- Speaker #0
Bonjour à toutes et à tous, je suis Nicole Eweck et vous écoutez weTalk, le podcast qui transforme l'échec en réussite. Aujourd'hui, mon invité, c'est Pierre Fournier. Merci d'avoir accepté mon invitation.
- Speaker #1
Merci à toi.
- Speaker #0
Pierre, tu es formateur, consultant en prise de parole en public. Est-ce que tu peux te présenter rapidement aux auditeurs de weTalk ?
- Speaker #1
Avec grand plaisir et merci pour l'invitation. Donc moi, je m'appelle Pierre et on travaille au quotidien. C'est d'accompagner les dirigeantes et notamment les dirigeantes de la tech dans leur prise de parole, dans un but qu'elles deviennent mémorables et rôle-modèles, et aussi qu'elles puissent développer leur activité. Pourquoi la prise de parole ? Parce que quand on est dirigeante, qu'on soit entrepreneuse ou manageuse, c'est le quotidien, c'est un outil du quotidien indispensable pour à la fois fédérer des équipes, trouver de l'activité, trouver des clients, créer de la confiance. Et on est souvent peu, voire pas formés à des outils autour de la persuasion, autour de comment on langage, comment on se présente, etc.
- Speaker #0
Et même pour faire aussi des podcasts.
- Speaker #1
Et pour faire des podcasts aussi.
- Speaker #0
Alors très bien, ce que je te propose, c'est qu'au cours de ce podcast, justement, on va parler de tes échecs. Des échecs qui ont parsemé ton chemin. notamment le drame familial que tu as vécu. Ta sœur a été victime d'inceste. Tu étais un témoin indirect de ça. Nous allons en parler. Nous allons parler de l'épuisement professionnel que tu as également vécu, qui s'apparente un petit peu à un burn-out. Et ensuite, tu vas nous dire, parce que c'est weTalk, comment est-ce que tu as rebondi et de quelle manière est-ce que ça t'a construit aujourd'hui en tant que personne ? Mais avant ça, à weTalk, il y a une tradition. C'est que je prépare un conte pour chacun de mes invités. Est-ce que tu es prêt à écouter le conte duquel tu es le héros ?
- Speaker #1
Je suis tout oui. Tu es tout oui.
- Speaker #0
Alors, il était une fois un garçon sensible et curieux. Pierre Fournier naît dans une famille modeste, dans un monde où l'on ne pose pas de questions. Ici, tout est clair, figé, immuable. On sait qui est bon, qui est mauvais. qui mérite d'être aimé et qui doit être méprisé. On lui répète chaque jour comme une prière. Les étrangers sont des menaces et des différences, des dangers. On lui dit qui éviter, qui craindre et qui exclure. Mais Pierre, lui, ne comprend pas. Pourquoi son ami Kamel, toujours prêt à l'aider en maths, serait-il un voleur simplement parce qu'il est algérien ? Pourquoi la famille Juan, qui habite au bout de la rue, mérite-t-elle d'être moquée alors que leur fils possède la plus belle collection de cartes Pokémon du quartier ? Pourquoi son copain Antoine, né en Guadeloupe, devrait-il rentrer chez lui alors qu'il est ici chez lui ? Pierre grandit avec ces questions. Elles s'accumulent, elles s'entrechoquent dans son esprit, grignotent les certitudes qu'on essaie de lui inculquer. Il y a une incohérence, il le sent. Mais il y a autre chose, quelque chose de plus grand, de plus sombre, quelque chose dont personne ne parle. Sa sœur. Sa sœur qui s'enferme de plus en plus dans le silence, qui s'énerve pour un rien. qui mange avec frénésie avant de se faire vomir en cachette, qui s'assombrit chaque fois que ce membre de la famille, ce proche, vient leur rendre visite. Pierre ne saisit pas tout, pas tout de suite. Il voit seulement que sa sœur change, qu'elle se renferme, qu'elle s'éteint et qu'elle souffre. Et puis un jour, il comprend. Il comprend que sa sœur est une victime, une victime d'inceste. Que dans leur maison, sous leur toit, l'horreur se répète encore et encore dans le silence complice des adultes qui détournent le regard. Pierre, lui, ne subit pas directement cette violence, mais il la voit. Il est le témoin impuissant, l'ombre collée à cette tragédie dont personne ne veut parler. Il sent cette douleur flotter dans l'air, imprégner les murs, suinter dans chaque silence gêné. Il est trop jeune, trop petit pour avoir des mots, trop fragile pour avoir des armes. Alors il fait ce qu'il sait faire le mieux. Il questionne. Pourquoi personne ne protège sa sœur ? Pourquoi tout le monde fait comme si de rien n'était ? Pourquoi faut-il se taire ? Pourquoi faut-il cacher ? Pourquoi faut-il subir en silence ? À 13 ans, il trouve une échappatoire, les livres. Il devient son refuge, sa révolte muette. Il y découvre d'autres vérités, d'autres destins, d'autres chemins possibles. Il lit les histoires de lutte, d'émancipation de ceux qui ont brisé leur chaîne. Il comprend qu'il peut lui aussi déconstruire tout ce qu'on lui a appris. Il se met à observer son monde différemment, à abattre les idées reçues, à repenser son éducation, ses croyances et ses certitudes. Il rejette le racisme qu'on lui a enseigné et refuse la violence qu'on lui a présentée comme normale. Petit à petit, Pierre s'élève. Mais être libre a un prix. Il connaît l'exclusion, l'isolement, il devient celui dont on se méfie, celui qu'on accuse d'être contre sa propre famille, contre son propre sang. Il vacille et se sent seul. Jusqu'au jour où il comprend une chose essentielle. S'il croit en lui-même, il n'a pas besoin de convaincre les autres. Alors Pierre décide d'avancer et de faire de la justice son combat. Il utilise sa voix pour ceux et celles qui n'en ont pas. Il devient un allié, un guide, un phare pour celles qui cherchent à se libérer. Et choisit d'accompagner bien sûr des femmes. Parce qu'il sait ce que c'est que de se sentir piégé quand on tente de nous briser, de nous réduire au silence. Il veut semer les graines de confiance, d'émancipation et leur donner la force d'être pleinement elle-même. Et aujourd'hui, Pierre n'a plus peur de son passé. Il ne le fuit plus, il l'a regardé en face, il l'a compris, il en a fait une force car il sait que rien n'est écrit d'avance. Que nous ne sommes pas condamnés à perpétuer ce qu'on nous a transmis et que si on ose questionner, alors on peut choisir son propre.
