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Africa Fashion Tour

Aïsha Deme, fondatrice de Siriworo

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48min |04/09/2025
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48min |04/09/2025
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Description

Comment quitter une carrière confortable pour bâtir un empire par passion et devenir une référence dans le monde de l'art ?


Cet épisode est une véritable masterclass avec Aïsha Deme, spécialiste des arts et des industries culturelles en Afrique ! Découvrez le parcours inspirant d'une pionnière qui a transformé sa passion en une carrière influente.

Dans cette interview, Aïsha nous offre des leçons inestimables sur :

  • L'audace d'entreprendre : Comment elle a quitté une carrière d'informaticienne bancaire pour se lancer, avec naïveté mais détermination, dans un domaine qui la faisait vibrer.

  • La persévérance du pionnier : Les défis des débuts d'Agenda Dakar, première plateforme culturelle digitale au Sénégal, et comment deux ans sans salaire ont forgé sa résilience.

  • Le positionnement unique : La création des "kits de survie" pour les grands événements culturels sénégalais (Biennale de Dakar, Festival de Jazz), devenus des outils indispensables pour naviguer la scène artistique.

  • Devenir une référence : Comment son agence Siriworo accompagne les artistes et les organisations, structurant des projets et bâtissant une crédibilité solide grâce à une éthique rigoureuse.

  • Le rayonnement de l'Art Africain : Son regard d'experte sur le "bouillonnement incroyable" de la créativité sur le continent et comment l'art africain s'impose sur la scène mondiale.

L'histoire d'Aïsha Deme est une source d'inspiration pour tout entrepreneur créatif. Elle prouve que la passion, l'engagement et la capacité à saisir les opportunités sont les clés pour transformer un rêve en une référence incontournable.


Prêt(e) à découvrir les secrets de son succès ? Écoutez cette masterclass de l'art !


Africa Fashion Tour poursuit chaque semaine l'exploration des industries culturelles et créatives africaines avec des interviews d'entrepreneurs passionnés qui s'interrogent sur les questions de diversité et de représentation. Chacun des invités du podcast est passé du questionnement à l'action pour proposer des solutions concrètes, des business model vertueux pour promouvoir l'Afrique à travers les soft power.


J’en profite pour remercier les auditeur.e.s de plus en plus nombreux de ce podcast. Pour découvrir en avant première les dernières interviews et analyses de l'écosystème de la mode africaine, abonnez-vous à la ⁠⁠⁠Newsletter Africa Fashion Tour⁠⁠⁠.


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A très vite en Afrique ou ailleurs


Ramata Diallo 


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Aïsha

    Pour moi, c'est de dire comment survivre à la biennale. D'abord, savoir déjà les dates exactes, qui vient, qui ne vient pas. Savoir comment réserver un hôtel, savoir comment accéder. Parce qu'il y a des gens qui vont vraiment demander est-ce qu'il faut payer. Alors que pour certaines personnes, c'est une information évidente. Et moi, je découvre avec tous les messages que je reçois de personnes que je ne connais pas, qu'en fait, les gens ne savent pas. Les gens ne savent pas ce que nous pensons être évident et que nous ne communiquons pas. Qu'il faut s'accréditer juste pour aller voir un île. Que pour le festival de jazz, le même bat, je peux marcher par-ci, par-là. Mais qu'aussi, il faut s'y mettre très tôt pour trouver un hébergement. Mais comment le trouver ? Il y a des personnes à Saint-Louis qui peuvent aider. Donc, des petites choses comme ça qui te font survivre dans ce festival, d'où le nom de survie.

  • Ramata

    Bienvenue dans ce nouvel épisode du podcast Africa Fashion Tour. Je vous emmène avec moi à la rencontre de créateurs basés sur le continent africain. Je vous invite à voyager à Abidjan, Dakar ou Bamako pour découvrir les parcours de professionnels talentueux, responsables et ambitieux. Au fil des interviews, je me rends compte que chaque entrepreneur veut contribuer au rayonnement de la créativité africaine sur le continent et au-delà. Ce podcast est un moyen de sortir des clichés du boubou et du wax. pour représenter un éventail de tissus, de savoir-faire et de créativité, trop souvent sous-représentés. Je suis Ramata Diallo. Je suis professeure de marketing dans des écoles de mode parisiennes et je suis également consultante spécialisée dans l'accompagnement de porteurs de projets qui veulent lancer leur marque de mode. En 2017, j'ai hésité à ma première Fashion Week en Afrique. Et depuis, je voyage régulièrement sur le continent pour aller à la rencontre de ceux et celles qui font la mode en Afrique. Le podcast est le moyen que j'ai trouvé pour partager au plus grand nombre une autre vision de la mode africaine. Aujourd'hui, je suis en compagnie d'Aïcha Deme. Elle est spécialiste des arts et des industries culturelles en Afrique. Elle a fondé Siriworo, une structure d'ingénierie culturelle qui accompagne des artistes et des organisations dans leurs initiatives créatives. Je l'ai invitée aujourd'hui pour qu'elle puisse nous parler de son parcours et de ses différentes initiatives. Bienvenue Aïcha, comment vas-tu ?

  • Aïsha

    Merci beaucoup Ramata, je vais très bien, merci.

  • Ramata

    Alors, on va commencer cette interview comme je le fais avec chacun de mes invités. Je vais te demander de te présenter.

  • Aïsha

    Alors, je pense que tu m'as déjà présenté et tu as dit l'essentiel. Je rajouterai que je suis une grande, grande passionnée d'art et de culture, très heureuse et fière de travailler dans ce domaine en Afrique. Quoi d'autre ? Je suis Sénégalaise, je suis née et j'ai grandi au Sénégal, j'ai étudié là-bas. je suis contente de travailler de ma passion, on en reparlera plus tard parce que j'ai changé de métier pour ça sinon je pense que tu as dit l'essentiel dans ta présentation

  • Ramata

    Très bien, ben écoute tu m'offres une belle transition, tu dis que t'es contente de travailler dans ta passion et donc a priori t'es peut-être pas dans ce secteur-là le secteur des industries culturelles et de l'art au départ Ah ! Donc, comment est-ce que ta carrière a commencé ? Quel a été ton parcours au niveau de tes études ? Et ensuite, quels ont été tes premiers métiers ?

  • Aïsha

    Alors, moi, je suis une scientifique, une informaticienne. Et je viens de la banque. J'ai fait 50 banques en tant qu'informaticienne. J'ai fait des études informatiques, donc. Mais j'ai toujours été très, très passionnée d'art et de culture. Depuis enfant, j'allais beaucoup voir les expos. J'allais beaucoup dans les concerts. au cinéma, au théâtre. Et puis un jour, il y a eu plusieurs choses. C'est d'abord l'envie de changer de métier, même si c'est un métier que j'aimais beaucoup au début, mais à un moment, ça a devenu routinier. Et puis je me suis rendue compte qu'il n'y avait rien sur Internet au Sénégal qui était destiné à parler d'art et de culture. Mais vraiment rien. C'est-à-dire que quand on voulait sortir voir une exposition, il fallait chercher. J'ai décidé donc de monter une plateforme, la première au Sénégal, qui faisait la promotion des événements culturels, qui était un agenda. Agenda Dakar, ça s'appelait en 2009, avec un ami, nous avons fait ça ensemble. Et c'est comme ça que je suis arrivée dans la culture, Ramata.

  • Ramata

    Très bien, donc tu as toujours eu cette passion, comme tu le dis, pour l'art, pour la culture. Toi, est-ce que tu avais une âme d'artiste ou tu étais plutôt spectatrice ?

  • Aïsha

    Non, toujours spectatrice, toujours. Grande consommatrice, mais tellement passionnée que vraiment j'allais à la recherche. Je me suis rendue compte que je faisais tout, tout, tout pour avoir les informations. Je sortais de la banque à 18h, j'allais chercher des expos. Et j'ai fini aussi par connaître les artistes à force d'être présente dans le milieu. Ce qui m'a beaucoup aidée par la suite, parce que quand j'ai monté cette plateforme, je les appelais personnellement pour avoir leur programme, pour le mettre sur mon site. J'ai commencé à les interviewer et donc à écrire. Beaucoup pensent que je suis journaliste en passant, mais je n'ai pas fait d'études de journalisme. mais j'ai beaucoup écrit j'ai beaucoup chroniqué j'ai été chroniqueuse du monde afrique j'ai beaucoup écrit sur mes plateformes personnelles et j'ai fait un livre aussi dédié à l'art à Dakar, qui a été nominé sélection du monde justement en 2022. Et donc c'est juste, je consommais beaucoup. À force de consommer, je connaissais plus, j'apprenais plus, je connaissais mieux les pratiques. Et moi-même, j'ai commencé à pratiquer certaines choses, comme écrire, comme faire de la curation, organiser des expositions. C'est avec le temps.

  • Ramata

    Et à partir de... Donc, il y a eu toute une partie où tu faisais ça un peu en side. Ce n'était même pas un business, c'était une passion. Donc, en parallèle de la banque, à partir de quel moment tu te dis, bon là, j'arrête, je vais me consacrer, je vais consacrer en tout cas mon temps à cette passion ?

  • Aïsha

    C'est comme j'ai dit, c'est à partir du moment où à un instant, parce que j'ai toujours besoin justement d'être passionnée quand je fais quelque chose. C'est à partir du moment où je ne le ressentais pas. plus à la banque et dans mon métier d'informaticienne que j'ai décidé d'aller faire ce qui me passionnait vraiment. Et donc, c'était une bonne transition, on va dire, parce que je suis restée dans le digital quand même avec la plateforme Agence Dakar, mais je ne m'occupais que de culture. Mais c'est vraiment ce moment-là, en 2009, où j'ai dit, bon, d'accord, on va y aller. Ce qui était très risqué parce que c'était quitter un... travail très stable et commencer à zéro une vie d'entrepreneur. Et je n'avais aucune idée de ce que c'était en réalité. Je suis juste partie avec ma passion, mon meilleur ami et moi. On a été un peu fous, mais voilà.

  • Ramata

    Et du coup, c'est intéressant ce que tu dis là. Est-ce que tu avais une idée d'un business model, de comment est-ce que tu allais te rémunérer ? Comment dire ? Parce qu'au départ, on est... passionnés par la culture, par l'art, il y a un côté créatif qui nous fait vibrer, mais à un moment donné, il faut relier ça à un business model et il faut des rentrées d'argent. Donc toi, tu avais une idée précise de comment tu voulais faire les choses ?

  • Aïsha

    Absolument pas. C'était une catastrophe. Je n'avais aucune idée et on était naïfs, on va dire, et rêveurs, parce qu'on connaissait une plateforme très connue au Sénégal où tout le monde se connectait tous les jours, qui se faisait beaucoup Beaucoup d'argent, c'était une plateforme d'information en ligne qui se faisait beaucoup d'argent avec la publicité, les bannières à l'époque de publicité. Et nous, on se disait, on fait une plateforme gratuite parce que la culture, on sait que ça ne paie pas beaucoup et qu'on allait se faire rémunérer avec les pubs. Mais c'était une catastrophe parce que pendant une année et demie ou deux ans, nous n'avons pas eu de salaire parce que les pubs ne venaient pas. Au début, les gens étaient assez réticents. sur une plateforme culturelle. Ce qu'ils connaissaient, c'était les flyers, les affiches. C'était 2009 dont je parle. Donc même Facebook, c'était juste parler entre amis. Il n'y avait pas encore les événements pour promouvoir. Et donc il fallait shifter cela. Et c'est de ça dont je suis fière parce que nous sommes arrivés à le faire. Au bout de deux ans quand même. Au bout de deux ans, les expats ont commencé beaucoup à utiliser le site et les partenaires ont commencé à arriver et c'est à partir de là. À partir de là, nous avons pu réaliser quelque chose. Mais nous sommes restés deux ans où on fonctionnait avec nos économies. Et à un moment, bien évidemment, c'était difficile. C'était très dur au début. Il faut dire la vérité quand même.

  • Ramata

    Donc, c'est intéressant de revenir sur un petit peu la naïveté que l'on a quand on se lance dans un projet de passion, même si toi, tu avais un background de banquier quelque part. Donc, on aurait pu supposer que tu avais un business plan. Mais finalement, de ce que tu me dis, tu es un peu allé avec... beaucoup de naïveté au départ.

  • Aïsha

    C'est fou, mais ça continue. Et c'est pour ça que j'en parle souvent dans mes talks et dans mes... partout où je suis invitée à parler. L'entrepreneuriat, on fonce toujours en disant que c'est beau. Tu vois, on montre toujours le côté très rêveur. Mais il faut dire la vérité. Il faut vraiment que si on décide d'entreprendre, qu'on soit sûr au moins d'avoir un modèle qui marche. Parce que sinon, clairement, on n'y arrive pas. J'étais dans une banque, je suis scientifique, ingénieur informatique, structuré et tout, mais là, j'arrive avec une passion, beaucoup de rêves. Et avec un ami aussi rêveur que moi, on a vraiment raté le crochet au début.

  • Ramata

    C'est intéressant aussi parce que souvent, quand il y a des associés, on dit qu'il faut qu'il y ait quelqu'un de plus pragmatique, rationnel et quelqu'un peut-être de plus créatif. Comme ça, le duo va marcher parce qu'on a le financé d'un côté et puis le créatif. Mais là, de ce que tu dis, il y a deux rêveurs créatifs. Oui,

  • Aïsha

    exactement. C'est ça qui a été le cas, mais en même temps. Ça apporte aussi, il faut dire la vérité, parce que plusieurs fois, par exemple, moi j'ai été découragée, j'ai voulu abandonner. Et en réalité, mon associé était beaucoup plus rêveur que moi et beaucoup plus optimiste. Et tout le temps, il me disait non, non, non, on ne peut pas, ça va marcher, ça va marcher. Si j'avais été toute seule, je pense qu'au bout d'une année, j'aurais laissé tomber. Mais lui a continué de croire et c'est lui qui d'ailleurs continue de chercher des partenariats. sponsor et c'est comme ça qu'on a réussi en fait finalement à exploser d'un coup. Nous avons même eu une subvention de la coopération espagnole qui nous a permis de recruter une grosse équipe de nous organiser mieux et de dérouler d'autres projets qui en fait nous ont permis d'avoir de l'argent. Et sans son côté tellement rêveur, tellement optimiste qui croit que tout toujours va bien se passer. Je pense que j'aurais abandonné en réalité. Je serais restée dans la culture, mais je serais peut-être allée trouver un poste où je serais salariée et travaillée dans la culture, je pense.

  • Ramata

    Très bien. Donc, dans ce que tu évoques, en fait, c'est quand tu parles de 2009 pour le lancement de cette plateforme en ligne qui va recenser tous les événements du Sénégal. C'est vrai que c'était très précurseur. C'était vraiment les débuts de ce type de plateforme-là. Oui, vraiment. Et tu expliques que du coup, pour faire vivre cette plateforme, l'idée c'est que tu t'es mise à rechercher les informations, à écrire des chroniques, à rencontrer les différents artistes. Du coup, c'est des nouveaux métiers que tu as appris.

  • Aïsha

    Absolument, c'est des nouveaux métiers. Et je me découvre des capacités que je ne connaissais pas. Mais c'était tellement exaltant pour moi de faire ça. que je ne me rendais même pas compte en réalité. Je travaillais énormément, énormément. Je passais mes nuits à créer le contenu, c'est-à-dire à écrire, à fermer, à mettre le contenu de l'agenda, les journées à travailler au bureau. Je ne dormais littéralement pas. Mais effectivement, c'est des métiers que j'ai appris sur le tard.

  • Ramata

    Et alors, vous avez finalement, quand on dit pendant deux ans, vous n'avez pas gagné d'argent, et puis ensuite... on va dire les graines que vous avez semées, elles ont commencé à pousser, mais au bout d'un certain temps, finalement, quand on prend du recul, deux ans, c'est assez long que ça.

  • Aïsha

    Ça dépend. Ce n'est pas si long peut-être, mais quand c'est sans salaire, c'est quand même, ça paraît 10. Je vais être sincère. Mais finalement, on aurait pu attendre plus. On aurait pu attendre plus que ça. Et comme tu as dit, c'était semer des graines. Je suis contente que tu dises cette expression que j'utilise énormément. J'ai même un hashtag, c'est mes des graines. Parce que quand on insiste finalement, ça finit toujours par payer.

  • Ramata

    Et aujourd'hui, l'agenda, c'est toujours une plateforme qui est d'actualité ou comment ça a évolué finalement cette plateforme ? Puisque vous avez eu des subventions, vous avez eu vos sponsors. J'imagine qu'il y avait une audience. Si c'était une plateforme précurseur ? Tout de suite, vous avez une audience assez importante qui s'habitue à venir sur ton site, qui veut lire tes chroniques. Et du coup, ça fait vraiment une monnaie d'échange avec des sponsors. Comment est-ce qu'elle a évolué, la plateforme, et où elle en est aujourd'hui ?

  • Aïsha

    Alors, on a eu une audience à partir de 2010. D'ailleurs, ça a commencé avec le Festival, le Festman, le Festival Mondial des Arts Nègres qui avait été organisé par le président Wad. Et l'organisation était très compliquée, très. Ça s'est fait vraiment, il y a des choses qui se faisaient à la dernière minute. Et donc, côté communication, ils avaient un problème. Et moi, j'étais très tenace. Moi, je trouvais l'info comme d'habitude. Et finalement, notre plateforme était devenue la plateforme où on savait ce qui se passait pendant tout un mois au Sénégal, où c'était bouillonnant, où on avait tous les grands artistes du monde, que ce soit dans le rap. dans le jazz, dans les arts visuels et tout ça, vraiment. Et donc là, il y a eu un rush. Après ça, ça a un peu baissé, mais comme tu viens de dire... Nous avons eu donc ces partenaires et puis surtout la subvention qui était assez grosse, qui nous a permis de recruter des équipes et de développer d'autres choses. Parce que les gens ont commencé à nous contacter en nous disant vous communiquez bien, vous communiquez très bien sur Internet, ce qui ne se faisait pas beaucoup. Et c'est là que les artistes venaient me voir, Aïcha je veux que tu communiques sur mon projet, Aïcha je veux que tu fasses ceci avec moi. Et donc, on a continué avec la plateforme et ces nouvelles équipes. Nous sommes passés de deux personnes à douze personnes. Au bout de cinq années, c'était vraiment au top, ça marchait bien. C'était en 2014. Et comme j'avais beaucoup ces sollicitations-là dont je parle aussi, j'ai décidé de laisser l'équipe continuer la plateforme Agence Dakar. Et moi, j'ai monté. Je suis allée faire de la consultance. Et donc, d'aller travailler justement avec... tel artiste sur tel album, avec tel artiste sur son expo, avec l'autre sur son film. Malheureusement, ce qui est un peu triste, c'est qu'après, la plateforme a perdu son... Avec les équipes, c'était devenu un peu difficile parce qu'il y avait les autres projets à gérer, il y avait... Voilà, ça arrive. Et finalement, elle est juste, elle ne marche plus depuis. Le site existe, le nom existe. Mais ils ont été concentrés parce que moi, j'ai cédé, j'ai passé la main pour faire la consultance, ce que je fais toujours. Mon bonheur est que ma communauté est restée parce que cette communauté était très fidèle et très belle. Et c'est pour elle que j'écrivais énormément pour faire découvrir qui est l'artiste, pour faire découvrir ce qui se passe, pour dire qu'il y a tel espace qu'il faut absolument visiter. Et ça, j'ai dû continuer à le faire sur mes réseaux sociaux parce que la communauté était toujours là. Chaque fois qu'il y a un événement majeur comme la Biennale, comme le Festival de jazz, la communauté est là qui me demande, Aïcha, qu'est-ce que tu nous recommandes ? Quel expo nous devons aller voir ? Et là, donc, j'ai développé au-delà de mon activité de consultante avec l'agence, je suis restée quand même celle qui faisait quand même l'agenda sur mes réseaux sociaux, beaucoup. J'écris beaucoup toujours et j'ai des kits de survie pour chaque grand événement culturel au Sénégal. Par exemple, il y a un kit de survie de la Biennale qui dira sur 500 expos qui se passent à Dakar, voici celles que je recommande, voici les artistes à découvrir, ce genre de choses. Parce que ça aide beaucoup de personnes qui ne savent pas. L'information est toujours assez difficile. Et surtout que c'est juste qu'ils sont là, ils sont là constamment, et qu'au final, je pense que je leur dois un peu. Et il y a cette relation entre nous qui est très belle. Donc, je continue de faire ça. Je regrette un peu que l'agenda ne marche plus, mais à un moment, il faut accepter que c'est comme ça, puisque j'étais partie de toute façon.

  • Ramata

    C'est intéressant que tu partages, en fait, que tu continues, finalement, tu restes sur ta passion de départ, finalement. Ce que tu as commencé par toi, tu continues à le faire à travers... tes réseaux sociaux, que la plateforme allait continuer ou pas. Et pourquoi est-ce que tu as appelé ça des kits de survie ? Parce que c'est une expression qui est quand même très particulière.

  • Aïsha

    C'est littéralement ça. Là, je vais être très franche. J'ai commencé avec, comme j'ai dit, le festival de jazz et la biennale. Organiser des événements de cette envergure, c'est très difficile. Et dans nos pays, on est tellement concentré, tellement pris par les choses au jour le jour, c'est-à-dire les espaces, les artistes, comment faire venir les œuvres, la logistique, qu'on oublie souvent la com. Les gens s'y mettent en général vers la fin, à la dernière minute. Il se trouve que des événements comme ça, c'est aussi des événements qui attirent du monde. Par exemple, à la Biennale, les gens viennent de partout dans le monde pour venir visiter. Le festival de jazz aussi. Donc, des mois avant, ils ont besoin de savoir ce qui se passe, comment ça se passe, qui vient, qui ne vient pas. Mais c'est un foulard tard à sortir. Et c'est pour ça que j'ai appelé le kit le kit de survie, parce que pour moi, c'est de dire comment survivre à la biennale. D'abord, savoir déjà les dates exactes, qui vient, qui ne vient pas. Savoir comment réserver un hôtel, savoir comment accéder. Parce qu'il y a des gens qui vont vraiment demander est-ce qu'il faut payer, alors que pour certaines personnes c'est une information évidente. Et moi je découvre avec tous les messages que je reçois de personnes que je ne connais pas. En fait, les gens ne savent pas. Les gens ne savent pas ce que nous pensons être évident et que nous ne communiquons pas. Il faut s'accréditer juste pour aller voir, que pour le festival de jazz, le même badge peut marcher par-ci, par-là. Mais aussi, il faut s'y mettre très tôt pour trouver un hébergement. Mais comment le trouver ? Il y a des personnes à Saint-Louis qui peuvent aider. Donc, des petites choses comme ça... te font survivre dans ce festival, d'où le nom Kit de survie, que finalement les gens apprécient beaucoup. Et c'est aussi comme un kit, c'est comme quand on va en forêt faire du camping. Je le vois un peu comme ça. Les outils qui permettent de traverser ces moments-là.

  • Ramata

    Et ce que tu évoques aussi, tu évoques tes missions de conseil. Donc, au service des artistes, je pense qu'aussi au service d'un certain nombre d'organisations, est-ce que tu peux évoquer ces parties-là ? Parce qu'encore une fois, toi, tu as un background scientifique, informatique, banquier. Même si tu as pu faire du conseil, ça n'a vraiment rien à voir avec le conseil auprès d'artistes. Donc, est-ce que tu peux parler de comment tu as pris cette casquette ?

  • Aïsha

    Ça aussi, c'est venu naturellement, c'est venu par leur demande. Quand je suis allée, moi, faire du consulting, c'était plus, par exemple, quelqu'un qui lance un album, je l'aide dans la communication, dans tout le déroulement du process, ce que je sais faire très bien. Mais au fur et à mesure, comme j'ai dit, j'ai appris beaucoup sur le tard et aussi j'ai appris à connaître très bien le milieu, vraiment. Mais parce que je suis plongée dedans constamment. C'est-à-dire, je suis constamment dedans. Si je n'écris pas, si je ne suis pas devant l'ordinateur en train de travailler sur les projets culturels, c'est-à-dire, je suis dans une expo, je suis à un festival. Et c'est là que je me rends compte qu'à force de les côtoyer, qu'à force d'être là, j'observe aussi. C'est peut-être le côté, justement, scientifique. J'observe et j'apprends avec tout, dans tout, partout. Là, en ce moment, je te parle, j'apprends. C'est ma nature. Et donc, je suis arrivée à vraiment connaître très, très bien le milieu et connaître très, très bien aussi les artistes. Je connais bien les profils, je connais leurs points forts, leurs points faibles. Et ce qui fait que spontanément aussi, je donnais même des conseils. J'ai beaucoup fait de bénévolat. J'en fais toujours, je décide d'arrêter, mais c'est difficile. Dès que je vois même un artiste que je ne connais pas, je peux voir sur ses réseaux sociaux quelque chose et puis lui écrire derrière. pour dire je pense que là ce serait bien si tu faisais ci, si tu faisais ça. Mais souvent ils sont venus vers moi donc pour me dire Aïcha, j'aimerais bien qu'on travaille ensemble sur tel projet. Et je me retrouve soit à structurer un projet, soit à organiser, soit à mobiliser parce que je mobilise beaucoup aussi. Mais c'est très naturellement que c'est arrivé. Au fur et à mesure, je rajoute dans mes services. Quand je vois que je maîtrise bien quelque chose, je me dis d'accord, ça maintenant je peux. je peux en faire un service. Parce qu'il est aussi très important pour moi que quand je travaille, que ce soit bien fait. Parce que j'ai réussi avec les années à construire une crédibilité et qu'au Sénégal, dès qu'on dit Aïcha Dem, tout le monde dira, ah d'accord, ça veut dire que ça va bien se passer. Et que ça, je le dis d'ailleurs toujours à mes équipes, je n'ai pas le droit de le gâcher ou de le perdre. Donc je travaille sur des choses et des projets très différents, mais je ne m'engage que là où je suis sûre que je peux bien faire le travail, que j'ai les compétences.

