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20 Divin, le Podcast du Vin

20 Divin #81 : Sonia Guillotin Keïta, caviste à Bamako

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19min |30/07/2025
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20 Divin #81 : Sonia Guillotin Keïta, caviste à Bamako

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Description

Je profite de cette période estivale pour vous emmener en Afrique, à Bamako, capitale du Mali qui abrite plus de 3 millions d’habitants à la rencontre d’une ex enseignante, reconvertie en caviste.


Arrivée à Bamako fin 1999 dans le cadre d’un contrat avec l’Education Nationale au lycée français « Liberté » avec pour mission l’apprentissage de la lecture, Sonia Guillotin Keïta, rencontre son futur mari qui tient le « Bla Bla Bar », un bar iconique de Bamako.


Ce dernier étant approché par le groupe Castel pour distribuer leurs vins, il décide de créer une cave à vins qui sera pour Sonia, l’opportunité de changer complètement de métier.


Sonia nous parle de sa vie de caviste dans un pays qui a beaucoup changé depuis son arrivée.


A découvrir sur toutes les plateformes de podcasts🎧 et sur www.20divin.fr


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Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Je profite de cette période estivale pour vous emmener en Afrique, à Bamako, capitale du Mali, qui abrite plus de 3 millions d'habitants, à la rencontre de Sonia Keita, fondatrice de la cave Bacchus. Arrivée à Bamako fin 1999, dans le cadre d'un contrat avec l'éducation nationale au lycée français Liberté, avec pour mission l'apprentissage de la lecture, Sonia Keita rencontre son futur mari qui tient le Blabla Bar, un bar iconique de Bamako. Six ans plus tard, ce dernier est approché par le groupe Castel pour distribuer leurs vins. Il décide alors de créer une cave à vin qui sera pour Sonia l'opportunité de changer complètement de métier. Je m'appelle Philippe Hermé, bienvenue dans Rindy 20. Bonjour Sonia.

  • Speaker #1

    Bonjour Philippe.

  • Speaker #0

    Quelle est la genèse de l'ouverture de cette cave qui s'appelle Bacchus ?

  • Speaker #1

    Alors la genèse de cette cave, ça commence un peu par une histoire d'amour. Je rencontre M. Keïta et M. Keïta était très inquiet de savoir ce que j'allais faire puisque j'avais décidé de ne plus lui enseigner. Il a été approché par des messieurs de Castel, Castel Frères, qui était à l'époque bien implanté. Et il voulait mettre en avant un vin qui avait le nom de la bière, il s'appelait Castel. Donc il cherchait une enseigne qui puisse mettre en avant ce vin. Ils ont été voir Seiba Keita, mon mari. qui lui a dit, tiens, c'est une très bonne idée, ouvrons une cave avant avec vos produits, à côté du blabla, et ça sera très très joli, et on mettra bien de l'avant. Donc le neveu de Castel a dit, mais c'est une idée magnifique, et c'est comme ça que ça a démarré.

  • Speaker #0

    D'accord. Moi j'ai dit,

  • Speaker #1

    oui, c'est une très très bonne idée. Bon, j'étais, à l'époque, je réfléchissais pas trop de savoir que j'allais devenir caviste, j'avoue. Mais voilà, après j'ai appris un peu sur le tas.

  • Speaker #0

    Vous avez déjà une attirance pour le vin, quand même.

  • Speaker #1

    Oui, j'avais une connaissance du vin, mais pas aussi forte que ça. Mais j'avais compris qu'à Bamako, il y avait un problème avec le vin. C'est-à-dire que quand on allait dans les restaurants, il n'y avait pas de bon vin. Il y avait les vins sur les cartes.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Il y avait les vins sur la carte, effectivement, mais quand on demandait le vin, il n'y avait pas.

  • Speaker #0

    Donc pas de stock, pas de difficulté. Voilà,

  • Speaker #1

    pas de stock, beaucoup de ruptures, beaucoup de vins bouchonnés.

  • Speaker #0

    Problème de conservation.

  • Speaker #1

    Très abîmé, donc je me suis dit que là, il y avait effectivement quelque chose à faire pour le service autour du vin.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    C'était ça, les premières.

  • Speaker #0

    Vous démarrez avec Castel.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Et puis ?

  • Speaker #1

    Ça ne se passe pas bien.

  • Speaker #0

    Ça ne se passe pas bien.

  • Speaker #1

    Ça ne se passe pas bien du tout parce que le neveu Castel s'en va, il est remplacé par un autre monsieur qui s'appelait M. Brousseau. Je me souviens bien parce que Brousseau, il était aussi Brousseau de nom que de comportement.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc il me dit qu'il n'avait pas besoin de moi, qu'il ne comprenait pas qu'on ouvre une cave à vin à Bamako. Et j'entends effectivement qu'ils vont ouvrir une espèce de store dans une zone industrielle, mais à 200 mètres de la cave à vin qu'on a ouverte.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc effectivement, on rentre en concurrence immédiate. Et il me donne un stock de vin, mais abîmé. D'accord. Donc ça commence mal. Moi déjà, je ne connais pas.

  • Speaker #0

    Il vous le donne ou il vous le vend ?

  • Speaker #1

    Il me le met en dépôt et je dois le rembourser en six mois.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc je vais le voir, je vais voir les gens là-bas, je leur dis c'est pas possible, je ne peux pas vendre un vin pareil, c'est la catastrophe. Ils ne m'ont pas écouté, ils m'ont envoyé les huissiers pour récupérer l'argent. Donc là après c'est un peu, à Bamako parfois il faut se défendre, on devient un peu cow-boy. Donc mon mari est venu avec moi, m'accompagner chez Castel, il a secoué un monsieur par le cou en lui disant qu'il ne fallait pas faire de mal à sa femme. C'était lui un grand monsieur Keita et qu'on ne faisait jamais du mal à sa femme. Bref, les lignes se sont effacées, ce stock a disparu de la comptabilité et j'ai repris avec un petit stock et je choisissais moi-même mes vins, je vérifiais.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Mais très vite, j'ai compris qu'en fait, si je restais avec eux, je n'allais pas m'en sortir. Les marges étaient très étroites et je ne m'en sortais pas en fait.

  • Speaker #0

    Donc vous démarrez cette cave. Alors pour construire votre stock, vous faites comment ? J'imagine qu'il faut quand même un peu de cash. Comment vous allez vous sourcer ? Comment vous trouvez vos fournisseurs ? Surtout que vous démarrez, vous n'êtes pas forcément très connue dans le milieu. Non,

  • Speaker #1

    non. Tout le monde me prend pour une illuminée quand même. Et il s'avère qu'à l'ambassade de France, il y avait un conseiller économique qui aimait beaucoup le vin.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc, il s'est dit, si je donne à madame Keïta une bonne note, une bonne appréciation, elle pourra bénéficier d'une assurance qui lui permet d'avoir six mois pour payer le vin.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est l'assurance Ausha. Donc il m'a mis une bonne note, sans que j'aie vraiment du vin, il m'a mis une très bonne note. Et avec cette très bonne note, je suis allée voir mon banquier, alors un banquier vraiment très sahélien, du Nord, qui ne boit pas de vin. Et je lui ai exposé mon projet en lui disant que j'avais le soutien de la Ausha. Et il m'a dit... Dans ces cas-là, je trouve que ce que vous faites, c'est très, très bien. J'accepte de vous faire un prêt bancaire à un taux relativement bas. Bon, pas par rapport à ici, on est un peu plus que 10%, mais là-bas, c'est fait.

  • Speaker #0

    D'accord, l'inflation est plus élevée. Voilà.

  • Speaker #1

    Donc,

  • Speaker #0

    vous vous êtes rendu compte qu'il fallait apporter plutôt des gros volumes pour éviter de refaire 150 fois les démarches ?

  • Speaker #1

    Je n'avais pas le choix. Si je ne faisais pas un gros volume d'emblée, je ne gagnais pas d'argent. Les marges, ce n'était pas bon.

  • Speaker #0

    Les premiers vins que vous achetez, quels sont-ils ? Du Bordeaux ?

  • Speaker #1

    Pas du tout. J'avais repéré qu'à Babaco, il n'y avait pas de vin de Loire. Et que le vin de Loire, quand il fait très chaud, ce n'est pas désagréable à boire. C'est des vins flammés, des vins de Touraine, les petits Chinons, les Bourgueuils. Je me suis dit... Et puis, ça va avec les grillades. Je me suis dit... Je commence par la Loire. Je suis de la Loire, mon grand-père était de la Loire.

  • Speaker #0

    Vous connaissez un peu, vous allez voir une foire ou deux.

  • Speaker #1

    Je vais à une foire des vins de Loire à Angers. Je tombe sur un monsieur qui vendait du Bourgueil. Il me dit, nous on est une association de vignerons, c'était la collégiale des vins de Loire, des domaines de Loire. J'apporte un conteneur entier de vins de Loire.

  • Speaker #0

    Plutôt de blancs ?

  • Speaker #1

    Des blancs, des rouges et des rouges.

  • Speaker #0

    Et ça marche tout de suite ?

  • Speaker #1

    Ça marche tout de suite parce que c'est des vins effectivement très agréables à boire, frais, pas trop chers.

  • Speaker #0

    Alors quels sont vos premiers clients ? Parce qu'on le rappelle, le Mali est un pays régulièrement à 95%, donc c'est quand même pas évident de vendre du vin à des Maliens.

  • Speaker #1

    À l'époque, il y avait beaucoup d'étrangers, énormément d'étrangers. Donc les vins, ça allait dans les ambassades, pour les cocktails, pour les particuliers, pour les restaurants.

  • Speaker #0

    Il y avait une forte présence française aussi, j'imagine.

  • Speaker #1

    Oui, mais ce n'est pas eux les plus grands clients.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    C'est assez réfractaire, les Français. Ils ont tendance à penser que chez leur grand-père, c'est meilleur.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc, ils sont toujours un peu sceptiques par rapport à ça.

  • Speaker #0

    Donc, plutôt des expats, plutôt des…

  • Speaker #1

    Des Canadiens, Anglais, Australiens, Chinois déjà un petit peu à l'époque.

  • Speaker #0

    Ce sont les Chinois qui vont devenir vos plus gros clients finalement avec le temps. Qui vont avoir une influence, une implantation ? Eux,

  • Speaker #1

    vraiment, ils se sont installés. Là, depuis quelques années, ils ont carrément une cité.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    On l'appelle maintenant Chinatown.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    C'était la cité du Niger. Mais elle est en train de se rebaptiser Chinatown. Ils sont extrêmement nombreux. Et ils ont même fait un blabla bis.

  • Speaker #0

    D'accord. Oui. Un blabla bis chinois.

  • Speaker #1

    Oui, dans la cité du Niger, avec la même forme de table,

  • Speaker #0

    etc. D'accord.

  • Speaker #1

    Bon. Ok.

  • Speaker #0

    Pourquoi pas ? Et donc, vous me disiez, ce sont eux finalement qui sont les plus gros acheteurs en valeur, puisqu'ils aiment bien ce qui est cher.

  • Speaker #1

    Ils ont une drôle de façon de consommer et d'acheter. Ils veulent des vins chers.

  • Speaker #0

    Pour pouvoir les ramener chez eux, fricter, pèter des amis, montrer qu'ils sont riches. C'est ça.

  • Speaker #1

    Pendant la période après le Nouvel An, ils partent en congé pendant un mois. Et là, ils ramènent énormément de vins comme cadeau. Vins rouges, Bordeaux. De préférence dans les 40-50 000 francs CFA, ça fait presque 100 euros quand même, la bouteille.

  • Speaker #0

    Oui, c'est pas mal. Oui,

  • Speaker #1

    c'est pas mal. Bon, après, c'est plus cher qu'ici.

  • Speaker #0

    Oui, bien sûr, bien sûr. C'est quel type de vin ? Ils achètent quoi ? Des grands crus classés ?

  • Speaker #1

    Non, là, je...

  • Speaker #0

    Le Rayas, ils achètent...

  • Speaker #1

    Ils sont très amateurs de Pessac Léonian.

  • Speaker #0

    Ah, Pessac, très bien.

