- Speaker #0
Parlez-moi d'ailleurs, un podcast Voyage Galima. Bienvenue. Aujourd'hui, laissez-vous raconter l'Écosse par celles et ceux qui la vivent. L'Écosse, c'est bien plus qu'une région du Royaume-Uni, c'est une nation à... part entière, avec ses codes, sa culture, sa langue et même son humour, qui parvient à être encore un peu plus décalé que sa voisine l'Angleterre. Alors bien sûr, vous croiserez des moutons, des distilleries, des champs de bruyères et même des plages turquoises. Mais rien ne peut vraiment vous préparer à la beauté des paysages, les loques et les îles et surtout la gentillesse de ses habitants. C'est ce qui pousse Jean-Philippe, co-auteur du guide coup de cœur aux éditions Voyages Galimard, à y retourner chaque année et il nous racontera sa passion pour l'Ecosse. En seconde partie, c'est Sarah Lachap qui nous guide dans les subtilités de la gastronomie écossaise. Elle vit à Edimbourg où elle a monté sa société de guides francophones OuiEcosse. Enfin, cet épisode se terminera par la lecture d'un extrait du roman d'Alice Zenithère intitulé Juste avant l'oubli. Avec ses 900 îles et ses 30 000 lacs, l'Écosse vous invite à jouer à saut de mouton. Des moutons d'ailleurs, il y en a plus que d'Écossais. Ce voyage sera placé sous le signe des grands espaces et du grand air. Jean-Philippe est auteur pour Voyages Gallimard. Il est surtout un passionné d'Écosse qui, au fil de ses séjours, s'est immergé dans les us et coutumes locales. Alors ma première question, j'aimerais commencer par ta propre expérience pour savoir quand tu te rends en Écosse, quel mode de transport tu choisis déjà ?
- Speaker #1
Une petite confidence pour commencer, je ne conduis pas. Je me déplace donc en transport en commun et en Écosse ce n'est pas si compliqué en fait. Je dirais même que c'est un vrai plaisir. Cela évite les tourments de la conduite à gauche, du volant à droite, des routes à voie étroite. Alors bien sûr, voyager en transport en commun, que ce soit en ferry, en bus, ça demande un minimum d'organisation en amont. D'abord parce que les petites compagnies de bus ne circulent pas le dimanche et aussi parce que dans certaines régions, reculée, il n'est pas possible de faire l'aller-retour en bus dans la journée. En revanche, sur les grands axes, on circule très facilement avec la CityLink. La CityLink, c'est la principale compagnie de bus avec laquelle on peut rallier l'île de Skye au Inverness depuis Glasgow au moins trois fois par jour, peut-être même quatre en été. Mais surtout, ce que je conseille vivement, pour un premier voyage en tout cas, c'est de prendre le train. Au départ de Glasgow, ou d'Édimbourg. Parce que les chemins de fer écossaire ont le don de vous propulser très vite en pleine nature. Si vous montez à bord de la West High Line, par exemple, qui relie Glasgow à Fort William et continue ensuite vers Malick, vous passerez 4-5 heures bien calés près de la fenêtre, à jouer à cache-cache avec la mer, les montagnes, les torrents, les cascades. Il y a même un tronçon sur cette ligne. qui traverse le plus grand désert de Grande-Bretagne. Ça s'appelle le Rannich Moor. C'est un paysage assez hallucinant de landes et de tourbières, criblés de lacs et de marais. On a vraiment l'impression que les rails flottent au milieu de nulle part. Ah oui, il y a peut-être un petit détail à signaler. C'est que sur les lignes écossaises, certains arrêts sont à la demande, on request. Sur la ligne Wick-Invenace, par exemple, la garde de Don Roving qui est peut-être plus un chalet qu'une vraie gare, à vrai dire. C'est un arrêt facultatif. Ce qui veut dire que quand vous êtes sur le quai, il faut faire un signe au conducteur du train. Il s'arrête et il vous emmène ensuite tout droit jusqu'à Inverness.