  • Ramata

    Très bien, c'est une éthique qui est indispensable pour pouvoir se préserver et durer en fait, parce que quand il y a un partenariat, une collaboration qui ne se passe pas bien, en fait du coup on n'est pas rappelé. Et puis par contre, quand on est reconnu, identifié,

  • Aïsha

    C'est ça, c'est un petit mot. Les gens se disent les choses. Et donc, quand ça se passe mal, tout le monde le sait. Quand ça se passe bien, tout le monde le sait. Et souvent, cela se voit aussi dans le travail.

  • Ramata

    Est-ce que, donc, tu évoquais le kit de survie pour quelqu'un qui vient, j'imagine, visiter une expo, qui parle de conseil. Quels sont les conseils pour un artiste contemporain africain qui se lance ? Pour toi, quelles sont les priorités ? Je ne vais pas te demander une mission de conseil gratuite. Je mettrai tes coordonnées avec toutes les informations. Comment accéder à tes services ? Est-ce que tu peux nous partager des conseils clés pour quelqu'un qui se lance ?

  • Aïsha

    Alors pour Dakar, par exemple, je dirais tout faire d'abord pour se faire connaître. Et c'est là que ça va être la communication. Parce que quand l'artiste arrive, il arrive avec son talent et sur sa créativité. Je ne peux pas me permettre de faire des remarques parce que chacun a son... Voilà, le travail de l'artiste, c'est le travail de l'artiste qui s'exprime. Maintenant, il arrive à Dakar, il démarre. C'est souvent ça le problème avec ces artistes qui démarrent ou qui travaillent depuis longtemps. C'est d'abord la communication et ensuite l'entourage, l'équipe, parce qu'ils sont seuls. Ils sont seuls, ils veulent tout faire. L'artiste, il doit créer. Maintenant, s'il veut à la fois créer, faire son marketing, faire son networking. trouver les partenaires, forcément, il ne peut pas y arriver. Ce qu'il va faire, il va appeler un ami, il va appeler un frère, il va appeler la famille, il va s'entourer de ces gens-là qui n'ont pas forcément les compétences, donc cela finit mal. Donc moi, souvent, ce que je conseille, c'est de justement trouver une personne qui peut aider à faire cela. Mais quelles sont les compétences, même si c'est la famille en fait, mais de trouver la bonne personne. et ensuite de se faire connaître par les personnes clés. Quand je dis les personnes clés, c'est les galeristes, les curateurs. C'est d'aller les voir, c'est de faire un bon dossier qui présente son travail, qui présente l'artiste, c'est-à-dire un portfolio, de dire qui il est, de se présenter, de faire le bon document qui est correct, qu'il va envoyer, de ne pas être paresseux, de faire en sorte de voir tout le monde, de rencontrer tout le monde autant que possible. Pour moi, c'est d'abord ça. Et après, dès qu'il y en a un qui connaît quelqu'un comme moi, quand je vois un bon dossier ou un bon artiste que je trouve intéressant, je vais le recommander aux autres. Et ils font tout ça. Je pense que déjà, pour commencer, ça, c'est important. Je ne sais pas si ça répond à ta question.

  • Ramata

    Complètement. Ce que tu vois vraiment, c'est cette notion de communication. Et aujourd'hui... Donc, quand tu évoques la communication aujourd'hui avec les réseaux sociaux, c'est vrai qu'on a vu des artistes gagner en notoriété parce qu'ils vont partager leurs œuvres à travers les réseaux sociaux. C'est ça que tu évoques ? Ou est-ce que tu as parlé du fait de se faire connaître en allant dans les galeries, en allant se présenter ? Mais il y a aussi les réseaux sociaux. Pour toi, les deux sont aussi importants l'un que l'autre ? Ou est-ce qu'il faut privilégier plutôt le côté galerie ? d'un, voilà, être... Aller prospecter auprès des galeries, j'ai envie de dire ça, même si quand on est dans l'environnement de l'art, on n'aime peut-être pas trop utiliser des termes très commerciaux. La priorité, c'est les galeries ou ce sera les réseaux sociaux ou les deux sont aussi importants que l'autre ?

  • Aïsha

    Les deux sont importants parce que les cibles sont différentes et l'objectif est différent. Les réseaux sociaux, c'est le public. Mais ça marche très bien parce qu'une fois qu'on a fédéré le public, C'est le public qui va demander des expositions. Les galeries, ça c'est le pilier. Quand je dis les galeries, c'est les curateurs aussi, les centres culturels, les gens du secteur. Il faut vraiment qu'ils vous connaissent. Mais ça, ce sera plus pour le côté professionnel. Pour moi, les deux sont importants. D'où l'importance aussi d'avoir au moins une personne qui aide, parce que faire les deux, c'est dur. animer des réseaux sociaux, ce n'est pas simple. Mais je pense que les deux sont importants.

  • Ramata

    Tu as évoqué aussi le fait que tu fais de la curation et que tu as organisé des expositions, des événements. Est-ce que tu peux nous parler justement de cette autre casquette ? Parce que là, ça fait à peine une demi-heure qu'on parle et j'ai affaire à une banquière informaticienne, écrivain,

  • Aïsha

    journaliste.

  • Ramata

    Pour moi, c'est qu'une heure d'interview. On va programmer une autre interview pour pouvoir parler de tout. Au moins,

  • Aïsha

    si tu peux, je suis d'accord. J'ai beaucoup de casquettes. Mais c'est toujours la passion, comme je dis. En réalité, ça ne sort pas. Tout est dans le même sac. Il y a aussi cette fondation dont ils font que je te parle de musique en Afrique. Je ne t'en ai pas parlé. Je ne suis pas sûre que c'était dans ma bio. Je reviendrai dessus, je réponds à ta question. La curation donc. La curation, c'est aussi à force, j'adore les expos vraiment, c'est ce que je préfère. Et à force d'aller dans les expositions et à force de connaître les artistes, de faire leur promotion, de parler de leur travail, de devenir amie avec eux. De temps en temps, je dis tiens, venez, on fait une expo. Donc j'appelle deux, trois amis qui sont des artistes souvent. C'est souvent à la Biennale en fait, parce qu'à la Biennale, il y a... C'est un événement qui dure un mois. Il y a des événements in, organisés par l'État, mais il y a beaucoup de off. Les off, c'est quand je dis il y en a 500 dans la ville, il y en a 500. C'est tous les artistes qui vont organiser quelque chose, tous les espaces culturels. Et ça bouillonne partout dans Dakar. Et donc c'est toujours cet engouement-là qui fait qu'on a envie de partager, on a envie d'être ensemble, on a envie de faire, de créer ensemble. Et là, souvent, je dis, tenez, venez, on va faire quelque chose. Et souvent, c'est des expos collectives. Donc, j'appelle quelques amis et on se retrouve et on organise. Et je me retrouve à faire la curation, ce que je n'ai pas appris non plus, et à faire du commissariat. Et j'ai fait trois biennales. Et d'ailleurs, la dernière, c'était... il y a quelques mois, à la dernière Biennale de Dakar. C'était ma plus grosse expo parce que c'était mon livre qui contient 100 artistes de Dakar que j'ai mis en expo. C'était une expo gigantesque avec de très grands artistes où il y avait des installations, où il y avait de la peinture, où il y avait du graffiti et où on organisait des événements ponctuels chaque semaine. du slam, des concerts, c'était incroyable. Mais ce sont des choses qui se sont faites aussi vraiment spontanément, avec beaucoup d'esprit de partage, de partage et d'échange surtout. C'est ça qui est très beau.

  • Ramata

    Et est-ce que tu peux nous parler, moi je vais profiter de ta présence ici, d'artistes vraiment qui t'ont particulièrement touchée, que tu suis ? tu suis le parcours depuis longtemps et que tu apprécies. Est-ce que tu as des recommandations d'artistes à nous faire ?

  • Aïsha

    Dis-moi un domaine, je te dis un artiste. C'est dans quel domaine ?

  • Ramata

    J'en ai beaucoup. Je sais bien, je sais bien. La peinture ?

  • Aïsha

    La peinture. Je vais vous dire Fanny Senso, qui d'ailleurs expose en ce moment à Paris, à la galerie Christophe Palletier. personnes, quelque chose comme ça, dans le mari.

  • Ramata

    Ok.

  • Aïsha

    Qui a été une... Il y a deux biennales, c'est-à-dire il y a quatre ans, c'était vraiment la star de la biennale. Incroyable artiste que j'aime beaucoup, qui retrace le quotidien d'un marché où il habite, avec des maquettes, avec des peintures, bref, je ne veux pas passer beaucoup de temps sur chaque artiste. Fali Senso. Ensuite, il y a... Kiné Aou, qui est une des femmes les plus connues dans son domaine, qu'on appelle l'application sénégalaise, qui est extraordinaire. Il y a aussi, parmi les anciens, la dame Anta Germaine Gaye, qui fait de la peinture sous-vert, c'est-à-dire qu'elle peint sur le vert, et c'est la pionnière. Je ne peux en citer encore des dizaines.

  • Ramata

    De toute façon, si on veut plus d'infos... Tout à fait, je suis sur les réseaux sociaux.

  • Aïsha

    Je mets les liens de tes réseaux pour qu'on puisse avoir accès aux informations en live.

  • Ramata

    Toi, depuis que tu t'intéresses à l'art, donc tu as évoqué 2009, est-ce que tu as vu, on parle beaucoup de l'évolution de la cote des artistes contemporains africains, on voit de plus en plus de créateurs africains qui ont l'opportunité d'être présents dans des galeries, pas seulement en France, à Paris, mais à l'international. Il y a de plus en plus d'événements d'envergure qui vont faire la part belle à l'art contemporain africain. Toi, de la fenêtre, vu que c'est vraiment, comment dire, tu es plongée dedans depuis 2009, en tout cas, ta plateforme a été créée en 2009, mais c'est un sujet qui t'intéressait déjà depuis longtemps. Comment est-ce que tu perçois cette évolution ?

  • Aïsha

    Écoute, moi je pense qu'en ce moment, c'est comme dans tout. C'est l'Afrique qui est là, en réalité. C'est vrai qu'en art contemporain, comme la peinture, tout ce qui est galerie et tout ça, c'est plus difficile parce que... Parce que voilà, on va dire qu'à Paris, par exemple, avoir des expos d'Africains, ce n'est pas aussi commun, mais ça a beaucoup changé, effectivement. Mais ce que j'ai observé, c'est que les gens retournent beaucoup à l'art africain, que ce soit dans la peinture, dans la mode, dans la musique. Tu as vu la mode, on s'est rencontrés au Galerie Lafayette parce qu'il y avait tous ces créateurs sénégalais. C'est parce que cette créativité africaine... en ce moment, elle est tellement, tellement, tellement bouillonnante et incroyable et belle. Et que les autres, je pense, je le dis souvent, ils ont fait le tour, mais l'Afrique, nous sommes... C'est-à-dire que tu marches dans les rues de Dakar, partout tu vois de l'art, et c'est comme ça. Tu vois les femmes habillées, c'est de l'art. Tu vois les murs, les graffitis, c'est de l'art. Et ça, ça ne se perd pas, c'est là, c'est jusque... il faut en faire quelque chose. Et donc, en ce moment, je ne veux pas dire tendance, c'est péjoratif, mais c'est ça, la créativité est en Afrique. Donc déjà, et ça, les gens l'ont compris, le monde l'a compris. J'ai parlé de monde de tout à l'heure, Chanel est venue à Dakar faire son défilé. On voit tous les gens qui reviennent, qui viennent, qui viennent parce que l'art est là. Après, côté c'est... Côté art contemporain, côté peinture, côté galerie, c'est un peu plus dur, mais je vois la différence effectivement. Je le vois du côté des artistes, je le vois du côté de ceux qui vendent. Et même chez le public, il s'y intéresse de plus en plus, mais aussi parce qu'il y a les réseaux sociaux, qu'il n'y a plus de barrières, que maintenant les jeunes, les artistes les plus jeunes et ceux dans tous les domaines, surtout dans le milieu de la mode, ils s'exposent. et ils montrent et il n'y a aucune barrière, il n'y a aucun complexe. Avant, nos artistes étaient un peu complexés parce que chez nous, faire de l'art, ce n'est pas bien vu. Chez nous, nos sociétés sont très dures. Être dans la culture, ce n'est pas quelque chose dont les parents rêvent pour leurs enfants. Maintenant, ça change. Maintenant, les jeunes s'expriment et assument d'être artistes et le montrent et se connectent. avec les autres à travers le monde. Et il faut connaître leur travail et on voit que les autres découvrent. Et je pense que ça, ça fait évoluer l'art et ça fait évoluer aussi les artistes partout dans le monde.

  • Ramata

    Toi, je pense que tu es jugée partie. Ce que tu évoques là, c'est qu'effectivement, on parle d'Africa Rising, il y a beaucoup de choses qui se passent sur le continent et quelque part. Est-ce que... Tu as le sentiment qu'il y a vraiment quelque chose de beaucoup plus puissant en Afrique. Alors sans être, on va être un peu chauvin, on a tendance à dire, oui, tout est au Sénégal, mais en essayant d'avoir un regard objectif, même si tu es sénégalaise et que tu vas me dire que c'est Dakar qui est devant. Mais est-ce que tu as vraiment le sentiment qu'il y a un engouement vers la créativité africaine, mais parce qu'il y a vraiment énormément de propositions, énormément d'artistes qui émergent ? et qu'il y a une vraie différence par rapport à ce que l'Europe peut proposer, par rapport à ce que la Corée ou d'autres continents ou d'autres régions du monde peuvent proposer. Donc, c'est ce qui fait qu'il y a une différence. Ou est-ce que, quelque part, il y a un essor global de tout ce qui ne vient pas de l'Occident ?

  • Aïsha

    C'est une bonne question. C'est une bonne question. Je réfléchis en même temps. Spontanément, je dirais que oui, moi, je pense qu'il y a un essor en Afrique. Mais maintenant que tu le dis, peut-être aussi que c'est de façon générale l'envie de découvrir autre chose que l'Occident. Mais sincèrement, moi, le talent que je vois en Afrique, la créativité étant plongée dedans, sincèrement, je suis assez bluffée par ce que je vois. Et je me dis que c'est parce que c'est là. Et comme je dis encore une fois, l'Occident a fait le tour. La preuve, il revient beaucoup. ils reviennent beaucoup en Afrique pour s'inspirer et donc moi je crois qu'il y a vraiment quelque chose, je ne sais pas ce qui se passe vraiment mais il se passe un truc en Afrique en ce moment, en art.

  • Ramata

    J'ai l'impression aussi, je me dis peut-être qu'on n'est pas objectif mais c'est absolument correct.

  • Aïsha

    Peut-être, je le sens mais peut-être on est chez nous, on voit mais moi je vois qu'il y a cette créativité, c'est incroyable quand même. Surtout chez les jeunes, c'est incroyable.

  • Ramata

    Moi, j'y crois. Je suis du même avec toi. Ce que je trouve intéressant, c'est que c'est comme s'il y a énormément de courants qui existent, qui ont été classifiés par l'Occident de plein de façons différentes. Et ce qui arrive d'Afrique, c'est complètement différent. Et puis, c'est un mélange plein d'influences différentes avec, bien sûr, les racines qui sont en Afrique, mais qui peuvent parler à quelqu'un aux États-Unis, en Corée, en Amérique latine. Et c'est ça aussi qui fait la force de la créativité africaine, c'est que ça vient du continent, mais ça peut vraiment toucher tout le monde, en fait.

  • Aïsha

    C'est ce que je suis en train de te dire tout à l'heure. C'est-à-dire, ils sont assis dans un village quelque part au Kenya, ils font leurs choses qu'ils mettent sur Internet, et ça touche un jeune Chinois, un jeune Américain, parce que finalement, ils sont connectés.

  • Ramata

    Alors, en termes de créativité à Dakar, Merci. tu parlais de la Biennale et de tes réseaux sociaux qui te permettent un peu de faire la liste de tous les événements qui peuvent se passer au Sénégal. Est-ce que tu déplaces les frontières du Sénégal et est-ce que tu vas aussi parler d'événements qui peuvent se passer en Côte d'Ivoire ? Je sais qu'il y a une grande foire d'art contemporain à l'Écosse, au Nigeria. Est-ce que tu fais aussi une veille sur ce puissant... ce qui peut se passer en dehors de Dakar ?

  • Aïsha

    Une veille, je ne sais pas, mais quand je vois des choses importantes que je pense que les gens doivent savoir, j'en parle. À l'extérieur, c'est souvent le travail, c'est souvent des missions, c'est souvent des choses où on m'invite à venir participer, souvent des conférences, des panels. Mais en même temps, on est en Afrique et quand je vois un événement, un grand événement africain, forcément, je peux en parler. Mais vraiment, c'est plus, tu vois, à Côte d'Ivoire, Afrique du Sud, dont j'ai parlé tout à l'heure, j'en parle pas mal, mais parce que je suis souvent là-bas pour le travail avec cette fondation de musique. Et donc, c'est aussi ça qui est beau, parce que cela me permet de découvrir. Les autres pays africains, c'est à travers la culture, moi, que j'ai commencé à voyager autant. À la banque, je prenais mon congé, je venais à Paris et puis c'est tout. Quand j'ai commencé à faire ce travail, donc, au bout de deux ans, par exemple, j'ai été appelée en Afrique du Sud pour rejoindre un projet qui est une plateforme dédiée à l'industrie musicale. Et comme j'avais l'expérience à Jean-Dakar... et m'ont d'abord appelée juste pour voir si je pouvais collaborer avec eux.

  • Ramata

    Donc maintenant, j'aimerais que tu nous parles de la fondation que tu évoquais tout à l'heure. Puisque c'est une de tes dernières initiatives liées à l'art et la culture, mais là, on est plus centré sur la musique. Donc, est-ce que tu peux nous parler de cette fondation et de ton rôle dans cette fondation ?

  • Aïsha

    Musique in Africa. Je suis cofondatrice de la fondation parce que... Il y a eu d'abord la plateforme online et puis il y a eu la fondation. C'est destiné à booster l'industrie de la musique en Afrique. L'idée était de dire que c'est bien beau d'être connecté au reste du monde avec les grands, mais c'est bien que les Africains se connaissent et se retrouvent entre eux. C'était quand même il y a un moment, c'était en 2012, que nous avons fondé Musique in Africa. Je suis rentrée dans le board et j'ai été... J'étais dans le Bode pendant cinq ans, dans deux où j'étais présidente. C'est un milieu très, très masculin dans la fondation. Il y avait les membres, c'était vraiment, il y avait pratiquement cinq femmes sur peut-être une centaine. Et je me suis retrouvée présidente, donc entourée d'hommes du secteur dans un milieu très, très masculin. C'était une très belle expérience. Et je suis très fière parce que ça a tellement grandi en dix ans, c'est devenu vraiment incontournable. Et la Fondation développe de magnifiques projets qui soutiennent la musique en Afrique. Mais là aussi, récemment, quand j'ai fini mon mandat, j'ai décidé de me consacrer entièrement à mon agence. Donc je suis, on va dire, membre d'honneur. Maintenant, on n'est pas vraiment dans les décisions. mais très très fiers de ce que nous avons accompli jusqu'ici.

  • Ramata

    Très bien. Et est-ce que tu as dit, c'est quoi les next projets pour Aïcha ? Est-ce qu'il y a des choses dont tu peux nous parler ? J'imagine que tu es toujours dans le milieu de l'art et de la culture, mais comme on peut le voir là, tu as commencé par créer une plateforme, tu as endossé cette casquette de journaliste, puis curatrice, de consultante, de conférencière, d'écrivain. Donc, tu as été à la tête de cette fondation avec ce focus sur la musique. Qu'est-ce que tu nous prépares ?

  • Aïsha

    Alors, j'ai beaucoup de choses que je voudrais faire. Il y a quelques années, j'avais commencé un projet d'incubateur, juste avant de commencer mon livre. Donc, j'avais ce projet d'incubateur culturel et le livre m'est tombé dessus presque. Et je me suis consacrée au livre qui m'a pris trois ans d'années de travail. Et après ces trois années, j'étais en promo constamment. Donc là, j'aimerais beaucoup reprendre l'incubateur et un fonds pour les artistes. J'ai beaucoup de projets personnels avec Sylvie Woro, mais dont je ne peux pas parler maintenant. Ici en France, j'ai rejoint un autre board d'une organisation dédiée à l'art aussi. Ça aussi, j'en suis très fière. Mais ils n'ont pas encore communiqué officiellement. Je te tiendrai au courant. Et donc, il y a tous ces petits projets aussi qui ne sont pas gros, mais auxquels je tiens au Sénégal à accompagner des femmes artistes, à mentorer la transmission. Ça compte beaucoup pour moi. Je le fais beaucoup de façon officieuse, on va dire. Je cherche de voir un moyen de le rendre plus officiel pour que je... puisse accorder vraiment du temps à ça, au-delà de ce que je fais en ce moment comme accompagnement de jeunes artistes. Et en parlant justement des autres pays, ça aussi, tu vois, je reçois beaucoup de messages de gens qui sont en Côte d'Ivoire, au Burkina, qui me disent, on est inspiré par votre travail, est-ce que vous pouvez nous mentorer ? Donc je le fais pas mal et ça me touche beaucoup et j'aime beaucoup cela, cette connexion avec ces autres pays-là, de cette façon-là, plutôt que par la communication ou en parlant juste d'un artiste. Il y a ce côté où il y a une vraie connexion que j'aime beaucoup.

  • Ramata

    Très bien, on a hâte de voir la suite. On arrive à la fin de cette interview. Moi, j'étais ravie d'avoir l'opportunité de découvrir ton profil et d'en savoir un peu plus sur toutes tes initiatives. Je mettrais bien, comme je l'évoquais tout à l'heure, en note de l'épisode, les liens vers tes comptes sur les réseaux sociaux et également le lien vers ton livre, de manière à ce qu'on puisse vraiment en savoir encore davantage sur tout ce que tu peux partager. Et puis, je te dis merci.

  • Aïsha

    Mais c'est moi qui te remercie, Ramatha. Je suis très contente aussi de t'avoir rencontrée déjà. de découvrir ce que tu fais. Et merci de donner la parole parce que c'est important. Et c'est un secteur où on ne parle pas assez. Et tu as beaucoup de générosité et une très belle écoute que j'apprécie beaucoup, beaucoup, beaucoup. Et j'ai été très, très contente de venir, de faire cette discussion avec toi. Merci infiniment.

  • Ramata

    Écoute, merci à toi. Je te dis à très vite en Afrique ou ailleurs.

  • Aïsha

    À très vite. Merci.

  • Ramata

    Merci d'avoir écouté l'épisode jusqu'au bout. Je vous invite à pratiquer quelques petits gestes à impact fort pour m'aider à gagner de la visibilité sur ce podcast. Vous pouvez partager l'épisode à trois de vos amis. Vous pouvez laisser un commentaire sur Apple Podcasts ou Spotify. Je vous invite également à cliquer sur les cinq étoiles pour donner de la force. Je vous dis à très vite en Afrique. Bye.

Chapters

  • Introduction au podcast et présentation d'Aïcha Deme

    01:00

  • Parcours d'Aïcha Deme et ses débuts dans la culture

    02:05

  • Transition vers le secteur culturel et création d'Agenda Dakar

    03:30

  • Les défis de l'entrepreneuriat culturel en Afrique

    06:18

  • L'importance de la communication pour les artistes

    07:42

  • Rôle de consultante et conseils pour les artistes

    12:06

  • Évolution de la plateforme Agenda Dakar et ses impacts

    14:07

  • Kits de survie pour les événements culturels

    18:14

  • Conseils pour les artistes contemporains africains

    24:40

  • Projets futurs et engagement d'Aïcha Deme

    29:23

Description

Comment quitter une carrière confortable pour bâtir un empire par passion et devenir une référence dans le monde de l'art ?


