faire transiter ces œuvres par Marseille, mais d'indiquer dessus que c'était du mobilier tout simple, sur les cartons.

  • Speaker #2

    Pour qu'elles soient arrêtées par la douane.

  • Speaker #1

    Voilà, exactement. Et donc, en remerciement au fait que le musée, en tout cas que le directeur ait bien voulu conserver ces œuvres-là, ils ont eu une petite discussion sur un choix d'œuvres qu'elle voulait bien offrir au musée de Grenoble. Et le choix s'est porté sur cette œuvre de Yves Tanguy. qui s'intitule, j'ai oublié de le dire, « Les nids d'Anphoxus » . C'est un titre aussi très énigmatique. Il rejoint complètement cette pensée surréaliste. Yves Tanguy était habitué à proposer des titres, des fois tirés de la psychanalyse. Il était un peu provocateur dans sa vie. Et des titres qui parfois déstabilisèrent les nids d'Anphoxus, ce sont des petits verres de sable qu'on trouve au bord des plages et qui créent des petites concrétions. Ça a quand même un lien de loin avec ce paysage qui paraît un peu... Oui, tout à fait.

  • Speaker #2

    On pourrait s'imaginer qu'il s'agit de ça, oui.

  • Speaker #1

    Voilà. Et Peggy Guggenheim, pour aller encore plus loin, si vous voulez, c'est dans ce lien que je voulais faire avec les influenceuses et les influenceurs. Elle ne va pas s'arrêter quand elle va arriver aux Etats-Unis. En 1943, elle crée une exposition d'artistes femmes. C'est quand même aussi incroyable parce qu'aujourd'hui, on parle beaucoup de replacer la femme dans la création. et elle déjà avait conscience de ça. Elle n'était pas toute seule, elle s'est fait aider d'autres personnes, mais en tout cas, elle a porté ces messages-là.

  • Speaker #2

    Si l'influence de Peggy Guggenheim fait toujours son effet, venez admirer Nid d'Amphioxus de Yves Tanguy en salle 36 du musée de Grenoble. Le musée, entièrement gratuit, vous accueille toute l'année pour un voyage à travers les œuvres du XIIIe au XXe siècle, ainsi que de nombreuses expositions temporaires. Réalisation Célia Buny-Romand. Remerciements Ville de Grenoble, Relief, Isabelle Touchard. Musée de Grenoble, Claire Gabin, Marianne Télibert. N'hésitez pas à explorer les autres épisodes de cette série. À bientôt !

Description

Au bord de l’Isère, le musée de Grenoble se dévoile dans un élégant bâtiment blanc et lumineux. Derrière ses lignes modernes, l’ancien et le nouveau se rassemblent avec plus de 900 œuvres qui racontent l’histoire de l’Antiquité à l’art contemporain.

Cette série de podcasts vous fait découvrir 5 œuvres majeures du musée. Mystérieuses, puissantes, surprenantes, elles ont chacune à leur manière traversé le temps pour faire écho à nos préoccupations contemporaines.

Eric Chaloupy, médiateur culturel en charge de l’accueil des publics, par le biais du tableau de Yves Tanguy « Nid d’Amphioxus » raconte deux personnes qui ont marqué l’histoire de l’art à Grenoble : Peggy Guggenheim et Andry Farcy.

Un podcasts réalisé par Célia Bugni-Romand


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Il y a vraiment eu les JO à Grenoble ?

  • Speaker #1

    On se donne rendez-vous à VH ou au PPN ?

  • Speaker #0

    Avant Grenoble,

  • Speaker #2

    ça s'appelait cul-à-roue.

  • Speaker #0

    Un arvalo, c'est un bébé phoque.

  • Speaker #1

    On peut voir le Mont-Blanc depuis la Bastille ?

  • Speaker #0

    On prend les bulles ou on monte à pied ?

  • Speaker #1

    Allez, je prends mon vélo et j'arrive.

  • Speaker #2

    Relief.

  • Speaker #0

    Relief.

  • Speaker #1

    Relief.

  • Speaker #2

    Le podcast du magazine Gremag. Au bord de l'Isère, le musée de Grenoble se dévoile dans un élégant bâtiment blanc et lumineux. Derrière ces lignes modernes, l'ancien et le nouveau se rassemblent avec plus de 900 œuvres qui racontent l'histoire de l'Antiquité à l'art contemporain. Dans cette série de podcasts, nous avons choisi de vous faire découvrir 5 œuvres majeures du musée. Mystérieuses, puissantes, surprenantes, elles ont chacune à leur manière traversé le temps pour faire écho. à nos préoccupations contemporaines.

  • Speaker #1

    Et c'est justement en souhaitant mettre sa collection un petit peu, comment dirais-je, en dépôt et dans une zone sécurisée, elle va pouvoir venir à Grenoble et déposer sa collection dans l'ancien musée.

  • Speaker #2

    Derrière certaines collections majeures se cachent des mécènes visionnaires, à l'image de Peggy Guggenheim, libre... audacieuse, ardente, elle assumait les mécénats et influences avant même que ces mots ne se croisent, révélant au grand public les artistes de l'avant-garde. C'est à elle que l'on doit la présence à Grenoble du tableau de Yves Tanguy, ni d'Amphioxus. Yves Tanguy, d'ailleurs, fut son amant. André Farsi fut son allié, et sur fond de Seconde Guerre mondiale, voici comment une histoire d'art et de passion a conduit cette œuvre jusqu'au musée de Grenoble.

  • Speaker #1

    Voulez-vous parler de... Plusieurs personnes. Des personnes qui ont marqué l'histoire de l'art et l'histoire du musée de Grenoble. Ce qui est assez étonnant, c'est que ce sont deux personnes qui n'ont pas de lien au départ. L'une est américaine, elle s'appelle Peggy Guggenheim, et l'autre est français, il s'appelle André Farsi, plus connu sous son pseudonyme d'artiste André Farsi. Et j'ajouterai un troisième personnage qui est Yves Tanguy.

  • Speaker #2

    Relief au musée de Grenoble, Éric Chaloupi, médiateur culturel en charge de l'accueil des publics.