- Speaker #1
magnifique, très joli conte. Il y a des choses qui font écho, il y a des choses que j'ai vécues, il y a des choses sur lesquelles c'est romancé. Mais ouais, j'aimerais peut-être revenir sur le début, justement, sur cette partie l'inceste pour expliquer un peu le contexte dans lequel j'ai grandi. Alors moi, j'ai grandi dans une... petit village à côté du Mans. Et donc moi, j'ai eu plusieurs éléments en plus. Quand je suis allé à l'école primaire, j'ai très vite, parce que j'étais un peu plus courant que les autres, très vite subi du harcèlement scolaire.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
Donc, pendant toute l'école primaire. Donc, en fait, pour moi, l'école n'était pas un lieu sécurisant.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
Et aussi, dans la famille, ce n'était pas un lieu sécurisant. Parce que mon père était quelqu'un d'un passif agressif. C'est autre chose que la... C'est quelqu'un qui est totalement déconnecté de ses émotions. Absolument absent dans tout l'acte éducatif. Et ma mère faisait ce qu'elle pouvait.
- Speaker #0
D'accord. Donc, avant d'aller, parce que tu vas nous expliquer un petit peu tout ça tout au long de l'interview, moi, j'ai besoin d'abord en premier de savoir quelle est ta définition de l'échec, Pierre ?
- Speaker #1
Pour moi, la définition de l'échec, c'est un passage incontournable.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
On ne peut pas réussir s'il n'y a pas eu d'échec. On ne peut pas savourer le plaisir de la... de la victoire si on n'a pas connu ses échecs. Et pour moi, l'échec signifie apprentissage. Et après, ça dépend de ce qu'on en fait. Soit on veut apprendre et on continue et on refait un peu différemment. Et ça, il y a plein de possibilités de le faire. Et il faut avoir aussi l'environnement favorable pour le faire. Ou alors, on peut aussi rester stable. Parce qu'on a trop peur aussi de voir l'angle nouveau. Et on a un environnement qui n'est pas du tout favorable sur le plan relation et autres. Et là, c'est compliqué, en fait. Et c'est là qu'il faut se faire aider, il faut se faire accompagner.
- Speaker #0
Justement, en parlant d'environnement, donc on va revenir sur cet environnement familial. À quel moment tu te rends compte que tes parents sont racistes ?
- Speaker #1
Alors, ce n'est pas forcément mes parents, c'est surtout mon... père qui est raciste. Père, en fait, n'est quelqu'un qui n'aime pas les gens, en fait, dans sa nature même. Quel que soit raciste, sexiste, si ce n'est pas blanc, homme blanc, c'est très compliqué. Pourquoi ? Parce qu'il a grandi dans un environnement qui est lui-même raciste, sexiste et tous les mots en isme. Donc, il ne savait pas faire autrement. Il n'a malheureusement pas, de mon point de vue, évolué. Et ma mère était justement, au contraire, quelqu'un qui est très ouverte, un peu de gauche, un peu...
- Speaker #0
Comment ils ont fait pour cohabiter ?
- Speaker #1
C'est justement la question que je me pose. Moi, je me pose la question aussi avec ma sœur. comment vous avez fait. Après, c'est des circonstances. Les deux familles ont des événements traumatiques très lourds, très importants. C'est des circonstances de vie qui font qu'ils se sont rencontrés. Après, ils sont restés pendant... plus de 35 ans ensemble. Mais en fait, c'est le phénomène d'emprise. Quand il y a de l'emprise...
- Speaker #0
Mais l'emprise de qui, vis-à-vis de qui ?
- Speaker #1
De mon père vis-à-vis de ma mère.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
Et ce qui fait que quand tu as de l'emprise et que tu n'as aucun soutien familial présent, aucun cercle d'environnement qui est là... tu peux y rester des années, voire des décennies.
- Speaker #0
Oui, bien sûr. Et toi, comment tu as su qu'il y avait quelque chose qui était dissonant ?
- Speaker #1
Alors, si je reprends en lien avec ma sœur, la dissonance, un des choses très concrets, c'est pourquoi mon père ne faisait aucune action éducative. Pas de voyage, pas de vacances, pas de... Voilà, pas de voyage, pas de vacances, aucun, et ça c'est très culturel aussi, enfin culturel, inter, là chez moi, aucune marque d'affection, aucun mot. Or le jeu thème n'existe pas, mais ah tiens, je suis fier de toi, non ça, ça n'existe pas. Ah tiens, je suis content, non ça n'existe pas. Mon père était quelqu'un qui était très silencieux. C'est-à-dire qu'on est au-delà de, c'est quoi, on parle... au-delà de seulement les sujets qu'il connaît, c'est-à-dire le foot, le jardin, la plomberie, c'était un mur de silence. Et donc, raciste dans quel sens ? C'est qu'il avait quelques blagues racistes, quelques petites ou sexistes ou autres. Et c'est là où je me dis, mais attends, c'est quoi le problème ? Moi, si tu me présentes des personnes de n'importe quelle couleur, n'importe quelle religion, je suis le premier à dire chouette, cool, on va pouvoir apprendre des trucs. Et là, non. Et après, concernant ma sœur, en fait, c'est ma mère qui a été très transparente à l'âge de 8 ans. Elle m'a dit qu'il y avait un... ou... que le père de mon père avait fait un acte incestueux vis-à-vis de ma sœur.
- Speaker #0
Donc ton grand-père ?