Cet épisode est une véritable masterclass avec Aïsha Deme, spécialiste des arts et des industries culturelles en Afrique ! Découvrez le parcours inspirant d'une pionnière qui a transformé sa passion en une carrière influente.

Dans cette interview, Aïsha nous offre des leçons inestimables sur :

  • L'audace d'entreprendre : Comment elle a quitté une carrière d'informaticienne bancaire pour se lancer, avec naïveté mais détermination, dans un domaine qui la faisait vibrer.

  • La persévérance du pionnier : Les défis des débuts d'Agenda Dakar, première plateforme culturelle digitale au Sénégal, et comment deux ans sans salaire ont forgé sa résilience.

  • Le positionnement unique : La création des "kits de survie" pour les grands événements culturels sénégalais (Biennale de Dakar, Festival de Jazz), devenus des outils indispensables pour naviguer la scène artistique.

  • Devenir une référence : Comment son agence Siriworo accompagne les artistes et les organisations, structurant des projets et bâtissant une crédibilité solide grâce à une éthique rigoureuse.

  • Le rayonnement de l'Art Africain : Son regard d'experte sur le "bouillonnement incroyable" de la créativité sur le continent et comment l'art africain s'impose sur la scène mondiale.

L'histoire d'Aïsha Deme est une source d'inspiration pour tout entrepreneur créatif. Elle prouve que la passion, l'engagement et la capacité à saisir les opportunités sont les clés pour transformer un rêve en une référence incontournable.


Prêt(e) à découvrir les secrets de son succès ? Écoutez cette masterclass de l'art !


Africa Fashion Tour poursuit chaque semaine l'exploration des industries culturelles et créatives africaines avec des interviews d'entrepreneurs passionnés qui s'interrogent sur les questions de diversité et de représentation. Chacun des invités du podcast est passé du questionnement à l'action pour proposer des solutions concrètes, des business model vertueux pour promouvoir l'Afrique à travers les soft power.


J’en profite pour remercier les auditeur.e.s de plus en plus nombreux de ce podcast. Pour découvrir en avant première les dernières interviews et analyses de l'écosystème de la mode africaine, abonnez-vous à la ⁠⁠⁠Newsletter Africa Fashion Tour⁠⁠⁠.


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A très vite en Afrique ou ailleurs


Ramata Diallo 


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Aïsha

    Pour moi, c'est de dire comment survivre à la biennale. D'abord, savoir déjà les dates exactes, qui vient, qui ne vient pas. Savoir comment réserver un hôtel, savoir comment accéder. Parce qu'il y a des gens qui vont vraiment demander est-ce qu'il faut payer. Alors que pour certaines personnes, c'est une information évidente. Et moi, je découvre avec tous les messages que je reçois de personnes que je ne connais pas, qu'en fait, les gens ne savent pas. Les gens ne savent pas ce que nous pensons être évident et que nous ne communiquons pas. Qu'il faut s'accréditer juste pour aller voir un île. Que pour le festival de jazz, le même bat, je peux marcher par-ci, par-là. Mais qu'aussi, il faut s'y mettre très tôt pour trouver un hébergement. Mais comment le trouver ? Il y a des personnes à Saint-Louis qui peuvent aider. Donc, des petites choses comme ça qui te font survivre dans ce festival, d'où le nom de survie.

  • Ramata

    Bienvenue dans ce nouvel épisode du podcast Africa Fashion Tour. Je vous emmène avec moi à la rencontre de créateurs basés sur le continent africain. Je vous invite à voyager à Abidjan, Dakar ou Bamako pour découvrir les parcours de professionnels talentueux, responsables et ambitieux. Au fil des interviews, je me rends compte que chaque entrepreneur veut contribuer au rayonnement de la créativité africaine sur le continent et au-delà. Ce podcast est un moyen de sortir des clichés du boubou et du wax. pour représenter un éventail de tissus, de savoir-faire et de créativité, trop souvent sous-représentés. Je suis Ramata Diallo. Je suis professeure de marketing dans des écoles de mode parisiennes et je suis également consultante spécialisée dans l'accompagnement de porteurs de projets qui veulent lancer leur marque de mode. En 2017, j'ai hésité à ma première Fashion Week en Afrique. Et depuis, je voyage régulièrement sur le continent pour aller à la rencontre de ceux et celles qui font la mode en Afrique. Le podcast est le moyen que j'ai trouvé pour partager au plus grand nombre une autre vision de la mode africaine. Aujourd'hui, je suis en compagnie d'Aïcha Deme. Elle est spécialiste des arts et des industries culturelles en Afrique. Elle a fondé Siriworo, une structure d'ingénierie culturelle qui accompagne des artistes et des organisations dans leurs initiatives créatives. Je l'ai invitée aujourd'hui pour qu'elle puisse nous parler de son parcours et de ses différentes initiatives. Bienvenue Aïcha, comment vas-tu ?

  • Aïsha

    Merci beaucoup Ramata, je vais très bien, merci.

  • Ramata

    Alors, on va commencer cette interview comme je le fais avec chacun de mes invités. Je vais te demander de te présenter.

  • Aïsha

    Alors, je pense que tu m'as déjà présenté et tu as dit l'essentiel. Je rajouterai que je suis une grande, grande passionnée d'art et de culture, très heureuse et fière de travailler dans ce domaine en Afrique. Quoi d'autre ? Je suis Sénégalaise, je suis née et j'ai grandi au Sénégal, j'ai étudié là-bas. je suis contente de travailler de ma passion, on en reparlera plus tard parce que j'ai changé de métier pour ça sinon je pense que tu as dit l'essentiel dans ta présentation

  • Ramata

    Très bien, ben écoute tu m'offres une belle transition, tu dis que t'es contente de travailler dans ta passion et donc a priori t'es peut-être pas dans ce secteur-là le secteur des industries culturelles et de l'art au départ Ah ! Donc, comment est-ce que ta carrière a commencé ? Quel a été ton parcours au niveau de tes études ? Et ensuite, quels ont été tes premiers métiers ?

  • Aïsha

    Alors, moi, je suis une scientifique, une informaticienne. Et je viens de la banque. J'ai fait 50 banques en tant qu'informaticienne. J'ai fait des études informatiques, donc. Mais j'ai toujours été très, très passionnée d'art et de culture. Depuis enfant, j'allais beaucoup voir les expos. J'allais beaucoup dans les concerts. au cinéma, au théâtre. Et puis un jour, il y a eu plusieurs choses. C'est d'abord l'envie de changer de métier, même si c'est un métier que j'aimais beaucoup au début, mais à un moment, ça a devenu routinier. Et puis je me suis rendue compte qu'il n'y avait rien sur Internet au Sénégal qui était destiné à parler d'art et de culture. Mais vraiment rien. C'est-à-dire que quand on voulait sortir voir une exposition, il fallait chercher. J'ai décidé donc de monter une plateforme, la première au Sénégal, qui faisait la promotion des événements culturels, qui était un agenda. Agenda Dakar, ça s'appelait en 2009, avec un ami, nous avons fait ça ensemble. Et c'est comme ça que je suis arrivée dans la culture, Ramata.

  • Ramata

    Très bien, donc tu as toujours eu cette passion, comme tu le dis, pour l'art, pour la culture. Toi, est-ce que tu avais une âme d'artiste ou tu étais plutôt spectatrice ?

  • Aïsha

    Non, toujours spectatrice, toujours. Grande consommatrice, mais tellement passionnée que vraiment j'allais à la recherche. Je me suis rendue compte que je faisais tout, tout, tout pour avoir les informations. Je sortais de la banque à 18h, j'allais chercher des expos. Et j'ai fini aussi par connaître les artistes à force d'être présente dans le milieu. Ce qui m'a beaucoup aidée par la suite, parce que quand j'ai monté cette plateforme, je les appelais personnellement pour avoir leur programme, pour le mettre sur mon site. J'ai commencé à les interviewer et donc à écrire. Beaucoup pensent que je suis journaliste en passant, mais je n'ai pas fait d'études de journalisme. mais j'ai beaucoup écrit j'ai beaucoup chroniqué j'ai été chroniqueuse du monde afrique j'ai beaucoup écrit sur mes plateformes personnelles et j'ai fait un livre aussi dédié à l'art à Dakar, qui a été nominé sélection du monde justement en 2022. Et donc c'est juste, je consommais beaucoup. À force de consommer, je connaissais plus, j'apprenais plus, je connaissais mieux les pratiques. Et moi-même, j'ai commencé à pratiquer certaines choses, comme écrire, comme faire de la curation, organiser des expositions. C'est avec le temps.

  • Ramata

    Et à partir de... Donc, il y a eu toute une partie où tu faisais ça un peu en side. Ce n'était même pas un business, c'était une passion. Donc, en parallèle de la banque, à partir de quel moment tu te dis, bon là, j'arrête, je vais me consacrer, je vais consacrer en tout cas mon temps à cette passion ?

  • Aïsha

    C'est comme j'ai dit, c'est à partir du moment où à un instant, parce que j'ai toujours besoin justement d'être passionnée quand je fais quelque chose. C'est à partir du moment où je ne le ressentais pas. plus à la banque et dans mon métier d'informaticienne que j'ai décidé d'aller faire ce qui me passionnait vraiment. Et donc, c'était une bonne transition, on va dire, parce que je suis restée dans le digital quand même avec la plateforme Agence Dakar, mais je ne m'occupais que de culture. Mais c'est vraiment ce moment-là, en 2009, où j'ai dit, bon, d'accord, on va y aller. Ce qui était très risqué parce que c'était quitter un... travail très stable et commencer à zéro une vie d'entrepreneur. Et je n'avais aucune idée de ce que c'était en réalité. Je suis juste partie avec ma passion, mon meilleur ami et moi. On a été un peu fous, mais voilà.

  • Ramata

    Et du coup, c'est intéressant ce que tu dis là. Est-ce que tu avais une idée d'un business model, de comment est-ce que tu allais te rémunérer ? Comment dire ? Parce qu'au départ, on est... passionnés par la culture, par l'art, il y a un côté créatif qui nous fait vibrer, mais à un moment donné, il faut relier ça à un business model et il faut des rentrées d'argent. Donc toi, tu avais une idée précise de comment tu voulais faire les choses ?

  • Aïsha

    Absolument pas. C'était une catastrophe. Je n'avais aucune idée et on était naïfs, on va dire, et rêveurs, parce qu'on connaissait une plateforme très connue au Sénégal où tout le monde se connectait tous les jours, qui se faisait beaucoup Beaucoup d'argent, c'était une plateforme d'information en ligne qui se faisait beaucoup d'argent avec la publicité, les bannières à l'époque de publicité. Et nous, on se disait, on fait une plateforme gratuite parce que la culture, on sait que ça ne paie pas beaucoup et qu'on allait se faire rémunérer avec les pubs. Mais c'était une catastrophe parce que pendant une année et demie ou deux ans, nous n'avons pas eu de salaire parce que les pubs ne venaient pas. Au début, les gens étaient assez réticents. sur une plateforme culturelle. Ce qu'ils connaissaient, c'était les flyers, les affiches. C'était 2009 dont je parle. Donc même Facebook, c'était juste parler entre amis. Il n'y avait pas encore les événements pour promouvoir. Et donc il fallait shifter cela. Et c'est de ça dont je suis fière parce que nous sommes arrivés à le faire. Au bout de deux ans quand même. Au bout de deux ans, les expats ont commencé beaucoup à utiliser le site et les partenaires ont commencé à arriver et c'est à partir de là. À partir de là, nous avons pu réaliser quelque chose. Mais nous sommes restés deux ans où on fonctionnait avec nos économies. Et à un moment, bien évidemment, c'était difficile. C'était très dur au début. Il faut dire la vérité quand même.

  • Ramata

    Donc, c'est intéressant de revenir sur un petit peu la naïveté que l'on a quand on se lance dans un projet de passion, même si toi, tu avais un background de banquier quelque part. Donc, on aurait pu supposer que tu avais un business plan. Mais finalement, de ce que tu me dis, tu es un peu allé avec... beaucoup de naïveté au départ.

  • Aïsha

    C'est fou, mais ça continue. Et c'est pour ça que j'en parle souvent dans mes talks et dans mes... partout où je suis invitée à parler. L'entrepreneuriat, on fonce toujours en disant que c'est beau. Tu vois, on montre toujours le côté très rêveur. Mais il faut dire la vérité. Il faut vraiment que si on décide d'entreprendre, qu'on soit sûr au moins d'avoir un modèle qui marche. Parce que sinon, clairement, on n'y arrive pas. J'étais dans une banque, je suis scientifique, ingénieur informatique, structuré et tout, mais là, j'arrive avec une passion, beaucoup de rêves. Et avec un ami aussi rêveur que moi, on a vraiment raté le crochet au début.

  • Ramata

    C'est intéressant aussi parce que souvent, quand il y a des associés, on dit qu'il faut qu'il y ait quelqu'un de plus pragmatique, rationnel et quelqu'un peut-être de plus créatif. Comme ça, le duo va marcher parce qu'on a le financé d'un côté et puis le créatif. Mais là, de ce que tu dis, il y a deux rêveurs créatifs. Oui,

  • Aïsha

    exactement. C'est ça qui a été le cas, mais en même temps. Ça apporte aussi, il faut dire la vérité, parce que plusieurs fois, par exemple, moi j'ai été découragée, j'ai voulu abandonner. Et en réalité, mon associé était beaucoup plus rêveur que moi et beaucoup plus optimiste. Et tout le temps, il me disait non, non, non, on ne peut pas, ça va marcher, ça va marcher. Si j'avais été toute seule, je pense qu'au bout d'une année, j'aurais laissé tomber. Mais lui a continué de croire et c'est lui qui d'ailleurs continue de chercher des partenariats. sponsor et c'est comme ça qu'on a réussi en fait finalement à exploser d'un coup. Nous avons même eu une subvention de la coopération espagnole qui nous a permis de recruter une grosse équipe de nous organiser mieux et de dérouler d'autres projets qui en fait nous ont permis d'avoir de l'argent. Et sans son côté tellement rêveur, tellement optimiste qui croit que tout toujours va bien se passer. Je pense que j'aurais abandonné en réalité. Je serais restée dans la culture, mais je serais peut-être allée trouver un poste où je serais salariée et travaillée dans la culture, je pense.

  • Ramata

    Très bien. Donc, dans ce que tu évoques, en fait, c'est quand tu parles de 2009 pour le lancement de cette plateforme en ligne qui va recenser tous les événements du Sénégal. C'est vrai que c'était très précurseur. C'était vraiment les débuts de ce type de plateforme-là. Oui, vraiment. Et tu expliques que du coup, pour faire vivre cette plateforme, l'idée c'est que tu t'es mise à rechercher les informations, à écrire des chroniques, à rencontrer les différents artistes. Du coup, c'est des nouveaux métiers que tu as appris.

  • Aïsha

    Absolument, c'est des nouveaux métiers. Et je me découvre des capacités que je ne connaissais pas. Mais c'était tellement exaltant pour moi de faire ça. que je ne me rendais même pas compte en réalité. Je travaillais énormément, énormément. Je passais mes nuits à créer le contenu, c'est-à-dire à écrire, à fermer, à mettre le contenu de l'agenda, les journées à travailler au bureau. Je ne dormais littéralement pas. Mais effectivement, c'est des métiers que j'ai appris sur le tard.

  • Ramata

    Et alors, vous avez finalement, quand on dit pendant deux ans, vous n'avez pas gagné d'argent, et puis ensuite... on va dire les graines que vous avez semées, elles ont commencé à pousser, mais au bout d'un certain temps, finalement, quand on prend du recul, deux ans, c'est assez long que ça.

  • Aïsha

    Ça dépend. Ce n'est pas si long peut-être, mais quand c'est sans salaire, c'est quand même, ça paraît 10. Je vais être sincère. Mais finalement, on aurait pu attendre plus. On aurait pu attendre plus que ça. Et comme tu as dit, c'était semer des graines. Je suis contente que tu dises cette expression que j'utilise énormément. J'ai même un hashtag, c'est mes des graines. Parce que quand on insiste finalement, ça finit toujours par payer.

  • Ramata

    Et aujourd'hui, l'agenda, c'est toujours une plateforme qui est d'actualité ou comment ça a évolué finalement cette plateforme ? Puisque vous avez eu des subventions, vous avez eu vos sponsors. J'imagine qu'il y avait une audience. Si c'était une plateforme précurseur ? Tout de suite, vous avez une audience assez importante qui s'habitue à venir sur ton site, qui veut lire tes chroniques. Et du coup, ça fait vraiment une monnaie d'échange avec des sponsors. Comment est-ce qu'elle a évolué, la plateforme, et où elle en est aujourd'hui ?

  • Aïsha

    Alors, on a eu une audience à partir de 2010. D'ailleurs, ça a commencé avec le Festival, le Festman, le Festival Mondial des Arts Nègres qui avait été organisé par le président Wad. Et l'organisation était très compliquée, très. Ça s'est fait vraiment, il y a des choses qui se faisaient à la dernière minute. Et donc, côté communication, ils avaient un problème. Et moi, j'étais très tenace. Moi, je trouvais l'info comme d'habitude. Et finalement, notre plateforme était devenue la plateforme où on savait ce qui se passait pendant tout un mois au Sénégal, où c'était bouillonnant, où on avait tous les grands artistes du monde, que ce soit dans le rap. dans le jazz, dans les arts visuels et tout ça, vraiment. Et donc là, il y a eu un rush. Après ça, ça a un peu baissé, mais comme tu viens de dire... Nous avons eu donc ces partenaires et puis surtout la subvention qui était assez grosse, qui nous a permis de recruter des équipes et de développer d'autres choses. Parce que les gens ont commencé à nous contacter en nous disant vous communiquez bien, vous communiquez très bien sur Internet, ce qui ne se faisait pas beaucoup. Et c'est là que les artistes venaient me voir, Aïcha je veux que tu communiques sur mon projet, Aïcha je veux que tu fasses ceci avec moi. Et donc, on a continué avec la plateforme et ces nouvelles équipes. Nous sommes passés de deux personnes à douze personnes. Au bout de cinq années, c'était vraiment au top, ça marchait bien. C'était en 2014. Et comme j'avais beaucoup ces sollicitations-là dont je parle aussi, j'ai décidé de laisser l'équipe continuer la plateforme Agence Dakar. Et moi, j'ai monté. Je suis allée faire de la consultance. Et donc, d'aller travailler justement avec... tel artiste sur tel album, avec tel artiste sur son expo, avec l'autre sur son film. Malheureusement, ce qui est un peu triste, c'est qu'après, la plateforme a perdu son... Avec les équipes, c'était devenu un peu difficile parce qu'il y avait les autres projets à gérer, il y avait... Voilà, ça arrive. Et finalement, elle est juste, elle ne marche plus depuis. Le site existe, le nom existe. Mais ils ont été concentrés parce que moi, j'ai cédé, j'ai passé la main pour faire la consultance, ce que je fais toujours. Mon bonheur est que ma communauté est restée parce que cette communauté était très fidèle et très belle. Et c'est pour elle que j'écrivais énormément pour faire découvrir qui est l'artiste, pour faire découvrir ce qui se passe, pour dire qu'il y a tel espace qu'il faut absolument visiter. Et ça, j'ai dû continuer à le faire sur mes réseaux sociaux parce que la communauté était toujours là. Chaque fois qu'il y a un événement majeur comme la Biennale, comme le Festival de jazz, la communauté est là qui me demande, Aïcha, qu'est-ce que tu nous recommandes ? Quel expo nous devons aller voir ? Et là, donc, j'ai développé au-delà de mon activité de consultante avec l'agence, je suis restée quand même celle qui faisait quand même l'agenda sur mes réseaux sociaux, beaucoup. J'écris beaucoup toujours et j'ai des kits de survie pour chaque grand événement culturel au Sénégal. Par exemple, il y a un kit de survie de la Biennale qui dira sur 500 expos qui se passent à Dakar, voici celles que je recommande, voici les artistes à découvrir, ce genre de choses. Parce que ça aide beaucoup de personnes qui ne savent pas. L'information est toujours assez difficile. Et surtout que c'est juste qu'ils sont là, ils sont là constamment, et qu'au final, je pense que je leur dois un peu. Et il y a cette relation entre nous qui est très belle. Donc, je continue de faire ça. Je regrette un peu que l'agenda ne marche plus, mais à un moment, il faut accepter que c'est comme ça, puisque j'étais partie de toute façon.

  • Ramata

    C'est intéressant que tu partages, en fait, que tu continues, finalement, tu restes sur ta passion de départ, finalement. Ce que tu as commencé par toi, tu continues à le faire à travers... tes réseaux sociaux, que la plateforme allait continuer ou pas. Et pourquoi est-ce que tu as appelé ça des kits de survie ? Parce que c'est une expression qui est quand même très particulière.

  • Aïsha

    C'est littéralement ça. Là, je vais être très franche. J'ai commencé avec, comme j'ai dit, le festival de jazz et la biennale. Organiser des événements de cette envergure, c'est très difficile. Et dans nos pays, on est tellement concentré, tellement pris par les choses au jour le jour, c'est-à-dire les espaces, les artistes, comment faire venir les œuvres, la logistique, qu'on oublie souvent la com. Les gens s'y mettent en général vers la fin, à la dernière minute. Il se trouve que des événements comme ça, c'est aussi des événements qui attirent du monde. Par exemple, à la Biennale, les gens viennent de partout dans le monde pour venir visiter. Le festival de jazz aussi. Donc, des mois avant, ils ont besoin de savoir ce qui se passe, comment ça se passe, qui vient, qui ne vient pas. Mais c'est un foulard tard à sortir. Et c'est pour ça que j'ai appelé le kit le kit de survie, parce que pour moi, c'est de dire comment survivre à la biennale. D'abord, savoir déjà les dates exactes, qui vient, qui ne vient pas. Savoir comment réserver un hôtel, savoir comment accéder. Parce qu'il y a des gens qui vont vraiment demander est-ce qu'il faut payer, alors que pour certaines personnes c'est une information évidente. Et moi je découvre avec tous les messages que je reçois de personnes que je ne connais pas. En fait, les gens ne savent pas. Les gens ne savent pas ce que nous pensons être évident et que nous ne communiquons pas. Il faut s'accréditer juste pour aller voir, que pour le festival de jazz, le même badge peut marcher par-ci, par-là. Mais aussi, il faut s'y mettre très tôt pour trouver un hébergement. Mais comment le trouver ? Il y a des personnes à Saint-Louis qui peuvent aider. Donc, des petites choses comme ça... te font survivre dans ce festival, d'où le nom Kit de survie, que finalement les gens apprécient beaucoup. Et c'est aussi comme un kit, c'est comme quand on va en forêt faire du camping. Je le vois un peu comme ça. Les outils qui permettent de traverser ces moments-là.

  • Ramata

    Et ce que tu évoques aussi, tu évoques tes missions de conseil. Donc, au service des artistes, je pense qu'aussi au service d'un certain nombre d'organisations, est-ce que tu peux évoquer ces parties-là ? Parce qu'encore une fois, toi, tu as un background scientifique, informatique, banquier. Même si tu as pu faire du conseil, ça n'a vraiment rien à voir avec le conseil auprès d'artistes. Donc, est-ce que tu peux parler de comment tu as pris cette casquette ?

  • Aïsha

    Ça aussi, c'est venu naturellement, c'est venu par leur demande. Quand je suis allée, moi, faire du consulting, c'était plus, par exemple, quelqu'un qui lance un album, je l'aide dans la communication, dans tout le déroulement du process, ce que je sais faire très bien. Mais au fur et à mesure, comme j'ai dit, j'ai appris beaucoup sur le tard et aussi j'ai appris à connaître très bien le milieu, vraiment. Mais parce que je suis plongée dedans constamment. C'est-à-dire, je suis constamment dedans. Si je n'écris pas, si je ne suis pas devant l'ordinateur en train de travailler sur les projets culturels, c'est-à-dire, je suis dans une expo, je suis à un festival. Et c'est là que je me rends compte qu'à force de les côtoyer, qu'à force d'être là, j'observe aussi. C'est peut-être le côté, justement, scientifique. J'observe et j'apprends avec tout, dans tout, partout. Là, en ce moment, je te parle, j'apprends. C'est ma nature. Et donc, je suis arrivée à vraiment connaître très, très bien le milieu et connaître très, très bien aussi les artistes. Je connais bien les profils, je connais leurs points forts, leurs points faibles. Et ce qui fait que spontanément aussi, je donnais même des conseils. J'ai beaucoup fait de bénévolat. J'en fais toujours, je décide d'arrêter, mais c'est difficile. Dès que je vois même un artiste que je ne connais pas, je peux voir sur ses réseaux sociaux quelque chose et puis lui écrire derrière. pour dire je pense que là ce serait bien si tu faisais ci, si tu faisais ça. Mais souvent ils sont venus vers moi donc pour me dire Aïcha, j'aimerais bien qu'on travaille ensemble sur tel projet. Et je me retrouve soit à structurer un projet, soit à organiser, soit à mobiliser parce que je mobilise beaucoup aussi. Mais c'est très naturellement que c'est arrivé. Au fur et à mesure, je rajoute dans mes services. Quand je vois que je maîtrise bien quelque chose, je me dis d'accord, ça maintenant je peux. je peux en faire un service. Parce qu'il est aussi très important pour moi que quand je travaille, que ce soit bien fait. Parce que j'ai réussi avec les années à construire une crédibilité et qu'au Sénégal, dès qu'on dit Aïcha Dem, tout le monde dira, ah d'accord, ça veut dire que ça va bien se passer. Et que ça, je le dis d'ailleurs toujours à mes équipes, je n'ai pas le droit de le gâcher ou de le perdre. Donc je travaille sur des choses et des projets très différents, mais je ne m'engage que là où je suis sûre que je peux bien faire le travail, que j'ai les compétences.