  • Speaker #1

    Et ces trois personnages, en tout cas les deux premiers, ont une histoire commune avec la ville de Grenoble. Cette trilogie nous ramène un petit peu à l'histoire de l'art au XXe siècle et à celle du musée. Et que ce soit Peggy Guggenheim ou André Farsi, je les vois un petit peu comme des personnes, des influenceurs et des influenceuses. C'est pour ça que je voulais faire ce lien entre ces personnes, dans le cadre de ce podcast, entre ces personnes, ce qu'elles ont pu véhiculer dans la première moitié du XXe siècle. et comment aujourd'hui d'autres personnes peuvent aussi véhiculer des messages, en tout cas faire apparaître des éléments historiques. Le nom de Guggenheim est très connu. Il y a plusieurs fondations dans le monde entier, notamment une qui est à New York, qui donne sur Central Park, qui est une fondation qui a été créée, il y a une confusion parfois, par son oncle, Salomon Guggenheim. Peggy, elle, est née du frère de Salomon, qui est tragiquement décédé lors du naufrage du Titanic. Et c'est vrai qu'elle avait 14 ans à ce moment-là. Pour le commun des mortels, ça serait une situation terrible. Pour elle, ça l'a été forcément. Mais ce qu'il faut savoir, c'est que la famille Guggenheim est une famille immensément riche. Ses grands-parents, qu'ils soient du côté paternel ou du côté maternel, ont tous les deux immigré aux Etats-Unis au 19e siècle. et tous les deux ont fait fortune dans... un dans la banque et un dans les minerais. Et elle se retrouve, si vous voulez, à la croisée de deux chemins entre la famille Guggenheim et la famille Seligman. Et elle va en effet vivre une vie assez particulière. Il y a eu plusieurs ouvrages qui ont été écrits sur son existence, sur sa vie. Et surtout, elle a écrit elle-même ses mémoires, qui sont aussi un moment important pour sceller une part de vérité sur son existence et sur sa longue trajectoire qui va l'amener de New York. jusqu'à de nombreux pays tout au long de sa vie, mais surtout à Venise. Et donc l'autre figure, ou en tout cas l'autre grande personnalité que je voulais aborder, c'était celle d'André Farsi. Donc André Farsi a été directeur du musée de Grenoble entre 1919 et 1949. Donc c'est un long, long parcours à la tête du musée de Grenoble. C'est un personnage dont on a fait des rendus hommages au musée plusieurs fois. c'est un personnage qui a créé créer quand même, il faut le dire, le premier musée d'art moderne de France, non pas, enfin, dans le temps, puisque Quand il est arrivé en 1919, ce qu'il souhaitait c'était s'orienter vers la création contemporaine de son époque naturellement. Et c'est vrai que c'est quelqu'un qui a énormément œuvré pour faire entrer dans les collections du musée ce qui était considéré à l'époque comme de l'art contemporain. Aujourd'hui si je cite les noms ça va surprendre personne et en même temps tout le monde connaît le musée de Grenoble par rapport à ses noms. C'est Henri Matisse, ça va être Pablo Picasso, Claude Monet. donc Des artistes qui, déjà dans les années 1920, étaient pour Picasso déjà reconnus, mais pas dans les institutions françaises. Et c'est vrai que ce personnage, sur 30 années de direction au sein du musée, il a enrichi considérablement les collections. Et c'est quelqu'un qui était un peu par mons et par veau. C'est quand même quelqu'un qui a créé beaucoup d'expositions itinérantes. ou Paris ou d'autres lieux. Mais c'est vrai qu'aujourd'hui, quand on regarde la collection du XXe siècle historique du musée de Grenoble, on peut être admiratif du travail qu'il a pu mener et surtout de l'expression qu'on utilise assez familièrement qui est celle du nez creux. C'est-à-dire que c'est quelqu'un qui a quand même su acquérir des œuvres qui étaient parfois décriées à son époque, de son vivant, mais qui aujourd'hui font la totale notoriété du musée et de ses collections.

  • Speaker #2

    Et justement, la première question qui nous vient, c'est quel est le lien entre Peggy Guggenheim et André Farsi ?

  • Speaker #1

    Alors, l'histoire est un petit peu longue. Il faudrait revenir sur les différents moments de la vie de Peggy. Allons-y,

  • Speaker #2

    passe Peggy pour commencer.

  • Speaker #1

    C'est quelqu'un qui est venu d'une... qui est héritière d'une immense fortune. C'est quelqu'un qui a eu un parcours très, très riche tout au long de sa vie. Et en même temps, qui a eu une vie assez truculente. Il faut le dire quand même. C'est quelqu'un qui a eu des passions.

  • Speaker #2

    Beaucoup d'amis, beaucoup d'amants.

  • Speaker #1

    Beaucoup d'amis, beaucoup d'amants.

  • Speaker #2

    Quelques amantes.

  • Speaker #1

    Quelques amantes, exactement. Elle ne s'en cache pas. D'ailleurs, il y a une petite anecdote assez sympathique. C'est qu'en 1944, quand elle a publié ses mémoires, son oncle est tellement offusqué par ce qu'elle a écrit dans ses mémoires qu'il refuse tout lien avec sa nièce à ce moment-là. D'accord. Par la suite, on va voir que les choses vont se renouer entre les deux fondations. À partir des années 30, elle va vivre à Londres et elle va avoir comme projet de créer une galerie d'art. C'est assez récent dans son parcours, c'est vraiment marqué par les années 30, parce qu'avant elle fréquentait déjà des artistes sans avoir cette velléité de créer une galerie. Mais le premier artiste qu'elle va solliciter pour créer cette galerie, c'est Yves Tanguy. Et c'est vrai que c'est intéressant puisque nous sommes devant un tableau de ce même artiste qui a aussi un lien très important avec Peggy Gennheim et le musée. Et donc, au tout début de l'année 1938, elle va ouvrir cette galerie et qui aura un certain succès. Mais ce succès, si vous voulez, comme c'est une galerie d'avant-garde où elle présente beaucoup de mouvements qui sont découverts par le grand public, il y a forcément des forces un peu opposées à cette forme d'art. c'est à dire qu'elle joue quand même à ce moment-là un rôle, je dirais, d'influenceuse et elle est armée pour ça, pour présenter des artistes qui sont méconnus. Yves Tanguy et d'autres surréalistes, elle jouera un rôle important dans la période de la Seconde Guerre mondiale aux Etats-Unis. C'est vrai que les Américains, par exemple, connaissent un seul artiste, c'est Salvador Dali. Dans le surréalisme. Et de faire connaître les autres, c'est quand même quelque chose d'important. Ce qui explique qu'aujourd'hui, Yves Tanguy est peut-être un peu plus connu aux Etats-Unis qu'en France.

  • Speaker #2

    Alors qu'il est français.

  • Speaker #1

    Alors qu'il est français,

  • Speaker #2

    il a des origines bretonnes.

  • Speaker #1

    D'ailleurs, je ne dis pas que ça se voit immédiatement dans le tableau qu'on a sous les yeux et qui nous concerne, puisque c'est un tableau vraiment dans la fibre surréaliste. C'est un paysage très étrange dans lequel on voit apparaître des formes qui évoquent beaucoup de choses et en même temps des formes embryonnaires. On est vraiment en interrogation, il y a une forme de biomorphisme dans ces formes et c'est quelque chose d'assez troublant. C'est quelqu'un qui travaillait de manière, il le dit lui-même, parfois compulsive, une sorte de fièvre créatrice, ou parfois prenait du temps. Mais en tout cas, ce n'était pas quelqu'un qui était attaché à un travail régulier, pas quelqu'un qui se mettait à son bureau, vous voyez, c'était quelqu'un d'un peu extrême aussi dans sa façon d'être et de vivre. Il y a une phrase de Breton que je trouve qui est assez belle. Les peintures de Tanguy ne sont pas des paysages où l'on pourrait distinguer la terre, la mer et le ciel, car il peint ce qui existe. avant la séance. « La préparation des éléments » . C'est une phrase très poétique et qui ne nous donne pas de clé de lecture, mais qui décrit, je trouve, assez bien l'atmosphère que l'on a dans ce tableau.

  • Speaker #2

    Oui, tout à fait. Je suis assez d'accord avec ça.

  • Speaker #1

    Et alors, pourquoi ce tableau se retrouve dans nos collections ? Parce que justement, Peggy Guggenheim, à partir de son expérience de la galerie à Londres, elle a souhaité fermer sa galerie en 1939 et voulu partir sur un autre projet qui était de créer un musée. Elle va se rendre à Paris. Du coup, son projet de musée va naturellement tomber à l'eau à cause de l'invasion, bien sûr. Et elle est juive.

  • Speaker #2

    Et elle est juive.