  • Speaker #1

    Ça, ils aiment beaucoup. Les Saint-Emilion, un peu moins. Donc,

  • Speaker #0

    ils ont fait quoi du Smith's au Laffite ? Oui,

  • Speaker #1

    du Smith's au Laffite, ça, ils sont à fond.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    C'est même... C'est un peu bête, mais c'est le mot Laffite qui a fait qu'ils achètent le Smith's au Laffite.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Ils ont bien vu qu'il y avait deux T par un T, parce que ce n'est pas le Rothschild.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Mais ce n'est pas grave, ils sont contents.

  • Speaker #0

    Ils aiment bien le mot Laffite. Oui. Et ils vendent aussi des spiritueux. j'imagine qu'ils vous achètent aussi peut-être De l'Armagnac ? Du Cognac peut-être ?

  • Speaker #1

    J'ai très peu de spiritueux.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Parce que ce n'est pas mon réseau au niveau des douanes.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et je n'ai pas accès à ce réseau-là, donc je ne l'en vends pas. Ok. Juste un petit peu de Calvados à la maison Dupont, c'est tout.

  • Speaker #0

    Ok. Et comment vous faites pour conserver votre stock ? Puisque là, on est quand même dans un pays avec des contraintes climatiques fortes. Très fortes. Très grosse chaleur, très forte humidité en fonction des saisons.

  • Speaker #1

    Très forte humidité suivie de zéro amplitude thermique.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc là c'est très compliqué parce que les bouchons se rétractent. Donc il faut les surveiller très très près.

  • Speaker #0

    Avec des caves, avec de l'air conditionné.

  • Speaker #1

    Air conditionné partout.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et au sol j'ai mis des tomates qui boivent l'eau.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et j'arrose ces tomates régulièrement pour que ça fasse un peu d'humidité en période sèche. Et j'ai des canaries en terre aussi, qui, quand la clim et la jarre, ça fait un espèce de microclimat. Elles se glacent, elles se rafraîchissent et elles rafraîchissent autour d'elles.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et puis je surveille, je bois les vins, je les goûte très très régulièrement.

  • Speaker #0

    Puis j'imagine que vous les laissez reposer quand ils arrivent par container, vous les laissez un peu reposer avant de les mettre à vente, j'imagine ? Oui,

  • Speaker #1

    certains vins sont même très capricieux. Ils se ferment pendant 2-3 mois.

  • Speaker #0

    D'accord, ok.

  • Speaker #1

    Alors je l'ai goûté en salon, je sais bien ce que j'ai bu, j'ai eu le souvenir, et ils arrivent, ils sont éteints. D'accord. Donc j'attends.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Mais ils m'immobilisent l'argent pendant un petit moment.

  • Speaker #0

    Bien sûr.

  • Speaker #1

    Je suis obligée de dire au client, attendez. Attendez un peu.

  • Speaker #0

    Alors, est-ce qu'au Mali, on trouve du vin ailleurs que dans votre cave ? Oui. Et dans quels sont les circuits de distribution ? Alors,

  • Speaker #1

    il y a un circuit libanais.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Par l'intermédiaire des petits supermarchés. Ils sont assez nombreux. Il y en a 3-4 dans la ville. Donc, eux, ils vendent des vins. Très entrée de gamme, en blanc, rouge, rosé.

  • Speaker #0

    D'accord, à peu près le seul.

  • Speaker #1

    Ils ont la problématique d'être souvent abîmés. Les gens repèrent quand il y a un nouvel arrivage, donc là ils vont acheter, mais après ça s'abîme un peu. On voit les couleurs un peu, les rosés qui deviennent un peu orangés.

  • Speaker #0

    Alors quelles sont les spécificités du marché du vin au Mali ? Aujourd'hui, il y a des producteurs africains auprès desquels vous vous sourcez ou pas du tout ? C'est exclusivement des vins qui viennent du...

  • Speaker #1

    Moi, je travaille avec la France, l'Espagne, l'Italie, de plus en plus.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    L'Italie, ça marche très très bien. C'est un vin qui marche avec les plats africains.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et puis, je travaille pas mal aussi avec... tout ce qui est Amérique du Sud, quelques vins qui sont vraiment intéressants en Chili et Argentine.

  • Speaker #0

    D'accord, des Malbecs, des choses comme ça.

  • Speaker #1

    C'est ça, oui.

  • Speaker #0

    Très bien. Et est-ce que lors de votre visite à Paris, vous avez découvert des choses un petit peu sympathiques qui vous ont tapé dans l'œil et que vous aimeriez importer au Mali ?

  • Speaker #1

    Disons que ces trois jours-là, c'est presque juste. J'ai le temps de dire bonjour à tous mes fournisseurs. C'est difficile d'aller voir les autres. Pourtant, ils sont extrêmement nombreux à venir m'écrire avant, en me disant « Venez nous voir, venez nous voir » . Il y a beaucoup de gens qui veulent un ancrage sur l'Afrique.

  • Speaker #0

    Beaucoup de pignons.

  • Speaker #1

    Un souhait. Mais bon, je n'ai pas le temps, je ne peux pas. Je voudrais voyager avec mon vendeur, M. Denna. Mais hélas, il n'a pas le droit au visa. Donc, ce n'est pas la peine. Sinon, à deux, on trouverait une façon de gérer ça un peu plus sympathique. Donc là, cette année, j'ai pris l'option italienne.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc voilà, j'ai découvert des vins que je n'avais jamais bu en fait. Des Valpolicella, des Amarone, des Chianti.

  • Speaker #0

    Qui vous ont plu ?

  • Speaker #1

    Oui, vraiment. Oui, c'est très, très beau.

  • Speaker #0

    D'accord. Alors, qu'est-ce qui vous plaît le plus aujourd'hui dans votre métier de caviste ?

  • Speaker #1

    Il y a plusieurs choses qui me plaisent. D'abord, j'aime bien vendre du vin. J'aime bien ça, j'aime bien parce que je suis dans les coulisses des fêtes, donc je sais un peu à ma manière ce qui va se passer, ce qu'on va manger. Et puis voilà, je suis dans les coulisses.

  • Speaker #0

    Les gens viennent vous voir avant pour vous demander des conseils. Oui,

  • Speaker #1

    c'est ça.

  • Speaker #0

    D'accord, mais ben...

  • Speaker #1

    Bon, arrêtez de prendre le rosé là parce qu'il y a déjà pas mal de gens qui ont pris de rosé, prenez peut-être quelques bulles. Donc j'aménage aussi les bouteilles qui arrivent. Et puis, une autre chose qui m'a beaucoup plu, c'est que je me suis remise à voyager en Europe.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Voilà, redécouvrir les terres, le tiroir, les vignerons.

  • Speaker #0

    À la rencontre des femmes.

  • Speaker #1

    Et des hommes et des femmes plutôt intègres. Donc ça, ça a été un très grand plaisir pour moi. Une manière de revenir en fait en Europe.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Vous savez, quand on habite longtemps loin de l'Europe, à un moment donné, on a migré.

  • Speaker #0

    Oui, un petit peu.

  • Speaker #1

    On a vraiment migré. Et là, ça me permet de faire un retour.

  • Speaker #0

    Ça vous permet de garder des liens, des attraps ?

  • Speaker #1

    Oui, des liens forts.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Oui,

  • Speaker #0

    très forts. Et on en a parlé tout à l'heure. Est-ce que les conditions politiques actuelles et le ressentiment un petit peu croissant vis-à-vis de la France ne représentent-elles pas une menace pour les Français qui vivent ?

  • Speaker #1

    Non, à l'heure actuelle, on n'est pas du tout,

  • Speaker #0

    du tout,

  • Speaker #1

    mais alors pas du tout embêtés sur place. Pour les gens qui vivent sur place, on vit très bien, on n'est pas inquiétés. Il y a un nombre croissant de Français. Deuxième génération de Maliens, en fait, si je m'exprime bien. Ils sont deuxième génération de Maliens français. Et il y a un retour au pays massif.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Alors vraiment avec une volonté d'ajouter leur vision sur le pays.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et ils s'intéressent à beaucoup de choses.

  • Speaker #0

    Il y a la croissance du pays aux perspectives.

  • Speaker #1

    C'est ça. Ils ont des associations. Ils se retrouvent. Et il y a beaucoup d'entraide entre eux. On les appelle les repates.

  • Speaker #0

    D'accord. Donc,

  • Speaker #1

    c'est repatriation.

  • Speaker #0

    Vous vendez également du vin aux musulmans, mais ça se fait toujours de manière un petit peu discrète quand même.

  • Speaker #1

    Un système de vente qui est lié à une forme de pudeur. C'est-à-dire qu'il est... Pas très bien vu de sortir avec des bouteilles de ventre au vu de tous.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Donc, il ne faut pas de fenêtre au sac. Il faut vraiment que les bouteilles soient cachées, qu'on ne voit pas.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Souvent, les gens se mettent... au bar, au blabla, ils me donnent les clés et ils me demandent de mettre directement dans la voiture. Comme ça, ils ne passent pas par le magasin.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Ou bien je vais au blabla, je discute avec eux, ils me disent ce qu'ils veulent, etc. Donc, ils évitent de se montrer au niveau de la cavave. Parce qu'il peut y avoir une pression, une pression familiale, si on les voit en train d'acheter du vin. Donc, ils font attention à ça. Voilà. D'accord. Il y en a pas mal aussi qui vont boire au champ. Donc, ils ont régulièrement... Les Bamakois ont encore des racines très rurales et ils ont tous des terres, pas très loin de Bamako. Donc ils vont au champ et là, ils ramènent du vin, ils boivent tranquillement leur vin.

  • Speaker #0

    Vous remplissez le vin dans des bouteilles ?

  • Speaker #1

    Je l'ai fait, mais moins maintenant. Mais c'est vrai que je mettais le vin dans des bouteilles d'eau et on faisait croire que c'était du bisap.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Le bisap, c'est un jus très rouge qui est bu sur place. C'est une espèce d'hibiscus, en fait.

  • Speaker #0

    D'accord. Quels sont vos projets, court et moyen terme ? Vous parliez tout à l'heure éventuellement de vous développer dans le reste du Mali ou peut-être même dans d'autres pays d'Afrique.

  • Speaker #1

    Oui, j'aimerais bien atteindre quelques grandes villes du Mali, notamment Ségou et Mopti. Alors, Ségou, je commence à avoir quelque chose d'intéressant. Mopti, non, très peu. Des hôtels, mais vraiment rarement parce qu'il faut qu'ils viennent et qu'ils repartent. Les routes ne sont pas sûres, donc on a…

  • Speaker #0

    Oui, la logistique. Oui,

  • Speaker #1

    il n'y a plus d'attaque. Donc, c'est un peu compliqué. Déjà les grandes villes du Mali, et alors j'aimerais bien essayer d'ouvrir des petits Bacchus, Côte d'Ivoire.

  • Speaker #0

    D'accord, des franchises.

  • Speaker #1

    J'ai essayé le Sénégal. C'est difficile, il y a du monde. Ils ont les dents longues, il y a quelques bons cavistes. Je sens que je n'ai pas l'énergie qu'il faudrait pour y arriver.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Que je me laisse porter, moi, un peu. Donc là, peut-être vers la Côte d'Ivoire, où c'est très étrange. étendu. Il y a moyen d'aller, pas obligatoirement sur Abidjan, mais sur d'autres villes. Et comme ce sont beaucoup de chrétiens, ils boivent différemment. Ils boivent plus... C'est plus facile à vendre, le vin.

  • Speaker #0

    C'est plus dans la tradition naturelle. Super. Écoutez, merci d'être passés par le micro de Vin Divin.

  • Speaker #1

    Ça me fait plaisir.

  • Speaker #0

    Moi aussi. Et je vous souhaite un bon retour à Bamako. Une bonne continuation. Puis on se reverra probablement lors de votre prochaine durée. Oui,

  • Speaker #1

    j'ai votre numéro,

  • Speaker #0

    Philippe. Voilà. À bientôt.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci, au revoir. Merci d'avoir pris le temps de nous écouter et de nous être fidèles. Vous êtes toujours plus nombreux à écouter ce podcast et à nous suivre sur les réseaux sociaux. Si vous avez apprécié ce contenu, partagez-le autour de vous et n'hésitez pas à nous créditer de 5 étoiles sur Apple Podcasts ou Spotify. Ça nous aide à remonter dans les classements. Ce contenu a été créé avec le soutien de Alma, société de conseils en croissance digitale. Pour ma part, je vous donne rendez-vous dans quelques minutes. quelques semaines pour de nouveaux épisodes de Vin Divin et je vous souhaite un très bel été.