- Speaker #2
C'est aussi simple que ça. qui est à peu près à quelques milles à l'ouest de ici, et ils ont perdu de l'argent Et cela a déçu le 3e duc de Sutherland.
- Speaker #0
Petit aparté pour les non-anglophones, vous entendez là l'histoire de la ligne de train qui arrive d'Inverness. Mais par manque de moyens, sa construction s'est arrêtée. Ce qui a déçu le 3e duc de Sutherland, qui a décidé d'investir 8 millions de livres de sa poche pour achever la ligne. Mais il avait une bonne raison. Cela lui permettait de connecter au rail sa mine de charbon située tout au nord de l'Écosse.
- Speaker #2
Donc il a décidé...
- Speaker #0
Qu'est-ce que tu nous conseilles ?
- Speaker #1
Oui, il est plus facile de se loger à moindre prix à Glasgow qu'à Edinburgh. Dans la capitale écossaise, les tarifs pratiqués par les hôtels sont élevés. Dans les Highlands, je conseille de privilégier les bed and breakfast. Il faut garder aussi à l'esprit que de plus en plus de bed and breakfast dans les Highlands exigent depuis peu un séjour minimum de deux nuits, voire de trois nuits. Ce n'est pas forcément... une mauvaise chose. Cela vous oblige à vous poser un peu, à rayonner dans la région ou à explorer à pied les environs. Il y a souvent, d'ailleurs, posé sur la table du Bed and Breakfast une brochure avec les sentiers de randonnée qui sont décrits et vous pouvez en discuter avec votre hôte. Il les connaît bien, souvent même très, très bien. Et c'est ça aussi l'avantage de dormir dans un Bed and Breakfast. C'est l'occasion idéale d'échanger avec l'habitant, de mieux connaître la région. de tester même les produits locaux. On vous préparera le fameux, généreux Full Scottish Breakfast. Et alors,
- Speaker #0
si justement, là on parle de s'installer un peu dans un lieu pour pouvoir vivre à l'écossaise, si tu devais définir ce mode de vie à l'écossaise, quel terme choisirais-tu ?
- Speaker #1
Chaleureux. C'est vraiment le premier mot qui me vient à l'esprit. Les écossais sont très accueillants et ce dont on se rend vite compte, c'est qu'ils ont le sens de l'autre.
- Speaker #0
Un sens de l'autre qui pousse même les Anglais à écrire des sketchs sur le sujet comme celui-ci, où un « northerner » , un homme venu du Nord, traumatise les Londoniens en les saluant dans la rue.
- Speaker #1
Il avait déjà dit bonjour à plusieurs personnes en route de la station de la Crosse de la Reine, en laissant les commuteurs inquiets, en ne sachant pas pourquoi un homme qu'ils ne connaissaient pas les avait parlé à eux. La culture écossaise est foncièrement community-oriented, tournée vers la communauté, surtout dans les Highlands et dans les archipels où l'entraide est vitale. Ils savent aussi prendre le temps, la météo, comme elle vient. toujours avec une bonne dose d'humour et c'est très appréciable. En particulier lorsque les conditions météo se font un peu rudes. Dans les hôtels, il y a toujours un fauteuil qui vous attend devant une vraie cheminée avec un thé bien chaud. chaud, un thé de bruyère par exemple, ou un verre de whisky. Ces jours-là, même si le paysage est un peu austère, on se sent bien.
- Speaker #0
Et quels sont les bons points d'entrée pour découvrir justement cette culture écossaise ? Est-ce qu'il y a des musées, des événements, des ateliers à suivre peut-être, qui permettraient de comprendre, d'entrer dans cette culture ?
