- Speaker #0
Au cœur de la boulange, le podcast de l'édition 1071, le média qui donne la parole à celles et ceux qui façonnent la boulange. Bienvenue dans ce nouvel épisode de Au cœur de la boulorange, le podcast de l'édition 10-71. Le monde évolue, la boulangerie n'est pas exceptionnelle. Depuis 10-15 ans, nous voyons se développer des enseignes régionales et nationales, créées par des artisans boulangers ou pas forcément. Ces nouveaux acteurs ont marketé, voire industrialisé, une offre qui existait déjà chez les artisans les plus business. Un vrai service de restauration. à cela s'est ajoutée naturellement une offre de salon de thé, pardon, de coffee shop pour parler 2025. Et ce n'est pas tout. Aujourd'hui, le concept va jusqu'à répondre à la problématique du frigo vide, pour reprendre le terme de Bernard Boudboul, du cabinet Jira, expert en consommation alimentaire hors domicile. On l'écoute.
- Speaker #1
On va perdre la spécificité d'une boulangerie au sens propre du terme. Et les boulangeries sont en train de rentrer dans une autre catégorie qu'on pourrait appeler, vous dites, « fast food à la française » , moi je dis « restauration quotidienne à la française » , plutôt traditionnelle, ils ne sont pas asiatiques, ils ne sont pas américains, ils sont plutôt traditionnels français. Non, je pense que la boulangerie, si on se projetait dans dix ans, ne seront plus des boulangeries. Enfin, on ne les appellera plus des boulangeries, on les appellera, je n'ai pas de nom en tête. mais des établissements où on va chercher son déjeuner, des établissements où on va peut-être chercher de quoi manger ce soir vers 18h ou 19h en sortant du bureau, parce que chez Gira on appelle le frigo-vie. Bref, ça va être des lieux de vie alimentaire. Alors évidemment, il y aura toujours du pain, il y aura toujours de la pâtisserie, il y aura toujours de la viennoiserie.
- Speaker #0
C'est pour cette raison notamment que ces néo-boulangers, comme on les appelle et comme ils se définissent, se doivent d'ouvrir en continu depuis... tôt le matin jusqu'à tard le soir, comme l'explique à notre micro Nicolas Bécam, artisan boulanger à Angers, franchiseur à la tête de plus d'une trentaine de boutiques à ce jour. On l'écoute.
- Speaker #2
Les différences, valeurs ajoutées, ils prennent beaucoup de temps à gérer, beaucoup d'investissements, notamment déjà la dette ouverte, c'est 2 sur 7. et avoir la capacité qu'un consommateur soit sûr de venir chez nous sans prendre de rendez-vous, sans se questionner si on est ouvert. Et puis surtout quand il vient, il faut être sûr d'avoir tous les produits du matin au soir qui vont lui permettre de recevoir bien ses amis qu'il reçoit chez lui ou pour différentes occasions, pour un anniversaire notamment ou pour un parcours. On est là pour, comme je dis souvent à mes équipes au quotidien, on est là pour rendre service aux gens. Mais pour rendre à l'exigence, il y a un multiple de facteurs différents. Il faut savoir bien les accueillir, il faut savoir avoir le bon packaging, il faut savoir avoir le bon produit, le beau et bon produit, toujours adapté au moment commercial du moment.