  • Ramata

    Très bien, c'est une éthique qui est indispensable pour pouvoir se préserver et durer en fait, parce que quand il y a un partenariat, une collaboration qui ne se passe pas bien, en fait du coup on n'est pas rappelé. Et puis par contre, quand on est reconnu, identifié,

  • Aïsha

    C'est ça, c'est un petit mot. Les gens se disent les choses. Et donc, quand ça se passe mal, tout le monde le sait. Quand ça se passe bien, tout le monde le sait. Et souvent, cela se voit aussi dans le travail.

  • Ramata

    Est-ce que, donc, tu évoquais le kit de survie pour quelqu'un qui vient, j'imagine, visiter une expo, qui parle de conseil. Quels sont les conseils pour un artiste contemporain africain qui se lance ? Pour toi, quelles sont les priorités ? Je ne vais pas te demander une mission de conseil gratuite. Je mettrai tes coordonnées avec toutes les informations. Comment accéder à tes services ? Est-ce que tu peux nous partager des conseils clés pour quelqu'un qui se lance ?

  • Aïsha

    Alors pour Dakar, par exemple, je dirais tout faire d'abord pour se faire connaître. Et c'est là que ça va être la communication. Parce que quand l'artiste arrive, il arrive avec son talent et sur sa créativité. Je ne peux pas me permettre de faire des remarques parce que chacun a son... Voilà, le travail de l'artiste, c'est le travail de l'artiste qui s'exprime. Maintenant, il arrive à Dakar, il démarre. C'est souvent ça le problème avec ces artistes qui démarrent ou qui travaillent depuis longtemps. C'est d'abord la communication et ensuite l'entourage, l'équipe, parce qu'ils sont seuls. Ils sont seuls, ils veulent tout faire. L'artiste, il doit créer. Maintenant, s'il veut à la fois créer, faire son marketing, faire son networking. trouver les partenaires, forcément, il ne peut pas y arriver. Ce qu'il va faire, il va appeler un ami, il va appeler un frère, il va appeler la famille, il va s'entourer de ces gens-là qui n'ont pas forcément les compétences, donc cela finit mal. Donc moi, souvent, ce que je conseille, c'est de justement trouver une personne qui peut aider à faire cela. Mais quelles sont les compétences, même si c'est la famille en fait, mais de trouver la bonne personne. et ensuite de se faire connaître par les personnes clés. Quand je dis les personnes clés, c'est les galeristes, les curateurs. C'est d'aller les voir, c'est de faire un bon dossier qui présente son travail, qui présente l'artiste, c'est-à-dire un portfolio, de dire qui il est, de se présenter, de faire le bon document qui est correct, qu'il va envoyer, de ne pas être paresseux, de faire en sorte de voir tout le monde, de rencontrer tout le monde autant que possible. Pour moi, c'est d'abord ça. Et après, dès qu'il y en a un qui connaît quelqu'un comme moi, quand je vois un bon dossier ou un bon artiste que je trouve intéressant, je vais le recommander aux autres. Et ils font tout ça. Je pense que déjà, pour commencer, ça, c'est important. Je ne sais pas si ça répond à ta question.

  • Ramata

    Complètement. Ce que tu vois vraiment, c'est cette notion de communication. Et aujourd'hui... Donc, quand tu évoques la communication aujourd'hui avec les réseaux sociaux, c'est vrai qu'on a vu des artistes gagner en notoriété parce qu'ils vont partager leurs œuvres à travers les réseaux sociaux. C'est ça que tu évoques ? Ou est-ce que tu as parlé du fait de se faire connaître en allant dans les galeries, en allant se présenter ? Mais il y a aussi les réseaux sociaux. Pour toi, les deux sont aussi importants l'un que l'autre ? Ou est-ce qu'il faut privilégier plutôt le côté galerie ? d'un, voilà, être... Aller prospecter auprès des galeries, j'ai envie de dire ça, même si quand on est dans l'environnement de l'art, on n'aime peut-être pas trop utiliser des termes très commerciaux. La priorité, c'est les galeries ou ce sera les réseaux sociaux ou les deux sont aussi importants que l'autre ?

  • Aïsha

    Les deux sont importants parce que les cibles sont différentes et l'objectif est différent. Les réseaux sociaux, c'est le public. Mais ça marche très bien parce qu'une fois qu'on a fédéré le public, C'est le public qui va demander des expositions. Les galeries, ça c'est le pilier. Quand je dis les galeries, c'est les curateurs aussi, les centres culturels, les gens du secteur. Il faut vraiment qu'ils vous connaissent. Mais ça, ce sera plus pour le côté professionnel. Pour moi, les deux sont importants. D'où l'importance aussi d'avoir au moins une personne qui aide, parce que faire les deux, c'est dur. animer des réseaux sociaux, ce n'est pas simple. Mais je pense que les deux sont importants.

  • Ramata

    Tu as évoqué aussi le fait que tu fais de la curation et que tu as organisé des expositions, des événements. Est-ce que tu peux nous parler justement de cette autre casquette ? Parce que là, ça fait à peine une demi-heure qu'on parle et j'ai affaire à une banquière informaticienne, écrivain,

  • Aïsha

    journaliste.

  • Ramata

    Pour moi, c'est qu'une heure d'interview. On va programmer une autre interview pour pouvoir parler de tout. Au moins,

  • Aïsha

    si tu peux, je suis d'accord. J'ai beaucoup de casquettes. Mais c'est toujours la passion, comme je dis. En réalité, ça ne sort pas. Tout est dans le même sac. Il y a aussi cette fondation dont ils font que je te parle de musique en Afrique. Je ne t'en ai pas parlé. Je ne suis pas sûre que c'était dans ma bio. Je reviendrai dessus, je réponds à ta question. La curation donc. La curation, c'est aussi à force, j'adore les expos vraiment, c'est ce que je préfère. Et à force d'aller dans les expositions et à force de connaître les artistes, de faire leur promotion, de parler de leur travail, de devenir amie avec eux. De temps en temps, je dis tiens, venez, on fait une expo. Donc j'appelle deux, trois amis qui sont des artistes souvent. C'est souvent à la Biennale en fait, parce qu'à la Biennale, il y a... C'est un événement qui dure un mois. Il y a des événements in, organisés par l'État, mais il y a beaucoup de off. Les off, c'est quand je dis il y en a 500 dans la ville, il y en a 500. C'est tous les artistes qui vont organiser quelque chose, tous les espaces culturels. Et ça bouillonne partout dans Dakar. Et donc c'est toujours cet engouement-là qui fait qu'on a envie de partager, on a envie d'être ensemble, on a envie de faire, de créer ensemble. Et là, souvent, je dis, tenez, venez, on va faire quelque chose. Et souvent, c'est des expos collectives. Donc, j'appelle quelques amis et on se retrouve et on organise. Et je me retrouve à faire la curation, ce que je n'ai pas appris non plus, et à faire du commissariat. Et j'ai fait trois biennales. Et d'ailleurs, la dernière, c'était... il y a quelques mois, à la dernière Biennale de Dakar. C'était ma plus grosse expo parce que c'était mon livre qui contient 100 artistes de Dakar que j'ai mis en expo. C'était une expo gigantesque avec de très grands artistes où il y avait des installations, où il y avait de la peinture, où il y avait du graffiti et où on organisait des événements ponctuels chaque semaine. du slam, des concerts, c'était incroyable. Mais ce sont des choses qui se sont faites aussi vraiment spontanément, avec beaucoup d'esprit de partage, de partage et d'échange surtout. C'est ça qui est très beau.

  • Ramata

    Et est-ce que tu peux nous parler, moi je vais profiter de ta présence ici, d'artistes vraiment qui t'ont particulièrement touchée, que tu suis ? tu suis le parcours depuis longtemps et que tu apprécies. Est-ce que tu as des recommandations d'artistes à nous faire ?

  • Aïsha

    Dis-moi un domaine, je te dis un artiste. C'est dans quel domaine ?

  • Ramata

    J'en ai beaucoup. Je sais bien, je sais bien. La peinture ?

  • Aïsha

    La peinture. Je vais vous dire Fanny Senso, qui d'ailleurs expose en ce moment à Paris, à la galerie Christophe Palletier. personnes, quelque chose comme ça, dans le mari.

  • Ramata

    Ok.

  • Aïsha

    Qui a été une... Il y a deux biennales, c'est-à-dire il y a quatre ans, c'était vraiment la star de la biennale. Incroyable artiste que j'aime beaucoup, qui retrace le quotidien d'un marché où il habite, avec des maquettes, avec des peintures, bref, je ne veux pas passer beaucoup de temps sur chaque artiste. Fali Senso. Ensuite, il y a... Kiné Aou, qui est une des femmes les plus connues dans son domaine, qu'on appelle l'application sénégalaise, qui est extraordinaire. Il y a aussi, parmi les anciens, la dame Anta Germaine Gaye, qui fait de la peinture sous-vert, c'est-à-dire qu'elle peint sur le vert, et c'est la pionnière. Je ne peux en citer encore des dizaines.

  • Ramata

    De toute façon, si on veut plus d'infos... Tout à fait, je suis sur les réseaux sociaux.

  • Aïsha

    Je mets les liens de tes réseaux pour qu'on puisse avoir accès aux informations en live.

  • Ramata

    Toi, depuis que tu t'intéresses à l'art, donc tu as évoqué 2009, est-ce que tu as vu, on parle beaucoup de l'évolution de la cote des artistes contemporains africains, on voit de plus en plus de créateurs africains qui ont l'opportunité d'être présents dans des galeries, pas seulement en France, à Paris, mais à l'international. Il y a de plus en plus d'événements d'envergure qui vont faire la part belle à l'art contemporain africain. Toi, de la fenêtre, vu que c'est vraiment, comment dire, tu es plongée dedans depuis 2009, en tout cas, ta plateforme a été créée en 2009, mais c'est un sujet qui t'intéressait déjà depuis longtemps. Comment est-ce que tu perçois cette évolution ?

  • Aïsha

    Écoute, moi je pense qu'en ce moment, c'est comme dans tout. C'est l'Afrique qui est là, en réalité. C'est vrai qu'en art contemporain, comme la peinture, tout ce qui est galerie et tout ça, c'est plus difficile parce que... Parce que voilà, on va dire qu'à Paris, par exemple, avoir des expos d'Africains, ce n'est pas aussi commun, mais ça a beaucoup changé, effectivement. Mais ce que j'ai observé, c'est que les gens retournent beaucoup à l'art africain, que ce soit dans la peinture, dans la mode, dans la musique. Tu as vu la mode, on s'est rencontrés au Galerie Lafayette parce qu'il y avait tous ces créateurs sénégalais. C'est parce que cette créativité africaine... en ce moment, elle est tellement, tellement, tellement bouillonnante et incroyable et belle. Et que les autres, je pense, je le dis souvent, ils ont fait le tour, mais l'Afrique, nous sommes... C'est-à-dire que tu marches dans les rues de Dakar, partout tu vois de l'art, et c'est comme ça. Tu vois les femmes habillées, c'est de l'art. Tu vois les murs, les graffitis, c'est de l'art. Et ça, ça ne se perd pas, c'est là, c'est jusque... il faut en faire quelque chose. Et donc, en ce moment, je ne veux pas dire tendance, c'est péjoratif, mais c'est ça, la créativité est en Afrique. Donc déjà, et ça, les gens l'ont compris, le monde l'a compris. J'ai parlé de monde de tout à l'heure, Chanel est venue à Dakar faire son défilé. On voit tous les gens qui reviennent, qui viennent, qui viennent parce que l'art est là. Après, côté c'est... Côté art contemporain, côté peinture, côté galerie, c'est un peu plus dur, mais je vois la différence effectivement. Je le vois du côté des artistes, je le vois du côté de ceux qui vendent. Et même chez le public, il s'y intéresse de plus en plus, mais aussi parce qu'il y a les réseaux sociaux, qu'il n'y a plus de barrières, que maintenant les jeunes, les artistes les plus jeunes et ceux dans tous les domaines, surtout dans le milieu de la mode, ils s'exposent. et ils montrent et il n'y a aucune barrière, il n'y a aucun complexe. Avant, nos artistes étaient un peu complexés parce que chez nous, faire de l'art, ce n'est pas bien vu. Chez nous, nos sociétés sont très dures. Être dans la culture, ce n'est pas quelque chose dont les parents rêvent pour leurs enfants. Maintenant, ça change. Maintenant, les jeunes s'expriment et assument d'être artistes et le montrent et se connectent. avec les autres à travers le monde. Et il faut connaître leur travail et on voit que les autres découvrent. Et je pense que ça, ça fait évoluer l'art et ça fait évoluer aussi les artistes partout dans le monde.

  • Ramata

    Toi, je pense que tu es jugée partie. Ce que tu évoques là, c'est qu'effectivement, on parle d'Africa Rising, il y a beaucoup de choses qui se passent sur le continent et quelque part. Est-ce que... Tu as le sentiment qu'il y a vraiment quelque chose de beaucoup plus puissant en Afrique. Alors sans être, on va être un peu chauvin, on a tendance à dire, oui, tout est au Sénégal, mais en essayant d'avoir un regard objectif, même si tu es sénégalaise et que tu vas me dire que c'est Dakar qui est devant. Mais est-ce que tu as vraiment le sentiment qu'il y a un engouement vers la créativité africaine, mais parce qu'il y a vraiment énormément de propositions, énormément d'artistes qui émergent ? et qu'il y a une vraie différence par rapport à ce que l'Europe peut proposer, par rapport à ce que la Corée ou d'autres continents ou d'autres régions du monde peuvent proposer. Donc, c'est ce qui fait qu'il y a une différence. Ou est-ce que, quelque part, il y a un essor global de tout ce qui ne vient pas de l'Occident ?

  • Aïsha

    C'est une bonne question. C'est une bonne question. Je réfléchis en même temps. Spontanément, je dirais que oui, moi, je pense qu'il y a un essor en Afrique. Mais maintenant que tu le dis, peut-être aussi que c'est de façon générale l'envie de découvrir autre chose que l'Occident. Mais sincèrement, moi, le talent que je vois en Afrique, la créativité étant plongée dedans, sincèrement, je suis assez bluffée par ce que je vois. Et je me dis que c'est parce que c'est là. Et comme je dis encore une fois, l'Occident a fait le tour. La preuve, il revient beaucoup. ils reviennent beaucoup en Afrique pour s'inspirer et donc moi je crois qu'il y a vraiment quelque chose, je ne sais pas ce qui se passe vraiment mais il se passe un truc en Afrique en ce moment, en art.

  • Ramata

    J'ai l'impression aussi, je me dis peut-être qu'on n'est pas objectif mais c'est absolument correct.

  • Aïsha

    Peut-être, je le sens mais peut-être on est chez nous, on voit mais moi je vois qu'il y a cette créativité, c'est incroyable quand même. Surtout chez les jeunes, c'est incroyable.

  • Ramata

    Moi, j'y crois. Je suis du même avec toi. Ce que je trouve intéressant, c'est que c'est comme s'il y a énormément de courants qui existent, qui ont été classifiés par l'Occident de plein de façons différentes. Et ce qui arrive d'Afrique, c'est complètement différent. Et puis, c'est un mélange plein d'influences différentes avec, bien sûr, les racines qui sont en Afrique, mais qui peuvent parler à quelqu'un aux États-Unis, en Corée, en Amérique latine. Et c'est ça aussi qui fait la force de la créativité africaine, c'est que ça vient du continent, mais ça peut vraiment toucher tout le monde, en fait.

  • Aïsha

    C'est ce que je suis en train de te dire tout à l'heure. C'est-à-dire, ils sont assis dans un village quelque part au Kenya, ils font leurs choses qu'ils mettent sur Internet, et ça touche un jeune Chinois, un jeune Américain, parce que finalement, ils sont connectés.

  • Ramata

    Alors, en termes de créativité à Dakar, Merci. tu parlais de la Biennale et de tes réseaux sociaux qui te permettent un peu de faire la liste de tous les événements qui peuvent se passer au Sénégal. Est-ce que tu déplaces les frontières du Sénégal et est-ce que tu vas aussi parler d'événements qui peuvent se passer en Côte d'Ivoire ? Je sais qu'il y a une grande foire d'art contemporain à l'Écosse, au Nigeria. Est-ce que tu fais aussi une veille sur ce puissant... ce qui peut se passer en dehors de Dakar ?

  • Aïsha

    Une veille, je ne sais pas, mais quand je vois des choses importantes que je pense que les gens doivent savoir, j'en parle. À l'extérieur, c'est souvent le travail, c'est souvent des missions, c'est souvent des choses où on m'invite à venir participer, souvent des conférences, des panels. Mais en même temps, on est en Afrique et quand je vois un événement, un grand événement africain, forcément, je peux en parler. Mais vraiment, c'est plus, tu vois, à Côte d'Ivoire, Afrique du Sud, dont j'ai parlé tout à l'heure, j'en parle pas mal, mais parce que je suis souvent là-bas pour le travail avec cette fondation de musique. Et donc, c'est aussi ça qui est beau, parce que cela me permet de découvrir. Les autres pays africains, c'est à travers la culture, moi, que j'ai commencé à voyager autant. À la banque, je prenais mon congé, je venais à Paris et puis c'est tout. Quand j'ai commencé à faire ce travail, donc, au bout de deux ans, par exemple, j'ai été appelée en Afrique du Sud pour rejoindre un projet qui est une plateforme dédiée à l'industrie musicale. Et comme j'avais l'expérience à Jean-Dakar... et m'ont d'abord appelée juste pour voir si je pouvais collaborer avec eux.

  • Ramata

    Donc maintenant, j'aimerais que tu nous parles de la fondation que tu évoquais tout à l'heure. Puisque c'est une de tes dernières initiatives liées à l'art et la culture, mais là, on est plus centré sur la musique. Donc, est-ce que tu peux nous parler de cette fondation et de ton rôle dans cette fondation ?

  • Aïsha

    Musique in Africa. Je suis cofondatrice de la fondation parce que... Il y a eu d'abord la plateforme online et puis il y a eu la fondation. C'est destiné à booster l'industrie de la musique en Afrique. L'idée était de dire que c'est bien beau d'être connecté au reste du monde avec les grands, mais c'est bien que les Africains se connaissent et se retrouvent entre eux. C'était quand même il y a un moment, c'était en 2012, que nous avons fondé Musique in Africa. Je suis rentrée dans le board et j'ai été... J'étais dans le Bode pendant cinq ans, dans deux où j'étais présidente. C'est un milieu très, très masculin dans la fondation. Il y avait les membres, c'était vraiment, il y avait pratiquement cinq femmes sur peut-être une centaine. Et je me suis retrouvée présidente, donc entourée d'hommes du secteur dans un milieu très, très masculin. C'était une très belle expérience. Et je suis très fière parce que ça a tellement grandi en dix ans, c'est devenu vraiment incontournable. Et la Fondation développe de magnifiques projets qui soutiennent la musique en Afrique. Mais là aussi, récemment, quand j'ai fini mon mandat, j'ai décidé de me consacrer entièrement à mon agence. Donc je suis, on va dire, membre d'honneur. Maintenant, on n'est pas vraiment dans les décisions. mais très très fiers de ce que nous avons accompli jusqu'ici.

  • Ramata

    Très bien. Et est-ce que tu as dit, c'est quoi les next projets pour Aïcha ? Est-ce qu'il y a des choses dont tu peux nous parler ? J'imagine que tu es toujours dans le milieu de l'art et de la culture, mais comme on peut le voir là, tu as commencé par créer une plateforme, tu as endossé cette casquette de journaliste, puis curatrice, de consultante, de conférencière, d'écrivain. Donc, tu as été à la tête de cette fondation avec ce focus sur la musique. Qu'est-ce que tu nous prépares ?

  • Aïsha

    Alors, j'ai beaucoup de choses que je voudrais faire. Il y a quelques années, j'avais commencé un projet d'incubateur, juste avant de commencer mon livre. Donc, j'avais ce projet d'incubateur culturel et le livre m'est tombé dessus presque. Et je me suis consacrée au livre qui m'a pris trois ans d'années de travail. Et après ces trois années, j'étais en promo constamment. Donc là, j'aimerais beaucoup reprendre l'incubateur et un fonds pour les artistes. J'ai beaucoup de projets personnels avec Sylvie Woro, mais dont je ne peux pas parler maintenant. Ici en France, j'ai rejoint un autre board d'une organisation dédiée à l'art aussi. Ça aussi, j'en suis très fière. Mais ils n'ont pas encore communiqué officiellement. Je te tiendrai au courant. Et donc, il y a tous ces petits projets aussi qui ne sont pas gros, mais auxquels je tiens au Sénégal à accompagner des femmes artistes, à mentorer la transmission. Ça compte beaucoup pour moi. Je le fais beaucoup de façon officieuse, on va dire. Je cherche de voir un moyen de le rendre plus officiel pour que je... puisse accorder vraiment du temps à ça, au-delà de ce que je fais en ce moment comme accompagnement de jeunes artistes. Et en parlant justement des autres pays, ça aussi, tu vois, je reçois beaucoup de messages de gens qui sont en Côte d'Ivoire, au Burkina, qui me disent, on est inspiré par votre travail, est-ce que vous pouvez nous mentorer ? Donc je le fais pas mal et ça me touche beaucoup et j'aime beaucoup cela, cette connexion avec ces autres pays-là, de cette façon-là, plutôt que par la communication ou en parlant juste d'un artiste. Il y a ce côté où il y a une vraie connexion que j'aime beaucoup.

  • Ramata

    Très bien, on a hâte de voir la suite. On arrive à la fin de cette interview. Moi, j'étais ravie d'avoir l'opportunité de découvrir ton profil et d'en savoir un peu plus sur toutes tes initiatives. Je mettrais bien, comme je l'évoquais tout à l'heure, en note de l'épisode, les liens vers tes comptes sur les réseaux sociaux et également le lien vers ton livre, de manière à ce qu'on puisse vraiment en savoir encore davantage sur tout ce que tu peux partager. Et puis, je te dis merci.

  • Aïsha

    Mais c'est moi qui te remercie, Ramatha. Je suis très contente aussi de t'avoir rencontrée déjà. de découvrir ce que tu fais. Et merci de donner la parole parce que c'est important. Et c'est un secteur où on ne parle pas assez. Et tu as beaucoup de générosité et une très belle écoute que j'apprécie beaucoup, beaucoup, beaucoup. Et j'ai été très, très contente de venir, de faire cette discussion avec toi. Merci infiniment.

  • Ramata

    Écoute, merci à toi. Je te dis à très vite en Afrique ou ailleurs.

  • Aïsha

    À très vite. Merci.

  • Ramata

    Merci d'avoir écouté l'épisode jusqu'au bout. Je vous invite à pratiquer quelques petits gestes à impact fort pour m'aider à gagner de la visibilité sur ce podcast. Vous pouvez partager l'épisode à trois de vos amis. Vous pouvez laisser un commentaire sur Apple Podcasts ou Spotify. Je vous invite également à cliquer sur les cinq étoiles pour donner de la force. Je vous dis à très vite en Afrique. Bye.

Chapters

  • Introduction au podcast et présentation d'Aïcha Deme

    01:00

  • Parcours d'Aïcha Deme et ses débuts dans la culture

    02:05

  • Transition vers le secteur culturel et création d'Agenda Dakar

    03:30

  • Les défis de l'entrepreneuriat culturel en Afrique

    06:18

  • L'importance de la communication pour les artistes

    07:42

  • Rôle de consultante et conseils pour les artistes

    12:06

  • Évolution de la plateforme Agenda Dakar et ses impacts

    14:07

  • Kits de survie pour les événements culturels

    18:14

  • Conseils pour les artistes contemporains africains

    24:40

  • Projets futurs et engagement d'Aïcha Deme

    29:23

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Description

Comment quitter une carrière confortable pour bâtir un empire par passion et devenir une référence dans le monde de l'art ?