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Je profite de cette période estivale pour vous emmener en Afrique, à Bamako, capitale du Mali qui abrite plus de 3 millions d’habitants à la rencontre d’une ex enseignante, reconvertie en caviste.


Arrivée à Bamako fin 1999 dans le cadre d’un contrat avec l’Education Nationale au lycée français « Liberté » avec pour mission l’apprentissage de la lecture, Sonia Guillotin Keïta, rencontre son futur mari qui tient le « Bla Bla Bar », un bar iconique de Bamako.


Ce dernier étant approché par le groupe Castel pour distribuer leurs vins, il décide de créer une cave à vins qui sera pour Sonia, l’opportunité de changer complètement de métier.


Sonia nous parle de sa vie de caviste dans un pays qui a beaucoup changé depuis son arrivée.


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Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Je profite de cette période estivale pour vous emmener en Afrique, à Bamako, capitale du Mali, qui abrite plus de 3 millions d'habitants, à la rencontre de Sonia Keita, fondatrice de la cave Bacchus. Arrivée à Bamako fin 1999, dans le cadre d'un contrat avec l'éducation nationale au lycée français Liberté, avec pour mission l'apprentissage de la lecture, Sonia Keita rencontre son futur mari qui tient le Blabla Bar, un bar iconique de Bamako. Six ans plus tard, ce dernier est approché par le groupe Castel pour distribuer leurs vins. Il décide alors de créer une cave à vin qui sera pour Sonia l'opportunité de changer complètement de métier. Je m'appelle Philippe Hermé, bienvenue dans Rindy 20. Bonjour Sonia.

  • Speaker #1

    Bonjour Philippe.

  • Speaker #0

    Quelle est la genèse de l'ouverture de cette cave qui s'appelle Bacchus ?

  • Speaker #1

    Alors la genèse de cette cave, ça commence un peu par une histoire d'amour. Je rencontre M. Keïta et M. Keïta était très inquiet de savoir ce que j'allais faire puisque j'avais décidé de ne plus lui enseigner. Il a été approché par des messieurs de Castel, Castel Frères, qui était à l'époque bien implanté. Et il voulait mettre en avant un vin qui avait le nom de la bière, il s'appelait Castel. Donc il cherchait une enseigne qui puisse mettre en avant ce vin. Ils ont été voir Seiba Keita, mon mari. qui lui a dit, tiens, c'est une très bonne idée, ouvrons une cave avant avec vos produits, à côté du blabla, et ça sera très très joli, et on mettra bien de l'avant. Donc le neveu de Castel a dit, mais c'est une idée magnifique, et c'est comme ça que ça a démarré.

  • Speaker #0

    D'accord. Moi j'ai dit,

  • Speaker #1

    oui, c'est une très très bonne idée. Bon, j'étais, à l'époque, je réfléchissais pas trop de savoir que j'allais devenir caviste, j'avoue. Mais voilà, après j'ai appris un peu sur le tas.

  • Speaker #0

    Vous avez déjà une attirance pour le vin, quand même.

  • Speaker #1

    Oui, j'avais une connaissance du vin, mais pas aussi forte que ça. Mais j'avais compris qu'à Bamako, il y avait un problème avec le vin. C'est-à-dire que quand on allait dans les restaurants, il n'y avait pas de bon vin. Il y avait les vins sur les cartes.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Il y avait les vins sur la carte, effectivement, mais quand on demandait le vin, il n'y avait pas.

  • Speaker #0

    Donc pas de stock, pas de difficulté. Voilà,

  • Speaker #1

    pas de stock, beaucoup de ruptures, beaucoup de vins bouchonnés.

  • Speaker #0

    Problème de conservation.

  • Speaker #1

    Très abîmé, donc je me suis dit que là, il y avait effectivement quelque chose à faire pour le service autour du vin.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    C'était ça, les premières.

  • Speaker #0

    Vous démarrez avec Castel.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Et puis ?

  • Speaker #1

    Ça ne se passe pas bien.

  • Speaker #0

    Ça ne se passe pas bien.

  • Speaker #1

    Ça ne se passe pas bien du tout parce que le neveu Castel s'en va, il est remplacé par un autre monsieur qui s'appelait M. Brousseau. Je me souviens bien parce que Brousseau, il était aussi Brousseau de nom que de comportement.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc il me dit qu'il n'avait pas besoin de moi, qu'il ne comprenait pas qu'on ouvre une cave à vin à Bamako. Et j'entends effectivement qu'ils vont ouvrir une espèce de store dans une zone industrielle, mais à 200 mètres de la cave à vin qu'on a ouverte.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc effectivement, on rentre en concurrence immédiate. Et il me donne un stock de vin, mais abîmé. D'accord. Donc ça commence mal. Moi déjà, je ne connais pas.

  • Speaker #0

    Il vous le donne ou il vous le vend ?

  • Speaker #1

    Il me le met en dépôt et je dois le rembourser en six mois.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc je vais le voir, je vais voir les gens là-bas, je leur dis c'est pas possible, je ne peux pas vendre un vin pareil, c'est la catastrophe. Ils ne m'ont pas écouté, ils m'ont envoyé les huissiers pour récupérer l'argent. Donc là après c'est un peu, à Bamako parfois il faut se défendre, on devient un peu cow-boy. Donc mon mari est venu avec moi, m'accompagner chez Castel, il a secoué un monsieur par le cou en lui disant qu'il ne fallait pas faire de mal à sa femme. C'était lui un grand monsieur Keita et qu'on ne faisait jamais du mal à sa femme. Bref, les lignes se sont effacées, ce stock a disparu de la comptabilité et j'ai repris avec un petit stock et je choisissais moi-même mes vins, je vérifiais.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Mais très vite, j'ai compris qu'en fait, si je restais avec eux, je n'allais pas m'en sortir. Les marges étaient très étroites et je ne m'en sortais pas en fait.

  • Speaker #0

    Donc vous démarrez cette cave. Alors pour construire votre stock, vous faites comment ? J'imagine qu'il faut quand même un peu de cash. Comment vous allez vous sourcer ? Comment vous trouvez vos fournisseurs ? Surtout que vous démarrez, vous n'êtes pas forcément très connue dans le milieu. Non,

  • Speaker #1

    non. Tout le monde me prend pour une illuminée quand même. Et il s'avère qu'à l'ambassade de France, il y avait un conseiller économique qui aimait beaucoup le vin.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc, il s'est dit, si je donne à madame Keïta une bonne note, une bonne appréciation, elle pourra bénéficier d'une assurance qui lui permet d'avoir six mois pour payer le vin.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est l'assurance Ausha. Donc il m'a mis une bonne note, sans que j'aie vraiment du vin, il m'a mis une très bonne note. Et avec cette très bonne note, je suis allée voir mon banquier, alors un banquier vraiment très sahélien, du Nord, qui ne boit pas de vin. Et je lui ai exposé mon projet en lui disant que j'avais le soutien de la Ausha. Et il m'a dit... Dans ces cas-là, je trouve que ce que vous faites, c'est très, très bien. J'accepte de vous faire un prêt bancaire à un taux relativement bas. Bon, pas par rapport à ici, on est un peu plus que 10%, mais là-bas, c'est fait.

  • Speaker #0

    D'accord, l'inflation est plus élevée. Voilà.

  • Speaker #1

    Donc,

  • Speaker #0

    vous vous êtes rendu compte qu'il fallait apporter plutôt des gros volumes pour éviter de refaire 150 fois les démarches ?

  • Speaker #1

    Je n'avais pas le choix. Si je ne faisais pas un gros volume d'emblée, je ne gagnais pas d'argent. Les marges, ce n'était pas bon.

  • Speaker #0

    Les premiers vins que vous achetez, quels sont-ils ? Du Bordeaux ?

  • Speaker #1

    Pas du tout. J'avais repéré qu'à Babaco, il n'y avait pas de vin de Loire. Et que le vin de Loire, quand il fait très chaud, ce n'est pas désagréable à boire. C'est des vins flammés, des vins de Touraine, les petits Chinons, les Bourgueuils. Je me suis dit... Et puis, ça va avec les grillades. Je me suis dit... Je commence par la Loire. Je suis de la Loire, mon grand-père était de la Loire.

  • Speaker #0

    Vous connaissez un peu, vous allez voir une foire ou deux.

  • Speaker #1

    Je vais à une foire des vins de Loire à Angers. Je tombe sur un monsieur qui vendait du Bourgueil. Il me dit, nous on est une association de vignerons, c'était la collégiale des vins de Loire, des domaines de Loire. J'apporte un conteneur entier de vins de Loire.

  • Speaker #0

    Plutôt de blancs ?

  • Speaker #1

    Des blancs, des rouges et des rouges.

  • Speaker #0

    Et ça marche tout de suite ?

  • Speaker #1

    Ça marche tout de suite parce que c'est des vins effectivement très agréables à boire, frais, pas trop chers.

  • Speaker #0

    Alors quels sont vos premiers clients ? Parce qu'on le rappelle, le Mali est un pays régulièrement à 95%, donc c'est quand même pas évident de vendre du vin à des Maliens.

  • Speaker #1

    À l'époque, il y avait beaucoup d'étrangers, énormément d'étrangers. Donc les vins, ça allait dans les ambassades, pour les cocktails, pour les particuliers, pour les restaurants.

  • Speaker #0

    Il y avait une forte présence française aussi, j'imagine.

  • Speaker #1

    Oui, mais ce n'est pas eux les plus grands clients.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    C'est assez réfractaire, les Français. Ils ont tendance à penser que chez leur grand-père, c'est meilleur.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc, ils sont toujours un peu sceptiques par rapport à ça.

  • Speaker #0

    Donc, plutôt des expats, plutôt des…

  • Speaker #1

    Des Canadiens, Anglais, Australiens, Chinois déjà un petit peu à l'époque.

  • Speaker #0

    Ce sont les Chinois qui vont devenir vos plus gros clients finalement avec le temps. Qui vont avoir une influence, une implantation ? Eux,

  • Speaker #1

    vraiment, ils se sont installés. Là, depuis quelques années, ils ont carrément une cité.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    On l'appelle maintenant Chinatown.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    C'était la cité du Niger. Mais elle est en train de se rebaptiser Chinatown. Ils sont extrêmement nombreux. Et ils ont même fait un blabla bis.

  • Speaker #0

    D'accord. Oui. Un blabla bis chinois.

  • Speaker #1

    Oui, dans la cité du Niger, avec la même forme de table,

  • Speaker #0

    etc. D'accord.

  • Speaker #1

    Bon. Ok.

  • Speaker #0

    Pourquoi pas ? Et donc, vous me disiez, ce sont eux finalement qui sont les plus gros acheteurs en valeur, puisqu'ils aiment bien ce qui est cher.

  • Speaker #1

    Ils ont une drôle de façon de consommer et d'acheter. Ils veulent des vins chers.

  • Speaker #0

    Pour pouvoir les ramener chez eux, fricter, pèter des amis, montrer qu'ils sont riches. C'est ça.

  • Speaker #1

    Pendant la période après le Nouvel An, ils partent en congé pendant un mois. Et là, ils ramènent énormément de vins comme cadeau. Vins rouges, Bordeaux. De préférence dans les 40-50 000 francs CFA, ça fait presque 100 euros quand même, la bouteille.

  • Speaker #0

    Oui, c'est pas mal. Oui,

  • Speaker #1

    c'est pas mal. Bon, après, c'est plus cher qu'ici.

  • Speaker #0

    Oui, bien sûr, bien sûr. C'est quel type de vin ? Ils achètent quoi ? Des grands crus classés ?

  • Speaker #1

    Non, là, je...

  • Speaker #0

    Le Rayas, ils achètent...

  • Speaker #1

    Ils sont très amateurs de Pessac Léonian.

  • Speaker #0

    Ah, Pessac, très bien.

  • Speaker #1

    Ça, ils aiment beaucoup. Les Saint-Emilion, un peu moins. Donc,

  • Speaker #0

    ils ont fait quoi du Smith's au Laffite ? Oui,

  • Speaker #1

    du Smith's au Laffite, ça, ils sont à fond.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    C'est même... C'est un peu bête, mais c'est le mot Laffite qui a fait qu'ils achètent le Smith's au Laffite.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Ils ont bien vu qu'il y avait deux T par un T, parce que ce n'est pas le Rothschild.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Mais ce n'est pas grave, ils sont contents.