- Speaker #1
Je commencerais par une virée au pub, les soirs de Sessions. La session, c'est un concert imprévisé de musique traditionnelle. Je pense que c'est un excellent point d'entrée pour approcher la culture écossaise et pour mesurer à quel point les gens d'ici sont chaleureux et ont le sens de la fête. Mais ce n'est pas tout, il y a aussi les soirées kelly. Il ne faut pas hésiter à y aller. Un kelly, c'est un bal traditionnel où l'on danse parfois en cercle, parfois en huit, parfois en ligne, mais toujours dans la bonne humeur. Merci. Et les néophytes sont les bienvenus. En général, l'un des musiciens explique les figures aux participants. Et vous trouverez des soirées Kelly à Aubin, à Glasgow, à Édimbourg. Mais surtout, si vous êtes à Édimbourg, profitez de votre séjour pour visiter la section Écosse du Musée national. C'est gratuit. Il vous donnera plein de clés sur huit étages pour comprendre l'histoire mouvementée du pays et de ses relations tendues avec le voisin anglais. Idéalement, il faudrait compléter cette visite. par celle d'un site dans les hautes terres, comme la vallée de Glencoe, par exemple, ou d'un champ de bataille comme celui de Clodding. Après tout ça, vous saurez pourquoi les Highlands sont aussi déserts aujourd'hui et pourquoi les villages ne sont plus que ruines enfouies sous les fougères.
- Speaker #0
Et en parlant de fougères et donc de nature, il y a aussi ce côté vraiment grands espaces, quand on va en Écosse, qu'on a envie d'explorer avec des randonnées. Est-ce qu'il y a une randonnée qui te tient particulièrement à cœur ?
- Speaker #1
Oui, il y a un joli sentier de 12 km en sous-bois avec des petites criques de rêve sur la rive est du Loch Lomond. Je l'aime bien parce qu'il est très facile d'accès entre transports en commun. Depuis la rive ouest du lac, au pied de la gare de Tarbet, on trouve chaque matin un bateau qui traverse le lac pour vous déposer à Råvardenen et pour vous reprendre cinq heures plus tard au bout du sentier à Inversnayt. Au moment où les campanules sont en fleurs, c'est juste magique. J'aime beaucoup aussi marcher sur l'île de Razi, qui est une petite île à côté de l'île de Skye. C'est une île très paisible, où l'on prend vite de la hauteur entre les pins et les fougères, et à mesure que l'on grimpe, on découvre les vues spectaculaires sur les montagnes de Skye et sur l'Apple Cross.
- Speaker #0
Ça donne envie d'y être ! Et une fois qu'on revient à la civilisation, est-ce qu'il y a des villes à ne pas manquer ?
- Speaker #1
Moi, la ville que je préfère, c'est Auburn, sur la côte ouest de l'Argyle. On en a vite fait le tour, il n'y a pas de monument majeur, si tu veux, mais la baie est remarquable et le port bourdonne littéralement de bateaux à destination des îles. Depuis Auburn, tu peux donc t'offrir plein de mini-croisières. Et si vous n'avez qu'une semaine devant vous et si vous aimez les îles, Auburn, ça c'est un formidable point de chute.
- Speaker #0
Le Loch Ness, c'est surcoté.
- Speaker #1
Le Loch Ness, oui, oui, oui. La rive ouest risque de te laisser sur ta faim. C'est très touristique. Le château de Erkart, c'est le plus visité d'Ecosse, après ceux d'Edinbourg et de Stirling. Oh, you're too scared. La rive est du Loch Ness est moins connue et plus intéressante, je trouve. Mais il y a mieux, le Loch Afrique. Ce lac est situé à l'ouest du Loch Ness, dans une superbe vallée, le Glen Afrique. que l'on peut rejoindre en bus depuis Inverness. Il faut compter 5-6 heures à peu près pour faire le tour du lore à pied, pique-nique compris. Mais même si l'on n'en parcourt qu'un petit bout, c'est un enchantement. On respire le parfum des pins calédoniens, on a les sommets enneigés en ligne de mire. C'est extraordinaire, c'est tellement bon.
- Speaker #0
Maintenant, parlons de choses sérieuses. Comment on s'équipe quand on va en Écosse ? Parce qu'on sait qu'on ne va pas chercher le soleil en Écosse.