  • Speaker #1

    Et elle vit en France, alors de manière très libre. Elle a des attaches en France. Elle avait acheté une maison à un moment donné dans le sud de la France. Elle a beaucoup vécu à Paris. Donc, elle parle le français, enfin l'écrit, puisqu'on a une lettre d'elle dans nos collections. Voilà. Et c'est vrai que ce qui va se passer, c'est qu'elle va venir en 1939 en France et elle va sillonner la France accompagnée d'une femme d'artiste qui s'appelle Nelly von de Heysburg. Et elle va constituer une collection dans le but, justement, de créer son musée. Le grand mythe, c'était qu'elle se disait « je me lève tous les jours et tous les jours je vais acheter une œuvre d'art » . C'est beau comme projet quand même. C'est ambitieux. Oui, c'est ambitieux. Elle en avait les moyens. Et c'est vrai que grâce à son réseau, elle a pu acheter un nombre d'œuvres assez important, mais avec des œuvres de Francis Picabia ou d'Alberto Giacometti, par exemple. C'est quand même de Max Ernst aussi, qui est un artiste surréaliste également. Et elle va constituer cette collection. Mais ce qui va se passer, si vous voulez, c'est que la guerre en 1940, naturellement, se précise notamment pour la France. Et donc, Fernand Léger, qui est un artiste aussi du XXe siècle, qui est très connu, lui suggère donc de mettre sa collection en sécurité et de proposer, par exemple, au Louvre, d'abriter sa collection.

  • Speaker #2

    D'accord.

  • Speaker #1

    Parce que le Louvre, pour des questions administratives, mais aussi... d'œuvres trop modernes va décliner. C'est assez intéressant parce que dans les années 70, le Louvre va organiser une exposition de la collection de Piguenay. Donc il y a un retour sur l'histoire assez intéressant.

  • Speaker #2

    Mais à l'époque, c'était trop moderne.

  • Speaker #1

    Oui, on peut se dire ça. Donc si vous voulez, c'est vrai qu'il y avait des Kandinsky, des Klee. Il y avait des œuvres d'Edali. J'en ai parlé tout à l'heure pour d'autres raisons. Des sculptures de Constantin de Brancusi. Des œuvres incroyables qu'elle avait, pour Brancusi, mis beaucoup de temps à acquérir. Parce que c'était un personnage aussi qui ne lâchait pas ses sculptures aussi facilement. Il a fallu faire un travail presque au corps de l'artiste pour obtenir ses œuvres.

  • Speaker #2

    Et finalement, le Louvre refuse ?

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #2

    Et ?

  • Speaker #1

    Ces œuvres vont passer dans la région de Vichy, c'est un comble de l'histoire, avant d'arriver à Annecy et d'être entreposées dans un entrepôt à la gare d'Annecy. Elle a des liens avec la Suisse puisque son ex-mari avec qui elle a eu deux enfants vit en Suisse. Et de là, elle va avoir un contact avec le directeur du musée de Grenoble parce que Nelly von Doisburg avait eu connu André Farsi. Et c'est justement en souhaitant mettre sa collection un petit peu en dépôt et dans une zone sécurisée. Sécurité. Le Grenoble n'étant pas occupé à ce moment-là, même si on est sous le gouvernement de Vichy, et que pour elle c'est compliqué parce qu'elle n'a pas de papier, elle est en situation on va dire irrégulière. Et donc elle va pouvoir venir à Grenoble et déposer sa collection dans l'ancien musée. Nous nous trouvons dans le nouveau qui est éduqué en 1994.

  • Speaker #2

    Dans une usine de peinture qui se trouve sur la place Verdun.

  • Speaker #1

    Exactement, la place Verdun. Je tiens à préciser quand même que malheureusement, ces œuvres n'ont pas pu être visibles pour le public. Puisqu'elles étaient, si vous voulez, déclarées pour la plupart. Vous savez, la politique nazie était de déclarer certains artistes interdits, dégénérés, c'était le terme approprié. Et toutes ces œuvres faisaient partie de ces artistes que les nazis... avaient complètement exclu de leur politique. Et donc du coup, André Farsi a gardé cela. Alors, ça n'a pas duré énormément de temps non plus. Ça a duré quelques mois. Parce qu'à partir de Grenoble, Peggy Gellem s'est rendue plusieurs fois à Marseille. Parce que Marseille, à ce moment-là, c'était la porte de sortie, si vous voulez, pour fuir l'Europe et rejoindre les États-Unis ou d'autres, Cuba ou par exemple. voilà Donc il y avait Ryan Fry qui était un journaliste américain qui avait mis en place un pont entre Marseille et les Etats-Unis pour aider notamment. des allemands qui étaient contre le pouvoir nazi, mais aussi des grandes personnalités de l'art, de l'art en général, à fuir la France. Et puis Guggenheim, d'ailleurs, a financé elle-même quelques départs, parce qu'il y avait quand même toujours cette part, il fallait partir sur un bateau. Et alors qu'elle est revenue sur Grenoble, elle a repris contact avec un de ses transporteurs qui avait l'habitude de transporter ses tableaux, qui lui avait conseillé de faire transiter ces œuvres par Marseille, mais d'indiquer dessus que c'était du mobilier tout simple, sur les cartons.

  • Speaker #2

    Pour qu'elles soient arrêtées par la douane.

  • Speaker #1

    Voilà, exactement. Et donc, en remerciement au fait que le musée, en tout cas que le directeur ait bien voulu conserver ces œuvres-là, ils ont eu une petite discussion sur un choix d'œuvres qu'elle voulait bien offrir au musée de Grenoble. Et le choix s'est porté sur cette œuvre de Yves Tanguy. qui s'intitule, j'ai oublié de le dire, « Les nids d'Anphoxus » . C'est un titre aussi très énigmatique. Il rejoint complètement cette pensée surréaliste. Yves Tanguy était habitué à proposer des titres, des fois tirés de la psychanalyse. Il était un peu provocateur dans sa vie. Et des titres qui parfois déstabilisèrent les nids d'Anphoxus, ce sont des petits verres de sable qu'on trouve au bord des plages et qui créent des petites concrétions. Ça a quand même un lien de loin avec ce paysage qui paraît un peu... Oui, tout à fait.

  • Speaker #2

    On pourrait s'imaginer qu'il s'agit de ça, oui.

  • Speaker #1

    Voilà. Et Peggy Guggenheim, pour aller encore plus loin, si vous voulez, c'est dans ce lien que je voulais faire avec les influenceuses et les influenceurs. Elle ne va pas s'arrêter quand elle va arriver aux Etats-Unis. En 1943, elle crée une exposition d'artistes femmes. C'est quand même aussi incroyable parce qu'aujourd'hui, on parle beaucoup de replacer la femme dans la création. et elle déjà avait conscience de ça. Elle n'était pas toute seule, elle s'est fait aider d'autres personnes, mais en tout cas, elle a porté ces messages-là.

  • Speaker #2

    Si l'influence de Peggy Guggenheim fait toujours son effet, venez admirer Nid d'Amphioxus de Yves Tanguy en salle 36 du musée de Grenoble. Le musée, entièrement gratuit, vous accueille toute l'année pour un voyage à travers les œuvres du XIIIe au XXe siècle, ainsi que de nombreuses expositions temporaires. Réalisation Célia Buny-Romand. Remerciements Ville de Grenoble, Relief, Isabelle Touchard. Musée de Grenoble, Claire Gabin, Marianne Télibert. N'hésitez pas à explorer les autres épisodes de cette série. À bientôt !

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Description

Au bord de l’Isère, le musée de Grenoble se dévoile dans un élégant bâtiment blanc et lumineux. Derrière ses lignes modernes, l’ancien et le nouveau se rassemblent avec plus de 900 œuvres qui racontent l’histoire de l’Antiquité à l’art contemporain.

Cette série de podcasts vous fait découvrir 5 œuvres majeures du musée. Mystérieuses, puissantes, surprenantes, elles ont chacune à leur manière traversé le temps pour faire écho à nos préoccupations contemporaines.

Eric Chaloupy, médiateur culturel en charge de l’accueil des publics, par le biais du tableau de Yves Tanguy « Nid d’Amphioxus » raconte deux personnes qui ont marqué l’histoire de l’art à Grenoble : Peggy Guggenheim et Andry Farcy.

Un podcasts réalisé par Célia Bugni-Romand


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Il y a vraiment eu les JO à Grenoble ?

  • Speaker #1

    On se donne rendez-vous à VH ou au PPN ?