  • Speaker #0

    Ils aiment bien le mot Laffite. Oui. Et ils vendent aussi des spiritueux. j'imagine qu'ils vous achètent aussi peut-être De l'Armagnac ? Du Cognac peut-être ?

  • Speaker #1

    J'ai très peu de spiritueux.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Parce que ce n'est pas mon réseau au niveau des douanes.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et je n'ai pas accès à ce réseau-là, donc je ne l'en vends pas. Ok. Juste un petit peu de Calvados à la maison Dupont, c'est tout.

  • Speaker #0

    Ok. Et comment vous faites pour conserver votre stock ? Puisque là, on est quand même dans un pays avec des contraintes climatiques fortes. Très fortes. Très grosse chaleur, très forte humidité en fonction des saisons.

  • Speaker #1

    Très forte humidité suivie de zéro amplitude thermique.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc là c'est très compliqué parce que les bouchons se rétractent. Donc il faut les surveiller très très près.

  • Speaker #0

    Avec des caves, avec de l'air conditionné.

  • Speaker #1

    Air conditionné partout.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et au sol j'ai mis des tomates qui boivent l'eau.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et j'arrose ces tomates régulièrement pour que ça fasse un peu d'humidité en période sèche. Et j'ai des canaries en terre aussi, qui, quand la clim et la jarre, ça fait un espèce de microclimat. Elles se glacent, elles se rafraîchissent et elles rafraîchissent autour d'elles.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et puis je surveille, je bois les vins, je les goûte très très régulièrement.

  • Speaker #0

    Puis j'imagine que vous les laissez reposer quand ils arrivent par container, vous les laissez un peu reposer avant de les mettre à vente, j'imagine ? Oui,

  • Speaker #1

    certains vins sont même très capricieux. Ils se ferment pendant 2-3 mois.

  • Speaker #0

    D'accord, ok.

  • Speaker #1

    Alors je l'ai goûté en salon, je sais bien ce que j'ai bu, j'ai eu le souvenir, et ils arrivent, ils sont éteints. D'accord. Donc j'attends.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Mais ils m'immobilisent l'argent pendant un petit moment.

  • Speaker #0

    Bien sûr.

  • Speaker #1

    Je suis obligée de dire au client, attendez. Attendez un peu.

  • Speaker #0

    Alors, est-ce qu'au Mali, on trouve du vin ailleurs que dans votre cave ? Oui. Et dans quels sont les circuits de distribution ? Alors,

  • Speaker #1

    il y a un circuit libanais.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Par l'intermédiaire des petits supermarchés. Ils sont assez nombreux. Il y en a 3-4 dans la ville. Donc, eux, ils vendent des vins. Très entrée de gamme, en blanc, rouge, rosé.

  • Speaker #0

    D'accord, à peu près le seul.

  • Speaker #1

    Ils ont la problématique d'être souvent abîmés. Les gens repèrent quand il y a un nouvel arrivage, donc là ils vont acheter, mais après ça s'abîme un peu. On voit les couleurs un peu, les rosés qui deviennent un peu orangés.

  • Speaker #0

    Alors quelles sont les spécificités du marché du vin au Mali ? Aujourd'hui, il y a des producteurs africains auprès desquels vous vous sourcez ou pas du tout ? C'est exclusivement des vins qui viennent du...

  • Speaker #1

    Moi, je travaille avec la France, l'Espagne, l'Italie, de plus en plus.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    L'Italie, ça marche très très bien. C'est un vin qui marche avec les plats africains.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et puis, je travaille pas mal aussi avec... tout ce qui est Amérique du Sud, quelques vins qui sont vraiment intéressants en Chili et Argentine.

  • Speaker #0

    D'accord, des Malbecs, des choses comme ça.

  • Speaker #1

    C'est ça, oui.

  • Speaker #0

    Très bien. Et est-ce que lors de votre visite à Paris, vous avez découvert des choses un petit peu sympathiques qui vous ont tapé dans l'œil et que vous aimeriez importer au Mali ?

  • Speaker #1

    Disons que ces trois jours-là, c'est presque juste. J'ai le temps de dire bonjour à tous mes fournisseurs. C'est difficile d'aller voir les autres. Pourtant, ils sont extrêmement nombreux à venir m'écrire avant, en me disant « Venez nous voir, venez nous voir » . Il y a beaucoup de gens qui veulent un ancrage sur l'Afrique.

  • Speaker #0

    Beaucoup de pignons.

  • Speaker #1

    Un souhait. Mais bon, je n'ai pas le temps, je ne peux pas. Je voudrais voyager avec mon vendeur, M. Denna. Mais hélas, il n'a pas le droit au visa. Donc, ce n'est pas la peine. Sinon, à deux, on trouverait une façon de gérer ça un peu plus sympathique. Donc là, cette année, j'ai pris l'option italienne.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc voilà, j'ai découvert des vins que je n'avais jamais bu en fait. Des Valpolicella, des Amarone, des Chianti.

  • Speaker #0

    Qui vous ont plu ?

  • Speaker #1

    Oui, vraiment. Oui, c'est très, très beau.

  • Speaker #0

    D'accord. Alors, qu'est-ce qui vous plaît le plus aujourd'hui dans votre métier de caviste ?

  • Speaker #1

    Il y a plusieurs choses qui me plaisent. D'abord, j'aime bien vendre du vin. J'aime bien ça, j'aime bien parce que je suis dans les coulisses des fêtes, donc je sais un peu à ma manière ce qui va se passer, ce qu'on va manger. Et puis voilà, je suis dans les coulisses.

  • Speaker #0

    Les gens viennent vous voir avant pour vous demander des conseils. Oui,

  • Speaker #1

    c'est ça.

  • Speaker #0

    D'accord, mais ben...

  • Speaker #1

    Bon, arrêtez de prendre le rosé là parce qu'il y a déjà pas mal de gens qui ont pris de rosé, prenez peut-être quelques bulles. Donc j'aménage aussi les bouteilles qui arrivent. Et puis, une autre chose qui m'a beaucoup plu, c'est que je me suis remise à voyager en Europe.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Voilà, redécouvrir les terres, le tiroir, les vignerons.

  • Speaker #0

    À la rencontre des femmes.

  • Speaker #1

    Et des hommes et des femmes plutôt intègres. Donc ça, ça a été un très grand plaisir pour moi. Une manière de revenir en fait en Europe.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Vous savez, quand on habite longtemps loin de l'Europe, à un moment donné, on a migré.

  • Speaker #0

    Oui, un petit peu.

  • Speaker #1

    On a vraiment migré. Et là, ça me permet de faire un retour.

  • Speaker #0

    Ça vous permet de garder des liens, des attraps ?

  • Speaker #1

    Oui, des liens forts.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Oui,

  • Speaker #0

    très forts. Et on en a parlé tout à l'heure. Est-ce que les conditions politiques actuelles et le ressentiment un petit peu croissant vis-à-vis de la France ne représentent-elles pas une menace pour les Français qui vivent ?

  • Speaker #1

    Non, à l'heure actuelle, on n'est pas du tout,

  • Speaker #0

    du tout,

  • Speaker #1

    mais alors pas du tout embêtés sur place. Pour les gens qui vivent sur place, on vit très bien, on n'est pas inquiétés. Il y a un nombre croissant de Français. Deuxième génération de Maliens, en fait, si je m'exprime bien. Ils sont deuxième génération de Maliens français. Et il y a un retour au pays massif.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Alors vraiment avec une volonté d'ajouter leur vision sur le pays.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et ils s'intéressent à beaucoup de choses.

  • Speaker #0

    Il y a la croissance du pays aux perspectives.

  • Speaker #1

    C'est ça. Ils ont des associations. Ils se retrouvent. Et il y a beaucoup d'entraide entre eux. On les appelle les repates.

  • Speaker #0

    D'accord. Donc,

  • Speaker #1

    c'est repatriation.

  • Speaker #0

    Vous vendez également du vin aux musulmans, mais ça se fait toujours de manière un petit peu discrète quand même.

  • Speaker #1

    Un système de vente qui est lié à une forme de pudeur. C'est-à-dire qu'il est... Pas très bien vu de sortir avec des bouteilles de ventre au vu de tous.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Donc, il ne faut pas de fenêtre au sac. Il faut vraiment que les bouteilles soient cachées, qu'on ne voit pas.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Souvent, les gens se mettent... au bar, au blabla, ils me donnent les clés et ils me demandent de mettre directement dans la voiture. Comme ça, ils ne passent pas par le magasin.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Ou bien je vais au blabla, je discute avec eux, ils me disent ce qu'ils veulent, etc. Donc, ils évitent de se montrer au niveau de la cavave. Parce qu'il peut y avoir une pression, une pression familiale, si on les voit en train d'acheter du vin. Donc, ils font attention à ça. Voilà. D'accord. Il y en a pas mal aussi qui vont boire au champ. Donc, ils ont régulièrement... Les Bamakois ont encore des racines très rurales et ils ont tous des terres, pas très loin de Bamako. Donc ils vont au champ et là, ils ramènent du vin, ils boivent tranquillement leur vin.

  • Speaker #0

    Vous remplissez le vin dans des bouteilles ?

  • Speaker #1

    Je l'ai fait, mais moins maintenant. Mais c'est vrai que je mettais le vin dans des bouteilles d'eau et on faisait croire que c'était du bisap.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Le bisap, c'est un jus très rouge qui est bu sur place. C'est une espèce d'hibiscus, en fait.

  • Speaker #0

    D'accord. Quels sont vos projets, court et moyen terme ? Vous parliez tout à l'heure éventuellement de vous développer dans le reste du Mali ou peut-être même dans d'autres pays d'Afrique.

  • Speaker #1

    Oui, j'aimerais bien atteindre quelques grandes villes du Mali, notamment Ségou et Mopti. Alors, Ségou, je commence à avoir quelque chose d'intéressant. Mopti, non, très peu. Des hôtels, mais vraiment rarement parce qu'il faut qu'ils viennent et qu'ils repartent. Les routes ne sont pas sûres, donc on a…

  • Speaker #0

    Oui, la logistique. Oui,

  • Speaker #1

    il n'y a plus d'attaque. Donc, c'est un peu compliqué. Déjà les grandes villes du Mali, et alors j'aimerais bien essayer d'ouvrir des petits Bacchus, Côte d'Ivoire.

  • Speaker #0

    D'accord, des franchises.

  • Speaker #1

    J'ai essayé le Sénégal. C'est difficile, il y a du monde. Ils ont les dents longues, il y a quelques bons cavistes. Je sens que je n'ai pas l'énergie qu'il faudrait pour y arriver.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Que je me laisse porter, moi, un peu. Donc là, peut-être vers la Côte d'Ivoire, où c'est très étrange. étendu. Il y a moyen d'aller, pas obligatoirement sur Abidjan, mais sur d'autres villes. Et comme ce sont beaucoup de chrétiens, ils boivent différemment. Ils boivent plus... C'est plus facile à vendre, le vin.

  • Speaker #0

    C'est plus dans la tradition naturelle. Super. Écoutez, merci d'être passés par le micro de Vin Divin.

  • Speaker #1

    Ça me fait plaisir.

  • Speaker #0

    Moi aussi. Et je vous souhaite un bon retour à Bamako. Une bonne continuation. Puis on se reverra probablement lors de votre prochaine durée. Oui,

  • Speaker #1

    j'ai votre numéro,

  • Speaker #0

    Philippe. Voilà. À bientôt.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci, au revoir. Merci d'avoir pris le temps de nous écouter et de nous être fidèles. Vous êtes toujours plus nombreux à écouter ce podcast et à nous suivre sur les réseaux sociaux. Si vous avez apprécié ce contenu, partagez-le autour de vous et n'hésitez pas à nous créditer de 5 étoiles sur Apple Podcasts ou Spotify. Ça nous aide à remonter dans les classements. Ce contenu a été créé avec le soutien de Alma, société de conseils en croissance digitale. Pour ma part, je vous donne rendez-vous dans quelques minutes. quelques semaines pour de nouveaux épisodes de Vin Divin et je vous souhaite un très bel été.