- Speaker #1
C'est une très bonne question, oui. Comme la météo est relativement imprévisible, il faut s'attendre à tout. Parfois, on a les quatre saisons dans la même journée. Il y a trois choses indispensables, à mon avis. C'est un coupe-vent bien imperméable, de bonnes chaussures de marche spéciales milieu humide. Et si vous randonnez dans les Highlands de juin à septembre, il est prudent d'avoir sur soi un répulsif contre les midges, contre les moucherons qui piquent en haute saison. Alors, il existe un spray spécial anti-midgees. qui n'est pas efficace à 100%, mais que l'on peut acheter sur place à peu près partout. Et je crois que ça vaut vraiment la peine, en effet.
- Speaker #0
Certains s'équipent aussi de filets qu'ils mettent sur la tête, ou ils prennent des chapeaux avec des filets pour éviter justement les midges.
- Speaker #1
Oui, le filet, c'est une très bonne solution si vous faites du camping, par exemple. Cela dit, il faut savoir que quand on marche vite, on marche plus vite que les midges. Ils n'arrivent pas à vous suivre, parce qu'ils sont tellement légers, ils sont entêtés par le vent.
- Speaker #0
Oui, on va vous parler du haggis. Oui, on évoquera aussi le whisky, avec modération. Et non ! On ne vous dira rien des barres de Mars frites, oui oui, que l'on ne trouve qu'en Écosse, si ce n'est qu'elles sont emblématiques de l'humour très second degré qui foisonne dans cette région et dont vous entendrez quelques extraits au fil de cet entretien. Sarah Lachab a choisi de vivre à Édimbourg. Elle s'est plongée dans la culture gastronomique de sa région d'adoption, notamment en publiant avec sa coautrice Aurélie Bellacico l'ouvrage de recettes « Avoine, Aguisse et Cranacane » aux éditions La Martinière. J'ai commencé par lui demander... quel était le rythme de vie des écossais.
- Speaker #3
C'est vrai que c'est intéressant de regarder un petit peu comment se passe la journée gourmande d'une écossaise ou d'un écossais. Il y a quelques... Petite tradition, c'est vrai que le petit déjeuner, par exemple, quand on a le temps de le prendre en longueur le week-end, il va être plutôt salé. On va y retrouver des saucisses, le fameux haggis, je pense qu'on en reparlera, des champignons, des tomates, des tatiscones, par exemple, on pourra en parler aussi. Bien sûr, tous les jours, les écossais ne peuvent pas prendre un énorme petit déjeuner salé. Ça reste exceptionnel pour les matins où on a le temps. À midi, de manière générale, quand on travaille, on ne s'étend pas sur le repas, c'est-à-dire que c'est souvent une pause. prises assez rapidement. Et bien souvent, on réalise que beaucoup d'Écossaises et d'Écossais ont l'habitude de dîner assez tôt. Et donc, quand vous promenez en Écosse, ne vous étonnez pas de voir des gens qui sont déjà attablés à 18h par exemple. Et il est parfois difficile de trouver une table dans un restaurant après 20h quand on est dans les Highlands, donc dans les zones du nord qui sont les zones rurales de l'Écosse. En ville, bien sûr, ce n'est pas le cas. Il est possible de manger à toute heure du jour ou de la nuit à Édimbourg. Mais voilà, c'est une petite habitude à noter, surtout quand on voyage dans le Nord et qu'on ne réfléchit pas à l'endroit où on va dîner le soir.
- Speaker #0
Tu as parlé de ce qu'on appelle le full Scottish breakfast, qui est donc plutôt dégusté en week-end. Et tu as évoqué le haggis. Alors, rentrons directement dans le vif du sujet. Raconte-nous ce qu'est ce plat quasiment national, si on osait dire. En tout cas, cet emblème de l'Écosse.
- Speaker #3
Et oui, comme ça, on peut l'éluder après. Le haggis, c'est une histoire assez formidable. puisque c'est un plat paysan, un plat très rural, qui est en fait constitué d'abats de moutons finement hachés, mélangés avec de l'avoine et plusieurs épices comme le poivre, le clou de girofle, la cannelle. Cette farce, elle est ensuite traditionnellement, en tout cas, elle est toute dans une panche de brebis. Et elle est conservée ainsi. Mesdames et Messieurs,
- Speaker #1
c'est la deuxième farce que vous allez entendre ce soir. Nous avons le haguis.