Cet épisode est une véritable masterclass avec Aïsha Deme, spécialiste des arts et des industries culturelles en Afrique ! Découvrez le parcours inspirant d'une pionnière qui a transformé sa passion en une carrière influente.

Dans cette interview, Aïsha nous offre des leçons inestimables sur :

  • L'audace d'entreprendre : Comment elle a quitté une carrière d'informaticienne bancaire pour se lancer, avec naïveté mais détermination, dans un domaine qui la faisait vibrer.

  • La persévérance du pionnier : Les défis des débuts d'Agenda Dakar, première plateforme culturelle digitale au Sénégal, et comment deux ans sans salaire ont forgé sa résilience.

  • Le positionnement unique : La création des "kits de survie" pour les grands événements culturels sénégalais (Biennale de Dakar, Festival de Jazz), devenus des outils indispensables pour naviguer la scène artistique.

  • Devenir une référence : Comment son agence Siriworo accompagne les artistes et les organisations, structurant des projets et bâtissant une crédibilité solide grâce à une éthique rigoureuse.

  • Le rayonnement de l'Art Africain : Son regard d'experte sur le "bouillonnement incroyable" de la créativité sur le continent et comment l'art africain s'impose sur la scène mondiale.

L'histoire d'Aïsha Deme est une source d'inspiration pour tout entrepreneur créatif. Elle prouve que la passion, l'engagement et la capacité à saisir les opportunités sont les clés pour transformer un rêve en une référence incontournable.


Prêt(e) à découvrir les secrets de son succès ? Écoutez cette masterclass de l'art !


Africa Fashion Tour poursuit chaque semaine l'exploration des industries culturelles et créatives africaines avec des interviews d'entrepreneurs passionnés qui s'interrogent sur les questions de diversité et de représentation. Chacun des invités du podcast est passé du questionnement à l'action pour proposer des solutions concrètes, des business model vertueux pour promouvoir l'Afrique à travers les soft power.


J’en profite pour remercier les auditeur.e.s de plus en plus nombreux de ce podcast. Pour découvrir en avant première les dernières interviews et analyses de l'écosystème de la mode africaine, abonnez-vous à la ⁠⁠⁠Newsletter Africa Fashion Tour⁠⁠⁠.


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A très vite en Afrique ou ailleurs


Ramata Diallo 


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Aïsha

    Pour moi, c'est de dire comment survivre à la biennale. D'abord, savoir déjà les dates exactes, qui vient, qui ne vient pas. Savoir comment réserver un hôtel, savoir comment accéder. Parce qu'il y a des gens qui vont vraiment demander est-ce qu'il faut payer. Alors que pour certaines personnes, c'est une information évidente. Et moi, je découvre avec tous les messages que je reçois de personnes que je ne connais pas, qu'en fait, les gens ne savent pas. Les gens ne savent pas ce que nous pensons être évident et que nous ne communiquons pas. Qu'il faut s'accréditer juste pour aller voir un île. Que pour le festival de jazz, le même bat, je peux marcher par-ci, par-là. Mais qu'aussi, il faut s'y mettre très tôt pour trouver un hébergement. Mais comment le trouver ? Il y a des personnes à Saint-Louis qui peuvent aider. Donc, des petites choses comme ça qui te font survivre dans ce festival, d'où le nom de survie.

  • Ramata

    Bienvenue dans ce nouvel épisode du podcast Africa Fashion Tour. Je vous emmène avec moi à la rencontre de créateurs basés sur le continent africain. Je vous invite à voyager à Abidjan, Dakar ou Bamako pour découvrir les parcours de professionnels talentueux, responsables et ambitieux. Au fil des interviews, je me rends compte que chaque entrepreneur veut contribuer au rayonnement de la créativité africaine sur le continent et au-delà. Ce podcast est un moyen de sortir des clichés du boubou et du wax. pour représenter un éventail de tissus, de savoir-faire et de créativité, trop souvent sous-représentés. Je suis Ramata Diallo. Je suis professeure de marketing dans des écoles de mode parisiennes et je suis également consultante spécialisée dans l'accompagnement de porteurs de projets qui veulent lancer leur marque de mode. En 2017, j'ai hésité à ma première Fashion Week en Afrique. Et depuis, je voyage régulièrement sur le continent pour aller à la rencontre de ceux et celles qui font la mode en Afrique. Le podcast est le moyen que j'ai trouvé pour partager au plus grand nombre une autre vision de la mode africaine. Aujourd'hui, je suis en compagnie d'Aïcha Deme. Elle est spécialiste des arts et des industries culturelles en Afrique. Elle a fondé Siriworo, une structure d'ingénierie culturelle qui accompagne des artistes et des organisations dans leurs initiatives créatives. Je l'ai invitée aujourd'hui pour qu'elle puisse nous parler de son parcours et de ses différentes initiatives. Bienvenue Aïcha, comment vas-tu ?

  • Aïsha

    Merci beaucoup Ramata, je vais très bien, merci.

  • Ramata

    Alors, on va commencer cette interview comme je le fais avec chacun de mes invités. Je vais te demander de te présenter.

  • Aïsha

    Alors, je pense que tu m'as déjà présenté et tu as dit l'essentiel. Je rajouterai que je suis une grande, grande passionnée d'art et de culture, très heureuse et fière de travailler dans ce domaine en Afrique. Quoi d'autre ? Je suis Sénégalaise, je suis née et j'ai grandi au Sénégal, j'ai étudié là-bas. je suis contente de travailler de ma passion, on en reparlera plus tard parce que j'ai changé de métier pour ça sinon je pense que tu as dit l'essentiel dans ta présentation

  • Ramata

    Très bien, ben écoute tu m'offres une belle transition, tu dis que t'es contente de travailler dans ta passion et donc a priori t'es peut-être pas dans ce secteur-là le secteur des industries culturelles et de l'art au départ Ah ! Donc, comment est-ce que ta carrière a commencé ? Quel a été ton parcours au niveau de tes études ? Et ensuite, quels ont été tes premiers métiers ?

  • Aïsha

    Alors, moi, je suis une scientifique, une informaticienne. Et je viens de la banque. J'ai fait 50 banques en tant qu'informaticienne. J'ai fait des études informatiques, donc. Mais j'ai toujours été très, très passionnée d'art et de culture. Depuis enfant, j'allais beaucoup voir les expos. J'allais beaucoup dans les concerts. au cinéma, au théâtre. Et puis un jour, il y a eu plusieurs choses. C'est d'abord l'envie de changer de métier, même si c'est un métier que j'aimais beaucoup au début, mais à un moment, ça a devenu routinier. Et puis je me suis rendue compte qu'il n'y avait rien sur Internet au Sénégal qui était destiné à parler d'art et de culture. Mais vraiment rien. C'est-à-dire que quand on voulait sortir voir une exposition, il fallait chercher. J'ai décidé donc de monter une plateforme, la première au Sénégal, qui faisait la promotion des événements culturels, qui était un agenda. Agenda Dakar, ça s'appelait en 2009, avec un ami, nous avons fait ça ensemble. Et c'est comme ça que je suis arrivée dans la culture, Ramata.

  • Ramata

    Très bien, donc tu as toujours eu cette passion, comme tu le dis, pour l'art, pour la culture. Toi, est-ce que tu avais une âme d'artiste ou tu étais plutôt spectatrice ?

  • Aïsha

    Non, toujours spectatrice, toujours. Grande consommatrice, mais tellement passionnée que vraiment j'allais à la recherche. Je me suis rendue compte que je faisais tout, tout, tout pour avoir les informations. Je sortais de la banque à 18h, j'allais chercher des expos. Et j'ai fini aussi par connaître les artistes à force d'être présente dans le milieu. Ce qui m'a beaucoup aidée par la suite, parce que quand j'ai monté cette plateforme, je les appelais personnellement pour avoir leur programme, pour le mettre sur mon site. J'ai commencé à les interviewer et donc à écrire. Beaucoup pensent que je suis journaliste en passant, mais je n'ai pas fait d'études de journalisme. mais j'ai beaucoup écrit j'ai beaucoup chroniqué j'ai été chroniqueuse du monde afrique j'ai beaucoup écrit sur mes plateformes personnelles et j'ai fait un livre aussi dédié à l'art à Dakar, qui a été nominé sélection du monde justement en 2022. Et donc c'est juste, je consommais beaucoup. À force de consommer, je connaissais plus, j'apprenais plus, je connaissais mieux les pratiques. Et moi-même, j'ai commencé à pratiquer certaines choses, comme écrire, comme faire de la curation, organiser des expositions. C'est avec le temps.

  • Ramata

    Et à partir de... Donc, il y a eu toute une partie où tu faisais ça un peu en side. Ce n'était même pas un business, c'était une passion. Donc, en parallèle de la banque, à partir de quel moment tu te dis, bon là, j'arrête, je vais me consacrer, je vais consacrer en tout cas mon temps à cette passion ?

  • Aïsha

    C'est comme j'ai dit, c'est à partir du moment où à un instant, parce que j'ai toujours besoin justement d'être passionnée quand je fais quelque chose. C'est à partir du moment où je ne le ressentais pas. plus à la banque et dans mon métier d'informaticienne que j'ai décidé d'aller faire ce qui me passionnait vraiment. Et donc, c'était une bonne transition, on va dire, parce que je suis restée dans le digital quand même avec la plateforme Agence Dakar, mais je ne m'occupais que de culture. Mais c'est vraiment ce moment-là, en 2009, où j'ai dit, bon, d'accord, on va y aller. Ce qui était très risqué parce que c'était quitter un... travail très stable et commencer à zéro une vie d'entrepreneur. Et je n'avais aucune idée de ce que c'était en réalité. Je suis juste partie avec ma passion, mon meilleur ami et moi. On a été un peu fous, mais voilà.

  • Ramata

    Et du coup, c'est intéressant ce que tu dis là. Est-ce que tu avais une idée d'un business model, de comment est-ce que tu allais te rémunérer ? Comment dire ? Parce qu'au départ, on est... passionnés par la culture, par l'art, il y a un côté créatif qui nous fait vibrer, mais à un moment donné, il faut relier ça à un business model et il faut des rentrées d'argent. Donc toi, tu avais une idée précise de comment tu voulais faire les choses ?

  • Aïsha

    Absolument pas. C'était une catastrophe. Je n'avais aucune idée et on était naïfs, on va dire, et rêveurs, parce qu'on connaissait une plateforme très connue au Sénégal où tout le monde se connectait tous les jours, qui se faisait beaucoup Beaucoup d'argent, c'était une plateforme d'information en ligne qui se faisait beaucoup d'argent avec la publicité, les bannières à l'époque de publicité. Et nous, on se disait, on fait une plateforme gratuite parce que la culture, on sait que ça ne paie pas beaucoup et qu'on allait se faire rémunérer avec les pubs. Mais c'était une catastrophe parce que pendant une année et demie ou deux ans, nous n'avons pas eu de salaire parce que les pubs ne venaient pas. Au début, les gens étaient assez réticents. sur une plateforme culturelle. Ce qu'ils connaissaient, c'était les flyers, les affiches. C'était 2009 dont je parle. Donc même Facebook, c'était juste parler entre amis. Il n'y avait pas encore les événements pour promouvoir. Et donc il fallait shifter cela. Et c'est de ça dont je suis fière parce que nous sommes arrivés à le faire. Au bout de deux ans quand même. Au bout de deux ans, les expats ont commencé beaucoup à utiliser le site et les partenaires ont commencé à arriver et c'est à partir de là. À partir de là, nous avons pu réaliser quelque chose. Mais nous sommes restés deux ans où on fonctionnait avec nos économies. Et à un moment, bien évidemment, c'était difficile. C'était très dur au début. Il faut dire la vérité quand même.

  • Ramata

    Donc, c'est intéressant de revenir sur un petit peu la naïveté que l'on a quand on se lance dans un projet de passion, même si toi, tu avais un background de banquier quelque part. Donc, on aurait pu supposer que tu avais un business plan. Mais finalement, de ce que tu me dis, tu es un peu allé avec... beaucoup de naïveté au départ.

  • Aïsha

    C'est fou, mais ça continue. Et c'est pour ça que j'en parle souvent dans mes talks et dans mes... partout où je suis invitée à parler. L'entrepreneuriat, on fonce toujours en disant que c'est beau. Tu vois, on montre toujours le côté très rêveur. Mais il faut dire la vérité. Il faut vraiment que si on décide d'entreprendre, qu'on soit sûr au moins d'avoir un modèle qui marche. Parce que sinon, clairement, on n'y arrive pas. J'étais dans une banque, je suis scientifique, ingénieur informatique, structuré et tout, mais là, j'arrive avec une passion, beaucoup de rêves. Et avec un ami aussi rêveur que moi, on a vraiment raté le crochet au début.

  • Ramata

    C'est intéressant aussi parce que souvent, quand il y a des associés, on dit qu'il faut qu'il y ait quelqu'un de plus pragmatique, rationnel et quelqu'un peut-être de plus créatif. Comme ça, le duo va marcher parce qu'on a le financé d'un côté et puis le créatif. Mais là, de ce que tu dis, il y a deux rêveurs créatifs. Oui,

  • Aïsha

    exactement. C'est ça qui a été le cas, mais en même temps. Ça apporte aussi, il faut dire la vérité, parce que plusieurs fois, par exemple, moi j'ai été découragée, j'ai voulu abandonner. Et en réalité, mon associé était beaucoup plus rêveur que moi et beaucoup plus optimiste. Et tout le temps, il me disait non, non, non, on ne peut pas, ça va marcher, ça va marcher. Si j'avais été toute seule, je pense qu'au bout d'une année, j'aurais laissé tomber. Mais lui a continué de croire et c'est lui qui d'ailleurs continue de chercher des partenariats. sponsor et c'est comme ça qu'on a réussi en fait finalement à exploser d'un coup. Nous avons même eu une subvention de la coopération espagnole qui nous a permis de recruter une grosse équipe de nous organiser mieux et de dérouler d'autres projets qui en fait nous ont permis d'avoir de l'argent. Et sans son côté tellement rêveur, tellement optimiste qui croit que tout toujours va bien se passer. Je pense que j'aurais abandonné en réalité. Je serais restée dans la culture, mais je serais peut-être allée trouver un poste où je serais salariée et travaillée dans la culture, je pense.

  • Ramata

    Très bien. Donc, dans ce que tu évoques, en fait, c'est quand tu parles de 2009 pour le lancement de cette plateforme en ligne qui va recenser tous les événements du Sénégal. C'est vrai que c'était très précurseur. C'était vraiment les débuts de ce type de plateforme-là. Oui, vraiment. Et tu expliques que du coup, pour faire vivre cette plateforme, l'idée c'est que tu t'es mise à rechercher les informations, à écrire des chroniques, à rencontrer les différents artistes. Du coup, c'est des nouveaux métiers que tu as appris.

  • Aïsha

    Absolument, c'est des nouveaux métiers. Et je me découvre des capacités que je ne connaissais pas. Mais c'était tellement exaltant pour moi de faire ça. que je ne me rendais même pas compte en réalité. Je travaillais énormément, énormément. Je passais mes nuits à créer le contenu, c'est-à-dire à écrire, à fermer, à mettre le contenu de l'agenda, les journées à travailler au bureau. Je ne dormais littéralement pas. Mais effectivement, c'est des métiers que j'ai appris sur le tard.

  • Ramata

    Et alors, vous avez finalement, quand on dit pendant deux ans, vous n'avez pas gagné d'argent, et puis ensuite... on va dire les graines que vous avez semées, elles ont commencé à pousser, mais au bout d'un certain temps, finalement, quand on prend du recul, deux ans, c'est assez long que ça.

  • Aïsha

    Ça dépend. Ce n'est pas si long peut-être, mais quand c'est sans salaire, c'est quand même, ça paraît 10. Je vais être sincère. Mais finalement, on aurait pu attendre plus. On aurait pu attendre plus que ça. Et comme tu as dit, c'était semer des graines. Je suis contente que tu dises cette expression que j'utilise énormément. J'ai même un hashtag, c'est mes des graines. Parce que quand on insiste finalement, ça finit toujours par payer.

  • Ramata

    Et aujourd'hui, l'agenda, c'est toujours une plateforme qui est d'actualité ou comment ça a évolué finalement cette plateforme ? Puisque vous avez eu des subventions, vous avez eu vos sponsors. J'imagine qu'il y avait une audience. Si c'était une plateforme précurseur ? Tout de suite, vous avez une audience assez importante qui s'habitue à venir sur ton site, qui veut lire tes chroniques. Et du coup, ça fait vraiment une monnaie d'échange avec des sponsors. Comment est-ce qu'elle a évolué, la plateforme, et où elle en est aujourd'hui ?

  • Aïsha

    Alors, on a eu une audience à partir de 2010. D'ailleurs, ça a commencé avec le Festival, le Festman, le Festival Mondial des Arts Nègres qui avait été organisé par le président Wad. Et l'organisation était très compliquée, très. Ça s'est fait vraiment, il y a des choses qui se faisaient à la dernière minute. Et donc, côté communication, ils avaient un problème. Et moi, j'étais très tenace. Moi, je trouvais l'info comme d'habitude. Et finalement, notre plateforme était devenue la plateforme où on savait ce qui se passait pendant tout un mois au Sénégal, où c'était bouillonnant, où on avait tous les grands artistes du monde, que ce soit dans le rap. dans le jazz, dans les arts visuels et tout ça, vraiment. Et donc là, il y a eu un rush. Après ça, ça a un peu baissé, mais comme tu viens de dire... Nous avons eu donc ces partenaires et puis surtout la subvention qui était assez grosse, qui nous a permis de recruter des équipes et de développer d'autres choses. Parce que les gens ont commencé à nous contacter en nous disant vous communiquez bien, vous communiquez très bien sur Internet, ce qui ne se faisait pas beaucoup. Et c'est là que les artistes venaient me voir, Aïcha je veux que tu communiques sur mon projet, Aïcha je veux que tu fasses ceci avec moi. Et donc, on a continué avec la plateforme et ces nouvelles équipes. Nous sommes passés de deux personnes à douze personnes. Au bout de cinq années, c'était vraiment au top, ça marchait bien. C'était en 2014. Et comme j'avais beaucoup ces sollicitations-là dont je parle aussi, j'ai décidé de laisser l'équipe continuer la plateforme Agence Dakar. Et moi, j'ai monté. Je suis allée faire de la consultance. Et donc, d'aller travailler justement avec... tel artiste sur tel album, avec tel artiste sur son expo, avec l'autre sur son film. Malheureusement, ce qui est un peu triste, c'est qu'après, la plateforme a perdu son... Avec les équipes, c'était devenu un peu difficile parce qu'il y avait les autres projets à gérer, il y avait... Voilà, ça arrive. Et finalement, elle est juste, elle ne marche plus depuis. Le site existe, le nom existe. Mais ils ont été concentrés parce que moi, j'ai cédé, j'ai passé la main pour faire la consultance, ce que je fais toujours. Mon bonheur est que ma communauté est restée parce que cette communauté était très fidèle et très belle. Et c'est pour elle que j'écrivais énormément pour faire découvrir qui est l'artiste, pour faire découvrir ce qui se passe, pour dire qu'il y a tel espace qu'il faut absolument visiter. Et ça, j'ai dû continuer à le faire sur mes réseaux sociaux parce que la communauté était toujours là. Chaque fois qu'il y a un événement majeur comme la Biennale, comme le Festival de jazz, la communauté est là qui me demande, Aïcha, qu'est-ce que tu nous recommandes ? Quel expo nous devons aller voir ? Et là, donc, j'ai développé au-delà de mon activité de consultante avec l'agence, je suis restée quand même celle qui faisait quand même l'agenda sur mes réseaux sociaux, beaucoup. J'écris beaucoup toujours et j'ai des kits de survie pour chaque grand événement culturel au Sénégal. Par exemple, il y a un kit de survie de la Biennale qui dira sur 500 expos qui se passent à Dakar, voici celles que je recommande, voici les artistes à découvrir, ce genre de choses. Parce que ça aide beaucoup de personnes qui ne savent pas. L'information est toujours assez difficile. Et surtout que c'est juste qu'ils sont là, ils sont là constamment, et qu'au final, je pense que je leur dois un peu. Et il y a cette relation entre nous qui est très belle. Donc, je continue de faire ça. Je regrette un peu que l'agenda ne marche plus, mais à un moment, il faut accepter que c'est comme ça, puisque j'étais partie de toute façon.

  • Ramata

    C'est intéressant que tu partages, en fait, que tu continues, finalement, tu restes sur ta passion de départ, finalement. Ce que tu as commencé par toi, tu continues à le faire à travers... tes réseaux sociaux, que la plateforme allait continuer ou pas. Et pourquoi est-ce que tu as appelé ça des kits de survie ? Parce que c'est une expression qui est quand même très particulière.

  • Aïsha

    C'est littéralement ça. Là, je vais être très franche. J'ai commencé avec, comme j'ai dit, le festival de jazz et la biennale. Organiser des événements de cette envergure, c'est très difficile. Et dans nos pays, on est tellement concentré, tellement pris par les choses au jour le jour, c'est-à-dire les espaces, les artistes, comment faire venir les œuvres, la logistique, qu'on oublie souvent la com. Les gens s'y mettent en général vers la fin, à la dernière minute. Il se trouve que des événements comme ça, c'est aussi des événements qui attirent du monde. Par exemple, à la Biennale, les gens viennent de partout dans le monde pour venir visiter. Le festival de jazz aussi. Donc, des mois avant, ils ont besoin de savoir ce qui se passe, comment ça se passe, qui vient, qui ne vient pas. Mais c'est un foulard tard à sortir. Et c'est pour ça que j'ai appelé le kit le kit de survie, parce que pour moi, c'est de dire comment survivre à la biennale. D'abord, savoir déjà les dates exactes, qui vient, qui ne vient pas. Savoir comment réserver un hôtel, savoir comment accéder. Parce qu'il y a des gens qui vont vraiment demander est-ce qu'il faut payer, alors que pour certaines personnes c'est une information évidente. Et moi je découvre avec tous les messages que je reçois de personnes que je ne connais pas. En fait, les gens ne savent pas. Les gens ne savent pas ce que nous pensons être évident et que nous ne communiquons pas. Il faut s'accréditer juste pour aller voir, que pour le festival de jazz, le même badge peut marcher par-ci, par-là. Mais aussi, il faut s'y mettre très tôt pour trouver un hébergement. Mais comment le trouver ? Il y a des personnes à Saint-Louis qui peuvent aider. Donc, des petites choses comme ça... te font survivre dans ce festival, d'où le nom Kit de survie, que finalement les gens apprécient beaucoup. Et c'est aussi comme un kit, c'est comme quand on va en forêt faire du camping. Je le vois un peu comme ça. Les outils qui permettent de traverser ces moments-là.

  • Ramata

    Et ce que tu évoques aussi, tu évoques tes missions de conseil. Donc, au service des artistes, je pense qu'aussi au service d'un certain nombre d'organisations, est-ce que tu peux évoquer ces parties-là ? Parce qu'encore une fois, toi, tu as un background scientifique, informatique, banquier. Même si tu as pu faire du conseil, ça n'a vraiment rien à voir avec le conseil auprès d'artistes. Donc, est-ce que tu peux parler de comment tu as pris cette casquette ?

  • Aïsha

    Ça aussi, c'est venu naturellement, c'est venu par leur demande. Quand je suis allée, moi, faire du consulting, c'était plus, par exemple, quelqu'un qui lance un album, je l'aide dans la communication, dans tout le déroulement du process, ce que je sais faire très bien. Mais au fur et à mesure, comme j'ai dit, j'ai appris beaucoup sur le tard et aussi j'ai appris à connaître très bien le milieu, vraiment. Mais parce que je suis plongée dedans constamment. C'est-à-dire, je suis constamment dedans. Si je n'écris pas, si je ne suis pas devant l'ordinateur en train de travailler sur les projets culturels, c'est-à-dire, je suis dans une expo, je suis à un festival. Et c'est là que je me rends compte qu'à force de les côtoyer, qu'à force d'être là, j'observe aussi. C'est peut-être le côté, justement, scientifique. J'observe et j'apprends avec tout, dans tout, partout. Là, en ce moment, je te parle, j'apprends. C'est ma nature. Et donc, je suis arrivée à vraiment connaître très, très bien le milieu et connaître très, très bien aussi les artistes. Je connais bien les profils, je connais leurs points forts, leurs points faibles. Et ce qui fait que spontanément aussi, je donnais même des conseils. J'ai beaucoup fait de bénévolat. J'en fais toujours, je décide d'arrêter, mais c'est difficile. Dès que je vois même un artiste que je ne connais pas, je peux voir sur ses réseaux sociaux quelque chose et puis lui écrire derrière. pour dire je pense que là ce serait bien si tu faisais ci, si tu faisais ça. Mais souvent ils sont venus vers moi donc pour me dire Aïcha, j'aimerais bien qu'on travaille ensemble sur tel projet. Et je me retrouve soit à structurer un projet, soit à organiser, soit à mobiliser parce que je mobilise beaucoup aussi. Mais c'est très naturellement que c'est arrivé. Au fur et à mesure, je rajoute dans mes services. Quand je vois que je maîtrise bien quelque chose, je me dis d'accord, ça maintenant je peux. je peux en faire un service. Parce qu'il est aussi très important pour moi que quand je travaille, que ce soit bien fait. Parce que j'ai réussi avec les années à construire une crédibilité et qu'au Sénégal, dès qu'on dit Aïcha Dem, tout le monde dira, ah d'accord, ça veut dire que ça va bien se passer. Et que ça, je le dis d'ailleurs toujours à mes équipes, je n'ai pas le droit de le gâcher ou de le perdre. Donc je travaille sur des choses et des projets très différents, mais je ne m'engage que là où je suis sûre que je peux bien faire le travail, que j'ai les compétences.