- Speaker #1
Oui, exactement. Et en fait, comment ça s'est passé ? Comment c'est arrivé ? En tout cas, comment on l'a appris ? C'est que ma sœur avait piqué une énorme colère, puisqu'elle s'est souvenue de moments précis. Et après, elle est tombée dans une extrême violence, comme toute personne qui subit ce genre d'actes. Sauf que moi, je dis ça, aujourd'hui, j'ai 32 ans. Si je remets dans le contexte où j'ai 8 ans, je ne comprends pas tout ça. On est dans une société avant MeToo, c'est des non-sujets.
- Speaker #0
Mais est-ce qu'il y a quelque chose qui est mis en place ? Est-ce que quand ta mère en parle, tu as quel âge ?
- Speaker #1
J'ai 8 ans.
- Speaker #0
Donc elle t'en parle à toi ?
- Speaker #1
Elle m'en parle à moi en transparence.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
Et ensuite, ce qui se passe, c'est qu'il y a deux choses. La première chose, c'est que... Donc mon père se trouve entre deux eaux, parce qu'il doit croire qui ? Son père ou sa fille ?
- Speaker #0
Ouais. Et donc, qu'est-ce qui se passe ? Qu'est-ce qu'ils font ? Qu'est-ce qui est mis en place ?
- Speaker #1
Qu'est-ce qui est mis en place ? Mon père a décidé de croire son père. Donc, ce qui se passe, c'est qu'il y a une dislocation de la famille très forte, un isolement très important. Ma mère commence à faire des actions pour voir un avocat, pour porter en justice, pour porter plainte. Et en fait, l'avocat... Avant MeToo, on est en 2007, je crois. Non, même un peu avant. 2005. C'est donc le sujet. Et l'avocat lui dit, en fait, ça c'est parole contre parole. Il y a eu un acte de santé qui montre que ma sœur a été...
- Speaker #0
Elle avait quel âge, ta sœur ?
- Speaker #1
Elle avait... On a 6 ans de décart. Elle avait 13 ans.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
Qu'il y a eu acte de pén��tration et on ne saura jamais par qui. Donc on sait qu'il y a eu un acte de santé qui a été fait pour prouver, mais en fait on ne sait pas par qui. Et donc l'avocat le dit à l'époque, mais en fait c'est parole contre parole. Mais le problème c'est que votre père c'est un ancien militaire, donc c'est compliqué. Et ce qui se passe c'est qu'il n'y a pas de dépôt de plainte. Donc, ça reste morné. Et pourquoi il n'y a pas d'épaule de plainte ? Parce que, parole contre parole, vous avez beaucoup de chances de perdre au procès. Et les parents n'ont pas de moyens, donc il n'y a pas de possibilité de dépenser de l'argent pour une perte.
- Speaker #0
Oui, bien sûr.
- Speaker #1
Et donc, la conséquence de ça, c'est qu'ensuite, ma mère, ce qu'elle fait, c'est qu'elle s'occupe plus de ma sœur. Parce qu'à la suite de ça, elle entre dans une extrême violence pendant trois ans, continuellement. Ta sœur ? Oui. Et elle fait quand même deux tentatives de suicide, trois mois d'hôpital psychiatrique. Donc en fait, moi, pendant ce temps-là, je suis délaissée et je suis en silence. Et en même temps, je me fais harceler à l'école. Donc, j'ai une situation de vie qui est un peu très similaire aux jeunes qui sont harcelés tout le temps à l'école, tout le temps, que ce soit le cyberharcèlement ou en présentiel. Je n'ai pas de moment où je suis en survie tout le temps.
- Speaker #0
Et à quel moment tu te dis que tu peux t'en sortir ?
- Speaker #1
Alors après c'est quelques années après, c'est en 5ème, alors là c'est ma sœur qui me dit tiens tu peux peut-être participer à cette association-là. En fait pendant 13 ans, moi j'ai pas de relation sociale, j'ai un ami et c'est tout. Donc j'ai vraiment peur des autres. Et donc une association d'éducation populaire, et elle me dit bah participe, ça ne te coûte rien. Je vais être très, très peur des autres, très timide, très introverti, très silencieux. Les autres, c'est le danger. Et donc, je vais participer à un premier événement de cette structure associative. Et là, je découvre des relations saines. On me dit bonjour, comment ça va ? On ne m'insulte pas par mon poids. Je ne suis pas stressée par ce passé. Mais je découvre en fait la vie en société normale à 13 ans. D'accord. Donc c'est un peu long.
- Speaker #0
Tu te dis, ah mais tiens, donc ça existe. Ça existe vraiment,
- Speaker #1
c'est possible en fait. Et après, je suis passionnée par les sujets. Donc c'est des sujets un peu autour de l'émancipation, autour de l'éducation populaire, autour de jeunes de quartier populaire et prioritaire. Donc moi, ça me passionne. Et je prends très vite des responsabilités associatives. et Yann. déclic qui fait que ça a été la première étape de mon parcours en lien avec la parole. C'est qu'il y a 14 ans, dans le cadre d'une structure, d'un week-end où on est 80 personnes, de la région au pays de la Loire, 80 jeunes en fait. Avec ma sœur et quelques autres personnes, on devait animer des temps, des fils rouges, dans quelques minutes, pour faire des transitions durant l'événement, pour faire que les plateaux changent, etc. et donc moi et donc le sujet c'était un savant fou un extraterrestre qui débarque bref on fait des conneries quoi on fait le clown et donc moi en fait je découvre à ce moment là précis la puissance de la prise de parole parce qu'en fait je joue le rôle d'un savant fou, je suis devant 90 personnes et je prends la parole et je prends un kiff mais énorme quoi tu te sens tu te sens...
- Speaker #0
connecté, tu te sens vibre, vibré.
- Speaker #1
Ouais, et une jouissance. C'est plaisant. Je kiffe. Quand je prends la parole, les personnes ne m'écoutent sans dénigrement. Et en plus, sur certaines paroles, je sais que j'ai un impact. Parce que certaines personnes m'ont dit, deux ou trois années après, quand t'as dit ça, ça m'a fait grandir. Donc, moi, l'enfant réservé, introvertie, harcelée, en survie, découvre à un moment, en fait, que je peux être écoutée, je peux avoir de l'impact, et je peux prendre du plaisir en même temps. C'est le bonheur, quoi.