  • Speaker #0

    Avant Grenoble,

  • Speaker #2

    ça s'appelait cul-à-roue.

  • Speaker #0

    Un arvalo, c'est un bébé phoque.

  • Speaker #1

    On peut voir le Mont-Blanc depuis la Bastille ?

  • Speaker #0

    On prend les bulles ou on monte à pied ?

  • Speaker #1

    Allez, je prends mon vélo et j'arrive.

  • Speaker #2

    Relief.

  • Speaker #0

    Relief.

  • Speaker #1

    Relief.

  • Speaker #2

    Le podcast du magazine Gremag. Au bord de l'Isère, le musée de Grenoble se dévoile dans un élégant bâtiment blanc et lumineux. Derrière ces lignes modernes, l'ancien et le nouveau se rassemblent avec plus de 900 œuvres qui racontent l'histoire de l'Antiquité à l'art contemporain. Dans cette série de podcasts, nous avons choisi de vous faire découvrir 5 œuvres majeures du musée. Mystérieuses, puissantes, surprenantes, elles ont chacune à leur manière traversé le temps pour faire écho. à nos préoccupations contemporaines.

  • Speaker #1

    Et c'est justement en souhaitant mettre sa collection un petit peu, comment dirais-je, en dépôt et dans une zone sécurisée, elle va pouvoir venir à Grenoble et déposer sa collection dans l'ancien musée.

  • Speaker #2

    Derrière certaines collections majeures se cachent des mécènes visionnaires, à l'image de Peggy Guggenheim, libre... audacieuse, ardente, elle assumait les mécénats et influences avant même que ces mots ne se croisent, révélant au grand public les artistes de l'avant-garde. C'est à elle que l'on doit la présence à Grenoble du tableau de Yves Tanguy, ni d'Amphioxus. Yves Tanguy, d'ailleurs, fut son amant. André Farsi fut son allié, et sur fond de Seconde Guerre mondiale, voici comment une histoire d'art et de passion a conduit cette œuvre jusqu'au musée de Grenoble.

  • Speaker #1

    Voulez-vous parler de... Plusieurs personnes. Des personnes qui ont marqué l'histoire de l'art et l'histoire du musée de Grenoble. Ce qui est assez étonnant, c'est que ce sont deux personnes qui n'ont pas de lien au départ. L'une est américaine, elle s'appelle Peggy Guggenheim, et l'autre est français, il s'appelle André Farsi, plus connu sous son pseudonyme d'artiste André Farsi. Et j'ajouterai un troisième personnage qui est Yves Tanguy.

  • Speaker #2

    Relief au musée de Grenoble, Éric Chaloupi, médiateur culturel en charge de l'accueil des publics.

  • Speaker #1

    Et ces trois personnages, en tout cas les deux premiers, ont une histoire commune avec la ville de Grenoble. Cette trilogie nous ramène un petit peu à l'histoire de l'art au XXe siècle et à celle du musée. Et que ce soit Peggy Guggenheim ou André Farsi, je les vois un petit peu comme des personnes, des influenceurs et des influenceuses. C'est pour ça que je voulais faire ce lien entre ces personnes, dans le cadre de ce podcast, entre ces personnes, ce qu'elles ont pu véhiculer dans la première moitié du XXe siècle. et comment aujourd'hui d'autres personnes peuvent aussi véhiculer des messages, en tout cas faire apparaître des éléments historiques. Le nom de Guggenheim est très connu. Il y a plusieurs fondations dans le monde entier, notamment une qui est à New York, qui donne sur Central Park, qui est une fondation qui a été créée, il y a une confusion parfois, par son oncle, Salomon Guggenheim. Peggy, elle, est née du frère de Salomon, qui est tragiquement décédé lors du naufrage du Titanic. Et c'est vrai qu'elle avait 14 ans à ce moment-là. Pour le commun des mortels, ça serait une situation terrible. Pour elle, ça l'a été forcément. Mais ce qu'il faut savoir, c'est que la famille Guggenheim est une famille immensément riche. Ses grands-parents, qu'ils soient du côté paternel ou du côté maternel, ont tous les deux immigré aux Etats-Unis au 19e siècle. et tous les deux ont fait fortune dans... un dans la banque et un dans les minerais. Et elle se retrouve, si vous voulez, à la croisée de deux chemins entre la famille Guggenheim et la famille Seligman. Et elle va en effet vivre une vie assez particulière. Il y a eu plusieurs ouvrages qui ont été écrits sur son existence, sur sa vie. Et surtout, elle a écrit elle-même ses mémoires, qui sont aussi un moment important pour sceller une part de vérité sur son existence et sur sa longue trajectoire qui va l'amener de New York. jusqu'à de nombreux pays tout au long de sa vie, mais surtout à Venise. Et donc l'autre figure, ou en tout cas l'autre grande personnalité que je voulais aborder, c'était celle d'André Farsi. Donc André Farsi a été directeur du musée de Grenoble entre 1919 et 1949. Donc c'est un long, long parcours à la tête du musée de Grenoble. C'est un personnage dont on a fait des rendus hommages au musée plusieurs fois. c'est un personnage qui a créé créer quand même, il faut le dire, le premier musée d'art moderne de France, non pas, enfin, dans le temps, puisque Quand il est arrivé en 1919, ce qu'il souhaitait c'était s'orienter vers la création contemporaine de son époque naturellement. Et c'est vrai que c'est quelqu'un qui a énormément œuvré pour faire entrer dans les collections du musée ce qui était considéré à l'époque comme de l'art contemporain. Aujourd'hui si je cite les noms ça va surprendre personne et en même temps tout le monde connaît le musée de Grenoble par rapport à ses noms. C'est Henri Matisse, ça va être Pablo Picasso, Claude Monet. donc Des artistes qui, déjà dans les années 1920, étaient pour Picasso déjà reconnus, mais pas dans les institutions françaises. Et c'est vrai que ce personnage, sur 30 années de direction au sein du musée, il a enrichi considérablement les collections. Et c'est quelqu'un qui était un peu par mons et par veau. C'est quand même quelqu'un qui a créé beaucoup d'expositions itinérantes. ou Paris ou d'autres lieux. Mais c'est vrai qu'aujourd'hui, quand on regarde la collection du XXe siècle historique du musée de Grenoble, on peut être admiratif du travail qu'il a pu mener et surtout de l'expression qu'on utilise assez familièrement qui est celle du nez creux. C'est-à-dire que c'est quelqu'un qui a quand même su acquérir des œuvres qui étaient parfois décriées à son époque, de son vivant, mais qui aujourd'hui font la totale notoriété du musée et de ses collections.

  • Speaker #2

    Et justement, la première question qui nous vient, c'est quel est le lien entre Peggy Guggenheim et André Farsi ?

  • Speaker #1

    Alors, l'histoire est un petit peu longue. Il faudrait revenir sur les différents moments de la vie de Peggy. Allons-y,

  • Speaker #2

    passe Peggy pour commencer.

  • Speaker #1

    C'est quelqu'un qui est venu d'une... qui est héritière d'une immense fortune. C'est quelqu'un qui a eu un parcours très, très riche tout au long de sa vie. Et en même temps, qui a eu une vie assez truculente. Il faut le dire quand même. C'est quelqu'un qui a eu des passions.

  • Speaker #2

    Beaucoup d'amis, beaucoup d'amants.

  • Speaker #1

    Beaucoup d'amis, beaucoup d'amants.

  • Speaker #2

    Quelques amantes.