  • Ramata

    Très bien, c'est une éthique qui est indispensable pour pouvoir se préserver et durer en fait, parce que quand il y a un partenariat, une collaboration qui ne se passe pas bien, en fait du coup on n'est pas rappelé. Et puis par contre, quand on est reconnu, identifié,

  • Aïsha

    C'est ça, c'est un petit mot. Les gens se disent les choses. Et donc, quand ça se passe mal, tout le monde le sait. Quand ça se passe bien, tout le monde le sait. Et souvent, cela se voit aussi dans le travail.

  • Ramata

    Est-ce que, donc, tu évoquais le kit de survie pour quelqu'un qui vient, j'imagine, visiter une expo, qui parle de conseil. Quels sont les conseils pour un artiste contemporain africain qui se lance ? Pour toi, quelles sont les priorités ? Je ne vais pas te demander une mission de conseil gratuite. Je mettrai tes coordonnées avec toutes les informations. Comment accéder à tes services ? Est-ce que tu peux nous partager des conseils clés pour quelqu'un qui se lance ?

  • Aïsha

    Alors pour Dakar, par exemple, je dirais tout faire d'abord pour se faire connaître. Et c'est là que ça va être la communication. Parce que quand l'artiste arrive, il arrive avec son talent et sur sa créativité. Je ne peux pas me permettre de faire des remarques parce que chacun a son... Voilà, le travail de l'artiste, c'est le travail de l'artiste qui s'exprime. Maintenant, il arrive à Dakar, il démarre. C'est souvent ça le problème avec ces artistes qui démarrent ou qui travaillent depuis longtemps. C'est d'abord la communication et ensuite l'entourage, l'équipe, parce qu'ils sont seuls. Ils sont seuls, ils veulent tout faire. L'artiste, il doit créer. Maintenant, s'il veut à la fois créer, faire son marketing, faire son networking. trouver les partenaires, forcément, il ne peut pas y arriver. Ce qu'il va faire, il va appeler un ami, il va appeler un frère, il va appeler la famille, il va s'entourer de ces gens-là qui n'ont pas forcément les compétences, donc cela finit mal. Donc moi, souvent, ce que je conseille, c'est de justement trouver une personne qui peut aider à faire cela. Mais quelles sont les compétences, même si c'est la famille en fait, mais de trouver la bonne personne. et ensuite de se faire connaître par les personnes clés. Quand je dis les personnes clés, c'est les galeristes, les curateurs. C'est d'aller les voir, c'est de faire un bon dossier qui présente son travail, qui présente l'artiste, c'est-à-dire un portfolio, de dire qui il est, de se présenter, de faire le bon document qui est correct, qu'il va envoyer, de ne pas être paresseux, de faire en sorte de voir tout le monde, de rencontrer tout le monde autant que possible. Pour moi, c'est d'abord ça. Et après, dès qu'il y en a un qui connaît quelqu'un comme moi, quand je vois un bon dossier ou un bon artiste que je trouve intéressant, je vais le recommander aux autres. Et ils font tout ça. Je pense que déjà, pour commencer, ça, c'est important. Je ne sais pas si ça répond à ta question.

  • Ramata

    Complètement. Ce que tu vois vraiment, c'est cette notion de communication. Et aujourd'hui... Donc, quand tu évoques la communication aujourd'hui avec les réseaux sociaux, c'est vrai qu'on a vu des artistes gagner en notoriété parce qu'ils vont partager leurs œuvres à travers les réseaux sociaux. C'est ça que tu évoques ? Ou est-ce que tu as parlé du fait de se faire connaître en allant dans les galeries, en allant se présenter ? Mais il y a aussi les réseaux sociaux. Pour toi, les deux sont aussi importants l'un que l'autre ? Ou est-ce qu'il faut privilégier plutôt le côté galerie ? d'un, voilà, être... Aller prospecter auprès des galeries, j'ai envie de dire ça, même si quand on est dans l'environnement de l'art, on n'aime peut-être pas trop utiliser des termes très commerciaux. La priorité, c'est les galeries ou ce sera les réseaux sociaux ou les deux sont aussi importants que l'autre ?

  • Aïsha

    Les deux sont importants parce que les cibles sont différentes et l'objectif est différent. Les réseaux sociaux, c'est le public. Mais ça marche très bien parce qu'une fois qu'on a fédéré le public, C'est le public qui va demander des expositions. Les galeries, ça c'est le pilier. Quand je dis les galeries, c'est les curateurs aussi, les centres culturels, les gens du secteur. Il faut vraiment qu'ils vous connaissent. Mais ça, ce sera plus pour le côté professionnel. Pour moi, les deux sont importants. D'où l'importance aussi d'avoir au moins une personne qui aide, parce que faire les deux, c'est dur. animer des réseaux sociaux, ce n'est pas simple. Mais je pense que les deux sont importants.

  • Ramata

    Tu as évoqué aussi le fait que tu fais de la curation et que tu as organisé des expositions, des événements. Est-ce que tu peux nous parler justement de cette autre casquette ? Parce que là, ça fait à peine une demi-heure qu'on parle et j'ai affaire à une banquière informaticienne, écrivain,

  • Aïsha

    journaliste.

  • Ramata

    Pour moi, c'est qu'une heure d'interview. On va programmer une autre interview pour pouvoir parler de tout. Au moins,

  • Aïsha

    si tu peux, je suis d'accord. J'ai beaucoup de casquettes. Mais c'est toujours la passion, comme je dis. En réalité, ça ne sort pas. Tout est dans le même sac. Il y a aussi cette fondation dont ils font que je te parle de musique en Afrique. Je ne t'en ai pas parlé. Je ne suis pas sûre que c'était dans ma bio. Je reviendrai dessus, je réponds à ta question. La curation donc. La curation, c'est aussi à force, j'adore les expos vraiment, c'est ce que je préfère. Et à force d'aller dans les expositions et à force de connaître les artistes, de faire leur promotion, de parler de leur travail, de devenir amie avec eux. De temps en temps, je dis tiens, venez, on fait une expo. Donc j'appelle deux, trois amis qui sont des artistes souvent. C'est souvent à la Biennale en fait, parce qu'à la Biennale, il y a... C'est un événement qui dure un mois. Il y a des événements in, organisés par l'État, mais il y a beaucoup de off. Les off, c'est quand je dis il y en a 500 dans la ville, il y en a 500. C'est tous les artistes qui vont organiser quelque chose, tous les espaces culturels. Et ça bouillonne partout dans Dakar. Et donc c'est toujours cet engouement-là qui fait qu'on a envie de partager, on a envie d'être ensemble, on a envie de faire, de créer ensemble. Et là, souvent, je dis, tenez, venez, on va faire quelque chose. Et souvent, c'est des expos collectives. Donc, j'appelle quelques amis et on se retrouve et on organise. Et je me retrouve à faire la curation, ce que je n'ai pas appris non plus, et à faire du commissariat. Et j'ai fait trois biennales. Et d'ailleurs, la dernière, c'était... il y a quelques mois, à la dernière Biennale de Dakar. C'était ma plus grosse expo parce que c'était mon livre qui contient 100 artistes de Dakar que j'ai mis en expo. C'était une expo gigantesque avec de très grands artistes où il y avait des installations, où il y avait de la peinture, où il y avait du graffiti et où on organisait des événements ponctuels chaque semaine. du slam, des concerts, c'était incroyable. Mais ce sont des choses qui se sont faites aussi vraiment spontanément, avec beaucoup d'esprit de partage, de partage et d'échange surtout. C'est ça qui est très beau.

  • Ramata

    Et est-ce que tu peux nous parler, moi je vais profiter de ta présence ici, d'artistes vraiment qui t'ont particulièrement touchée, que tu suis ? tu suis le parcours depuis longtemps et que tu apprécies. Est-ce que tu as des recommandations d'artistes à nous faire ?

  • Aïsha

    Dis-moi un domaine, je te dis un artiste. C'est dans quel domaine ?

  • Ramata

    J'en ai beaucoup. Je sais bien, je sais bien. La peinture ?

  • Aïsha

    La peinture. Je vais vous dire Fanny Senso, qui d'ailleurs expose en ce moment à Paris, à la galerie Christophe Palletier. personnes, quelque chose comme ça, dans le mari.

  • Ramata

    Ok.

  • Aïsha

    Qui a été une... Il y a deux biennales, c'est-à-dire il y a quatre ans, c'était vraiment la star de la biennale. Incroyable artiste que j'aime beaucoup, qui retrace le quotidien d'un marché où il habite, avec des maquettes, avec des peintures, bref, je ne veux pas passer beaucoup de temps sur chaque artiste. Fali Senso. Ensuite, il y a... Kiné Aou, qui est une des femmes les plus connues dans son domaine, qu'on appelle l'application sénégalaise, qui est extraordinaire. Il y a aussi, parmi les anciens, la dame Anta Germaine Gaye, qui fait de la peinture sous-vert, c'est-à-dire qu'elle peint sur le vert, et c'est la pionnière. Je ne peux en citer encore des dizaines.

  • Ramata

    De toute façon, si on veut plus d'infos... Tout à fait, je suis sur les réseaux sociaux.

  • Aïsha

    Je mets les liens de tes réseaux pour qu'on puisse avoir accès aux informations en live.

  • Ramata

    Toi, depuis que tu t'intéresses à l'art, donc tu as évoqué 2009, est-ce que tu as vu, on parle beaucoup de l'évolution de la cote des artistes contemporains africains, on voit de plus en plus de créateurs africains qui ont l'opportunité d'être présents dans des galeries, pas seulement en France, à Paris, mais à l'international. Il y a de plus en plus d'événements d'envergure qui vont faire la part belle à l'art contemporain africain. Toi, de la fenêtre, vu que c'est vraiment, comment dire, tu es plongée dedans depuis 2009, en tout cas, ta plateforme a été créée en 2009, mais c'est un sujet qui t'intéressait déjà depuis longtemps. Comment est-ce que tu perçois cette évolution ?

  • Aïsha

    Écoute, moi je pense qu'en ce moment, c'est comme dans tout. C'est l'Afrique qui est là, en réalité. C'est vrai qu'en art contemporain, comme la peinture, tout ce qui est galerie et tout ça, c'est plus difficile parce que... Parce que voilà, on va dire qu'à Paris, par exemple, avoir des expos d'Africains, ce n'est pas aussi commun, mais ça a beaucoup changé, effectivement. Mais ce que j'ai observé, c'est que les gens retournent beaucoup à l'art africain, que ce soit dans la peinture, dans la mode, dans la musique. Tu as vu la mode, on s'est rencontrés au Galerie Lafayette parce qu'il y avait tous ces créateurs sénégalais. C'est parce que cette créativité africaine... en ce moment, elle est tellement, tellement, tellement bouillonnante et incroyable et belle. Et que les autres, je pense, je le dis souvent, ils ont fait le tour, mais l'Afrique, nous sommes... C'est-à-dire que tu marches dans les rues de Dakar, partout tu vois de l'art, et c'est comme ça. Tu vois les femmes habillées, c'est de l'art. Tu vois les murs, les graffitis, c'est de l'art. Et ça, ça ne se perd pas, c'est là, c'est jusque... il faut en faire quelque chose. Et donc, en ce moment, je ne veux pas dire tendance, c'est péjoratif, mais c'est ça, la créativité est en Afrique. Donc déjà, et ça, les gens l'ont compris, le monde l'a compris. J'ai parlé de monde de tout à l'heure, Chanel est venue à Dakar faire son défilé. On voit tous les gens qui reviennent, qui viennent, qui viennent parce que l'art est là. Après, côté c'est... Côté art contemporain, côté peinture, côté galerie, c'est un peu plus dur, mais je vois la différence effectivement. Je le vois du côté des artistes, je le vois du côté de ceux qui vendent. Et même chez le public, il s'y intéresse de plus en plus, mais aussi parce qu'il y a les réseaux sociaux, qu'il n'y a plus de barrières, que maintenant les jeunes, les artistes les plus jeunes et ceux dans tous les domaines, surtout dans le milieu de la mode, ils s'exposent. et ils montrent et il n'y a aucune barrière, il n'y a aucun complexe. Avant, nos artistes étaient un peu complexés parce que chez nous, faire de l'art, ce n'est pas bien vu. Chez nous, nos sociétés sont très dures. Être dans la culture, ce n'est pas quelque chose dont les parents rêvent pour leurs enfants. Maintenant, ça change. Maintenant, les jeunes s'expriment et assument d'être artistes et le montrent et se connectent. avec les autres à travers le monde. Et il faut connaître leur travail et on voit que les autres découvrent. Et je pense que ça, ça fait évoluer l'art et ça fait évoluer aussi les artistes partout dans le monde.

  • Ramata

    Toi, je pense que tu es jugée partie. Ce que tu évoques là, c'est qu'effectivement, on parle d'Africa Rising, il y a beaucoup de choses qui se passent sur le continent et quelque part. Est-ce que... Tu as le sentiment qu'il y a vraiment quelque chose de beaucoup plus puissant en Afrique. Alors sans être, on va être un peu chauvin, on a tendance à dire, oui, tout est au Sénégal, mais en essayant d'avoir un regard objectif, même si tu es sénégalaise et que tu vas me dire que c'est Dakar qui est devant. Mais est-ce que tu as vraiment le sentiment qu'il y a un engouement vers la créativité africaine, mais parce qu'il y a vraiment énormément de propositions, énormément d'artistes qui émergent ? et qu'il y a une vraie différence par rapport à ce que l'Europe peut proposer, par rapport à ce que la Corée ou d'autres continents ou d'autres régions du monde peuvent proposer. Donc, c'est ce qui fait qu'il y a une différence. Ou est-ce que, quelque part, il y a un essor global de tout ce qui ne vient pas de l'Occident ?

  • Aïsha

    C'est une bonne question. C'est une bonne question. Je réfléchis en même temps. Spontanément, je dirais que oui, moi, je pense qu'il y a un essor en Afrique. Mais maintenant que tu le dis, peut-être aussi que c'est de façon générale l'envie de découvrir autre chose que l'Occident. Mais sincèrement, moi, le talent que je vois en Afrique, la créativité étant plongée dedans, sincèrement, je suis assez bluffée par ce que je vois. Et je me dis que c'est parce que c'est là. Et comme je dis encore une fois, l'Occident a fait le tour. La preuve, il revient beaucoup. ils reviennent beaucoup en Afrique pour s'inspirer et donc moi je crois qu'il y a vraiment quelque chose, je ne sais pas ce qui se passe vraiment mais il se passe un truc en Afrique en ce moment, en art.

  • Ramata

    J'ai l'impression aussi, je me dis peut-être qu'on n'est pas objectif mais c'est absolument correct.

  • Aïsha

    Peut-être, je le sens mais peut-être on est chez nous, on voit mais moi je vois qu'il y a cette créativité, c'est incroyable quand même. Surtout chez les jeunes, c'est incroyable.

  • Ramata

    Moi, j'y crois. Je suis du même avec toi. Ce que je trouve intéressant, c'est que c'est comme s'il y a énormément de courants qui existent, qui ont été classifiés par l'Occident de plein de façons différentes. Et ce qui arrive d'Afrique, c'est complètement différent. Et puis, c'est un mélange plein d'influences différentes avec, bien sûr, les racines qui sont en Afrique, mais qui peuvent parler à quelqu'un aux États-Unis, en Corée, en Amérique latine. Et c'est ça aussi qui fait la force de la créativité africaine, c'est que ça vient du continent, mais ça peut vraiment toucher tout le monde, en fait.

  • Aïsha

    C'est ce que je suis en train de te dire tout à l'heure. C'est-à-dire, ils sont assis dans un village quelque part au Kenya, ils font leurs choses qu'ils mettent sur Internet, et ça touche un jeune Chinois, un jeune Américain, parce que finalement, ils sont connectés.

  • Ramata

    Alors, en termes de créativité à Dakar, Merci. tu parlais de la Biennale et de tes réseaux sociaux qui te permettent un peu de faire la liste de tous les événements qui peuvent se passer au Sénégal. Est-ce que tu déplaces les frontières du Sénégal et est-ce que tu vas aussi parler d'événements qui peuvent se passer en Côte d'Ivoire ? Je sais qu'il y a une grande foire d'art contemporain à l'Écosse, au Nigeria. Est-ce que tu fais aussi une veille sur ce puissant... ce qui peut se passer en dehors de Dakar ?

  • Aïsha

    Une veille, je ne sais pas, mais quand je vois des choses importantes que je pense que les gens doivent savoir, j'en parle. À l'extérieur, c'est souvent le travail, c'est souvent des missions, c'est souvent des choses où on m'invite à venir participer, souvent des conférences, des panels. Mais en même temps, on est en Afrique et quand je vois un événement, un grand événement africain, forcément, je peux en parler. Mais vraiment, c'est plus, tu vois, à Côte d'Ivoire, Afrique du Sud, dont j'ai parlé tout à l'heure, j'en parle pas mal, mais parce que je suis souvent là-bas pour le travail avec cette fondation de musique. Et donc, c'est aussi ça qui est beau, parce que cela me permet de découvrir. Les autres pays africains, c'est à travers la culture, moi, que j'ai commencé à voyager autant. À la banque, je prenais mon congé, je venais à Paris et puis c'est tout. Quand j'ai commencé à faire ce travail, donc, au bout de deux ans, par exemple, j'ai été appelée en Afrique du Sud pour rejoindre un projet qui est une plateforme dédiée à l'industrie musicale. Et comme j'avais l'expérience à Jean-Dakar... et m'ont d'abord appelée juste pour voir si je pouvais collaborer avec eux.

  • Ramata

    Donc maintenant, j'aimerais que tu nous parles de la fondation que tu évoquais tout à l'heure. Puisque c'est une de tes dernières initiatives liées à l'art et la culture, mais là, on est plus centré sur la musique. Donc, est-ce que tu peux nous parler de cette fondation et de ton rôle dans cette fondation ?

  • Aïsha

    Musique in Africa. Je suis cofondatrice de la fondation parce que... Il y a eu d'abord la plateforme online et puis il y a eu la fondation. C'est destiné à booster l'industrie de la musique en Afrique. L'idée était de dire que c'est bien beau d'être connecté au reste du monde avec les grands, mais c'est bien que les Africains se connaissent et se retrouvent entre eux. C'était quand même il y a un moment, c'était en 2012, que nous avons fondé Musique in Africa. Je suis rentrée dans le board et j'ai été... J'étais dans le Bode pendant cinq ans, dans deux où j'étais présidente. C'est un milieu très, très masculin dans la fondation. Il y avait les membres, c'était vraiment, il y avait pratiquement cinq femmes sur peut-être une centaine. Et je me suis retrouvée présidente, donc entourée d'hommes du secteur dans un milieu très, très masculin. C'était une très belle expérience. Et je suis très fière parce que ça a tellement grandi en dix ans, c'est devenu vraiment incontournable. Et la Fondation développe de magnifiques projets qui soutiennent la musique en Afrique. Mais là aussi, récemment, quand j'ai fini mon mandat, j'ai décidé de me consacrer entièrement à mon agence. Donc je suis, on va dire, membre d'honneur. Maintenant, on n'est pas vraiment dans les décisions. mais très très fiers de ce que nous avons accompli jusqu'ici.

  • Ramata

    Très bien. Et est-ce que tu as dit, c'est quoi les next projets pour Aïcha ? Est-ce qu'il y a des choses dont tu peux nous parler ? J'imagine que tu es toujours dans le milieu de l'art et de la culture, mais comme on peut le voir là, tu as commencé par créer une plateforme, tu as endossé cette casquette de journaliste, puis curatrice, de consultante, de conférencière, d'écrivain. Donc, tu as été à la tête de cette fondation avec ce focus sur la musique. Qu'est-ce que tu nous prépares ?

  • Aïsha

    Alors, j'ai beaucoup de choses que je voudrais faire. Il y a quelques années, j'avais commencé un projet d'incubateur, juste avant de commencer mon livre. Donc, j'avais ce projet d'incubateur culturel et le livre m'est tombé dessus presque. Et je me suis consacrée au livre qui m'a pris trois ans d'années de travail. Et après ces trois années, j'étais en promo constamment. Donc là, j'aimerais beaucoup reprendre l'incubateur et un fonds pour les artistes. J'ai beaucoup de projets personnels avec Sylvie Woro, mais dont je ne peux pas parler maintenant. Ici en France, j'ai rejoint un autre board d'une organisation dédiée à l'art aussi. Ça aussi, j'en suis très fière. Mais ils n'ont pas encore communiqué officiellement. Je te tiendrai au courant. Et donc, il y a tous ces petits projets aussi qui ne sont pas gros, mais auxquels je tiens au Sénégal à accompagner des femmes artistes, à mentorer la transmission. Ça compte beaucoup pour moi. Je le fais beaucoup de façon officieuse, on va dire. Je cherche de voir un moyen de le rendre plus officiel pour que je... puisse accorder vraiment du temps à ça, au-delà de ce que je fais en ce moment comme accompagnement de jeunes artistes. Et en parlant justement des autres pays, ça aussi, tu vois, je reçois beaucoup de messages de gens qui sont en Côte d'Ivoire, au Burkina, qui me disent, on est inspiré par votre travail, est-ce que vous pouvez nous mentorer ? Donc je le fais pas mal et ça me touche beaucoup et j'aime beaucoup cela, cette connexion avec ces autres pays-là, de cette façon-là, plutôt que par la communication ou en parlant juste d'un artiste. Il y a ce côté où il y a une vraie connexion que j'aime beaucoup.

  • Ramata

    Très bien, on a hâte de voir la suite. On arrive à la fin de cette interview. Moi, j'étais ravie d'avoir l'opportunité de découvrir ton profil et d'en savoir un peu plus sur toutes tes initiatives. Je mettrais bien, comme je l'évoquais tout à l'heure, en note de l'épisode, les liens vers tes comptes sur les réseaux sociaux et également le lien vers ton livre, de manière à ce qu'on puisse vraiment en savoir encore davantage sur tout ce que tu peux partager. Et puis, je te dis merci.

  • Aïsha

    Mais c'est moi qui te remercie, Ramatha. Je suis très contente aussi de t'avoir rencontrée déjà. de découvrir ce que tu fais. Et merci de donner la parole parce que c'est important. Et c'est un secteur où on ne parle pas assez. Et tu as beaucoup de générosité et une très belle écoute que j'apprécie beaucoup, beaucoup, beaucoup. Et j'ai été très, très contente de venir, de faire cette discussion avec toi. Merci infiniment.

  • Ramata

    Écoute, merci à toi. Je te dis à très vite en Afrique ou ailleurs.

  • Aïsha

    À très vite. Merci.

  • Ramata

    Merci d'avoir écouté l'épisode jusqu'au bout. Je vous invite à pratiquer quelques petits gestes à impact fort pour m'aider à gagner de la visibilité sur ce podcast. Vous pouvez partager l'épisode à trois de vos amis. Vous pouvez laisser un commentaire sur Apple Podcasts ou Spotify. Je vous invite également à cliquer sur les cinq étoiles pour donner de la force. Je vous dis à très vite en Afrique. Bye.

Chapters

  • Introduction au podcast et présentation d'Aïcha Deme

    01:00

  • Parcours d'Aïcha Deme et ses débuts dans la culture

    02:05

  • Transition vers le secteur culturel et création d'Agenda Dakar

    03:30

  • Les défis de l'entrepreneuriat culturel en Afrique

    06:18

  • L'importance de la communication pour les artistes

    07:42

  • Rôle de consultante et conseils pour les artistes

    12:06

  • Évolution de la plateforme Agenda Dakar et ses impacts

    14:07

  • Kits de survie pour les événements culturels

    18:14

  • Conseils pour les artistes contemporains africains

    24:40

  • Projets futurs et engagement d'Aïcha Deme

    29:23

Description

Comment quitter une carrière confortable pour bâtir un empire par passion et devenir une référence dans le monde de l'art ?


