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Aby Gaye : Je me choisis, donc je pars

Aby Gaye : Je me choisis, donc je pars

55min |21/09/2025
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Aby Gaye : Je me choisis, donc je pars

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55min |21/09/2025
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Description

✨ Et si le sport était bien plus qu’un jeu ?
Et s’il devenait une arme pour se relever, inspirer et changer des vies ?


C’est exactement ce que nous explorons dans weTalk, le podcast qui transforme l’échec en réussite.
Une émission intimiste où l’on parle de résilience, de seconde chance et de ces histoires vraies qui rappellent que tomber n’est jamais la fin, mais un nouveau départ.


Dans ce nouvel épisode, je reçois Aby Gaye, basketteuse professionnelle et fondatrice de l’association Terrang’Aby.

Elle nous confie :
- Comment elle a transformé blessures, doutes et échecs en véritables moteurs pour grandir.
- Son engagement au Sénégal contre le colorisme et la dépigmentation, pour redonner confiance aux jeunes filles.
- Pourquoi elle croit que l’éducation et l’estime de soi sont les clés pour bâtir une société plus forte et plus juste.


💡 Comment garder foi en soi quand le corps lâche ?
💡 Comment transformer la douleur en mission ?
💡 Et pourquoi la confiance est le plus grand trophée qu’on puisse gagner ?


Aby Gaye nous rappelle qu’au-delà des terrains et des médailles, le vrai combat est intérieur : apprendre à s’aimer, à s’accepter, et à inspirer les autres à en faire autant.

Un épisode vibrant, puissant, qui montre que le sport peut être une école de vie et un levier d’émancipation.


🎧 Disponible sur toutes les plateformes (Spotify, Deezer, Apple Podcasts, podcast addict, YouTube).

Retrouve weTalk sur :

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Enregistrement : L'Appart studio
Musique : Nicole Eweck


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à toutes et à tous, je suis Nicole Ewek et tu écoutes We Talk, le podcast qui transforme l'échec en réussite. Mon invitée du jour, c'est une femme exceptionnelle, exceptionnellement grande, exceptionnellement dans le cœur, grande dans le cœur, c'est Abigaye. Bonjour Abie, comment tu vas ?

  • Speaker #1

    Bonjour Nicole, je vais très bien, merci.

  • Speaker #0

    Je suis ravie de t'avoir sur le micro, enfin en tout cas sur le plateau de We Talk aujourd'hui, tant pis ce qu'on a eu un peu de mal.

  • Speaker #1

    On a eu du mal à se coordonner au niveau des dates, mais finalement on est là toutes les deux.

  • Speaker #0

    Alors je vais te laisser te présenter. auprès des auditeurs de We Talk.

  • Speaker #1

    Très bien. Alors moi, c'est Abigaye, j'ai 30 ans, je suis basketteuse pro maintenant depuis une dizaine d'années. J'ai principalement joué en première division en France, mais aussi un peu à l'étranger. Et j'ai aussi eu l'honneur d'être internationale française, d'avoir été en équipe de France.

  • Speaker #0

    Justement, au cours de cet épisode, on va parler d'un athlète. Il y a des hauts, il y a des bas. Ta vie en tant que présidente de Terrangabi, qui est une association, tu vas m'en parler un peu plus longuement. Mais avant ça, il y a une tradition à We Talk. C'est que je présente mes invités grâce à un conte que j'ai écrit rien que pour eux. Est-ce que tu es prête à écouter le tien ? Oh, j'ai hâte ! Bon, alors. Il était une fois une géante par la taille, mais pas seulement. Une géante de cœur, d'engagement, d'idéal. Elle s'appelle Abigail. Elle est née à Vitry-sur-Seine, dans une banlieue parisienne. Ses parents sont des... Peul, venue tout droit de Dakar au Sénégal. Petite, elle déborde d'énergie, grandit plus vite que les autres. À 4 ans, son père, visionnaire on dirait, sans le savoir, lui met un ballon entre les mains. C'est un geste simple, une intuition de papa, mais il vient d'éveiller un destin. Le basket, pourtant, ne sera pas tout de suite le coup de cœur. Ce n'est pas bien sûr le coup de foudre, mais c'est une danse timide. Elle teste l'athlétisme, le tennis, elle explore ce qu'elle recherche, ce que seule une équipe peut offrir, la chaleur du collectif, la boue. beauté de la solidarité, le pouvoir du nous. Alors elle revient au basket et là, tout s'éclaire. En 2013, alors qu'elle est âgée de 18 ans, Abie rejoint Toulouse Métropole Basket et fait son entrée dans le monde professionnel. Puis tout s'enchaîne. Une médaille d'or en équipe de France U20, arrachée à l'Espagne en 2014. Une courante de championne de France en 2017 avec Villeneuve d'Ascq. Elle brille sur les parquets, elle pose son rythme, s'agrase. Mais ce que les projecteurs ne montrent pas, ce sont des blessures, des nuits d'angoisse. des corps fatigués qu'il faut réapprendre à aimer. Être sportif de haut niveau, c'est aussi ça. C'est tomber, c'est douter, puis se relever. Mais Abhi, ce n'est pas qu'un pivot d'exception. C'est une conscience, une voix, une âme éveillée. Car très tôt, à 9 ans, elle crée sa première association. À 11, elle devient conseillère municipale des jeunes. Un jour, dans la bibliothèque de l'école, elle tombe sur un article qui raconte l'histoire de la traite négrière. Et là, tout bascule. Quelque chose se noue entre cet enfant et l'Afrique, son continent d'origine. Une mémoire transmise, un fil invisible qui ne la quittera plus. Elle se rend au Sénégal, découvre un pays qui lui y ressemble. Mais aussi un choc. Là-bas, près d'une femme sur trois se dépigmente la peau. Noir, chez certaines, ne veut pas dire beau. Noir veut dire trop, trop visible, trop brut, trop rejeté. Les surnoms sont violents. Charbon, minuit, crapaud. Alors, Abby décide de ne plus se taire. Elle crée Terangabi, qui veut dire la lumière d'habit. Une association qui œuvre pour l'estime de soi des jeunes filles sénégalaises. Elle les invite à se voir belles, fortes et puissantes. À travers le sport, elle leur transmet ce que le basket lui a offert, la confiance, la rigueur, l'amour de soi. À chaque rebond, à chaque mot, à chaque action, Abigaï nous rappelle que l'on peut être athlète et militante, féminine et puissante, noire et fière. Elle incarne ce que We Talk célèbre, la résilience, la transformation, l'engagement. Et aujourd'hui ? Abhi vient de raconter son histoire. Alors, prends une grande inspiration. Car voici venir une femme qui n'a jamais baissé la tête. Une femme qui se tient droite. Une femme debout pour toutes les autres. Bienvenue dans We Talk. Bienvenue Abhi Gaye.

  • Speaker #1

    Waouh ! Déjà, merci beaucoup pour cette magnifique présentation, Nicole. Je vois que tu as fait un vrai travail de recherche.

  • Speaker #0

    C'est mon travail.

  • Speaker #1

    C'est vraiment appréciable. Je vais juste apporter deux petites rectifications. Je ne suis pas peule.

  • Speaker #0

    J'étais sûre.

  • Speaker #1

    En fait, ma mère, je pense, l'est de par son famille qui est si. Mais elle dit toujours, c'est une Paul Wolofisé. Je dirais plutôt que je suis Wolof quand même. Et la deuxième rectification, c'est que j'ai commencé le basket à 12 ans, mais le sport à 4 ans.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc, j'ai commencé pas mal de sport avant de faire du basket. Mais c'est réellement à 12 ans que j'ai été initiée en club. J'ai eu à toucher le ballon, c'était un petit peu avant. Mais c'est vraiment à 12 ans que je prends ma première licence. Voilà, ça c'est les deux seules petites erreurs.

  • Speaker #0

    C'est tout le reste. C'est mon petit cadeau que j'adore faire à tous mes invités. Je me suis dit, j'ai eu un doute, je voulais t'envoyer un message tout à l'heure pour te dire, t'es peule ou ? T'es peule ou ?

  • Speaker #1

    Mais je suis un petit peu, je pense, parce que comme je te le disais, c'est une famille. Bon,

  • Speaker #0

    rien que pour les 1% de sang peule que tu as, ça veut dire que j'ai fait une seule erreur.

  • Speaker #1

    Une seule,

  • Speaker #0

    voilà.

  • Speaker #1

    Une seule seulement.

  • Speaker #0

    Abhi, ma première question, c'est, We Talk parle d'échec, de résilience. Quelle est ta définition de l'échec ?

  • Speaker #1

    Alors l'échec, l'échec, en tout cas, c'est ce qui est communément admis, c'est le fait de ne pas réussir l'objectif fixé et du coup de tomber sans figurer. Et c'est aussi un peu la définition que j'ai, c'est de me fixer un objectif, admettons de me dire, je ne sais pas, je vais obtenir tel diplôme et finalement je ne l'ai pas. Donc c'est un échec. Mais après, c'est vrai qu'avec le temps, j'ai nuancé ma vision de l'échec. Aujourd'hui, je suis vraiment partisane de me dire que les échecs sont nécessaires pour grandir, pour avancer. Sans échec, je ne me remets pas en question. Sans échec, je ne change pas forcément ma façon de faire. qui peut être plus ou moins adapté en fonction des périodes, en fonction de la saison. Donc l'échec, oui, c'est de ne pas réussir ce qu'on s'était fixé comme objectif. Mais au final, c'est quelque chose de nécessaire pour avancer. Et en tant qu'athlète, l'échec, surtout dans mon sport, que l'on pense être un sport d'adresse, le basket est un sport d'échec. Dans le sens où on a plus de chances de rater quand on prend un tir que de marquer. Les statistiques le prouvent. Très peu de gens, au final, finissent des saisons à plus de 50% de réussite. Donc voilà, l'échec fait partie de mon sport, fait partie de ma vie au final. Et même si ce n'est pas facile, tous les jours de l'accepter, c'est un vrai travail d'accepter l'échec.

  • Speaker #0

    Justement, pour toi, quel est le plus grand échec que tu aies vécu et qu'est-ce que ça t'a enseigné ? Est-ce que tu peux partager ça avec nous ?

  • Speaker #1

    Alors, le plus grand échec de ces dernières années, clairement, je dirais mon passage à l'étranger, mon premier passage à l'étranger. En 2021, je suis championne de France avec le club de Basketland. On va dire que je suis à mon apogée d'un point de vue individuel mais aussi collectif. Je joue dans une merveilleuse équipe, dans un club qui m'a fait confiance, dans lequel j'ai signé à l'âge de 24 ans, je crois, 23-24 ans. Donc vraiment pour me donner un nouveau défi, pour continuer à monter en compétences. Et donc on finit championne de France deux ans après mon arrivée dans ce club, et c'est le premier titre du club. Et à ce moment-là, j'avais prévu de rester dans ce club. Je me sentais bien. J'avais déjà donné mon accord de principe. Et quelques semaines plus tard, je reçois une offre, donc celle de Sopron, qui était à l'époque un des plus gros clubs européens. Et moi, je vois ça comme un signe. Je me dis impossible de refuser. Je ne sais pas si j'aurai de nouveau cette occasion-là. Donc, j'accepte. Surtout que Sopron, c'était quand même un club qui me tenait à cœur. C'est le premier club d'Euroleague que j'ai vu jouer. C'est le premier club contre qui j'ai joué aussi en Euroleague. Donc, il y avait une symbolique. Et je me suis dit, ça sera mon premier club à l'étranger aussi. Et malheureusement, ça a été la désillusion totale. J'ai finalement coupé mon contrat après 7-8 mois, il me semble, la veille de mon anniversaire. Et j'ai fini la saison en Italie. Donc, ce fut un échec, mais il m'a beaucoup, beaucoup appris sur moi, sur ma capacité à être résiliente.

  • Speaker #0

    Mais sans vous en couper, mais qu'est-ce qui s'est passé ?

  • Speaker #1

    Alors ce qui s'est passé, c'est que je suis arrivée là-bas avec plein d'espoir, plein d'illusions, prête quand même. Je me suis beaucoup préparée l'été, mais je n'ai pas trouvé un environnement favorable. J'irais même hostile à certains égards. Dans quel sens ? Dans quel sens ? Je n'ai pas de confirmation, mais en tout cas, j'ai senti des ralentes de racisme en fait. C'est un peu ce que j'ai ressenti, beaucoup de rejet. J'ai ressenti du rejet que je ne saurais expliquer aujourd'hui si ce n'est... par ça. Surtout que j'ai eu quelques discussions après avec quelques-unes de mes coéquipières dans l'équipe. Mais j'ai senti vraiment une forme d'hostilité à mon égard. Et je pensais rencontrer ceux-là en dehors de ma structure sportive et c'est à l'intérieur que je l'ai un peu rencontré.

  • Speaker #0

    Ce club, il est en France ou il est... Non,

  • Speaker #1

    il est à l'étranger en Hongrie. La Hongrie qui est un pays réputé pour son nationalisme avec leur président Orban. Mais voilà, je me suis dit, bon, je ne suis pas la première, je peux y aller. Mais c'est vrai que j'ai... pas eu une bonne expérience de ce point de vue-là. D'autres aussi, d'ailleurs, je ne l'ai appris pas à la suite. Donc, voilà. J'ai pris la décision de partir parce que moi, par contre, s'il y a bien une chose sur laquelle je ne badine pas, c'est le respect.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    C'est-à-dire que moi, à partir du moment où la notion de respect est brisée entre nous, je pars. Je te le signale, mais je pars. Je ne peux pas accepter l'inacceptable. Et pour moi, ça, c'est vraiment la limite. Donc, j'ai décidé de partir. donc c'est pas forcément une bonne décision sportive parce qu'en plus ce club là gagne le Roli quelques mois après donc il y a la compétition en Europe mais j'ai aucun regret parce que je sais pourquoi je suis partie à ce moment là aujourd'hui je pourrais me dire oui j'aurais pu mais avec Dessy on refait le monde donc je finis ma saison en Italie je retrouve aussi le goût du basket j'ai la chance de rencontrer une coéquipière de l'équipe de France à ce moment là dans ce club Et donc vraiment, je me refais une santé mentale, on va dire, parce que ça a été vraiment très, très éprouvant. Et puis voilà, et malheureusement, je me fais aussi le ligament croisé quelques mois après cette échec. Ah oui, c'était un machinement. Voilà, donc ça a vraiment été une saison 2021-2022 très compliquée pour moi. Je pense que c'est le plus gros échec de ma vie. Jeune carrière.

  • Speaker #0

    Et comment on fait pour rebondir ? Comment tu te sens ? Est-ce que tu te dis que tu vas pouvoir remonter à un haut niveau ? Ça se passe comment dans ta tête ?

  • Speaker #1

    Alors, je passe par plusieurs étapes. Je me blesse. C'est l'effondrement total. Mais très rapidement, je rebondis. C'est-à-dire, je pense, peut-être 48 heures après, je me dis, OK, quel est le plan maintenant ? On pleure, on se lamente, mais maintenant, on to the next. Donc, je passe à autre chose. Je fais mon petit... planche, je calme au rendez-vous avec le chirurgien, je me fais opérer 15 jours après, donc de manière très expresse au final, et j'entame une rééducation. Sauf qu'il faut savoir, c'est qu'après cette première opération, je me refais opérer de nouveau 9 mois après, donc quasiment à la fin de la rééduc. Et là, c'est un peu le coup de grâce parce que j'avais signé à ce moment-là avec un club en France, pour deux saisons, et donc, ils ont accepté ma blessure, tout le monde l'a accepté, mais on se dit à ce moment-là que je rate une saison et que je reprends pour la seconde. Et au final, je ne joue que 3 mois sur... 24 mois d'engagement. Donc je reprends 18 mois plus tard, après ma première opération. Et donc 18 mois, il faut savoir que c'est énorme. C'est-à-dire que moi, en carrière, j'ai rencontré, je crois, aucun athlète que je connais dans mon entourage, en cas pas une basketteuse qui s'arrêtait autant. C'est particulièrement long. Et donc j'ai eu le temps aussi de beaucoup cogiter. J'ai eu le temps de me poser la question de si je voulais continuer au pal-basket. Qu'est-ce que je voulais faire ? Est-ce que ça en valait encore la peine ? J'ai éprouvé aussi beaucoup de dégoût à l'égard du milieu du basket. Parce qu'en fait, quand on est un athlète, on a de la valeur sur le terrain. Et une fois qu'on n'est plus sur le terrain, on perd en valeur, on perd en considération. Et donc, j'ai vu mon statut passer de potentielle joueuse de l'équipe de France à oublier, on parle de toi au passé, tu n'existes plus. Et donc, moi, la chance que j'ai aussi à ce moment-là, c'est de ne pas être quelqu'un qui s'attache beaucoup à cette image, mais ça pique quand même. Donc, j'ai quand même su, en parallèle de cette blessure, me construire, donc ma carrière, ma future carrière professionnelle, en tout cas, de réfléchir sur ma reconversion pro.

  • Speaker #0

    Tu as quel âge quand tu penses déjà à ta reconversion ?

  • Speaker #1

    Alors, je me suis blessée, j'avais 27 ans, mais on va dire que j'y pense depuis le début de ma carrière. J'ai toujours eu dans un coin de ma tête que le basket était éphémère et qu'il fallait préparer l'après. Donc ça m'a vraiment permis cette blessure aussi de me reconnecter à moi, de savoir ce que je voulais, où je voulais aller. Donc je dirais pas que ça a été un mal pour un bien, je ne recommencerai pas honnêtement. Mais je pense que j'ai su capitaliser sur ce temps-là pour ne pas perdre doublement mon temps, en fait.

  • Speaker #0

    Ok, d'accord. Et tu dirais aujourd'hui que, en quoi cette année 2020-2021, cette saison, a été déterminante pour ta vie, pour l'orientation de ta vie ? Est-ce que tu peux tirer comme bénéfice aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Elle a été très déterminante cette année. ce n'a pas été que sur cette saison malheureusement on va dire que de 2021 jusqu'à le début 2024, ça a quand même été assez compliqué. Parce qu'il faut savoir, on se blesse, 18 mois, mais ensuite il faut reprendre. Donc quand on reprend, qu'est-ce qui se passe ? On n'est pas en forme. Le basket, ce n'est plus aussi facile que quand on l'a quitté. Donc c'est une période qui a duré trois ans en fait. Qui a vraiment duré trois ans de flou, trois ans de vide un peu. Et là vraiment, Dieu merci, cette saison, j'ai pu rejouer, me relancer. et donc... C'est vraiment ça que je me dis, c'est que le plus dur est passé, mais maintenant, il faut continuer à construire.

  • Speaker #0

    Dans cet état-là, quand tu tombes, quand tu as été au plus bas, il y a eu la phase où tu n'étais pas bien, où tu as pleuré, la phase 2 et tout ça. Et puis, il y a eu la phase de, ok, qu'est-ce qu'on en fait ? Comment est-ce qu'on relève ? Mais tu penses que ça vient du basket ou c'est un état d'esprit que tu as toujours eu au final ?

  • Speaker #1

    J'aime quand même grandement le basket. Le basket m'a façonnée, j'en parle encore ce midi avec une amie. Je suis sportive de haut niveau depuis mes 13 ans, j'en ai 30. Donc ça fait 17 ans en fait que je suis poussée dans mes retranchements, 17 ans qu'il faut se relever, tomber, se relever. Donc c'est vraiment un état d'esprit, c'est devenu une seconde nature. C'est pas plaisant de tomber, mais à chaque fois que je tombe, je sais au fond de moi que je vais pouvoir me relever. Je sais que je vais pouvoir trouver les ressources pour le faire. Ça va pas être facile, hein, mais il y a toujours cette lueur d'espoir, parce que j'ai l'habitude de tomber. C'est le propre de l'athlète, c'est pas que... Les médailles, tout ça, c'est vraiment le quotidien, la remise en question, tous les matchs, tout le temps. C'est un éternel recommencement.

  • Speaker #0

    Justement, tu as décidé de faire du basket une caractère. pour métier, métier passion. Là où beaucoup de gens, dans le sport, basket, de foot, on dit souvent qu'il y a beaucoup d'appelés et très très peu d'élus. Est-ce que tu n'as pas eu peur de te lancer dans une carrière sportive, professionnelle ? Je vais peut-être commencer par cette question. Qu'est-ce qui t'a poussé et quel a été le déclic ? D'abord, voilà. Sinon, tu vas te dire, c'était quoi la troisième question ? Et j'ai rien que moi à dire. Non, je ne me souviens plus. C'est ça, je te laisse répondre.

  • Speaker #1

    mais Non, je n'ai pas eu peur parce qu'en fait, il faut savoir une chose, c'est que moi, quand j'ai commencé le basket, je n'imaginais pas une seconde devenir pro. Ce n'était pas quelque chose d'imaginable pour moi. Je n'avais pas de référence dans mon entourage. Donc moi, je commence le basket à l'âge de 12 ans pour prendre une énième licence sportive. J'aime le sport. Chaque année, pour moi, j'attends juste le magazine de la ville de Créteil pour regarder dans quel club je vais m'inscrire. Un an plus tard, je rentre en sport études. Donc là, ça commence à devenir un peu plus sérieux. On parle d'entraînement quotidien, de représenter la région Île-de-France sur des compétitions nationales. Je deviens multiple championne de France à cet âge-là, mais c'est encore insignifiant pour moi. Et c'est vraiment en rentrant à l'INSEP, deux ans après avoir commencé le basket, que là je réalise qu'il y a quelque chose qui est en train de se jouer. Je côtoie au quotidien des Ladis du Couré, des Christine Aron, des Teddy Riner, les plus grands athlètes français dans le temple du sport français. Et je me dis OK. Là maintenant, en fait, ça devient réel. On peut devenir athlète de haut niveau, on peut vivre, en faire un métier. Et j'assiste aussi à mes premiers matchs professionnels. Je vois des joueuses au plus haut niveau français. Et là, je me dis, OK, à 15-16 ans, je deviendrai pro. Mais à aucun moment à ce moment-là, je me dis que ce n'est pas possible. J'étais sûre que je deviendrais pro. Pour ta famille,

  • Speaker #0

    tes parents ? Ils sont tous ok,

  • Speaker #1

    ils t'encouragent Ils m'encouragent dès mes 13 ans en transport et études Je pars de chez mes parents à l'âge de 13 ans Je rentre que le week-end Depuis 13 ans je suis partie de la maison mes parents l'ont compris, ils m'ont beaucoup soutenu aussi Une fois que je rentre dans le moule de l'INSEP pour moi il n'y a pas d'autres issues C'est plus une question Est-ce que je deviens pro, est-ce que je ne deviens pas pro C'est la suite logique Pendant 3 ans je fais mon cursus à l'INSEP Mon objectif c'est à 18 ans de signer mon premier contrat pro Et c'est ce qui arrive. Et donc, petit à petit, je suis prise dans le moule aussi, parce qu'on a un peu formaté pour, en rentrant INSEP. Et voilà, ça fait 12 ans que ça dure maintenant, et c'est devenu mon métier.

  • Speaker #0

    En tout cas, bravo. Il y a une figure féminine qui t'a quand même inspirée, qui t'a donné envie de continuer,

  • Speaker #1

    d'avancer ? Donner envie de devenir pro à 15 ans, non. C'était juste l'environnement. Mais après, petit à petit, il y a des choses qui m'ont beaucoup inspirée. notamment une qui est Lauren Jackson c'est une joueuse australienne que j'ai pu voir à l'âge de 17-18 ans jouer en vrai et elle m'avait impressionnée elle était très grande, elle savait tout faire sur le terrain, elle dominait vraiment c'était un modèle elle m'a vraiment vraiment impressionnée et d'ailleurs quand je me suis fait le croiser c'était l'année du mondial et donc j'avais mon ancienne assistante coach qui lui a demandé de faire un carton, un petit signature un mot quoi Donc, elle m'a fait parvenir après la carte. J'ai eu le plaisir de lire ça. Et ça m'a fait plaisir. Après, bien sûr, je n'étais plus fan à ce moment-là. C'était à trois ans. Mais ça m'a fait plaisir. Voilà, cette marque de respect et d'encouragement de la part d'une si grande joueuse de basket.

  • Speaker #0

    Le sport de haut niveau, ça implique, comme tu l'as dit, des blessures.

  • Speaker #1

    C'est ça.

  • Speaker #0

    En tant que femme, quel est ton rapport à ton corps, à ta féminité ? Avec tout ce que tu as pu... que tu as pu faire endurer à ton corps à travers ce sport. Est-ce que ça a entamé ta confiance en toi ? Est-ce qu'au contraire, ça a renforcé ta confiance en toi et ton rapport à ta féminité ?

  • Speaker #1

    Clairement, le basket a renforcé ma confiance en moi. Ça, c'est sûr et certain. Parce que, comme tu peux le voir, j'ai un physique qui dénote. Je mesure 1,95 m.

  • Speaker #0

    Ouais, de bisfrance. Tu fais 1m95, tu pourrais être Miss France. Oui,

  • Speaker #1

    parfois on me dit, il n'y a pas longtemps, vous êtes mannequin. Je dis non, je suis basketteuse. Ça m'a réellement donné confiance en moi parce que j'ai trouvé un milieu qui a valorisé mon physique. Et dans lequel je me suis valorisée moi-même. Donc au contraire. Après, la chance que j'ai grâce au sport, c'est de me voir bien au-delà de mon physique aussi. Je ne sais pas comment le dire. de ce qu'on attend en tout cas d'une femme dans la société, de son image, de ce qu'elle représente. J'arrive à me voir de manière assez globale. Donc je pense que ça me met dans mon rapport à la féminité, parce que ça m'a montré qu'on peut être féminine de différentes manières. Dans une équipe de basket, on voit tout type de femmes, vraiment de la fille la plus girly au tomboy. Donc ça permet de se dire, ok, il y a plusieurs façons d'être une femme. Il n'y a pas qu'une seule, il n'y a pas qu'un moule. Et je trouve que c'est bien. On peut se façonner son identité en fonction de sa personnalité. Et on n'est pas jugé par rapport à ça, en tout cas dans le monde du sport. On est jugé par rapport à ses performances ou autre. Mais du coup, tout ce qui est rapport... En fait, un peu tous les dictages qu'on retrouve dans la société, en tout cas moi dans le basket, je ne les retrouve pas nécessairement. Et ça enlève un poids, je pense.

  • Speaker #0

    Donc, grâce à ça, finalement, ton rapport à ta féminité a été plutôt... Tu t'es sentie plus femme, du coup ?

  • Speaker #1

    Oui, en tout cas, j'ai défini ma version de la féminité. Je n'ai pas attendu que la société me dise à quoi je dois ressembler. Par exemple, quand on parle de la dépigmentation de la peau, du colorisme, moi, ce n'est clairement pas un sujet pour moi. J'ai l'incarnation de peau foncée. Je ne peux même pas parler de fierté. Je suis née comme ça. Ce n'est pas un acquis. Donc, je suis très bien avec. Je pense que le sport m'a aidée à m'accepter telle que j'étais.

  • Speaker #0

    À l'école, tu es née à Vitry-sur-Seine.

  • Speaker #1

    Je suis née à Vitry, mais j'ai grandi à Créteil.

  • Speaker #0

    À Créteil, d'accord. Est-ce qu'à l'école, on ne te faisait pas ressentir que tu étais trop différente du coup ? Tu étais beaucoup plus grande que les autres.

  • Speaker #1

    Clairement.

  • Speaker #0

    Et comment tu vivais cette différence ?

  • Speaker #1

    Clairement, à l'école, j'étais trop grande, trop grosse, trop noire. J'étais trop tout. Je dénotais, encore une fois, physiquement. Et c'est pour ça que le sport m'a vraiment aidée à prendre confiance en moi. À 12 ans, lorsque je commence le basket, c'est comme une forme de renaissance. Dans ma vie, je situe ma vie avant-après basket. J'ai une vie avant le basket, une autre vie après le basket. Donc quand je commence le basket, je suis vraiment valorisée parce que je mesure 1m82 à l'époque. Les gens sont enthousiastes de me voir entrer dans le gymnase. mais qu'est-ce qu'on va en faire de cette fille ? C'est pépi, tu vois ? Donc, non, vraiment, ça, ça a été une grâce pour moi que de commencer le basket. D'accord,

  • Speaker #0

    ok. En tout cas,

  • Speaker #1

    j'imagine,

  • Speaker #0

    à l'école, on te voyait comme, oh, la fille est trop grande. Et là, tout à coup, dans le basket, c'est comme, oh, c'est génial,

  • Speaker #1

    elle est larmiale.

  • Speaker #0

    Comme quoi, en fait, ce qui peut être notre différence, parfois, c'est juste qu'on n'est peut-être pas au bon endroit.

  • Speaker #1

    Exactement.

  • Speaker #0

    Et là où les gens, pour eux, ils ont une autre norme, Bah... Nous, on peut être la norme ailleurs. Donc au final, c'est un message un peu à toutes les personnes qui se sentent trop ou pas assez. C'est peut-être changer juste d'environnement.

  • Speaker #1

    Trouver l'environnement dans lequel vous serez valorisé, dans lequel on vous acceptera tel que vous êtes. Après, je ne dis pas que parfois, il ne faut pas se remettre en question. Ce n'est pas que ça aussi. Parce que parfois, on peut se cacher derrière ça. Mais de manière générale, on a tous des qualités à faire valoir. Et parfois, on n'est juste pas au bon endroit au bon moment. Pour reprendre l'exemple de tout à l'heure du basket. Je ne suis pas devenue nulle d'une saison à l'autre. C'est-à-dire que j'ai été dans un environnement qui m'a valorisée, avec une coach qui me connaissait, qui savait me faire jouer, avec des coéquipières qui m'appréciaient. Un an plus tard, je deviens une autre joueuse. Non pas parce que je suis moins bonne, mais parce que je ne suis pas dans un environnement qui me met en avant, qui me valorise. Et donc c'est ce que je dis aussi aux jeunes joueurs, trouvez des projets dans lesquels vous serez valorisés, dans lesquels les coachs reconnaissent vos compétences et les utilisent correctement, tout simplement. Mais ce n'est pas tout le temps se dire que je ne suis pas bon, je ne suis pas si. Non, trouver les environnements qui vous valorisent.

  • Speaker #0

    En disant ça, si tu fais écho, moi, je suis chargée RH à temps plein, entre 9 et 17. Et je dis souvent, parfois de temps en temps, je prends la parole sur LinkedIn sur ce sujet.

  • Speaker #1

    Je dis,

  • Speaker #0

    il faut choisir les entreprises qui correspondent aussi à nos valeurs. C'est bien de chercher un travail. Parfois, les gens se disent, ah mais tiens, on ne m'a pas recruté, etc. Mais est-ce qu'au moment où tu postules, est-ce que les valeurs que tu vois correspondent à ce qui tu es ? C'est hyper important.

  • Speaker #1

    C'est très important.

  • Speaker #0

    Parce qu'il suffit qu'on soit dans la bonne entreprise ou dans la bonne équipe, dans le bon environnement par rapport au basket, on peut être très bon, mais ne pas du tout performer si on est mal encouré.

  • Speaker #1

    Clairement. Et ça, c'est une leçon que j'ai aussi apprise. Avant cette expérience-là, je ne pense pas que j'avais ces exigences-là. Je sais que là, j'ai signé dans un club. Mais avant de signer, de m'engager, j'ai demandé à parler avec le coach très longuement. J'ai préparé une liste de questions, mais pas qu'en rapport avec le salaire ou la position dans l'équipe, mais par rapport à ses valeurs, sa vision du basket, sa philosophie du jeu. Parce qu'en fait, c'est des choses qui, au final, m'impactent tellement et qui vont tellement impacter mes performances que je ne peux pas les minimiser dans les discussions et après dans ma prise de décision. C'est pour ça qu'il faut se connaître aussi. Il faut vraiment se connaître. et connaître l'environnement dans lequel on veut évoluer pour voir si ça match, tout simplement.

  • Speaker #0

    C'est de beaux conseils.

  • Speaker #1

    J'aurais aimé les avoir avec quelques amis.

  • Speaker #0

    C'est pour ça que maintenant, tu les donnes à d'autres.

  • Speaker #1

    Je les donne à d'autres, volontiers.

  • Speaker #0

    Là, on va passer à la partie True Talk. Et dans cette partie, je dis qu'on ne se fait pas tout seul. Sur notre chemin, on rencontre des personnes qui sont des détracteurs. Elles nous poussent dans nos retranchements, ne croient tellement pas en nous que c'est nous qui sommes fautifs. Et ces personnes, oui, nous posent nos retranchements, mais surtout, finalement, nous poussent à... nous déployer différemment. C'est l'adversité. Il y a la rencontre fortuite. Elle ne se rend pas compte, mais elle dit quelque chose, une phrase, un projet, un conseil, et ça change un petit peu le cours de notre vie. Et puis, il y a la personne de Providence, elle croit en nous, même quand nous-mêmes, on ne croit pas en nous. Elle nous ouvre la porte sans rien attendre. Alors, dis-moi, Abby, quelle est la pire situation dans laquelle un détracteur t'amise ? Peut-être que c'est pas...

  • Speaker #1

    L'histoire avec le club de basket. Oui, ça peut être une autre aussi. Je réfléchis un peu. Qu'une personne aurait provoqué la situation. Oui,

  • Speaker #0

    ou même une situation. Tu sais, parfois, on ne se rend pas compte qu'il y a certains invités qui me disent que mon premier détracteur, c'est moi-même.