- Speaker #3
En français, on aime bien faire peur en disant que l'agis, c'est de la pence bruit farcie. Et tout de suite, les gens ont peur de manger de la pence, alors qu'en fait, la pence, on ne la consomme pas. On consomme en fait cette farce. Et ce qui est très, très intéressant, c'est que dans toutes les gastronomies du monde, ou au moins de l'Europe, eh bien, on a des manières similaires de conserver toutes les parties d'un animal. Mais ce qui est intéressant, c'est qu'on s'est moqué des Écossais parce qu'ils mangeaient le agis. et les Anglais notamment se moquaient d'eux en disant « Ah, regarde, les Écossais, ils mangent de l'avoine. De l'avoine, normalement, c'est pour les chevaux. Regarde, c'est un peuple si pauvre. » Bref, on s'est beaucoup moqués des Écossais à travers ce plat, même s'il existait également en Angleterre.
- Speaker #1
Et ce qui a...
- Speaker #3
permis de propulser le haguis sous les feux de la rampe, en fait, c'est un poète qui s'appelle Robert Burns. Et ce poète, il a décidé de défendre le haguis et d'écrire un texte qui chante les louanges du haguis. C'est un très beau poème, bien sûr. En fait, on utilise le haguis pour défendre l'identité des Écossais et en fait, il revendique le haguis en disant « Non, mais le haguis, c'est génial, ça nous donne de la force, c'est un produit de la terre. » Et Robert Burns, il est né en 1759. Et aujourd'hui, on fête l'anniversaire de Robert Burns tous les 25 janvier et on mange le haggis. On récite les poèmes de Burns parce que tous les enfants à l'école apprennent des poèmes de Burns. Et finalement, grâce à ce poème, le hagi s'est devenu un plat un peu génial, parce qu'à la fois il est fort en symbolique, et à la fois c'est un plat très simple qui ne coûte pas cher.
- Speaker #0
Et quels sont les autres types de plats qu'aiment manger les Écossais ? Qu'est-ce qu'on va trouver dans leurs assiettes ?
- Speaker #3
Alors on va trouver beaucoup de produits de la mer. Il faut savoir que 60% de la pêche britannique, elle est faite en Écosse. pas mal de plats autour du poisson. Alors bien sûr, le fish and chips, on le trouve dans tout le Royaume-Uni, mais on peut penser à la soupe Cullen's Kink, qui est une soupe de poisson crémeuse avec des poireaux et des pommes de terre, qui est hyper simple à faire et qui est vraiment savoureuse. Beaucoup de ce qu'on appelle en France récemment les légumes anciens, mais en Écosse ils ne sont jamais devenus anciens. Toutes ces variétés de carottes, les panais, les navets, les citrouilles, toute cette grande famille qui peut servir à pas mal de choses. Il y a notamment une purée assez sympa qui s'appelle le clap shot, purée de pommes de terre et de rutabaga, qui est toute simple. Encore une fois, c'est vraiment toujours cette notion de la simplicité. On a aussi des fruits très intéressants, même si en France, on ne le voit pas trop, mais en Écosse, dans la région du Fife, qui est spécialisée dans la framboise et la fraise. Et elles font partie de certaines recettes, comme par exemple le kranakan, qui est une vérine de framboise et de crème fouettée, où on va rajouter du miel, de l'avoine grillée et une touche de whisky si on le souhaite.
- Speaker #0
Quand on est en Écosse, ces plats-là, est-ce qu'on va plutôt les trouver dans des pubs ou dans des restaurants ?
- Speaker #3
Ça qui est intéressant, en fait, on va les trouver dans les deux types de lieux. Dans les pubs, vous allez avoir une ambiance un peu plus populaire, des plats un petit peu plus simples. Vous allez quand même trouver des grands classiques de la cuisine écossaise. Et certains restaurants, parfois même une paix, reprennent aussi à leur sauce ces spécialités et en font leur propre version.