- Speaker #0
C'est le bonheur absolu. Et donc, c'est comme ça que tu rebondis et que tu sors la tête de l'eau, que tu te reconstruis, du coup.
- Speaker #1
En fait, c'est là où je reste, parce que le souci, c'est que je reste quand même dans un environnement familial très... Merci. très fermé, très toxique. Donc, Moi, c'est là où je me dis, tiens, je sais que je peux prendre la parole, mais j'ai quand même gardé beaucoup de séquelles à ce moment-là de la peur d'aller vers les autres. Moi, j'avais été un enfant qui était très bizarre, dans le sens que plus il y avait de gens sur scène, dans le public, plus j'étais à l'aise. Et quand j'étais en one-to-one, c'était l'enfer absolu. Je n'arrivais pas à aller vers les personnes. Comment on me mettait sur... des animations d'événements devant 300 personnes ou de faire le fameux pitch de 3 minutes pour présenter le projet devant 50 personnes. Ok, je suis le premier, mais tu me dis demain, enfin à l'époque, tu me dis demain, écoute, il va falloir que tu ailles voir telle personne ou tu vas rentrer dans telle serre ou d'aller voir une personne. C'était la panique.
- Speaker #0
Mais c'est dû à quoi ? Est-ce que tu peux expliquer le fait que devant du monde, tu arrives à t'exprimer et tu vibres ? Et avec une personne en face de toi, tu perds complètement tes moyens. Est-ce qu'aujourd'hui, tu as des réponses ?
- Speaker #1
Oui, bien sûr. En fait, le premier truc, c'est que quand on est face à un grand groupe ou à un groupe, il y a très peu de jugement. Il y a très peu de retour. Il y a très peu d'insultes. C'est quand même très rare qu'une personne de l'Assemblée va dire « Non, sale gros » ou « Non, là, c'est totalement dégueulasse ce que tu as dit » . C'est compliqué pour une personne. Donc en fait, moi, c'est un des rares où je ne ressens pas le peur du jugement de l'autre. La peur du regard de l'autre. Il n'y en a pas. Il y a très peu de retours. Il n'y a pas de retour du tout. Ou alors, si c'est un retour, c'est des retours positifs. Donc, c'est cool. Mais quand on est en one-to-one, en face-à-face, et que la personne dit non, le potentiel de dire non, en fait... Pour moi, le potentiel de dire non ou le potentiel de dire non, en fait, c'est pas tout à fait ça. Ou non, j'aime pas ça de toi. Pour moi, ça, c'est très violent. Et quand je le prends comme un potentiel, je n'y vais pas.
- Speaker #0
D'accord. Et comment aujourd'hui, tu peux dire que cet événement-là, ces événements-là, ont fait de toi la personne que tu es aujourd'hui ? Que ce soit le drame familial que tu as vécu, le harcèlement que tu as vécu à l'école. Aujourd'hui, qu'est-ce que ça a fait de toi ?
- Speaker #1
En fait, ça m'a apporté des choses indispensables dans la place de parole et dans mon quotidien. C'est trois choses. La première, c'est la capacité d'observation. Observer les gens tels qu'ils sont. Dans leur interaction, dans leur non-interaction. Deuxième chose, c'est la capacité d'écoute. Écouter activement les personnes. Et troisième chose, c'est la synthèse.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
Parce que les moments où je prenais peu la parole étaient rares, donc il fallait être synthétique.
- Speaker #0
D'accord.
- Speaker #1
Et tout ça, en fait, ce sont des choses qui sont indispensables dans la prise de parole, mais aussi dans le quotidien, dans les relations avec les autres.
- Speaker #0
Est-ce que pendant cette période-là, il y avait quand même quelqu'un sur qui tu pouvais compter ? Un ami, une personne à qui tu t'étais confiée de tout ce que tu vivais ?
- Speaker #1
J'avais un ami que je voyais régulièrement, mais on faisait plutôt de... des jeux, du ping-pong ou autre. Mais à l'époque, je ne conscientisais pas tout ça. Parce qu'en fait, c'était mon environnement d'éducatif. J'étais très peu confrontée à d'autres environnements. Et c'est bien plus tard, à 27-28 ans, où j'ai pu avoir des mots, où j'ai pu me rendre compte. de cet environnement un petit peu dysfonctionnel dans lequel j'ai grandi. D'accord. Mais comme un enfant qui grandit avec ses parents, ils disent, ah non, ce milieu-là est normal.
- Speaker #0
D'accord. Et donc après, tu fais tes études, tu termines tes études. Oui. Et qu'est-ce que tu fais après ? Tu rentres dans le milieu du monde de l'entreprise normale, un salarié ? Qu'est-ce que tu fais après tes études ?
- Speaker #1
Après mes études, je fais deux choses. La première chose, c'est que je fais une année de service civique dans une asso qui lutte contre l'obsolescence programmée, de volontariat. Puisqu'en fait, études chez l'économie sociale, donc tous les sujets autour de l'injustice, des inégalités sociales, du climat m'intéressent. Et je développe des projets, je dois accompagner la structuration de cet asso sur l'accompagnement des adhérents, l'accompagnement des bénévoles et de motiver les bénévoles à faire des trucs.
- Speaker #0
Finalement, tu restes un peu dans le milieu associatif.
- Speaker #1
Exactement. J'ai toujours un long parcours associatif. Pendant plus de 15 ans, ça a été un de mes fils conducteurs. Parce que c'est là où je me plais le mieux. Et j'apprends plein de trucs que je n'apprends pas à l'école. Comme la prise de parole en public. Et je fais huit mois. Et là, j'ai eu un autre déclic sur la prise de parole. C'est que pendant ce service civique, je participe au concours éloquentia à Nanterre. Donc ça, c'était il y a huit ans. Et suite au documentaire Avaout que je visionne un peu avant, je suis amoureux de ce documentaire, amoureux de cette structure associative et je participe au concours. Et c'est là où je découvre la puissance de la rhétorique, puisqu'en fait, j'y vais sans conviction, je ne connaissais rien en structuration, rien en persuasion. J'achète juste un livre de Bertrand Perrier, La parole est un sport de combat, j'applique et en fait, je termine l'encar de finale. Et je suis le premier surpris.