  • Speaker #1

    Quelques amantes, exactement. Elle ne s'en cache pas. D'ailleurs, il y a une petite anecdote assez sympathique. C'est qu'en 1944, quand elle a publié ses mémoires, son oncle est tellement offusqué par ce qu'elle a écrit dans ses mémoires qu'il refuse tout lien avec sa nièce à ce moment-là. D'accord. Par la suite, on va voir que les choses vont se renouer entre les deux fondations. À partir des années 30, elle va vivre à Londres et elle va avoir comme projet de créer une galerie d'art. C'est assez récent dans son parcours, c'est vraiment marqué par les années 30, parce qu'avant elle fréquentait déjà des artistes sans avoir cette velléité de créer une galerie. Mais le premier artiste qu'elle va solliciter pour créer cette galerie, c'est Yves Tanguy. Et c'est vrai que c'est intéressant puisque nous sommes devant un tableau de ce même artiste qui a aussi un lien très important avec Peggy Gennheim et le musée. Et donc, au tout début de l'année 1938, elle va ouvrir cette galerie et qui aura un certain succès. Mais ce succès, si vous voulez, comme c'est une galerie d'avant-garde où elle présente beaucoup de mouvements qui sont découverts par le grand public, il y a forcément des forces un peu opposées à cette forme d'art. c'est à dire qu'elle joue quand même à ce moment-là un rôle, je dirais, d'influenceuse et elle est armée pour ça, pour présenter des artistes qui sont méconnus. Yves Tanguy et d'autres surréalistes, elle jouera un rôle important dans la période de la Seconde Guerre mondiale aux Etats-Unis. C'est vrai que les Américains, par exemple, connaissent un seul artiste, c'est Salvador Dali. Dans le surréalisme. Et de faire connaître les autres, c'est quand même quelque chose d'important. Ce qui explique qu'aujourd'hui, Yves Tanguy est peut-être un peu plus connu aux Etats-Unis qu'en France.

  • Speaker #2

    Alors qu'il est français.

  • Speaker #1

    Alors qu'il est français,

  • Speaker #2

    il a des origines bretonnes.

  • Speaker #1

    D'ailleurs, je ne dis pas que ça se voit immédiatement dans le tableau qu'on a sous les yeux et qui nous concerne, puisque c'est un tableau vraiment dans la fibre surréaliste. C'est un paysage très étrange dans lequel on voit apparaître des formes qui évoquent beaucoup de choses et en même temps des formes embryonnaires. On est vraiment en interrogation, il y a une forme de biomorphisme dans ces formes et c'est quelque chose d'assez troublant. C'est quelqu'un qui travaillait de manière, il le dit lui-même, parfois compulsive, une sorte de fièvre créatrice, ou parfois prenait du temps. Mais en tout cas, ce n'était pas quelqu'un qui était attaché à un travail régulier, pas quelqu'un qui se mettait à son bureau, vous voyez, c'était quelqu'un d'un peu extrême aussi dans sa façon d'être et de vivre. Il y a une phrase de Breton que je trouve qui est assez belle. Les peintures de Tanguy ne sont pas des paysages où l'on pourrait distinguer la terre, la mer et le ciel, car il peint ce qui existe. avant la séance. « La préparation des éléments » . C'est une phrase très poétique et qui ne nous donne pas de clé de lecture, mais qui décrit, je trouve, assez bien l'atmosphère que l'on a dans ce tableau.

  • Speaker #2

    Oui, tout à fait. Je suis assez d'accord avec ça.

  • Speaker #1

    Et alors, pourquoi ce tableau se retrouve dans nos collections ? Parce que justement, Peggy Guggenheim, à partir de son expérience de la galerie à Londres, elle a souhaité fermer sa galerie en 1939 et voulu partir sur un autre projet qui était de créer un musée. Elle va se rendre à Paris. Du coup, son projet de musée va naturellement tomber à l'eau à cause de l'invasion, bien sûr. Et elle est juive.

  • Speaker #2

    Et elle est juive.

  • Speaker #1

    Et elle vit en France, alors de manière très libre. Elle a des attaches en France. Elle avait acheté une maison à un moment donné dans le sud de la France. Elle a beaucoup vécu à Paris. Donc, elle parle le français, enfin l'écrit, puisqu'on a une lettre d'elle dans nos collections. Voilà. Et c'est vrai que ce qui va se passer, c'est qu'elle va venir en 1939 en France et elle va sillonner la France accompagnée d'une femme d'artiste qui s'appelle Nelly von de Heysburg. Et elle va constituer une collection dans le but, justement, de créer son musée. Le grand mythe, c'était qu'elle se disait « je me lève tous les jours et tous les jours je vais acheter une œuvre d'art » . C'est beau comme projet quand même. C'est ambitieux. Oui, c'est ambitieux. Elle en avait les moyens. Et c'est vrai que grâce à son réseau, elle a pu acheter un nombre d'œuvres assez important, mais avec des œuvres de Francis Picabia ou d'Alberto Giacometti, par exemple. C'est quand même de Max Ernst aussi, qui est un artiste surréaliste également. Et elle va constituer cette collection. Mais ce qui va se passer, si vous voulez, c'est que la guerre en 1940, naturellement, se précise notamment pour la France. Et donc, Fernand Léger, qui est un artiste aussi du XXe siècle, qui est très connu, lui suggère donc de mettre sa collection en sécurité et de proposer, par exemple, au Louvre, d'abriter sa collection.

  • Speaker #2

    D'accord.

  • Speaker #1

    Parce que le Louvre, pour des questions administratives, mais aussi... d'œuvres trop modernes va décliner. C'est assez intéressant parce que dans les années 70, le Louvre va organiser une exposition de la collection de Piguenay. Donc il y a un retour sur l'histoire assez intéressant.

  • Speaker #2

    Mais à l'époque, c'était trop moderne.

  • Speaker #1

    Oui, on peut se dire ça. Donc si vous voulez, c'est vrai qu'il y avait des Kandinsky, des Klee. Il y avait des œuvres d'Edali. J'en ai parlé tout à l'heure pour d'autres raisons. Des sculptures de Constantin de Brancusi. Des œuvres incroyables qu'elle avait, pour Brancusi, mis beaucoup de temps à acquérir. Parce que c'était un personnage aussi qui ne lâchait pas ses sculptures aussi facilement. Il a fallu faire un travail presque au corps de l'artiste pour obtenir ses œuvres.

  • Speaker #2

    Et finalement, le Louvre refuse ?

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #2

    Et ?

  • Speaker #1

    Ces œuvres vont passer dans la région de Vichy, c'est un comble de l'histoire, avant d'arriver à Annecy et d'être entreposées dans un entrepôt à la gare d'Annecy. Elle a des liens avec la Suisse puisque son ex-mari avec qui elle a eu deux enfants vit en Suisse. Et de là, elle va avoir un contact avec le directeur du musée de Grenoble parce que Nelly von Doisburg avait eu connu André Farsi. Et c'est justement en souhaitant mettre sa collection un petit peu en dépôt et dans une zone sécurisée. Sécurité. Le Grenoble n'étant pas occupé à ce moment-là, même si on est sous le gouvernement de Vichy, et que pour elle c'est compliqué parce qu'elle n'a pas de papier, elle est en situation on va dire irrégulière. Et donc elle va pouvoir venir à Grenoble et déposer sa collection dans l'ancien musée. Nous nous trouvons dans le nouveau qui est éduqué en 1994.

  • Speaker #2

    Dans une usine de peinture qui se trouve sur la place Verdun.