- Speaker #0
Alors tu viens d'aborder le whisky, c'est aussi un autre monument écossais. Comment nous conseilles-tu de découvrir ce breuvage ?
- Speaker #3
Je pense que c'est une très bonne porte d'entrée sur la culture gastronomique écossaise, puisque l'Écosse est un énorme pilier de l'économie et il y a des distilleries à peu près partout. Ces distilleries font travailler beaucoup de gens, en général on peut les visiter. Et même si, alors attention, les Écossais ne consomment pas du whisky à longueur de journée, ça reste un alcool qui est cher, un alcool que l'on savoure. Peut-être que c'est là la différence en fait, c'est que... En Écosse, on prend le whisky au sérieux, on va le savourer de manière collective. On va tous prendre des whisky différents et on va les goûter, on va les comparer. On donne une certaine importance et on prend le temps de s'intéresser à tous les différents whisky. Moi, je suis guide et j'accueille souvent des personnes qui ne se rendent pas compte qu'il y a tant de whisky différents. Or, en Écosse, on a plus de 250 distilleries qui font chacune plusieurs bouteilles différentes. Et avec trois ingrédients de base, l'eau, la levure et l'orge maltais, on peut faire des univers de saveurs qui sont infinis. Et c'est ça qui est dingue avec le whisky.
- Speaker #0
Et à propos des distilleries, d'ailleurs, j'ai une question annexe, puisque nous, on a été concernés par cette problématique-là en tant que famille qui visite l'Écosse. Est-ce qu'il existe des distilleries où on peut visiter les lieux avec des enfants de moins de 14 ans ?
- Speaker #3
Il en existe, ce n'est pas la majorité. Et bien sûr, il faut toujours se renseigner avant. Et de manière générale, pour l'Écosse, je conseille toujours de réserver les choses en amont dès que c'est possible. C'est vrai qu'on dit souvent qu'en Écosse, c'est plus facile d'aller au pub avec un chien qu'avec un enfant, parce qu'il y a des règles très strictes par rapport à l'exposition à l'alcool. Et même aller dans les pubs avec des mineurs, il y a des règles assez strictes.
- Speaker #0
Et en dehors du whisky, est-ce qu'il y a d'autres breuvages à découvrir en Écosse ?
- Speaker #3
Bien sûr. Alors, quand on reste dans le volet de l'alcool, eh bien, il y a du cidre écossais, il y a le gin, qui est un alcool aussi assez fort, qui est fait à base de baie de genièvre. L'Écosse produit l'immense majorité du gin britannique, même si souvent on l'associe plus à l'ongle. Hors de l'alcool, cependant, on parle souvent du soda iron brew. C'est en fait un soda orange. qui a un goût assez indescriptible, que moi je situe entre le malabar et le sirop pour la toux, que les locaux adorent. Moi j'avoue que j'ai, après dix ans, j'ai encore besoin d'y aller doucement sur le Iron Brew, mais il est très populaire et l'Ecosse est l'un des rares pays au monde où Coca-Cola et Pepsi ne sont pas les premiers sodas buts. C'est bien le Iron Brew, le soda local, qui lui aussi est presque une revendication culturelle et politique.
- Speaker #0
Alors tu nous as déjà parlé des fraises et des framboises, mais du côté agriculture, est-ce qu'il y a des cultures locales qu'on peut découvrir ?