Cet épisode est une véritable masterclass avec Aïsha Deme, spécialiste des arts et des industries culturelles en Afrique ! Découvrez le parcours inspirant d'une pionnière qui a transformé sa passion en une carrière influente.

Dans cette interview, Aïsha nous offre des leçons inestimables sur :

  • L'audace d'entreprendre : Comment elle a quitté une carrière d'informaticienne bancaire pour se lancer, avec naïveté mais détermination, dans un domaine qui la faisait vibrer.

  • La persévérance du pionnier : Les défis des débuts d'Agenda Dakar, première plateforme culturelle digitale au Sénégal, et comment deux ans sans salaire ont forgé sa résilience.

  • Le positionnement unique : La création des "kits de survie" pour les grands événements culturels sénégalais (Biennale de Dakar, Festival de Jazz), devenus des outils indispensables pour naviguer la scène artistique.

  • Devenir une référence : Comment son agence Siriworo accompagne les artistes et les organisations, structurant des projets et bâtissant une crédibilité solide grâce à une éthique rigoureuse.

  • Le rayonnement de l'Art Africain : Son regard d'experte sur le "bouillonnement incroyable" de la créativité sur le continent et comment l'art africain s'impose sur la scène mondiale.

L'histoire d'Aïsha Deme est une source d'inspiration pour tout entrepreneur créatif. Elle prouve que la passion, l'engagement et la capacité à saisir les opportunités sont les clés pour transformer un rêve en une référence incontournable.


Prêt(e) à découvrir les secrets de son succès ? Écoutez cette masterclass de l'art !


Africa Fashion Tour poursuit chaque semaine l'exploration des industries culturelles et créatives africaines avec des interviews d'entrepreneurs passionnés qui s'interrogent sur les questions de diversité et de représentation. Chacun des invités du podcast est passé du questionnement à l'action pour proposer des solutions concrètes, des business model vertueux pour promouvoir l'Afrique à travers les soft power.


J’en profite pour remercier les auditeur.e.s de plus en plus nombreux de ce podcast. Pour découvrir en avant première les dernières interviews et analyses de l'écosystème de la mode africaine, abonnez-vous à la ⁠⁠⁠Newsletter Africa Fashion Tour⁠⁠⁠.


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A très vite en Afrique ou ailleurs


Ramata Diallo 


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Aïsha

    Pour moi, c'est de dire comment survivre à la biennale. D'abord, savoir déjà les dates exactes, qui vient, qui ne vient pas. Savoir comment réserver un hôtel, savoir comment accéder. Parce qu'il y a des gens qui vont vraiment demander est-ce qu'il faut payer. Alors que pour certaines personnes, c'est une information évidente. Et moi, je découvre avec tous les messages que je reçois de personnes que je ne connais pas, qu'en fait, les gens ne savent pas. Les gens ne savent pas ce que nous pensons être évident et que nous ne communiquons pas. Qu'il faut s'accréditer juste pour aller voir un île. Que pour le festival de jazz, le même bat, je peux marcher par-ci, par-là. Mais qu'aussi, il faut s'y mettre très tôt pour trouver un hébergement. Mais comment le trouver ? Il y a des personnes à Saint-Louis qui peuvent aider. Donc, des petites choses comme ça qui te font survivre dans ce festival, d'où le nom de survie.

  • Ramata

    Bienvenue dans ce nouvel épisode du podcast Africa Fashion Tour. Je vous emmène avec moi à la rencontre de créateurs basés sur le continent africain. Je vous invite à voyager à Abidjan, Dakar ou Bamako pour découvrir les parcours de professionnels talentueux, responsables et ambitieux. Au fil des interviews, je me rends compte que chaque entrepreneur veut contribuer au rayonnement de la créativité africaine sur le continent et au-delà. Ce podcast est un moyen de sortir des clichés du boubou et du wax. pour représenter un éventail de tissus, de savoir-faire et de créativité, trop souvent sous-représentés. Je suis Ramata Diallo. Je suis professeure de marketing dans des écoles de mode parisiennes et je suis également consultante spécialisée dans l'accompagnement de porteurs de projets qui veulent lancer leur marque de mode. En 2017, j'ai hésité à ma première Fashion Week en Afrique. Et depuis, je voyage régulièrement sur le continent pour aller à la rencontre de ceux et celles qui font la mode en Afrique. Le podcast est le moyen que j'ai trouvé pour partager au plus grand nombre une autre vision de la mode africaine. Aujourd'hui, je suis en compagnie d'Aïcha Deme. Elle est spécialiste des arts et des industries culturelles en Afrique. Elle a fondé Siriworo, une structure d'ingénierie culturelle qui accompagne des artistes et des organisations dans leurs initiatives créatives. Je l'ai invitée aujourd'hui pour qu'elle puisse nous parler de son parcours et de ses différentes initiatives. Bienvenue Aïcha, comment vas-tu ?

  • Aïsha

    Merci beaucoup Ramata, je vais très bien, merci.

  • Ramata

    Alors, on va commencer cette interview comme je le fais avec chacun de mes invités. Je vais te demander de te présenter.

  • Aïsha

    Alors, je pense que tu m'as déjà présenté et tu as dit l'essentiel. Je rajouterai que je suis une grande, grande passionnée d'art et de culture, très heureuse et fière de travailler dans ce domaine en Afrique. Quoi d'autre ? Je suis Sénégalaise, je suis née et j'ai grandi au Sénégal, j'ai étudié là-bas. je suis contente de travailler de ma passion, on en reparlera plus tard parce que j'ai changé de métier pour ça sinon je pense que tu as dit l'essentiel dans ta présentation

  • Ramata

    Très bien, ben écoute tu m'offres une belle transition, tu dis que t'es contente de travailler dans ta passion et donc a priori t'es peut-être pas dans ce secteur-là le secteur des industries culturelles et de l'art au départ Ah ! Donc, comment est-ce que ta carrière a commencé ? Quel a été ton parcours au niveau de tes études ? Et ensuite, quels ont été tes premiers métiers ?

  • Aïsha

    Alors, moi, je suis une scientifique, une informaticienne. Et je viens de la banque. J'ai fait 50 banques en tant qu'informaticienne. J'ai fait des études informatiques, donc. Mais j'ai toujours été très, très passionnée d'art et de culture. Depuis enfant, j'allais beaucoup voir les expos. J'allais beaucoup dans les concerts. au cinéma, au théâtre. Et puis un jour, il y a eu plusieurs choses. C'est d'abord l'envie de changer de métier, même si c'est un métier que j'aimais beaucoup au début, mais à un moment, ça a devenu routinier. Et puis je me suis rendue compte qu'il n'y avait rien sur Internet au Sénégal qui était destiné à parler d'art et de culture. Mais vraiment rien. C'est-à-dire que quand on voulait sortir voir une exposition, il fallait chercher. J'ai décidé donc de monter une plateforme, la première au Sénégal, qui faisait la promotion des événements culturels, qui était un agenda. Agenda Dakar, ça s'appelait en 2009, avec un ami, nous avons fait ça ensemble. Et c'est comme ça que je suis arrivée dans la culture, Ramata.

  • Ramata

    Très bien, donc tu as toujours eu cette passion, comme tu le dis, pour l'art, pour la culture. Toi, est-ce que tu avais une âme d'artiste ou tu étais plutôt spectatrice ?

  • Aïsha

    Non, toujours spectatrice, toujours. Grande consommatrice, mais tellement passionnée que vraiment j'allais à la recherche. Je me suis rendue compte que je faisais tout, tout, tout pour avoir les informations. Je sortais de la banque à 18h, j'allais chercher des expos. Et j'ai fini aussi par connaître les artistes à force d'être présente dans le milieu. Ce qui m'a beaucoup aidée par la suite, parce que quand j'ai monté cette plateforme, je les appelais personnellement pour avoir leur programme, pour le mettre sur mon site. J'ai commencé à les interviewer et donc à écrire. Beaucoup pensent que je suis journaliste en passant, mais je n'ai pas fait d'études de journalisme. mais j'ai beaucoup écrit j'ai beaucoup chroniqué j'ai été chroniqueuse du monde afrique j'ai beaucoup écrit sur mes plateformes personnelles et j'ai fait un livre aussi dédié à l'art à Dakar, qui a été nominé sélection du monde justement en 2022. Et donc c'est juste, je consommais beaucoup. À force de consommer, je connaissais plus, j'apprenais plus, je connaissais mieux les pratiques. Et moi-même, j'ai commencé à pratiquer certaines choses, comme écrire, comme faire de la curation, organiser des expositions. C'est avec le temps.

  • Ramata

    Et à partir de... Donc, il y a eu toute une partie où tu faisais ça un peu en side. Ce n'était même pas un business, c'était une passion. Donc, en parallèle de la banque, à partir de quel moment tu te dis, bon là, j'arrête, je vais me consacrer, je vais consacrer en tout cas mon temps à cette passion ?

  • Aïsha

    C'est comme j'ai dit, c'est à partir du moment où à un instant, parce que j'ai toujours besoin justement d'être passionnée quand je fais quelque chose. C'est à partir du moment où je ne le ressentais pas. plus à la banque et dans mon métier d'informaticienne que j'ai décidé d'aller faire ce qui me passionnait vraiment. Et donc, c'était une bonne transition, on va dire, parce que je suis restée dans le digital quand même avec la plateforme Agence Dakar, mais je ne m'occupais que de culture. Mais c'est vraiment ce moment-là, en 2009, où j'ai dit, bon, d'accord, on va y aller. Ce qui était très risqué parce que c'était quitter un... travail très stable et commencer à zéro une vie d'entrepreneur. Et je n'avais aucune idée de ce que c'était en réalité. Je suis juste partie avec ma passion, mon meilleur ami et moi. On a été un peu fous, mais voilà.

  • Ramata

    Et du coup, c'est intéressant ce que tu dis là. Est-ce que tu avais une idée d'un business model, de comment est-ce que tu allais te rémunérer ? Comment dire ? Parce qu'au départ, on est... passionnés par la culture, par l'art, il y a un côté créatif qui nous fait vibrer, mais à un moment donné, il faut relier ça à un business model et il faut des rentrées d'argent. Donc toi, tu avais une idée précise de comment tu voulais faire les choses ?

  • Aïsha

    Absolument pas. C'était une catastrophe. Je n'avais aucune idée et on était naïfs, on va dire, et rêveurs, parce qu'on connaissait une plateforme très connue au Sénégal où tout le monde se connectait tous les jours, qui se faisait beaucoup Beaucoup d'argent, c'était une plateforme d'information en ligne qui se faisait beaucoup d'argent avec la publicité, les bannières à l'époque de publicité. Et nous, on se disait, on fait une plateforme gratuite parce que la culture, on sait que ça ne paie pas beaucoup et qu'on allait se faire rémunérer avec les pubs. Mais c'était une catastrophe parce que pendant une année et demie ou deux ans, nous n'avons pas eu de salaire parce que les pubs ne venaient pas. Au début, les gens étaient assez réticents. sur une plateforme culturelle. Ce qu'ils connaissaient, c'était les flyers, les affiches. C'était 2009 dont je parle. Donc même Facebook, c'était juste parler entre amis. Il n'y avait pas encore les événements pour promouvoir. Et donc il fallait shifter cela. Et c'est de ça dont je suis fière parce que nous sommes arrivés à le faire. Au bout de deux ans quand même. Au bout de deux ans, les expats ont commencé beaucoup à utiliser le site et les partenaires ont commencé à arriver et c'est à partir de là. À partir de là, nous avons pu réaliser quelque chose. Mais nous sommes restés deux ans où on fonctionnait avec nos économies. Et à un moment, bien évidemment, c'était difficile. C'était très dur au début. Il faut dire la vérité quand même.

  • Ramata

    Donc, c'est intéressant de revenir sur un petit peu la naïveté que l'on a quand on se lance dans un projet de passion, même si toi, tu avais un background de banquier quelque part. Donc, on aurait pu supposer que tu avais un business plan. Mais finalement, de ce que tu me dis, tu es un peu allé avec... beaucoup de naïveté au départ.

  • Aïsha

    C'est fou, mais ça continue. Et c'est pour ça que j'en parle souvent dans mes talks et dans mes... partout où je suis invitée à parler. L'entrepreneuriat, on fonce toujours en disant que c'est beau. Tu vois, on montre toujours le côté très rêveur. Mais il faut dire la vérité. Il faut vraiment que si on décide d'entreprendre, qu'on soit sûr au moins d'avoir un modèle qui marche. Parce que sinon, clairement, on n'y arrive pas. J'étais dans une banque, je suis scientifique, ingénieur informatique, structuré et tout, mais là, j'arrive avec une passion, beaucoup de rêves. Et avec un ami aussi rêveur que moi, on a vraiment raté le crochet au début.

  • Ramata

    C'est intéressant aussi parce que souvent, quand il y a des associés, on dit qu'il faut qu'il y ait quelqu'un de plus pragmatique, rationnel et quelqu'un peut-être de plus créatif. Comme ça, le duo va marcher parce qu'on a le financé d'un côté et puis le créatif. Mais là, de ce que tu dis, il y a deux rêveurs créatifs. Oui,

  • Aïsha

    exactement. C'est ça qui a été le cas, mais en même temps. Ça apporte aussi, il faut dire la vérité, parce que plusieurs fois, par exemple, moi j'ai été découragée, j'ai voulu abandonner. Et en réalité, mon associé était beaucoup plus rêveur que moi et beaucoup plus optimiste. Et tout le temps, il me disait non, non, non, on ne peut pas, ça va marcher, ça va marcher. Si j'avais été toute seule, je pense qu'au bout d'une année, j'aurais laissé tomber. Mais lui a continué de croire et c'est lui qui d'ailleurs continue de chercher des partenariats. sponsor et c'est comme ça qu'on a réussi en fait finalement à exploser d'un coup. Nous avons même eu une subvention de la coopération espagnole qui nous a permis de recruter une grosse équipe de nous organiser mieux et de dérouler d'autres projets qui en fait nous ont permis d'avoir de l'argent. Et sans son côté tellement rêveur, tellement optimiste qui croit que tout toujours va bien se passer. Je pense que j'aurais abandonné en réalité. Je serais restée dans la culture, mais je serais peut-être allée trouver un poste où je serais salariée et travaillée dans la culture, je pense.

  • Ramata

    Très bien. Donc, dans ce que tu évoques, en fait, c'est quand tu parles de 2009 pour le lancement de cette plateforme en ligne qui va recenser tous les événements du Sénégal. C'est vrai que c'était très précurseur. C'était vraiment les débuts de ce type de plateforme-là. Oui, vraiment. Et tu expliques que du coup, pour faire vivre cette plateforme, l'idée c'est que tu t'es mise à rechercher les informations, à écrire des chroniques, à rencontrer les différents artistes. Du coup, c'est des nouveaux métiers que tu as appris.

  • Aïsha

    Absolument, c'est des nouveaux métiers. Et je me découvre des capacités que je ne connaissais pas. Mais c'était tellement exaltant pour moi de faire ça. que je ne me rendais même pas compte en réalité. Je travaillais énormément, énormément. Je passais mes nuits à créer le contenu, c'est-à-dire à écrire, à fermer, à mettre le contenu de l'agenda, les journées à travailler au bureau. Je ne dormais littéralement pas. Mais effectivement, c'est des métiers que j'ai appris sur le tard.

  • Ramata

    Et alors, vous avez finalement, quand on dit pendant deux ans, vous n'avez pas gagné d'argent, et puis ensuite... on va dire les graines que vous avez semées, elles ont commencé à pousser, mais au bout d'un certain temps, finalement, quand on prend du recul, deux ans, c'est assez long que ça.

  • Aïsha

    Ça dépend. Ce n'est pas si long peut-être, mais quand c'est sans salaire, c'est quand même, ça paraît 10. Je vais être sincère. Mais finalement, on aurait pu attendre plus. On aurait pu attendre plus que ça. Et comme tu as dit, c'était semer des graines. Je suis contente que tu dises cette expression que j'utilise énormément. J'ai même un hashtag, c'est mes des graines. Parce que quand on insiste finalement, ça finit toujours par payer.

  • Ramata

    Et aujourd'hui, l'agenda, c'est toujours une plateforme qui est d'actualité ou comment ça a évolué finalement cette plateforme ? Puisque vous avez eu des subventions, vous avez eu vos sponsors. J'imagine qu'il y avait une audience. Si c'était une plateforme précurseur ? Tout de suite, vous avez une audience assez importante qui s'habitue à venir sur ton site, qui veut lire tes chroniques. Et du coup, ça fait vraiment une monnaie d'échange avec des sponsors. Comment est-ce qu'elle a évolué, la plateforme, et où elle en est aujourd'hui ?

  • Aïsha

    Alors, on a eu une audience à partir de 2010. D'ailleurs, ça a commencé avec le Festival, le Festman, le Festival Mondial des Arts Nègres qui avait été organisé par le président Wad. Et l'organisation était très compliquée, très. Ça s'est fait vraiment, il y a des choses qui se faisaient à la dernière minute. Et donc, côté communication, ils avaient un problème. Et moi, j'étais très tenace. Moi, je trouvais l'info comme d'habitude. Et finalement, notre plateforme était devenue la plateforme où on savait ce qui se passait pendant tout un mois au Sénégal, où c'était bouillonnant, où on avait tous les grands artistes du monde, que ce soit dans le rap. dans le jazz, dans les arts visuels et tout ça, vraiment. Et donc là, il y a eu un rush. Après ça, ça a un peu baissé, mais comme tu viens de dire... Nous avons eu donc ces partenaires et puis surtout la subvention qui était assez grosse, qui nous a permis de recruter des équipes et de développer d'autres choses. Parce que les gens ont commencé à nous contacter en nous disant vous communiquez bien, vous communiquez très bien sur Internet, ce qui ne se faisait pas beaucoup. Et c'est là que les artistes venaient me voir, Aïcha je veux que tu communiques sur mon projet, Aïcha je veux que tu fasses ceci avec moi. Et donc, on a continué avec la plateforme et ces nouvelles équipes. Nous sommes passés de deux personnes à douze personnes. Au bout de cinq années, c'était vraiment au top, ça marchait bien. C'était en 2014. Et comme j'avais beaucoup ces sollicitations-là dont je parle aussi, j'ai décidé de laisser l'équipe continuer la plateforme Agence Dakar. Et moi, j'ai monté. Je suis allée faire de la consultance. Et donc, d'aller travailler justement avec... tel artiste sur tel album, avec tel artiste sur son expo, avec l'autre sur son film. Malheureusement, ce qui est un peu triste, c'est qu'après, la plateforme a perdu son... Avec les équipes, c'était devenu un peu difficile parce qu'il y avait les autres projets à gérer, il y avait... Voilà, ça arrive. Et finalement, elle est juste, elle ne marche plus depuis. Le site existe, le nom existe. Mais ils ont été concentrés parce que moi, j'ai cédé, j'ai passé la main pour faire la consultance, ce que je fais toujours. Mon bonheur est que ma communauté est restée parce que cette communauté était très fidèle et très belle. Et c'est pour elle que j'écrivais énormément pour faire découvrir qui est l'artiste, pour faire découvrir ce qui se passe, pour dire qu'il y a tel espace qu'il faut absolument visiter. Et ça, j'ai dû continuer à le faire sur mes réseaux sociaux parce que la communauté était toujours là. Chaque fois qu'il y a un événement majeur comme la Biennale, comme le Festival de jazz, la communauté est là qui me demande, Aïcha, qu'est-ce que tu nous recommandes ? Quel expo nous devons aller voir ? Et là, donc, j'ai développé au-delà de mon activité de consultante avec l'agence, je suis restée quand même celle qui faisait quand même l'agenda sur mes réseaux sociaux, beaucoup. J'écris beaucoup toujours et j'ai des kits de survie pour chaque grand événement culturel au Sénégal. Par exemple, il y a un kit de survie de la Biennale qui dira sur 500 expos qui se passent à Dakar, voici celles que je recommande, voici les artistes à découvrir, ce genre de choses. Parce que ça aide beaucoup de personnes qui ne savent pas. L'information est toujours assez difficile. Et surtout que c'est juste qu'ils sont là, ils sont là constamment, et qu'au final, je pense que je leur dois un peu. Et il y a cette relation entre nous qui est très belle. Donc, je continue de faire ça. Je regrette un peu que l'agenda ne marche plus, mais à un moment, il faut accepter que c'est comme ça, puisque j'étais partie de toute façon.

  • Ramata

    C'est intéressant que tu partages, en fait, que tu continues, finalement, tu restes sur ta passion de départ, finalement. Ce que tu as commencé par toi, tu continues à le faire à travers... tes réseaux sociaux, que la plateforme allait continuer ou pas. Et pourquoi est-ce que tu as appelé ça des kits de survie ? Parce que c'est une expression qui est quand même très particulière.

  • Aïsha

    C'est littéralement ça. Là, je vais être très franche. J'ai commencé avec, comme j'ai dit, le festival de jazz et la biennale. Organiser des événements de cette envergure, c'est très difficile. Et dans nos pays, on est tellement concentré, tellement pris par les choses au jour le jour, c'est-à-dire les espaces, les artistes, comment faire venir les œuvres, la logistique, qu'on oublie souvent la com. Les gens s'y mettent en général vers la fin, à la dernière minute. Il se trouve que des événements comme ça, c'est aussi des événements qui attirent du monde. Par exemple, à la Biennale, les gens viennent de partout dans le monde pour venir visiter. Le festival de jazz aussi. Donc, des mois avant, ils ont besoin de savoir ce qui se passe, comment ça se passe, qui vient, qui ne vient pas. Mais c'est un foulard tard à sortir. Et c'est pour ça que j'ai appelé le kit le kit de survie, parce que pour moi, c'est de dire comment survivre à la biennale. D'abord, savoir déjà les dates exactes, qui vient, qui ne vient pas. Savoir comment réserver un hôtel, savoir comment accéder. Parce qu'il y a des gens qui vont vraiment demander est-ce qu'il faut payer, alors que pour certaines personnes c'est une information évidente. Et moi je découvre avec tous les messages que je reçois de personnes que je ne connais pas. En fait, les gens ne savent pas. Les gens ne savent pas ce que nous pensons être évident et que nous ne communiquons pas. Il faut s'accréditer juste pour aller voir, que pour le festival de jazz, le même badge peut marcher par-ci, par-là. Mais aussi, il faut s'y mettre très tôt pour trouver un hébergement. Mais comment le trouver ? Il y a des personnes à Saint-Louis qui peuvent aider. Donc, des petites choses comme ça... te font survivre dans ce festival, d'où le nom Kit de survie, que finalement les gens apprécient beaucoup. Et c'est aussi comme un kit, c'est comme quand on va en forêt faire du camping. Je le vois un peu comme ça. Les outils qui permettent de traverser ces moments-là.

  • Ramata

    Et ce que tu évoques aussi, tu évoques tes missions de conseil. Donc, au service des artistes, je pense qu'aussi au service d'un certain nombre d'organisations, est-ce que tu peux évoquer ces parties-là ? Parce qu'encore une fois, toi, tu as un background scientifique, informatique, banquier. Même si tu as pu faire du conseil, ça n'a vraiment rien à voir avec le conseil auprès d'artistes. Donc, est-ce que tu peux parler de comment tu as pris cette casquette ?

  • Aïsha

    Ça aussi, c'est venu naturellement, c'est venu par leur demande. Quand je suis allée, moi, faire du consulting, c'était plus, par exemple, quelqu'un qui lance un album, je l'aide dans la communication, dans tout le déroulement du process, ce que je sais faire très bien. Mais au fur et à mesure, comme j'ai dit, j'ai appris beaucoup sur le tard et aussi j'ai appris à connaître très bien le milieu, vraiment. Mais parce que je suis plongée dedans constamment. C'est-à-dire, je suis constamment dedans. Si je n'écris pas, si je ne suis pas devant l'ordinateur en train de travailler sur les projets culturels, c'est-à-dire, je suis dans une expo, je suis à un festival. Et c'est là que je me rends compte qu'à force de les côtoyer, qu'à force d'être là, j'observe aussi. C'est peut-être le côté, justement, scientifique. J'observe et j'apprends avec tout, dans tout, partout. Là, en ce moment, je te parle, j'apprends. C'est ma nature. Et donc, je suis arrivée à vraiment connaître très, très bien le milieu et connaître très, très bien aussi les artistes. Je connais bien les profils, je connais leurs points forts, leurs points faibles. Et ce qui fait que spontanément aussi, je donnais même des conseils. J'ai beaucoup fait de bénévolat. J'en fais toujours, je décide d'arrêter, mais c'est difficile. Dès que je vois même un artiste que je ne connais pas, je peux voir sur ses réseaux sociaux quelque chose et puis lui écrire derrière. pour dire je pense que là ce serait bien si tu faisais ci, si tu faisais ça. Mais souvent ils sont venus vers moi donc pour me dire Aïcha, j'aimerais bien qu'on travaille ensemble sur tel projet. Et je me retrouve soit à structurer un projet, soit à organiser, soit à mobiliser parce que je mobilise beaucoup aussi. Mais c'est très naturellement que c'est arrivé. Au fur et à mesure, je rajoute dans mes services. Quand je vois que je maîtrise bien quelque chose, je me dis d'accord, ça maintenant je peux. je peux en faire un service. Parce qu'il est aussi très important pour moi que quand je travaille, que ce soit bien fait. Parce que j'ai réussi avec les années à construire une crédibilité et qu'au Sénégal, dès qu'on dit Aïcha Dem, tout le monde dira, ah d'accord, ça veut dire que ça va bien se passer. Et que ça, je le dis d'ailleurs toujours à mes équipes, je n'ai pas le droit de le gâcher ou de le perdre. Donc je travaille sur des choses et des projets très différents, mais je ne m'engage que là où je suis sûre que je peux bien faire le travail, que j'ai les compétences.