  • Speaker #1

    Exactement, la place Verdun. Je tiens à préciser quand même que malheureusement, ces œuvres n'ont pas pu être visibles pour le public. Puisqu'elles étaient, si vous voulez, déclarées pour la plupart. Vous savez, la politique nazie était de déclarer certains artistes interdits, dégénérés, c'était le terme approprié. Et toutes ces œuvres faisaient partie de ces artistes que les nazis... avaient complètement exclu de leur politique. Et donc du coup, André Farsi a gardé cela. Alors, ça n'a pas duré énormément de temps non plus. Ça a duré quelques mois. Parce qu'à partir de Grenoble, Peggy Gellem s'est rendue plusieurs fois à Marseille. Parce que Marseille, à ce moment-là, c'était la porte de sortie, si vous voulez, pour fuir l'Europe et rejoindre les États-Unis ou d'autres, Cuba ou par exemple. voilà Donc il y avait Ryan Fry qui était un journaliste américain qui avait mis en place un pont entre Marseille et les Etats-Unis pour aider notamment. des allemands qui étaient contre le pouvoir nazi, mais aussi des grandes personnalités de l'art, de l'art en général, à fuir la France. Et puis Guggenheim, d'ailleurs, a financé elle-même quelques départs, parce qu'il y avait quand même toujours cette part, il fallait partir sur un bateau. Et alors qu'elle est revenue sur Grenoble, elle a repris contact avec un de ses transporteurs qui avait l'habitude de transporter ses tableaux, qui lui avait conseillé de faire transiter ces œuvres par Marseille, mais d'indiquer dessus que c'était du mobilier tout simple, sur les cartons.

  • Speaker #2

    Pour qu'elles soient arrêtées par la douane.

  • Speaker #1

    Voilà, exactement. Et donc, en remerciement au fait que le musée, en tout cas que le directeur ait bien voulu conserver ces œuvres-là, ils ont eu une petite discussion sur un choix d'œuvres qu'elle voulait bien offrir au musée de Grenoble. Et le choix s'est porté sur cette œuvre de Yves Tanguy. qui s'intitule, j'ai oublié de le dire, « Les nids d'Anphoxus » . C'est un titre aussi très énigmatique. Il rejoint complètement cette pensée surréaliste. Yves Tanguy était habitué à proposer des titres, des fois tirés de la psychanalyse. Il était un peu provocateur dans sa vie. Et des titres qui parfois déstabilisèrent les nids d'Anphoxus, ce sont des petits verres de sable qu'on trouve au bord des plages et qui créent des petites concrétions. Ça a quand même un lien de loin avec ce paysage qui paraît un peu... Oui, tout à fait.

  • Speaker #2

    On pourrait s'imaginer qu'il s'agit de ça, oui.

  • Speaker #1

    Voilà. Et Peggy Guggenheim, pour aller encore plus loin, si vous voulez, c'est dans ce lien que je voulais faire avec les influenceuses et les influenceurs. Elle ne va pas s'arrêter quand elle va arriver aux Etats-Unis. En 1943, elle crée une exposition d'artistes femmes. C'est quand même aussi incroyable parce qu'aujourd'hui, on parle beaucoup de replacer la femme dans la création. et elle déjà avait conscience de ça. Elle n'était pas toute seule, elle s'est fait aider d'autres personnes, mais en tout cas, elle a porté ces messages-là.

  • Speaker #2

    Si l'influence de Peggy Guggenheim fait toujours son effet, venez admirer Nid d'Amphioxus de Yves Tanguy en salle 36 du musée de Grenoble. Le musée, entièrement gratuit, vous accueille toute l'année pour un voyage à travers les œuvres du XIIIe au XXe siècle, ainsi que de nombreuses expositions temporaires. Réalisation Célia Buny-Romand. Remerciements Ville de Grenoble, Relief, Isabelle Touchard. Musée de Grenoble, Claire Gabin, Marianne Télibert. N'hésitez pas à explorer les autres épisodes de cette série. À bientôt !

Description

Au bord de l’Isère, le musée de Grenoble se dévoile dans un élégant bâtiment blanc et lumineux. Derrière ses lignes modernes, l’ancien et le nouveau se rassemblent avec plus de 900 œuvres qui racontent l’histoire de l’Antiquité à l’art contemporain.

Cette série de podcasts vous fait découvrir 5 œuvres majeures du musée. Mystérieuses, puissantes, surprenantes, elles ont chacune à leur manière traversé le temps pour faire écho à nos préoccupations contemporaines.

Eric Chaloupy, médiateur culturel en charge de l’accueil des publics, par le biais du tableau de Yves Tanguy « Nid d’Amphioxus » raconte deux personnes qui ont marqué l’histoire de l’art à Grenoble : Peggy Guggenheim et Andry Farcy.

Un podcasts réalisé par Célia Bugni-Romand


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Il y a vraiment eu les JO à Grenoble ?

  • Speaker #1

    On se donne rendez-vous à VH ou au PPN ?

  • Speaker #0

    Avant Grenoble,

  • Speaker #2

    ça s'appelait cul-à-roue.

  • Speaker #0

    Un arvalo, c'est un bébé phoque.

  • Speaker #1

    On peut voir le Mont-Blanc depuis la Bastille ?

  • Speaker #0

    On prend les bulles ou on monte à pied ?

  • Speaker #1

    Allez, je prends mon vélo et j'arrive.

  • Speaker #2

    Relief.

  • Speaker #0

    Relief.

  • Speaker #1

    Relief.

  • Speaker #2

    Le podcast du magazine Gremag. Au bord de l'Isère, le musée de Grenoble se dévoile dans un élégant bâtiment blanc et lumineux. Derrière ces lignes modernes, l'ancien et le nouveau se rassemblent avec plus de 900 œuvres qui racontent l'histoire de l'Antiquité à l'art contemporain. Dans cette série de podcasts, nous avons choisi de vous faire découvrir 5 œuvres majeures du musée. Mystérieuses, puissantes, surprenantes, elles ont chacune à leur manière traversé le temps pour faire écho. à nos préoccupations contemporaines.

  • Speaker #1

    Et c'est justement en souhaitant mettre sa collection un petit peu, comment dirais-je, en dépôt et dans une zone sécurisée, elle va pouvoir venir à Grenoble et déposer sa collection dans l'ancien musée.

  • Speaker #2

    Derrière certaines collections majeures se cachent des mécènes visionnaires, à l'image de Peggy Guggenheim, libre... audacieuse, ardente, elle assumait les mécénats et influences avant même que ces mots ne se croisent, révélant au grand public les artistes de l'avant-garde. C'est à elle que l'on doit la présence à Grenoble du tableau de Yves Tanguy, ni d'Amphioxus. Yves Tanguy, d'ailleurs, fut son amant. André Farsi fut son allié, et sur fond de Seconde Guerre mondiale, voici comment une histoire d'art et de passion a conduit cette œuvre jusqu'au musée de Grenoble.

  • Speaker #1

    Voulez-vous parler de... Plusieurs personnes. Des personnes qui ont marqué l'histoire de l'art et l'histoire du musée de Grenoble. Ce qui est assez étonnant, c'est que ce sont deux personnes qui n'ont pas de lien au départ. L'une est américaine, elle s'appelle Peggy Guggenheim, et l'autre est français, il s'appelle André Farsi, plus connu sous son pseudonyme d'artiste André Farsi. Et j'ajouterai un troisième personnage qui est Yves Tanguy.

  • Speaker #2

    Relief au musée de Grenoble, Éric Chaloupi, médiateur culturel en charge de l'accueil des publics.