- Speaker #3
Oui, alors l'Écosse c'est un pays... à la géologie très variée, aux paysages très variés. On ne fait pas pousser les mêmes choses, on n'élève pas les mêmes animaux dans les quatre coins du pays. Du côté des céréales, majoritairement, on cultive de l'orge. C'est le cas de 60% des céréales cultivées. On n'a pas la culture du pain blanc, du blé, il n'y en a pas beaucoup. On a pas mal d'avoine, bien sûr, de plus en plus de colza aussi. Et ça, ça va plutôt être dans le sud de l'Écosse et dans l'est, le nord-est, où on a des grandes plaines agricoles. Dans l'Ouest, on va trouver plus d'élevages, notamment bien sûr les moutons. Alors ces moutons, ils sont surtout élevés pour leur viande. On en dénombre plus de 7 millions, ce qui est impressionnant pour un pays de 5,5 millions d'habitants. On a bien sûr des espèces assez particulières. Je pense au bœuf Angus. C'est un bœuf qui est originaire justement du nord-est du pays, dans la région de l'Angus. Et ce bœuf, il a une viande très réputée parce qu'il est nourri uniquement à l'herbe toute sa vie. Voilà, il y a aussi les vaches des Highlands. En général, elles sont trop mignonnes pour qu'on parle de leur viande, mais elles sont aussi élevées pour leur viande. Et voilà, peut-être que ça peut aussi nous mener vers le fromage, puisqu'on a beaucoup de brebis, donc on fait aussi pas mal de fromage. Il n'y a pas autant de variété qu'en France, évidemment. Mais sur les 20 dernières années, c'est vraiment impressionnant de voir à quel point... Le monde du fromage s'est développé, s'est structuré et à quel point les gens se reconnectent finalement à cette haute manière de consommer le lait écossais.
- Speaker #0
Et puis ma dernière question, qu'est-ce qu'on rapporte dans sa valise quand on revient d'Ecosse ?
- Speaker #3
Alors depuis la sortie de l'Union européenne du Royaume-Uni, il n'est plus possible de ramener de produits d'origine animale. Donc on ne peut pas ramener de haïs, on ne peut pas ramener de fromage par exemple. Cependant on peut choisir... Des hot cakes, ces craquelins à l'avoine qui sont super pour l'apéro, que l'on peut tartiner, grignoter et qui sont hyper bons pour la santé. On a aussi les shortbreads, ce sont des sablés au beurre hyper savoureux. Je pense aussi peut-être à la marque Tenox. Alors là, ce sont des produits de supermarché, des produits industriels. Ce sont des gaufrettes et des petits gâteaux faits en Écosse et qui sont super bons et que les gens adorent. C'est toujours un succès si vous ramenez ça à la maison.
- Speaker #0
Galwin Donnell était un maître incontesté du polar. Alors qu'il vivait sur une île perdue des ébrides, il disparaît brutalement. Il se serait jeté du haut des falaises. Émilie entame justement une thèse sur Donnell. Elle se rend sur l'île où elle doit organiser des journées d'études consacrées à l'auteur. Son compagnon, Franck, doit la rejoindre. Pour lui, l'enjeu est ailleurs. Il espère parvenir à convaincre Émilie de passer le restant de ses jours avec lui. Vous allez entendre un extrait du roman d'Alice Zeniter, juste avant l'oubli, publié chez Gallimard.
- Speaker #4
Le voyage de Franck comprenait un premier vol de Beauvais à Glasgow, puis un autre de Glasgow à Barra. d'où il prendrait pour finir le bateau jusqu'à Mirallais. La préparation de ce périple avait été angoissante. Franck se déplaçait presque uniquement en voiture. Il aimait conduire lui-même son véhicule. Il aimait suivre des panneaux avec le sentiment qu'il comprenait l'organisation du réseau routier irriguant un pays et s'arrêter quand il l'avait décidé, parfois par pure caprice géométrique, milieu d'un segment, angle droit formé par deux nationales, parfois... pour prévenir les nécessités mécaniques, faire le plein, laisser refroidir le moteur, parfois parce que la beauté d'un endroit l'exigeait, simplement. Un été, Émilie et lui étaient descendus jusqu'à Rome de cette manière, et lorsqu'ils avaient atteint la capitale italienne, incapables de partager avec d'autres la splendeur des ruines et des églises, ils avaient fait demi-tour. Ils avaient prétendu plus