  • Speaker #1

    Moi, j'ai une histoire qui me revient en tête. Vraiment, de jeunesse, j'avais 15 ans. Et à l'époque, j'étais en internat. J'étais en internat et il y avait la personne qui était en charge de l'internat qui, je ne sais pas, bon après avec du recul, je peux peut-être le comprendre un peu, mais qui avait vraiment du mal avec moi. Et elle avait convaincu les autres filles que j'étais une sorte de gourou. Et en fait, avec du recul, c'est vraiment une histoire absurde, mais avec du recul, je pense qu'à l'époque, j'avais déjà une forme de leadership et d'affirmation de soi qui pouvait déranger. dans le sens où Je prenais de la place, certainement, dans le groupe. J'imposais aussi mes idées. Et ce n'était pas très bien vu. Et ça, je sais que ça m'a vraiment peinée à l'époque. J'avais à peine 15 ans. Mais surtout, ça a très probablement modifié après certains de mes caractères que j'avais naturellement. Ça m'a pris l'initiative, le leadership. Et durant quelques années, je pense que je l'ai un peu inhibée. Parce que je voyais ça, du coup, comme étant quelque chose de négatif. On me reprochait beaucoup à l'époque. de me mêler de ce que je ne me regardais pas, c'est-à-dire de prendre position, de défendre les gens, m'appeler l'avocat du diable. Et ça, c'est des injonctions qu'on a posées sur moi à cet âge-là qui, je sais, peuvent vraiment freiner. Et je pense que si je n'avais pas eu, après, derrière, cette carrière dans le basket, la création de cette association, etc., j'aurais pu vouloir me faire petite, du coup, pour ne pas trop éblouir, ou bien trop cacher les autres, ou bien trop en faire. Quand je pense que c'est vraiment dans ma nature profonde que de vouloir... éclairer les gens, je pense, de guider ceux qui sont un petit peu perdus, mais surtout de tendre la main et d'aider. Parce que moi, je respecte particulièrement les personnes qui le font, et je pense qu'à l'époque, je le faisais peut-être maladroitement aussi, je ne pense pas que j'étais irréprochable, mais il y avait ce truc de... Je prenais la place dans un groupe et que j'aimais guider les gens, en fait. Et ça, ça a pu déranger parce que parfois, quand on est un peu en contradiction avec les adultes en face de nous, on peut être pointé du doigt.

  • Speaker #0

    Et comment tu... Comment tu as réussi finalement à te construire avec ça ? Oui, je sais qu'il y a eu le basket. Heureusement, il y a eu le basket. Mais il n'y aurait pas eu le basket. Avec Dessy, on refait le monde. Comment ça aurait pu switcher ? Comment tu aurais pu dépasser ça, en fait ?

  • Speaker #1

    Honnêtement, je ne sais pas. C'est marrant, j'avais vraiment cette discussion-là avec mon ami ce midi sur comment le basket nous a éduqués. Moi, le basket m'a donné un vrai cadre de vie. Non pas que je n'ai pas reçu une bonne éducation, mais... Le sport m'a appris la discipline, le dépassement, la résilience. Donc je ne sais pas comment j'aurais été sans le basket. Je sais que j'étais déjà studieuse, plus jeune, donc peut-être que je me serais sûrement concentrée dans les études. Mais le sport m'a apporté autre chose que le simple fait d'être une femme studieuse. Ça m'a apporté une estime de moi, ça m'a apporté une force de caractère. Voilà, vraiment le fait de pouvoir m'asseoir en face de toi, de discuter assez librement. Prendre place, prendre position. Ça, je pense que je l'avais aussi un peu en moi. Mais le basket l'a vraiment révélé. Révélé, quoi. D'accord. Accentué.

  • Speaker #0

    Ta rencontre fortuite. Peut-être que tu en as conscience. Peut-être que cette personne est dans ta vie ou n'est plus dans ta vie. Je ne sais pas, une situation. Mais quelque chose d'apparence anodine t'a pourtant marquée et a changé, entre guillemets, le cours de ta vie. Ouais.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que je peux citer ? Ah oui, Maria Lamont.

  • Speaker #0

    Marie-Alain Laman, c'est une grande sœur pour moi. C'est une ancienne joueuse de basket, qui s'appelle Marielle. C'est une femme que j'ai rencontrée grâce au basket. On était toutes les deux convoquées en équipe de France. Très peu de temps avant que je signe dans le même club qu'elle. Et c'est vraiment devenu une sœur, une grande sœur. Celle que je n'ai pas eue, puisque moi je suis l'aînée de ma famille. Et elle a vraiment fait office de guide durant toute ma vingtaine. La vingtaine pour moi aujourd'hui avec du recul, c'est vraiment la période où on fait toutes les bêtises du monde. où l'on apprend énormément de choses, mais à chaque chute, elle a su être là, me donner les bons mots, et avec une telle justesse, vraiment, c'est vraiment une qualité remarquable qu'elle a, et je dirais que vraiment cette rencontre, je ne sais pas si elle a changé le cours de ma vie, mais en tout cas, elle l'a bien influencée.

  • Speaker #1

    D'accord, on lui dit merci du coup.

  • Speaker #0

    Ah bah merci Marie, je lui dis tout le temps.

  • Speaker #1

    Et la personne Providence, c'est celle qui croit en toi, même parfois quand toi-même tu doutes de toi. Ouais. et Elle t'a ouvert la porte à un moment où personne d'autre ne l'aurait fait. Et ça a changé tout.

  • Speaker #0

    J'ai peur de ne pas citer la bonne personne et d'oublier. Mais là,

  • Speaker #1

    attention, parce que si je ne cite pas la bonne personne, après,

  • Speaker #0

    il va écouter ou elle va écouter l'épisode.

  • Speaker #1

    Elle va t'en vouloir.

  • Speaker #0

    Alors, la personne qui a cru en moi, j'irais Francis Crespin. C'est... un de mes tout premiers coachs de basket. C'est un coach qui m'a appris à faire le lay-up, le move basique au basket. Je me souviens, comme c'était hier, j'avais 12 ans. Mais c'est un homme avec qui je suis encore en contact. On était encore au téléphone avant-hier. Il fait office de mentor dans ma vie. Plusieurs fois, je l'ai appelé quand c'était très compliqué au basket. Ça a pu être à 18 ans, comme ça a pu l'être dernièrement, 12 ans plus tard. Et il a... toujours eu pareil, les bons mots, toujours eu ce soutien indéfectible. Il croit en moi puisque je ne crois en moi. Vraiment, la façon qu'il a de me coacher, les conseils de ce qu'il dit de moi, je sens vraiment quelqu'un qui a toujours cru en moi, qui m'a toujours repoussée et qui a surtout de manière très avant-gardiste, j'irais, parce que maintenant, on replace beaucoup l'humain dans la performance, mais parler justement de l'humain, de l'importance du bien-être pour performer. Moi, il m'en parlait déjà quand j'avais à peine 20 ans. donc il y a déjà plus de dix ans. Et ça me parlait, ça faisait écho en moi, parce que j'ai toujours moi compris aussi que je n'étais pas une personne qui était tournée uniquement vers la performance sportive. J'avais besoin d'un bien-être global, j'avais besoin de me sentir bien émotionnellement, j'avais besoin de faire d'autres choses en dehors du basket. Et ça, beaucoup de gens ne l'ont pas compris. On m'a souvent dit que je me dispersais, parce que j'ai continué mes études, parce que j'ai fondé une asso, et que du coup, je n'étais pas suffisamment concentrée au basket. Et lui, en revanche, il m'a toujours encouragée à cultiver autre chose à côté de ma carrière. Et c'est vraiment le conseil number one que je donne à tout jeune athlète que je rencontre. De toujours cultiver son jardin secret à côté de sa carrière. Parce que le danger, quand on se voit uniquement à travers une casquette, c'est de se définir en fait par cette casquette-là. Et ça veut dire quoi ? Que quand on performe, on se pense être la meilleure du monde, donc avoir tendance à être hautain. Et en revanche, quand on ne performe pas, de se dévaloriser, de se dénigrer, de se penser vraiment nul. Et donc, ça, c'est vraiment quelque chose dans lequel je ne voulais pas tomber, ce piège-là, de me définir uniquement à travers ma casquette de basketteuse. Et lui, c'est aussi quelque chose qu'il m'a partagé très tôt dans ma carrière. Donc vraiment, je le donnerais lui en premier exemple, même s'il y en a eu d'autres. Mais il a fait office de mentor et vraiment, je le remercie pour l'impact qu'il a eu dans ma vie.

  • Speaker #1

    Ah oui, non, mais ce qu'il t'a dit, c'est... Moi aussi, je lui dis merci parce que c'est incroyable. J'allais dire, mais à la fois, le sport peut t'encenser et te porter au nu. Mais en même temps, et donc cultiver la confiance, etc. Mais en même temps, comme c'est une activité très exigeante, quand on échoue, il faut pouvoir se... motivée déjà personnellement et se dire mais relève-toi, tu n'es pas si nulle.

  • Speaker #0

    C'est ça. Surtout, tu n'es pas que ça. C'est puissant. Moi, c'est ça qui m'a aidée avec la blessure. Parce qu'en fait, si on se voit qu'à travers cette casquette, si je me dis ok, je ne suis que basketteuse, le jour où il n'y a plus de basket, qu'est-ce que je deviens ? En fait. Et c'est toute la remise en question que j'ai dû effectuer durant ma longue blessure. Ça a été vraiment une très longue traversée du désert. Moi, je me souviens, les premiers jours... J'étais là à déambuler dans mon quartier. à Orly. Et je me suis dit, mais qu'est-ce que je fais là ? Je n'avais jamais été, en tant qu'adulte, je n'avais jamais vécu sur Paris, en fait. Moi, je connaissais Paris que le week-end, chez mes parents, dans un cadre bien précis. Mais là, de prendre ma voiture, de sortir, d'aller faire les courses, de ne pas être avec des sportifs, c'était très, très déroutant pour moi. Donc, pendant deux mois, il y a vraiment eu cette perte d'identité et cette reconstruction nécessaire à faire. Petit à petit, j'ai commencé à sortir, à rencontrer d'autres personnes. Et j'avais même du mal à... terme à me définir comme une basketteuse parce que je ne pratiquais plus et je ne savais plus qui j'étais. Et vraiment, je te parle de ça, mais ça fait que depuis quelques mois seulement que j'ai su reconnecter avec mon identité et comprendre la femme que j'étais dans son entière essence, tu vois. Mais j'avais perdu totalement la notion de mon identité. Je ne savais plus qui j'étais. Je ne me présentais plus comme étant basketteuse parce que ça faisait plus d'un an que je ne jouais plus. En même temps, je fais des études, mais je ne suis pas encore diplômée, donc je ne peux pas me qualifier sous le titre. Donc c'était compliqué. Qui suis-je ? Qui suis-je ? Et donc, c'est vraiment important de... C'est aussi pour ça que je préconise de ne pas se définir uniquement à travers sa casquette professionnelle. Parce qu'on est bien plus que ça.

  • Speaker #1

    D'accord. Même si tu t'es présentée au début, je vais donc te répondre à la question.

  • Speaker #0

    Qui es-tu ? Qui je suis ? Aujourd'hui, moi, je me définis avant tout comme une femme engagée. D'accord. Voilà, je pense que c'est la casquette que j'aime bien porter. Une femme engagée qui a envie de faire changer les choses. Et ça, quand je le dis, ça me ramène à la jeune que j'étais. À 9 ans ? À 9 ans, vraiment. J'ai toujours été engagée. Je me souviens, en CP, je me suis présentée pour être déléguée. Le premier échec de ma vie, trois votes, dont un qui était le mien. Je me représente, tu vois, quelques années plus tard, je deviens déléguée. Pour moi, c'est aussi une forme de succès. Je suis heureuse. un de mes premiers gros succès. Quelques années plus tard, je deviens conseillère municipale. Mais en fait, tout ça pour dire que j'ai toujours eu à cœur de défendre, de porter la voix, de s'envoier, de changer les choses, de dire les trois questions.

  • Speaker #1

    L'enfant que tu étais, qui n'avait reçu que trois voix, à ce moment-là, qu'est-ce qu'elle se dit ?

  • Speaker #0

    Aïe, aïe, aïe, ça m'a fait mal. Moi, je me souviens, tu vois, je t'en parle, j'étais en CP. Oui,

  • Speaker #1

    parce que... La manière avec laquelle on vit l'échec quand on est tout petit, comment tu... Alors, si tu devais comparer entre les deux,

  • Speaker #0

    entre avant,

  • Speaker #1

    quand tu étais petite, et maintenant, en tout cas avec la blessure de 3 ans, qu'est-ce qui a été le plus dur ?

  • Speaker #0

    La blessure de 3 ans, je pense, parce que...

  • Speaker #1

    Psychologiquement,

  • Speaker #0

    je pense à la blessure de 3 ans, parce que vraiment, l'échec du CP, ça m'a vraiment marquée sur le coup, mais honnêtement, je ne sais pas l'impact que ça a eu en moi. Je sais juste que je me suis dit, waouh, je ne suis pas populaire. Je pense que je vais venir. Voilà, c'est tout.

  • Speaker #1

    Tu n'as pas eu honte ?

  • Speaker #0

    Ah, je me suis dit, quand même, j'ai... Pas d'amis, tu vois, à l'époque, c'est ça. Tu n'as pas d'amis, tu vois. D'accord. Et donc, c'est vraiment ce que je me suis dit. Mais bon, en tout cas, je me suis représentée l'année qui a suivi. Ah oui, d'accord.

  • Speaker #1

    Et c'est là que tu es devenue déléguée.

  • Speaker #0

    Je crois que c'était l'année d'avant, cette année-là ou celle d'après. Mais en tout cas, ça ne m'a pas découragée. D'accord. Je me suis représentée.

  • Speaker #1

    Comme quoi ? Tu vois, le parallèle, c'est quand on est petit, on en casse le cou, mais on rebondit. Il n'y a pas de souci. Et pourtant, quand on est adulte, on rumine.

  • Speaker #0

    On tente d'antisme.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça. Comme si la vie s'arrêtait au moment où on a vécu ce qui est compliqué. Tu as créé tes rangabies. Justement, tu m'as parlé, tu me dis que tu es une femme d'engagement, ce qui est le cas. Est-ce que tu as eu du mal également à te trouver ? Est-ce que tu t'es sentie légitime au moment où tu as commencé à porter ce combat ? Tu as abordé ce que c'est que tes rangabies, ses objectifs, etc. On va répondre ensuite à la deuxième question par rapport à la légitimité.

  • Speaker #0

    Alors, Terran Gabi, c'est une association que j'ai fondée en 2018. La genèse de ce projet, c'est la lutte contre la dépigmentation volontaire de la peau. Donc en fait, moi, j'ai été au Sénégal en 2017, après 15 ans d'absence. Donc j'avais 22 ans à l'époque. Quand j'y retourne, je suis pleine d'illusions. Trop heureuse. Vraiment, j'ai senti que pendant mon adolescence, ça m'avait manqué. qui a eu vraiment un manque dû à cette... identité que j'ai pas pleinement formée au Sénégal. Le fait de ne pas y aller, le fait de ne pas reconnecter avec mes proches, il y a eu une fracture. Quand j'y suis retournée, j'étais vraiment la plus heureuse du monde. Ça a été un choc, je sors de l'avion même, je pleure parce que je ressens cette reconnection. Littéralement, c'est comme si on m'avait arraché du sol et qu'on me replantait chez moi. C'est vraiment ce que j'ai ressenti. Je ressens l'odeur du Sénégal que je n'avais pas senti depuis 15 ans. La reconnexion est totale. Je passe de très bonnes vacances, mais en même temps, j'essuie pas mal de remarques. sur la couleur de ma peau. Ma mère aussi, ma petite sœur, car on a la peau foncée. Je me souviens, une fois, j'étais maquillée, un peu comme là, et quand tu mets un peu de fond de teint, ça te claircit légèrement, ça donne un teint un peu plus orangé. Et j'ai ma tante, je portais un t-shirt noir qui me dit « Ah, ça, c'est pas bon, mais là, comme t'es là, c'est bien. » Habituellement, je suis noire comme mon t-shirt, mais que là, avec le fond de teint, ça passe mieux. Je souris, ça ne m'attend plus trop à cet âge-là, vraiment, les remarques. J'en ai essuyé pas mal dans l'adolescence. Mais le coup de grâce, c'est le jour où j'entends ma petite cousine qui dit à ma soeur, donc elles ont 4 ans et 7 ans, « Je suis plus belle que toi parce que je suis claire de peau. » Cette histoire, je la raconte partout où je vais, parce que c'est vraiment ça qui a été le déclic de ce projet, de l'urgence pour moi que de fonder quelque chose en ce sens. Parce que... Une fille de 4 ans qui a déjà conscientisé les enjeux du colorisme, c'est grave, c'est très très grave. Donc je rentre en France, on m'avait suggéré à l'époque de faire un camp de basket comme j'étais basketeuse pro, et je me dis j'ai pas envie de faire un énième camp sportif. Plein d'athlètes font ça, c'est très bien, mais j'avais pas envie, ça me motivait pas. En revanche, de faire un camp de basket éducatif, ça, ça me motivait. Parce que c'était à mon image, sport et éducation, et que pour moi l'éducation c'est la clé. Donc je me dis ok. L'année d'après, je retournerai au Sénégal, donc en 2018, et je fonderai Terre en Gabi. Donc toute l'année, j'ai réfléchi à ce projet, on m'a connectée, j'ai tout organisé à distance. Et en arrivant, on monte ce premier camp de basket éducatif féminin à Thies, dans la ville de mes parents. Et dans ce camp-là, on fait venir des experts, donc dermato, sages-femmes, psychologues, pour parler des enjeux de la confiance en soi, l'estime de soi, de la dépigmentation de la peau, mais aussi des violences sexuelles et de l'éducation sexuelle avec les jeunes filles. Donc on choisit la période de l'adolescence parce que c'est une période dans laquelle les jeunes filles se construisent. Et donc aussi où il est important de planter les bonnes graines qui vont pouvoir permettre à ces jeunes filles de devenir des femmes confiantes et sûres de leur identité. Parce que le problème, c'est que quand tu as 15 ans, on passe ta vie à te répéter que tu es trop ci, trop ça. Tu nourris des complexes, tu construis même des complexes. tu deviens une femme complexée qui peut potentiellement recourir ensuite à la dépigmentation volontaire de la peau. Et donc nous, l'enjeu, c'était vraiment de casser ce cycle et de planter dans le décor un nouveau discours, un nouveau paradigme pour ces filles-là et de leur dire, écoutez, on peut être noire, belle, réussir, être désirable, tout ce que vous voudrez, et c'est très bien comme ça. L'enjeu, il n'est pas de se dire, je suis plus belle quand je suis foncée ou je suis plus belle quand je suis claire, c'est juste de s'accepter. telle que l'on est. Au Sénégal, on a la chance d'avoir des femmes aussi noires que moi, d'autres plus claires comme toi. Et c'est très bien. C'est ça qui est la diversité aussi de la peau.

  • Speaker #1

    Comme il y a des brunes, des blondes.

  • Speaker #0

    Exactement. Et donc du coup, ça a été vraiment la naissance de ce projet. Et donc ensuite, on a évolué sur un concept plus global, sur la confiance en soi et l'estime de soi. Parce que la dépigmentation de la peau, au final, c'est quoi ? C'est un manque de confiance en soi et d'estime de soi. Oui,

  • Speaker #1

    c'est clairement.

  • Speaker #0

    Voilà. Et donc de là, on a créé tout un programme. Et aujourd'hui, on accompagne des jeunes filles sur toute une année scolaire, sur des temps sport, éducation, pour les sensibiliser à tous ces enjeux, pour leur permettre de se connaître, de développer leurs compétences, leurs appétences et d'avoir un plan de vie à la fin solide pour lancer leur vie de femme. Et ne plus s'arrêter à tous ces dictates, à toutes ces injonctions de la société qui les poussent à se dénaturer et à se détester tout simplement. C'est vraiment ça, Terran Gabi. C'est beau.

  • Speaker #1

    Et si on veut te soutenir, si on veut soutenir Terran Gabi, comment ça se passe ?

  • Speaker #0

    Alors, si on veut me soutenir, donc là, on va lancer prochainement une campagne de parrainage. J'aimerais vraiment qu'on puisse... Parce qu'en fait, là, on va partir sur une année, donc à partir de septembre, donc jusqu'à juin, une année scolaire, où les jeunes filles vont venir deux fois par mois. On va accompagner deux fois plus de filles. Donc, on est passé de 100 à 40. On va accompagner des filles scolarisées et non scolarisées. et le but pour nous c'est vraiment d'avoir des ambassadrices dans toute la ville de Louga. la vie dans laquelle on est présente. Et pour ça, il faut des moyens. Aujourd'hui, nous, on souhaite lancer cette campagne de parrainage pour permettre à chaque fille d'avoir un parrain, une marraine, qui la soutiendrait. L'objectif pour nous, c'est d'avoir 150 parrains qui parraineraient 100 filles. Et donc, ça permettrait largement de pouvoir mettre ce projet en place, même s'il va déjà être lancé, mais pour nous permettre du moins d'avoir une marge. pour pouvoir travailler davantage, pour travailler mieux aussi et mieux les accompagner. Donc, on va lancer cette campagne-là. Donc, ne pas hésiter à nous soutenir. Aussi, nous suivre sur les réseaux sociaux. On a une page Instagram.

  • Speaker #1

    Terrangabi.

  • Speaker #0

    Terrangabi, voilà. Et on a un site Internet. Voilà. Donc, www.terrangabi.org. C'est le site.

  • Speaker #1

    Faites des dons. Voilà.

  • Speaker #0

    Faites des dons, soutenez, partagez. Mais surtout, voilà. Et je cherche aussi des entreprises, partenaires, des institutions qui veulent s'associer à nous. nous prêter main forte, parce que c'est un projet qui a pour ambition quand même de prendre de l'envergure. On est au Sénégal, demain on va être dans la sous-région africaine. Donc voilà, c'est un projet qui ne fait que commencer. Et moi, c'est vraiment aussi pour moi le projet d'une vie. Je ne sais pas comment il évoluera, mais moi l'éducation, c'est vraiment mon credo. C'est vraiment quelque chose dans lequel j'ai envie de m'engager pleinement.

  • Speaker #1

    En tout cas, c'est un très, très beau projet. Je te dis bravo.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Pour revenir donc à ma question, c'est est-ce que... Tu t'es sentie légitime de porter un tel projet ? Est-ce qu'on t'a fait sentir que tu ne l'étais pas ?

  • Speaker #0

    Alors oui, je me suis sentie légitime parce que je pars d'une expérience personnelle. Ce projet, c'est totalement moi. J'ai été cette jeune fille dont on se moquait plus jeune parce qu'elle était trop foncée de peau. Et c'est là où j'ai vraiment compris que c'était un enjeu, en tout cas en étant plus âgée, c'était un enjeu qui me dépassait, déjà avec l'histoire de ma petite sœur, mais aussi pour avoir grandi en France et avoir aussi connu le colorisme. pas que sur ma propre personne, mais sur d'autres. C'est un vrai enjeu. Et puis, encore une fois, ce n'est pas qu'une question esthétique. Moi, je ne viens pas juste dire aux filles, ce n'est pas bien se dépigmenter la peau, machin. Non, non seulement c'est un danger pour elles, sanitaire. Donc, qui dit dépigmentation, dit cancer de la peau, hypertension, mycose, gale. Donc, des maladies qu'on retrouve énormément chez les femmes africaines. Mais il y a aussi cet aspect psychologique de rejet de soi. Et pour moi, c'est tellement violent. Comment on veut... On parle de développement en Afrique, matin, midi, soir, mais il n'est pas qu'économique le développement, il est surtout mental.

  • Speaker #1

    Il est même d'abord mental.

  • Speaker #0

    Il est même d'abord mental aujourd'hui, pour pouvoir progresser, pour pouvoir avancer. On a besoin d'être un peuple, en tout cas d'être des peuples, parce que ce n'est pas qu'un seul peuple, mais d'être des peuples, des États, des sociétés, des communautés qui ont confiance en elles-mêmes, qui s'aiment, qui savent d'où elles viennent. Et il y a eu une vraie rupture en fait. Aujourd'hui... beaucoup de jeunes en Afrique, beaucoup d'Africains ne savent pas qui ils sont, n'en sont pas fiers, veulent copier tout ce qui vient de l'extérieur, mais c'est ça qui est regrettable, en fait. Et moi, le projet, c'est vraiment aussi pour dire à la jeunesse, pour dire aux filles, vous êtes très bien comme vous êtes. Et c'est parce que vous êtes comme ça que vous devez agir en conséquence, que vous devez faire ci, que vous devez faire ça. Ne cherchez pas à copier. Vous êtes uniques. Avancez. Faites ce que vous avez à faire. Connaissez-vous. Mais ne vous dénaturez pas, on ne peut pas se dénaturer et espérer faire des choses originales au final.

  • Speaker #1

    Exactement. Commençons par la fameuse connaissance de soi.

  • Speaker #0

    C'est ça.

  • Speaker #1

    Et qui dit connaissance de soi, dit finalement amour de soi.

  • Speaker #0

    Amour de soi, voilà.

  • Speaker #1

    Est-ce que c'est plus compliqué de gagner une coupe ? Alors, qu'est-ce qui est le plus difficile ? Il faut que je formule bien ma question. Qu'est-ce qui est le plus difficile ? Gagner un championnat de France, ou convaincre une jeune fille qu'il ne faut pas qu'elle se dépigmente ? Qu'est-ce qui est plus con ?

  • Speaker #0

    Il y a un dilemme. Parce que la jeune fille... Il y a un dilemme parce que la jeune fille, encore une fois, je ne suis pas la seule à lui parler. Il y a toute la société qui lui rappelle qu'elle est trop noire. C'est-à-dire que quand on sort au Sénégal, aujourd'hui, les panneaux publicitaires qui font la promotion de la dépigmentation de la peau sont présents partout. Les spots TV, les spots radio. Moi, je suis une fan des séries sénégalaises. Aujourd'hui, je dirais peut-être un peu moins, mais il y a une apologie. incroyables des produits dépigmentants. Les influenceuses que l'on met en avant dans la société, elles sont toutes pareilles, elles ont toutes ce même... Oui, cette même identité, en fait. Et elles sont aux antipodes des jeunes filles que je vois au quotidien dans mes camps de basket. Donc, c'est pas facile d'être championne de France, mais c'est pas facile aussi de se liguer contre la dépigmentation volontaire de la peau. Parce que c'est une vraie industrie, c'est... C'est quelque chose qui est très présent dans les mentalités en Afrique.

  • Speaker #1

    C'est pour ça que des projets comme Terangabi valent le coup d'être soutenus pour que des changements de mentalité, en tout cas...

  • Speaker #0

    Effectivement.

  • Speaker #1

    On arrive à la toute fin. J'ai deux dernières questions. Si on devait retenir qu'une seule chose de toi, tu voudrais qu'on retienne quoi ?

  • Speaker #0

    J'aimerais qu'on retienne que... J'ai fait de mon mieux pour impacter positivement mon environnement. C'est-à-dire que moi, ce que j'aimerais vraiment laisser demain en partant, c'est l'espoir et surtout des progrès significatifs dans l'éducation en Afrique. Moi, l'éducation, j'ai parlé du sport, mais avant le sport, il y a vraiment eu l'éducation. L'éducation, ça a été cet élément qui m'a permis réellement de m'élever socialement, je pense. Et pas que socialement, mais intellectuellement. d'être ouverte sur le monde, d'avoir un esprit critique, analytique, fort. Et c'est super important pour moi. Moi, j'aime le fait de pouvoir me dire que je peux penser par moi-même, que j'en ai la capacité aussi, parce que l'école, c'est pas que retenir telle et telle leçon, mais c'est surtout la capacité à réfléchir, à analyser, à se positionner dans le monde. Et c'est ça, en fait, qui... permet d'avoir une voix, ça qui permet de se distinguer, qui permet de faire progresser aussi la société. Donc l'école c'est un... C'est indispensable. On peut nous dire ce qu'on veut. Je ne parle pas de diplôme, je ne parle pas de tout ça. Je parle vraiment de cette capacité que l'école permet à savoir de se développer intellectuellement, d'être en mesure de réfléchir en fait, et d'avoir du répondant, d'avoir une conscience, de pouvoir tout simplement avoir ce libre arbitre. que l'école aussi permet d'acquérir, je pense. Il ne vient pas automatiquement.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu dirais aujourd'hui que tu as réussi ?

  • Speaker #0

    Ah, j'ai que 30 ans, donc franchement, ça serait prétentieux de dire oui.

  • Speaker #1

    C'est quoi réussir ?

  • Speaker #0

    C'est une bonne question. Mais non, je n'ai pas encore réussi. Il y a tellement de choses que j'ai envie d'accomplir. Mais réussir, c'est de se dire, encore une fois, qu'on a été aligné déjà avec la personne que l'on a été. avec ce que l'on projetait aussi. Moi, j'ai mes valeurs, j'ai mon système de valeurs, j'ai mes convictions, c'est de me dire que j'ai été alignée avec, en fait. Et que j'ai fait de mon mieux à chaque fois. J'ai toujours donné mon 100% à un moment donné, dans un endroit donné. Mais surtout, voilà, que j'ai su rester alignée et que je n'ai pas été déroutée à un moment donné. Que j'ai toujours su garder la tête froide, la tête haute et avancer dignement et faire ce que j'avais à faire. Donc, je n'ai pas encore réussi, mais je dirais que je ne m'en sors pas trop mal. Je fais de mon mieux au quotidien, en tout cas. Au final,

  • Speaker #1

    si je retiens juste ta définition,

  • Speaker #0

    tu as réussi ? Plus ou moins. On va dire qu'avec le temps, l'alignement arrive. Non, mais ce que je ne veux pas dire, c'est que la vie, c'est un cheminement. C'est vraiment ce que je comprends. Il y a des moments où on est plus ou moins dérouté. Mais je peux dire en tout cas aujourd'hui que face à toi, tu as une femme qui s'aligne de plus en plus.

  • Speaker #1

    Voilà. Écoute, Abby, c'était un... plaisir de pouvoir échanger avec toi.

  • Speaker #0

    Le plaisir est partagé.

  • Speaker #1

    S'il y a quelque chose que je retiens, c'est que tu es un vrai leader. On t'a reproché tes camarades de classe peut-être par inconfort, parce qu'elles ne savaient pas comment se mouvoir à tes côtés, avaient du mal à te capter, à comprendre, en tout cas à se positionner elles-mêmes. Mais ton leadership, en tout cas aujourd'hui, c'est celui d'une personne très intérieure, qui est alignée, qui est à l'aise avec qui elle est. et... il y a cette aura naturelle qui se dégage et qui fait que ton propos est extrêmement aligné et convaincant. C'est ce que moi je retiens de cet épisode. C'est d'avoir fait la rencontre d'une femme, d'un leader, d'une femme alignée qui a des convictions, des convictions très très fortes, qui reconnaît sa part d'erreur, sa part de, sa marge de, comme on dit en RH, ses axes d'amélioration, ses axes de progression. mais qui avance sereinement. Il y a quelque chose de très serein chez toi. Et ça fait du bien. Ça m'a fait du bien de t'écouter. Ça m'a renvoyée aussi à mes propres questionnements. Et j'espère que ceux qui, toutes les personnes qui m'ont écoutée, vont également s'interroger avec beaucoup de douceur, avec beaucoup de bienveillance. Il y a beaucoup de bienveillance vis-à-vis de toi-même et que l'on ressent. Et donc, on se dit, c'est aussi également vis-à-vis de nous-mêmes. Donc, il y a cette forme de bienveillance que l'on a. Je le retiens. Moi, c'est ce que je prends dans cet épisode. Et je partirai avec, je me sentirai un peu mieux, on va dire, les prochains jours. Merci de me l'avoir communiqué, Abby. Pourquoi on regarderait ton épisode ? Pour quelles raisons ? Là, tu peux pitcher maintenant devant cette caméra.

  • Speaker #0

    Alors, regarder cet épisode, pourquoi ? Parce que ça a été, je pense, un moment très intéressant, déjà pour Nicole, mais aussi pour moi. Le fait de s'exprimer, ça a permis aussi de se reconnecter à soi. en parlant avec Nicole j'ai eu aussi une conversation avec moi-même et la conclusion de Nicole, donc il faut aller jusqu'au bout de l'épisode pour le savoir, elle a été très belle, très juste et je pense qu'aujourd'hui je suis dans une phase de ma vie où clairement c'est la sérénité que je recherche. Donc merci Nicole d'avoir su se lâcher chez moi et j'en suis vraiment ravie d'être touchée.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup. Voilà, cet épisode de We Talk se termine. Je vous remercie à toutes et à tous d'avoir de l'avoir écouté, il est disponible sur toutes les plateformes YouTube, Deezer, Spotify, Apple Podcast, Apple Addict, Podcast Addict, pardon. Et bien sûr, rejoignez la communauté WeTalk sur Instagram, LinkedIn, TikTok. On attend que vous portez-vous bien et à très bientôt. Bye bye.

  • Speaker #0

    Sous-titrage Soci

Chapters

  • Introduction de l'épisode avec Nicole Ewek

    00:06

  • Présentation de Abi Gaye et son parcours sportif

    00:12

  • L'importance de l'échec dans la carrière d'Abi Gaye

    00:51

  • L'échec à l'étranger : le passage en Hongrie

    06:51

  • Rebondir après une blessure : le processus de réhabilitation

    10:40

  • Soutenir Terrang'Aby et l'engagement d'Abigaye

    43:31

  • Création de l'association Terrang'Aby et ses objectifs

    45:21

Description

✨ Et si le sport était bien plus qu’un jeu ?
Et s’il devenait une arme pour se relever, inspirer et changer des vies ?