  • Speaker #1

    Et ces trois personnages, en tout cas les deux premiers, ont une histoire commune avec la ville de Grenoble. Cette trilogie nous ramène un petit peu à l'histoire de l'art au XXe siècle et à celle du musée. Et que ce soit Peggy Guggenheim ou André Farsi, je les vois un petit peu comme des personnes, des influenceurs et des influenceuses. C'est pour ça que je voulais faire ce lien entre ces personnes, dans le cadre de ce podcast, entre ces personnes, ce qu'elles ont pu véhiculer dans la première moitié du XXe siècle. et comment aujourd'hui d'autres personnes peuvent aussi véhiculer des messages, en tout cas faire apparaître des éléments historiques. Le nom de Guggenheim est très connu. Il y a plusieurs fondations dans le monde entier, notamment une qui est à New York, qui donne sur Central Park, qui est une fondation qui a été créée, il y a une confusion parfois, par son oncle, Salomon Guggenheim. Peggy, elle, est née du frère de Salomon, qui est tragiquement décédé lors du naufrage du Titanic. Et c'est vrai qu'elle avait 14 ans à ce moment-là. Pour le commun des mortels, ça serait une situation terrible. Pour elle, ça l'a été forcément. Mais ce qu'il faut savoir, c'est que la famille Guggenheim est une famille immensément riche. Ses grands-parents, qu'ils soient du côté paternel ou du côté maternel, ont tous les deux immigré aux Etats-Unis au 19e siècle. et tous les deux ont fait fortune dans... un dans la banque et un dans les minerais. Et elle se retrouve, si vous voulez, à la croisée de deux chemins entre la famille Guggenheim et la famille Seligman. Et elle va en effet vivre une vie assez particulière. Il y a eu plusieurs ouvrages qui ont été écrits sur son existence, sur sa vie. Et surtout, elle a écrit elle-même ses mémoires, qui sont aussi un moment important pour sceller une part de vérité sur son existence et sur sa longue trajectoire qui va l'amener de New York. jusqu'à de nombreux pays tout au long de sa vie, mais surtout à Venise. Et donc l'autre figure, ou en tout cas l'autre grande personnalité que je voulais aborder, c'était celle d'André Farsi. Donc André Farsi a été directeur du musée de Grenoble entre 1919 et 1949. Donc c'est un long, long parcours à la tête du musée de Grenoble. C'est un personnage dont on a fait des rendus hommages au musée plusieurs fois. c'est un personnage qui a créé créer quand même, il faut le dire, le premier musée d'art moderne de France, non pas, enfin, dans le temps, puisque Quand il est arrivé en 1919, ce qu'il souhaitait c'était s'orienter vers la création contemporaine de son époque naturellement. Et c'est vrai que c'est quelqu'un qui a énormément œuvré pour faire entrer dans les collections du musée ce qui était considéré à l'époque comme de l'art contemporain. Aujourd'hui si je cite les noms ça va surprendre personne et en même temps tout le monde connaît le musée de Grenoble par rapport à ses noms. C'est Henri Matisse, ça va être Pablo Picasso, Claude Monet. donc Des artistes qui, déjà dans les années 1920, étaient pour Picasso déjà reconnus, mais pas dans les institutions françaises. Et c'est vrai que ce personnage, sur 30 années de direction au sein du musée, il a enrichi considérablement les collections. Et c'est quelqu'un qui était un peu par mons et par veau. C'est quand même quelqu'un qui a créé beaucoup d'expositions itinérantes. ou Paris ou d'autres lieux. Mais c'est vrai qu'aujourd'hui, quand on regarde la collection du XXe siècle historique du musée de Grenoble, on peut être admiratif du travail qu'il a pu mener et surtout de l'expression qu'on utilise assez familièrement qui est celle du nez creux. C'est-à-dire que c'est quelqu'un qui a quand même su acquérir des œuvres qui étaient parfois décriées à son époque, de son vivant, mais qui aujourd'hui font la totale notoriété du musée et de ses collections.

  • Speaker #2

    Et justement, la première question qui nous vient, c'est quel est le lien entre Peggy Guggenheim et André Farsi ?

  • Speaker #1

    Alors, l'histoire est un petit peu longue. Il faudrait revenir sur les différents moments de la vie de Peggy. Allons-y,

  • Speaker #2

    passe Peggy pour commencer.

  • Speaker #1

    C'est quelqu'un qui est venu d'une... qui est héritière d'une immense fortune. C'est quelqu'un qui a eu un parcours très, très riche tout au long de sa vie. Et en même temps, qui a eu une vie assez truculente. Il faut le dire quand même. C'est quelqu'un qui a eu des passions.

  • Speaker #2

    Beaucoup d'amis, beaucoup d'amants.

  • Speaker #1

    Beaucoup d'amis, beaucoup d'amants.

  • Speaker #2

    Quelques amantes.

  • Speaker #1

    Quelques amantes, exactement. Elle ne s'en cache pas. D'ailleurs, il y a une petite anecdote assez sympathique. C'est qu'en 1944, quand elle a publié ses mémoires, son oncle est tellement offusqué par ce qu'elle a écrit dans ses mémoires qu'il refuse tout lien avec sa nièce à ce moment-là. D'accord. Par la suite, on va voir que les choses vont se renouer entre les deux fondations. À partir des années 30, elle va vivre à Londres et elle va avoir comme projet de créer une galerie d'art. C'est assez récent dans son parcours, c'est vraiment marqué par les années 30, parce qu'avant elle fréquentait déjà des artistes sans avoir cette velléité de créer une galerie. Mais le premier artiste qu'elle va solliciter pour créer cette galerie, c'est Yves Tanguy. Et c'est vrai que c'est intéressant puisque nous sommes devant un tableau de ce même artiste qui a aussi un lien très important avec Peggy Gennheim et le musée. Et donc, au tout début de l'année 1938, elle va ouvrir cette galerie et qui aura un certain succès. Mais ce succès, si vous voulez, comme c'est une galerie d'avant-garde où elle présente beaucoup de mouvements qui sont découverts par le grand public, il y a forcément des forces un peu opposées à cette forme d'art. c'est à dire qu'elle joue quand même à ce moment-là un rôle, je dirais, d'influenceuse et elle est armée pour ça, pour présenter des artistes qui sont méconnus. Yves Tanguy et d'autres surréalistes, elle jouera un rôle important dans la période de la Seconde Guerre mondiale aux Etats-Unis. C'est vrai que les Américains, par exemple, connaissent un seul artiste, c'est Salvador Dali. Dans le surréalisme. Et de faire connaître les autres, c'est quand même quelque chose d'important. Ce qui explique qu'aujourd'hui, Yves Tanguy est peut-être un peu plus connu aux Etats-Unis qu'en France.

  • Speaker #2

    Alors qu'il est français.

  • Speaker #1

    Alors qu'il est français,

  • Speaker #2

    il a des origines bretonnes.

  • Speaker #1

    D'ailleurs, je ne dis pas que ça se voit immédiatement dans le tableau qu'on a sous les yeux et qui nous concerne, puisque c'est un tableau vraiment dans la fibre surréaliste. C'est un paysage très étrange dans lequel on voit apparaître des formes qui évoquent beaucoup de choses et en même temps des formes embryonnaires. On est vraiment en interrogation, il y a une forme de biomorphisme dans ces formes et c'est quelque chose d'assez troublant. C'est quelqu'un qui travaillait de manière, il le dit lui-même, parfois compulsive, une sorte de fièvre créatrice, ou parfois prenait du temps. Mais en tout cas, ce n'était pas quelqu'un qui était attaché à un travail régulier, pas quelqu'un qui se mettait à son bureau, vous voyez, c'était quelqu'un d'un peu extrême aussi dans sa façon d'être et de vivre. Il y a une phrase de Breton que je trouve qui est assez belle. Les peintures de Tanguy ne sont pas des paysages où l'on pourrait distinguer la terre, la mer et le ciel, car il peint ce qui existe. avant la séance. « La préparation des éléments » . C'est une phrase très poétique et qui ne nous donne pas de clé de lecture, mais qui décrit, je trouve, assez bien l'atmosphère que l'on a dans ce tableau.

  • Speaker #2

    Oui, tout à fait. Je suis assez d'accord avec ça.

  • Speaker #1

    Et alors, pourquoi ce tableau se retrouve dans nos collections ? Parce que justement, Peggy Guggenheim, à partir de son expérience de la galerie à Londres, elle a souhaité fermer sa galerie en 1939 et voulu partir sur un autre projet qui était de créer un musée. Elle va se rendre à Paris. Du coup, son projet de musée va naturellement tomber à l'eau à cause de l'invasion, bien sûr. Et elle est juive.