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Description

Je profite de cette période estivale pour vous emmener en Afrique, à Bamako, capitale du Mali qui abrite plus de 3 millions d’habitants à la rencontre d’une ex enseignante, reconvertie en caviste.


Arrivée à Bamako fin 1999 dans le cadre d’un contrat avec l’Education Nationale au lycée français « Liberté » avec pour mission l’apprentissage de la lecture, Sonia Guillotin Keïta, rencontre son futur mari qui tient le « Bla Bla Bar », un bar iconique de Bamako.


Ce dernier étant approché par le groupe Castel pour distribuer leurs vins, il décide de créer une cave à vins qui sera pour Sonia, l’opportunité de changer complètement de métier.


Sonia nous parle de sa vie de caviste dans un pays qui a beaucoup changé depuis son arrivée.


A découvrir sur toutes les plateformes de podcasts🎧 et sur www.20divin.fr


Si vous avez aimé cet épisode, n'hésitez pas à le partager autour de vous, à nous faire part de vos commentaires ou à nous créditer de 5⭐sur Apple Podcasts ou Spotify.  



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Je profite de cette période estivale pour vous emmener en Afrique, à Bamako, capitale du Mali, qui abrite plus de 3 millions d'habitants, à la rencontre de Sonia Keita, fondatrice de la cave Bacchus. Arrivée à Bamako fin 1999, dans le cadre d'un contrat avec l'éducation nationale au lycée français Liberté, avec pour mission l'apprentissage de la lecture, Sonia Keita rencontre son futur mari qui tient le Blabla Bar, un bar iconique de Bamako. Six ans plus tard, ce dernier est approché par le groupe Castel pour distribuer leurs vins. Il décide alors de créer une cave à vin qui sera pour Sonia l'opportunité de changer complètement de métier. Je m'appelle Philippe Hermé, bienvenue dans Rindy 20. Bonjour Sonia.

  • Speaker #1

    Bonjour Philippe.

  • Speaker #0

    Quelle est la genèse de l'ouverture de cette cave qui s'appelle Bacchus ?

  • Speaker #1

    Alors la genèse de cette cave, ça commence un peu par une histoire d'amour. Je rencontre M. Keïta et M. Keïta était très inquiet de savoir ce que j'allais faire puisque j'avais décidé de ne plus lui enseigner. Il a été approché par des messieurs de Castel, Castel Frères, qui était à l'époque bien implanté. Et il voulait mettre en avant un vin qui avait le nom de la bière, il s'appelait Castel. Donc il cherchait une enseigne qui puisse mettre en avant ce vin. Ils ont été voir Seiba Keita, mon mari. qui lui a dit, tiens, c'est une très bonne idée, ouvrons une cave avant avec vos produits, à côté du blabla, et ça sera très très joli, et on mettra bien de l'avant. Donc le neveu de Castel a dit, mais c'est une idée magnifique, et c'est comme ça que ça a démarré.

  • Speaker #0

    D'accord. Moi j'ai dit,

  • Speaker #1

    oui, c'est une très très bonne idée. Bon, j'étais, à l'époque, je réfléchissais pas trop de savoir que j'allais devenir caviste, j'avoue. Mais voilà, après j'ai appris un peu sur le tas.

  • Speaker #0

    Vous avez déjà une attirance pour le vin, quand même.

  • Speaker #1

    Oui, j'avais une connaissance du vin, mais pas aussi forte que ça. Mais j'avais compris qu'à Bamako, il y avait un problème avec le vin. C'est-à-dire que quand on allait dans les restaurants, il n'y avait pas de bon vin. Il y avait les vins sur les cartes.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Il y avait les vins sur la carte, effectivement, mais quand on demandait le vin, il n'y avait pas.

  • Speaker #0

    Donc pas de stock, pas de difficulté. Voilà,

  • Speaker #1

    pas de stock, beaucoup de ruptures, beaucoup de vins bouchonnés.

  • Speaker #0

    Problème de conservation.

  • Speaker #1

    Très abîmé, donc je me suis dit que là, il y avait effectivement quelque chose à faire pour le service autour du vin.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    C'était ça, les premières.

  • Speaker #0

    Vous démarrez avec Castel.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Et puis ?

  • Speaker #1

    Ça ne se passe pas bien.

  • Speaker #0

    Ça ne se passe pas bien.

  • Speaker #1

    Ça ne se passe pas bien du tout parce que le neveu Castel s'en va, il est remplacé par un autre monsieur qui s'appelait M. Brousseau. Je me souviens bien parce que Brousseau, il était aussi Brousseau de nom que de comportement.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc il me dit qu'il n'avait pas besoin de moi, qu'il ne comprenait pas qu'on ouvre une cave à vin à Bamako. Et j'entends effectivement qu'ils vont ouvrir une espèce de store dans une zone industrielle, mais à 200 mètres de la cave à vin qu'on a ouverte.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc effectivement, on rentre en concurrence immédiate. Et il me donne un stock de vin, mais abîmé. D'accord. Donc ça commence mal. Moi déjà, je ne connais pas.

  • Speaker #0

    Il vous le donne ou il vous le vend ?

  • Speaker #1

    Il me le met en dépôt et je dois le rembourser en six mois.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc je vais le voir, je vais voir les gens là-bas, je leur dis c'est pas possible, je ne peux pas vendre un vin pareil, c'est la catastrophe. Ils ne m'ont pas écouté, ils m'ont envoyé les huissiers pour récupérer l'argent. Donc là après c'est un peu, à Bamako parfois il faut se défendre, on devient un peu cow-boy. Donc mon mari est venu avec moi, m'accompagner chez Castel, il a secoué un monsieur par le cou en lui disant qu'il ne fallait pas faire de mal à sa femme. C'était lui un grand monsieur Keita et qu'on ne faisait jamais du mal à sa femme. Bref, les lignes se sont effacées, ce stock a disparu de la comptabilité et j'ai repris avec un petit stock et je choisissais moi-même mes vins, je vérifiais.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Mais très vite, j'ai compris qu'en fait, si je restais avec eux, je n'allais pas m'en sortir. Les marges étaient très étroites et je ne m'en sortais pas en fait.

  • Speaker #0

    Donc vous démarrez cette cave. Alors pour construire votre stock, vous faites comment ? J'imagine qu'il faut quand même un peu de cash. Comment vous allez vous sourcer ? Comment vous trouvez vos fournisseurs ? Surtout que vous démarrez, vous n'êtes pas forcément très connue dans le milieu. Non,

  • Speaker #1

    non. Tout le monde me prend pour une illuminée quand même. Et il s'avère qu'à l'ambassade de France, il y avait un conseiller économique qui aimait beaucoup le vin.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc, il s'est dit, si je donne à madame Keïta une bonne note, une bonne appréciation, elle pourra bénéficier d'une assurance qui lui permet d'avoir six mois pour payer le vin.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est l'assurance Ausha. Donc il m'a mis une bonne note, sans que j'aie vraiment du vin, il m'a mis une très bonne note. Et avec cette très bonne note, je suis allée voir mon banquier, alors un banquier vraiment très sahélien, du Nord, qui ne boit pas de vin. Et je lui ai exposé mon projet en lui disant que j'avais le soutien de la Ausha. Et il m'a dit... Dans ces cas-là, je trouve que ce que vous faites, c'est très, très bien. J'accepte de vous faire un prêt bancaire à un taux relativement bas. Bon, pas par rapport à ici, on est un peu plus que 10%, mais là-bas, c'est fait.

  • Speaker #0

    D'accord, l'inflation est plus élevée. Voilà.

  • Speaker #1

    Donc,

  • Speaker #0

    vous vous êtes rendu compte qu'il fallait apporter plutôt des gros volumes pour éviter de refaire 150 fois les démarches ?

  • Speaker #1

    Je n'avais pas le choix. Si je ne faisais pas un gros volume d'emblée, je ne gagnais pas d'argent. Les marges, ce n'était pas bon.

  • Speaker #0

    Les premiers vins que vous achetez, quels sont-ils ? Du Bordeaux ?

  • Speaker #1

    Pas du tout. J'avais repéré qu'à Babaco, il n'y avait pas de vin de Loire. Et que le vin de Loire, quand il fait très chaud, ce n'est pas désagréable à boire. C'est des vins flammés, des vins de Touraine, les petits Chinons, les Bourgueuils. Je me suis dit... Et puis, ça va avec les grillades. Je me suis dit... Je commence par la Loire. Je suis de la Loire, mon grand-père était de la Loire.

  • Speaker #0

    Vous connaissez un peu, vous allez voir une foire ou deux.

  • Speaker #1

    Je vais à une foire des vins de Loire à Angers. Je tombe sur un monsieur qui vendait du Bourgueil. Il me dit, nous on est une association de vignerons, c'était la collégiale des vins de Loire, des domaines de Loire. J'apporte un conteneur entier de vins de Loire.

  • Speaker #0

    Plutôt de blancs ?

  • Speaker #1

    Des blancs, des rouges et des rouges.

  • Speaker #0

    Et ça marche tout de suite ?

  • Speaker #1

    Ça marche tout de suite parce que c'est des vins effectivement très agréables à boire, frais, pas trop chers.

  • Speaker #0

    Alors quels sont vos premiers clients ? Parce qu'on le rappelle, le Mali est un pays régulièrement à 95%, donc c'est quand même pas évident de vendre du vin à des Maliens.

  • Speaker #1

    À l'époque, il y avait beaucoup d'étrangers, énormément d'étrangers. Donc les vins, ça allait dans les ambassades, pour les cocktails, pour les particuliers, pour les restaurants.

  • Speaker #0

    Il y avait une forte présence française aussi, j'imagine.

  • Speaker #1

    Oui, mais ce n'est pas eux les plus grands clients.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    C'est assez réfractaire, les Français. Ils ont tendance à penser que chez leur grand-père, c'est meilleur.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc, ils sont toujours un peu sceptiques par rapport à ça.

  • Speaker #0

    Donc, plutôt des expats, plutôt des…

  • Speaker #1

    Des Canadiens, Anglais, Australiens, Chinois déjà un petit peu à l'époque.

  • Speaker #0

    Ce sont les Chinois qui vont devenir vos plus gros clients finalement avec le temps. Qui vont avoir une influence, une implantation ? Eux,

  • Speaker #1

    vraiment, ils se sont installés. Là, depuis quelques années, ils ont carrément une cité.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    On l'appelle maintenant Chinatown.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    C'était la cité du Niger. Mais elle est en train de se rebaptiser Chinatown. Ils sont extrêmement nombreux. Et ils ont même fait un blabla bis.

  • Speaker #0

    D'accord. Oui. Un blabla bis chinois.

  • Speaker #1

    Oui, dans la cité du Niger, avec la même forme de table,

  • Speaker #0

    etc. D'accord.

  • Speaker #1

    Bon. Ok.

  • Speaker #0

    Pourquoi pas ? Et donc, vous me disiez, ce sont eux finalement qui sont les plus gros acheteurs en valeur, puisqu'ils aiment bien ce qui est cher.

  • Speaker #1

    Ils ont une drôle de façon de consommer et d'acheter. Ils veulent des vins chers.

  • Speaker #0

    Pour pouvoir les ramener chez eux, fricter, pèter des amis, montrer qu'ils sont riches. C'est ça.

  • Speaker #1

    Pendant la période après le Nouvel An, ils partent en congé pendant un mois. Et là, ils ramènent énormément de vins comme cadeau. Vins rouges, Bordeaux. De préférence dans les 40-50 000 francs CFA, ça fait presque 100 euros quand même, la bouteille.

  • Speaker #0

    Oui, c'est pas mal. Oui,

  • Speaker #1

    c'est pas mal. Bon, après, c'est plus cher qu'ici.

  • Speaker #0

    Oui, bien sûr, bien sûr. C'est quel type de vin ? Ils achètent quoi ? Des grands crus classés ?

  • Speaker #1

    Non, là, je...

  • Speaker #0

    Le Rayas, ils achètent...

  • Speaker #1

    Ils sont très amateurs de Pessac Léonian.

  • Speaker #0

    Ah, Pessac, très bien.