C’est exactement ce que nous explorons dans weTalk, le podcast qui transforme l’échec en réussite.
Une émission intimiste où l’on parle de résilience, de seconde chance et de ces histoires vraies qui rappellent que tomber n’est jamais la fin, mais un nouveau départ.


Dans ce nouvel épisode, je reçois Aby Gaye, basketteuse professionnelle et fondatrice de l’association Terrang’Aby.

Elle nous confie :
- Comment elle a transformé blessures, doutes et échecs en véritables moteurs pour grandir.
- Son engagement au Sénégal contre le colorisme et la dépigmentation, pour redonner confiance aux jeunes filles.
- Pourquoi elle croit que l’éducation et l’estime de soi sont les clés pour bâtir une société plus forte et plus juste.


💡 Comment garder foi en soi quand le corps lâche ?
💡 Comment transformer la douleur en mission ?
💡 Et pourquoi la confiance est le plus grand trophée qu’on puisse gagner ?


Aby Gaye nous rappelle qu’au-delà des terrains et des médailles, le vrai combat est intérieur : apprendre à s’aimer, à s’accepter, et à inspirer les autres à en faire autant.

Un épisode vibrant, puissant, qui montre que le sport peut être une école de vie et un levier d’émancipation.


🎧 Disponible sur toutes les plateformes (Spotify, Deezer, Apple Podcasts, podcast addict, YouTube).

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Enregistrement : L'Appart studio
Musique : Nicole Eweck


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à toutes et à tous, je suis Nicole Ewek et tu écoutes We Talk, le podcast qui transforme l'échec en réussite. Mon invitée du jour, c'est une femme exceptionnelle, exceptionnellement grande, exceptionnellement dans le cœur, grande dans le cœur, c'est Abigaye. Bonjour Abie, comment tu vas ?

  • Speaker #1

    Bonjour Nicole, je vais très bien, merci.

  • Speaker #0

    Je suis ravie de t'avoir sur le micro, enfin en tout cas sur le plateau de We Talk aujourd'hui, tant pis ce qu'on a eu un peu de mal.

  • Speaker #1

    On a eu du mal à se coordonner au niveau des dates, mais finalement on est là toutes les deux.

  • Speaker #0

    Alors je vais te laisser te présenter. auprès des auditeurs de We Talk.

  • Speaker #1

    Très bien. Alors moi, c'est Abigaye, j'ai 30 ans, je suis basketteuse pro maintenant depuis une dizaine d'années. J'ai principalement joué en première division en France, mais aussi un peu à l'étranger. Et j'ai aussi eu l'honneur d'être internationale française, d'avoir été en équipe de France.

  • Speaker #0

    Justement, au cours de cet épisode, on va parler d'un athlète. Il y a des hauts, il y a des bas. Ta vie en tant que présidente de Terrangabi, qui est une association, tu vas m'en parler un peu plus longuement. Mais avant ça, il y a une tradition à We Talk. C'est que je présente mes invités grâce à un conte que j'ai écrit rien que pour eux. Est-ce que tu es prête à écouter le tien ? Oh, j'ai hâte ! Bon, alors. Il était une fois une géante par la taille, mais pas seulement. Une géante de cœur, d'engagement, d'idéal. Elle s'appelle Abigail. Elle est née à Vitry-sur-Seine, dans une banlieue parisienne. Ses parents sont des... Peul, venue tout droit de Dakar au Sénégal. Petite, elle déborde d'énergie, grandit plus vite que les autres. À 4 ans, son père, visionnaire on dirait, sans le savoir, lui met un ballon entre les mains. C'est un geste simple, une intuition de papa, mais il vient d'éveiller un destin. Le basket, pourtant, ne sera pas tout de suite le coup de cœur. Ce n'est pas bien sûr le coup de foudre, mais c'est une danse timide. Elle teste l'athlétisme, le tennis, elle explore ce qu'elle recherche, ce que seule une équipe peut offrir, la chaleur du collectif, la boue. beauté de la solidarité, le pouvoir du nous. Alors elle revient au basket et là, tout s'éclaire. En 2013, alors qu'elle est âgée de 18 ans, Abie rejoint Toulouse Métropole Basket et fait son entrée dans le monde professionnel. Puis tout s'enchaîne. Une médaille d'or en équipe de France U20, arrachée à l'Espagne en 2014. Une courante de championne de France en 2017 avec Villeneuve d'Ascq. Elle brille sur les parquets, elle pose son rythme, s'agrase. Mais ce que les projecteurs ne montrent pas, ce sont des blessures, des nuits d'angoisse. des corps fatigués qu'il faut réapprendre à aimer. Être sportif de haut niveau, c'est aussi ça. C'est tomber, c'est douter, puis se relever. Mais Abhi, ce n'est pas qu'un pivot d'exception. C'est une conscience, une voix, une âme éveillée. Car très tôt, à 9 ans, elle crée sa première association. À 11, elle devient conseillère municipale des jeunes. Un jour, dans la bibliothèque de l'école, elle tombe sur un article qui raconte l'histoire de la traite négrière. Et là, tout bascule. Quelque chose se noue entre cet enfant et l'Afrique, son continent d'origine. Une mémoire transmise, un fil invisible qui ne la quittera plus. Elle se rend au Sénégal, découvre un pays qui lui y ressemble. Mais aussi un choc. Là-bas, près d'une femme sur trois se dépigmente la peau. Noir, chez certaines, ne veut pas dire beau. Noir veut dire trop, trop visible, trop brut, trop rejeté. Les surnoms sont violents. Charbon, minuit, crapaud. Alors, Abby décide de ne plus se taire. Elle crée Terangabi, qui veut dire la lumière d'habit. Une association qui œuvre pour l'estime de soi des jeunes filles sénégalaises. Elle les invite à se voir belles, fortes et puissantes. À travers le sport, elle leur transmet ce que le basket lui a offert, la confiance, la rigueur, l'amour de soi. À chaque rebond, à chaque mot, à chaque action, Abigaï nous rappelle que l'on peut être athlète et militante, féminine et puissante, noire et fière. Elle incarne ce que We Talk célèbre, la résilience, la transformation, l'engagement. Et aujourd'hui ? Abhi vient de raconter son histoire. Alors, prends une grande inspiration. Car voici venir une femme qui n'a jamais baissé la tête. Une femme qui se tient droite. Une femme debout pour toutes les autres. Bienvenue dans We Talk. Bienvenue Abhi Gaye.

  • Speaker #1

    Waouh ! Déjà, merci beaucoup pour cette magnifique présentation, Nicole. Je vois que tu as fait un vrai travail de recherche.

  • Speaker #0

    C'est mon travail.

  • Speaker #1

    C'est vraiment appréciable. Je vais juste apporter deux petites rectifications. Je ne suis pas peule.

  • Speaker #0

    J'étais sûre.

  • Speaker #1

    En fait, ma mère, je pense, l'est de par son famille qui est si. Mais elle dit toujours, c'est une Paul Wolofisé. Je dirais plutôt que je suis Wolof quand même. Et la deuxième rectification, c'est que j'ai commencé le basket à 12 ans, mais le sport à 4 ans.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc, j'ai commencé pas mal de sport avant de faire du basket. Mais c'est réellement à 12 ans que j'ai été initiée en club. J'ai eu à toucher le ballon, c'était un petit peu avant. Mais c'est vraiment à 12 ans que je prends ma première licence. Voilà, ça c'est les deux seules petites erreurs.

  • Speaker #0

    C'est tout le reste. C'est mon petit cadeau que j'adore faire à tous mes invités. Je me suis dit, j'ai eu un doute, je voulais t'envoyer un message tout à l'heure pour te dire, t'es peule ou ? T'es peule ou ?

  • Speaker #1

    Mais je suis un petit peu, je pense, parce que comme je te le disais, c'est une famille. Bon,

  • Speaker #0

    rien que pour les 1% de sang peule que tu as, ça veut dire que j'ai fait une seule erreur.

  • Speaker #1

    Une seule,

  • Speaker #0

    voilà.

  • Speaker #1

    Une seule seulement.

  • Speaker #0

    Abhi, ma première question, c'est, We Talk parle d'échec, de résilience. Quelle est ta définition de l'échec ?

  • Speaker #1

    Alors l'échec, l'échec, en tout cas, c'est ce qui est communément admis, c'est le fait de ne pas réussir l'objectif fixé et du coup de tomber sans figurer. Et c'est aussi un peu la définition que j'ai, c'est de me fixer un objectif, admettons de me dire, je ne sais pas, je vais obtenir tel diplôme et finalement je ne l'ai pas. Donc c'est un échec. Mais après, c'est vrai qu'avec le temps, j'ai nuancé ma vision de l'échec. Aujourd'hui, je suis vraiment partisane de me dire que les échecs sont nécessaires pour grandir, pour avancer. Sans échec, je ne me remets pas en question. Sans échec, je ne change pas forcément ma façon de faire. qui peut être plus ou moins adapté en fonction des périodes, en fonction de la saison. Donc l'échec, oui, c'est de ne pas réussir ce qu'on s'était fixé comme objectif. Mais au final, c'est quelque chose de nécessaire pour avancer. Et en tant qu'athlète, l'échec, surtout dans mon sport, que l'on pense être un sport d'adresse, le basket est un sport d'échec. Dans le sens où on a plus de chances de rater quand on prend un tir que de marquer. Les statistiques le prouvent. Très peu de gens, au final, finissent des saisons à plus de 50% de réussite. Donc voilà, l'échec fait partie de mon sport, fait partie de ma vie au final. Et même si ce n'est pas facile, tous les jours de l'accepter, c'est un vrai travail d'accepter l'échec.

  • Speaker #0

    Justement, pour toi, quel est le plus grand échec que tu aies vécu et qu'est-ce que ça t'a enseigné ? Est-ce que tu peux partager ça avec nous ?

  • Speaker #1

    Alors, le plus grand échec de ces dernières années, clairement, je dirais mon passage à l'étranger, mon premier passage à l'étranger. En 2021, je suis championne de France avec le club de Basketland. On va dire que je suis à mon apogée d'un point de vue individuel mais aussi collectif. Je joue dans une merveilleuse équipe, dans un club qui m'a fait confiance, dans lequel j'ai signé à l'âge de 24 ans, je crois, 23-24 ans. Donc vraiment pour me donner un nouveau défi, pour continuer à monter en compétences. Et donc on finit championne de France deux ans après mon arrivée dans ce club, et c'est le premier titre du club. Et à ce moment-là, j'avais prévu de rester dans ce club. Je me sentais bien. J'avais déjà donné mon accord de principe. Et quelques semaines plus tard, je reçois une offre, donc celle de Sopron, qui était à l'époque un des plus gros clubs européens. Et moi, je vois ça comme un signe. Je me dis impossible de refuser. Je ne sais pas si j'aurai de nouveau cette occasion-là. Donc, j'accepte. Surtout que Sopron, c'était quand même un club qui me tenait à cœur. C'est le premier club d'Euroleague que j'ai vu jouer. C'est le premier club contre qui j'ai joué aussi en Euroleague. Donc, il y avait une symbolique. Et je me suis dit, ça sera mon premier club à l'étranger aussi. Et malheureusement, ça a été la désillusion totale. J'ai finalement coupé mon contrat après 7-8 mois, il me semble, la veille de mon anniversaire. Et j'ai fini la saison en Italie. Donc, ce fut un échec, mais il m'a beaucoup, beaucoup appris sur moi, sur ma capacité à être résiliente.

  • Speaker #0

    Mais sans vous en couper, mais qu'est-ce qui s'est passé ?

  • Speaker #1

    Alors ce qui s'est passé, c'est que je suis arrivée là-bas avec plein d'espoir, plein d'illusions, prête quand même. Je me suis beaucoup préparée l'été, mais je n'ai pas trouvé un environnement favorable. J'irais même hostile à certains égards. Dans quel sens ? Dans quel sens ? Je n'ai pas de confirmation, mais en tout cas, j'ai senti des ralentes de racisme en fait. C'est un peu ce que j'ai ressenti, beaucoup de rejet. J'ai ressenti du rejet que je ne saurais expliquer aujourd'hui si ce n'est... par ça. Surtout que j'ai eu quelques discussions après avec quelques-unes de mes coéquipières dans l'équipe. Mais j'ai senti vraiment une forme d'hostilité à mon égard. Et je pensais rencontrer ceux-là en dehors de ma structure sportive et c'est à l'intérieur que je l'ai un peu rencontré.

  • Speaker #0

    Ce club, il est en France ou il est... Non,

  • Speaker #1

    il est à l'étranger en Hongrie. La Hongrie qui est un pays réputé pour son nationalisme avec leur président Orban. Mais voilà, je me suis dit, bon, je ne suis pas la première, je peux y aller. Mais c'est vrai que j'ai... pas eu une bonne expérience de ce point de vue-là. D'autres aussi, d'ailleurs, je ne l'ai appris pas à la suite. Donc, voilà. J'ai pris la décision de partir parce que moi, par contre, s'il y a bien une chose sur laquelle je ne badine pas, c'est le respect.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    C'est-à-dire que moi, à partir du moment où la notion de respect est brisée entre nous, je pars. Je te le signale, mais je pars. Je ne peux pas accepter l'inacceptable. Et pour moi, ça, c'est vraiment la limite. Donc, j'ai décidé de partir. donc c'est pas forcément une bonne décision sportive parce qu'en plus ce club là gagne le Roli quelques mois après donc il y a la compétition en Europe mais j'ai aucun regret parce que je sais pourquoi je suis partie à ce moment là aujourd'hui je pourrais me dire oui j'aurais pu mais avec Dessy on refait le monde donc je finis ma saison en Italie je retrouve aussi le goût du basket j'ai la chance de rencontrer une coéquipière de l'équipe de France à ce moment là dans ce club Et donc vraiment, je me refais une santé mentale, on va dire, parce que ça a été vraiment très, très éprouvant. Et puis voilà, et malheureusement, je me fais aussi le ligament croisé quelques mois après cette échec. Ah oui, c'était un machinement. Voilà, donc ça a vraiment été une saison 2021-2022 très compliquée pour moi. Je pense que c'est le plus gros échec de ma vie. Jeune carrière.

  • Speaker #0

    Et comment on fait pour rebondir ? Comment tu te sens ? Est-ce que tu te dis que tu vas pouvoir remonter à un haut niveau ? Ça se passe comment dans ta tête ?

  • Speaker #1

    Alors, je passe par plusieurs étapes. Je me blesse. C'est l'effondrement total. Mais très rapidement, je rebondis. C'est-à-dire, je pense, peut-être 48 heures après, je me dis, OK, quel est le plan maintenant ? On pleure, on se lamente, mais maintenant, on to the next. Donc, je passe à autre chose. Je fais mon petit... planche, je calme au rendez-vous avec le chirurgien, je me fais opérer 15 jours après, donc de manière très expresse au final, et j'entame une rééducation. Sauf qu'il faut savoir, c'est qu'après cette première opération, je me refais opérer de nouveau 9 mois après, donc quasiment à la fin de la rééduc. Et là, c'est un peu le coup de grâce parce que j'avais signé à ce moment-là avec un club en France, pour deux saisons, et donc, ils ont accepté ma blessure, tout le monde l'a accepté, mais on se dit à ce moment-là que je rate une saison et que je reprends pour la seconde. Et au final, je ne joue que 3 mois sur... 24 mois d'engagement. Donc je reprends 18 mois plus tard, après ma première opération. Et donc 18 mois, il faut savoir que c'est énorme. C'est-à-dire que moi, en carrière, j'ai rencontré, je crois, aucun athlète que je connais dans mon entourage, en cas pas une basketteuse qui s'arrêtait autant. C'est particulièrement long. Et donc j'ai eu le temps aussi de beaucoup cogiter. J'ai eu le temps de me poser la question de si je voulais continuer au pal-basket. Qu'est-ce que je voulais faire ? Est-ce que ça en valait encore la peine ? J'ai éprouvé aussi beaucoup de dégoût à l'égard du milieu du basket. Parce qu'en fait, quand on est un athlète, on a de la valeur sur le terrain. Et une fois qu'on n'est plus sur le terrain, on perd en valeur, on perd en considération. Et donc, j'ai vu mon statut passer de potentielle joueuse de l'équipe de France à oublier, on parle de toi au passé, tu n'existes plus. Et donc, moi, la chance que j'ai aussi à ce moment-là, c'est de ne pas être quelqu'un qui s'attache beaucoup à cette image, mais ça pique quand même. Donc, j'ai quand même su, en parallèle de cette blessure, me construire, donc ma carrière, ma future carrière professionnelle, en tout cas, de réfléchir sur ma reconversion pro.

  • Speaker #0

    Tu as quel âge quand tu penses déjà à ta reconversion ?

  • Speaker #1

    Alors, je me suis blessée, j'avais 27 ans, mais on va dire que j'y pense depuis le début de ma carrière. J'ai toujours eu dans un coin de ma tête que le basket était éphémère et qu'il fallait préparer l'après. Donc ça m'a vraiment permis cette blessure aussi de me reconnecter à moi, de savoir ce que je voulais, où je voulais aller. Donc je dirais pas que ça a été un mal pour un bien, je ne recommencerai pas honnêtement. Mais je pense que j'ai su capitaliser sur ce temps-là pour ne pas perdre doublement mon temps, en fait.

  • Speaker #0

    Ok, d'accord. Et tu dirais aujourd'hui que, en quoi cette année 2020-2021, cette saison, a été déterminante pour ta vie, pour l'orientation de ta vie ? Est-ce que tu peux tirer comme bénéfice aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Elle a été très déterminante cette année. ce n'a pas été que sur cette saison malheureusement on va dire que de 2021 jusqu'à le début 2024, ça a quand même été assez compliqué. Parce qu'il faut savoir, on se blesse, 18 mois, mais ensuite il faut reprendre. Donc quand on reprend, qu'est-ce qui se passe ? On n'est pas en forme. Le basket, ce n'est plus aussi facile que quand on l'a quitté. Donc c'est une période qui a duré trois ans en fait. Qui a vraiment duré trois ans de flou, trois ans de vide un peu. Et là vraiment, Dieu merci, cette saison, j'ai pu rejouer, me relancer. et donc... C'est vraiment ça que je me dis, c'est que le plus dur est passé, mais maintenant, il faut continuer à construire.

  • Speaker #0

    Dans cet état-là, quand tu tombes, quand tu as été au plus bas, il y a eu la phase où tu n'étais pas bien, où tu as pleuré, la phase 2 et tout ça. Et puis, il y a eu la phase de, ok, qu'est-ce qu'on en fait ? Comment est-ce qu'on relève ? Mais tu penses que ça vient du basket ou c'est un état d'esprit que tu as toujours eu au final ?

  • Speaker #1

    J'aime quand même grandement le basket. Le basket m'a façonnée, j'en parle encore ce midi avec une amie. Je suis sportive de haut niveau depuis mes 13 ans, j'en ai 30. Donc ça fait 17 ans en fait que je suis poussée dans mes retranchements, 17 ans qu'il faut se relever, tomber, se relever. Donc c'est vraiment un état d'esprit, c'est devenu une seconde nature. C'est pas plaisant de tomber, mais à chaque fois que je tombe, je sais au fond de moi que je vais pouvoir me relever. Je sais que je vais pouvoir trouver les ressources pour le faire. Ça va pas être facile, hein, mais il y a toujours cette lueur d'espoir, parce que j'ai l'habitude de tomber. C'est le propre de l'athlète, c'est pas que... Les médailles, tout ça, c'est vraiment le quotidien, la remise en question, tous les matchs, tout le temps. C'est un éternel recommencement.

  • Speaker #0

    Justement, tu as décidé de faire du basket une caractère. pour métier, métier passion. Là où beaucoup de gens, dans le sport, basket, de foot, on dit souvent qu'il y a beaucoup d'appelés et très très peu d'élus. Est-ce que tu n'as pas eu peur de te lancer dans une carrière sportive, professionnelle ? Je vais peut-être commencer par cette question. Qu'est-ce qui t'a poussé et quel a été le déclic ? D'abord, voilà. Sinon, tu vas te dire, c'était quoi la troisième question ? Et j'ai rien que moi à dire. Non, je ne me souviens plus. C'est ça, je te laisse répondre.

  • Speaker #1

    mais Non, je n'ai pas eu peur parce qu'en fait, il faut savoir une chose, c'est que moi, quand j'ai commencé le basket, je n'imaginais pas une seconde devenir pro. Ce n'était pas quelque chose d'imaginable pour moi. Je n'avais pas de référence dans mon entourage. Donc moi, je commence le basket à l'âge de 12 ans pour prendre une énième licence sportive. J'aime le sport. Chaque année, pour moi, j'attends juste le magazine de la ville de Créteil pour regarder dans quel club je vais m'inscrire. Un an plus tard, je rentre en sport études. Donc là, ça commence à devenir un peu plus sérieux. On parle d'entraînement quotidien, de représenter la région Île-de-France sur des compétitions nationales. Je deviens multiple championne de France à cet âge-là, mais c'est encore insignifiant pour moi. Et c'est vraiment en rentrant à l'INSEP, deux ans après avoir commencé le basket, que là je réalise qu'il y a quelque chose qui est en train de se jouer. Je côtoie au quotidien des Ladis du Couré, des Christine Aron, des Teddy Riner, les plus grands athlètes français dans le temple du sport français. Et je me dis OK. Là maintenant, en fait, ça devient réel. On peut devenir athlète de haut niveau, on peut vivre, en faire un métier. Et j'assiste aussi à mes premiers matchs professionnels. Je vois des joueuses au plus haut niveau français. Et là, je me dis, OK, à 15-16 ans, je deviendrai pro. Mais à aucun moment à ce moment-là, je me dis que ce n'est pas possible. J'étais sûre que je deviendrais pro. Pour ta famille,

  • Speaker #0

    tes parents ? Ils sont tous ok,

  • Speaker #1

    ils t'encouragent Ils m'encouragent dès mes 13 ans en transport et études Je pars de chez mes parents à l'âge de 13 ans Je rentre que le week-end Depuis 13 ans je suis partie de la maison mes parents l'ont compris, ils m'ont beaucoup soutenu aussi Une fois que je rentre dans le moule de l'INSEP pour moi il n'y a pas d'autres issues C'est plus une question Est-ce que je deviens pro, est-ce que je ne deviens pas pro C'est la suite logique Pendant 3 ans je fais mon cursus à l'INSEP Mon objectif c'est à 18 ans de signer mon premier contrat pro Et c'est ce qui arrive. Et donc, petit à petit, je suis prise dans le moule aussi, parce qu'on a un peu formaté pour, en rentrant INSEP. Et voilà, ça fait 12 ans que ça dure maintenant, et c'est devenu mon métier.

  • Speaker #0

    En tout cas, bravo. Il y a une figure féminine qui t'a quand même inspirée, qui t'a donné envie de continuer,

  • Speaker #1

    d'avancer ? Donner envie de devenir pro à 15 ans, non. C'était juste l'environnement. Mais après, petit à petit, il y a des choses qui m'ont beaucoup inspirée. notamment une qui est Lauren Jackson c'est une joueuse australienne que j'ai pu voir à l'âge de 17-18 ans jouer en vrai et elle m'avait impressionnée elle était très grande, elle savait tout faire sur le terrain, elle dominait vraiment c'était un modèle elle m'a vraiment vraiment impressionnée et d'ailleurs quand je me suis fait le croiser c'était l'année du mondial et donc j'avais mon ancienne assistante coach qui lui a demandé de faire un carton, un petit signature un mot quoi Donc, elle m'a fait parvenir après la carte. J'ai eu le plaisir de lire ça. Et ça m'a fait plaisir. Après, bien sûr, je n'étais plus fan à ce moment-là. C'était à trois ans. Mais ça m'a fait plaisir. Voilà, cette marque de respect et d'encouragement de la part d'une si grande joueuse de basket.

  • Speaker #0

    Le sport de haut niveau, ça implique, comme tu l'as dit, des blessures.

  • Speaker #1

    C'est ça.

  • Speaker #0

    En tant que femme, quel est ton rapport à ton corps, à ta féminité ? Avec tout ce que tu as pu... que tu as pu faire endurer à ton corps à travers ce sport. Est-ce que ça a entamé ta confiance en toi ? Est-ce qu'au contraire, ça a renforcé ta confiance en toi et ton rapport à ta féminité ?

  • Speaker #1

    Clairement, le basket a renforcé ma confiance en moi. Ça, c'est sûr et certain. Parce que, comme tu peux le voir, j'ai un physique qui dénote. Je mesure 1,95 m.

  • Speaker #0

    Ouais, de bisfrance. Tu fais 1m95, tu pourrais être Miss France. Oui,

  • Speaker #1

    parfois on me dit, il n'y a pas longtemps, vous êtes mannequin. Je dis non, je suis basketteuse. Ça m'a réellement donné confiance en moi parce que j'ai trouvé un milieu qui a valorisé mon physique. Et dans lequel je me suis valorisée moi-même. Donc au contraire. Après, la chance que j'ai grâce au sport, c'est de me voir bien au-delà de mon physique aussi. Je ne sais pas comment le dire. de ce qu'on attend en tout cas d'une femme dans la société, de son image, de ce qu'elle représente. J'arrive à me voir de manière assez globale. Donc je pense que ça me met dans mon rapport à la féminité, parce que ça m'a montré qu'on peut être féminine de différentes manières. Dans une équipe de basket, on voit tout type de femmes, vraiment de la fille la plus girly au tomboy. Donc ça permet de se dire, ok, il y a plusieurs façons d'être une femme. Il n'y a pas qu'une seule, il n'y a pas qu'un moule. Et je trouve que c'est bien. On peut se façonner son identité en fonction de sa personnalité. Et on n'est pas jugé par rapport à ça, en tout cas dans le monde du sport. On est jugé par rapport à ses performances ou autre. Mais du coup, tout ce qui est rapport... En fait, un peu tous les dictages qu'on retrouve dans la société, en tout cas moi dans le basket, je ne les retrouve pas nécessairement. Et ça enlève un poids, je pense.

  • Speaker #0

    Donc, grâce à ça, finalement, ton rapport à ta féminité a été plutôt... Tu t'es sentie plus femme, du coup ?

  • Speaker #1

    Oui, en tout cas, j'ai défini ma version de la féminité. Je n'ai pas attendu que la société me dise à quoi je dois ressembler. Par exemple, quand on parle de la dépigmentation de la peau, du colorisme, moi, ce n'est clairement pas un sujet pour moi. J'ai l'incarnation de peau foncée. Je ne peux même pas parler de fierté. Je suis née comme ça. Ce n'est pas un acquis. Donc, je suis très bien avec. Je pense que le sport m'a aidée à m'accepter telle que j'étais.

  • Speaker #0

    À l'école, tu es née à Vitry-sur-Seine.

  • Speaker #1

    Je suis née à Vitry, mais j'ai grandi à Créteil.

  • Speaker #0

    À Créteil, d'accord. Est-ce qu'à l'école, on ne te faisait pas ressentir que tu étais trop différente du coup ? Tu étais beaucoup plus grande que les autres.

  • Speaker #1

    Clairement.

  • Speaker #0

    Et comment tu vivais cette différence ?

  • Speaker #1

    Clairement, à l'école, j'étais trop grande, trop grosse, trop noire. J'étais trop tout. Je dénotais, encore une fois, physiquement. Et c'est pour ça que le sport m'a vraiment aidée à prendre confiance en moi. À 12 ans, lorsque je commence le basket, c'est comme une forme de renaissance. Dans ma vie, je situe ma vie avant-après basket. J'ai une vie avant le basket, une autre vie après le basket. Donc quand je commence le basket, je suis vraiment valorisée parce que je mesure 1m82 à l'époque. Les gens sont enthousiastes de me voir entrer dans le gymnase. mais qu'est-ce qu'on va en faire de cette fille ? C'est pépi, tu vois ? Donc, non, vraiment, ça, ça a été une grâce pour moi que de commencer le basket. D'accord,

  • Speaker #0

    ok. En tout cas,

  • Speaker #1

    j'imagine,

  • Speaker #0

    à l'école, on te voyait comme, oh, la fille est trop grande. Et là, tout à coup, dans le basket, c'est comme, oh, c'est génial,

  • Speaker #1

    elle est larmiale.

  • Speaker #0

    Comme quoi, en fait, ce qui peut être notre différence, parfois, c'est juste qu'on n'est peut-être pas au bon endroit.

  • Speaker #1

    Exactement.

  • Speaker #0

    Et là où les gens, pour eux, ils ont une autre norme, Bah... Nous, on peut être la norme ailleurs. Donc au final, c'est un message un peu à toutes les personnes qui se sentent trop ou pas assez. C'est peut-être changer juste d'environnement.

  • Speaker #1

    Trouver l'environnement dans lequel vous serez valorisé, dans lequel on vous acceptera tel que vous êtes. Après, je ne dis pas que parfois, il ne faut pas se remettre en question. Ce n'est pas que ça aussi. Parce que parfois, on peut se cacher derrière ça. Mais de manière générale, on a tous des qualités à faire valoir. Et parfois, on n'est juste pas au bon endroit au bon moment. Pour reprendre l'exemple de tout à l'heure du basket. Je ne suis pas devenue nulle d'une saison à l'autre. C'est-à-dire que j'ai été dans un environnement qui m'a valorisée, avec une coach qui me connaissait, qui savait me faire jouer, avec des coéquipières qui m'appréciaient. Un an plus tard, je deviens une autre joueuse. Non pas parce que je suis moins bonne, mais parce que je ne suis pas dans un environnement qui me met en avant, qui me valorise. Et donc c'est ce que je dis aussi aux jeunes joueurs, trouvez des projets dans lesquels vous serez valorisés, dans lesquels les coachs reconnaissent vos compétences et les utilisent correctement, tout simplement. Mais ce n'est pas tout le temps se dire que je ne suis pas bon, je ne suis pas si. Non, trouver les environnements qui vous valorisent.

  • Speaker #0

    En disant ça, si tu fais écho, moi, je suis chargée RH à temps plein, entre 9 et 17. Et je dis souvent, parfois de temps en temps, je prends la parole sur LinkedIn sur ce sujet.

  • Speaker #1

    Je dis,

  • Speaker #0

    il faut choisir les entreprises qui correspondent aussi à nos valeurs. C'est bien de chercher un travail. Parfois, les gens se disent, ah mais tiens, on ne m'a pas recruté, etc. Mais est-ce qu'au moment où tu postules, est-ce que les valeurs que tu vois correspondent à ce qui tu es ? C'est hyper important.

  • Speaker #1

    C'est très important.

  • Speaker #0

    Parce qu'il suffit qu'on soit dans la bonne entreprise ou dans la bonne équipe, dans le bon environnement par rapport au basket, on peut être très bon, mais ne pas du tout performer si on est mal encouré.

  • Speaker #1

    Clairement. Et ça, c'est une leçon que j'ai aussi apprise. Avant cette expérience-là, je ne pense pas que j'avais ces exigences-là. Je sais que là, j'ai signé dans un club. Mais avant de signer, de m'engager, j'ai demandé à parler avec le coach très longuement. J'ai préparé une liste de questions, mais pas qu'en rapport avec le salaire ou la position dans l'équipe, mais par rapport à ses valeurs, sa vision du basket, sa philosophie du jeu. Parce qu'en fait, c'est des choses qui, au final, m'impactent tellement et qui vont tellement impacter mes performances que je ne peux pas les minimiser dans les discussions et après dans ma prise de décision. C'est pour ça qu'il faut se connaître aussi. Il faut vraiment se connaître. et connaître l'environnement dans lequel on veut évoluer pour voir si ça match, tout simplement.

  • Speaker #0

    C'est de beaux conseils.

  • Speaker #1

    J'aurais aimé les avoir avec quelques amis.

  • Speaker #0

    C'est pour ça que maintenant, tu les donnes à d'autres.

  • Speaker #1

    Je les donne à d'autres, volontiers.

  • Speaker #0

    Là, on va passer à la partie True Talk. Et dans cette partie, je dis qu'on ne se fait pas tout seul. Sur notre chemin, on rencontre des personnes qui sont des détracteurs. Elles nous poussent dans nos retranchements, ne croient tellement pas en nous que c'est nous qui sommes fautifs. Et ces personnes, oui, nous posent nos retranchements, mais surtout, finalement, nous poussent à... nous déployer différemment. C'est l'adversité. Il y a la rencontre fortuite. Elle ne se rend pas compte, mais elle dit quelque chose, une phrase, un projet, un conseil, et ça change un petit peu le cours de notre vie. Et puis, il y a la personne de Providence, elle croit en nous, même quand nous-mêmes, on ne croit pas en nous. Elle nous ouvre la porte sans rien attendre. Alors, dis-moi, Abby, quelle est la pire situation dans laquelle un détracteur t'amise ? Peut-être que c'est pas...

  • Speaker #1

    L'histoire avec le club de basket. Oui, ça peut être une autre aussi. Je réfléchis un peu. Qu'une personne aurait provoqué la situation. Oui,

  • Speaker #0

    ou même une situation. Tu sais, parfois, on ne se rend pas compte qu'il y a certains invités qui me disent que mon premier détracteur, c'est moi-même.