  • Ramata

    Très bien, c'est une éthique qui est indispensable pour pouvoir se préserver et durer en fait, parce que quand il y a un partenariat, une collaboration qui ne se passe pas bien, en fait du coup on n'est pas rappelé. Et puis par contre, quand on est reconnu, identifié,

  • Aïsha

    C'est ça, c'est un petit mot. Les gens se disent les choses. Et donc, quand ça se passe mal, tout le monde le sait. Quand ça se passe bien, tout le monde le sait. Et souvent, cela se voit aussi dans le travail.

  • Ramata

    Est-ce que, donc, tu évoquais le kit de survie pour quelqu'un qui vient, j'imagine, visiter une expo, qui parle de conseil. Quels sont les conseils pour un artiste contemporain africain qui se lance ? Pour toi, quelles sont les priorités ? Je ne vais pas te demander une mission de conseil gratuite. Je mettrai tes coordonnées avec toutes les informations. Comment accéder à tes services ? Est-ce que tu peux nous partager des conseils clés pour quelqu'un qui se lance ?

  • Aïsha

    Alors pour Dakar, par exemple, je dirais tout faire d'abord pour se faire connaître. Et c'est là que ça va être la communication. Parce que quand l'artiste arrive, il arrive avec son talent et sur sa créativité. Je ne peux pas me permettre de faire des remarques parce que chacun a son... Voilà, le travail de l'artiste, c'est le travail de l'artiste qui s'exprime. Maintenant, il arrive à Dakar, il démarre. C'est souvent ça le problème avec ces artistes qui démarrent ou qui travaillent depuis longtemps. C'est d'abord la communication et ensuite l'entourage, l'équipe, parce qu'ils sont seuls. Ils sont seuls, ils veulent tout faire. L'artiste, il doit créer. Maintenant, s'il veut à la fois créer, faire son marketing, faire son networking. trouver les partenaires, forcément, il ne peut pas y arriver. Ce qu'il va faire, il va appeler un ami, il va appeler un frère, il va appeler la famille, il va s'entourer de ces gens-là qui n'ont pas forcément les compétences, donc cela finit mal. Donc moi, souvent, ce que je conseille, c'est de justement trouver une personne qui peut aider à faire cela. Mais quelles sont les compétences, même si c'est la famille en fait, mais de trouver la bonne personne. et ensuite de se faire connaître par les personnes clés. Quand je dis les personnes clés, c'est les galeristes, les curateurs. C'est d'aller les voir, c'est de faire un bon dossier qui présente son travail, qui présente l'artiste, c'est-à-dire un portfolio, de dire qui il est, de se présenter, de faire le bon document qui est correct, qu'il va envoyer, de ne pas être paresseux, de faire en sorte de voir tout le monde, de rencontrer tout le monde autant que possible. Pour moi, c'est d'abord ça. Et après, dès qu'il y en a un qui connaît quelqu'un comme moi, quand je vois un bon dossier ou un bon artiste que je trouve intéressant, je vais le recommander aux autres. Et ils font tout ça. Je pense que déjà, pour commencer, ça, c'est important. Je ne sais pas si ça répond à ta question.

  • Ramata

    Complètement. Ce que tu vois vraiment, c'est cette notion de communication. Et aujourd'hui... Donc, quand tu évoques la communication aujourd'hui avec les réseaux sociaux, c'est vrai qu'on a vu des artistes gagner en notoriété parce qu'ils vont partager leurs œuvres à travers les réseaux sociaux. C'est ça que tu évoques ? Ou est-ce que tu as parlé du fait de se faire connaître en allant dans les galeries, en allant se présenter ? Mais il y a aussi les réseaux sociaux. Pour toi, les deux sont aussi importants l'un que l'autre ? Ou est-ce qu'il faut privilégier plutôt le côté galerie ? d'un, voilà, être... Aller prospecter auprès des galeries, j'ai envie de dire ça, même si quand on est dans l'environnement de l'art, on n'aime peut-être pas trop utiliser des termes très commerciaux. La priorité, c'est les galeries ou ce sera les réseaux sociaux ou les deux sont aussi importants que l'autre ?

  • Aïsha

    Les deux sont importants parce que les cibles sont différentes et l'objectif est différent. Les réseaux sociaux, c'est le public. Mais ça marche très bien parce qu'une fois qu'on a fédéré le public, C'est le public qui va demander des expositions. Les galeries, ça c'est le pilier. Quand je dis les galeries, c'est les curateurs aussi, les centres culturels, les gens du secteur. Il faut vraiment qu'ils vous connaissent. Mais ça, ce sera plus pour le côté professionnel. Pour moi, les deux sont importants. D'où l'importance aussi d'avoir au moins une personne qui aide, parce que faire les deux, c'est dur. animer des réseaux sociaux, ce n'est pas simple. Mais je pense que les deux sont importants.

  • Ramata

    Tu as évoqué aussi le fait que tu fais de la curation et que tu as organisé des expositions, des événements. Est-ce que tu peux nous parler justement de cette autre casquette ? Parce que là, ça fait à peine une demi-heure qu'on parle et j'ai affaire à une banquière informaticienne, écrivain,

  • Aïsha

    journaliste.

  • Ramata

    Pour moi, c'est qu'une heure d'interview. On va programmer une autre interview pour pouvoir parler de tout. Au moins,

  • Aïsha

    si tu peux, je suis d'accord. J'ai beaucoup de casquettes. Mais c'est toujours la passion, comme je dis. En réalité, ça ne sort pas. Tout est dans le même sac. Il y a aussi cette fondation dont ils font que je te parle de musique en Afrique. Je ne t'en ai pas parlé. Je ne suis pas sûre que c'était dans ma bio. Je reviendrai dessus, je réponds à ta question. La curation donc. La curation, c'est aussi à force, j'adore les expos vraiment, c'est ce que je préfère. Et à force d'aller dans les expositions et à force de connaître les artistes, de faire leur promotion, de parler de leur travail, de devenir amie avec eux. De temps en temps, je dis tiens, venez, on fait une expo. Donc j'appelle deux, trois amis qui sont des artistes souvent. C'est souvent à la Biennale en fait, parce qu'à la Biennale, il y a... C'est un événement qui dure un mois. Il y a des événements in, organisés par l'État, mais il y a beaucoup de off. Les off, c'est quand je dis il y en a 500 dans la ville, il y en a 500. C'est tous les artistes qui vont organiser quelque chose, tous les espaces culturels. Et ça bouillonne partout dans Dakar. Et donc c'est toujours cet engouement-là qui fait qu'on a envie de partager, on a envie d'être ensemble, on a envie de faire, de créer ensemble. Et là, souvent, je dis, tenez, venez, on va faire quelque chose. Et souvent, c'est des expos collectives. Donc, j'appelle quelques amis et on se retrouve et on organise. Et je me retrouve à faire la curation, ce que je n'ai pas appris non plus, et à faire du commissariat. Et j'ai fait trois biennales. Et d'ailleurs, la dernière, c'était... il y a quelques mois, à la dernière Biennale de Dakar. C'était ma plus grosse expo parce que c'était mon livre qui contient 100 artistes de Dakar que j'ai mis en expo. C'était une expo gigantesque avec de très grands artistes où il y avait des installations, où il y avait de la peinture, où il y avait du graffiti et où on organisait des événements ponctuels chaque semaine. du slam, des concerts, c'était incroyable. Mais ce sont des choses qui se sont faites aussi vraiment spontanément, avec beaucoup d'esprit de partage, de partage et d'échange surtout. C'est ça qui est très beau.

  • Ramata

    Et est-ce que tu peux nous parler, moi je vais profiter de ta présence ici, d'artistes vraiment qui t'ont particulièrement touchée, que tu suis ? tu suis le parcours depuis longtemps et que tu apprécies. Est-ce que tu as des recommandations d'artistes à nous faire ?

  • Aïsha

    Dis-moi un domaine, je te dis un artiste. C'est dans quel domaine ?

  • Ramata

    J'en ai beaucoup. Je sais bien, je sais bien. La peinture ?

  • Aïsha

    La peinture. Je vais vous dire Fanny Senso, qui d'ailleurs expose en ce moment à Paris, à la galerie Christophe Palletier. personnes, quelque chose comme ça, dans le mari.

  • Ramata

    Ok.

  • Aïsha

    Qui a été une... Il y a deux biennales, c'est-à-dire il y a quatre ans, c'était vraiment la star de la biennale. Incroyable artiste que j'aime beaucoup, qui retrace le quotidien d'un marché où il habite, avec des maquettes, avec des peintures, bref, je ne veux pas passer beaucoup de temps sur chaque artiste. Fali Senso. Ensuite, il y a... Kiné Aou, qui est une des femmes les plus connues dans son domaine, qu'on appelle l'application sénégalaise, qui est extraordinaire. Il y a aussi, parmi les anciens, la dame Anta Germaine Gaye, qui fait de la peinture sous-vert, c'est-à-dire qu'elle peint sur le vert, et c'est la pionnière. Je ne peux en citer encore des dizaines.

  • Ramata

    De toute façon, si on veut plus d'infos... Tout à fait, je suis sur les réseaux sociaux.

  • Aïsha

    Je mets les liens de tes réseaux pour qu'on puisse avoir accès aux informations en live.

  • Ramata

    Toi, depuis que tu t'intéresses à l'art, donc tu as évoqué 2009, est-ce que tu as vu, on parle beaucoup de l'évolution de la cote des artistes contemporains africains, on voit de plus en plus de créateurs africains qui ont l'opportunité d'être présents dans des galeries, pas seulement en France, à Paris, mais à l'international. Il y a de plus en plus d'événements d'envergure qui vont faire la part belle à l'art contemporain africain. Toi, de la fenêtre, vu que c'est vraiment, comment dire, tu es plongée dedans depuis 2009, en tout cas, ta plateforme a été créée en 2009, mais c'est un sujet qui t'intéressait déjà depuis longtemps. Comment est-ce que tu perçois cette évolution ?

  • Aïsha

    Écoute, moi je pense qu'en ce moment, c'est comme dans tout. C'est l'Afrique qui est là, en réalité. C'est vrai qu'en art contemporain, comme la peinture, tout ce qui est galerie et tout ça, c'est plus difficile parce que... Parce que voilà, on va dire qu'à Paris, par exemple, avoir des expos d'Africains, ce n'est pas aussi commun, mais ça a beaucoup changé, effectivement. Mais ce que j'ai observé, c'est que les gens retournent beaucoup à l'art africain, que ce soit dans la peinture, dans la mode, dans la musique. Tu as vu la mode, on s'est rencontrés au Galerie Lafayette parce qu'il y avait tous ces créateurs sénégalais. C'est parce que cette créativité africaine... en ce moment, elle est tellement, tellement, tellement bouillonnante et incroyable et belle. Et que les autres, je pense, je le dis souvent, ils ont fait le tour, mais l'Afrique, nous sommes... C'est-à-dire que tu marches dans les rues de Dakar, partout tu vois de l'art, et c'est comme ça. Tu vois les femmes habillées, c'est de l'art. Tu vois les murs, les graffitis, c'est de l'art. Et ça, ça ne se perd pas, c'est là, c'est jusque... il faut en faire quelque chose. Et donc, en ce moment, je ne veux pas dire tendance, c'est péjoratif, mais c'est ça, la créativité est en Afrique. Donc déjà, et ça, les gens l'ont compris, le monde l'a compris. J'ai parlé de monde de tout à l'heure, Chanel est venue à Dakar faire son défilé. On voit tous les gens qui reviennent, qui viennent, qui viennent parce que l'art est là. Après, côté c'est... Côté art contemporain, côté peinture, côté galerie, c'est un peu plus dur, mais je vois la différence effectivement. Je le vois du côté des artistes, je le vois du côté de ceux qui vendent. Et même chez le public, il s'y intéresse de plus en plus, mais aussi parce qu'il y a les réseaux sociaux, qu'il n'y a plus de barrières, que maintenant les jeunes, les artistes les plus jeunes et ceux dans tous les domaines, surtout dans le milieu de la mode, ils s'exposent. et ils montrent et il n'y a aucune barrière, il n'y a aucun complexe. Avant, nos artistes étaient un peu complexés parce que chez nous, faire de l'art, ce n'est pas bien vu. Chez nous, nos sociétés sont très dures. Être dans la culture, ce n'est pas quelque chose dont les parents rêvent pour leurs enfants. Maintenant, ça change. Maintenant, les jeunes s'expriment et assument d'être artistes et le montrent et se connectent. avec les autres à travers le monde. Et il faut connaître leur travail et on voit que les autres découvrent. Et je pense que ça, ça fait évoluer l'art et ça fait évoluer aussi les artistes partout dans le monde.

  • Ramata

    Toi, je pense que tu es jugée partie. Ce que tu évoques là, c'est qu'effectivement, on parle d'Africa Rising, il y a beaucoup de choses qui se passent sur le continent et quelque part. Est-ce que... Tu as le sentiment qu'il y a vraiment quelque chose de beaucoup plus puissant en Afrique. Alors sans être, on va être un peu chauvin, on a tendance à dire, oui, tout est au Sénégal, mais en essayant d'avoir un regard objectif, même si tu es sénégalaise et que tu vas me dire que c'est Dakar qui est devant. Mais est-ce que tu as vraiment le sentiment qu'il y a un engouement vers la créativité africaine, mais parce qu'il y a vraiment énormément de propositions, énormément d'artistes qui émergent ? et qu'il y a une vraie différence par rapport à ce que l'Europe peut proposer, par rapport à ce que la Corée ou d'autres continents ou d'autres régions du monde peuvent proposer. Donc, c'est ce qui fait qu'il y a une différence. Ou est-ce que, quelque part, il y a un essor global de tout ce qui ne vient pas de l'Occident ?

  • Aïsha

    C'est une bonne question. C'est une bonne question. Je réfléchis en même temps. Spontanément, je dirais que oui, moi, je pense qu'il y a un essor en Afrique. Mais maintenant que tu le dis, peut-être aussi que c'est de façon générale l'envie de découvrir autre chose que l'Occident. Mais sincèrement, moi, le talent que je vois en Afrique, la créativité étant plongée dedans, sincèrement, je suis assez bluffée par ce que je vois. Et je me dis que c'est parce que c'est là. Et comme je dis encore une fois, l'Occident a fait le tour. La preuve, il revient beaucoup. ils reviennent beaucoup en Afrique pour s'inspirer et donc moi je crois qu'il y a vraiment quelque chose, je ne sais pas ce qui se passe vraiment mais il se passe un truc en Afrique en ce moment, en art.

  • Ramata

    J'ai l'impression aussi, je me dis peut-être qu'on n'est pas objectif mais c'est absolument correct.

  • Aïsha

    Peut-être, je le sens mais peut-être on est chez nous, on voit mais moi je vois qu'il y a cette créativité, c'est incroyable quand même. Surtout chez les jeunes, c'est incroyable.

  • Ramata

    Moi, j'y crois. Je suis du même avec toi. Ce que je trouve intéressant, c'est que c'est comme s'il y a énormément de courants qui existent, qui ont été classifiés par l'Occident de plein de façons différentes. Et ce qui arrive d'Afrique, c'est complètement différent. Et puis, c'est un mélange plein d'influences différentes avec, bien sûr, les racines qui sont en Afrique, mais qui peuvent parler à quelqu'un aux États-Unis, en Corée, en Amérique latine. Et c'est ça aussi qui fait la force de la créativité africaine, c'est que ça vient du continent, mais ça peut vraiment toucher tout le monde, en fait.

  • Aïsha

    C'est ce que je suis en train de te dire tout à l'heure. C'est-à-dire, ils sont assis dans un village quelque part au Kenya, ils font leurs choses qu'ils mettent sur Internet, et ça touche un jeune Chinois, un jeune Américain, parce que finalement, ils sont connectés.

  • Ramata

    Alors, en termes de créativité à Dakar, Merci. tu parlais de la Biennale et de tes réseaux sociaux qui te permettent un peu de faire la liste de tous les événements qui peuvent se passer au Sénégal. Est-ce que tu déplaces les frontières du Sénégal et est-ce que tu vas aussi parler d'événements qui peuvent se passer en Côte d'Ivoire ? Je sais qu'il y a une grande foire d'art contemporain à l'Écosse, au Nigeria. Est-ce que tu fais aussi une veille sur ce puissant... ce qui peut se passer en dehors de Dakar ?

  • Aïsha

    Une veille, je ne sais pas, mais quand je vois des choses importantes que je pense que les gens doivent savoir, j'en parle. À l'extérieur, c'est souvent le travail, c'est souvent des missions, c'est souvent des choses où on m'invite à venir participer, souvent des conférences, des panels. Mais en même temps, on est en Afrique et quand je vois un événement, un grand événement africain, forcément, je peux en parler. Mais vraiment, c'est plus, tu vois, à Côte d'Ivoire, Afrique du Sud, dont j'ai parlé tout à l'heure, j'en parle pas mal, mais parce que je suis souvent là-bas pour le travail avec cette fondation de musique. Et donc, c'est aussi ça qui est beau, parce que cela me permet de découvrir. Les autres pays africains, c'est à travers la culture, moi, que j'ai commencé à voyager autant. À la banque, je prenais mon congé, je venais à Paris et puis c'est tout. Quand j'ai commencé à faire ce travail, donc, au bout de deux ans, par exemple, j'ai été appelée en Afrique du Sud pour rejoindre un projet qui est une plateforme dédiée à l'industrie musicale. Et comme j'avais l'expérience à Jean-Dakar... et m'ont d'abord appelée juste pour voir si je pouvais collaborer avec eux.

  • Ramata

    Donc maintenant, j'aimerais que tu nous parles de la fondation que tu évoquais tout à l'heure. Puisque c'est une de tes dernières initiatives liées à l'art et la culture, mais là, on est plus centré sur la musique. Donc, est-ce que tu peux nous parler de cette fondation et de ton rôle dans cette fondation ?

  • Aïsha

    Musique in Africa. Je suis cofondatrice de la fondation parce que... Il y a eu d'abord la plateforme online et puis il y a eu la fondation. C'est destiné à booster l'industrie de la musique en Afrique. L'idée était de dire que c'est bien beau d'être connecté au reste du monde avec les grands, mais c'est bien que les Africains se connaissent et se retrouvent entre eux. C'était quand même il y a un moment, c'était en 2012, que nous avons fondé Musique in Africa. Je suis rentrée dans le board et j'ai été... J'étais dans le Bode pendant cinq ans, dans deux où j'étais présidente. C'est un milieu très, très masculin dans la fondation. Il y avait les membres, c'était vraiment, il y avait pratiquement cinq femmes sur peut-être une centaine. Et je me suis retrouvée présidente, donc entourée d'hommes du secteur dans un milieu très, très masculin. C'était une très belle expérience. Et je suis très fière parce que ça a tellement grandi en dix ans, c'est devenu vraiment incontournable. Et la Fondation développe de magnifiques projets qui soutiennent la musique en Afrique. Mais là aussi, récemment, quand j'ai fini mon mandat, j'ai décidé de me consacrer entièrement à mon agence. Donc je suis, on va dire, membre d'honneur. Maintenant, on n'est pas vraiment dans les décisions. mais très très fiers de ce que nous avons accompli jusqu'ici.

  • Ramata

    Très bien. Et est-ce que tu as dit, c'est quoi les next projets pour Aïcha ? Est-ce qu'il y a des choses dont tu peux nous parler ? J'imagine que tu es toujours dans le milieu de l'art et de la culture, mais comme on peut le voir là, tu as commencé par créer une plateforme, tu as endossé cette casquette de journaliste, puis curatrice, de consultante, de conférencière, d'écrivain. Donc, tu as été à la tête de cette fondation avec ce focus sur la musique. Qu'est-ce que tu nous prépares ?

  • Aïsha

    Alors, j'ai beaucoup de choses que je voudrais faire. Il y a quelques années, j'avais commencé un projet d'incubateur, juste avant de commencer mon livre. Donc, j'avais ce projet d'incubateur culturel et le livre m'est tombé dessus presque. Et je me suis consacrée au livre qui m'a pris trois ans d'années de travail. Et après ces trois années, j'étais en promo constamment. Donc là, j'aimerais beaucoup reprendre l'incubateur et un fonds pour les artistes. J'ai beaucoup de projets personnels avec Sylvie Woro, mais dont je ne peux pas parler maintenant. Ici en France, j'ai rejoint un autre board d'une organisation dédiée à l'art aussi. Ça aussi, j'en suis très fière. Mais ils n'ont pas encore communiqué officiellement. Je te tiendrai au courant. Et donc, il y a tous ces petits projets aussi qui ne sont pas gros, mais auxquels je tiens au Sénégal à accompagner des femmes artistes, à mentorer la transmission. Ça compte beaucoup pour moi. Je le fais beaucoup de façon officieuse, on va dire. Je cherche de voir un moyen de le rendre plus officiel pour que je... puisse accorder vraiment du temps à ça, au-delà de ce que je fais en ce moment comme accompagnement de jeunes artistes. Et en parlant justement des autres pays, ça aussi, tu vois, je reçois beaucoup de messages de gens qui sont en Côte d'Ivoire, au Burkina, qui me disent, on est inspiré par votre travail, est-ce que vous pouvez nous mentorer ? Donc je le fais pas mal et ça me touche beaucoup et j'aime beaucoup cela, cette connexion avec ces autres pays-là, de cette façon-là, plutôt que par la communication ou en parlant juste d'un artiste. Il y a ce côté où il y a une vraie connexion que j'aime beaucoup.

  • Ramata

    Très bien, on a hâte de voir la suite. On arrive à la fin de cette interview. Moi, j'étais ravie d'avoir l'opportunité de découvrir ton profil et d'en savoir un peu plus sur toutes tes initiatives. Je mettrais bien, comme je l'évoquais tout à l'heure, en note de l'épisode, les liens vers tes comptes sur les réseaux sociaux et également le lien vers ton livre, de manière à ce qu'on puisse vraiment en savoir encore davantage sur tout ce que tu peux partager. Et puis, je te dis merci.

  • Aïsha

    Mais c'est moi qui te remercie, Ramatha. Je suis très contente aussi de t'avoir rencontrée déjà. de découvrir ce que tu fais. Et merci de donner la parole parce que c'est important. Et c'est un secteur où on ne parle pas assez. Et tu as beaucoup de générosité et une très belle écoute que j'apprécie beaucoup, beaucoup, beaucoup. Et j'ai été très, très contente de venir, de faire cette discussion avec toi. Merci infiniment.

  • Ramata

    Écoute, merci à toi. Je te dis à très vite en Afrique ou ailleurs.

  • Aïsha

    À très vite. Merci.

  • Ramata

    Merci d'avoir écouté l'épisode jusqu'au bout. Je vous invite à pratiquer quelques petits gestes à impact fort pour m'aider à gagner de la visibilité sur ce podcast. Vous pouvez partager l'épisode à trois de vos amis. Vous pouvez laisser un commentaire sur Apple Podcasts ou Spotify. Je vous invite également à cliquer sur les cinq étoiles pour donner de la force. Je vous dis à très vite en Afrique. Bye.

Chapters

  • Introduction au podcast et présentation d'Aïcha Deme

    01:00

  • Parcours d'Aïcha Deme et ses débuts dans la culture

    02:05

  • Transition vers le secteur culturel et création d'Agenda Dakar

    03:30

  • Les défis de l'entrepreneuriat culturel en Afrique

    06:18

  • L'importance de la communication pour les artistes

    07:42

  • Rôle de consultante et conseils pour les artistes

    12:06

  • Évolution de la plateforme Agenda Dakar et ses impacts

    14:07

  • Kits de survie pour les événements culturels

    18:14

  • Conseils pour les artistes contemporains africains

    24:40

  • Projets futurs et engagement d'Aïcha Deme

    29:23

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