  • Speaker #1

    Ça, ils aiment beaucoup. Les Saint-Emilion, un peu moins. Donc,

  • Speaker #0

    ils ont fait quoi du Smith's au Laffite ? Oui,

  • Speaker #1

    du Smith's au Laffite, ça, ils sont à fond.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    C'est même... C'est un peu bête, mais c'est le mot Laffite qui a fait qu'ils achètent le Smith's au Laffite.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Ils ont bien vu qu'il y avait deux T par un T, parce que ce n'est pas le Rothschild.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Mais ce n'est pas grave, ils sont contents.

  • Speaker #0

    Ils aiment bien le mot Laffite. Oui. Et ils vendent aussi des spiritueux. j'imagine qu'ils vous achètent aussi peut-être De l'Armagnac ? Du Cognac peut-être ?

  • Speaker #1

    J'ai très peu de spiritueux.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Parce que ce n'est pas mon réseau au niveau des douanes.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et je n'ai pas accès à ce réseau-là, donc je ne l'en vends pas. Ok. Juste un petit peu de Calvados à la maison Dupont, c'est tout.

  • Speaker #0

    Ok. Et comment vous faites pour conserver votre stock ? Puisque là, on est quand même dans un pays avec des contraintes climatiques fortes. Très fortes. Très grosse chaleur, très forte humidité en fonction des saisons.

  • Speaker #1

    Très forte humidité suivie de zéro amplitude thermique.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc là c'est très compliqué parce que les bouchons se rétractent. Donc il faut les surveiller très très près.

  • Speaker #0

    Avec des caves, avec de l'air conditionné.

  • Speaker #1

    Air conditionné partout.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et au sol j'ai mis des tomates qui boivent l'eau.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et j'arrose ces tomates régulièrement pour que ça fasse un peu d'humidité en période sèche. Et j'ai des canaries en terre aussi, qui, quand la clim et la jarre, ça fait un espèce de microclimat. Elles se glacent, elles se rafraîchissent et elles rafraîchissent autour d'elles.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et puis je surveille, je bois les vins, je les goûte très très régulièrement.

  • Speaker #0

    Puis j'imagine que vous les laissez reposer quand ils arrivent par container, vous les laissez un peu reposer avant de les mettre à vente, j'imagine ? Oui,

  • Speaker #1

    certains vins sont même très capricieux. Ils se ferment pendant 2-3 mois.

  • Speaker #0

    D'accord, ok.

  • Speaker #1

    Alors je l'ai goûté en salon, je sais bien ce que j'ai bu, j'ai eu le souvenir, et ils arrivent, ils sont éteints. D'accord. Donc j'attends.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Mais ils m'immobilisent l'argent pendant un petit moment.

  • Speaker #0

    Bien sûr.

  • Speaker #1

    Je suis obligée de dire au client, attendez. Attendez un peu.

  • Speaker #0

    Alors, est-ce qu'au Mali, on trouve du vin ailleurs que dans votre cave ? Oui. Et dans quels sont les circuits de distribution ? Alors,

  • Speaker #1

    il y a un circuit libanais.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Par l'intermédiaire des petits supermarchés. Ils sont assez nombreux. Il y en a 3-4 dans la ville. Donc, eux, ils vendent des vins. Très entrée de gamme, en blanc, rouge, rosé.

  • Speaker #0

    D'accord, à peu près le seul.

  • Speaker #1

    Ils ont la problématique d'être souvent abîmés. Les gens repèrent quand il y a un nouvel arrivage, donc là ils vont acheter, mais après ça s'abîme un peu. On voit les couleurs un peu, les rosés qui deviennent un peu orangés.

  • Speaker #0

    Alors quelles sont les spécificités du marché du vin au Mali ? Aujourd'hui, il y a des producteurs africains auprès desquels vous vous sourcez ou pas du tout ? C'est exclusivement des vins qui viennent du...

  • Speaker #1

    Moi, je travaille avec la France, l'Espagne, l'Italie, de plus en plus.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    L'Italie, ça marche très très bien. C'est un vin qui marche avec les plats africains.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et puis, je travaille pas mal aussi avec... tout ce qui est Amérique du Sud, quelques vins qui sont vraiment intéressants en Chili et Argentine.

  • Speaker #0

    D'accord, des Malbecs, des choses comme ça.

  • Speaker #1

    C'est ça, oui.

  • Speaker #0

    Très bien. Et est-ce que lors de votre visite à Paris, vous avez découvert des choses un petit peu sympathiques qui vous ont tapé dans l'œil et que vous aimeriez importer au Mali ?

  • Speaker #1

    Disons que ces trois jours-là, c'est presque juste. J'ai le temps de dire bonjour à tous mes fournisseurs. C'est difficile d'aller voir les autres. Pourtant, ils sont extrêmement nombreux à venir m'écrire avant, en me disant « Venez nous voir, venez nous voir » . Il y a beaucoup de gens qui veulent un ancrage sur l'Afrique.

  • Speaker #0

    Beaucoup de pignons.

  • Speaker #1

    Un souhait. Mais bon, je n'ai pas le temps, je ne peux pas. Je voudrais voyager avec mon vendeur, M. Denna. Mais hélas, il n'a pas le droit au visa. Donc, ce n'est pas la peine. Sinon, à deux, on trouverait une façon de gérer ça un peu plus sympathique. Donc là, cette année, j'ai pris l'option italienne.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc voilà, j'ai découvert des vins que je n'avais jamais bu en fait. Des Valpolicella, des Amarone, des Chianti.

  • Speaker #0

    Qui vous ont plu ?

  • Speaker #1

    Oui, vraiment. Oui, c'est très, très beau.

  • Speaker #0

    D'accord. Alors, qu'est-ce qui vous plaît le plus aujourd'hui dans votre métier de caviste ?

  • Speaker #1

    Il y a plusieurs choses qui me plaisent. D'abord, j'aime bien vendre du vin. J'aime bien ça, j'aime bien parce que je suis dans les coulisses des fêtes, donc je sais un peu à ma manière ce qui va se passer, ce qu'on va manger. Et puis voilà, je suis dans les coulisses.

  • Speaker #0

    Les gens viennent vous voir avant pour vous demander des conseils. Oui,

  • Speaker #1

    c'est ça.

  • Speaker #0

    D'accord, mais ben...

  • Speaker #1

    Bon, arrêtez de prendre le rosé là parce qu'il y a déjà pas mal de gens qui ont pris de rosé, prenez peut-être quelques bulles. Donc j'aménage aussi les bouteilles qui arrivent. Et puis, une autre chose qui m'a beaucoup plu, c'est que je me suis remise à voyager en Europe.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Voilà, redécouvrir les terres, le tiroir, les vignerons.

  • Speaker #0

    À la rencontre des femmes.

  • Speaker #1

    Et des hommes et des femmes plutôt intègres. Donc ça, ça a été un très grand plaisir pour moi. Une manière de revenir en fait en Europe.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Vous savez, quand on habite longtemps loin de l'Europe, à un moment donné, on a migré.

  • Speaker #0

    Oui, un petit peu.

  • Speaker #1

    On a vraiment migré. Et là, ça me permet de faire un retour.

  • Speaker #0

    Ça vous permet de garder des liens, des attraps ?

  • Speaker #1

    Oui, des liens forts.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Oui,

  • Speaker #0

    très forts. Et on en a parlé tout à l'heure. Est-ce que les conditions politiques actuelles et le ressentiment un petit peu croissant vis-à-vis de la France ne représentent-elles pas une menace pour les Français qui vivent ?

  • Speaker #1

    Non, à l'heure actuelle, on n'est pas du tout,

  • Speaker #0

    du tout,

  • Speaker #1

    mais alors pas du tout embêtés sur place. Pour les gens qui vivent sur place, on vit très bien, on n'est pas inquiétés. Il y a un nombre croissant de Français. Deuxième génération de Maliens, en fait, si je m'exprime bien. Ils sont deuxième génération de Maliens français. Et il y a un retour au pays massif.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Alors vraiment avec une volonté d'ajouter leur vision sur le pays.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et ils s'intéressent à beaucoup de choses.

  • Speaker #0

    Il y a la croissance du pays aux perspectives.

  • Speaker #1

    C'est ça. Ils ont des associations. Ils se retrouvent. Et il y a beaucoup d'entraide entre eux. On les appelle les repates.

  • Speaker #0

    D'accord. Donc,

  • Speaker #1

    c'est repatriation.

  • Speaker #0

    Vous vendez également du vin aux musulmans, mais ça se fait toujours de manière un petit peu discrète quand même.

  • Speaker #1

    Un système de vente qui est lié à une forme de pudeur. C'est-à-dire qu'il est... Pas très bien vu de sortir avec des bouteilles de ventre au vu de tous.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Donc, il ne faut pas de fenêtre au sac. Il faut vraiment que les bouteilles soient cachées, qu'on ne voit pas.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Souvent, les gens se mettent... au bar, au blabla, ils me donnent les clés et ils me demandent de mettre directement dans la voiture. Comme ça, ils ne passent pas par le magasin.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Ou bien je vais au blabla, je discute avec eux, ils me disent ce qu'ils veulent, etc. Donc, ils évitent de se montrer au niveau de la cavave. Parce qu'il peut y avoir une pression, une pression familiale, si on les voit en train d'acheter du vin. Donc, ils font attention à ça. Voilà. D'accord. Il y en a pas mal aussi qui vont boire au champ. Donc, ils ont régulièrement... Les Bamakois ont encore des racines très rurales et ils ont tous des terres, pas très loin de Bamako. Donc ils vont au champ et là, ils ramènent du vin, ils boivent tranquillement leur vin.

  • Speaker #0

    Vous remplissez le vin dans des bouteilles ?

  • Speaker #1

    Je l'ai fait, mais moins maintenant. Mais c'est vrai que je mettais le vin dans des bouteilles d'eau et on faisait croire que c'était du bisap.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Le bisap, c'est un jus très rouge qui est bu sur place. C'est une espèce d'hibiscus, en fait.

  • Speaker #0

    D'accord. Quels sont vos projets, court et moyen terme ? Vous parliez tout à l'heure éventuellement de vous développer dans le reste du Mali ou peut-être même dans d'autres pays d'Afrique.

  • Speaker #1

    Oui, j'aimerais bien atteindre quelques grandes villes du Mali, notamment Ségou et Mopti. Alors, Ségou, je commence à avoir quelque chose d'intéressant. Mopti, non, très peu. Des hôtels, mais vraiment rarement parce qu'il faut qu'ils viennent et qu'ils repartent. Les routes ne sont pas sûres, donc on a…

  • Speaker #0

    Oui, la logistique. Oui,

  • Speaker #1

    il n'y a plus d'attaque. Donc, c'est un peu compliqué. Déjà les grandes villes du Mali, et alors j'aimerais bien essayer d'ouvrir des petits Bacchus, Côte d'Ivoire.

  • Speaker #0

    D'accord, des franchises.

  • Speaker #1

    J'ai essayé le Sénégal. C'est difficile, il y a du monde. Ils ont les dents longues, il y a quelques bons cavistes. Je sens que je n'ai pas l'énergie qu'il faudrait pour y arriver.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Que je me laisse porter, moi, un peu. Donc là, peut-être vers la Côte d'Ivoire, où c'est très étrange. étendu. Il y a moyen d'aller, pas obligatoirement sur Abidjan, mais sur d'autres villes. Et comme ce sont beaucoup de chrétiens, ils boivent différemment. Ils boivent plus... C'est plus facile à vendre, le vin.

  • Speaker #0

    C'est plus dans la tradition naturelle. Super. Écoutez, merci d'être passés par le micro de Vin Divin.

  • Speaker #1

    Ça me fait plaisir.

  • Speaker #0

    Moi aussi. Et je vous souhaite un bon retour à Bamako. Une bonne continuation. Puis on se reverra probablement lors de votre prochaine durée. Oui,

  • Speaker #1

    j'ai votre numéro,

  • Speaker #0

    Philippe. Voilà. À bientôt.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci, au revoir. Merci d'avoir pris le temps de nous écouter et de nous être fidèles. Vous êtes toujours plus nombreux à écouter ce podcast et à nous suivre sur les réseaux sociaux. Si vous avez apprécié ce contenu, partagez-le autour de vous et n'hésitez pas à nous créditer de 5 étoiles sur Apple Podcasts ou Spotify. Ça nous aide à remonter dans les classements. Ce contenu a été créé avec le soutien de Alma, société de conseils en croissance digitale. Pour ma part, je vous donne rendez-vous dans quelques minutes. quelques semaines pour de nouveaux épisodes de Vin Divin et je vous souhaite un très bel été.