- Speaker #0
C'est donc le concept qui dirige la politique des horaires. Mais pas forcément. En effet, si on regarde de plus près les différentes boutiques Maison Bécam, On voit une certaine disparité dans les horaires. Par exemple, quand on regarde sur le site de l'enseigne, la boutique de Brissac ouvre dès 6h15 le matin pour ne fermer qu'à 20h. En revanche, le magasin de Saint-Barthélemy ouvre à 6h30 pour fermer à 19h30. Dernier exemple, la boutique Atoll à Angers. à l'amplitude horaire la plus faible. Elle ouvre de 8h30 le matin pour fermer le soir à 19h. Comment expliquer cela ? Ces trois boutiques ont des environnements différents. L'une est en plein centre-ville quand les deux autres sont en périphérie. Et parmi ces deux-là, l'une est en centre commercial quand l'autre est, disons, indépendante, proche d'un grand rond-point donnant l'accès à... deux axes routiers. Maison Bécam prend en compte non seulement l'environnement mais aussi les habitudes des riverains. L'enseigne explique son fonctionnement ainsi. Durant la première année d'exploitation, nous fixons en général une amplitude large, sur une base de 7 jours sur 7, de 6 heures à 20 heures. Cette organisation nous permet d'observer précisément les habitudes de la zone et les flux réels de clientèle. Par la suite, les horaires peuvent être ajustés selon les contraintes propres à chaque implantation. Centre commercial, zone commerciale... environnement spécifique. En résumé, ce sont essentiellement le flux et la localisation qui définissent naturellement les horaires après cette première année. Pour les néoboulangeries, l'environnement est à prendre en compte à même hauteur que l'offre pour la définition des horaires d'ouverture. L'enseigne Mariette en est également une bonne illustration, avec ses implantations dans les campus. Pour le fondateur, Boris Kahl, La consommation se déplace. Aller à la rencontre des étudiants, c'est répondre à un besoin immédiat, récurrent et dense. Mais c'est aussi accepter les contraintes propres à ces sites. Horaires spécifiques, flux très concentrés, espaces restreints. Question horaire, ça se voit. La boutique du campus de Carlan, située près de Rennes, ouvre de 8h pour fermer dès 16h. Quand celle de vitrée... toujours en éluvilienne, mais hors campus, celle-ci ouvre de 8h30 pour ne fermer qu'à 19h30. Quant à la boutique de Kemp's en Alsace, elle est hors compétition. Elle ouvre dès 5h le matin pour ne fermer qu'à 19h. La grande amplitude horaire répond à la notion de service au client. Mais la boulangerie demande beaucoup d'investissement quand on veut être sur tous les fronts. tant en termes financiers qu'en termes humains. C'est pourquoi de nombreux artisans aujourd'hui ont décidé de choisir leur combat et de s'adapter au plus juste au potentiel business d'une part, mais aussi et surtout aux moyens humains d'autre part, sans oublier d'y aligner leur objectif qui peut être de trouver le parfait équilibre vie pro, vie perso, et ce sans aucune atteinte au business. Comme l'explique François Soigné, à notre micro, artisans près de Rennes.
- Speaker #3
J'ai lu un reportage il n'y a pas très longtemps sur une petite boulangerie à Nantes où un couple de jeunes ont fait le choix de fermer trois jours ou quatre jours par semaine et d'ouvrir vendredi, samedi ou dimanche. Je ne sais plus exactement comment c'était leur jour d'ouverture. Ils ont fait ça pendant quelques mois et le retour en fait est très satisfaisant parce que Ils ont privilégié la qualité à la quantité. Du coup, qu'est-ce qui se passe quand on fait ça ? C'est vrai qu'on fait des plus petits chiffres d'affaires, mais on s'en sort mieux, on a moins de charges, on a moins de pression de travail, on peut adapter ses produits aux heures d'ouverture et à la demande, le travailler complètement différemment. Et les gens, encore une fois, s'habituent et s'adaptent aux artisans. de confiance. Donc moi, je pense qu'il est préférable de changer complètement cette méthode de travail où on commence à 2h du matin. Alors c'est vrai que comparé à 20 ans ou 30 ans, on a du confort du travail par rapport aux outils. Mais maintenant, ce que ne veulent plus les gens, et c'est pour ça qu'il y a un problème de recrutement, les gens ne veulent plus travailler le dimanche. Ça revient à ce que vous disiez tout à l'heure, parce que les gens privilégient le loisir plutôt qu'au salaire, souvent. Donc, il faut adapter des méthodes d'ouverture, de travail et changer, revisiter un petit peu tout ça. Laissons toutes les grandes chaînes ouvrir 7 sur 7, de 6 heures du matin à 21 heures le soir, s'ils en ont envie. Eux, ce qu'ils ont besoin, c'est de faire des gros chiffres d'affaires. Mais l'artisan, il n'a pas besoin de faire des gros chiffres d'affaires pour s'en sortir, c'est-à-dire sans rentrer dans des chiffres, mais des petits artisans boulangers, quand on travaille en couple. ou avec un petit apprenti parce qu'on a envie de former. Même, je suis sûr que moi, à Châteaubourg, je pourrais ouvrir que quatre jours et finalement, les gens comprendraient les valeurs et ma façon de travailler et viendraient chercher leur pain finalement que sur quatre jours, plutôt que sur six.
- Speaker #0
C'est aussi dans cette optique que les têtes de meule, à Vannes, ont décidé de fermer le week-end et de n'ouvrir qu'à neuf heures en semaine. C'est pour une raison d'équilibre pro-perso. mais aussi pour une question de coût de travail et de confort de travail. Car commencer à 6h le matin, c'est tout de même plus agréable que commencer à 3h30. Et cela ne freine en rien l'activité, comme l'a expliqué à notre micro Nicolas Dabar, l'un des cofondateurs des Têtes de Meule.