  • Speaker #1

    Moi, j'ai une histoire qui me revient en tête. Vraiment, de jeunesse, j'avais 15 ans. Et à l'époque, j'étais en internat. J'étais en internat et il y avait la personne qui était en charge de l'internat qui, je ne sais pas, bon après avec du recul, je peux peut-être le comprendre un peu, mais qui avait vraiment du mal avec moi. Et elle avait convaincu les autres filles que j'étais une sorte de gourou. Et en fait, avec du recul, c'est vraiment une histoire absurde, mais avec du recul, je pense qu'à l'époque, j'avais déjà une forme de leadership et d'affirmation de soi qui pouvait déranger. dans le sens où Je prenais de la place, certainement, dans le groupe. J'imposais aussi mes idées. Et ce n'était pas très bien vu. Et ça, je sais que ça m'a vraiment peinée à l'époque. J'avais à peine 15 ans. Mais surtout, ça a très probablement modifié après certains de mes caractères que j'avais naturellement. Ça m'a pris l'initiative, le leadership. Et durant quelques années, je pense que je l'ai un peu inhibée. Parce que je voyais ça, du coup, comme étant quelque chose de négatif. On me reprochait beaucoup à l'époque. de me mêler de ce que je ne me regardais pas, c'est-à-dire de prendre position, de défendre les gens, m'appeler l'avocat du diable. Et ça, c'est des injonctions qu'on a posées sur moi à cet âge-là qui, je sais, peuvent vraiment freiner. Et je pense que si je n'avais pas eu, après, derrière, cette carrière dans le basket, la création de cette association, etc., j'aurais pu vouloir me faire petite, du coup, pour ne pas trop éblouir, ou bien trop cacher les autres, ou bien trop en faire. Quand je pense que c'est vraiment dans ma nature profonde que de vouloir... éclairer les gens, je pense, de guider ceux qui sont un petit peu perdus, mais surtout de tendre la main et d'aider. Parce que moi, je respecte particulièrement les personnes qui le font, et je pense qu'à l'époque, je le faisais peut-être maladroitement aussi, je ne pense pas que j'étais irréprochable, mais il y avait ce truc de... Je prenais la place dans un groupe et que j'aimais guider les gens, en fait. Et ça, ça a pu déranger parce que parfois, quand on est un peu en contradiction avec les adultes en face de nous, on peut être pointé du doigt.

  • Speaker #0

    Et comment tu... Comment tu as réussi finalement à te construire avec ça ? Oui, je sais qu'il y a eu le basket. Heureusement, il y a eu le basket. Mais il n'y aurait pas eu le basket. Avec Dessy, on refait le monde. Comment ça aurait pu switcher ? Comment tu aurais pu dépasser ça, en fait ?

  • Speaker #1

    Honnêtement, je ne sais pas. C'est marrant, j'avais vraiment cette discussion-là avec mon ami ce midi sur comment le basket nous a éduqués. Moi, le basket m'a donné un vrai cadre de vie. Non pas que je n'ai pas reçu une bonne éducation, mais... Le sport m'a appris la discipline, le dépassement, la résilience. Donc je ne sais pas comment j'aurais été sans le basket. Je sais que j'étais déjà studieuse, plus jeune, donc peut-être que je me serais sûrement concentrée dans les études. Mais le sport m'a apporté autre chose que le simple fait d'être une femme studieuse. Ça m'a apporté une estime de moi, ça m'a apporté une force de caractère. Voilà, vraiment le fait de pouvoir m'asseoir en face de toi, de discuter assez librement. Prendre place, prendre position. Ça, je pense que je l'avais aussi un peu en moi. Mais le basket l'a vraiment révélé. Révélé, quoi. D'accord. Accentué.

  • Speaker #0

    Ta rencontre fortuite. Peut-être que tu en as conscience. Peut-être que cette personne est dans ta vie ou n'est plus dans ta vie. Je ne sais pas, une situation. Mais quelque chose d'apparence anodine t'a pourtant marquée et a changé, entre guillemets, le cours de ta vie. Ouais.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que je peux citer ? Ah oui, Maria Lamont.

  • Speaker #0

    Marie-Alain Laman, c'est une grande sœur pour moi. C'est une ancienne joueuse de basket, qui s'appelle Marielle. C'est une femme que j'ai rencontrée grâce au basket. On était toutes les deux convoquées en équipe de France. Très peu de temps avant que je signe dans le même club qu'elle. Et c'est vraiment devenu une sœur, une grande sœur. Celle que je n'ai pas eue, puisque moi je suis l'aînée de ma famille. Et elle a vraiment fait office de guide durant toute ma vingtaine. La vingtaine pour moi aujourd'hui avec du recul, c'est vraiment la période où on fait toutes les bêtises du monde. où l'on apprend énormément de choses, mais à chaque chute, elle a su être là, me donner les bons mots, et avec une telle justesse, vraiment, c'est vraiment une qualité remarquable qu'elle a, et je dirais que vraiment cette rencontre, je ne sais pas si elle a changé le cours de ma vie, mais en tout cas, elle l'a bien influencée.

  • Speaker #1

    D'accord, on lui dit merci du coup.

  • Speaker #0

    Ah bah merci Marie, je lui dis tout le temps.

  • Speaker #1

    Et la personne Providence, c'est celle qui croit en toi, même parfois quand toi-même tu doutes de toi. Ouais. et Elle t'a ouvert la porte à un moment où personne d'autre ne l'aurait fait. Et ça a changé tout.

  • Speaker #0

    J'ai peur de ne pas citer la bonne personne et d'oublier. Mais là,

  • Speaker #1

    attention, parce que si je ne cite pas la bonne personne, après,

  • Speaker #0

    il va écouter ou elle va écouter l'épisode.

  • Speaker #1

    Elle va t'en vouloir.

  • Speaker #0

    Alors, la personne qui a cru en moi, j'irais Francis Crespin. C'est... un de mes tout premiers coachs de basket. C'est un coach qui m'a appris à faire le lay-up, le move basique au basket. Je me souviens, comme c'était hier, j'avais 12 ans. Mais c'est un homme avec qui je suis encore en contact. On était encore au téléphone avant-hier. Il fait office de mentor dans ma vie. Plusieurs fois, je l'ai appelé quand c'était très compliqué au basket. Ça a pu être à 18 ans, comme ça a pu l'être dernièrement, 12 ans plus tard. Et il a... toujours eu pareil, les bons mots, toujours eu ce soutien indéfectible. Il croit en moi puisque je ne crois en moi. Vraiment, la façon qu'il a de me coacher, les conseils de ce qu'il dit de moi, je sens vraiment quelqu'un qui a toujours cru en moi, qui m'a toujours repoussée et qui a surtout de manière très avant-gardiste, j'irais, parce que maintenant, on replace beaucoup l'humain dans la performance, mais parler justement de l'humain, de l'importance du bien-être pour performer. Moi, il m'en parlait déjà quand j'avais à peine 20 ans. donc il y a déjà plus de dix ans. Et ça me parlait, ça faisait écho en moi, parce que j'ai toujours moi compris aussi que je n'étais pas une personne qui était tournée uniquement vers la performance sportive. J'avais besoin d'un bien-être global, j'avais besoin de me sentir bien émotionnellement, j'avais besoin de faire d'autres choses en dehors du basket. Et ça, beaucoup de gens ne l'ont pas compris. On m'a souvent dit que je me dispersais, parce que j'ai continué mes études, parce que j'ai fondé une asso, et que du coup, je n'étais pas suffisamment concentrée au basket. Et lui, en revanche, il m'a toujours encouragée à cultiver autre chose à côté de ma carrière. Et c'est vraiment le conseil number one que je donne à tout jeune athlète que je rencontre. De toujours cultiver son jardin secret à côté de sa carrière. Parce que le danger, quand on se voit uniquement à travers une casquette, c'est de se définir en fait par cette casquette-là. Et ça veut dire quoi ? Que quand on performe, on se pense être la meilleure du monde, donc avoir tendance à être hautain. Et en revanche, quand on ne performe pas, de se dévaloriser, de se dénigrer, de se penser vraiment nul. Et donc, ça, c'est vraiment quelque chose dans lequel je ne voulais pas tomber, ce piège-là, de me définir uniquement à travers ma casquette de basketteuse. Et lui, c'est aussi quelque chose qu'il m'a partagé très tôt dans ma carrière. Donc vraiment, je le donnerais lui en premier exemple, même s'il y en a eu d'autres. Mais il a fait office de mentor et vraiment, je le remercie pour l'impact qu'il a eu dans ma vie.

  • Speaker #1

    Ah oui, non, mais ce qu'il t'a dit, c'est... Moi aussi, je lui dis merci parce que c'est incroyable. J'allais dire, mais à la fois, le sport peut t'encenser et te porter au nu. Mais en même temps, et donc cultiver la confiance, etc. Mais en même temps, comme c'est une activité très exigeante, quand on échoue, il faut pouvoir se... motivée déjà personnellement et se dire mais relève-toi, tu n'es pas si nulle.

  • Speaker #0

    C'est ça. Surtout, tu n'es pas que ça. C'est puissant. Moi, c'est ça qui m'a aidée avec la blessure. Parce qu'en fait, si on se voit qu'à travers cette casquette, si je me dis ok, je ne suis que basketteuse, le jour où il n'y a plus de basket, qu'est-ce que je deviens ? En fait. Et c'est toute la remise en question que j'ai dû effectuer durant ma longue blessure. Ça a été vraiment une très longue traversée du désert. Moi, je me souviens, les premiers jours... J'étais là à déambuler dans mon quartier. à Orly. Et je me suis dit, mais qu'est-ce que je fais là ? Je n'avais jamais été, en tant qu'adulte, je n'avais jamais vécu sur Paris, en fait. Moi, je connaissais Paris que le week-end, chez mes parents, dans un cadre bien précis. Mais là, de prendre ma voiture, de sortir, d'aller faire les courses, de ne pas être avec des sportifs, c'était très, très déroutant pour moi. Donc, pendant deux mois, il y a vraiment eu cette perte d'identité et cette reconstruction nécessaire à faire. Petit à petit, j'ai commencé à sortir, à rencontrer d'autres personnes. Et j'avais même du mal à... terme à me définir comme une basketteuse parce que je ne pratiquais plus et je ne savais plus qui j'étais. Et vraiment, je te parle de ça, mais ça fait que depuis quelques mois seulement que j'ai su reconnecter avec mon identité et comprendre la femme que j'étais dans son entière essence, tu vois. Mais j'avais perdu totalement la notion de mon identité. Je ne savais plus qui j'étais. Je ne me présentais plus comme étant basketteuse parce que ça faisait plus d'un an que je ne jouais plus. En même temps, je fais des études, mais je ne suis pas encore diplômée, donc je ne peux pas me qualifier sous le titre. Donc c'était compliqué. Qui suis-je ? Qui suis-je ? Et donc, c'est vraiment important de... C'est aussi pour ça que je préconise de ne pas se définir uniquement à travers sa casquette professionnelle. Parce qu'on est bien plus que ça.

  • Speaker #1

    D'accord. Même si tu t'es présentée au début, je vais donc te répondre à la question.

  • Speaker #0

    Qui es-tu ? Qui je suis ? Aujourd'hui, moi, je me définis avant tout comme une femme engagée. D'accord. Voilà, je pense que c'est la casquette que j'aime bien porter. Une femme engagée qui a envie de faire changer les choses. Et ça, quand je le dis, ça me ramène à la jeune que j'étais. À 9 ans ? À 9 ans, vraiment. J'ai toujours été engagée. Je me souviens, en CP, je me suis présentée pour être déléguée. Le premier échec de ma vie, trois votes, dont un qui était le mien. Je me représente, tu vois, quelques années plus tard, je deviens déléguée. Pour moi, c'est aussi une forme de succès. Je suis heureuse. un de mes premiers gros succès. Quelques années plus tard, je deviens conseillère municipale. Mais en fait, tout ça pour dire que j'ai toujours eu à cœur de défendre, de porter la voix, de s'envoier, de changer les choses, de dire les trois questions.

  • Speaker #1

    L'enfant que tu étais, qui n'avait reçu que trois voix, à ce moment-là, qu'est-ce qu'elle se dit ?

  • Speaker #0

    Aïe, aïe, aïe, ça m'a fait mal. Moi, je me souviens, tu vois, je t'en parle, j'étais en CP. Oui,

  • Speaker #1

    parce que... La manière avec laquelle on vit l'échec quand on est tout petit, comment tu... Alors, si tu devais comparer entre les deux,

  • Speaker #0

    entre avant,

  • Speaker #1

    quand tu étais petite, et maintenant, en tout cas avec la blessure de 3 ans, qu'est-ce qui a été le plus dur ?

  • Speaker #0

    La blessure de 3 ans, je pense, parce que...

  • Speaker #1

    Psychologiquement,

  • Speaker #0

    je pense à la blessure de 3 ans, parce que vraiment, l'échec du CP, ça m'a vraiment marquée sur le coup, mais honnêtement, je ne sais pas l'impact que ça a eu en moi. Je sais juste que je me suis dit, waouh, je ne suis pas populaire. Je pense que je vais venir. Voilà, c'est tout.

  • Speaker #1

    Tu n'as pas eu honte ?

  • Speaker #0

    Ah, je me suis dit, quand même, j'ai... Pas d'amis, tu vois, à l'époque, c'est ça. Tu n'as pas d'amis, tu vois. D'accord. Et donc, c'est vraiment ce que je me suis dit. Mais bon, en tout cas, je me suis représentée l'année qui a suivi. Ah oui, d'accord.

  • Speaker #1

    Et c'est là que tu es devenue déléguée.

  • Speaker #0

    Je crois que c'était l'année d'avant, cette année-là ou celle d'après. Mais en tout cas, ça ne m'a pas découragée. D'accord. Je me suis représentée.

  • Speaker #1

    Comme quoi ? Tu vois, le parallèle, c'est quand on est petit, on en casse le cou, mais on rebondit. Il n'y a pas de souci. Et pourtant, quand on est adulte, on rumine.

  • Speaker #0

    On tente d'antisme.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça. Comme si la vie s'arrêtait au moment où on a vécu ce qui est compliqué. Tu as créé tes rangabies. Justement, tu m'as parlé, tu me dis que tu es une femme d'engagement, ce qui est le cas. Est-ce que tu as eu du mal également à te trouver ? Est-ce que tu t'es sentie légitime au moment où tu as commencé à porter ce combat ? Tu as abordé ce que c'est que tes rangabies, ses objectifs, etc. On va répondre ensuite à la deuxième question par rapport à la légitimité.

  • Speaker #0

    Alors, Terran Gabi, c'est une association que j'ai fondée en 2018. La genèse de ce projet, c'est la lutte contre la dépigmentation volontaire de la peau. Donc en fait, moi, j'ai été au Sénégal en 2017, après 15 ans d'absence. Donc j'avais 22 ans à l'époque. Quand j'y retourne, je suis pleine d'illusions. Trop heureuse. Vraiment, j'ai senti que pendant mon adolescence, ça m'avait manqué. qui a eu vraiment un manque dû à cette... identité que j'ai pas pleinement formée au Sénégal. Le fait de ne pas y aller, le fait de ne pas reconnecter avec mes proches, il y a eu une fracture. Quand j'y suis retournée, j'étais vraiment la plus heureuse du monde. Ça a été un choc, je sors de l'avion même, je pleure parce que je ressens cette reconnection. Littéralement, c'est comme si on m'avait arraché du sol et qu'on me replantait chez moi. C'est vraiment ce que j'ai ressenti. Je ressens l'odeur du Sénégal que je n'avais pas senti depuis 15 ans. La reconnexion est totale. Je passe de très bonnes vacances, mais en même temps, j'essuie pas mal de remarques. sur la couleur de ma peau. Ma mère aussi, ma petite sœur, car on a la peau foncée. Je me souviens, une fois, j'étais maquillée, un peu comme là, et quand tu mets un peu de fond de teint, ça te claircit légèrement, ça donne un teint un peu plus orangé. Et j'ai ma tante, je portais un t-shirt noir qui me dit « Ah, ça, c'est pas bon, mais là, comme t'es là, c'est bien. » Habituellement, je suis noire comme mon t-shirt, mais que là, avec le fond de teint, ça passe mieux. Je souris, ça ne m'attend plus trop à cet âge-là, vraiment, les remarques. J'en ai essuyé pas mal dans l'adolescence. Mais le coup de grâce, c'est le jour où j'entends ma petite cousine qui dit à ma soeur, donc elles ont 4 ans et 7 ans, « Je suis plus belle que toi parce que je suis claire de peau. » Cette histoire, je la raconte partout où je vais, parce que c'est vraiment ça qui a été le déclic de ce projet, de l'urgence pour moi que de fonder quelque chose en ce sens. Parce que... Une fille de 4 ans qui a déjà conscientisé les enjeux du colorisme, c'est grave, c'est très très grave. Donc je rentre en France, on m'avait suggéré à l'époque de faire un camp de basket comme j'étais basketeuse pro, et je me dis j'ai pas envie de faire un énième camp sportif. Plein d'athlètes font ça, c'est très bien, mais j'avais pas envie, ça me motivait pas. En revanche, de faire un camp de basket éducatif, ça, ça me motivait. Parce que c'était à mon image, sport et éducation, et que pour moi l'éducation c'est la clé. Donc je me dis ok. L'année d'après, je retournerai au Sénégal, donc en 2018, et je fonderai Terre en Gabi. Donc toute l'année, j'ai réfléchi à ce projet, on m'a connectée, j'ai tout organisé à distance. Et en arrivant, on monte ce premier camp de basket éducatif féminin à Thies, dans la ville de mes parents. Et dans ce camp-là, on fait venir des experts, donc dermato, sages-femmes, psychologues, pour parler des enjeux de la confiance en soi, l'estime de soi, de la dépigmentation de la peau, mais aussi des violences sexuelles et de l'éducation sexuelle avec les jeunes filles. Donc on choisit la période de l'adolescence parce que c'est une période dans laquelle les jeunes filles se construisent. Et donc aussi où il est important de planter les bonnes graines qui vont pouvoir permettre à ces jeunes filles de devenir des femmes confiantes et sûres de leur identité. Parce que le problème, c'est que quand tu as 15 ans, on passe ta vie à te répéter que tu es trop ci, trop ça. Tu nourris des complexes, tu construis même des complexes. tu deviens une femme complexée qui peut potentiellement recourir ensuite à la dépigmentation volontaire de la peau. Et donc nous, l'enjeu, c'était vraiment de casser ce cycle et de planter dans le décor un nouveau discours, un nouveau paradigme pour ces filles-là et de leur dire, écoutez, on peut être noire, belle, réussir, être désirable, tout ce que vous voudrez, et c'est très bien comme ça. L'enjeu, il n'est pas de se dire, je suis plus belle quand je suis foncée ou je suis plus belle quand je suis claire, c'est juste de s'accepter. telle que l'on est. Au Sénégal, on a la chance d'avoir des femmes aussi noires que moi, d'autres plus claires comme toi. Et c'est très bien. C'est ça qui est la diversité aussi de la peau.

  • Speaker #1

    Comme il y a des brunes, des blondes.

  • Speaker #0

    Exactement. Et donc du coup, ça a été vraiment la naissance de ce projet. Et donc ensuite, on a évolué sur un concept plus global, sur la confiance en soi et l'estime de soi. Parce que la dépigmentation de la peau, au final, c'est quoi ? C'est un manque de confiance en soi et d'estime de soi. Oui,

  • Speaker #1

    c'est clairement.

  • Speaker #0

    Voilà. Et donc de là, on a créé tout un programme. Et aujourd'hui, on accompagne des jeunes filles sur toute une année scolaire, sur des temps sport, éducation, pour les sensibiliser à tous ces enjeux, pour leur permettre de se connaître, de développer leurs compétences, leurs appétences et d'avoir un plan de vie à la fin solide pour lancer leur vie de femme. Et ne plus s'arrêter à tous ces dictates, à toutes ces injonctions de la société qui les poussent à se dénaturer et à se détester tout simplement. C'est vraiment ça, Terran Gabi. C'est beau.

  • Speaker #1

    Et si on veut te soutenir, si on veut soutenir Terran Gabi, comment ça se passe ?

  • Speaker #0

    Alors, si on veut me soutenir, donc là, on va lancer prochainement une campagne de parrainage. J'aimerais vraiment qu'on puisse... Parce qu'en fait, là, on va partir sur une année, donc à partir de septembre, donc jusqu'à juin, une année scolaire, où les jeunes filles vont venir deux fois par mois. On va accompagner deux fois plus de filles. Donc, on est passé de 100 à 40. On va accompagner des filles scolarisées et non scolarisées. et le but pour nous c'est vraiment d'avoir des ambassadrices dans toute la ville de Louga. la vie dans laquelle on est présente. Et pour ça, il faut des moyens. Aujourd'hui, nous, on souhaite lancer cette campagne de parrainage pour permettre à chaque fille d'avoir un parrain, une marraine, qui la soutiendrait. L'objectif pour nous, c'est d'avoir 150 parrains qui parraineraient 100 filles. Et donc, ça permettrait largement de pouvoir mettre ce projet en place, même s'il va déjà être lancé, mais pour nous permettre du moins d'avoir une marge. pour pouvoir travailler davantage, pour travailler mieux aussi et mieux les accompagner. Donc, on va lancer cette campagne-là. Donc, ne pas hésiter à nous soutenir. Aussi, nous suivre sur les réseaux sociaux. On a une page Instagram.

  • Speaker #1

    Terrangabi.

  • Speaker #0

    Terrangabi, voilà. Et on a un site Internet. Voilà. Donc, www.terrangabi.org. C'est le site.

  • Speaker #1

    Faites des dons. Voilà.

  • Speaker #0

    Faites des dons, soutenez, partagez. Mais surtout, voilà. Et je cherche aussi des entreprises, partenaires, des institutions qui veulent s'associer à nous. nous prêter main forte, parce que c'est un projet qui a pour ambition quand même de prendre de l'envergure. On est au Sénégal, demain on va être dans la sous-région africaine. Donc voilà, c'est un projet qui ne fait que commencer. Et moi, c'est vraiment aussi pour moi le projet d'une vie. Je ne sais pas comment il évoluera, mais moi l'éducation, c'est vraiment mon credo. C'est vraiment quelque chose dans lequel j'ai envie de m'engager pleinement.

  • Speaker #1

    En tout cas, c'est un très, très beau projet. Je te dis bravo.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Pour revenir donc à ma question, c'est est-ce que... Tu t'es sentie légitime de porter un tel projet ? Est-ce qu'on t'a fait sentir que tu ne l'étais pas ?

  • Speaker #0

    Alors oui, je me suis sentie légitime parce que je pars d'une expérience personnelle. Ce projet, c'est totalement moi. J'ai été cette jeune fille dont on se moquait plus jeune parce qu'elle était trop foncée de peau. Et c'est là où j'ai vraiment compris que c'était un enjeu, en tout cas en étant plus âgée, c'était un enjeu qui me dépassait, déjà avec l'histoire de ma petite sœur, mais aussi pour avoir grandi en France et avoir aussi connu le colorisme. pas que sur ma propre personne, mais sur d'autres. C'est un vrai enjeu. Et puis, encore une fois, ce n'est pas qu'une question esthétique. Moi, je ne viens pas juste dire aux filles, ce n'est pas bien se dépigmenter la peau, machin. Non, non seulement c'est un danger pour elles, sanitaire. Donc, qui dit dépigmentation, dit cancer de la peau, hypertension, mycose, gale. Donc, des maladies qu'on retrouve énormément chez les femmes africaines. Mais il y a aussi cet aspect psychologique de rejet de soi. Et pour moi, c'est tellement violent. Comment on veut... On parle de développement en Afrique, matin, midi, soir, mais il n'est pas qu'économique le développement, il est surtout mental.

  • Speaker #1

    Il est même d'abord mental.

  • Speaker #0

    Il est même d'abord mental aujourd'hui, pour pouvoir progresser, pour pouvoir avancer. On a besoin d'être un peuple, en tout cas d'être des peuples, parce que ce n'est pas qu'un seul peuple, mais d'être des peuples, des États, des sociétés, des communautés qui ont confiance en elles-mêmes, qui s'aiment, qui savent d'où elles viennent. Et il y a eu une vraie rupture en fait. Aujourd'hui... beaucoup de jeunes en Afrique, beaucoup d'Africains ne savent pas qui ils sont, n'en sont pas fiers, veulent copier tout ce qui vient de l'extérieur, mais c'est ça qui est regrettable, en fait. Et moi, le projet, c'est vraiment aussi pour dire à la jeunesse, pour dire aux filles, vous êtes très bien comme vous êtes. Et c'est parce que vous êtes comme ça que vous devez agir en conséquence, que vous devez faire ci, que vous devez faire ça. Ne cherchez pas à copier. Vous êtes uniques. Avancez. Faites ce que vous avez à faire. Connaissez-vous. Mais ne vous dénaturez pas, on ne peut pas se dénaturer et espérer faire des choses originales au final.

  • Speaker #1

    Exactement. Commençons par la fameuse connaissance de soi.

  • Speaker #0

    C'est ça.

  • Speaker #1

    Et qui dit connaissance de soi, dit finalement amour de soi.

  • Speaker #0

    Amour de soi, voilà.

  • Speaker #1

    Est-ce que c'est plus compliqué de gagner une coupe ? Alors, qu'est-ce qui est le plus difficile ? Il faut que je formule bien ma question. Qu'est-ce qui est le plus difficile ? Gagner un championnat de France, ou convaincre une jeune fille qu'il ne faut pas qu'elle se dépigmente ? Qu'est-ce qui est plus con ?

  • Speaker #0

    Il y a un dilemme. Parce que la jeune fille... Il y a un dilemme parce que la jeune fille, encore une fois, je ne suis pas la seule à lui parler. Il y a toute la société qui lui rappelle qu'elle est trop noire. C'est-à-dire que quand on sort au Sénégal, aujourd'hui, les panneaux publicitaires qui font la promotion de la dépigmentation de la peau sont présents partout. Les spots TV, les spots radio. Moi, je suis une fan des séries sénégalaises. Aujourd'hui, je dirais peut-être un peu moins, mais il y a une apologie. incroyables des produits dépigmentants. Les influenceuses que l'on met en avant dans la société, elles sont toutes pareilles, elles ont toutes ce même... Oui, cette même identité, en fait. Et elles sont aux antipodes des jeunes filles que je vois au quotidien dans mes camps de basket. Donc, c'est pas facile d'être championne de France, mais c'est pas facile aussi de se liguer contre la dépigmentation volontaire de la peau. Parce que c'est une vraie industrie, c'est... C'est quelque chose qui est très présent dans les mentalités en Afrique.

  • Speaker #1

    C'est pour ça que des projets comme Terangabi valent le coup d'être soutenus pour que des changements de mentalité, en tout cas...

  • Speaker #0

    Effectivement.

  • Speaker #1

    On arrive à la toute fin. J'ai deux dernières questions. Si on devait retenir qu'une seule chose de toi, tu voudrais qu'on retienne quoi ?

  • Speaker #0

    J'aimerais qu'on retienne que... J'ai fait de mon mieux pour impacter positivement mon environnement. C'est-à-dire que moi, ce que j'aimerais vraiment laisser demain en partant, c'est l'espoir et surtout des progrès significatifs dans l'éducation en Afrique. Moi, l'éducation, j'ai parlé du sport, mais avant le sport, il y a vraiment eu l'éducation. L'éducation, ça a été cet élément qui m'a permis réellement de m'élever socialement, je pense. Et pas que socialement, mais intellectuellement. d'être ouverte sur le monde, d'avoir un esprit critique, analytique, fort. Et c'est super important pour moi. Moi, j'aime le fait de pouvoir me dire que je peux penser par moi-même, que j'en ai la capacité aussi, parce que l'école, c'est pas que retenir telle et telle leçon, mais c'est surtout la capacité à réfléchir, à analyser, à se positionner dans le monde. Et c'est ça, en fait, qui... permet d'avoir une voix, ça qui permet de se distinguer, qui permet de faire progresser aussi la société. Donc l'école c'est un... C'est indispensable. On peut nous dire ce qu'on veut. Je ne parle pas de diplôme, je ne parle pas de tout ça. Je parle vraiment de cette capacité que l'école permet à savoir de se développer intellectuellement, d'être en mesure de réfléchir en fait, et d'avoir du répondant, d'avoir une conscience, de pouvoir tout simplement avoir ce libre arbitre. que l'école aussi permet d'acquérir, je pense. Il ne vient pas automatiquement.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu dirais aujourd'hui que tu as réussi ?

  • Speaker #0

    Ah, j'ai que 30 ans, donc franchement, ça serait prétentieux de dire oui.

  • Speaker #1

    C'est quoi réussir ?

  • Speaker #0

    C'est une bonne question. Mais non, je n'ai pas encore réussi. Il y a tellement de choses que j'ai envie d'accomplir. Mais réussir, c'est de se dire, encore une fois, qu'on a été aligné déjà avec la personne que l'on a été. avec ce que l'on projetait aussi. Moi, j'ai mes valeurs, j'ai mon système de valeurs, j'ai mes convictions, c'est de me dire que j'ai été alignée avec, en fait. Et que j'ai fait de mon mieux à chaque fois. J'ai toujours donné mon 100% à un moment donné, dans un endroit donné. Mais surtout, voilà, que j'ai su rester alignée et que je n'ai pas été déroutée à un moment donné. Que j'ai toujours su garder la tête froide, la tête haute et avancer dignement et faire ce que j'avais à faire. Donc, je n'ai pas encore réussi, mais je dirais que je ne m'en sors pas trop mal. Je fais de mon mieux au quotidien, en tout cas. Au final,

  • Speaker #1

    si je retiens juste ta définition,

  • Speaker #0

    tu as réussi ? Plus ou moins. On va dire qu'avec le temps, l'alignement arrive. Non, mais ce que je ne veux pas dire, c'est que la vie, c'est un cheminement. C'est vraiment ce que je comprends. Il y a des moments où on est plus ou moins dérouté. Mais je peux dire en tout cas aujourd'hui que face à toi, tu as une femme qui s'aligne de plus en plus.

  • Speaker #1

    Voilà. Écoute, Abby, c'était un... plaisir de pouvoir échanger avec toi.

  • Speaker #0

    Le plaisir est partagé.

  • Speaker #1

    S'il y a quelque chose que je retiens, c'est que tu es un vrai leader. On t'a reproché tes camarades de classe peut-être par inconfort, parce qu'elles ne savaient pas comment se mouvoir à tes côtés, avaient du mal à te capter, à comprendre, en tout cas à se positionner elles-mêmes. Mais ton leadership, en tout cas aujourd'hui, c'est celui d'une personne très intérieure, qui est alignée, qui est à l'aise avec qui elle est. et... il y a cette aura naturelle qui se dégage et qui fait que ton propos est extrêmement aligné et convaincant. C'est ce que moi je retiens de cet épisode. C'est d'avoir fait la rencontre d'une femme, d'un leader, d'une femme alignée qui a des convictions, des convictions très très fortes, qui reconnaît sa part d'erreur, sa part de, sa marge de, comme on dit en RH, ses axes d'amélioration, ses axes de progression. mais qui avance sereinement. Il y a quelque chose de très serein chez toi. Et ça fait du bien. Ça m'a fait du bien de t'écouter. Ça m'a renvoyée aussi à mes propres questionnements. Et j'espère que ceux qui, toutes les personnes qui m'ont écoutée, vont également s'interroger avec beaucoup de douceur, avec beaucoup de bienveillance. Il y a beaucoup de bienveillance vis-à-vis de toi-même et que l'on ressent. Et donc, on se dit, c'est aussi également vis-à-vis de nous-mêmes. Donc, il y a cette forme de bienveillance que l'on a. Je le retiens. Moi, c'est ce que je prends dans cet épisode. Et je partirai avec, je me sentirai un peu mieux, on va dire, les prochains jours. Merci de me l'avoir communiqué, Abby. Pourquoi on regarderait ton épisode ? Pour quelles raisons ? Là, tu peux pitcher maintenant devant cette caméra.

  • Speaker #0

    Alors, regarder cet épisode, pourquoi ? Parce que ça a été, je pense, un moment très intéressant, déjà pour Nicole, mais aussi pour moi. Le fait de s'exprimer, ça a permis aussi de se reconnecter à soi. en parlant avec Nicole j'ai eu aussi une conversation avec moi-même et la conclusion de Nicole, donc il faut aller jusqu'au bout de l'épisode pour le savoir, elle a été très belle, très juste et je pense qu'aujourd'hui je suis dans une phase de ma vie où clairement c'est la sérénité que je recherche. Donc merci Nicole d'avoir su se lâcher chez moi et j'en suis vraiment ravie d'être touchée.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup. Voilà, cet épisode de We Talk se termine. Je vous remercie à toutes et à tous d'avoir de l'avoir écouté, il est disponible sur toutes les plateformes YouTube, Deezer, Spotify, Apple Podcast, Apple Addict, Podcast Addict, pardon. Et bien sûr, rejoignez la communauté WeTalk sur Instagram, LinkedIn, TikTok. On attend que vous portez-vous bien et à très bientôt. Bye bye.

  • Speaker #0

    Sous-titrage Soci

Chapters

  • Introduction de l'épisode avec Nicole Ewek

    00:06

  • Présentation de Abi Gaye et son parcours sportif

    00:12

  • L'importance de l'échec dans la carrière d'Abi Gaye

    00:51

  • L'échec à l'étranger : le passage en Hongrie

    06:51

  • Rebondir après une blessure : le processus de réhabilitation

    10:40

  • Soutenir Terrang'Aby et l'engagement d'Abigaye

    43:31

  • Création de l'association Terrang'Aby et ses objectifs

    45:21

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Description

✨ Et si le sport était bien plus qu’un jeu ?
Et s’il devenait une arme pour se relever, inspirer et changer des vies ?