Description

Je profite de cette période estivale pour vous emmener en Afrique, à Bamako, capitale du Mali qui abrite plus de 3 millions d’habitants à la rencontre d’une ex enseignante, reconvertie en caviste.


Arrivée à Bamako fin 1999 dans le cadre d’un contrat avec l’Education Nationale au lycée français « Liberté » avec pour mission l’apprentissage de la lecture, Sonia Guillotin Keïta, rencontre son futur mari qui tient le « Bla Bla Bar », un bar iconique de Bamako.


Ce dernier étant approché par le groupe Castel pour distribuer leurs vins, il décide de créer une cave à vins qui sera pour Sonia, l’opportunité de changer complètement de métier.


Sonia nous parle de sa vie de caviste dans un pays qui a beaucoup changé depuis son arrivée.


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Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Je profite de cette période estivale pour vous emmener en Afrique, à Bamako, capitale du Mali, qui abrite plus de 3 millions d'habitants, à la rencontre de Sonia Keita, fondatrice de la cave Bacchus. Arrivée à Bamako fin 1999, dans le cadre d'un contrat avec l'éducation nationale au lycée français Liberté, avec pour mission l'apprentissage de la lecture, Sonia Keita rencontre son futur mari qui tient le Blabla Bar, un bar iconique de Bamako. Six ans plus tard, ce dernier est approché par le groupe Castel pour distribuer leurs vins. Il décide alors de créer une cave à vin qui sera pour Sonia l'opportunité de changer complètement de métier. Je m'appelle Philippe Hermé, bienvenue dans Rindy 20. Bonjour Sonia.

  • Speaker #1

    Bonjour Philippe.

  • Speaker #0

    Quelle est la genèse de l'ouverture de cette cave qui s'appelle Bacchus ?

  • Speaker #1

    Alors la genèse de cette cave, ça commence un peu par une histoire d'amour. Je rencontre M. Keïta et M. Keïta était très inquiet de savoir ce que j'allais faire puisque j'avais décidé de ne plus lui enseigner. Il a été approché par des messieurs de Castel, Castel Frères, qui était à l'époque bien implanté. Et il voulait mettre en avant un vin qui avait le nom de la bière, il s'appelait Castel. Donc il cherchait une enseigne qui puisse mettre en avant ce vin. Ils ont été voir Seiba Keita, mon mari. qui lui a dit, tiens, c'est une très bonne idée, ouvrons une cave avant avec vos produits, à côté du blabla, et ça sera très très joli, et on mettra bien de l'avant. Donc le neveu de Castel a dit, mais c'est une idée magnifique, et c'est comme ça que ça a démarré.

  • Speaker #0

    D'accord. Moi j'ai dit,

  • Speaker #1

    oui, c'est une très très bonne idée. Bon, j'étais, à l'époque, je réfléchissais pas trop de savoir que j'allais devenir caviste, j'avoue. Mais voilà, après j'ai appris un peu sur le tas.

  • Speaker #0

    Vous avez déjà une attirance pour le vin, quand même.

  • Speaker #1

    Oui, j'avais une connaissance du vin, mais pas aussi forte que ça. Mais j'avais compris qu'à Bamako, il y avait un problème avec le vin. C'est-à-dire que quand on allait dans les restaurants, il n'y avait pas de bon vin. Il y avait les vins sur les cartes.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Il y avait les vins sur la carte, effectivement, mais quand on demandait le vin, il n'y avait pas.

  • Speaker #0

    Donc pas de stock, pas de difficulté. Voilà,

  • Speaker #1

    pas de stock, beaucoup de ruptures, beaucoup de vins bouchonnés.

  • Speaker #0

    Problème de conservation.

  • Speaker #1

    Très abîmé, donc je me suis dit que là, il y avait effectivement quelque chose à faire pour le service autour du vin.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    C'était ça, les premières.

  • Speaker #0

    Vous démarrez avec Castel.

  • Speaker #1

    Oui.

  • Speaker #0

    Et puis ?

  • Speaker #1

    Ça ne se passe pas bien.

  • Speaker #0

    Ça ne se passe pas bien.

  • Speaker #1

    Ça ne se passe pas bien du tout parce que le neveu Castel s'en va, il est remplacé par un autre monsieur qui s'appelait M. Brousseau. Je me souviens bien parce que Brousseau, il était aussi Brousseau de nom que de comportement.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc il me dit qu'il n'avait pas besoin de moi, qu'il ne comprenait pas qu'on ouvre une cave à vin à Bamako. Et j'entends effectivement qu'ils vont ouvrir une espèce de store dans une zone industrielle, mais à 200 mètres de la cave à vin qu'on a ouverte.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc effectivement, on rentre en concurrence immédiate. Et il me donne un stock de vin, mais abîmé. D'accord. Donc ça commence mal. Moi déjà, je ne connais pas.

  • Speaker #0

    Il vous le donne ou il vous le vend ?

  • Speaker #1

    Il me le met en dépôt et je dois le rembourser en six mois.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc je vais le voir, je vais voir les gens là-bas, je leur dis c'est pas possible, je ne peux pas vendre un vin pareil, c'est la catastrophe. Ils ne m'ont pas écouté, ils m'ont envoyé les huissiers pour récupérer l'argent. Donc là après c'est un peu, à Bamako parfois il faut se défendre, on devient un peu cow-boy. Donc mon mari est venu avec moi, m'accompagner chez Castel, il a secoué un monsieur par le cou en lui disant qu'il ne fallait pas faire de mal à sa femme. C'était lui un grand monsieur Keita et qu'on ne faisait jamais du mal à sa femme. Bref, les lignes se sont effacées, ce stock a disparu de la comptabilité et j'ai repris avec un petit stock et je choisissais moi-même mes vins, je vérifiais.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Mais très vite, j'ai compris qu'en fait, si je restais avec eux, je n'allais pas m'en sortir. Les marges étaient très étroites et je ne m'en sortais pas en fait.

  • Speaker #0

    Donc vous démarrez cette cave. Alors pour construire votre stock, vous faites comment ? J'imagine qu'il faut quand même un peu de cash. Comment vous allez vous sourcer ? Comment vous trouvez vos fournisseurs ? Surtout que vous démarrez, vous n'êtes pas forcément très connue dans le milieu. Non,

  • Speaker #1

    non. Tout le monde me prend pour une illuminée quand même. Et il s'avère qu'à l'ambassade de France, il y avait un conseiller économique qui aimait beaucoup le vin.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc, il s'est dit, si je donne à madame Keïta une bonne note, une bonne appréciation, elle pourra bénéficier d'une assurance qui lui permet d'avoir six mois pour payer le vin.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Voilà, c'est l'assurance Ausha. Donc il m'a mis une bonne note, sans que j'aie vraiment du vin, il m'a mis une très bonne note. Et avec cette très bonne note, je suis allée voir mon banquier, alors un banquier vraiment très sahélien, du Nord, qui ne boit pas de vin. Et je lui ai exposé mon projet en lui disant que j'avais le soutien de la Ausha. Et il m'a dit... Dans ces cas-là, je trouve que ce que vous faites, c'est très, très bien. J'accepte de vous faire un prêt bancaire à un taux relativement bas. Bon, pas par rapport à ici, on est un peu plus que 10%, mais là-bas, c'est fait.

  • Speaker #0

    D'accord, l'inflation est plus élevée. Voilà.

  • Speaker #1

    Donc,

  • Speaker #0

    vous vous êtes rendu compte qu'il fallait apporter plutôt des gros volumes pour éviter de refaire 150 fois les démarches ?

  • Speaker #1

    Je n'avais pas le choix. Si je ne faisais pas un gros volume d'emblée, je ne gagnais pas d'argent. Les marges, ce n'était pas bon.

  • Speaker #0

    Les premiers vins que vous achetez, quels sont-ils ? Du Bordeaux ?

  • Speaker #1

    Pas du tout. J'avais repéré qu'à Babaco, il n'y avait pas de vin de Loire. Et que le vin de Loire, quand il fait très chaud, ce n'est pas désagréable à boire. C'est des vins flammés, des vins de Touraine, les petits Chinons, les Bourgueuils. Je me suis dit... Et puis, ça va avec les grillades. Je me suis dit... Je commence par la Loire. Je suis de la Loire, mon grand-père était de la Loire.

  • Speaker #0

    Vous connaissez un peu, vous allez voir une foire ou deux.

  • Speaker #1

    Je vais à une foire des vins de Loire à Angers. Je tombe sur un monsieur qui vendait du Bourgueil. Il me dit, nous on est une association de vignerons, c'était la collégiale des vins de Loire, des domaines de Loire. J'apporte un conteneur entier de vins de Loire.

  • Speaker #0

    Plutôt de blancs ?

  • Speaker #1

    Des blancs, des rouges et des rouges.

  • Speaker #0

    Et ça marche tout de suite ?

  • Speaker #1

    Ça marche tout de suite parce que c'est des vins effectivement très agréables à boire, frais, pas trop chers.

  • Speaker #0

    Alors quels sont vos premiers clients ? Parce qu'on le rappelle, le Mali est un pays régulièrement à 95%, donc c'est quand même pas évident de vendre du vin à des Maliens.

  • Speaker #1

    À l'époque, il y avait beaucoup d'étrangers, énormément d'étrangers. Donc les vins, ça allait dans les ambassades, pour les cocktails, pour les particuliers, pour les restaurants.

  • Speaker #0

    Il y avait une forte présence française aussi, j'imagine.

  • Speaker #1

    Oui, mais ce n'est pas eux les plus grands clients.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    C'est assez réfractaire, les Français. Ils ont tendance à penser que chez leur grand-père, c'est meilleur.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc, ils sont toujours un peu sceptiques par rapport à ça.

  • Speaker #0

    Donc, plutôt des expats, plutôt des…

  • Speaker #1

    Des Canadiens, Anglais, Australiens, Chinois déjà un petit peu à l'époque.

  • Speaker #0

    Ce sont les Chinois qui vont devenir vos plus gros clients finalement avec le temps. Qui vont avoir une influence, une implantation ? Eux,

  • Speaker #1

    vraiment, ils se sont installés. Là, depuis quelques années, ils ont carrément une cité.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    On l'appelle maintenant Chinatown.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    C'était la cité du Niger. Mais elle est en train de se rebaptiser Chinatown. Ils sont extrêmement nombreux. Et ils ont même fait un blabla bis.

  • Speaker #0

    D'accord. Oui. Un blabla bis chinois.

  • Speaker #1

    Oui, dans la cité du Niger, avec la même forme de table,

  • Speaker #0

    etc. D'accord.

  • Speaker #1

    Bon. Ok.

  • Speaker #0

    Pourquoi pas ? Et donc, vous me disiez, ce sont eux finalement qui sont les plus gros acheteurs en valeur, puisqu'ils aiment bien ce qui est cher.

  • Speaker #1

    Ils ont une drôle de façon de consommer et d'acheter. Ils veulent des vins chers.

  • Speaker #0

    Pour pouvoir les ramener chez eux, fricter, pèter des amis, montrer qu'ils sont riches. C'est ça.

  • Speaker #1

    Pendant la période après le Nouvel An, ils partent en congé pendant un mois. Et là, ils ramènent énormément de vins comme cadeau. Vins rouges, Bordeaux. De préférence dans les 40-50 000 francs CFA, ça fait presque 100 euros quand même, la bouteille.

  • Speaker #0

    Oui, c'est pas mal. Oui,

  • Speaker #1

    c'est pas mal. Bon, après, c'est plus cher qu'ici.

  • Speaker #0

    Oui, bien sûr, bien sûr. C'est quel type de vin ? Ils achètent quoi ? Des grands crus classés ?

  • Speaker #1

    Non, là, je...

  • Speaker #0

    Le Rayas, ils achètent...

  • Speaker #1

    Ils sont très amateurs de Pessac Léonian.

  • Speaker #0

    Ah, Pessac, très bien.

  • Speaker #1

    Ça, ils aiment beaucoup. Les Saint-Emilion, un peu moins. Donc,

  • Speaker #0

    ils ont fait quoi du Smith's au Laffite ? Oui,

  • Speaker #1

    du Smith's au Laffite, ça, ils sont à fond.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    C'est même... C'est un peu bête, mais c'est le mot Laffite qui a fait qu'ils achètent le Smith's au Laffite.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Ils ont bien vu qu'il y avait deux T par un T, parce que ce n'est pas le Rothschild.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Mais ce n'est pas grave, ils sont contents.