- Speaker #0
C'est un concours d'éloquence, on précise. Éloquence,
- Speaker #1
oui. Le plus grand concours de prise de parole de France pour les jeunes. Et c'est là que je me dis, ah tiens, si un jour, j'aimerais être formateur en prise de parole ou être payé pour être vu, ça, ce serait le kiff.
- Speaker #0
Et c'est ça le déclic qui t'emmène après vers l'entrepreneuriat ? Pourquoi tu décides de ne pas être salarié ?
- Speaker #1
Parce qu'après mon service civique, j'ai eu une opportunité. J'ai fait un Startup Weekend avec deux connaissances. Et en fait, le Startup Weekend, c'est un format sur trois jours. On crée un projet entrepreneurial de A à Z. Et en fait, on a eu l'opportunité de développer le projet. On est passé de l'idée au premier client en deux jours. Le projet était de créer un biscuit fait à partir de pain invendu. Et en deux jours, on trouve notre premier client. Et on remporte le concours du Startup Weekend sur Le Mans en 2018. Et après, tout va très vite. C'est-à-dire qu'en une semaine, on a une opportunité d'ouvrir un espace commercial dans un centre commercial sur Le Mans. Et après, l'aventure part. On ouvre un café en 15 jours et ensuite, tout va très, très vite. Donc, c'est vraiment l'opportunité entrepreneuriale qui est arrivée. Moi, je ne rêvais jamais d'être entrepreneur. Je ne savais pas que l'entrepreneuriat, ça existait. Je savais que ça existait, mais moi, entrepreneur, jamais.
- Speaker #0
Tu ne te voyais pas du tout. Tout s'enchaîne, tout est positif, tout est finalement un peu... Un peu idyllique, et puis finalement...
- Speaker #1
Oui, en fait, idyllique dans l'extérieur, pour donner quelques chiffres, en fait, on vend quasiment, je crois que c'est 100 000 biscuits en un an, on fait 80 000 euros de chiffre d'affaires, on ouvre dans deux espaces commerciaux, deux centres commerciaux. Moi j'ai des relations presse et de la communication, j'ai obtenu 70 relais presse en un an. Plus un peu de développement commercial, plus la gestion d'un café. Donc plein de choses quoi. Moi j'arrive par exemple, parfois je sortais en ville, les gens me reconnaissaient dans la rue. « Ah mais vous êtes le monsieur des biscuits ou des machins » Je ne suis pas fait pour ça. Mon but, c'est quand même d'être devant des biscuits.
- Speaker #0
Mais on te reconnaît.
- Speaker #1
Je connais la gloire locale. Et je me suis dit, non, plus jamais. Plus jamais, dans le sens... C'est très étrange. La première fois, on me reconnaît dans la route. Ouais, OK, d'accord. Moi, je reste très comme je suis. Mais je sais que pour certaines personnes, ça peut très vite vriller.
- Speaker #0
Donc il y a un peu la petite notoriété locale, il y a le succès, le chiffre d'affaires qui est plutôt impressionnant.
- Speaker #1
On travaille avec des structures type
- Speaker #0
Blablacar, ça va très vite. Donc tout semble parfait.
- Speaker #1
Après, il y a eu quelques petits effritements, problèmes de tension avec mes anciens associés. On se voit très peu pour faire des réunions stratégiques parce qu'on a deux... Deux espaces, deux cafés. Donc moi, je tiens le premier café. Donc les heures d'ouverture, c'est...
- Speaker #0
9h-19h, du lundi au samedi, il faut rajouter 2h pour le trajet. Donc, en fait, c'est 8h-20h du lundi au samedi pendant 13 mois.
- Speaker #1
8h-20h du lundi au samedi pendant 13 mois.
- Speaker #0
Donc, c'est compliqué d'avoir une vie sociale autre, voire quasiment.
- Speaker #1
C'est un peu comme si tu retombais dans une forme d'isolement.
- Speaker #0
Exactement. Je l'ai découvert après coup. Mais voilà, on faisait du chiffre, mais pas assez pour se payer parce qu'on n'était pas assez. Il n'y avait pas assez d'activités. On lançait pas mal de choses. Et ça, c'est aussi un conseil que je peux dire. Mais on avait cinq, quatre tunnels de vente différents. On avait les cafés, on avait les hôtels, on avait les restaurants scolaires et la partie traiteur. Concentrez-vous sur un seul truc qui marche.
- Speaker #1
Se concentrer d'abord sur une cible. Un seul tunnel de vente.
- Speaker #0
Et le truc qui marche le plus.
- Speaker #1
D'accord.
- Speaker #0
Et qui prend le moins de temps. On a tout fait. Moi, ça m'a... En fait, ça a été trop. Ça a été beaucoup de temps. Et donc, aimer. Voilà, ça, c'est un peu le contexte. Et ensuite, en fait, c'est ma relation avec mes anciens associés aujourd'hui où je me suis aperçu que, en termes de valeur, c'était compliqué. C'était pas aligné. En fait, tout le... Pour moi, le projet est parti beaucoup trop vite. Et il y a un moment, c'était au bout de 13 mois, je ressens les premiers symptômes du burn-out. Par exemple, je tombe plus facilement, j'oublie des mots, je n'ai plus envie que les clients viennent en café, je n'ai plus envie de les servir. des motivations totales un désengagement une capacité cognitive réduite à néant donc là j'ai les premiers symptômes j'ai des amis qui ont connu des épuisements professionnels et donc ils m'ont dit fais gaffe parce que là t'as le DB et après je me suis arrêté pendant 15 jours plus de café. Après, c'est mes anciens associés qui reprennent un petit peu le relais. Et il y a aussi quelques moments de trahison avec mes anciens associés sur des termes, sur des mots, sur des promesses qui n'ont pas été tenues. Moi, à l'époque, je ne gagnais pas d'argent, j'étais au RSA à l'époque. Donc, 13 mois, tu n'as pas de vie sociale, tu n'as pas de vie amoureuse, tu n'as pas de vie médicale et tu n'as pas d'argent. C'est un peu sacrificiel, beaucoup trop.