C’est exactement ce que nous explorons dans weTalk, le podcast qui transforme l’échec en réussite.
Une émission intimiste où l’on parle de résilience, de seconde chance et de ces histoires vraies qui rappellent que tomber n’est jamais la fin, mais un nouveau départ.


Dans ce nouvel épisode, je reçois Aby Gaye, basketteuse professionnelle et fondatrice de l’association Terrang’Aby.

Elle nous confie :
- Comment elle a transformé blessures, doutes et échecs en véritables moteurs pour grandir.
- Son engagement au Sénégal contre le colorisme et la dépigmentation, pour redonner confiance aux jeunes filles.
- Pourquoi elle croit que l’éducation et l’estime de soi sont les clés pour bâtir une société plus forte et plus juste.


💡 Comment garder foi en soi quand le corps lâche ?
💡 Comment transformer la douleur en mission ?
💡 Et pourquoi la confiance est le plus grand trophée qu’on puisse gagner ?


Aby Gaye nous rappelle qu’au-delà des terrains et des médailles, le vrai combat est intérieur : apprendre à s’aimer, à s’accepter, et à inspirer les autres à en faire autant.

Un épisode vibrant, puissant, qui montre que le sport peut être une école de vie et un levier d’émancipation.


🎧 Disponible sur toutes les plateformes (Spotify, Deezer, Apple Podcasts, podcast addict, YouTube).

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  • Instagram : @wetalk_tv

  • YouTube : @weTalkLepodcast

  • LinkedIn : weTalk le podcast


Enregistrement : L'Appart studio
Musique : Nicole Eweck


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à toutes et à tous, je suis Nicole Ewek et tu écoutes We Talk, le podcast qui transforme l'échec en réussite. Mon invitée du jour, c'est une femme exceptionnelle, exceptionnellement grande, exceptionnellement dans le cœur, grande dans le cœur, c'est Abigaye. Bonjour Abie, comment tu vas ?

  • Speaker #1

    Bonjour Nicole, je vais très bien, merci.

  • Speaker #0

    Je suis ravie de t'avoir sur le micro, enfin en tout cas sur le plateau de We Talk aujourd'hui, tant pis ce qu'on a eu un peu de mal.

  • Speaker #1

    On a eu du mal à se coordonner au niveau des dates, mais finalement on est là toutes les deux.

  • Speaker #0

    Alors je vais te laisser te présenter. auprès des auditeurs de We Talk.

  • Speaker #1

    Très bien. Alors moi, c'est Abigaye, j'ai 30 ans, je suis basketteuse pro maintenant depuis une dizaine d'années. J'ai principalement joué en première division en France, mais aussi un peu à l'étranger. Et j'ai aussi eu l'honneur d'être internationale française, d'avoir été en équipe de France.

  • Speaker #0

    Justement, au cours de cet épisode, on va parler d'un athlète. Il y a des hauts, il y a des bas. Ta vie en tant que présidente de Terrangabi, qui est une association, tu vas m'en parler un peu plus longuement. Mais avant ça, il y a une tradition à We Talk. C'est que je présente mes invités grâce à un conte que j'ai écrit rien que pour eux. Est-ce que tu es prête à écouter le tien ? Oh, j'ai hâte ! Bon, alors. Il était une fois une géante par la taille, mais pas seulement. Une géante de cœur, d'engagement, d'idéal. Elle s'appelle Abigail. Elle est née à Vitry-sur-Seine, dans une banlieue parisienne. Ses parents sont des... Peul, venue tout droit de Dakar au Sénégal. Petite, elle déborde d'énergie, grandit plus vite que les autres. À 4 ans, son père, visionnaire on dirait, sans le savoir, lui met un ballon entre les mains. C'est un geste simple, une intuition de papa, mais il vient d'éveiller un destin. Le basket, pourtant, ne sera pas tout de suite le coup de cœur. Ce n'est pas bien sûr le coup de foudre, mais c'est une danse timide. Elle teste l'athlétisme, le tennis, elle explore ce qu'elle recherche, ce que seule une équipe peut offrir, la chaleur du collectif, la boue. beauté de la solidarité, le pouvoir du nous. Alors elle revient au basket et là, tout s'éclaire. En 2013, alors qu'elle est âgée de 18 ans, Abie rejoint Toulouse Métropole Basket et fait son entrée dans le monde professionnel. Puis tout s'enchaîne. Une médaille d'or en équipe de France U20, arrachée à l'Espagne en 2014. Une courante de championne de France en 2017 avec Villeneuve d'Ascq. Elle brille sur les parquets, elle pose son rythme, s'agrase. Mais ce que les projecteurs ne montrent pas, ce sont des blessures, des nuits d'angoisse. des corps fatigués qu'il faut réapprendre à aimer. Être sportif de haut niveau, c'est aussi ça. C'est tomber, c'est douter, puis se relever. Mais Abhi, ce n'est pas qu'un pivot d'exception. C'est une conscience, une voix, une âme éveillée. Car très tôt, à 9 ans, elle crée sa première association. À 11, elle devient conseillère municipale des jeunes. Un jour, dans la bibliothèque de l'école, elle tombe sur un article qui raconte l'histoire de la traite négrière. Et là, tout bascule. Quelque chose se noue entre cet enfant et l'Afrique, son continent d'origine. Une mémoire transmise, un fil invisible qui ne la quittera plus. Elle se rend au Sénégal, découvre un pays qui lui y ressemble. Mais aussi un choc. Là-bas, près d'une femme sur trois se dépigmente la peau. Noir, chez certaines, ne veut pas dire beau. Noir veut dire trop, trop visible, trop brut, trop rejeté. Les surnoms sont violents. Charbon, minuit, crapaud. Alors, Abby décide de ne plus se taire. Elle crée Terangabi, qui veut dire la lumière d'habit. Une association qui œuvre pour l'estime de soi des jeunes filles sénégalaises. Elle les invite à se voir belles, fortes et puissantes. À travers le sport, elle leur transmet ce que le basket lui a offert, la confiance, la rigueur, l'amour de soi. À chaque rebond, à chaque mot, à chaque action, Abigaï nous rappelle que l'on peut être athlète et militante, féminine et puissante, noire et fière. Elle incarne ce que We Talk célèbre, la résilience, la transformation, l'engagement. Et aujourd'hui ? Abhi vient de raconter son histoire. Alors, prends une grande inspiration. Car voici venir une femme qui n'a jamais baissé la tête. Une femme qui se tient droite. Une femme debout pour toutes les autres. Bienvenue dans We Talk. Bienvenue Abhi Gaye.

  • Speaker #1

    Waouh ! Déjà, merci beaucoup pour cette magnifique présentation, Nicole. Je vois que tu as fait un vrai travail de recherche.

  • Speaker #0

    C'est mon travail.

  • Speaker #1

    C'est vraiment appréciable. Je vais juste apporter deux petites rectifications. Je ne suis pas peule.

  • Speaker #0

    J'étais sûre.

  • Speaker #1

    En fait, ma mère, je pense, l'est de par son famille qui est si. Mais elle dit toujours, c'est une Paul Wolofisé. Je dirais plutôt que je suis Wolof quand même. Et la deuxième rectification, c'est que j'ai commencé le basket à 12 ans, mais le sport à 4 ans.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc, j'ai commencé pas mal de sport avant de faire du basket. Mais c'est réellement à 12 ans que j'ai été initiée en club. J'ai eu à toucher le ballon, c'était un petit peu avant. Mais c'est vraiment à 12 ans que je prends ma première licence. Voilà, ça c'est les deux seules petites erreurs.

  • Speaker #0

    C'est tout le reste. C'est mon petit cadeau que j'adore faire à tous mes invités. Je me suis dit, j'ai eu un doute, je voulais t'envoyer un message tout à l'heure pour te dire, t'es peule ou ? T'es peule ou ?

  • Speaker #1

    Mais je suis un petit peu, je pense, parce que comme je te le disais, c'est une famille. Bon,

  • Speaker #0

    rien que pour les 1% de sang peule que tu as, ça veut dire que j'ai fait une seule erreur.

  • Speaker #1

    Une seule,

  • Speaker #0

    voilà.

  • Speaker #1

    Une seule seulement.

  • Speaker #0

    Abhi, ma première question, c'est, We Talk parle d'échec, de résilience. Quelle est ta définition de l'échec ?

  • Speaker #1

    Alors l'échec, l'échec, en tout cas, c'est ce qui est communément admis, c'est le fait de ne pas réussir l'objectif fixé et du coup de tomber sans figurer. Et c'est aussi un peu la définition que j'ai, c'est de me fixer un objectif, admettons de me dire, je ne sais pas, je vais obtenir tel diplôme et finalement je ne l'ai pas. Donc c'est un échec. Mais après, c'est vrai qu'avec le temps, j'ai nuancé ma vision de l'échec. Aujourd'hui, je suis vraiment partisane de me dire que les échecs sont nécessaires pour grandir, pour avancer. Sans échec, je ne me remets pas en question. Sans échec, je ne change pas forcément ma façon de faire. qui peut être plus ou moins adapté en fonction des périodes, en fonction de la saison. Donc l'échec, oui, c'est de ne pas réussir ce qu'on s'était fixé comme objectif. Mais au final, c'est quelque chose de nécessaire pour avancer. Et en tant qu'athlète, l'échec, surtout dans mon sport, que l'on pense être un sport d'adresse, le basket est un sport d'échec. Dans le sens où on a plus de chances de rater quand on prend un tir que de marquer. Les statistiques le prouvent. Très peu de gens, au final, finissent des saisons à plus de 50% de réussite. Donc voilà, l'échec fait partie de mon sport, fait partie de ma vie au final. Et même si ce n'est pas facile, tous les jours de l'accepter, c'est un vrai travail d'accepter l'échec.

  • Speaker #0

    Justement, pour toi, quel est le plus grand échec que tu aies vécu et qu'est-ce que ça t'a enseigné ? Est-ce que tu peux partager ça avec nous ?

  • Speaker #1

    Alors, le plus grand échec de ces dernières années, clairement, je dirais mon passage à l'étranger, mon premier passage à l'étranger. En 2021, je suis championne de France avec le club de Basketland. On va dire que je suis à mon apogée d'un point de vue individuel mais aussi collectif. Je joue dans une merveilleuse équipe, dans un club qui m'a fait confiance, dans lequel j'ai signé à l'âge de 24 ans, je crois, 23-24 ans. Donc vraiment pour me donner un nouveau défi, pour continuer à monter en compétences. Et donc on finit championne de France deux ans après mon arrivée dans ce club, et c'est le premier titre du club. Et à ce moment-là, j'avais prévu de rester dans ce club. Je me sentais bien. J'avais déjà donné mon accord de principe. Et quelques semaines plus tard, je reçois une offre, donc celle de Sopron, qui était à l'époque un des plus gros clubs européens. Et moi, je vois ça comme un signe. Je me dis impossible de refuser. Je ne sais pas si j'aurai de nouveau cette occasion-là. Donc, j'accepte. Surtout que Sopron, c'était quand même un club qui me tenait à cœur. C'est le premier club d'Euroleague que j'ai vu jouer. C'est le premier club contre qui j'ai joué aussi en Euroleague. Donc, il y avait une symbolique. Et je me suis dit, ça sera mon premier club à l'étranger aussi. Et malheureusement, ça a été la désillusion totale. J'ai finalement coupé mon contrat après 7-8 mois, il me semble, la veille de mon anniversaire. Et j'ai fini la saison en Italie. Donc, ce fut un échec, mais il m'a beaucoup, beaucoup appris sur moi, sur ma capacité à être résiliente.

  • Speaker #0

    Mais sans vous en couper, mais qu'est-ce qui s'est passé ?

  • Speaker #1

    Alors ce qui s'est passé, c'est que je suis arrivée là-bas avec plein d'espoir, plein d'illusions, prête quand même. Je me suis beaucoup préparée l'été, mais je n'ai pas trouvé un environnement favorable. J'irais même hostile à certains égards. Dans quel sens ? Dans quel sens ? Je n'ai pas de confirmation, mais en tout cas, j'ai senti des ralentes de racisme en fait. C'est un peu ce que j'ai ressenti, beaucoup de rejet. J'ai ressenti du rejet que je ne saurais expliquer aujourd'hui si ce n'est... par ça. Surtout que j'ai eu quelques discussions après avec quelques-unes de mes coéquipières dans l'équipe. Mais j'ai senti vraiment une forme d'hostilité à mon égard. Et je pensais rencontrer ceux-là en dehors de ma structure sportive et c'est à l'intérieur que je l'ai un peu rencontré.

  • Speaker #0

    Ce club, il est en France ou il est... Non,

  • Speaker #1

    il est à l'étranger en Hongrie. La Hongrie qui est un pays réputé pour son nationalisme avec leur président Orban. Mais voilà, je me suis dit, bon, je ne suis pas la première, je peux y aller. Mais c'est vrai que j'ai... pas eu une bonne expérience de ce point de vue-là. D'autres aussi, d'ailleurs, je ne l'ai appris pas à la suite. Donc, voilà. J'ai pris la décision de partir parce que moi, par contre, s'il y a bien une chose sur laquelle je ne badine pas, c'est le respect.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    C'est-à-dire que moi, à partir du moment où la notion de respect est brisée entre nous, je pars. Je te le signale, mais je pars. Je ne peux pas accepter l'inacceptable. Et pour moi, ça, c'est vraiment la limite. Donc, j'ai décidé de partir. donc c'est pas forcément une bonne décision sportive parce qu'en plus ce club là gagne le Roli quelques mois après donc il y a la compétition en Europe mais j'ai aucun regret parce que je sais pourquoi je suis partie à ce moment là aujourd'hui je pourrais me dire oui j'aurais pu mais avec Dessy on refait le monde donc je finis ma saison en Italie je retrouve aussi le goût du basket j'ai la chance de rencontrer une coéquipière de l'équipe de France à ce moment là dans ce club Et donc vraiment, je me refais une santé mentale, on va dire, parce que ça a été vraiment très, très éprouvant. Et puis voilà, et malheureusement, je me fais aussi le ligament croisé quelques mois après cette échec. Ah oui, c'était un machinement. Voilà, donc ça a vraiment été une saison 2021-2022 très compliquée pour moi. Je pense que c'est le plus gros échec de ma vie. Jeune carrière.

  • Speaker #0

    Et comment on fait pour rebondir ? Comment tu te sens ? Est-ce que tu te dis que tu vas pouvoir remonter à un haut niveau ? Ça se passe comment dans ta tête ?

  • Speaker #1

    Alors, je passe par plusieurs étapes. Je me blesse. C'est l'effondrement total. Mais très rapidement, je rebondis. C'est-à-dire, je pense, peut-être 48 heures après, je me dis, OK, quel est le plan maintenant ? On pleure, on se lamente, mais maintenant, on to the next. Donc, je passe à autre chose. Je fais mon petit... planche, je calme au rendez-vous avec le chirurgien, je me fais opérer 15 jours après, donc de manière très expresse au final, et j'entame une rééducation. Sauf qu'il faut savoir, c'est qu'après cette première opération, je me refais opérer de nouveau 9 mois après, donc quasiment à la fin de la rééduc. Et là, c'est un peu le coup de grâce parce que j'avais signé à ce moment-là avec un club en France, pour deux saisons, et donc, ils ont accepté ma blessure, tout le monde l'a accepté, mais on se dit à ce moment-là que je rate une saison et que je reprends pour la seconde. Et au final, je ne joue que 3 mois sur... 24 mois d'engagement. Donc je reprends 18 mois plus tard, après ma première opération. Et donc 18 mois, il faut savoir que c'est énorme. C'est-à-dire que moi, en carrière, j'ai rencontré, je crois, aucun athlète que je connais dans mon entourage, en cas pas une basketteuse qui s'arrêtait autant. C'est particulièrement long. Et donc j'ai eu le temps aussi de beaucoup cogiter. J'ai eu le temps de me poser la question de si je voulais continuer au pal-basket. Qu'est-ce que je voulais faire ? Est-ce que ça en valait encore la peine ? J'ai éprouvé aussi beaucoup de dégoût à l'égard du milieu du basket. Parce qu'en fait, quand on est un athlète, on a de la valeur sur le terrain. Et une fois qu'on n'est plus sur le terrain, on perd en valeur, on perd en considération. Et donc, j'ai vu mon statut passer de potentielle joueuse de l'équipe de France à oublier, on parle de toi au passé, tu n'existes plus. Et donc, moi, la chance que j'ai aussi à ce moment-là, c'est de ne pas être quelqu'un qui s'attache beaucoup à cette image, mais ça pique quand même. Donc, j'ai quand même su, en parallèle de cette blessure, me construire, donc ma carrière, ma future carrière professionnelle, en tout cas, de réfléchir sur ma reconversion pro.

  • Speaker #0

    Tu as quel âge quand tu penses déjà à ta reconversion ?

  • Speaker #1

    Alors, je me suis blessée, j'avais 27 ans, mais on va dire que j'y pense depuis le début de ma carrière. J'ai toujours eu dans un coin de ma tête que le basket était éphémère et qu'il fallait préparer l'après. Donc ça m'a vraiment permis cette blessure aussi de me reconnecter à moi, de savoir ce que je voulais, où je voulais aller. Donc je dirais pas que ça a été un mal pour un bien, je ne recommencerai pas honnêtement. Mais je pense que j'ai su capitaliser sur ce temps-là pour ne pas perdre doublement mon temps, en fait.

  • Speaker #0

    Ok, d'accord. Et tu dirais aujourd'hui que, en quoi cette année 2020-2021, cette saison, a été déterminante pour ta vie, pour l'orientation de ta vie ? Est-ce que tu peux tirer comme bénéfice aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Elle a été très déterminante cette année. ce n'a pas été que sur cette saison malheureusement on va dire que de 2021 jusqu'à le début 2024, ça a quand même été assez compliqué. Parce qu'il faut savoir, on se blesse, 18 mois, mais ensuite il faut reprendre. Donc quand on reprend, qu'est-ce qui se passe ? On n'est pas en forme. Le basket, ce n'est plus aussi facile que quand on l'a quitté. Donc c'est une période qui a duré trois ans en fait. Qui a vraiment duré trois ans de flou, trois ans de vide un peu. Et là vraiment, Dieu merci, cette saison, j'ai pu rejouer, me relancer. et donc... C'est vraiment ça que je me dis, c'est que le plus dur est passé, mais maintenant, il faut continuer à construire.

  • Speaker #0

    Dans cet état-là, quand tu tombes, quand tu as été au plus bas, il y a eu la phase où tu n'étais pas bien, où tu as pleuré, la phase 2 et tout ça. Et puis, il y a eu la phase de, ok, qu'est-ce qu'on en fait ? Comment est-ce qu'on relève ? Mais tu penses que ça vient du basket ou c'est un état d'esprit que tu as toujours eu au final ?

  • Speaker #1

    J'aime quand même grandement le basket. Le basket m'a façonnée, j'en parle encore ce midi avec une amie. Je suis sportive de haut niveau depuis mes 13 ans, j'en ai 30. Donc ça fait 17 ans en fait que je suis poussée dans mes retranchements, 17 ans qu'il faut se relever, tomber, se relever. Donc c'est vraiment un état d'esprit, c'est devenu une seconde nature. C'est pas plaisant de tomber, mais à chaque fois que je tombe, je sais au fond de moi que je vais pouvoir me relever. Je sais que je vais pouvoir trouver les ressources pour le faire. Ça va pas être facile, hein, mais il y a toujours cette lueur d'espoir, parce que j'ai l'habitude de tomber. C'est le propre de l'athlète, c'est pas que... Les médailles, tout ça, c'est vraiment le quotidien, la remise en question, tous les matchs, tout le temps. C'est un éternel recommencement.

  • Speaker #0

    Justement, tu as décidé de faire du basket une caractère. pour métier, métier passion. Là où beaucoup de gens, dans le sport, basket, de foot, on dit souvent qu'il y a beaucoup d'appelés et très très peu d'élus. Est-ce que tu n'as pas eu peur de te lancer dans une carrière sportive, professionnelle ? Je vais peut-être commencer par cette question. Qu'est-ce qui t'a poussé et quel a été le déclic ? D'abord, voilà. Sinon, tu vas te dire, c'était quoi la troisième question ? Et j'ai rien que moi à dire. Non, je ne me souviens plus. C'est ça, je te laisse répondre.

  • Speaker #1

    mais Non, je n'ai pas eu peur parce qu'en fait, il faut savoir une chose, c'est que moi, quand j'ai commencé le basket, je n'imaginais pas une seconde devenir pro. Ce n'était pas quelque chose d'imaginable pour moi. Je n'avais pas de référence dans mon entourage. Donc moi, je commence le basket à l'âge de 12 ans pour prendre une énième licence sportive. J'aime le sport. Chaque année, pour moi, j'attends juste le magazine de la ville de Créteil pour regarder dans quel club je vais m'inscrire. Un an plus tard, je rentre en sport études. Donc là, ça commence à devenir un peu plus sérieux. On parle d'entraînement quotidien, de représenter la région Île-de-France sur des compétitions nationales. Je deviens multiple championne de France à cet âge-là, mais c'est encore insignifiant pour moi. Et c'est vraiment en rentrant à l'INSEP, deux ans après avoir commencé le basket, que là je réalise qu'il y a quelque chose qui est en train de se jouer. Je côtoie au quotidien des Ladis du Couré, des Christine Aron, des Teddy Riner, les plus grands athlètes français dans le temple du sport français. Et je me dis OK. Là maintenant, en fait, ça devient réel. On peut devenir athlète de haut niveau, on peut vivre, en faire un métier. Et j'assiste aussi à mes premiers matchs professionnels. Je vois des joueuses au plus haut niveau français. Et là, je me dis, OK, à 15-16 ans, je deviendrai pro. Mais à aucun moment à ce moment-là, je me dis que ce n'est pas possible. J'étais sûre que je deviendrais pro. Pour ta famille,

  • Speaker #0

    tes parents ? Ils sont tous ok,

  • Speaker #1

    ils t'encouragent Ils m'encouragent dès mes 13 ans en transport et études Je pars de chez mes parents à l'âge de 13 ans Je rentre que le week-end Depuis 13 ans je suis partie de la maison mes parents l'ont compris, ils m'ont beaucoup soutenu aussi Une fois que je rentre dans le moule de l'INSEP pour moi il n'y a pas d'autres issues C'est plus une question Est-ce que je deviens pro, est-ce que je ne deviens pas pro C'est la suite logique Pendant 3 ans je fais mon cursus à l'INSEP Mon objectif c'est à 18 ans de signer mon premier contrat pro Et c'est ce qui arrive. Et donc, petit à petit, je suis prise dans le moule aussi, parce qu'on a un peu formaté pour, en rentrant INSEP. Et voilà, ça fait 12 ans que ça dure maintenant, et c'est devenu mon métier.

  • Speaker #0

    En tout cas, bravo. Il y a une figure féminine qui t'a quand même inspirée, qui t'a donné envie de continuer,

  • Speaker #1

    d'avancer ? Donner envie de devenir pro à 15 ans, non. C'était juste l'environnement. Mais après, petit à petit, il y a des choses qui m'ont beaucoup inspirée. notamment une qui est Lauren Jackson c'est une joueuse australienne que j'ai pu voir à l'âge de 17-18 ans jouer en vrai et elle m'avait impressionnée elle était très grande, elle savait tout faire sur le terrain, elle dominait vraiment c'était un modèle elle m'a vraiment vraiment impressionnée et d'ailleurs quand je me suis fait le croiser c'était l'année du mondial et donc j'avais mon ancienne assistante coach qui lui a demandé de faire un carton, un petit signature un mot quoi Donc, elle m'a fait parvenir après la carte. J'ai eu le plaisir de lire ça. Et ça m'a fait plaisir. Après, bien sûr, je n'étais plus fan à ce moment-là. C'était à trois ans. Mais ça m'a fait plaisir. Voilà, cette marque de respect et d'encouragement de la part d'une si grande joueuse de basket.

  • Speaker #0

    Le sport de haut niveau, ça implique, comme tu l'as dit, des blessures.

  • Speaker #1

    C'est ça.

  • Speaker #0

    En tant que femme, quel est ton rapport à ton corps, à ta féminité ? Avec tout ce que tu as pu... que tu as pu faire endurer à ton corps à travers ce sport. Est-ce que ça a entamé ta confiance en toi ? Est-ce qu'au contraire, ça a renforcé ta confiance en toi et ton rapport à ta féminité ?

  • Speaker #1

    Clairement, le basket a renforcé ma confiance en moi. Ça, c'est sûr et certain. Parce que, comme tu peux le voir, j'ai un physique qui dénote. Je mesure 1,95 m.

  • Speaker #0

    Ouais, de bisfrance. Tu fais 1m95, tu pourrais être Miss France. Oui,

  • Speaker #1

    parfois on me dit, il n'y a pas longtemps, vous êtes mannequin. Je dis non, je suis basketteuse. Ça m'a réellement donné confiance en moi parce que j'ai trouvé un milieu qui a valorisé mon physique. Et dans lequel je me suis valorisée moi-même. Donc au contraire. Après, la chance que j'ai grâce au sport, c'est de me voir bien au-delà de mon physique aussi. Je ne sais pas comment le dire. de ce qu'on attend en tout cas d'une femme dans la société, de son image, de ce qu'elle représente. J'arrive à me voir de manière assez globale. Donc je pense que ça me met dans mon rapport à la féminité, parce que ça m'a montré qu'on peut être féminine de différentes manières. Dans une équipe de basket, on voit tout type de femmes, vraiment de la fille la plus girly au tomboy. Donc ça permet de se dire, ok, il y a plusieurs façons d'être une femme. Il n'y a pas qu'une seule, il n'y a pas qu'un moule. Et je trouve que c'est bien. On peut se façonner son identité en fonction de sa personnalité. Et on n'est pas jugé par rapport à ça, en tout cas dans le monde du sport. On est jugé par rapport à ses performances ou autre. Mais du coup, tout ce qui est rapport... En fait, un peu tous les dictages qu'on retrouve dans la société, en tout cas moi dans le basket, je ne les retrouve pas nécessairement. Et ça enlève un poids, je pense.

  • Speaker #0

    Donc, grâce à ça, finalement, ton rapport à ta féminité a été plutôt... Tu t'es sentie plus femme, du coup ?

  • Speaker #1

    Oui, en tout cas, j'ai défini ma version de la féminité. Je n'ai pas attendu que la société me dise à quoi je dois ressembler. Par exemple, quand on parle de la dépigmentation de la peau, du colorisme, moi, ce n'est clairement pas un sujet pour moi. J'ai l'incarnation de peau foncée. Je ne peux même pas parler de fierté. Je suis née comme ça. Ce n'est pas un acquis. Donc, je suis très bien avec. Je pense que le sport m'a aidée à m'accepter telle que j'étais.

  • Speaker #0

    À l'école, tu es née à Vitry-sur-Seine.

  • Speaker #1

    Je suis née à Vitry, mais j'ai grandi à Créteil.

  • Speaker #0

    À Créteil, d'accord. Est-ce qu'à l'école, on ne te faisait pas ressentir que tu étais trop différente du coup ? Tu étais beaucoup plus grande que les autres.

  • Speaker #1

    Clairement.

  • Speaker #0

    Et comment tu vivais cette différence ?

  • Speaker #1

    Clairement, à l'école, j'étais trop grande, trop grosse, trop noire. J'étais trop tout. Je dénotais, encore une fois, physiquement. Et c'est pour ça que le sport m'a vraiment aidée à prendre confiance en moi. À 12 ans, lorsque je commence le basket, c'est comme une forme de renaissance. Dans ma vie, je situe ma vie avant-après basket. J'ai une vie avant le basket, une autre vie après le basket. Donc quand je commence le basket, je suis vraiment valorisée parce que je mesure 1m82 à l'époque. Les gens sont enthousiastes de me voir entrer dans le gymnase. mais qu'est-ce qu'on va en faire de cette fille ? C'est pépi, tu vois ? Donc, non, vraiment, ça, ça a été une grâce pour moi que de commencer le basket. D'accord,

  • Speaker #0

    ok. En tout cas,

  • Speaker #1

    j'imagine,

  • Speaker #0

    à l'école, on te voyait comme, oh, la fille est trop grande. Et là, tout à coup, dans le basket, c'est comme, oh, c'est génial,

  • Speaker #1

    elle est larmiale.

  • Speaker #0

    Comme quoi, en fait, ce qui peut être notre différence, parfois, c'est juste qu'on n'est peut-être pas au bon endroit.

  • Speaker #1

    Exactement.

  • Speaker #0

    Et là où les gens, pour eux, ils ont une autre norme, Bah... Nous, on peut être la norme ailleurs. Donc au final, c'est un message un peu à toutes les personnes qui se sentent trop ou pas assez. C'est peut-être changer juste d'environnement.

  • Speaker #1

    Trouver l'environnement dans lequel vous serez valorisé, dans lequel on vous acceptera tel que vous êtes. Après, je ne dis pas que parfois, il ne faut pas se remettre en question. Ce n'est pas que ça aussi. Parce que parfois, on peut se cacher derrière ça. Mais de manière générale, on a tous des qualités à faire valoir. Et parfois, on n'est juste pas au bon endroit au bon moment. Pour reprendre l'exemple de tout à l'heure du basket. Je ne suis pas devenue nulle d'une saison à l'autre. C'est-à-dire que j'ai été dans un environnement qui m'a valorisée, avec une coach qui me connaissait, qui savait me faire jouer, avec des coéquipières qui m'appréciaient. Un an plus tard, je deviens une autre joueuse. Non pas parce que je suis moins bonne, mais parce que je ne suis pas dans un environnement qui me met en avant, qui me valorise. Et donc c'est ce que je dis aussi aux jeunes joueurs, trouvez des projets dans lesquels vous serez valorisés, dans lesquels les coachs reconnaissent vos compétences et les utilisent correctement, tout simplement. Mais ce n'est pas tout le temps se dire que je ne suis pas bon, je ne suis pas si. Non, trouver les environnements qui vous valorisent.

  • Speaker #0

    En disant ça, si tu fais écho, moi, je suis chargée RH à temps plein, entre 9 et 17. Et je dis souvent, parfois de temps en temps, je prends la parole sur LinkedIn sur ce sujet.

  • Speaker #1

    Je dis,

  • Speaker #0

    il faut choisir les entreprises qui correspondent aussi à nos valeurs. C'est bien de chercher un travail. Parfois, les gens se disent, ah mais tiens, on ne m'a pas recruté, etc. Mais est-ce qu'au moment où tu postules, est-ce que les valeurs que tu vois correspondent à ce qui tu es ? C'est hyper important.

  • Speaker #1

    C'est très important.

  • Speaker #0

    Parce qu'il suffit qu'on soit dans la bonne entreprise ou dans la bonne équipe, dans le bon environnement par rapport au basket, on peut être très bon, mais ne pas du tout performer si on est mal encouré.

  • Speaker #1

    Clairement. Et ça, c'est une leçon que j'ai aussi apprise. Avant cette expérience-là, je ne pense pas que j'avais ces exigences-là. Je sais que là, j'ai signé dans un club. Mais avant de signer, de m'engager, j'ai demandé à parler avec le coach très longuement. J'ai préparé une liste de questions, mais pas qu'en rapport avec le salaire ou la position dans l'équipe, mais par rapport à ses valeurs, sa vision du basket, sa philosophie du jeu. Parce qu'en fait, c'est des choses qui, au final, m'impactent tellement et qui vont tellement impacter mes performances que je ne peux pas les minimiser dans les discussions et après dans ma prise de décision. C'est pour ça qu'il faut se connaître aussi. Il faut vraiment se connaître. et connaître l'environnement dans lequel on veut évoluer pour voir si ça match, tout simplement.

  • Speaker #0

    C'est de beaux conseils.

  • Speaker #1

    J'aurais aimé les avoir avec quelques amis.

  • Speaker #0

    C'est pour ça que maintenant, tu les donnes à d'autres.

  • Speaker #1

    Je les donne à d'autres, volontiers.

  • Speaker #0

    Là, on va passer à la partie True Talk. Et dans cette partie, je dis qu'on ne se fait pas tout seul. Sur notre chemin, on rencontre des personnes qui sont des détracteurs. Elles nous poussent dans nos retranchements, ne croient tellement pas en nous que c'est nous qui sommes fautifs. Et ces personnes, oui, nous posent nos retranchements, mais surtout, finalement, nous poussent à... nous déployer différemment. C'est l'adversité. Il y a la rencontre fortuite. Elle ne se rend pas compte, mais elle dit quelque chose, une phrase, un projet, un conseil, et ça change un petit peu le cours de notre vie. Et puis, il y a la personne de Providence, elle croit en nous, même quand nous-mêmes, on ne croit pas en nous. Elle nous ouvre la porte sans rien attendre. Alors, dis-moi, Abby, quelle est la pire situation dans laquelle un détracteur t'amise ? Peut-être que c'est pas...

  • Speaker #1

    L'histoire avec le club de basket. Oui, ça peut être une autre aussi. Je réfléchis un peu. Qu'une personne aurait provoqué la situation. Oui,

  • Speaker #0

    ou même une situation. Tu sais, parfois, on ne se rend pas compte qu'il y a certains invités qui me disent que mon premier détracteur, c'est moi-même.