  • Speaker #0

    Ils aiment bien le mot Laffite. Oui. Et ils vendent aussi des spiritueux. j'imagine qu'ils vous achètent aussi peut-être De l'Armagnac ? Du Cognac peut-être ?

  • Speaker #1

    J'ai très peu de spiritueux.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Parce que ce n'est pas mon réseau au niveau des douanes.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et je n'ai pas accès à ce réseau-là, donc je ne l'en vends pas. Ok. Juste un petit peu de Calvados à la maison Dupont, c'est tout.

  • Speaker #0

    Ok. Et comment vous faites pour conserver votre stock ? Puisque là, on est quand même dans un pays avec des contraintes climatiques fortes. Très fortes. Très grosse chaleur, très forte humidité en fonction des saisons.

  • Speaker #1

    Très forte humidité suivie de zéro amplitude thermique.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc là c'est très compliqué parce que les bouchons se rétractent. Donc il faut les surveiller très très près.

  • Speaker #0

    Avec des caves, avec de l'air conditionné.

  • Speaker #1

    Air conditionné partout.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et au sol j'ai mis des tomates qui boivent l'eau.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et j'arrose ces tomates régulièrement pour que ça fasse un peu d'humidité en période sèche. Et j'ai des canaries en terre aussi, qui, quand la clim et la jarre, ça fait un espèce de microclimat. Elles se glacent, elles se rafraîchissent et elles rafraîchissent autour d'elles.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et puis je surveille, je bois les vins, je les goûte très très régulièrement.

  • Speaker #0

    Puis j'imagine que vous les laissez reposer quand ils arrivent par container, vous les laissez un peu reposer avant de les mettre à vente, j'imagine ? Oui,

  • Speaker #1

    certains vins sont même très capricieux. Ils se ferment pendant 2-3 mois.

  • Speaker #0

    D'accord, ok.

  • Speaker #1

    Alors je l'ai goûté en salon, je sais bien ce que j'ai bu, j'ai eu le souvenir, et ils arrivent, ils sont éteints. D'accord. Donc j'attends.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Mais ils m'immobilisent l'argent pendant un petit moment.

  • Speaker #0

    Bien sûr.

  • Speaker #1

    Je suis obligée de dire au client, attendez. Attendez un peu.

  • Speaker #0

    Alors, est-ce qu'au Mali, on trouve du vin ailleurs que dans votre cave ? Oui. Et dans quels sont les circuits de distribution ? Alors,

  • Speaker #1

    il y a un circuit libanais.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Par l'intermédiaire des petits supermarchés. Ils sont assez nombreux. Il y en a 3-4 dans la ville. Donc, eux, ils vendent des vins. Très entrée de gamme, en blanc, rouge, rosé.

  • Speaker #0

    D'accord, à peu près le seul.

  • Speaker #1

    Ils ont la problématique d'être souvent abîmés. Les gens repèrent quand il y a un nouvel arrivage, donc là ils vont acheter, mais après ça s'abîme un peu. On voit les couleurs un peu, les rosés qui deviennent un peu orangés.

  • Speaker #0

    Alors quelles sont les spécificités du marché du vin au Mali ? Aujourd'hui, il y a des producteurs africains auprès desquels vous vous sourcez ou pas du tout ? C'est exclusivement des vins qui viennent du...

  • Speaker #1

    Moi, je travaille avec la France, l'Espagne, l'Italie, de plus en plus.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    L'Italie, ça marche très très bien. C'est un vin qui marche avec les plats africains.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et puis, je travaille pas mal aussi avec... tout ce qui est Amérique du Sud, quelques vins qui sont vraiment intéressants en Chili et Argentine.

  • Speaker #0

    D'accord, des Malbecs, des choses comme ça.

  • Speaker #1

    C'est ça, oui.

  • Speaker #0

    Très bien. Et est-ce que lors de votre visite à Paris, vous avez découvert des choses un petit peu sympathiques qui vous ont tapé dans l'œil et que vous aimeriez importer au Mali ?

  • Speaker #1

    Disons que ces trois jours-là, c'est presque juste. J'ai le temps de dire bonjour à tous mes fournisseurs. C'est difficile d'aller voir les autres. Pourtant, ils sont extrêmement nombreux à venir m'écrire avant, en me disant « Venez nous voir, venez nous voir » . Il y a beaucoup de gens qui veulent un ancrage sur l'Afrique.

  • Speaker #0

    Beaucoup de pignons.

  • Speaker #1

    Un souhait. Mais bon, je n'ai pas le temps, je ne peux pas. Je voudrais voyager avec mon vendeur, M. Denna. Mais hélas, il n'a pas le droit au visa. Donc, ce n'est pas la peine. Sinon, à deux, on trouverait une façon de gérer ça un peu plus sympathique. Donc là, cette année, j'ai pris l'option italienne.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Donc voilà, j'ai découvert des vins que je n'avais jamais bu en fait. Des Valpolicella, des Amarone, des Chianti.

  • Speaker #0

    Qui vous ont plu ?

  • Speaker #1

    Oui, vraiment. Oui, c'est très, très beau.

  • Speaker #0

    D'accord. Alors, qu'est-ce qui vous plaît le plus aujourd'hui dans votre métier de caviste ?

  • Speaker #1

    Il y a plusieurs choses qui me plaisent. D'abord, j'aime bien vendre du vin. J'aime bien ça, j'aime bien parce que je suis dans les coulisses des fêtes, donc je sais un peu à ma manière ce qui va se passer, ce qu'on va manger. Et puis voilà, je suis dans les coulisses.

  • Speaker #0

    Les gens viennent vous voir avant pour vous demander des conseils. Oui,

  • Speaker #1

    c'est ça.

  • Speaker #0

    D'accord, mais ben...

  • Speaker #1

    Bon, arrêtez de prendre le rosé là parce qu'il y a déjà pas mal de gens qui ont pris de rosé, prenez peut-être quelques bulles. Donc j'aménage aussi les bouteilles qui arrivent. Et puis, une autre chose qui m'a beaucoup plu, c'est que je me suis remise à voyager en Europe.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Voilà, redécouvrir les terres, le tiroir, les vignerons.

  • Speaker #0

    À la rencontre des femmes.

  • Speaker #1

    Et des hommes et des femmes plutôt intègres. Donc ça, ça a été un très grand plaisir pour moi. Une manière de revenir en fait en Europe.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Vous savez, quand on habite longtemps loin de l'Europe, à un moment donné, on a migré.

  • Speaker #0

    Oui, un petit peu.

  • Speaker #1

    On a vraiment migré. Et là, ça me permet de faire un retour.

  • Speaker #0

    Ça vous permet de garder des liens, des attraps ?

  • Speaker #1

    Oui, des liens forts.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Oui,

  • Speaker #0

    très forts. Et on en a parlé tout à l'heure. Est-ce que les conditions politiques actuelles et le ressentiment un petit peu croissant vis-à-vis de la France ne représentent-elles pas une menace pour les Français qui vivent ?

  • Speaker #1

    Non, à l'heure actuelle, on n'est pas du tout,

  • Speaker #0

    du tout,

  • Speaker #1

    mais alors pas du tout embêtés sur place. Pour les gens qui vivent sur place, on vit très bien, on n'est pas inquiétés. Il y a un nombre croissant de Français. Deuxième génération de Maliens, en fait, si je m'exprime bien. Ils sont deuxième génération de Maliens français. Et il y a un retour au pays massif.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Alors vraiment avec une volonté d'ajouter leur vision sur le pays.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Et ils s'intéressent à beaucoup de choses.

  • Speaker #0

    Il y a la croissance du pays aux perspectives.

  • Speaker #1

    C'est ça. Ils ont des associations. Ils se retrouvent. Et il y a beaucoup d'entraide entre eux. On les appelle les repates.

  • Speaker #0

    D'accord. Donc,

  • Speaker #1

    c'est repatriation.

  • Speaker #0

    Vous vendez également du vin aux musulmans, mais ça se fait toujours de manière un petit peu discrète quand même.

  • Speaker #1

    Un système de vente qui est lié à une forme de pudeur. C'est-à-dire qu'il est... Pas très bien vu de sortir avec des bouteilles de ventre au vu de tous.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Donc, il ne faut pas de fenêtre au sac. Il faut vraiment que les bouteilles soient cachées, qu'on ne voit pas.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Souvent, les gens se mettent... au bar, au blabla, ils me donnent les clés et ils me demandent de mettre directement dans la voiture. Comme ça, ils ne passent pas par le magasin.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Ou bien je vais au blabla, je discute avec eux, ils me disent ce qu'ils veulent, etc. Donc, ils évitent de se montrer au niveau de la cavave. Parce qu'il peut y avoir une pression, une pression familiale, si on les voit en train d'acheter du vin. Donc, ils font attention à ça. Voilà. D'accord. Il y en a pas mal aussi qui vont boire au champ. Donc, ils ont régulièrement... Les Bamakois ont encore des racines très rurales et ils ont tous des terres, pas très loin de Bamako. Donc ils vont au champ et là, ils ramènent du vin, ils boivent tranquillement leur vin.

  • Speaker #0

    Vous remplissez le vin dans des bouteilles ?

  • Speaker #1

    Je l'ai fait, mais moins maintenant. Mais c'est vrai que je mettais le vin dans des bouteilles d'eau et on faisait croire que c'était du bisap.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Le bisap, c'est un jus très rouge qui est bu sur place. C'est une espèce d'hibiscus, en fait.

  • Speaker #0

    D'accord. Quels sont vos projets, court et moyen terme ? Vous parliez tout à l'heure éventuellement de vous développer dans le reste du Mali ou peut-être même dans d'autres pays d'Afrique.

  • Speaker #1

    Oui, j'aimerais bien atteindre quelques grandes villes du Mali, notamment Ségou et Mopti. Alors, Ségou, je commence à avoir quelque chose d'intéressant. Mopti, non, très peu. Des hôtels, mais vraiment rarement parce qu'il faut qu'ils viennent et qu'ils repartent. Les routes ne sont pas sûres, donc on a…

  • Speaker #0

    Oui, la logistique. Oui,

  • Speaker #1

    il n'y a plus d'attaque. Donc, c'est un peu compliqué. Déjà les grandes villes du Mali, et alors j'aimerais bien essayer d'ouvrir des petits Bacchus, Côte d'Ivoire.

  • Speaker #0

    D'accord, des franchises.

  • Speaker #1

    J'ai essayé le Sénégal. C'est difficile, il y a du monde. Ils ont les dents longues, il y a quelques bons cavistes. Je sens que je n'ai pas l'énergie qu'il faudrait pour y arriver.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Que je me laisse porter, moi, un peu. Donc là, peut-être vers la Côte d'Ivoire, où c'est très étrange. étendu. Il y a moyen d'aller, pas obligatoirement sur Abidjan, mais sur d'autres villes. Et comme ce sont beaucoup de chrétiens, ils boivent différemment. Ils boivent plus... C'est plus facile à vendre, le vin.

  • Speaker #0

    C'est plus dans la tradition naturelle. Super. Écoutez, merci d'être passés par le micro de Vin Divin.

  • Speaker #1

    Ça me fait plaisir.

  • Speaker #0

    Moi aussi. Et je vous souhaite un bon retour à Bamako. Une bonne continuation. Puis on se reverra probablement lors de votre prochaine durée. Oui,

  • Speaker #1

    j'ai votre numéro,

  • Speaker #0

    Philippe. Voilà. À bientôt.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Merci, au revoir. Merci d'avoir pris le temps de nous écouter et de nous être fidèles. Vous êtes toujours plus nombreux à écouter ce podcast et à nous suivre sur les réseaux sociaux. Si vous avez apprécié ce contenu, partagez-le autour de vous et n'hésitez pas à nous créditer de 5 étoiles sur Apple Podcasts ou Spotify. Ça nous aide à remonter dans les classements. Ce contenu a été créé avec le soutien de Alma, société de conseils en croissance digitale. Pour ma part, je vous donne rendez-vous dans quelques minutes. quelques semaines pour de nouveaux épisodes de Vin Divin et je vous souhaite un très bel été.

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