- Speaker #1
Vous aviez signé des documents.
- Speaker #0
Oui, justement, c'était aussi une de mes erreurs. Je n'avais pas mal lu les documents et maintenant, je ne refais plus jamais ces erreurs-là. Pourquoi j'ai fait ces erreurs ? Parce qu'en fait, chaque mois qui passait, on avait 300 nouvelles opportunités commerciales au développement. Donc ça, ça n'arrêtait jamais. On n'a jamais eu de moment de pause en dire « Ok, on pense à la strat, qu'est-ce qu'on fait, qu'est-ce qu'on ne fait pas ? »
- Speaker #1
C'est-à-dire qu'on consolide ce que l'on a avant de vouloir absolument se développer, se déployer.
- Speaker #0
Et on se concentre sur un seul truc qui fonctionne, qui est rentable et qui ne prend pas de temps. Et comment on se relève de ça,
- Speaker #1
de cet épuisement ? Tu disais ce terme « épuisement mental » , comment on fait ?
- Speaker #0
Quand on est dans une culture familiale, on n'ose pas demander, etc. Et que dans le contexte dans lequel je suis, c'est compliqué. Et aussi, l'élément qui est important, c'est que cet événement arrive d'épuisement pro en décembre 2019. Et en mars 2020, il y a le confinement. Ce qui fait que... Moi, les six premiers mois, donc après, les trois premiers mois de confinement, moi, je tournais en rond et je n'avais plus d'énergie de vie. Et ça, c'est un truc qui a été extrêmement violent aussi. C'est qu'on parlait de gloire ou de gloire médiatique. Plein de gens soutenaient le projet. Et en fait, moi, du jour au lendemain, quand je décide d'arrêter, je n'ai plus aucun compte fil et je rentre dans un isolement complet. Je recontacte des personnes, enfin je rentre par choix, mais en contactant toutes les anciennes personnes qui soutenaient le projet, aucune réponse.
- Speaker #1
Parce que tu t'étais retirée du projet ?
- Speaker #0
D'accord. Pas de réponse, donc je suppose que oui. En tout cas, je rentre, il y a le confinement.
- Speaker #1
Mais tu les recontactes pour quoi ?
- Speaker #0
Tu as besoin de quoi ? Déjà pour avoir le regard, leur point de vue sur ma situation. Et aussi pour possiblement trouver des pistes, pour trouver un boulot ou autre. Pour vous bon dire, oui. Parce que vous pouvez lever des compétences et autres. Pas de réponse. D'accord.
- Speaker #1
Merci.
- Speaker #0
Il y a le confinement. Et en fait, moi, les huit premiers mois, c'était un peu un jour sans fin qui se répète de... En fait, je suis nul, je suis mauvais, etc. Et aussi, il y a tous ces événements familiaux qui remontent.
- Speaker #1
D'accord.
- Speaker #0
Et donc, au bout de six mois, je crois que c'est six mois, je commençais à prendre... Je suis vraiment au fond du trou. Je ne lis plus. Moi qui étais très curieux, je ne lis plus. Je vis dans un... Je retourne, je suis encore chez mes parents et c'est très traumatique. Mon père et voilà. Et donc, au bout de six mois, j'ai consulté un psy. Moi qui me disais, je vais m'en sortir tout seul, bah non. Il faut, quand on a la possibilité, il faut se faire aider, il faut se faire accompagner.
- Speaker #1
À ce moment-là, tes parents, quand tu retournes chez eux, qu'est-ce qu'ils disent ? Qu'est-ce qu'ils te disent ? Est-ce qu'ils t'encouragent quand même ? Quels sont les mots qu'ils utilisent pour... t'aider ?
- Speaker #0
Mais en fait, c'est que mes parents, à ce moment-là, c'est très tendu entre eux. Donc moi, je me suis... Je me délaisse, quoi. Enfin, moi, je veux pas rentrer dans cette discussion, dans cet échange. Mais surtout, c'est que, pour rappel, mes parents n'ont pas du tout cette culture de mots d'affection ou autre. Donc, ils n'ont pas changé depuis. Donc c'est vraiment ce côté, bon, chacun fait un peu sa vie. Donc je vais voir un psy, c'est là au fait où j'ai un premier déclic avec l'accompagnement. C'est quand ma psy me dit, écoutez, vu ce que vous avez vécu dans votre famille, dans votre projet, aussi dans vos relations perso, il y a des chances que vous ayez réagi avec un... ce qu'on appelle une anesthésie émotionnelle. C'est une rupture complète avec les émotions. Les émotions sont là dans votre corps, mais vous ne pouvez pas les ressentir parce que vous avez dû vivre des traumas qui étaient importants et c'est une réaction de défense de votre corps pour éviter de souffrir trop.
- Speaker #1
D'accord, donc en fait, ça se manifeste comment ? C'est comme si tu t'absentais à toi-même ? Cette rupture émotionnelle ?
- Speaker #0
C'est comme si, si je peux donner un peu une image pour toi et les auditeurs qui nous écoutent, c'est comme si dans votre vie, en fait, vous ne ressentez strictement rien. Pas de plaisir, pas de joie, pas d'émotion, pas de tristesse, pas de jouissance, rien. Il y a... Sec. C'est sec, voilà. Il n'y a que l'intellectuel.
- Speaker #1
Et comment tu fais pour... Et ta psy te donne des clés pour que tu puisses te reconnecter à toi-même.