  • Speaker #1

    Moi, j'ai une histoire qui me revient en tête. Vraiment, de jeunesse, j'avais 15 ans. Et à l'époque, j'étais en internat. J'étais en internat et il y avait la personne qui était en charge de l'internat qui, je ne sais pas, bon après avec du recul, je peux peut-être le comprendre un peu, mais qui avait vraiment du mal avec moi. Et elle avait convaincu les autres filles que j'étais une sorte de gourou. Et en fait, avec du recul, c'est vraiment une histoire absurde, mais avec du recul, je pense qu'à l'époque, j'avais déjà une forme de leadership et d'affirmation de soi qui pouvait déranger. dans le sens où Je prenais de la place, certainement, dans le groupe. J'imposais aussi mes idées. Et ce n'était pas très bien vu. Et ça, je sais que ça m'a vraiment peinée à l'époque. J'avais à peine 15 ans. Mais surtout, ça a très probablement modifié après certains de mes caractères que j'avais naturellement. Ça m'a pris l'initiative, le leadership. Et durant quelques années, je pense que je l'ai un peu inhibée. Parce que je voyais ça, du coup, comme étant quelque chose de négatif. On me reprochait beaucoup à l'époque. de me mêler de ce que je ne me regardais pas, c'est-à-dire de prendre position, de défendre les gens, m'appeler l'avocat du diable. Et ça, c'est des injonctions qu'on a posées sur moi à cet âge-là qui, je sais, peuvent vraiment freiner. Et je pense que si je n'avais pas eu, après, derrière, cette carrière dans le basket, la création de cette association, etc., j'aurais pu vouloir me faire petite, du coup, pour ne pas trop éblouir, ou bien trop cacher les autres, ou bien trop en faire. Quand je pense que c'est vraiment dans ma nature profonde que de vouloir... éclairer les gens, je pense, de guider ceux qui sont un petit peu perdus, mais surtout de tendre la main et d'aider. Parce que moi, je respecte particulièrement les personnes qui le font, et je pense qu'à l'époque, je le faisais peut-être maladroitement aussi, je ne pense pas que j'étais irréprochable, mais il y avait ce truc de... Je prenais la place dans un groupe et que j'aimais guider les gens, en fait. Et ça, ça a pu déranger parce que parfois, quand on est un peu en contradiction avec les adultes en face de nous, on peut être pointé du doigt.

  • Speaker #0

    Et comment tu... Comment tu as réussi finalement à te construire avec ça ? Oui, je sais qu'il y a eu le basket. Heureusement, il y a eu le basket. Mais il n'y aurait pas eu le basket. Avec Dessy, on refait le monde. Comment ça aurait pu switcher ? Comment tu aurais pu dépasser ça, en fait ?

  • Speaker #1

    Honnêtement, je ne sais pas. C'est marrant, j'avais vraiment cette discussion-là avec mon ami ce midi sur comment le basket nous a éduqués. Moi, le basket m'a donné un vrai cadre de vie. Non pas que je n'ai pas reçu une bonne éducation, mais... Le sport m'a appris la discipline, le dépassement, la résilience. Donc je ne sais pas comment j'aurais été sans le basket. Je sais que j'étais déjà studieuse, plus jeune, donc peut-être que je me serais sûrement concentrée dans les études. Mais le sport m'a apporté autre chose que le simple fait d'être une femme studieuse. Ça m'a apporté une estime de moi, ça m'a apporté une force de caractère. Voilà, vraiment le fait de pouvoir m'asseoir en face de toi, de discuter assez librement. Prendre place, prendre position. Ça, je pense que je l'avais aussi un peu en moi. Mais le basket l'a vraiment révélé. Révélé, quoi. D'accord. Accentué.

  • Speaker #0

    Ta rencontre fortuite. Peut-être que tu en as conscience. Peut-être que cette personne est dans ta vie ou n'est plus dans ta vie. Je ne sais pas, une situation. Mais quelque chose d'apparence anodine t'a pourtant marquée et a changé, entre guillemets, le cours de ta vie. Ouais.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que je peux citer ? Ah oui, Maria Lamont.

  • Speaker #0

    Marie-Alain Laman, c'est une grande sœur pour moi. C'est une ancienne joueuse de basket, qui s'appelle Marielle. C'est une femme que j'ai rencontrée grâce au basket. On était toutes les deux convoquées en équipe de France. Très peu de temps avant que je signe dans le même club qu'elle. Et c'est vraiment devenu une sœur, une grande sœur. Celle que je n'ai pas eue, puisque moi je suis l'aînée de ma famille. Et elle a vraiment fait office de guide durant toute ma vingtaine. La vingtaine pour moi aujourd'hui avec du recul, c'est vraiment la période où on fait toutes les bêtises du monde. où l'on apprend énormément de choses, mais à chaque chute, elle a su être là, me donner les bons mots, et avec une telle justesse, vraiment, c'est vraiment une qualité remarquable qu'elle a, et je dirais que vraiment cette rencontre, je ne sais pas si elle a changé le cours de ma vie, mais en tout cas, elle l'a bien influencée.

  • Speaker #1

    D'accord, on lui dit merci du coup.

  • Speaker #0

    Ah bah merci Marie, je lui dis tout le temps.

  • Speaker #1

    Et la personne Providence, c'est celle qui croit en toi, même parfois quand toi-même tu doutes de toi. Ouais. et Elle t'a ouvert la porte à un moment où personne d'autre ne l'aurait fait. Et ça a changé tout.

  • Speaker #0

    J'ai peur de ne pas citer la bonne personne et d'oublier. Mais là,

  • Speaker #1

    attention, parce que si je ne cite pas la bonne personne, après,

  • Speaker #0

    il va écouter ou elle va écouter l'épisode.

  • Speaker #1

    Elle va t'en vouloir.

  • Speaker #0

    Alors, la personne qui a cru en moi, j'irais Francis Crespin. C'est... un de mes tout premiers coachs de basket. C'est un coach qui m'a appris à faire le lay-up, le move basique au basket. Je me souviens, comme c'était hier, j'avais 12 ans. Mais c'est un homme avec qui je suis encore en contact. On était encore au téléphone avant-hier. Il fait office de mentor dans ma vie. Plusieurs fois, je l'ai appelé quand c'était très compliqué au basket. Ça a pu être à 18 ans, comme ça a pu l'être dernièrement, 12 ans plus tard. Et il a... toujours eu pareil, les bons mots, toujours eu ce soutien indéfectible. Il croit en moi puisque je ne crois en moi. Vraiment, la façon qu'il a de me coacher, les conseils de ce qu'il dit de moi, je sens vraiment quelqu'un qui a toujours cru en moi, qui m'a toujours repoussée et qui a surtout de manière très avant-gardiste, j'irais, parce que maintenant, on replace beaucoup l'humain dans la performance, mais parler justement de l'humain, de l'importance du bien-être pour performer. Moi, il m'en parlait déjà quand j'avais à peine 20 ans. donc il y a déjà plus de dix ans. Et ça me parlait, ça faisait écho en moi, parce que j'ai toujours moi compris aussi que je n'étais pas une personne qui était tournée uniquement vers la performance sportive. J'avais besoin d'un bien-être global, j'avais besoin de me sentir bien émotionnellement, j'avais besoin de faire d'autres choses en dehors du basket. Et ça, beaucoup de gens ne l'ont pas compris. On m'a souvent dit que je me dispersais, parce que j'ai continué mes études, parce que j'ai fondé une asso, et que du coup, je n'étais pas suffisamment concentrée au basket. Et lui, en revanche, il m'a toujours encouragée à cultiver autre chose à côté de ma carrière. Et c'est vraiment le conseil number one que je donne à tout jeune athlète que je rencontre. De toujours cultiver son jardin secret à côté de sa carrière. Parce que le danger, quand on se voit uniquement à travers une casquette, c'est de se définir en fait par cette casquette-là. Et ça veut dire quoi ? Que quand on performe, on se pense être la meilleure du monde, donc avoir tendance à être hautain. Et en revanche, quand on ne performe pas, de se dévaloriser, de se dénigrer, de se penser vraiment nul. Et donc, ça, c'est vraiment quelque chose dans lequel je ne voulais pas tomber, ce piège-là, de me définir uniquement à travers ma casquette de basketteuse. Et lui, c'est aussi quelque chose qu'il m'a partagé très tôt dans ma carrière. Donc vraiment, je le donnerais lui en premier exemple, même s'il y en a eu d'autres. Mais il a fait office de mentor et vraiment, je le remercie pour l'impact qu'il a eu dans ma vie.

  • Speaker #1

    Ah oui, non, mais ce qu'il t'a dit, c'est... Moi aussi, je lui dis merci parce que c'est incroyable. J'allais dire, mais à la fois, le sport peut t'encenser et te porter au nu. Mais en même temps, et donc cultiver la confiance, etc. Mais en même temps, comme c'est une activité très exigeante, quand on échoue, il faut pouvoir se... motivée déjà personnellement et se dire mais relève-toi, tu n'es pas si nulle.

  • Speaker #0

    C'est ça. Surtout, tu n'es pas que ça. C'est puissant. Moi, c'est ça qui m'a aidée avec la blessure. Parce qu'en fait, si on se voit qu'à travers cette casquette, si je me dis ok, je ne suis que basketteuse, le jour où il n'y a plus de basket, qu'est-ce que je deviens ? En fait. Et c'est toute la remise en question que j'ai dû effectuer durant ma longue blessure. Ça a été vraiment une très longue traversée du désert. Moi, je me souviens, les premiers jours... J'étais là à déambuler dans mon quartier. à Orly. Et je me suis dit, mais qu'est-ce que je fais là ? Je n'avais jamais été, en tant qu'adulte, je n'avais jamais vécu sur Paris, en fait. Moi, je connaissais Paris que le week-end, chez mes parents, dans un cadre bien précis. Mais là, de prendre ma voiture, de sortir, d'aller faire les courses, de ne pas être avec des sportifs, c'était très, très déroutant pour moi. Donc, pendant deux mois, il y a vraiment eu cette perte d'identité et cette reconstruction nécessaire à faire. Petit à petit, j'ai commencé à sortir, à rencontrer d'autres personnes. Et j'avais même du mal à... terme à me définir comme une basketteuse parce que je ne pratiquais plus et je ne savais plus qui j'étais. Et vraiment, je te parle de ça, mais ça fait que depuis quelques mois seulement que j'ai su reconnecter avec mon identité et comprendre la femme que j'étais dans son entière essence, tu vois. Mais j'avais perdu totalement la notion de mon identité. Je ne savais plus qui j'étais. Je ne me présentais plus comme étant basketteuse parce que ça faisait plus d'un an que je ne jouais plus. En même temps, je fais des études, mais je ne suis pas encore diplômée, donc je ne peux pas me qualifier sous le titre. Donc c'était compliqué. Qui suis-je ? Qui suis-je ? Et donc, c'est vraiment important de... C'est aussi pour ça que je préconise de ne pas se définir uniquement à travers sa casquette professionnelle. Parce qu'on est bien plus que ça.

  • Speaker #1

    D'accord. Même si tu t'es présentée au début, je vais donc te répondre à la question.

  • Speaker #0

    Qui es-tu ? Qui je suis ? Aujourd'hui, moi, je me définis avant tout comme une femme engagée. D'accord. Voilà, je pense que c'est la casquette que j'aime bien porter. Une femme engagée qui a envie de faire changer les choses. Et ça, quand je le dis, ça me ramène à la jeune que j'étais. À 9 ans ? À 9 ans, vraiment. J'ai toujours été engagée. Je me souviens, en CP, je me suis présentée pour être déléguée. Le premier échec de ma vie, trois votes, dont un qui était le mien. Je me représente, tu vois, quelques années plus tard, je deviens déléguée. Pour moi, c'est aussi une forme de succès. Je suis heureuse. un de mes premiers gros succès. Quelques années plus tard, je deviens conseillère municipale. Mais en fait, tout ça pour dire que j'ai toujours eu à cœur de défendre, de porter la voix, de s'envoier, de changer les choses, de dire les trois questions.

  • Speaker #1

    L'enfant que tu étais, qui n'avait reçu que trois voix, à ce moment-là, qu'est-ce qu'elle se dit ?

  • Speaker #0

    Aïe, aïe, aïe, ça m'a fait mal. Moi, je me souviens, tu vois, je t'en parle, j'étais en CP. Oui,

  • Speaker #1

    parce que... La manière avec laquelle on vit l'échec quand on est tout petit, comment tu... Alors, si tu devais comparer entre les deux,

  • Speaker #0

    entre avant,

  • Speaker #1

    quand tu étais petite, et maintenant, en tout cas avec la blessure de 3 ans, qu'est-ce qui a été le plus dur ?

  • Speaker #0

    La blessure de 3 ans, je pense, parce que...

  • Speaker #1

    Psychologiquement,

  • Speaker #0

    je pense à la blessure de 3 ans, parce que vraiment, l'échec du CP, ça m'a vraiment marquée sur le coup, mais honnêtement, je ne sais pas l'impact que ça a eu en moi. Je sais juste que je me suis dit, waouh, je ne suis pas populaire. Je pense que je vais venir. Voilà, c'est tout.

  • Speaker #1

    Tu n'as pas eu honte ?

  • Speaker #0

    Ah, je me suis dit, quand même, j'ai... Pas d'amis, tu vois, à l'époque, c'est ça. Tu n'as pas d'amis, tu vois. D'accord. Et donc, c'est vraiment ce que je me suis dit. Mais bon, en tout cas, je me suis représentée l'année qui a suivi. Ah oui, d'accord.

  • Speaker #1

    Et c'est là que tu es devenue déléguée.

  • Speaker #0

    Je crois que c'était l'année d'avant, cette année-là ou celle d'après. Mais en tout cas, ça ne m'a pas découragée. D'accord. Je me suis représentée.

  • Speaker #1

    Comme quoi ? Tu vois, le parallèle, c'est quand on est petit, on en casse le cou, mais on rebondit. Il n'y a pas de souci. Et pourtant, quand on est adulte, on rumine.

  • Speaker #0

    On tente d'antisme.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça. Comme si la vie s'arrêtait au moment où on a vécu ce qui est compliqué. Tu as créé tes rangabies. Justement, tu m'as parlé, tu me dis que tu es une femme d'engagement, ce qui est le cas. Est-ce que tu as eu du mal également à te trouver ? Est-ce que tu t'es sentie légitime au moment où tu as commencé à porter ce combat ? Tu as abordé ce que c'est que tes rangabies, ses objectifs, etc. On va répondre ensuite à la deuxième question par rapport à la légitimité.

  • Speaker #0

    Alors, Terran Gabi, c'est une association que j'ai fondée en 2018. La genèse de ce projet, c'est la lutte contre la dépigmentation volontaire de la peau. Donc en fait, moi, j'ai été au Sénégal en 2017, après 15 ans d'absence. Donc j'avais 22 ans à l'époque. Quand j'y retourne, je suis pleine d'illusions. Trop heureuse. Vraiment, j'ai senti que pendant mon adolescence, ça m'avait manqué. qui a eu vraiment un manque dû à cette... identité que j'ai pas pleinement formée au Sénégal. Le fait de ne pas y aller, le fait de ne pas reconnecter avec mes proches, il y a eu une fracture. Quand j'y suis retournée, j'étais vraiment la plus heureuse du monde. Ça a été un choc, je sors de l'avion même, je pleure parce que je ressens cette reconnection. Littéralement, c'est comme si on m'avait arraché du sol et qu'on me replantait chez moi. C'est vraiment ce que j'ai ressenti. Je ressens l'odeur du Sénégal que je n'avais pas senti depuis 15 ans. La reconnexion est totale. Je passe de très bonnes vacances, mais en même temps, j'essuie pas mal de remarques. sur la couleur de ma peau. Ma mère aussi, ma petite sœur, car on a la peau foncée. Je me souviens, une fois, j'étais maquillée, un peu comme là, et quand tu mets un peu de fond de teint, ça te claircit légèrement, ça donne un teint un peu plus orangé. Et j'ai ma tante, je portais un t-shirt noir qui me dit « Ah, ça, c'est pas bon, mais là, comme t'es là, c'est bien. » Habituellement, je suis noire comme mon t-shirt, mais que là, avec le fond de teint, ça passe mieux. Je souris, ça ne m'attend plus trop à cet âge-là, vraiment, les remarques. J'en ai essuyé pas mal dans l'adolescence. Mais le coup de grâce, c'est le jour où j'entends ma petite cousine qui dit à ma soeur, donc elles ont 4 ans et 7 ans, « Je suis plus belle que toi parce que je suis claire de peau. » Cette histoire, je la raconte partout où je vais, parce que c'est vraiment ça qui a été le déclic de ce projet, de l'urgence pour moi que de fonder quelque chose en ce sens. Parce que... Une fille de 4 ans qui a déjà conscientisé les enjeux du colorisme, c'est grave, c'est très très grave. Donc je rentre en France, on m'avait suggéré à l'époque de faire un camp de basket comme j'étais basketeuse pro, et je me dis j'ai pas envie de faire un énième camp sportif. Plein d'athlètes font ça, c'est très bien, mais j'avais pas envie, ça me motivait pas. En revanche, de faire un camp de basket éducatif, ça, ça me motivait. Parce que c'était à mon image, sport et éducation, et que pour moi l'éducation c'est la clé. Donc je me dis ok. L'année d'après, je retournerai au Sénégal, donc en 2018, et je fonderai Terre en Gabi. Donc toute l'année, j'ai réfléchi à ce projet, on m'a connectée, j'ai tout organisé à distance. Et en arrivant, on monte ce premier camp de basket éducatif féminin à Thies, dans la ville de mes parents. Et dans ce camp-là, on fait venir des experts, donc dermato, sages-femmes, psychologues, pour parler des enjeux de la confiance en soi, l'estime de soi, de la dépigmentation de la peau, mais aussi des violences sexuelles et de l'éducation sexuelle avec les jeunes filles. Donc on choisit la période de l'adolescence parce que c'est une période dans laquelle les jeunes filles se construisent. Et donc aussi où il est important de planter les bonnes graines qui vont pouvoir permettre à ces jeunes filles de devenir des femmes confiantes et sûres de leur identité. Parce que le problème, c'est que quand tu as 15 ans, on passe ta vie à te répéter que tu es trop ci, trop ça. Tu nourris des complexes, tu construis même des complexes. tu deviens une femme complexée qui peut potentiellement recourir ensuite à la dépigmentation volontaire de la peau. Et donc nous, l'enjeu, c'était vraiment de casser ce cycle et de planter dans le décor un nouveau discours, un nouveau paradigme pour ces filles-là et de leur dire, écoutez, on peut être noire, belle, réussir, être désirable, tout ce que vous voudrez, et c'est très bien comme ça. L'enjeu, il n'est pas de se dire, je suis plus belle quand je suis foncée ou je suis plus belle quand je suis claire, c'est juste de s'accepter. telle que l'on est. Au Sénégal, on a la chance d'avoir des femmes aussi noires que moi, d'autres plus claires comme toi. Et c'est très bien. C'est ça qui est la diversité aussi de la peau.

  • Speaker #1

    Comme il y a des brunes, des blondes.

  • Speaker #0

    Exactement. Et donc du coup, ça a été vraiment la naissance de ce projet. Et donc ensuite, on a évolué sur un concept plus global, sur la confiance en soi et l'estime de soi. Parce que la dépigmentation de la peau, au final, c'est quoi ? C'est un manque de confiance en soi et d'estime de soi. Oui,

  • Speaker #1

    c'est clairement.

  • Speaker #0

    Voilà. Et donc de là, on a créé tout un programme. Et aujourd'hui, on accompagne des jeunes filles sur toute une année scolaire, sur des temps sport, éducation, pour les sensibiliser à tous ces enjeux, pour leur permettre de se connaître, de développer leurs compétences, leurs appétences et d'avoir un plan de vie à la fin solide pour lancer leur vie de femme. Et ne plus s'arrêter à tous ces dictates, à toutes ces injonctions de la société qui les poussent à se dénaturer et à se détester tout simplement. C'est vraiment ça, Terran Gabi. C'est beau.

  • Speaker #1

    Et si on veut te soutenir, si on veut soutenir Terran Gabi, comment ça se passe ?

  • Speaker #0

    Alors, si on veut me soutenir, donc là, on va lancer prochainement une campagne de parrainage. J'aimerais vraiment qu'on puisse... Parce qu'en fait, là, on va partir sur une année, donc à partir de septembre, donc jusqu'à juin, une année scolaire, où les jeunes filles vont venir deux fois par mois. On va accompagner deux fois plus de filles. Donc, on est passé de 100 à 40. On va accompagner des filles scolarisées et non scolarisées. et le but pour nous c'est vraiment d'avoir des ambassadrices dans toute la ville de Louga. la vie dans laquelle on est présente. Et pour ça, il faut des moyens. Aujourd'hui, nous, on souhaite lancer cette campagne de parrainage pour permettre à chaque fille d'avoir un parrain, une marraine, qui la soutiendrait. L'objectif pour nous, c'est d'avoir 150 parrains qui parraineraient 100 filles. Et donc, ça permettrait largement de pouvoir mettre ce projet en place, même s'il va déjà être lancé, mais pour nous permettre du moins d'avoir une marge. pour pouvoir travailler davantage, pour travailler mieux aussi et mieux les accompagner. Donc, on va lancer cette campagne-là. Donc, ne pas hésiter à nous soutenir. Aussi, nous suivre sur les réseaux sociaux. On a une page Instagram.

  • Speaker #1

    Terrangabi.

  • Speaker #0

    Terrangabi, voilà. Et on a un site Internet. Voilà. Donc, www.terrangabi.org. C'est le site.

  • Speaker #1

    Faites des dons. Voilà.

  • Speaker #0

    Faites des dons, soutenez, partagez. Mais surtout, voilà. Et je cherche aussi des entreprises, partenaires, des institutions qui veulent s'associer à nous. nous prêter main forte, parce que c'est un projet qui a pour ambition quand même de prendre de l'envergure. On est au Sénégal, demain on va être dans la sous-région africaine. Donc voilà, c'est un projet qui ne fait que commencer. Et moi, c'est vraiment aussi pour moi le projet d'une vie. Je ne sais pas comment il évoluera, mais moi l'éducation, c'est vraiment mon credo. C'est vraiment quelque chose dans lequel j'ai envie de m'engager pleinement.

  • Speaker #1

    En tout cas, c'est un très, très beau projet. Je te dis bravo.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Pour revenir donc à ma question, c'est est-ce que... Tu t'es sentie légitime de porter un tel projet ? Est-ce qu'on t'a fait sentir que tu ne l'étais pas ?

  • Speaker #0

    Alors oui, je me suis sentie légitime parce que je pars d'une expérience personnelle. Ce projet, c'est totalement moi. J'ai été cette jeune fille dont on se moquait plus jeune parce qu'elle était trop foncée de peau. Et c'est là où j'ai vraiment compris que c'était un enjeu, en tout cas en étant plus âgée, c'était un enjeu qui me dépassait, déjà avec l'histoire de ma petite sœur, mais aussi pour avoir grandi en France et avoir aussi connu le colorisme. pas que sur ma propre personne, mais sur d'autres. C'est un vrai enjeu. Et puis, encore une fois, ce n'est pas qu'une question esthétique. Moi, je ne viens pas juste dire aux filles, ce n'est pas bien se dépigmenter la peau, machin. Non, non seulement c'est un danger pour elles, sanitaire. Donc, qui dit dépigmentation, dit cancer de la peau, hypertension, mycose, gale. Donc, des maladies qu'on retrouve énormément chez les femmes africaines. Mais il y a aussi cet aspect psychologique de rejet de soi. Et pour moi, c'est tellement violent. Comment on veut... On parle de développement en Afrique, matin, midi, soir, mais il n'est pas qu'économique le développement, il est surtout mental.

  • Speaker #1

    Il est même d'abord mental.

  • Speaker #0

    Il est même d'abord mental aujourd'hui, pour pouvoir progresser, pour pouvoir avancer. On a besoin d'être un peuple, en tout cas d'être des peuples, parce que ce n'est pas qu'un seul peuple, mais d'être des peuples, des États, des sociétés, des communautés qui ont confiance en elles-mêmes, qui s'aiment, qui savent d'où elles viennent. Et il y a eu une vraie rupture en fait. Aujourd'hui... beaucoup de jeunes en Afrique, beaucoup d'Africains ne savent pas qui ils sont, n'en sont pas fiers, veulent copier tout ce qui vient de l'extérieur, mais c'est ça qui est regrettable, en fait. Et moi, le projet, c'est vraiment aussi pour dire à la jeunesse, pour dire aux filles, vous êtes très bien comme vous êtes. Et c'est parce que vous êtes comme ça que vous devez agir en conséquence, que vous devez faire ci, que vous devez faire ça. Ne cherchez pas à copier. Vous êtes uniques. Avancez. Faites ce que vous avez à faire. Connaissez-vous. Mais ne vous dénaturez pas, on ne peut pas se dénaturer et espérer faire des choses originales au final.

  • Speaker #1

    Exactement. Commençons par la fameuse connaissance de soi.

  • Speaker #0

    C'est ça.

  • Speaker #1

    Et qui dit connaissance de soi, dit finalement amour de soi.

  • Speaker #0

    Amour de soi, voilà.

  • Speaker #1

    Est-ce que c'est plus compliqué de gagner une coupe ? Alors, qu'est-ce qui est le plus difficile ? Il faut que je formule bien ma question. Qu'est-ce qui est le plus difficile ? Gagner un championnat de France, ou convaincre une jeune fille qu'il ne faut pas qu'elle se dépigmente ? Qu'est-ce qui est plus con ?

  • Speaker #0

    Il y a un dilemme. Parce que la jeune fille... Il y a un dilemme parce que la jeune fille, encore une fois, je ne suis pas la seule à lui parler. Il y a toute la société qui lui rappelle qu'elle est trop noire. C'est-à-dire que quand on sort au Sénégal, aujourd'hui, les panneaux publicitaires qui font la promotion de la dépigmentation de la peau sont présents partout. Les spots TV, les spots radio. Moi, je suis une fan des séries sénégalaises. Aujourd'hui, je dirais peut-être un peu moins, mais il y a une apologie. incroyables des produits dépigmentants. Les influenceuses que l'on met en avant dans la société, elles sont toutes pareilles, elles ont toutes ce même... Oui, cette même identité, en fait. Et elles sont aux antipodes des jeunes filles que je vois au quotidien dans mes camps de basket. Donc, c'est pas facile d'être championne de France, mais c'est pas facile aussi de se liguer contre la dépigmentation volontaire de la peau. Parce que c'est une vraie industrie, c'est... C'est quelque chose qui est très présent dans les mentalités en Afrique.

  • Speaker #1

    C'est pour ça que des projets comme Terangabi valent le coup d'être soutenus pour que des changements de mentalité, en tout cas...

  • Speaker #0

    Effectivement.

  • Speaker #1

    On arrive à la toute fin. J'ai deux dernières questions. Si on devait retenir qu'une seule chose de toi, tu voudrais qu'on retienne quoi ?

  • Speaker #0

    J'aimerais qu'on retienne que... J'ai fait de mon mieux pour impacter positivement mon environnement. C'est-à-dire que moi, ce que j'aimerais vraiment laisser demain en partant, c'est l'espoir et surtout des progrès significatifs dans l'éducation en Afrique. Moi, l'éducation, j'ai parlé du sport, mais avant le sport, il y a vraiment eu l'éducation. L'éducation, ça a été cet élément qui m'a permis réellement de m'élever socialement, je pense. Et pas que socialement, mais intellectuellement. d'être ouverte sur le monde, d'avoir un esprit critique, analytique, fort. Et c'est super important pour moi. Moi, j'aime le fait de pouvoir me dire que je peux penser par moi-même, que j'en ai la capacité aussi, parce que l'école, c'est pas que retenir telle et telle leçon, mais c'est surtout la capacité à réfléchir, à analyser, à se positionner dans le monde. Et c'est ça, en fait, qui... permet d'avoir une voix, ça qui permet de se distinguer, qui permet de faire progresser aussi la société. Donc l'école c'est un... C'est indispensable. On peut nous dire ce qu'on veut. Je ne parle pas de diplôme, je ne parle pas de tout ça. Je parle vraiment de cette capacité que l'école permet à savoir de se développer intellectuellement, d'être en mesure de réfléchir en fait, et d'avoir du répondant, d'avoir une conscience, de pouvoir tout simplement avoir ce libre arbitre. que l'école aussi permet d'acquérir, je pense. Il ne vient pas automatiquement.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu dirais aujourd'hui que tu as réussi ?

  • Speaker #0

    Ah, j'ai que 30 ans, donc franchement, ça serait prétentieux de dire oui.

  • Speaker #1

    C'est quoi réussir ?

  • Speaker #0

    C'est une bonne question. Mais non, je n'ai pas encore réussi. Il y a tellement de choses que j'ai envie d'accomplir. Mais réussir, c'est de se dire, encore une fois, qu'on a été aligné déjà avec la personne que l'on a été. avec ce que l'on projetait aussi. Moi, j'ai mes valeurs, j'ai mon système de valeurs, j'ai mes convictions, c'est de me dire que j'ai été alignée avec, en fait. Et que j'ai fait de mon mieux à chaque fois. J'ai toujours donné mon 100% à un moment donné, dans un endroit donné. Mais surtout, voilà, que j'ai su rester alignée et que je n'ai pas été déroutée à un moment donné. Que j'ai toujours su garder la tête froide, la tête haute et avancer dignement et faire ce que j'avais à faire. Donc, je n'ai pas encore réussi, mais je dirais que je ne m'en sors pas trop mal. Je fais de mon mieux au quotidien, en tout cas. Au final,

  • Speaker #1

    si je retiens juste ta définition,

  • Speaker #0

    tu as réussi ? Plus ou moins. On va dire qu'avec le temps, l'alignement arrive. Non, mais ce que je ne veux pas dire, c'est que la vie, c'est un cheminement. C'est vraiment ce que je comprends. Il y a des moments où on est plus ou moins dérouté. Mais je peux dire en tout cas aujourd'hui que face à toi, tu as une femme qui s'aligne de plus en plus.

  • Speaker #1

    Voilà. Écoute, Abby, c'était un... plaisir de pouvoir échanger avec toi.

  • Speaker #0

    Le plaisir est partagé.

  • Speaker #1

    S'il y a quelque chose que je retiens, c'est que tu es un vrai leader. On t'a reproché tes camarades de classe peut-être par inconfort, parce qu'elles ne savaient pas comment se mouvoir à tes côtés, avaient du mal à te capter, à comprendre, en tout cas à se positionner elles-mêmes. Mais ton leadership, en tout cas aujourd'hui, c'est celui d'une personne très intérieure, qui est alignée, qui est à l'aise avec qui elle est. et... il y a cette aura naturelle qui se dégage et qui fait que ton propos est extrêmement aligné et convaincant. C'est ce que moi je retiens de cet épisode. C'est d'avoir fait la rencontre d'une femme, d'un leader, d'une femme alignée qui a des convictions, des convictions très très fortes, qui reconnaît sa part d'erreur, sa part de, sa marge de, comme on dit en RH, ses axes d'amélioration, ses axes de progression. mais qui avance sereinement. Il y a quelque chose de très serein chez toi. Et ça fait du bien. Ça m'a fait du bien de t'écouter. Ça m'a renvoyée aussi à mes propres questionnements. Et j'espère que ceux qui, toutes les personnes qui m'ont écoutée, vont également s'interroger avec beaucoup de douceur, avec beaucoup de bienveillance. Il y a beaucoup de bienveillance vis-à-vis de toi-même et que l'on ressent. Et donc, on se dit, c'est aussi également vis-à-vis de nous-mêmes. Donc, il y a cette forme de bienveillance que l'on a. Je le retiens. Moi, c'est ce que je prends dans cet épisode. Et je partirai avec, je me sentirai un peu mieux, on va dire, les prochains jours. Merci de me l'avoir communiqué, Abby. Pourquoi on regarderait ton épisode ? Pour quelles raisons ? Là, tu peux pitcher maintenant devant cette caméra.

  • Speaker #0

    Alors, regarder cet épisode, pourquoi ? Parce que ça a été, je pense, un moment très intéressant, déjà pour Nicole, mais aussi pour moi. Le fait de s'exprimer, ça a permis aussi de se reconnecter à soi. en parlant avec Nicole j'ai eu aussi une conversation avec moi-même et la conclusion de Nicole, donc il faut aller jusqu'au bout de l'épisode pour le savoir, elle a été très belle, très juste et je pense qu'aujourd'hui je suis dans une phase de ma vie où clairement c'est la sérénité que je recherche. Donc merci Nicole d'avoir su se lâcher chez moi et j'en suis vraiment ravie d'être touchée.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup. Voilà, cet épisode de We Talk se termine. Je vous remercie à toutes et à tous d'avoir de l'avoir écouté, il est disponible sur toutes les plateformes YouTube, Deezer, Spotify, Apple Podcast, Apple Addict, Podcast Addict, pardon. Et bien sûr, rejoignez la communauté WeTalk sur Instagram, LinkedIn, TikTok. On attend que vous portez-vous bien et à très bientôt. Bye bye.

  • Speaker #0

    Sous-titrage Soci

Chapters

  • Introduction de l'épisode avec Nicole Ewek

    00:06

  • Présentation de Abi Gaye et son parcours sportif

    00:12

  • L'importance de l'échec dans la carrière d'Abi Gaye

    00:51

  • L'échec à l'étranger : le passage en Hongrie

    06:51

  • Rebondir après une blessure : le processus de réhabilitation

    10:40

  • Soutenir Terrang'Aby et l'engagement d'Abigaye

    43:31

  • Création de l'association Terrang'Aby et ses objectifs

    45:21

Description

✨ Et si le sport était bien plus qu’un jeu ?
Et s’il devenait une arme pour se relever, inspirer et changer des vies ?