- Speaker #4
Je ne sais pas, je suis assez rassuré avec nos horaires. C'était un gros sujet, un gros débat en début de construction de projet, parce qu'il y a beaucoup de boulangerie, un peu néo-boulangerie. qui font des ouvertures l'après-midi, qui permettent notamment de se rémunérer contre le travail de nuit. Alors nous, on ne travaille pas la nuit, mais on ouvre quand même à 9h. C'est juste qu'on débarque à 6h et entre 6h et 9h, avec nos pousselins, on a le temps de mettre en place le café-offre et les cuissons pour avoir le magasin rempli à 9h. 8h, c'est trop juste, ça fait 3 ans. Il y a encore 9h, là, on commence à avoir des créneaux qui démarrent à 5h parce qu'on ne cuit pas assez vite pour la vitesse à laquelle ça part en boutique. Ce qu'on veut dire, c'est qu'on a une clientèle, il y a beaucoup de gens qui débarquent à Vannes qui sont au télétravail. donc ils sont plus souples sur leur zone d'une part et d'autre part il y a un autre truc qu'on se dit avec nos horaires c'est qu'on fait que des produits qui se conservent donc moi perso depuis le début je suis hyper à l'aise à me dire ne prends pas de sandwich donc il n'y a pas de truc du matin les artisans ils ne viennent pas chez nous pour acheter des sandwichs et après nos produits vous venez les prendre quand vous voulez vous pouvez les garder 2, 3, 4, 5 jours si vous voulez même de la brioche la gastiale elle se garde facilement 6 jours
- Speaker #0
Non mais ça se défend, je ne disais pas le contraire
- Speaker #4
Oui, je sais, mais ça me permet de souligner ce fameux truc-là de à quelle heure on peut ouvrir. Ah, mon Dieu ! Parce que derrière, c'est quand même les conditions de travail. Nous, c'est comment on réenchant le métier pour attirer des gens dans le métier. Et c'est quand même un gros sujet, ce truc de à quelle heure j'ouvre ma boutique, à quelle heure je la ferme pour viser quelle clientèle et toutes les croyances qu'on peut encore avoir sur est-ce que c'est réaliste en modèle économique ou pas. Il y en a plein aujourd'hui qui ont réussi à… faire fonctionner les boutiques, on est ouvert que l'après-midi. Et je pense que c'est du fait de la qualité des produits et la qualité de l'accueil. On a un boulevard devant nous avec ces nouvelles façons de faire.
- Speaker #0
Évoquons également l'exemple de Frédéric Petit, artisan en campagne entre Rennes et Fougères, en Bretagne. Cet artisan ouvre sa boutique du lundi au vendredi, sauf le mardi après-midi et le jeudi après-midi. Ce qui peut surprendre. Alors pourquoi ces horaires ? Pour une raison de confort de vie, après plus de 20 ans à travailler quasiment 7 jours sur 7 sur Paris, l'artisan a décidé de préserver sa vie de famille le week-end. Et quant à la semaine, qu'est-ce qui se passe ? Eh bien, il s'agit simplement de s'adapter au flux comme maison Beckham. Personne ne venait le mardi après-midi et le jeudi après-midi. Et pourtant, le test a duré plus de deux ans. Dernier cas de figure, les boulangers un peu radicaux. qui proposent une offre originale et haut de gamme, certes, mais qui n'ouvrent qu'un ou deux après-midi par semaine. S'ils trouvent leur clientèle, plutôt de niche, je vous en conviendrai, pourquoi pas ? Et surtout, si c'est viable économiquement, c'est encore mieux. En effet, ouvrir peu, c'est produire peu. C'est donc diminuer les charges variables, mais sans diminuer les charges fixes, comme le loyer, ou encore comme l'équipement du fournil, par exemple. Il faut donc tout bien calculer. Conclusion, comme souvent en boulangerie artisanale, tous les schémas sont bons, à condition d'atteindre les objectifs que l'on souhaite fixer, que ce soit la performance économique, le confort de travail, l'équilibre vie pro-vie perso ou même si l'objectif c'est créer son propre style, son propre modèle. Merci d'avoir suivi cet épisode, malgré son format, malgré sa durée, j'espère qu'il participe à votre réflexion. Vous pouvez retrouver tous les contenus cités ici. en description de l'épisode et sur le site www.e1071.com Merci de partager ce podcast à celles et ceux qui peuvent être intéressés, à laisser un commentaire ou une note sur votre plateforme d'écoute préférée et pour nous faire un retour, c'est toujours la même chose, vous pouvez nous envoyer un message à contact arrobase e1071.com Merci de rester jusqu'au bout de cet épisode, merci de nous suivre depuis le début pour ceux qui le font et à très bientôt ! Au revoir.