- Speaker #0
Oui, en fait, elle me donne des clés. Puis après, j'ai toujours été très curieux. Moi, depuis enfant, j'ai quand même cette notion de pourquoi. Maintenant, j'ai changé. C'est pourquoi, mais d'abord comment, quoi faire. Parce que pourquoi, c'est bien, mais comment on passe à l'action. Mais pourquoi ? Et en fait, même si j'ai des capacités cognitives qui sont vraiment altérées, où il y a un isolement fort, j'ai envie de comprendre. Et donc, c'est là où je découvre des travaux de Muriel Selmona, qui est une grande psychologue sur les questions de trauma sexuel, de trauma des violences, sur YouTube, je commence. C'est une curiosité sur YouTube. Et puis après, les travaux de Borussia Unik. Et après, je commence à lire des livres de ces personnes-là. Et c'est là où je découvre déjà des outils concrets. Parce que c'est des cas pratiques de personnes qui ont vécu soit des traumas de résilience, soit des chemins de résilience ou des traumas importants. Et c'est là où je dis, ah tiens, là, il y a enfin un début de chemin possible de comment on fait pour s'en sortir. Et l'une des premières étapes, que ce soit Salmona ou Cyril Nick, pour déclencher un processus de résilience et pour sortir de ces événements traumatiques, c'est de rentrer dans un environnement sain sur un plan affectif. Donc, en gros, de sortir de l'environnement toxique et de d'intégrer un environnement où les relations affectives sont saines. Et c'est pour ça. Et donc là, il y a deux événements qui arrivent. Le premier événement, c'est vraiment très profond, des idées noires très fortes. Et là, je lance un premier appel à l'aide sur Facebook. Et là, j'ai un de mes très bons amis, un très bon ami, qui me contacte et qui me dit, écoute, si tu veux, si vraiment c'est la merde chez toi, et c'était vraiment très violent, psychologiquement, jamais physiquement. mes parents peuvent t'héberger si vraiment t'en as besoin. Et là arrive le deuxième confinement. Et là, au fait, je vais dormir. C'était très, très, très violent. Et là, je vais être hébergé gracieusement chez eux pendant deux mois et demi. Et là, je découvre un truc. Donc, je découvre à 26 ans une famille qui se parle. Une famille qui, malgré des différences, se respecte, s'apprécie. Ah oui, en fait, ça existe vraiment.
- Speaker #1
Ça fait comme quand tu découvres le milieu associatif, tout à coup, tu dis, ah,
- Speaker #0
ça existe. C'est ça. Oui. C'est ça. Et après, il y a un deuxième événement un peu plus tard. Parce que j'ai eu quand même quelques jobs salariés, mais ça n'a pas été conclu. Et en 2022, en fait... fin 2022 je pars pendant 3 mois dans un espace de retraite chrétien en Bourgogne à Thésée où en fait c'est un lieu où je vais habituellement 2 fois par semaine depuis 6 ans et c'est le seul lieu où je me sens très bien et donc pendant 3 mois je suis volontaire, je fais des actions toutes simples pour aider à l'accueil des personnes aux prières qui sont là Aïe ! Donc, c'est la vaisselle, les voyages, l'accueil de camping, en gros. Et c'est là où je découvre la puissance de l'écriture. Je découvre aussi des personnes qui sont un peu saines et où il y a du respect. Et c'est là où je commence le processus de résilience par l'écriture.
- Speaker #1
D'accord. Aujourd'hui, si tu devais faire un bilan de tout ce que tu as vécu ? Tu dirais que ces événements-là, qu'est-ce que tu en tires ? Quelle est la force que tu puisses de tout ça ? Comment est-ce que ça définit le Pierre d'aujourd'hui ?
- Speaker #0
C'est le Pierre qui est de plus en plus solide, en fait, parce que ça m'a permis de pouvoir réaliser le seul rêve que j'ai, c'est formateur en prise de parole. C'est organiser, être sur scène et parler de ces sujets autour de l'influence. C'est ça, en fait. Moi, il y a une question qui m'a toujours taraudé l'esprit, c'est de tout ce parcours, c'est qu'est-ce qui fait que quand il y a des gens qui écoutent d'autres gens, les gens peuvent passer à l'action ou pas ? Pourquoi ? Pourquoi qu'il y a des gens qui parlent, les gens changent ? Et en fait, de tout, on parle pour le meilleur comme pour le pire, comme je l'ai connu dans ma famille, dans ma situation, mais aussi dans la société. On ne fait pas de description d'exemple concret, mais la parole a un pouvoir extrêmement puissant pour détruire ou construire. Et donc moi, dans mon projet, je transmets beaucoup d'éléments pour construire. Mais les outils, les méthodes sont les mêmes. Et donc, pour faire les deux. et donc c'est ça moi qui me plaît c'est l'impact en fait de la parole c'est pour générer des actions chez les autres, c'est pas parler pour s'écouter parler mais c'est ça, et derrière il y a plein d'outils plein de méthodes, de la rhétorique de la psychologie de la philosophie, de la poésie de l'écriture et qui font que des neurosciences qui font que On découvre en fait toute la phase très riche de l'humain, dans son côté le plus dégueulasse, mais aussi dans son côté le plus merveilleux. Et c'est ça qui me plaît à transmettre, à mieux comprendre et à donner des clés.
- Speaker #1
D'accord, c'est fabuleux. Dis-moi Pierre, aujourd'hui, quelle est ta définition de la réussite ?
- Speaker #0
devenir le numéro 1 dans ce que l'on aime faire le plus. Il va tracer sa route.
- Speaker #1
D'accord. C'est une belle définition. En tout cas, c'est une belle façon de voir les choses. Et j'aime, enfin, à 8 ans, je dis souvent qu'on ne se fait pas tout seul, qu'il y a des détracteurs, une personne de providence. Les détracteurs, c'est les personnes qui nous mettent des bâtons dans les roues et qui nous poussent à nous challenger et à sortir un peu de notre zone de confort. Est-ce que tu peux me parler de la pire situation dans laquelle un détracteur t'a mise et comment tu as rebondi ?