C’est exactement ce que nous explorons dans weTalk, le podcast qui transforme l’échec en réussite.
Une émission intimiste où l’on parle de résilience, de seconde chance et de ces histoires vraies qui rappellent que tomber n’est jamais la fin, mais un nouveau départ.


Dans ce nouvel épisode, je reçois Aby Gaye, basketteuse professionnelle et fondatrice de l’association Terrang’Aby.

Elle nous confie :
- Comment elle a transformé blessures, doutes et échecs en véritables moteurs pour grandir.
- Son engagement au Sénégal contre le colorisme et la dépigmentation, pour redonner confiance aux jeunes filles.
- Pourquoi elle croit que l’éducation et l’estime de soi sont les clés pour bâtir une société plus forte et plus juste.


💡 Comment garder foi en soi quand le corps lâche ?
💡 Comment transformer la douleur en mission ?
💡 Et pourquoi la confiance est le plus grand trophée qu’on puisse gagner ?


Aby Gaye nous rappelle qu’au-delà des terrains et des médailles, le vrai combat est intérieur : apprendre à s’aimer, à s’accepter, et à inspirer les autres à en faire autant.

Un épisode vibrant, puissant, qui montre que le sport peut être une école de vie et un levier d’émancipation.


🎧 Disponible sur toutes les plateformes (Spotify, Deezer, Apple Podcasts, podcast addict, YouTube).

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Enregistrement : L'Appart studio
Musique : Nicole Eweck


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à toutes et à tous, je suis Nicole Ewek et tu écoutes We Talk, le podcast qui transforme l'échec en réussite. Mon invitée du jour, c'est une femme exceptionnelle, exceptionnellement grande, exceptionnellement dans le cœur, grande dans le cœur, c'est Abigaye. Bonjour Abie, comment tu vas ?

  • Speaker #1

    Bonjour Nicole, je vais très bien, merci.

  • Speaker #0

    Je suis ravie de t'avoir sur le micro, enfin en tout cas sur le plateau de We Talk aujourd'hui, tant pis ce qu'on a eu un peu de mal.

  • Speaker #1

    On a eu du mal à se coordonner au niveau des dates, mais finalement on est là toutes les deux.

  • Speaker #0

    Alors je vais te laisser te présenter. auprès des auditeurs de We Talk.

  • Speaker #1

    Très bien. Alors moi, c'est Abigaye, j'ai 30 ans, je suis basketteuse pro maintenant depuis une dizaine d'années. J'ai principalement joué en première division en France, mais aussi un peu à l'étranger. Et j'ai aussi eu l'honneur d'être internationale française, d'avoir été en équipe de France.

  • Speaker #0

    Justement, au cours de cet épisode, on va parler d'un athlète. Il y a des hauts, il y a des bas. Ta vie en tant que présidente de Terrangabi, qui est une association, tu vas m'en parler un peu plus longuement. Mais avant ça, il y a une tradition à We Talk. C'est que je présente mes invités grâce à un conte que j'ai écrit rien que pour eux. Est-ce que tu es prête à écouter le tien ? Oh, j'ai hâte ! Bon, alors. Il était une fois une géante par la taille, mais pas seulement. Une géante de cœur, d'engagement, d'idéal. Elle s'appelle Abigail. Elle est née à Vitry-sur-Seine, dans une banlieue parisienne. Ses parents sont des... Peul, venue tout droit de Dakar au Sénégal. Petite, elle déborde d'énergie, grandit plus vite que les autres. À 4 ans, son père, visionnaire on dirait, sans le savoir, lui met un ballon entre les mains. C'est un geste simple, une intuition de papa, mais il vient d'éveiller un destin. Le basket, pourtant, ne sera pas tout de suite le coup de cœur. Ce n'est pas bien sûr le coup de foudre, mais c'est une danse timide. Elle teste l'athlétisme, le tennis, elle explore ce qu'elle recherche, ce que seule une équipe peut offrir, la chaleur du collectif, la boue. beauté de la solidarité, le pouvoir du nous. Alors elle revient au basket et là, tout s'éclaire. En 2013, alors qu'elle est âgée de 18 ans, Abie rejoint Toulouse Métropole Basket et fait son entrée dans le monde professionnel. Puis tout s'enchaîne. Une médaille d'or en équipe de France U20, arrachée à l'Espagne en 2014. Une courante de championne de France en 2017 avec Villeneuve d'Ascq. Elle brille sur les parquets, elle pose son rythme, s'agrase. Mais ce que les projecteurs ne montrent pas, ce sont des blessures, des nuits d'angoisse. des corps fatigués qu'il faut réapprendre à aimer. Être sportif de haut niveau, c'est aussi ça. C'est tomber, c'est douter, puis se relever. Mais Abhi, ce n'est pas qu'un pivot d'exception. C'est une conscience, une voix, une âme éveillée. Car très tôt, à 9 ans, elle crée sa première association. À 11, elle devient conseillère municipale des jeunes. Un jour, dans la bibliothèque de l'école, elle tombe sur un article qui raconte l'histoire de la traite négrière. Et là, tout bascule. Quelque chose se noue entre cet enfant et l'Afrique, son continent d'origine. Une mémoire transmise, un fil invisible qui ne la quittera plus. Elle se rend au Sénégal, découvre un pays qui lui y ressemble. Mais aussi un choc. Là-bas, près d'une femme sur trois se dépigmente la peau. Noir, chez certaines, ne veut pas dire beau. Noir veut dire trop, trop visible, trop brut, trop rejeté. Les surnoms sont violents. Charbon, minuit, crapaud. Alors, Abby décide de ne plus se taire. Elle crée Terangabi, qui veut dire la lumière d'habit. Une association qui œuvre pour l'estime de soi des jeunes filles sénégalaises. Elle les invite à se voir belles, fortes et puissantes. À travers le sport, elle leur transmet ce que le basket lui a offert, la confiance, la rigueur, l'amour de soi. À chaque rebond, à chaque mot, à chaque action, Abigaï nous rappelle que l'on peut être athlète et militante, féminine et puissante, noire et fière. Elle incarne ce que We Talk célèbre, la résilience, la transformation, l'engagement. Et aujourd'hui ? Abhi vient de raconter son histoire. Alors, prends une grande inspiration. Car voici venir une femme qui n'a jamais baissé la tête. Une femme qui se tient droite. Une femme debout pour toutes les autres. Bienvenue dans We Talk. Bienvenue Abhi Gaye.

  • Speaker #1

    Waouh ! Déjà, merci beaucoup pour cette magnifique présentation, Nicole. Je vois que tu as fait un vrai travail de recherche.

  • Speaker #0

    C'est mon travail.

  • Speaker #1

    C'est vraiment appréciable. Je vais juste apporter deux petites rectifications. Je ne suis pas peule.

  • Speaker #0

    J'étais sûre.

  • Speaker #1

    En fait, ma mère, je pense, l'est de par son famille qui est si. Mais elle dit toujours, c'est une Paul Wolofisé. Je dirais plutôt que je suis Wolof quand même. Et la deuxième rectification, c'est que j'ai commencé le basket à 12 ans, mais le sport à 4 ans.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc, j'ai commencé pas mal de sport avant de faire du basket. Mais c'est réellement à 12 ans que j'ai été initiée en club. J'ai eu à toucher le ballon, c'était un petit peu avant. Mais c'est vraiment à 12 ans que je prends ma première licence. Voilà, ça c'est les deux seules petites erreurs.

  • Speaker #0

    C'est tout le reste. C'est mon petit cadeau que j'adore faire à tous mes invités. Je me suis dit, j'ai eu un doute, je voulais t'envoyer un message tout à l'heure pour te dire, t'es peule ou ? T'es peule ou ?

  • Speaker #1

    Mais je suis un petit peu, je pense, parce que comme je te le disais, c'est une famille. Bon,

  • Speaker #0

    rien que pour les 1% de sang peule que tu as, ça veut dire que j'ai fait une seule erreur.

  • Speaker #1

    Une seule,

  • Speaker #0

    voilà.

  • Speaker #1

    Une seule seulement.

  • Speaker #0

    Abhi, ma première question, c'est, We Talk parle d'échec, de résilience. Quelle est ta définition de l'échec ?

  • Speaker #1

    Alors l'échec, l'échec, en tout cas, c'est ce qui est communément admis, c'est le fait de ne pas réussir l'objectif fixé et du coup de tomber sans figurer. Et c'est aussi un peu la définition que j'ai, c'est de me fixer un objectif, admettons de me dire, je ne sais pas, je vais obtenir tel diplôme et finalement je ne l'ai pas. Donc c'est un échec. Mais après, c'est vrai qu'avec le temps, j'ai nuancé ma vision de l'échec. Aujourd'hui, je suis vraiment partisane de me dire que les échecs sont nécessaires pour grandir, pour avancer. Sans échec, je ne me remets pas en question. Sans échec, je ne change pas forcément ma façon de faire. qui peut être plus ou moins adapté en fonction des périodes, en fonction de la saison. Donc l'échec, oui, c'est de ne pas réussir ce qu'on s'était fixé comme objectif. Mais au final, c'est quelque chose de nécessaire pour avancer. Et en tant qu'athlète, l'échec, surtout dans mon sport, que l'on pense être un sport d'adresse, le basket est un sport d'échec. Dans le sens où on a plus de chances de rater quand on prend un tir que de marquer. Les statistiques le prouvent. Très peu de gens, au final, finissent des saisons à plus de 50% de réussite. Donc voilà, l'échec fait partie de mon sport, fait partie de ma vie au final. Et même si ce n'est pas facile, tous les jours de l'accepter, c'est un vrai travail d'accepter l'échec.

  • Speaker #0

    Justement, pour toi, quel est le plus grand échec que tu aies vécu et qu'est-ce que ça t'a enseigné ? Est-ce que tu peux partager ça avec nous ?

  • Speaker #1

    Alors, le plus grand échec de ces dernières années, clairement, je dirais mon passage à l'étranger, mon premier passage à l'étranger. En 2021, je suis championne de France avec le club de Basketland. On va dire que je suis à mon apogée d'un point de vue individuel mais aussi collectif. Je joue dans une merveilleuse équipe, dans un club qui m'a fait confiance, dans lequel j'ai signé à l'âge de 24 ans, je crois, 23-24 ans. Donc vraiment pour me donner un nouveau défi, pour continuer à monter en compétences. Et donc on finit championne de France deux ans après mon arrivée dans ce club, et c'est le premier titre du club. Et à ce moment-là, j'avais prévu de rester dans ce club. Je me sentais bien. J'avais déjà donné mon accord de principe. Et quelques semaines plus tard, je reçois une offre, donc celle de Sopron, qui était à l'époque un des plus gros clubs européens. Et moi, je vois ça comme un signe. Je me dis impossible de refuser. Je ne sais pas si j'aurai de nouveau cette occasion-là. Donc, j'accepte. Surtout que Sopron, c'était quand même un club qui me tenait à cœur. C'est le premier club d'Euroleague que j'ai vu jouer. C'est le premier club contre qui j'ai joué aussi en Euroleague. Donc, il y avait une symbolique. Et je me suis dit, ça sera mon premier club à l'étranger aussi. Et malheureusement, ça a été la désillusion totale. J'ai finalement coupé mon contrat après 7-8 mois, il me semble, la veille de mon anniversaire. Et j'ai fini la saison en Italie. Donc, ce fut un échec, mais il m'a beaucoup, beaucoup appris sur moi, sur ma capacité à être résiliente.

  • Speaker #0

    Mais sans vous en couper, mais qu'est-ce qui s'est passé ?

  • Speaker #1

    Alors ce qui s'est passé, c'est que je suis arrivée là-bas avec plein d'espoir, plein d'illusions, prête quand même. Je me suis beaucoup préparée l'été, mais je n'ai pas trouvé un environnement favorable. J'irais même hostile à certains égards. Dans quel sens ? Dans quel sens ? Je n'ai pas de confirmation, mais en tout cas, j'ai senti des ralentes de racisme en fait. C'est un peu ce que j'ai ressenti, beaucoup de rejet. J'ai ressenti du rejet que je ne saurais expliquer aujourd'hui si ce n'est... par ça. Surtout que j'ai eu quelques discussions après avec quelques-unes de mes coéquipières dans l'équipe. Mais j'ai senti vraiment une forme d'hostilité à mon égard. Et je pensais rencontrer ceux-là en dehors de ma structure sportive et c'est à l'intérieur que je l'ai un peu rencontré.

  • Speaker #0

    Ce club, il est en France ou il est... Non,

  • Speaker #1

    il est à l'étranger en Hongrie. La Hongrie qui est un pays réputé pour son nationalisme avec leur président Orban. Mais voilà, je me suis dit, bon, je ne suis pas la première, je peux y aller. Mais c'est vrai que j'ai... pas eu une bonne expérience de ce point de vue-là. D'autres aussi, d'ailleurs, je ne l'ai appris pas à la suite. Donc, voilà. J'ai pris la décision de partir parce que moi, par contre, s'il y a bien une chose sur laquelle je ne badine pas, c'est le respect.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    C'est-à-dire que moi, à partir du moment où la notion de respect est brisée entre nous, je pars. Je te le signale, mais je pars. Je ne peux pas accepter l'inacceptable. Et pour moi, ça, c'est vraiment la limite. Donc, j'ai décidé de partir. donc c'est pas forcément une bonne décision sportive parce qu'en plus ce club là gagne le Roli quelques mois après donc il y a la compétition en Europe mais j'ai aucun regret parce que je sais pourquoi je suis partie à ce moment là aujourd'hui je pourrais me dire oui j'aurais pu mais avec Dessy on refait le monde donc je finis ma saison en Italie je retrouve aussi le goût du basket j'ai la chance de rencontrer une coéquipière de l'équipe de France à ce moment là dans ce club Et donc vraiment, je me refais une santé mentale, on va dire, parce que ça a été vraiment très, très éprouvant. Et puis voilà, et malheureusement, je me fais aussi le ligament croisé quelques mois après cette échec. Ah oui, c'était un machinement. Voilà, donc ça a vraiment été une saison 2021-2022 très compliquée pour moi. Je pense que c'est le plus gros échec de ma vie. Jeune carrière.

  • Speaker #0

    Et comment on fait pour rebondir ? Comment tu te sens ? Est-ce que tu te dis que tu vas pouvoir remonter à un haut niveau ? Ça se passe comment dans ta tête ?

  • Speaker #1

    Alors, je passe par plusieurs étapes. Je me blesse. C'est l'effondrement total. Mais très rapidement, je rebondis. C'est-à-dire, je pense, peut-être 48 heures après, je me dis, OK, quel est le plan maintenant ? On pleure, on se lamente, mais maintenant, on to the next. Donc, je passe à autre chose. Je fais mon petit... planche, je calme au rendez-vous avec le chirurgien, je me fais opérer 15 jours après, donc de manière très expresse au final, et j'entame une rééducation. Sauf qu'il faut savoir, c'est qu'après cette première opération, je me refais opérer de nouveau 9 mois après, donc quasiment à la fin de la rééduc. Et là, c'est un peu le coup de grâce parce que j'avais signé à ce moment-là avec un club en France, pour deux saisons, et donc, ils ont accepté ma blessure, tout le monde l'a accepté, mais on se dit à ce moment-là que je rate une saison et que je reprends pour la seconde. Et au final, je ne joue que 3 mois sur... 24 mois d'engagement. Donc je reprends 18 mois plus tard, après ma première opération. Et donc 18 mois, il faut savoir que c'est énorme. C'est-à-dire que moi, en carrière, j'ai rencontré, je crois, aucun athlète que je connais dans mon entourage, en cas pas une basketteuse qui s'arrêtait autant. C'est particulièrement long. Et donc j'ai eu le temps aussi de beaucoup cogiter. J'ai eu le temps de me poser la question de si je voulais continuer au pal-basket. Qu'est-ce que je voulais faire ? Est-ce que ça en valait encore la peine ? J'ai éprouvé aussi beaucoup de dégoût à l'égard du milieu du basket. Parce qu'en fait, quand on est un athlète, on a de la valeur sur le terrain. Et une fois qu'on n'est plus sur le terrain, on perd en valeur, on perd en considération. Et donc, j'ai vu mon statut passer de potentielle joueuse de l'équipe de France à oublier, on parle de toi au passé, tu n'existes plus. Et donc, moi, la chance que j'ai aussi à ce moment-là, c'est de ne pas être quelqu'un qui s'attache beaucoup à cette image, mais ça pique quand même. Donc, j'ai quand même su, en parallèle de cette blessure, me construire, donc ma carrière, ma future carrière professionnelle, en tout cas, de réfléchir sur ma reconversion pro.

  • Speaker #0

    Tu as quel âge quand tu penses déjà à ta reconversion ?

  • Speaker #1

    Alors, je me suis blessée, j'avais 27 ans, mais on va dire que j'y pense depuis le début de ma carrière. J'ai toujours eu dans un coin de ma tête que le basket était éphémère et qu'il fallait préparer l'après. Donc ça m'a vraiment permis cette blessure aussi de me reconnecter à moi, de savoir ce que je voulais, où je voulais aller. Donc je dirais pas que ça a été un mal pour un bien, je ne recommencerai pas honnêtement. Mais je pense que j'ai su capitaliser sur ce temps-là pour ne pas perdre doublement mon temps, en fait.

  • Speaker #0

    Ok, d'accord. Et tu dirais aujourd'hui que, en quoi cette année 2020-2021, cette saison, a été déterminante pour ta vie, pour l'orientation de ta vie ? Est-ce que tu peux tirer comme bénéfice aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Elle a été très déterminante cette année. ce n'a pas été que sur cette saison malheureusement on va dire que de 2021 jusqu'à le début 2024, ça a quand même été assez compliqué. Parce qu'il faut savoir, on se blesse, 18 mois, mais ensuite il faut reprendre. Donc quand on reprend, qu'est-ce qui se passe ? On n'est pas en forme. Le basket, ce n'est plus aussi facile que quand on l'a quitté. Donc c'est une période qui a duré trois ans en fait. Qui a vraiment duré trois ans de flou, trois ans de vide un peu. Et là vraiment, Dieu merci, cette saison, j'ai pu rejouer, me relancer. et donc... C'est vraiment ça que je me dis, c'est que le plus dur est passé, mais maintenant, il faut continuer à construire.

  • Speaker #0

    Dans cet état-là, quand tu tombes, quand tu as été au plus bas, il y a eu la phase où tu n'étais pas bien, où tu as pleuré, la phase 2 et tout ça. Et puis, il y a eu la phase de, ok, qu'est-ce qu'on en fait ? Comment est-ce qu'on relève ? Mais tu penses que ça vient du basket ou c'est un état d'esprit que tu as toujours eu au final ?

  • Speaker #1

    J'aime quand même grandement le basket. Le basket m'a façonnée, j'en parle encore ce midi avec une amie. Je suis sportive de haut niveau depuis mes 13 ans, j'en ai 30. Donc ça fait 17 ans en fait que je suis poussée dans mes retranchements, 17 ans qu'il faut se relever, tomber, se relever. Donc c'est vraiment un état d'esprit, c'est devenu une seconde nature. C'est pas plaisant de tomber, mais à chaque fois que je tombe, je sais au fond de moi que je vais pouvoir me relever. Je sais que je vais pouvoir trouver les ressources pour le faire. Ça va pas être facile, hein, mais il y a toujours cette lueur d'espoir, parce que j'ai l'habitude de tomber. C'est le propre de l'athlète, c'est pas que... Les médailles, tout ça, c'est vraiment le quotidien, la remise en question, tous les matchs, tout le temps. C'est un éternel recommencement.

  • Speaker #0

    Justement, tu as décidé de faire du basket une caractère. pour métier, métier passion. Là où beaucoup de gens, dans le sport, basket, de foot, on dit souvent qu'il y a beaucoup d'appelés et très très peu d'élus. Est-ce que tu n'as pas eu peur de te lancer dans une carrière sportive, professionnelle ? Je vais peut-être commencer par cette question. Qu'est-ce qui t'a poussé et quel a été le déclic ? D'abord, voilà. Sinon, tu vas te dire, c'était quoi la troisième question ? Et j'ai rien que moi à dire. Non, je ne me souviens plus. C'est ça, je te laisse répondre.

  • Speaker #1

    mais Non, je n'ai pas eu peur parce qu'en fait, il faut savoir une chose, c'est que moi, quand j'ai commencé le basket, je n'imaginais pas une seconde devenir pro. Ce n'était pas quelque chose d'imaginable pour moi. Je n'avais pas de référence dans mon entourage. Donc moi, je commence le basket à l'âge de 12 ans pour prendre une énième licence sportive. J'aime le sport. Chaque année, pour moi, j'attends juste le magazine de la ville de Créteil pour regarder dans quel club je vais m'inscrire. Un an plus tard, je rentre en sport études. Donc là, ça commence à devenir un peu plus sérieux. On parle d'entraînement quotidien, de représenter la région Île-de-France sur des compétitions nationales. Je deviens multiple championne de France à cet âge-là, mais c'est encore insignifiant pour moi. Et c'est vraiment en rentrant à l'INSEP, deux ans après avoir commencé le basket, que là je réalise qu'il y a quelque chose qui est en train de se jouer. Je côtoie au quotidien des Ladis du Couré, des Christine Aron, des Teddy Riner, les plus grands athlètes français dans le temple du sport français. Et je me dis OK. Là maintenant, en fait, ça devient réel. On peut devenir athlète de haut niveau, on peut vivre, en faire un métier. Et j'assiste aussi à mes premiers matchs professionnels. Je vois des joueuses au plus haut niveau français. Et là, je me dis, OK, à 15-16 ans, je deviendrai pro. Mais à aucun moment à ce moment-là, je me dis que ce n'est pas possible. J'étais sûre que je deviendrais pro. Pour ta famille,

  • Speaker #0

    tes parents ? Ils sont tous ok,

  • Speaker #1

    ils t'encouragent Ils m'encouragent dès mes 13 ans en transport et études Je pars de chez mes parents à l'âge de 13 ans Je rentre que le week-end Depuis 13 ans je suis partie de la maison mes parents l'ont compris, ils m'ont beaucoup soutenu aussi Une fois que je rentre dans le moule de l'INSEP pour moi il n'y a pas d'autres issues C'est plus une question Est-ce que je deviens pro, est-ce que je ne deviens pas pro C'est la suite logique Pendant 3 ans je fais mon cursus à l'INSEP Mon objectif c'est à 18 ans de signer mon premier contrat pro Et c'est ce qui arrive. Et donc, petit à petit, je suis prise dans le moule aussi, parce qu'on a un peu formaté pour, en rentrant INSEP. Et voilà, ça fait 12 ans que ça dure maintenant, et c'est devenu mon métier.

  • Speaker #0

    En tout cas, bravo. Il y a une figure féminine qui t'a quand même inspirée, qui t'a donné envie de continuer,

  • Speaker #1

    d'avancer ? Donner envie de devenir pro à 15 ans, non. C'était juste l'environnement. Mais après, petit à petit, il y a des choses qui m'ont beaucoup inspirée. notamment une qui est Lauren Jackson c'est une joueuse australienne que j'ai pu voir à l'âge de 17-18 ans jouer en vrai et elle m'avait impressionnée elle était très grande, elle savait tout faire sur le terrain, elle dominait vraiment c'était un modèle elle m'a vraiment vraiment impressionnée et d'ailleurs quand je me suis fait le croiser c'était l'année du mondial et donc j'avais mon ancienne assistante coach qui lui a demandé de faire un carton, un petit signature un mot quoi Donc, elle m'a fait parvenir après la carte. J'ai eu le plaisir de lire ça. Et ça m'a fait plaisir. Après, bien sûr, je n'étais plus fan à ce moment-là. C'était à trois ans. Mais ça m'a fait plaisir. Voilà, cette marque de respect et d'encouragement de la part d'une si grande joueuse de basket.

  • Speaker #0

    Le sport de haut niveau, ça implique, comme tu l'as dit, des blessures.

  • Speaker #1

    C'est ça.

  • Speaker #0

    En tant que femme, quel est ton rapport à ton corps, à ta féminité ? Avec tout ce que tu as pu... que tu as pu faire endurer à ton corps à travers ce sport. Est-ce que ça a entamé ta confiance en toi ? Est-ce qu'au contraire, ça a renforcé ta confiance en toi et ton rapport à ta féminité ?

  • Speaker #1

    Clairement, le basket a renforcé ma confiance en moi. Ça, c'est sûr et certain. Parce que, comme tu peux le voir, j'ai un physique qui dénote. Je mesure 1,95 m.

  • Speaker #0

    Ouais, de bisfrance. Tu fais 1m95, tu pourrais être Miss France. Oui,

  • Speaker #1

    parfois on me dit, il n'y a pas longtemps, vous êtes mannequin. Je dis non, je suis basketteuse. Ça m'a réellement donné confiance en moi parce que j'ai trouvé un milieu qui a valorisé mon physique. Et dans lequel je me suis valorisée moi-même. Donc au contraire. Après, la chance que j'ai grâce au sport, c'est de me voir bien au-delà de mon physique aussi. Je ne sais pas comment le dire. de ce qu'on attend en tout cas d'une femme dans la société, de son image, de ce qu'elle représente. J'arrive à me voir de manière assez globale. Donc je pense que ça me met dans mon rapport à la féminité, parce que ça m'a montré qu'on peut être féminine de différentes manières. Dans une équipe de basket, on voit tout type de femmes, vraiment de la fille la plus girly au tomboy. Donc ça permet de se dire, ok, il y a plusieurs façons d'être une femme. Il n'y a pas qu'une seule, il n'y a pas qu'un moule. Et je trouve que c'est bien. On peut se façonner son identité en fonction de sa personnalité. Et on n'est pas jugé par rapport à ça, en tout cas dans le monde du sport. On est jugé par rapport à ses performances ou autre. Mais du coup, tout ce qui est rapport... En fait, un peu tous les dictages qu'on retrouve dans la société, en tout cas moi dans le basket, je ne les retrouve pas nécessairement. Et ça enlève un poids, je pense.

  • Speaker #0

    Donc, grâce à ça, finalement, ton rapport à ta féminité a été plutôt... Tu t'es sentie plus femme, du coup ?

  • Speaker #1

    Oui, en tout cas, j'ai défini ma version de la féminité. Je n'ai pas attendu que la société me dise à quoi je dois ressembler. Par exemple, quand on parle de la dépigmentation de la peau, du colorisme, moi, ce n'est clairement pas un sujet pour moi. J'ai l'incarnation de peau foncée. Je ne peux même pas parler de fierté. Je suis née comme ça. Ce n'est pas un acquis. Donc, je suis très bien avec. Je pense que le sport m'a aidée à m'accepter telle que j'étais.

  • Speaker #0

    À l'école, tu es née à Vitry-sur-Seine.

  • Speaker #1

    Je suis née à Vitry, mais j'ai grandi à Créteil.

  • Speaker #0

    À Créteil, d'accord. Est-ce qu'à l'école, on ne te faisait pas ressentir que tu étais trop différente du coup ? Tu étais beaucoup plus grande que les autres.

  • Speaker #1

    Clairement.

  • Speaker #0

    Et comment tu vivais cette différence ?

  • Speaker #1

    Clairement, à l'école, j'étais trop grande, trop grosse, trop noire. J'étais trop tout. Je dénotais, encore une fois, physiquement. Et c'est pour ça que le sport m'a vraiment aidée à prendre confiance en moi. À 12 ans, lorsque je commence le basket, c'est comme une forme de renaissance. Dans ma vie, je situe ma vie avant-après basket. J'ai une vie avant le basket, une autre vie après le basket. Donc quand je commence le basket, je suis vraiment valorisée parce que je mesure 1m82 à l'époque. Les gens sont enthousiastes de me voir entrer dans le gymnase. mais qu'est-ce qu'on va en faire de cette fille ? C'est pépi, tu vois ? Donc, non, vraiment, ça, ça a été une grâce pour moi que de commencer le basket. D'accord,

  • Speaker #0

    ok. En tout cas,

  • Speaker #1

    j'imagine,

  • Speaker #0

    à l'école, on te voyait comme, oh, la fille est trop grande. Et là, tout à coup, dans le basket, c'est comme, oh, c'est génial,

  • Speaker #1

    elle est larmiale.

  • Speaker #0

    Comme quoi, en fait, ce qui peut être notre différence, parfois, c'est juste qu'on n'est peut-être pas au bon endroit.

  • Speaker #1

    Exactement.

  • Speaker #0

    Et là où les gens, pour eux, ils ont une autre norme, Bah... Nous, on peut être la norme ailleurs. Donc au final, c'est un message un peu à toutes les personnes qui se sentent trop ou pas assez. C'est peut-être changer juste d'environnement.

  • Speaker #1

    Trouver l'environnement dans lequel vous serez valorisé, dans lequel on vous acceptera tel que vous êtes. Après, je ne dis pas que parfois, il ne faut pas se remettre en question. Ce n'est pas que ça aussi. Parce que parfois, on peut se cacher derrière ça. Mais de manière générale, on a tous des qualités à faire valoir. Et parfois, on n'est juste pas au bon endroit au bon moment. Pour reprendre l'exemple de tout à l'heure du basket. Je ne suis pas devenue nulle d'une saison à l'autre. C'est-à-dire que j'ai été dans un environnement qui m'a valorisée, avec une coach qui me connaissait, qui savait me faire jouer, avec des coéquipières qui m'appréciaient. Un an plus tard, je deviens une autre joueuse. Non pas parce que je suis moins bonne, mais parce que je ne suis pas dans un environnement qui me met en avant, qui me valorise. Et donc c'est ce que je dis aussi aux jeunes joueurs, trouvez des projets dans lesquels vous serez valorisés, dans lesquels les coachs reconnaissent vos compétences et les utilisent correctement, tout simplement. Mais ce n'est pas tout le temps se dire que je ne suis pas bon, je ne suis pas si. Non, trouver les environnements qui vous valorisent.

  • Speaker #0

    En disant ça, si tu fais écho, moi, je suis chargée RH à temps plein, entre 9 et 17. Et je dis souvent, parfois de temps en temps, je prends la parole sur LinkedIn sur ce sujet.

  • Speaker #1

    Je dis,

  • Speaker #0

    il faut choisir les entreprises qui correspondent aussi à nos valeurs. C'est bien de chercher un travail. Parfois, les gens se disent, ah mais tiens, on ne m'a pas recruté, etc. Mais est-ce qu'au moment où tu postules, est-ce que les valeurs que tu vois correspondent à ce qui tu es ? C'est hyper important.

  • Speaker #1

    C'est très important.

  • Speaker #0

    Parce qu'il suffit qu'on soit dans la bonne entreprise ou dans la bonne équipe, dans le bon environnement par rapport au basket, on peut être très bon, mais ne pas du tout performer si on est mal encouré.

  • Speaker #1

    Clairement. Et ça, c'est une leçon que j'ai aussi apprise. Avant cette expérience-là, je ne pense pas que j'avais ces exigences-là. Je sais que là, j'ai signé dans un club. Mais avant de signer, de m'engager, j'ai demandé à parler avec le coach très longuement. J'ai préparé une liste de questions, mais pas qu'en rapport avec le salaire ou la position dans l'équipe, mais par rapport à ses valeurs, sa vision du basket, sa philosophie du jeu. Parce qu'en fait, c'est des choses qui, au final, m'impactent tellement et qui vont tellement impacter mes performances que je ne peux pas les minimiser dans les discussions et après dans ma prise de décision. C'est pour ça qu'il faut se connaître aussi. Il faut vraiment se connaître. et connaître l'environnement dans lequel on veut évoluer pour voir si ça match, tout simplement.

  • Speaker #0

    C'est de beaux conseils.

  • Speaker #1

    J'aurais aimé les avoir avec quelques amis.

  • Speaker #0

    C'est pour ça que maintenant, tu les donnes à d'autres.

  • Speaker #1

    Je les donne à d'autres, volontiers.

  • Speaker #0

    Là, on va passer à la partie True Talk. Et dans cette partie, je dis qu'on ne se fait pas tout seul. Sur notre chemin, on rencontre des personnes qui sont des détracteurs. Elles nous poussent dans nos retranchements, ne croient tellement pas en nous que c'est nous qui sommes fautifs. Et ces personnes, oui, nous posent nos retranchements, mais surtout, finalement, nous poussent à... nous déployer différemment. C'est l'adversité. Il y a la rencontre fortuite. Elle ne se rend pas compte, mais elle dit quelque chose, une phrase, un projet, un conseil, et ça change un petit peu le cours de notre vie. Et puis, il y a la personne de Providence, elle croit en nous, même quand nous-mêmes, on ne croit pas en nous. Elle nous ouvre la porte sans rien attendre. Alors, dis-moi, Abby, quelle est la pire situation dans laquelle un détracteur t'amise ? Peut-être que c'est pas...

  • Speaker #1

    L'histoire avec le club de basket. Oui, ça peut être une autre aussi. Je réfléchis un peu. Qu'une personne aurait provoqué la situation. Oui,

  • Speaker #0

    ou même une situation. Tu sais, parfois, on ne se rend pas compte qu'il y a certains invités qui me disent que mon premier détracteur, c'est moi-même.