tard ne pas avoir pu supporter la chaleur collante de Rome au mois d'août. Mais en réalité, Ce qui les avait poussés à partir, c'était la conscience que la ville splendeur était régie par des horaires oublieux de leur réveil tardif, de leur sieste répétée, ou de leur pic d'énergie nocturne, au contraire du cocon de leur véhicule, où ils pouvaient plier le temps à leur désir. Ils avaient décidé d'abandonner toute convention sociale, l'obligation d'admirer Rome, d'ajouter quelques lignes au discours universel et extatique sur les statues du Bernin, les tableaux de Caravage et la Pietà de Michel-Ange. À la place, ils n'agiraient qu'au gré de leurs envies immédiates. Voir la mer, boire du vin blanc, manger des olives. Émilie riait comme une enfant en remontant en voiture. « Franck ! » répétait-elle sans parvenir à croire qu'elle tournait le dos à des siècles de culture. « Franck, Franck, on s'en fout de Rome. Rome n'est pas si importante. » « Bien sûr qu'on s'en fout ! » disait Franck en saluant d'un geste moqueur le circo Massimo. Ils avaient fui la capitale. Leurs vacances avaient été merveilleuses à partir de là. Ils avaient réalisé que leur voyage n'avait pas de destination. Ils étaient leur propre destination. L'amour les rendait suffisamment égoïstes ou narcissiques pour qu'ils ne veuillent pour tout souvenir de l'été que des cartes postales d'eux-mêmes. Rejoindre aujourd'hui Émilie n'avait ni la même facilité, ni la même grâce que voyager avec elle. Le trajet n'était plus un moment de plaisir à partager. mais une course d'obstacles. Franck pensait à Ulysse et à sa longue errance sur le chemin du foyer. Il avait prévu de s'acquitter de la partie avion dans la première journée, puis de passer la nuit à Barra. Il prendrait la mer le jour suivant. Le trajet en bateau avait été difficile à mettre en place car il n'y avait pas de navette régulière pour Miralais, propriété privée du but d'albergue. De plus, la belle saison était passée et il était difficile de convaincre un marin de sortir en septembre alors que le vent s'était levé. Malgré le soin avec lequel Franck avait préparé son voyage, son premier vol eut deux heures de retard et, arrivé à Glasgow, Il n'avait plus d'avion pour Barra. Après un bref instant de panique, l'Odyssée commence. Son cerveau se mit instinctivement à fonctionner de manière efficace, compilant les possibilités, présentant une liste de solutions. Dix ans passés en hôpital, avait ordonné les pensées de Frank presque malgré lui. Il se rendit dans un bed and breakfast proposé par les affiches de l'aéroport et situé dans un quartier résidentiel sans intérêt. Son guide de l'Écosse lui assurait pourtant que Glasgow réservait aux visiteurs de nombreuses surprises architecturales. La chambre était blanche et mauve, et il y flottait une odeur de lessive mêlée d'humidité. Sur le lit, une ronde souris en peluche lui présentait leurs longues dents de feutrine. La frontière du charmant et de l'effrayant y était relativement mince. Il envoya un mail à Émilie, en espérant qu'elle le lirait à temps, puis... appela le marin qui devait le conduire sur l'île pour repousser leur rendez-vous. L'homme paraissait mécontent du changement. Franck n'était pas sûr. L'accent écossais et le téléphone faussaient également sa compréhension des sentiments. Une fois traité cette erreur de parcours, il sentit son calme revenir. Ce n'était pas un mauvais présage. À peine un ok.
- Speaker #0
C'est la fin de cet épisode. Merci d'avoir exploré l'Écosse avec nous. Le générique est signé Hélène Biziot, les interviews et la réalisation Marjolaine Corr. Au fil de ce podcast, vous avez entendu l'extrait du sketch « Northerner Terrifies Londoners » diffusé par la BBC et des extraits de la « Burns Night » et du poème « Address to Haggis » organisé par The University of Edinburgh Business School. Parlez-moi d'ailleurs, un podcast créé sur une idée originale des éditions Voyage Gallimard. Si vous avez aimé ce contenu, n'hésitez pas à nous laisser un commentaire sur les plateformes et bien sûr à le partager autour de vous. A bientôt et bon voyage !