- Speaker #0
C'était une personne où j'ai eu une relation de dépendance affective. Et les situations très précises, et moi qui m'énerve profondément, c'est quand elle me promettait une chose très concrète et qu'elle me disait qu'elle allait me rappeler pour pouvoir la faire, et pas de réponse. Et pas de rappel derrière. Que ce soit pro ou perso d'ailleurs. Et vraiment, ça, c'est les choses qui m'énervent profondément. Et en fait, maintenant, j'ai une solution qui est toute simple. J'adore la parole. J'adore la prise de parole. Mais les gens, on peut plus croire à ce que font les personnes, à ce qu'ils disent.
- Speaker #1
C'est-à-dire que les actes parlent plus que les paroles. Ils sont plus éloquents que les paroles, on va dire.
- Speaker #0
C'est-à-dire que pour moi, mon métier, c'est de soutenir les actes. Je ne peux pas remplacer les actes. Si les actes sont différents des mots, je ne peux pas vous aider. Par contre, si vous avez des actes qui sont très forts et très puissants, mais que vous avez du mal à les raconter, ou que vous avez envie d'être encore plus mémorable pour les dire, là, je suis là. Mais les actes définissent vraiment qui sont les personnes.
- Speaker #1
Et c'est donc grâce à cette analyse-là que tu as pu sortir de la situation de dépendance affective dans laquelle tu es ? Oui.
- Speaker #0
Oui, parce que c'était peu dans le même package. Et maintenant, aujourd'hui, je crois beaucoup plus à ce que les personnes font de ce que les personnes disent.
- Speaker #1
D'accord. Et la personne de Providence, c'est celui qui croit en nous, malgré tout. Parfois même plus que nous-mêmes, on croit en nous-mêmes. Qui est-elle ? Parce que là, c'est le moment de dire merci à cette personne, une seule personne en particulier.
- Speaker #0
Moi, de ma conviction religieuse, je dirais merci au Christ. Parce que j'ai eu la chance de le rencontrer. Et c'était une phrase qui est présente dans l'évangile, qui m'a fait un énorme shift, c'est « aime ton prochain comme toi-même » . Et tout le monde oublie la partie « comme soi-même » . Et pourtant, c'est la plus fondamentale.
- Speaker #1
Oui, parce que ça revient finalement à soi. Exactement. La première personne que l'on doit aimer.
- Speaker #0
Exactement.
- Speaker #1
C'est nous-mêmes.
- Speaker #0
Et c'est la phrase fondamentale, le commandement, le plus important qu'il dit dans... dans l'évangile et personne quasiment le comprend et l'applique. Et moi, cette phrase-là a fait un énorme shift. Et maintenant, il est dans mon quotidien de tous les jours.
- Speaker #1
Donc, je ne vais pas poser la fameuse question « Est-ce que tu t'aimes ? »
- Speaker #0
C'est « work in progress » .
- Speaker #1
« Work in progress » . S'il fallait dire une chose, une seule chose à Pierre qui avait 8 ans, tu lui dirais quoi ?
- Speaker #0
Dire non ne fait pas mal.
- Speaker #1
C'est beau ça. Dire non ne fait pas mal. Écoute Pierre, on arrive vraiment tout à la fin. Pourquoi est-ce qu'on devrait écouter cet épisode avec Pierre Fournier ?
- Speaker #0
Pourquoi ? Pour montrer que tout est possible et aussi pour dire que... Même si vous êtes dans des relations dysfonctionnelles avec vos plus proches, vous pouvez dire non. Vous pouvez les supprimer de votre vie. On n'est pas obligé d'être toujours en toute sorte de relation où on doit faire genre. Soyez vous-même. Et j'ai l'habitude de dire... Si vous êtes le plus intelligent d'une pièce, changez de pièce. Mais si vous êtes avec des gens où vous ne vibrez pas, où il n'y a pas de notion de respect, de consentement et de réciprocité, changez de personne. Personne qui vous entoure et vous allez aussi changer vous-même. Mais ne restez pas avec des gens qui ne vous font pas grandir sur tous les plans.
- Speaker #1
Est-ce que tu es en contact encore aujourd'hui avec tes parents ?
- Speaker #0
Je suis encore en contact avec ma mère et j'ai eu la force de dire à mon père que je ne le reconnaissais pas comme tel. Parce qu'il n'y a rien eu. Donc, j'ai eu une discussion assez importante avec lui. Et en me disant, pour moi, c'est terminé. La relation, elle est terminée. La porte, elle est ouverte. Mais c'est toi qui dois la prendre. Ce n'est pas moi qui vais aller vers toi. Et depuis, je n'ai plus de relation avec lui depuis quatre ans. Et je le vis pas trop mal.
- Speaker #1
Et quelles sont tes relations avec ta sœur ?
- Speaker #0
compliqué parce que comme elle, elle a vécu l'inceste, c'est encore plus dur. Donc elle est dans un processus de résilience, d'accompagnement. Mais ce n'est pas évident.
- Speaker #1
Pierre, si on veut être accompagné par toi, on te retrouve où ? C'est le moment de faire ta pub !
- Speaker #0
Vous pouvez me contacter via LinkedIn. Je serais ravie de pouvoir vous répondre. Et si vous avez envie d'être mémorable, sachez-le, ce n'est pas du talent, c'est de la compétence. Et ça s'apprend. Et je serais ravie de pouvoir accélérer votre envie, votre ambition, pour que votre parole devienne mémorable.
- Speaker #1
Écoute, ça, c'était le mot de la toute fin. Je ne peux pas dire mieux. je te remercie Pierre d'avoir en tout cas échangé, de m'avoir parlé à cœur ouvert de ton parcours ce que je retiens, c'est surtout sur la fin là où tu as dit savoir dire non, ça ne fait pas de mal au contraire, j'ai même envie de dire savoir dire non aux autres c'est se dire oui à soi exactement, merci d'avoir écouté cet épisode si vous l'avez aimé, vous laissez des étoiles des commentaires, vous partagez bien sûr c'est sur Youtube, Deezer, Spotify, Apple Podcast et rejoignez la communauté WeTalk sur Instagram, LinkedIn, TikTok. Ce sera avec plaisir de vous y lire, de vous voir, de vous rencontrer, d'échanger avec vous. Portez-vous bien et à très bientôt. Bye bye.