  • Speaker #2

    Et elle est juive.

  • Speaker #1

    Et elle vit en France, alors de manière très libre. Elle a des attaches en France. Elle avait acheté une maison à un moment donné dans le sud de la France. Elle a beaucoup vécu à Paris. Donc, elle parle le français, enfin l'écrit, puisqu'on a une lettre d'elle dans nos collections. Voilà. Et c'est vrai que ce qui va se passer, c'est qu'elle va venir en 1939 en France et elle va sillonner la France accompagnée d'une femme d'artiste qui s'appelle Nelly von de Heysburg. Et elle va constituer une collection dans le but, justement, de créer son musée. Le grand mythe, c'était qu'elle se disait « je me lève tous les jours et tous les jours je vais acheter une œuvre d'art » . C'est beau comme projet quand même. C'est ambitieux. Oui, c'est ambitieux. Elle en avait les moyens. Et c'est vrai que grâce à son réseau, elle a pu acheter un nombre d'œuvres assez important, mais avec des œuvres de Francis Picabia ou d'Alberto Giacometti, par exemple. C'est quand même de Max Ernst aussi, qui est un artiste surréaliste également. Et elle va constituer cette collection. Mais ce qui va se passer, si vous voulez, c'est que la guerre en 1940, naturellement, se précise notamment pour la France. Et donc, Fernand Léger, qui est un artiste aussi du XXe siècle, qui est très connu, lui suggère donc de mettre sa collection en sécurité et de proposer, par exemple, au Louvre, d'abriter sa collection.

  • Speaker #2

    D'accord.

  • Speaker #1

    Parce que le Louvre, pour des questions administratives, mais aussi... d'œuvres trop modernes va décliner. C'est assez intéressant parce que dans les années 70, le Louvre va organiser une exposition de la collection de Piguenay. Donc il y a un retour sur l'histoire assez intéressant.

  • Speaker #2

    Mais à l'époque, c'était trop moderne.

  • Speaker #1

    Oui, on peut se dire ça. Donc si vous voulez, c'est vrai qu'il y avait des Kandinsky, des Klee. Il y avait des œuvres d'Edali. J'en ai parlé tout à l'heure pour d'autres raisons. Des sculptures de Constantin de Brancusi. Des œuvres incroyables qu'elle avait, pour Brancusi, mis beaucoup de temps à acquérir. Parce que c'était un personnage aussi qui ne lâchait pas ses sculptures aussi facilement. Il a fallu faire un travail presque au corps de l'artiste pour obtenir ses œuvres.

  • Speaker #2

    Et finalement, le Louvre refuse ?

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #2

    Et ?

  • Speaker #1

    Ces œuvres vont passer dans la région de Vichy, c'est un comble de l'histoire, avant d'arriver à Annecy et d'être entreposées dans un entrepôt à la gare d'Annecy. Elle a des liens avec la Suisse puisque son ex-mari avec qui elle a eu deux enfants vit en Suisse. Et de là, elle va avoir un contact avec le directeur du musée de Grenoble parce que Nelly von Doisburg avait eu connu André Farsi. Et c'est justement en souhaitant mettre sa collection un petit peu en dépôt et dans une zone sécurisée. Sécurité. Le Grenoble n'étant pas occupé à ce moment-là, même si on est sous le gouvernement de Vichy, et que pour elle c'est compliqué parce qu'elle n'a pas de papier, elle est en situation on va dire irrégulière. Et donc elle va pouvoir venir à Grenoble et déposer sa collection dans l'ancien musée. Nous nous trouvons dans le nouveau qui est éduqué en 1994.

  • Speaker #2

    Dans une usine de peinture qui se trouve sur la place Verdun.

  • Speaker #1

    Exactement, la place Verdun. Je tiens à préciser quand même que malheureusement, ces œuvres n'ont pas pu être visibles pour le public. Puisqu'elles étaient, si vous voulez, déclarées pour la plupart. Vous savez, la politique nazie était de déclarer certains artistes interdits, dégénérés, c'était le terme approprié. Et toutes ces œuvres faisaient partie de ces artistes que les nazis... avaient complètement exclu de leur politique. Et donc du coup, André Farsi a gardé cela. Alors, ça n'a pas duré énormément de temps non plus. Ça a duré quelques mois. Parce qu'à partir de Grenoble, Peggy Gellem s'est rendue plusieurs fois à Marseille. Parce que Marseille, à ce moment-là, c'était la porte de sortie, si vous voulez, pour fuir l'Europe et rejoindre les États-Unis ou d'autres, Cuba ou par exemple. voilà Donc il y avait Ryan Fry qui était un journaliste américain qui avait mis en place un pont entre Marseille et les Etats-Unis pour aider notamment. des allemands qui étaient contre le pouvoir nazi, mais aussi des grandes personnalités de l'art, de l'art en général, à fuir la France. Et puis Guggenheim, d'ailleurs, a financé elle-même quelques départs, parce qu'il y avait quand même toujours cette part, il fallait partir sur un bateau. Et alors qu'elle est revenue sur Grenoble, elle a repris contact avec un de ses transporteurs qui avait l'habitude de transporter ses tableaux, qui lui avait conseillé de faire transiter ces œuvres par Marseille, mais d'indiquer dessus que c'était du mobilier tout simple, sur les cartons.

  • Speaker #2

    Pour qu'elles soient arrêtées par la douane.

  • Speaker #1

    Voilà, exactement. Et donc, en remerciement au fait que le musée, en tout cas que le directeur ait bien voulu conserver ces œuvres-là, ils ont eu une petite discussion sur un choix d'œuvres qu'elle voulait bien offrir au musée de Grenoble. Et le choix s'est porté sur cette œuvre de Yves Tanguy. qui s'intitule, j'ai oublié de le dire, « Les nids d'Anphoxus » . C'est un titre aussi très énigmatique. Il rejoint complètement cette pensée surréaliste. Yves Tanguy était habitué à proposer des titres, des fois tirés de la psychanalyse. Il était un peu provocateur dans sa vie. Et des titres qui parfois déstabilisèrent les nids d'Anphoxus, ce sont des petits verres de sable qu'on trouve au bord des plages et qui créent des petites concrétions. Ça a quand même un lien de loin avec ce paysage qui paraît un peu... Oui, tout à fait.

  • Speaker #2

    On pourrait s'imaginer qu'il s'agit de ça, oui.

  • Speaker #1

    Voilà. Et Peggy Guggenheim, pour aller encore plus loin, si vous voulez, c'est dans ce lien que je voulais faire avec les influenceuses et les influenceurs. Elle ne va pas s'arrêter quand elle va arriver aux Etats-Unis. En 1943, elle crée une exposition d'artistes femmes. C'est quand même aussi incroyable parce qu'aujourd'hui, on parle beaucoup de replacer la femme dans la création. et elle déjà avait conscience de ça. Elle n'était pas toute seule, elle s'est fait aider d'autres personnes, mais en tout cas, elle a porté ces messages-là.

  • Speaker #2

    Si l'influence de Peggy Guggenheim fait toujours son effet, venez admirer Nid d'Amphioxus de Yves Tanguy en salle 36 du musée de Grenoble. Le musée, entièrement gratuit, vous accueille toute l'année pour un voyage à travers les œuvres du XIIIe au XXe siècle, ainsi que de nombreuses expositions temporaires. Réalisation Célia Buny-Romand. Remerciements Ville de Grenoble, Relief, Isabelle Touchard. Musée de Grenoble, Claire Gabin, Marianne Télibert. N'hésitez pas à explorer les autres épisodes de cette série. À bientôt !

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