  • Speaker #1

    Moi, j'ai une histoire qui me revient en tête. Vraiment, de jeunesse, j'avais 15 ans. Et à l'époque, j'étais en internat. J'étais en internat et il y avait la personne qui était en charge de l'internat qui, je ne sais pas, bon après avec du recul, je peux peut-être le comprendre un peu, mais qui avait vraiment du mal avec moi. Et elle avait convaincu les autres filles que j'étais une sorte de gourou. Et en fait, avec du recul, c'est vraiment une histoire absurde, mais avec du recul, je pense qu'à l'époque, j'avais déjà une forme de leadership et d'affirmation de soi qui pouvait déranger. dans le sens où Je prenais de la place, certainement, dans le groupe. J'imposais aussi mes idées. Et ce n'était pas très bien vu. Et ça, je sais que ça m'a vraiment peinée à l'époque. J'avais à peine 15 ans. Mais surtout, ça a très probablement modifié après certains de mes caractères que j'avais naturellement. Ça m'a pris l'initiative, le leadership. Et durant quelques années, je pense que je l'ai un peu inhibée. Parce que je voyais ça, du coup, comme étant quelque chose de négatif. On me reprochait beaucoup à l'époque. de me mêler de ce que je ne me regardais pas, c'est-à-dire de prendre position, de défendre les gens, m'appeler l'avocat du diable. Et ça, c'est des injonctions qu'on a posées sur moi à cet âge-là qui, je sais, peuvent vraiment freiner. Et je pense que si je n'avais pas eu, après, derrière, cette carrière dans le basket, la création de cette association, etc., j'aurais pu vouloir me faire petite, du coup, pour ne pas trop éblouir, ou bien trop cacher les autres, ou bien trop en faire. Quand je pense que c'est vraiment dans ma nature profonde que de vouloir... éclairer les gens, je pense, de guider ceux qui sont un petit peu perdus, mais surtout de tendre la main et d'aider. Parce que moi, je respecte particulièrement les personnes qui le font, et je pense qu'à l'époque, je le faisais peut-être maladroitement aussi, je ne pense pas que j'étais irréprochable, mais il y avait ce truc de... Je prenais la place dans un groupe et que j'aimais guider les gens, en fait. Et ça, ça a pu déranger parce que parfois, quand on est un peu en contradiction avec les adultes en face de nous, on peut être pointé du doigt.

  • Speaker #0

    Et comment tu... Comment tu as réussi finalement à te construire avec ça ? Oui, je sais qu'il y a eu le basket. Heureusement, il y a eu le basket. Mais il n'y aurait pas eu le basket. Avec Dessy, on refait le monde. Comment ça aurait pu switcher ? Comment tu aurais pu dépasser ça, en fait ?

  • Speaker #1

    Honnêtement, je ne sais pas. C'est marrant, j'avais vraiment cette discussion-là avec mon ami ce midi sur comment le basket nous a éduqués. Moi, le basket m'a donné un vrai cadre de vie. Non pas que je n'ai pas reçu une bonne éducation, mais... Le sport m'a appris la discipline, le dépassement, la résilience. Donc je ne sais pas comment j'aurais été sans le basket. Je sais que j'étais déjà studieuse, plus jeune, donc peut-être que je me serais sûrement concentrée dans les études. Mais le sport m'a apporté autre chose que le simple fait d'être une femme studieuse. Ça m'a apporté une estime de moi, ça m'a apporté une force de caractère. Voilà, vraiment le fait de pouvoir m'asseoir en face de toi, de discuter assez librement. Prendre place, prendre position. Ça, je pense que je l'avais aussi un peu en moi. Mais le basket l'a vraiment révélé. Révélé, quoi. D'accord. Accentué.

  • Speaker #0

    Ta rencontre fortuite. Peut-être que tu en as conscience. Peut-être que cette personne est dans ta vie ou n'est plus dans ta vie. Je ne sais pas, une situation. Mais quelque chose d'apparence anodine t'a pourtant marquée et a changé, entre guillemets, le cours de ta vie. Ouais.

  • Speaker #1

    Qu'est-ce que je peux citer ? Ah oui, Maria Lamont.

  • Speaker #0

    Marie-Alain Laman, c'est une grande sœur pour moi. C'est une ancienne joueuse de basket, qui s'appelle Marielle. C'est une femme que j'ai rencontrée grâce au basket. On était toutes les deux convoquées en équipe de France. Très peu de temps avant que je signe dans le même club qu'elle. Et c'est vraiment devenu une sœur, une grande sœur. Celle que je n'ai pas eue, puisque moi je suis l'aînée de ma famille. Et elle a vraiment fait office de guide durant toute ma vingtaine. La vingtaine pour moi aujourd'hui avec du recul, c'est vraiment la période où on fait toutes les bêtises du monde. où l'on apprend énormément de choses, mais à chaque chute, elle a su être là, me donner les bons mots, et avec une telle justesse, vraiment, c'est vraiment une qualité remarquable qu'elle a, et je dirais que vraiment cette rencontre, je ne sais pas si elle a changé le cours de ma vie, mais en tout cas, elle l'a bien influencée.

  • Speaker #1

    D'accord, on lui dit merci du coup.

  • Speaker #0

    Ah bah merci Marie, je lui dis tout le temps.

  • Speaker #1

    Et la personne Providence, c'est celle qui croit en toi, même parfois quand toi-même tu doutes de toi. Ouais. et Elle t'a ouvert la porte à un moment où personne d'autre ne l'aurait fait. Et ça a changé tout.

  • Speaker #0

    J'ai peur de ne pas citer la bonne personne et d'oublier. Mais là,

  • Speaker #1

    attention, parce que si je ne cite pas la bonne personne, après,

  • Speaker #0

    il va écouter ou elle va écouter l'épisode.

  • Speaker #1

    Elle va t'en vouloir.

  • Speaker #0

    Alors, la personne qui a cru en moi, j'irais Francis Crespin. C'est... un de mes tout premiers coachs de basket. C'est un coach qui m'a appris à faire le lay-up, le move basique au basket. Je me souviens, comme c'était hier, j'avais 12 ans. Mais c'est un homme avec qui je suis encore en contact. On était encore au téléphone avant-hier. Il fait office de mentor dans ma vie. Plusieurs fois, je l'ai appelé quand c'était très compliqué au basket. Ça a pu être à 18 ans, comme ça a pu l'être dernièrement, 12 ans plus tard. Et il a... toujours eu pareil, les bons mots, toujours eu ce soutien indéfectible. Il croit en moi puisque je ne crois en moi. Vraiment, la façon qu'il a de me coacher, les conseils de ce qu'il dit de moi, je sens vraiment quelqu'un qui a toujours cru en moi, qui m'a toujours repoussée et qui a surtout de manière très avant-gardiste, j'irais, parce que maintenant, on replace beaucoup l'humain dans la performance, mais parler justement de l'humain, de l'importance du bien-être pour performer. Moi, il m'en parlait déjà quand j'avais à peine 20 ans. donc il y a déjà plus de dix ans. Et ça me parlait, ça faisait écho en moi, parce que j'ai toujours moi compris aussi que je n'étais pas une personne qui était tournée uniquement vers la performance sportive. J'avais besoin d'un bien-être global, j'avais besoin de me sentir bien émotionnellement, j'avais besoin de faire d'autres choses en dehors du basket. Et ça, beaucoup de gens ne l'ont pas compris. On m'a souvent dit que je me dispersais, parce que j'ai continué mes études, parce que j'ai fondé une asso, et que du coup, je n'étais pas suffisamment concentrée au basket. Et lui, en revanche, il m'a toujours encouragée à cultiver autre chose à côté de ma carrière. Et c'est vraiment le conseil number one que je donne à tout jeune athlète que je rencontre. De toujours cultiver son jardin secret à côté de sa carrière. Parce que le danger, quand on se voit uniquement à travers une casquette, c'est de se définir en fait par cette casquette-là. Et ça veut dire quoi ? Que quand on performe, on se pense être la meilleure du monde, donc avoir tendance à être hautain. Et en revanche, quand on ne performe pas, de se dévaloriser, de se dénigrer, de se penser vraiment nul. Et donc, ça, c'est vraiment quelque chose dans lequel je ne voulais pas tomber, ce piège-là, de me définir uniquement à travers ma casquette de basketteuse. Et lui, c'est aussi quelque chose qu'il m'a partagé très tôt dans ma carrière. Donc vraiment, je le donnerais lui en premier exemple, même s'il y en a eu d'autres. Mais il a fait office de mentor et vraiment, je le remercie pour l'impact qu'il a eu dans ma vie.

  • Speaker #1

    Ah oui, non, mais ce qu'il t'a dit, c'est... Moi aussi, je lui dis merci parce que c'est incroyable. J'allais dire, mais à la fois, le sport peut t'encenser et te porter au nu. Mais en même temps, et donc cultiver la confiance, etc. Mais en même temps, comme c'est une activité très exigeante, quand on échoue, il faut pouvoir se... motivée déjà personnellement et se dire mais relève-toi, tu n'es pas si nulle.

  • Speaker #0

    C'est ça. Surtout, tu n'es pas que ça. C'est puissant. Moi, c'est ça qui m'a aidée avec la blessure. Parce qu'en fait, si on se voit qu'à travers cette casquette, si je me dis ok, je ne suis que basketteuse, le jour où il n'y a plus de basket, qu'est-ce que je deviens ? En fait. Et c'est toute la remise en question que j'ai dû effectuer durant ma longue blessure. Ça a été vraiment une très longue traversée du désert. Moi, je me souviens, les premiers jours... J'étais là à déambuler dans mon quartier. à Orly. Et je me suis dit, mais qu'est-ce que je fais là ? Je n'avais jamais été, en tant qu'adulte, je n'avais jamais vécu sur Paris, en fait. Moi, je connaissais Paris que le week-end, chez mes parents, dans un cadre bien précis. Mais là, de prendre ma voiture, de sortir, d'aller faire les courses, de ne pas être avec des sportifs, c'était très, très déroutant pour moi. Donc, pendant deux mois, il y a vraiment eu cette perte d'identité et cette reconstruction nécessaire à faire. Petit à petit, j'ai commencé à sortir, à rencontrer d'autres personnes. Et j'avais même du mal à... terme à me définir comme une basketteuse parce que je ne pratiquais plus et je ne savais plus qui j'étais. Et vraiment, je te parle de ça, mais ça fait que depuis quelques mois seulement que j'ai su reconnecter avec mon identité et comprendre la femme que j'étais dans son entière essence, tu vois. Mais j'avais perdu totalement la notion de mon identité. Je ne savais plus qui j'étais. Je ne me présentais plus comme étant basketteuse parce que ça faisait plus d'un an que je ne jouais plus. En même temps, je fais des études, mais je ne suis pas encore diplômée, donc je ne peux pas me qualifier sous le titre. Donc c'était compliqué. Qui suis-je ? Qui suis-je ? Et donc, c'est vraiment important de... C'est aussi pour ça que je préconise de ne pas se définir uniquement à travers sa casquette professionnelle. Parce qu'on est bien plus que ça.

  • Speaker #1

    D'accord. Même si tu t'es présentée au début, je vais donc te répondre à la question.

  • Speaker #0

    Qui es-tu ? Qui je suis ? Aujourd'hui, moi, je me définis avant tout comme une femme engagée. D'accord. Voilà, je pense que c'est la casquette que j'aime bien porter. Une femme engagée qui a envie de faire changer les choses. Et ça, quand je le dis, ça me ramène à la jeune que j'étais. À 9 ans ? À 9 ans, vraiment. J'ai toujours été engagée. Je me souviens, en CP, je me suis présentée pour être déléguée. Le premier échec de ma vie, trois votes, dont un qui était le mien. Je me représente, tu vois, quelques années plus tard, je deviens déléguée. Pour moi, c'est aussi une forme de succès. Je suis heureuse. un de mes premiers gros succès. Quelques années plus tard, je deviens conseillère municipale. Mais en fait, tout ça pour dire que j'ai toujours eu à cœur de défendre, de porter la voix, de s'envoier, de changer les choses, de dire les trois questions.

  • Speaker #1

    L'enfant que tu étais, qui n'avait reçu que trois voix, à ce moment-là, qu'est-ce qu'elle se dit ?

  • Speaker #0

    Aïe, aïe, aïe, ça m'a fait mal. Moi, je me souviens, tu vois, je t'en parle, j'étais en CP. Oui,

  • Speaker #1

    parce que... La manière avec laquelle on vit l'échec quand on est tout petit, comment tu... Alors, si tu devais comparer entre les deux,

  • Speaker #0

    entre avant,

  • Speaker #1

    quand tu étais petite, et maintenant, en tout cas avec la blessure de 3 ans, qu'est-ce qui a été le plus dur ?

  • Speaker #0

    La blessure de 3 ans, je pense, parce que...

  • Speaker #1

    Psychologiquement,

  • Speaker #0

    je pense à la blessure de 3 ans, parce que vraiment, l'échec du CP, ça m'a vraiment marquée sur le coup, mais honnêtement, je ne sais pas l'impact que ça a eu en moi. Je sais juste que je me suis dit, waouh, je ne suis pas populaire. Je pense que je vais venir. Voilà, c'est tout.

  • Speaker #1

    Tu n'as pas eu honte ?

  • Speaker #0

    Ah, je me suis dit, quand même, j'ai... Pas d'amis, tu vois, à l'époque, c'est ça. Tu n'as pas d'amis, tu vois. D'accord. Et donc, c'est vraiment ce que je me suis dit. Mais bon, en tout cas, je me suis représentée l'année qui a suivi. Ah oui, d'accord.

  • Speaker #1

    Et c'est là que tu es devenue déléguée.

  • Speaker #0

    Je crois que c'était l'année d'avant, cette année-là ou celle d'après. Mais en tout cas, ça ne m'a pas découragée. D'accord. Je me suis représentée.

  • Speaker #1

    Comme quoi ? Tu vois, le parallèle, c'est quand on est petit, on en casse le cou, mais on rebondit. Il n'y a pas de souci. Et pourtant, quand on est adulte, on rumine.

  • Speaker #0

    On tente d'antisme.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est ça. Comme si la vie s'arrêtait au moment où on a vécu ce qui est compliqué. Tu as créé tes rangabies. Justement, tu m'as parlé, tu me dis que tu es une femme d'engagement, ce qui est le cas. Est-ce que tu as eu du mal également à te trouver ? Est-ce que tu t'es sentie légitime au moment où tu as commencé à porter ce combat ? Tu as abordé ce que c'est que tes rangabies, ses objectifs, etc. On va répondre ensuite à la deuxième question par rapport à la légitimité.

  • Speaker #0

    Alors, Terran Gabi, c'est une association que j'ai fondée en 2018. La genèse de ce projet, c'est la lutte contre la dépigmentation volontaire de la peau. Donc en fait, moi, j'ai été au Sénégal en 2017, après 15 ans d'absence. Donc j'avais 22 ans à l'époque. Quand j'y retourne, je suis pleine d'illusions. Trop heureuse. Vraiment, j'ai senti que pendant mon adolescence, ça m'avait manqué. qui a eu vraiment un manque dû à cette... identité que j'ai pas pleinement formée au Sénégal. Le fait de ne pas y aller, le fait de ne pas reconnecter avec mes proches, il y a eu une fracture. Quand j'y suis retournée, j'étais vraiment la plus heureuse du monde. Ça a été un choc, je sors de l'avion même, je pleure parce que je ressens cette reconnection. Littéralement, c'est comme si on m'avait arraché du sol et qu'on me replantait chez moi. C'est vraiment ce que j'ai ressenti. Je ressens l'odeur du Sénégal que je n'avais pas senti depuis 15 ans. La reconnexion est totale. Je passe de très bonnes vacances, mais en même temps, j'essuie pas mal de remarques. sur la couleur de ma peau. Ma mère aussi, ma petite sœur, car on a la peau foncée. Je me souviens, une fois, j'étais maquillée, un peu comme là, et quand tu mets un peu de fond de teint, ça te claircit légèrement, ça donne un teint un peu plus orangé. Et j'ai ma tante, je portais un t-shirt noir qui me dit « Ah, ça, c'est pas bon, mais là, comme t'es là, c'est bien. » Habituellement, je suis noire comme mon t-shirt, mais que là, avec le fond de teint, ça passe mieux. Je souris, ça ne m'attend plus trop à cet âge-là, vraiment, les remarques. J'en ai essuyé pas mal dans l'adolescence. Mais le coup de grâce, c'est le jour où j'entends ma petite cousine qui dit à ma soeur, donc elles ont 4 ans et 7 ans, « Je suis plus belle que toi parce que je suis claire de peau. » Cette histoire, je la raconte partout où je vais, parce que c'est vraiment ça qui a été le déclic de ce projet, de l'urgence pour moi que de fonder quelque chose en ce sens. Parce que... Une fille de 4 ans qui a déjà conscientisé les enjeux du colorisme, c'est grave, c'est très très grave. Donc je rentre en France, on m'avait suggéré à l'époque de faire un camp de basket comme j'étais basketeuse pro, et je me dis j'ai pas envie de faire un énième camp sportif. Plein d'athlètes font ça, c'est très bien, mais j'avais pas envie, ça me motivait pas. En revanche, de faire un camp de basket éducatif, ça, ça me motivait. Parce que c'était à mon image, sport et éducation, et que pour moi l'éducation c'est la clé. Donc je me dis ok. L'année d'après, je retournerai au Sénégal, donc en 2018, et je fonderai Terre en Gabi. Donc toute l'année, j'ai réfléchi à ce projet, on m'a connectée, j'ai tout organisé à distance. Et en arrivant, on monte ce premier camp de basket éducatif féminin à Thies, dans la ville de mes parents. Et dans ce camp-là, on fait venir des experts, donc dermato, sages-femmes, psychologues, pour parler des enjeux de la confiance en soi, l'estime de soi, de la dépigmentation de la peau, mais aussi des violences sexuelles et de l'éducation sexuelle avec les jeunes filles. Donc on choisit la période de l'adolescence parce que c'est une période dans laquelle les jeunes filles se construisent. Et donc aussi où il est important de planter les bonnes graines qui vont pouvoir permettre à ces jeunes filles de devenir des femmes confiantes et sûres de leur identité. Parce que le problème, c'est que quand tu as 15 ans, on passe ta vie à te répéter que tu es trop ci, trop ça. Tu nourris des complexes, tu construis même des complexes. tu deviens une femme complexée qui peut potentiellement recourir ensuite à la dépigmentation volontaire de la peau. Et donc nous, l'enjeu, c'était vraiment de casser ce cycle et de planter dans le décor un nouveau discours, un nouveau paradigme pour ces filles-là et de leur dire, écoutez, on peut être noire, belle, réussir, être désirable, tout ce que vous voudrez, et c'est très bien comme ça. L'enjeu, il n'est pas de se dire, je suis plus belle quand je suis foncée ou je suis plus belle quand je suis claire, c'est juste de s'accepter. telle que l'on est. Au Sénégal, on a la chance d'avoir des femmes aussi noires que moi, d'autres plus claires comme toi. Et c'est très bien. C'est ça qui est la diversité aussi de la peau.

  • Speaker #1

    Comme il y a des brunes, des blondes.

  • Speaker #0

    Exactement. Et donc du coup, ça a été vraiment la naissance de ce projet. Et donc ensuite, on a évolué sur un concept plus global, sur la confiance en soi et l'estime de soi. Parce que la dépigmentation de la peau, au final, c'est quoi ? C'est un manque de confiance en soi et d'estime de soi. Oui,

  • Speaker #1

    c'est clairement.

  • Speaker #0

    Voilà. Et donc de là, on a créé tout un programme. Et aujourd'hui, on accompagne des jeunes filles sur toute une année scolaire, sur des temps sport, éducation, pour les sensibiliser à tous ces enjeux, pour leur permettre de se connaître, de développer leurs compétences, leurs appétences et d'avoir un plan de vie à la fin solide pour lancer leur vie de femme. Et ne plus s'arrêter à tous ces dictates, à toutes ces injonctions de la société qui les poussent à se dénaturer et à se détester tout simplement. C'est vraiment ça, Terran Gabi. C'est beau.

  • Speaker #1

    Et si on veut te soutenir, si on veut soutenir Terran Gabi, comment ça se passe ?

  • Speaker #0

    Alors, si on veut me soutenir, donc là, on va lancer prochainement une campagne de parrainage. J'aimerais vraiment qu'on puisse... Parce qu'en fait, là, on va partir sur une année, donc à partir de septembre, donc jusqu'à juin, une année scolaire, où les jeunes filles vont venir deux fois par mois. On va accompagner deux fois plus de filles. Donc, on est passé de 100 à 40. On va accompagner des filles scolarisées et non scolarisées. et le but pour nous c'est vraiment d'avoir des ambassadrices dans toute la ville de Louga. la vie dans laquelle on est présente. Et pour ça, il faut des moyens. Aujourd'hui, nous, on souhaite lancer cette campagne de parrainage pour permettre à chaque fille d'avoir un parrain, une marraine, qui la soutiendrait. L'objectif pour nous, c'est d'avoir 150 parrains qui parraineraient 100 filles. Et donc, ça permettrait largement de pouvoir mettre ce projet en place, même s'il va déjà être lancé, mais pour nous permettre du moins d'avoir une marge. pour pouvoir travailler davantage, pour travailler mieux aussi et mieux les accompagner. Donc, on va lancer cette campagne-là. Donc, ne pas hésiter à nous soutenir. Aussi, nous suivre sur les réseaux sociaux. On a une page Instagram.

  • Speaker #1

    Terrangabi.

  • Speaker #0

    Terrangabi, voilà. Et on a un site Internet. Voilà. Donc, www.terrangabi.org. C'est le site.

  • Speaker #1

    Faites des dons. Voilà.

  • Speaker #0

    Faites des dons, soutenez, partagez. Mais surtout, voilà. Et je cherche aussi des entreprises, partenaires, des institutions qui veulent s'associer à nous. nous prêter main forte, parce que c'est un projet qui a pour ambition quand même de prendre de l'envergure. On est au Sénégal, demain on va être dans la sous-région africaine. Donc voilà, c'est un projet qui ne fait que commencer. Et moi, c'est vraiment aussi pour moi le projet d'une vie. Je ne sais pas comment il évoluera, mais moi l'éducation, c'est vraiment mon credo. C'est vraiment quelque chose dans lequel j'ai envie de m'engager pleinement.

  • Speaker #1

    En tout cas, c'est un très, très beau projet. Je te dis bravo.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Pour revenir donc à ma question, c'est est-ce que... Tu t'es sentie légitime de porter un tel projet ? Est-ce qu'on t'a fait sentir que tu ne l'étais pas ?

  • Speaker #0

    Alors oui, je me suis sentie légitime parce que je pars d'une expérience personnelle. Ce projet, c'est totalement moi. J'ai été cette jeune fille dont on se moquait plus jeune parce qu'elle était trop foncée de peau. Et c'est là où j'ai vraiment compris que c'était un enjeu, en tout cas en étant plus âgée, c'était un enjeu qui me dépassait, déjà avec l'histoire de ma petite sœur, mais aussi pour avoir grandi en France et avoir aussi connu le colorisme. pas que sur ma propre personne, mais sur d'autres. C'est un vrai enjeu. Et puis, encore une fois, ce n'est pas qu'une question esthétique. Moi, je ne viens pas juste dire aux filles, ce n'est pas bien se dépigmenter la peau, machin. Non, non seulement c'est un danger pour elles, sanitaire. Donc, qui dit dépigmentation, dit cancer de la peau, hypertension, mycose, gale. Donc, des maladies qu'on retrouve énormément chez les femmes africaines. Mais il y a aussi cet aspect psychologique de rejet de soi. Et pour moi, c'est tellement violent. Comment on veut... On parle de développement en Afrique, matin, midi, soir, mais il n'est pas qu'économique le développement, il est surtout mental.

  • Speaker #1

    Il est même d'abord mental.

  • Speaker #0

    Il est même d'abord mental aujourd'hui, pour pouvoir progresser, pour pouvoir avancer. On a besoin d'être un peuple, en tout cas d'être des peuples, parce que ce n'est pas qu'un seul peuple, mais d'être des peuples, des États, des sociétés, des communautés qui ont confiance en elles-mêmes, qui s'aiment, qui savent d'où elles viennent. Et il y a eu une vraie rupture en fait. Aujourd'hui... beaucoup de jeunes en Afrique, beaucoup d'Africains ne savent pas qui ils sont, n'en sont pas fiers, veulent copier tout ce qui vient de l'extérieur, mais c'est ça qui est regrettable, en fait. Et moi, le projet, c'est vraiment aussi pour dire à la jeunesse, pour dire aux filles, vous êtes très bien comme vous êtes. Et c'est parce que vous êtes comme ça que vous devez agir en conséquence, que vous devez faire ci, que vous devez faire ça. Ne cherchez pas à copier. Vous êtes uniques. Avancez. Faites ce que vous avez à faire. Connaissez-vous. Mais ne vous dénaturez pas, on ne peut pas se dénaturer et espérer faire des choses originales au final.

  • Speaker #1

    Exactement. Commençons par la fameuse connaissance de soi.

  • Speaker #0

    C'est ça.

  • Speaker #1

    Et qui dit connaissance de soi, dit finalement amour de soi.

  • Speaker #0

    Amour de soi, voilà.

  • Speaker #1

    Est-ce que c'est plus compliqué de gagner une coupe ? Alors, qu'est-ce qui est le plus difficile ? Il faut que je formule bien ma question. Qu'est-ce qui est le plus difficile ? Gagner un championnat de France, ou convaincre une jeune fille qu'il ne faut pas qu'elle se dépigmente ? Qu'est-ce qui est plus con ?

  • Speaker #0

    Il y a un dilemme. Parce que la jeune fille... Il y a un dilemme parce que la jeune fille, encore une fois, je ne suis pas la seule à lui parler. Il y a toute la société qui lui rappelle qu'elle est trop noire. C'est-à-dire que quand on sort au Sénégal, aujourd'hui, les panneaux publicitaires qui font la promotion de la dépigmentation de la peau sont présents partout. Les spots TV, les spots radio. Moi, je suis une fan des séries sénégalaises. Aujourd'hui, je dirais peut-être un peu moins, mais il y a une apologie. incroyables des produits dépigmentants. Les influenceuses que l'on met en avant dans la société, elles sont toutes pareilles, elles ont toutes ce même... Oui, cette même identité, en fait. Et elles sont aux antipodes des jeunes filles que je vois au quotidien dans mes camps de basket. Donc, c'est pas facile d'être championne de France, mais c'est pas facile aussi de se liguer contre la dépigmentation volontaire de la peau. Parce que c'est une vraie industrie, c'est... C'est quelque chose qui est très présent dans les mentalités en Afrique.

  • Speaker #1

    C'est pour ça que des projets comme Terangabi valent le coup d'être soutenus pour que des changements de mentalité, en tout cas...

  • Speaker #0

    Effectivement.

  • Speaker #1

    On arrive à la toute fin. J'ai deux dernières questions. Si on devait retenir qu'une seule chose de toi, tu voudrais qu'on retienne quoi ?

  • Speaker #0

    J'aimerais qu'on retienne que... J'ai fait de mon mieux pour impacter positivement mon environnement. C'est-à-dire que moi, ce que j'aimerais vraiment laisser demain en partant, c'est l'espoir et surtout des progrès significatifs dans l'éducation en Afrique. Moi, l'éducation, j'ai parlé du sport, mais avant le sport, il y a vraiment eu l'éducation. L'éducation, ça a été cet élément qui m'a permis réellement de m'élever socialement, je pense. Et pas que socialement, mais intellectuellement. d'être ouverte sur le monde, d'avoir un esprit critique, analytique, fort. Et c'est super important pour moi. Moi, j'aime le fait de pouvoir me dire que je peux penser par moi-même, que j'en ai la capacité aussi, parce que l'école, c'est pas que retenir telle et telle leçon, mais c'est surtout la capacité à réfléchir, à analyser, à se positionner dans le monde. Et c'est ça, en fait, qui... permet d'avoir une voix, ça qui permet de se distinguer, qui permet de faire progresser aussi la société. Donc l'école c'est un... C'est indispensable. On peut nous dire ce qu'on veut. Je ne parle pas de diplôme, je ne parle pas de tout ça. Je parle vraiment de cette capacité que l'école permet à savoir de se développer intellectuellement, d'être en mesure de réfléchir en fait, et d'avoir du répondant, d'avoir une conscience, de pouvoir tout simplement avoir ce libre arbitre. que l'école aussi permet d'acquérir, je pense. Il ne vient pas automatiquement.

  • Speaker #1

    Est-ce que tu dirais aujourd'hui que tu as réussi ?

  • Speaker #0

    Ah, j'ai que 30 ans, donc franchement, ça serait prétentieux de dire oui.

  • Speaker #1

    C'est quoi réussir ?

  • Speaker #0

    C'est une bonne question. Mais non, je n'ai pas encore réussi. Il y a tellement de choses que j'ai envie d'accomplir. Mais réussir, c'est de se dire, encore une fois, qu'on a été aligné déjà avec la personne que l'on a été. avec ce que l'on projetait aussi. Moi, j'ai mes valeurs, j'ai mon système de valeurs, j'ai mes convictions, c'est de me dire que j'ai été alignée avec, en fait. Et que j'ai fait de mon mieux à chaque fois. J'ai toujours donné mon 100% à un moment donné, dans un endroit donné. Mais surtout, voilà, que j'ai su rester alignée et que je n'ai pas été déroutée à un moment donné. Que j'ai toujours su garder la tête froide, la tête haute et avancer dignement et faire ce que j'avais à faire. Donc, je n'ai pas encore réussi, mais je dirais que je ne m'en sors pas trop mal. Je fais de mon mieux au quotidien, en tout cas. Au final,

  • Speaker #1

    si je retiens juste ta définition,

  • Speaker #0

    tu as réussi ? Plus ou moins. On va dire qu'avec le temps, l'alignement arrive. Non, mais ce que je ne veux pas dire, c'est que la vie, c'est un cheminement. C'est vraiment ce que je comprends. Il y a des moments où on est plus ou moins dérouté. Mais je peux dire en tout cas aujourd'hui que face à toi, tu as une femme qui s'aligne de plus en plus.

  • Speaker #1

    Voilà. Écoute, Abby, c'était un... plaisir de pouvoir échanger avec toi.

  • Speaker #0

    Le plaisir est partagé.

  • Speaker #1

    S'il y a quelque chose que je retiens, c'est que tu es un vrai leader. On t'a reproché tes camarades de classe peut-être par inconfort, parce qu'elles ne savaient pas comment se mouvoir à tes côtés, avaient du mal à te capter, à comprendre, en tout cas à se positionner elles-mêmes. Mais ton leadership, en tout cas aujourd'hui, c'est celui d'une personne très intérieure, qui est alignée, qui est à l'aise avec qui elle est. et... il y a cette aura naturelle qui se dégage et qui fait que ton propos est extrêmement aligné et convaincant. C'est ce que moi je retiens de cet épisode. C'est d'avoir fait la rencontre d'une femme, d'un leader, d'une femme alignée qui a des convictions, des convictions très très fortes, qui reconnaît sa part d'erreur, sa part de, sa marge de, comme on dit en RH, ses axes d'amélioration, ses axes de progression. mais qui avance sereinement. Il y a quelque chose de très serein chez toi. Et ça fait du bien. Ça m'a fait du bien de t'écouter. Ça m'a renvoyée aussi à mes propres questionnements. Et j'espère que ceux qui, toutes les personnes qui m'ont écoutée, vont également s'interroger avec beaucoup de douceur, avec beaucoup de bienveillance. Il y a beaucoup de bienveillance vis-à-vis de toi-même et que l'on ressent. Et donc, on se dit, c'est aussi également vis-à-vis de nous-mêmes. Donc, il y a cette forme de bienveillance que l'on a. Je le retiens. Moi, c'est ce que je prends dans cet épisode. Et je partirai avec, je me sentirai un peu mieux, on va dire, les prochains jours. Merci de me l'avoir communiqué, Abby. Pourquoi on regarderait ton épisode ? Pour quelles raisons ? Là, tu peux pitcher maintenant devant cette caméra.

  • Speaker #0

    Alors, regarder cet épisode, pourquoi ? Parce que ça a été, je pense, un moment très intéressant, déjà pour Nicole, mais aussi pour moi. Le fait de s'exprimer, ça a permis aussi de se reconnecter à soi. en parlant avec Nicole j'ai eu aussi une conversation avec moi-même et la conclusion de Nicole, donc il faut aller jusqu'au bout de l'épisode pour le savoir, elle a été très belle, très juste et je pense qu'aujourd'hui je suis dans une phase de ma vie où clairement c'est la sérénité que je recherche. Donc merci Nicole d'avoir su se lâcher chez moi et j'en suis vraiment ravie d'être touchée.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup. Voilà, cet épisode de We Talk se termine. Je vous remercie à toutes et à tous d'avoir de l'avoir écouté, il est disponible sur toutes les plateformes YouTube, Deezer, Spotify, Apple Podcast, Apple Addict, Podcast Addict, pardon. Et bien sûr, rejoignez la communauté WeTalk sur Instagram, LinkedIn, TikTok. On attend que vous portez-vous bien et à très bientôt. Bye bye.

  • Speaker #0

    Sous-titrage Soci

Chapters

  • Introduction de l'épisode avec Nicole Ewek

    00:06

  • Présentation de Abi Gaye et son parcours sportif

    00:12

  • L'importance de l'échec dans la carrière d'Abi Gaye

    00:51

  • L'échec à l'étranger : le passage en Hongrie

    06:51

  • Rebondir après une blessure : le processus de réhabilitation

    10:40

  • Soutenir Terrang'Aby et l'engagement d'Abigaye

    43:31

  • Création de l'association Terrang'Aby et ses objectifs

    45:21

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